Séance du 13 décembre 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Budgets annexes de la Légion d'honneur
et de l'ordre de la Libération
(p.
2
)
M. le président.
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances ;
Mmes Marie-Claude Beaudeau ; Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la
justice.
LÉGION D'HONNEUR (p.
3
)
Adoption des crédits figurant aux articles 42 et 43
ORDRE DE LA LIBÉRATION (p.
4
)
Adoption des crédits figurant aux articles 42 et 43
Justice
(p.
5
)
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Dinah
Derycke, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour les services
généraux ; MM. Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois,
pour l'administration pénitentiaire ; Patrice Gélard, rapporteur pour avis de
la commission des lois, pour la protection judiciaire de la jeunesse ; Robert
Badinter, Pierre Fauchon, Jacques Peyrat, Robert Bret, Guy Cabanel, Jean-Pierre
Bel, Jean-Jacques Hyest, Dominique Leclerc, Georges Othily.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.
Crédits des titres III à VI. - Adoption (p.
6
)
Article 71. - Adoption (p.
7
)
Article additionnel après l'article 71 (p.
8
)
Amendement n° II-9 de la commission des finances. - M. le rapporteur spécial, Mme le ministre. - Retrait.
Suspension et reprise de la séance (p. 9 )
3.
Demande d'autorisation de missions d'information
(p.
10
).
4.
Loi de finances pour 2000. -
Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
11
).
Articles de totalisation des crédits (p. 12 )
M. le président.
Article 37. - Adoption (p.
13
)
Article 38 et état B (p.
14
)
MM. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur ; Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, président de
la commission des finances.
Adoption de l'article et de l'état annexé.
Articles 39 et état C, 42, 43, 51 et état E, 52 et état F,
53 et état G, 54 et état H. - Adoption (p.
15
)
Articles non rattachés
(p.
16
)
Article 56 (p.
17
)
Amendement n° II-86 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 57 (p. 18 )
Amendements identiques n°s II-12 rectifié de M. Murat, II-16 de M. Arthuis et
II-77 de M. Trucy ; amendements identiques n°s II-44 de la commission, II-17 de
M. Arthuis et II-78 de M. Trucy. - MM. Gérard Braun, Claude Huriet, François
Trucy, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, le président de la
commission, Bernard Angels. - Retrait des amendements n°s II-12 rectifié,
II-16, II-77 et II-78 ; adoption des amendements n°s II-44 et II-17.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 57 (p. 19 )
Amendement n° II-64 de M. Oudin. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendements n°s II-43 de la commission, II-18, II-19 de M. Fréville et II-63 de
M. Oudin. - MM. le rapporteur général, Denis Badré, Gérard Braun, le secrétaire
d'Etat, Michel Moreigne, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Retrait des amendements
n°s II-63 et II-18 ; adoption de l'amendement n° II-43 insérant un article
additionnel, l'amendement n° II-19 devenant sans objet.
Article 58 (p. 20 )
Amendement n° II-45 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-46 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-47 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 58 (p. 21 )
Amendement n° II-65 rectifié de M. Oudin. - MM. Gérard Braun, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat, Jean Chérioux. - Adoption de l'amendement
insérant un article additionnel.
Amendement n° II-59 rectifié
bis
de M. Pelletier repris par la
commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, le président de
la commission, Jean Chérioux. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° II-66 rectifié de M. Oudin. - MM. Gérard Braun, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° II-48 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Adoption de l'amendement
insérant un article additionnel.
Amendement n° II-49 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° II-50 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° II-62 de Mme Bardou. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général,
le secrétaire d'Etat, Michel Moreigne. - Adoption de l'amendement insérant un
article additionnel.
Article 59. - Adoption. (p.
22
)
Article 60 (p.
23
)
Amendement n° II-51 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 60 (p. 24 )
Amendement n° II-76 rectifié de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean Chérioux. - Rejet.
Article 61. - Adoption (p.
25
)
Articles additionnels après l'article 61 (p.
26
)
Amendement n° II-75 de M. Ostermann. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean Chérioux, Denis Badré. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel avant l'article 61 bis (p. 27 )
Amendement n° II-79 rectifié de M. Revet. - MM. François Trucy, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 61 bis (p. 28 )
Amendements identiques n°s II-52 de la commission et II-81 de M. Deneux. - MM. le rapporteur général, Marcel Deneux, le secrétaire d'Etat. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.
Article 62. - Adoption (p.
29
)
Article additionnel après l'article 62 (p.
30
)
Amendement n° II-38 de M. Foucaud. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 63. - Adoption (p.
31
)
Article additionnel après l'article 63 (p.
32
)
Amendements n°s II-37 de M. Foucaud, II-53 de la commission et II-82 de M. Hérisson. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° II-82 ; rejet de l'amendement n° II-37 ; adoption de l'amendement n° II-53 insérant un article additionnel.
Article 63
bis. -
Adoption (p.
33
)
Article 63
ter
(p.
34
)
Amendement n° II-54 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
Article additionnel après l'article 63
ter
(p.
35
)
Amendement n° II-41 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Articles 63
quater
et 63
quinquies. -
Adoption (p.
36
)
Article 63
sexies
(p.
37
)
Amendement n° II-55 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 63
septies
. - Adoption (p.
38
)
Article 63
octies
(p.
39
)
Amendement n° II-56 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 63 nonies (p. 40 )
Amendement n° II-57 de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel avant l'article 63 decies (p. 41 )
Amendement n° II-40 rectifié de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 63 decies (p. 42 )
Amendement n° II-58 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 63 decies (p. 43 )
Amendement n° II-39 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Yann Gaillard. - Rejet.
Article additionnel avant l'article 63 undecies (p. 44 )
Amendement n° II-42 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 63
undecies
. - Adoption (p.
45
)
Articles additionnels après l'article 63
undecies
(p.
46
)
Amendement n° II-80 rectifié de M. Trucy repris par la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 63
duodecies
à 63
quaterdecies
. - Adoption (p.
47
)
Articles additionnels après l'article 63
quaterdecies
(p.
48
)
Amendement n° II-74 rectifié de M. Ostermann repris par la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Demande de seconde délibération (p. 49 )
MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur général.
La seconde délibération est ordonnée.
M. le président.
Renvoi de la suite de la discussion.
5.
Dépôt d'un avis
(p.
50
).
6.
Ordre du jour
(p.
51
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000 (n° 88, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 89 (1999-2000).]
Budgets annexes de la Légion d'honneur
et de l'ordre de la Libération
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les budgets
de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
Je suis heureux, au nom du Sénat, de saluer la présence, aux côtés de Mme le
ministre, du général Douin, grand chancelier de l'ordre national de la Légion
d'honneur, et du général Simon, chancelier de l'ordre de la Libération.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Pierre Demerliat,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
garde des sceaux, monsieur le grand chancelier, monsieur le chancelier, mes
chers collègues, en 2000, le montant des recettes et des dépenses du budget
annexe de la Légion d'honneur s'élèvera à 123,914 millions de francs, en
augmentation de 9,42 % après une hausse de 2,82 % en 1999.
Les recettes de l'ordre de la Légion d'honneur proviennent, pour l'essentiel,
de la subvention de l'Etat, versée par le budget de la justice, qui n'augmente
que de 0,26 % pour s'établir à 105,75 millions de francs. En 1999, la
progression était de 2,86 %.
Les ressources propres progressent, en 2000, de 5,16 %, pour atteindre 8,163
millions de francs. Elles comprennent trois éléments : les droits de
chancellerie, qui restent stables, les pensions et trousseaux des élèves des
maisons d'éducation, relevés par arrêté de 3,43 % pour atteindre 5,86 millions
de francs, et les produits accessoires, qui sont en augmentation de 32,77 %, du
fait de l'intégration des recettes du musée de la Légion d'honneur.
Je voudrais maintenant vous présenter les dépenses du budget annexe de l'ordre
de la Légion d'honneur.
Les dépenses de fonctionnement concernent pour 92 % le fonctionnement de
l'administration centrale de la grande chancellerie de la Légion d'honneur et
des maisons d'éducation, qui reçoivent les filles ou les petites-filles des
légionnaires de l'Ordre, ainsi que les filles des membres de l'ordre national
du Mérite. Elles s'élèvent à 98,976 millions de francs, leur augmentation de
1,17 % étant liée à l'application de l'accord salarial conclu dans la fonction
publique et à la création nette de trois emplois.
En effet, l'intégration du musée dans le budget annexe de la Légion d'honneur
pour 2000 aura pour conséquence la création de huit emplois en contrepartie de
cinq suppressions, ce qui portera l'effectif de 413 à 416 emplois, dont 101 à
la grande chancellerie et 315 dans les maisons d'éducation.
Les opérations en capital, avec 16,43 millions de francs, connaissent une
importante augmentation, même si 10,15 millions de francs concernent des
programmes déjà engagés. Sur les 6,28 millions de francs de mesures nouvelles,
4,4 millions de francs sont destinés à l'entretien des bâtiments.
Le budget annexe de la Légion d'honneur a bénéficié, au titre de la loi de
finances rectificative pour 1998, d'ouvertures nettes de 15 millions de francs
destinés au financement partiel de la restauration du cloître de la maison
d'éducation de Saint-Denis. Cette année, c'est en loi de finances initiale
qu'il est attribué 10 millions de francs pour la réalisation pluriannuelle de
ces travaux dont le coût total est estimé à 37 millions de francs.
En outre, une dotation de 1,6 million de francs pour les travaux à la grande
chancellerie permettra la poursuite de la réfection des toitures et des
menuiseries extérieures du palais de Salm.
Pour conclure l'examen du budget annexe de la Légion d'honneur, je souhaite
vous faire part de quelques observations.
Je me félicite de la reprise, dans les recettes, pour un montant de 10
millions de francs, d'une « provision pour risques et charges financières »,
afin de tenir compte des observations de la Cour des comptes. Je constate
toutefois que l'augmentation des dotations en capital résulte surtout de cet
ajustement de trésorerie.
Je relève avec satisfaction la persistance de l'effort en matière de travaux.
En effet, après la restauration des maisons d'éducation, il est indispensable
de préserver les collections du musée de la Légion d'honneur comme l'ensemble
architectural constitué par le palais de Salm et ses annexes.
J'approuve la dissolution prochaine de l'établissement public administratif
gérant le musée national de la Légion d'honneur, pour l'intégrer au budget
annexe, ce qui permettra l'utilisation de sa trésorerie pour réaliser les
travaux nécessités par l'état de vétusté du musée.
A cet égard, j'espère que l'ensemble des travaux prévus pourra être terminé
avant 2002, année du bicentenaire de l'Ordre.
J'apprécie la qualité de l'enseignement dispensé dans les maisons d'éducation,
attesté par l'excellence des résultats obtenus, notamment un troisième prix et
une mention régionale aux concours généraux.
Enfin, je m'inquiète de la question, soulevée par la Cour des comptes,
concernant la qualité d'ordonnateur principal dont ne disposerait pas le grand
chancelier de l'ordre de la Légion d'honneur pour son budget. Cette
interrogation a déjà été formulée par le rapporteur spécial de l'Assemblée
nationale, lors de l'examen de ces crédits, et je souhaite savoir, madame la
garde des sceaux, si la situation a été clarifiée depuis.
J'en viens à présent à l'examen des crédits relatifs au budget annexe de
l'ordre de la Libération.
La subvention du budget général, seule ressource du budget annexe, s'établit,
en 2000, à 4,96 millions de francs, soit une diminution de 1,1 %. Cette
réduction n'est qu'apparente, puisqu'elle résulte d'une mesure d'ajustement.
Cette subvention avait progressé de 21,9 % en 1999, pour permettre la reprise
des investissements pour des gros travaux devenus indispensables.
Les dépenses de fonctionnement diminuent de 1,32 %, pour s'établir à 4,11
millions de francs. Quant aux dépenses en capital, elles concerneront, pour un
montant de 850 000 francs, une deuxième tranche de crédits de paiement destinés
à la réfection de l'installation électrique de la chancellerie et du musée de
l'ordre de la Libération.
Comme en 1999, outre le chancelier, douze personnes seront employées par la
chancellerie.
Je conclurai en vous faisant part de deux observations.
Si le coût prévisionnel des travaux de la chancellerie s'élève à 2,63 millions
de francs en autorisations de programme, les crédits de paiement s'échelonnent
sur trois exercices. Leur réalisation, qui ne prendra que quelques mois, ne
pourra débuter avant la fin de l'an 2000 pour permettre leur règlement début
2001, lorsque la totalité des crédits aura été attribuée. Je regrette cette
conséquence, mais je me satisfais toutefois du maintien de l'effort dans le
projet de budget pour 2000.
Je me félicite surtout de l'adoption de la loi créant le Conseil national des
communes « Compagnons de la Libération », qui permettra de pérenniser la
mémoire et les traditions de l'ordre de la Libération, par l'institution d'un
établissement public à caractère administratif, lorsqu'il ne comptera plus le
nombre de compagnons nécessaire à son fonctionnement. En effet, au 4 août 1999,
si l'Ordre comptait 6 300 médaillés de la Résistance, seulement 161 compagnons
de la Libération étaient encore en vie. Depuis la semaine dernière, ils ne
sont, hélas ! plus que 157.
Cette organisation a été retenue pour préserver à l'Ordre personnalité morale
et autonomie financière. En l'état actuel de la réflexion, les crédits seraient
toujours rattachés au ministère de la justice, mais la question du maintien
d'un budget annexe reste en suspens. Quant au choix des communes, il repose sur
le souci de fonder l'avenir de l'Ordre sur les seuls cinq compagnons permanents
: Grenoble, Nantes, Paris, l'île de Sein et Vassieux-en-Vercors. En effet, sur
les dix-huit unités combattantes compagnons, certaines sont dissoutes et la
pérennité des autres n'est pas assurée.
J'apprécie le large consensus observé dans les deux chambres à l'occasion de
ce débat. Ainsi nous acquitterons-nous de notre devoir de mémoire à l'égard de
ceux qui, par leur volonté de résistance et leur courage, ont contribué à
sauver notre pays de l'obscurantisme et de la barbarie. A l'aube du troisième
millénaire, le message universel délivré par leur sacrifice continuera à être
transmis aux jeunes générations.
Ces observations étant faites, je vous propose, mes chers collègues, de suivre
votre commission des finances en adoptant à l'unanimité les budgets annexes de
l'ordre de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
(Applaudissements.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée le 2
novembre 1999, la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de
parole dont chaque groupe dispose pour cette discusion.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant
d'aborder l'examen des crédits de la Légion d'honneur et de l'ordre de la
Libération, je souhaiterais obtenir quelques précisions du Gouvernement sur une
anomalie juridique concernant l'ordonnateur du budget de la Légion
d'honneur.
Je rappelle que l'ordonnance du 10 août 1945 précise que « l'ordre sera doté
de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Son budget, dont le
chancelier est institué l'ordonnateur principal, sera un budget annexe à celui
du ministère de la justice ».
Est-il exact, madame la ministre, que des dispositions seraient prises faisant
du ministre de la justice l'ordonnateur principal et le grand chancelier
l'ordonnateur secondaire ?
Nous en sommes étonnés, car il s'agit d'une loi qui, à notre connaissance, n'a
pas été modifiée. Des textes nouveaux ont-ils été décidés, ne pouvant alors
prendre forme que d'une ordonnance ?
Nous n'avons pas connaissance de modifications intervenues pour la Légion
d'honneur et nous considérons toujours le chancelier de l'ordre de la Légion
d'honneur comme ordonnateur principal d'un budget annexe.
Confirmez-vous cette réalité, car ce que j'ai pu lire des débats à l'Assemblée
nationale n'est pas clair à ce sujet ?
L'institution n'est pas dépassée, puisqu'elle s'occupe des enfants de la
France s'étant illustrés à son service dans les domaines les plus divers,
qu'ils soient civils ou militaires. Il en est ainsi des actes de la République
qui, au fil du temps, s'ennoblissent ; son budget est à l'image de
l'institution, sans bouleversement majeur.
Deux modifications cependant sont à noter.
La première concerne le musée national de la Légion d'honneur. Sa gestion en
sera confiée au budget de la Légion d'honneur, et non à un établissement public
de gestion qui disparaît. Cette mesure assure une appartenance du musée à
l'Institution, mesure pérenne, justifiée mais entraînant cependant une dépense
de 205 730 francs.
La seconde mesure porte sur un ajustement de la trésorerie du budget annexe
aux besoins réels de l'ordre. Les ressources du budget annexe augmenteront de
9,42 %. Une analyse attentive démontre que le ministère de la justice
n'augmentera la subvention que de 0,26 %, alors que les ressources propres
croîtront de 134 %. Le fonds de roulement a d'ailleurs été réduit comme le
souhaitait la Cour des comptes dans ses observations du début de l'année.
Nous voudrions noter un aspect trompeur concernant la création de postes.
Huit postes sont créés, mais du fait de l'intégration du musée national de la
Légion d'honneur au budget annexe. Il ne faut pas oublier que cinq postes
seront supprimés, un à la grande chancellerie et quatre dans les maisons
d'éducation.
Parmi les grosses dépenses, 10 millions de francs supplémentaires seront
investis pour le cloître de la Maison de Saint-Denis. La fin de la restauration
du cloître était attendue. Elle est justifiée. Rappelons que l'ensemble de
cette dépense s'élève à 37 millions de francs et a été échelonnée sur plusieurs
années.
Je voudrais faire trois remarques complémentaires après avoir précisé que nous
voterons les crédits de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
Le Sénat se doit de féliciter les 897 élèves pour leurs brillants résultats
aux examens. Le taux de réussite atteint 97 % pour le brevet des collèges et 88
% pour le BTS.
Tous les élèves de khâgne et d'hypokhâgne ont au moins obtenu l'équivalence
correspondant à leur niveau universitaire, DEUG première ou seconde année.
Ma deuxième remarque porte sur une augmentation de tous les effectifs et
promotions des deux ordres nationaux de la Légion d'honneur et des médaillés
militaires avec une progression de 3,7 %. En 1999, les effectifs de la Légion
d'honneur se montaient à 114 042.
Ne faudrait-il pas se montrer un peu plus généreux pour la recherche des
mérites ? Ne faudrait-il pas également féminiser les promotions ?
La dignité de grand-croix de la Légion d'honneur n'a été attribuée qu'à deux
femmes, Mme Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Germaine Tillon. En 1999, 20 % de
femmes ont été promues dans les promotions civiles.
Enfin - et il s'agira plutôt d'une proposition - ne conviendrait-il pas
d'attribuer la Légion d'honneur à tout titulaire du titre de combattant
volontaire de la Résistance ? Les plus jeunes ont aujourd'hui soixante-quinze
ans. Pour les anciens combattants de 1914-1918, la décision a été prise un peu
tard pour nombre d'entre eux qui ont attendu en vain cette distinction.
N'attendons pas pour prendre une décision de reconnaissance des combattants
volontaires de la résistance qu'ils ne soient plus que quelques survivants. Le
devoir de mémoire, c'est aussi le devoir de reconnaissance.
(M. Jean-Pierre
Bel applaudit.)
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le grand chancellier de l'ordre
national de la Légion d'honneur, monsieur le chancellier de l'ordre de la
libération, le budget annexe de la Légion d'honneur atteindra, en 2000, 123,9
millions de francs, soit une augmentation des crédits de 9,4 % par rapport à la
dotation de l'exercice précédent.
La subvention budgétaire s'élèvera à 105 millions de francs en 2000 comme en
1999. Les recettes propres, d'un montant de 8,16 millions de francs sont en
augmentation de 5,16 %.
Les crédits de fonctionnement, qui s'élèvent à 107,5 millions de francs, soit
une augmentation de 1 % par rapport à 1999, assurent le paiement des
traitements des membres de la Légion d'honneur et des médaillés militaires, le
fonctionnement des services ainsi que l'action sociale menés par la grande
chancellerie. Dans ce total, les traitements des membres du premier ordre
national et des médaillés militaires s'élèvent à 8,16 millions de francs.
Les nominations et promotions dans la Légion d'honneur et l'ordre national du
Mérite, qui constituent la raison d'être de la grande chancellerie, ont
concerné, en 1998, 10 600 citoyens français, hommes et femmes, civils et
militaires ; 3 600 médailles militaires ont été concédées pendant la même
période.
Les effectifs globaux des décorés vivants sont connus avec précision : c'est
ainsi qu'au 30 septembre dernier la Légion d'honneur comptait 115 765 membres
dans ses rangs.
Le premier ordre national s'est ouvert davantage, en cette période de paix que
connaît la France, aux civils de toutes catégories et aussi aux femmes qui
représentent désormais plus de 20 % des promotions de l'ensemble des
ministères.
Il faut également signaler que le musée national de la Légion d'honneur,
établissement public à caractère administratif, est supprimé à compter du 1er
janvier 2000 et intégré dans le budget annexe de la Légion d'honneur ; cette
opération, réalisée à coût nul, nécessite la transformation de quatre emplois à
la grande chancellerie et aux maisons d'éducation.
Les dépenses en capital prévues en 2000 représentent 16,44 millions de francs
en autorisations de programme et en crédits de paiement.
Le financement partiel des travaux de restauration du cloître de l'abbaye de
Saint-Denis, dont le coût est estimé à 37 millions de francs, sera assuré en
loi de finances initiale pour 2000 par une dotation budgétaire de 10 millions
de francs.
Dans ses deux maisons d'éducation, la grande chancellerie de la Légion
d'honneur a pour mission d'assurer l'éducation de près de 1 000 élèves, filles
et petites-filles des membres français de l'ordre.
Comme les années précédentes, les résultats obtenus aux examens à la fin de
l'année scolaire 1998-1999 par les élèves de maisons d'éducation ont été
excellents : 98 % d'entre elles ont obtenu le brevet des collèges, alors que le
taux de réussite national est de 76,20 % ; 91 % ont réussi aux épreuves du
baccalauréat, taux, là encore, plus élevé que le taux de réussite national qui
est de 78,4 % ; 88 % ont obtenu le BTS, taux beaucoup plus élevé que le taux de
réussite national qui est de 58,5 %.
Ces résultats, fondés non pas sur la sélection des meilleurs mais sur la
qualité de l'éducation et de l'enseignement dispensés, sont le meilleur gage de
la pérennité de ces institutions.
S'agissant de la possibilité de conférer la qualité d'ordonnateur principal au
grand chancelier, point évoqué par M. le rapporteur spécial et par Mme
Beaudeau, je peux vous indiquer que mon collègue du budget et moi-même
examinerons cette proposition pour savoir quelle suite lui donner dans le cadre
de la préparation de la loi de finances pour 2001. Pour ma part, je n'y vois
aucun inconvénient. Ce serait le même statut que celui qui a été donné au
Conseil d'Etat et qui me paraît présenter toute garantie.
Je vous demande donc de bien vouloir voter ce projet de budget annexe de la
Légion d'honneur qui permettra à l'ordre d'assumer ses missions et de s'adapter
à l'évolution de notre société à l'approche du bicentenaire de la Légion
d'honneur que nous célébrerons en 2002.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, avant
le début de la discussion sur le budget de la justice, vous prier de bien
vouloir m'excuser car je devrai quitter la séance vers dix heures pour
accueillir le Président de la République à la Sorbonne à l'occasion des
manifestations du bicentenaire du Conseil d'Etat. J'espère être de retour parmi
vous assez vite, en tout cas pour participer à la fin du débat. Mon collègue
François Huwart, que je remercie de sa disponibilité, assurera la présence du
Gouvernement jusqu'à mon retour.
(Applaudissements.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant les budgets
annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération et figurant aux
articles 42 et 43.
LÉGION D'HONNEUR
Services votés
M. le président.
« Crédits : 107 285 110 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 42.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 16 437 000 francs ;
« II. - Crédits : 16 628 723 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 43.
(Ces crédits sont adoptés.)
ORDRE DE LA LIBÉRATION
Services votés
M. le président.
« Crédits : 5 043 096 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 42.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 0 franc ;
« II. - Crédits de paiement :
moins
83 498 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 43.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé les dispositions du projet de loi de finances concernant les
budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
Justice
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant le ministère
de la justice.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai décidé de
présenter cette année le projet de budget de la justice d'une manière un peu
différente.
Le rapport qui vous a été distribué contient toutes les indications chiffrées.
Je n'y reviendrai donc pas. Je tiens seulement à rappeler que ce projet de
budget se caractérise par la poursuite de l'effort entrepris en faveur de la
justice depuis le vote de la loi de programme sur la justice de 1995 et
intensifié par le gouvernement actuel.
Ainsi, les crédits de la justice pour 2000 progressent de 3,9 %, atteignant
27,29 milliards de francs. Cette hausse intervient après une augmentation de
5,6 % en 1999 et de 4 % en 1998. La loi de programme visait en effet à
accroître les moyens des juridictions de 8,1 milliards de francs sur cinq ans.
Son application a été prolongée jusqu'en 2000.
De même, les effectifs seront considérablement renforcés en 2000, puisque 1
237 emplois seront créés, contre 939 en 1999 et 762 en 1998. Je rappelle que la
loi de programme votée en 1995 prévoyait 5 760 créations d'emplois
budgétaires.
J'en viens donc immédiatement à mes principales observations.
Je constate tout d'abord - ce sera ma première observation - que l'effort
budgétaire réel fourni en faveur de la justice ne se traduit pas encore - mais
il y faut bien sûr du temps - par une amélioration notable, pour le
justiciable, du fonctionnement de la justice.
Ainsi, le stock d'affaires en cours auprès de la Cour de cassation, des cours
d'appel, des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance s'est
encore accru en 1998, tandis que la durée moyenne des procédures s'est encore
allongée.
Les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel sont
également confrontés à une augmentation inquiétante de leurs stocks d'affaires.
Ainsi, à Paris, celui-ci était de 50 575 affaires en 1998, pour 16 561 affaires
réglées. Quant au délai moyen de jugement dans les cours administratives
d'appel, il est passé d'un an en 1993 à près de trois ans en 1998.
Certes, les juridictions doivent faire face à un flux toujours croissant
d'affaires nouvelles, tandis qu'une partie non négligeable des emplois créés ne
sont réellement pourvus qu'avec un décalage de plusieurs années, en raison des
impératifs de recrutement et de formation.
Pour autant, la justice sera jugée sur sa capacité, le moment venu,
c'est-à-dire au fur et à mesure des mois et des années, à tirer le meilleur
parti des moyens financiers et humains qui sont mis à sa disposition pour
améliorer la qualité du service public de la justice.
Ma deuxième observation concernera le nombre de postes vacants - j'ai déjà
évoqué cette question l'année dernière, j'y reviens cette année - et la
difficulté d'obtenir un chiffre fiable à cet égard auprès de la
chancellerie.
En 1997, l'Union syndicale des magistrats avait envoyé à toutes les
juridictions un questionnaire relatif au nombre de postes officiellement
vacants et à celui des postes vacants de fait. Cette enquête avait été
éclairante : alors que la chancellerie avançait un taux de 3 % d'emplois
vacants - soit 195 postes budgétaires de magistrat sur un total de 6 287 - les
réponses au questionnaire conduisaient à évaluer ledit taux à 7,7 %, soit à 482
postes vacants.
Aujourd'hui, malheureusement, cette ambiguïté subsiste. Curieusement, lorsque
je me rends dans les juridictions, ce qui m'arrive fréquemment, la question des
vacances de postes est toujours soulevée et constitue l'un des principaux
griefs des magistrats. La chancellerie, au contraire, assure que la gestion des
effectifs a été considérablement améliorée et que le nombre des vacances
d'emplois aurait atteint un niveau incompressible - 0,17 % pour 1999 - ce qui
correspondrait, d'après les calculs de la chancellerie, à onze emplois vacants
! Qui croire ?
Je vais donc devoir, à moins que vous ne le fassiez vous-même, madame le garde
des sceaux, adresser à tous les chefs de cour, au titre des pouvoirs de
contrôle sur place et sur pièces des rapporteurs spéciaux, un questionnaire
pour tenter d'évaluer le nombre exact de vacances, tant pour les magistrats que
pour les fonctionnaires des greffes des juridictions de l'ordre judiciaire. Je
trouve regrettable de devoir revenir sur ce point : quel est le bon chiffre ?
Finalement, on n'en sait rien !
Ma troisième observation portera sur la nécessité de renforcer les crédits
consacrés à l'entretien des juridictions et des services des établissements
pénitentiaires.
Les crédits de fonctionnement mis à disposition des juridictions et des
établissements pénitentiaires ne permettent pas, en effet, d'assurer
l'entretien courant de ces bâtiments. Ainsi, faute de moyens suffisants, les
travaux de maintenance, de modernisation du parc et d'adaptation aux normes de
sécurité ne sont pas réalisés, ce qui oblige à effectuer, de manière beaucoup
trop fréquente, de gros travaux de réparation, voire de reconstruction,
financés sur les crédits du titre V.
A ce propos, plusieurs de mes collègues de la commission des finances ont
soulevé la question de la sécurité dans les palais de justice et les
établissements pénitentiaires. Quelle est la commission de sécurité compétente
? Quelles sont notamment les responsabilités respectives des chefs de
juridiction ou des directeurs d'établissement pénitentiaire, de l'autorité
préfectorale et du maire ? Le Gouvernement pourrait-il donner au Sénat toutes
les indications utiles sur ce point ?
Il est urgent que le ministère de la justice obtienne les crédits nécessaires
à l'entretien de son parc immobilier. A défaut, cette administration, qui est
déjà parfois en infraction avec les règles élémentaires de sécurité, risque
d'engager un jour lourdement sa responsabilité devant l'opinion publique.
Ma quatrième observation visera la nécessité d'adopter une nouvelle loi de
programme pour permettre d'achever la rénovation des juridictions et des
établissements pénitentiaires.
A ce titre, la loi de programme relative à la justice avait prévu une
enveloppe de 8,1 milliards de francs en autorisations de programme, dont 4,5
milliards de francs pour les services judiciaires et 3 milliards de francs pour
les services pénitentiaires. Rappelons que ces crédits ont permis de lancer un
programme de réhabilitation du parc immobilier de la justice. Pour autant, les
besoins restent encore énormes, et de nombreux bâtiments demeurent vétustes,
inadaptés à l'accueil du public, voire dangereux. Un certain nombre de mes
collègues de la commission des finances l'ont souligné avec force lorsque nous
avons examiné les crédits de la justice.
En outre, faute de crédits suffisants pour effectuer en même temps les travaux
d'équipement concernant les services judiciaires et ceux qui intéressent les
services pénitentiaires, la réalisation de certaines opérations a été différée.
Il est à craindre que ce retard ne sera pas comblé. Pourriez-vous indiquer au
Sénat, madame la ministre, les raisons précises de cette situation, qui a
d'ailleurs conduit - appelons un chat un chat - à remettre parfois en cause le
vote de certains projets de budget ?
Pour remédier à cet état de fait, il me paraît nécessaire d'adopter une
nouvelle loi de programme pour la justice qui permette d'achever le programme
de rénovation du parc immobilier entrepris en 1995. Je sais, madame le garde
des sceaux, que vous y êtes hostile, mais je persiste à penser, et la plupart
de mes collègues avec moi, que cette démarche donnerait plus de visibilité et
de lisibilité aux efforts budgétaires, qu'il faut souligner, consentis en
faveur de la justice, au moins pour ce qui concerne l'immobilier.
J'en arrive à ma cinquième observation, qui tendra à mettre en exergue
l'utilité des travaux de la Haute Assemblée et des rapports qu'elle publie.
En effet, je constate avec plaisir que le garde des sceaux tient parfois
compte, sans le dire, des observations contenues dans les rapports du Sénat,
ceux de la commission des finances mais aussi ceux de nos collègues de la
commission des lois.
Ainsi, mes remarques sur le développement incontrôlé des frais de justice -
j'y reviendrai tout à l'heure - semblent avoir été entendues, puisque de
nombreuses mesures ont été prises pour limiter l'augmentation de ceux-ci.
Par ailleurs, j'avais insisté l'année dernière sur la nécessité de mettre à la
disposition du tribunal de grande instance de Paris, par le biais de la
construction d'un nouveau palais de justice, des locaux lui permettant de
remplir sa mission correctement. Or, il semblerait qu'un arbitrage dans ce sens
soit en passe d'être rendu.
S'il arrive parfois que le Sénat soit entendu, il arrive aussi trop souvent
que les questions posées dans l'optique de l'exercice des prérogatives des
pouvoirs du rapporteur spécial ne rencontrent que peu d'écho dans certains
services, et que le dialogue, qui pourrait être fructueux avec un
parlementaire, fût-il issu du Sénat, relève davantage du dialogue de sourds ou
de la langue de bois que de l'éclairage institutionnel prévu dans le cadre
constitutionnel.
Cette année, par exemple, M. Jean-Louis Nadal, inspecteur général des services
judiciaires, s'est montré très coopératif, mais j'ai renoncé depuis deux ans à
perdre du temps avec d'autres services et directions, pour lesquels le contrôle
parlementaire représente une formalité sans grand intérêt. Je ne peux en dire
autant, bien entendu, des échanges le plus souvent constructifs que j'ai pu
entretenir avec certains membres du cabinet du garde des sceaux. Cela étant,
l'administration française, particulièrement celle de la justice, n'a pas
encore assimilé les règles élémentaires qui régissent ses relations codifiées
avec le Parlement.
En effet, depuis 1986, date de mon entrée au Sénat, j'ai pu constater, après
avoir présidé trois commissions d'enquête, rapporté cinq projets de budget de
la justice et mené plusieurs contrôles relatifs à des questions de fond, que
nous sommes très loin de la lettre et de l'esprit des textes. Contrôle,
évaluation, remise en cause sont trop souvent étrangers à la culture du
ministère de la justice, et lorsque le Parlement révèle certains
dysfonctionnements administratifs, comme ce fut le cas récemment pour des
services participant à la sécurité, c'est le diable qui est lâché !
Le président de la commission des finances, notre collègue Alain Lambert, a
émis le voeu que le rapporteur spécial du projet de budget de la justice dresse
le bilan, au cours de l'année 2000, de toutes les suites données ou non aux
observations budgétaires ou aux propositions des commissions d'enquête et de
contrôle. Ce sera peut-être l'occasion de vérifier la pertinence de tout ce
que, trop sommairement, je me suis contenté voilà quelques instants de suggérer
avec, il est vrai, parfois quelque lassitude !
Ma dernière observation concernera le renforcement de l'inspection générale
des services judiciaires, qui me paraît devoir être l'une des priorités du
ministère de la justice.
Alors que, voilà douze ans, ce service ne comprenait que trois magistrats, son
effectif s'élèvera, au 1er janvier 2000, à vingt-deux personnes, reconnues par
le monde judiciaire pour leurs compétences et leur connaissance approfondie des
services du ministère de la justice.
Ce renforcement apparaît très opportun. En effet, depuis quelques années, le
ministère de la justice bénéficie d'une augmentation importante des crédits mis
à sa disposition. En contrepartie, il me paraît nécessaire de vérifier que
l'argent public est dépensé de la manière la plus efficace possible.
En outre, l'adoption de la réforme de l'organisation du parquet devrait
conduire à accentuer l'indépendance des magistrats. Pour autant, ceux-ci ne
doivent pas échapper à tout contrôle, or leur responsabilité pourra être
engagée à partir des informations transmises par l'inspection générale des
services judiciaires. C'est la raison pour laquelle il me paraît important de
poursuivre l'effort financier et humain que vous avez entrepris en faveur de
l'inspection générale des services judiciaires, afin que celle-ci puisse jouer
un rôle équivalent à celui d'autres inspections, comme l'inspection des
finances ou encore l'inspection générale des affaires sociales, pour ne citer
que ces deux exemples.
A cet égard, je tiens à vous soumettre une proposition. Au cours de l'année
prochaine, je souhaiterais, en tant que rapporteur spécial des crédits de la
justice, être associé, autant que faire se peut, à une mission de contrôle du
fonctionnement des juridictions menée par l'inspection générale des services
judiciaires dans le ressort d'une cour d'appel. En effet, je souhaiterais
conduire une mission d'information sur la gestion d'une cour d'appel et des
juridictions de son ressort, or pouvoir coopérer avec les services de
l'inspection me paraît très utile, dans la mesure où nos approches sont
complémentaires.
Au terme de cette analyse, je tiens à rappeler que, eu égard à l'évolution des
crédits de la justice, qui est très comparable à celle qui avait été observée
l'année dernière, la commission des finances a proposé, à l'unanimité des
présents, d'adopter le projet de budget de la justice pour 2000. Toutefois,
l'analyse de la commission des finances est purement financière, et elle n'a
pas pris position sur la politique menée par le garde des sceaux. Cet examen
plus qualitatif relève de la commission des lois qui, par ses avis, dresse un
bilan de la politique judiciaire menée par Mme la ministre. Mes collègues
rapporteurs pour avis de la commission des lois interviendront donc sur ce
point.
En conséquence, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, je
vous propose l'adoption des crédits du ministère de la justice. Je pourrais me
contenter, en guise de conclusion, de cette formule et m'en tenir à des
chiffres, mais vous auriez l'impression que le compte n'y est pas. Nous aurions
parlé pour le
Journal officiel
et constaté que les crédits de la justice
sont en amélioration, sans que le coeur y soit.
J'ai d'ailleurs été tenté, ces jours derniers, de m'en remettre purement et
simplement à mon rapport écrit. En effet, à quoi bon ? A quoi sert cette
liturgie, dans le contexte actuel et la polémique récurrente ?
Il y aura bientôt dix ans que, avec Jean Arthuis et une vingtaine de nos
collègues, nous avons tiré la sonnette d'alarme : justice sinistrée, démocratie
en danger. Aujourd'hui nous pourrions, en établissant le bilan de dix années,
arriver à la même conclusion, pour d'autres raisons. Certes, le budget de la
justice a progressé. Il y a eu la loi de programme « Balladur-Méhaignerie »,
les efforts notables de l'actuel gouvernement, que l'on mettra plus tard au
crédit du tandem « Jospin-Guigou »
(Sourires),
mais ces bouffées d'air n'ont pas suffi à apaiser le débat.
La sérénité n'est pas revenue.
La paupérisation de la justice, la banalisation de ses fonctions, les
hésitations et les polémiques sur sa place dans les institutions et dans la
société ont considérablement brouillé la perception qu'en ont l'opinion
publique, les élus, les auxiliaires de justice, voire les magistrats
eux-mêmes.
Nous payons cher, la démocratie paie cher l'état dans lequel nous avons laissé
se dégrader la justice sur le plan tant budgétaire qu'institutionnel ; et à
ceux qui se plaignent aujourd'hui de la justice, nous pouvons répondre que nous
avons les juges et la justice que nous méritons !
Le nouveau Premier président de la cour d'appel de Paris, M. Jean-Marie
Coulon, disait, à l'occasion de son installation, lundi dernier, que les
magistrats - au moins certains d'entre eux - étaient gagnés par la mélancolie.
Voilà qui est dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui, car, souvent, un tel
état d'âme précède la dépression ou la révolte.
Les temps ne sont-ils pas venus où des sages - il y en a - dans l'exécutif, au
Parlement, dans l'institution judiciaire ou dans la presse s'inquiètent de
l'avenir du combat engagé ? Les débats actuels, l'attitude de tel ou tel, ou de
telle ou telle corporation, mettent en danger la démocratie et risquent de
bouleverser l'ordre institutionnel.
M. Pierre Fauchon.
Très juste !
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Alors, que faut-il faire ? Ou faut-il ne rien faire ?
Est-il encore temps de convoquer des états généraux de la justice précédant un
grand référendum pour que le peuple, au nom duquel nous siégeons, nous
légiférons et nous contrôlons, au nom duquel les magistrats rendent la justice,
tranche et fasse cesser ce combat entre juges et politiques qui ne peut
conduire qu'à une extermination réciproque ?
(Applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme Derycke, rapporteur pour avis.
Mme Dinah Derycke,
rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale,
pour les services généraux.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire
d'Etat, mes chers collègues, lors du quarantième anniversaire de l'Ecole
nationale de la magistrature, le 1er octobre 1999, à Bordeaux, le Président de
la République affirmait ceci : « Notre appareil judiciaire doit sortir de la
misère et de la vétusté qui ont été trop longtemps les siennes. » Ce constat
est unanimement partagé tant il est vrai que notre justice a toujours été le
parent pauvre de l'Etat.
Alors même qu'elle constitue une mission régalienne, que son bon
fonctionnement est une condition essentielle à l'exercice de notre démocratie
et que le besoin de justice est aujourd'hui une exigence forte de nos
concitoyens, la part des crédits de la justice dans le budget de l'Etat, même
si elle progresse d'année en année, reste ridiculement faible.
Rappelons les chiffres : ces crédits ne représentaient que 1,55 % du budget
général de l'Etat en 1997. Ils en représenteront 1,62 % en l'an 2000. Cette
progression a d'ailleurs été soulignée par le Chef de l'Etat qui, toujours
devant l'Ecole nationale de la magistrature, déclarait que « des efforts réels
ont été faits par le Gouvernement, qu'il s'agisse des montants des crédits, des
créations d'emploi ou des recrutements exceptionnels de magistrats ». Il
ajoutait que ces efforts devaient être poursuivis.
Le budget qui nous est présenté par Mme la garde des sceaux répond à cette
exigence : avec une augmentation de 3,91 %, soit une progression trois fois
supérieure à la moyenne de l'ensemble des budgets civils de l'Etat, le
Gouvernement persévère dans sa volonté de placer la justice au rang de ses
priorités.
Un autre chiffre significatif de cet effort concerne les recrutements, avec la
création de 1 237 emplois, chiffre le plus important de tous les ministères.
Ce budget en augmentation permet donc d'achever l'exécution de la loi de
programme relative à la justice du 6 janvier 1995 pour les services judiciaires
et les juridictions administratives, les objectifs fixés par cette loi étant
réalisés voire dépassés en ce qui concerne tant les créations d'emplois
budgétaires que les équipements.
Conformément à l'engagement pris par Mme la garde des sceaux, ce budget permet
également la mise en oeuvre des réformes en cours ou à venir, qu'il s'agisse de
la création de juges de la détention provisoire, de la mixité des formations de
jugement au sein des tribunaux de commerce ou des mesures nouvelles résultant
de réformes législatives déjà votées ou en cours d'examen, telles la loi du 18
décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des
conflits, celle du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale
ou le projet de loi relatif à la présomption d'innoncence.
La commission des lois regrette toutefois que, près d'un an après le vote
définitif de la loi du 18 décembre 1998, aucun décret d'application n'ait été
publié.
La commission des lois a également pris acte des actions qualitatives
entreprises avec les contrats de juridiction, les contrats de procédure et
l'amélioration de l'outil informatique, afin de réduire les coûts, d'améliorer
les délais de jugement et de stabiliser les stocks d'affaires en cours.
A ce sujet, notre collègue Robert Badinter a souligné que la pratique des
contrats de procédure, expérimentée entre 1983 et 1985, avait alors donné des
résultats très positifs.
Un budget en augmentation constante depuis trois ans, des réformes dont le
financement est prévu voire anticipé, constituent des motifs de
satisfaction.
Toutefois, la commission des lois a souligné plusieurs raisons d'inquiétude
tenant aux délais toujours excessifs devant les juridictions civiles,
administratives et prud'homales, à l'accroissement des stocks des affaires en
cours, au taux toujours élevé des classements sans suite en matière pénale et à
un engorgement préoccupant des juridictions administratives.
Devant cette situation, plusieurs membres de la commission des lois ont estimé
que, compte tenu des besoins importants liés à la mise en oeuvre des réformes,
les créations d'emploi, en particulier de magistrats, seraient insuffisantes
pour améliorer le fonctionnement de la justice au quotidien. Ils ont ainsi fait
valoir que seuls 34 postes de magistrats sur les 212 postes créés seraient
affectés au renforcement des moyens ordinaires des juridictions.
Comme l'année dernière, ils ont également regretté la faiblesse des
recrutements de magistrats à titre temporaire et de conseillers de cour d'appel
en service extraordinaire.
Par ailleurs, ils se sont interrogés sur le fonctionnement, l'année prochaine,
de la justice commerciale, confrontée à de nombreuses démissions de juges
consulaires suscitées par l'annonce de la réforme des tribunaux de commerce.
A ce sujet, la commission des lois a pris acte de la révision de la carte
judiciaire des tribunaux de commerce annoncée l'an dernier par Mme la garde des
sceaux, mais elle souhaite attirer l'attention de cette dernière sur l'urgence
de la réforme de la carte judiciaire pour l'ensemble des juridictions.
Enfin, la commission des lois regrette la baisse importante des crédits
d'équipement et le retard dans la consommation des crédits d'investissement,
tout en se félicitant de la décision de construire un nouveau palais de justice
à Paris.
En conclusion, la commission des lois a émis un avis partagé sur les crédits
du ministère de la justice consacrés aux services généraux. L'augmentation
incontestable des crédits n'a pas suffi à emporter l'adhésion de toute la
commission des lois, qui s'en est remise à la sagesse du Sénat.
A titre personnel, prenant en considération l'effort continu depuis trois ans
à l'égard du budget de la justice, le financement effectif des réformes
réalisées ou engagées, le commencement de la révision de la carte judiciaire et
la méthode de concertation adoptée pour cette révision, ainsi que les progrès
de rationalisation de gestion, je suivrai l'avis de la commission des finances
et j'émettrai un vote positif sur le budget de la justice pour l'an 2000.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines
travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Haenel, rapporteur
spécial, applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Othily, rapporteur pour avis.
M. Georges Othily,
rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale,
pour l'administration pénitentiaire.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits de l'administration
pénitentiaire dans le projet de budget pour 2000 s'élèvent à 7,85 milliards de
francs et sont en hausse de près de 6 % ; 386 créations d'emploi sont prévues :
c'est bien, mais on est loin de rattraper le retard pris dans l'exécution de la
loi de programme de 1995.
Dans le temps qui m'est imparti, je voudrais formuler cinq observations à
propos de la situation de l'administration pénitentiaire.
Tout d'abord, monsieur le secrétaire d'Etat, voilà maintenant deux ans presque
jour pour jour que nous avons voté définitivement la loi relative au placement
sous surveillance électronique. L'année dernière, Mme le garde des sceaux nous
avait dit que des études étaient nécessaires et que les premières
expérimentations débuteraient à la fin de 1999. Pourtant, nous n'avons rien vu
venir. On nous déclare maintenant que ces premières expérimentations auront
lieu dans le cadre des centres pour peines aménagées. Or, j'ai appris que ces
centres ne fonctionneraient qu'à partir de 2001. Faudra-t-il donc plus de trois
ans pour que cette loi reçoive ses premières applications ? On en vient à se
demander si le Gouvernement veut réellement la mettre en oeuvre.
Nous savons que Mme le garde des sceaux réfléchit aux alternatives à
l'incarcération et qu'elle est très préoccupée par l'évolution de la libération
conditionnelle. Avec la surveillance électronique, le législateur lui a donné
un outil important pour éviter les effets de désocialisation de la prison. Bien
sûr, c'est novateur, mais on ne va tout de même pas reprocher au Sénat de
s'être montré novateur en proposant et en adoptant cette loi ! Nous demandons
donc instamment au Gouvernement d'accélérer les choses, afin que des
expérimentations aient lieu dès l'an 2000.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Oui ! Ça, c'est bien !
M. Georges Othily,
rapporteur pour avis.
J'en viens à la question du contrôle des
établissements pénitentiaires.
Comme vous le savez, certains incidents graves survenus dans des
établissements pénitentiaires et impliquant des personnels ont été révélés au
cours de l'année. Pourtant, en théorie, les contrôles qui s'exercent sur
l'administration pénitentiaire sont nombreux. Il y a des contrôles internes,
exercés notamment par l'inspection générale des services judiciaires. En outre,
les autorités judiciaires - juge de l'application des peines, juge
d'instruction, Procureur de la République - sont censées exercer un contrôle
sur les établissements de leur ressort. En fait, il semble que ce contrôle soit
réduit au strict minimum. Il existe, par ailleurs, une commission de
surveillance auprès de chaque établissement, qui regroupe les autorités
administratives et judiciaires, mais, là encore, ce contrôle paraît être
formel.
Il est peut-être temps d'aller plus loin : les visites parlementaires dans les
établissements pénitentiaires doivent se développer. La commission des lois
participe d'ailleurs à ce développement puisque j'ai pu visiter cette année,
avec Mme Derycke, MM. Gélard et Bret, quatre établissements.
Un projet de loi déposé sur le bureau du Sénat prévoit la création d'une
commission nationale de déontologie de la sécurité, qui excercerait un contrôle
sur le respect de la déontologie par certains agents, en particulier de la
police, de la gendarmerie et de la douane. Mme le garde des sceaux ne semble
cependant pas favorable à ce que cette commission contrôle le respect de la
déontologie par les personnels pénitentiaires. Je crois qu'il s'agit d'une
question importante dont nous devrons débattre de manière approfondie.
Mme le garde des sceaux a mis en place un groupe de travail présidé par M.
Canivet, groupe dont fait partie notre collègue M. Cabanel, pour réfléchir à
cette question du contrôle externe de l'administration pénitentiaire.
Il faut aller plus loin dans le contrôle de l'administration pénitentiaire.
Sur cette question, nous resterons vigilants, afin que les événements qui ont
été révélés ne puissent plus se produire.
Une autre question me paraît mériter quelques remarques : il s'agit de la
libération conditionnelle. Cette mesure connaît une évolution préoccupante
puisqu'elle est de moins en moins accordée depuis quelques années. Cela
s'explique notamment par la situation économique et la difficulté pour certains
détenus sous-qualifiés de présenter un projet de sortie en vue d'une libération
conditionnelle.
Actuellement, la libération conditionnelle est accordée par le juge de
l'application des peines lorsque la peine est inférieure ou égale à cinq ans
d'emprisonnement et par le garde des sceaux dans les autres cas. Depuis
longtemps, des propositions sont formulées pour modifier le régime de la
libération conditionnelle, notamment pour judiciariser cette mesure qui,
aujourd'hui, est une simple mesure d'administration judiciaire. Là, encore,
monsieur le secrétaire d'Etat, la commission de réflexion mise en place rendra
ses conclusions, en principe, avant le début de l'année prochaine.
Il me semble qu'une réflexion approfondie s'impose compte tenu de tous les
phénomènes que nous pouvons observer : la durée de détention s'allonge, les
libérations conditionnelles diminuent, la population carcérale change. De plus
en plus de détenus purgent de très longues peines. Il semble aussi qu'il y ait
de plus en plus de personnes souffrant de problèmes psychiatriques dans les
prisons. Peut-être notre régime d'application des peines mériterait-il d'être
remis à plat ?
J'évoquerai brièvement la situation des établissements pour constater que,
s'il existe en France des établissements modernes, le parc pénitentiaire est
dans l'ensemble plutôt vétuste, voire très vétuste.
M. Jacques Peyrat.
C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Georges Othily,
rapporteur pour avis.
Nous avons visité quatre établissements cette année
et nous avons pu constater que l'état de certaines cellules dans les maisons
d'arrêt de Loos et des Baumettes n'était pas acceptable. L'organisation du
centre de jeunes détenus de Fleury n'est pas plus acceptable et il est en train
d'être modifié à la suite de la violence qui s'y est développée.
Actuellement, un programme de construction de six établissements dans les
agglomérations de Lille, Toulouse, Avignon, Montpellier, Meaux et Liancourt est
en cours de réalisation, et Mme le garde des sceaux a décidé la construction
d'un septième établissement, à la Réunion, ce dont nous nous réjouissons.
Pour l'avenir, un second programme est envisagé, qui pourrait notamment
comprendre la construction d'un nouvel établissement à Nice.
M. Jacques Peyrat.
Très bonne nouvelle !
M. Georges Othily,
rapporteur pour avis.
Par ailleurs, un programme de rénovation de cinq
grandes maisons d'arrêt a été lancé, qui concerne Fleury-Mérogis, Fresnes, La
Santé, Les Baumettes et Loos. A ce sujet, permettez-moi de vous faire part de
mon inquiétude. Dans un premier temps, les travaux ont été estimés à un
milliard de francs, ils font maintenant l'objet d'estimations plus proches de 2
milliards de francs. Or, 50 millions de francs seulement ont été inscrits en
autorisations de programme sur le budget 1999 et 50 millions de francs sur le
projet de budget pour 2000. Tout cela est-il exact ?
Comme nous, Mme le garde des sceaux a visité les maisons d'arrêt de Loos et
des Baumettes. Elle sait donc qu'il y a urgence à rénover ces établissements.
Je sais que la construction des nouveaux établissements coûte cher mais,
vraiment, ce programme de rénovation doit être accéléré.
Ma dernière remarque concerne le nombre élevé des suicides dans les
établissements pénitentiaires : 114 détenus se sont suicidés depuis le début de
l'année, ils étaient 118 à l'avoir fait en 1998. En 1998, la chancellerie a
diffusé une circulaire sur ce sujet, qui invite notamment à une grande
vigilance au cours des premiers jours d'incarcération et incite à un accueil
individualisé des personnes incarcérées. Très honnêtement, dans les grandes
maisons d'arrêt, compte tenu du nombre quotidien d'entrées et de sorties, un
tel accueil me paraît difficile à assumer. La surpopulation carcérale ne
facilite vraiment pas la conduite d'une politique de prévention des
suicides.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Eat, je vous dirai que nous sommes
inquiets. Les crédits de l'administration pénitentiaire augmentent, mais les
problèmes sont nombreux et sérieux. Pour marquer son inquiétude face au constat
dressé par les délégations de la commission qui ont visité des prisons cette
année et sa désapprobation à l'égard du retard pris dans l'application de la
loi relative au placement sous surveillance électronique, la commission des
lois a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'administration
pénitentiaire.
M. le président.
La parole est à M. Gélard, rapporteur pour avis.
M. Patrice Gélard,
rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale,
pour la protection judiciaire de la jeunesse.
Monsieur le président,
monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits des services de
la protection judiciaire de la jeunesse sont, dans ce budget, d'un montant
exceptionnel : 3,18 milliards de francs - 11,7 % du budget total de la justice
- soit une hausse de 14,7 % par rapport à 1999. Cet effort financier est sans
précédent.
Les créations d'emplois sont également sans précédent : 380 dont 258
d'éducateur, auxquelles il convient d'ajouter 600 emplois-jeunes qui seront
affectés à la protection judiciaire de la jeunesse.
Par ailleurs, un remarquable effort est fait au bénéfice des vingt-six
départements pour poursuivre les actions engagées qui, d'ores et déjà, donnent
des résultats significatifs.
Il s'agit donc là d'un bon budget pour la protection judiciaire de la
jeunesse.
Je ferai cependant trois constatations, trois remarques et trois
propositions.
Première constatation, je note le retard important pris dans les
investissements en matière d'hébergement collectif ; il en va de même
d'ailleurs en ce qui concerne la rénovation de certains quartiers pour jeunes.
Un effort devra être fait dans les années à venir pour rattraper ce retard.
Deuxième constatation, trop de décisions de justice sont en attente
d'exécution ou restent inappliquées.
Enfin, troisième constatation, l'accueil d'urgence ne s'effectue actuellement
que par transformation de structures existantes et non par la mise en place de
structures nouvelles.
Ces constatations étant faites, j'en viens aux remarques.
Première remarque, il est nécessaire de maintenir des concours de recrutement
qui garantissent la qualité des candidats et de leur formation initiale. En
effet, 200 emplois d'éducateur seront pourvus par la voie d'un concours
dérogatoire qui ne garantit pas le recrutement de qualité et le niveau de
formation que l'on est en droit d'attendre. Il y a là une inquiétude que je
tiens à souligner.
Deuxième remarque, et je rejoins là ce qu'a dit notre collègue, M. Othily,
voilà quelques instants, la sécurité physique et psychologique des jeunes nous
préoccupe. Sans doute convient-il de trouver des moyens nouveaux pour mieux
évaluer l'état de santé psychologique et mieux protéger la santé physique des
jeunes, lorsqu'ils sont incarcérés ou même placés dans des centres
éducatifs.
Troisième remarque, il importe d'exercer un meilleur contrôle de toute nature
sur les associations privées qui gèrent des établissements car, parmi ces
derniers, certains sont excellents, d'autres moins bons et, disons-le
franchement, quelques-uns sont exécrables. Il convient par un contrôle
approprié d'harmoniser la façon dont fonctionnent ces associations privées
lorsqu'elles ont en charge la jeunesse qui est placée dans leurs
établissements.
Enfin, je formulerai trois propositions.
Première proposition, il faut améliorer la prévention. En effet, nous
constatons à cet égard un manque sur le plan de la réflexion et des
propositions du ministère. Je souhaiterais que le ministère engage, soit sous
la forme d'une mission, soit sous la forme d'une enquête, une vaste étude pour
déterminer les causes et les conséquences de la délinquance juvénile, et
réfléchir aux moyens de réintégrer les jeunes qui, à un moment donné, ont été
délinquants. Cet effort de réflexion, de conceptualisation s'impose à nous.
Certes, une multitude d'études ont déjà été faites, mais elles sont dispersées
et elles ne nous permettent pas d'avoir une vision d'ensemble de l'évolution de
la situation.
Deuxième proposition, il faut améliorer la prévention. Il me semble que les
liens entre la protection judiciaire de la jeunesse et l'éducation nationale
sont insuffisants et qu'un effort pourrait déjà être fait au niveau de l'IUFM
afin de sensibiliser les futurs enseignants aux problèmes de la protection
judiciaire de la jeunesse.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Bonne idée !
M. Patrice Gélard,
rapporteur pour avis.
Mais il faudrait également établir un partenariat
permanent entre l'éducation nationale et la protection judiciaire de la
jeunesse. Des modalités de concours existent déjà entre ces deux grands
ministères, mais le ministère de l'éducation nationale me semble très éloigné
des préoccupations de la protection judiciaire de la jeunesse.
Enfin, ma troisième proposition est beaucoup plus terre à terre. Il s'agit de
prendre en compte de façon un peu plus objective la rémunération des avocats en
ce qui concerne la défense des jeunes qui n'ont pas toujours les avocats de
qualité qu'ils mériteraient. Il faut également prendre en compte le fait que
les avocats font toute une série d'actes qui ne sont pas rémunérés lorsque l'on
n'aboutit pas à une poursuite pénale du jeune délinquant. Notamment dans le
cadre de la médiation pénale, il n'y a pas à ce moment-là une prise en compte
suffisante de la rémunération des avocats.
En conclusion, je dirai mon inquiétude pour l'avenir. Il faudra, selon moi,
que le ministère se penche très sérieusement sur la carrière des éducateurs. Il
y a là maintenant une anomalie puisque les éducateurs, vous le savez, étaient
auparavant sur le même plan que les instituteurs. Les instituteurs sont
maintenant devenus des cadres de catégorie A du fait de leur recrutement par le
biais de l'IUFM et de leur transformation en professeurs des écoles. Cela va
créer dans les années à venir des tensions car les éducateurs, qui resteront de
catégorie B, auront un déroulement de carrière nettement moins intéressant ou
moins satisfaisant que les instituteurs. Cette réflexion d'ensemble déborde
très largement le cadre de la protection judiciaire de la jeunesse et celui du
ministère de la justice : il faudra bien un jour que l'on se saisisse de
l'ensemble des problèmes de carrière de toute une série de fonctionnaires de
catégorie B, qu'ils soient éducateurs ou infirmiers des hôpitaux ou autres
encore et dont la carrière ne correspond plus aux réalités du monde
contemporain.
Compte tenu de ces constatations, de ces remarques et de ces propositions, la
commission des lois a émis sur ce budget qui, je le répète, est exceptionnel
par l'effort financier consenti, un avis favorable.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 21 minutes ;
Groupe socialiste, 18 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 16 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes ;
Groupe communiste, républicain et citoyen, 12 minutes.
