Séance du 6 avril 2000






LUTTE CONTRE L'EFFET DE SERRE

Adoption des conclusions
du rapport d'une commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 293, 1999-2000) de M. Paul Vergès, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur la proposition de loi (n° 159, 1999-2000), de M. Paul Vergès, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mmes Danielle Bidard-Reydet, Nicole Borvo, MM. Robert Bret, Yvon Collin, Jean Delaneau, Jean-Paul Delevoye, Rodolphe Désiré, Michel Duffour, Guy Fischer, Gaston Flosse, Thierry Foucaud, Marcel Henry, Dominique Larifla, Robert Laufoaulu, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, Pierre Lefebvre, Serge Lepeltier, Claude Lise, Mmes Hélène Luc, Lucette Michaux-Chevry, MM. Lucien Neuwirth, Georges Othily, Lylian Payet, Jean-PierreRaffarin, Jack Ralite, Ivan Renar, Victor Reux et Mme Odette Terrade, tendant à conférer à la lutte contre l'effet de serre et à la prévention des risques liés au réchauffement climatique la qualité de priorité nationale et portant création d'un observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d'outre-mer.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Vergès, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous réunit ce matin concerne l'effet de serre et la prévention des changements climatiques. Elle est cosignée par un certain nombre de nos collèges - certains de la métropole, d'autres des départements et territoires d'outre-mer - appartenant aux différents groupes de la majorité sénatoriale. Je tiens ici à les remercier tous très sincèrement.
De quoi s'agit-il ? Le texte qui vous est soumis tend à créer un observatoire national sur les effets du réchauffement climatique.
Avant d'aborder précisément les dispositions de la proposition de loi, je dirai quelques mots du contexte dans lequel elle s'inscrit.
La nécessité de maîtriser les émissions de gaz à effet de serre et les conséquences du réchauffement climatique fait aujourd'hui l'objet d'un consensus international.
Je vous rappelle que l'effet de serre est, à l'origine, un phénomène naturel essentiel à la régulation de la température. Seule son amplification, liée au développement économique, constitue une menace pour l'environnement. L'intensification des émissions de gaz à effet de serre conduit, en effet, à un réchauffement climatique dont les conséquences devraient, à terme, être considérables.
Les changements climatiques seront sans doute l'un des problèmes structurels auquel le monde sera confronté dans les décennies à venir. C'est donc tout à l'honneur du Sénat que de s'extraire de la dictature de l'urgence pour aborder les enjeux de demain. Les exigences de l'immédiat nous font, en effet, trop souvent oublier les courants de fond qui façonneront l'avenir. Je pense notamment, à cet égard, à la démographie : comment oublier que les pays développés ne représenteront, en 2015, que 15 % de la population mondiale ?
Quoi qu'il en soit, d'après les dernières études internationales, fruit de la réflexion de plus de 2 000 chercheurs et experts, la température moyenne à la surface de la terre pourrait s'accroître de 2 à 3,5 degrés d'ici au siècle prochain. Cela représente une élévation du niveau de la mer d'environ 50 à 95 centimètres.
Cinquante centimètres par siècle, cela peut paraître peu. Pourtant les conséquences de cette augmentaion sur le climat risquent d'être déterminantes.
En France, l'élévation du niveau de la mer provoquerait l'inondation permanente des espaces côtiers aujourd'hui à peine émergés. La Camargue, les lagunes du Languedoc seraient touchées. Dans les départements et territoires d'outre-mer, la hausse de la température des eaux marines pourrait détruire une grande partie de la barrière corallienne et accroître la fréquence et l'amplitude des cyclones.
A l'échelle mondiale, ce sont bien sûr les pays les moins développés et les écosystèmes les plus vulnérables qui seront les premières victimes du changement climatique.
Il faut savoir que, dans les Caraïbes, le Pacifique et l'océan Indien, de nombreux petits Etats-îles envisagent très sérieusement la perspective de leur disparition. Certains Etats, tel l'Etat des îles Tuvalu, sont allés jusqu'à négocier des concessions avec la Nouvelle-Zélande au cas où il faudrait déplacer l'ensemble de leur population.
Devant l'ampleur de la menace, comme le souligne l'excellent rapport de notre collègue Serge Lepeltier sur l'effet de serre, le principe de précaution nous invite dès maintenant à mobiliser la communauté internationale pour engager une politique volontariste de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre.
De ce point de vue, la France - il faut le reconnaître - a joué un rôle très actif pour la mise en place d'engagements internationaux. Du sommet de La Haye, en mars 1989, au sommet de Kyoto, en décembre 1997, en passant par le sommet fondateur de Rio de Janeiro, en juin 1992, la France a été parmi les premiers pays à militer pour des engagements fermes de limitation des émissions à effet de serre.
Ce rôle pionnier mais aussi et surtout un sentiment de responsabilité à l'égard des générations futures nous imposent de tenir nos engagements.
Comme l'a souligné M. le Premier ministre, lors d'un récent colloque européen sur l'aménagement et le développement durable du territoire, « notre environnement n'est pas une marchandise, un simple stock de matières premières dans lequel on pourrait puiser sans se soucier des générations futures ».
Il n'est pas, mes chers collègues, de développement durable sans volontarisme.
Je vous rappelle que, pour la France, le protocole de Kyoto se traduit par l'obligation de ne pas dépasser, en moyenne, sur les cinq années 2008-2012, le niveau d'émissions de gaz à effet de serre qu'elle avait atteint en 1990. C'est, de l'aveu même du Premier ministre, un défi considérable. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui ont conduit le Gouvernement à adopter, le 24 janvier dernier, un nouveau programme d'actions contre le risque de changement climatique pour la période 2000-2010. On peut discuter pour savoir si ce plan est ou non suffisamment volontariste. Cela dépendra beaucoup des négociations communautaires. Je ne m'y étendrai pas.
Comme vous le savez, à la fin de l'année, la conférence de La Haye déterminera l'essentiel des conditions d'application du protocole de Kyoto. La France, qui présidera alors l'Union européenne, aura l'occasion d'imprimer sa marque. Elle doit, pour ce faire, montrer l'exemple. Je sais, madame la ministre, que vous ferez votre possible pour qu'il en soit ainsi.
Poursuivre une politique volontariste de lutte contre l'effet de serre suppose, mes chers collègues, de pouvoir se fonder sur une connaissance approfondie des émissions de gaz à effet de serre et de leurs conséquences sur le réchauffement climatique.
Cette connaissance suppose un inventaire systématique des émissions de gaz à effet de serre, une analyse des déterminants de ces émissions, un suivi des mesures adoptées pour les limiter, un suivi de l'évolution des changements climatiques et, enfin, une analyse de leurs conséquences.
La France dispose, pour recueillir l'ensemble de ces données, d'une capacité importante de recherche. Nous disposons, en effet, de plusieurs laboratoires de recherche qui consacrent une partie de leur activité à ces questions. Il y a bien sûr Météo-France, le Centre national d'études spatiales (CNES), le Centre national de la recherche scientifique le CNRS, ou le Commissariat à l'énergie atomique le CEA. Pour les conséquences des changements climatiques, un nombre important d'instituts - certains liés au CNRS, d'autres à Météo-France, à l'Institut national de la recherche agronomique, etc. - interviennent également. Les conséquences des changements climatiques concernent, en effet, aussi bien les infrastructures que l'agriculture ou la santé. Quant au suivi administratif des mesures de lutte contre l'intensification de l'effet de serre, il est enfin assuré, comme vous le savez, par la mission interministérielle de l'effet de serre.
Ici même, au sein de cette assemblée, l'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques a chargé notre collège Marcel Deneux d'une étude sur ce sujet.
J'ai la conviction que cette capacité de recherche doit être aujourd'hui renforcée et mieux coordonnée. Pour de nombreux observateurs, un des principaux enjeux est aujourd'hui d'asseoir la crédibilité des politiques de lutte contre l'effet de serre.
Comme le souligne le rapport de notre collègue Lepeltier, l'information des citoyens est un préalable nécessaire à la mise en oeuvre de choix collectifs et privés contraignants. Cela suppose d'accroître la diffusion de l'information, cela exige également de lever le maximum d'incertitudes scientifiques.
C'est d'abord pour cela qu'un renforcement de nos capacités de recherche est nécessaire. La multiplicité des intervenants ne doit pas faire illusion, l'effet de serre est pour beaucoup de laboratoires une activité accessoire et l'absence de coordination des travaux un frein à la complémentarité des efforts de recherche entrepris.
Une augmentation des moyens et une amélioration de la coordination de la recherche scientifique française dans ce domaine sont donc souhaitables. Elles permettraient, de plus, à la France de mieux faire valoir ses positions dans les négociations internationales. Les Américains, qui y ont consacré des moyens considérables, ont compris depuis longtemps combien l'approfondissement des connaissances dans ce domaine pourrait servir leurs intérêts.
Le renforcement de nos capacités de recherche permettrait également d'intensifier notre politique de coopération en faveur des pays en voie de développement.
Comme vous le savez, ces pays seront demain les premières victimes et les premiers responsables des émissions de gaz à effet de serre et des changements climatiques.
