Séance du 18 janvier 2000
M. le président. La parole est à M. Haenel, auteur de la question n° 668, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Hubert Haenel. L'expérimentation de la régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs - dont j'ai été l'un des initiateurs - avait pour objet de tester une nouvelle organisation du service public ferroviaire dans les régions et d'irriguer plus finement les territoires grâce à une approche intermodale globale.
Cette expérimentation est un succès. Elle a permis de démontrer que la décentralisation pouvait permettre de « coller » au terrain, si je puis dire, de s'adapter aux réalités géographiques, historiques, économiques et sociales.
L'annonce du projet de loi qui devrait conduire à une généralisation rapide de la régionalisation a suscité quelques craintes et interrogations, voire quelques suspicions, venant de tous bords.
Les conseils régionaux peuvent en effet interpréter l'accélération annoncée par l'Etat comme une manoeuvre pour leur forcer la main alors qu'ils ne disposent pas de toutes les données indispensables pour décider. L'Etat peut aussi voir dans l'attitude de l'Assemblée des régions de France la manifestation d'une sorte de frilosité de quelques régions, qui entraînent les autres dans leur sillage, et un prétexte pour ne pas aboutir à la généralisation de la régionalisation. Quant au personnel de la SNCF, il peut craindre qu'un feu orange ne soit soudainement mis au travers de la voie et ne cache quelques arrière-pensées. Enfin, les usagers peuvent craindre de faire les frais de ce contretemps et d'une éventuelle décélération.
L'attachement personnel que je porte à l'aboutissement de cette réforme me conduit, monsieur le ministre, à vous poser quelques questions.
Devant le Sénat, qui est très souvent en pointe sur ces sujets, pouvez-vous, non pas nous rassurer sur vos intentions, que je crois dépourvues de toute arrière-pensée...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est vrai !
M. Hubert Haenel. ... mais préciser les points suivants : où en est le projet gouvernemental ? Quand souhaitez-vous qu'il soit adopté ? Quel délai impartissez-vous aux partenaires pour conclure - 1er janvier 2001 ou 1er janvier 2002 ? Quelles garanties l'Etat donnera-t-il aux régions sur la pérennité de la contribution qu'il leur versera ? Dans quels délais la SNCF pourra-t-elle produire, donc opposer aux régions et à l'Etat, des comptes transparents et certifiés ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Votre question mériterait un débat bien plus approfondi que le cadre restreint de la séance de questions orales ne peut le permettre. Mais, rassurez-vous, ce débat aura lieu, et vite.
Sur le fond, l'expérimentation de la régionalisation des services ferroviaires régionaux de voyageurs est un succès - tout le monde le reconnaît - qui ne peut que nous réjouir et satisfaire l'un des pères de l'expérimentation que vous êtes.
Nous constatons en effet des gains de trafics plus importants dans les régions participant à l'expérimentation que dans les autres.
Les raisons de ce succès sont incontestablement à rechercher dans une meilleure définition des besoins à l'échelon régional, dans une plus grande proximité vis-à-vis de l'usager et dans un partenariat plus riche et constructif entre la SNCF et les régions.
Plus personne ne conteste aujourd'hui, je crois, l'intérêt de la généralisation à l'ensemble des régions du transfert de compétences en matière de service régional de voyageurs. Il convient maintenant d'en définir les modalités techniques, juridiques, financières et législatives ainsi que les délais ; ce sont les questions que vous posez.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que je m'emploie à ce que cela se fasse rapidement et dans des conditions optimales pour tous. Je vous précise que les mesures législatives nécessaires figureront dans le projet de loi solidarité et renouvellement urbains, qui sera présenté en conseil des ministres au début du mois de février et qui devrait être discuté à l'Assemblée nationale en mars et au Sénat en avril.
Vous le savez, il nous faut traiter plusieurs questions. Il s'agit tout d'abord de celle qui concerne le montant des concours financiers nécessaires. Cette décentralisation s'inscrit dans le cadre des principes généraux des lois de décentralisation, fondés sur un transfert de ressources correspondant à l'exercice de la compétence transférée, afin qu'il n'y ait pas de transfert de charges supplémentaire.
Ainsi, la compensation nécessaire tant au renouvellement du matériel qu'à l'apurement de l'éventuel déficit du compte des services ferroviaires régionaux à la date du transfert sera inscrite dans la loi de finances initiale de l'année de transfert. La commission consultative sur l'évaluation des charges résultant des transferts de compétences donnera, en cours d'exercice, un avis sur le montant des charges transférées, sur la base des comptes 2000, de manière à ajuster, s'il y a lieu, le montant de la compensation dans la loi de finances rectificative de la fin de l'exercice.
S'agissant, ensuite, de la date du transfert, la dynamique engagée et l'intérêt qu'elle suscite auprès des autres régions me conduisent à penser que le transfert doit pouvoir commencer dès le 1er janvier 2001.
Cela dit, certaines régions n'auront pas encore pu, à cette date, créer toutes les conditions objectives nécessaires à la mise en place du dispositif final. Aussi, je crois qu'il convient d'être pragmatique et d'envisager, pour elles, la possibilité de mettre en oeuvre la régionalisation au 1er janvier 2002, afin que tout se passe dans les meilleures conditions.
Vous évoquez la nécessité de dresser un bilan périodique de la réforme : il est prévu un rapport au Parlement cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi, sur la base d'une évaluation conjointe de l'Etat et des régions.
Je partage tout à fait votre volonté de voir traités au fond tous les sujets, et c'est d'ailleurs dans ce sens qu'ont commencé, depuis plusieurs mois, les travaux techniques entre les services des régions et ceux du ministère. Une concertation très importante a été engagée, qui a permis à tous les points de vue de s'exprimer. J'ai reçu moi-même les présidents de région pour en débattre, puis j'ai adressé des propositions à l'Assemblée des régions de France le 8 décembre dernier, afin de faciliter la poursuite de la concertation.
Dans cette perspective, les articles relatifs à la régionalisation des services régionaux de voyageurs ont été transmis au Conseil d'Etat.
Bien entendu, la transmission du projet de loi au Conseil d'Etat n'arrête pas la concertation. Elle se poursuivra avant et à l'occasion du débat parlementaire afin de rechercher le meilleur équilibre possible tout en respectant les attentes de chacun des partenaires.
M. Hubert Haenel. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel. Je remercie M. le ministre de sa réponse. Je constate une nouvelle fois que nous sommes souvent sur le même rail. (Sourires.)
J'attends avec impatience le débat que nous aurons sur ce sujet en avril prochain.
SITUATION DES DIFFUSEURS DE PRESSE
ET DES LIBRAIRES