La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
c'est avec une satisfaction non dissimulée que le groupe socialiste accueille
le budget de la justice pour l'an 2000.
S'agissant de la volonté politique qui anime Mme la garde des sceaux, il n'y a
pas de doute que l'effort en direction du service public de la justice est
remarquable et, comme je traiterai de la question des services judiciaires, je
tiens à le souligner.
La progression du budget par rapport à 1999 atteint près de 4 %, chiffre qui
traduit à la fois un progrès constant et la continuité des actions déployées
par le Gouvernement depuis trois ans.
M. Haenel a fait remarquer qu'aujourd'hui, avec 27,291 milliards de francs, le
budget de la justice représente 1,62 % du budget de la nation, et notre
excellente rapporteur, ou rapporteuse pour avis,...
Mme Dinah Derycke,
rapporteur pour avis.
« Rapporteuse » !
M. Robert Badinter.
... Mme Dinah Derycke, a souligné que nous en étions sensiblement à quelque
1,56 % ou 1,60 %.
Nous sommes unanimes, dans cet hémicycle, à considérer que l'accroissement
quantitatif doit se poursuivre ; nous sommes unanimes à considérer que, dans
les budgets à venir, la part du budget de la justice dans le budget général
doit être réévaluée.
Nous savons que Mme le garde des sceaux partage cette conviction et la traduit
dans les faits.
Permettez-moi à cet égard de rappeler un souvenir ancien. Lorsque, pour la
première fois de ma vie, j'ai pénétré dans cet hémicycle, c'était au moment du
discours introductif de M. Pierre Mauroy. A la sortie, un vétéran qui avait été
dix-huit fois ministre sous les IVe et Ve Républiques et que je connaissais
depuis longtemps me fit signe de le rejoindre, et il me dit alors : « Les
grandes réformes, c'est bien beau ; mais une seule chose compte dans la vie
ministérielle : le budget, encore le budget, toujours le budget. Le reste est
superfétatoire ». Je n'ai pas oublié cet avertissement dans les années
suivantes. Il en sera fait écho ici encore.
Je note avec satisfaction la création, dans le budget des services
judiciaires, de 382 postes contre 370 en 1999 et 300 en 1998. Voilà qui est à
mettre en parallèle avec la création de 212 postes de magistrats, de 155 postes
de fonctionnaires de greffe et de 15 postes de contractuels.
S'agissant des magistrats, je me félicite de ces créations, qui tranchent, je
dois le dire, avec le retard qui a été malheureusement pris par certains des
prédécesseurs de notre garde des sceaux dans la réalisation du plan pluriannuel
pour la justice, dont la paternité revient à M. Méhaignerie.
J'ai relevé que, pour la période 1995-1997, le taux d'exécution du plan,
s'agissant des magistrats, ne s'élevait qu'à 50 %. Le budget de 1997, chacun
s'en souvient, avait prévu la création de 30 postes seulement au lieu des 60
qui auraient dû l'être.
Aujourd'hui, le retard a été comblé grâce à votre action. Si je fais le calcul
global, ce sont en trois ans, 422 postes de magistrats qui auront été créés
dans les juridictions judiciaires. A n'en pas douter, il s'agit là d'un progrès
très satisfaisant.
Cependant, je tiens à faire part, à titre personnel, d'une remarque que
j'avais déjà formulée devant la commission des lois. Je m'inquiète quelque peu
de la proportion de magistrats recrutés par la voie de concours exceptionnels
par rapport à celle du concours donnant accès à l'ENM. Le nombre de postes a
été porté à 185 pour 1998 et 1999, ce qui marque un accroissement certain ;
mais ce chiffre doit être mis en parallèle avec le nombre de magistrats
recrutés par les concours exceptionnels pendant la même période.
Je sais bien que nécessité fait loi mais je tiens à souligner que la part
ouverte au recrutement par l'école doit être plus importante, sauf à décourager
nos meilleurs étudiants, ce qui serait très fâcheux pour l'avenir.
Je souligne aussi, mais cette remarque ne s'adresse pas directement à Mme la
ministre, l'insuffisance des recrutements extérieurs réalisés par la commission
d'intégration. J'ai relevé des chiffres allant de l'ordre de 20 à 25 %. Ce
malthusianisme n'est pas admissible.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Tout à fait !
M. Robert Badinter.
Il vaudrait mieux favoriser le recrutement des meilleurs éléments des
professions par la voie de la commission d'intégration au lieu d'organiser des
concours exceptionnels par nécessité.
Cette remarque faite, félicitons une fois encore l'auteur de ce budget qui
s'inscrit dans le cadre d'une action législative et réglementaire que nous
approuvons et que nous soutenons tout à fait en ce qu'elle porte sur
l'amélioration de la justice au quotidien, aussi bien par la loi du 18 décembre
1998 que par le décret du 28 décembre 1998, qui s'inspire, d'ailleurs, des
excellentes propositions formulées dans le rapport du président du tribunal de
grande instance de Paris, M. Coulon.
Là encore, je note avec plaisir que l'on favorise le règlement amiable des
litiges par la médiation, la conciliation et la transaction. Vous savez
combien, depuis des années, je ne cesse de rappeler qu'il est indispendable de
recourir au mode alternatif de solution des conflits et que, à défaut d'y
recourir toujours plus, nous ne parviendrons pas à surmonter l'engorgement
judiciaire.
Je veux faire maintenant quelques observations plus précises.
Tout d'abord, j'insiste à nouveau auprès de Mme le garde des sceaux, comme
j'insistais déjà auprès de ses prédécesseurs, pour qu'il soit enfin procédé à
la révision de la carte judiciaire dans son ensemble.
(MM. Fauchon, Hyest et
Peyrat applaudissent.)
C'est une exigence prioritaire de la réforme de la justice. Voilà des années
que les travaux ont été engagés sur ce point. Très franchement, ce ne sont pas
les suppressions de quelques juridictions consulaires en état de survie, pour
ne pas parler d'acharnement thérapeutique, qui suffiront.
Nous savons que Mme le ministre songe à cette grande réforme. Il est temps
qu'elle agisse dans les prochains mois.
En ce qui concerne la justice civile et le flux des affaires au cours de la
période 1992-1998, le nombre des affaires nouvelles a augmenté sensiblement :
il est en effet passé de 523 000 à 623 000. Cependant - et cela porte
témoignage des efforts réalisés par tous dans les juridictions de première
instance - la durée moyenne de règlement des litiges a baissé. Augmentation du
nombre des litiges et baisse des durées de règlement, la situation est donc en
progrès.
En revanche, la situation est tout à fait différente dans les cours d'appel,
où la durée des procédures s'est accrue de 13,5 à 17,4 mois. Alors que le
nombre des affaires a légèrement baissé entre 1997 et 1998 - il est
effectivement passé de 213 000 à 209 000 -, je constate avec inquiétude que la
durée moyenne des procédures s'est accrue.
Les cours d'appel doivent bénéficier d'une action en priorité. Il faudra
prévoir non seulement un accroissement des effectifs, mais aussi une
amélioration des méthodes.
Je suis heureux de constater que Mme le garde des sceaux soutient les contrats
de juridiction de procédure. Cette concertation juridiction par juridiction,
avec le concours plus qu'actif de l'inspection des services judiciaires s'est
révélée très fructueuse. Il suffit à cet égard de consulter un traité sur les
institutions judiciaires pour s'en convaincre.
En ce qui concerne les juridictions prud'homales, j'attire l'attention de Mme
la garde des sceaux sur le fait que, là aussi, cela ne va pas : la durée
moyenne des jugements atteint près de dix mois ; 60 % des décisions sont
frappées d'appel, ce qui contribue d'ailleurs aux difficultés des juridictions
de second degré.
Dans les Hauts-de-Seine, le conseil de Nanterre, qui est très important, a vu
le nombre des affaires quadrupler en vingt ans. Or, sur vingt-cinq postes
budgétés dans cette juridiction, seuls dix-huit sont pourvus, et il faut
compter près de vingt mois pour aboutir à un jugement. Il en va de même pour le
conseil des prud'hommes de Boulogne, où il y a sept présents pour dix-sept
postes budgétés.
Ces contentieux revêtent, pour les demandeurs, une importance extrême sur le
plan humain. Il faut leur accorder une priorité.
Par ailleurs, s'agissant de la chambre sociale de la Cour de cassation, il
faut absolument instituer le recours à la représentation par avocat pour
réduire son encombrement.
Je laisse de côté les questions concernant les juridictions pénales. Nous
aurons l'occasion d'en reparler.
Toutefois, la première cause du nombre de détentions provisoires, c'est la
longueur de l'instruction et non pas les décisions de placement.
M. Jacques Peyrat.
C'est sûr !
M. Robert Badinter.
J'insiste donc auprès de Mme la garde des sceaux pour que les services de la
Chancellerie, qui sont si compétents, examinent dans quelle mesure on peut
utiliser une partie des nouveaux magistrats, de l'ordre d'une centaine, pour
veiller sur la durée des détentions, donc des instructions.
Il faut porter le fer là où est la plaie !
M. Jean-Jacques Hyest.
Ah !
M. Robert Badinter.
C'est à vous, cher monsieur Haenel, que j'adresserai ma conclusion : ne soyez
pas à ce point mélancolique, ne dressez pas un état des lieux si cataclysmique,
ne dramatisez pas !
Je sais que le mur des lamentations est une tradition de la société judiciaire
française. Mais on ne peut pas à la fois proposer notre modèle judiciaire à
travers toute l'Europe centrale et orientale et dire ici que c'est une
institution en ruine et dans laquelle il ne reste plus qu'à compter les
morts.
Pour avoir beaucoup voyagé, comme vous, monsieur le rapporteur spécial, je
constate que nous ne sommes pas, même en Europe occidentale, les plus mal
placés. Allez ailleurs et vous verrez ce qui se passe. Regardez les
statistiques et vous constaterez que, si nous ne sommes certes pas les
meilleurs, nous sommes loin, très loin d'être les plus mauvais.
Si je regarde la grande justice britannique, le rapport de Lord Woolf le
montre, je constate que la situation est catastrophique.
Si je passe les Alpes et que j'arrive chez nos amis italiens, je n'ose même
pas dire ce qu'il en est.
M. Jean-Jacques Hyest.
Et pourquoi !
M. Robert Badinter.
Si j'écoute ce qui se passe chez nos amis espagnols, je m'aperçois que ce
n'est pas brillant.
Pour ce qui est des Belges, nous savons dans quel désastre judiciaire ils
sont.
M. Jean-Jacques Hyest.
Il reste l'Allemagne !
M. Robert Badinter.
Alors, de grâce, mon cher collègue, si les institutions judiciaires françaises
ne sont certainement pas le modèle absolu, j'affirme très franchement qu'elles
tiennent leur rang par rapport à celles des autres pays occidentaux.
Cela tient beaucoup à l'énergie et au courage avec lesquels magistrats et
fonctionnaires font face à leur tâche. Ne donnons pas de cet effort une
représentation mélancolique, pour ne pas dire funèbre.
(Applaudissements sur
les travées socialistes.)
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Je voudrais non pas rectifier vos propos, monsieur
Badinter, mais vous dire que peut-être ne m'avez vous pas bien écouté.
Je suis intervenu au nom de la commission des finances, j'ai donc reflété le
débat qui a eu lieu d'abord en présence de Mme le garde des sceaux, puis entre
nous.
Lorsque j'ai fait allusion à la mélancolie, je n'ai fait que citer l'un de nos
amis communs, le président Jean-Marie Coulon. Par ailleurs, je n'ai fait preuve
d'aucun catastrophisme.
Etant magistrat de formation, j'observe avec une grande attention le
fonctionnement d'un certain nombre de juridictions et je ne peux que constater
l'effort qui a été réalisé ces dernières années : bien des choses vont bien.
Mes inquiétudes portaient en fait sur les relations qui existent actuellement
entre le monde politique et le monde judiciaire d'une manière générale.
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
pour ma part, je parlerai, non pas sur le ton de la mélancolie mais - vous
voudrez bien m'en excuser - sur celui de l'indignation.
Il y a plusieurs façons de considérer un budget ministériel. J'en vois au
moins deux.
On peut, d'une manière que je qualifierai de comptable et d'administrative,
comparer le budget de l'année qui vient à celui des années précédentes,
constater un certain nombre d'avancées et conclure que le budget de la justice
pour l'année 2000 est un bon budget, ce qui n'est pas faux, puisqu'il est
meilleur que celui de l'année précédente qui lui-même était meilleur...
On peut aussi, et je dirai même qu'on doit aussi, surtout si l'on considère
les choses du point de vue de la commission des lois, élever le regard pour
avoir une vue générale des missions de ce département ministériel et
s'interroger sur le point de savoir si l'Etat consacre à ces missions les
moyens qui lui sont nécessaires.
Je ne crois pas avoir beaucoup de peine à montrer que nous sommes très loin du
compte, que la gestion financière de notre pays sacrifie - et sacrifie
délibérément - la justice à des missions probablement plus visibles
médiatiquement, plus gratifiantes électoralement, et qu'elle assume ainsi la
responsabilité d'entretenir au coeur de l'Etat une plaie qui ne cesse
d'empirer. Vous avez compris que je m'adresse beaucoup moins à l'actuel
Gouvernement qu'à ses prédécesseurs.
A partir de là, je suis conduit à dire que le budget de 2000 est
dramatiquement insuffisant, comme l'ont été depuis des décennies tous les
autres budgets, mais que le présent budget a peut-être moins d'excuses que n'en
avaient bien de ses prédécesseurs du fait de l'évolution des données
économiques générales.
Disant cela, je n'ai pas le sentiment de parler contre Mme le garde des
sceaux, à qui j'aurais aimé m'adresser directement, ni contre son action
personnelle ou celle de son équipe, à laquelle je rends hommage, et moins
encore contre ces quelques milliers de juges et de fonctionnaires - trop peu de
milliers de juges et de fonctionnaires - qui luttent quotidiennement pour
préserver ce qui peut l'être et qui sans doute font aussi bien, sinon mieux que
leurs collègues d'outre-Manche ou d'outre-Pyrénées. Avec eux, avec Mme la
ministre elle-même, je crois, je parlerai contre une tradition gouvernementale
indigne des proclamations auxquelles on se complaît sur l'état de droit et les
vertus humanistes de la République. Oserais-je dire que les raisons pour
lesquelles Mme la ministre a cru devoir déserter cet hémicycle me confirme un
peu dans ce diagnostic !
Est-il nécessaire de démontrer le caractère dramatiquement insuffisant des
moyens de la justice ? Nous l'avons fait naguère : la situation ne s'est pas
sensiblement modifiée.
L'augmentation des moyens a d'ailleurs pour origine le plan quinquennal de M.
Méhaignerie - fort honnête homme ! - appliqué et amplifié par les plus récents
budgets. Cette amélioration, très limitée tout de même, a plus qu'été absorbée
par l'augmentation générale des contentieux, à quoi s'ajoute l'augmentation des
tâches qui résultent des réformes et spécialement des réformes en cours.
Il me vient à l'esprit la fameuse fable de La Fontaine :
Le Savetier et le
financier,
quand le savetier dit : cela pourrait aller si l'on n'augmentait
pas tous les jours ma tâche ; alors je ne peux plus m'en sortir. Je
transposerais volontiers la fable en ces termes :
On nous ruine en instances
L'une fait tort à l'autre et Mme la ministre
De quelques nouveaux points
charge toujours l'audience.
(Sourires.)
N'est-il pas visible que la justice ne peut pas fonctionner en France avec à
peu près le même nombre de magistrats à la fin de ce siècle qu'elle en
comportait au milieu de l'autre ?
N'est-il pas visible que les procédures sont trop longues, que bien des
audiences pénales sont aussi trop longues comme les instructions, les
détentions provisoires et les délibérés, à la différence des motivations qui,
elles, sont souvent trop courtes et quelquefois quasi inexistantes ?
N'est-il pas visible que le nombre de classements sans suite est tel que le
ministère est conduit à nous proposer, pour corriger cette situation, un
système qui ne brille pas par sa simplicité et qui, en alourdissant la tâche du
parquet, risque fort d'aggraver la situation ?
N'est-il pas visible, à Nantes par exemple, ces jours-ci, que les facilités du
traitement rapide que l'on qualifie, abusivement selon moi, de traitement en
temps réel des affaires pénales courantes se traduit par un ralentissement
excessif et fâcheux et quelquefois par un oubli pur et simple des affaires plus
complexes et en réalité plus importantes ?
Je demande qu'on n'allègue pas ici telle ou telle statistique pour donner une
impression moins négative, en particulier celle sur la durée moyenne des
procédures.
D'abord, ces statistiques ne donnent que des moyennes et celles-ci n'ont de
sens que si les données de base ne sont pas trop dispersées comme elles le
sont.
Ensuite, ces statistiques sont encore tout à fait globales, elles sont même
grossières, et la durée moyenne du règlement des affaires est une notion qui,
en réalité, n'a aucune signification, d'autant qu'elle s'arrête, excusez la
supercherie, à la date du jugement, sans se soucier de la date à laquelle la
copie exécutoire du jugement est délivrée, c'est-à-dire quelquefois des mois
plus tard. Nous en savons quelque chose, nous autres praticiens !
Enfin, il faudrait traiter séparément les procédures naturellement brèves
comme les requêtes et les référés, le jugement avant faire droit et les
décisions de fond. A ce moment-là, la notion de durée moyenne prendrait
peut-être un certain sens !
Est-il permis d'espérer que nous aurons un jour de telles précisions ? Je me
le demande et, en vérité, je vous le demande.
J'en viens à ma dernière observation sur les statistiques. Il y a manière et
manière de gérer un contentieux. Malheureusement, nous rencontrons ici comme
ailleurs des modes de gestion dans lesquels le souci de la statistique, de
faire du chiffre, est prioritaire, ce qui est une dernière raison de ne pas
tenir les statistiques pour des indicateurs fiables, d'ailleurs nous n'en avons
pas besoin.
Je maintiens donc, et nul ne peut sérieusement les contester, les conclusions
de notre rapport sur les moyens de la justice. Cette dernière est en état
d'hémiplégie. Je ne me console pas à l'idée que cette hémiplégie est un
phénomène largement répandu en Europe. Ce n'est pas mieux. C'est à juste titre
en tout cas que, en France, une majorité de Français considèrent - tous les
sondages le montrent - que c'est là le plus grave problème de notre société.
Sans doute n'est-ce pas seulement un problème de moyens. Il est impossible
cependant de s'attaquer aux problèmes d'organisation, d'intensité d'action
aussi longtemps que prévaudront l'insuffisance des moyens et leur mauvaise
répartition.
Je pense d'abord à la carte judiciaire, dont on a parlé très justement voilà
quelques instants, et je m'inquiète de ne plus en entendre parler ailleurs qu'à
cette tribune. Tant qu'on n'aura pas apporté ces modifications, on ne pourra
pas progresser.
Je signale au passage les remèdes, sans doute partiels, que nous avons
imaginés, qui ont été votés par le Parlement et que la chancellerie,
manifestement, ne veut pas mettre en oeuvre.
Je pense également aux magistrats à titre temporaire et je partage le point de
vue qui a été exprimé tout à l'heure à propos des recrutements exeptionnels. Je
pense aussi au bracelet électronique. Je trouve, à cet égard, assez «
surprenante » la ligne de conduite de votre ministère.
Si le Gouvernement doit être remercié d'accorder près de 4 % d'augmentation à
ce budget, il faut aussi souligner que ce pourcentage est en réalité tout à
fait insuffisant. M. Hyest montrera d'ailleurs que c'est une moyenne en
elle-même trompeuse.
En vérité, pour faire face aux missions de la justice, il conviendrait de
prévoir une augmentation substantielle de 10 % pendant dix ans ou de 20 %
pendant cinq ans. Seule une telle augmentation serait à la hauteur de la
difficulté.
Si j'insiste particulièrement sur ce point à l'occasion de l'année 2000,
c'est parce que, pour la première fois depuis longtemps, le retour de la
croissance économique en France comme dans l'ensemble du monde occidental,
permet de dégager des disponibilités considérables, alors que, dans le passé,
notamment durant la phase préparatoire au passage à l'euro, toute augmentation
substantielle d'un budget nécessitait un prélèvement sur un autre, ce qui,
personne ne peut l'ignorer, est toujours très difficile. Mais, à partir du
moment où des disponibilités existent, la responsabilité du Gouvernement est
entière quant à leur emploi.
Dès lors, est-il supportable - et je pense que cela ne l'est pas - que les
crédits de la justice, qui s'élèvent à 27,29 milliards de francs, restent à la
même hauteur que ceux des anciens combattants : 25 milliards de francs, ou que
la dotation de la SNCF : 26 milliards de francs ? C'est tout de même effarant !
Il est encore moins supportable que les emplois-jeunes, que je préfère ne pas
qualifier ici pour ne pas dévier de mon propos, coûtent presque autant que la
justice en 2000, soit 24 milliards de francs, et ils atteindront 34 milliards
de francs en année pleine par la suite. Où en sera alors la justice ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Et les 35 heures !
M. Pierre Fauchon.
Et les 35 heures, autre catastrophe !
Il serait facile de stigmatiser de tels choix et quelques autres. Je préfère
pour conclure dire qu'un Etat moderne, qui se vante d'être un Etat de droit, ne
peut pas traiter ainsi le service public de la justice. C'est injuste, mais
aussi c'est inconséquent lorsqu'on considère les effets de la démoralisation
des Français, avec la progression à chaque élection des abstentions ou des
votes extrêmes qui sont, pour la plupart, des votes de protestation.
Face à une situation aussi grave, il faut protester, il faut crier, comme
notre collègue M. Haenel l'a fait.
Si le Gouvernement juge ne pas devoir prêter une oreille trop attentive aux
réflexions du Sénat, comme il en donne aujourd'hui encore le sentiment,
puisse-t-il du moins grâce à vous, monsieur le secrétaire d'Etat, entendre
l'immense plainte des praticiens comme des justiciables, sans se boucher les
oreilles.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Peyrat.
M. Jacques Peyrat.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
bien des choses ont été dites soit pour approuver, soit pour critiquer les
divers aspects de ce budget ; je vais pour ma part vous livrer mes propres
observations.
En dix ans, le budget de la justice aura connu un accroissement considérable,
de plus de 10 milliards de francs, ce qui nous permet d'espérer franchir, d'ici
à deux ans, la barre des 30 milliards de francs, à laquelle il ne nous était
même pas permis de rêver il y a quelques années.
L'honnêteté m'oblige donc à vous exprimer, monsieur le sécrétaire d'Etat, ma
satisfaction devant l'aspect quantitatif de ce budget.
Pour autant, ce satisfecit mérite d'être tempéré, car la seule question qui
vaille est de savoir si ces crédits permettent à votre ministère de rendre à la
société le service qu'elle en attend.
Et là, force est de constater que la réponse est loin d'être positive puisque
les Français sont toujours aussi nombreux à se plaindre des dysfonctionnements
du service public de la justice.
En fait, l'appréciation portée à votre budget sera tout à fait différente
selon que l'on regarde d'où l'on vient ou que l'on se penche sur les chantiers
prioritaires et nombreux qui demeurent. Ils sont, à mon sens, essentiellement
au nombre de deux.
Le premier d'entre eux concerne les délais de jugement, qui ne cessent de
s'allonger. Notre collègue Robert Badinter le rappelait tout à l'heure. En
effet, devant les tribunaux d'instance, ceux-ci sont passés de 5 mois à 5,2
mois, devant les tribunaux de grande instance de 8,9 mois à 9,3 mois et, devant
les cours d'appel, soit après tous les délais précédents, ils sont aujourd'hui
de plus de 17 mois. A la cour d'appel d'Aix-en-Provence, ils peuvent atteindre
trois ans et trois ans et demi en matière sociale.
Cette situation conduit donc, dans un très grand nombre de cas, à de
véritables dénis de justice. Cela vaut particulièrement en matière de droit du
travail, au mépris, d'ailleurs, de l'égalité entre les parties, puisque ce sont
les salariés qui ont intérêt le plus souvent à un jugement rapide.
La diminution du stock doit donc être notre priorité. Or, sur les 212
créations de postes de magistrat prévues, la résorption du retard ne vient
qu'en troisième position avec trente-quatre créations, soit un magistrat pour
sept cours ou tribunaux. Celui-ci sera, certes, le bienvenu, mais ce choix
constitue, à mon avis, une erreur dans la définition des priorités.
C'est là que vous attendaient les Français, et c'est grâce à cela, d'abord,
qu'ils pouvaient retrouver confiance dans leur justice. Malheureusement, vous
n'en avez pas suffisamment tenu compte.
Le fait que vous ayez souhaité faire voter bien des nouveaux textes sur la
justice - relatifs à accès au droit, à la résolution amiable des conflits, à la
présomption d'innocence - n'est en soi pas contestable.
Je pense que leur application pourra contribuer à améliorer le fonctionnement
de la justice. Mais cela ne pouvait vous exonérer de penser d'abord et en
priorité au problème numéro un de notre justice : sa lenteur.
Avouez quand même qu'il est plus important de créer de nouveaux postes de
magistrat dans de nombreuses chambres de tribunaux plus qu'encombrés que de
prévoir d'ores et déjà la création de cent postes pour appliquer une loi
introduisant la mixité de jugement dans les tribunaux de commerce, loi très
discutable d'ailleurs, mais qui, de toute façon, n'est pas encore votée.
Qui dit raccourcissement des délais de jugement dit donc nécessaire réforme de
la carte judiciaire. Or celle-ci n'avance que très lentement.
Certes, vous avez supprimé cet été trente-six tribunaux de commerce, et vous
avez bien fait. Mais, pour les autres juridictions, l'indispensable remise en
cause de la carte judiciaire ne progresse guère.
C'est là, j'en suis conscient, une réforme difficile, impopulaire parfois
braquant tous les conservatismes, ceux des élus locaux, des avocats, des
magistrats, se conjuguent pour ne rien changer dans leur ressort. Mais quand
l'intérêt général vous semble l'exiger, vous savez passer en force !
Car c'est grâce à cette réforme que vous pourrez affecter les postes supprimés
dans les petits tribunaux à ceux, plus grands, où l'évolution du stock
l'impose.
A ce sujet, rassurez-vous, je ne reviendrai pas une nouvelle fois sur ma
demande de création d'une cour d'appel à Nice puisque Mme le garde des sceaux
m'avait déjà adressé en commission des lois une aimable fin de non-recevoir.
Elle m'a d'ailleurs aussi répondu à propos de l'éventuelle construction d'une
nouvelle prison à Nice, une fois la première tranche de construction
réalisée.
Permettez-moi néanmoins, avec un peu de malice, de vous dire toute la chance
qu'ont le Vaucluse et Avignon
(Sourires),
qui ont bénéficié de la construction d'un nouveau palais de
justice, pour un coût de 212 millions de francs, d'un nouveau centre
pénitentiaire, doté de 122 emplois, pour un coût de 270 millions de francs, et
du renforcement du tribunal de grande instance.
Devant ce dynamisme, je me dis que j'aurais presque aimé voir confirmée la
rumeur qui annonçait, un temps, la candidature de Mme Guigou à Nice pour les
prochaines échéances électorales.
(Nouveaux sourires.)
Je sais que, pour justifier cette frénésie de nouvelles constructions
dans la prestigieuse cité des papes, elle a déclaré qu'à son arrivée place
Vendôme, les dossiers techniques étaient bouclés et qu'il ne manquait qu'un
financement. Mais permettez-moi de vous dire qu'il en est ainsi partout.
Pour la prison de Nice, par exemple, les services nous avaient déjà donné leur
accord pour un transfert sur un terrain que la ville de Nice a même réservé
dans son POS, et qui n'attend donc plus, comme pour Avignon, qu'un
financement.
J'espère au moins que ce relatif désintérêt du ministère de la justice pour la
ville de Nice ne nous empêchera pas de créer dans le quartier sensible de
l'Ariane, cette maison de la justice et du droit pour l'installation de
laquelle nous nous battons depuis maintenant deux ans.
Je suis, pour ma part, très favorable à cette implantation, qui permettra
d'améliorer le traitement de la petite délinquance et d'offrir un accès au
droit gratuit et à proximité pour tous les justiciables.
Nous étions d'ailleurs très près d'aboutir il y a un an, mais il semble que la
position du nouveau procureur sur ce sujet soit assez « contrastée », ce qui a
quelque peu retardé les choses.
Je vous demande donc de tout faire pour que cette maison puisse voir le jour
dès cette année. Je n'ose d'ailleurs penser qu'il puisse en aller différemment,
sachant que vous avez budgété cinquante-cinq projets de ce type pour l'an
2000.
Le deuxième chantier qui me semble absolument prioritaire concerne la
délinquance des mineurs. Les réponses que vous y apportez me semblent bien
insuffisantes et surtout inadaptées à l'explosion de ce phénomène, qui devrait
vous inciter à revoir l'ordonnance de 1945, ou tout au moins à la faire
appliquer complètement, plutôt que de créer des postes d'éducateur au sein de
la protection judiciaire de la jeunesse dont l'utilité me paraît parfois
douteuse.
Commençons néanmoins par une bonne nouvelle : je constate avec plaisir que
vous vous êtes ralliée à la politique lancée par votre prédécesseur, Jacques
Toubon - en collaboration avec le ministre de la ville de l'époque, Jean-Claude
Gaudin - qui avait créé les premiers centres éducatifs renforcés, lesquels
s'appelaient d'ailleurs, à l'époque, « unités à encadrement éducatif renforcé
».
Vous en prévoyez vingt nouveaux pour l'année prochaine, ce qui portera leur
total à une centaine. C'est un bel effort pour un ministre qui, par
méconnaissance peut-être, ou par réflexe idéologique, en avait décidé la
suppression dès son arrivée.
Pour autant, les autres réponses que vous apportez à la problématique de la
délinquance des mineurs ne me semblent pas à la hauteur du fléau.
Tout d'abord, je pense qu'il est devenu indispensable de réformer l'ordonnance
de 1945 pour l'adapter à notre époque, c'est-à-dire au rajeunissement de la
délinquance et à son caractère, hélas ! de plus en plus violent.
Aujourd'hui encore, la mesure éducative demeure la règle alors que la sanction
pénale reste l'exception, et encore seulement à l'égard des plus de treize ans.
C'est cela qui conduit au sentiment d'impunité de certains jeunes. Car toutes
les enquêtes démontrent qu'ils savent pertinemment jusqu'où ils peuvent aller
et quelles sont les limites à ne pas franchir sous peine d'aller en prison.
Je pense également qu'il est indispensable aujourd'hui, compte tenu des
résultats obtenus, d'obliger tous les parquets, et non pas seulement ceux qui
le souhaitent, à mettre en place une politique volontariste de traitement de la
délinquance en temps réel.
En matière d'organisation, ensuite, des dysfonctionnements perdurent. En
effet, un certain nombre de départements comportent plusieurs tribunaux pour
enfants alors que certains tribunaux de grande instance n'en disposent pas.
D'autre part, les ressorts des régions de la protection judiciaire de la
jeunesse et de l'administration pénitentiaire ne correspondent pas aux ressorts
des cours d'appel. A l'évidence, la mauvaise imbrication de ces divers
découpages territoriaux nuit à la collaboration des divers acteurs.
Enfin, mon attention a été attirée sur l'une des propositions du rapport de
mes anciens collègues de l'Assemblée nationale, les députés Jean-Pierre
Balduyck et Christine Lazerges, qui sont d'ailleurs socialistes, sur la
délinquance des mineurs.
Elle consiste à informer les élèves, dès l'école primaire, pour qu'ils
connaissent les principes fondamentaux de l'ordonnance de 1945, afin qu'il leur
soit précisé qu'ils peuvent faire l'objet dès l'âge de raison de poursuites
devant les juridictions pénales, que dès treize ans ils sont susceptibles
d'aller en prison et qu'à partir de seize ans ils peuvent être placés en
détention provisoire, même pour un délit.
Il s'agirait là d'une mesure intéressante, qui pourrait parfaitement être mise
en oeuvre dans les établissements scolaires par ceux de vos nombreux
emplois-jeunes qui travaillent auprès des juridictions pour mineurs. Je
souhaiterais, puisque cela ne coûte pas cher, avoir votre avis à ce sujet.
Voilà, monsieur le secrétaire d'Etat, qui représentez Mme le garde des sceaux,
ce que je tenais à dire dans le temps qui m'était imparti. Je ne crois pas que
le fonctionnement de la justice en France permette de se réjouir pleinement
d'un tel budget, certes en augmentation, mais qui ne répond pas aux principaux
défis qui se présentent à vous.
Je voudrais terminer en attirant votre attention sur l'extrême gravité de la
situation pénitentiaire de notre pays. L'année dernière, 118 prisonniers se
sont suicidés dans les prisons de France. Cette année, nous avons déjà rattrapé
ce chiffre : 114 à ce jour.
Ce malaise, qui frappe tous les établissements de l'administration
pénitentiaire, a un corollaire : la violence. Or, je le dis comme je le pense,
la démocratie française n'a pas d'établissement pénitentiaire digne de ses
grands principes. Je sais que vous en avez conscience, et ce sera tout à votre
honneur que de mobiliser le plus rapidement possible tous les moyens
nécessaires pour que cessent ces situations indignes d'un Etat de droit.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
pour la troisième année consécutive, le budget de la justice est en
progression.
Il augmente cette année de 3,91 %, soit trois fois plus que la croissance
moyenne du budget de l'Etat.
Nous devrions tous nous réjouir de l'effort particulier qui est consenti en
cette matière.
Certes, on peut déplorer que la part du budget de la justice ne représente que
1,63 % du budget général ; néanmoins cette part est en augmentation puisqu'elle
était de 1,55 % et de 1,56 % les années précédentes.
Sachons tous en convenir : le budget de la justice est, dans l'ensemble, un
bon budget, et les élus du groupe communiste républicain et citoyen le
voteront.
La continuité des efforts financiers permet de donner vie aux priorités
affichées par le Gouvernement, notamment l'amélioration de la vie carcérale et
la lutte contre la délinquance juvénile. Ce sont les secteurs qui bénéficient
en effet des plus fortes hausses de crédits : de 14,7 % pour la protection
judiciaire de la jeunesse et de 5,85 % pour l'administration pénitentiaire. Ces
deux secteurs totalisent plus des trois cinquièmes des créations d'emplois,
soit 766 sur les 1 237 proposés.
La protection judiciaire de la jeunesse - les sénateurs du groupe communiste
républicain et citoyen s'en félicitent - a été placée au centre des
préoccupations gouvernementales ces dernières années. Les priorités définies
par le conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998 en matière de lutte contre
la délinquance des mineurs ont été confirmées en janvier de cette année.
L'augmentation substantielle des moyens de la protection judiciaire de la
jeunesse dans le projet de budget pour 2000 permettra, notamment, une réelle
prise en charge des mineurs délinquants dès la première infraction.
Pourtant, l'effort ne doit pas être, loin de là, relâché. Les besoins sont
immenses, les retards énormes. Certains chiffres continuent ainsi d'être
préoccupants, voire parfois catastrophiques.
Tel est le cas, d'autres l'ont souligné avant moi, des délais de jugement, qui
continuent de s'allonger, si l'on fait exception des tribunaux de commerces,
malgré les efforts entrepris ces dernières années pour les réduire : il faut
attendre près d'un an et demi - 17,4 mois - pour avoir un arrêt de cour d'appel
; les délais dans les tribunaux d'instance et les conseils de prud'hommes sont
d'un mois plus longs que ceux de l'année précédente ; l'augmentation est de
deux mois dans les tribunaux de grande instance.
Le problème semble difficile à résoudre, surtout là où le nombre d'affaires en
cours augmente.
Au civil, le recul du nombre d'affaires nouvelles ne permet pas de résorber le
stock existant.
Au pénal, la situation est encore plus préoccupante. On enregistre une forte
proportion d'affaires nouvelles : près de 10 % tant au niveau de la Cour de
cassation qu'à celui des cours d'assises. Ne parlons même pas de la situation
des juges des enfants qui voient leur activité en nette progression - de 14,5 %
en 1998 - ainsi que des juridictions prud'homales, qui ont enregistré une
augmentation de 11,6 % des affaires introduites en 1998.
C'est la quadrature du cercle : plus on traite d'affaires, plus il y en a à
traiter !
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
C'est vrai !
M. Robert Bret.
Cette illustration de la juridiciarisation de notre société doit nous
conforter dans l'idée selon laquelle il faut absolument persister, comme le
fait Mme la garde des sceaux depuis quelques années, dans le développement des
réponses extrajudiciaires aux conflits, telles la médiation ou la transaction,
faute de quoi l'encombrement continuera à enfler.
Venons-en, à la situation dans les prisons, qui reste, à bien des égards,
catastrophique. En atteste le nombre des suicides : 118 l'année dernière, 114
depuis le début de l'année. On pense également aux scandales qui émaillent
régulièrement l'actualité : celui de Beauvais, ou, plus près de nous, celui de
Riom, qui remet à l'ordre du jour la question du contrôle des prisons.
Mme la garde des sceaux a refusé que la commission nationale de déontologie de
la sécurité soit chargée de cette mission, au motif que le contrôle de
l'autorité judiciaire s'exerce dejà sur ce point. Mais dans quelles conditions
? Nous aimerions savoir où en sont, à cet égard, les réflexions du groupe de
travail présidé par M. Canivet ?
S'agissant de l'état du parc pénitentiaire, chaque budget, année après année,
a son « établissement de la honte » : l'an dernier, nous nous émouvions de la
situation de vétusté extrême dans laquelle se trouvait la maison d'arrêt de
Lyon-Perrache et de sa surpopulation carcérale puisque le taux d'occupation y
était de 165 %. Cette année, c'est au tour des établissements d'outre-mer, et
particulièrement de celui de Saint-Denis de la Réunion, dont une délégation de
la commission des lois du Sénat a qualifié les conditions de détention d'«
humainement inacceptables », constatant en outre que les mesures de sécurité y
étaient tout à fait insuffisantes. Avec son taux d'occupation de 229 %, cet
établissement bat d'ailleurs un bien triste record !
Quel établissement sera, l'année prochaine, celui de la honte ? Nous avons
malheureusement l'embarras du choix !
Très récemment, j'ai visité le centre des Baumettes avec notre collègue M.
Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois pour
l'administration pénitentiaire, et nous avons été profondément choqués devant
l'état de vétusté de cet établissement.
Les établissements pénitentiaires sont dans un tel état de délabrement qu'on a
l'impression, malgré l'effort notable consenti par le Gouvernement dans ce
domaine - près de 600 millions de francs d'autorisations de programme pour la
rénovation ou la reconstruction du parc pénitentiaire, y compris d'ailleurs le
centre des Baumettes - qu'il s'agit d'une goutte d'eau dans un océan !
Comment s'étonner, dès lors, des violences exercées par les détenus sur les
surveillants ?
Certes, la surpopulation carcérale diminue, avec un taux d'occupation qui est
passé de 114 % en 1998 à 107 % en 1999, mais on ne peut se satisfaire d'un tel
chiffre.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen notent avec
satisfaction que le Gouvernement poursuit ses efforts pour l'amélioration de la
vie en prison.
L'année dernière, une action particulière a été menée en direction, notamment,
de l'hygiène ; l'affectation de 152 nouveaux surveillants à l'accueil et à la
prise en charge des détenus devrait permettre de renforcer cette démarche.
On sait aujourd'hui que les efforts devront être maintenus concernant la prise
en charge sanitaire des détenus, en particulier en direction des malades
mentaux.
Nous sommes également sensibles aux moyens affectés à la préparation de la
sortie de prison et à l'accent mis sur les centres pour peines aménagés. Ils
sont en effet de nature à remédier, en partie du moins, à la surpopulation des
prisons et freiner la récidive.
Mon collègue André Gerin soulignait, à l'Assemblée nationale, que le taux de
libération conditionnelle était en baisse en partie à cause de la situation
économique. Il est donc absolument nécessaire de concentrer nos efforts sur ces
questions de réinsertion économique des prisonniers.
Mme la garde des sceaux a souhaité mettre l'accent sur l'importance des moyens
humains dégagés. Nous ne pouvons que l'approuver. Néanmoins, les sénateurs
communistes souhaitent faire part de leurs inquiétudes quant à la gestion de
ces personnels.
Tout d'abord, nous ne sommes pas favorables à la multiplication des emplois
issus du recrutement en masse d'emplois-jeunes. Ces personnels recrutés à titre
temporaire et qui bénéficient d'une formation souvent sommaire ne nous semblent
pas de nature à répondre aux attentes et aux besoins exprimés.
Ainsi, pour ce qui est de l'administration pénitentiaire, l'affectation
d'emplois-jeunes aux quartiers de mineurs peut susciter quelques inquiétudes.
Là, plus que nulle part ailleurs, la délicatesse de la mission à remplir
exigerait au contraire la présence d'un personnel qualifié. On peut exprimer
les mêmes craintes pour la protection judiciaire de la jeunesse.
Veillons également à ne pas former des personnels « au rabais ». Les syndicats
ont émis des réserves quant à l'opportunité d'une formation de six mois pour
les nouveaux éducateurs de la PJJ, ce qui paraît en effet bien court compte
tenu de la complexité des tâches qui leur incombera. Dans le même sens, la
réduction à quatre mois de la formation en école des nouveaux surveillants de
prison ne semble guère opportune. Et songez que, bien souvent, ils sont déjà en
poste avant d'être formés !
Les conséquences de la bonification du 1/5 semblent avoir été mal évaluées :
les 600 départs à la retraite qui devraient avoir lieu au début de 2000 ne
seront pas compensés, au moins dans un premier temps, par les recrutements. Ils
pourraient concerner, dans certains établissements, jusqu'à 20 % des effectifs.
Si l'on y ajoute les mutations, on peut alors craindre que des établissements
pénitentiaires ne se retrouvent avec un personnel majoritairement, sinon quasi
exclusivement novice.
Lorsqu'on connaît le fort taux d'absentéisme qui sévit déjà à l'heure actuelle
chez les personnels de surveillance, compte tenu notamment des conditions de
travail, et la faible attractivité des carrières pénitentiaires aujourd'hui, on
a de quoi être inquiet. Les personnels en place, déjà démotivés par les
inégalités statutaires flagrantes dont ils nous ont fait part et par un manque
de reconnaissance générale, risquent d'être confrontés à un surcroît de travail
qui ne fera qu'amplifier le phénomène et les cantonnera un peu plus dans un
rôle de « porte-clés » dont ils ne se satisfont pas.
Il est donc urgent d'opérer des recrutements en prévision de ces départs. Il
apparaît également nécessaire de revaloriser suffisamment la profession pour
attirer à elle un personnel qualifié et motivé.
Sur toutes ces questions, nous regrettons que Mme la ministre n'ait pas cru
bon de pousser plus loin l'effort de concertation avec les syndicats concernés
: tous ont déploré auprès de nous le manque de dialogue avec la
chancellerie.
C'est dommage. Au surplus, cette situation est préjudiciable au développement
de certains projets. La formule des unités de vie familiale en est l'exemple
symbolique qui risque d'achopper devant les réticences des personnels chargés
de la faire vivre, comme nous avons pu l'entendre dire lors de notre visite des
Baumettes.
Pour conclure, nous voudrions nous faire l'écho des inquiétudes exprimées par
les personnels des greffes des tribunaux de commerce qui ont été supprimés. Le
reclassement de certains d'entre eux ne va pas sans réelles difficultés,
contrairement à la réponse que nous a fournie Mme la ministre lors de son
audition par la commission.
Nous souhaiterions que le ministère règle au plus vite ces situations
individuelles dues, en partie, à la parution tardive du décret relatif à la
cession des greffes et au reclassement des personnels, et dues aussi au manque
de concertation avec les personnels concernés.
Sur toutes ces questions, que j'ai formulées au nom de mon groupe, je souhaite
que, dans un instant, Mme la ministre puisse m'apporter un certain nombre de
réponses.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
malgré les nombreuses analyses critiques entendues ce matin, il faut bien
reconnaître que, dans le projet de loi de finances pour 2000, les crédits du
ministère de la justice connaissent une augmentation globale de 3,9 %, soit
trois fois plus que la croissance moyenne du budget de l'Etat.
Je ne rappellerai pas dans le détail l'architecture de ce budget, que nos
excellents collègues ont soulignée lors de la présentation de leur rapport.
J'évoquerai tout d'abord la place croissante de la justice dans notre société,
et vous ferai part ensuite de mes interrogations sur la politique
pénitentiaire.
La justice est actuellement au centre des préoccupations de l'opinion
publique, des responsables politiques et des médias. Depuis dix ans, de
nombreux rapports se sont succédé, traduisant la perte de confiance des
citoyens en ce service public. Le manque de moyens face à une demande de plus
en plus pressante de justice y était également dénoncé.
Où en est-on aujourd'hui ? Un plan quinquennal avait été lancé, en 1995, pour
rénover l'institution judiciaire, mais il n'a pu atteindre ses objectifs,
compte tenu de l'insuffisance des moyens mis en oeuvre. Sur la proposition de
Mme le garde des sceaux, voilà deux ans, le Gouvernement a décidé d'engager une
réforme de la justice articulée autour de sept projets de loi. Cet ensemble, en
cours de discussion tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, nécessitera une
réunion en congrès du Parlement.
Ce train de réformes ne pourra être mis en oeuvre sans que la justice
bénéficie durablement d'une part suffisante dans le budget de l'Etat.
En effet, le système judiciaire évolue, mais sans pouvoir répondre, jusqu'ici,
à l'attente des justiciables, dont les demandes sont croissantes. La justice
doit arbitrer des conflits de plus en plus nombreux dans une société frappée
par l'incivilité et la délinquance.
Il est vrai que notre pays fait l'objet de recours devant la Cour européenne
des droits de l'homme. Cependant, il faut rappeler qu'une grande part de ce
contentieux concerne la durée excessive des procédures pénales, les décisions
sans appel des cours d'assises et l'importance de la détention provisoire.
Notre organisation judiciaire reste, malgré l'abondance des affaires à
traiter, soucieuse d'une stricte défense des droits des citoyens. Il en résulte
des délais relativement longs.
Quant aux reproches concernant le nombre des prévenus, il est au centre d'une
large réflexion engagée dans le cadre du projet de loi sur la présomption
d'innocence, afin de limiter la détention provisoire. La solution
gouvernementale consistant à confier la décision de mise en détention à un juge
particulier est l'une des voies de réflexion dans ce débat.
Mes interrogations porteront principalement sur la situation de
l'administration pénitentiaire. Certes, des moyens ont été dégagés par le
ministère afin d'améliorer la prise en charge des personnes détenues et la
sécurité dans le système carcéral.
Dans le cadre de la poursuite de l'amélioration du parc pénitentiaire, je
constate avec satisfaction qu'en plus des efforts de réhabilitation et
d'entretien des locaux l'année 2000 sera celle du plein engagement en faveur de
la construction de six - voire sept, si l'on tient compte de la promesse qui a
été faite pour Saint-Denis de la Réunion - nouvelles prisons et de la
rénovation lourde des cinq principales maisons d'arrêt de France, celles qui
posent le plus de problèmes.
Des préoccupations demeurent néanmoins sur certains aspects du fonctionnement
de l'administration pénitentiaire. Dans beaucoup de pays, les effectifs de
personnes emprisonnées ne cessent de croître. Il faut savoir que l'augmentation
de la population carcérale en France est due en grande partie à la sévérité des
condamnations et à l'allongement consécutif des durées de détention. Cette
surpopulation, malgré une certaine stabilisation récente du fait, notamment, de
la diminution du nombre de prévenus, reste préoccupante par la promiscuité
qu'elle entraîne dans certains établissements pénitentiaires.
Afin d'éviter l'incarcération pour des courtes peines, on dispose, depuis la
loi du 19 décembre 1997 - comme l'a rappelé mon collègue et ami Georges Othily
- de la possibilité de placement sous surveillance électronique. Vous savez
tout l'intérêt que je porte, et depuis de nombreuses années, à cette
alternative à l'emprisonnement.
Mme le ministre nous a annoncé l'expérimentation prochaine de cette technique
dans les centres pour peines aménagées. Je me réjouis - malgré certains bruits
entendus ce matin - qu'en 2000 la mise en oeuvre de cette loi, votée par le
Parlement voilà deux ans, se fasse dans le centre de Metz puis dans celui des
Baumettes, à Marseille. Je serais reconnaissant au Gouvernement de tenir
strictement informé le Sénat de l'évolution de ce processus.
Il faut aussi améliorer les conditions de vie des condamnés détenus. Ce souci
humaniste doit naturellement être concilié avec la préoccupation du maintien de
l'ordre dans les prisons. C'est dire combien les solutions sont difficiles à
trouver. On peut tout de même se féliciter des progrès déjà accomplis.
Cependant, si la prison s'humanise, elle reste un espace de contraintes après
avoir été longtemps une zone de non-droit.
Cette évolution conduit à plusieurs réflexions. La première est qu'une
judiciarisation des décisions du juge d'application des peines doit être
aujourd'hui envisagée. Cette proposition, que j'avais présentée voilà quelques
années, devrait permettre de respecter les droits de la défense dans des
décisions jusqu'ici considérées comme de simples mesures disciplinaires.
En ce domaine de l'humanisation de la vie sous main de justice, la situation
doit impérativement évoluer. Je tiens à souligner l'heureuse initiative prise
par Mme le garde des sceaux de mettre en chantier un code de déontologie - à
défaut d'appliquer à l'administration pénitentiaire le code de déontologie des
forces de sécurité en général - et d'instituer un groupe de travail, sous la
présidence du premier président de la Cour de cassation, M. Guy Canivet, chargé
de rénover le contrôle externe de l'administration pénitentiaire.
Je participe avec intérêt aux travaux de ce groupe, qui devrait proposer dans
ses conclusions une clarification des contrôles existants ainsi que des mesures
nouvelles permettant de faire mieux respecter les droits de la personne humaine
détenue.
Enfin, je tiens à évoquer le système de santé dans le milieu carcéral, qui a
nécessité une réforme, décrite dans la circulaire ministérielle du 21 décembre
1990 et, surtout, clairement définie par la loi du 18 janvier 1994.
Ces efforts d'adaptation étaient indispensables étant donné l'impact de la
durée et des conditions de détention sur l'état de santé des prisonniers. Cet
impact est d'autant plus sensible que la population carcérale a un profil
sanitaire particulier.
Elle comprend, en effet, 80 % de fumeurs invétérés et 15 % de toxicomanes ;
les hépatites B et C y sont fréquentes ; le taux de prévalence du VIH y est
beaucoup plus important que dans l'ensemble du pays ; enfin, des troubles de
santé mentale touchent un nombre non négligeable de détenus.
Les moyens sanitaires en milieu pénitentiaire ont été longtemps inadaptés à la
diversité et à la gravité des pathologies. Certes, les contraintes liées au
maintien de l'ordre et à la sécurité rendent l'intervention médicale plus
complexe.
Aujourd'hui, que constate-t-on ? Les unités de consultation et de soins
ambulatoires sont créées ou en passe de l'être. Les conventions de transfert de
la prise en charge sanitaire de l'administration pénitentiaire vers le service
public hospitalier sont presque toutes élaborées. De même, l'adaptation des
missions de l'établissement public de santé national de Fresnes, dans le cadre
de ce nouveau dispositif, est en préparation. Je me félicite de cette
évolution.
Néanmoins, le caractère alarmant du récent rapport Pradier, qui attire
l'attention sur les difficultés résultant d'une présence de malades mentaux en
augmentation dans les prisons, conduit logiquement à de nouveaux efforts. Ces
derniers doivent se faire en faveur non seulement des services médicaux
psychiatriques régionaux mais aussi d'autres structures d'accueil à
inventer.
J'aimerais savoir si l'année 2000 sera celle de la mise en oeuvre d'un
dispositif sanitaire cohérent, rénové, en pleine application de la loi du 18
janvier 1994. Pour ma part, je souhaite que les actions entreprises jusqu'ici
se concrétisent le plus rapidement possible.
Compte tenu de la progression globale des crédits du ministère de la justice
et des efforts en vue d'une évolution humaniste des services pénitentiaires, je
voterai, malgré certaines insuffisances, le budget de la justice pour 2000.
(Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
Robert Badinter procédait, voilà un instant, avec le brio et la maîtrise du
sujet que nous lui connaissons, à l'examen des crédits des services
judiciaires. J'aborderai, quant à moi, celui des crédits de l'administration
pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse.
Ce budget est en constante augmentation. Pourtant, nous avons noté, en
commission des lois et peut-être aussi ce matin, au cours des débats, des
réactions plutôt contrastées.
Pour ne fâcher personne dans cet hémicycle, et après avoir relevé l'avis
favorable du rapporteur spécial de la commission des finances et la mention «
bon budget au plan quantitatif » décernée à l'Assemblée nationale par le
rapporteur, M. Devedjian, je ne puis que m'étonner de l'indignation excessive
de certains.
Entendre un ancien ministre des finances, ces derniers jours, et ce matin
encore à la radio, vilipender sans retenue l'action qui est conduite, critiquer
un budget trois fois supérieur à la croissance moyenne du budget de l'Etat,
réclamer à hauts cris un plan Orsec pour la justice après avoir lui-même,
lorsqu'il était aux responsabilités, taillé allègrement dans les crédits de la
justice, ne manque pas de piquant. Il est vrai que, pour dépenser beaucoup plus
et baisser massivement les impôts, M. Madelin, puisque c'est de lui qu'il
s'agit, entrevoit la panacée de la privatisation, privatisation des prisons
avant celle, on peut l'imaginer, d'autres pans de notre administration.
C'est une vision, c'est une philosophie, mais ce n'est pas la nôtre. Avec
moins de démagogie, mais certainement avec plus de sérénité, Mme la garde des
sceaux nous propose de poursuivre et d'amplifier les efforts consentis ces
trois dernières années en augmentant - cela a été dit - de près de 6 % les
crédits de l'administration pénitentiaire et de 14,7 % ceux qui concernent la
protection judiciaire de la jeunesse.
L'administration pénitentiaire absorbe plus d'un quart du budget de la justice
et, cette année, plus d'un tiers des autorisations de paiement. Cela démontre,
là encore, la volonté du Gouvernement de mettre en oeuvre les quatre grandes
orientations de la politique pénitentiaire, que je ne rappellerai pas.
Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit la création de 386 emplois,
dont 290 emplois de surveillants. Je me félicite que ces emplois soient
destinés à mieux préparer la sortie de prison. Or, cette préparation, qui est
essentielle pour prévenir la récidive, a longtemps été négligée par les
pouvoirs publics. Mme la ministre de la justice tente de rattraper ce retard :
outre le projet d'exécution des peines, qui permet de placer les personnes
condamnées dans une perspective de réinsertion dès le début de la peine, et les
centres pour peines aménagées, elle met en place deux réformes susceptibles de
favoriser la réinsertion des détenus : la mise en place des unités de vie
familiale et la modification de la liberté conditionnelle.
Nous encourageons Mme la ministre à généraliser les dispositifs d'unités de
vie familiale, tout comme nous l'encourageons à réfléchir à l'instauration d'un
revenu minimum pour les détenus les plus démunis.
La libération conditionnelle, quant à elle, est l'une des mesures les plus
efficaces pour préparer la réinsertion des condamnés et limiter la récidive. On
dénombre deux fois moins de récidives parmi les détenus qui ont bénéficié de
cette mesure. Cela a encore été rappelé ce matin par un responsable syndical
dans une interview à un quotidien.
Or, depuis quelques années, on assiste à une baisse du nombre de libérations
conditionnelles. Aussi Mme la ministre a-t-elle, à juste raison, mis en place
un groupe de travail chargé de réfléchir à cette question et dont nous
attendons beaucoup.
Si l'on constate depuis quatre ans une diminution constante de la population
carcérale, le taux d'occupation des établissements pénitentiaires reste encore
trop élevé.
Cette surpopulation associée à l'allongement de la durée des incarcérations a
des incidences sur les détenus, dont le taux de suicide est très préoccupant.
L'observatoire international des prisons a fait état du suicide de 114
personnes dans les prisons françaises depuis le début de l'année. Cette
information a beaucoup ému l'opinion. Les gardiens de prison nous le disent :
il est impossible de travailler avec des personnes qui n'ont aucun espoir.
L'état de santé des détenus est, lui aussi, inquiétant. A côté des pathologies
traditionnelles, on assiste à une augmentation des détenus souffrant de
troubles mentaux, troubles aggravées par l'allongement constant des peines qui
leur sont infligées ainsi que par les conditions de la vie carcérale.
Malgré le renforcement des soins psychiatriques en prison se pose en
permanence la question de la présence de ces détenus malades, au comportement
imprévisible et souvent violents. Face à eux, les surveillants sont démunis,
car ils ne sont pas formés pour gérer ce type de situation.
Je me réjouis que le Gouvernement fasse des efforts importants pour la
formation des personnels pénitentiaires et je me félicite des mesures
statutaires et indemnitaires dont ceux-ci font l'objet.
Nombre de problèmes que je viens d'évoquer sont en partie liés à la
surpopulation carcérale. Les efforts pour lutter contre cette dernière ont,
jusqu'à présent, essentiellement porté sur les flux d'entrée en détention.
Outre le développement des alternatives à l'incarcération, qu'il faut
multiplier à tout prix, une réforme de la détention provisoire a été engagée.
Par ailleurs, le projet de loi visant à renforcer la protection de la
présomption d'innocence, actuellement en discussion devant le Parlement,
devrait limiter les détentions provisoires, et donc l'encombrement des maisons
d'arrêt.
Quant à la protection judiciaire de la jeunesse, les crédits qui la concernent
augmentent, dans le projet de loi de finances pour 2000, de 14,7 % et
atteignent 3 200 millions de francs en crédits de paiement. Cette forte
croissance des crédits mis à la disposition de la protection judiciaire de la
jeunesse, que l'on peut, comme l'a fait le rapporteur pour avis M. Patrice
Gélard, qualifier d'exceptionnelle, traduit la priorité donnée par le
Gouvernement au traitement de la délinquance juvénile.
L'augmentation des moyens en personnel est sans précédent. Cet effort se
traduit par des mesures de revalorisation statutaires et indemnitaires, par un
effort pour le recrutement et la formation des délégués des procureurs et par
une meilleure prise en compte des situations d'urgence grâce à une coordination
accrue. Cela doit maintenant se traduire rapidement par du concret.
Dans vingt-six départements prioritaires, la prise en charge immédiate a été
décidée et elle est effective dans neuf d'entre eux. Même si elle se heurte à
des difficultés, la mise en place de ces centres de placement immédiat est une
réelle innovation.
On peut se féliciter du travail accompli par les délégués du procureur chargés
de mettre en oeuvre, à la demande ou sous le contrôle du parquet, des mesures
décidées dans le cadre de l'opportunité des poursuites, principalement des
rappels à la loi et du classement sous condition.
Le projet de budget pour 2000 marque votre volonté, madame la garde des
sceaux, de faire de ce secteur un outil majeur de la lutte contre la
délinquance des mineurs et, par ricochet, de la délinquance en général. Le
groupe socialiste se félicite de ce choix.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
M. Jean-Pierre Bel.
Notre collègue Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des
finances, a émis un avis favorable sur votre projet de budget, madame la
ministre. La commission des lois, elle, s'en est remise à la sagesse du Sénat
pour les crédits des services judiciaires, a adopté ceux de la protection
judiciaire de la jeunesse et rejeté ceux de l'administration pénitentiaire. Je
laisse chacune juge de la cohérence de l'ensemble !
Quant au groupe socialiste, madame la ministre, il votera sans état d'âme
votre projet de budget comme il sera prochainement derrière vous, uni et
rassemblé, pour appuyer vos choix, et plus précisément le chantier de réforme
de la justice. Nous le ferons d'autant plus aisément, madame la ministre, que
vos engagements et votre action depuis maintenant deux ans et demi donnent du
sens à nos convictions et font honneur à l'image que nous avons d'une justice
équitable, transparente et moderne.