Or leur niveau d'expertise sur le sujet est aujourd'hui extrêmement faible. Il sont plus que jamais demandeurs de notre aide dans ce domaine. Il est de notre intérêt de coopérer car, sans cette aide, ils n'auront pas les moyens de s'engager dans des modes de développement plus respectueux de l'environnement et plus adaptés aux changements climatiques.
Au moment où je vous parle, l'un des plus graves cyclones du siècle s'est abattu sur Madagascar, y a provoqué un véritable désastre, et se dirige vers le Mozambique. Sans nul doute ces pays seront-ils intéressés par une expertise sur les mesures de prévention et d'adaptation susceptibles de réduire l'impact des cyclones !
C'est dans ce contexte que la présente proposition de loi tend, tout d'abord, à conférer à la lutte contre l'effet de serre et à la prévention des risques liés au réchauffement climatique la qualité de priorité nationale.
C'est évidemment là une mesure symbolique, mais l'expérience nous a montré que la définition d'une priorité pouvait, à terme, avoir des conséquences pratiques.
Le G8 considère les changements climatiques comme la plus grande menace pour le développement durable du monde. Il me semble que cette menace doit également figurer parmi les priorités des politiques publiques.
Quant à cet observatoire, il répond tout d'abord à la nécessité de développer notre capacité à prévenir les impacts des changements climatiques et des phénomènes extrêmes comme les cyclones et les tempêtes. Il s'agit, à terme, de réduire la vulnérabilité de nos territoires et de permettre la mise en place de mesures de prévention et d'adaptation aux changements climatiques. Comme le souligne la mission interministérielle sur l'effet de serre, c'est un domaine où la France gagnerait à assurer une présence scientifique comparable à celle des grands pays développés.
Cet observatoire répond également au besoin de recueillir, de consolider et de diffuser des informations actuellement disséminées dans les différents centres de recherche. Il s'agit aussi bien de collecter des données grâce à la constitution d'études scientifiques que de centraliser les études et travaux déjà effectués par les établissements et instituts de recherche nationaux.
Dans notre esprit, cette nouvelle structure devrait permettre de diffuser des informations auprès de la communauté scientifique, de sensibiliser le public sur les enjeux liés aux changements climatiques et, enfin, d'informer les collectivités territoriales sur les mesures de prévention et d'adaptation susceptibles d'atténuer les conséquences des changements climatiques.
Cet observatoire pourrait également être l'instrument d'une meilleure coordination des scientifiques français qui participent aux différentes instances internationales concernées par les enjeux climatiques. Il dotera également la France d'un outil de coopération avec les pays du Sud et, en particulier, avec les Etats insulaires, qui sont particulièrement vulnérables aux conséquences du réchauffement climatique.
Par rapport à la proposition de loi initialement déposée, la commission des affaires économiques vous propose de recentrer les missions de l'observatoire sur la collecte et la diffusion des informations et de ne plus faire référence à une mission de recommandation aux pouvoirs publics. Il y avait, dans ce pouvoir de recommandation, un risque de chevauchement avec les recommandations de la mission interministérielle sur l'effet de serre.
D'une façon générale, il nous a paru important que cet observatoire soit non pas une structure de plus, mais un centre où convergent les analyses de l'ensemble des laboratoires de recherche qui travaillent dans ce domaine.
C'est pourquoi j'ai souhaité écouter les scientifiques et les responsables administratifs qui participent à ces travaux pour connaître leurs besoins. Je me félicite qu'ils accueillent très favorablement cette initiative.
La commission vous propose, à cet égard, d'indiquer dans la rédaction de la proposition de loi que l'observatoire exerce ses missions en liaison avec les établissements et instituts de recherche concernés et avec le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le GIEC.
Il nous est apparu également utile de confier à l'observatoire une mission de sensibilisation du public et d'information des collectivités territoriales. L'expérience douloureuse de la tempête qui s'est abattue en France l'hiver dernier a montré que les élus locaux avaient besoin, dans ce domaine, d'informations.
Cet observatoire sera, pour tous les responsables locaux, un interlocuteur susceptible de les éclairer. L'observatoire pourra notamment les informer sur les mesures de prévention et d'adaptation de nature à limiter l'impact du réchauffement climatique et des phénomènes climatiques extrêmes.
Il m'a paru également important que l'observatoire puisse formuler dans son rapport annuel des recommandations en matière de prévention.
La commission n'a pas souhaité déterminer dans la loi la composition et les règles de fonctionnement de cet observatoire, qui non seulement relèvent du domaine réglementaire mais devraient, je crois, faire l'objet d'une négociation entre les différents centres de recherche concernés.
De ce point de vue, la formule du groupement d'intérêt public, le GIP, me paraît la plus adaptée, car elle permettrait à l'observatoire d'avoir une réelle autonomie de gestion tout en associant des partenaires publics et privés.
Comme vous le voyez, il s'agit d'une proposition de loi aux ambitions apparemment modestes, face à un enjeu qui est par nature planétaire. Je crois néanmoins que cet observatoire pourra contribuer à la lisibilité, à la crédibilité et à l'efficacité des politiques publiques liées aux changements climatiques.
Avec l'effet de serre, la notion de responsabilité à l'égard des générations futures me semble prendre tout son sens : nous travaillons ici essentiellement pour les petits-enfants de nos enfants.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. Paul Vergès, rapporteur. Mais n'oublions pas, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que, si nous attendons leur avènement pour agir, il sera sans doute trop tard. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, mois après mois, l'alerte donnée par la communauté scientifique mondiale et les écologistes sur le risque d'un changement climatique se confirme. La température du globe a augmenté sans doute de plus d'un demi-degré au cours du xxe siècle. Les précipitations s'accroissent, particulièrement aux latitudes moyennes et élevées. La superficie et l'épaisseur des glaces des pôles diminuent. Les glaciers alpins et continentaux régressent.
Les scientifiques estiment également que le changement de climat se traduira par une augmentation de la fréquence et de l'intensité des aléas climatiques. S'il n'est pas possible d'attribuer avec certitude la double tempête qui a frappé la France en décembre dernier au changement de climat, celle-ci montre la vulnérabilité de notre pays à des évolutions climatiques extrêmes.
Autant que d'un réchauffement global de quelques degrés, nous devons nous préoccuper des conséquences que l'effet de serre pourrait avoir sur le bouleversement des climats. Le principe de précaution doit nous conduire à agir pour en réduire le risque et pour anticiper ses conséquences.
Consciente de ces enjeux, la France a joué un rôle de premier plan dans la négociation internationale sur les climats depuis la conférence de La Haye, qu'elle a co-organisée en 1989.
La convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques a été négociée sous l'égide d'un Français, Jean Ripert. J'ai, pour ma part, fait de la lutte contre l'effet de serre une des priorités de mon action au ministère de l'environnement et je suis fière d'avoir présidé la délégation française à Kyoto, en décembre 1997, lors de la conférence qui a permis d'aboutir à un accord sur un protocole complétant la convention cadre et fixant pour la première fois des objectifs contraignants de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les pays industrialisés.
Son adoption, malgré les fortes réticences de certains de nos partenaires de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, qui ne souhaitaient pas s'engager sur des réductions réelles de leurs émissions, a été rendue possible par la solidarité dont les pays de l'Union européenne ont fait preuve pendant plus de deux ans de négociations.
La Communauté européenne et ses Etats membres ont en effet choisi de souscrire un engagement commun de réduction de leurs émissions de 8 % entre 1990 et 2010. Ils se sont réparti les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre, en juin 1998, au sein de ce que l'on a appelé la « bulle européenne ».
Du fait de l'intégration croissante des politiques économiques et environnementales des pays de l'Union européenne, le respect de cet engagement commun demandera, outre la mise en oeuvre de mesures nationales de réduction des émissions, une harmonisation au niveau communautaire des actions engagées.
L'objectif global de réduction des émissions des pays industrialisés, de 5,2 % entre 1990 et 2010, peut paraître modeste face aux enjeux du changement de climat. Assurer sans délai la mise en oeuvre des engagements que les pays industrialisés ont pris à Kyoto en décembre 1997 constitue cependant la première étape d'un effort qui devra se poursuivre tout au long du xxie siècle. Les pays développés doivent, en effet, s'orienter vers la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre et cesser d'offrir aux pays du Sud le modèle d'un développement reposant sur une consommation d'énergie toujours plus importante.
Au niveau national, le protocole de Kyoto nous a fixé comme objectif de ramener nos émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990 en 2010. Sans efforts de réduction, nos émissions, qui s'élevaient à 144 millions de tonnes d'équivalent carbone en 1990 et qui ont été stables sur la période 1990-2000, dans un contexte de recul économique pendant la première partie de la période, croîtraient de 31 millions de tonnes entre aujourd'hui et 2010. L'effort que nous aurons à accomplir est donc loin d'être négligeable, puisqu'il devra conduire à réduire nos émissions de près de 20 %.
