Séance du 20 janvier 2000







M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Ma question s'adresse à M. lePremier ministre.
La fin de l'année 1999 aura été, pour la plupart des Français, une période difficile, voire tragique, car des femmes et des hommes ont péri lors de la tempête et des inondations.
C'est aussi l'arrivée d'une marée noire, qu'il ne faut pas avoir peur de qualifier, n'en déplaise à certains, de catastrophe écologique et qui a atteint toute la côte atlantique. Contrairement à la tempête, elle aurait pu et dû être évitée si la négligence des hommes n'était pas à l'origine de celle-ci.
Monsieur le Premier ministre, le rapport d'étape de l'enquête sur les causes du naufrage de l' Erika mentionne la responsabilité de l'armateur - certes -, des affréteurs successifs et de la société italienne chargée de vérifier l'état du navire.
Je ne vous poserai pas la question qui consiste à savoir, selon la rumeur qu'il vous appartiendra peut-être de faire taire, pourquoi le capitaine du pétrolier, qui avait décelé des anomalies sur son bateau et avait demandé à entrer dans le port de Saint-Nazaire, n'a pas été autorisé à y faire escale (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Je n'évoquerai pas non plus la rumeur selon laquelle une compagnie hollandaise spécialiste des pompages en surface n'a pas été sollicitée alors qu'elle proposait ses services.
Ma question porte sur les suites et les initiatives que vous comptez prendre, d'une part, pour aider sur tous les plans ces communes sinistrées une fois de plus sur la côte atlantique et, d'autre part, pour faire avancer le droit international afin qu'une véritable politique du transport maritime soit mise en oeuvre, comme cela a été le cas dans notre pays - et nous nous en félicitons - pour le transport routier des matières dangereuses et des hydrocarbures. Cela me permet d'ailleurs de dire aujourd'hui, avec une certaine fierté, que notre parc routier, dans ce domaine d'activité, est l'un des plus modernes d'Europe et que la formation des personnels y est la meilleure.
La responsabilité des acteurs de ce type de catastrophe maritime doit être recherchée à tous les niveaux d'intervention, y compris et surtout en direction du propriétaire de la marchandise.
Monsieur le Premier ministre, à quelle échéance pouvons-nous espérer la fin des marées noires et leur cortège de perte d'activité des professionnels de la mer et du tourisme, de côtes souillées, d'oiseaux mazoutés dans notre pays, même si de nombreux bénévoles venant de toute la France - la population de nos côtes, mais aussi des Savoyards, à qui je tiens à rendre hommage ici - sont toujours prompts à se rendre sur les lieux ?
Pensez-vous pouvoir peser rapidement sur tous les lobbies de la planète dans le domaine du transport maritime des hydrocarbures et des matières dangereuses et engager la responsabilité de l'ensemble des pétroliers qui, aujourd'hui, appliquent le régime du moins-disant pour réaliser du profit ? Au demeurant, contrairement à notre collègue M. Le Cam, ce qui nous gêne, nous, ce n'est pas le profit, mais ceux qui ne respectent pas les règles - c'est bien le problème du moment ! - pour obtenir ledit profit.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, s'agissant de la chronologie des événements que vous avez évoqués, je vous encourage à prendre connaissance - puisque le Gouvernement a décidé de les rendre publics immédiatement - des premiers éléments du rapport du bureau Enquête accidents : cela vous évitera de faire état de rumeurs et vous permettra de parler des faits.
Compte tenu des indications fournies par le directeur du port, je suis en mesure de vous dire que le bateau n'a pas du tout changé de cap vers Donges et qu'il se trouvait encore à plus d'une demi-journée de navigation du port lorsqu'il a sombré. Le capitaine du port a donc réagi en fonction des éléments qui étaient à sa disposition au moment où la question lui a été posée.
S'agissant de la responsabilité des différents acteurs du transport maritime des matières dangereuses ou polluantes, les dispositions juridiques internationales doivent être revues si nous voulons apporter un véritable remède à la situation que nous connaissons. En effet, les mécanismes actuels limitent les responsabilités. Or, je le répète, les pollueurs doivent être les payeurs.
Vous souhaitez, monsieur le sénateur, que pareille situation ne se reproduise plus jamais. C'est aussi le voeu du Gouvernement, bien entendu ! Nous savons que le risque zéro n'existe pas, surtout compte tenu de l'augmentation du trafic. Cette année, on a ainsi dénombré 300 000 mouvements dans la Manche et 50 000 sur le rail d'Ouessant ! Face à cette augmentation de trafic, nous devons donc prendre des mesures supplémentaires, car la réglementation, les contrôles et les normes ne sont pas suffisants.
Telle est la démarche du Gouvernement, et il n'attendra pas pour agir la présidence française de l'Union européenne.
Enfin - je n'avais pas prévu de vous répondre à cet égard, mais vous vous êtes fait l'écho des propos de M. Le Cam en ce qui concerne la recherche du profit maximum - permettez-moi de vous dire que la logique qui consiste à rechercher le profit maximum immédiat est une des raisons qui expliquent le dumping économique et social : la recherche du transport à bas prix est dangereuse non seulement pour les hommes, mais aussi pour l'environnement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)

RAPPORTS CHARPIN ET TEULADE
SUR L'AVENIR DES RETRAITES