(Applaudissements sur les travées
socialistes. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Madame le garde des sceaux, depuis deux ans, le Sénat a approuvé le budget du
ministère de la justice qui a effectivement connu des augmentations sensibles,
et vous soulignez vous-même qu'en trois ans les crédits du ministère de la
justice progresseraient de 14 % et que près de 3 000 postes seraient créés.
Le fait que, pour 2000, le budget augmente de 3,91 %, un peu moins que les
autres années mais l'inflation est, paraît-il, moins importante, ne doit pas
faire oublier qu'il ne représente, beaucoup l'ont dit, que 1,62 % du budget de
l'Etat, pour une de ses missions essentielles. Pour un parlementaire en
fonction depuis quelques années, une progression de 0,2 % par an, c'est tout de
même considérable.
Mais encore faut-il examiner de près si ce budget correspond aux objectifs
affichés d'amélioration de la justice au quotidien, au-delà des réformes en
tous genres engagées.
S'il faut se féliciter, comme l'ont fait MM. les rapporteurs et de nombreux
orateurs, de l'effort en faveur de la protection judiciaire de la jeunesse pour
traiter la délinquance des mineurs - 380 postes créés auxquels s'ajoutent 25
postes de magistrat et de greffier - et si on note une augmentation de 5,9 %
des crédits des services pénitentiaires, on ne peut en dire autant des services
judiciaires, dont la part relative baisse en 2000. L'augmentation n'est que de
0,6 %, monsieur le rapporteur ; j'ai puisé ces excellents chiffres dans votre
rapport.
Une observation souvent faite s'impose tout d'abord en ce qui concerne
l'équipement. On note une forte diminution des autorisations de programme et
des crédits de paiement, et, quel que soit le garde des sceaux - cela dure
depuis longtemps - on ne peut guère se féliciter de l'efficacité des services
du ministère de la justice en matière d'équipement. D'ailleurs, certains
nouveaux palais de justice - mais cette situation n'est pas nouvelle - font
sans doute plaisir aux architectes mais moins aux utilisateurs. En effet, on
constate des malfaçons ou des difficultés de fonctionnement considérables dans
un certain nombre de palais de justice. Je pense tout particulièrement à l'un
d'entre eux, que vous avez inauguré récemment, madame le garde des sceaux.
J'en viens aux moyens des services judiciaires. Il est apparemment très
satisfaisant que des juridictions soient dotées de nombreux postes. Cependant,
un examen attentif montre que, sur les 212 postes de magistrat créés, seuls 34
postes sont réservés à l'amélioration de la justice au quotidien, outre les 25
postes que j'évoquais tout à l'heure au titre de la justice des mineurs.
Si le recrutement de cent assistants de justice supplémentaires est positif,
on peut s'interroger sur la création de 1 050 agents de justice, ce qui
constitue une nouveauté. Nous pensions jusqu'à présent que les emplois-jeunes
devaient être, comme cela nous avait été dit, des emplois « émergents ». Or, il
apparaît clairement que, dans leur grande majorité, ceux-ci vont remplacer les
contrats emploi-solidarité et autres emplois précaires pour soulager les
greffes et les services d'accueil du public.
Mais surtout, outre les quarante-huit emplois prévus pour la mise en oeuvre de
la réforme de la procédure de la détention provisoire, après les cinquante qui
avaient été inscrits au budget de 1999, cent postes sont réservés pour la
réforme des tribunaux de commerce, afin de permettre la « mixité ». On ne peut
que déplorer, même si la réforme des tribunaux de commerce se révèle
nécessaire, le caractère précipité et polémique pris par cette question.
Certes, des dysfonctionnements et quelques comportements indélicats, et même
délictueux, ont existé. Ils ont été grossis à l'excès par un rapport trop
partiel et partial ; ce n'est pas celui qui a été établi par le ministère de la
justice. D'ailleurs, qu'a donc fait le parquet sur ces affaires ? Cependant, on
ne peut oublier les services rendus par les juges consulaires depuis tant de
décennies. D'ailleurs, je serais heureux de connaître le nombre d'appels
concernant les décisions au fond des tribunaux de commerce, notamment en
matière de défaillances d'entreprises. Qu'en sera-t-il au 1er janvier prochain,
puisque nombre de juges de tribunaux de commerce démissionnent en bloc, car ils
ont été ulcérés par la campagne de dénigrement systématique et orientée dont
ils ont fait l'objet.
Certes, et ce sera sans doute la seule réforme de la carte judiciaire qui
marquera votre présence à la chancellerie - même si nous vous y souhaitons une
longue vie - l'émiettement des juridictions commerciales dans certaines zones
mérite un regroupement, à condition qu'une juste indemnisation des personnels
et des greffes intervienne.
Par ailleurs, nous ne connaissons pas encore, si ce n'est de manière très
lacunaire et par voie de presse, la teneur exacte des projets dans ce domaine.
Deux questions se posent. Compte tenu des enjeux humains, notamment la
situation des personnels, et des enjeux économiques, la justice commerciale
requiert à la fois la rapidité et une connaissance approfondie des entreprises.
Nous savons que, dans les circonscriptions judiciaires où il n'existe pas de
tribunaux de commerce, la situation n'est pas non plus parfaite, c'est le moins
que l'on puisse dire, et que les professionnels du droit se plaignent de
retards dans le traitement des difficultés des entreprises dans certaines
juridictions. Qu'en sera-t-il demain ? Comment garantir, même s'ils sont
accompagnés d'assesseurs, qu'un ou deux juges professionnels par tribunal de
commerce mèneront à bien cette tâche ?
Enfin, quels juges allez-vous recruter et comment ? Par l'Ecole nationale de
la magistrature ou dans divers corps d'Etat ? Il faut être très attentif à la
qualité des personnes recrutées : des professionnels du droit, dotés d'une
connaissance des entreprises. De ce point de vue, les juges du commerce tels
qu'ils existent actuellement sont indispensables.
Enfin, j'évoquerai la situation dans les départements et territoires
d'outre-mer, dernier sujet de préoccupation qui ne permet pas de porter un
jugement favorable sur votre projet de budget, madame le garde des sceaux. J'ai
eu l'occasion de dire, dans mon rapport sur le budget des territoires
d'outre-mer, combien la situation est préoccupante dans certains territoires.
D'ailleurs, les statistiques sont lacunaires ou très tardives ou inexistantes.
Il est un département français, la Guyane, où la justice est en faillite, comme
le montrent les rapports parlementaires et de grands hebdomadaires. Pour sa
part, la commission des lois du Sénat l'a constaté sur place. Il faut
absolument remettre de l'ordre. En effet, sur 1 200 jugements rendus, une
vingtaine seulement auraient été dactylographiés et exécutés. Si c'est la
réalité, on ne peut accepter cette situation plus longtemps et des mesures
urgentes doivent être prises pour y remédier.
Telles sont, madame le garde des sceaux, les observations complémentaires que
je souhaitais présenter après mon excellent collègue M. Fauchon. Bien entendu,
ce budget se situe aussi dans une période où l'on parle beaucoup de la justice,
certains le faisant d'ailleurs de manière inconsidérée. Vous le savez bien,
nous attendons que l'Etat prenne ses responsabilités quand des magistrats se
permettent de dépasser les bornes, soit en critiquant des commissions
parlementaires, soit - ce qui est plus grave - en disant que les sénateurs font
du chantage.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.
- M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le
projet de budget qui nous est présenté aujourd'hui marque une progression de
3,9 % par rapport à 1999 et s'inscrit dans la continuité des efforts engagés
dans ce domaine depuis 1988, comme cela a été dit à plusieurs reprises par les
orateurs qui m'ont précédé.
En effet, les crédits consacrés à la justice sont maintenus, et certains
d'entre eux, notamment ceux qui sont destinés aux créations de postes,
augmentent même notablement. Aussi, quantitativement, ce projet de budget
est-il bon.
Pourtant, je reste sceptique quant aux résultats que le projet de budget
permettra d'obtenir, n'étant pas convaincu de la complète utilisation des
crédits annoncés.
M. Raymond Courrière.
C'était la spécialité de M. Juppé, cela !
M. Dominique Leclerc.
Cette incertitude, nous la tenons de la situation actuelle : on constate la
diminution du taux de consommation des crédits de paiement et des autorisations
de programme, alors même que persistent un certain engorgement des tribunaux,
l'allongement des délais de jugement et un manque d'accessibilité de la justice
pour l'ensemble de nos concitoyens.
Ainsi, si l'aspect quantitatif est satisfaisant, on ne peut pas toujours en
dire autant de l'aspect qualitatif. Il est donc essentiel d'améliorer la «
performance » de la justice.
Cela doit se traduire notamment, bien sûr, par des efforts financiers, qui
devraient vous être aisés, madame le garde des sceaux, puisque le Gouvernement
annonce avec satisfaction des embellies fiscales.
Cependant, l'amélioration du fonctionnement de la justice exige une volonté
politique forte.
A cet effet, nous attendons, madame le garde des sceaux, l'annonce d'une
nouvelle loi de programmation qui permettrait non seulement de remettre à
niveau l'ensemble du secteur judiciaire, mais aussi d'y apporter quelques
améliorations.
Je pense tout d'abord ici aux délais de jugement, qui, je vous l'ai dit,
restent beaucoup trop longs, que ce soit au civil, au pénal ou devant les
juridictions administratives, où le nombre annuel d'affaires enregistrées
progresse de plus de 10 % par an.
Or les Français ne comprennent plus aujourd'hui de telles lenteurs. Par
conséquent, je souhaite que les créations de postes prévues par votre projet de
budget permettent, malgré le nombre insuffisant de magistrats spécialisés, une
amélioration notable des services rendus.
Permettez-moi maintenant, mes chers collègues, d'aborder le problème de la
petite délinquance, notamment de la délinquance des mineurs, à laquelle nos
concitoyens sont particulièrement sensibles, puisqu'ils y sont confrontés
quotidiennement.
Dans ce domaine, certaines solutions, comme la convocation par officier de
police judiciaire ou la mesure de réparation, mériteraient d'être préconisées
plus largement, malgré certaines réticences des uns et des autres.
En effet, la convocation par officier de police judiciaire, de par sa forme,
est une bonne mesure, puisqu'elle permet au jeune délinquant de prendre
conscience de la relation directe qui existe entre son acte délictueux et
l'intervention du juge.
La mesure de réparation, quant à elle, présente l'avantage de pouvoir être
prononcée avant le jugement. Elle constitue ainsi une réponse rapide et adaptée
au délit, tout en réduisant le sentiment d'impunité et en replaçant la victime
au centre du débat.
Dans ce domaine, les maisons de justice, qui sont en plein développement, ont
elles aussi un grand rôle à jouer. Elles permettent en effet d'assurer une
présence judiciaire de proximité et de répondre de manière adaptée au problème
de la petite délinquance, notamment en associant différents partenaires aux
professionnels de la justice, ainsi qu'en impliquant les parents.
Toutefois, nous devons prendre garde aux dérives possibles, car ces maisons de
justice sont des lieux d'accès au droit, où il faut notamment veiller à ce que
l'institution judiciaire ne soit pas désacralisée. Nous devons donc faire en
sorte qu'elles restent l'apanage de professionnels, qui seuls sont susceptibles
de rendre une justice de qualité.
Le problème du financement se pose par ailleurs avec la même acuité pour
l'aide juridictionnelle, qui connaît un immense succès, puisque le nombre des
dossiers a décuplé en dix ans.
Pourtant, là aussi, les moyens, qui atteignent 17 millions de francs, restent
insuffisants. Or, si vous souhaitez réellement que les plus démunis puissent
bénéficier eux aussi d'une défense de qualité et que chacun de nos concitoyens
puisse se voir accorder une aide, vous vous devez d'accroître les crédits
consacrés à l'aide juridictionnelle. Nous ne pouvons, madame le garde des
sceaux, au motif de vouloir réduire les flux, faire entrer la justice dans une
logique purement comptable.
J'aimerais à présent formuler quelques remarques sur la situation de
l'administration pénitentiaire.
Dans ce domaine, malgré une hausse de 5,85 % par rapport au précédent budget,
les moyens en personnels restent encore insuffisants, notamment au regard de la
surpopulation carcérale qui, en dépit d'une stagnation du nombre des détenus
depuis trois ans, reste importante. Elle accroît les risques de conflits entre
détenus, et donc la charge de travail des personnels de surveillance, qui se
trouve également alourdie par certaines réformes que vous mettez en place, par
exemple l'instauration de la « troisième douche ».
Cette dernière réforme est bonne en soi, mais, une fois encore, sa mise en
oeuvre exige des moyens supplémentaires en termes de personnels de
surveillance, que les établissements, pour certains d'entre eux déjà en
sous-effectif, ont du mal à dégager. Ne serait-il pas possible, pour le parc
classique, de procéder à l'installation de douches dans les cellules, ce qui
éviterait des mouvements supplémentaires et donc les problèmes de personnel
afférents ?
Un autre problème important demeure celui du suivi social des détenus, en vue,
notamment, de limiter la récidive. Permettez-moi à cet égard de prendre
l'exemple de mon département.
En juin 1999, le service pénitentiaire de probation et d'insertion a été
officiellement créé en Indre-et-Loire. Ainsi, le suivi social et l'insertion
sont désormais assurés par un seul service départemental responsable des
milieux fermé et ouvert. Ce service représente aujourd'hui le seul
interlocuteur administratif pénitentiaire en matière d'accompagnement et
d'insertion pour tous les partenaires départementaux, ce qui est une bonne
chose.
J'ai pu personnellement constater la remarquable qualité du travail accompli
par cette administration. Cependant, pour garantir véritablement l'efficacité
du suivi par ce service des populations concernées, il convient de poursuivre
avec détermination les efforts entrepris en matière de recrutement.
En effet, j'ai noté qu'un éducateur est chargé en permanence d'en moyenne 120
dossiers, ce qui est très lourd. Globalement, ce sont en permanence près de 1
000 dossiers par an qui sont gérés par huit travailleurs sociaux.
Par ailleurs, les observations que j'ai faites localement me conduisent à
penser que le développement de la semi-liberté est essentiel, l'enfermement
contribuant, dans la plupart des cas, à déstructurer plus encore la
personnalité d'individus déjà en difficulté.
Pour les peines inférieures à un an d'emprisonnement, qui sont les plus
nombreuses, le magistrat peut prononcer une mesure alternative à
l'incarcération. La semi-liberté fait partie de ces mesures, or le recours à
celle-ci est actuellement limité, faute de places, ce qui est particulièrement
regrettable. Dans mon département, la maison d'arrêt de Tours possède quatorze
places de détention en semi-liberté, ce qui est nettement insuffisant au regard
des besoins. Alors que nous nous accordons tous aujourd'hui pour recommander un
recours plus large aux mesures alternatives à l'incarcération, le manque de
moyens conduit encore à limiter l'application du régime de la semi-liberté.
La construction d'un centre autonome en agglomération constituerait une
réponse cohérente avec les ambitions affichées par les différents budgets de la
justice depuis la mise en oeuvre du programme pluriannuel. Je souhaite, dans
l'intérêt des personnes concernées, que cette requête rencontre votre
approbation, madame le ministre, et je vous remercie par avance de bien vouloir
prendre en compte les différents points que je viens d'évoquer.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Othily.
M. Georges Othily.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat doit
aujourd'hui se prononcer sur les crédits du ministère de la justice. Si l'étude
de chaque projet de budget est un moment important pour le Parlement, celui que
nous examinons maintenant est essentiel, puisqu'il correspond à l'une des
missions régaliennes de l'Etat. Qui plus est, cette fonction, en application de
la théorie de la séparation des pouvoirs, est l'un des trois pouvoirs
permettant à la démocratie d'exister.
Un Etat de droit ne peut, en effet, durer sans une justice indépendante et
efficace. Or, en Guyane - et j'y reviendrai ultérieurement - la justice ne
répond plus à ces principes.
Les crédits qui nous sont soumis, madame la garde des sceaux, connaissent une
augmentation de 3,9 % dans le projet de loi de finances pour 2000. A ce stade
du débat, il apparaît inutile de revenir sur l'ensemble des éléments que nous
ont présentés, avec éloquence, nos éminents collègues, M. Haenel, Mme Derycke
et M. Gélard. Je centrerai donc mon intervention sur deux points, à savoir la
situation particulière de la justice en Guyane et les peines alternatives à
l'emprisonnement.
J'évoquerai tout d'abord les défaillances dont souffre la justice
guyanaise.
Si, en métropole, le système judiciaire connaît des maux, que la loi de
programmation de 1995 a permis de commencer à atténuer - action d'ailleurs
poursuivie par le Gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre - en
Guyane la justice se trouve actuellement dans un état plus que lamentable.
Madame la garde des sceaux, un rapport vous a été remis, voilà quelques mois,
dressant un tableau accablant de l'état de la justice guyanaise : au manque de
moyens matériels s'ajoutent des insuffisances en matière de personnel.
En effet, on peut s'étonner que le budget de fonctionnement de la juridiction
de Cayenne stagne depuis plus de huit années, alors que la population
guyanaise, pour sa part, a crû d'un tiers au cours de la même période. Dans ce
département d'outre-mer, l'on peut parler réellement, et le mot n'est pas trop
fort, de justice sinistrée.
Madame la garde des sceaux, si le Gouvernement marque une attention
particulière à la justice, notamment grâce à votre action, le département de la
Guyane semble être oublié. Il faut pourtant impérativement donner à la justice
guyanaise les moyens d'améliorer son fonctionnement au quotidien.
En ce sens, si l'on peut souhaiter une hausse des effectifs et des moyens en
personnel, il apparaît urgent, parallèlement, de créer une cour d'appel
autonome à Cayenne, car l'échelon actuel de Fort-de-France ne répond pas aux
exigences d'une juridiction à double degré, son fonctionnement anormal étant
fortement et depuis longtemps remis en cause.
En effet, les réquisitions sont souvent prises, en première instance et en
appel, par le même substitut au procureur lorsque l'avocat général ne peut
venir de Fort-de-France.
On peut proposer, au surplus, pour tenir compte des exigences de la
population, la création d'un tribunal de grande instance dans la région ouest
de la Guyane. Si une maison de justice a été créée à Saint-Laurent-du-Maroni,
cela ne renforce en aucun cas la présence judiciaire.
Ainsi, madame la ministre, les départements d'outre-mer, partie intégrante de
la République, doivent se voir appliquer les mêmes lois et connaître le même
système juridictionnel que la métropole.
Ce n'est pas le cas actuellement, et la situation est telle, en Guyane, que
des mesures urgentes doivent être arrêtées, car on assiste à des grèves à
répétition au tribunal de Cayenne. Bientôt, les magistrats descendront dans la
rue avec les membres du barreau. Ils l'ont d'ailleurs déjà fait voilà quelque
temps, et ils risquent très certainement de récidiver avant la fin de
l'année.
S'agissant des mesures alternatives à l'emprisonnement, je désirerais
maintenant vous faire part de mes interrogations concernant le service
pénitentiaire, ce pan de la justice que l'on dit souvent oublié. Dans la
plupart des pays occidentaux, les effectifs des personnes emprisonnées ne
cessent de croître. Pourquoi, dans les sociétés où la liberté est posée comme
un principe fondamental, recourt-on toujours autant à la prison ? La prison y
apparaît comme la sanction habituelle et efficace, et si la surpopulation
carcérale n'est pas une caractéristique française, elle reste un problème
préoccupant.
Aujourd'hui, après la suppression des peines corporelles, des travaux forcés
et de la peine de mort, la privation de liberté est la peine la plus élevée
dans l'échelle des peines. Alors que la gamme des petites peines a été élargie,
les infractions les plus graves n'ont toujours, à l'heure actuelle, qu'une
solution : la prison.
Parmi les peines les moins lourdes, on doit compter, depuis la loi du 19
décembre 1997, le placement sous surveillance électronique.
Ce système, comme l'a d'ailleurs rappelé mon éminent collègue Guy Cabanel,
apparaît comme une alternative intéressante à l'emprisonnement. Je serais
heureux, madame la ministre, que vous nous rappeliez, dans cet hémicycle, les
lieux d'expérimentation qui ont été choisis par le Gouvernement. Surtout, je
pense qu'il est grand temps de voir appliquer cette loi adoptée par le
Parlement voilà bientôt deux ans. Je vous serais ainsi reconnaissant de me dire
quand cette loi sera appliquée non plus sous forme d'expérimentation sur
certains sites mais d'une manière générale et définitive.
Madame la ministre, vous pouvez compter sur notre vote favorable sur votre
projet de budget.
(Applaudissements sur les travées du RDSE. - M. Haenel,
rapporteur spécial, et Mme Derycke, rapporteur pour avis, applaudissent
également.)
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier les
rapporteurs des commissions qui ont apporté leur concours aux travaux
parlementaires précédant le vote de la loi de finances.
Le rapporteur spécial de la commission des finances, M. Haenel, a donné acte,
et je l'en remercie, de « l'effort budgétaire réel » fait par le Gouvernement
en faveur de la justice, ce qui justifie un avis favorable à l'adoption du
budget de la justice. Il a également fait plusieurs observations importantes
auxquelles je vais m'efforcer de répondre.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez regretté notamment que les services
de la justice ne répondent pas aux questions que vous leur avez posées. Je
déplore absolument ce constat, car j'ai demandé que le rapporteur spécial et
plus généralement tous les parlementaires reçoivent le plus rapidement possible
réponse à leurs questions. Vous avez d'ailleurs bien voulu reconnaître qu'il en
était le plus souvent ainsi. J'aimerais donc que vous me fassiez connaître très
précisément toutes les questions sans retour pour que vous puissiez recevoir,
comme il est bien normal, les réponses qui vous sont dues.
Je voudrais aussi saluer la qualité des travaux des rapporteurs pour avis de
la commission des lois.
Mme Derycke a fait une analyse approfondie et nuancée de la situation des
juridictions et a rappelé l'importance des moyens nouveaux, aussi bien en
personnel que pour l'équipement.
M. Gélard, tout en relevant les difficultés de traitement de la délinquance
juvénile, a salué le changement d'échelle dans les moyens alloués à la
protection judiciaire de la jeunesse.
M. Othily s'est attaché à décrire les progrès qui restent encore à réaliser
par l'administration pénitentiaire pour remplir une mission dont il connaît la
difficulté.
Sans entrer dans le détail des crédits et avant de répondre aux principales
observations des rapporteurs, je voudrais rappeler brièvement les grandes
lignes de l'action que j'ai entreprise à la tête de ce ministère.
Il s'agit, vous le savez, d'une politique d'ensemble qui, d'une part, engage
des réformes très attendues par nos concitoyens et mobilise les moyens
nécessaires pour les mettre en oeuvre et, d'autre part, inscrit dans la durée
l'effort de modernisation et d'amélioration d'une justice au service des
citoyens, conformément à la communication que j'ai présentée au conseil des
ministres du 29 octobre 1997 et dont nous avons débattu ici même le 22 janvier
1998, débat qui donnait déjà, voilà deux ans, une vision globale des textes qui
seraient soumis au Parlement.
Les réformes embrassent l'ensemble du système de la justice. Ce sont d'abord
la réforme constitutionnelle et les projets de loi organique qui fondent
l'organisation judiciaire ; ce sont aussi le projet de loi sur la présomption
d'innocence, qui renforce les garanties du justiciable, le projet de loi sur la
conduite de la politique pénale, qui garantit l'égalité et l'impartialité des
poursuites ; ce sont enfin les réformes destinées à simplifier et à rendre plus
efficace la justice au quotidien. Je crois que l'achèvement de ce vaste
chantier législatif permettra de mieux garantir l'indépendance et
l'impartialité de la justice que réclament les Français.
Mais nos concitoyens réclament aussi une amélioration de la justice au
quotidien. C'est un objectif qui demande un travail de modernisation de longue
haleine et une augmentation des moyens inscrits dans la durée. C'est ce qui est
fait depuis trois ans.
Comme l'ont relevé les rapporteurs, le budget pour 2000 est un très bon
budget. C'est d'autant plus remarquable qu'il vient après les deux exercices
1998 et 1999 qui avaient déjà été très favorables. C'est ainsi que, sur les
trois premiers budgets de la législature, les crédits du ministère auront
progressé de 3,4 milliards de francs, soit un gain de 14 %, et ses effectifs
auront gagné près de 3 000 postes - 2 930 exactement.
Je veux remercier M. Fauchon de son hommage au travail réalisé dans mon
ministère et par l'ensemble des juridictions. Je comprends évidemment que l'on
puisse souhaiter encore plus et encore mieux ; mais on ne rattrape pas, vous le
savez, de tels retards en un jour ni en un seul budget, et c'est bien par un
effort persévérant et soutenu dans la durée que les améliorations que nous
attendons seront obtenues.
Les créations de postes de magistrat seront au total de 422 en trois ans, soit
un effort sans précédent depuis vingt ans. Par ailleurs, les effectifs
d'auditeurs à l'Ecole nationale de la magistrature ont également été accrus dès
1998 pour passer de 140 à 185, ce qui augmentera les effectifs de la promotion
qui sortira en 2002.
A ce sujet, je veux dire à M. Badinter que, actuellement, la part des
magistrats recrutés par le concours de l'ENM représente 80 % des magistrats en
fonction, 20 % provenant soit des concours exceptionnels, soit des recrutements
latéraux.
Les deux concours exceptionnels de 1998 et 1999 représenteront 200 magistrats
supplémentaires, la part de l'ENM, pour la même période, étant de 370
magistrats.
Quant à la commission d'avancement statuant pour l'intégration de magistrats,
elle est aujourd'hui constituée uniquement de magistrats. J'envisage, dans la
loi organique sur le CSM, de transférer cette compétence au Conseil supérieur
de la magistrature rénové.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Très bien !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
L'effort en faveur de la protection judiciaire de la
jeunesse est historique, avec 380 emplois et une augmentation de 16 % des
crédits ordinaires.
M. le rapporteur spécial a bien voulu observer que « cet effort budgétaire ne
se traduit pas encore par une amélioration du fonctionnement de la justice
».
S'agissant des délais de jugement, je crois qu'il est facile d'expliquer le
décalage. Les statistiques de 1998, sur lesquelles portent les commentaires,
reflètent les postes ouverts dans les budgets de 1997 et de 1998.
L'augmentation forte des moyens en magistrats est intervenue en 1999 et sera
surtout sensible l'an prochain. Chacun comprendra que les moyens attribués pour
l'année prochaine ne peuvent évidemment avoir eu d'impact sur les statistiques
de l'année dernière !
En outre, et comme le rappelle à juste titre M. le rapporteur spécial, les
créations de poste ne se traduisent pas par des renforts au 1er janvier, du
fait des délais liés aux mouvements de personnel. En général, les magistrats ne
sont arrivés dans les juridictions qu'à l'automne 1999.
Vous avez également insisté, monsieur le rapporteur spécial, sur le problème
important des vacances de postes de magistrat. Le seul chiffre sur lequel nous
pouvons nous fonder est celui des vacances budgétaires. Sur ce plan, je
confirme que nous sommes arrivés à un taux très bas, puisque, à la fin de 1999,
seuls 46 postes budgétaires seront non utilisés sur 6 502 ouverts en loi de
finances pour 1999, c'est-à-dire un taux de 0,7 %. Ce résultat est d'autant
plus remarquable que nous sommes en période de créations de poste et qu'il faut
à la fois combler les vacances antérieures et recruter pour pourvoir les
nouveaux emplois.
Mais il faut aussi parler des absences physiques pour raisons diverses, car
c'est bien cela qui est vécu dans les juridictions. Les mises à la disposition
sont modestes - soixante-dix - et les décharges syndicales sont seulement au
nombre de douze. Bien entendu, ce sont les absences pour maladie, les congés de
maternité ou les congés pour formation qui comptent, et c'est la raison pour
laquelle il convient de poursuivre l'effort de création de postes de magistrats
placés auprès des chefs de cour. C'est en effet le système qui permet de faire
face aux vacances temporaires.
Je ne rappelle pas cela pour éluder la question, mais parce que j'ai déjà
indiqué à plusieurs reprises, y compris aux chefs de cour à qui j'ai présenté
le budget pour 2000, que le travail des juridictions sera aussi jugé sur leur
capacité à tirer profit des moyens qui leur sont accordés pour améliorer le
service public. C'est un message qui, je crois, a été entendu.
M. Badinter a fort justement souligné la nécessité de maîtriser les flux en
amont. Plusieurs dispositions vont dans ce sens : le développement des
alternatives aux poursuites pénales, d'ailleurs souhaité également par M.
Leclerc, les aides à la transaction, à la conciliation, la médiation civile, la
réorientation vers les tribunaux d'instance de certains petits contentieux
grâce à l'élévation de leur taux de compétence, la création des maisons de
justice.
Je suis d'accord avec M. Badinter pour rappeler que toutes ces mesures ont
pour objet d'éviter de mettre en oeuvre des procédures juridictionnelles
lourdes pour des affaires qui peuvent être réglées plus rapidement et plus
efficacement par d'autres voies.
Mme Derycke a eu raison d'appeler mon attention sur l'application de la loi du
18 décembre 1998, sur laquelle je peux donner les précisions suivantes : deux
décrets, l'un sur le conseil départemental d'accès au droit, l'autre sur les
maisons de la justice et du droit, ont été transmis au Conseil d'Etat et
devraient être publiés très prochainement ; les autres sont en cours de
consultation auprès des professionnels.
La réforme du juge de la détention va dans le même sens. En limitant le nombre
de détentions provisoires, on limitera ainsi la surpopulation carcérale.
Par ailleurs, et comme le rappellent à juste titre Mme Derycke et M. Badinter,
il faut clarifier le problème des délais. Je ne dirai pas, comme M. Fauchon,
que les statistiques n'ont aucun sens ; je considère plutôt qu'il ne faut pas
tout réduire à un seul chiffre. Nous avons besoin d'indicateurs plus fins et,
l'an prochain, nous devrions enregistrer des progrès en ce sens. Je
souhaiterais, en effet, que l'on essaye de ne pas tout mélanger.
Pour le premier degré de juridiction, c'est plutôt la stabilité qui prime et,
sur longue période, les performances des tribunaux de grande instance se sont
améliorées et sont plutôt bonnes, comparées à celles des autres tribunaux
européens.
De plus, les moyennes nationales cachent une grande diversité de situation. La
moitié des affaires civiles - ce sont elles qui intéressent au premier chef nos
concitoyens - sont traitées en moins de six mois, et les trois quarts en moins
de neuf mois. En général, ce sont les 10 % d'affaires très longues qui font
augmenter les délais moyens des tribunaux.
Le vrai problème, comme l'ont parfaitement observé les rapporteurs et les
orateurs, se pose dans les cours d'appel qui ont vu leur situation se dégrader
très rapidement, les délais de jugement passant de treize mois et demi en 1993,
à dix-sept mois et demi en 1998, et ce en l'espace de cinq ans.
C'est la raison pour laquelle j'ai mis en place un véritable plan d'urgence
pour y faire face, en augmentant de 90 postes les effectifs globaux. Je
regrette d'ailleurs qu'on ait tant attendu pour renforcer ces juridictions. Si
l'on avait commencé à créer des postes plus tôt, en 1995, en 1996 et en 1997,
les statistiques de 1998 seraient évidemment bien meilleures.
S'agissant, par exemple, de la cour d'appel d'Aix, qui est la plus surchargée
de France et que M. Peyrat a mentionnée, je rappelle que son encombrement ne
date pas d'hier : elle avait déjà, en 1994 et en 1995, des délais de jugement
de vingt-trois mois, alors que la moyenne nationale était alors de quatorze
mois. Qu'a-t-on fait à l'époque pour la remettre à flot ? Trois postes en 1996,
zéro en 1997 ! Voilà comment s'expliquent les statistiques de 1998. En
revanche, dès mon arrivée, j'ai pris des mesures d'urgence pour cette même cour
: sept postes de magistrats en 1998, cinq en 1999, soit une augmentation de 10
% en deux ans, et une augmentation de 66 % du nombre des assistants de justice
!
Je réfute ainsi les amalgames tendant à faire croire que tous les tribunaux de
France sont en difficulté, alors que, comme chacun le sait, c'est dans quelques
grandes juridictions et du fait de certains contentieux, notamment dans les
chambres sociales, qu'est concentré l'essentiel des problèmes. Ce n'est pas une
raison pour minorer ces derniers ; mais il faut voir la réalité en face.
Il existe effectivement un problème de contentieux social, que M. Robert
Badinter a bien décrit : 60 % des décisions prud'homales font l'objet d'un
appel, d'où un encombrement des juridictions du second degré.
L'an prochain, comme les années précédentes, les renforts seront affectés dans
les juridictions les plus encombrées dans le cadre de contrats de gestion
incluant des objectifs précis de réduction des stocks. Plus généralement, c'est
un changement de culture qui doit s'installer et qui s'installe d'ailleurs peu
à peu dans les juridictions, avec l'informatisation, la déconcentration, les
contrats de gestion, le développement de l'évaluation, la maîtrise des frais de
justice, les progrès sur le travail en équipe, l'accueil du public, la
coopération avec les autres services de l'Etat.
Plusieurs orateurs ont rappelé la nécessité d'une réforme de la carte
judiciaire. La suppression de trente-six tribunaux de commerce en juillet
dernier a montré qu'on était enfin passé des discours aux actes.
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est le plus facile !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Certes, mais encore fallait-il le faire ! Cela faisait
deux cents ans que rien n'avait été fait à cet égard, monsieur Hyest !
Quant à la dernière réforme de la carte judiciaire, elle remonte à 1958 !
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est vrai !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Il y en a eu deux pendant notre siècle : celle de
Poincaré et celle de Michel Debré, par ordonnance. Aujourd'hui, on ne pourrait
plus faire la même chose !
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est dommage !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Par conséquent, les concertations engagées localement
sur ces mesures ont permis d'ouvrir des discussions sereines et constructives
sur la meilleure façon de concilier la bonne utilisation des moyens publics et
les exigences de la justice de proximité, et je pense que nous progressons dans
la bonne voie.
M. Bret a, sur ce sujet, souhaité connaître les dispositions prises pour
accompagner la fermeture des greffes des tribunaux de commerce.
Les deux décrets concernant, d'une part, le reclassement des greffiers et,
d'autre part, les modalités de conciliation pour le rachat des offices entre
greffiers ont été publiés au
Journal officiel
du 7 décembre. Je rappelle
qu'il s'agit de mesures d'accompagnement qui ne concernent que la situation
personnelle des greffiers et qui n'interfèrent pas avec les mesures de carte
judiciaire.
Le décret de suppression des tribunaux a été publié en juillet dernier. La
préparation des opérations de transfert de registres et d'archives a donc été
suffisante pour une entrée en vigueur au 1er janvier prochain.
M. Badinter a également attiré mon attention sur les difficultés que peuvent
rencontrer certains conseils de prud'hommes du fait de l'insuffisance de leurs
moyens administratifs. Je partage sa préoccupation et je rappelle que le projet
de budget pour 2000 ouvre 145 postes de greffiers, après 122 en 1999, pour
renforcer les juridictions qui en ont besoin.
J'indique à Mme Derycke, que c'est dans cette masse que sont prévus la
trentaine de greffiers qui constitueront des renforts pour la gestion du
PACS.
Il faut également mentionner les efforts faits pour les juridictions
administratives, avec la création de 82 emplois dont 40 de magistrat, contre 61
dont 21 de magistrat en 1999.
Ces créations d'emplois sont complétées par un effort en investissement pour
la construction du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et des crédits
informatiques pour le déploiement du logiciel
Skipper
lancé en 1999.
Sur la situation, il est vrai très particulière, de Saint-Pierre-et-Miquelon,
je voudrais rassurer M. Hyest. Les risques d'incompatibilité des fonctions dus
au faible nombre de magistrats ont été vus et traités. Je lui ferai parvenir
sur ce point une réponse détaillée, expliquant comment fonctionne ce ressort en
liaison avec la cour de Paris et grâce à des moyens de visioconférence, pour
éviter les problèmes qu'il a évoqués.
Sur la Guyane, également mentionnée par MM. Hyest et Othily, le directeur des
services judiciaires a en effet attiré mon attention sur les difficultés graves
de ce département. J'envisage de saisir l'inspection des services
judiciaires.
S'agissant du budget de la protection judiciaire de la jeunesse, M. Gélard,
rapporteur pour avis, attire l'attention sur l'importance des moyens débloqués
pour la justice des mineurs mais aussi sur l'augmentation considérable de
l'activité des juges des enfants. Tout en soulignant cette mobilisation des
juges, il rappelle qu'il y avait, à la fin de 1998, plus de 5 000 mesures de
suivi en attente d'exécution dans le milieu ouvert.
Jean-Pierre Bel pour le groupe socialiste a également salué ce changement
d'échelle dans les moyens de la protection judiciaire de la jeunesse, moyens
qui doivent profiter à tous les dispositifs gérés par cette direction.
Je partage ce souci d'apporter des réponses judiciaires multiples à la
délinquance des mineurs et c'est un des axes forts de la politique que je mène
depuis deux ans.
Les moyens sont, tout d'abord, affectés à l'une des priorités annoncées en
1999, l'ouverture de centres de placement immédiat et de centre éducatif
renforcé. Sans crédits spécialement affectés à cet effet au budget 1999 et sans
postes supplémentaires, 15 centres de placement immédiat auront pu être ouverts
à la fin de cette année.. C'est un effort considérable qui a été demandé aux
personnels de la protection judiciaire de la jeunesse. Nous en programmons
vingt pour l'an prochain. De la même façon, vingt centres éducatifs ont été
ouverts, toujours à moyens constants, à la fin de 1999. Nous avons déjà une
vingtaine de nouveaux projets en préparation pour l'an 2000. L'examen des
projets est évidemment un processus continu et nous apportons un grand soin à
la validation des projets.
Dans les deux prochaines années, nous allons, vous l'avez souligné, opérer de
très gros efforts de recrutement et de gestion de personnel, qui nous
conduiront à un ajustement progressif de la carte des centres d'hébergement de
toutes natures et à un renforcement des départements prioritaires.
Ces nouvelles structures sont indispensables mais elles ne doivent pas nous
faire oublier les autres besoins : prises en charge en milieu ouvert, classes
relais, mesures de réparation, qui passeront le cap de 10 000 en 1999 pour
atteindre 12 000 l'année prochaine.
J'en viens maintenant aux observations de M. Othily sur l'administration
pénitentiaire.
S'agissant du comportement de certains chefs d'établissement, votre commission
a souligné ce que certains pouvaient avoir d'inadmissible. Vous avez insisté
notamment sur les poursuites disciplinaires engagées à la maison d'arrêt de
Beauvais et plus récemment à la centrale de Riom.
Je souhaite indiquer ici que, depuis mon arrivée au ministère, j'ai exercé
l'action disciplinaire avec la plus grande fermeté. En 1998, 298 sanctions ont
été prononcées. Ce chiffre était de 109 sur les six premiers mois de 1999.
En ce qui concerne la maison d'arrêt de Beauvais, je tiens à vous préciser que
les faits ont été portés à la connaissance de la direction de l'administration
pénitentiaire en décembre 1997. Immédiatement, une inspection a été ordonnée.
Elle a procédé, de janvier à avril 1998, à des investigations et, le 7 mai, à
l'audition du directeur de cet établissement, qui a été immédiatement
suspendu.
A la suite d'un conseil de discipline, le chef d'établissement et un de ses
collaborateurs ont été révoqués, quatre autres agents ont été exclus à titre
temporaire. Ces décisions ont donc été prises bien avant que cette affaire ne
soit portée à la connaissance du public, au printemps de 1999.
En ce qui concerne la centrale de Riom, les faits ont été portés à la
connaissance de l'administration en juin 1999. Une inspection a été diligentée
et a entendu dix-neuf personnes. Le 12 novembre 1999, le directeur de cet
établissement et son adjoint ont été suspendus. Ils seront déférés devant le
conseil de discipline très prochainement. Là aussi, les mesures ont été prises
rapidement par l'administration et avant que les faits ne soient rendus
publics, le 17 novembre.
De manière générale, je partage l'appréciation de votre commission des lois
sur la faiblesse des contrôles dans les prisons. C'est pourquoi j'ai souhaité
l'élaboration d'un code de déontologie, dont la commission nationale
consultative des droits de l'homme est saisie, et qui sera transmis dans les
prochaines semaines au Conseil d'Etat, pour avis.
Par ailleurs, le Conseil supérieur de l'administration pénitentiaire a apporté
son concours précieux à la réflexion sur ces sujets.
J'ai souhaité passer à une phase décisionnelle et j'ai demandé à M. Canivet de
présider une commission sur le contrôle extérieur des établissements
pénitentiaires. Elle me rendra ses conclusions à la fin du mois de janvier
prochain.
Les avancées n'ont ainsi jamais été aussi importantes que depuis ces deux
dernières années. Croyez bien que je compte les poursuivre. Sur les suicides en
détention, qui constituent un problème grave sur lequel - vous le savez - j'ai
demandé une mobilisation constante des agents et des chefs d'établissements, je
souhaite rappeler les évolutions récentes et les mesures prises.
Le nombre de suicide a connu une forte augmentation ces dernières années. En
1996, il a atteint le chiffre de 138, pour baisser à 125 en 1997 et à 118 en
1998. Il est de 114 à la fin du mois de novembre 1999. Dès mon arrivée, j'ai
souhaité mettre en place un dispositif de prévention, présenté dans une
circulaire du 28 mai 1998.
Ces mesures améliorent l'accueil des détenus arrivants, le suivi de ceux qui
sont repérés par l'équipe médicale comme sensibles et les conditions de prise
en charge dans les quartiers disciplinaires. A plusieurs reprises, des actions
de mobilisation ponctuelle des agents ont été mises en place, notamment à
Fleury-Mérogis, où cela a permis d'éviter plusieurs décès. Un bilan
d'application de cette circulaire doit m'être communiqué en janvier
prochain.
Mais j'ai souhaité, dès le budget pour 2000, renforcer encore le dispositif.
Ainsi, 21 emplois sur les 386 créés, soit 5 % du total, seront consacrés à la
prévention des suicides, dont 10 emplois de premier surveillant pour renforcer
les équipes de nuit et 5 emplois de psychologue.
S'agissant des libérations conditionnelles, sujet qui a été évoqué par MM. Bel
et Cabanel, je souhaite, comme vous le savez, une relance de la politique en la
matière. J'ai demandé à M. Farge, président du Comité national de la libération
conditionnelle, de présider un groupe de travail sur ce thème, qui doit me
rendre ses conclusions en janvier 2000.
Votre commission, tout comme MM. Cabanel et Othily, a regretté les lenteurs de
la mise en oeuvre du placement sous surveillance électronique. Il est inexact
de dire que le Gouvernement n'a pas pris d'initiative pour l'application de la
loi du 19 décembre 1997. En 1998, 1 million de francs a été engagé afin de
passer un marché pour des études de faisabilité qui sont en voie d'achèvement.
La mise en place de ce dispositif est complexe d'un point de vue informatique
et technique.
En 2000 seront validés les premiers dispositifs qui seront expérimentés dans
les futurs centres pour peines aménagées, à Metz et aux Baumettes. En effet, il
est apparu judicieux de rattacher ces expérimentations à des établissements
conçus pour la prise en charge des courtes peines.
S'agissant des départs en retraite, comme vous le soulignez justement, le
déficit entre les postes budgétaires et les agents présents est largement dû à
la mise en place de la loi de 1996, qui a permis aux agents de surveillance de
bénéficier d'une bonification, dans le calcul des annuités pour la retraite, à
hauteur de un cinquième.
Cette mesure, qui représente une avancée importante pour les personnels de
surveillance exercant un métier difficile, n'a pas été accompagnée, lors de son
adoption, en 1996, des moyens budgétaires nécessaires pour faire face aux
départs importants et anticipés en retraite qu'elle induit.
Aussi, lors de mon arrivée au ministère de la justice, j'ai dû prendre les
mesures nécessaires pour pallier cette difficulté : autorisation de surnombre
en cours d'année, pour permettre l'ouverture des concours, augmentation des
recrutements d'élèves surveillants à l'Ecole nationale de l'administration
pénitentiaire.
Ainsi, en 1999, l'administration pénitentiaire a recruté 968 élèves
surveillants et ce chiffre devrait être proche de 2000, l'année prochaine.
C'est une montée en charge rapide qui pose des problèmes de gestion de
concours et de mouvement de personnels très lourds, qui auraient pu être évités
si l'augmentation des recrutements avait été effective dès l'adoption de la
loi, en 1996. Nous avons malheureusement perdu deux ans...
Vous voyez, monsieur Bret, j'ai, comme vous, le souci de prendre en compte les
attentes sociales des personnels de l'administration pénitentiaire auxquels
nous devons une grande considération, car ils exercent leur métier dans les
conditions extrêmement difficiles que nous connaissons tous, pour aller visiter
régulièrement les prisons.
Enfin, tous les rapporteurs ont évoqué la question des investissements et de
la consommation des crédits.
Sur ce sujet, je voudrais faire une remarque générale. Les cycles des
opérations lourdes d'investissement sont de cinq à six ans. Entre la décision
qui conduit à inscrire les premières autorisations de programme et les travaux,
il s'écoule plusieurs années. Toute gestion budgétaire erratique, avec des «
coups d'accordéon » qui retardent le lancement de certaines opérations, ce qui
nécessite ensuite des rattrapages massifs, se traduit par des creux d'activité
et des sous-consommations passagères des crédits. Le budget de la justice n'a
pas manqué de « coups d'accordéon » ces dernières années, à l'exception
toutefois des trois dernières ; j'espère que cela continuera.
La situation du programme pénitentiaire 4000 est, à cet égard, caricaturale.
Annoncé en 1995 pour 2 milliards de francs, ce projet était au point mort en
1997, du fait de l'absence d'autorisations de programme inscrites. Il a donc
fallu inscrire 1,5 milliard de francs sur deux budgets, 1998 et 1999, pour
sauver l'opération.
Malgré cette célérité, les décaissements ne pourront pas intervenir de façon
importante avant 2000 et 2001. Je trouve donc bien léger que l'on vienne me
dire aujourd'hui que ces crédits ne sont pas consommés assez vite. Que ne les
a-t-on inscrits plus tôt !
M. Philippe Marini.
C'est toujours la faute des autres !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
De la même façon, il est plutôt incongru de demander au
Gouvernement d'aller plus vite sur la rénovation du parc existant, alors qu'il
lance un plan sans précédent pour traiter ce problème : un milliard de francs
pour la rénovation des cinq grosses maisons d'arrêt et un milliard de francs
pour la rénovation du parc classique entre 2000 et 2004.
Par ailleurs, 200 millions de francs d'autorisations supplémentaires ont été
inscrites en loi de finances rectificative pour 1999 pour la construction d'une
nouvelle prison à la Réunion. Cette opération s'ajoutera aux six établissements
du programme 4000 déjà lancé.
Au total, ce sont plus de cinq milliards de francs qui seront consacrés aux
investissements dans les établissements pénitentiaires dans les cinq prochaines
années : c'est un effort unique pour l'investissement civil de l'Etat.
J'informe également M. Othily que les crédits pour la remise en état de la
prison de Remiré-Montjoly en Guyane ont été débloqués en loi de finances
rectificative pour 1999. Les travaux qui débuteront en début d'année prochaine
devraient permettre un retour des détenus à l'été 2000.
S'agissant des services judiciaires, je rappelle que 805 millions de francs
d'autorisations de programme nouvelles ont été inscrites en 2000 et que le
lancement de l'opération de construction d'un nouveau tribunal de grande
instance à Paris entre 2000 et 2006...
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
C'est bien !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
... ajoutera plus de deux milliards de francs
d'investissement à l'enveloppe prévisionnelle des investissements en province.
Au total, nous mobiliserons près de six milliards de francs pendant la période
2000-2004 pour la rénovation et la construction des palais de justice.
M. Peyrat a évoqué les constructions nouvelles dans le Vaucluse, la prison du
Pontet et le palais de justice d'Avignon. Je lui parlerai de Nice : 20 millions
de francs en 1998 pour le tribunal de commerce, 220 millions de francs pour la
rénovation et l'extension du tribunal de grande instance achevée en 1999 : 240
millions de francs en cinq ans, ce n'est pas rien ; validation prochaine de la
maison de justice du quartier de l'Ariane dont le retard est dû à des problèmes
locaux ; résolution des problèmes de recherche foncière par une nouvelle prison
à Nice prévue dans le cadre d'une troisième tranche de constructions neuves. Je
crois que l'on peut dire que Nice n'est ni oubliée ni défavorisée !
Pour conclure sur ce sujet, je voudrais donc rassurer le Sénat : la
consommation des autorisations de programme est très bonne, en dehors du cas
très particulier du programme 4000 de la pénitentiaire sur lequel je ne reviens
pas et qui est en plein rattrapage du retard accumulé avant mon arrivée.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, des éléments qui démontrent
l'ampleur du travail entrepris et l'importance des moyens mobilisés.
J'espère avoir répondu sinon à toutes, du moins à l'essentiel des observations
ou des questions précises des différents orateurs, et je les en remercie. Dans
le cas contraire, je ne manquerai pas de leur faire parvenir, s'ils le
souhaitent, des compléments écrits.
Comme vous le demande votre commission des finances et dans un esprit de
continuité, nécessaire au travail de longue haleine qui a été entrepris, je
souhaite, naturellement, que le Sénat, comme il m'en a fait l'honneur les
années précédentes, adopte les crédits du budget de la justice pour 2000.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le ministère
de la justice et figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 832 150 569 francs. »
Par amendement n° II-85, M. Paul Girod propose de réduire ces crédits de 11
000 000 francs.
L'amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits du titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 34 115 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits du titre IV.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 1 555 300 000 francs ;
« Crédits de paiement : 509 300 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 21 500 000 francs ;
« Crédits de paiement : 4 000 000 francs. »
Personne de demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits de figurant au titre VI.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
J'appelle en discussion l'article 71 qui est rattaché pour son examen aux
crédits affectés à la justice ainsi que l'amendement n° II-9 tendant à insérer
un article additionnel après l'article 71.
Article 71
M. le président.
« Art. 71. - Le montant hors taxe sur la valeur ajoutée de l'unité de valeur
mentionnée au troisième alinéa de l'article 27 de la loi n° 91-647 du 10
juillet 1991 relative à l'aide juridique est fixé, pour les missions achevées à
compter du 1er janvier 2000, à 134 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 71.
(L'article 71 est adopté.)
Article additionnel après l'article 71
M. le président.
Par amendement n° II-9, M. Haenel, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 71, un article additionnel ainsi rédigé :
« A partir du 1er janvier 2000, il est établi dans chaque juridiction une
comptabilité retraçant le détail des dépenses de frais de justice criminelle,
correctionnelle et de police engagées par dossier d'instruction.
« Les comptabilités sont transmises chaque année pour contrôle aux présidents
des chambres d'accusation compétentes.
« Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Ces dernières années, les dépenses de frais de
justice ont connu une croissance telle que vous avez vous-même, madame la
ministre, fait procéder à une enquête sur les causes de leur forte
augmentation.
Une grande partie de ces dépenses apparaissent inéluctables du fait de la
technicité indéniablement croissante des affaires et du recours beaucoup plus
systématique aux expertises et contre-expertise.
Toutefois, une liste de dysfonctionnements a été dressée, qui concerne
principalement les dépenses de fourrières et de scellés ainsi que les
réquisitions aux opérateurs de télécommunications, que l'on appelle plus
prosaïquement les écoutes téléphoniques.
Toute une série de réformes a donc été mise en oeuvre pour éviter certains
gaspillages.
Pour autant, à l'heure actuelle, les chefs de juridiction, les chefs de cour
et les présidents de chambre d'accusation ne disposent d'aucun outil leur
permettant d'exercer un suivi des dépenses de frais de justice engagées par
chacun des cabinets d'instruction de leur ressort.
Cette situation apparaît d'autant plus paradoxale, madame la ministre, que
vous avez multiplié depuis trois ans les actions d'évaluation des services.
Les dépenses de frais de justice ne doivent pas rester à l'écart de ces
réformes, qui visent à améliorer, à moyens constants, la qualité des services
rendus par une responsabilisation de tous les acteurs de la justice et par
l'introduction de certaines réformes dans le domaine de l'organisation et de la
méthode.
Pourtant, il n'existe aujourd'hui aucune comptabilité permettant de connaître
le montant des dépenses de frais de justice engagées par un juge d'instruction
pour une affaire déterminée. On pourrait dire la même chose du juge
d'application des peines, du juge des enfants, etc.
C'est pourquoi la commission des finances propose, à titre expérimental, de
rendre la tenue d'une telle comptabilité obligatoire. Cette proposition n'a
pour objectif que d'évaluer le coût d'une instruction, de permettre certaines
comparaisons entre affaires de nature similaire, de compléter et d'affiner le
tableau de bord dont se dotent ou devraient se doter les chefs de cour et de
juridiction, mais aussi les présidents de chambre d'accusation.
Cette proposition de la commission des finances s'inscrit dans la réflexion
menée dans le cadre de l'Ecole nationale de la magistrature sur la
responsabilisation des magistrats et sur la nécessaire évaluation à laquelle
doit consentir tout magistrat pour ne pas se laisser gagner par l'excessive
culture du précédent.
Mme l'avocat général Commaret a parfaitement mis en lumière la nécessité de
procéder à cette évaluation dans une note de synthèse sur l'école. Ce rapport
mériterait, madame la ministre, d'être porté à la connaissance de tous les
magistrats pour cette raison, mais aussi pour d'autres raisons.
Tel est le sens, monsieur le président, madame la ministre, mes chers
collègues, de cet amendement n° II-9 de la commission des finances.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Cet amendement aborde un sujet extrêmement important :
la maîtrise des frais de justice.
Il prévoit, selon son exposé des motifs, un dispositif tendant à éviter une
dérive supposée du coût des instructions.
Je rappelle d'abord que la maîtrise des frais de justice est justement l'un
des grands succès de la gestion de mon ministère en 1999.
Jusqu'en 1997, ces frais augmentaient de 8 % par an. Un premier
ralentissement, limitant la hausse à 5 %, avait été obtenu en 1998. Mais, en
1999, nous avons obtenu la stabilisation, c'est-à-dire en réalité une baisse en
francs constants : par rapport aux crédits votés, nous avons ainsi réalisé 100
millions de francs d'économies.
Ce résultat sans précédent a été obtenu grâce à une révision du coût de garde
des scellés, une renégociation des tarifs de certaines prestations avec France
Télécom, la mise en place d'un visa obligatoire des parquets sur les devis
présentés par les experts, mais aussi et surtout grâce à une mobilisation des
magistrats du fait de la mise en place de contrats de gestion.
Il s'agit de donner un supplément de crédits de fonctionnement aux cours
d'appel qui ont fait des économies sur les frais de justice. Et cela marche !
En 1998, quinze cours d'appel sur trente-trois ont eu leur bonus ; en 1999, on
est passé à vingt-deux. Certaines cours particulièrement mobilisées ont même
obtenu des baisses de plus de 10 % des frais de justice.
Ces chiffres montrent que nous n'avons pas eu besoin de mesures de contrainte
pour obtenir des résultats. La responsabilisation des prescripteurs de la
dépense est une méthode qui s'est révélée plus efficace.
S'agissant de la mise en place d'une comptabilité analytique, je crois, comme
vous, que nous devons et que nous pouvons progresser. Nous allons d'ailleurs
nous en donner les moyens avec le déploiement progressif, à partir de 2000, du
nouveau logiciel national des régies des tribunaux, regina.
Le ministère, comme vous le savez, achève le déploiement du logiciel gibus de
gestion des crédits budgétaires déconcentrés, la prochaine étape est celle des
dépenses des régies. J'observe que cet outil, lorsqu'il sera en place, nous
permettra d'aller plus loin que ce que prévoit l'amendement, puisqu'il donnera
le détail des dépenses pour toutes les procédures et pas seulement pour les
instructions.
Telles sont les raisons pour lesquelles je ne suis pas favorable à ce que
figure dans la loi une telle disposition, qui serait d'ailleurs inapplicable
pour l'année 2000 et qui relève plus de la bonne gestion administrative que de
la loi de finances.
Il est très important que, tout en mettant en place la modernisation
informatique du ministère, nous montrions bien que nous ne souhaitons pas
mélanger le contrôle juridictionnel et le contrôle administratif et
financier.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement. Je reconnais certes que le
problème posé doit être résolu, mais je préfère qu'il le soit par d'autres
méthodes.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel,
rapporteur spécial.
Cette question a été abordée en commission des
finances à l'occasion de l'examen des crédits du ministère de la justice. Je ne
disposais pas des précisions que vous venez de donner à l'instant, madame la
ministre, et qui devraient, me semble-t-il, donner satisfaction à mes
collègues.
Des efforts ont été faits dans ce domaine, mais il reste des progrès à faire.
Il faudrait notamment que les présidents de chambre d'accusation soient invités
à examiner plus attentivement la situation dans les cabinets d'instruction, et
pas seulement dans le cadre de la « notice trimestrielle ».
Les jeunes juges d'instruction méritent d'être guidés et conseillés. On nous
apprenait autrefois que le président de la chambre d'accusation était en
quelque sorte le « tuteur » des juges d'instruction. Si mon maître, le
professeur Vitu, tenait aujourd'hui de tels propos, les réactions seraient
certainement diverses et variées !...
Quoi qu'il en soit, compte tenu des précisions que vous venez de donner,
madame la ministre, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° II-9 est retiré.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant la justice.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à seize
heures.)
M. le président. La séance est reprise.
3
DEMANDE D'AUTORISATION
DE MISSIONS D'INFORMATION
M. le président.
M. le président a été saisi :
- par M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires
culturelles, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de
désigner une mission d'information sur le fonctionnement de la Bibliothèque
nationale de France ;
- par M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires
économiques, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de
désigner une mission d'information en Italie sur l'évolution de la poste
italienne et ses stratégies d'avenir ;
- par M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires
étrangères, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner
une mission d'information en Iran afin de recueillir des informations sur
l'évolution de la situation politique et économique de ce pays et sur les
relations bilatérales entre la France et ce pays ;
- par M. Jacques Larché, président de la commission des lois, d'une demande
tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information
pour poursuivre la préparation de l'examen du volet institutionnel du projet de
loi d'orientation relatif aux départements d'outre-mer et étudier les problèmes
posés par l'élaboration d'un nouveau statut pour la collectivité territoriale
de Mayotte.
Le Sénat sera appelé à statuer sur ces demandes dans les formes fixées par
l'article 21 du règlement.
4
LOI DE FINANCES POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté
par l'Assemblée nationale.
Nous en sommes parvenus à l'examen des articles de la deuxième partie non
joints aux crédits.
Articles de totalisation des crédits
M. le président.
Tous les crédits afférents au budget général et aux budgets annexes étant
examinés, le Sénat va maintenant statuer sur les articles qui portent
récapitulation de ces crédits.
Le service de la séance a procédé à la rectification des états B et C, compte
tenu des votes intervenus dans le cadre de la deuxième partie. Ces deux états
ont été annexés au « dérouleur ».
J'appellerai successivement l'article 37, qui comporte le total des crédits du
budget général ouverts au titre des services votés ; les articles 38 et 39,
auxquels sont annexés les états B et C, qui récapitulent les crédits du budget
général ouverts au titre des mesures nouvelles ; l'article 42, qui récapitule
les crédits ouverts au titre des services votés des budgets annexes, et
l'article 43, qui récapitule les crédits ouverts au titre des mesures nouvelles
des budgets annexes.
DEUXIÈME PARTIE
MOYENS DES SERVICES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE Ier
DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 2000
I. -
Opérations à caractère définitif
A. -
Budget général
Article 37
M. le président.
« Art. 37. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2000, au titre
des services votés du budget général, est fixé à la somme de 1 940 475 324 397
F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 37.