Afin d'engager dès maintenant les efforts qui nous permettront de respecter nos engagements, j'ai souhaité que le Gouvernement adopte un nouveau programme national de lutte contre le changement climatique. Les mesures identifiées par ce programme, adopté en janvier dernier, ont donc pour objet de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 31 millions de tonnes d'équivalent carbonne par an jusqu'en 2010.
Prise individuellement, chacune de ces mesures réglementaires, fiscales, incitatives, de formation ou d'information, peut paraître de peu de portée ; prises dans leur ensemble, ces mesures constituent un ensemble cohérent devant nous permettre d'atteindre l'objectif de Kyoto.
Ce plan est à la fois un relevé de décisions de mesures immédiatement applicables, mais aussi un programme de travail pour le Gouvernement.
Les mesures immédiatement applicables concernent tous les domaines : le logement, l'industrie, l'agriculture, les transports et, heureusement, la réduction des émissions de gaz à effet de serre n'est pas le seul objectif. Ainsi, dans le logement, nous souhaitons non seulement réduire les émissions, mais aussi contribuer à l'augmentation du confort des usagers par l'isolation, par la lutte contre le bruit, et diminuer leurs factures, notamment dans le logement social.
On le voit bien, la mobilisation générale du Gouvernement dans tous les domaines permet donc, par des mesures qui sont positives pour le climat mais aussi dans d'autres domaines, de s'assurer d'un réel engagement de sa part.
Nous avons également mis en place un programme de travail et j'attacherai une importance particulière à sa mise en oeuvre effective et à la préparation des mesures complémentaires, qui supposent des négociations avec la Commission européenne, avec tel ou tel secteur économique et avec les ministères concernés. Cette stratégie conduit - je le rappelle - à ne pas faire de l'effet de serre le problème de la seule ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, mais la préoccupation partagée de l'ensemble des membres du Gouvernement.
J'en veux pour preuve deux exemples : les contrats de plan ont marqué une réorientation des choix en matière de transports vers les transports collectifs dans les grandes améliorations et vers les transports à longue distance des marchandises par le rail, même si nous sommes encore loin de l'équilibre souhaité. Nous négocions toutefois avec les régions, et un certain nombre d'entre elles ont élaboré des projets routiers. Par ailleurs, s'agissant des schémas de services collectifs, le journal Libération relate aujourd'hui - et d'une façon qui ne peut pas être considérée comme exagérée - les difficultés qui résultent de la distance qui persiste parfois entre les engagements des ministres et les réticences d'administrations chargées de les « mettre en musique ».
Ces réticences sont d'abord culturelles : il est difficile de passer d'une civilisation de la route à une civilisation du rail en matière de transport, par exemple.
Sur plusieurs sujets, le Gouvernement a décidé d'anticiper des décisions communautaires. C'est le cas, notamment, de l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, aux consommations intermédiaires d'énergie des entreprises, que le Gouvernement souhaite mettre en place dès l'année prochaine, sans attendre l'aboutissement des négociations communautaires.
La France présidera le Conseil de l'Union européenne à partir de juillet. La lutte contre l'effet de serre sera l'une des grandes priorités de cette présidence en matière d'environnement.
Il s'agira, d'abord, de se donner les moyens, au niveau communautaire, d'atteindre l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 8 % entre 1990 et 2010 que nous a fixé le protocole de Kyoto.
J'ai écrit, en février dernier, à la commissaire en charge de l'environnement pour lui demander d'élaborer une véritable stratégie communautaire visant à permettre à l'Union de respecter ses engagements et qui devrait être soumise rapidement au Conseil. Je souhaite en effet saisir l'opportunité de la présidence française de l'Union pour avancer sur ces questions.
De manière plus générale, il me semble indispensable que les pays industrialisés mettent en oeuvre rapidement les mesures qui leur permettront de respecter leurs engagements. J'évoquerai ce sujet lors de la réunion du G 8 « environnement », qui aura lieu ce week-end au Japon et qui traitera essentiellement de la lutte contre l'effet de serre. La semaine prochaine, je présiderai avec mon collègue danois un atelier international sur les politiques et mesures de lutte contre l'effet de serre. Ce sera une étape importante pour définir quelles sont les meilleures politiques - ou « meilleures pratiques » - et les conditions de leur succès. Nos opinions publiques attendent nos actes dans la lutte contre l'effet de serre. Elles souhaitent que l'élan de Kyoto s'affirme d'abord à travers les politiques et mesures que nous mettons en place.
A défaut, la difficile avancée des négociations internationales, les délais que certains pays semblent vouloir mettre pour ratifier le protocole, laissent craindre que le souffle de Kyoto ne retombe.
C'est ce qui pourrait se passer si chaque pays s'accoutumait à l'idée qu'il ne respectera pas la totalité de ses engagements faute d'actions nationales suffisantes et comptait sur les difficultés rencontrées par les autres pays pour justifier ses propres manquements. Les effets d'une telle attitude seraient dramatiques : perte de confiance des opinions publiques, affaiblissement de la crédibilité des organisations internationales, mais aussi poursuite d'un processus de dégradation du climat dont chaque conférence internationale nous rappelle l'acuité. Ces conférences sont en général ouvertes par des représentants des petits Etats insulaires, qui nous disent avec beaucoup d'émotion que, si ce débat reste, pour nous, un débat sur le moment où il va falloir commencer à opérer des changements de nos habitudes et de nos comportements, il s'agit, pour eux, d'une question vitale, à tous les sens du terme.
C'est pourquoi il me semble essentiel que notre pays donne l'exemple, à la veille d'assurer la présidence de l'Union, en mettant en place les mesures nécessaires pour respecter ses engagements et en oeuvrant pour l'entrée en vigueur rapide du protocole de Kyoto.
La conférence de La Haye, qui aura lieu en novembre 2000 sous présidence française de l'Union européenne, sera une étape décisive pour rendre le protocole de Kyoto pleinement applicable. Mon objectif est que ses résultats permettent à un nombre suffisant de pays de ratifier ce protocole pour assurer son entrée en vigueur avant 2002, c'est-à-dire avant le dixième anniversaire de la conférence de Rio. La France est le premier pays de l'Union européenne qui ait véritablement engagé la procédure de ratification du protocole de Kyoto, puisque l'Assemblée nationale a approuvé hier le projet de loi que je lui ai présenté au nom du Gouvernement. Vous aurez sans doute à le faire bientôt au Sénat.
Je défendrai trois grandes priorités à La Haye.
D'abord, il convient de mettre en place un dispositif crédible de respect des obligations pour vérifier le caractère effectif et durable des réductions d'émissions et d'instituer un système complet d'incitations et de sanctions qui assurera le respect des engagements de Kyoto. L'enjeu n'est pas mince, car il s'agit de mettre en place, dans le cadre du système des Nations unies, des institutions ne reposant pas seulement sur le bon vouloir des uns et des autres.
Ensuite, il faut s'assurer que les objectifs de réduction des émissions seront principalement atteints par des mesures mises en oeuvre sur le territoire de chaque pays partie au protocole. C'est notre ambition au niveau national, puisque le programme national est calibré pour que nous puissions respecter nos engagements sans recourir à l'achat de droits d'émissions auprès d'autres parties. Cela suppose que les mécanismes prévus au protocole de Kyoto soient strictement encadrés et régulés. S'ils ne l'étaient pas, ces mécanismes pourraient avoir les pires conséquences en constituant des échappatoires faciles pour les pays peu soucieux d'engager, chez eux, les efforts nécessaires de réduction de leurs émissions.
Il s'agit, enfin, de développer une véritable politique de coopération avec les pays en développement, l'histoire nous ayant appris que des investissements ponctuels ne suffisent pas à entraîner le décollage de ces pays. A cet égard, j'ai apprécié, monsieur le rapporteur, votre insistance à plaider en faveur d'un renforcement de notre coopération avec les petits pays du Sud. J'y reviendrai, tout à l'heure, concernant la collecte et la diffusion de données, qui constituent un des premiers enjeux de la mise en place de l'observatoire.
Je veux également insister sur la nécessité de faciliter les transferts de technologie, qui permettront à un pays d'adopter des politiques de maîtrise de l'énergie pour participer à l'effort global de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de ne pas reproduire les erreurs que nous avons commises nous-mêmes au même stade de développement ; je crois que c'est un enjeu tout à fait majeur.
Il est important, dans ce contexte, que nous nous organisions mieux, à l'échelon national, pour lutter contre le réchauffement climatique et ses impacts.
La proposition de loi que vous venez de nous présenter, monsieur le rapporteur, tend à conférer à la lutte contre l'effet de serre et à la prévention des risques liés au réchauffement climatique la qualité de priorité nationale. Je ne peux, bien sûr, que m'en féliciter.
Vous avez souligné que le Gouvernement a déjà considérablement renforcé la mission interministérielle de l'effet de serre. Celle-ci doit jouer un rôle essentiel pour la préparation et le suivi de la mise en oeuvre des mesures de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre et pour la préparation des positions que nous défendons dans la négociation internationale.