(L'article 37 est adopté.)
Article 38 et état B
M. le président.
« Art. 38. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures
nouvelles de dépenses ordinaires des services civils, des crédits ainsi
répartis :
« Titre Ier : "Dette publique et dépenses en atténuation de recettes" 19 719
780 000 F
« Titre II : "Pouvoirs publics" 95 899 000 F
« Titre III : "Moyens des services" 4 099 228 579 F
« Titre IV : "Interventions publiques" - 3 293 423 594 F
« Total 20 621 483 985 F
« Ces crédits sont répartis par ministère conformément à l'état B annexé à la
présente loi. »
Je donne lecture de l'état B annexé :
É T A T B
Répartition, par titre et par ministère,
des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures
nouvelles)
(En francs)
MINISTE`RES OU SERVICES |
TITRE Ier |
TITRE II |
TITRE III |
TITRE IV |
TOTAUX |
---|---|---|---|---|---|
Affaires étrangères | . | . | 86 450 797 | - 153 934 707 | - 67 483 910 |
Agriculture et pêche | . | . | . | . | . |
Aménagement du territoire et environnement : I. - Aménagement du territoire |
. | . | . | . | . |
II. - Environnement | . | . | . | . | . |
Anciens combattants | . | . | . | . | . |
Charges communes | 19 719 780 000 | 95 899 000 | 2 391 440 000 | - 696 806 000 | 21 510 313 000 |
Culture et communication | . | . | 173 840 935 | 169 595 432 | 343 436 367 |
Economie, finances et industrie : I. - Economie, finances et industrie |
. | . | . | . | . |
II. - Industrie (ancien) | . | . | . | . | . |
III. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat (ancien) | . | . | . | . | . |
Total | . | . | . | . | . |
Education nationale, recherche et technologie : I. - Enseignement scolaire |
. | . | . | . | . |
II. - Enseignement supérieur | . | . | . | . | . |
III. - Recherche et technologie | . | . | . | . | . |
Emploi et solidarité : I. - Emploi |
. | . | . | . | . |
II. - Santé et solidarité | . | . | . | . | . |
III. - Ville | . | . | . | . | . |
Equipement, transports et logement : I. - Services communs |
. | . | . | . | . |
II. - Urbanisme et logement | . | . | . | . | . |
III. - Transports : 1. Transports terrestres |
. | . | . | . | . |
2. Routes | . | . | . | . | . |
3. Sécurité routière | . | . | . | . | . |
4. Transport aérien et météorologie | . | . | . | . | . |
Sous-total | . | . | . | . | . |
IV. - Mer | . | . | . | . | . |
V. - Tourisme | . | . | . | . | . |
Total | . | . | . | . | . |
Intérieur et décentralisation | . | . | 603 694 841 | - 3 582 304 140 | - 2 978 609 299 |
Jeunesse et sports | . | . | - 4 723 269 | 155 001 000 | 150 277 731 |
Justice | . | . | 832 150 569 | 34 115 000 | 866 265 569 |
Outre-mer | . | . | - 8 307 562 | 780 688 860 | 772 381 298 |
Services du Premier ministre : I. - Services généraux |
. | . | . | . | . |
II. - Secrétariat général de la défense nationale | . | . | 11 656 084 | . | 11 656 084 |
III. - Conseil économique et social | . | . | 6 987 473 | . | 6 987 473 |
IV. - Plan | . | . | 6 038 711 | 220 961 |
6 259 672 |
Total général | 19 719 780 000 | 95 899 000 | 4 099 228 579 | - 3 293 423 594 | 20 621 483 985 |
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, je voulais noter que l'article
38 et l'état B, ainsi que les articles suivants, tels qu'ils sont présentés,
traduisent les votes du Sénat et les positions qui ont été prises, fascicule
budgétaire par fascicule budgétaire.
Je ne ferai pas de remarques spécifiques à ce stade, si ce n'est pour marquer
un désaccord de principe sur la méthode qui consiste à rejeter des budgets
purement et simplement, sans proposer de mesures de remplacement. Cela ne me
semble ni raisonnable ni responsable. J'aurai l'occasion de le dire
ultérieurement, au moment du vote sur l'ensemble du projet de loi de finances
pour 2000.
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, votre remarque, nous
l'avons bien entendue, mais peut-être pourriez-vous nous dire ce qu'une
opposition peut faire dans le cadre de la loi organique du 2 janvier 1959 sur
les lois de finances ? Vous savez fort bien que nous ne pouvons pas modifier
les dépenses prévues par le Gouvernement pour les allouer différemment et vous
savez fort bien que notre liberté d'initiative est extrêmement réduite par les
textes qui concernent les finances publiques !
L'opposition a le devoir d'exprimer, sur les budgets qui lui sont proposés,
les objectifs qui sont les siens. Nous avons examiné ces budgets de façon - je
crois pouvoir le dire - extrêmement honnête par rapport à des critères que nous
nous sommes donnés, qui sont des critères de bonne gestion.
Le maximum est-il fait pour cantonner les dépenses de fonctionnement ?
Le maximum est-il fait, en particulier, pour utiliser au mieux les ressources
humaines de l'Etat ?
Le maximum est-il fait pour préparer l'avenir, notamment au travers des
dépenses d'investissement ?
C'est au vu de ces critères que nous avons adopté des positions globales, en
effet, budget par budget, et il me semble que l'actuel gouvernement est mal
fondé à reprocher à la majorité sénatoriale ce qui se faisait autrefois, dans
des configurations différentes, quand, par exemple, à l'Assemblée nationale,
sous d'autres gouvernements, l'opposition refusait tout simplement de voter les
budgets qui lui étaient soumis !
Faudrait-il croire, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous avons une carte
forcée et que nous n'avons que le choix d'adhérer à vos démarches ? Je ne peux
pas penser que telle est votre conception de la démocratie, en particulier de
la démocratie parlementaire !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, non, bien sûr, je ne
vous incite pas à croire cela ! J'étais en train de me dire qu'il existait une
autre solution, qui pouvait consister comme cela a été le cas par le passé, à
faire une contre-proposition,...
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
C'est un compliment pour l'année dernière !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
... avec des mesures d'économies.
Je fais donc une réserve sur la méthode, mais loin de moi l'idée de priver le
Sénat du moyen de s'exprimer !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je voudrais dire à M. le
secrétaire d'Etat que je prends comme un compliment pour le Sénat les propos
qu'il vient de tenir ! Il a raison de dire que l'oeuvre qui a été accomplie au
cours des deux années passées était très utile pour éclairer la nation sur le
lien qui existe entre la dépense et l'impôt. En effet, si l'on n'agit pas sur
les dépenses, l'impôt explose, comme il le fait actuellement.
Cela dit, nous avons mené cet exercice à deux reprises, comme l'a fort bien
souligné voilà quelques instants M. le rapporteur général, et nous n'avions pas
senti - mais peut-être n'avions-nous pas eu la chance de vous avoir au banc du
Gouvernement - l'intérêt que vous avez témoigné voilà un instant et la
reconnaissance, trop tardive, mais qui nous touche néanmoins, que vous venez de
manifester envers le Sénat pour les lectures auxquelles il a procédé ces deux
dernières années sur les projets de loi de finances.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. Raymond Courrière.
Vous n'avez pas tellement réussi !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 38 et de l'état B annexé, avec les
chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat sur les
lignes de l'état B.
(L'ensemble de l'article 38 et de l'état B est adopté.)
Article 39 et état C
M. le président.
« Art. 39. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures
nouvelles de dépenses en capital des services civils du budget général, des
autorisations de programme ainsi réparties :
« Titre V : "Investissements exécutés par l'Etat" 5 888 900 F
« Titre VI : "Subventions d'investissement accordées par l'Etat" 20 299 097
F
« Titre VII : "Réparation des dommages de guerre" 0 F
« Total 26 187 997 F
« Ces autorisations de programme sont réparties par ministère conformément à
l'état C annexé à la présente loi.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles
des dépenses en capital des services civils du budget général, des crédits de
paiement ainsi répartis :
« Titre V : "Investissements exécutés par l'Etat" 1 674 753 F
« Titre VI : "Subventions d'investissement accordées par l'Etat" 10 432 346
F
« Titre VII : "Réparation des dommages de guerre" 0 F
« Total 12 107 099 F
« Ces crédits de paiement sont répartis par ministère conformément à l'état C
annexé à la présente loi. »
Je donne lecture de l'état C annexé :
É T A T C
Répartition, par titre et par ministère, des autorisations de programme et des
crédits de paiement
applicables aux dépenses en capital des services civils
(Mesures nouvelles)
(En milliers de francs)
TITRE V |
TITRE VI |
TITRE VII |
TOTAUX
|
|||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
MINISTÈRES OU SERVICES |
Autorisations |
Crédits |
Autorisations |
Crédits |
Autorisations |
Crédits |
Autorisations |
Crédits de programme de paiement de programme de paiement de programme de paiement de programme de paiement |
Affaires étrangères | 478 000 | 149 000 | 2 663 000 | 461 000 | . | . | 3 141 000 | 610 000 |
Agriculture et pêche | . | . | . | . | . | . | . | . |
Aménagement du territoire et environnement : |
||||||||
I. _ Aménagement du territoire | . | . | . | . | . | . | . | . |
II. - Environnement | . | . | 2 755 708 | 1 903 824 | . | . | 2 755 708 | 1 903 824 |
Anciens combattants | » | » | . | . | . | . | » | » |
Charges communes | » | » | » | » | . | . | » | » |
Culture et communication | 2 024 100 | 515 633 | 1 681 470 | 900 645 | . | . | 3 705 570 | 1 416 278 |
Economie, finances et industrie : |
||||||||
I. _ Economie, finances et industrie | . | . | . | . | . | . | . | . |
II. - Industrie (ancien) | » | » | » | » | . | . | » | » |
III. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat (ancien) | . | . | » | » | . | . | » | » |
Total | . | . | . | . | . | . | . | . |
Education nationale, recherche et technologie : |
||||||||
I. _ Enseignement scolaire | . | . | . | . | . | . | . | . |
II. _ Enseignement supérieur | . | . | . | . | . | . | » | . |
III. _ Recherche et technologie | . | . | . | . | . | . | » | . |
Emploi et solidarité : |
||||||||
I. _ Emploi | . | . | . | . | . | . | . | . |
II. - Santé et solidarité | . | . | . | . | . | . | . | . |
III. - Ville | . | . | . | . | . | . | . | . |
Equipement, transports et logement : |
||||||||
I. _ Services communs | . | . | . | . | » | » | . | . |
II. _ Urbanisme et logement | . | . | . | . | . | . | . | . |
III. _ Transports : 1. Transports terrestres |
. | . | . | . | . | . | . | . |
2. Routes | . | . | . | . | . | . | . | . |
3. Sécurité routière | . | . | . | . | . | . | . | . |
4. Transport aérien et météorologie | . | . | . | . | . | . | . | . |
Sous-total | . | . | . | . | . | . | . | . |
IV. - Mer | . | . | . | . | . | . | . | . |
V. - Tourisme | » | » | . | . | . | . | . | . |
Total | . | . | . | . | » | » | . | . |
Intérieur et décentralisation | 1 698 000 | 422 100 | 11 302 681 | 6 504 489 | . | . | 13 000 681 | 6 926 589 |
Jeunesse et sports | 40 000 | 27 500 | 66 550 | 54 550 | . | . | 106 550 | 82 050 |
Justice | 1 555 300 | 509 300 | 21 500 | 4 000 | . | . | 1 576 800 | 513 300 |
Outre-mer | 39 500 | 22 220 | 1 805 188 | 602 638 | . | . | 1 844 688 | 624 858 |
Services du Premier ministre : |
||||||||
I. _ Services généraux | . | . | . | . | . | . | . | . |
II. _ Secrétariat général de la défense nationale | 50 000 | 25 000 | . | . | . | . | 50 000 | 25 000 |
III. _ Conseil économique et social | 4 000 | 4 000 | . | . | . | . | 4 000 | 4 000 |
IV. _ Plan | . | . | 3 000 | 1 200 | . | . | 3 000 |
1 200 |
Total général | 5 888 900 | 1 674 753 | 20 299 097 | 10 432 346 | » | » | 26 187 997 | 12 107 099 |
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 39 et de l'état C annexé, avec les
chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat sur les
lignes de l'état C.
(L'ensemble de l'article 39 et de l'état C est adopté.)
Articles 40 et 41
M. le président. Je rappelle que le Sénat a rejeté les articles 40 et 41, le mercredi 8 décembre 1999.
B. - Budgets annexes
Article 42
M. le président.
« Art. 42. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2000, au titre
des services votés des budgets annexes, est fixé à la somme de 104 997 323 988
F, ainsi répartie :
« Aviation civile 7 781 174 150 F
« Journaux officiels 887 068 999 F
« Légion d'honneur 107 285 110 F
« Ordre de la Libération 5 043 096 F
« Monnaies et médailles 1 337 052 633 F
« Prestations sociales agricoles 94 879 700 000 F
« Total 104 997 323 988 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 42 avec les chiffres sans modification résultant
des votes précédemment émis par le Sénat.
M. Bernard Angels.
Notre groupe votera cet article.
Mme Hélène Luc.
Le groupe communiste et républicain et citoyen également.
(L'article 42 est adopté.)
Article 43
M. le président.
« Art. 43. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures
nouvelles des budgets annexes, des autorisations de programme s'élevant à la
somme totale de 86 687 000 F, ainsi répartie :
« Aviation civile »
« Journaux officiels 30 450 000 F
« Légion d'honneur 16 437 000 F
« Ordre de la Libération 0 F
« Monnaies et médailles 39 800 000 F
« Total 86 687 000 F
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles
des budgets annexes, des crédits s'élevant à la somme totale de 222 165 838 F,
ainsi répartie :
« Aviation civile »
« Journaux officiels 334 831 001 F
« Légion d'honneur 16 628 723 F
« Ordre de la Libération - 83 498 F
« Monnaies et médailles 58 489 612 F
« Prestations sociales agricoles - 187 700 000 F
« Total 222 165 838 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 43 avec les chiffres modifiés résultant des votes
précédemment émis par le Sénat.
(L'article 43 est adopté.)
Articles 44, 44 bis, 45 à 50
M. le président. Je rappelle que le Sénat a examiné les articles 44, 44 bis, 45 à 50 relatifs aux comptes spéciaux du Trésor le mardi 7 décembre 1999.
III. - Dispositions diverses
Article 51 et état E
M. le président.
« Art. 51. - La perception des taxes parafiscales dont la liste figure à
l'état E annexé à la présente loi continuera d'être opérée pendant l'année
2000. »
Je donne lecture de l'état E annexé :
É T A T E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception est autorisée en 2000
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953 et au décret n°
80-854 du 30 octobre 1980)
LIGNES
|
|||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Nomen- clature 1999 |
Nomen-
2000 |
||||||
|
|
NATURE DE LA TAXE |
ORGANISMES BÉNÉFICIAIRES ou objet |
TAUX ET ASSIETTE |
TEXTES |
PRODUIT
1998-1999 |
ÉVALUATION
1999-2000
I. - TAXES PERÇUES DANS UN INTÉRE^T ÉCONOMIQUE
|
1 | 1 | Taxe perçue pour le financement des actions du secteur céréalier. |
Office national interprofessionnel des céréales (ONIC).
|
Répartition entre organismes : ONIC 42,5 %, ITCF 49 %, FSCE 8,5 %. Montant de la taxe/tonne de céréales livrées aux collecteurs agréés et producteurs grainiers (taux effectif) : - blé tendre : 5,55 F/tonne ; - orge : 5,55 F/tonne ; - maïs : 5,55 F/tonne ; - blé dur : 5,50 F/tonne ; - seigle, triticale : 5,10 F/tonne ; - avoine : 3,50 F/tonne ; - riz : 5,20 F/tonne ; - sorgho : 3,50 F/tonne. |
Décret n° 97-1265 du 29 décembre 1997. Arrêté du 31 août 1998. |
324 578 000 | 301 875 000 |
2 | 2 | Taxe acquittée par les fabricants et importateurs de conserves et de jus de tomate. | Société nationale interprofessionnelle de la tomate (SONITO). |
Tomates entrées en usine : - 0,025 F/kg de tomates traitées sur contrats de culture ; - 0,040 F/kg de tomates traitées hors contrats de culture. Concentrés de tomate : - 12 à 15 % d'extrait sec : 0,080 F/kg ; - au-delà de 15 et jusqu'à 30 % : 0,180 F/kg ; - au-delà de 30 et jusqu'à 90 % : 0,230 F/kg ; - au-delà de 90 % : 0,600 F/kg. Conserves de tomate : 0,030 F/kg. Jus de tomate : 0,035 F/kg. Tomates congelées ou surgelées : 0,030 F/kg. Pour le jus concentré : 0,060 F/kg. |
Décret n° 97-814 du 3 septembre 1997. Arrêté du 1er décembre 1998. |
1 550 000 | 1 550 000 |
3 | 3 | Taxe acquittée par les producteurs de prunes séchées d'Ente, les transformateurs et importateurs de pruneaux. | Bureau national interprofessionnel du pruneau (BIP). |
Taux maxima : - producteurs et transformateurs : 2,5 % du montant des ventes de prunes ; - importateurs : 5 % de la valeur en douane des produits importés de pays tiers. Taux effectifs : 2 % et 4 %. |
Décret n° 97-809 du 29 août 1997. Arrêté du 29 août 1997. |
22 448 000 |
20 550 000
CONTRÔLE DE LA QUALITÉ DES PRODUITS ET SOUTIEN DES PÊCHES MARITIMES
|
4 | 4 | Taxe due annuellement par les professionnels en raison de leurs activités sur les produits selon leur nature, le tonnage et la valeur. | Groupement national interprofessionnel des semences, graines et plants (GNIS). | Le taux des taxes à percevoir au profit du groupement est fixé par arrêté dans la limite des maxima fixés par le décret institutif. |
Décret n° 98-769 du 3 septembre 1998. Arrêté du 3 septembre 1998. |
130 297 000 | 130 975 000 |
5 | 5 | Taxe due par les armateurs de tous les navires armés à la pêche, par les premiers acheteurs de produits de la mer et les éleveurs de produits de culture marine (sauf conchyliculture). | Comité national, comités régionaux et comités locaux des pêches maritimes et des élevages marins. |
Armateurs : taxe sur la somme des salaires forfaitaires des équipages de navires armés ; taux maximum : 3 %. Premiers acheteurs : taxe forfaitaire différenciée par tranche de salariés permanents, maximum 8 500 F. Eleveurs de cultures marines (hors conchyliculture) : taxe forfaitaire fixe, maximum 600 F. |
Décret n° 96-1231 du 27 décembre 1996, modifié par le décret n° 97-1230 du 26 décembre 1997. | 27 000 000 | 27 000 000 |
6 | 6 | Taxe due par l'armateur et le premier acheteur pour les produits de la pêche maritime débarqués sur le territoire français ou dans un port étranger par un navire de pêche immatriculé en France, et par le déclarant en douane de produits de la mer importés en France hors CEE et AELE. | Office national interprofessionnel des produits de la pêche maritime et de l'aquaculture (OFIMER). |
Taxe payée par l'armateur et l'éleveur. Taxe assise sur la valeur hors taxe des produits débarqués ou commercialisés (sauf importations). Taux maximal : - conserves, semi-conserves : 0,13 % ; - autres produits de la mer : 0,15 %. Taxe payée par le déclarant en douane. Taxe assise sur la valeur en douane des produits importés. Taux maximal : - conserves, semi-conserves : 0,26 % ; - autres produits de la mer : 0,30 %. |
Décret n° 98-1260 du 29 décembre 1998. Arrêté du 29 décembre 1998. |
22 000 000 |
22 000 000
B. - ENCOURAGEMENTS AUX ACTIONS COLLECTIVES DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT
AGRICOLES
|
7 | 7 | Taxe sur la betterave destinée au financement et à la mise en oeuvre des programmes agricoles. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maximum : 1,42 F/tonne de betteraves destinées à la production de sucre. Campagne 1998-1999 : 1,06 F/tonne. |
Décret n° 95-1044 du 22 septembre 1995. Arrêté du 2 janvier 1998. |
15 600 000 | 15 600 000 |
8 | 8 | Taxe sur les céréales livrées par les producteurs aux organismes agréés pour la collecte et aux producteurs grainiers. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maxima : - blé tendre, orge : 5,20 F/tonne ; - maïs : 4,75 F/tonne ; - blé dur, riz : 4,75 F/tonne ; - avoine : 3,40 F/tonne ; - sorgho, seigle, triticale : 2,75 F/tonne. |
Décret n° 95-1042 du 22 septembre 1995. Arrêté du 2 juillet 1998. |
140 000 000 | 140 000 000 |
. | . | . | . |
Campagne 1998-1999 : - blé dur, riz : 2,85 F/tonne ; - blé tendre, orge : 3,10 F/tonne ; - maïs : 2,85 F/tonne ; - avoine : 2,05 F/tonne ; - sorgho, seigle, triticale : 1,65 F/tonne. |
. | . | . |
9 | 9 | Taxe sur les graines oléagineuses et protéagineuses. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maxima : - colza, navette : 4,10 F/tonne ; - tournesol : 5 F/tonne ; - soja : 2,65 F/tonne ; - lupin doux : 1,75 F/tonne ; - pois : 1,55 F/tonne ; - fèves et féveroles : 1,50 F/tonne. |
Décret n° 95-1043 du 22 septembre 1995. Arrêté du 9 décembre 1998. |
17 000 000 | 17 000 000 |
. | . | . | . |
Campagne 1998-1999 : - colza, navette : 3,38 F/tonne ; - tournesol : 4,14 F/tonne ; - soja : 2,21 F/tonne ; - lupin doux : 1,17 F/tonne ; - pois : 1,04 F/tonne ; - fèves et féveroles : 0,97 F/tonne. |
. | . | . |
10 | 10 | Taxes versées par les producteurs sur les graines oléagineuses. | Centre technique interprofessionnel des oléagineux métropolitains (CETIOM). |
Taux maxima : - colza, navette, oeillette, ricin et carthame : 13 F/tonne ; - tournesol, soja et lin oléagineux : 15 F/tonne. Campagne 1998-1999 : - colza, navette, oeillette, ricin et carthame : 10 F/tonne ; - tournesol : 11,55 F/tonne ; - soja : 11,30 F/tonne ; - lin oléagineux : 12 F/tonne. |
Décret n° 96-118 du 8 février 1996. Arrêté du 18 août 1998. |
55 000 000 | 52 000 000 |
11 | 11 | Taxe sur certaines viandes. |
Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maxima : - boeuf et veau, espèces chevaline, asine et leurs croisements : 48 F/tonne de viande ; - porc : 44,50 F/tonne ; - mouton, chèvre : 60 F/tonne ; - lapin : 44 F/tonne ; - poulet : 24,80 F/tonne ; - poule de réforme : 72 F/tonne ; - dinde : 30,60 F/tonne ; - canard, pintade, oie : 36 F/tonne. |
Décret n° 95-1338 du 28 décembre 1995. Arrêté du 22 décembre 1998. |
162 000 000 | 162 000 000 |
. | . | . | . |
Taux effectifs pour 1999 : - boeuf et veau : 48 F/tonne ; - porc : 36 F/tonne ; - mouton : 46,50 F/tonne ; - espèces chevaline et asine et leurs croisements : 48 F/tonne ; - chèvre : 30 F/tonne ; - lapin : 24,90 F/tonne ; - poulet et coq non labellisés : 9,50 F/tonne ; - poulet et coq labellisés : 17,75 F/tonne ; - poule de réforme : 44,90 F/tonne ; - dinde non labellisée : 11,80 F/tonne ; - dinde labellisée : 23,75 F/tonne ; - canard non labellisé : 18,25 F/tonne ; - canard labellisé : 23,75 F/tonne ; - pintade et oie non labellisées : 21,30 F/tonne ; - pintade et oie labellisées : 23,75 F/tonne. |
. | . | . |
12 | 12 | Taxe versée par les entreprises intéressées. | Centre technique de la salaison, de la charcuterie et des conserves de viande. |
Taux maximum : - 3 du montant du chiffre d'affaires. |
Décret n° 97-291 du 28 mars 1997. Arrêté du 28 mars 1997. |
8 500 000 | 8 500 000 |
13 | 13 | Taxe sur le lait de vache. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maxima : - lait : 0,45 F/hl ; - crème : 9,15 F par 100 kilogrammes de matière grasse incluse dans la crème. Taux en vigueur : 0,41 F et 8,21 F. |
Décret n° 95-1340 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996. |
88 200 000 | 88 200 000 |
14 | 14 | Taxe sur les vins. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maxima : - vin d'appellation d'origine contrôlée : 3 F/hl (en vigueur 2,80 F/hl) ; - vin délimité de qualité supérieure : 1,95 F/hl (en vigueur 1,69 F/hl) ; - autres vins : 0,80 F/hl (en vigueur 0,77 F/hl). |
Décret n° 95-1337 du 28 décembre 1995. Arrêté du 26 décembre 1997. |
74 000 000 | 74 000 000 |
15 | 15 | Taxe sur les produits de l'horticulture florale, ornementale et des pépinières non forestières. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maximum : 3 du montant des ventes hors taxes. Taux en vigueur : 1,5 . |
Décret n° 97-1234 du 26 décembre 1997. Arrêté du 22 décembre 1998. |
6 000 000 | 6 000 000 |
16 | 16 | Taxes sur les fruits et légumes. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maximum : 4,6 des montants des ventes hors taxes réalisées par les producteurs. Taux en vigueur : 2,25 . |
Décret n° 95-1341 du 28 décembre 1995. Arrêté du 22 décembre 1998. |
35 000 000 | 35 000 000 |
17 | 17 | Taxe forfaitaire payée par les exploitants agricoles. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maximum : 500 F. Taux en vigueur : 500 F. |
Décret n° 95-1335 du 28 décembre 1995. Arrêté du 26 décembre 1997. |
205 000 000 | 205 000 000 |
18 | 18 | Taxe sur les laits de brebis et de chèvre. | Association nationale pour le développement agricole (ANDA). |
Taux maxima : - 0,9 F/hl pour le lait de brebis ; - 0,58 F/hl pour le lait de chèvre. Taux en vigueur : - 0,70 F/hl pour le lait de brebis ; - 0,40 F/hl pour le lait de chèvre. |
Décret n° 95-1336 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996. |
1 800 000 | 1 800 000 |
19 | 19 | Taxes destinées à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du comité. | Comité des fruits à cidre et des productions cidricoles. |
Taux maxima : - 0,80 F/quintal de fruits à cidre et par 12,5 kg de concentrés desdits produits ; - 1,10 F/hl de jus, de moûts, de cidre, de fermenté et de poiré ; - 20 F/hl d'alcool pur de calvados, d'eaux-de-vie de cidre et de poiré. Taux en vigueur : 0,80 F, 1,10 F et 20 F. |
Décret n° 97-808 du 29 août 1997. Arrêté du 1er septembre 1997. |
1 900 000 | 1 900 000 |
20 | 20 | Taxe destinée à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du bureau. | Bureau national interprofessionnel du cognac. |
Pour les livraisons par les viticulteurs : 1,19 F/hl de vin : - pour les mouvements de place : 18,88 F/hl d'alcool pur de cognac ; - pour les ventes à la consommation : de 43,69 F à 64,88 F/hl d'alcool pur de cognac selon l'importance des sorties ; - pour les autres eaux-de-vie : 4,72 F/hl d'alcool pur ; - pour les cognacs entrant dans des produits composés : 4,72 F/hl d'alcool pur de cognac ; - pour le pineau des Charentes : 4,72 F/hl d'alcool pur. |
Décret n° 97-1087 du 25 novembre 1997. Arrêté du 25 novembre 1997. |
36 554 000 | 33 800 000 |
21 | 21 | Taxe destinée à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du bureau. | Bureau national interprofessionnel des calvados et eaux-de-vie de cidre et de poiré. |
Taux maxima : - 32 F/hl d'alcool pur pour les calvados et les produits composés avec ces calvados ; - 18 F/hl d'alcool pur pour les eaux-de-vie de cidre et de poiré et les produits composés élaborés avec ces eaux-de-vie. Taux en vigueur : 25 F et 12,40 F. |
Décret n° 97-1231 du 21 décembre 1997. Arrêté du 26 décembre 1997. |
670 000 | 670 000 |
22 | 22 | Taxes dues par les négociants et récoltants sur les ventes de bouteilles de champagne. | Comité interprofessionnel du vin de Champagne. |
Taux maxima : - 0,16 F/bouteille de vente départ hors taxe ; - récoltants manipulants : 0,11 F/bouteille. |
Décret n° 97-1073 du 20 novembre 1997. Arrêté du 10 décembre 1998. |
33 000 000 | 32 500 000 |
23 | 23 | Taxe sur la valeur de la récolte. | Comité interprofessionnel du vin de Champagne. |
Taux maximum : 0,15 F/kg de récolte. Taux en vigueur : 0,12 F/kg pour la récolte 1998. |
Décret n° 97-1073 du 20 novembre 1997. Arrêté du 20 décembre 1998. |
34 000 000 | 41 500 000 |
24 | 24 | Taxe destinée au financement des conseils, comités ou unions interprofessionnels des vins tranquilles. |
Conseil, comités ou unions interprofessionnels des vins de : Bordeaux ; Appellation contrôlée de Touraine ; La région de Bergerac ; Appellation d'origine de Nantes ; Anjou et Saumur ; Côtes du Rhône et vallée du Rhône ; Fitou, Corbières et Minervois ; Côtes de Provence ; Gaillac ; Beaujolais ; Alsace ; Bourgogne. |
Taux maximum : 5 F. Taux en vigueur : 4,83 F. |
Décret n° 97-1003 du 30 octobre 1997. Arrêté du 30 décembre 1997. |
83 824 647 | 81 255 500 |
25 | 25 | Taxe destinée au financement du comité. | Comité interprofessionnel des vins doux naturels et vins de liqueur d'appellation d'origine contrôlée. |
Taux maximum : 5 F. Taux en vigueur : 4,83 F. |
Décret n° 97-1004 du 30 octobre 1997. Arrêté du 30 décembre 1997. |
2 300 000 | 2 250 000 |
26 | 26 | Taxe sur les plants de vigne. | Etablissement national technique pour l'amélioration de la viticulture (ENTAV). |
Montant maximum : - 2,20 F pour 100 plants racinés (en vigueur : 1,80 F) ; - 7 F pour 100 plants greffés-soudés (en vigueur : 5,50 F). |
Décret n° 97-154 du 18 février 1997. Arrêté du 8 octobre 1998. |
4 600 000 | 5 200 000 |
27 | 27 | Taxes versées par les vendeurs en gros de fruits et légumes. | Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL). |
Taux maximum : 1,8 prélevé sur le prix des ventes de fruits et légumes frais ou secs, et de plantes aromatiques à usage culinaire, réalisées par toute personne physique ou morale vendant en gros à tout détaillant. Taux en vigueur : 1,8 . |
Décret n° 98-1258 du 29 décembre 1998. Arrêté du 29 décembre 1998. |
84 000 000 | 85 000 000 |
28 | 28 | Taxes versées par les entreprises intéressées. | Centre technique de la conservation des produits agricoles (CTCPA). | Taux maximum : 2 du montant des ventes et variable selon la nature des fabrications vendues. |
Décret n° 96-1153 du 26 décembre 1996. Arrêté du 26 décembre 1996. |
16 400 000 | 16 400 000 |
29 | 29 | Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. | Centre technique de la canne et du sucre de la Réunion. |
Taux maximum : 7,65 F/tonne de canne entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires des cannes. Taux en vigueur : 7,14 F/tonne. |
Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 16 novembre 1998. |
12 495 000 | 12 495 000 |
29 | 29 | Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. | Centre technique de la canne et du sucre de la Martinique. |
Taux maximum : 7,65 F/tonne de canne entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires des cannes. Taux en vigueur : 2,68 F/tonne. |
Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 30 juin 1998. |
559 650 | 559 650 |
29 | 29 | Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. | Centre technique de la canne et du sucre de la Guadeloupe. |
Taux maximum : 7,65 F/tonne de canne entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires des cannes. Taux en vigueur : 7,08 F/tonne. |
Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 30 juin 1998. |
4 566 600 |
4 566 600
C. - ENCOURAGEMENTS AUX ACTIONS COLLECTIVES DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT
INDUSTRIELS
|
32 | 30 | Taxe versée par les entreprises de la profession. | Membres du groupement d'intérêt économique Comité de coordination des centres de recherche en mécanique. |
Mécanique, soudage et décolletage : 0,112 % du CAHT (taux
maximum : 0,112 %).
|
Décret n° 93-1370 du 29 décembre 1993 (modifié par le décret n° 96-146 du 22 février 1996, par le décret n° 97-680 du 30 mai 1997 et par le décret n° 98-130 du 27 février 1998). Arrêté du 29 décembre 1997. Décret en cours de renouvellement. |
381 000 000 | 385 000 000 |
33 | 31 | Taxe versée par les industries de l'habillement. | Comité de développement et de promotion du textile et de l'habillement. | 0,11 % de la valeur des articles d'habillement fabriqués en France ou importés hors UE (taux maximum : 0,14 %). |
Décret n° 96-82 du 24 janvier 1996. Arrêté du 24 janvier 1996. Décret en cours de modification. |
85 000 000 | 62 000 000 |
34 | 32 | Taxe perçue sur certains produits pétroliers et sur le gaz naturel. | Institut français du pétrole. |
1,92 F/hectolitre de supercarburant (taux maximum : 2,20 F) ; 1,92 F/hectolitre d'essence (taux maximum : 2,20 F) ; 1,92 F/hectolitre de carburéacteur (taux maximum : 2,20 F) ; 1,92 F/hectolitre de gazole et fioul assimilé (taux maximum : 2,20 F) ; 1,10 F/hectolitre de fioul domestique (taux maximum : 2 F) ; 1,17 F/quintal de fioul lourd (taux maximum : 2 F) ; 1,92 F/hectolitre de pétrole lampant (carburant) (taux maximum : 2,20 F) ; 4,84 F/quintal de mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant (taux maximum : 4,84 F) ; 1,10 F/hectolitre de white-spirit (combustible domestique) (taux maximum : 2 F) ; 6 F/millier de m³ de gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant (taux maximum : 10 F) ; 0,40 F/millier de kWh de gaz naturel livré à l'utilisateur final par les réseaux de transport et de distribution (taux maximum : 1,10 F). |
Décret n° 97-1182 du 24 décembre 1997. Arrêté du 24 décembre 1997 fixant les montants de la taxe perçue sur certains produits pétroliers et sur le gaz naturel. Arrêté du 31 décembre 1997, modifié par l'arrêté du 25 janvier 1999 fixant le taux de prélèvement pour frais d'assiette et de perception opéré par la direction générale des douanes et droits indirects, sur la taxe perçue au profit de l'IFP. |
1 222 000 000 | 1 224 000 000 |
36 | 33 | Taxe à la charge des entreprises ressortissant au Centre d'études et de recherches du béton manufacturé et au Centre technique des tuiles et briques. | Association Les Centres techniques des matériaux et composants pour la construction. | Taux en vigueur : 0,35 % pour le béton (taux maximum : 0,35 %) et 0,40 % pour la terre cuite (taux maximum : 0,40 %). |
Décret n° 95-1334 du 27 décembre 1995. Arrêté du 27 décembre 1995. |
60 500 000 | 62 000 000 |
38 | 34 | Taxe versée par les industriels et négociants de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie. | Comité professionnel de développement de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie. | 0,20 % du montant hors taxes des opérations de vente (taux maximum : 0,3 %). |
Décret n° 96-148 du 22 février 1996. Arrêté du 22 décembre 1998. |
48 000 000 | 50 000 000 |
39 | 35 | Taxe versée par les entreprises de la profession. | Comité de développement des industries françaises de l'ameublement. | 0,20 % du montant hors taxes des ventes, y compris à l'exportation, sauf certains produits métalliques taxés à 0,15 % (taux maximum : 0,35 %). |
Décret n° 96-147 du 22 février 1996. Arrêté du 22 février 1996. Décret en cours de modification. |
68 500 000 | 51 000 000 |
40 | 36 | Taxe versée par les entreprises des professions. |
Comité interprofessionnel de développement des industries du cuir, de la maroquinerie et de la chaussure. Centre technique du cuir, de la chaussure et de la maroquinerie. |
0,18 % du montant hors taxes (taux maximum : 0,18 %) : - des ventes, exportations comprises, de cuirs et peaux finis ou semi-finis, d'articles de maroquinerie, de voyage et de chasse, d'articles divers en cuir et similaires et d'articles chaussants ; - des ventes de cuirs et peaux bruts aux utilisateurs métropolitains et à l'exportation, à l'exclusion des peaux brutes d'ovins. 55 % du produit de la taxe sont affectés au Centre technique du cuir, de la chaussure et de la maroquinerie. |
Décret n° 96-78 du 24 janvier 1996. Arrêté du 24 janvier 1996. |
50 000 000 | 49 000 000 |
41 | 37 | Taxe parafiscale sur certaines huiles minérales. | Comité professionnel de la distribution des carburants. | 0,115 F/hl pour le supercarburant, l'essence et le gazole (taux maximum : 0,13 F). |
Décret n° 97-201 du 5 mars 1997. Arrêté du 5 mars 1997. Décret en cours de modification. |
56 000 000 |
59 200 000
II. - TAXES PERÇUES DANS UN INTÉRÊT SOCIAL
|
43 | 38 | Taxes sur les spectacles. | Association pour le soutien du théâtre privé et Association pour le soutien de la chanson, des variétés et du jazz. | 3,50 % des recettes brutes des théâtres et 3,50 % des recettes brutes des spectacles de variétés. |
Décret n° 95-609 du 6 mai 1995.
|
73 000 000 |
75 000 000
|
46 | 41 | Taxe sur les salaires versée par les employeurs du secteur du bâtiment et des travaux publics. | Comité central de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics. | Pour les entreprises dont l'effectif moyen de l'année au titre de laquelle la cotisation est due est de dix salariés ou plus : 0,16 % en règle générale, et 0,08 % pour les entreprises relevant du sous-groupe 34-8 de la nomenclature des entreprises, établissements et toutes activités collectives. |
Décret n° 98-67 du 4 février 1998. Arrêté du 3 mars 1998. |
246 900 000 | 246 900 000 |
. | . | . | . | Pour les entreprises dont l'effectif moyen de l'année au titre de laquelle la cotisation est due est inférieur à dix salariés : 0,30 % en règle générale, et 0,10 % pour les entreprises relevant du sous-groupe 34-8 de la nomenclature des entreprises, établissements et toutes activités collectives. | . | . | . |
47 | 42 | Taxe versée par les entreprises de réparation des automobiles, cycles et motocycles. | Association nationale pour la formation automobile. | 0,75 % du montant total des salaires versés au personnel des ateliers et services de réparation. |
Décret n° 98-19 du 8 janvier 1998. Arrêté du 8 janvier 1998. |
101 000 000 |
103 000 000
ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT
|
48 | 43 | Taxe additionnelle au droit de timbre des cartes grises des véhicules utilitaires pour le financement de la formation professionnelle dans les transports. | Association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports (AFT). |
Véhicules pour le transport des marchandises dont le poids
total autorisé en charge est :
|
Décret n° 96-139 du 21 février 1996. Arrêté du 5 janvier 1999. |
302 631 000 | 310 000 000 |
Je rappelle que le Sénat, lors de l'examen des crédits relatifs à la communication, a adopté la ligne 39 concernant la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision et la ligne 40 concernant la taxe sur la publicité radiodiffusée et télévisée.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les lignes 1 à 38 et 41 à 43 de l'état E.
(Ces lignes sont adoptées.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 51 et l'état E annexé tel qu'il résulte des votes précédemment intervenus.
(L'ensemble de l'article 51 et de l'état E est adopté.)
Article 52 et état F
M. le président.
« Art. 52. - Est fixée pour 2000, conformément à l'état F annexé à la présente
loi, la liste des chapitres sur lesquels s'imputent des crédits évaluatifs
autres que ceux limitativement énumérés à l'article 9 de l'ordonnance n° 59-2
du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. »
Je donne lecture de l'état F annexé :
É T A T F
Tableau des dépenses auxquelles s'appliquent des crédits évaluatifs
NUMÉROS des chapitres |
NATURE DES DÉPENSES |
---|---|
. |
TOUS LES SERVICES |
33-90 | Cotisations sociales. - Part de l'Etat. |
33-91 | Prestations sociales versées par l'Etat. |
. |
AGRICULTURE ET PÊCHE |
44-42 |
Prêts à l'agriculture. - Charges de bonification. |
. |
AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT |
. |
II. - Environnement |
44-30 | Dations en paiement en application de la loi n° 95-1346 du 31 décembre 1995. |
. |
CHARGES COMMUNES |
44-91 | Encouragements à la construction immobilière. - Primes à la construction. |
46-98 | Réparation de préjudices résultant de la contamination par le virus d'immunodéficience humaine de transfusés. |
. |
CULTURE ET COMMUNICATION |
43-94 | Dations en paiement faites en application de la loi n° 68-1251 du 31 décembre 1968. |
. |
ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE |
. |
I. - Economie, finances et industrie |
42-07 | Application de conventions fiscales passées entre la France et des Etats étrangers. |
44-97 | Participation de l'Etat au service d'emprunts à caractère économique. |
44-98 | Bonfications d'intérêt dans le domaine de l'artisanat. |
. |
EMPLOI ET SOLIDARITÉ |
. |
I. - Emploi |
46-71 | Fonds national de chômage. |
. |
JUSTICE |
46-12 | Aide juridique. |
. |
AVIATION CIVILE |
60-03 | Variation des stocks. |
65-04 | Autres charges de gestion courante. |
66-01 | Pertes de change. |
68-02 | Dotations aux provisions. |
. |
JOURNAUX OFFICIELS |
68-00 | Dotation aux amortissements et aux provisions. |
. |
LÉGION D'HONNEUR |
68-00 | Amortissements et provisions. |
. |
MONNAIES ET MÉDAILLES |
60-03 | Variation des stocks (approvisionnements et marchandises). |
68-00 | Dotations aux amortissements et aux provisions. |
83-00 | Augmentation de stocks constatée en fin de gestion. |
88-00 | Utilisation et reprises sur provisions. |
. |
PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES |
11-91 | Intérêts dus. |
11-92 | Remboursements des avances et prêts. |
37-94 | Versement au fonds de réserve. |
46-01 | Prestations maladie, maternité, soins aux invalides versées aux exploitants agricoles et aux membres non salariés de leur famille. |
46-02 | Prestations invalidité versées aux exploitants agricoles et aux membres non salariés de leur famille. |
46-03 | Allocations de remplacement versées aux conjoints des non-salariés agricoles. |
46-04 | Prestations d'assurance veuvage versées aux non-salariés du régime agricole. |
46-92 | Prestations familiales versées aux non-salariés du régime agricole. |
46-96 | Prestations vieillesse versées aux non-salariés du régime agricole. |
46-97 | Contribution aux assurances sociales des étudiants et au régime d'assurance obligatoire des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (art. L. 381-8 et L. 722-4 du code de la sécurité sociale). |
. |
COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE |
. |
COMPTE D'EMPLOI DE LA TAXE PARAFISCALE AFFECTÉE AU FINANCEMENT DES ORGANISMES DU SECTEUR PUBLIC DE LA RADIODIFFUSION SONORE ET DE LA TÉLÉVISION |
04 | Versement au compte de commerce « Liquidation d'établissements publics et d'organismes para-administratifs ou professionnels et liquidations diverses ». |
. |
COMPTE D'AFFECTATION DES PRODUITS DE CESSIONS DE TITRES, PARTS ET DROITS DE SOCIÉTÉS |
01 | Dotations en capital, avances d'actionnaire et autres apports aux entreprises publiques et aux établissements publics. |
02 | Achats de titres, parts et droits de sociétés. |
03 | Dépenses afférentes aux ventes de titres, de parts ou de droits de sociétés. |
04 | Versements à la Caisse d'amortissement de la dette publique. |
05 | Versements au Fonds de soutien des rentes. |
06 | Reversements au budget général. |
. |
COMPTES DE PRÊTS |
. |
AVANCES DU TRÉSOR CONSOLIDÉES PAR TRANSFORMATION EN PRÊTS DU TRÉSOR |
. |
COMPTES D'AVANCES DU TRÉSOR |
. |
AVANCES AUX DÉPARTEMENTS SUR LE PRODUIT DE LA TAXE
DIFFÉRENTIELLE SUR LES VÉHICULES À MOTEUR
TERRITOIRES, ÉTABLISSEMENTS ET ÉTATS D'OUTRE-MER |
03 | Avances de l'article 34 de la loi du 31 décembre 1953 (avances spéciales sur recettes budgétaires). |
04 | Avances au territoire de la Nouvelle-Calédonie (fiscalité Nickel). |
. |
AVANCES SUR LE MONTANT DES IMPOSITIONS REVENANT AUX
DÉPARTEMENTS,
AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS |
01 | Avances aux budgets annexes. |
02 | Avances à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole au titre des besoins temporaires de préfinancement des dépenses communautaires. |
03 | Avances aux autres établissements publics nationaux et services autonomes de l'Etat. |
04 | Avances à des services concédés ou nationalisés ou à des sociétés d'économie mixte. |
05 | Avances à divers organismes de caractère social. |
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 52 et de l'état F annexé.
(L'ensemble de l'article 52 et de l'état F est adopté.)
Article 53 et état G
M. le président.
« Art. 53. - Est fixée pour 2000, conformément à l'état G annexé à la présente
loi, la liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel.
»
Je donne lecture de l'état G annexé :
É T A T G
Tableau des dépenses auxquelles s'appliquent des crédits provisionnels
NUMÉROS des chapitres |
NATURE DES DÉPENSES |
---|---|
. |
AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
34-03 | Frais de réceptions et de voyages exceptionnels. |
42-31 | Participation de la France à des dépenses internationales (contributions obligatoires). |
46-91 | Frais de rapatriement. |
. |
ANCIENS COMBATTANTS |
46-03 | Remboursements à diverses compagnies de transports. |
46-27 | Soins médicaux gratuits et frais d'application de la loi du 31 mars 1919 et des lois subséquentes. |
. |
CHARGES COMMUNES |
46-02 | Secours aux victimes de sinistres et calamités. |
. |
ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE |
. |
I. - Economie, finances et industrie |
31-96 | Remises diverses. |
37-44 | (Ligne supprimée.) |
37-61 | Dépenses et remboursements supportés par la France au titre de l'infrastructure pétrolière. |
. |
INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION |
34-03 | Frais de réception et de voyages exceptionnels. |
37-61 | Dépenses relatives aux élections. |
41-61 | Financement des partis et groupements politiques (lois n° 88-227 du 11 mars 1988 et n° 90-55 du 15 janvier 1990). |
46-91 | Secours d'extrême urgence aux victimes de calamités publiques. |
. |
JUSTICE |
37-23 | Services pénitentiaires. - Dépenses de santé des détenus. |
37-33 | Services de la protection judiciaire de la jeunesse. - Remboursement des prestations effectuées par le secteur habilité ou conventionné. |
37-61 | Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. - Dépenses relatives aux élections. |
. |
OUTRE-MER |
34-03 | Frais de réceptions et de voyages exceptionnels. |
34-42 | Service militaire adapté. - Alimentation. |
46-93 | Secours d'extrême urgence aux victimes de calamités publiques. |
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 53 et de l'état G annexé.
(L'ensemble de l'article 53 et de l'état G est adopté.)
Article 54 et état H
M. le président.
« Art. 54. - Est fixée pour 2000, conformément à l'état H annexé à la présente
loi, la liste des chapitres sur lesquels s'imputent les crédits pouvant donner
lieu à report, dans les conditions fixées par l'article 17 de l'ordonnance n°
59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances.
»
Je donne lecture de l'état H annexé :
É T A T H
Tableau des dépenses pouvant donner lieu à reports de crédits de 1999 à
2000
NUMÉROS des chapitres |
NATURE DES DÉPENSES |
---|---|
. |
BUDGETS CIVILS AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
41-03 | Promotion de Strasbourg, capitale parlementaire européenne. |
41-43 | Concours financiers. |
42-26 | Transport et dépenses diverses au titre de l'aide alimentaire. |
42-29 | Coopération militaire et de défense. |
42-31 | Participation de la France à des dépenses internationales (contributions obligatoires). |
42-37 | Autres interventions de politique internationale. |
. |
AGRICULTURE ET PÊCHE |
44-36 | Pêches maritimes et cultures marines. - Subventions et apurement FEOGA. |
44-41 | Amélioration des structures agricoles. |
44-43 | Aide alimentaire et autres actions de coopération technique. |
44-53 | Interventions en faveur de l'orientation et de la valorisation de la production agricole. |
44-55 | Primes au maintien du troupeau des vaches allaitantes. |
44-70 | Promotion et contrôle de la qualité. |
44-80 | Amélioration du cadre de vie et aménagement de l'espace rural. |
44-84 | Contrats territoriaux d'exploitations agricoles. |
46-33 | Participation à la garantie contre les calamités agricoles. |
. |
AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT I. - Aménagement du territoire |
44-10 | Fonds national d'aménagement et de développement du territoire. |
. |
ANCIENS COMBATTANTS |
46-31 | Indemnités et pécules. |
. |
CULTURE ET COMMUNICATION |
43-92 | Commandes artistiques et achats d'oeuvres d'art. |
. |
ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE I. - Charges communes |
41-25 | Plan d'urgence en faveur des lycées. |
44-02 | Réaménagement de charges d'endettement. |
46-02 | Secours aux victimes de sinistres et calamités. |
46-90 | Versements à divers régimes obligatoires de sécurité sociale. |
46-91 | Français rapatriés d'outre-mer. - Moratoire des dettes, indemnisation des biens, remise des prêts de réinstallation, financement des prêts de consolidation. |
47-92 | Contribution de l'Etat à l'amélioration des retraites des rapatriés. |
. |
II. - Services communs et finances |
42-80 | Participation de la France à diverses assemblées et expositions internationales. |
44-42 | Interventions diverses. |
44-84 | Subventions pour l'expansion économique à l'étranger et coopération technique. |
44-85 | Modernisation des organismes de soutien au commerce extérieur. - Crédit à répartir. |
. |
III. - Industrie |
46-93 | Prestations à certains retraités des mines et des industries électriques et gazières. |
. |
EMPLOI ET SOLIDARITÉ I. - Emploi |
43-70 | Financement de la formation professionnelle. |
44-01 | Programme « nouveaux services-nouveaux emplois ». |
44-70 | Dispositifs d'insertion des publics en difficulté. |
44-77 | Compensation de l'exonération des cotisations sociales. |
44-79 | Promotion de l'emploi et adaptations économiques. |
. |
II. - Santé et solidarité |
43-32 | Professions médicales et paramédicales. - Formation et recyclage. |
46-03 | Prestations sociales et actions culturelles en faveur des rapatriés. |
46-92 | Contribution de l'Etat au financement de l'allocation aux adultes handicapés. |
47-16 | Action interministérielle de lutte contre la toxicomanie. |
. |
III. - Ville |
46-60 | Interventions en faveur de la ville et du développement social urbain. |
. |
ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT II. - Urbanisme et logement |
46-50 | Participation de l'Etat aux fonds de solidarité pour le logement et aux fonds d'aides aux accédants en difficulté. - Subventions aux associations logeant des personnes défavorisées. |
. |
III. - Transports 2. Routes |
44-42 | Subventions intéressant la gestion de la voirie nationale (dépenses déconcentrées). |
. |
3. Sécurité routière |
44-43 | Sécurité et circulation routières. - Actions d'incitation. |
. |
IV. - Mer |
44-34 | Ports autonomes maritimes. - Participation aux dépenses. |
45-35 | Flotte de commerce. - Subventions. |
46-37 | Gens de mer et professions de la filière portuaire. - Allocations compensatrices. |
. |
INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION |
41-55 | Dotation de compensation aux régions des pertes de recettes fiscales immobilières. |
41-56 | Dotation générale de décentralisation. |
41-57 | Dotation générale de décentralisation de la collectivité territoriale de Corse. |
. |
JUSTICE |
41-11 | Subventions en faveur des collectivités. |
46-01 | Subventions et interventions diverses. |
. |
OUTRE-MER |
46-01 | Actions d'insertion en faveur des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion dans les départements d'outre-mer. |
. |
BUDGET MILITAIRE DÉFENSE |
36-01 | Subventions de fonctionnement et participation aux dépenses de fonctionnement de divers organismes. |
. |
BUDGETS ANNEXES AVIATION CIVILE |
60-00 | Achats et services. |
61-01 | Dépenses d'informatique et de télématique. |
63-00 | Impôts, taxes et versements assimilés. |
66-00 | Charges financières. |
. |
JOURNAUX OFFICIELS |
60-01 | Achats. |
61-02 | Fonctionnement informatique. |
. |
LÉGION D'HONNEUR |
60-00 | Achats. |
61-02 | Informatique. |
. |
ORDRE DE LA LIBÉRATION |
60-00 | Matériel et entretien immobilier. |
. |
MONNAIES ET MÉDAILLES |
60-01 | Achats. |
. |
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE |
. | Fonds national pour le développement des adductions d'eau. |
. | Fonds forestier national. |
. | Soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie audiovisuelle. |
. | Fonds de secours aux victimes de sinistres et calamités. |
. | Compte d'emploi de la taxe parafiscale affectée au financement des organismes du secteur public de la radiodiffusion sonore et de la télévision. |
. | Fonds national du livre. |
. | Fonds national pour le développement du sport. |
. | Fonds national des haras et des activités hippiques. |
. | Fonds national pour le développement de la vie associative. |
. | Fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France. |
. | Actions en faveur du développement des départements, des territoires et des collectivités territoriales d'outre-mer. |
. | Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés. |
. | Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien. |
. | Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables. |
. | Indemnisation au titre des créances françaises sur la Russie. |
. | Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale. |
. |
COMPTES DE PRÊTS |
. | Prêts du Fonds de développement économique et social. |
. | Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social. |
. | Prêts du Trésor à des Etats étrangers pour la consolidation de dettes envers la France. |
. | Avances du Trésor consolidées par transformation en prêts du Trésor. |
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 54 et de l'état H annexé.
(L'ensemble de l'article 54 et de l'état H est adopté.)
Articles 55 et 55 bis
M. le président. Je rappelle que le Sénat a adopté les articles 55 et 55 bis le samedi 11 décembre, lors de l'examen des crédits relatifs à la communication.
Articles non rattachés
M. le président.
Le Sénat va examiner maintenant les articles de la deuxième partie du projet
de loi de finances qui n'ont pas encore été discutés lors de l'examen des
crédits, c'est-à-dire ceux que nous appelons « les articles non rattachés ».
TITRE II
DISPOSITIONS PERMANENTES
« A. _
Mesures fiscales »
Article 56
M. le président.
« Art. 56. _ I. _ Il est inséré, dans le livre des procédures fiscales, un
article L. 52 A ainsi rédigé :
«
Art. L. 52 A
. _ Les dispositions de l'article L. 52 ne s'appliquent
pas aux personnes morales ni aux sociétés visées à l'article 238
bis
M
du code général des impôts à l'actif desquelles sont inscrits des titres de
placement ou de participation pour un montant total d'au moins 50 millions de
francs. »
« II. _ Les dispositions du I s'appliquent aux contrôles pour lesquels la
première intervention sur place a lieu à compter du 1er janvier 2000. »
Par amendement n° II-86, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par le I de cet article pour l'article L 52 A du livre des
procédures fiscales, de supprimer les mots : « ni aux sociétés visées à
l'article 238
bis
M du code général des impôts ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 56 concerne la durée des vérifications
fiscales de comptabilité applicables à certaines entreprises. Cette durée est
limitée à trois mois pour les petites entreprises, et cet article vise à
exclure du dispositif certaines catégories de sociétés. Cela nous sembler aller
dans le bon sens. Mais il nous semble nécessaire d'apporter une précision
supplémentaire. C'est l'objet de notre amendement.
Nous souhaitons revenir au texte initial du Gouvernement, c'est-à-dire
maintenir une durée maximale de vérification de comptabilité de trois ans pour
les sociétés en participation visées à l'article 238
bis
M du code
général des impôts.
En effet, ces société sont, en règle générale, des sociétés fiscalement
transparentes. Si l'on adoptait l'article en l'état, l'allongement des délais
de vérifications s'étendrait de manière contestable à des contribuables qui ne
devraient pas être compris dans le champ d'application de cette mesure,
c'est-à-dire aux détenteurs de parts des sociétés dites en participation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, la précision que vous
proposez de supprimer a été apportée par un amendement de la commission des
finances de l'Assemblée nationale. Le Gouvernement s'était alors rangé aux
voeux de vos collègues députés, qui ont estimé cette précision nécessaire.
Elle me paraît d'ailleurs toujours utile pour éviter toute incertitude dans
l'interprétation du code général des impôts à la lumière du code civil. En tout
cas, il est parfaitement dans l'esprit du texte d'appliquer aux sociétés en
participation la même règle qu'aux holdings.
Dans ces conditions, je ne puis que suggérer le retrait de cet amendement. A
défaut, je serai obligé de m'y opposer.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Concernant les holdings, c'est-à-dire des sociétés
complexes, la mesure se comprend. En revanche, s'agissant de sociétés en
participation, qui, je le répète, pour la plupart d'entre elles sont des
sociétés transparentes fiscalement, aller rechercher chez les porteurs de parts
les responsabilités fiscales en s'exonérant du délai de trois mois semble
excessivement pénalisant. Sociétés en participation et sociétés holdings,
lorsque les sociétés holdings sont bien des sociétés de capitaux classiques, ne
peuvent être assimilées.
Je maintiens donc l'amendement n° II-86.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-86, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 56, ainsi modifié.
(L'article 56 est adopté.)
Article 57
M. le président.
« Art. 57. _ I. _ Après le premier alinéa de l'article 99 du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le livre-journal mentionné au premier alinéa comporte, quelle que soit la
profession exercée, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la
forme du versement des honoraires. »
« II. _ Le 4 de l'article 102
ter
du même code est complété par les
mots : " , l'identité des clients ainsi que le montant, la date et la forme du
versement des honoraires ".
« III. _ Le deuxième alinéa de l'article 1649
quater
G du même code est
supprimé.
« IV. _ Il est inséré, dans le livre des procédures fiscales, un article L.
13-0 A ainsi rédigé :
«
Art. L. 13-0 A
. _ Les agents de l'administration des impôts peuvent
demander toutes informations relatives à l'identité des clients ainsi qu'au
montant, à la date et la forme du versement afférent aux recettes de toute
nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel en vertu
des dispositions de l'article 226-13 du code pénal. Ils ne peuvent demander de
renseignement sur la nature des prestations fournies par ces personnes. »
« La présentation spontanée par ces personnes de documents comportant d'autres
informations que celles mentionnées au premier alinéa n'affecte pas les
procédures d'imposition mises en oeuvre par l'administration. »
« IV
bis.
_ Dans l'article L. 86 A du livre des procédures fiscales,
les mots : " par l'adhérent d'une association agréée " sont supprimés et les
mots : " cet adhérent " sont remplacés par les mots : " le contribuable ".
« V. _ S'agissant du droit de contrôle, les dispositions du présent article
s'appliquent aux opérations enregistrées à compter du 1er janvier 2000. »
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy.
Monsieur le président, je vous propose, pour éviter des redites et alléger la
tâche de tout le monde, de renoncer à ce droit de parole au bénéfice des deux
amendements que j'ai déposés sur l'article et que vous me permettrez sans doute
de présenter ensemble.
M. le président.
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° II-12 rectifié est présenté par MM. Murat, Bernard, Bizet,
Blanc, Braun, Braye, Calmejane, Ceccaldi-Raynaud, Cornu, de Cuttoli, Darcos,
Dejoie, Delong, Descours, Dufaut, Fournier, Giraud, Gruillot, Larcher,
Lassourd, Laurin, Leclerc, Le Grand, Lemaire, Michaux-Chevry, Neuwirth,
Ostermann, Peyrat, de Richemont, Rufin, Taugourdeau, Vasselle, Vial, Besse et
les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° II-16 est déposé par M. Arthuis et les membres du groupe de
l'Union centriste.
L'amendement n° II-77 est présenté par M. Trucy et les membres du groupe des
Républicains et indépendants.
Tout trois tendent à supprimer l'article 57.
Les trois suivants sont également identiques.
L'amendement n° II-44 est déposé par M. Marini au nom de la commission des
finances.
L'amendement n° II-17 est présenté par M. Arthuis et les membres du groupe de
l'Union centriste.
L'amendement n° II-78 est déposé par M. Trucy et les membres du groupe des
Républicains et indépendants.
Tous trois tendent à supprimer le IV de l'article 57.
La parole est à M. Braun, pour défendre l'amendement n° II-12 rectifié.
M. Gérard Braun.
Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 57, qui, d'une part,
enfreint le secret médical et qui, d'autre part, est contraire à une directive
européenne devant entrer en vigueur le 1er mars prochain et disposant que le
secret professionnel est un droit inaliénable.
Un arrêt du Conseil d'Etat de 1998 a même réaffirmé le principe du respect de
ce secret, estimant que tout redressement fiscal après un contrôle ayant
enfreint ce principe était nul et non avenu.
M. le président.
La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° II-16.
M. Claude Huriet.
Bien évidemment, je souscris aux arguments qui viennent d'être exposés, non
seulement quant au rappel de la jurisprudence du Conseil d'Etat, jurisprudence
constante, mais aussi quant aux conséquences que pourrait avoir ce qui nous
apparaît comme une manière de contourner le principe fondamental et jamais
contesté la préservation du secret médical.
M. le président.
La parole est à M. Trucy, pour défendre les amendements n° II-77 et II-78.
M. François Trucy.
L'article 57 étend à toutes les professions médicales la faculté donnée à
l'administration fiscale de connaître l'identité des clients des membres des
professions libérales, ainsi que la date du versement des honoraires. A ceux
qui s'émurent - et ils furent nombreux - de cette entorse au secret médical à
des fins fiscales, il fut répondu, dans la presse et ailleurs, qu'après tout il
ne s'agissait que d'étendre une procédure qui existait déjà, ne serait-ce qu'à
l'égard des praticiens médicaux qui adhèrent à des centres de gestion
agréés.
Ce cas existe effectivement, mais il est un élément qui devrait rassurer
pleinement l'administration fiscale : le fait que, depuis de très nombreuses
années l'ensemble des honoraires des praticiens, quelle que soit leur
spécialité, fait l'objet d'un relevé du SNIR - Syndicat national interrégimes -
en fin d'année. Il y a belle lurette que les déclarations des médecins sont
conformes à ces documents et collent donc à la réalité !
J'ajouterai qu'il ne suffit pas de ne donner que le noms, les actes, les
adresses et les dates de versement des clients pour penser que le secret
médical est respecté car si l'on va dans un centre de cancérologie, ce n'est
pas pour soigner une grippe ! Si l'on va dans un centre de traitement des
maladies sexuellement transmissibles, ce n'est pas pour traiter une angine !
Aller dans certains endroits et donner son nom pour qu'il figure dans un
relevé, c'est pratiquement permettre son identification, et donc permettre le
viol du secret professionnel.
C'est pourquoi notre groupe présente deux amendements : l'un visant à
supprimer l'article 57 et l'autre, par défaut, tendant à supprimer le
paragraphe IV de cet article.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n°
II-44.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 57 vise deux objectifs qu'il ne faut pas
confondre.
En premier lieu, il tend à aligner les obligations comptables de tous les
titulaires de bénéfices non commerciaux soumis au secret professionnel, en
second lieu, il comporte des innovations par rapport au régime préexistant. Ce
sont ces innovations que nous critiquons tout particulièrement.
Sur le premier point, je rappellerai que tous les membres des professions
libérales sont tenus de remplir un livre-journal servi au jour le jour et
présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses
professionnelles.
En revanche, seuls les professionnels adhérant à une association de gestion
agréée doivent établir des documents comptables qui comprennent, conformément à
l'article 1649
quater
G du code général des impôts, quelle que soit la
profession exercée, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la
forme du versement des honoraires.
La commission n'est pas opposée à l'extension des obligations comptables
actuellement applicables aux adhérents d'associations de gestion agréées à tous
les membres des professions libérales soumis à la règle du secret
professionnel.
Mais l'article comporte une disposition infiniment plus critiquable en son
paragraphe IV, qui vise à autoriser l'administration fiscale à accéder aux
informations et aux documents relatifs à l'identité des clients, à la date et à
la forme du versement afférents aux recettes de toute nature perçues par les
personnes dépositaires du secret professionnel, dans le cadre d'une
vérification de comptabilité.
De plus, et d'une façon que je qualifierai de particulièrement insidieuse, cet
article précise que la présentation spontanée par les personnes soumises à une
vérification de comptabilité de documents comportant d'autres informations
n'affecterait pas la régularité des procédures d'imposition mises en oeuvre par
l'administration.
Le terme « spontané » fait penser - pardonnez cette image - aux « aveux
spontanés » qui parfois sont obtenus dans le cadre de procédures pénales.
Je crois devoir rappeler que les jurisprudences que le Gouvernement s'efforce
de combattre par cette disposition ont été confirmées très récemment.
La Cour de cassation, par une décision du 18 mars 1997, a renouvelé le
principe selon lequel « les dispositions relatives au secret professionnel font
obstacle à ce que l'identité d'un malade soit divulguée sans son consentement
».
Le Conseil d'Etat, quant à lui, par une décision du 7 juin 1998, a jugé que
les dispositions du code pénal « font obstacle à ce que les membres des
professions auxquelles elles s'appliquent fassent connaître à des tiers les
noms des personnes qui ont recours à leurs services ou à leurs soins. Bien que
les agents des services fiscaux soient eux-mêmes tenus au secret professionnel,
il ne saurait être dérogé en leur faveur, sauf dispositions législatives
expresses, à la règle édictée par l'article 378 du code pénal, y compris dans
le cas où ils entendent faire usage, pour les besoins des contrôles qu'ils
doivent effectuer, de renseignements contenus dans des documents obtenus auprès
de l'autorité judiciaire ».
J'ajoute que le Conseil d'Etat, par un arrêt du 20 janvier 1999 - c'est encore
plus récent -, a confirmé un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes
qui estimait que les dispositions en vigueur du code général des impôts et du
livre des procédures fiscales « n'ont pas et ne peuvent avoir pour effet de
permettre à l'administration des impôts d'avoir connaissance, par
l'intermédiaire d'organismes de sécurité sociale, de faits couverts par le
secret médical, au nombre desquels figure le nom des patients ».
Mes chers collègues, cette affaire est grave et les professionnels concernés
ne s'y sont pas trompés.
Il n'est pas possible d'accepter une telle entorse au principe de portée
générale du secret professionnel. D'ailleurs, si la mesure envisagée par le
Gouvernement devait s'appliquer, il y aurait bien conflit de droit entre, d'une
part, les obligations que les professionnels sont toujours tenus de respecter
en termes de secret professionnel, obligations qui sont assorties de sanctions
pénales, et, d'autre part, les facilités que se donnerait l'administration
fiscale en vertu de la législation que l'on veut ici nous faire approuver.
Il est clair que, avec le terme très général, très vague, d'« informations »
qui figure dans le texte de l'article 57, nous serions conduits à une mise en
cause à dimension variable, et probablement grave dans bien des cas, du secret
professionnel. Ce terme ne permet en aucun cas de circonscrire les demandes de
l'administration fiscale.
En votant cette disposition, nous donnerions donc à cette dernière des
pouvoirs de contrôle extrêmement puissants, remettant en question le fragile
équilibre établi en 1982 lors de la fixation du dispositif concernant les
professionnels affiliés à un centre de gestion agréé.
Du reste, je ne résiste pas au plaisir d'évoquer certains des commentaires
qu'avait suscités, en 1982, l'instauration de ce dispositif. Christian Pierret,
votre collègue, monsieur le secrétaire d'Etat, qui a d'ailleurs occupé le banc
du Gouvernement tout au long de la discussion des articles la première partie,
et qui était, en 1982, rapporteur général de la commission des finances de
l'Assemblée nationale, avait tenu des propos plus que réservés sur le
dispositif proposé par le gouvernement d'alors. Il avait notamment eu cette
phrase, à laquelle chacun pourra souscrire : « Les libertés du citoyen doivent
prendre le pas sur les facilités administratives. »
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Tout est dit !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout est dit par cette seule phrase, en effet !
Nous avons ici, mes chers collègues, un devoir, qui est de préserver et de
conforter le secret professionnel, car des conséquences extrêmement
dommageables pourraient résulter de la disposition que l'on nous demande, en
cet instant, d'adopter.
Dans les arguments opposés aux parlementaires qui ont contesté le bien-fondé
de cette mesure, on a en fait confondu ce qui a trait à la tenue des
comptabilités et ce qui concerne le secret professionnel.
En outre, mes chers collègues, je vous laisse imaginer ce que peut avoir de «
spontanée » la présentation d'informations dans le cadre d'une vérification
fiscale, lorsqu'un vérificateur « campe » à domicile et utilise naturellement
tous les moyens qui lui sont conférés par le code des procédures fiscales ! Il
s'agit évidemment d'une spontanéité toute particulière !
Nous ne pouvons vraiment pas accepter, monsieur le secrétaire d'Etat, d'aller
dans la voie qu'on nous invite à suivre. Je me permets de le dire avec quelque
solennité, car j'ai le sentiment que cette proposition est faite précisément
pour contrer les jurisprudences très claires qui ont été confirmées ces
dernières années tant par la Cour de cassation que par le Conseil d'Etat. Il me
semble que, dans cette affaire, l'administration fiscale veuille avoir raison
envers et contre tous, y compris contre la Cour de cassation et le Conseil
d'Etat, en l'occurrence protecteurs des libertés individuelles.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° II-17.
M. Claude Huriet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans
la position que mes collègues et moi-même nous efforçons de faire valoir.
En effet, l'objectif affiché par le Gouvernement est la lutte contre la fraude
et le blanchiment d'argent. Comment ne serions-nous pas d'accord sur cet
objectif ? C'est sur les moyens dont le Gouvernement souhaite disposer pour
atteindre ce but que nous divergeons fondamentalement.
J'approuve les arguments qui ont été développés à l'instant par M. le
rapporteur général et qui rejoignent ceux qu'avait avancés, voilà quelques
années à peine, M. Christian Pierret, alors rapporteur général de l'Assemblée
nationale.
Ce qui est en cause, en effet, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est la
préservation des libertés et de la vie privée.
Il se trouve que plusieurs d'entre nous ont célébré, il y a quelques jours
seulement, le cent cinquantième anniversaire de l'Assistance publique des
hôpitaux de Paris. A cette occasion, non seulement des médecins mais aussi de
nombreux représentants des associations de malades se sont émus du fait que, en
raison du développement de certaines techniques de communication, le secret
médical risquait d'être de plus en plus largement bafoué.
En vérité, dans ce débat, nous sommes face à un dilemme : si nous donnons à
l'administration fiscale de tels moyens, pour renforcer, ce qui est apparemment
l'objectif du Gouvernement, sa lutte contre la fraude, nous ne pouvons le faire
qu'au détriment de libertés fondamentales.
Monsieur le secrétaire d'Etat, qu'arrivera-t-il si, en cas de vérification de
comptabilité, les agents de l'administration des impôts demandent des
informations relatives à l'identité des clients et si le médecin refuse de les
donner ? Le médecin sera-t-il sanctionné, soupçonné, ou sera-t-il finalement
contraint, sous les pressions dont M. le rapporteur général vient de faire
état, de céder et de révéler l'identité de ses clients ?
Enfin, le dispositif adopté à l'Assemblée nationale va à l'encontre d'une
directive européenne qui prévoit que le secret professionnel est un droit
inaliénable. Cette directive devra d'ailleurs être transposée en droit français
à compter du 1er mars 2000. Comment concilier cette obligation pour notre pays
de transposer une directive européenne et les entorses que, à travers ces
dispositions, on nous demande d'apporter au secret professionnel ?
Pour toutes ces raisons, je demande au Sénat, s'il ne juge pas devoir
supprimer l'ensemble de l'article 57, au moins d'en supprimer le paragraphe
IV.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s II-12
rectifié, II-16 et II-77 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces amendements tendent à supprimer la totalité de
l'article 57, et cela peut se comprendre. Leur adoption reviendrait en fait à
maintenir le
statu quo
.
Cependant, on peut distinguer, comme je me suis efforcé de le faire voilà
quelques instants, deux parties dans cet article. Il y a, d'un côté, des
précisions concernant les obligations comptables et, d'un autre côté,
l'innovation consistant dans l'accès de l'administration fiscale aux
informations relatives à l'identité des clients, à la date et à la forme des
versements afférents aux recettes de toute nature perçues par les
professionnels concernés, à quoi s'ajoute la disposition particulièrement
inopportune portant sur la présentation dite « spontanée » de documents. C'est
cette deuxième partie qui est manifestement constitutive d'entorses au secret
professionnel.
Si nous voulons que le Sénat ait une position parfaitement compréhensible sur
ce sujet, mieux vaut accepter le maintien de l'équilibre établi depuis 1982 en
ce qui concerne les adhérents à un centre de gestion agréé. Mieux vaut donc
accepter l'alignement des obligations comptables de tous les professionnels
concernés et refuser avec énergie les dérives matérialisées par le paragraphe
IV.
Je suggère donc aux auteurs des amendements n°s II-12 rectifié, II-16, II-77,
puisque leurs motivations sont les mêmes que les nôtres, de bien vouloir les
retirer au bénéfice des amendements identiques qui se bornent à supprimer le
paragraphe IV de l'article 57.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je voudrais rappeler quelle est, pour le Gouvernement,
la portée exacte de l'article 57.
Cet article correspond à une levée seulement partielle du secret
professionnel.
En premier lieu, il étend à tous les membres des professions libérales
soumises au secret professionnel les obligations comptables qui sont
actuellement celles des membres de ces mêmes professions lorsqu'ils adhèrent à
une association de gestion agréée. Il s'agit de la tenue d'un livre-journal qui
récapitule les versements d'honoraires avec le nom du client et la date du
versement. Ce document est accessible aux agents de l'administration en cas de
contrôle de comptabilité. La tenue de ce document comptable et son contrôle
sont nécessaires pour valider les recettes qui sont déclarées à
l'administration.
Cette disposition a été instaurée, pour les membres des associations de
gestion agrées, par la loi de finances de 1983. Je souligne que, en dix-sept
ans, elle n'a donné lieu à aucun incident.
En second lieu, l'article 57 permet l'accès des agents des impôts, lors d'un
contrôle de comptabilité, à toutes les informations comptables et
extra-comptables qui sont utiles à son contrôle et qui peuvent porter identité
des clients.
L'exemple typique est celui du carnet de rendez-vous. Le vérificateur doit
pouvoir procéder au décompte du nombre de rendez-vous du professionnel pour
vérifier qu'il n'est pas supérieur à ce qui est déclaré à d'administration. Il
y a donc une levée partielle du secret professionnel, limitée à l'identité des
clients, le texte précisant bien que les agents de l'administration ne peuvent
pas avoir accès à la nature des prestations fournies.
Il ne s'agit surtout pas, pour le vérificateur, de relever les noms des
clients et encore moins de réaliser des fichiers de clients. Pour que ce soit
possible, il faudrait que le texte de l'article 57 l'autorise explicitement. Or
il ne le fait en aucune façon.
Il convient d'observer qu'il s'agit d'une levée partielle indispensable pour
la réalisation du contrôle. Afin de procéder à une vérification de
comptabilité, les agents de l'administration doivent pouvoir accéder aux
informations comptables et extra-comptables détenue par un professionnel de
façon à valider la cohérence d'ensemble de la comptabilité et des sommes
déclarées. Or certaines informations ne sont pas accessibles dès lors qu'elles
peuvent comporter des noms de clients.
En pratique, il est donc impossible de contrôler les recettes d'un membre de
profession libérale soumis au secret professionnel. Cette impossibilité
introduit une rupture d'égalité entre les citoyens face aux charges
fiscales.
Cete situation découle de la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui a jugé, en
1998 et 1999, que la procédure de vérification était viciée, et donc les
impositions correspondantes irrécouvrables, dès lors que le vérificateur avait
pu avoir accès à des documents ou informations comportant le nom du client.
Il ne s'agit cependant évidemment pas de contrer une jurisprudence du Conseil
d'Etat, contrairement à ce qui est affirmé par certains, y compris dans cette
assemblée.
Hubert Haenel.
Heureusement !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
En effet, le Conseil d'Etat a rappelé, dans son arrêt
de 1998, que cette interdiction d'accès s'imposait, sauf disposition
législative expresse. Il a donc implicitement jugé qu'une disposition
législative pouvait introduire cette levée partielle. D'ailleurs, lors de
l'examen du projet de l'article 57, le Conseil d'Etat n'a émis aucune
objection.
J'ajoute qu'il s'agit d'une dérogation limitée du secret professionnel de
façon à maintenir un équilibre entre les nécessités du contrôle et
l'indispensable préservation de la vie privée.
Les règles du secret professionnel ne sont pas de valeur supra-législative. Le
secret professionnel est instauré par l'article 226-13 du code pénal.
D'ailleurs, l'article 226-14 du même code prévoit des possibilités de
dérogation, dès lors que celles-ci sont précisées par un texte législatif. Ces
possibilités de dérogation sont parfaitement reconnues par la Cour de
cassation, laquelle considère que les règles du secret professionnel
n'interdisent pas aux agents de l'administration fiscale d'avoir accès à
l'identité des client, des membres de professions libérales soumises au secret
professionnel. Sur ce point, il y a donc une divergence de jurisprudence avec
le Conseil d'Etat.
Pour répondre plus précisément à M. le rapporteur général, je préciserai que
la Cour de cassation juge, depuis 1966, que les règles du secret professionnel
n'ont pas pour effet d'interdire aux agents de l'administration fiscale d'avoir
accès, dans le cadre du contrôle qu'ils exercent, à l'identité des clients de
membres de professions libérales soumises au secret professionnel.
Cette position a été encore confirmée par un arrêt du 29 avril 1996 : après
avoir relevé que « les agents de l'administration se sont bornés à examiner,
pour les besoins de leur contrôle, les documents comptables obligatoires et
deux états informatiques ayant les caractéristiques de feuilles de recettes et
mentionnant, notamment, le nom des clients et le montant des honoraires payés
», la Cour de cassation a jugé que « l'exploitation de tels documents qui ne
comportaient aucun renseignement d'ordre médical sur les patients ne saurait
constituer une violation du secret professionnel. Par conséquent, pour la Cour
de cassation, seul l'accès à la nature des prestations est interdit aux agents
de l'administration fiscale.
Un arrêt plus récent de la Cour de cassation a pu être évoqué au cours du
débat pour affirmer qu'il y avait eu un revirement de jurisprudence de la Cour
de cassation. Dans un arrêt du 18 mars 1997, la cour aurait jugé que « les
dispositions relatives au secret professionnel font obstacle à ce que
l'identité d'un malade soit divulgée sans son consentement ». Il s'agit, en
réalité, d'une phrase qui est sortie de son contexte. Le litige portait, tout
d'abord, sur un cas de figure très différent puisqu'il ne concernait pas le
droit d'accès de l'administration fiscale. Dans le cadre d'un litige privé
entre deux médecins, la cour d'appel avait ordonné une expertise et l'expert
avait eu accès aux dossiers médicaux des patients, et non pas seulement à leur
identité. Au surplus, la cour s'est prononcée, en fait, non pas sur l'accès de
cet expert au dossier, mais sur les risques de divulgation de l'identité des
clients qui en découlaient.
Après avoir énoncé le principe selon lequel l'identité des clients ne pouvait
être divulguée, la Cour de cassation a reconnu la possibilité d'accès de
l'expert aux dossiers médicaux, dès lors que les précautions nécessaires
avaient été prises pour éviter les risques de divulgation. La cour a ainsi jugé
qu'il appartient au juge, lorsqu'une expertise impliquant l'accès à des
informations couvertes par le secret médical est nécessaire à la manifestation
de la vérité, de prescrire des mesures efficaces pour éviter la divulgation de
l'identité des malades aux consultants.
Il ne s'agit donc pas d'un revirement de jurisprudence. D'ailleurs, cet arrêt
n'a pas du tout été relevé comme tel par les commentateurs. La cour s'inscrit
dans la continuité de sa jurisprudence en admettant la levée limitée du secret
professionnel, ici pour un expert, avec des précautions nécessaires.
Un parallèle peut d'ailleurs être établi sur ce point avec les agents de
l'administration fiscale qui sont eux-mêmes tenus au secret professionnel, ce
qui répond aux précautions relatives à l'absence de divulgation prescrite par
la Cour de cassation. C'est notamment grâce à cette sécurité que la cour admet
l'accès des agents de l'administration aux noms des clients.
A la différence de la jurisprudence de la Cour de cassation, monsieur le
rapporteur général, celle du Conseil d'Etat, très restrictive, s'oppose à ce
que les vérificateurs puissent, exception faite des adhérents d'associations
agréées, avoir connaissance de l'identité des clients des membres des
professions libérales soumises au secret professionnel. Cette jurisprudence
résulte d'une application stricte des textes législatifs en vigueur. En effet,
l'arrêt Chung du 7 juin 1998 indique, sans équivoque, que l'accès d'un
vérificateur à l'identité des patients vicie la procédure, à défaut - j'insiste
sur ce point - de dispositions législatives expresses.
Cette même approche restrictive a conduit le Conseil d'Etat, par l'arrêt Méas
rendu le 20 janvier 1999, à sanctionner l'exploitation, par un vérificateur,
d'informations strictement nominatives contenues dans les relevés
récapitulatifs fournis par les différents organismes de sécurité sociale.
L'objet de l'article 57 du projet de loi de finances est donc de créer la
disposition législative, dont le principe a été expressément réservé par la
jurisprudence du Conseil d'Etat, qui permettra aux agents de l'administration
d'avoir accès à l'identité des clients, et seulement l'identité des clients.
Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur général, des propos tenus voilà
dix-sept ans par mon collègue Christian Pierret, alors rapporteur général du
budget à l'Assemblée nationale. Je ne sais pas si je dois y voir de la malice.
En tous les cas, je suis certain qu'il ne dirait pas autre chose aujourd'hui et
voici pourquoi.
Il s'agissait alors, pour me replacer dans le contexte de l'époque, d'un
amendement hâtif. Je ne crois pas que tel soit le cas du texte dont nous
débattons aujourd'hui. Celui-ci a fait l'objet, comme il se doit, d'une
discussion entre le Gouvernement et le Conseil d'Etat et il a été rendu public
le 15 septembre dernier.
S'agissant de la recherche d'un équilibre entre la nécessité de lutter contre
l'évasion fiscale et le respect des libertés publiques et privées, vous
convenez vous-même dans votre rapport, monsieur le rapporteur général, que dans
ce texte, la démarche du Gouvernement est conforme à ce principe
fondamental.
En ce qui concerne l'atteinte portée à la vie privée par la divulgation à un
tiers du fait qu'une personne a consulté tel médecin spécialisé, cela a suscité
à l'époque, de la part de Christian Pierret, un certain nombre de réserves.
Voilà, me semble-t-il, la réaction juste d'un démocrate sincère et voici le
bilan qu'il pourrait en tirer aujourd'hui devant vous.
Un inspecteur des impôts, vous le savez, n'est pas un tiers comme les autres.
Il est soumis à une obligation de secret professionnel absolu. Les professions
médicales ne sont pas seules en cause, même si elles sont, et de très loin, les
plus largement adhérentes d'associations de gestion agréées.
En seize années, le dispositif de la loi de finances de 1983 n'a connu aucun
incident imputable à l'administration fiscale. La jurisprudence, et c'est son
rôle, a précisé le droit dans plusieurs cas limites ; je pense, notamment, à la
décision du 7 juin 1998 du Conseil d'Etat que cite votre rapport. Cela a
parfois eu pour conséquence de faire tomber des procédures d'imposition. Le
texte qui vous est soumis corrige le tir sur certains points.
Tout cela nous montre au moins une chose : le vrai débat, c'est l'imposition
des professions libérales et l'égalité devant l'impôt, et non pas le secret de
la vie privée auquel ce Gouvernement, comme celui de 1982, est bien sûr
profondément attaché.
M. Hubert Haenel.
Comme tous les gouvernements !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
L'explication est longue ! Vous
avez beaucoup de choses à vous faire pardonner !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Pour conclure, j'indique que je suis défavorable aux
amendements n°s II-12 rectifié, II-16, II-77, II-44, II-17 et II-78.
M. le président.
Monsieur Braun, l'amendement n° II-12 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Braun.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° II-12 rectifié est retiré.
Monsieur Huriet, l'amendement n° II-16 est-il maintenu ?
M. Claude Huriet.
Je le retire également.
M. le président.
L'amendement n° II-16 est retiré.
Monsieur Trucy, l'amendement n° II-77 est-il maintenu ?
M. François Trucy.
Si je n'avais eu que les seules réponses de M. le secrétaire d'Etat, j'aurais
maintenu cet amendement tendant à supprimer l'article 57. Toutefois, M. le
rapporteur a formulé des propositions.
En effet, à partir d'un carnet de rendez-vous - on y a fait allusion tout à
l'heure - de cancérologues, de psychiatres ou de vénérologues, comme on les
appelait autrefois, on peut, derrière l'identification du praticien, déterminer
la maladie du patient.
Si le serment d'Esculape impose aux médecins le secret médical - et il l'a
fait bien longtemps avant que la fiscalité soit une dominante des rapports
financiers entre l'Etat et les praticiens - c'est pour protéger non pas la
fiscalité des médecins, pour ne parler que d'eux, mais l'identité du malade et
sa personnalité.
Par conséquent, je me rallie à la proposition de M. le rapporteur général.
Elle instaure, en effet, un équilibre et elle donne une preuve au Gouvernement
que, par ces attendus, nous cherchons à protéger non pas quelque fraude que ce
soit, mais l'essentiel, c'est-à-dire le secret médical, qui mérite d'être
conservé.
Je retire donc les amendements n°s II-77 et II-78, monsieur le président.
M. le président.
Les amendements n°s II-77 et II-78 sont retirés.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Si j'ai bien compris, monsieur le secrétaire d'Etat,
vous nous dites que le Gouvernement préconise à la fois une levée partielle et
une levée indispensable du secret professionnel.
S'agissant de la levée partielle, les trois premiers alinéas de l'article 57
suffisent. Le paragraphe IV n'est pas nécessaire, car vous alignez les
obligations comptables. Or nous sommes déjà parvenus à un équilibre à cet
égard. Vous avez dit vous-même que cela n'avait pas suscité d'incidents
d'application en ce qui concerne les affiliés aux centres de gestion agréés.
Par conséquent, point n'est besoin, je le répète, du paragraphe IV !
Vous préconisez également une levée indispensable du secret professionnel.
J'avoue ne pas comprendre, là non plus, la raison d'être de ce paragraphe IV,
car l'administration dispose déjà de moyens très étendus. En fait, ce
paragraphe IV serait essentiel pour éviter que ne soient considérés comme non
valables des procédures ou des contentieux qui seraient fondés sur des
informations que l'on a soutirées indûment et en marge de la loi.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Et voilà !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Par conséquent, c'est l'administration qui veut se
protéger, compte tenu de la jurisprudence, et qui vous inspire cette
disposition. Elle pousse toujours plus loin l'inquisition à l'égard des
particuliers, notamment des professions libérales.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite vous poser une question de fond.
Permettez-moi de vous relire l'article 226-13 du code pénal : « La révélation
d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire,
soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission
temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende.
»
Monsieur le secrétaire d'Etat, je croirais plus volontiers à votre bonne foi,
plus exactement à celle du Gouvernement, si, au-delà de l'article 57 que vous
présentez, vous proposiez une modification du code pénal tendant à atténuer les
sanctions prévues par cet article 226-13. En effet, si l'article 57 est voté en
l'état, l'administration fiscale va accéder à des informations nominatives de
nature à porter préjudice à des tiers, donc à des clients de ces professionnels
libéraux. Croyez-vous que ces clients ne vont pas, un jour ou l'autre, se
retourner contre les professionnels libéraux en question ? Croyez-vous que ces
professionnels libéraux ne seront pas, un jour ou l'autre, traînés devant les
prétoires pour atteinte au secret professionnel et violation de l'article
226-13 du code pénal ?
Ne serait-il pas plus simple et plus clair qu'enfin une coordination
ministérielle existe et que la Chancellerie soit un peu plus associée à des
textes de cette nature qui, je le maintiens, portent atteinte à des libertés
publiques ?
M. Hubert Haenel.
La création d'une grande direction des affaires juridiques au ministère des
finances a complètement effacé les directions juridiques du ministère de la
justice !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
J'ai la faiblesse de penser, cher collègue, qu'il
existe encore un ministre de la justice ! D'ailleurs, elle s'est exprimée ce
matin à cette tribune. Par conséquent, il doit être possible de concevoir, sur
le plan interministériel, une approche de cette question.
S'il y a levée des obligations du secret professionnel, monsieur le secrétaire
d'Etat, il faut également lever les sanctions correspondantes et il importe de
le prévoir dans le code pénal, et pas seulement dans le code général des impôts
!
Je crois pouvoir dire que ce dispositif est improvisé et excessif et qu'il ne
peut en aucun cas être approuvé par le Sénat.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite simplement vous rappeler, monsieur le
rapporteur général, que, depuis 1982, l'administration fiscale accède à des
informations nominatives pour les associations agréées sans qu'aucun incident
n'ait été signalé.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Restez-en là !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je vous rappellerai, par ailleurs, en réponse aux
risques que vous évoquez, que les agents de l'administration fiscale sont tenus
au secret professionnel. Je ne leur fais ni l'injure ni le procès de croire que
cela puisse poser problème, pas plus d'ailleurs que ne me permettrait de le
faire l'expérience de la gestion de ces affaires depuis longtemps.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
M. le rapporteur général nous a
très bien rappelé que la commission des finances ne souhaite pas s'opposer à ce
que les obligations comptables auxquelles sont soumis les membres
d'associations agréées soient étendues à ceux qui ne le sont pas, pour montrer,
précisément, qu'il ne s'agit en aucune façon d'empêcher que le contrôle ne
puisse s'effectuer. En revanche, il a beaucoup insisté sur le paragraphe IV de
l'article 57, qui vise à étendre l'ampleur et la portée du contrôle que vous
vous êtes attaché à essayer de réduire.
Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, ne faites pas de nous - nous ne
l'accepterons pas - le greffier de vos bureaux !
Mettez-vous à la place de vos bureaux : ils ont un métier qui consiste à lever
l'impôt et à le faire dans des conditions conformes à la loi. Ils vont donc
vous demander en permanence des moyens légaux supplémentaires. Si vous ne
veillez pas à ce que la limite protectrice des libertés publiques et des
libertés individuelles ne soit pas franchie, nous allons nous retrouver un jour
dans un régime totalitaire sans nous en être aperçus et sans l'avoir voulu !
M. Hubert Haenel.
C'est vrai !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Si j'en juge aux éléments
d'information que vous portez à notre connaissance, j'y vois le germe d'un
certain manque d'attention au regard de grands principes, singulièrement au
regard des libertés publiques et des libertés individuelles.
Vous nous dites - je trouve l'expression charmante - que les fonctionnaires
des impôts sont soumis au secret professionnel...
M. Hubert Haenel.
Sauf pour
Le Canard enchaîné ! (Sourires).
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Mais de qui se moque-t-on ?
Prenez le cas du médecin cancérologue. On le choisit d'abord pour sa
compétence, certes, mais aussi parce que l'on sait qu'il a certaines valeurs et
qu'il respectera un certain nombre de règles, notamment celle du secret
professionnel. Quand on va chez son inspecteur des impôts, ce n'est pas le
secret professionnel qui motive vraiment, sauf peut-être pour vous, monsieur le
secrétaire d'Etat, mais parce que vous êtes vraiment un contribuable parfait.
(Nouveaux sourires.)
Pour que vos inspecteurs des impôts puissent en savoir plus sur les clients,
parce que c'est de cela qu'il s'agit, vous allez tenter d'obtenir
l'autorisation pour vos bureaux d'en connaître davantage non pas sur les
redevables de l'impôt, mais sur leurs clients, y compris sur les difficultés
qu'ils rencontrent. Cela, nous ne le voulons pas. Vous pouvez peut-être
l'obtenir d'une majorité qui vous obéit, mais pas de cette maison, car elle a
une haute idée des libertés individuelles et des libertés publiques. Elle a
choisi de n'être le greffier de personne. Elle a le souci d'instaurer un
certain équilibre et, franchement, ce que vous nous proposez ne va pas dans ce
sens.
D'ailleurs, l'insistance du Gouvernement nous ferait presque regretter de ne
pas rejeter l'ensemble de l'article 57 !
(Sourires.)
Dieu merci ! M. le
rapporteur général est modéré, et il ne nous propose de n'en rejeter que les
dispositions réellement insupportables.
(Très bien ! et applaudissements sur
les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je comprends bien que le Sénat est dans son rôle de
gardien des libertés, mais je ne veux pas laisser penser que le Gouvernement
n'est pas animé de la même préoccupation.
M. Jean Chérioux.
C'est à prouver !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
J'ai clairement indiqué tout à l'heure, en me référant
à la jurisprudence de la Cour de cassation, qui est aussi, me semble-t-il, en
ce domaine, gardienne des libertés, que telle n'était pas la volonté du
Gouvernement. Simplement, celui-ci souhaite, sans porter atteinte le moins du
monde aux libertés, donner à l'administration fiscale l'efficacité qu'elle ne
peut avoir si elle n'a pas accès à certaines informations. Cela ne va pas
au-delà.
Je le répète, le droit en vigueur, qui s'impose aux agents du fisc, offre
suffisamment de garanties pour que l'on ne puisse pas dresser un tableau aussi
pessimiste et aussi noir de la situation que nous voulons créer.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s II-44 et II-17.
M. Bernard Angels.
Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président.
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels.
Cet article a provoqué un certain émoi, car il a été dit qu'il s'attaquait au
secret professionnel, notamment au secret médical. Si tel était le cas, notre
groupe serait le premier à s'insurger. Mais il n'en est rien. En effet, il
s'agit simplement d'aligner la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière de
secret professionnel sur celle de la Cour de cassation, d'unifier les
obligations des contribuables exerçant des professions libérales et de
renforcer par là même les moyens du contrôle fiscal.
Par cette disposition, les membres de professions libérales non adhérents à
des associations de gestion agréées, soit seulement 25 % d'entre eux, devront,
comme leurs collègues adhérents, également faire figurer dans leur comptabilité
les noms de leurs clients et le montant des honoraires versés.
Il n'y a, dans cette extension, aucun élément contraire au secret
professionnel et médical, à moins de penser que les membres des associations de
gestion agréées acceptent cette mise en cause.
Monsieur le rapporteur général, il ne s'agit pas pour l'administration fiscale
de se lancer dans une recherche d'informations sur les clients d'un avocat ou
d'un médecin. Cette disposition rappelle simplement que la vérification de
comptabilité peut être réalisée afin de s'assurer de la réalité des
informations que l'administration fiscale reçoit.
Sans vérification de comptabilité, il n'y a plus de réel contrôle fiscal.
De plus, je vous rappelle que la procédure de vérification de comptabilité est
très encadrée, et vous savez bien qu'en qualité de rapporteur spécial de
services financiers je m'y attache tout particulièrement.
Enfin, l'Assemblée nationale a introduit des protections supplémentaires en
rappelant la règle selon laquelle les agents des impôts ne pouvaient demander
des renseignements sur la nature des prestations fournies et a prévu
explicitement que tous les contribuables membres de professions libérales
bénéficiaient de l'article L. 86 A du livre des procédures fiscales aux termes
duquel il ne peut y avoir, de la part de l'administration, de demandes de
renseignements sur la nature des prestations fournies pour un membre d'une
profession non commerciale soumise au secret professionnel.
Ainsi, les craintes exprimées sont, je crois, infondées. Notre groupe votera
contre ces amendements de suppression.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vois absolument pas, dans une matière
aussi délicate que celle dont nous parlons en cet instant, en quoi peut
consister une « dérogation limitée » ou une « levée partielle ». Un secret, on
le garde ou on le livre !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Claude Huriet.
Vous avez fait référence également aux propos tenus, voilà une quinzaine
d'années, par M. Christian Pierret, disant que les choses avaient changé et que
le contexte était différent. C'est vrai, les choses ont beaucoup changé en
quinze ans. On parle beaucoup plus désormais des droits du malade. Je crois
savoir d'ailleurs que le Gouvernement a l'intention de déposer prochainement
sur le bureau des assemblées un texte dans lequel précisément seront défendus
les droits du malade.
Or, actuellement, monsieur le secrétaire d'Etat, s'il y a un droit auquel les
malades tiennent particulièrement, c'est le droit au secret médical, et plus
encore que par le passé. En effet, avec cette notion extensive de ce « secret
partagé », ils ont le sentiment, et je crains malheureusement qu'ils ne se
trompent pas toujours, qu'à force d'être « partagé », le secret médical
n'existe plus.
Permettez-moi aussi de relever une sorte de contradiction de la part du
Gouvernement. J'ai lu dans les journaux ces derniers temps que la question de
la publication des PACS n'était pas encore réglée. Il semble, en effet, qu'un
courant, peut-être majoritaire, s'oppose à cette publicité au motif que, à
travers le PACS, on serait amené à évoquer tel ou tel comportement qui ne
serait pas accepté par la société. Permettez-moi de vous dire que les
dispositions que le Gouvernement défend actuellement sont bien pires que les
effets que pourrait avoir la publicité, somme toute normale, des PACS. Car il
existe en ville, monsieur le secrétaire d'Etat, des médecins dont on sait
qu'ils sont spécialistes des maladies infectieuses et qu'ils ont en charge plus
particulièrement des séropositifs. Comment éviter, monsieur le secrétaire
d'Etat, qu'à l'occasion d'un contrôle fiscal, alors que le médecin ne pourra
pas, semble-t-il, ne pas livrer les informations relatives à l'identité de ses
clients - bien que vous n'ayez pas répondu clairement à ma question sur ce
point - que l'administration n'établisse un lien et ne déduise des
consultations répétées auprès de tel ou tel médecin la présence de telle ou
telle pathologie ?
Pour toutes ces raisons, il va de soi, monsieur le secrétaire d'Etat, que le
groupe de l'Union centriste votera les amendements de suppression du paragraphe
IV de l'article 57.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais simplement poser une question
complémentaire à M. le secrétaire d'Etat.
Le texte qui nous est proposé par l'article 57 n'est-il applicable qu'en
matière de vérification de comptabilité ou serait-il applicable dans le cadre
de la procédure unilatérale du droit à communication ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, bien entendu, cette
procédure s'applique exclusivement dans le cadre des vérifications de
comptabilité.
Je saisis cette opportunité pour répondre à M. Huriet qu'il s'agit pour
l'administration d'avoir accès à l'identité des clients, et aucunement à la
nature des prestations fournies.
Par conséquent, je crois utile de répéter que ce texte ne met pas en cause le
secret dans ce qu'il a d'essentiel.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s II-44 et II-17, repoussés par
la Gouvernement.
(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 57, modifié.
(L'article 57 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 57
M. le président.
Par amendement n° II-64, MM. Oudin, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 57, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le quatrième alinéa du 3° de l'article 83 du code général des impôts
est complété par une phrase ainsi rédigée : "A compter de l'imposition des
revenus de 2000, cette limite est de 50 000 francs pour les voyageurs,
représentants et placiers de commerce ou d'industrie."
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun.
Cet amendement prend en compte la spécificité des voyageurs, représentants et
placiers, dont le rôle est particulièrement important pour le développement des
PME et du commerce extérieur de la France. Il convient de revenir, pour cette
catégorie et à compter des revenus de l'année 2000, au plafond antérieur de 50
000 francs pour la déduction forfaitaire supplémentaire pour frais
professionnels.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous avons évoqué en première partie cette
proposition, qui semble tout à fait légitime s'agissant de professions qui
bénéficiaient naguère d'une déduction supplémentaire et qui se trouvent
aujourd'hui traitées moins favorablement que d'autres.
Nous avions évoqué le cas d'une autre profession qui a obtenu le
rétablissement du système favorable qui lui était appliqué auparavant. En
l'occurrence, il s'agit de nos amis les journalistes pour lesquels dorénavant,
dans la limite de 50 000 francs, une allocation d'emploi est soustraite à
l'impôt comme représentative de frais. Monsieur le secrétaire d'Etat, il est
certes légitime que d'autres professions, tout aussi estimables, comme celle
des VRP, viennent demander un traitement équivalent.
La commission, sur ce sujet, considérant la discussion comme tout à fait
opportune, s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Certains proposent de revenir, mais pour les seuls
VRP, sur la suppression progressive des déductions forfaitaires supplémentaires
qui, je le rappelle, ont été entreprises sur l'initiative du gouvernement
précédent.
Le Gouvernement ne peut vous accompagner dans une telle démarche. En effet, il
n'est pas envisageable de rétablir les déductions forfaitaires supplémentaires
qui ont été source d'inégalités entre des contribuables exerçant des
professions voisines, au bénéfice, de surcroît, d'une seule profession, ce qui,
du même coup, créerait une nouvelle inégalité au sein même de l'ensemble des
professions bénéficiaires de ces déductions.
Dans ce cas particulier des VRP, l'existence, depuis de nombreuses années,
d'un barème administratif du prix de revient kilométrique des véhicules
automobiles permettant l'évaluation forfaitaire des frais de déplacement
professionnels, qui représentent avec les frais d'hébergement et de
restauration près de 80 % du total des frais déduits par les membres de cette
profession, facilite d'ores et déjà grandement aux intéressés l'exercice d'une
option pour les frais réels. Elle leur permet même, pour un kilométrage
parcouru de 50 000 kilomètres par an - qui serait la moyenne de la profession
selon ses propres représentants - de bénéficier d'une déduction de frais mieux
adaptée pour évaluer les frais réellement engagés, alors même que la déduction
supplémentaire était plafonnée à 50 000 francs.
Compte tenu de ces éléments, je ne pense pas que votre amendement soit utile,
et je vous demande de bien vouloir le retirer. Si tel n'était pas le cas,
l'avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-64, repoussé par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 57.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° II-43, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 57, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 de l'article 197 du code général des impôts est complété par le
membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à l'imposition
commune, le montant de l'impôt est diminué dans la limite de son montant, de la
différence entre 6 700 francs et son montant."
« II. - Les dispositions du I ci-dessus s'appliquent aux revenus perçus à
compter de l'année 2000.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I et du II ci-dessus
sont compensées par la majoration, à due concurrence, des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° II-18, MM. Fréville, Badré, Mme Bocandé et les membres du
groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 57, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 de l'article 197 du code général des impôts est complété par le
membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à imposition commune,
le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la
différence entre 6 700 francs et son montant ;"
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par
la réduction de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers
prévue à l'article 265
bis
1-
b
du code des douanes. »
Par amendement n° II-19, MM. Fréville, Badré, Mme Bocandé et les membres du
groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 57, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 de l'article 197 du code général des impôts est complété par le
membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à imposition commune,
le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la
différence entre 5 020 francs et son montant ;" ;
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par
la réduction de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers
prévue à l'article 265
bis
1-
b
du code des douanes. »
Par amendement n° II-63, MM. Oudin, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 57, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter de l'imposition des revenus de 2000, dans le 4 I de l'article
197 du code général des impôts, la somme : "3 350 francs" est remplacée par la
somme : "2 280 francs".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
II-43.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vous vous souvenez sans doute, que lors de l'examen
des articles de la première partie du projet de loi de finances, notre collègue
M. Yves Fréville a présenté,...
M. Denis Badré.
Avec beaucoup d'éloquence et de conviction !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... avec la connaissance du droit fiscal que chacun
lui connaît, un amendement relatif à ce qu'on a appelé la « conjugalisation »
de la décote au titre de l'impôt sur le revenu.
Le mécanisme de la décote, qui est conçu pour retarder l'entrée dans le barème
des contribuables célibataires modestes, aboutit paradoxalement, comme l'a fort
bien montré M. Fréville en s'appuyant sur des arguments chiffrés, à pénaliser
certains couples mariés soumis à imposition commune. A l'évidence, on ne peut
considérer comme normal que les mêmes personne bénéficient deux fois de la
décote lorsqu'elles sont imposées séparément et n'en bénéficient plus qu'une
seule fois lorsqu'elles se marient, ce qui se traduit par un surcroît d'impôt
significatif.
Les calculs montrent que ce mécanisme défavorise surtout les couples formés de
deux personnes qui travaillent lorsque celles-ci sont de condition modeste ou
moyenne, c'est-à-dire lorsque leur revenu imposable est inférieure à 10 000
francs de revenus salariaux par mois et pour le couple.
Dans l'exemple que nous donnait M. Yves Fréville, le passage devant M. le
maire pour se marier représentait pour les intéressés un supplément d'impôt de
2 700 francs, ce qui constitue une contre-incitation à se marier, qui ne peut
bien sûr être acceptée.
Par cet amendement qui a vocation à être un signal pour l'avenir et pour une
future réforme de la fiscalité, notamment une réforme de la fiscalité sur le
revenu que nous appelons de nos voeux, nous voulons dire qu'il faut cesser de
pénaliser fiscalement le mariage, qu'il serait préférable de l'avantager pour
des raisons de stabilité sociale et de bonne éducation des enfants, plutôt que
de le pénaliser, comme c'est le cas, dans certains situations telle celle qui a
été mise en évidence par notre collègue M. Fréville.
M. le président.
La parole est à M. Badré, pour défendre les amendements n°s II-18 et II-19.
M. Denis Badré.
M. le rapporteur général vient de rappeler très clairement de quoi il
s'agit.
Voilà quelques jours, dans cet hémicycle, la clarté de l'exposé et la qualité
du plaidoyer de M. Yves Fréville, qui a mis toute sa force de conviction pour
défendre ce dossier, ont, je crois, emporté l'adhésion de tous. Aujourd'hui, je
reprends modestement son exposé, je me fais le porte-parole de la même thèse et
met au service de celle-ci une conviction au moins égale à celle qu'ont
exprimée nos collègues MM. Marini et Fréville. Je dénonce simplement ce qui
serait une incitation au non-mariage dans la situation actuelle et,
inversement, ce qui est une injustice pour les personnes mariées. Je demande
que cette situation cesse.
L'amendement n° II-19 est un amendement de repli par rapport à l'amendement n°
II-18. Ce dernier prévoit que, pour un couple marié soumis à imposition
commune, le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de
la différence entre 6 700 francs et son montant. Quant à l'amendement n° II-19,
il dispose que le montant de l'impôt est diminué de la différence entre 5 020
francs et son montant.
M. le président.
La parole est à M. Braun, pour défendre l'amendement n° II-63.
M. Gérard Braun.
Nous avons la même préoccupation et nous différons seulement sur les chiffres.
Aussi, je retire cet amendement au profit de celui qui a été présenté par M. le
rapporteur général.
M. le président.
L'amendement n° II-63 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-18 et II-19 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est évidemment très favorable à
l'amendement n° II-18 puisqu'il prévoit, comme celui que j'ai présenté, que le
montant de l'impôt est diminué de la différence entre 6 700 francs et son
montant. Elle préfère cette rédaction à la version de repli présentée dans
l'amendement n° II-19.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-43, II-18 et II-19
?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Permettez-moi, monsieur le rapporteur général,
d'attirer votre attention sur le fait que l'exemple que vous citez concerne le
cas très spécifique de personnes qui vivent en concubinage. Or, il me paraît
extrêmement réducteur de limiter la problématique du sujet qui a été abordé à
ce simple aspect de la question. En effet, la décote a été instituée pour
corriger, au profit des contribuables célibataires de condition modeste, les
effets d'un barème progressif conçu en tenant compte du système du quotient
familial, celui-ci constituant une technique très favorable pour les
contribuables soumis à l'imposition commune qui bénéficient du quotient
conjugal.
M. Jean Chérioux.
Pour ce qu'il en reste ! Il n'en reste pas grand-chose !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
En outre, le bénéfice de la décote a été étendu en
1987 à l'ensemble des contribuables. Sa « conjugalisation » - je ne sais si je
dois employer ce terme - ne se justifie toutefois pas dès lors que son objectif
n'est pas d'instituer un seuil directement proportionnel à la situation de
famille.
Or, ainsi que M. le Premier ministre l'a annoncé, le Gouvernement conduira en
2000 une réflexion sur les impôts directs pesant sur les ménages. La question
de la décote sera naturellement examinée à cette occasion. Si, comme vous
l'avez dit, cet amendement est un signal, vous pourriez enregistrer ce signal
et nous en resterions là. Je suis donc défavorable à cette disposition.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-43.
M. Michel Moreigne.
Je demande la parole contre cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne.
Nous considérons que, si des réformes doivent être accomplies s'agissant de
l'impôt sur le revenu, elles doivent intervenir de manière globale, et non au
coup par coup, par des touches sans grande cohérence.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
M. Michel Moreigne.
Certes, les ressauts d'imposition, lorsque le contribuable se retrouve soumis
à l'impôt sur le revenu, constituent un problème important, qu'il faut
résoudre. Un rapport de M. Bourguignon l'a suffisamment démontré. Mais, à nos
yeux, cela ne concerne pas la seule décote appliquée à l'imposition des couples
mariés.
M. le secrétaire d'Etat a confirmé à l'instant qu'une réforme d'ensemble est
prévue pour l'année prochaine. Il nous semble préférable d'attendre cette
réforme pour résoudre cette question.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ces amendements présentés par nos collègues de la majorité sénatoriale
concernent l'application des dispositions correctrices du barème de l'impôt
progressif. Vous souhaitez, mes chers collègues, à travers ces amendements,
donner une sorte de prime aux couples mariés qui subiraient les conséquences un
peu perverses de l'application actuelle de la décote.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Cela vous choque-t-il ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président de la commission du finances, je souhaite faire un petit
rappel.
Une part essentielle des contribuables au titre de l'impôt sur le revenu est
aujourd'hui constituée de personnes seules. Je crois même qu'aujourd'hui
pratiquement un foyer fiscal sur deux est dans ce cas. Le dispositif de décote
s'applique donc à l'ensemble de ces foyers fiscaux.
En la matière, il y a une diversité de situations. Il convient notamment de
souligner que la décote n'est pas, si l'on peut dire, une prime aux unions
illicites, d'autant que le débat récent que nous avons mené sur le pacte civil
de solidarité a abondamment montré que les liens du mariage n'étaient plus - on
peut le regretter comme l'admettre une bonne fois pour toutes - la condition
sine qua non
de la définition d'un projet de vie commune. Je doute, de
surcroît, que les personnes qui vivent en union libre pensent aussi d'abord,
dans leur choix, à l'optimisation fiscale qui peut découler de leur situation.
Ou bien ce serait à désespérer de la nature humaine.
Sur le fond, d'ailleurs, le système de la décote a été mis en place non pas
pour favoriser les couples non mariés, mais pour tenir compte de situations de
ressources modestes. On ne peut, par exemple, oublier que des célibataires
rémunérés au SMIC sont aujourd'hui imposables, compte tenu des règles de calcul
en vigueur. La véritable question est la suivante : qu'est ce qui fait que
notre pays compte autant de salariés sous-rémunérés, que les revenus de
remplacement sont parfois si faibles - regardez les allocations chômage. Il ne
s'agit pas d'une prétendue amoralité fiscale, qui ne profiterait qu'aux couples
illégitimes, terminologie un peu poussiéreuse.
C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ces amendements.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je n'ai vraiment rien compris !
M. Denis Badré.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi reporter à demain la suppression d'une
injustice qui est avérée dès aujourd'hui ? Pourquoi reporter l'examen à demain
de cette question, alors que nous l'avons examinée attentivement et de manière
très approfondie ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Denis Badré.
Je préfère que nous supprimions cette injustice tout de suite. Ainsi, nous
confirmerons que le mariage est une valeur fondatrice de notre société et nous
affirmerons clairement - il me paraît important de le faire aujourd'hui -
qu'elle doit le rester.
MM. Emmanuel Hamel et Gérard Braun.
Très bien !
M. Denis Badré.
Monsieur le président, je précise que je retire l'amendement n° II-18 au
profit de celui qui a été présenté par la commission. Pour l'instant je ne
parle pas de l'amendement n° II-19 puisque son destin dépendra du sort qui sera
réservé à l'amendement de la commission.
M. le président.
L'amendement n° II-18 est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-43, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, une article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 57, et l'amendement n° II-19 n'a plus
d'objet.
Article 58
M. le président.
« Art. 58. _ I. _ A. _ L'article 44
sexies
du code général des impôts
est ainsi modifié :
« 1° Au I :
«
a)
A la première phrase du premier alinéa, les mots : "créées à
compter du 1er octobre 1988 jusqu'au 31 décembre 1994" sont supprimés et, après
les mots : "des bénéfices réalisés", sont insérés les mots : ", à l'exclusion
des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif,";
«
b)
Au deuxième alinéa, les mots : "A compter du 1er janvier 1995 :"
sont supprimés et les 1 et 2 deviennent respectivement les deuxième et
troisième alinéas ;
«
c)
Au troisième alinéa, les mots : "jusqu'au 31 décembre 1999" sont
remplacés par les mots : "à compter du 1er janvier 1995 jusqu'au 31 décembre
2004";
«
d)
Au quatrième alinéa, les mots : "les dispositions du 1" sont
remplacés par les mots : "Ces dispositions";
«
e)
Après la première phrase du premier alinéa, il est inséré deux
phrases ainsi rédigées :
« Dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, le
bénéfice des dispositions du présent article est également accordé aux
contribuables visés au 5° du I de l'article 35. Le contribuable exerçant une
activité de location d'immeubles n'est exonéré qu'à raison des bénéfices
provenant des seuls immeubles situés dans une zone de revitalisation rurale.
« Dans le dernier alinéa, après les mots : "de gestion ou de location
d'immeubles", sont insérés les mots : "sauf dans les cas prévus au premier
alinéa". »
« 2° Le II est ainsi rédigé :
« II. _ Le capital des sociétés nouvellement créées ne doit pas être détenu,
directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés.
« Pour l'application du premier alinéa, le capital d'une société nouvellement
créée est détenu indirectement par d'autres sociétés lorsque l'une au moins des
conditions suivantes est remplie :
« _ un associé exerce en droit ou en fait une fonction de direction ou
d'encadrement dans une autre entreprise, lorsque l'activité de celle-ci est
similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire
;
« _ un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des
droits sociaux dans une autre entreprise dont l'activité est similaire à celle
de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire. » ;
« 3° A la fin du III, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour
objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité
préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance
de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom
commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions
d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse,
commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est
placée dans une situation de dépendance. » ;
« 4° Il est inséré un IV ainsi rédigé :
« IV. _ Pour les entreprises créées à compter du 1er janvier 2000, le bénéfice
exonéré ne peut en aucun cas excéder 225 000 euros par période de trente-six
mois. »
« B. _ Au douzième alinéa (e) du I de l'article 125-0 A du code général des
impôts et au
c
du 3 de l'article 92 B
decies
du même code, les
mots : "au deuxième alinéa du 2 du I de l'article 44
sexies
" sont
remplacés par les mots : "au quatrième alinéa du I de l'article 44
sexies
".
« II. _ L'article 39
quinquies
D du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "entre le 1er janvier 1995 et le 31
décembre 1999" sont remplacés par les mots : "avant le 1er janvier 2005";
« 2° Le dernier alinéa est supprimé. »
Par amendement n° II-45, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose, après les mots : « sont supprimés », de supprimer la fin du
a)
du 1° du A du I de cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit, dans cet article 58, du régime fiscal des
entreprises nouvelles.
Le Gouvernement propose, au premier alinéa de cet article, de ne pas inclure,
dans les bénéfices susceptibles d'être exonérés d'impôts, les plus-values
réalisées par une entreprise à l'occasion de la réévaluation libre de ses
éléments d'actifs, et donc de valider expressément la doctrine actuelle de
l'administration, récemment infirmée par la cour administrative d'appel de
Nantes dans un arrêt du 2 octobre 1998.
Mes chers collègues, nous ne saurions accepter de telles méthodes. Lorsque
l'administration est condamnée, elle doit respecter la règle du jeu et ne pas
demander au Parlement de valider des comportements qui ont été, à juste titre,
censurés par les cours compétentes !
M. Jean Chérioux.
Exactement ! La loi est pour tout le monde !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est donc pour des raisons de principe, parce que
nous demandons à l'administration fiscale de respecter le droit, que nous ne
saurions, encore une fois, accepter de valider cette doctrine
administrative.
Par conséquent, le présent amendement vise à ce que ne soient pas distingués,
au sein des profits d'une entreprise, les bénéfices réalisés et ceux qui sont
simplement constatés, ces deux catégories devant demeurer exonérées. Il s'agit,
je le répète, d'un amendement de principe, qui témoigne de notre souci de
lutter contre le recours à la méthode un peu trop facile des validations
administratives.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est radicalement opposé à cet
amendement, dont l'adoption reviendrait à avaliser par la loi des opérations
ayant l'évasion fiscale pour unique objet.
La précision apportée dans la loi vise à dissiper une ambiguïté née d'une
décision de la cour administrative d'appel de Nantes, qui a considéré que les
plus-values pouvaient bénéficier du régime d'exonération dès lors que, en
l'absence d'éléments particuliers figurant dans les travaux et les débats
parlementaires, l'expression « bénéfices réalisés » utilisée à l'article 44
sexies
ne traduisait pas une intention claire du législateur de taxer
ces profits. Or l'application du régime d'exonération à des bénéfices résultant
d'un simple jeu d'écriture comptable n'aurait aucune légitimité et serait sans
rapport avec les objectifs visés dans l'optique de ce dispositif.
Dans ces conditions, si la commission ne retire pas son amendement, le
Gouvernement émettra un avis défavorable sur celui-ci.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-45, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° II-46, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
I. A la fin du
c)
du 1° du A du I de l'article 58, de remplacer la date
: « 31 décembre 2004 » par la date : « 31 décembre 2006 ».
II. En conséquence, à la fin du 1° du II de l'article 58, de remplacer la date
: « 1er janvier 2005 » par la date « 1er janvier 2007 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Avec cet amendement, il s'agit toujours du régime
fiscal des entreprises nouvelles, au sens de l'aménagement du territoire. Notre
amendement a pour objet de proroger ce régime issu de l'article 44
sexies
du code général des impôts, ainsi que le régime d'amortissement
exceptionnel des immeubles construits par des petites et moyennes entreprises
dans certaines zones du territoire.
Le régime en question devrait à notre avis s'appliquer non pas jusqu'au 31
décembre 2004, comme le propose le Gouvernement, mais jusqu'au 31 décembre
2006, c'est-à-dire jusqu'au terme des nouveaux contrats de plan Etats-régions
en cours de négociation, ce dernier mot devant parfois être mis entre
guillemets.
Il serait logique, s'agissant d'aménagement du territoire, de « caler » la
mesure sur la durée de validité de ces contrats de plan, ainsi que sur la
programmation européenne des fonds structurels.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
Le texte adopté en première lecture par l'Assemblée nationale prévoit une
prorogation, pour cinq ans, du régime d'exonération des entreprises nouvelles
et de l'amortissement dérogatoire des immeubles commerciaux construits dans les
ZRR, les zones de rénovation rurale, et les ZRU, les zones de redynamisation
urbaine.