Mais, quels que soient les efforts de réduction des émissions que nous effectuerons, la France n'échappera pas à des variations du climat et à leurs conséquences, qui affecteront tous les secteurs de la société. La montée des niveaux des mers concernera toutes les zones côtières de la métropole ainsi, bien sûr, que les départements et territoires d'outre-mer, notamment ceux des Caraïbes, du Pacifique et de l'océan Indien. Ces départements et territoires d'outre-mer sont, au même titre que les petits Etats insulaires regroupés au sein de l'Alliance des petits Etats insulaires, l'AOSIS, particulièrement exposés aux risques du changement de climat.
L'observatoire national que vous proposez de créer, monsieur le rapporteur, aurait ainsi pour mission l'approfondissement de l'étude des conséquences du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d'outre-mer, en vue, notamment, d'offrir aux élus locaux et aux collectivités les moyens d'élaborer d'une véritable politique de prévention face à ces risques nouveaux.
Sa création permettrait d'améliorer notre organisation interne, notamment en matière de recherche sur les impacts du changement de climat et d'information sur les risques liés à ce changement.
La création de cet observatoire répondrait, en effet, tout d'abord à la nécessité de développer notre capacité à mieux connaître les impacts des changements climatiques et des phénomènes climatiques extrêmes, et ainsi de réduire notre vulnérabilité à ces phénomènes. Je suis convaincue qu'elle serait très utile, car l'analyse de l'évolution des phénomènes climatiques et de leur impact est, en effet, un des domaines où notre capacité de recherche devrait être renforcée.
Cette création répondrait également à un besoin de recueillir, de consolider et de diffuser des informations actuellement disséminées dans les différents centres de recherche. Le recueil de ces données permettrait de mener une politique plus active d'information et de sensibilisation du public sur les enjeux liés aux changements climatiques.
Je rejoins, monsieur le rapporteur, votre souci que cet observatoire ne soit pas une structure de plus mais qu'il travaille avec les établissements existants. Vous en avez cité certains. A y regarder de près, on se rend compte que nombreux sont les organismes où des chercheurs travaillent sur le climat. Je pense, par exemple, au CEA, où un groupe de travail s'est mis en place de façon quelque peu inattendue, l'administrateur du CEA, que j'ai rencontré il y a quelques jours, ayant pratiquement découvert, à cette occasion, l'ampleur des travaux menés sur ce sujet dans son établissement.
Je crois donc utile de travailler avec les établissements existants, avec la mission interministérielle de l'effet de serre, bien sûr, avec le GIEC, que vous avez cité, et qui n'est pas pour rien dans la prise de conscience internationale de l'ampleur et de la réalité du phénomène, qui étaient encore contestées, il y a quelques années, dans les instances politiques - plus que dans les instances techniques, je dois le dire - et qui ne le sont plus du tout aujourd'hui.
Enfin, vous l'avez dit - et, là encore, je partage votre analyse -, la mise en place de l'observatoire permettra de renforcer la capacité de notre pays à s'engager dans des politiques de coopération avec les pays du Sud.
Vous ne l'avez pas évoqué, mais je pense que c'était clair dans votre esprit d'après ce que je sais de votre engagement, il convient que cette politique de coopération en matière de climat, notamment par la mobilisation du mécanisme de développement propre, ne se fasse pas au détriment des crédits actuellement mobilisés par l'aide au développement, qu'elle vienne en sus, pour permettre d'accompagner les efforts de ces pays. Ainsi, notre coopération sera renforcée avec les petits Etats insulaires regroupés au sein de l'AOSIS.
Pour toutes ces raisons, je suis favorable, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, à la proposition de loi soumise à votre approbation. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Paul Vergès relative à l'effet de serre, que nous examinons aujourd'hui, est courte, simple et claire.
Ce texte est important, bien sûr, par les dispositions qu'il contient, mais surtout par le débat qu'il ouvre, débat que vous avez bien entamé, madame la ministre, et que M. le rapporteur évoque notamment dans son exposé des motifs.
Il vient compléter d'autres travaux parlementaires auxquels le Sénat a largement contribué et qui témoignent de la grande attention que nous portons à cette question. J'en veux pour preuve l'excellent rapport de notre collègue Serge Lepeltier sur l'effet de serre et les réflexions actuellement menées par l'office parlementaire des choix technologiques et scientifiques sous l'égide de notre collègue Marcel Deneux. Peut-être aurait-il d'ailleurs été plus judicieux d'attendre la remise de son rapport, prévue pour la fin de l'année, avant d'examiner la présente proposition de loi.
Mais ce texte ne doit pas occulter le reste. Il ne faudrait pas que l'observatoire que nous souhaitons créer aujourd'hui soit un simple gadget qui nous donne bonne conscience et qui dispense la France de tenir les engagements pris devant la communauté internationale à Rio de Janeiro et à Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Je rappelle que la lutte contre l'effet de serre est un enjeu majeur, qui appelle la mobilisation de tous, à commencer, bien sûr, par le Gouvernement.
Permettez-moi de rappeler les deux mesures contenues dans la proposition de loi que nous discutons.
Il s'agit, d'abord, de faire de la lutte contre l'effet de serre et de la prévention des risques liés au réchauffement climatique une référence nationale. Nous ne pouvons qu'approuver un tel objectif. Certes, d'aucuns pourront regretter qu'il s'apparente à une déclaration d'intention et que sa contrainte jurdique, pour le moment, reste faible.
La deuxième disposition envisagée est plus concrète : la création d'un observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et, bien sûr, dans les DOM-TOM. Cet observatoire aura pour mission d'approfondir la connaissance des risques liés au réchauffement climatique, d'élaborer des recommandations et de présenter un rapport d'information annuel.
A ce titre, je formulerai deux souhaits : le premier, c'est que ce rapport soit rendu public et communiqué à la représentation nationale ; l'observatoire participera ainsi pleinement à l'information de nos concitoyens. Le second, c'est que l'observatoire ait également un rôle fédérateur et travaille en coopération avec les organismes nationaux et internationaux qui s'intéressent déjà à la question - ils sont nombreux, vous venez de le dire, madame la ministre - de façon à faire oeuvre utile pour la Communauté internationale. Je pense notamment au CNRS - vous avez cité le CEA - aux chercheurs des pays étrangers, à l'Organisation météorologique mondiale et, bien entendu, au Groupe intergouvernemental d'évaluation du climat, le GIEC, créé dans le cadre des Nations unies.
Au-delà de ces dispositions immédiates, ce qui me semble important, c'est de pouvoir les mettre en perspective afin d'ouvrir le débat, dresser un état des lieux, suggérer des améliorations aux moyens mis en place pour lutter contre l'effet de serre.
A cette occasion, nous nous rendons compte que votre gouvernement, madame la ministre, ne peut pas, pour le moment - je ne voudrais pas faire de procès d'intention - se targuer d'un bilan très glorieux, malgré l'annonce, avec un effet médiatique assez réussi, des cent mesures du plan Jospin. J'y reviendrai.
Si le phénomène naturel de l'« effet de serre » a été découvert il y a plus d'un siècle par un savant suédois, cela ne fait qu'une douzaine d'années que la communauté scientifique mondiale s'est vraiment alarmée des conséquences possibles d'un excès de gaz carbonique et des risques de changements climatiques.
Face à cette situation, les analyses scientifiques sont complexes et n'apportent pas encore d'explication définitive. J'en veux pour preuve les interrogations du GIEC sur le rôle des forêts en tant que « puits à carbone » ou encore les conclusions de chercheurs britanniques sur les conséquences d'une augmentation du flux magnétique émis par le soleil.
Nous devons donc agir une fois encore en appliquant le principe de précaution, sachant que nous pouvons convenir que l'augmentation de CO2 doit non seulement être maîtrisée mais encore réduite.
Je citerai quelques chiffres pour situer l'enjeu.
Entre 1990 et 1996, les émissions de CO2 ont augmenté de 7 % au niveau mondial : de 9 % aux Etats-Unis mais de 11 % au Japon et, bien sûr, dans certains pays dont vous connaissez la situation les uns et les autres, de 33 % en Chine, de 44 % en Inde et de 32 % en Russie.
La France, avec une augmentation de CO2 dans la même période de 1,6 %, fait plutôt figure de bon élève, et d'ailleurs c'est une chose qui avait été présentée comme un bon point pour notre pays à Kyoto.
Les Etats-Unis émettent à eux seuls, il faut le savoir, le quart des gaz à effet de serre ; il faudra en tenir compte dans les discussions et les négociations qui nous attendent avec ce pays, et auxquelles vous avez fait allusion tout à l'heure, madame la ministre.
Enfin, dernier chiffre, les émissions de CO2 représentent 80 % des émissions de gaz à effet de serre dans l'Union européenne. Bien sûr, sur d'autres continents, ce n'est pas le même rapport.
Dans ces conditions, dès 1990, dans le premier rapport du GIEC, les experts estimaient qu'il fallait immédiatement réduire de 60 % les émissions de CO2 et de méthane.
A partir de ces analyses, la communauté internationale a commencé à se mobiliser : il s'en est suivi une série de conventions internationales, que vous avez évoquées, madame la ministre, et vous aussi, monsieur le rapporteur.
D'abord, au Sommet de la Terre, à Rio, en juin 1992, plus de 170 Etats, dont la totalité des Etats européens, ont signé la convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique. Elle visait la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre en 2000 au même niveau qu'en 1990.
Le résultat, nous le savons tous, a été décevant, car les moyens mis en oeuvre ne répondaient pas à cet ambitieux objectif. Il a donc été décidé au sommet suivant, le sommet de Kyoto, en décembre 1997, par les pays industrialisés de prolonger ces engagements pour la période 2008-2012 et de fixer un objectif de réduction des émissions, et non plus de simple stabilisation.
Les pays industrialisés se sont engagés à réduire de 5,2 % leurs émissions de gaz à effet de serre sur la période 2008-2012 par rapport à 1990. Pour sa part, l'Union européenne s'engage à réduire ses émissions de 8 %, et la France, quant à elle, se fixe l'objectif de stabiliser ses émissions par rapport à 1990. Pourquoi seulement une stabilisation ? Tout simplement parce que la France est un meilleur élève que ses voisins, raison pour laquelle elle a moins d'efforts à faire.
Il avait également été dit, à cette époque, que les pays en développement, les PED, n'étaient pas tenus de réduire leurs émissions.
En contrepartie de ces différents objectifs, des mécanismes de flexibilité ont été adoptés, notamment la création d'un marché de « permis de polluer ». Je voudrais juste rappeler au passage que cela correspondait surtout à un souhait des Américains. Il y a simplement quelques semaines, la France et l'Union européenne se sont ralliées à ce marché de « permis de polluer », qui est à la fois une bonne chose du point de vue économique, mais une formule bien ambiguë sur le plan des principes.
En novembre 1998, la conférence de Buenos Aires devait préciser les outils permettant de décliner les objectifs du protocole de Kyoto. Elle s'est soldée par un échec dans la mesure où l'accord final ne comprenait pas d'engagements fermes ni, surtout, de calendrier de travail.
Les négociations ont repris récemment, en octobre 1999, à Bonn, et comme vous le disiez, madame la ministre, si la prochaine conférence internationale prévue à La Haye en fin d'année, ne sera pas l'ultime étape, car nous savons que tout cela prend du temps, du moins se tiendra-t-elle sous le présidence française de l'Union européenne. J'espère que nous en profiterons pour faire avancer ce débat difficile.
On le voit, la lutte contre l'effet de serre n'est pas évidente. Elle relève d'un long processus international de déclarations d'intention qui ne sont pas toujours assorties de mesures contraignantes. Ainsi le protocole de Kyoto est-il encore largement inapplicable. Il ne pourra entrer en vigueur que lorsque cinquante-cinq pays représentant 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre l'auront ratifié. L'enjeu est dur.
A cet égard, la procédure de ratification a été récemment engagée puisque l'Assemblée nationale a adopté votre texte hier, madame la ministre. C'est un signe encourageant qui ferait de la France un des premiers pays industrialisés à ratifier le protocole de Kyoto.
Je voudrais, après avoir dresser le tableau du contexte international, m'arrêter sur la position de la France et sur les mesures qui pourraient être prises.
C'est en début d'année que le Premier ministre a lancé un programme de lutte contre l'effet de serre, qui se décline en cent mesures.
Parler de programme est d'ailleurs bien ambitieux, car, à le lire, cela ressemble un peu à un catalogue « fourre-tout » dans la mesure où les moyens demeurent assez confus.
D'abord, avant même que ces mesures soient mises en place, vous déclariez, madame la ministre, le 19 janvier dernier, que ce programme serait amené à évoluer. Nous sommes curieux de savoir comment et en vertu de quels arbitrages au sein du Gouvernement.
Quoi qu'il advienne, permettez-moi de vous dire que si ces cent mesures vous donnent le sentiment d'agir, elles nous laissent perplexes et inquiets notamment du fait de certaines incohérences et ambiguïté.
Premièrement, ce programme augmente la fiscalité en étendant l'assiette de la TGAP, mais ne concerne pas le secteur des transports qui est pourtant à l'origine de près du quart de la pollution à effet de serre.
Ce choix ou, devrais-je dire, cette absence de choix est lourde de conséquences.
D'une part, l'augmentation de la TGAP et sa nouvelle version sous la forme de l'écotaxe représentera 12 milliards de francs au moins en 2001 : un tel prélèvement - je n'entends pas beaucoup de membres du Gouvernement le rappeler - pose la question de la compétivité de nos entreprises et du risque de délocalisation de certaines d'entre elles. Vous le savez très bien, cette écotaxe frappe certains secteurs - pas tous - notamment certains secteurs créateurs d'emplois malheureusement.
D'autre part, sans rouvrir ici le débat sur les 35 heures, je tiens à rappeler que la TGAP ne finance pas la politique de l'environnement mais une décision que je considère comme doctrinaire : celle d'imposer la réduction du temps de travail. C'est absurde !
Enfin, notre fiscalité sur les carburants est l'une des plus fortes d'Europe. Certes, nous savons tous ce qu'elle représente comme ressources pour le budget de l'Etat, mais je vous pose la question suivante : peut-on encore augmenter la fiscalité sur les carburants ?
En tout état de cause, madame la ministre, vous avez le devoir de défendre votre secteur de compétence. Vous devez exiger que la totalité de ces nouveaux prélèvements aillent à la lutte contre l'effet de serre et ne servent pas à payer d'autres dépenses.
La deuxième remarque sur les actions proposées par le Gouvernement, c'est qu'elles n'abordent pas la question d'un comportement individuel qui permettrait de réduire nos consommations d'énergie. Il est temps, par le biais notamment d'une communication et d'une information appropriées, de sensibiliser nos concitoyens - nous pouvons modifier nos habitudes sans réduire notre confort - car tous doivent participer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Troisièmement, le plan proposé par le Gouvernement passe complètement sous silence l'encouragement à la recherche et, bien sûr, la recherche sur des technologies réduisant les émissions de gaz.
Quatrièmement, il est évident que des mesures de lutte contre l'effet de serre ne peuvent pas être engagées au seul niveau national.
Vous vous réjouissiez, voilà quelques instants, madame la ministre, de l'augmentation de la TGAP. Certes, elle procurera des ressources, mais elle frappera nos entreprises. Or il importe que nos entreprises ne se trouvent pas handicapées par rapport aux entreprises des pays voisins en Europe. Il est impératif à cet égard que nous profitions de la présidence française de l'Union pour faire en sorte que ces mesures soient engagées à égalité à l'échelon européen. Cela permettra d'éviter les distorsions de concurrence et, le cas échéant, de réduire les coûts.
A ce titre, la démarche de la Commission européenne est tout à fait pertinente : elle a récemment présenté un livre vert sur l'établissement d'un système d'échange de droits d'émissions ; ce livre vert doit être l'occasion d'un large débat jusqu'à l'automne.
Mes questions à ce sujet sont, dès lors, simples : quelle position la France va-t-elle défendre ? D'autant que j'ai cru comprendre qu'il existait, au sein du Gouvernement, des différences d'analyse sur le choix même du recours à l'échange des permis d'émission. Quelles initiatives seront prises lors de la présidence française de l'Union européenne ? En effet, le livre vert ne répond pas à toutes les questions. Par exemple, il ne dit pas comment la charge sera répartie entre les secteurs polluants, ni, surtout, comment les quotas seront alloués.
J'espère, madame la ministre, que vous défendrez la France, qui, je viens de vous le rappeler, est un bon élève en matière d'émission de gaz à effets polluants. La logique veut qu'en contrepartie nous soyons bien servis en matière de quotas.
En particulier, il me semble indispensable d'établir avec précision les règles d'organisation de cette bourse d'échange. A cet égard, il faut fixer un encadrement aux droits qui pourront être vendus ; cet encadrement peut se concevoir comme un plafond en volume ou comme une limite dans la durée. Il faut aussi se donner les compétences techniques en matière de mesures d'émission, de certification des installations et des moyens de contrôle efficaces pour que le système fonctionne vraiment et surtout pour qu'il ne se transforme pas en un droit à polluer plus. Je ne suis pas inquiet en ce qui concerne la France en l'occurrence, mais je suis inquiet s'agissant du comportement des pays voisins.
Je terminerai mon propos en rappelant que le débat énergétique ne se limite pas au seul critère de l'environnement mais qu'il relève d'une stratégie globale sur le long terme.
Ainsi, le dossier de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ne peut être ouvert sans évoquer la question du nucléaire, principale industrie énergétique, avec l'hydraulique, qui ne dégage quasiment pas de CO2. Or, la France, grâce à son parc de centrales, est, avec la Suède, l'un des pays d'Europe qui produit le moins de CO2.
Il faut savoir que la production d'électricité est responsable dans le monde de 40 % des émissions de CO2 ; mais, en France, du fait de notre parc nucléaire et hydraulique, ce sont plus de 95 % de l'électricité qui sont produites sans émettre de CO2. Actuellement, la France présente le plus faible rejet de CO2 par kilowatt/heure produit : 78 grammes de CO2 par kilowatt/heure en France, contre 444 en moyenne pour l'ensemble des pays européens. A vous, madame la ministre, d'exiger des instances européennes qu'elles prennent en considération cet effort.
Dans le grand débat qui nous attend à propos du renouvellement de notre parc de centrales, nous devrons raisonner de manière globale, pour toutes les énergies propres ; nous devrons aussi prendre en compte les énergies renouvelables, énergies d'appoint qu'il faudra intégrer dans des projets économiques et secteur où la France a des progrès à faire si elle veut rattraper ses voisins.
Mes chers collègues, le groupe des Républicains et Indépendants apporte son soutien à la présente proposition de loi, mais il souhaite que s'engage enfin une véritable politique nationale de lutte contre l'effet de serre et les risques de réchauffement climatique. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je pense qu'il y a unanimité dans cet hémicycle pour considérer que l'effet de serre, comme l'a révélé le G 8, est un problème fondamental pour l'humanité.
Il y a plus de quinze ans, à Sophia-Antipolis, j'ai organisé, au sein de l'Ecole des mines de Paris, décentralisée pour partie là-bas, un colloque sur le changement de climat et le gaz carbonique atmosphérique. C'était le premier colloque au monde à réunir des décideurs de politique énergétique, y compris des politiques, et les scientifiques internationaux les plus compétents, ceux qui lançaient le programme « effet global de serre », notamment un certain nombre de nos collègues américains.
Les conclusions furent, bien entendu, parce que les scientifiques sont toujours prudents : « Nous ne pouvons pas l'affirmer, mais nous sommes absolument certains que, d'abord, l'augmentation de l'effet de serre est dû à un effet anthropique, c'est-à-dire au développement de l'utilisation des combustibles fossiles, ensuite que cet effet aura, à terme, sans que nous puissions dire quand, des conséquences catastrophiques. » Malheureusement, quand un scientifique dit : « Nous ne savons pas quand », automatiquement, les médias et les gouvernements lui répondent : « Quand vous saurez quelque chose de plus précis, vous reviendrez nous voir. »
L'échelle de temps, dont on pense qu'il s'agit d'une échelle de temps géologique, correspondant donc à des centaines de milliers d'années, n'intéresse, au fond, ni les décideurs, ni les politiques, ni les économistes, ni les industriels.
A partir du moment où l'on avoue ne pas savoir si l'échéance est à dix ans, ou à cent ans, la nature du problème change. Or, nous sommes dans cette situation à l'heure actuelle.
Il ne faut pas croire que les conséquences de l'effet de serre seront pour le xxiie siècle. Non ! le processus est déjà en marche. Les scientifiques savent aujourd'hui de façon certaine que l'augmentation des cyclones tropicaux est due à un changement de climat.
Il est tout à fait normal que le rapporteur de cette excellente initiative soit sénateur de la Réunion. Il est en effet certain que les premiers menacés par l'effet de serre sont les pays situés dans les zones tropicales.
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Pierre Laffitte. Mais sont-ils les seuls ?
Quelle que soit leur importance, quel que soit l'intérêt que nous apportons aux petits Etats-îles, il y a beaucoup plus grave.
Ainsi, parmi les conséquences de l'aggravation de l'effet de serre, il faut noter, tout d'abord, l'augmentation de la température des mers, qui conduit à une élévation de leur niveau de 50 à 60 centimètres.
Mais il y a plus grave, il y a la fonte des glaciers, en particulier de l'inlandsis antarctique.
Il faut savoir que des pans entiers de glace se détachent et deviennent des icebergs. Cela a été le cas, l'an dernier, pour un morceau gros comme la Corse. Cela aussi contribue à une augmentation instantanée du niveau de la mer de quelques millimètres.
Nous savons également que, au-dessus de la mer de Ross, un morceau grand comme la France est en équilibre instable. Ce que nous ne savons pas, en revanche, c'est s'il va s'effondrer dans cinq ans, dans dix ans, ou dans cinquante ans. Mais, s'il s'effondre, cela conduira à une augmentation du niveau des mers de 5,5 mètres. Tous les ports mondiaux seront arrêtés, la plupart des aéroports mondiaux seront submergés. Ce sera une catastrophe globale, planétaire.
Un certain nombre de villes, voire de pays, y compris européens - je pense en particulier au Danemark et aux Pays-Bas - sont eux aussi directement concernés par ce scénario catastrophe, dont les scientifiques savent qu'il se produira, même s'ils ne savent pas quand.
Pour ce qui concerne des problèmes très importants, tels que la sécurité alimentaire, les scientifiques prennent des précautions. En matière d'effet de serre, en revanche, il n'est pas question du principe de précaution. Les conséquences économiques de ce phénomène sont pourtant fondamentales, considérables.
Les mesures à prendre visent l'ensemble des centrales d'électricité dans le monde, à l'exception des centrales nucléaires.
Il faudrait d'abord bannir toutes les centrales à lignite car ce sont les plus polluantes, notamment par leur radioactivité ; il faudrait bannir aussi toutes les centrales à charbon, toutes les centrales à pétrole et même les centrales à gaz.
Il faudrait bannir également la circulation automobile, sauf pour les véhicules électriques - mais on retombe alors sur le problème de la fabrication de l'électricité.
Il faudrait évidemment aussi mettre un terme à toutes les dépenses d'énergie extravagantes, notamment dans des pays tels que l'Ukraine ou la Russie, où elles sont de trois ou quatre fois supérieures à celles d'autres pays, en particulier de la France.
La France est la bonne élève dans cette affaire. Il convient toutefois qu'elle renforce la recherche, qu'elle a un peu laissé tomber, sur la biomasse, qui est une forme d'énergie solaire, sur l'utilisation du bois dans le bâtiment, qui est une forme de stockage de CO2, sur le photovoltaïque, sur toutes les formes d'énergies alternatives.
Il faut par ailleurs renforcer la recherche sur tout ce qui contribue aux économies d'énergie, y compris dans les transports, comme Mme la ministre l'a rappelé tout à l'heure.
Il faut renforcer la recherche sur la gestion à long terme des déchets nucléaires. Car, ne nous y trompons pas, l'avenir dépend en grande partie du développement de la sécurisation de la seule énergie dont nous pensons à l'heure actuelle qu'elle n'a pas d'effet sur le réchauffement de la planète. De plus, elle est stockable.
Il faudra également développer les recherches sur l'utilisation de l'électricité dans les transports. Pour le rail, c'est fait, et bien fait. Mais, pour les voitures personnelles, c'est beaucoup plus compliqué. Toutefois, des recherches sont en cours pour l'utilisation de l'hydrogène pour la propulsion des voitures, surtout en Allemagne, à Munich.
Il y a donc véritablement une stratégie à mettre en oeuvre, pour laquelle tant Mme la ministre que M. le rapporteur ont très clairement évoqué la nécessité de faire des recherches.
M. Poniatowsky a relevé, à très juste titre, que, pourtant, cela ne paraissait pas une prioriété actuelle. J'espère que le Gouvernement se rendra compte que c'est une nécessité à la fois pour que la France puisse développer les moyens scientifiques, qui sont de plus en plus importants dans la nouvelle économie, et attirer vers elle les cerveaux du monde entier qui s'intéressent à ce problème.
Comme nous sommes réputés être les bons élèves en la matière, nous pouvons très bien saisir l'occasion, avec la création de l'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, d'afficher d'emblée une volonté technique et scientifique qui nous aidera à être véritablement perçus par les scientifiques du monde entier comme les leaders indispensables et indiscutables. Nous pouvons l'être, nous devons l'être. C'est notre intérêt et nous pouvons y parvenir.
Je demande donc à Mme la ministre de profiter de la présidence française pour développer cet observatoire - auquel je suis favorable - en lui donnant au départ une dimension européenne.
Mme Hélène Luc. Cela, c'est très bien !
M. Pierre Laffitte. Dans quelques minutes, je vais faire une conférence de presse sur la politique européenne de recherche, thème sur lequel je viens de terminer un rapport pour le compte de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Vous voyez, madame la ministre, que le Parlement s'intéresse à des sujets d'avenir. J'en veux pour preuve également le rapport que M. Deneux va déposer, lui aussi, sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui.
Mon propre rapport prévoit très clairement de faire financer par l'Europe les opérations initiées par un pays, à condition qu'elles aient une vocation mondiale. Nous l'avons fait pour le CERN et pour l'institut Léo-Langevin notamment. Nous pouvons le faire pour l'observatoire, qui sera un lieu de concentration des compétences mondiales en matière de réchauffement climatique.
Mon groupe votera, sous réserve de l'affirmation de la volonté d'européanisation, puis d'internationalisation de l'observatoire, l'excellente proposition de loi de notre collègue, M. Vergès. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. M. le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l'indique dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi notre collègue Paul Vergès : « Il est peu d'autres exemples dans l'histoire du monde où la responsabilité n'a été aussi forte, dans les choix du présent, au regard de l'avenir de l'humanité et des générations futures. »
Il est peu d'autres exemples, peut-être, mais doit-on s'en réjouir ? Ces derniers se multiplient et le réchauffement de la planète, comme souvent les dossiers qui ont trait à l'environnement, appelle une responsabilité particulière, qui dépasse très largement le cadre national et dans laquelle notre pays doit prendre toute sa part, voire l'initiative, comme nous le propose notre collègue.
Ce dossier, qui se révèle à plus d'un titre complexe - les études sont encore relativement récentes, les conclusions des experts ne sont pas unanimes - est l'objet, depuis les moments clefs que furent le sommet de Rio et la conférence de Kyoto, d'une attention de plus en plus grande tant chez nos concitoyens que dans la classe politique elle-même.
En outre, l'ampleur des catastrophes naturelles de la dernière période ajoute encore à cette préoccupation.
Figurant au rang de ces questions qui appellent une responsabilité internationale - je serai même tenté de dire universelle - le réchauffement de la planète est l'exemple de ces questions qui justifient une autre manière de règlement politique, non plus à l'échelle de l'Etat, mais à l'échelle planétaire.
Comment ne pas voir en effet qu'en l'espèce d'autres relations au monde sont nécessaires.
Les rapports Nord-Sud, l'augmentation de la population mondiale, une nouvelle conception du développement, bref un nouveau mode de pensée de la modernité et, bien entendu, une autre définition des règles économiques en cours, à l'échelle mondiale, sont des éléments incontournables de la réflexion à conduire.
Faut-il y voir la venue du « village planétaire » qui bouleverse notre vision du monde dans son ensemble et qui nous impose une tout autre conception du « vivre en société », fondée sur d'autres paramètres que des critères économiques, qui paraissent ici, compte tenu des enjeux, bien déplacés ?
Nous le pensons, comme le pensent ceux qui ont pour souci la mise en place d'autres règles ou d'autres modèles pour l'organisation mondiale du commerce, pour la sécurité alimentaire ou encore pour les organismes génétiquement modifiés. La liste s'allonge, comme je l'indiquais à l'instant, de ces questions universelles auxquelles il faut nous confronter pour assurer le devenir de l'humanité tout entière !
La réduction des émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique doit être l'affaire de chacune et de chacun des individus qui peuplent notre planète, nous en sommes convaincus.
Pour autant, nous savons - et, à ce titre, le sommet de Rio fut un moment important - qu'il convient de distinguer la réalité des pays développés de celle des pays en voie de développement : pour faire court, le souci environnemental est partagé dès lors que le développement lui-même est partagé. En elle-même, cette question est déjà bien vaste.
Saurons-nous répondre, avec modestie mais non sans solennité, à la question posée par le sommet de Rio et qui soulevait la question du développement durable : l'espèce humaine saura-t-elle durer ?
Sans sombrer dans une vision eschatologique universelle, la proposition de notre collègue Paul Vergès nous invite à cette réflexion.
Quel développement pour demain ?
Après le sommet de Rio, il nous faut, avec l'ensemble de la communauté des hommes, proposer, innover, rechercher.
Le sommet de Rio n'a pas fini d'appeler des réponses neuves, et il convient en premier lieu de redéfinir la notion même de développement.
A ce titre, les projections des émissions de CO2 varient considérablement selon les hypothèses de la croissance mondiale, donc selon le niveau de développement.
Ainsi, pour un taux de croissance annuel moyen de 3,3 %, les émissions de CO2 à l'horizon 2050 pourraient tourner autour de trente milliards de tonnes de carbone et atteindre neuf milliards de tonnes selon une hypothèse de croissance annuelle de 1,3 %.
Il va sans dire que le coût annuel des dommages liés au changement climatique pèserait très lourdement sur les économies des pays en voie de développement, même si ces indications sont à relativiser dans la mesure où de nombreuses incertitudes scientifiques pèsent encore.
Dans ce contexte, la proposition de notre collègue et ami Paul Vergès s'inscrit pleinement dans le cadre du principe de précaution tel que le suggère dans son rapport notre collègue Serge Lepeltier : « L'effet de serre est un dossier qui préoccupe notre Haute Assemblée. »
Au premier rang des priorités pour lutter contre l'effet de serre, notre pays doit disposer de connaissances suffisantes. A cet égard, si la création d'un observatoire national peut constituer un élément privilégié pour la mise en réseau des informations relatives au réchauffement, l'effort de notre pays en matière de recherche scientifique ne doit pas fléchir. La moindre croissance, ces dernières années, du budget de la recherche civile et du développement doit donc être inversée.
L'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique aura également pour mission d'informer l'ensemble non seulement de nos concitoyens, mais également des élus et au-delà, sur l'avancement de la recherche scientifique en matière de réchauffement climatique et sur les mesures propres à prévenir ce phénomène.
La solidarité de cet observatoire en direction des petits pays, des Etats-îles les plus exposés est un aspect particulièrement positif de cette proposition.
La sensibilisation à ces questions passe par une plus grande information de nos concitoyens qui, seule, permettra une responsabilisation de chacun.
Plus qu'aujourd'hui peut-être, le débat, l'enjeu démocratique est incontournable autour de questions dont la portée fondamentale pour le devenir des espèces ne doit pas nous échapper.
La proposition de loi que nous examinons fait l'objet d'une attention unanime des membres de notre Haute Assemblée et permettra, si elle est adoptée, de donner une place neuve dans ce défi universel qu'est le réchauffement de la planète et ses conséquences.
Les territoires et départements d'outre-mer constituent des pôles avancés de l'observation des phénomènes climatiques ; ils peuvent également, du fait de leur proximité géographique avec les pays en voie de développement, constituer un instrument d'appréhension particulièrement adapté à de nouvelles formes de coopération internationales.
En adoptant ce texte, nous mesurons l'importance du problème et donc les tâches qui nous attendent dans les contours de ce dossier aux dimensions internationales.
Nous souhaitons, pour notre part, que cette initiative soit la première d'une série qui associe le Parlement à des questions d'une portée aussi fondamentale.
Nous prendrons part, toutes les fois que l'occasion nous en sera donnée, à ces débats qui, bien qu'éloignés de la stricte actualité politique, n'en constituent pas moins une des missions fondamentales du politique aujourd'hui.
Il va sans dire que notre groupe votera cette proposition de loi. (Applaudissements.)
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous apporter des éléments de réponse et formuler quelques remarques à la suite de vos interventions.
Je ne crois décidément pas qu'un discours d'autosatisfaction soit de mise à cette heure. La France a pu peut-être, par le passé, apparaître comme un bon élève. Mais il faut reconnaître qu'une certaine stagnation des émissions de gaz à effet de serre a pu aussi correspondre à des périodes de récession économique. La description d'une France bonne élève, d'une France exemplaire, à laquelle reviendrait le soin de diffuser de bonnes pratiques et de donner de bons conseils, n'est donc pas vraiment à la mesure de la réalité.
Nous sommes aujourd'hui confrontés à une explosion des émissions, dans le domaine des transports notamment, qui nécessite d'envisager, dans l'avenir, des mesures allant au-delà de ce qui a déjà été fait aux échelons tant national et communautaire qu'international.
Sur le plan national, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à apporter le plus grand soin à la cohérence des positions des uns et des autres dans les différentes enceintes où nous sommes amenés à nous exprimer. En effet, je me suis trouvée confrontée, au sein de cet hémicycle, à des membres de la Haute Assemblée qui plaidaient pour la poursuite à l'identique du programme autoroutier et d'un programme d'aménagement routier qui pourraient être déconnectés, à mes yeux, des efforts que nous déployons par ailleurs en matière d'effet de serre !
Vous souhaitez, par le programme national de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre, susciter une mobilisation générale et assurer la cohérence entre les mesures qui sont prises aux niveaux national, régional - dans le cadre des contrats de plan -, départemental et des collectivités locales.
Je voudrais assurer une articulation entre les mesures que nous prenons ici et celles que je défends, au nom de la France, au sein du conseil « environnement », par exemple, ou qui sont défendues par M. Jean-Claude Gayssot au sein du conseil « transports ».
Ce qui frappe, c'est que ces mesures touchent des champs - dans le domaine du transport notamment - qui n'ont pas de lien apparent avec l'effet de serre. Quand je plaide, sur le plan communautaire, pour la réduction des émissions par la modification des moteurs et des carburants, c'est limpide ; mais quand M. Jean-Claude Gayssot se bat, au niveau européen, pour harmoniser les temps de travail des chauffeurs routiers ou pour infléchir de façon significative les choix d'infrastructures en faveur du rail pour les transports à longue distance de marchandises, le lien avec l'effet de serre n'est pas aussi évident pour tout le monde.
Notre premier combat réside donc dans la mise en place d'un plan national de maîtrise des émissions qui soit à la mesure des besoins et qui, par un soin maniaque, associe l'ensemble des secteurs.
M. Poniatowski a plaidé d'une curieuse façon tout à l'heure en déclarant, en substance, que dans certains secteurs, on n'en fait pas assez, mais que c'est déjà trop. Vous vous êtes tour à tour étonné de l'absence de mesures fiscales nouvelles dans le domaine des transports, tout en espérant que l'on n'alourdisse pas la fiscalité des carburants.
M. Ladislas Poniatowski. C'est une question très difficile, madame la ministre, je le reconnais.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je vous le répète, monsieur Poniatowski, dans les domaines où nous sommes confrontés à des problèmes de compétitivité de nos entreprises, nous agissons évidemment en privilégiant la coordination des mesures qui doivent être prises au niveau communautaire. C'est ainsi que le Gouvernement français a choisi de faire de l'harmonisation de la fiscalité dans le domaine de l'énergie et de la taxation de l'énergie et du CO2 une des priorités de la présidence française. Je vous rappelle qu'il est prévu, dans le calendrier de la présidence, un temps permettant une réunion, soit parallèle, soit même conjointe, du conseil « ECOFIN » et du conseil « environnement », afin d'avancer dans ce domaine de la fiscalité de l'énergie.
Il en est de même s'agissant de la modification des comportements individuels. Vous nous dites -, et je suis tout à fait en accord avec vous -, qu'il est possible de modifier nos habitudes sans réduire notre confort. C'est bien l'enjeu du plan. Il ne s'agit pas de petites mesures qui auraient pour objet de dispenser la France de tenir ses engagements. Il s'agit de mesures qui touchent chacune et chacun d'entre nous dans ses habitudes, dans ses choix de consommation, dans ses comportements individuels. C'est l'ensemble de ces petites gouttes qui formeront la grande rivière qui nous est nécessaire pour satisfaire à nos engagements internationaux.
J'en arrive au programme national de lutte contre l'effet de serre, qui a été annoncé voilà quelques jours.
Bien sûr, il est évolutif. Il n'est pas le premier dont la France s'est dotée ; c'est pratiquement le quatrième ou le cinquième. A peu près tous les deux ans, nous sommes conduits à dresser un bilan des résultats obtenus par les mesures déjà décidées, à les compléter, voire à les modifier s'il se révèle que certaines de ces mesures sont de fausses bonnes idées, comme cela peut aussi arriver.
En tout cas, je défends, tant aux niveaux national et communautaire qu'au niveau international, l'idée que les pays industrialisés doivent réaliser l'essentiel de leurs efforts à travers des politiques et des mesures domestiques coordonnées.
M. Ladislas Poniatowski. Mais conjointement !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je pense, par exemple, à l'idée d'une taxe sur le kérosène. On me dit, au niveau communautaire, qu'une telle décision ne peut être prise qu'au niveau international. Pour ma part, je ne partage pas cette idée. Les avions qui atterrissent sur le continent européen doivent en repartir. Si nous mettons en place une taxe sur le kérosène coordonnée au niveau communautaire,...
M. Ladislas Poniatowski. Ce serait une bonne chose !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. ... je pense au contraire que cette mesure sera très efficace. Elle pourrait même être une des idées-forces que l'Union européenne défendrait au niveau international. Je n'ai donc pas l'intention de relâcher la pression sur l'idée que ce sont les politiques et les mesures coordonnées et/ou domestiques qui doivent constituer l'essentiel des efforts des pays industrialisés.
Viennent ensuite les mécanismes de Kyoto.
Vous aurez noté que je ne les qualifie jamais de mécanismes de flexibilité. En effet, ils ne me paraissent acceptables que dans la mesure où, précisément, ils ne sont pas flexibles. Ils ne doivent pas permettre aux Etats de s'exonérer de leurs responsabilités et de faire peser sur d'autres la responsabilité de limiter les émissions de gaz à effet de serre.
A cette heure, ces mécanismes sont au nombre de trois. Ils ne se limitent pas à la mise en place d'un marché de « droits à polluer », comme je l'entends parfois dire de façon hâtive.
En premier lieu, il s'agit du mécanisme de mise en oeuvre conjointe. Il s'adresse aux pays dits « de l'Annexe I », c'est-à-dire à ceux qui ont d'ores et déjà pris des engagements contraignants de réduction de leurs émissions. Ce mécanisme comporte un risque, à savoir l'échange, entre pays, d'émissions qui n'existent déjà plus, comme « l'air chaud ».
Les pays de l'ex-Europe de l'Est, confrontés à une récession économique de grande ampleur, ont déjà fermé ou fermeront nombre d'installations qui polluaient beaucoup et émettaient beaucoup de gaz à effet de serre.
On ne peut pas considérer, c'est vrai, que la coopération entre - je vais donner des exemples au hasard - la Finlande et la Russie, ou bien la France et la Pologne se traduirait par une dotation en équipements permettant de limiter les émissions du côté russe sans réduction réelle des émissions, les installations correspondantes ayant été fermées voilà déjà plusieurs années. Ce serait un marché de dupes.
En deuxième lieu, le mécanisme de développement propre concerne, cette fois, des systèmes de coopération entre des pays de l'Annexe I et des pays en voie de développement. Il comporte une difficulté : il doit vraiment correspondre à des projets additionnels au programme de coopération et de développement. Il ne faudrait pas que ce soit un prétexte pour vendre à ces pays des technologies à la place de programmes de développement préexistants.
En troisième lieu, il y a la mise en place d'un marché de permis d'émissions, avec tous les problèmes que vous avez évoqués les uns et les autres et que M. Lepeltier a très bien résumés dans son rapport. Quid de l'allocation initiale ?
M. Ladislas Poniatowski. C'est vrai.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il y a une vraie ambiguïté.
Défendons-nous, pour notre pays, des droits d'émissions aussi élevés que possible, ce que vous m'avez appelée à faire, monsieur Poniatowski ?
M. Ladislas Poniatowski. Non, je pense qu'il ne faut pas tricher.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Mais il faut savoir que cela reviendrait à s'allouer un droit maximal à polluer.
Défendons-nous, au contraire, l'idée de la fixation d'un droit d'émissions par être humain à l'échelle de l'humanité, avec le souci de s'engager dans une stratégie de convergence des émissions à un niveau qui nous paraît compatible avec les exigences du développement et avec celles d'une stabilisation du climat ?
Je considère que ce ne sont pas seulement des problèmes techniques. Ce sont d'abord des problèmes politiques. Il nous manque avant tout des lieux pour approfondir ces discussions qui sont d'ordre politique, éthique et social autant que technique.
M. Ladislas Poniatowski. La France, ce n'est pas ma crainte. Ma crainte, ce sont les Etats-Unis.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Ma crainte, c'est aussi la France, parce qu'elle n'échappe pas davantage à cette tentation !
Il est vrai que l'on voit aussi se dessiner, dans les pays développés en général, des tentations qu'il nous faut cadrer.
M. Ladislas Poniatowski. Tout à fait !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il existe une difficulté supplémentaire : alors que ce sont les Etats qui prennent des engagements internationaux, ce sont les entreprises qui pourraient être amenées à mettre en place un permis d'émissions,...
M. Ladislas Poniatowski. Absolument !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. ... d'où une vraie difficulté d'articulation.
J'en viens brièvement aux liens entre le nucléaire et l'effet de serre.
Heureusement, il existe, je crois, des alternatives. Le choix n'est plus, comme dans les années soixante-dix, entre le nucléaire et la bougie. Il n'est pas non plus, aujourd'hui, entre le nucléaire et l'effet de serre. On sous-estime les opportunités ouvertes par les progrès technologiques tout à fait considérables, par exemple dans le domaine de la cogénération. Le rendement des chaudières au gaz, qui permettent de produire à la fois de la chaleur et de l'électricité, est aujourd'hui tout à fait intéressant. Or je constate que les entreprises françaises sont bien plus capables d'en vendre à l'étranger que de les utiliser sur le territoire national ; mais le rendement atteint 60 % aujourd'hui.
Je constate également que la pile à combustible constitue une piste crédible à l'échelle de quelques années, tant pour la production d'électricité proprement dite dans le domaine industriel que pour la propulsion des véhicules.
Je note aussi que l'on ne peut pas faire l'impasse sur une réalité tragique, à savoir que la plupart des pays de la planète n'ont pas d'autres énergies à leur disposition que des énergies sales.
M. Ladislas Poniatowski. Le charbon.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Nous avons une grosse marge de manoeuvre dans la diffusion de techniques d'utilisation propre de ces énergies sales. Je pense notamment à la centrale thermique de Gardanne, à la chaudière à « lit fluidisé circulant », qui utilise du charbon qui n'est pas d'une qualité optimale, mais avec un procédé qui permet de réduire de façon tout à fait considérable les émissions.
Je ne veux pas laisser croire à des pays en voie de développement qui n'ont pas les moyens de nourrir leur population qu'ils pourront acheter des technologies ruineuses à nos pays développés, nucléaires ou autres. En revanche, je crois beaucoup à la diffusion massive des technologies qui permettent de réduire la casse dans des délais raisonnables. Il faut agir en ce sens de façon rapide.
M. Pierre Laffitte. Le terme « ruineux » est excessif !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. C'est ruineux pour eux, effectivement !
Monsieur Vergès, nous avons à développer, pour les départements et les territoires d'outre-mer, une stratégie de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre.
Je ne veux pas faire l'impasse sur le fait qu'à la Réunion, tout particulièrement, est utilisé, pour des raisons économiques, un carburant, fourni par des pays du Moyen-Orient, qui ne respecte pas les normes européennes.
Une mise à jour de notre programme national de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre devrait nous permettre d'avancer de façon positive pour le confort des habitants des départements d'outre-mer. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

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