Ce délai nous paraît satisfaisant. S'agissant d'aménagement du territoire, je
note d'ailleurs que, comme vous venez de le dire, monsieur le rapporteur
général, c'est celui qui avait été retenu par le Sénat lors de la discussion en
1995 de la loi « Pasqua ».
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-46, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° II-47 rectifié, M. Marini, au nom de la commission des
finances, propose :
A. - De rédiger comme suit le dernier alinéa
e
du 1° du A du I de
l'article 58 :
«
e)
Le cinquième alinéa est ainsi modifié :
« 1. Les mots : "aux entreprises qui exercent une activité bancaire,
financière, d'assurances, ou de location d'immeubles ni" sont supprimés ;
« 2. Il est complété par une phrase ainsi rédigée : "Les contribuables
exerçant une activité de location d'immeubles ne sont exonérés qu'à hauteur des
bénéfices provenant des seuls immeubles situés dans une des zones visées au
premier alinéa.". »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du A
ci-dessus, de compléter
in fine
l'article 58 par un paragraphe ainsi
rédigé :
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension du champ
d'application de l'article 44
sexies
du code général des impôts est
compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, nous souhaitons, par cet
amendement, étendre le régime fiscal des entreprises nouvelles à toutes les
entreprises, quelle que soit leur branche d'activité, c'est-à-dire, en
particulier, à celles qui exercent une activité bancaire, financière,
d'assurances ou de location d'immeubles.
Nous pensons qu'il n'y a aucune raison d'exclure du champ du dispositif ces
entreprises, qui sont aussi créatrices d'emplois et de richesses que d'autres
et qui peuvent être tout aussi fragiles au cours de leurs premières années
d'existence.
Au demeurant, je rappellerai que, à lire la version initiale du projet de loi
de finances, c'était bien cette logique qu'avait suivi l'ancien ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie, l'article 10 prévoyant d'étendre,
par ailleurs, le régime des bons de souscription de parts de créateur
d'entreprise aux activités que j'ai citées.
Il faut souligner que seules les entreprises créées dans certaines zones
d'aménagement du territoire sont éligibles, ce qui conduit à penser que le coût
de l'extension que nous souhaitons devrait être tout à fait acceptable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le régime d'exonération prévu à l'article 44
sexies
est destiné à renforcer les fonds propres d'entreprises nouvelles
indépendantes qui doivent recourir à l'emprunt et supporter des charges
importantes au cours de leurs premières années d'existence.
Dans ces conditions, l'exclusion des activités bancaires, financières et
d'assurances du champ du dispositif de l'article 44
sexies
du code
général des impôts se justifie par le fait que ces activités sont généralement
exercées dans des conditions telles qu'une aide de l'Etat ne se justifie
pas.
Ces secteurs d'activité sont en effet moins exposés que d'autres aux
difficultés économiques...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ah bon !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
... et sont, par ailleurs, peu créateurs d'emplois.
En outre, le respect de la condition d'implantation exclusive en zone
d'aménagement du territoire soulèverait d'importantes difficultés pour les
entreprises relevant de ces secteurs d'activité. En effet, la réalité de leur
implantation reste, en pratique, difficile à établir pour le contribuable et
délicate à vérifier pour l'administration.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cette disposition ne coûterait pas cher !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
En tout état de cause, le Gouvernement demande le
rejet de cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-47 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je remarque que, dès qu'il s'agit d'alléger la contribution des entreprises au
financement de la charge publique, la majorité de la commission des finances du
Sénat sait toujours faire preuve de beaucoup d'imagination. Il en est ainsi
avec l'amendement n° II-47 rectifié, comme avec l'amendement n° II-45, que nous
avons examiné précédemment.
Pour notre part, nous avons approuvé les orientations ayant guidé la rédaction
de l'article 58 du projet de loi, qui tend, dans sa version actuelle, à
rééquilibrer le dispositif d'exonération temporaire de l'impôt sur les sociétés
défini à l'article 44
sexies
.
L'application de ce dispositif représente, faut-il le rappeler, un certain
coût, qui s'élèverait aujourd'hui, selon les estimations tirées du document
d'évaluation des voies et moyens, à un milliard de francs.
On notera aussi que la mise en oeuvre de ce dispositif a engendré un important
contentieux fiscal, dont les dispositions de l'actuel article 58 permettraient
d'ailleurs de limiter l'ampleur, voire d'amener la disparition.
Il est également indispensable de s'interroger sur la portée et l'efficacité
réelles du dispositif en termes de développement économique et de création
d'emplois. Nous étions très sceptiques lors de l'instauration du dispositif, et
nous le demeurons.
En effet, nous pensons que la meilleure incitation au développement économique
des parties du territoire dites défavorisées réside non pas dans l'accumulation
de facilités fiscales ou d'allégements de cotisations sociales, mais dans une
meilleure allocation des ressources du crédit aux entreprises en faveur des
véritables « entreprises nouvelles ».
Ces observations expliquent que nous ne voterons pas cet amendement de la
commission des finances, pas plus que nous n'avions voté les deux
précédents.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais rappeler à M. le secrétaire d'Etat que la
disposition prévue par notre amendement vise à apporter une simplification, qui
devrait amener une réduction du contentieux.
En effet, il suffit aujourd'hui qu'une entreprise exerce à titre accessoire
une activité de nature immobilière ou financière pour que puissent lui être
opposées les dispositions actuelles du code général des impôts et que, bien que
créant réellement des emplois dans une zone aidée au sens de l'aménagement du
territoire, elle se voit privée de l'exonération d'impôt sur les bénéfices, ce
qui suscite un contentieux nourri.
Alors, que veut-on ? Veut-on oui ou non que le système des ZRU et des ZRR soit
efficace ? Un emploi n'en vaut-il pas un autre ?
Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il n'y avait sans doute guère
d'entreprises de ces secteurs d'activité qui soient localisées spécifiquement
dans les zones en question. Par conséquent, puisqu'il y en a si peu, et puisque
la simplification proposée aurait pour effet de réduire les difficultés
d'application des textes préexistants, vous ne risquez pas grand-chose à
accepter la suggestion que nous formulons.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-47 rectifié, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 58, modifié.
(L'article 58 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 58
M. le président.
Par amendement n° II-65 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 58, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du
e
du 1° du I de l'article 31 du code
général des impôts, le taux : "14 %" est remplacé par le taux : "17 %".
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter des revenus de
2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et
du II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits
visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création
d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun.
L'objet de cet amendement est de favoriser les propriétaires bailleurs, dont
les revenus tirés d'une location sont les plus taxés. La charge fiscale est
lourde par rapport aux risques pris par le propriétaire bailleur.
Il convient donc de relever le taux de l'abattement auquel a droit le
propriétaire au titre des frais de gestion, car il est insuffisant au regard
des frais réels.
Je pense que le Gouvernement, en acceptant cet amendement, marquerait tout
l'intérêt qu'il porte au secteur locatif et aux propriétaires bailleurs,
lesquels rencontrent bien des difficultés.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout à fait favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Défavorable, pour des raisons qui ont déjà été
expliquées par M. Christian Pierret lors de l'examen de la première partie du
projet de loi de finances.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-65 rectifié.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
J'indiquerai simplement qu'en employant l'expression « frais de gestion », on
fait rarement référence à une notion qui est capitale pour ceux qui possèdent
des biens immobiliers, à savoir l'amortissement.
En effet, la situation du bailleur n'est pas identique à celle d'une
entreprise, qui peut amortir chaque année, dans son bilan, le bien qu'elle
possède. Le bailleur, lui, ne pratique pas l'amortissement. La seule
possibilité qui lui est donnée, c'est donc d'inclure le montant équivalent à
cet amortissement dans l'abattement de 14 %, qui passera à 17 % si le Sénat
veut bien suivre les auteurs de l'amendement, ce que je souhaite.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-65 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-59, M. Pelletier propose d'insérer, après l'article 58,
un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Le cinquième alinéa du
e
du 1° du I de l'article 31 du code
général des impôts est ainsi modifié :
« 1° La première phrase est complétée
in fine
par les mots : "ou
reconduit ou renouvelé à compter du 1er janvier 2000".
« 2° La troisième phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Cet engagement prévoit que le loyer et les ressources du locataire, qu'il a
perçus pendant l'avant-dernière année précédant celle au titre de laquelle la
location avec ce locataire ouvre droit pour la première fois aux dispositions
du présent alinéa, ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret. Cet
engagement prévoit, en outre, que la location ne peut être conclue avec un
membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant du contribuable, ou, si
le logement est la propriété d'une société non soumise à l'impôt sur les
sociétés, l'un de ses associés ou un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un
descendant d'un associé. »
« B. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une
majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je le reprends, monsieur le président.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° II-59 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement de notre collègue Jacques Pelletier a
semblé tout à fait opportun à la commission, car il vise à étendre le bénéfice
du régime dit « Besson », pour le logement ancien, aux baux conclus, reconduits
ou renouvelés avec une personne occupant déjà le logement, lorsque cette
personne respecte les conditions de ressources prévues par le régime.
Il s'agit donc d'étendre au logement ancien le régime de la loi « Besson », et
de favoriser ainsi le succès de cette formule destinée aux logements
intermédiaires.
Toutefois, monsieur le président, et pour tenir compte du fait que, lors de la
discussion de la première partie du projet de loi de finances, nous avons
souhaité étendre le régime Besson aux locaux loués à un ascendant ou à un
descendant du contribuable concerné, je rectifie cet amendement afin de
supprimer par deux fois, dans le texte proposé par l'alinéa 2° du paragraphe A,
les mots : « , un ascendant ou un descendant ».
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° II-59 rectifié
bis
, présenté par
M. Marini, au nom de la commission des finances, et visant à insérer, après
l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Le cinquième alinéa du
e
du 1° du I de l'article 31 du code
général des impôts est ainsi modifié :
« 1° La première phrase est complétée
in fine
par les mots : "ou
reconduit ou renouvelé à compter du 1er janvier 2000".
« 2° La troisième phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Cet engagement prévoit que le loyer et les ressources du locataire, qu'il a
perçues pendant l'avant-dernière année précédant celle au titre de laquelle la
location avec ce locataire ouvre droit pour la première fois aux dispositions
du présent alinéa, ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret. Cet
engagement prévoit, en outre que la location ne peut être conclue avec un
membre du foyer fiscal du contribuable, ou, si le logement est la propriété
d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés, l'un de ses associés ou
un membre du foyer fiscal d'un associé. »
« B. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une
majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Cette mesure procurerait en effet au bailleur, dont le contrat de location et
le locataire remplissent déjà les conditions prévues pour le faire bénéficier
de la déduction forfaitaire majorée de 25 %, un avantage fiscal important
dépourvu de toute utilité incitative.
En outre, l'exclusion des locations en cours permet d'étaler la montée en
puissance, et donc le coût budgétaire, d'un dispositif qui, à terme, compte
tenu du taux de rotation des locataires, devrait concerner une part très
importante du parc locatif.
Je ne doute pas des bonnes intentions de M. Pelletier ni de celles de M. le
rapporteur général, mais je tiens à préciser que tout avantage fiscal important
doit avoir pour contrepartie un effort du contribuable en direction du logement
intermédiaire. En l'absence d'un réel sacrifice, l'avantage fiscal
constituerait une aubaine.
J'ajoute que le dispositif Besson vient tout juste de naître et qu'il faut
donc le laisser vivre avant d'envisager de le corriger.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je suis désolé d'insister, mais
il nous faut attirer régulièrement l'attention des gouvernements, quels qu'ils
soient, sur la situation du logement ancien. Une sorte de fatalité pèse en
effet, dans notre pays, sur ce type de logements : tout pour le neuf, rien pour
l'ancien ! C'est une obsession !
Or, le logement ancien, en particulier la catégorie à laquelle s'est référé M.
le rapporteur général tout à l'heure, est précisément celui qu'il faut inciter
les propriétaires soit à conserver dans leur patrimoine, soit à acquérir pour
le réhabiliter et le remettre à la disposition de locataires de condition
modeste, dans la mesure où il s'agit de loyers plafonnés.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes issu d'un terroir que je connais.
Vous ne pouvez pas me laisser penser que vous estimez plus adapté et plus
conforme aux besoins des familles d'être « stockées », dirai-je, dans des
immeubles collectifs de type HLM, construits voilà vingt-cinq ou trente ans et
qui ont, hélàs ! produit les dégâts sociaux que nous connaissons.
Parallèlement, en tout cas dans une région que vous connaissez bien et qui est
proche de la vôtre, il existe des logements anciens de qualité qui ne sont plus
en état d'être habités. Il faut donc impérativement inciter les propriétaires à
les réhabiliter, à les remettre sur le marché locatif et à les louer à des
conditions qui répondent aux normes fixées par l'Etat pour les locataires de
condition modeste. C'est de cela qu'il s'agit.
Cet amendement vise donc à atteindre en même temps deux objectifs utiles :
d'une part, loger des ménages aux revenus modestes dans d'excellentes
conditions ; d'autre part, permettre la réhabilitation du patrimoine de la
France.
Vous allez nous dire qu'il est déjà beaucoup fait. Mais curieusement, il est
tellement fait que force est de constater que les mesures prises n'ont pas
l'effet attendu !
Faisons donc ce qu'il faut. Prenons des dispositions pour que ces logements
puissent être réhabilités, pour que les familles qui les recherchent les
trouvent sur le marché locatif aux meilleures conditions. Et vous aurez alors
vraiment fait progresser les choses.
Les réponses qui nous sont apportées sont toujours les mêmes. Elles ne nous
donnent pas satisfaction. Croyez bien que nous n'avons pas du tout le sentiment
d'être à côté de la réalité parce que les Français, eux, ne se trompent pas et
ne comprennent rien aux réponses données par le Gouvernement. Ils attendent des
logements anciens réhabilités ouverts précisément aux familles de condition
modeste. Tel est l'objet de l'amendement n° II-59 rectifié
bis,
qu'a
bien fait de reprendre M. le rapporteur général.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je suis naturellement sensible à l'expérience partagée
à laquelle M. le président de la commission des finances a fait allusion. Je ne
peux néanmoins pas laisser dire que rien ne serait fait pour l'ancien et que
tout serait fait pour le neuf !
Permettez-moi de rappeler certaines des mesures qui ont été prises depuis juin
1997 et auxquelles les Français, me semble-t-il, comprennent quelque chose : la
baisse de 60 % des frais de notaire et la baisse de la TVA sur les logements,
qui représente 20 milliards de francs, sont des mesures extrêmement concrètes
en direction des logements dont vous parliez. Cela faisait bien longtemps qu'un
gouvernement ne s'était pas attaqué à cette question de façon aussi dynamique
!
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Cela n'a rien à voir avec le
marché locatif !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Rien à voir !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Si !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-59 rectifié
bis.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je suis étonné des arguments utilisés par M. le secrétaire d'Etat. Il
considère qu'il ne serait pas normal d'accorder l'avantage en question aux
bailleurs qui sont visés par cet amendement sous prétexte qu'ils ne feraient
aucun effort.
S'il s'agit effectivement de faire des travaux, c'est autre chose ; mais s'il
s'agit des logements soumis à la loi Besson, un propriétaire qui accepte de
mettre à la disposition du locataire un logement sous condition de ressources,
selon des conditions bien déterminées et avec un loyer plafonné, consent bien,
à mon avis, un effort ; si vous ne considérez pas que c'en est un, je voudrais
bien savoir ce que c'est !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Exactement !
M. Jean Chérioux.
Je pense que, s'agissant des logements à loyer modéré, M. le secrétaire d'Etat
préfère bien entendu, comme le disait tout à l'heure M. le président de la
commission des finances, les grands logements HLM aux petits logements mis à la
disposition des locataires dans des conditions aussi avantageuses que les HLM
et certainement plus agréables à habiter.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Exactement !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-59 rectifié
bis,
repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-66, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Gaillard, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article
58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 199
terdecies
OA du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1. Au premier alinéa du paragraphe I, le taux : "25 %" est remplacé par le
taux : "40 %".
« 2. Le paragraphe II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 1999, les limites
mentionnées au premier alinéa sont portées respectivement à 50 000 francs et
100 000 francs.
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter de l'imposition des
revenus de 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et
II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun.
Cet amendement tend à rendre plus attractifs les investissements dans les PME
par le relèvement des plafonds de la réduction d'impôt pour souscription au
capital des PME. Quand on connaît l'importance de tels investissements pour
toutes les PME qui manquent de fonds propres, il apparaît qu'il faut vraiment
encourager ces souscriptions en capital.
Il est proposé pour cela que le taux de 25 % soit remplacé par le taux de 40 %
et, pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 1999, que les limites
mentionnées au premier alinéa soient portées respectivement à 50 000 francs et
à 100 000 francs.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission des finances est favorable aux
objectifs fixés. Elle est également favorable à la première partie du
dispositif, c'est-à-dire le passage du taux de 25 % à celui de 40 %.
En revanche, s'agissant des plafonds, nous avons déjà voté, lors de la
discussion de la première partie du projet de loi de finances, un amendement
les fixant à 75 000 francs et à 150 000 francs.
Aussi, mon cher collègue, pour que la commission puisse émettre un avis
favorable sur cet amendement, je vous invite à le rectifier en en supprimant
l'alinéa 2 du paragraphe I.
M. le président.
Monsieur Braun, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur général
?
M. Gérard Braun.
J'y suis tout à fait favorable, et je rectifie donc mon amendement en ce sens,
monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° II-66 rectifié, présenté par MM. Oudin,
Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Gaillard, Joyandet, Ostermann et Trégouët, et
tendant à insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 199
terdecies
OA du code général des impôts est ainsi
modifié :
« Au premier alinéa du paragraphe I le taux : "25 %" est remplacé par le taux
: "40 %".
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter de l'imposition des
revenus de 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et
II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Il est défavorable, pour des raisons qui ont été déjà
largement expliquées lors de la discussion de la première partie du projet de
loi de finances.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-66 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-48, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 220
quinquies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Le quatrième alinéa du I est ainsi rédigé :
« La créance est remboursée l'année suivant celle de la clôture de l'exercice
au cours duquel l'option visée au premier alinéa a été exercée. »
« 2° Le cinquième alinéa du I est supprimé.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée par le
relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code
général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je rappelle que le régime dit « de l'imputation en
arrière » - je n'ose parler de
carry-back
en la présence de notre
collègue Emmanuel Hamel !
(Sourires)
- s'applique lorsque les résultats
d'un exercice sont déficitaires alors que ceux des exercices antérieurs ont été
bénéficiaires. Dans ce cas, et depuis 1985, les sociétés soumises à l'impôt sur
les sociétés ont la possibilité d'imputer le déficit en question sur les
bénéfices des exercices précédents.
A l'étranger, lorsque de tels régimes existent - et je pense, monsieur le
secrétaire d'Etat, que vous y êtes sensible puisque vous êtes en charge du
commerce extérieur, donc de la compétitivité des entreprises - le Trésor
rembourse aussitôt l'impôt antérieurement versé, ce qui apporte un ballon
d'oxygène à la trésorerie de l'entreprise, d'autant plus appréciable que
celle-ci connaît par définition à ce moment-là des difficultés financières.
Le régime en vigueur en France est moins favorable puisqu'il aboutit seulement
à la constatation d'une créance fiscale imputable sur les impôts futurs ou
remboursable cinq ans plus tard si aucun bénéfice susceptible de permettre
l'imputation n'a été réalisé. Théoriquement, la créance peut être cédée à titre
de garantie à un établissement de crédit selon la procédure prévue par la loi
Dailly, mais une telle mobilisation est peu usitée, voire quasiment jamais
opérée.
L'amendement n° II-48 vise à permettre aux entreprises de se voir rembourser
immédiatement la créance née du report en arrière du déficit. Cette mesure
aurait, selon nous, un impact budgétaire limité, car le stock actuel de
créances est évalué, nous dit-on, à 150 millions de francs environ. Elle
permettrait de préserver la situation d'entreprises qui ont des besoins de
trésorerie pour faire face, à la suite d'un retournement de la conjoncture, à
des restructurations ou à des redéploiements dans une période difficile de leur
existence.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet
amendement.
Le dispositif du report en arrière des déficits procure déjà des avantages
financiers importants ; la créance de l'Etat résultant du report en arrière
améliore les résultats de l'entreprise et contribue au renforcement des fonds
propres. Ce dispositif prévoit le remboursement de la créance au terme d'un
délai de cinq ans et permet ainsi de tenir compte de la situation des
entreprises qui connaissent des difficultés sur une longue période.
L'objectif du dispositif est donc rempli. Aller au-delà poserait un problème
de principe en rompant le parallélisme qui existe entre le report en arrière et
le report en avant des déficits.
Enfin, en ce qui concerne le coût budgétaire de l'amendement n° II-48,
j'indiquerai simplement que, quoi qu'il en soit, le Gouvernement a d'autres
priorités en matière de réduction d'impôts. L'impôt sur les sociétés n'est en
effet pas le plus injuste.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-48.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement n° II-48 s'inscrit dans la droite ligne des amendements
défendus tout à l'heure par M. le rapporteur général lors de l'examen de
l'article 58. Il présente la même sollicitude en faveur de l'allégement de
l'impôt sur les sociétés.
M. Philippe Marini.
C'est la réaction en marche !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
En l'occurrence, il s'agit de nous inviter à accélérer le remboursement pour
les entreprises des déficits fiscaux cumulés dans le cadre du dispositif de
report en arrière, dont je conçois qu'il soit difficile à comprendre pour
quelques-uns de nos compatriotes. Ce dispositif est d'un coût important pour le
budget de l'Etat. Il s'en faut en effet de peu qu'il corrige de quelque 20
milliards de francs le produit de l'impôt sur les sociétés. Et contrairement à
ce qui nous est proposé par cet amendement, il ne nous semble pas utile d'en
accroître le coût pour les finances publiques.
Vous qui êtes si attentif à la réduction de la dette et des déficits publics,
monsieur le rapporteur général, vous devriez tout de même regarder d'un peu
plus près à une dépense de 20 milliards de francs. Mais vous avez, en fait, une
vision un peu sélective et tronquée de la consistance de ce déficit public et
vous oubliez un peu vite que, parmi ses éléments constitutifs, figurent
l'abaissement du taux de l'impôt sur les sociétés et l'ensemble des dispositifs
qui en ont rabrougri l'assiette, dont le coût cumulé n'a pas que peu participé
à la création du déficit et de la dette publique.
Pour quels résultats ? Des créations d'emplois ? Nous les attendons, d'autant
que les secteurs dégageant aujourd'hui le plus de valeur ajoutée ne sont pas
nécessairement ceux qui créent le plus d'emplois. La santé financière des
entreprises ? Assurément, quand on constate que les sociétés non financières
ont distribué, en 1998, plus de 500 milliards de francs de dividendes et que la
progression de ce prélèvement sur la richesse créée est chaque année plus
spectaculaire : il suffit d'observer le CAC 40 !
Nous ne vous suivrons donc pas dans l'adoption de cet amendement, qu'il nous
semble d'ailleurs presque indécent de déposer dans le contexte économique que
nous connaissons, marqué par le maintien d'un haut niveau des profits des
entreprises.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est un amendement « indécent » !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-48, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-49, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A la fin de la première phrase du
b
du 1° de l'article 209 OA du
code général des impôts, les mots : "ouvrant droit à l'avoir fiscal" sont
supprimés.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée par une
majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
J'ai peur que cet amendement ne soit aussi « indécent
» que le précédent ! Mais peut-être Mme Beaudeau animera-t-elle nos débats en
expliquant à nouveau son vote ?
Depuis la loi de finances pour 1993, les entreprises passibles de l'impôt sur
les sociétés sont, en principe, imposables chaque année au titre de la
valorisation des parts d'OPCVM détenues en France ou à l'étranger alors
qu'auparavant la plus-value n'était imposable que lors de la cession de ces
parts.
Toutefois, et afin de ne pas remettre en cause les efforts visant à renforcer
les fonds propres des entreprises, les titres des OPCVM placés en actions sont
exemptés de ladite mesure à condition que leur actif soit composé pour 90 % au
moins d'actions ou de certificats d'investissement émis par des sociétés
situées dans l'Union européenne et à condition que les dividendes auxquels ils
donnent droit soient assortis d'un avoir fiscal.
Ces deux conditions visent à exclure les montages qui reviendraient à
transformer des produits d'actions en revenus de taux.
La condition qui impose que les dividendes des actions figurant dans l'actif
des OPCVM exonérées ouvrent droit à l'avoir fiscal vise en effet à éviter que
les actions logées dans l'organisme de placement collectif recouvrent en
réalité d'autres sociétés de capitalisation ayant un actif composé de produits
de taux.
Toutefois, cette condition apparaît aujourd'hui démesurément restrictive,
puisqu'elle prive du bénéfice de la mesure les organismes de placement
collectif dont l'actif est constitué d'actions de sociétés situées dans des
Etats membres de l'Union européenne qui n'ont pas institué un crédit d'impôt
équivalent à l'avoir fiscal, ce qui est le cas de la plupart des pays
européens.
Monsieur le secrétaire d'Etat, l'année dernière, également dans le cadre de la
discussion de la loi de finances, la question avait été posée. Christian
Sautter, à l'époque secrétaire d'Etat au budget, avait assuré, pour leur
demander de le retirer, les auteurs d'un amendement similaire que l'appel
qu'ils avaient lancé avait été entendu.
Un an après, l'appel aura sans doute été entendu et peut-être les travaux de
l'administration ont-ils progressé ? Peut-être vous exprimerez-vous, monsieur
le secrétaire d'Etat, sur l'orientation qu'il vous paraît souhaitable de suivre
pour garantir la compétitivité fiscale et l'équité de traitement entre les
OPCVM dont l'actif est constitué d'actions de sociétés françaises et ceux dont
l'actif est constitué d'actions des sociétés d'autres pays de l'Union
européenne.
Parfaitement averti, monsieur le secrétaire d'Etat, de la problématique de la
concurrence fiscale en Europe, vous savez que, dans ce domaine, les choses sont
difficiles. Vous avez en mémoire les épisodes récents de la directive traitant
de la taxation de certaines catégories de produits d'épargne ! Au regard des
décisions récentes de la Commission européenne, peut-être serait-il utile que
notre législation fiscale ne crée pas de discriminations entre les placements
en actions de sociétés françaises et les autres.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est sensible au problème qui vient
d'être soulevé.
Vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur général, l'année dernière, le
Gouvernement s'était engagé devant votre assemblée à procéder à un examen
approfondi de cette question technique, qui est d'ailleurs d'une grande
complexité.
S'il a bien confirmé la réalité des difficultés évoquées, cet examen a aussi
mis en évidence l'importance du coût budgétaire de la proposition qui est faite
: il s'élève à au moins 2 milliards de francs, ce qui paraît disproportionné
par rapport à l'objectif recherché, même si celui-ci est louable.
Dans ces conditions, le Gouvernement suggère le retrait de l'amendement ou, à
défaut, son rejet.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-49, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-50 rectifié, M. Marini, au nom de la commission des
finances, propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
« A. - L'article 54
septies
est ainsi modifié :
«
a)
Le deuxième alinéa du I est abrogé ;
«
b)
Le III est ainsi rédigé :
« III. - Pour les scissions de sociétés placées sous le régime prévu aux
articles 210 A et 210 B, les sociétés bénéficiaires des apports doivent
produire un état indiquant la situation de propriété, au cours de l'exercice,
des titres représentatifs des apports que les associés de la société scindée se
sont engagés à conserver. Cet état, conforme au modèle fixé par
l'administration, doit être joint à leurs déclarations de résultats souscrites
au titre de la période couverte par l'engagement de conservation des titres. »
;
« B. - Le dernier alinéa du II de l'article 151
octies
est abrogé ;
« C. - L'article 93
quater
est ainsi modifié :
«
a)
Au I
ter
et au II, les mots : "des quatrième et cinquième
alinéas" sont remplacés par les mots : "du dernier alinéa" ;
«
b)
Le dernier alinéa du V est ainsi rédigé :
« Les personnes placées sous le régime prévu à l'alinéa précédent sont
soumises aux obligations définies à l'article 54
septies
. » ;
« D. - L'article 1734
ter
est ainsi modifié :
«
a)
Au premier alinéa, le pourcentage : "1 %" est remplacé par le
pourcentage : "5 %" ;
«
b)
Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés
:
« De même, si l'état prévu au I de l'article 54
septies
ou au II de
l'article 151
octies
n'est pas produit au titre de l'exercice au cours
duquel est réalisée l'opération visée par ces dispositions ou au titre des
exercices ultérieurs, ou si les renseignements qui sont portés sur ces états
sont inexacts ou incomplets, il est prononcé une amende égale à 5 % des
résultats omis.
« Si l'état prévu au III de l'article 54
septies
n'est pas produit au
titre d'un exercice ou si les renseignements qui y sont portés sont inexacts ou
incomplets, il est prononcé une amende égale à 5 % des résultats de la société
scindée non imposés en application des dispositions prévues aux articles 210 A
et 210 B. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables aux opérations réalisées à
compter du 1er janvier 2000. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article additionnel que nous proposons d'insérer
vise les sanctions pour défaut de présentation de l'état de suivi des
plus-values en report d'imposition.
Le sujet que nous abordons ici est déjà ancien puisque, dès le mois de mai
1998, lors de l'examen d'un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier, le rapporteur général de l'époque, M. Alain Lambert,
avait présenté un amendement visant à limiter l'application de ces sanctions au
cas où l'état manquant n'aurait pas été souscrit dans les trente jours d'une
mise en demeure.
L'amendement que la commission des finances présente aujourd'hui me paraît
être le résultat d'une collaboration fructueuse entre les spécialistes de la
commission des finances du Sénat et certains des collaborateurs de Bercy.
Cet amendement aurait pu trouver sa place à l'occasion de la discussion de
l'article 14 du projet de loi de finances rectificative que nous examinerons la
semaine prochaine, lequel article réforme profondément les conditions
d'exercice des professions libérales, mais nous considérons que cette seconde
partie du projet de loi de finances peut tout aussi bien constituer un support
approprié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, votre amendement
initial rejoignait les intentions du Gouvernement, mais il avait semblé à ce
dernier que le dispositif technique proposé méritait d'être amélioré.
En revanche, dans sa nouvelle rédaction corrigée, qui assouplit les
conséquences en termes de taxation tout en maintenant le principe d'une
sanction pécuniaire, il nous paraît tout à fait équilibré.
Dans ces conditions le Gouvernement ne peut que l'accepter.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-50 rectifié, accepté par le
Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-62, Mme Bardou, MM. Jean Faure, Natali, Jarlier,
Descours, Braun, Louis Grillot, de Rocca Serra, Carle, Amoudry, Lesbros, Jean
Boyer, Besse, Vissac, Blanc, Jourdain, Althapé et Fournier proposent d'insérer,
après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1383 C ainsi
rédigé :
«
Art. 1383 C.
- Sauf délibération contraire de la collectivité
territoriale ou du groupement de collectivités territoriales, à compter du 1er
janvier 2000, les immeubles situés dans les zones de revitalisation rurale
définies au troisième alinéa de l'article 1465 A et affectés, au 1er janvier
2000, à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe
professionnelle sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties pour
une durée de cinq ans.
« Pour les immeubles affectés, après le 1er janvier 2000, à une activité
entrant dans le champ d'application de la taxe professionnelle, l'exonération
prévue à l'alinéa précédent s'applique à compter du 1er janvier de l'année qui
suit celle où est intervenue cette affectation.
« L'exonération prévue aux premier et deuxième alinéas cesse de s'appliquer à
compter du 1er janvier de l'année suivant celle où les immeubles ne sont plus
affectés à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe
professionnelle.
« En cas de changement d'exploitant, l'exonération s'applique pour une durée
de cinq ans à compter du 1er janvier de l'année suivant celle où est intervenu
le changement.
« L'exonération porte sur la totalité de la part revenant à chaque
collectivité ou groupement de collectivités territoriales et ne peut avoir pour
effet de reporter de plus de cinq ans l'application du régime d'imposition de
droit commun.
« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l'exonération prévue à
l'article 1383 A et celles prévues au présent article sont remplies, le
contribuable doit opter pour l'un ou l'autre de ces deux régimes avant le 1er
janvier de l'année au titre de laquelle l'exonération prend effet. L'option est
irrévocable.
« Les obligations déclaratives des personnes et organismes concernés par les
exonérations prévues au présent article sont fixées par décret. »
« II. - L'article 1383 A du code général des impôts est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l'exonération prévue à
l'article 1383 C et celles prévues au présent article sont remplies, le
contribuable doit opter pour l'un ou l'autre de ces deux régimes avant le 1er
janvier de l'année au titre de laquelle l'exonération prend effet. L'option est
irrévocable. »
« III. - Dans les conditions prévues par la loi de finances, l'Etat compense,
chaque année, la perte de recettes résultant pour les collectivités
territoriales ou leurs groupements dotés d'une fiscalité propre de
l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, mentionnée à
l'article 1383 C du code général des impôts.
« Le prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation
d'exonérations relatives à la fiscalité locale est majoré à due concurrence.
« IV. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une majoration
à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun.
Le présent amendement vise à apporter aux entreprises situées ou ayant des
établissements situés dans des zones de revitalisation rurales, les ZRR, un
allégement du poids de la fiscalité locale qu'elles supportent au moyen d'une
exonération temporaire de la taxe sur le foncier bâti.
Il a pour objet de remédier au caractère largement inopérant du dispositif
actuellement en vigueur, lequel est, s'agissant des mesures d'exonérations de
fiscalité locale en faveur des zones de revitalisation rurale, circonscrit à la
seule taxe professionnelle aux termes de l'article 1465 A du code général des
impôts.
Nonobstant une réécriture en faveur du secteur particulier de l'artisanat,
opérée à l'occasion de l'élaboration de la loi de finances pour 1998, cet
article 1465 A dispose que le bénéfice de l'exonération est conditionné à une
taille minimale d'établissement - dans le meilleur des cas, six emplois et 300
000 francs d'investissement - et est réservé aux activités industrielles et de
recherches scientifiques et techniques, ainsi qu'aux services de direction,
d'études, d'ingénierie et d'informatique.
Il est donc rédigé de telle façon que les mesures qu'il prévoit sont
déconnectées de la réalité de la quasi-totalité de l'activité économique à même
de se développer en milieu rural défavorisé. Au demeurant, le coût total des
compensations de taxe professionnelle dans les ZRR s'élève à 58,4 millions de
francs, soit moins du vingtième de ce qu'il représente dans les zones
urbaines.
Plutôt qu'une réécriture de l'article 1465 A, laquelle souffrirait
nécessairement d'une mauvaise lisibilité à l'égard des entreprises du fait de
la réforme de la taxe professionnelle introduite par la loi de finances pour
1999, une exonération de la taxe sur le foncier bâti, à titre temporaire,
apparaît préférable. Par ailleurs, elle présente l'avantage de la modération du
coût pour le budget de l'Etat.
En acceptant cet amendement, le Gouvernement montrera tout l'intérêt qu'il
porte à ces zones particulièrement défavorisées car, si les zones urbaines
connaissent des difficultés, il ne faut pas oublier, monsieur le secrétaire
d'Etat, les zones rurales et les zones de montagne, qui ont elles aussi besoin
d'aides.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission, après s'être livrée à quelques
recherches du côté de l'Assemblée nationale, a constaté qu'un amendement de
même nature avait été présenté en commission des finances par M. Bonrepaux,
président de ladite commission, et par son collègue M. Idiart.
Adopté par la commission des finances de l'Assemblée nationale, cet amendement
n'a pas été, pour des raisons mystérieuses - en tout cas, nous ne les avons pas
élucidées - présenté en séance publique.
Nous estimons, monsieur le secrétaire d'Etat, que, dans un souci de bonne
camaraderie envers nos collègues de l'Assemblée nationale, il vous faut
accepter cette excellente initiative, qui a été défendue avec talent et
conviction par M. Braun.
Il s'agit d'exonérer pendant cinq ans de taxe foncière sur les propriétés
bâties les entreprises situées en zone de revitalisation rurale et qui sont
assujetties à la taxe professionnelle.
Quant aux entreprises nouvelles ou à celles qui reprennent une entreprise en
difficulté, elles devront opter entre ce dispositif et l'exonération de deux
ans accordée aux entreprises nouvelles par l'article 1383 A du code général des
impôts, l'exonération étant accordée de plein droit, sauf délibération
contraire de la collectivité concernée.
Les députés sont partis du constat tout à fait justifié que l'exonération de
taxe professionnelle accordée dans ces zones est insuffisante : le dispositif
actuel paraît inadapté aux activités installées en milieu rural défavorisé.
La disposition proposée ne coûterait pas très cher à l'Etat, puisqu'elle
représenterait une dépense fiscale de l'ordre de 55 millions de francs.
Le Sénat ne pourra donc, je l'espère, qu'adopter cette disposition, sur
laquelle la commission des finances a émis un avis favorable.
M. Paul Loridant.
Marini, Bonrepaux, même combat !
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je veux tout d'abord assurer M. Braun et M. Marini de
l'esprit de constante et de bonne camaraderie - doublé de surcroît de bonne
convivialité - qui anime le Gouvernement.
Je veux toutefois aussi leur dire que je ne peux être favorable à cet
amendement, dont le coût serait proche de 6 milliards de francs, ce qui est
considérable.
(M. le rapporteur général s'exclame.)
M. Gérard Braun.
Nous n'avons pas les mêmes chiffres !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteurgénéral.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je ne saurais mettre en doute les estimations des
services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, mais 6
milliards de francs supposent un beau dynamisme dans ces zones défavorisées
!
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Et le gage est le tabac !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faut savoir de quelles zones on parle. Les ZZR
sont strictement définies dans la loi sur l'aménagement du territoire. Si le
plateau de Millevaches - n'est-ce pas, M. Moreigne ? - et un certain nombre
d'autres zones dans d'autres départements généraient autant de bases fiscales,
je crois qu'elles en seraient particulièrement ravies !
Monsieur le secrétaire d'Etat, vos estimations, nous y croirons vraiment le
jour où vous nous donnerez votre méthode de travail et de calcul, car il est
vraiment trop facile d'asséner de tels chiffres. Disant cela, je ne mets
nullement en cause votre probité intellectuelle.
Certes, la Constitution de 1958 laisse déjà relativement peu de marge de
manoeuvre au législatif par rapport à l'exécutif.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
C'est vous qui le dites !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous vivons cette réalité au quotidien - et elle ne
peut être contestée. Mais au moins faudrait-il qu'il y ait un partage du savoir
afin que le législateur puisse faire et soutenir des propositions en toute
connaissance de leurs coûts.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette remarque de méthode que je me suis permis
de faire valoir, sur cet amendement, se veut de portée générale.
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, il n'est pas dans mes
intentions de martyriser les consciences collectives.
(Sourires.)
Nous vous fournirons les éléments et la méthode qui ont
permis d'aboutir à ce chiffrage.
M. Gérard Braun.
Parfait !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-62.
M. Michel Moreigne.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne.
M. le rapporteur général m'a fait un grand honneur tout à l'heure en citant le
plateau de Millevaches. Je tiens tout de même à lui préciser que ce plateau ne
m'appartient pas tout entier
(Sourires)
, la Corrèze en possède la plus
grande partie.
Cela étant, je voudrais dire à M. le secrétaire d'Etat que la préoccupation
qu'exprime l'amendement n° II-62 n'est pas illégitime. Je souhaiterais donc que
le Gouvernement étudie cette proposition avec la plus grande attention, bien
que je comprenne, vu son coût, qu'il ne puisse lui donner aujourd'hui une suite
favorable.
Néanmoins, il s'agit là d'une grande préoccupation qui a été exprimée par les
zones de revitalisation rurale. Et même si la Creuse ne compte sur son
territoire qu'une petite fraction du plateau de Millevaches - qui vit
d'ailleurs très bien - monsieur le secrétaire d'Etat, je vous prie d'étudier ce
dossier, avec le Gouvernement, en y portant l'intérêt qu'il mérite.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je serais tenté de demander le retrait de cet
amendement, monsieur le secrétaire d'Etat, sous réserve que vos services
acceptent de nous transmettre, comme vous avez bien voulu l'accepter tout à
l'heure, tous les éléments de méthodologie permettant de calculer la
moins-value fiscale de 6 milliards de francs. A partir de ces éléments de
calcul, nous pourrions naturellement, pour d'autres textes, retailler une
mesure qui, si nous validons l'estimation considérable que vous avez donnée,
pourrait devenir une mesure plus acceptable budgétairement, ou susceptible
d'être absorbée par fraction sur une certaine période.
Si nous sommes d'accord sur l'objectif, nous devons pouvoir trouver un chemin
pour l'atteindre. Cette disposition est susceptible de s'appliquer, notamment
aux zones défavorisées du Massif central, mais également à celles de l'Ariège
ou d'autres beaux départements ruraux de notre beau pays.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ou de la Lozère !
M. Gérard Braun.
Ou des Vosges !
M. le président.
Monsieur Braun, l'amendement n° II-62 est-il maintenu ?
M. Gérard Braun.
Je maintiens cet amendement, mais cela n'empêche absolument pas le
Gouvernement - et je rejoins là tout à fait M. le rapporteur général - de nous
fournir tous les éléments et d'établir cette méthodologie de travail tout à
fait intéressante entre le Gouvernement et le Parlement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-62, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 58.
Article 59
M. le président.
« Art. 59. _ L'avant-dernier alinéa de l'article 199
quater
F du code
général des impôts est ainsi rédigé :
« Le bénéfice de la réduction d'impôt est subordonné à la condition que soient
mentionnés sur la déclaration des revenus, pour chaque enfant concerné, ses nom
et prénom, le nom de l'établissement scolaire et la classe qu'il fréquente ou
le nom de l'établissement supérieur dans lequel il est inscrit. »
- (Adopté.)
Article 60
M. le président.
« Art. 60. _ I. _ Avant l'article 150 A du code général des impôts, il est
inséré les articles 150-0 A, 150-0 B, 150-0 D et 150-0 E ainsi rédigés :
«
Art. 150-0A
. _ I. _ 1. Sous réserve des dispositions propres aux
bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux
bénéfices agricoles ainsi que de l'article 150 A
bis,
les gains nets
retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne
interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au
1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces
valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits
ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces
cessions excède, par foyer fiscal, 50 000 francs par an.
« Toutefois, en cas d'intervention d'un événement exceptionnel dans la
situation personnelle, familiale ou professionnelle des contribuables, le
franchissement de la limite précitée de 50 000 francs est apprécié par
référence à la moyenne des cessions de l'année considérée et des deux années
précédentes. Les événements exceptionnels doivent notamment s'entendre de la
mise à la retraite, du chômage, du redressement ou de la liquidation
judiciaires ainsi que de l'invalidité ou du décès du contribuable ou de l'un ou
l'autre des époux soumis à une imposition commune.
« 2. Le complément de prix reçu par le cédant en exécution de la clause du
contrat de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux par laquelle le
cessionnaire s'engage à verser au cédant un complément de prix exclusivement
déterminé en fonction d'une indexation en relation directe avec l'activité de
la société dont les titres sont l'objet du contrat, est imposable au titre de
l'année au cours de laquelle il est reçu, quel que soit le montant des cessions
au cours de cette année.
« 3. Lorsque les droits détenus directement ou indirectement par le cédant
avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants dans les bénéfices
sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés et ayant son siège en
France ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au
cours des cinq dernières années, la plus-value réalisée lors de la cession de
ces droits, pendant la durée de la société, à l'une des personnes mentionnées
au présent alinéa, est exonérée si tout ou partie de ces droits sociaux n'est
pas revendu à un tiers dans un délai de cinq ans. A défaut, la plus-value est
imposée au nom du premier cédant au titre de l'année de la revente des droits
au tiers.
« II. _ Les dispositions du I sont applicables :
« 1. Au gain net retiré des cessions d'actions acquises par le bénéficiaire
d'une option accordée dans les conditions prévues aux articles 208-1 à 208-8-2
de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;
« 2. Au gain net réalisé depuis l'ouverture du plan d'épargne en actions
défini à l'article 163
quinquies
D en cas de retrait de titres ou de
liquidités ou de rachat avant l'expiration de la cinquième année dans les mêmes
conditions. Pour l'appréciation de la limite de 50 000 francs mentionnée au 1
du I, la valeur liquidative du plan ou la valeur de rachat pour un contrat de
capitalisation à la date de sa clôture est ajoutée au montant des cessions
réalisées en dehors du plan au cours de la même année ;
« 3. Au gain net retiré des cessions de titres de sociétés immobilières pour
le commerce et l'industrie non cotées ;
« 4. Au gain net retiré des rachats d'actions de sociétés d'investissement à
capital variable et au gain net résultant des rachats de parts de fonds communs
de placement définis au 2 du III ou de la dissolution de tels fonds ;
« 5. Au gain net retiré des cessions de parts des fonds communs de créances
dont la durée à l'émission est supérieure à cinq ans.
« III. _ Les dispositions du I ne s'appliquent pas :
« 1. Aux cessions et aux rachats de parts de fonds communs de placement à
risques mentionnées à l'article 163
quinquies
B, réalisés par les
porteurs de parts, remplissant les conditions fixées aux I et II de l'article
précité, après l'expiration de la période mentionnée au I du même article.
Cette disposition n'est pas applicable si, à la date de la cession ou du
rachat, le fonds a cessé de remplir les conditions énumérées au 1° et au 1° bis
du II de l'article 163
quinquies
B ;
« 2. Aux titres cédés dans le cadre de leur gestion par les autres fonds
communs de placement sous réserve qu'aucune personne physique agissant
directement ou par personne interposée ne possède plus de 10 % des parts du
fonds ;
« 3. Aux titres cédés dans le cadre de leur gestion par les fonds communs de
placement, constitués en application des législations sur la participation des
salariés aux résultats des entreprises et les plans d'épargne d'entreprise
ainsi qu'aux rachats de parts de tels fonds ;
« 4. A la cession des titres acquis dans le cadre de la législation sur la
participation des salariés aux résultats de l'entreprise et sur l'actionnariat
des salariés, à la condition que ces titres revêtent la forme nominative et
comportent la mention d'origine ;
« 5. A la cession de titres effectuée dans le cadre d'un engagement d'épargne
à long terme lorsque les conditions fixées par l'article 163
bis
A sont
respectées ;
« 6. Aux profits réalisés dans le cadre des placements en report par les
contribuables qui effectuent de tels placements.
«
Art. 150-0B
. _ Les dispositions de l'article 150-0A ne sont pas
applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values
réalisées dans le cadre d'une opération d'offre publique, de fusion, de
scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société
d'investissement à capital variable, de conversion, de division, ou de
regroupement, réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un
apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés.
« Les échanges avec soulte demeurent soumis aux dispositions de l'article
150-0 A lorsque le montant de la soulte reçue par le contribuable excède 10 %
de la valeur nominale des titres reçus. »
«
Art. 150-0D
. _ 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A
sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres
ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix
effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit,
leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation.
« 2. Le prix d'acquisition des titres ou droits à retenir par le cessionnaire
pour la détermination du gain net de cession des titres ou droits concernés
est, le cas échéant, augmenté du complément de prix mentionné au 2 du I de
l'article 150-0A.
« 3. En cas de cession d'un ou plusieurs titres appartenant à une série de
titres de même nature acquis pour des prix différents, le prix d'acquisition à
retenir est la valeur moyenne pondérée d'acquisition de ces titres.
« Le détachement de droits de souscription ou d'attribution emporte les
conséquences suivantes :
«
a)
Le prix d'acquisition des actions ou parts antérieurement détenues
et permettant de participer à l'opération ne fait l'objet d'aucune modification
;
«
b)
Le prix d'acquisition des droits détachés est, s'ils font l'objet
d'une cession, réputé nul ;
«
c)
Le prix d'acquisition des actions ou parts reçues à l'occasion de
l'opération est réputé égal au prix des droits acquis dans ce but à titre
onéreux, augmenté, s'il y a lieu, de la somme versée par le souscripteur.
« 4. Pour l'ensemble des titres admis aux négociations sur un marché
réglementé acquis avant le 1er janvier 1979, le contribuable peut retenir,
comme prix d'acquisition, le cours au comptant le plus élevé de l'année
1978.
« Pour l'ensemble des valeurs françaises à revenu variable, il peut également
retenir le cours moyen de cotation au comptant de ces titres pendant l'année
1972.
« Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la cession porte sur des
droits sociaux qui, détenus directement ou indirectement dans les bénéfices
sociaux par le cédant ou son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants,
ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des
cinq dernières années. Pour ces droits, le contribuable peut substituer au prix
d'acquisition la valeur de ces droits au 1er janvier 1949 si elle est
supérieure.
« 5. En cas de cession de titres après la clôture d'un plan d'épargne en
actions défini à l'article 163
quinquies
D ou leur retrait au-delà de la
huitième année, le prix d'acquisition est réputé égal à leur valeur à la date
où le cédant a cessé de bénéficier, pour ces titres, des avantages prévus aux
5° bis et 5° ter de l'article 157 et au IV de l'article 163
quinquies
D.
« 6. Le gain net réalisé depuis l'ouverture du plan d'épargne en actions
défini à l'article 163
quinquies
D s'entend de la différence entre la
valeur liquidative du plan ou la valeur de rachat pour les contrats de
capitalisation à la date du retrait et le montant des versements effectués sur
le plan depuis la date de son ouverture.
« 7. Le prix d'acquisition des titres acquis en vertu d'un engagement
d'épargne à long terme est réputé égal au dernier cours coté au comptant de ces
titres précédant l'expiration de cet engagement.
« 8. Le gain net mentionné au 1 du II de l'article 150-0A est constitué par la
différence entre le prix effectif de cession des actions, net des frais et
taxes acquittés par le cédant, et le prix de souscription ou d'achat.
« Le prix d'acquisition est, le cas échéant, augmenté du montant mentionné à
l'article 80
bis
imposé selon les règles prévues pour les traitements et
salaires.
« Pour les actions acquises avant le 1er janvier 1990, le prix d'acquisition
est réputé égal à la valeur de l'action à la date de la levée de l'option.
« 9. En cas de vente ultérieure de titres reçus à l'occasion d'une opération
mentionnée à l'article 150-0B, le gain net est calculé à partir du prix ou de
la valeur d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou
majoré de la soulte versée lors de l'échange.
« 10. En cas d'absorption d'une société d'investissement à capital variable
par un fonds commun de placement réalisée conformément à la réglementation en
vigueur, les gains nets résultant de la cession ou du rachat des parts reçues
en échange ou de la dissolution du fonds absorbant sont réputés être constitués
par la différence entre le prix effectif de cession ou de rachat des parts
reçues en échange, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et le prix
de souscription ou d'achat des actions de la société d'investissement à capital
variable absorbée remises à l'échange.
« 11. Les moins-values subies au cours d'une année sont imputables
exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même
année ou des cinq années suivantes.
« 12. Les pertes constatées en cas d'annulation de valeurs mobilières, de
droits sociaux, ou de titres assimilés sont imputables, dans les conditions
mentionnées au 11, à compter de l'année au cours de laquelle intervient soit la
réduction du capital de la société, en exécution d'un plan de redressement
mentionné aux articles 69 et suivants de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985
relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, soit
la cession de l'entreprise ordonnée par le tribunal en application des articles
81 et suivants de la même loi, soit le jugement de clôture de la liquidation
judiciaire.
« Ces dispositions ne s'appliquent pas :
«
a)
Aux pertes constatées afférentes à des valeurs mobilières ou des
droits sociaux annulés détenus, dans le cadre d'engagements d'épargne à long
terme définis à l'article 163
bis
A, dans un plan d'épargne d'entreprise
mentionné à l'article 163
bis
B ou dans un plan d'épargne en actions
défini à l'article 163
quinquies
D ;
«
b)
Aux pertes constatées par les personnes à l'encontre desquelles le
tribunal a prononcé au titre des sociétés en cause l'une des condamnations
mentionnées aux articles 180, 181, 182, 188, 189, 190, 192, 197 ou 201 de la
loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 précitée.
« 13. L'imputation des pertes mentionnées au 12 est opérée dans la limite du
prix effectif d'acquisition des titres par le cédant ou, en cas d'acquisition à
titre gratuit, de la valeur retenue pour l'assiette des droits de mutation.
Lorsque les titres annulés ont été reçus, à compter du 1er janvier 2000, dans
le cadre d'une opération d'échange dans les conditions prévues à l'article
150-0B, le prix d'acquisition à retenir est celui des titres remis à l'échange,
diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange.
« La perte nette constatée est minorée, en tant qu'elle se rapporte aux titres
annulés, du montant :
«
a)
Des apports remboursés ;
«
b)
De la déduction prévue à l'article 163
septdecies ;
«
c)
De la déduction opérée en application de l'article 163
octodecies
A.
« 14. Par voie de réclamation présentée dans le délai prévu au livre des
procédures fiscales en matière d'impôt sur le revenu, le prix de cession des
titres ou des droits retenu pour la détermination des gains nets mentionnés au
1 du I de l'article 150-0A est diminué du montant du versement effectué par le
cédant en exécution de la clause du contrat de cession par laquelle le cédant
s'engage à reverser au cessionnaire tout ou partie du prix de cession en cas de
révélation, dans les comptes de la société dont les titres sont l'objet du
contrat, d'une dette ayant son origine antérieurement à la cession ou d'une
surestimation de valeurs d'actif figurant au bilan de cette même société à la
date de la cession.
« Le montant des sommes reçues en exécution d'une telle clause de garantie de
passif ou d'actif net diminue le prix d'acquisition des valeurs mobilières ou
des droits sociaux à retenir par le cessionnaire pour la détermination du gain
net de cession des titres concernés.
«
Art. 150-0E
. _ Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0A
doivent être déclarés dans les conditions prévues au 1 de l'article 170. »
« II. _ Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. L'article 92 B
decies
devient l'article 150-0 C et est ainsi
modifié :
«
a)
Au premier alinéa du 1, la référence : "92 B" est remplacée par la
référence : "150-0A" ;
«
b)
Le 6 est ainsi rédigé :
« 6. A compter du 1er janvier 2000, lorsque les titres reçus en contrepartie
de l'apport font l'objet d'une opération d'échange dans les conditions du
quatrième alinéa de l'article 150 A
bis
ou dans les conditions prévues à
l'article 150-0B, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée en
application du 1 est reportée de plein droit au moment où s'opérera la
transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres
reçus. ;
«
c)
Le 7 est abrogé.
« 2. Au premier alinéa de l'article 96 A, les mots : "et aux articles 92 B et
92 F" sont supprimés.
« 3. Au 6° de l'article 112, les mots : "92 B ou 160" sont remplacés par les
mots : "150-0 A ou 150 A
bis
".
« 4. Au premier alinéa de l'article 124 C, les mots : "aux 1 et 2 de l'article
94 A" sont remplacés par les mots : "aux 1 et 2 de l'article 150-0D".
« 5. Au deuxième alinéa de l'article 150
quinquies,
au 3 de l'article
150
nonies
et au 3 de l'article 150
decies
, les mots : "6 de
l'article 94 A" sont remplacés par les mots : "11 de l'article 150-0 D".
« 6. Au 2 de l'article 150
undecies,
les mots : "aux 1 et 2 de
l'article 94 A" sont remplacés par les mots : "aux 1 et 2 de l'article
150-0D".
« 7. L'article 150 A
bis
est ainsi modifié :
«
a)
Au deuxième alinéa, les mots : "de l'article 92 C" sont remplacés
par les mots : "du 3 du II de l'article 150-0A" ;
«
b)
Au troisième alinéa, après les mots : "En cas d'échange de titres
résultant d'une fusion, d'une scission ou d'un apport", sont insérés les mots :
"réalisé antérieurement au 1er janvier 2000" ;
«
c)
Après le troisième alinéa, il est inséré deux alinéas ainsi
rédigés ;
« A compter du 1er janvier 2000, les dispositions du premier alinéa ne sont
pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values
réalisées dans le cadre d'une opération de fusion, de scission ou d'un apport
de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés. Cette exception
n'est pas applicable aux échanges avec soulte lorsque le montant de la soulte
reçue par le contribuable excède 10 % de la valeur nominale des titres
reçus.
« A compter du 1er janvier 2000, lorsque les titres reçus dans les cas prévus
au troisième alinéa font l'objet d'une nouvelle opération d'échange dans les
conditions du quatrième alinéa ou dans les conditions prévues à l'article
150-0B, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée est reportée de
plein droit au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou
l'annulation des nouveaux titres reçus. »
« 8. Il est créé un article 150 H
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 150 H
bis
. _ En cas de vente ultérieure de titres reçus à
l'occasion d'une opération mentionnée au quatrième alinéa de l'article 150 A
bis,
la plus-value imposable en application du premier alinéa du même
article est calculée à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres
échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de
l'échange. »
« 9. A l'article 160
quater
, les mots : "article 160" sont remplacés
par les mots : "article 150-0A lorsque ces actions ou parts sont détenues dans
les conditions du
f
de l'article 164 B".
« 10. Le premier alinéa de l'article 161 est complété par une phrase ainsi
rédigée :
« Lorsque les droits ont été reçus, à compter du 1er janvier 2000, dans le
cadre d'une opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0
B, le boni est calculé à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des
titres ou droits remis à l'échange, diminué de la soulte reçue ou majoré de la
soulte versée lors de l'échange. »
« 11. Au premier alinéa de l'article 163
bis
C, les mots : "92 B, 150 A
bis
ou 160" sont remplacés par les mots : "150-0A ou 150 A
bis
".
« 12. Au deuxième alinéa de l'article 163
bis
D, à l'article 163
bis
E et à l'article 163
bis
F, les mots : "94 A" sont remplacés par les
mots : "150-0D".
« 13. Au premier alinéa du I de l'article 163
bis
G, les mots : "aux
articles 92 B, 92 J ou 160," sont remplacés par les mots : "à l'article
150-0A".
« 14. Au premier alinéa du 1 du II de l'article 163
quinquies
D, les
mots : "au 2° de l'article 92 D" sont remplacés par les mots : "au 3 du III de
l'article 150-0A".
« 15. Le
f
de l'article 164 B est ainsi rédigé :
«
f)
Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0A et résultant de
la cession de droits sociaux, lorsque les droits détenus directement ou
indirectement par le cédant avec son conjoint, leurs ascendants et leurs
descendants dans les bénéfices sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les
sociétés et ayant son siège en France ont dépassé ensemble 25 % de ces
bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années.
« 16. Au 1 du I de l'article 167
bis,
les mots : "l'article 160" sont
remplacés par les mots : "l'article 150-0A et détenus dans les conditions du f
de l'article 164 B".
« 17. L'article 200 A est ainsi modifié :
«
a)
Au 2, les mots : "aux articles 92 B et 92 F" sont remplacés par
les mots : "à l'article 150-0A" ;
«
b)
Au 5, les mots : "à l'article 92 B
ter
" sont remplacés par
les mots : "au 2 du II de l'article 150-0A" ;
«
c)
L'article est complété par un 7 ainsi rédigé ;
« 7. Le taux prévu au 2 est réduit de 30 % dans les départements de la
Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion et de 40 % dans le département de
la Guyane pour les gains mentionnés à l'article 150-0A résultant de la cession
de droits sociaux détenus dans les conditions du f de l'article 164 B. Les taux
résultant de ces dispositions sont arrondis, s'il y a lieu, à l'unité
inférieure. »
« 18. A l'article 238
bis
HK et à l'article 238
bis
HS, les mots
: "aux articles 92 B et 160" sont remplacés par les mots : "à l'article 150-0
A".
« 19. L'article 238
septies
A est complété par un V ainsi rédigé :
« V. _ Lorsque les titres ou droits mentionnés au II et au III ont été reçus,
à compter du 1er janvier 2000, dans le cadre d'une opération d'échange dans les
conditions prévues à l'article 150-0B, la prime de remboursement mentionnée au
II est calculée à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres ou
droits remis à l'échange, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte
versée. »
« 20. Le premier alinéa de l'article 244
bis
B est ainsi rédigé :
« Les gains mentionnés à l'article 150-0A résultant de la cession de droits
sociaux détenus dans les conditions du f de l'article 164 B réalisés par des
personnes physiques qui ne sont pas domiciliées en France au sens de l'article
4 B ou par des personnes morales ou organismes quelle qu'en soit la forme,
ayant leur siège social hors de France, sont déterminés et imposés selon les
modalités prévues aux articles 150-0 A à 150-0 E. »
« 21. Le premier alinéa de l'article 244
bis
C est ainsi rédigé :
« Sous réserve des dispositions de l'article 244
bis
B, les
dispositions de l'article 150-0A ne s'appliquent pas aux plus-values réalisées
à l'occasion de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières ou de droits
sociaux effectuées par les personnes qui ne sont pas fiscalement domiciliées en
France au sens de l'article 4 B, ou dont le siège social est situé hors de
France. »
« 22. L'article 248 B est ainsi modifié :
«
a)
Au premier alinéa, les mots : ", 92 B et 160" sont remplacés par
les mots : "et 150-0A" ;
«
b)
Les deuxième, troisième et quatrième alinéas sont remplacés par un
alinéa ainsi rédigé. »
« En cas de vente des titres reçus en échange, la plus ou moins-value est
calculée à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres ayant ouvert
droit à l'indemnisation. »
« 23. L'article 248 F est ainsi modifié :
«
a)
Au premier alinéa, les mots : "des articles 92 B et 160" sont
remplacés par les mots : "de l'article 150-0A" ;
«
b)
Au deuxième alinéa, l'avant-dernière phrase est supprimée.
« 24. A l'article 248 G, les mots : "Les dispositions du II de l'article 92 B"
sont remplacés par les mots : "Les dispositions de l'article 150-0B".
« 25. Au premier alinéa de l'article 1740
septies
, les mots : "à
l'article 92 B
ter
" sont remplacés par les mots : "au 2 du II de
l'article 150-0A".
« III. _ Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
« 1. Au deuxième alinéa de l'article L. 16, après le mot : "impôts", sont
insérés les mots : "ainsi que des gains de cession de valeurs mobilières ou de
droits sociaux tels qu'ils sont définis aux articles 150-0A à 150-0E du même
code".
« 2. Au 1° de l'article L. 66, les mots : "de l'article 150 S du code général
des impôts, les plus-values imposables qu'ils ont réalisées" sont remplacés par
les mots : "des articles 150-0E et 150 S du code général des impôts, les gains
nets et les plus-values imposables qu'ils ont réalisés".
« 3. Avant le dernier alinéa de l'article L. 73, il est inséré un 4° ainsi
rédigé :
« 4. Les gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux des
contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justifications
mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 16. »
« IV. _ Le II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et le II de
l'article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au
remboursement de la dette sociale sont ainsi modifiés :
«
a)
Au 8° , les mots : "à l'article 92 G" sont remplacés par les mots
: "au 1 du III de l'article 150-0A" ;
«
b)
Au 9° , les mots : "5° de l'article 92 D" sont remplacés par les
mots : " 5 du III de l'article 150-0A".
« V. _ Les articles 92 B, 92 B
bis,
92 B
ter,
92 C, 92 D, 92 E,
92 F, 92 G, 92 H, 92 J, 92 K, 94 A et 160 du code général des impôts sont
abrogés. Ces articles, ainsi que l'article 96 A du même code dans sa rédaction
antérieure à la présente loi, demeurent applicables aux plus-values en report
d'imposition à la date du 1er janvier 2000. L'imposition de ces plus-values est
reportée de plein droit lorsque les titres reçus en échange font l'objet d'une
nouvelle opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0B du
code général des impôts.
« En cas de vente ultérieure de titres reçus avant le 1er janvier 2000 à
l'occasion d'une opération de conversion, de division, ou de regroupement ainsi
qu'en cas de vente ultérieure de titres reçus, avant le 1er janvier 1992, à
l'occasion d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission,
d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à
capital variable, le gain net est calculé à partir du prix ou de la valeur
d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la
soulte versée lors de l'échange.
« VI. _ Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du
présent article et notamment les obligations déclaratives incombant aux
contribuables, aux intermédiaires ainsi qu'aux personnes interposées.
« VII. _ Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er
janvier 2000. »
Par amendement n° II-51, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
A. - I. - Après les mots : « sont soumis à l'impôt sur le revenu », de rédiger
comme suit la fin du premier alinéa du texte présenté par le paragraphe I de
l'article 60 pour l'article 150-OA du code général des impôts : « après un
abattement de 50 000 francs sur le total imposable des plus-values réalisées au
cours d'une même année, après application éventuelle des moins-values prévues
au 11 de l'article 150-OD ».
II. - Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le
paragraphe I de cet article pour l'article 150-OA du code général des impôts,
après les mots : « par référence à la moyenne des », d'insérer les mots : «
plus-values de ».
B. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'Etat des
dispositions du A ci-dessus, de compléter
in fine
cet article par un
paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« VIII. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'introduction d'un
abattement de 50 000 francs sur les plus-values de cession à titre onéreux de
valeurs mobilières et de droits sociaux est compensée par le relèvement à due
concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur spécial.
L'article 60 est relativement long et complexe
puisqu'il comporte 113 alinéas.
M. Paul Loridant.
Il y a plus long !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est vrai, nous verrons cela tout à l'heure.
Les 113 alinéas ont quatre objectifs : premièrement, l'harmonisation des
conditions d'imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières et de
droits sociaux ; deuxièmement, le remplacement du mécanisme du report
d'imposition par celui du sursis d'imposition ; troisièmement, la prise en
compte fiscale des clauses d'intéressement et de garanties de passif ainsi que
l'annulation de titres ; quatrièmement, la modification des modalités de
contrôle par l'administration des plus-values de cession.
Dans le rapport écrit, nous nous sommes livrés à de nombreux commentaires sur
ce dispositif, et je m'empresse de dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que,
dans l'ensemble, nous approuvons ses objectifs. Cet article traite de problèmes
bien réels, notamment la prise en compte fiscale des clauses d'intéressement et
de garantie de passif lorsqu'une entreprise est vendue à un prix susceptible
d'évoluer en fonction de ses résultats futurs. Lorsqu'une entreprise est vendue
et que le vendeur donne une garantie de passif, il faut en tenir compte.
Jusqu'à présent il y avait, sur le plan fiscal, quelques incertitudes ; ce
texte les lèvent. C'est une excellente chose.
Je reviens sur le régime du sursis d'imposition dont le champ d'application
est très large. Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous
confirmiez que le présent article ne crée aucune distorsion en fonction de la
nationalité de la société et que la doctrine administrative ne pourra donc pas
exclure du bénéfice du sursis d'imposition les plus-values résultant
d'opérations d'échange de titres de sociétés ayant leur siège hors de l'Union
européenne.
Cette précision est nécessaire dans la mesure où l'administration fiscale
avait estimé, en l'absence même de dispositions expresses, que les fusions
portant sur des titres dont la société émettrice est hors de l'Union européenne
n'ouvraient pas droit au report d'imposition.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, je regrette que la réforme ait
été introduite à droit constant, sans tenir compte des remarques que le conseil
des impôts a formulées dans son dernier rapport en ce qui concerne
l'inadaptation du seuil d'imposition.
C'est pourquoi je propose, par cet amendement, de remplacer le seuil
d'imposition actuel par « un abattement de 50 000 francs sur le total imposable
des plus-values réalisées au cours d'une même année ».
C'est un point sur lequel nous devons nous arrêter quelques instants, mes
chers collègues. La règle selon laquelle l'impôt est dû au-delà d'un volume de
cession de 50 000 francs, outre le chiffre très faible dont il s'agit pour les
détenteurs de valeurs mobilières, ne semble pas très défendable d'un point de
vue économique car elle s'oppose à la rotation des portefeuilles. Il serait
manifestement plus clair de taxer les plus-values réalisées au-delà d'un
certain seuil et non pas, comme le prévoit le système actuel, en fonction du
volume des cessions réalisées.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je ne suis pas favorable à cet amendement. La réforme
opérée par l'article 60 du projet de loi de finances est au premier chef une
réforme de simplification qui est réalisée à droit constant, vous l'avez
d'ailleurs souligné en manifestant votre désaccord, monsieur le rapporteur
général.
Ce n'est pas le sens de votre proposition qui, loin de simplifier les
obligations déclaratives des contribuables, rend nécessaire la déclaration de
toutes les cessions de valeurs immobilières quel qu'en soient leur montant et
le montant des plus-values réalisées.
L'avantage fondamental du mécanisme du seuil de cession par rapport à celui de
l'abattement est de dispenser de toutes formalités fiscales les titulaires de
petits portefeuilles qui ne pratiquent pas une gestion active de leurs titres
et ne retirent pas un revenu substantiel des opérations qu'ils réalisent. Nous
sommes loin de la simplification voulue par le Gouvernement.
En d'autres termes, votre proposition induit plus de déclarants, plus de
formalités pour les contribuables, des opérations plus complexes pour les
établissements bancaires qui offrent à leurs clients un service de calcul des
plus-values, enfin un alourdissement des charges de gestion des déclarations
par l'administration.
Je persiste à penser que le texte proposé par le Gouvernement, et qui a été
adopté par l'Assemblée nationale, est meilleur.
Il me semble que l'on pourrait se poser des questions sur l'applicabilité de
votre proposition. Comment peut-on, en effet, par le premier alinéa de votre
amendement supprimer le seuil de cession puis prévoir dans le second alinéa que
le franchissement de cette limite que vous venez de supprimer est apprécié par
rapport à la moyenne des plus-values de cession sur les trois années ?
Monsieur le rapporteur général, vous m'avez demandé, par ailleurs, de préciser
les conditions d'application du nouveau régime de report au regard des
plus-values réalisées sur des titres étrangers. Je ne suis pas maintenant en
mesure de vous apporter une réponse, mais je m'engage à vous la transmettre
très rapidement.
Vous aurez compris que, pour les raisons que je viens d'évoquer, je souhaite
que cet amendement soit retiré. Si tel n'était pas le cas, l'avis du
Gouvernement serait défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-51, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 60, ainsi modifié.
(L'article 60 est adopté.)
Article additionnel après l'article 60
M. le président.
Par amendement n° II-76, M. Loridant propose d'insérer, après l'article 60, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions
d'ordre économique et financier est inséré un article 1er
bis
ainsi
rédigé :
«
Art. 1er
bis. - I. - Peuvent être autorisées à prendre et à conserver
la dénomination de "sociétés de capital-risque" les sociétés françaises par
actions qui satisfont aux conditions suivantes :
« 1° Avoir pour objet social la gestion d'un portefeuille de valeurs
mobilières. Une société de capital-risque dont le total de bilan n'a pas excédé
10 millions d'euros au cours de l'exercice précédent peut également effectuer à
titre accessoire des prestations de services dans le prolongement de son objet
social, sous réserve que le montant du chiffre d'affaires hors taxes de ces
prestations n'excède pas au cours de l'exercice 50 % des charges, autres que
les dotations aux provisions et les charges exceptionnelles, admises en
déduction sur le plan fiscal au cours du même exercice.
« L'actif d'une société de capital-risque comprend exclusivement des valeurs
mobilières françaises ou étrangères, négociées ou non sur un marché réglementé,
des droits sociaux, des avances en compte courant, d'autres droits financiers
et des liquidités. L'actif peut également comprendre les biens meubles et
immeubles nécessaires à son fonctionnement.
« La situation nette comptable d'une société de capital-risque doit en outre
être représentée de façon constante à concurrence de 50 % au moins de parts,
actions, obligations convertibles ou titres participatifs de sociétés ayant
leur siège dans un Etat de la Communauté européenne, dont les titres ne sont
pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger, qui
exercent une activité mentionnée à l'article 34 du code général des impôts et
qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit
commun au taux normal ou qui y seraient soumises dans les mêmes conditions si
l'activité était exercée en France.
« Sont également pris en compte pour le calcul de la proportion de 50 % :
«
a)
Les parts, actions, obligations convertibles ou titres
participatifs des sociétés ayant leur siège dans un Etat de la Communauté
européenne, dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché
réglementé français ou étranger, qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés
dans les conditions de droit commun au taux normal ou qui y seraient soumises
dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France, et qui ont
pour activité exclusive de gérer des participations :
« - dans des sociétés qui répondent aux conditions prévues pour que leurs
titres soient inclus dans le quota de 50 % en cas de participation directe de
la société de capital-risque ;
« - ou dans des sociétés ayant leur siège dans un Etat de la Communauté
européenne, dont les titres ne sont pas admis à la négociation sur un marché
réglementé français ou étranger, qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés
dans les conditions de droit commun au taux normal ou qui y seraient soumises
dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France, et qui ont
pour activité exclusive de gérer des participations qui répondent aux
conditions prévues pour que leurs titres soient inclus dans le quota de 50 % en
cas de participation directe de la société de capital-risque ;
«
b)
Les titres, détenus depuis cinq ans au plus, des sociétés qui,
admises aux négociations sur l'un des marchés réglementés de valeurs de
croissance de l'Espace économique européen ou un compartiment de valeurs de
croissance de ces marchés dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé
de l'économie, et remplissant les conditions mentionnées au 3e alinéa du 1°
ci-dessus autres que celle tenant à la non-cotation, ont procédé à une
augmentation en numéraire de leur capital d'un montant au moins égal à 50 % du
montant global de l'opération d'introduction de leurs titres, ont obtenu leur
première cotation moins de cinq ans avant l'acquisition des actions par la
société de capital-risque et ont réalisé un chiffre d'affaires hors taxes
inférieur ou égal à soixante-seize millions d'euros au cours du dernier
exercice clos avant leur première cotation ;
«
c)
Dans la limite de 15 % de la situation nette comptable, les
avances en compte courant consenties, pour une durée de trois ans au plus, à
des sociétés remplissant les conditions pour être retenues dans le quota de 50
% dans lesquelles la société de capital-risque détient au moins 5 % du
capital.
« Lorsque les titres d'une société détenus par une société de capital-risque
sont admis aux négociations sur un marché réglementé, ils continuent à être
pris en compte pour le calcul de la proportion de 50 % pendant une durée de
cinq ans à compter de la date de l'admission.
« La proportion de 50 % est atteinte dans un délai de deux ans à compter du
début du premier exercice au titre duquel la société a demandé le bénéfice du
régime fiscal de société de capital-risque. Pour le calcul de cette proportion,
les augmentations de capital d'une société de capital-risque ne sont prises en
compte qu'à compter du deuxième exercice suivant celui au cours duquel elles
sont réalisées.
« Les participations prises en compte pour la proportion de 50 % ne doivent
pas conférer directement ou indirectement à une société de capital-risque ou à
l'un de ses actionnaires directs ou indirects la détention de plus de 40 % des
droits de vote dans lesdites sociétés ;
« 2° Ne pas procéder à des emprunts d'espèces au-delà de la limite de 10 % de
son actif ;
« 3° Une personne physique, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne
peuvent pas détenir ensemble, directement ou indirectement, plus de 30 % des
droits dans les bénéfices d'une société de capital-risque ;
« 4° L'option pour le régime fiscal des sociétés de capital-risque est exercée
avant la date d'ouverture de l'exercice au titre duquel ce régime s'applique,
si la société exerce déjà une activité ou, dans le cas contraire, dans les six
mois suivant celui de la création de son activité. »
« II. - Le code général des impôts est modifié comme suit :
« 1. Le 5 de l'article 38 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, les sommes correspondant
à la répartition, prévue au sixième alinéa de l'article 22 de la loi n° 88-1201
du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs
mobilières et portant création des fonds communs de créances, d'une fraction
des actifs d'un fonds commun de placement à risques qui remplit les conditions
prévues au II de l'article 163
quinquies
B, sont affectées en priorité
au remboursement des apports. L'excédent des sommes réparties sur le montant
des apports est compris dans le résultat imposable de l'exercice au cours
duquel cet excédent apparaît. Il est soumis au régime fiscal des plus-values à
long terme dans la proportion existant entre le montant des apports effectués
depuis au moins deux ans à la date de la répartition et le montant total des
apports effectués à cette même date. »
« 2. L'article 39
terdecies
est complété par un 4
bis
ainsi
rédigé :
« 4
bis
. Les distributions par les sociétés de capital-risque qui
fonctionnent dans les conditions de l'article 1
bis
de la loi n° 85-695
du 11 juillet 1985 modifiée sont soumises, lorsque l'actionnaire est une
entreprise, au régime fiscal des plus-values à long terme lors de la cession
d'actions si la distribution est prélevée sur des plus-values nettes réalisées
au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2000 provenant de titres,
cotés ou non cotés, détenus depuis au moins deux ans et de la nature de ceux
qui sont retenus pour la proportion de 50 % mentionnée au même article 1
bis.
« 3. Le 2 de l'article 119
bis
est complété par les dispositions
suivantes :
« La retenue à la source ne s'applique pas aux distributions des sociétés de
capital-risque fonctionnant dans les conditions prévues à l'article 1
bis
de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée qui bénéficient à
des personnes dont le domicile fiscal ou le siège de direction effective est
situé dans un pays ou territoire ayant conclu avec la France une convention
d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion
fiscales, lorsque :
«
a)
La distribution est prélevée sur des plus-values nettes réalisées
au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2000 provenant de titres,
cotés ou non cotés, de la nature de ceux retenus pour la proportion de 50 %
mentionnée à l'article 1
bis
de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985
modifiée et l'actionnaire, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne
détiennent pas ensemble, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits
dans les bénéfices de sociétés dont les titres figurent à l'actif de la société
de capital-risque, ou n'ont pas détenu ce montant à un moment quelconque au
cours des cinq années précédant la souscription ou l'acquisition des actions de
la société de capital-risque ;
«
b)
La distribution entre dans les prévisions du 4
bis
de
l'article 39
terdecies
et le bénéficiaire effectif est une personne
morale qui ne détient pas, directement ou indirectement, plus de 25 % des
droits dans les bénéfices de sociétés dont les titres figurent à l'actif de la
société de capital-risque, ou n'a pas détenu ce montant à un moment quelconque
au cours des cinq ans précédant la souscription ou l'acquisition des actions de
la société de capital-risque. »
« 4. Au III de l'article 150-O A, il est inséré un 1
bis
ainsi rédigé
:
« 1
bis.
Aux cessions d'actions de sociétés de capital-risque
mentionnées au II de l'article 163
quinquies
C souscrites ou acquises à
compter du 1er janvier 2000, réalisées par des actionnaires remplissant les
conditions fixées au II de l'article précité, après l'expiration de la période
de cinq ans mentionnée au 2° du même II. Cette disposition n'est pas applicable
si, à la date de la cession, la société a cessé de remplir les conditions
énumérées à l'article 1
bis
de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985
modifiée ; ».
« 5. Au II de l'article 163
quinquies
B, il est inséré un 1°
ter
ainsi rédigé :
« 1°
ter
A compter du 31 décembre 1999, les fonds doivent avoir 50 % de
leurs actifs constitués par des titres remplissant les conditions prévues à
l'article 1
bis
de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 précitée. »
« 6. L'article 163
quinquies
C est ainsi modifié :
«
a)
Les deux premiers alinéas constituent un I ;
«
b)
Les troisième et quatrième alinéas constituent un III ;
«
c)
Le dernier alinéa devient le troisième alinéa du I et les mots :
"Les dispositions du présent article" sont remplacés par les mots : "Ces
dispositions" ;
«
d)
Il est créé un II ainsi rédigé :
« II. - Les distributions par les sociétés de capital-risque qui remplissent
les conditions prévues à l'article I
bis
de la loi n° 85-695 du 11
juillet 1985 précitée, prélevées sur des plus-values nettes réalisées au cours
des exercices clos à compter du 31 décembre 2000 provenant de titres, cotés ou
non cotés, de la nature de ceux retenus pour la proportion de 50 % mentionnée
au même article 1
bis
sont soumises, lorsque l'actionnaire est une
personne physique, au taux d'imposition prévu au 2 de l'article 200 A.
« Toutefois, les distributions prélevées sur les bénéfices réalisés dans le
cadre de leur objet social défini à l'article 1er
bis
de la loi n°
85-695 du 11 juillet 1985 modifiée sont exonérées lorsque les conditions
suivantes sont remplies :
« 1° L'actionnaire a son domicile fiscal en France ou dans un pays ou
territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance
administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ;
« 2° L'actionnaire conserve ses actions pendant cinq ans au moins à compter de
leur souscription ou acquisition ;
« 3° Les produits sont immédiatement réinvestis pendant la période mentionnée
au 1° dans la société soit sous la forme de souscription ou d'achat d'actions,
soit sur un compte bloqué ; l'exonération s'étend alors aux intérêts du compte,
lesquels sont libérés à la clôture de ce dernier ;
« 4° L'actionnaire, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne
détiennent pas ensemble, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits
dans les bénéfices de sociétés dont les titres figurent à l'actif de la société
de capital-risque, ou n'ont pas détenu cette part à un moment quelconque au
cours des cinq années précédant la souscription ou l'acquisition des actions de
la société de capital-risque ».
« 7. Au 3°
septies
de l'article 208, il est créé un deuxième alinéa
ainsi rédigé :
« Les sociétés de capital-risque qui fonctionnent dans les conditions prévues
à l'article 1
bis
de la loi précitée, sur les produits et plus-values
nets provenant de leur portefeuille autres que ceux afférents aux titres
rémunérant l'apport de leurs activités qui ne relèvent pas de leur objet social
ainsi que, pour les sociétés de capital-risque mentionnées à la deuxième phrase
du
a
du 1 de l'article 1
bis
précité, sur les prestations de
services accessoires qu'elles réalisent. »
« 8. Au premier alinéa du
a
ter du I de l'article 219, les mots : "à
l'article 1er modifié" sont remplacés par les mots : "aux articles 1er modifié
ou 1
bis
".
« 9. Aux articles 238
bis
HI et 238
bis
HQ, les mots ;
"l'article 1er modifié" sont remplacés par les mots : "les articles 1er modifié
et 1
bis
".
« III. - Le 8 du II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et le
8° du II de l'article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative
au remboursement de la dette sociale sont ainsi rédigés :
« Les répartitions de sommes ou valeurs effectuées par un fonds commun de
placement à risques dans les conditions prévues aux I et II de l'article 163
quinquies
B, les distributions effectuées par les sociétés de
capital-risque dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I et du II de
l'article 163
quinquies
C, lors de leur versement, ainsi que les gains
nets mentionnés au 1 et 1
bis
du III de l'article 150-OA ; ».
« IV. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du
présent article, notamment les limites dans lesquelles les sociétés de
capital-risque peuvent effectuer des prestations de services ainsi que les
caractéristiques des participations prises en compte pour la proportion de 50 %
mentionnée au 1
bis
de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée et
les obligations déclaratives des sociétés de capital-risque et des
contribuables.
« V. - Sous réserve des dispositions des 1 et 5 du II, les dispositions du
présent article sont applicables aux exercices clos à compter du 31 décembre
2000. L'article 1er modifié de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 cesse de
s'appliquer aux exercices clos à compter du 1er janvier 2001.
« VI. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du présent article sont
compensées par le relèvement à due concurrence des droits figurant aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Ce modeste amendement technique vise à préciser le régime d'imposition des
sommes réparties par un fonds commun de placement à risques.
Les dispositions de l'article 38-5 du code général des impôts sont complétées
pour prévoir que les sommes ou valeurs distribuées par un FCPR, un fonds commun
de placement à risques, et correspondant au prix de cession de ses titres sont
imposables pour la fraction qui excède les apports effectivement libérés non
encore amortis et qui seraient remboursés en priorité.
Par suite, le porteur serait imposé sur l'excédent des sommes distribuées sur
le montant de son apport au titre de l'exercice au cours duquel cet excédent
apparaît.
L'excédent en cause serait soumis au régime des plus-values à long terme dans
la proportion existant entre le montant des apports effectués depuis au moins
deux ans à la date de distribution et leur montant total à cette même date.
Par ailleurs, les sociétés de capital-risque, les SCR, bénéficient d'un régime
fiscal de faveur à condition d'avoir un actif constitué, à concurrence de 50 %
au moins, de titres de sociétés non cotées ayant leur siège dans un Etat de
l'Union européenne et répondant à certaines conditions.
Mais, à la différence des FCPR, qui bénéficient également d'un régime fiscal
de faveur, les SCR sont libres de détenir, en dehors de ce quota de 50 %, des
actifs de toute nature et d'exercer diverses activités.
Sur le plan fiscal, cette situation conduit à créer deux secteurs d'activité
dans les sociétés de capital-risque. D'une part, un secteur exonéré d'impôt sur
les sociétés, restreint à la détention d'un portefeuille de valeurs mobilières
et dont le résultat est constitué des seuls produits et plus-values provenant
de ce portefeuille. D'autre part, un secteur taxable dans lequel les autres
produits et plus-values sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les
conditions de droit commun.
La gestion de ce double secteur est difficile et implique la mise en oeuvre de
règles particulièrement complexes de répartition de frais et charges, de
distribution des produits et de transmission des crédits d'impôt et des avoirs
fiscaux.
Or une simplification très profonde du régime fiscal des SCR est possible,
mais elle suppose que ces sociétés s'en tiennent à un objet exclusif, analogue
à celui des FCPR et de l'ensemble des organismes de placement collectif en
valeurs mobilières, OPCVM. En effet, dans cette nouvelle situation, il serait
possible d'accorder aux sociétés de capital-risque une exonération sur la
totalité de leurs bénéfices réalisés dans le cadre de leur objet social.
C'est pourquoi je propose de recentrer l'activité des sociétés de
capital-risque sur la gestion d'un portefeuille d'investissement à risques.
Seuls les SCR de taille modeste, c'est-à-dire dont le total de bilan serait
inférieur à dix millions d'euros, seraient autorisées à effectuer à titre
accessoire des prestations de services dans le prolongement de leur objet
social.
Cette simplification devrait avoir pour résultat de renforcer l'attrait de ces
sociétés auprès des investisseurs, tant personnes physiques que personnes
morales, et, par conséquent, d'apporter des fonds propres aux petites et
moyennes entreprises qui sont, je vous le rappelle, les plus grosses
entreprises en termes de création d'emplois.
Je vous propose en outre de prendre en compte pour le calcul de la proportion
de 50 % de titres non cotés des SCR et des FCPR : d'une part, les avances en
compte consenties à des sociétés éligibles au quota de 50 % et, d'autre part,
les participations dans le capital des sociétés holdings communautaires non
cotées qui ont pour activité exclusive de gérer des participations dans des
sociétés remplissant les conditions pour que leurs titres soient compris dans
la proportion de 50 %.
Voilà donc le détail des explications de l'amendement que je vous propose
d'adopter. Je tiens à remercier tous ceux qui m'ont aidé à mettre au point ce
dispositif très technique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est admirative : il a certainement
fallu une équipe nombreuse de spécialistes, sous la direction de M. Paul
Loridant, pour aboutir au résultat qui nous est proposé.
Il s'agit, en effet, de réformer les sociétés de capital-risque, leur statut,
les règles régissant la répartition de leurs actifs et, bien entendu, leur
régime fiscal par un amendement de six pages, qui constitue une véritable
proposition de loi !
Je dois d'abord rappeler que le Conseil constitutionnel veille - et cette
jurisprudence a été réaffirmée à plusieurs reprises - à ce que les amendements
n'excèdent pas une taille raisonnable. Sommes-nous en deçà ou au-delà de la
taille raisonnable ? Seuls les sages de la place du Palais-Royal, qui sont huit
actuellement, seraient en mesure de répondre à cette question.
Je dois ensuite confesser que la commission n'a pas disposé du temps
nécessaire pour entrer dans le détail de ce dispositif...
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Elle n'a pas les troupes de Paul
Loridant !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... et il faudrait que nous puissions, au-delà de la
période budgétaire, analyser ce sujet très au fond, comme il le mérite, puisque
nous partageons très largement les objectifs du dispositif proposé.
Mais, pour autant que ces objectifs soient respectables, puisqu'il s'agit
d'étendre le champ des entreprises dans lesquelles les sociétés de
capital-risque seraient autorisées à intervenir, il y a sans doute un certain
nombre de finesses techniques et de dispositions qu'il nous faudrait, je le
répète, pouvoir approfondir comme elles le méritent. Je suggère donc à notre
collègue de bien vouloir retirer son amendement.
J'ajoute que M. Loridant pourrait présenter à nouveau cet amendement, au moins
en partie, lors de la discussion d'un texte que l'on nous annonce pour l'année
prochaine et qui traiterait notamment de l'épargne salariale, mais aussi d'un
certain nombre d'instruments de nature à favoriser l'investissement dans le
capital des entreprises, notamment des petites et moyennes entreprises
auxquelles il a fait allusion.
En l'état, la commission n'est pas en mesure d'émettre un avis favorable et
elle souhaite donc le retrait de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement partage les motivations de M. Loridant
dans son amendement.
Les sociétés de capital-risque sont un facteur essentiel de l'animation
économique de notre pays. Il est important qu'elles ne soient pas empêchées,
pour des raisons tenant à la complexité du régime d'imposition, de lever, tant
auprès des personnes physiques que des personnes morales, les capitaux dont
elles ont besoin.
Le Gouvernement est donc heureux de cette simplification qui peut prendre
corps aujourd'hui grâce à cet amendement, qui, je le souligne, est très attendu
par les professionnels.
Je ne puis donc que recommander au Sénat de l'adopter sans tarder et, bien
entendu, je lève le gage.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° II-76 rectifié.
Je vais le mettre aux voix.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
J'ai bien entendu ce qu'a dit M. le rapporteur général et je reconnais que cet
amendement traite d'un problème intéressant. Il n'en demeure pas moins qu'en
matière de développement de l'actionnariat il y a bien des choses à faire et
qu'il serait préférable que ces dispositions s'insèrent dans un ensemble.
Ce qui m'étonne, c'est la position du Gouvernement : amendement après
amendement, à chacune de nos propositions, M. le secrétaire d'Etat a déclaré
qu'il fallait attendre la grande réforme que le Gouvernement allait présenter.
Je pensais que M. le secrétaire d'Etat adopterait la même attitude à l'égard de
l'amendement de M. Loridant. Mais pas du tout ! Il a pris la position inverse
!
Je me demande pourquoi il y a deux poids, deux mesures... et je préfère m'en
tenir à la position de la commission des finances.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur Chérioux, j'ai bien entendu M. le rapporteur
général et M. le président de la commission des finances demander à plusieurs
reprises que des mesures soient prises à part...
M. Jean Chérioux.
C'est du réchauffé par rapport à mon argumentation, et c'est bien triste !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Non ! monsieur Chérioux, ce n'est pas triste et il ne
faudrait pas que vous pensiez que le Gouvernement, parce qu'il considère qu'il
y a urgence sur ce point, ne suit pas avec constance la ligne qu'il s'est fixée
et qui tend à intégrer vos propositions aux mesures qui seront prises l'année
l'année prochaine.
Il me semble par ailleurs que les dérogations demandées par M. le rapporteur
général et par M. le président de la commission des finances étaient bien plus
importantes.
Nous sommes donc cohérents.
M. Jean Chérioux.
C'est une vision globale modulable !
(Sourires.)
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Monsieur Chérioux, il ne faut pas faire de crise de jalousie !...
M. Jean Chérioux.
Je suis sensible, moi !
M. Paul Loridant.
L'opposition sénatoriale dépose un amendement qui vise à favoriser le
financement des petites et moyennes entreprises, et vous ne seriez pas sensible
à sa démarche !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il est puisé à bonne source ! Il est trop beau pour
être vrai !
M. Paul Loridant.
Cet amendement très technique, je le reconnais, est attendu par les
professionnels et il vise à favoriser l'initiative, je vous invite donc, mes
chers collègues, à l'adopter.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-76 rectifié, repoussé par la commission et
adopté par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 61
M. le président.
« Art. 61. _ Au treizième alinéa du
f)
du 1° du I de l'article 31 du
code général des impôts, la date : "1er janvier 2001" est remplacée par la date
: "1er juillet 2001". » -
(Adopté.)
Articles additionnels après l'article 61
M. le président.
Par amendement n° II-75, MM. Ostermann, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, de
Broissia, Oudin et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 61, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du
b)
du 2° de l'article 278
bis
du
code général des impôts est complétée par les mots : "quel que soit leur mode
de présentation".
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er juillet
2001.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I est
compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun.
Aujourd'hui, non seulement la plupart des produits de chocolaterie sont
toujours assujettis à un taux de TVA de 20,6 %, contrairement à la
quasi-totalité des produits alimentaires, mais, en outre, l'administration
fiscale tente d'imposer ce taux au chocolat noir jusqu'ici taxé à 5,5 %,
n'hésitant pas à entreprendre des redressements fiscaux contre les entreprises
de chocolaterie en dépit de la position du juge administratif, de la direction
générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
et de la Commission européenne. Le présent amendement vise donc à remédier à
cette instabilité juridique en proposant de fixer à 5,5 % le taux de TVA
applicable au chocolat noir de couverture.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, c'est un amendement de
justice, car le chocolat noir reste le chocolat noir, qu'il soit en barrette,
en rond ou en triangle !
Il n'y a aucune raison pour établir des catégories selon je ne sais quel
critère pour taxer le chocolat noir, selon le cas, soit à 5,5 %, soit à 20,6 %.
C'est donc un amendement de bon sens qu'il faut naturellement soutenir.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Cette question a déjà été largement débattue en
première partie, je n'y reviens donc pas : l'avis du Gouvernement est
défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-75.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je suis étonné de la hargne de Bercy contre le chocolat noir. Peut-être est-ce
dicté par le souci de lutter contre la drogue, le chocolat étant considéré
comme une drogue douce bien entendu ?
(Sourires.)
Peut-être est-ce parce
qu'on ne sait pas très bien faire la différence entre le chocolat qui est noir
et celui qui ne l'est pas !
En tout cas, il s'agit d'une mesure de justice qu'il faut adopter.
J'ajoute que les services de Bercy feraient bien de manger du chocolat noir
parce que cela rend optimiste !
(Nouveaux sourires.)
M. Denis Badré.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Je confirme que nous avons eu, lors de l'examen de la première partie du
projet de loi de finances, un grand débat sur le chocolat et la TVA qui lui est
applicable.
Il est clair que ramener le taux de la TVA à 5,5 % sur l'ensemble des
chocolats est eurocompatible.
Nous avons cependant distingué clairement dans le débat précédent la
chocolaterie de confiserie et la chocolaterie alimentaire. Dans le droit-fil de
ce raisonnement, comme le disait M. le rapporteur général à l'instant,
l'amendement n° II-75 prévoit une mesure d'équité : tout ce qui est chocolat
alimentaire doit être taxé à 5,5 %.
Nous avons finalement estimé qu'appliquer le taux de TVA de 5,5 %
immédiatement à l'ensemble des chocolats coûterait trop cher et que nous avions
des priorités plus marquées. En revanche, sur ce sujet tout à fait spécifique,
nous pensons qu'il n'y a aucune raison d'hésiter.
M. Jean Chérioux.
Vous êtes trop raisonnable !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-75, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 61.
Par amendement n° II-67, MM. Oudin, Cazalet, Chaumont, Delong, Ostermann,
Trégouët, Blanc,Descours, Giraud, Leclerc et Taugourdeau proposent d'insérer,
après l'article 61, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le
c)
du 2° de l'article 278
bis
du code général des
impôts est supprimé.
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier
2001.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et
II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création
d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Article additionnel avant l'article 61
bis
M. le président.
Par amendement n° II-79 rectifié, M. Revet et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent d'insérer, avant l'article 61
bis,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 2224-6 du code général des collectivités territoriales,
il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - A titre transitoire, jusqu'à la date prévue au L. 2224-9, les
excédents de la section d'investissement du budget du service de distribution
d'eau potable peuvent être reversés à la section d'investissement du budget
d'assainissement de l'ensemble des communes et groupements. »
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy.
Depuis l'application de la M 49, deux budgets distincts s'appliquent à la
distribution d'eau et au traitement des eaux usées.
Dans l'esprit de la M 49 et de la politique européenne, l'usager doit financer
le service qu'il utilise et donc l'eau qu'il consomme et rejette.
Le traitement des eaux usées est directement lié à la consommation d'eau.
Dans cette logique, il paraît normal, à l'image de ce qui se passe en Suisse
et en Allemagne, que les excédents financiers résultant de l'amortissement des
réseaux d'eau plus anciens que ceux de l'assainissement permettent de protéger
les nappes phréatiques.
A l'inverse, il semble anormal de solliciter la participation des communes
pour rééquilibrer les services d'assainissement. Le ministère de l'intérieur
avait, en son temps, interdit aux communes de recourir à la fiscalité.
Les contributions communales fausseraient en effet la règle selon laquelle
l'usager doit rémunérer le service.
Il est donc proposé d'autoriser les communes et les groupements à reverser les
excédents de la section investissement du budget de l'eau vers la section
investissement du budget de l'assainissement.
Ce dispositif serait instauré à titre transitoire jusqu'à la date limite fixée
par la loi sur l'eau pour la généralisation de l'assainissement, c'est-à-dire
le 31 décembre 2005.
Il présente plusieurs avantages.
Il permettrait tout d'abord de prolonger les réseaux d'assainissement, de
créer des unités autonomes et, ainsi, d'être en conformité avec la loi sur
l'eau.
Il éviterait ensuite un recours à la fiscalité qui s'est révélé inadapté et
qui d'ailleurs a été supprimé voilà quelques années, dans un souci d'équité et
de juste paiement par l'usager de la prestation.
A ce sujet, mon collègue Charles Revet tient à souligner les limites d'une
solution qui consisterait à ajuster les deux budgets en modulant simplement le
taux des redevances.
Cette modulation est lourde et très difficile à mettre en oeuvre.
Elle pourrait conduire, demain ou après-demain, à une sorte de yo-yo fiscal
dans l'hypothèse où de nouveaux investissements seraient nécessaires pour le
service de l'eau.
Enfin, la consommation d'eau impliquant des rejets et un traitement, il
apparaît cohérent qu'une passerelle existe afin de donner toute sa force à la
solidarité de l'eau en faveur de l'assainissement car, sans eau, il n'y a pas
d'assainissement.
M. André Maman.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est tout à fait favorable à cet
amendement, car elle voit plusieurs avantages au dispositif envisagé par notre
collègue Charles Revet et par les membres de son groupe.
En premier lieu, il éviterait que les redevances demandées aux citoyens ne
varient de manière considérable pour assurer l'équilibre des comptes des
services de distribution et d'assainissement.
En deuxième lieu, il permettrait une plus grande souplesse de gestion.
En troisième lieu, il respecterait la logique qui consiste à financer les
investissements nouveaux d'assainissement grâce à l'amortissement des réseaux
anciens de redistribution d'eau.
De plus, l'amendement permettrait le redéploiement au niveau intercommunal des
excédents dégagés par les sections investissement des services des eaux des
budgets annexes du service des eaux, car il peut se produire que la
distribution d'eau soit au niveau communal et que l'assainissement soit au
niveau intercommunal. Par une disposition de cette nature, un transfert serait
possible de l'excédent du service municipal des eaux, section investissement,
vers le service d'assainissement, pris en charge par l'établissement public de
coopération intercommunal, là aussi dans sa section investissement.
Pour l'ensemble de ces raisons, je crois qu'il faut soutenir cette initiative
particulièrement opportune.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Les services de l'eau et de l'assainissement sont,
comme vous le savez, deux services publics industriels et commerciaux
distincts. Lorsqu'ils sont exploités en régie, leurs opérations sont retracées
dans deux budgets annexes. Chacun de ces deux services doit être financé par
une redevance proportionnelle au coût du service rendu.
Le dispositif prévu par le présent amendement aurait pour effet de faire payer
indûment par l'usager du service de l'eau les dépenses du service
d'assainissement, qui devraient, pour leur part, être répercutées sur l'usager
de ce service. Ce dispositif conduirait donc à fausser le calcul de la
redevance de chacun de ces deux services.
En outre, les services de l'eau et de l'assainissement des communes peuvent
être concédés. Dans ce cas, le dispositif prévu par cet amendement ne pourrait
pas être applicable. Il y aurait donc une inégalité entre les communes qui ont
concédé leur service et celles qui le gèrent en régie.
Pour ces raisons, et sans même évoquer le fait que cet amendement est un
cavalier budgétaire, je vous demande de retirer votre amendement. A défaut,
j'exprimerai un avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-79 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, avant l'article 61
bis.
Article 61
bis
M. le président.
« Art. 61
bis
. _ Il est inséré, après l'article L. 2333-86 du code
général des collectivités territoriales, une section 12 ainsi rédigée :
« Section 12
« Taxe sur les activités commerciales non salariées
à durée saisonnière
«
Art. L. 2333-87
. _ Toute commune peut, par délibération du conseil
municipal, instituer une taxe sur les activités commerciales non salariées à
durée saisonnière. La taxe est due par l'exploitant de l'emplacement où
s'exerce l'activité concernée ou, si celle-ci s'exerce exclusivement dans un
véhicule, par son conducteur. Les redevables de la taxe professionnelle au
titre d'une activité dans la commune ne sont pas assujettis au paiement de la
taxe.
«
Art. L. 2333-88
. _ La taxe est assise sur la surface du local ou de
l'emplacement où l'activité est exercée. Si elle est exercée exclusivement dans
un véhicule, la taxe est assise sur le double de la surface du véhicule. Elle
est due pour l'année d'imposition à la date de la première installation.
«
Art. L. 2333-89
. _ Le tarif de la taxe est fixé par une délibération
du conseil municipal avant le 1er juillet de l'année précédant l'année
d'imposition. Ce tarif uniforme ne peut être inférieur à 50 F par mètre carré,
ni excéder 800 F par mètre carré.
«
Art. L. 2333-90
. _ La taxe est établie et recouvrée par les soins de
l'administration communale sur la base d'une déclaration annuelle souscrite par
le redevable. Elle est payable au jour de la déclaration. Le défaut de
déclaration ou de paiement est puni d'une amende contraventionnelle. Les
communes sont admises à recourir aux agents de la force publique pour assurer
le contrôle de la taxe et en constater les contraventions. Un décret fixe les
conditions d'application du présent article, notamment le taux de l'amende
contraventionnelle. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-52 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances.
L'amendement n° II-81 est déposé par M. Deneux et les membres du groupe de
l'Union centriste.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n°
II-52.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une curieuse obsession que celle qui consiste à
revenir périodiquement sur certaines activités saisonnières non salariées, et
on se demande quelle importance économique considérable elles doivent avoir
pour justifier un tel acharnement !
Le Conseil constitutionnel a annulé à plusieurs reprises des dispositions
analogues. Voilà pourtant un nouvel avatar de cette taxe sur les activités
saisonnières en question. Mon rapport écrit contient à cet égard un texte très
intéressant qui est examiné dans le détail : « La taxe est due par l'exploitant
de l'emplacement où s'exerce l'activité concernée, ou, si celle-ci s'exerce
exclusivement dans un véhicule, par son conducteur ». Voilà une mesure
extraordinaire ! Si le véhicule est une remorque, celle-ci n'ayant pas de
conducteur, qui paie la taxe ?
Il y a là matière à quelques facéties que je vous remercie d'avoir
l'indulgence d'accepter ! La nouvelle rédaction qui nous est proposée n'est
toujours pas satisfaisante. Le recouvrement de cette taxe soulève de nombreuses
difficultés qui risquent de donner naissance à un réel contentieux. En outre,
il y a doute sur la constitutionnalité de cette mesure, qui pose le problème de
l'égalité devant l'impôt. Mais peut-être M. le président de la commission des
finances de l'Assemblée nationale trouvera-t-il, pour des futurs textes, une
autre rédaction ?
Sans nier l'existence de ce problème, qui est peut-être très préoccupant dans
le département de l'Ariège et dans certaines stations climatiques, nous ne
pouvons toujours pas accepter la proposition tendant à créer cette nouvelle
taxe.
M. le président.
La paroles est à M. Deneux, pour défendre l'amendement n° II-81.
M. Marcel Deneux.
Cet amendement ayant le même objet que celui que vient de présenter, mieux que
je ne saurais le faire, M. le rapporteur général, je n'insisterai pas.
Je rappelle simplement que la disposition introduite par l'article 61
bis
a déjà été condamnée à deux reprises par le Conseil constitutionnel.
Je ne comprends donc pas pourquoi on insiste autant !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s II-52 et
II-81 ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
L'article 61
bis
adopté en première lecture à
l'Assemblée nationale vise à créer une taxe pour assujettir, l'année de leur
établissement, les activités commerciales non salariées. Elle est assise sur la
surface du local ou de l'emplacement où est exercée l'activité du redevable.
Elle serait recouvrée par les communes auprès du redevable.
Le Gouvernement comprend l'objet d'une telle taxe, qui tend à faire participer
les activités saisonnières au financement des collectivités locales et à faire
en sorte qu'elles exercent leur activité dans des conditions normales de
concurrence.
Comme vous l'avez souligné, cette disposition a déjà été annulée, à deux
reprises, par le Conseil constitutionnel, d'abord pour des questions de
procédure, lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions
d'ordre économique et financier de l'année dernière, puis en raison d'une
définition trop imprécise des modalités de recouvrement.
Dans ces conditions, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute
Assemblée.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s II-52 et II-81, pour lesquels
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 61
bis
est supprimé.
Article 62
M. le président.
« Art. 62. _ Pour l'année 1999 et par exception aux dispositions de l'article
1639 A
bis
du code général des impôts, les délibérations des
collectivités locales et des organismes compétents relatives aux exonérations
de taxe professionnelle prévues à l'article 1464 A du même code prises au plus
tard le 15 novembre 1999 sont applicables à compter des impositions établies au
titre de l'année 2000. » -
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 62
M. le président.
Par amendement n° II-38, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 62, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du second alinéa de l'article L. 1613-2 du code
général des collectivités territoriales est supprimée.
« II. - Les taux d'imposition des deux dernières tranches du barème de l'impôt
sur le revenu des personnes physiques sont relevés à due concurrence des pertes
de recettes résultant du I. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement que nous avions déjà présenté lors de l'examen de la première
partie du projet de loi de finances a pour objet de supprimer la disposition
dite « amendement Auberger ».
Vous connaissez bien ce dispositif. Instauré en même temps que le pacte de
stabilité du gouvernement Juppé, il autorise l'utilisation par l'Etat de la
dotation de compensation de la taxe professionnelle comme variable d'ajustement
de l'enveloppe normée des concours financiers de l'Etat.
A l'origine, la dotation de compensation de la taxe professionnelle était
destinée à compenser les pertes de recettes de la taxe professionnelle
résultant des mesures législatives d'allégement.
Or force est de constater aujourd'hui, et chaque année le confirme, que cette
dotation est loin de compenser intégralement les recettes des collectivités
locales perdues au titre de divers allégements et exonérations consentis par
l'Etat aux contribuables locaux, et cela d'autant plus que le nombre des
compensations ne cesse d'augmenter.
De 1993 à 1999, la dotation de compensation de la taxe professionnelle a
baissé de près de 30 %. Elle est passée de 18,85 milliards de francs en 1993 à
12,4 milliards de francs en 1999.
L'an dernier, cette baisse n'a pas été accusée de la même façon par l'ensemble
des communes, puisque le Gouvernement a souhaité limiter la perte de recettes
de communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine ou des communes dites
bourgs-centres bénéficiaires de la dotation de solidarité rurale.
En revanche, les collectivités non éligibles à l'une de ces dotations de
solidarité doivent prendre à leur charge cette nouvelle diminution de la
dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Leurs propres taux de diminution s'établit ainsi, en 1999, à moins 23,14 %
pour les communes, à moins 12,88 % pour les départements et à moins 16,60 %
pour les régions.
Cette année, l'examen à l'Assemblée nationale a permis de réduire ces effets
que je qualifierai de pervers en améliorant le dispositif de compensation de la
suppression de la base salaire de la taxe professionnelle, en reconduisant les
dotations exceptionnelles de 500 millions et 150 millions de francs pour la DSU
et le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle qui permettent
de réduire les répercussions pour les communes éligibles aux dotations de
solidarité.
Ce sont des mesures dont nous nous félicitons, mais elles ne sont que
ponctuelles. La seule solution consite à supprimer la possibilité d'utiliser la
dotation de compensation de la taxe professionnelle comme variable d'ajustement
de l'enveloppe normée. C'est ce que je vous propose, mes chers collègues, au
nom du groupe communiste républicain et citoyen avec cet amendement n°
II-38.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission n'est pas favorable à cet
amendement.
Nous souhaitons en effet que les collectivités soient associées aux fruits de
la croissance et, pour cela, que la croissance soit davantage prise en compte
dans le calcul de l'enveloppe normée. Mais, dès lors, il faut en accepter les
contreparties. Autrement dit, si la croissance se ralentit, il faudra bien
admettre les ajustements pour la part de l'enveloppe normée qui sera indexée
sur elle.
Etre intéressé à la croissance, c'est comme être intéressé aux résultats d'une
entreprise. Ce qui vaut dans un sens doit valoir dans l'autre. Il faut accepter
cette règle du jeu. On ne peut pas gagner à tous les coups ! Les défenseurs
énergiques des finances locale que nous sommes tous doivent se soumettre à ce
principe de bon sens.
Par ailleurs, la réflexion globale sur les concours de l'Etat aux
collectivités est en cours. Nous connaîtrons bientôt les conclusions de la
mission sur la décentralisation, qui se réunit sous la présidence de M.
Delevoye et dont notre collègue M. Michel Mercier est le rapporteur. A ce
moment-là, peut-être ce sujet pourra-t-il être réexaminé.
Enfin, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen sait
bien que le gage utilisé pour compenser cet amendement ne peut recueillir
l'accord de la majorité de la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Madame le sénateur, lors de l'examen de la première
partie du projet de loi de finances, vous avez déjà déposé cet amendement, qui
vise à ne plus procéder à la régularisation de la DGF lorsque celle-ci est
négative et le Sénat l'a rejeté.
Je suis donc conduit à répéter ce qui avait été dit à cette occasion.
Compte tenu du poids de la DGF dans les concours de l'Etat aux collectivités
locales et du mode de calcul de l'évolution de cette dotation d'une année sur
l'autre, il me paraît difficilement envisageable qu'il ne soit pas procédé à
une actualisation de son indice d'évolution en fonction de l'évolution des
indicateurs économiques. Il s'agit d'une démarche technique qui tient compte
des mécanismes et du calendrier régissant l'élaboration de la loi de
finances.
L'esprit de cette régularisation n'est en effet certainement pas de chercher à
réduire les moyens affectés aux collectivités locales, dont je veux préciser
qu'ils augmenteront de 4 % sur l'année 2000, puisque l'article 1613-2 du code
général des collectivités locales s'applique aussi bien lorsque la
régularisation doit être négative que lorsqu'elle doit être positive.
Supprimer un ajustement technique lorsqu'il se révèle défavorable aux
collectivités locales ne me paraît donc pas légitime.
Compte tenu de ces considérations, je vous demande, madame, de bien vouloir
retirer votre amendement. Si tel n'était pas le cas, l'avis du Gouvernement
serait défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-38, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 63
M. le président.
« Art. 63. _ L'article 1518
bis
du code général des impôts est complété
par un
t)
ainsi rédigé :
«
t)
Au titre de 2000, à 1,01 pour les propriétés non bâties, pour les
immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 et pour l'ensemble des
autres propriétés bâties. »
- (Adopté.)
Article additionnel après l'article 63
M. le président.
Après l'article 63, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire
l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-37, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 63, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Le II de l'article 1635
sexies
du code général des impôts est
ainsi modifié :
« 1. Les 4° et 5° sont abrogés.
« 2. Le 6° est ainsi rédigé :
« 6° Le produit des cotisations afférentes aux impositions visées au I,
diminué de la fraction des cotisations afférentes aux taxes mentionnées aux
articles 1520 et 1528, est perçu par les collectivités locales accueillant, sur
leur territoire, un établissement de La Poste ou de France Télécom, à hauteur
de la moitié du montant global des produits subvisés, l'autre moitié étant
versée au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle visé à
l'article 1648 A
bis.
»
« B. - L'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence du A ci-dessus.
»
Par amendement n° II-53, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 63, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le II de l'article 1635
sexies
du code général des impôts est
ainsi modifié :
« A. - Le 4° est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« S'agissant de la taxe professionnelle acquittée par France Télécom à compter
de la date qui sera fixée par la loi de finances pour 2001, les taux
applicables aux établissements de cette entreprise sont les taux appliqués pour
l'année en cours par l'ensemble des collectivités locales, des établissements
publics de coopération intercommunale et des établissements et organismes
divers habilités à percevoir le produit de la taxe professionnelle sur le
territoire desquels ils sont implantés. »
« B. - Il est complété,
in fine,
par un alinéa ainsi rédigé :
« 6°
bis.
A compter de la date qui sera fixée par la loi de finances
pour 2001, le produit des cotisations afférentes à la taxe professionnelle
acquittée par les établissements de France Télécom est, pour moitié, conservé
par les collectivités locales, les établissements publics de coopération
intercommunale et les établissements et organismes divers habilités à percevoir
le produit de la taxe professionnelle sur le territoire desquels ils sont
implantés et, pour moitié, versé au fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle mentionné à l'article 1648 A
bis.
»
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des
dispositions du I ci-dessus, les droits prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts sont majorés à due concurrence. »
Par amendement n° II-82, M. Hérisson et les membres du groupe de l'Union
centriste proposent d'insérer, après l'article 63, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Le II de l'article 1635
sexies
du code général des impôts est
ainsi modifié :
« 1. Au début des 4° et 5° sont insérés les mots suivants : "Dans le cas des
impositions acquittées par La Poste et visées au I..."
« 2. Au 5°, les mots : "et France Télécom" sont supprimés.
« 3. Aux premier, deuxième et troisième alinéas du 6°, après le mot :
"impositions", sont insérés les mots : "acquittées par La Poste et".
« 4. Au troisième alinéa du 6°, les mots : "et de France Télécom" sont
supprimés.
« 5. Au 6°, après le troisième alinéa est inséré un alinéa nouveau ainsi
rédigé :
« D'autre part, le produit des cotisations afférentes aux impositions
acquittées par France Télécom et visées au I, diminué de la fraction des
cotisations afférentes aux taxes mentionnées aux articles 1520 et 1528, est
perçu en totalité par les établissements publics de coopération intercommunale
créés dans le cadre de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 ou, à défaut, par
les communes accueillant, sur leur territoire, un établissement de ladite
société, à hauteur de la moitié du montant global des produits subvisés,
l'autre moitié étant versée au fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle visé à l'article 1648 A
bis.
»
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par
un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° II-37.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mes chers collègues vous connaissez l'objectif de cet amendement, que nous
avons déjà défendu lors de l'examen de la première partie du projet de loi de
finances. Il vise à ce que l'imposition à la taxe professionnelle de France
Télécom revienne dans le droit commun.
Lors des débats, M. Christian Sautter nous a confirmé l'engagement du
Gouvernement de rechercher une solution. Le groupe de travail technique qui
associe la direction générale des impôts et France Télécom doit, bien entendu,
en premier lieu, recenser les bases locales par établissement, pour aboutir à
une réforme ambitieuse.
Nous nous félicitons de cet engagement puisque le Gouvernement a exprimé la
volonté d'avancer sur ce dossier. Toutefois, je ne vous cacherai pas notre
impatience.
Cette situation, en effet, perdure depuis 1991. Certaines communes, excédées,
ont entamé une procédure devant la Cour de justice des Communautés européennes
pour non-respect des règles concurrentielles entre les entreprises.
Il est presque certain qu'elles vont obtenir satisfaction, étant donné les
disparités d'imposition entre France Télécom et les entreprises de
téléphonie.
Vous le voyez donc, monsieur le secrétaire d'Etat, cette situation exige
d'être réglée rapidement sans pour autant oublier, comme nous le rappelait le
Gouvernement lors des discussions de la première partie, qu'une partie du
produit de la taxe professionnelle de France Télécom profite aux communes
défavorisées.
C'est la raison pour laquelle, par cet amendement, nous proposons que 50 % du
produit de la taxe professionnelle de France Télécom alimente le fonds national
de péréquation de la taxe professionnelle, l'autre moitié étant attribuée aux
collectivités locales accueillant des établissements France Télécom.
Cette solution présenterait l'avantage de tenir compte des frais engagés par
les communes pour l'accueil des salariés dudit établissement et de la nécessité
d'amplifier la solidarité entre les communes.
Il s'agit d'une péréquation qui, je tiens à le rappeler, ne s'opère que sur 6
milliards de francs, ce qui est très peu au regard de la somme globale que
représentent les concours de l'Etat aux collectivités.
Je ne doute pas du fait que vous saurez, mes chers collègues, apprécier cet
amendement, que je considère comme équilibré, et que vous l'adopterez.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
II-53.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous abordons là un sujet que nous connaissons bien
car, l'année dernière, nous avons adopté à l'unanimité l'amendement que je vais
à nouveau proposer.
Il résultait de la rédaction de la commission des finances, sous-amendée, en
séance, par un orfèvre en la matière, notre collègue M. Michel Charasse.
Ce dispositif est bien connu : il s'agit d'attribuer le produit de la taxe
professionnelle de France Télécom pour moitié, au fonds national de péréquation
de la taxe professionnelle et, pour l'autre moitié, aux collectivités locales
d'implantation des établissements de France Télécom.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il n'est pas possible de rester plus longtemps
dans le
statu quo
, qui laisse France Télécom dans une situation
pénalisante par rapport à ses compétiteurs. Les collectivités locales
d'implantation, quant à elles, ne peuvent que considérer comme insupportable
cette situation injuste des établissements dépendant d'une société qui
développe ses activités sur le plan mondial, européen et national et dont le
capital est largement ouvert, ne paient toujours pas la taxe professionnelle
dans leur commune d'implantation.
Cette situation tout à fait inacceptable se retourne contre France Télécom. Il
faut donc y mettre un terme, et la manière la plus simple de le faire est
d'adopter notre amendement.
M. le président.
La parole est à M. Deneux, pour présenter l'amendement n° II-82.
M. Marcel Deneux.
Le produit de la taxe professionnelle payé par France Télécom doit revenir
entièrement aux collectivités locales. Le Gouvernement a pris un engagement
dans ce sens lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1999. Le coût
de cette mesure est d'environ 6 milliards de francs mais, par ailleurs, l'Etat
a perçu cette année 4,3 milliards de dividendes en tant qu'actionnaire de
France Télécom.
Enfin, l'administration dispose depuis fin octobre des bases actualisées
fournies par France Télécom, et rien ne s'oppose donc à la réforme proposée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-37 et II-82 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission considère que l'amendement qu'elle
propose devrait rassembler toutes les bonnes volontés du Sénat car la
répartition proposée, 50 % revenant aux collectivités locales d'implantation,
50 % étant versé au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle,
permet à la fois d'intéresser les collectivités territorialement concernées et
le reste du tissu communal français, en particulier les communes petites et
moyennes, par le biais du fonds national de péréquation.
L'amendement n° II-37 du groupe communiste républicain et citoyen est
identique au nôtre à l'exception du gage, qui ne saurait être accepté par la
majorité de la commission des finances. Je demande donc à Mme Beaudeau de le
retirer au bénéfice de l'amendement de la commission.
Quant à l'amendement n° II-82, présenté par notre collègue Marcel Deneux, il a
également les mêmes objectifs. Toutefois, la répartition proposée relève de
principes un peu différents, puisqu'elle vise, ce qui se comprend, à avantager
certaines catégories d'établissements publics de coopération intercommunale :
ceux qui ont été créés dans le cadre de la loi du 12 juillet 1999, donc les
plus intégrés d'entre eux et, sans doute, les communautés d'agglomération.
Mais, par ce fait même, la répartition du produit de la taxe professionnelle
serait plus concentrée qu'elle ne le serait aux termes de l'amendement n° II-53
de la commission des finances, laquelle souhaite que la totalité ou la
quasi-totalité des communes françaises bénéficient, chacune pour sa part, des 5
milliards ou 6 milliards de francs supplémentaires qui seraient ainsi
obtenus.
Je souhaiterais donc également que l'amendement n° II-82 soit retiré au
bénéfice de l'amendement n° II-53.
M. le président.
Madame Beaudeau, l'amendement n° II-37 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous tenons beaucoup à notre gage. Je maintiens donc cet amendement.
M. le président.
Monsieur Deneux, l'amendement n° II-82 est-il maintenu ?
M. Marcel Deneux.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° II-82 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° II-37 et II-53 ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Ces deux amendements visent à assujettir La Poste et
France Télécom à la taxe professionnelle en fonction des taux de chacune des
collectivités locales sur le territoire desquelles les établissements de La
Poste ou de France Télécom sont implantés, et à répartir le produit de cette
imposition entre, d'une part, ces mêmes collectivités et, d'autre part, le
Fonds national de péréquation.
Une telle proposition a déjà été présentée lors de l'examen des articles de la
première partie du projet de loi de finances pour 2000, et le Gouvernement a
alors exposé les raisons pour lesquelles il y était défavorable. Je ne puis que
confirmer cet avis.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-37, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-53, repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 63.
Article 63
bis
M. le président.
« Art. 63
bis.
_ Dans le premier alinéa de l'article 73 B du code
général des impôts, la date : "31 décembre 1999" est remplacée par la date :
"31 décembre 2000". » -
(Adopté.)
Article 63
ter
M. le président.
« Art. 63
ter
. _ Le dernier alinéa du 1 de l'article 170 du code
général des impôts est complété par les mots : "ainsi que le montant des
produits de placement soumis à compter du 1er janvier 1999 aux prélèvements
libératoires opérés en application de l'article 125 A". »
Par amendement n° II-54, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 63
ter,
qui vise à l'instauration
d'une obligation de déclaration des revenus bénéficiant du prélèvement
libératoire, a été introduit à l'Assemblée nationale sur l'initiative du député
Jean-Pierre Brard.
Nous nous demandons s'il ne s'agit pas, plus que d'une mesure de transparence
fiscale, d'une mesure d'inquisition fiscale, la frontière étant souvent
incertaine entre ces deux sortes de mesures.
Pour éclairer le débat, il faut préciser quelques points et souligner quelques
incohérences du dispositif proposé.
La pénalité applicable en cas de non-déclaration est un droit fixe de 100
francs par omission ou inexactitude, avec un minimum de 1000 francs.
Il convient de rappeler que l'article 125 A du code général des impôts
s'applique également aux bons anonymes : cela pourrait, selon une
interprétation stricte du dispositif, conduire à en faire tomber l'anonymat, ce
qui n'est pas jusqu'ici, semble-t-il, dans l'intention du législateur.
Enfin, s'agissant du calcul du revenu de référence applicable pour le
plafonnement de la taxe d'habitation, il est peu cohérent d'inclure les revenus
soumis à prélèvement forfaitaire et non ceux des placements exonérés, sans
doute beaucoup plus fréquents dans la population concernée ; d'où des risques
d'incompréhension chez certains contribuables, qui auront le sentiment qu'il y
a deux poids deux mesures.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission préconise la suppression de
l'article 63
ter.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
L'article 63
ter
a pour objet de prévoir
l'obligation déclarative des prélèvements libératoires effectués en application
de l'article 125 A du code général des impôts.
En effet, la prise en compte des revenus soumis aux prélèvements libératoires,
bien que spécifiquement prévue par la loi de finances pour 1997 - je me permets
de le souligner - n'a jamais pu être mise en oeuvre, faute d'obligation
déclarative permettant de les identifier. Or ce sont près de 50 milliards de
francs de produits de placement à revenu fixe qui, en 1997, ont été soumis
d'office ou sur option aux prélèvements libératoires de l'impôt sur le revenu.
Il en résulte donc des inégalités choquantes dans l'accès aux divers avantages
que j'ai évoqués.
Le Gouvernement est favorable à ce que ces inégalités ne perdurent pas. C'est
pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-54, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 63
ter
est supprimé.
(M. Jean-Faure remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la
présidence.)PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
Article additionnel après l'article 63
ter
M. le président.
Par amendement n° II-41, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article
63
ter,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 734 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction
suivante :
«
Art. 734
. - A compter du 1er janvier 2001, la cession d'un contrat
d'assurance vie rachetable est enregistrée au droit fixe de 100 francs. »
« II. - L'article 1936
bis
du code général des impôts est rétabli dans
la rédaction suivante :
«
Art. 1936
bis. - Toute infraction aux dispositions de l'article 734
est punie d'une amende fiscale égale au double du droit fixe défini à cet
article. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement porte sur la cession des polices d'assurance vie. Il différe
légèrement de celui que nos collègues du groupe communiste de l'Assemblée
nationale ont déposé sur le même sujet.
Nous avons été animés, dans la rédaction de cet amendement, par un souci
d'équilibre.
Il nous semble en effet regrettable que les cessions de police ne fassent pas
aujourd'hui l'objet de la moindre procédure d'enregistrement, d'autant qu'une
telle police d'assurance vie peut être assise sur des valeurs particulièrement
significatives.
Notre amendement vise donc tout simplement à rendre obligatoire une procédure
d'enregistrement des opérations concernées, afin de donner à l'administration
fiscale un outil de connaissance et de mesure du patrimoine acquis par un
contribuable donné.
La modicité de ce droit fixe et le « formatage » subséquent de la sanction en
cas d'omission dans l'accomplissement de la procédure d'enregistrement sont
symboliques.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission émet un avis défavorable, car cette
mesure créerait une nouvelle incertitude quant au régime fiscal de l'assurance
vie, que l'on n'a déjà que trop souvent modifié. De plus, elle ferait peser à
tort une suspicion sur une certaine catégorie de contribuables.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à assujettir à un droit de 100
francs les cessions de police d'assurance vie afin d'éviter qu'elles donnent
lieu, lorsqu'il existe une faculté de rachat, à une donation indirecte. A
défaut, une sanction fiscale égale à 200 francs serait appliquée.
Le Gouvernement partage votre souci, madame Beaudeau, de lutter contre de
telles manoeuvres frauduleuses, qui constituent aujourd'hui un réel sujet
d'actualité. M. Christian Sautter l'avait déjà indiqué lorsqu'un amendement
visant le même objectif a été déposé par certains de vos collègues, à
l'Assemblée nationale, au cours de la première lecture du présent projet de loi
de finances.
Cela étant, le texte présenté ne me semble pas de nature à répondre à
l'objectif visé dans la mesure où il prévoit simplement le tarif de la
formalité de l'enregistrement, sans instituer la formalité obligatoire de
l'enregistrement.
De plus, la faiblesse de la sanction envisagée rendrait le dispositif
inopérant.
Le Gouvernement s'engage à poursuivre, avec les auteurs des deux amendements,
la réflexion sur ce sujet important afin d'aboutir à l'élaboration d'un texte
susceptible d'atteindre vraiement le but recherché.
Au bénéfice de ces explications, je demande à Mme Beaudeau de bien vouloir
retirer son amendement. A défaut de retrait, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-41, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles 63
quater
et 63
quinquies
M. le président.
« Art. 63
quater
. - Aux premier, deuxième et troisième alinéas de
l'article 1649
quater
B du code général des impôts, la somme : "50 000
F" est remplacée par la somme : "20 000 F".
- (Adopté.)
« Art. 63
quinquies
. - I. _ L'article 1649
quater
B du code
général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout versement d'une prime ou d'une cotisation d'assurance au titre d'un
contrat d'assurance vie ou d'assurance décès doit être opéré selon les
modalités prévues au premier alinéa, au-delà de 20 000 F par an et par contrat.
»
« II. _ Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article 1er de la loi du 22 octobre
1940 relative aux règlements par chèques et virements, après les mots : "titres
nominatifs", sont insérés les mots : "et des primes ou cotisations
d'assurance". »
- (Adopté.)
Article 63
sexies
M. le président.
« Art. 63
sexies
. I. _ Le 3 de l'article 1728 du code général des
impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. »
« II. _ Les dispositions du I s'appliquent aux infractions commises à compter
du 1er janvier 2000. »
Par amendement n° II-55, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger ainsi le I de cet article :
« I. - L'article 1728 du code général des impôts est complété par un 4 ainsi
rédigé :
« 4. Par dérogation au 3, la majoration visée au 1 est portée à 80 % sans
qu'il y ait eu lieu de procéder à une mise en demeure préalable en cas de
découverte d'une activité occulte, caractérisée par l'absence de toute démarche
ou formalité de nature à porter à la connaissance de l'administration
l'exercice par le contribuable de cette activité. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je rappelle qu'il existe, dans le code général des
impôts, deux sortes de pénalité d'assiette : d'une part les pénalités liées au
défaut ou au retard dans la souscription d'une déclaration ; d'autre part,
celles qui concernent les insuffisances, omissions ou inexactitudes relevées
dans les déclarations souscrites.
Ce sont bien les déclarations qui permettent de sanctionner la mauvaise foi ou
l'utilisation, par le contribuable, de manoeuvres frauduleuses ; s'il n'y a pas
de déclaration, il ne peut pas y avoir mauvaise foi constatée.
Ces pénalités de l'une et de l'autre sorte ne sont applicables qu'aux
contribuables qui ont sciemment déclaré ou fait apparaître une base ou des
éléments d'imposition insuffisants, inexacts ou incomplets. En conséquence,
elles ne peuvent pas s'appliquer à un contribuable exerçant des activités
occultes, dans la mesure où celui-ci ne souscrit pas de déclaration.
Afin de pallier ces inconvénients, il est proposé, avec l'article 63
sexies,
d'instaurer une majoration de 80 % en cas de découverte d'une
activité occulte.
Nous n'avons pas de réserve sur le principe, mais nous considérons que la
solution adoptée par l'Assemblée nationale n'est pas satisfaisante.
D'abord, en proposant d'inclure la pénalité relative aux activités occultes à
cet endroit du code général des impôts, on établit une confusion entre les
majorations de 40 % et de 80 % liées au refus du contribuable de déposer sa
déclaration malgré les mises en demeure de l'administration fiscale et, d'autre
part, la majoration proposée, qui vise à sanctionner le contribuable exerçant
une activité occulte sans qu'il soit procédé à une mise en demeure
préalable.
Par ailleurs, dans la mesure où cette sanction constitue une exception au
principe selon lequel la mauvaise foi d'un contribuable ne peut être établie en
l'absence de déclaration, il convient de limiter son champ d'application en
donnant une définition de l'exercice d'activités occultes.
C'est pourquoi nous proposons, par le présent amendement, de considérer comme
activité occulte une activité caractérisée par l'absence de toute démarche, de
toute formalité de nature à porter à la connaissance de l'administration
l'exercice par le contribuable de ladite activité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
rapporteur spécial.
Si je comprends bien, il s'agit d'un amendement de
précision. Or la notion d'activité occulte est aujourd'hui dénuée de toute
ambiguïté. Il s'agit simplement de l'exercice d'une activité qui n'a pas été
portée à la connaissance de l'administration.
Dès lors, je ne vois pas l'utilité d'apporter quelque précision que ce soit.
J'émets donc un avis défavorable.
M. Gérard Braun.
Quel sens du dialogue !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je vous avoue mon extrême surprise, monsieur le
secrétaire d'Etat. Vous ne souhaitez pas que les activités occultes soient
définies sous prétexte que cette notion apparaît déjà, si j'ai bien compris
votre propos, dans le livre des procédures fiscales, sans d'ailleurs, on le
notera au passage, que ladite notion ait été davantage définie au moment où la
disposition visée a été introduite.
Pardonnez-moi, mais l'argument que vous avez utilisé ne me convainc pas. Il me
semble que nous devrions plutôt regretter, pour des raisons de sécurité
juridique, que les activités occultes n'aient jamais reçu de définition. Nous
devons donc saisir l'occasion qui se présente à nous pour combler cette
lacune.
En effet, à se référer à une notion qui n'est pas définie, on accroît
considérablement les moyens d'action de l'administration. Le flou des textes
élargit évidemment sa marge de manoeuvre ! Il est alors impossible d'exercer un
contrôle efficace sur l'action de l'administration. Il est impossible de
vérifier qu'elle applique, certes, toutes les dispositions du livre des
procédures fiscales, mais seulement les dispositions du livre des procédures
fiscales.
Nous ne voulons pas qu'un blanc-seing soit donné à l'administration. C'est
pourquoi notre amendement tend à encadrer par une définition, suffisamment
large pour englober tous les cas, la notion d'activité occulte.
Il me semble que les précisions que nous apportons ne sont pas contraires à
l'esprit du texte que vous soutenez, monsieur le secrétaire d'Etat, mais
qu'elles sont nécessaires et font évoluer favorablement le droit fiscal.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-55, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 63
sexies,
ainsi modifié.
(L'article 63
sexies
est adopté.)
Article 63
septies
M. le président.
« Art. 63
septies
. - Au début du premier alinéa de l'article 1733 du
code général des impôts, les mots : "L'intérêt de retard et les majorations
prévus à l'article 1729 ne sont pas applicables" sont remplacés par les mots :
"Lorsque le montant des droits mis à la charge du contribuable n'est pas
assorti des majorations prévues à l'article 1729, l'intérêt de retard prévu à
ce même article n'est pas applicable". »
- (Adopté.)
Article 63
octies
M. le président.
« Art. 63
octies
. - Après le deuxième alinéa de l'article 1740
ter
du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il est établi qu'une personne n'a pas respecté l'obligation de
délivrance d'une facture ou d'un document en tenant lieu, elle est redevable
d'une amende fiscale égale à 50 % du montant de la transaction. Le client est
solidairement tenu au paiement de cette amende. Toutefois, lorsque le
fournisseur apporte, dans les trente jours d'une mise en demeure adressée
obligatoirement par l'administration fiscale, la preuve que l'opération a été
régulièrement comptabilisée, il encourt une amende réduite à 5 % du montant de
la transaction. »
Par amendement n° II-56, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose, dans la première phrase du texte présenté par cet article pour
compléter l'article 1740
ter
du code général des impôts, après les mots
: « en tenant lieu », d'insérer les mots : « mentionné à l'article 289 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je rappellerai tout d'abord que, dans l'état actuel
de la législation, il n'existe pas d'amende fiscale spécifique applicable aux
ventes sans facture entre professionnels. Les ventes sans facture ne peuvent
être sanctionnées que lorsqu'elles peuvent être assimilées à une manoeuvre
frauduleuse.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement qui complète l'article 1470
ter
du code général des impôts et qui sanctionne le non-respect de
l'obligation de délivrance d'une facture ou d'un document en tenant lieu par
une amende égale à 50 % de la transaction.
Je tiens à rappeler, ensuite, que, lors de l'examen du projet de loi de
finances pour 1998, ce sujet avait déjà été évoqué et, à l'époque, on nous
proposait de sanctionner le défaut de présentation de facture ou de document
par une amende de 10 000 francs par document non présenté. Cette disposition
avait été censurée par le Conseil constitutionnel, qui avait été saisi par nos
soins : il avait jugé la sanction disproportionnée par rapport à l'infraction
commise.
A présent, une disposition tient compte des observations formulées à l'époque
; elle est donc plus satisfaisante : dès lors qu'il s'agit de 50 % de la
transaction, le principe de proportionnalité est, par définition, respecté. En
effet, l'objectif recherché est de sanctionner les professionnels assujettis à
la TVA qui ne respectent pas l'obligation de délivrance de facture pour les
biens livrés ou les services rendus à un autre assujetti prévue à l'article 289
du code général des impôts.
Il est donc proposé ici de faire référence explicitement à l'article 289 du
code général des impôts. En réalité, c'est une précision de nature technique
que nous voulons apporter au dispositif qui a été approuvé par le Gouvernement
lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
L'amendement présenté par M. Marini tend à préciser le
cadre juridique des obligations de facturation dont la violation entraîne
l'application de sanctions sévères.
Il est exact que l'obligation générale est prévue à l'article 289 du code
général des impôts. Je rappelle cependant que les mentions précises que doivent
comporter les factures sont indiquées à l'article 242
nonies
de l'annexe
II du code général des impôts. D'autres textes existent également comme
l'article 290
quinquies
en ce qui concerne les travaux immobiliers ou
l'article 242
undecies
de la même annexe relatif aux opérations
intracommunautaires portant sur les moyens de transport.
Par ailleurs, les deux premiers alinéas de l'article 1740
ter
du code
général des impôts ne font pas référence à l'article 289 du même code.
Dans un souci de cohérence, il me semble donc souhaitable de maintenir le
texte voté par l'Assemblée nationale : il a le mérite de la clarté et ne risque
pas de provoquer des questions inutiles, voire des interprétations qui seraient
contraires à la volonté du Parlement.
Je pense, monsieur le rapporteur général, que nous avons, l'un comme l'autre,
le souci d'éviter l'insécurité juridique. C'est la raison pour laquelle je vous
demande de retirer votre amendement qui, s'il était adopté, aurait pour
inconvénient de susciter des interrogations.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est plutôt votre
réponse qui suscite des interrogations. En effet, pourquoi ne pas se référer à
l'article 289 du code général des impôts ? C'est lui qui énonce la règle
générale ! Les exemples que vous avez cités sont, en fait, des applications
spécifiques de cette règle générale issue de l'article 289.
En refusant de faire référence à l'article 289, comme vous le faites - et cela
figurera au compte rendu intégral des débats, lesquels deviendront les travaux
préparatoires de la loi - vous soulevez une suspicion sur le véritable champ
d'application de la mesure et je le regrette. Il serait de meilleure
législation, me semble-t-il, de se situer clairement dans le champ
d'application ainsi défini par l'article 289. C'est pourquoi la commission ne
peut que maintenir son amendement n° II-56.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-56, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 63
octies,
ainsi modifié.
(L'article 63
octies
est adopté.)
Article 63
nonies
M. le président.
« Art. 63
nonies
. - I. _ Après l'article 1740
ter,
il est
inséré, dans le code général des impôts, un article 1740
ter
A ainsi
rédigé :
«
Art. 1740
ter
A
. _ Toute omission ou inexactitude constatée
dans les factures ou documents en tenant lieu mentionnés aux articles 289 et
290
quinquies
donne lieu à l'application d'une amende de 100 F par
omission ou inexactitude. Toutefois, l'amende due au titre de chaque facture ou
document ne peut excéder le quart du montant qui y est ou aurait dû y être
mentionné.
« Cette amende ne peut être mise en recouvrement avant l'expiration d'un délai
de trente jours à compter de la notification du document par lequel
l'administration a fait connaître au contrevenant la sanction qu'elle se
propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose
l'intéressé de présenter dans ce délai des observations. Elle est recouvrée
suivant les procédures et sous les garanties prévues pour les taxes sur le
chiffre d'affaires. Les réclamations sont instruites et jugées comme pour ces
taxes. »
« II. _ Au troisime alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures
fiscales, les mots : "et 1740
ter
" sont remplacés par les mots : ",
1740
ter
et 1740
ter
A".
« III. _ Au premier alinéa de l'article 1736 du code général des impôts, après
la référence : "1740
ter,
", est insérée la référence : "1740
ter
A,". »
Par amendement n° II-57, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger ainsi le II de cet article :
« II. - Au troisième alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures
fiscales, les mots : "et 1740
ter
" sont supprimés. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit, là encore, des procédures fiscales.
En l'état actuel de la législation, il n'existe pas, je le répète, de sanction
applicable en cas d'omissions ou d'inexactitudes constatées dans les factures.
Le présent article constitue, à la suite des dispositions envisagées dans la
loi de finances de 1998, une nouvelle tentative pour sanctionner ces omissions
ou inexactitudes : il nous est proposé d'appliquer une amende de 100 francs par
omission ou inexactitude, sans que cette amende puisse excéder 25 % du montant
de la facture. Ce dispositif répond aux critiques qui avaient été formulées
voilà deux ans par le Conseil constitutionnel.
En revanche, nous ne pouvons pas accepter le paragraphe II de cet article 63
nonies
dans sa rédaction actuelle : il autorise, en effet, l'application
des amendes prévues au nouvel article 1740
ter
A à la suite de la mise
en oeuvre du droit d'enquête.
Or le droit d'enquête - et cela avait été martelé par la commission des
finances voilà deux ans - ne s'apparente pas à une procédure de contrôle
fiscal. C'est une démarche de caractère unilatéral de l'administration. Les
éventuels manquements relevés lors de cette procédure font l'objet non pas de
sanctions immédiates, mais d'un procès-verbal.
En conséquence, si la commission des finances accepte que le droit d'enquête
puisse donner lieu à l'application de l'amende prévue à l'article 1725 A du
code général des impôts qui sanctionne le défaut de présentation ou de tenue de
registre obligatoire en matière de TVA, elle s'oppose à ce que le nombre des
amendes applicable dans le cadre de cette procédure soit étendu.
L'amendement n° II-57 vise donc à supprimer l'extension de l'application
d'amendes à la suite de la procédure du droit d'enquête. Nous rétablirions
ainsi le dispositif qui existait avant 1998 et qui limitait l'application
d'amende à la suite de la mise en oeuvre du droit d'enquête à la seule amende
prévue à l'article 1725 A du code général des impôts.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement constitue une régression par rapport à
la législation adoptée par le Parlement en 1997 : il conduirait, en effet, à
laisser impunies les fraudes les plus manifestes.
Lors de l'adoption de la loi de finances de 1998, un renforcement des
sanctions pour les fautes graves a été voté. De façon parfaitement cohérente,
le Parlement a estimé que, s'agissant d'infractions aux règles de facturation,
l'application des pénalités pourrait naturellement être effectuée à l'issue
d'un droit d'enquête.
La procédure de droit d'enquête, qui a précisément pour objet de contrôler le
respect des règles de facturation, permet notamment d'auditionner le dirigeant
d'entreprise qui a ou aurait dû émettre une facture ou qui y a apporté des
mentions erronées. Dans ce cadre, l'administration constate fréquemment
l'existence de facturations fictives ou, à l'inverse, que certaines opérations
n'ont pas été facturées.
Le Gouvernement considère que l'administration fiscale ne peut se contenter de
constater passivement de tels agissements. Par conséquent, il émet un avis
défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-57, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 63
nonies,
ainsi modifié.
(L'article 63
nonies
est adopté.)
Article additionnel avant l'article 63
decies
M. le président.
Par amendement n° II-40 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant
l'article 63
decies
, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 56 du livre des procédures
fiscales, après le mot : "directes" sont insérés les mots : "autres que lors du
premier établissement de la taxe professionnelle". »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement concerne la mise en oeuvre de la procédure de redressement
contradictoire en matière de taxe professionnelle. Il répond à un objectif
relativement simple : permettre l'établissement clair et précis de l'état de la
matière fiscale existant au titre de la taxe professionnelle, donc des
ressources que cet impôt procure aux collectivités locales.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Lorsque nous avons examiné cet amendement en
commission, nous avons exprimé une crainte : des incertitudes pouvaient
résulter des mesures proposées quant à la définition des bases de la taxe
professionnelle et risquaient de peser sur les budgets des collectivités
territoriales. En effet, cette information doit être transmise chaque année,
avant le 31 janvier, aux collectivités territoriales, pour qu'elles fixent leur
taux d'imposition.
Les remarques qui ont été formulées lors de la réunion de la commission, ont
été, me semble-t-il, prises en compte par les auteurs de l'amendement : ils ont
accepté de considérer que l'extension de la procédure contradictoire devrait
être limitée au premier établissement de la taxe professionnelle.
Compte tenu de cette rectification qui répond aux objections qui avaient été
formulées par certains d'entre nous en commission, il est possible d'émettre un
avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Il ne paraît pas souhaitable d'étendre la procédure de
redressement contradictoire à la taxe professionnelle.
Certes, une extension de la procédure permettrait d'améliorer l'information
des contribuables qui font l'objet d'un redressement. Toutefois - cela vient
d'être dit - une telle mesure me paraît lourde de conséquences pour les
collectivités locales.
Le recensement des bases de taxe professionnelle s'effectue aujourd'hui, vous
le savez, dans un calendrier très serré. Les services de l'administration
fiscale doivent communiquer les bases de la fiscalité locale aux collectivités
locales dès le 31 janvier pour leur permettre de voter les taux d'imposition.
Avec l'introduction de la procédure de redressement contradictoire, une telle
célérité ne serait plus possible. Il faudrait informer au préalable les
contribuables puis attendre leurs réponses. Le processus serait inévitablement
rallongé de plusieurs mois, sans compter les délais relatifs au traitement du
contentieux.
Sous le bénéfice de ces explications de caractère technique, mais importantes,
je souhaite le retrait de cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-40 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, avant l'article 63
decies
.
Article 63
decies
M. le président.
« Art. 63
decies
. - L'article L. 80 C du livre des procédures fiscales
est abrogé.
Par amendement n° II-58, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement tend à supprimer une disposition
fiscale introduite à l'Assemblée nationale, sur l'initiative de Jean-Pierre
Brard.
L'article L. 80 C du livre des procédures fiscales dispose : « L'intervention
près d'un contribuable, sur le territoire national, d'un agent d'une
administration fiscale d'un pays étranger - je parle notamment pour notre
collègue Emmanuel Hamel ...
M. Emmanuel Hamel.
Pourquoi me citez-vous lorsque vous parlez de l'étranger ? Je suis français
!
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... rend nuls et de nul effet le redressement ainsi
que toute poursuite fondée sur celui-ci. »
Or l'Assemblée nationale voudrait abroger cette disposition, donc permettre
aux agents des administrations fiscales étrangères d'interférer dans les
procédures, ce en arguant de la signature prochaine d'une convention du Conseil
de l'europe qui date d'une époque relativement ancienne puisque le sujet était
déjà évoqué en 1987-1988.
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, de deux choses l'une : soit la France
signe cette convention et les agents d'administrations fiscales étrangères
auront accès aux dossiers dans les conditions prévues par la convention ; soit
elle ne la signe pas et il n'y a aucune raison de revenir sur le
statu
quo.
Or, d'après ce qui m'a été dit, il n'existerait aucune décision
formelle sur l'intention de signer cette convention de l'OCDE. Il est donc
inopportun d'abroger l'article L. 80 C du livre des procédures fiscales.
Il convient, en outre, de rappeler que, si la convention était signée, la
question serait dès lors tranchée, puisqu'elle aurait une force supérieure aux
dispositions du code général des impôts. Dès lors, qu'il n'est pas opportun
d'abroger l'article L. 80 C du livre des procédures fiscales, il devient
particulièrement opportun de supprimer l'article 63
decies,
ce que nous
proposons par le présent amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, j'ai quelque peine à
comprendre les raisons qui vous conduisent à rétablir un texte qui avait été
voté en 1987 sur l'initiative d'un député appartenant au groupe du front
national.
L'objet du texte que l'Assemblée nationale a justement supprimé était de
manifester, par une décision politique, l'opposition de la France à la
disposition de la convention du Conseil de l'Europe qui prévoit des
interventions de fonctionnaires des administrations fiscales en territoire
étranger.
Comme vous le savez, monsieur le rapporteur général, la France adhérera à la
convention du Conseil de l'Europe...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Qu'attend-on ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
... et cette décision implique nécessairement
l'abrogation de cet article L. 80 C
(M. le rapporteur général fait un signe
de dénégation)
qui constitue un obstacle à la coopération internationale
pour lutter contre la fraude fiscale. Nos partenaires ne comprendraient pas le
maintien d'une telle disposition dans notre législation.
Je suis persuadé que, sur ce point, nous partageons la même analyse. Aussi, je
suis convaincu qu'il vous apparaîtra que cet amendement n'est pas
nécessaire.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je le regrette, mais
je ne suis pas d'accord avec vous, ni sur un plan technique, ni sur un plan
constitutionnel.
Si la convention a force légale en France, si elle a été signée, si notre pays
y a adhéré, toutes dispositions contraires de droit national deviendront
caduques. C'est donc exactement l'inverse de ce que vous nous dites. La
disposition actuelle du code général des impôts n'est pas un obstacle à la
signature de la convention, mais si la convention est signée, l'article en
question sera caduc car le traité international a une autorité supérieure à
celle des lois. Ainsi le prévoit la Constitution, en ce domaine comme dans les
autres.
Votre argument me paraît mal fondé tout comme l'initiative du député M.
Jean-Pierre Brard. Je ne comprends pas que l'on aille rechercher dans
l'histoire parlementaire qui est à l'origine de tel ou tel amendement. Nous
examinons des situations de droit et nous ne jugeons pas en fonction des
opinions des uns ou des autres !
MM. Gérard Braun et André Maman.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-58, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 63
decies
est supprimé.
Article additionnel après l'article 63
decies
M. le président.
Par amendement n° II-39, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article
63
decies
, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 228 du livre des
procédures fiscales, après le mot : "affaires" sont insérés les mots : "pour
lesquelles le montant total des droits rappelés est supérieur à 500 000 francs,
ainsi que celles". »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement porte sur les conditions de saisine de la commission des
infractions fiscales.
Une part importante des articles du projet de loi de finances pour 2000, que
nous venons d'examiner ou que nous allons examiner, concerne la lutte contre la
fraude fiscale, qui constitue, dans les faits, l'un des vecteurs essentiels du
déficit de l'Etat, et conditionne donc lourdement les choix fiscaux et
politiques que nous sommes amenés à faire.
Cet amendement présente quelque similitude avec un amendement que notre
collègue Jean-Pierre Brard avait déposé à la fin du débat de l'Assemblée
nationale sur ce projet de loi de finances.
Cela dit, il présente la particularité - car nous avons tenu compte du débat -
de ne porter
a priori,
en matière de saisine de la commission, que sur
les dossiers pour lesquels la fraude peut s'avérer particulièrement importante
et donc pénalisante pour le comptable public et l'ensemble de la
collectivité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Le délit général de fraude fiscale, défini à l'article
1741 du code général des impôts, comprend, outre l'élément matériel, un élément
intentionnel, dont la preuve appartient à la partie poursuivante. La
proposition tendant à rendre obligatoire la saisine de la commission des
infractions fiscales au-delà d'un certain seuil de rappel fait totalement
abstraction de la démonstration de l'élément intentionnel. Or cette exigence
est incontournable. Devant la juridiction pénale, la charge de la preuve
incombe toujours à l'accusation, c'est-à-dire au ministère public et à
l'administration partie civile. Il est nécessaire que l'auteur de l'infraction
ait agi en connaissance de cause, c'est-à-dire qu'il ait eu conscience
d'accomplir un acte illicite et que son comportement ait été animé par une
volonté de fraude. Des rappels de droits élevés n'impliquent pas nécessairement
une intention frauduleuse avérée, le redressement pouvant être d'ordre purement
technique sans que la bonne foi du contribuable soit remise en cause.
Sous le bénéfice de ces explications, je demande à Mme Beaudeau de bien
vouloir retirer cet amendement, sinon le Gouvernement émettra un avis
défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-39.
M. Yann Gaillard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Je vais bien sûr voter contre cet amendement.
Si j'ai demandé la parole, c'est parce que j'ai été brusquement tiré de ma
torpeur par la présentation d'une telle disposition. D'habitude, notre collègue
Mme Beaudeau est mieux inspirée. Il est véritablement incroyable d'accroître
ainsi la pénalisation de notre société et d'ôter au ministre son pouvoir de
choix et d'initiative. D'ailleurs, M. le secrétaire d'Etat aurait dû être plus
éloquent pour combattre cet amendement, qui, à l'évidence, est liberticide.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-39, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 63
undecies
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° II-42, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article
63
undecies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa de l'article 265
septies
du code des
douanes, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«
c)
De transports publics en commun de voyageurs. »
« II. - Le dispositif prévu au I s'applique aux acquisitions de gazole
effectuées à compter du 11 janvier 2000.
« III. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts sont relevés à due concurrence. »
Par amendement n° II-68, MM. Descours, Bernard, Cazalet, Gerbaud et Haenel
proposent d'insérer, après l'article 63
undecies
, un article additionnel
ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré dans le code des douanes un article 265
octies
ainsi rédigé :
«
Art. 265
octies. - Les exploitants de réseaux de transport public en
commun de voyageurs peuvent obtenir, sur demande de leur part, le remboursement
d'une fraction de la taxe intérieure de consommation sur le gazole.
« Ce remboursement est égal à la différence entre la taxe intérieure de
consommation sur le gazole exigible au cours de l'année et celle calculée sur
la base d'un taux spécifique qui est fixé, pour la période du 11 janvier 2000
au 10 janvier 2001, à 246,56 francs par hectolitre. Pour les périodes
ultérieures, ce taux spécifique est relevé, le 11 janvier de chaque année, du
produit du dernier taux de la taxe intérieure de consommation appliqué au
supercarburant sans plomb au cours de la période précédente par le taux
prévisionnel d'évolution des prix à la consommation des ménages de l'année
précédente associé au projet de loi de finances de l'année du remboursement.
« Le remboursement est plafonné à 40 000 litres de gazole par an et par
véhicule.
« La période couverte par le remboursement s'entend de la période comprise
entre le 11 janvier d'une année et le 10 janvier de l'année suivante.
« Les exploitants de réseaux de transport public en commun de voyageurs
concernés peuvent adresser leur demande de remboursement au service des douanes
à partir du 12 janvier de l'année suivant la période au titre de laquelle le
remboursement est sollicité et au plus tard dans les trois ans qui suivent à
compter de cette date.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.
« II. - Le dispositif prévu au I s'applique aux acquisitions de gazole
effectuées à compter du 11 janvier 2000.
« III. - La perte de recettes résultant de l'application des I et II ci-dessus
est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° II-42.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement porte sur une question qui a, en partie, déjà été traitée lors
de la discussion de la première partie du projet de loi de finances mais qui
méritait et mérite encore, de notre point de vue, d'être examinée avec le plus
grand intérêt.
Dans le cadre de la loi de finances pour 1999, le principe d'un alourdissement
de la taxation du gazole a été retenu et a donc commencé à être mis en
oeuvre.
Toujours est-il que l'application de ce principe a été corrigée pour ce qui
concerne les activités de transport routier de marchandises, soumises, selon la
définition même fournie par le document Evaluation des voies et moyens, à des
contraintes de compétitivité à l'échelon européen.
Je me permettrai de faire observer que le coût fiscal de la mesure
d'accompagnement ainsi votée est estimé à 320 millions de francs pour
l'exercice 2000, ce qui relativise, de fait, la proposition contenue dans cet
amendement s'agissant de son incidence financière.
Ce qui nous a cependant guidé dans notre démarche, c'est de permettre aux
exploitants de services de transport public de voyageurs de bénéficier d'un
allégement de leurs contraintes de fonctionnement, contraintes qui se
répercutent sur l'usager, à travers le relèvement des tarifs ou de la fiscalité
permettant le financement de tels services.
D'ailleurs, cette possibilité nous est offerte par les règles communautaires
en vigueur. Il est regrettable que, en la matière, notre pays ait parfois un
peu de peine à se saisir d'opportunités positives issues du droit communautaire
et que nous nous contentions trop souvent d'accepter des contraintes bien moins
agréables.
Sur le fond, on peut bien sûr nous interroger sur le choix que nous avons
opéré alors que le Gouvernement fait un effort particulier pour l'émergence
d'une fiscalité environnementale favorisant, en particulier, le recours aux
sources d'énergie les moins polluantes.
Le problème, c'est que l'incitation à l'utilisation des carburants comme le
GNV, le gaz naturel véhicule, ou le GPL, le gaz de pétrole liquéfié, nécessite
aussi que les exploitants de services publics de transports de voyageurs aient
les moyens d'autofinancer un investissement nouveau en matériels utilisant ces
carburants. C'est aussi le sens de notre proposition.
De surcroît, même si l'on doit se demander s'il est effectivement prouvé que
le gazole est plus polluant que les autres carburants pétroliers, vous
comprendrez qu'il nous paraisse également nécessaire de favoriser, autant que
possible, le recours aux transports en commun publics par vos compatriotes.
La circulation automobile doit être maîtrisée, notamment dans les plus grandes
agglomérations, et le développement des transports collectifs est un outil
indispensable pour cette maîtrise.
Tel est l'objet de l'amendement que je vous invite, mes chers collègues, à
adopter.
M. le président.
L'amendement n° II-68 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-42 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Les amendements n°s II-42 et II-68 sont similaires :
le premier est présenté par Mme Beaudeau et les membres de son groupe ; le
second est proposé par M. Charles Descours et plusieurs de ses collègues. Les
uns et les autres souhaitent que les entreprises de transports publics en
commun bénéficient, comme les transporteurs routiers, de la possibilité
d'obtenir le remboursement de la TIPP sur le gazole.
En ce qui concerne les transporteurs routiers, c'est le projet de loi de
finances pour 1999 qui a permis ce remboursement. Vous vous en souvenez, mes
chers collègues, celui-ci a résulté d'une dérogation acceptée par la Commission
européenne aux dispositions de l'article 8-4 de la directive communautaire de
1992, dite directive structures, la directive sur les huiles minérales.
Il semble tout à fait logique et même conforme à l'esprit de la mesure adoptée
l'année dernière de faire bénéficier les entreprises de transport public en
commun de voyageurs de cette même possibilité de remboursement. Mais pour
obtenir cette extension, encore faut-il, monsieur le secrétaire d'Etat, que le
Gouvernement sollicite la même dérogation de la part de la Commission
européenne. Cela nécessite un encouragement de la part du Parlement et, en
l'occurrence, du Sénat. Cet encouragement, nous vous l'apporterons en votant
l'amendement n° II-42.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
L'année dernière, en instaurant un remboursement
partiel de TIPP pour les transporteurs routiers de marchandises, le
Gouvernement a estimé que cette mesure devait être accordée aux professionnels
de la route les plus exposés à la concurrence internationale du fait de leur
activité et de la libéralisation du cabotage intervenue le 1er juillet 1998, et
qui réalisent en très grande majorité des transports interurbains.
Vous proposez d'étendre ce dispositif aux transports publics de voyageurs.
Comme vous l'avez souligné, j'observe tout d'abord qu'une telle mesure, pour
être conforme au droit communautaire, doit nécessairement être autorisée sur le
fondement de l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81 du 19 octobre
1992 relative à l'harmonisation des droits d'accises sur les huiles minérales.
Cette dérogation ne pouvant être obtenue qu'après un délai de plusieurs mois,
il n'est pas envisageable d'adopter un remboursement de ce type dans le cadre
du présent projet de loi de finances.
Par ailleurs, comme vous le savez, des mesures ont déjà été prises afin de
développer l'utilisation des carburants propres par des exploitants de
transports en commun de voyageurs, comme le remboursement total de la TIPP sur
leur consommation de GPL carburant et de gaz naturel véhicule. Celui-ci s'élève
à 40 000 litres par an et par véhicule, ce qui couvre la totalité de la
consommation annuelle de la plupart des autobus et des autocars.
Des réductions de taux de la TIPP ont été votées l'an passé pour les émulsions
d'eau dans du gazole et sont encore accrues cette année, puisque le
Gouvernement a accepté, en première lecture, un amendement en ce sens. Il
s'agit, là encore, d'une mesure favorable aux exploitants de transports en
commun. Ces émulsions sont actuellement expérimentées à grande échelle à Paris
et dans de nombreuses villes de province.
Si l'on accordait aujourd'hui un nouvel avantage fiscal pour le gazole
consommé en milieu urbain, cette mesure irait à l'encontre de la politique
environnementale du Gouvernement. Je veux réaffirmer la volonté du Gouvernement
de poursuivre ses efforts en faveur d'une généralisation des carburants propres
dans les transports publics urbains.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-42, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, avant l'article 63
undecies
.
Article 63
undecies
M. le président.
« Art. 63
undecies
. - Il est inséré, dans le code des douanes, un
article 266
quinquies
A ainsi rédigé :
«
Art. 266
quinquies
A
. _ Les livraisons de fioul lourd d'une
teneur en soufre inférieure ou égale à 2 %, de gaz naturel et de gaz de
raffinerie destinés à être utilisés dans des installations de cogénération,
pour la production combinée de chaleur et d'électricité ou de chaleur et
d'énergie mécanique, sont exonérées des taxes intérieures de consommation
prévues aux articles 265 et 266
quinquies
pendant une durée de cinq
années à compter de la mise en service des installations.
« Cette exonération s'applique aux installations mises en service, au plus
tard, le 31 décembre 2005.
« La nature et la puissance minimale de ces installations ainsi que le rapport
entre les deux énergies produites sont fixés par décret en Conseil d'Etat. »
- (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 63
undecies
M. le président.
Par amendement n° II-30, MM. Vasselle et Delong proposent d'insérer, après
l'article 63
undecies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1 du I de l'article 266
sexies
du code des douanes est ainsi
rédigé :
« 1. Tout exploitant d'une installation de stockage ou d'incinération de
déchets ménagers et assimilés ou tout exploitant d'une installation
d'élimination de déchets industriels spéciaux par incinération, coincinération,
stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisés
pour les déchets que l'entreprise produit ; »
« II. - Les dispositions du I sont applicables au 1er janvier 2001. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° II-80, M. Trucy et les membres du groupe des Républicains et
Indépendants proposent d'insérer, après l'article 63
undecies,
un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article L. 1615-4 du code général des collectivités
territoriales, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
«
Art... -
Par dérogation, les collectivités territoriales et leurs
groupements bénéficient des attributions du fonds de compensation pour la taxe
sur la valeur ajoutée au titre des dépenses d'équipement relatives au
traitement des déchets ménagers dont les opérations sont partiellement
assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, à hauteur de la fraction de taxe
sur la valeur ajoutée ayant grevé l'investissement qui n'a pas été déduite
fiscalement. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par la majoration, à
due concurrence, des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code
général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je le reprends, monsieur le président.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° II-80 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit ici d'un sujet qui revient périodiquement
dans nos débats, à savoir l'éligibilité au fonds de compensation pour la TVA,
le FCTVA, des investissements relatifs au traitement des déchets ménagers
lorsque la TVA grevant ces investissements n'a pas été déduite fiscalement.
Sont visés en particulier les centres de valorisation énergétique, en d'autres
termes les usines d'incinération, dont une partie de l'activité peut conduire à
réaliser des recettes résultant, par exemple, de la vente de chaleur à un
réseau de chauffage urbain ou à des installations industrielles, recettes qui
sont accessoires par rapport à l'activité essentielle de l'outil.
De nombreuses collectivités, notamment des syndicats intercommunaux, qui sont
maîtres d'ouvrage de telles installations se heurtent au problème de
l'insécurité fiscale dans laquelle elles se trouvent.
L'éligibilité au FCTVA de tous les équipements de valorisation, même lorsque
les ventes de services ou d'énergie représentent une certaine proportion du
volume d'activité total de ces outils industriels, paraît donc constituer une
mesure importante pour encourager les collectivités territoriales à mettre en
oeuvre des investissements souvent très ambitieux et très lourds
financièrement, rendus nécessaires par l'obligation où elles se trouvent de
supprimer toutes les décharges à l'horizon 2002 et de mener à bien de vastes
projets de traitement des déchets ménagers.
C'est, je pense, dans cet esprit que nos collègues du groupe des Républicains
et Indépendants ont déposé cet amendement, que je me suis permis de
reprendre.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Les textes relatifs au FCTVA excluent de l'assiette de
celui-ci les dépenses réelles liées à des équipements utilisés concurremment
pour la réalisation d'opérations commerciales et d'opérations relevant du
service public.
Par dérogation à la règle générale de non-éligibilité au FCTVA, il est
cependant déjà prévu que la taxe non déductible par la voie fiscale peut faire,
sous certaines conditions, l'objet d'un remboursement, grâce à une attribution
du bénéfice du FCTVA dans la limite de la fraction relative aux opérations de
service public.
Toutefois, cette dérogation prévoit que l'usine de traitement ne doit être
utilisée qu'à titre accessoire pour les besoins de l'activité soumise à la TVA.
Aller au-délà de cette dérogation remettrait en cause les principes mêmes du
fonctionnement du FCTVA.
Je rappelle par ailleurs que, si la collectivité locale décide de financer ce
service au moyen de la redevance pour l'enlèvement des ordures ménagères, elle
peut opter pour l'assujettissement à la TVA, ce qui permet d'éviter toute
rémanence de TVA pour les dépenses d'investissement et de fonctionnement.
Enfin, le Gouvernement, je voudrais le rappeler, a déjà consenti, dans
l'optique de la loi de finances de 1999, un effort financier important,
s'agissant des dépenses relatives aux prestations de collecte, de tri et de
traitement des déchets des ménages assumées par les collectivités locales,
puisque l'article 31 prévoit que ces dépenses peuvent être soumises au taux
réduit de TVA de 5,5 %.
Je souhaite donc le retrait de cet amendement ; dans le cas contraire, j'y
serai défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-80 rectifié, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 63
undecies.
Articles 63
duodecies
à 63
quaterdecies
M. le président.
« Art. 63
duodecies
. - L'article 66 de la loi de finances pour 1976 (n°
75-1278 du 30 décembre 1975) est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - Le Gouvernement publie chaque année dans le fascicule "Evaluation des
voies et moyens" annexé au projet de loi de finances les éléments permettant
d'établir le rapport entre le montant des droits rappelés lors de l'exercice du
contrôle fiscal, celui des sommes effectivement mises en recouvrement et celui
des sommes effectivement recouvrées.
« Le rapport entre les droits rappelés une année donnée et le montant des
recouvrements relatifs à ces rappels constatés année après année est également
précisé. »
- (Adopté.)
« Art. 63
terdecies
. - Au premier alinéa de l'article 40
bis
de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique de l'Etat, de l'article 60
ter
de la
loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique territoriale et de l'article 47-1 de la loi n° 86-33 du 9
janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
hospitalière, les mots : "cinq ans" sont remplacés par les mots : "six ans".
»
- (Adopté.)
« Art. 63
quaterdecies
. - I. _ Au premier alinéa de l'article 12
de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction
publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, les mots : "pour une période
allant du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots :
"pour une période allant du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000". »
« II. - Aux articles 14, 31 et 42 de la même loi, l'année : "1999" est
remplacée par l'année : "2000". »
- (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 63
quaterdecies
M. le président.
Par amendement n° II-73, M. Le Grand propose d'insérer, après l'article 63
quaterdecies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 211-8 du code des juridictions financières, il est inséré
un article additionnel ainsi rédigé :
«
Art... -
La chambre régionale des comptes examine, dans son ressort,
les demandes d'avis qui peuvent lui être transmises par les maires, les
présidents de conseil général et les présidents de conseil régional sur une
question de droit relative aux textes applicables aux collectivités locales
dans les domaines financier, budgétaire ou comptable.
« Elle formule ses observations dans un délai d'un mois à compter de sa
saisine. L'avis de la chambre régionale des comptes est transmis à la
collectivité territoriale et au représentant de l'Etat.
« L'assemblée délibérante est informée de l'avis de la chambre régionale des
comptes dès sa plus prochaine réunion ».
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° II-74, M. Ostermann et Mme Olin proposent d'insérer, après
l'article 63
quaterdecies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 293 du code des pensions militaires d'invalidité et des
victimes de guerre est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les dispositions de l'article L. 288 sont applicables aux étrangers résidant
en France pendant la Deuxième Guerre mondiale et internés ou déportés dans les
conditions prévues par cet article. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je le reprends, monsieur le président.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° II-74 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
M. Ostermann et Mme Olin ont soulevé, par cet
amendement, un réel problème d'équité.
En effet, l'article L. 293 du code des pensions militaires d'invalidité et des
victimes de guerre accorde le statut d'interné politique aux étrangers arrivés
en France avant le début de la Seconde Guerre mondiale, c'est-à-dire avant la
déclaration de guerre, le 1er septembre 1939, lorsque ces personnes ont été
ensuite internées par l'ennemi ou par l'autorité de fait, dite alors «
gouvernement de l'Etat français ».
Pour des raisons qu'il est difficile de comprendre, des étrangers s'étant
réfugiés en France entre le 1er septembre 1939 et l'invasion de 1940 ne peuvent
pas bénéficier de ces dispositions. J'avoue que l'on ne cerne pas très bien les
motifs de cette discrimination, car il a pu notamment s'agir de personnes
venant de pays de l'Europe centrale ou orientale, de Belgique ou des Pays-Bas
qui, étant donné l'évolution du conflit, se sont réfugiées en France. Certaines
d'entre elles ont pu ensuite être appréhendées pendant la période de
l'Occupation et internées.
J'ajoute que la situation évoquée ne concerne très certainement aujourd'hui
que quelques personnes d'un âge, hélas, avancé, puisque plus de cinquante
années se sont écoulées depuis les événements en question, et le coût du
dispositif devrait donc être insignifiant. Compte tenu des malheurs que les
anciens internés ont pu connaître dans leur existence, d'autant qu'ils ont
parfois affronté des événements encore plus graves et plus douloureux que ceux
que j'ai évoqués et que tous n'ont pas survécu à la Seconde Guerre mondiale, ce
serait, pour ces quelques personnes, une mesure de reconnaissance et de
réparation extrêmement précieuse.
Je connais personnellement des cas d'anciens internés politiques qui, dans
l'état actuel du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de
guerre, ne peuvent pas se faire reconnaître cette qualification. Il serait donc
très souhaitable qu'un assouplissement intervienne et que les dispositions de
l'article L. 288 dudit code soient applicables aux étrangers ayant résidé en
France pendant la Seconde Guerre mondiale et ayant été internés ou déportés
dans les conditions prévues par cet article.
C'est donc avec conviction et même avec émotion que je suis amené à défendre
l'amendement qui avait été déposé par nos collègues.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien ! Emotion partagée !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
La loi du 9 septembre 1948 a posé une condition de
résidence sur le territoire français avant le 1er septembre 1939 pour les
ressortissants étrangers déportés politiques ou internés politiques, condition
que l'amendement défendu par le rapporteur général vise donc à lever,
s'agissant des internés politiques.
Certes, les personnes concernées ne sont pas nombreuses et elles sont
incontestablement âgées, mais j'ai le regret de devoir dire au Sénat que
l'adoption de cet amendement créerait une inégalité, qui serait difficile à
justifier au regard de l'intensité des préjudices subis, entre, d'une part, les
déportés politiques ressortissants étrangers, qui devront toujours justifier de
leur présence en France avant le 1er septembre 1939, et, d'autre part, les
internés politiques ressortissants étrangers, pour lesquels cette condition ne
s'appliquerait plus.
En outre, les législateurs des pays européens ont mis en place un dispositif
de réparation en faveur de leurs propres ressortissants victimes du nazisme,
déportés et internés.
A ce titre, il convient de préciser que la France a signé, dès les années
soixante, des conventions bilatérales de réciprocité avec certains pays comme
la Belgique ou les Pays-Bas, en vue de permettre l'instauration de mécanismes
de réparation des préjudices subis par les victimes du nazisme.
Dès lors, ces ressortissants étrangers ont déjà bénéficié de réparations. Une
seconde indemnisation ne s'impose pas, d'autant que cela les placerait dans une
position indemnitaire plus favorable que les ressortissants français ayant subi
le même préjudice.
Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement demande le retrait ou, à
défaut, le rejet de cet amendement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général,
et
M. Emmanuel Hamel.
Consternant !
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit bien entendu, vous l'aurez compris, d'une
question d'équité et d'égalité de traitement, même si j'éprouve quelque regret
de devoir apporter une telle réponse.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, au-delà des
considérations administratives, peut-être faut-il écouter un peu son coeur !
Je vais vous exposer un cas qui m'a sensibilisé à la question qui nous
occupe.
C'est celui d'un jeune israélite d'origine polonaise, dont les parents
habitaient la région d'Anvers. Cette famille, devant l'avancée des troupes
allemandes, fut contrainte de passer en France après le 1er septembre 1939.
Quelque temps après, toute la famille fut internée au camp de Rivesaltes. On se
souvient de ces camps d'internés où séjournaient de nombreux étrangers.
Malheureusement, la plupart des membres de cette famille furent ensuite
déportés dans les camps de la mort, et aucun n'en revint. Il n'y eut qu'un seul
survivant, ce jeune homme qui, après s'être évadé du camp d'internement,
rejoignit un réseau de résistance. Du sud-ouest de la France, il put passer en
Espagne et émigrer enfin dans ce qui n'était pas encore l'Etat d'Israël.
Cet homme a fait sa vie, et a d'ailleurs réalisé des choses assez remarquables
grâce à son énergie, à son esprit d'entreprise et à son sens des autres.
Mais aujourd'hui, lorsqu'il considère sa situation, il constate qu'il ne
bénéficie à la vérité de rien. Il ne demande d'ailleurs pas d'avantage
pécuniaire, ce qu'il demande c'est que l'on reconnaisse que les membres de sa
famille, juifs et ressortissants étrangers, ont été enfermés dans un camp
d'internement, avec le concours naturellement des autorités de fait que je
citais tout à l'heure. Il ne demande rien d'autre ! Il veut simplement que
cette situation soit reconnue dans le code français des pensions militaires
d'invalidité et des victimes de guerre, comme ce serait le cas si les
intéressés étaient arrivés en France avant le 1er septembre 1939.
Vous me parlez d'égalité de traitement, mais j'avoue que je ne comprends pas
cette réponse administrative. En effet, les internés politiques qui sont
arrivés dans notre pays avant le 1er septembre 1939 sont reconnus sans
problème, même s'ils ne bénéficient d'ailleurs pas de grand-chose. Ce n'est pas
un pactole, c'est même très modeste, mais ils bénéficient au moins d'une
reconnaissance et d'une petite, toute petite pension. Mais ceux qui sont
arrivés après le 1er septembre 1939 ne bénéficient d'aucune reconnaissance et
se trouvent devant un vide juridique ! Est-ce justifié ?
Je puis vous assurer, pour avoir décortiqué le cas que j'ai exposé, qu'il
n'existe aucune convention internationale ni avec la Belgique ni avec les
Pays-Bas permettant de traiter des situations de cette nature.
Alors, franchement, monsieur le secrétaire d'Etat, aujourd'hui où il ne reste
pratiquement plus de survivants, pourquoi faire de pareilles réponses
administratives ? Certes, il est bien tard, cinquante-cinq ans après les faits,
pour se pencher sur ce problème, et il aurait fallu y être attentif plus tôt.
Mais il n'est pas trop tard pour réparer. Même s'il ne reste qu'une seule
personne qui se pense en situation d'injustice au regard de cette histoire
terrible dont notre pays garde la mémoire, nous devons savoir traiter son
cas.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère qu'après avoir entendu l'explication
que je voulais vous donner, vous accepterez de défendre ce point de vue au sein
du Gouvernement, car vraiment cette disposition ne coûtera rien à l'Etat, et ce
sera une bonne action !
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. Emmanuel Hamel.
Vous avez écouté, monsieur le secrétaire d'Etat ?
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Oui, j'ai écouté, monsieur Hamel, et je tiens à
répondre à M. le rapporteur général que je ne peux pas demeurer insensible aux
propos qu'il a tenus, d'autant que j'ai souvent été confronté à de telles
situations en tant qu'élu local, et que j'ai longtemps été fonctionnaire au
ministère des anciens combattants. Il ne faut donc pas me dire à moi que je ne
connais pas le sujet ou que j'y serais insensible !
J'ai simplement dit tout à l'heure que la philosophie du code des pensions
militaires d'invalidité et des victimes de guerre répond à l'état d'esprit
général des anciens combattants, qui sont animés par un souci d'égalité de
traitement et d'équité dans le droit à réparation. La France s'est dotée d'un
droit à réparation - nous sommes d'ailleurs l'un des seuls pays à l'avoir fait
-, mais le droit en cause répond moins à des considérations pécuniaires qu'au
besoin de reconnaissance de la patrie et de l'Histoire. C'est donc une question
extrêmement sensible chez les anciens combattants.
Voilà ce que j'ai voulu dire tout à l'heure. Il ne s'agissait pas pour moi de
donner le point de vue d'une administration !
Cela dit, j'examinerai plus en détail les cas qui restent à traiter compte
tenu de leur caractère effectivement exceptionnel, tout en ayant à l'esprit que
les déportés et les internés politiques, qui sont aussi concernés par cette
question, ont bien entendu leur mot à dire dans ce débat. Nous en reparlerons
donc.
Quoi qu'il en soit, je tenais à vous dire que je n'accepte pas d'être accusé
de manquer de coeur sur ce sujet.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-74 rectifié, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. Emmanuel Hamel.
A l'unanimité !
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 63
quaterdecies
.
Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des articles de la deuxième
partie du projet de loi de finances pour 2000.
Demande de seconde délibération
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, en application de l'article 43,
alinéa 4, du règlement du Sénat, le Gouvernement, avec l'aval de la commission
des finances, demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des
articles 38 et état B, 39 et état C, 46 et, pour coordination, de l'article 36
et état A.
M. le président.
Le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des
articles 38 et état B, 39 et état C, 46 et, pour coordination, de l'article 36
et état A.
Quel est l'avis de la commission des finances sur cette demande de seconde
délibération ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Favorable.
M. le président.
Y a-t-il un orateur contre ?...
Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, acceptée par la
commission.
(La seconde délibération est ordonnée.)
M. le président.
Cette seconde délibération aura lieu au début de la séance de demain.
J'informe le Sénat que, compte tenu de l'avancement de nos travaux et après
accord entre le Gouvernement et la commission des finances, la séance de
demain, mardi 14 décembre, débutera à seize heures au lieu de quinze heures.
5
DÉPÔT D'UN AVIS
M. le président.
J'ai reçu de M. René Trégouët un avis présenté au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la
proposition de loi de M. Jean Arthuis et des membres du groupe de l'Union
centriste relative au développement du partenariat social (n° 87,
1999-2000).
L'avis sera imprimé sous le n° 129 et distribué.
6
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, fixée au
mardi 14 décembre 1999, à seize heures :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 88 et 89, 1999-2000).
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du
contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Seconde délibération sur les articles 38 (et état B), 39 (et état C), 46 et,
pour coordination, 36 (et état A).
Explications de vote sur l'ensemble.
Vote sur l'ensemble (scrutin public à la tribune de droit, en application de
l'article 60
bis,
troisième alinéa, du règlement.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle
lecture, relatif à la réduction négociée du temps de travail (n° 115,
1999-2000).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 14 décembre 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 14 décembre 1999, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jean
Faure visant à permettre aux communes d'exiger des intéressés le remboursement
des frais de secours qu'elles ont engagés à l'occasion d'accidents consécutifs
à la pratique d'une activité sportive et de loisir (n° 31, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à
dix-sept heures.
Eventuellement, conclusions de la commission des lois sur la proposition de
loi de M. Nicolas About tendant à renforcer le dispositif pénal à l'encontre
des associations ou groupements à caractère sectaire qui constituent, par leurs
agissements délictueux, un trouble à l'ordre public ou un péril majeur pour la
personne humaine ou la sûreté de l'Etat (n° 79, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à
dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant les
conditions d'acquisition de la nationalité française par les militaires
étrangers servant dans l'armée française (n° 104, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 118, 1999-2000) sur
:
« - la proposition de loi de M. Jean Chérioux et de plusieurs de ses collègues
tendant à favoriser le développement de l'actionnariat salarié (n° 52,
1999-2000) ;
« - la proposition de loi de M. Jean Arthuis et des membres du groupe de
l'Union centriste relative au développement du partenariat social (n° 87,
1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON