Séance du 7 décembre 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Charges communes et comptes spéciaux du Trésor (p. 2 )
MM. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les charges communes ; Paul Loridant, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les comptes spéciaux du Trésor ; Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Yves Fréville, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
CHARGES COMMUNES (p.
3
)
Crédits des titres Ier à IV. - Adoption (p.
4
)
Article 67. - Adoption (p.
5
)
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR (p.
6
)
Article 44 (p.
7
)
Amendement n° II-3 de la commission. - MM. Paul Loridant, rapporteur spécial ;
le secrétaire d'Etat, Jean-Philippe Lachenaud. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 44 bis (p. 8 )
Amendement n° II-4 de la commission. - MM. Paul Loridant, rapporteur spécial ;
le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles 45 à 50. - Adoption (p.
9
)
Budget annexe des monnaies et médailles
(p.
10
)
Mme Maryse Bergé-Lavigne, rapporteur spécial de la commission de finances ; M.
Christian Sautter, ministe de l'économie, des finances et de l'industrie.
Adoption des crédits figurant aux articles 42 et 43.
Economie, finances et industrie
I. - ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
(ET CONSOMMATION) (p.
11
)
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mmes Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour la consommation et la concurrence ; Marie-Claude Beaudeau, MM. Yann Gaillard, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Crédits des titre III à VI. - Vote réservé (p.
12
)
Article 68. - Adoption (p.
13
)
Suspension et reprise de la séance
(p.
14
)
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
II. - INDUSTRIE (ET POSTE) (p.
15
)
MM. Jean Clouet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Francis
Grignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour
l'industrie ; Jean Besson, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques, pour l'énergie ; Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la
commission des affaires économiques, pour les technologies de l'information et
La Poste ; Aymeri de Montesquiou, Pierre-Yvon Trémel, Mme Anne Heinis, M.
Bernard Murat.
3.
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire chinoise
(p.
16
).
4.
Loi de finances pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
17
).
Economie, finances et industrie
(suite)
II. - INDUSTRIE (ET POSTE)
(suite)
(p.
18
)
MM. Pierre Lefebvre, Pierre Laffitte, Henri Weber, Michel Teston.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Crédits des titres III à V. - Vote réservé (p.
19
)
Crédits du titre VI (p.
20
)
MM. Gérard Delfau, le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Vote des crédits réservé.
5.
Election à l'Assemblée nationale d'un sénateur
(p.
21
).
6.
Loi de finances pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
22
).
Economie, finances et industrie
(suite)
III. - PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT (p.
23
)
MM. Jean-Jacques Robert, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; René Ballayer, rapporteur spécial de la commission des finances ; Bernard Dussaut, Pierre Hérisson, Serge Mathieu, Joseph Ostermann, Mme Odette Terrade, MM. Léon Fatous, Jean-Pierre Raffarin, Christian Demuynck, Aymeri de Montesquiou, Michel Bécot.
Suspension et reprise de la séance (p. 24 )
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises,
au commerce et à l'artisanat.
Vote des crédits réservé.
Article 69 (p. 25 )
Amendement n° II-8 de la commission des finances. - M. le rapporteur spécial,
Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 69 bis (p. 26 )
Amendement n° II-15 rectifié
bis
de M. Ostermann. - MM. André Bohl, le
rapporteur spécial, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 69
ter
et 69
quater.
- Adoption (p.
27
)
Commerce extérieur
(p.
28
)
MM. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances ; Michel
Souplet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; André
Ferrand, Hubert Durand-Chastel, Gérard Cornu, Mme Odette Terrade, MM. Aymeri de
Montesquiou, Bernard Dussaut.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
Rejet des crédits.
7.
Textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
29
).
8.
Transmission d'un projet de loi
(p.
30
).
9.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
31
).
10.
Retrait d'une proposition de loi
(p.
32
).
11.
Dépôt de rapports
(p.
33
).
12.
Ordre du jour
(p.
34
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures trente.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000 (n° 88, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 89 (1999-2000).]
Charges communes et comptes spéciaux du Trésor
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.
La parole est à M. de Rocca Serra, rapporteur spécial.
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation, pour les charges communes.
Monsieur
le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget des charges
communes pour 2000, que j'ai l'honneur de vous présenter, s'élève à 701,12
milliards de francs.
Ces crédits, nets des dégrèvements et remboursements, qui s'élèvent à 330,73
milliards de francs, et des recettes d'ordre, soit 17,2 milliards de francs,
s'établissent à 353,19 milliards de francs, soit une diminution de 1,3 % par
rapport à 1999, à structure constante.
Le budget des charges communes subit traditionnellement d'importants
transferts de crédits. Le projet de budget pour l'an 2000 n'échappe pas à la
règle.
Les crédits précédemment inscrits sur le budget des charges communes, mais
transférés en 2000 vers d'autres sections budgétaires, s'élèvent à 13,53
milliards de francs. Il s'agit, pour l'essentiel, de 5 milliards de francs au
titre de diverses mesures économiques, de plus de 3 milliards de dépenses en
capital, de 1,6 milliard au titre de la dotation au fonds spécial d'invalidité
et de plus de 1 milliard au titre de cotisations patronales d'assurance
maladie.
En sens inverse, 10,57 milliards de francs sont inscrits pour la première fois
au budget des charges communes : 5 milliards de francs au titre des dépenses de
pension de divers établissements publics, près de 4 milliards pour la
participation de l'Etat au financement des prestations sociales agricoles et
1,6 milliard au titre de la participation de l'Etat au financement des
retraites de l'Imprimerie nationale et des mines.
Par ailleurs, l'article 67 du projet de loi de finances pour 2000 est
rattaché, pour son examen, au budget des charges communes.
Il tend à préciser les modalités de prise en charge de l'indexation des
obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation. L'article 19 de la
loi du 2 juillet 1998 a en effet autorisé l'Etat à émettre des obligations
indexées sur l'inflation. L'article 67 prévoit que la charge budgétaire
correspondant au coût représentatif de l'indexationde ces obligations est
inscrite chaque année en loi de finances. Le provisionnement de cette charge
budgétaire pour 2000 s'établit à 895,535 millions de francs, inscrits au
chapitre 11-05 du budget des charges communes.
Je souhaite maintenant vous faire part de quatre observations que m'inspirent
les dotations allouées au budget des charges communes pour 2000.
Première observation : le projet de budget des charges communes, en dépit de
sa nature particulière, fait l'objet d'un effort appréciable de
clarification.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Très bien !
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra,
rapporteur spécial.
Le budget des charges communes présente un caractère
paradoxal : il est relativement méconnu, alors qu'il représente près de la
moitié du budget général, tout en abordant des thèmes très variés.
Il présente également un caractère hétéroclite. En effet, il comprend les
crédits qui sont destinés à l'ensemble des services de l'Etat, ou à plusieurs
d'entre eux, et qui ne peuvent être inscrits dans le budget d'un ministère
particulier.
Toutefois, il faut souligner que les modifications de structure opérées par le
projet de loi de finances pour 2000 permettent de clarifier la présentation du
projet de budget, le rendant plus lisible. Le budget des charges communes passe
ainsi de 81 chapitres budgétaires en 1999 à 37 chapitres en 2000, à la suite de
la suppression de 44 chapitres.
Deuxième observation : les crédits correspondent essentiellement à des
dépenses de constatation.
La grande majorité des dépenses inscrites au budget des charges communes sont
des dépenses de constatation, résultant de la prise en compte de circonstances
extérieures, indépendantes de l'action du Gouvernement.
S'agissant de la dette de l'Etat, qui s'établissait à 4 022 milliards de
francs au 31 décembre 1998, soit 47 % du produit intérieur brut, seule sa
charge budgétaire apparaît dans le budget de l'Etat.
La charge nette de la dette passe ainsi de 237,25 milliards de francs en 1999
à 234,7 milliards de francs en 2000, soit une baisse de 1,07 % représentant 2,5
milliards de francs en comparant les lois de finances initiales, ce dont il
convient de se réjouir.
S'il faut se féliciter de ce que, en effet, l'Etat dégage un excédent primaire
pour la première fois depuis 1990 permettant de diminuer la charge de la dette
en 2000, ce résultat tient en partie au bas niveau des taux d'intérêt. Par
ailleurs, comme l'a exposé M. le rapporteur général, la réduction du déficit
budgétaire est bien insuffisante, eu égard à la conjoncture économique
actuelle.
Je m'interroge toutefois sur l'évolution réelle de la charge nette de la dette
en 2000. En effet, cette dernière est passée, en 1999, de 237,2 milliards de
francs dans la loi de finances initiale à 229 milliards de francs dans la loi
de finances rectificative,...
M. Yves Fréville.
Eh oui !
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra,
rapporteur spécial.
... soit une amélioration de 8,2 milliards de
francs.
M. Yves Fréville.
Tout à fait !
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra,
rapporteur spécial.
Le déficit primaire de l'Etat s'est donc accentué, la
charge nette de la dette étant finalement de 229 milliards de francs en 1999,
alors qu'elle s'établit à 234,7 milliards de francs dans le projet de loi de
finances initiale pour 2000. Comment expliquer, dès lors, cette aggravation du
poids de la charge nette de la dette de 5,7 milliards de francs en 2000,
contrairement aux affirmations du Gouvernement ?
Les dépenses de garanties, quant à elles, évoluent en fonction des aléas de la
conjoncture internationale.
Enfin, l'évolution des dépenses en atténuation de recettes est étroitement
liée à des facteurs exogènes ou à l'effet de mesures législatives
antérieures.
Troisième observation : le budget des charges communes ne donne qu'une vue
partielle des dépenses « transversales ».
Si 1,24 milliard de francs est inscrit au titre des garanties de l'Etat, ce
crédit ne prend pas en considération les « garanties implicites » qui sont
pourtant à la charge de l'Etat, c'est-à-dire les engagements à plus ou moins
long terme auxquels l'Etat et le secteur public devront faire face, et qui ne
sont pas retracés en tant que tels dans le budget de l'Etat.
Or l'Etat sera confronté, dans un avenir relativement proche, à un problème
budgétaire majeur, celui du « hors-bilan » ou de la « dette publique invisible
».
Si la structure et l'évolution du bilan de l'Etat peuvent être appréhendées et
contrôlées de façon relativement objective, le « hors-bilan », quant à lui,
fait l'objet d'une grande imprécision, le flou dont il est entouré empêchant la
représentation nationale et les citoyens de connaître précisément la situation
financière de l'Etat.
En effet, le Gouvernement apprécie actuellement le « hors-bilan » d'une
manière excessivement restrictive, ne s'en tenant qu'à une simple définition
juridique.
Ainsi, le « hors-bilan » n'est ni complètement connu ni totalement
provisionné, qu'il s'agisse du coût des structures de défaisance, des garanties
de l'Etat pour les prêts au logement, du démantèlement des centrales nucléaires
ou des pensions de la fonction publique.
Lors de votre audition par la commission des finances, je vous avais
interrogé, monsieur le ministre, sur ce point précis. La réponse que vous
m'aviez apportée alors était pour le moins vague, évoquant simplement le
rapport François sur la comptabilité patrimoniale de l'Etat. Je vous repose
donc la question ici et maintenant : quelles mesures envisagez-vous de mettre
en oeuvre pour rendre plus transparente la situation financière de la France,
et, surtout, pour faire face à cette dette « cachée » qu'il nous faudra bien
rembourser un jour ?
Le caractère tronqué du budget des charges communes apparaît également lorsque
sont analysées les dépenses de rémunérations comme celles des pensions.
Le budget des charges communes comporte une dotation de 230 millions de francs
au titre des rémunérations d'activité, alors que ces dernières s'élèvent, dans
leur ensemble, à plus de 400 milliards de francs.
La situation est la même pour les retraites de la fonction publique. La
totalité des charges de pension de l'Etat pour 2000 est évaluée à 192,2
milliards de francs, alors que le budget des charges communes est doté de 35,75
milliards de francs au titre des pensions, soit 18,6 % de l'ensemble.
Quatrième et dernière observation : les estimations de certaines dépenses sont
incertaines.
C'est le cas, par exemple, des dépenses éventuelles et, surtout, des dépenses
accidentelles. La dotation de ces dernières passe, en effet, de 450 millions de
francs en 1999 à 1 640 millions de francs en 2000, ce qui représente une
augmentation de plus de 260 %, sans que le Gouvernement en donne la moindre
justification autre qu'un vague « ajustement aux besoins ».
Monsieur le ministre, vous n'avez pas non plus répondu à cette question
lorsque vous avez été auditionné par la commission des finances. Je me permets
donc de vous interroger de nouveau : comment expliquer l'augmentation, ou
plutôt l'explosion, des dépenses accidentelles ?
J'espère que vous ne me répondrez pas que ces crédits seront affectés à
hauteur de 600 millions de francs à l'indemnisation des victimes des
catastrophes qui ont frappé très récemment les départements du sud de la
France, car cette indemnisation pouvait être prévue lors de l'élaboration de la
loi de finances.
Sous réserve de ces observations et des quelques interrogations que je viens
d'énumérer, la commission des finances propose au Sénat d'adopter les crédits
des charges communes pour 2000, ainsi que l'article 67 rattaché.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Loridant, rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation, pour les comptes spéciaux du Trésor.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les comptes
spéciaux du Trésor dessinent habituellement un tableau éclectique et
impressionnant qui couvre la quasi-totalité des politiques publiques.
C'est encore le cas cette année, même si le projet de loi de finances, qui
comporte la suppression de cinq comptes d'affectation spéciale, témoigne de la
volonté de réduire le champ d'intervention des affectations de recettes. Malgré
cela, la masse des sommes concernée est considérable puisque les comptes
spéciaux du Trésor représentent plus de 450 milliards de francs de recettes.
Le solde des comptes spéciaux du Trésor, tel qu'il est affiché par le
Gouvernement, connaîtrait, en 2000, avec 3 milliards de francs d'excédent, une
stabilisation par rapport aux données de la loi de finances initiale de
1999.
Toutefois, cela correspond à une légère dégradation par rapport à la situation
résultant du projet de loi de finances rectificative.
Contrairement au passé récent, l'excédent provient non plus des comptes
d'affectation spéciale, mais des comptes d'avances et de prêts.
Je dois cependant souligner que les opérations retracées dans le projet de loi
de finances sont loin de rendre compte de la réalité des interventions des
comptes. D'importants reports de crédits, qui n'apparaissent pas, influencent
beaucoup l'exécution budgétaire. En outre, et je reviendrai sur ce point,
certaines écritures et imputations peuvent être contestées.
J'ai rappelé votre projet de clôturer cinq comptes d'affectation spéciale,
mais cela n'épuise pas les innovations du projet de budget pour 2000.
En effet, parallèlement à ces suppressions, vous procédez à quelques
adjonctions qui manifestent une certaine vitalité de la formule.
Deux comptes sont concernés par ce dernier mouvement : le fonds national de
développement des adductions d'eau, le FNDAE, et le fonds national de
développement du sport, le FNDS.
Pour le FNDAE, il s'agit de le transformer en un fonds national de l'eau, FNE,
dont il ne constituerait plus qu'une section à côté d'une nouvelle section,
elle-même dénommée fonds national de solidarité pour l'eau, FNSE.
Le Sénat a voté en première partie un amendement de suppression des recettes
affectées au FNSE. Ce vote a été motivé entre autres par les perspectives
quelque peu dangereuses - elles sont considérées comme telles par la commission
des finances - pour le FNDAE d'un voisinage au sein du même compte
d'affectation spéciale avec le FNSE.
Je rappelle à ce propos que, si les comptes d'affectation spéciale constituent
une exception au principe de non-affectation des recettes, ce dernier principe
retrouve tous ses droits au sein de chaque compte. Il y avait donc lieu de
craindre un certain mélange des flux, d'autant qu'il s'agit, mes chers
collègues, de questions d'eau...
(Sourires.)
En ce qui concerne le FNDS, la commission des finances a supprimé le
prélèvement sur les droits de retransmission télévisée. A titre personnel, je
ne m'associe pas à cette démarche car, même si le fonds national du
développement du sport doit être réformé, et avec M. Michel Sergent, rapporteur
spécial de la jeunesse et des sports, nous avons formulé plusieurs
recommandations sur ce point, j'estime qu'il est justifié de rechercher une
diversification des recettes du FNDS.
J'ai évoqué vos propositions d'adjonction, monsieur le ministre, et j'en viens
maintenant à vos projets de suppression, plus particulièrement à ceux qui
concernent le fonds d'aménagement de la région d'Ile-de-France, le FARIF, et le
fonds national du livre.
Vous justifiez la suppression du FARIF par un souci de rebudgétisation. Nous
avons estimé qu'il y avait un certain risque à accepter votre dispositif :
celui de voir les produits de la taxe spécifique à l'Ile-de-France orientées
vers d'autres emplois que ceux qui sont destinés à l'Ile-de-France. S'il est un
compte pour lequel la procédure d'affectation de la recette est justifiée,
c'est précisément le FARIF, et sa suppression ne peut se concevoir sans une
réflexion sur la taxe qui l'alimente.
Quant au fonds national du livre, sa suppression équivaut à une totale
débudgétisation, entreprise qui, vous le savez, monsieur le ministre, n'a rien
pour séduire la Haute Assemblée.
C'est d'ailleurs l'une des difficultés substantielles qui caractérisent l'un
des comptes spéciaux du Trésor les plus significatifs, celui qui décrit les
opérations relatives au secteur public. J'y viens tout de suite, non sans vous
avoir indiqué que la suppression du fonds forestier national, le FFN, devra
s'accompagner d'une présentation périodique de l'effort public en faveur de la
forêt.
Le compte relatif au secteur public figure parmi les comptes d'affectation
spéciale dont les écritures soulèvent de façon récurrente interrogations et
critiques. Certaines opérations y sont recensées alors qu'elles n'y ont pas
leur place. D'autres, au contraire, n'y figurent pas alors qu'elles le
devraient.
Parmi les premières, on peut évoquer, avec la Cour des comptes, la
compensation des charges d'intérêt supportées par l'établissement public de
financement et de restructuration, l'EPFR parmi les secondes figurent les
recettes de cessions du GAN ou du Crédit lyonnais, par exemple. Cela fait plus
de 60 milliards de francs d'opérations, monsieur le ministre.
Je sais que vous nous indiquerez que ces choix sont justifiés techniquement et
compatibles avec la loi du 28 novembre 1995 sur le Crédit lyonnais. Peut-être,
mais cela ne vous empêche pas de passer par le compte spécial du Trésor
concerné. La représentation nationale trouve dans l'examen de ces opérations
une occasion trop rare de s'intéresser aux conditions dans lesquelles le
secteur public est géré.
A ce propos, je comprends que le Gouvernement use des libertés que lui
confient les lois par lesquelles le Parlement lui a donné une sorte de
blanc-seing aux fins de procéder à la cession qu'il souhaite au sein d'une
liste impressionnante d'entreprises. Je comprends aussi que, dans la
communication gouvernementale, l'information financière à destination des
marchés importe beaucoup. Mais il est moins légitime qu'elle éclipse
l'information parlementaire. Il faudrait que nous soyons mieux informés sur
chaque opération, et il me semblerait normal que nous soyons saisis, par
l'intermédiaire des présidents des commissions des finances, des mêmes dossiers
que la commission des participations et des transferts.
Une dernière observation s'impose. Je me félicite, monsieur le ministre, de
l'amélioration de la situation financière d'ensemble du secteur public. Mais
les besoins à financer restent considérables. Il faut assumer les conséquences
des sinistres bancaires, et j'exposerai bientôt à la commission des finances
les travaux que je conduis sur le consortium de réalisation, le fameux CDR, qui
doit apurer les comptes du Crédit lyonnais.
Il faut aussi accompagner les difficultés financières de certaines entreprises
publiques industrielles, qui paraissent hors d'état de les surmonter, au
demeurant pour des raisons structurelles. Je pense aux Charbonnages de France
ou à Réseau ferré de France.
Dans ces conditions, il est quelque peu irréel d'envisager une réduction
pérenne des recettes du compte.
Quant à supposer que ses dépenses pourraient contribuer à la résorption de la
dette publique de l'Etat, c'est, pour l'instant, une vue utopique.
Or les recettes du compte sont en net repli. Elles avaient atteint 53
milliards de francs en 1998. Elles sont supposées n'être que de 32 milliards de
francs au total pour les deux années 1999 et 2000.
Les ressources potentielles se raréfient. Les actifs financiers de l'Etat, qui
représentaient 15,7 points de PIB en 1980, ne s'élèvent plus qu'à 8,2 points de
PIB en 1997, et seront encore réduits à la fin de l'année 2000. Cela est assez
inquiétant en soi, et pose la question du devenir du compte et du financement
des besoins des entreprises publiques.
Pour ne pas allonger mon intervention, je ne ferai qu'évoquer la situation des
comptes de commerce du ministère de la défense en soulignant les progrès de
méthode en cours s'agissant du compte des constructions navales.
De la même manière, je ne fais qu'évoquer la situation des comptes de prêts
aux Etats étrangers pour indiquer qu'elle traduit les difficultés auxquelles
toute action extérieure se trouve aujourd'hui confrontée.
Ces difficultés, qui sont d'abord budgétaires, mettent en cause notre capacité
à financer le développement des pays les plus pauvres, et je me réjouis qu'en
compensation nous ayons lucidement tenu compte de leur situation en effaçant
des dettes irrécouvrables.
En conclusion, la commission des finances vous invite, mes chers collègues, à
voter ce budget compte tenu des amendements qui ont été adoptés lors de
l'examen des articles de la première partie de la loi de finances et de ceux
qui seront présentés à l'occasion de la discussion de ce projet de budget.
(Applaudissements.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe de l'Union centriste, 12 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon
intervention portera sur le compte d'affectation spéciale relatif à la gestion
des titres et participations de l'Etat, gestion qui a connu, semble-t-il, en
1999 un certain nombre d'évolutions pour le moins intéressantes.
C'est ainsi que, dans son fondement, ce compte d'affectation spéciale soulève
un certain nombre de questions.
Pour une part essentielle, le mouvement de cession de titres enregistré depuis
1997 est lié à la mise en oeuvre de choix politiques antérieurs à juin 1997.
J'observe qu'il en est ainsi pour l'ensemble des mouvements opérés dans le
cadre du plan de redressement du Crédit lyonnais et du Comptoir des
entrepreneurs, dans l'ouverture du capital d'Air France ou de France Télécom,
et que la démonstration a d'ailleurs été faite que certaines des motivations
qui avaient guidé ces opérations ne se sont pas immédiatement traduites
positivement dans les faits.
C'est ainsi que certains, en 1996, nous avaient présenté le changement de
statut de France Télécom comme la condition
sine qua non
du
développement d'alliances internationales.
Inutile de rappeler ici - ce serait trop long - l'épisode Deutsche
Telekom-Sprint.
De la même manière, si l'on peut apprécier que les affectations du produit des
cessions de titres soient plus directement liées aux nécessités de
recapitalisation des entreprises publiques « restantes », et que soit notamment
abandonnée la politique de désendettement qui avait marqué la période
1993-1997, sans effets réels sur le volume de cette dette, on doit souligner
que cette recapitalisation intervient le plus souvent dans le cadre de
contraintes qui nous ont été imposées ailleurs.
Ainsi, la séparation entre Réseau ferré de France et la SNCF entraîne, elle
aussi, une insuffisance de ressources de l'établissement gestionnaire de
l'infrastructure. Cela montre, preuves à l'appui, le caractère pernicieux de ce
qui découle des orientations de la Commission européenne sur ces questions
cruciales pour l'aménagement du territoire et le service public.
Je me permettrai aussi de souligner les incertitudes qui semblent avoir
présidé à l'opération de cession du GAN et qui nous amènent à nous interroger
sur leur réalisation.
De façon plus générale, les opérations retracées dans le compte d'affectation
spéciale n'ont pas, en fait, gagné en qualité sur la durée.
Elles posent encore et toujours la question de la conception que l'on peut
avoir du rôle économique de l'Etat.
C'est ainsi que nous sommes pratiquement parvenus à une privatisation totale
du secteur bancaire et assuranciel sans que cela se traduise pour l'heure par
autre chose qu'un mouvement de mégafusions particulièrement meurtrier, en fin
de compte, pour l'emploi et la qualité de services ou par des tentatives
d'obtenir la facturation de services bancaires jusqu'ici gratuits.
Quant à la concurrence qui s'exerce en des domaines comme les
télécommunications ou qui est appelée à s'exercer dans le domaine de l'énergie,
je ne suis pas certaine qu'elle favorise effectivement, à terme, la qualité de
service et la réduction des prix offerts aux usagers.
Les principes qui ont guidé la constitution du service public à la française
ont, de notre point de vue, une pertinence qui demeure tout à fait valable.
Il nous semble donc, alors même que nous sommes souvent engagés vis-à-vis de
nos partenaires européens dans des négociations portant sur l'harmonisation
fiscale ou la convergence des politiques économiques et budgétaires, que nous
devrions en tirer parti pour valider des choix différents en matière de
maîtrise publique d'un certain nombre de fonctions essentielles au
développement économique et social, choix que nous avons, de notre point de
vue, insuffisamment validés dans la dernière période.
Vous comprendrez que nous soyons clairement opposés à toute perspective de
tarification des services bancaires qui apparaîtrait comme une nouvelle
inégalité d'accès au crédit entre les habitants de ce pays, selon leur fortune
et, entre les entreprises, selon le volume des transactions qu'elles
réalisent.
Nous attendons du Gouvernement, sur ces questions, une intervention claire et
favorable aux intérêts des consommateurs, rejetant les orientations des
établissements de crédit.
Ce sont là, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
les quelques points que je souhaitais souligner à l'occasion de l'examen de ces
crédits.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, face à un
budget Léviathan que je dois examiner au rythme voisin d'un milliard de francs
la seconde
(Sourires),
je me bornerai à quelques questions sur la qualité de la
gestion de l'Etat et sur la pertinence de certaines interventions.
Je commencerai par la gestion non seulement de la dette publique mais aussi du
patrimoine et de la dette viagère. Certes, la dette publique n'a pas été le
thème dominant de ce débat budgétaire. Tout semble s'arranger, en effet ; la
baisse des taux d'intérêt nominaux a réduit l'écart entre ceux-ci et le taux de
croissance et enrayé partiellement la croissance en boule de neige de la dette.
La charge d'intérêt nette de la dette diminue, de loi de finances en loi de
finances, de 2,5 milliards de francs. Bien !
Tout d'abord, cette baisse apparente est illusoire. Par rapport à la charge
révisée du collectif pour 1999, l'augmentation réelle dépassera 5,7 milliards
de francs en raison d'une économie nette de 8,2 milliards de francs faite sur
le collectif à la suite d'une erreur de prévision dont je ne vous fais
nullement reproche, monsieur le ministre. Parce que vous avez choisi comme taux
d'intérêt de référence le taux du consensus, les taux d'intérêt en 1999 ont été
très inférieurs, à court terme, à ce qui avait été prévu, et l'économie va donc
de soi. Tant mieux, d'ailleurs, pour la France !
Il n'empêche que la rémission dans la croissance de la charge de la dette est
essentiellement due à un effet taux - des emprunts bon marché se substituent à
des emprunts coûteux lors de leur amortissement - et ne constitue donc qu'un
phénomène transitoire.
Si nous continuons avec un déficit annuel de 200 milliards de francs qui
accroît d'autant la charge de la dette avec un taux moyen de 5 %,
mathématiquement, nous aurons 10 milliards de francs de charges supplémentaires
chaque année.
Je constate d'ailleurs, en prenant les excellents indicateurs du « bleu »
budgétaire, que le poids de la dette de l'Etat dans le produit intérieur brut
continue à s'accroître : de 1997 à 2000, la croissance est de 3,3 points.
De plus, jamais le besoin de financement du Trésor n'a été aussi élevé,
puisqu'il va atteindre cette année 620 milliards de francs. En effet, s'ajoute
aux 215 milliards de francs de déficit budgétaire l'amortissement de 405
milliards de francs d'emprunts arrivant à échéance.
Heureusement, et je le reconnais, cette énorme dette est bien gérée par
France-Trésor. Permettez-moi, à ce sujet, deux ou trois remarques.
Tout d'abord, quelles sont les conséquences pour le Trésor de la faiblesse du
marché à terme d'instruments financiers, le MATIF, enfermé dans un piège
d'illiquidité, et de la domination écrasante prise par le contrat Bund d'Eurex
? Nous avons les titres, nous n'avons pas le marché. Qu'en est-il pour la
gestion de notre dette ?
Sur les chèques postaux maintenant, je vous interroge une fois de plus. L'an
passé, La Poste devait reprendre la gestion de 30 milliards de francs de dépôts
privés au Trésor. Cela n'a pas eu lieu, et l'opération a été reportée en 2000.
Pouvez-vous nous assurer que cette opération portera bien sur la tranche B,
rémunérée au taux plancher - actuellement, il est véritablement exorbitant pour
un taux à court terme, puisqu'il est de 4,75 % - et non sur la tranche A ?
Cette gestion somme toute satisfaisante de la dette tranche avec le reste de
la gestion patrimoniale de l'Etat, comme cela a très bien été montré dans le
rapport François.
Je prendrai un ou deux exemples.
Vous créez dans ce budget, et c'est très bien, des obligations assimilables du
Trésor indexées, et vous provisionnez les intérêts. C'est la seconde fois que
cela arrive. La première fois, c'était à l'occasion des primes d'épargne
populaire. Mais ce n'est là qu'un exemple malheureusement très limité.
Si l'on demeure dans la sphère financière, est-il logique de ne pas
provisionner aujourd'hui les pertes à venir de l'établissement de défaisance du
Crédit lyonnais ?
Si j'ai bien fait mes calculs, monsieur le ministre, les recettes provenant de
la privatisation du Crédit lyonnais, les 32 milliards de francs, qui remontent
en effet légalement au niveau de l'établissement public de financement et de
restructuration, s'ajouteront aux quelque 41 milliards de francs qui ont déjà
été versés par l'Etat à l'établissement public de restructuration et de
défaisance, et à ce même l'EPFR. On en est donc à 73 milliards de francs perdus
dans ce dramatique sinistre. Il doit bien rester actuellement 60 milliards de
francs. Comme M. le rapporteur spécial pour les comptes spéciaux du Trésor,
nous aimerions savoir à peu près où l'on en est et s'il ne conviendrait pas, là
aussi, de provisionner.
Pour m'en tenir à la présentation budgétaire, je reconnais qu'un progrès
sensible a été réalisé quant à la présentation du budget des charges communes ;
mais il faudrait que ce budget-là redevienne l'endroit privilégié de contrôle
de l'évolution croissante et préoccupante des retraites et de la dette viagère,
conformément d'ailleurs à la lettre de l'ordonnance organique, qui prévoit que
cette dette viagère soit inscrite au titre Ier. Or, actuellement, on en
répartit la charge pour faire de la « gonflette » dans les budgets des divers
ministères avant de tout rapatrier le 15 janvier dans le budget des charges
communes pour la gestion. Il serait beaucoup plus sain, pour la discussion
parlementaire, que nous puissions traiter de cette question ici-même.
Je constate, pour en prendre acte, que le rapport économique et financier nous
donne, pour la première fois, cette année, l'évolution réelle des coûts des
retraites des fonctionnaires, soit 206 milliards de francs pris en charge aux
trois quarts par la contribution de l'Etat de 147 milliards de francs. Et cette
contribution augmente au rythme de 5 milliards de francs à 6 milliards de
francs par an, ne serait-ce que parce que le nombre des pensionnés civils a
augmenté de 25 % en une décennie ! Face à de tels chiffres, j'estime, monsieur
le ministre, que le budget des charges communes serait tout à fait le cadre
d'une discussion sur l'évolution des retraites de l'Etat.
Après avoir parlé de la gestion, j'en viens aux interventions. Je me
contenterai de questions relatives aux entreprises publiques et aux
contribuables locaux.
Pour ce qui est, d'abord, des entreprises publiques, je constate que vous avez
plus privatisé depuis juin 1997 que la majorité précédente. Certes, si j'arrive
à la somme de 163 milliards de francs, c'est parce que j'ajoute le Crédit
lyonnais et le GAN ; mais il n'y a pas de raison de ne pas en tenir compte dans
l'addition. Reste que 163 milliards de francs, c'est bien plus que les 149
milliards de francs de privatisation réalisés de 1993 à 1997.
Je ne vous en ferai naturellement pas le reproche simplement, à ce stade, je
ne peux que constater, après M. le rapporteur spécial, l'opacité qui entoure la
remontée du solde financier de la
holding
GAN-société centrale.
Lors de la discussion de la loi de règlement de 1997 - vous vous en souvenez
peut-être - alors que l'on connaissait déjà le rapport accablant de la Cour des
comptes, vous m'aviez assuré que l'arrêté des comptes devait intervenir en
avril 1999. Or il a été répondu récemment à M. Arthuis, qui interrogeait M.
Pierret à ce sujet, que l'arrêté des comptes devait intervenir au cours de
l'année 2000.
Qu'en est-il réellement ? Que reste-t-il des 24 milliards de francs de
recettes de la privatisation ? On parle de 9 milliards de francs : je crois
que, là aussi, le Parlement a le droit d'être informé.
Monsieur le ministre, que fait-on du produit des privatisations ? Je sais très
bien que, lorsque l'on examine le compte d'affectation spéciale, on voit des
dotations en capital. Mais qu'en est-il réellement ? La Cour des comptes a bien
montré que ces dotations en capital, qui augmentent le volume de
l'investissement public auquel vous vous référez d'habitude, couvrent le plus
souvent des pertes d'exploitation et qu'elles n'ont de dotations en capital que
le nom. Les 5 milliards de francs accordés aux défaisances financières, les 4,5
milliards de francs accordés à Charbonnage de France et les 19,5 milliards de
francs attribués à Réseau ferré de France sur deux années constituent-ils
réellement des dotations en capital ? J'aimerais, monsieur le ministre, que,
sur ce point, vous puissiez nous fournir quelques éclaircissements.
J'en terminerai en évoquant un deuxième type d'interventions de l'Etat, à
savoir les fameux dégrèvements législatifs en faveur des contribuables locaux -
et non pas des collectivités locales - qui s'élèvent à 60 milliards de francs.
J'en donne acte également aux différents gouvernements qui se sont succédé, ces
dégrèvements législatifs sont désormais bien isolés en termes de présentation
budgétaire. Simplement, monsieur le ministre, maintenant qu'ils sont bien
isolés, ils ne devraient plus apparaître dans le tableau de l'article
d'équilibre en atténuation de recettes : ce sont de véritables dépenses de
l'Etat en faveur des contribuables locaux.
Je m'étonne du maintien à un niveau extrêmement élevé du principal de ces
dégrèvements, à savoir le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. Cela
pose question quant à la qualité de la prévision. Je ne parviens pas à
comprendre personnellement que, du fait, d'une part, de l'augmentation de la
croissance, par conséquent de l'augmentation rapide de la valeur ajoutée des
entreprises, d'autre part, de la réduction des bases de taxe professionnelle en
fonction des salaires, le coût du plafonnement ne diminue pas plus qu'il
n'apparaît dans le fascicule des voies et moyens.
C'est surtout sur le caractère contre-incitatif et contre-péréquateur de ces
dégrèvements que je veux intervenir une fois de plus.
Ces dégrèvements sont contre-incitatifs, car ce sont les collectivités locales
connaissant la pression fiscale la plus lourde qui sont indirectement les plus
aidées. Certes, on a figé le taux de taxe professionnelle servant au calcul du
dégrèvement au niveau de 1995, mais cela ne joue pas pour la taxe d'habitation.
Finalement, l'Etat récompense le plus les collectivités dépensières !
Ils sont également contre-péréquateurs, du moins ils n'obéissent à aucune
logique péréquatrice. J'ai examiné les données du rapport Dosière concernant le
taux, par département, de prise en charge par l'Etat de la taxe d'habitation.
C'est extraordinaire : ce taux n'est que de 10,5 % dans les Hautes-Alpes ou de
14,7 % en Lozère, qui n'est pas l'exemple du département le plus riche de
France - que mes collègues élus de ce département me pardonnent - contre 33,5 %
dans le territoire de Belfort et 29,5 % dans le Vaucluse - alors qu'il n'était
que de 10 %, soit un véritable bond - ce qui traduit un écart de une à
trois.
En fait, nous avons en France deux systèmes de péréquation : l'un fondé sur
les dégrèvements, l'autre, sur la DGF et autres dotations de l'Etat, et le
résultat - c'est une litote - est totalement incohérent.
Je considère que le budget des charges communes, plus qu'aucun autre, est le
reflet des choix stratégiques à long terme effectués par le Gouvernement en
matière de déficit budgétaire et de dette. Je constate que la commission des
finances a été surtout sensible, sur un plan technique, au caractère évolutif
des crédits qui y figurent. Je me joins à elle pour vous donner acte du
caractère satisfaisant de leur évolution et de la bonne gestion technique de la
dette. Ce choix est très honorable.
J'estime néanmoins que ce budget reflète aussi la politique budgétaire menée
depuis deux ans et l'insuffisante réduction du déficit budgétaire. Je réserve
donc mon vote en attendant les explications que vous ne manquerez pas de nous
apporter, monsieur le ministre.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme il est normal mais aussi
parfaitement sincère de ma part, je tiens tout d'abord à remercier les deux
rapporteurs spéciaux, MM. de Rocca Serra et Loridant, qui ont fourni, sur le
budget des charges communes et sur les comptes spéciaux du Trésor, une analyse
très complète que je qualifierai même d'objective.
Je vais donc m'efforcer de répondre tant à leurs questions, sans revenir dans
le détail sur leur analyse, qu'aux interrogations de Mme Beaudeau et de M.
Fréville.
Je commencerai par le budget des charges communes.
M. de Rocca Serra a fort bien dit que si, des 701 milliards de francs, somme
dont M. Fréville a souligné l'ampleur, on retire les dépenses qui ont une
contrepartie de recettes, on arrive à un budget net des charges communes de 353
milliards de francs. Il reste donc important mais, comme M. Rocca Serra l'a
souligné, connaît une baisse de 1,3 % par rapport à 1999.
Cette diminution vient, d'une part, de ce que les spécialistes appellent la
poursuite des opérations de périmètre, c'est-à-dire de simplification et de
transparence, et, d'autre part, de la diminution des charges financières de
l'Etat, sur laquelle je reviendrai.
M. de Rocca Serra, avec une très grande honnêteté, a bien voulu souligner
l'effort appréciable de clarification opéré dans ce projet de budget, je l'en
remercie.
Je rappelle, après lui, qu'en 1999 nous avions intégré dans le budget général
les charges des pensions versées par l'Etat aux fonctionnaires employés par La
Poste, pour un montant de 15 milliards de francs. Cette année, nous faisons la
même opération en ce qui concerne les retraites versées à des agents
d'organismes publics tels que la Caisse des dépôts et consignations, le CNRS,
l'INSERM ou l'INRA, à hauteur de 5 milliards de francs.
Pour ce qui est des transferts entre budgets, l'idée est bien de revenir aux
sources, c'est-à-dire de réserver aux charges communes des opérations qui ne
peuvent pas être affectées à un ministère en particulier.
C'est pourquoi environ 13 milliards de francs ont été retirés du budget des
charges communes et confiés à des ministères gestionnaires. Ainsi, le fonds
spécial d'invalidité - c'est bien normal ! - a été inscrit au budget de
l'emploi et de la solidarité, et les subventions aux partis et groupements
politiques, qui n'avaient rien à faire dans les charges communes, au budget de
l'intérieur. Tel a été également le cas pour le budget du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, dont j'ai la responsabilité.
Inversement, toujours avec cette même préoccupation de clarification que M. de
Rocca Serra s'est plu à souligner, nous avons regroupé au sein d'un chapitre
unique des charges communes des subventions qui étaient jusque-là éclatées et
versées à divers régimes de sécurité sociale. Il en va ainsi des subventions de
l'Etat au budget annexe des prestations agricoles, à la caisse des retraites de
l'Imprimerie nationale, à la caisse de sécurité sociale dans les mines.
Au total, la part des charges communes dans le total des charges nettes de
l'Etat diminue. Elle était passée de 21 %, en 1993, à 25 %, en 1997. Elle va
retrouver, pour l'an 2000, son niveau de 1993, soit 21 %.
M. de Rocca Serra - il ne m'en voudra pas de le citer fréquemment, car son
rapport a été de grande qualité - a mentionné la suppression de quarante-trois
chapitres budgétaires sur quatre-vingt-un. On est, de ce fait, passé d'une
espèce de budget fourre-tout à un budget beaucoup plus clair, plus transparent,
et de ce fait beaucoup plus intelligible et contrôlable par les
parlementaires.
A la fin de son exposé, M. de Rocca Serra m'a posé quelques questions
auxquelles je vais maintenant m'efforcer de répondre.
Il m'a demandé quelle suite serait donnée au rapport de M. François, autrement
dit si l'Etat entendait, outre le travail qu'il fait pour présenter ses comptes
année après année, se préoccuper de ses engagements à long terme.
Le compte général de l'administration des finances, sorte de bilan des actifs
et des passifs de l'Etat, que nous publierons au mois d'avril 2000, donc pour
la fin de l'année 1999, lui apportera, à cet égard, des informations
supplémentaires, notamment sur les dettes en droit consolidé, une provision
pour dépréciation des recettes fiscales. En conséquence, sans aller jusqu'à une
comptabilité patrimoniale parfaite, nous progressons.
M. de Rocca Serra a jugé surprenante la progression des dépenses
accidentelles. Evidemment, lorsque nous préparons un budget, nous ne pouvons
pas prévoir les catastrophes qui surviendront ! Le Gouvernement a toutefois, en
la matière, fait preuve de prévoyance en dotant ce compte, dans lequel on puise
largement lorsqu'il y a des catastrophes, de façon à ne pas être dépourvu le
cas échéant. C'est d'ailleurs grâce à cela que nous avons pu mobiliser, à la
suite des inondations qui ont eu lieu dans l'Aude et dans des départements
voisins, 600 millions de francs dans le compte de 1999.
Je reviendrai sur l'évolution de la charge de la dette en répondant à une
question similaire de M. Fréville. En l'instant, je dirai simplement que nous
avons révisé à la baisse, de 8 milliards de francs environ - vous le verrez
bientôt en examinant le collectif -, la charge de la dette que l'Etat doit
assumer.
En effet, les taux d'intérêt - M. Fréville l'a fort bien dit - ont été plus
faibles que prévu, ce qui est évidemment une excellente chose. Mais cela
n'enlève rien au fait que, en l'an 2000, nous allons, pour la première fois,
casser une tendance qui remontait bien plus loin qu'à quatre ou six ans, à
savoir la progression, année par année, du poids de la dette de l'Etat dans le
produit intérieur brut.
S'agissant des garanties, j'ai transmis au secrétariat général du Gouvernement
un document intitulé :
Rapport décrivant les opérations bénéficiant de la
garantie de l'Etat pour les exercices 1997 à 1999.
Ce document, qui sera
transmis au Sénat très prochainement, vous apportera des informations
complémentaires.
J'en viens maintenant aux comptes spéciaux du Trésor.
Les compliments que j'ai adressés à M. de Rocca Serra valent également pour M.
Loridant, qui a bien souligné que, derrière la stabilité apparente du solde des
comptes spéciaux du Trésor, il y avait des mouvements d'ampleur inspirés par un
souci de clarté et de simplification et, notamment, que nous avions réintégré
des comptes spéciaux du Trésor dans le budget général.
Chacun se souvient que nous avons supprimé un compte spécial du Trésor en 1998
et un autre en 1999. Cette fois, il est proposé d'en supprimer cinq.
Une comparaison étant toujours intéressante, je rappelle que, si le nombre de
comptes spéciaux du Trésor est passé de quatorze à dix-neuf entre 1993 et 1997,
il passera de dix-neuf à douze de 1997 à 2000, soit moins qu'en 1993.
Cette année, il s'agit, comme M. Loridant l'a dit, du fonds pour le
financement de l'accession à la propriété, du fonds pour l'aménagement de la
région d'Ile-de-France, sur lequel il a posé des questions, du fonds forestier
national, du fonds national du livre et du fonds de secours aux victimes de
sinistres et calamités. En tout, cela représente grosso modo plus de 1 milliard
de francs.
Evidemment, en supprimant ces comptes spéciaux, on a supprimé les taxes
correspondantes, telles que la taxe forestière et papetière ou la taxe de
défrichement, soit un allégement d'impôt substantiel de 350 millions de francs
pour les entreprises concernées. Les élus des départements forestiers
apprécieront certainement cette disposition, sachant que des ressources
budgétaires y ont été substituées.
S'agissant du FARIF, j'ai constaté - avec regret, d'ailleurs - que le Sénat
avait supprimé, lors de l'examen des articles de la première partie,
l'affectation d'une part de la taxe sur les bureaux à la région
d'Ile-de-France, privant celle-ci de 720 millions de francs.
Inversement, il se propose de rétablir le fonds pour l'aménagement de la
région d'Ile-de-France, que nous avons voulu réintégrer dans le budget général
afin de garantir à la région, comme la loi Pasqua du 4 février 1995 l'avait
prévu, la compensation de la suppression progressive de sa dotation globale de
fonctionnement, de donner une pérennité aux actions du FARIF au sein du budget
général et, enfin, de rechercher la transparence ; autant d'objectifs que ne
partage pas le Sénat. Je le regrette.
Quant au Fonds national du livre, c'est une sorte de boîte aux lettres à
laquelle sont affectées deux redevances, l'une sur l'édition d'ouvrages de
librairie, l'autre sur l'emploi de la reprographie. Supprimer une boîte aux
lettres ne peut être considéré que comme une simplification, sachant que les
deux redevances continueront à figurer dans les fascicules voies et moyens
annexés au projet de loi de finances et que les parlementaires pourront donc
continuer à les surveiller.
J'ai noté le soutien de M. Loridant - ce soutien n'a pas été exprimé par tous
- à la proposition du Gouvernement de créer une nouvelle taxe sur les droits de
retransmission télévisée destinée à abonder le Fonds national pour le
développement du sport. Cette taxe importante visait, puisqu'elle vient d'être
supprimée, et visera, lorsque, je l'espère, elle sera rétablie, à mutualiser
des ressources croissantes qui viennent de la commercialisation des droits de
diffusion.
Je souhaite maintenant répondre rapidement aux interrogations formulées par
Mme Beaudeau, ainsi que par MM. Loridant et Fréville, sur les dotations en
capital des entreprises publiques.
M. Loridant a eu raison de souligner que les besoins financiers des
entreprises publiques restaient importants. Je tiens à souligner que l'Etat,
sur ce point, comme sur beaucoup d'autres, s'est comporté en actionnaire
responsable : 59 milliards de francs en 1997, 45 milliards de francs en 1998,
environ 32 milliards de francs sur les deux années 1999 et 2000.
Pour ce qui est de cette période, l'un d'entre vous l'a dit : il faut ajouter
les recettes résultant de la privatisation du Crédit lyonnais, qui sont
affectées non pas à ce compte d'affectation spéciale mais à l'établissement
public qui a pris en charge les mauvaises dettes du Crédit lyonnais, à hauteur
de 33 milliards de francs.
Pour répondre aux appréhensions de M. Loridant et de Mme Beaudeau, j'ajoute
que l'Etat continuera à jouer son rôle d'actionnaire, comme il l'a fait entre
1997 et 1999.
Par ailleurs, Mme Beaudeau a formulé un certain nombre de remarques, qui m'ont
semblé un peu critiques, à l'égard de très belles entreprises comme Air France
ou France Télécom, dont le redressement financier est remarquable et dont les
projets d'expansion à l'étranger méritent d'être mis en exergue.
En effet, cette expansion, qui s'opère sur le marché européen et au-delà, est
bonne pour l'emploi, en France et au sein de ces sociétés. Comme vous, madame
Beaudeau, je suis attaché, en tant que membre du Gouvernement, au service
public à la française, dont vous avez si bien parlé ; mais je crois que
celui-ci, pour rester, comme il l'a toujours été, de très bonne qualité, doit
être perpétuellement mû par une recherche d'efficacité et, pourquoi pas, par
une volonté d'expansion à l'étranger.
Vous avez en outre évoqué la profession bancaire. A cet égard, je rappellerai
que des négociations un peu difficiles sont en cours entre la profession
bancaire et les associations de consommateurs sur un certain nombre de sujets.
Le Gouvernement les suit avec attention.
Pour conclure, je répondrai à M. Fréville, qui a relevé avec beaucoup
d'objectivité qu'un certain nombre de progrès ont été accomplis dans la
présentation des documents. L'honnêteté de ses compliments rend évidemment ses
critiques d'autant plus précises et vigoureuses. Puisqu'il a parlé de la charge
de la dette, je rappellerai quand même que celle-ci a crû, entre 1993 et 1997,
de 63 milliards de francs, alors que, entre 1997 et 2000, elle ne s'alourdira
que de 12 milliards de francs.
L'évolution des taux d'intérêts joue son rôle dans ce ralentissement, c'est
incontestable ; mais il n'en demeure pas moins que, peu à peu, les déficits
reviennent à des niveaux normaux. J'insiste sur ce fait, parce que j'y vois un
événement quasiment historique : la dette de l'Etat rapportée à la production
nationale diminuera en l'an 2000. C'est non pas moi qui l'affirme, monsieur
Fréville - vous auriez peut-être du mal à me croire, puisque je suis membre du
Gouvernement et que nous ne sommes pas du même camp - l'excellent rapport qui a
été publié sur les perspectives pour 2004 et dont nous avons débattu lors de
l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Vous y trouverez
un très beau graphique qui montre que la dette publique monte de façon
inexorable, pour diminuer enfin à partir de 2000. Il s'agit, je le répète, de
travaux objectifs menés sous l'égide du Sénat.
Par ailleurs, vous vous êtes inquiété de l'avenir du MATIF. Nous devons
effectivement veiller, avec les professionnels, à ce que ce marché à terme soit
vigoureux. Je dois dire que les professionnels ont fait des efforts importants
ces derniers temps, et, depuis quelques semaines, le MATIF a repris des
couleurs. Je puis par exemple vous indiquer que 70 000 contrats ont été
négociés le 2 décembre dernier.
Une autre des questions perlées et précises dont vous avez la spécialité,
monsieur Fréville, avait trait aux chèques postaux. Bien entendu, le travail de
décentralisation qui est en cours est mené avec un souci de la sécurité que
vous partagez l'an prochain, cette décentralisation portera sur 60 milliards de
francs. A cet égard, il s'agit bien de la tranche B. Accessoirement, cela se
traduira par des économies pour l'Etat.
Enfin, fidèle à votre habitude, vous avez exprimé des inquiétudes à propos du
produit de la privatisation du GAN. Je vous répète que le flou que vous
dénoncez rituellement n'est qu'apparent. La recette de 9 milliards de francs a
été prévue, l'arrêté des comptes pour 1998, publié en avril 1999, a fixé les
montants à provisionner au titre des garanties consenties aux acquéreurs de
filiales, et l'analyse des garanties susceptibles d'arriver à échéance à court
terme a été menée. Tout cela ayant été accompli, le reversement par la société
de gestion de garanties et de participations de sa trésorerie disponible pourra
intervenir dans les prochaines semaines.
Telles sont, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, les
réponses, aussi précises que possible, que je voulais vous apporter.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
CHARGES COMMUNES
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant à l'état B et concernant les charges communes.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre Ier : 19 719 780 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre Ier.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre II : 95 899 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre II.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre III : 2 391 440 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : - 696 806 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
J'appelle en discussion l'article 67, qui est rattaché pour son examen aux
crédits des charges communes.
Charges communes
Article 67
M. le président.
« Art. 67. - La charge budgétaire correspondant au coût représentatif de
l'indexation des obligations et bons du Trésor, telle qu'autorisée par
l'article 19 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses
dispositions d'ordre économique et financier et constatée à la date de
détachement du coupon, est inscrite chaque année en loi de finances au titre I
des dépenses ordinaires des services civils du budget général.
« La charge budgétaire pour l'année 2000 comprend également le coût
représentatif de l'indexation des titres dont les coupons ont été détachés en
1999. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 67.
(L'article 67 est adopté.)
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR
M. le président.
Nous allons maintenant examiner les articles 44, 44
bis
, 45 à 50 du
projet de loi de finances, qui concernent les comptes spéciaux du Trésor.
C. -
Opérations à caractère définitif
des comptes d'affectation spéciale
Article 44
M. le président.
« Art. 44. - I. - Les comptes d'affectation spéciale énumérés ci-dessous sont
clos à la date du 31 décembre 1999 :
« - compte d'affectation spéciale n° 902-01 "Fonds forestier national", ouvert
par l'article 2 de la loi n° 46-2172 du 30 septembre 1946 instituant un fonds
forestier national ;
« - compte d'affectation spéciale n° 902-13 "Fonds de secours aux victimes de
sinistres et calamités", ouvert par l'article 75 de la loi n° 56-780 du 4 août
1956 portant ajustement des dotations budgétaires reconduites à l'exercice 1956
;
« - compte d'affectation spéciale n° 902-16 "Fonds national du livre", ouvert
par l'article 38 de la loi de finances pour 1976 (n° 75-1278 du 30 décembre
1975) ;
« - compte d'affectation spéciale n° 902-22 "Fonds pour l'aménagement de
l'Ile-de-France", ouvert par l'article 53 de la loi de finances rectificative
pour 1989 (n° 89-936 du 29 décembre 1989) ;
« II. - Les opérations en compte au titre de ces fonds sont reprises au sein
du budget général, sur lequel sont reportés les crédits disponibles à la
clôture des comptes.
« III. - Les créances dont dispose le Fonds forestier national à la date du 31
décembre 1999 du fait des encours de prêts consentis sont reprises par
l'Etat.
« IV. - La loi n° 46-2172 du 30 septembre 1946 précitée, l'article 75 de la
loi n° 56-780 du 4 août 1956 précitée, l'article 38 de la loi de finances pour
1976 précitée et l'article 53 de la loi de finances rectificative pour 1989
précitée sont abrogés. »
Par amendement n° II-3, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
A. - De supprimer les quatrième et cinquième alinéas du I de cet article.
B. - En conséquence, dans le IV de cet article, de supprimer les mots : « ,
l'article 38 de la loi de finances pour 1976 précitée et l'article 53 de la loi
de finances rectificative pour 1989 précitée ».
La parole est à M. Loridant, rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
Cet amendement a pour objet de rétablir parmi les
comptes spéciaux du Trésor le fonds national du livre et le fonds pour
l'aménagement de la région d'Ile-de-France.
Je voudrais profiter de cette occasion pour indiquer à M. le ministre que je
crains qu'il ne m'ait mal compris s'agissant du Fonds pour l'aménagement de la
région Ile-de-France. En effet, il ne s'agit nullement pour nous de priver la
région d'Ile-de-France de ses ressources. Nous voulons au contraire veiller à
ce qu'il ne soit pas porté atteinte à celles-ci, compte tenu de l'affectation
du produit de la taxe sur les bureaux prévue par le présent projet de loi de
finances. En quelque sorte, l'amendement n° II-3 constitue un appel à la
discussion, lors de la navette, sur la façon dont ces ressources de la région
d'Ile-de-France pourraient être maintenues.
En ce qui concerne le fonds national du livre, nous ne considérons pas,
monsieur le ministre, qu'un compte d'affectation spéciale puisse simplement
servir de boîte aux lettres. J'imagine que les fonctionnaires gérant ce compte
d'affectation spéciale contrôlent l'usage qui est fait des subventions
accordées, et, en tout état de cause, l'existence de ce fonds nous permet, à
nous, parlementaires, de veiller à leur bonne utilisation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Le Gouvernement
émet un avis défavorable sur cet amendement.
En ce qui concerne tout d'abord la rebudgétisation du fonds pour l'aménagement
de la région d'Ile-de-France, le Gouvernement a veillé, pour répondre à la
préoccupation exprimée par M. Paul Loridant, à ce que les moyens d'intervention
alloués à la région d'Ile-de-France soient maintenus et consolidés.
Au total, 1,6 milliard de francs de crédits d'engagement est prévu. Ces
crédits sont répartis, à des lignes bien spécifiques, entre six budgets
différents - le budget de la ville, le budget de l'équipement, le budget des
transports terrestres, le budget des routes, le budget du logement et le budget
des services généraux du Premier ministre. Cela montre bien que la région
d'Ile-de-France ne sera pas handicapée par cette rebudgétisation.
S'agissant du fonds national du livre, je crois qu'il faut éviter toute
confusion avec le Centre national du livre.
Le fonds national du livre était une sorte de boîte aux lettres, qui, je l'ai
dit tout à l'heure, recevait le produit de deux redevances - une redevance «
édition » et une redevance « reprographie » - lequel était aussitôt transmis au
Centre national du livre.
Le Centre national du livre, quant à lui, est un organisme important qui,
depuis 1998, publie un rapport d'activité que je tiens à votre disposition. Il
est donc tout à fait facile, pour la représentation parlementaire, de retracer
l'affectation des sommes en question. Les responsables du fonds national du
livre se bornent simplement, je le répète, à les transmettre au Centre national
du livre dès qu'ils les ont perçues.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-3.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
A titre tout à fait personnel, j'indique que, connaissant le fonctionnement du
FARIF et du fonds national du livre, je ne voterai pas l'amendement n° II-3.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement II-3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 44, ainsi modifié.
(L'article 44 est adopté.)
Article 44
bis
M. le président.
« Art. 44
bis. -
I. - A compter du 1er janvier 2000, le compte
d'affectation spéciale n° 902-17 intitulé Fonds national pour le développement
du sport, ouvert dans les écritures du Trésor par l'article 37 de la loi de
finances pour 1976 (n° 75-1278 du 30 décembre 1975), retrace :
« En recettes :
« - le produit du prélèvement sur les sommes misées sur les jeux exploités en
France métropolitaine par la Française des jeux ;
« - la partie du produit du prélèvement sur les sommes engagées au pari mutuel
sur les hippodromes et hors les hippodromes mentionnée à l'article 28 de la loi
de finances pour 1980 (n° 80-30 du 18 janvier 1980) ;
« - le produit de la contribution sur la cession à un service de télévision
des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives,
mentionné à l'article 31
bis
de la présente loi ;
« - le remboursement des avances consenties aux associations sportives ;
« - les recettes diverses ou accidentelles.
En dépenses :
« - les subventions pour l'aide au sport de haut niveau ;
« - les avances consenties aux associations sportives pour l'aide au sport de
haut niveau ;
« - les subventions de fonctionnement pour l'aide au sport de masse ;
« - les restitutions de sommes indûment perçues ;
« - les dépenses diverses ou accidentelles ;
« - les frais de gestion ;
« - les subventions d'équipement versées aux associations sportives pour
l'aide au sport ;
« - les subventions d'équipement versées aux collectivités locales pour l'aide
au sport ;
« - les équipements de l'Etat contribuant au développement du sport.
« II. - Sont abrogés :
« - l'article 42 de la loi de finances pour 1980 (n° 80-30 du 18 janvier 1980)
;
« - l'article 46 de la loi de finances pour 1986 (n° 85-1403 du 30 décembre
1985) ;
« - l'article 70 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre
1992) ;
« - le III de l'article 67 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30
décembre 1993). »
Par amendement n° II-4, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. Loridant, rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
Cet amendement a pour objet de tirer les conséquences
du vote par lequel le Sénat, lors de l'examen de la première partie du projet
de loi de finances, a refusé l'accroissement des recettes du fonds national
pour le développement du sport, et de revenir au périmètre initial de ce compte
d'affectation spéciale.
Il s'agit donc d'un amendement de cohérence ; même si je ne suis pas d'accord
sur le fond, je ne peux qu'inviter la Haute Assemblée à le voter !
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur
Loridant, la cohérence est parfois douloureuse !
(Nouveaux sourires.)
Je rappelle que le Gouvernement avait prévu d'instaurer, au profit du FNDS,
une taxe sur les droits de retransmission télévisée de manifestations sportives
importantes, telles que les matches de football. Son produit devait ensuite
être réparti entre des fédérations sportives qui ne bénéficient certes pas de
la même audience médiatique, mais qui assurent la formation sportive de
milliers, voire de dizaines ou de centaines de milliers de jeunes. Cette taxe
était donc vraiment utile.
Etant opposé à la suppression de cette contribution de solidarité du mouvement
sportif, je suis défavorable, par cohérence moi aussi, à l'amendement défendu à
contrecoeur par M. Loridant.
M. Emmanuel Hamel.
Et vous avez raison !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-4.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
L'article 44
bis
fait l'objet d'un amendement de suppression déposé par
la commission des finances, amendement de conséquence de sa position à propos
de l'article 31
bis
, lors de l'examen de la première partie du projet de
loi de finances.
Rappelons que ce dernier article prévoyait expressément la mise en place d'un
fonds de mutualisation alimenté par la perception d'une taxe sur les droits de
retransmission audiovisuelle des grands événements sportifs.
Un tel prélèvement, quoique ait pu en dire M. le rapporteur général, n'est pas
de nature démagogique.
Il correspond, au contraire, à une attente forte du milieu associatif et
sportif et participe d'une conception plus équilibrée de la pratique sportive
dans notre pays.
On ne peut en effet, de notre point de vue, comme certains sont tentés de le
faire un peu facilement, peut-être pour faire oublier leurs responsabilités
passées, mettre en cause l'action qui est conduite, depuis 1997, par le
ministère de la jeunesse et des sports afin d'améliorer la gestion, la
lisibilité et la transparence des crédits du fonds national pour le
développement du sport.
Nous ne voterons donc pas, on l'aura compris, l'amendement n° II-4 tendant à
supprimer l'article 44
bis
, d'autant que nous sommes à peu près
convaincus qu'il sera, le cas échéant, rétabli lors de l'examen du texte en
nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-4, repoussé par le Gouvernement.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 44
bis.
(L'article 44
bis
est adopté.)
Articles 45 et 46
M. le président.
« Art. 45. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2000, au titre
des services votés des opérations définitives des comptes d'affectation
spéciale, est fixé à la somme de 19 345 619 600 francs. »
- (Adopté.)
« Art. 46. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures
nouvelles des opérations définitives des dépenses en capital des comptes
d'affectation spéciale, des autorisations de programme s'élevant à la somme de
22 777 333 000 francs.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles
des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale, des crédits de
paiement s'élevant à la somme de 23 632 570 000 francs ainsi répartie :
« Dépenses ordinaires civiles 1 793 237 000 F
« Dépenses civiles en capital 21 839 333 000 F
« Total 23 632 570 000 F. »
- (Adopté.)
II. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE
Articles 47 à 50
M. le président.
« Art. 47. - Il est ouvert au sein du compte de commerce n° 904-06 "Opérations
commerciales des domaines", créé par l'article 10 de la loi n° 49-310 du 8 mars
1949 relative aux comptes spéciaux du Trésor, une subdivision intitulée : "Zone
des cinquante pas géométriques", destinée à retracer les recettes et les
dépenses afférentes aux cessions prévues à l'article L. 89-5 du code du domaine
de l'Etat. »
- (Adopté.)
« Art. 48. - I. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2000, au
titre des services votés des opérations à caractère temporaire des comptes
d'affectation spéciale, est fixé à la somme de 500 000 francs.
« II. - Le montant des découverts applicables, en 2000, aux services votés des
comptes de commerce, est fixé à 1 812 000 000 francs.
« III. - Le montant des découverts applicables, en 2000, aux services votés
des comptes de règlement avec les gouvernements étrangers, est fixé à 308 000
000 francs.
« IV. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie, pour 2000, au titre des services votés des comptes d'avances
du Trésor, est fixé à la somme de 379 400 000 000 francs.
« V. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie, pour 2000, au titre des services votés des comptes de prêts,
est fixé à la somme de 3 500 000 000 francs. »
- (Adopté.)
« Art. 49. - Il est ouvert au ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie, pour 2000, au titre des mesures nouvelles des comptes de prêts,
une autorisation de programme et des crédits de paiement s'élevant
respectivement à 1 450 000 000 francs et 850 000 000 francs. »
-
(Adopté.)
« Art. 50. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures
nouvelles des comptes de commerce, une autorisation de découvert s'élevant à 2
000 000 francs. »
- (Adopté.)
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.
Budget annexe des monnaies et médailles
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le budget annexe des monnaies et médailles.
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Maryse Bergé-Lavigne,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, le mouvement de croissance du budget annexe des
monnaies et médailles, qui se poursuivait depuis quatre ans, marque une légère
pause, avec une augmentation symbolique d'un peu plus de 1 %, qui contraste
avec la forte progression des années précédentes.
Les recettes devraient ainsi passer de 1 382,45 millions de francs en 1999 à 1
395,54 millions de francs pour l'année 2000. Quant aux dépenses de
fonctionnement, elles progressent dans les mêmes proportions, à hauteur de 1,36
%.
La réussite de la Monnaie de Paris pour le lancement de l'euro ne doit pas
nous amener à passer sous silence les incertitudes qui pèsent sur son
avenir.
S'agissant de la frappe de l'euro, la Monnaie de Paris s'efforce de figurer en
tête du groupe des monnaies européennes. Les investissements réalisés ou en
cours de réalisation ont ainsi permis de tripler la capacité annuelle de
production de l'établissement monétaire de Pessac, de sorte qu'aujourd'hui, sur
5 milliards de pièces frappées en Europe, plus de la moitié sont des pièces à
face française, conformément d'ailleurs aux prévisions du plan de charge. La
production se poursuit au rythme d'environ 13 millions de pièces par jour.
Les recettes de la frappe monétaire représentent le premier poste de recettes
du budget annexe.
On constate, en revanche, une baisse des résultats des activités du secteur
commercial, pour lequel les prévisions de recettes sont reconduites à leur
niveau de 1999, de façon très confiante semble-t-il eu égard au niveau des
ventes à la fin du premier semestre.
Ainsi, les recettes relatives à la vente des monnaies de collection françaises
au 30 juin 1999 sont en baisse de 51 % par rapport au chiffre de l'année
précédente.
Seul le secteur des monnaies étrangères affiche des résultats très
performants, avec plus de 53 millions de francs de recettes au 30 juin 1999,
excédant largement les 41 millions de francs prévus pour l'ensemble de
l'exercice.
Les résultats des activités concurrentielles et les coûts inhérents aux
activités de service public de la Monnaie - musée de la Monnaie, lutte contre
la contrefaçon, entretien de l'hôtel de la Monnaie - expliquent le déficit de
l'établissement parisien, à hauteur de 70 millions de francs, heureusement
compensé par les résultats de l'établissement monétaire de Pessac.
Dans un contexte de concurrence vive, le maintien de l'équilibre budgétaire
sans recours à la subvention de l'Etat mérite d'être souligné. Pour la deuxième
année consécutive, en effet, le budget annexe sera équilibré sans subvention,
grâce à un contrôle strict des dépenses.
Les dépenses de fonctionnement augmentent de 1,36 %, ce qui contraste avec la
progression de 34 % enregistrée en 1999.
Cette modération s'explique notamment par la réduction de 5 % des crédits du
chapitre « achats », justifiée notamment par la baisse des cours des métaux
conjuguée à une baisse des prix consentie par les façonniers de flans. La
Monnaie a en effet recours, pour la fourniture de flans, à plusieurs
sous-traitants installés en Aquitaine et dans l'Oise.
Par ailleurs, une stabilisation des crédits d'achats de l'établissement
parisien a été volontairement appliquée.
Le poste « impôts et taxes » connaît un accroissement de 11,5 % du fait de
l'évolution de la taxe professionnelle de l'établissement de Pessac, dont la
valeur locative des biens a considérablement augmenté avec la mise en place des
équipements liés à la fabrication de l'euro.
S'agissant du personnel, l'augmentation de la masse salariale, toutes mesures
confondues, est limitée à 1,08 %. Malgré un souhait d'amélioration de carrière
du personnel chargé de la mise en caisse des flans, qui n'a pu être satisfait,
le personnel, conscient des enjeux en termes de compétitivité, a pris sa part
dans l'effort de maîtrise des dépenses.
En ce qui concerne la progression des crédits de fonctionnement, on notera
l'initiative pédagogique qui se traduit par la constitution d'une enveloppe de
40 millions de francs en vue de la confection de kits de pièces d'euros
destinés aux commerçants et aux particuliers.
Des kits correspondant à deux rouleaux de chacune des huit coupures seront
donc vendus aux commerçants dès la seconde quinzaine du mois de décembre 2001,
bien que leur mise en circulation ne commence qu'à compter du 1er janvier 2002,
date à laquelle ils contribueront à l'introduction des nouvelles coupures en
rendant la monnaie directement en euros. Parallèlement, les particuliers qui le
désirent pourront également se procurer un kit individuel de vingt-quatre
pièces, correspondant à une valeur de 100 francs. Cette initiative devrait
permettre de réduire la durée de la double circulation monétaire.
Le volume d'investissement pour 2000 baisse de 13,1 %. Cette réduction traduit
la fin du lourd programme d'équipement nécessaire à la production de l'euro.
En conclusion, j'insisterai sur la nécessité impérieuse, pour la Monnaie, de
maintenir, d'une part, une politique commerciale dynamique permettant aux
recettes, au-delà d'un programme de frappe très exceptionnel, de compenser
l'impact négatif de certains secteurs de production, et, d'autre part, un
niveau optimal de compétitivité afin de ne pas obérer ses chances de réussite
dans la compétition européenne.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous propose, mes chers
collègues, conformément à la décision de la commission des finances, d'adopter
les crédits du budget annexe des monnaies et médailles.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, après le rapport si remarquable
et si complet qui vient de vous être présenté, je pourrais me contenter de dire
: « Je suis d'accord au nom du Gouvernement. »
(Sourires.)
En effet, Mme Bergé-Lavigne vous a fort bien présenté le budget annexe
des monnaies et médailles pour 2000 ; elle a souligné l'ampleur des efforts
réalisés au cours du plan d'entreprise Monnaies 2000 et les résultats très
positifs obtenus, qu'ils concernent la compétitivité, l'équilibre budgétaire
retrouvé, l'augmentation des capacités de frappe - heureusement très pacifique
! - ou la production de pièces, qui a été portée à son plus haut niveau.
Je me joins à elle pour rendre hommage non seulement à la direction des
monnaies et médailles, mais aussi à l'ensemble des personnels pour ces efforts,
qui vont être poursuivis.
Je ne reviendrai pas sur le programme de frappe record inscrit dans ce projet
de budget.
Je ne détaillerai pas non plus la stabilité des recettes, qui combinent à la
fois une progression des volumes fabriqués et une diminution des prix de
fabrication des monnaies compte tenu de la concurrence internationale.
Je n'insisterai pas trop non plus sur la maîtrise des dépenses. J'indiquerai
simplement à Mme Bergé-Lavigne, qui s'est inquiétée de nos prévisions peut-être
un peu trop optimistes concernant les recettes commerciales, que, grâce à son
dynamisme, l'administration des monnaies et médailles va bénéficier du succès
des nouveaux produits liés au passage à l'euro, dont certains sont édités en
liaison avec la Mission 2000.
Le secteur des monnaies de collection devrait confirmer ses succès passés et,
comme Mme Bergé-Lavigne, je crois que le budget pour 2000 traduit notre
confiance dans l'avenir de l'administration des monnaies et médailles.
Je vous demande donc, mesdames, messieurs les sénateurs, de l'approuver.
(Applaudissements.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget
annexe des monnaies et médailles et figurant aux articles 42 et 43 du projet de
loi de finances.
Services votés
M. le président.
« Crédits : 1 337 052 633 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 42 au titre des services
votés.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 39 800 000 francs ;
« II. - Crédits : 58 489 612 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 43 au titre des mesures
nouvelles.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le budget annexe des monnaies et médailles.
Economie, finances et industrie
I. - ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
(ET CONSOMMATION)
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'économie,
les finances et l'industrie : I. - Economie, finances et industrie (et
consommation).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, le projet de budget du ministère de l'économie,
des finances et de l'industrie pour 2000 comporte plus de 90 milliards de
francs de crédits, contre 61 milliards de francs l'an dernier. C'est la
conséquence de nombreuses modifications de structures, avec, en particulier, le
regroupement dans la même section de crédits auparavant dispersés entre
plusieurs d'entre elles.
Dans ce contexte, mon intervention se limitera aux moyens des services
traditionnels du ministère de l'économie et des finances. Leur identification
n'est pas toujours facile cette année, ce qui brouille quelque peu l'analyse.
Ainsi, selon les concepts que l'on privilégie, l'augmentation de votre budget
varie entre 1,8 % et 3,5 %.
Il faut dire qu'aux changements institutionnels viennent s'ajouter des
améliorations de la présentation budgétaire, qui participent du mouvement de
renforcement de la sincérité de ce budget.
Sur ce point, si vous aviez fait l'année dernière un pas de géant avec la
réintégration dans le budget de plus de 11 milliards de francs de crédits,
cette année, l'effort est de moindre ampleur. C'est normal, compte tenu des
régularisations déjà intervenues. C'est louable, puisque cela va dans le sens
de plus de transparence. C'est perfectible aussi, monsieur le ministre, et nous
avons consigné votre engagement de mettre en oeuvre les réintégrations qui
s'imposent encore dès l'an prochain.
Ce contexte, où les comparaisons quantitatives sont un peu incertaines, invite
à des observations plus qualitatives.
Sans surprise s'agissant de services qui restent des services de
main-d'oeuvre, ce sont les évolutions concernant les crédits de personnel qui
conditionnent l'ensemble : quelque 80 % des crédits des services financiers
sont consacrés au personnel.
Cette année encore, l'appréciation doit tenir compte des suppressions
d'emplois, qui atteignent 654 unités, et du transfert de 73 emplois vers
d'autres ministères. Malgré cette réduction des effectifs, les rémunérations
augmentent assez vivement, ce qui est la démonstration même d'une certaine
rigidité budgétaire.
Les charges de pensions, qui représentent une part importante des crédits -
plus de 18 % - varient, quant à elles, modérément. Mais il en sera autrement à
l'avenir puisqu'à l'horizon 2013 près de 60 % des effectifs actuels auront
cessé leur activité.
Evidemment, cette perspective, coûteuse pour les finances publiques, offre
aussi l'occasion d'aménagements de la force de travail du ministère. Mais nous
savons bien que, sans réorganisations internes, sans gains d'efficacité, ces
ajustements pourraient altérer les performances d'un ministère dont la qualité
est pour beaucoup le reflet de celle de son personnel.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Très bien !
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial.
Permettez-moi une dernière observation sur les
emplois, monsieur le ministre : nous relevons un certain décalage entre les
emplois budgétaires et les effectifs équivalents temps plein réellement
rémunérés. Il nous serait utile d'en connaître les raisons.
Votre ministère est en pleine modernisation, ce qui ne va pas sans quelques
difficultés. A titre personnel, si je comprends ces dernières, je n'en adhère
pas moins pleinement à la démarche rénovatrice qui est à l'oeuvre et qui est
centrée sur la recherche d'une amélioration des performances et d'une plus
grande efficience.
Pour le moment, cette démarche s'est exprimée surtout dans le contrat
d'objectifs et de moyens de la direction générale des impôts, sur lequel je
veux faire quelques commentaires.
Le contrat qui vaut pour la période 2000-2002 me paraît exemplaire dans son
principe. La définition d'objectifs de qualité assortis d'indicateurs précis,
l'énoncé des conditions à remplir pour les atteindre, la programmation de gains
d'efficacité et de leur utilisation, tout cela va dans le bon sens, celui d'une
substitution d'un budget d'objectifs à un budget de moyens.
Ce contrat pluriannuel devra évidemment tenir compte des prérogatives du
Parlement, qui restent caractérisées par une fréquence d'intervention plus
resserrée. Mais, à vrai dire, en tant que parlementaires, nous ne pouvons que
nous féliciter des engagements pris par la direction générale des impôts, dont
nous serons en mesure de vérifier l'exécution.
Cette démarche témoigne d'une ambition louable, je l'ai dit, mais ses
résultats restent à vérifier s'agissant des objectifs de performances, et
quelque peu limités s'agissant des objectifs d'efficience. Cette dernière
caractéristique est, je le crois, due au report des réformes de structures sans
lesquelles les gisements d'efficacité du ministère ne peuvent être entièrement
valorisés.
Nous savons que, dans le cadre de la mission 2000-2003, vous attendez de ce
point de vue la remise imminente du rapport de MM. Bert et Champsaur. Je
souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez nous le communiquer afin que
nous soyons en mesure d'en étudier les propositions. Nous avons beaucoup
apprécié de disposer du rapport de la mission Lépine sur une comparaison
internationale des coûts des services fiscaux et j'ai, quant à moi, élaboré un
rapport sur les missions fiscales des services déconcentrés de la direction
générale des impôts, mais j'en ai reporté la présentation afin de pouvoir tenir
compte de vos propres travaux.
Il faut sans doute prendre avec quelque précaution les conclusions du rapport
de la mission Lépine ; mais les orientations qu'il contient en filigrane sont
précieuses : recentrer les services sur l'usager, simplifier les structures
administratives, moderniser les modalités de recouvrements, ce sont bien là les
axes essentiels d'une modernisation encore en gestation.
Je dois dire que, d'ores et déjà, vous avez programmé la création d'une
direction des grandes entreprises et la suppression des directions régionales
des impôts. Mais les réformes de structures doivent être approfondies. Elles
doivent tout particulièrement concerner les réseaux de la direction générale
des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique.
Il faut d'abord tenir compte des usagers, contribuables et collectivités
locales, mais aussi respecter les conditions d'efficacité des missions.
Deux schémas concurrents sont, semble-t-il, à l'étude : l'un de spécialisation
des réseaux par contribuable, l'autre de spécialisation par fonction avec, d'un
côté, l'assiette et le contrôle, et, de l'autre, le recouvrement. Mes
constatations me conduisent à estimer que la première voie renforcerait les
doublons existants tandis que la seconde confirmerait une séparation des
fonctions d'assiette et de recouvrement qui n'est pas souhaitable.
Il me semble que le regroupement des moyens des deux directions générales, qui
n'est pas synonyme d'une altération du principe fort de la séparation de
l'ordonnateur et du comptable, constitue une troisième voie qui permettrait
d'allier simplification, meilleure efficacité et maintien d'une administration
territorialisée.
Le temps m'étant compté, je ne ferai qu'évoquer les relations entre certaines
entités financées à partir de votre budget et le Parlement.
Je suis de ceux qui considèrent ici que la fonction de contrôle et
d'évaluation du Parlement mérite, à côté de sa fonction législative, d'être
développée.
L'an dernier, j'en avais appelé à une plus grande ouverture de vos services.
J'avais rappelé que, chaque année, nous concédions aux différents gouvernements
d'importants moyens leur permettant de disposer d'une expertise de qualité.
J'avais estimé qu'en retour le Parlement devrait pouvoir mieux accéder à ces
moyens. Il me semble que nous avons progressé mais qu'il faut poursuivre sur
cette voie.
Je crois toujours que les études d'intérêt général auxquelles se livrent les
corps de contrôle, et en particulier l'inspection générale des finances,
devraient être communiquées aux rapporteurs spéciaux de la commission des
finances. Ce ne serait qu'appliquer convenablement les textes qui définissent
nos prérogatives et, en particulier, l'article 164 de l'ordonnance du 30
décembre 1958.
J'avais aussi demandé que soit réactivée la pratique conventionnelle qui liait
le Sénat à la direction de la prévision et à l'INSEE et aux termes de laquelle
ces deux administrations prêtaient leur concours technique à des études
commandées par nous.
Nous avons franchi une étape avec la remise d'une étude de la direction de la
prévision sur la dette publique. Il faut l'approfondir.
Enfin, l'excellent apport de la Cour des comptes à nos travaux, dont nous nous
félicitons, doit être encore amélioré par des collaborations ponctuelles
respectueuses de l'identité de chacun. Un certain nombre d'engagements ont été
pris. Nous comptons beaucoup sur leur entière application.
Monsieur le président, mes chers collègues, contre ma recommandation, la
commission des finances vous propose de rejeter les crédits du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie pour 2000, et je le regrette
fortement.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Odette Terrade,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour la consommation et la concurrence.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, avec les crédits destinés à la consommation,
nous abordons un budget dont les crédits sont modestes - ils ne représentent
que 2 % du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie -
mais dont l'importance est grande pour nos concitoyens, comme l'ont illustré,
cette année, les débats sur la sécurité alimentaire.
Le budget de la consommation et de la concurrence pour 2000 s'élève à 1,15
milliard de francs ; il est en augmentation de 2 % par rapport à 1999.
Cette augmentation permettra, d'abord, de renforcer les moyens d'action de la
direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression
des fraudes, la DGCCRF.
Cette hausse bénéficiera, ensuite, à la nouvelle Agence française de sécurité
sanitaire des aliments, l'AFSSA.
Ces crédits serviront, enfin, à soutenir l'action du mouvement consumériste et
celle de l'Institut national de la consommation, l'INC.
Je tiens à souligner, à ce propos, le rôle précieux et souvent ignoré des
associations de consommateurs. Grâce à plus de 4 000 permanences dans tout le
pays et à plus de 150 000 heures de présence sur le terrain, elles remplissent
une mission essentielle d'information et de protection des consommateurs.
Alors que l'Etat a investi ces associations d'un rôle croissant, leurs
subventions ont longtemps diminué. C'est pourquoi je me félicite que les
crédits qui leur sont alloués soient stabilisés pour 2000 : 50 millions de
francs, comme en 1999.
En revanche, je constate qu'aucune solution n'a encore été trouvée pour
remédier à la crise que traverse l'INC.
Depuis l'année dernière, deux rapports aux conclusions similaires, l'un issu
d'un groupe de travail présidé par le directeur du CRÉDOC, le centre de
recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie, l'autre issu de
l'inspection des finances, ont été remis aux parties concernées. Leurs
propositions devraient servir de base à une redéfinition des missions et de
l'organisation de l'INC. Il faut que le Gouvernement se saisisse de ce dossier
pour mettre fin à une situation qui dure depuis déjà trop longtemps !
Au-delà des évolutions de ces crédits, je voudrais attirer votre attention,
mes chers collègues, sur trois aspects de la politique de protection des
consommateurs, qui ont retenu l'attention de la commission des affaires
économiques et du Plan.
Le premier concerne la sécurité des produits et des aliments, qui doit être,
aujourd'hui, la priorité de la politique de la consommation.
La contamination à la dioxine, l'affaire Coca-Cola, les suites de l'épidémie
d'encéphalopathie spongiforme bovine ont, cette année, mobilisé les
consommateurs et les pouvoirs publics. Cette attention accrue des pouvoirs
publics s'est traduite, au niveau tant national qu'européen, par une
intensification des contrôles, dans certains cas par un renforcement des normes
de sécurité et, enfin, par une réforme des structures chargées de la veille
sanitaire.
Au niveau national, la mise en place de la nouvelle Agence française de
sécurité sanitaire des aliments a renforcé la capacité des pouvoirs publics à
évaluer les risques sanitaires. Cette politique de vigilance doit être
poursuivie sans relâche, afin que la confiance et la sécurité des consommateurs
soient restaurées.
Au niveau européen, l'annonce d'une réforme d'envergure visant à mieux
harmoniser les réglementations relatives à la sécurité alimentaire et à créer
une agence de sécurité sanitaire est également un motif de satisfaction. La
crise du boeuf avec nos partenaires britanniques nous a démontré la nécessité
d'une telle réforme.
Le deuxième aspect qui a retenu notre attention est le surendettement des
ménages. L'accroissement du nombre de dossiers s'est malheureusement poursuivi
cette année. La réforme opérée par la loi de lutte contre les exclusions a
néanmoins permis de mieux accompagner les personnes en situation de très grande
fragilité, ce dont je me félicite. En revanche, je m'inquiète de ce que les
moyens en personnels des commissions de surendettement soient suffisants, pour
ne pas allonger de façon excessive les délais de traitement des dossiers.
J'en viens au troisième aspect : le commerce électronique. Ce nouveau type de
commerce offre aux consommateurs l'opportunité d'acheter, à partir de leur
ordinateur, des produits du monde entier. De nombreuses enquêtes montrent que
la protection du consommateur est, dans ce domaine, encore très limitée.
C'est pourquoi il faudra suivre avec vigilance les négociations européennes
sur ce sujet, avant d'exminer au Parlement le projet de loi sur la société de
l'information que M. le Premier ministre s'est engagé à déposer d'ici à la fin
de la session.
Prenant acte de la volonté du Gouvernement de préserver les moyens du budget
qui retient aujourd'hui notre attention et de s'attaquer aux grandes questions
qui se posent dans ce secteur, je voterai à titre personnel ces crédits.
La commission des affaires économiques a, quant à elle, émis un avis
défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la concurrence et la
consommation.
(Applaudissement sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
et sur les travées socialistes.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'occasion
de cette intervention sur les crédits de la consommation, je n'insisterai
évidemment pas sur leur modicité. Ils traduisent l'aide apportée par l'Etat au
fonctionnement de l'Institut national de la consommation et les subventions
accordées aux associations de consommateurs.
J'évoquerai cependant une question d'actualité : la négociation entreprise
entre ces associations et les établissements de crédit sur la tarification des
services bancaires, notamment le traitement des chèques sur formule.
D'une façon plus générale, vous me permettrez de souligner que les
associations de consommateurs peuvent jouer un rôle dans le contrôle de
l'application de certaines dispositions législatives, par exemple celles qui
sont relatives à la réduction des taux de taxe sur la valeur ajoutée.
Je n'ose espérer en la matière que l'application des dispositions de l'article
3 de la présente loi de finances permette la prise en compte de l'apport des
associations agréées et l'évaluation des mesures que nous avons votées. Si des
dispositions sont prises pour assurer le suivi des dispositions concernées,
nous estimons qu'il serait souhaitable d'y associer les associations
agréées.
S'agissant de la négociation en cours sur le coût des services bancaires, vous
me permettrez de souligner le caractère quelque peu discutable de
l'argumentation de l'Association française des banques, qui veut mettre en
oeuvre une facturation des chèques émis, quel que soit leur montant ; cela pose
une question de principe.
La généralisation de l'usage des instruments de paiement dématérialisés,
mouvement que ce projet de loi de finances prolonge d'ailleurs en réduisant
encore les seuils de règlement en espèces, fait de la clientèle des
établissements de crédit une clientèle quasiment captive.
Concurremment, la mise à l'écart d'un certain nombre de clients par la voie de
l'interdit bancaire et la volonté de certains établissements de se «
débarrasser » d'une clientèle aux moyens très modestes - les « petits comptes »
dans le jargon bancaire- ont tendance à alléger certains coûts de
fonctionnement des établissements de crédit.
Nous observons que la démarche des établissements de crédit est conduite au
moment même où se déroule la négociation sur la réduction du temps de travail ;
elle participe du même objectif : comment dégager, au sein des coûts de
fonctionnement, des marges d'économies qui seront autant de moyens de parvenir
à une plus forte rentabilité des fonds propres ?
Vous comprendrez que nous soyons clairement opposés à toute perspective de
tarification des services bancaires qui apparaîtrait comme une nouvelle
inégalité d'accès au crédit entre les habitants de ce pays, selon leur fortune,
et entre les entreprises, selon le volume des transactions qu'elles
réalisent.
Monsieur le ministre, nous attendons du Gouvernement, sur ces questions, une
intervention claire et favorable aux intérêts des consommateurs, en rejetant
les orientations des établissements de crédit.
Tels sont les quelques points que je souhaitais évoquer à l'occasion de
l'examen de ces crédits.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Monsieur le président, le groupe du RPR n'utilisera certainement pas tout son
temps de parole. Peut-être ce sujet quelque peu austère ou cette fin de matinée
ne sont-ils pas propices à de grands développements...
Monsieur le ministre, n'ayant pas eu l'occasion de vous le dire publiquement,
je profiterai de cette intervention pour vous féliciter de votre accession à
ces importantes fonctions et vous dire toute l'estime que je vous porte.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Vous êtes trop
bon !
M. Yann Gaillard.
Cette estime s'adresse également à notre excellent collègue M. Angels,
rapporteur spécial de ce budget, qui nous a dit beaucoup de choses que je me
contenterai de reprendre sous une forme différente car, sur bien des points,
mon analyse technique ne diffère pas de la sienne.
M. Angels, dans son rapport, nous a livré un tableau des réformes en cours.
Certaines ne poseront pas de problème particulier, comme la création d'une
direction des affaires juridiques. Il s'agit seulement de réunir sous une même
autorité l'agence judiciaire du Trésor, le secrétariat de la commission
centrale des marchés et certains bureaux juridiques du secrétariat de l'Etat à
l'industrie, c'est-à-dire des activités assez disparates. Mais pourquoi pas
?
J'observe simplement que les problèmes juridiques les plus aigus que le
ministère doit traiter et ceux qui intéressent le plus nos concitoyens relèvent
du contentieux fiscal... En cette matière, est-il dans votre intention de
donner compétence à la nouvelle direction juridique sur le contentieux fiscal ?
Ce serait une révolution, mais elle aurait peut-être l'avantage de faire porter
par l'administration un regard neuf et parfois plus objectif que celui des
services fiscaux. Mais ne rêvons pas !
D'autres mesures visent à intégrer définitivement l'industrie au bloc «
finances ». C'est bien là un signe des temps. Le ministère de l'industrie, tel
qu'il fonctionnait au temps de l'Etat interventionniste n'est plus. Que cette
disparition soit le fait d'un gouvernement socialiste relève d'un phénomène
bien connu : la ruse de l'histoire. J'espère seulement qu'un gouvernement à
venir ne ressuscitera pas un ministère de l'industrie. Il faudrait alors mettre
à sa disposition, « en tant que de besoin », selon la formule consacrée, ses
anciens services.
Je passe sur la création d'une direction des relations avec le public et de la
communication, où l'on reconnaît bien la « patte » médiatique de l'ancien
ministre de l'économie et des finances, votre prédécesseur. Je souhaite
seulement que la première moitié du nom de cette nouvelle direction - les
relations avec le public - ne soit pas moins importante dans votre esprit,
monsieur le ministre, que la seconde, c'est-à-dire la communication. Mais je ne
doute pas, connaissant votre personnalité, que vous aurez à coeur d'apporter
votre attention à l'une et à l'autre.
J'en viens à la réforme la plus importante, celle qui est encore en projet et
qui, si elle est menée à son terme, constituera un véritable bouleversement,
portant sur les compétences de la direction de la comptabilité publique et de
la direction générale des impôts, ainsi que sur leurs éventuelles
rectifications de frontières.
C'est un fait, monsieur le ministre : votre maison est constituée de fiefs qui
se surveillent jalousement. Par ailleurs, le contribuable, dès lors qu'il n'est
pas un simple salarié, peut se perdre dans cette géographie administrative.
Je me souviens à ce propos d'une anecdote déjà ancienne. Il m'est arrivé,
quand j'étais à l'Inspection générale des finances, de constater qu'un notaire
avait été poursuivi par le receveur des impôts. Son crime ? Avoir payé, au nom
d'un de ses clients, sur les fonds disponibles à l'étude, le percepteur - on ne
disait pas encore « trésorier » - alors que c'était le comptable de la
direction générale des impôts qui avait pris des sûretés réelles et qui, donc,
devait passer avant son collègue. Je ne parvins pas à faire entendre raison aux
services du contentieux de la direction générale des impôts, alors qu'en tout
état de cause le Trésor public, au sens éminent du terme, avait reçu son dû.
On parle beaucoup d'une direction des grandes entreprises - au-dessus de 4
milliards de francs de chiffre d'affaires - qui donnerait à celles-ci un
interlocuteur unique aussi bien pour l'assiette que pour le recouvrement. Cette
création est-elle confirmée ? Des bruits contradictoires circulent, à la suite
notamment du départ de la direction générale des impôts de son directeur, M.
Beaufret.
Une telle réforme suscite de multiples questions, à commencer par celle du
contrôle. La direction des vérifications nationales et internationales, « hyper
service » de contrôle, spécialisé dans les grandes entreprises, justement,
verra-t-elle les limites de ses compétences - actuellement à 400 millions de
francs, si je ne me trompe - adaptées à cette nouvelle situation ?
Qu'il faille simplifier, rendre plus clair le partage des compétences entre
les deux directions, entre les deux baronnies, dotées de syndicats puissants,
j'en conviens. Mais faut-il une spécialisation par clientèle ? Ne faut-il pas
au contraire considérer la réalité technique des métiers et des compétences ?
Je suis pour ma part convaincu, et depuis longtemps - je reprends ici un
développement de M. Angels - que la bonne voie, c'est d'avoir en France une
grande administration d'assiette et de contrôle, la direction générale des
impôts, et une grande direction de recouvrement, la direction générale de la
comptabilité publique.
Cette séparation entre l'assiette et le recouvrement devrait même être érigée
en principe déontologique, tout comme la séparation des ordonnateurs et des
comptables. Cela entraînerait l'unification des réseaux, avec la disparition
des recettes des impôts, ce qui, certes, poserait des problèmes de carrière aux
personnels ; ce sont des problèmes délicats, mais pas insolubles.
D'après ce que l'on a dit, le rapport Lépine - mais je n'en ai pas eu
connaissance - juge que le système français de recouvrement serait moins
productif que ceux des pays comparables au nôtre. Cette improductivité est due,
sans doute, au nombre de petites taxes ou parataxes de faible rendement et de
fort coût de recouvrement qui existent encore dans notre système et sur
lesquelles le projet de budget revient. Elle résulte aussi - n'en doutons pas
- de la pluralité des réseaux publics de recouvrement - DGCP, DGI et douanes -
qui rend impossibles les économies d'échelle.
Je voudrais être sûr, monsieur le ministre, que, pour des raisons de
communication et d'affichage, on ne s'éloignera pas de ce qui devrait être, à
mon humble sens, la véritable réforme du ministère de l'économie et des
finances.
Je souhaiterais enfin, comme M. le rapporteur spécial, avoir quelques
informations sur les préconisations du rapport de MM. Champsaur et Bert, et sur
les conséquences que le Gouvernement souhaite en tirer pour la réforme si
nécessaire de ce ministère, dont on peut bien dire qu'il est le ministère par
excellence que l'on critique souvent, mais dont on ne peut se détacher
sentimentalement quand on a eu l'honneur d'y servir.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Avant de vous donner la parole, monsieur le ministre, je tiens à joindre mes
félicitations à celles qui vous ont été exprimées ce matin.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Merci !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mesdames,
messieurs les sénateurs, vous avez abordé le débat relatif aux services
financiers, c'est-à-dire au ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, et, implicitement, au budget dont j'ai la charge.
Je voudrais d'emblée remercier M. Angels comme Mme Terrade de leurs exposés
tant sur le budget des services financiers, dont je parlerai principalement,
que sur celui de la consommation qui, s'il est petit, n'est pas du tout
insignifiant, comme Mme le rapporteur pour avis l'a fort bien souligné.
M. Angels a décrit avec une grande clarté le budget des services financiers.
Il a souligné que ce budget, qui est, à structure constante, de 77,7 milliards
de francs, a connu une progression de 1999 à 2000 de 1,8 %, que je qualifierai
de raisonnable compte tenu du poids des charges de personnel.
Si l'on tient compte des changements de périmètre de ce ministère, ce budget
s'élève, en fait, à 90,7 milliards de francs.
Notons parmi les changements le fait que, pour l'an 2000, le budget soit
unique pour l'économie, les finances et l'industrie. Et, même si M. Gaillard
regrette le passé interventionniste de l'Etat dans le domaine industriel, je
crois que cela va dans le sens de l'histoire.
Le deuxième changement, plus technique que politique, tient à l'inscription
des crédits de fonctionnement et d'informatique dans un chapitre commun.
Le troisième changement - je l'ai évoqué tout à l'heure en intervenant dans le
débat sur les charges communes - tient à la réintégration de 10,8 milliards de
francs de crédits provenant des charges communes dans le budget proprement dit
du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il s'agit, pour
l'essentiel, des crédits d'aide extérieure, de soutien aux entreprises à
l'exportation ou de diverses conventions fiscales.
J'articulerai ma réponse autour de trois principes : la transparence, la
maîtrise et la modernisation.
En ce qui concerne la transparence, il y a eu 10 milliards de francs de
budgétisation l'an dernier. C'était effectivement un pas de géant, monsieur
Angels. Cette année, 2 260 milliards de francs sont inclus dans le budget du
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie grâce à trois
opérations.
Il s'agit, tout d'abord, de la budgétisation des crédits de l'article 55 - le
Sénat avait beaucoup insisté sur ce point dans le passé - pour 301 milliards de
francs. Ce sont des crédits qui étaient ouverts au bénéfice de la direction
générale des impôts à partir d'une recette de conservation des hypothèques pour
financer l'informatisation des conservations.
Il s'agit ensuite de la budgétisation de 1,7 milliard de francs de fonds de
concours principalement de l'industrie - contrôle technique des véhicules,
activités de mesure, installations classées, surveillance des installations
nucléaires - mais aussi des douanes et de la direction générale des impôts.
Enfin - je tiens à insister sur ce sujet puisque de nombreux sénateurs m'ont
adressé des correspondances - nous avons voulu reprendre dans le budget, à
hauteur de 247 millions de francs, des actions d'intérêt général qui sont
menées par certains centres techniques industriels : papier, fonderie, textile
et habillement, notamment. Nous nous sommes concertés avec les professionnels
pour ne plus faire supporter les taxes parafiscales qui finançaient ces centres
techniques industriels par la profession : leur financement sera dorénavant
garanti à partir de ressources générales.
Il me paraît par exemple important pour le textile et l'habillement de mettre
un terme aux taxes parafiscales qui handicapaient ce secteur dans une
compétition internationale déjà fort dure.
Nous n'avons pas terminé le travail, mais nous allons vers une application
complète de l'article 110 de la loi de finances pour 1996 qui prévoyait la
réintégration dans le budget des recettes et des dépenses extrabudgétaires.
Nous allons continuer, mon objectif étant d'achever cette réintégration en
2001, notamment pour l'ensemble des recettes et des dépenses de l'activité
d'épargne du Trésor public.
Toujours à propos de la transparence, je voudrais aborder un sujet qui ne
figure ni dans le rapport écrit ni dans le rapport oral de M. Angels : la
réforme essentielle qui porte sur la clarification juridique des régimes
indemnitaires des agents du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie.
Une tâche importante nous attend en la matière. Je l'ai annoncé aux syndicats
du ministère lors du comité technique paritaire du 17 septembre dernier, et je
voudrais éclairer la Haute Assemblée sur ce que je vais faire en 2000 sur ce
point essentiel.
Nous allons passer en revue des régimes indemnitaires qui sont souvent très
anciens, tout en tenant compte des spécificités des métiers, qui sont très
nombreux dans ce ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Nous ferons cet inventaire en respectant deux objectifs, en nous appuyant sur
trois principes et en appliquant une méthode.
Les objectifs sont, d'abord, de refonder juridiquement ces régimes dans
l'esprit d'une circulaire - vous en avez peut-être noté la publication, le 1er
octobre dernier, au
Journal officiel -
qui a été signée par le directeur
du budget et le directeur général de la fonction publique.
C'est un fait que, dans ce ministère - mais cela peut arriver dans d'autres -
certaines indemnités versées aux agents reposent sur des textes anciens - ils
datent souvent des années cinquante - et parfois juridiquement fragiles, ce qui
peut aller à l'encontre de l'intérêt des agents concernés.
Le premier objectif est donc de refonder juridiquement ces régimes
indemnitaires.
Le deuxième objectif est de permettre que cette réforme conduise à une gestion
à la fois dynamique et équitable des personnels du ministère en mettant en
place des dispositifs simples, transparents et justes, d'où les trois principes
que je veux mentionner pour rassurer la Haute Assemblée et, à travers elle, les
agents du ministère, car il est bien évident que cette réforme est faite pour
eux et non pas contre eux.
Premier principe : les agents du ministère doivent être assurés du maintien au
niveau actuel moyen de leur rémunération par corps et par grade.
Deuxième principe : si cela apparaît nécessaire, des dispositifs de garantie
individuelle devront être envisagés pour les agents susceptibles de subir une
perte de revenu.
Troisième principe : il est évident - mais il est bon de le rappeler -, que
les indemnités doivent être fiscalisées dans le cadre de dispositions de droit
commun.
Certes, les agents du ministère peuvent, en application de l'article 81 du
code général des impôts, percevoir des indemnités destinées à couvrir des frais
inhérents à leur fonction ou à leur emploi, lesquelles sont donc exonérées de
l'impôt sur le revenu. Mais j'ai demandé que toutes les indemnités de ce type
fassent l'objet d'un examen rigoureux au regard des critères définis par le
code général des impôts, et cela dès les revenus de l'année 2000.
J'en viens, enfin, à la méthode.
Cet inventaire ayant été réalisé de façon exhaustive, les textes nécessaires
seront définis en liaison avec les organisations syndicales, dont je vous ai
dit tout à l'heure qu'elles avaient été informées du lancement de ce projet le
17 septembre.
J'ai été un peu long sur ce projet de clarification des régimes indemnitaires,
mais je crois qu'il faut, en la matière, apporter transparence et équité, ce
qui n'était pas systématiquement le cas jusqu'à présent.
S'agissant maintenant du deuxième point, la maîtrise de la dépense du
ministère, M. Angels a fort bien souligné que l'évolution des effectifs allait
se faire en fonction des gains d'efficacité. En effet, cette administration a
la chance de pouvoir mobiliser les technologies les plus modernes, des
traitements répétitifs se prêtant à l'automatisation, et elle bénéficiera des
mesures de simplification qui vous sont proposées dans chaque budget.
Par conséquent, les effectifs vont diminuer l'an prochain, les gains
d'efficacité permettant la suppression de 654 emplois, soit 0,36 % de
l'effectif de l'ensemble du ministère, suppressions qui ne sont, en fait, que
des transferts de postes budgétaires vers d'autres ministères, M. le Premier
ministre ayant posé le principe de la stabilité des effectifs civils de
l'Etat.
Je passerai rapidement sur les crédits. Ils progressent, comme je l'ai dit
tout à l'heure, de 1,8 % à structure constante. Les crédits de personnel, sur
lesquels M. Angels a insisté, ainsi que ceux de l'action sociale représentent
57 % du budget, et donc une part importante.
Les moyens de fonctionnement sont stabilisés en volume, ce qui n'empêche pas
de financer des actions nouvelles, notamment - Mme Terrade y a fait allusion -
la participation de mon ministère au financement de l'Agence française de
sécurité sanitaire des aliments, dont vous savez qu'elle joue désormais un rôle
important.
Les crédits destinés à l'informatique permettront de bénéficier de toutes les
nouvelles technologies, et les crédits d'investissement, qui sont tout à fait
substantiels - 943 millions de francs en autorisations de programme et 982
millions de francs en crédits de paiement - seront, pour l'essentiel, affectés
à la rénovation des services territoriaux du ministère ainsi qu'à la
modernisation des moyens de la douane pour lutter contre la fraude.
J'en viens au troisième et dernier point : la modernisation du ministère. Elle
se fait par une démarche contractuelle et ambitieuse.
M. Angels a fort bien démontré que nous changions de logique. Nous passons en
effet d'une logique de dépenses à une logique de contrats d'objectifs.
Monsieur le sénateur, vous avez cité le contrat passé par la Direction
générale des impôts, en particulier par son directeur général, M. Jean-Pascal
Beaufret, qui, après deux ans d'un excellent travail, a décidé de rejoindre le
secteur privé, ce qui est son droit le plus strict. Ce contrat comporte des
objectifs précis qui sont assignés en matière aussi bien de contrôle fiscal que
de qualité d'accueil des contribuables. Le contrat, tout à fait exemplaire,
donne au directeur général des impôts une souplesse et une prévisibilité de
moyens sur la période 2000-2002, avec pour seule obligation - mais quelle
obligation ! - d'atteindre un certain nombre d'objectifs et de dégager certains
gains d'efficacité.
Ce contrat est une sorte de préfiguration de la réforme dont vous avez rappelé
les principes et que M. Dominique Strauss-Kahn et moi-même avons lancée en
avril dernier. Nous voulons - c'est simple à dire, mais ce n'est pas si facile
à faire - donner la priorité à l'usager, car le service public de l'impôt doit
être destiné, au premier chef, au contribuable.
Nous voulons aussi que cette réforme, tournée vers l'usager, ne se fasse pas
au détriment des agents. Elle doit au contraire se faire avec eux, avec les
cadres et l'ensemble du personnel du ministère.
L'objectif sur lequel je reviendrai d'un mot, à la suite de l'intervention de
M. Gaillard, est clair ; il s'agit de s'orienter vers un service public plus
performant, du type de celui que l'on trouve à EDF ou à France Télécom,
c'est-à-dire que l'usager doit pouvoir s'adresser à un fonctionnaire capable de
traiter la plupart des problèmes simples que se pose un contribuable pour
l'établissement et le paiement de son impôt.
Nous nous orientons donc, d'ici à 2003, vers ce que l'on appelle un
correspondant fiscal unique aussi bien pour les grandes entreprises - c'est la
direction des grandes entreprises dont M. Angels a parlé et qui sera mise en
place dès l'an prochain - que pour les petites et moyennes entreprises et les
particuliers. C'est la première orientation.
Nous entendons aussi simplifier les obligations déclaratives des
contribuables, salariés et pensionnés, en nous orientant, d'ici à 2001, vers
une « déclaration expresse », sur laquelle seront préimprimés leur état civil
et le montant de leur salaire ou de leur retraite, tel qu'il est déclaré par
des tiers. C'est la deuxième orientation.
Le dernier point de cette réforme vise à doter chaque petite ou moyenne
entreprise d'un correspondant économique unique.
Comme M. Angels l'a fort bien dit, nous avons confié à deux hauts
fonctionnaires, M. Paul Champsaur, directeur général de l'INSEE, et M. Thierry
Bert, chef du service de l'inspection générale des finances, une « mission 2003
». Je ne suis pas en mesure de transmettre leurs conclusions à M. Angels,
malgré tout le désir que j'ai de le faire, car ils ne m'ont pas encore remis
leur rapport. Mais il est bien évident que j'informerai les assemblées dès que
ce sera possible.
Une fois éclairé par ce rapport et tenant compte du dialogue continu qui est
mené avec les organisations syndicales, je prendrai alors des décisions dans le
courant du mois de janvier.
Comme M. Gaillard, M. Angels s'est également interrogé - cela ne m'a pas
étonné de la part d'un sénateur qui plus est plein de talent, sur l'évolution
des réseaux, celui des impôts et celui du Trésor.
A ce stade du débat, je m'en tiendrai à deux considérations.
Tout d'abord, contrairement à ce qu'a dit M. Gaillard, le ministère n'est pas
constitué de fiefs entourés de barbelés ou de frontières. Il a même beaucoup
progressé, depuis deux ans et demi, vers une mentalité de service à
l'usager.
Une chose est importante ; que l'usager bénéficie du meilleur service public
de l'impôt sur le terrain, que ce soit en milieu rural, en banlieue ou en
centre-ville. C'est ce que nous cherchons à obtenir afin qu'un contribuable
n'ait pas à aller d'un bureau à l'autre pour résoudre ses problèmes.
S'agissant ensuite du réseau du Trésor, auquel vous avez fait allusion,
monsieur Angels - et vous n'êtes pas le seul - le réseau des trésoreries répond
à deux types d'usagers : les contribuables, certes, mais aussi et surtout les
collectivités locales.
J'ai bien noté, à l'occasion d'un colloque organisé par M. le président de la
Haute Assemblée, le souhait que les fonctionnaires du Trésor apportent aux
collectivités locales, plus particulièrement aux plus petites d'entre elles, un
service d'information, un service de conseil renforcé. Je garde ce souhait
présent à l'esprit dans ma démarche qui vise à réformer les services du
ministère.
J'en viens aux questions posées par M. Angels.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez souligné qu'il existait un décalage
entre les emplois budgétaires et les effectifs équivalents à temps plein du
ministère. Cela montre le côté pointu de votre observation. Ce décalage, facile
à comprendre, tient au fait que les départs se font à un rythme continu, alors
que les recrutements se font, comme dans beaucoup d'administrations, à date
fixe. Il s'est réduit au cours des années précédentes, et il est aujourd'hui
inférieur à 1 %. Nous cherchons, autant que faire se peut, à ajuster les
emplois budgétaires et les emplois réels.
Vous avez mentionné - c'est une observation que je reprends à mon compte - la
qualité de la relation entre le Sénat, la direction de la prévision et l'INSEE.
C'est une collaboration ancienne. Vous avez eu la cordialité de souligner
qu'une étude récente sur la dette publique et des projections à moyen terme
émanant de l'INSEE avaient rendu service à la Haute Assemblée. Personnellement,
je m'en réjouis.
Etendant votre curiosité, vous avez demandé que les rapporteurs spéciaux, au
moins, aient accès à l'ensemble des rapports de l'Inspection générale des
finances. J'imagine que vos homologues présentent la même demande pour les
autres inspections, car l'Inspection générale des finances n'est qu'une
inspection générale parmi d'autres, comme chacun le sait.
(Mme Beaudeau
acquiesce.)
Il s'agit d'un service administratif placé sous mon autorité qui, comme tous
les services administratifs, est régi par des règles de communication. Le
principe est de ne pas rendre ces rapports publics, afin de préserver les
intérêts généraux protégés par la loi ; mais, lorsque ces derniers ne sont pas
en cause, il arrive, comme vous l'avez souligné, que le Gouvernement rende
publics certains de ces rapports. Je resterai ouvert dans ce domaine, afin,
sans être systématique, que la Haute Assemblée accède aux meilleures
informations.
Mme Terrade a dit que le budget de la consommation, s'il ne représentait que 2
% du budget général, était qualitativement un budget d'une grande importance.
Elle a aussi souligné le rôle de la sécurité alimentaire, d'une part, et celui
des associations de consommateurs, d'autre part.
Je n'ai pas de commentaire particulier à ajouter à l'exposé général que vous
avez fait, madame la sénatrice. Je répondrai seulement à deux de vos
préoccupations.
La première porte sur la réforme de l'Institut national de la consommation.
Lorsque nous sommes arrivés aux affaires, cet institut était en crise. Ma
collègue Marylise Lebranchu s'est attachée, depuis deux ans et demi, à lui
redonner un avenir, avec la double préoccupation qu'il soit effectivement
l'institut national de la consommation, mais aussi l'institut national des
consommateurs. Sur ce point encore, vous pouvez le constater, nous avons le
souci de l'usager.
Nous sommes donc décidés à renforcer ces deux missions essentielles de l'INC,
qui doit être à la fois une source d'information sur la consommation à
l'intention des associations et un centre d'information pour le grand public,
c'est-à-dire directement pour les consommateurs, grâce à ses médias de
qualité.
La réforme va donc s'articuler dans trois directions : premièrement, dans le
sens du développement des relations contractuelles entre l'INC et les
associations de consommateurs ; deuxièmement, dans la mise en place d'un
véritable réseau d'information des structures régionales d'appui au mouvement
consommateur ; troisièmement, vers l'ouverture de l'INC à tous les publics en
remodelant le conseil d'administration.
Dès le début de l'an prochain, un décret paraîtra pour concrétiser les
engagements que je prends devant vous.
Nous compléterons cette modernisation juridique par un contrat passé entre
l'Etat et l'Institut national de la consommation portant sur la période
2000-2002, de façon que ce dernier se voie fixer des objectifs bien déterminés
et dispose de moyens clairement définis pour fonctionner.
Le deuxième point qui vous préoccupe concerne les commissions de
surendettement.
Il est vrai qu'après la décision salutaire prise par M. le Premier ministre,
le 27 septembre, d'exonérer d'impôt les chômeurs en situation de
surendettement, ces commissions voient affluer les dossiers.
Mon ministère a accompli un gros effort d'information à ce propos. Nombre de
chômeurs en difficulté s'adressent soit au centre des impôts, soit à la
trésorerie de leur quartier : ils peuvent aller à l'un ou à l'autre ; il leur
suffit de rédiger une demande écrite d'exonération d'impôt en apportant le seul
justificatif du fait qu'ils sont au chômage. Ils n'ont même pas besoin de
prouver qu'ils ont déposé un dossier devant la commission de surendettement. En
revanche, ils devront l'avoir fait avant la date limite prévue.
Conscient que de nombreux chômeurs étaient concernés et qu'en dépit de
l'action des associations et des élus ils ne recevaient pas tous l'information
nécessaire en temps voulu, j'ai décidé le report de la date limite du 31
décembre au 31 janvier. Nous ne voulons pas que des chômeurs surendettés en
très grande difficulté dépassent la fin de l'année sans avoir eu le temps
d'accomplir les formalités requises. Aussi, je vous invite tous, mesdames,
messieurs les sénateurs, à faire connaître cette mesure, qui correspond à
l'intention généreuse du Gouvernement, de la majorité qui le soutient à
l'Assemblée nationale et de la valeureuse minorité qui l'appuie au Sénat.
Mme Beaudeau a évoqué à nouveau les relations entre les associations de
consommateurs et les banques. Je lui confirme qu'une négociation est en cours,
négociation difficile à mener, même par M. Jolivet, qui connaît fort bien le
sujet. Elle a pour objet d'étendre le droit de la concurrence à certains
aspects de l'activité bancaire, ce qui est un plus pour les consommateurs, et
d'adapter les pratiques bancaires qui existent en France à celles qui ont cours
en Europe.
Je suis cette négociation avec attention, madame Beaudeau, en portant un
intérêt particulier à la qualité du service rendu par nos banques, y compris
aux usagers les plus modestes, dont vous avez souligné l'importance, mais aussi
à la compétitivité de notre industrie bancaire.
M. Gaillard est intervenu de façon pondérée et plutôt encourageante sur la
réforme en cours. Je crois avoir répondu à la plupart de ses interrogations.
Je lui indiquerai simplement que la direction des activités juridiques, la
direction des relations du personnel - elle porte un nom plus joli que cela ! -
et la direction de la communication constituent des directions à part entière,
pour un ministère à part entière.
En ce qui concerne les grandes entreprises, les activités de gestion de
l'impôt qui seront réalisées par la direction des grandes entreprises et dont
M. Angels a parlé sont séparées de la direction des vérifications nationales,
qui est seule chargée du contrôle. Il est important de séparer la gestion et
les contrôles. Au demeurant, les autres principes que vous avancez méritent
d'être examinés.
Je conclurai en vous indiquant, mesdames, messieurs les sénateurs, que, selon
le rapport Lépine, le coût de l'impôt en France est à peu près équivalent à ce
qu'il est en Allemagne et en Italie, mais qu'il est trois fois supérieur à ce
qu'il est en Suède.
C'est pourquoi je compte poursuivre la modernisation du ministère avec toute
l'énergie possible dans l'intention d'améliorer le service aux usagers,
d'enrichir les tâches des agents du ministère et d'assurer le meilleur service
public au moindre coût.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen. - M. Gaillard applaudit
également.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen des crédits figurant aux états B et C et
concernant l'économie, les finances et l'industrie : I. - Economie, finances et
industrie (et consommation).
Je rappelle au Sénat que ces crédits seront mis aux voix aujourd'hui même, à
la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 4 806 315 457 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 6 121 105 900 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 1 607 450 000 francs ;
« Crédits de paiement : 1 158 870 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 7 383 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 2 113 280 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion l'article 68, qui est rattaché pour son examen aux
crédits concernant l'économie, les finances et l'industrie.
Economie, finances et industrie
Article 68
M. le président.
« Art. 68. - I. - L'article 2 de la loi n° 51-695 du 24 mai 1951 portant
majoration de certaines rentes viagères et pensions est ainsi rédigé :
«
Art. 2
. - Les taux de majoration applicables aux rentes viagères
mentionnées à l'article 1er de la présente loi sont révisés chaque année au
mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au
Journal
officiel
, par application du taux prévisionnel d'évolution en moyenne
annuelle des prix à la consommation de tous les ménages, hors les prix du
tabac, de l'année civile en cours, tel qu'il figure dans le rapport économique
et financier annexé au dernier projet de loi de finances. Les taux de
majoration ainsi révisés s'appliquent aux rentes qui ont pris naissance avant
le 1er janvier de l'année en cours et qui sont servies au cours de l'année
suivante. »
« II. - Pour les taux applicables aux rentes servies en 2000, l'arrêté
mentionné au I du présent article sera publié en janvier 2000.
« III. - Les taux de majoration résultant de l'application de l'article 2 de
la loi n° 51-695 du 24 mai 1951 précitée sont applicables aux rentes viagères
régies par la loi n° 48-957 du 9 juin 1948 portant majoration des rentes
viagères constituées au profit des anciens combattants auprès des caisses
autonomes mutualistes, ainsi qu'aux rentes constituées par l'intermédiaire des
sociétés mutualistes au profit des bénéficiaires de la majoration attribuée en
application de l'article L. 321-9 du code de la mutualité.
« IV. - L'article 1er de la loi n° 49-420 du 25 mars 1949 révisant certaines
rentes viagères constituées entre particuliers est ainsi rédigé :
«
Art. 1er
. - Sous réserve des dispositions des articles 2 et 4, les
rentes viagères ayant pour objet le paiement par des personnes physiques ou
morales de sommes fixées en numéraire soit moyennant l'aliénation en pleine
propriété ou en nue-propriété d'un ou de plusieurs biens corporels, meubles ou
immeubles, ou d'un ou de plusieurs fonds de commerce, en vertu d'un contrat à
titre onéreux ou à titre gratuit, soit comme charge d'un legs de ces mêmes
biens, sont majorées de plein droit selon les modalités prévues par l'article 2
de la loi n° 51-695 du 24 mai 1951 portant majoration de certaines rentes
viagères et pensions. »
« V. - Dans les articles 3, 4
bis
et 4
ter
de la loi n° 49-420
du 25 mars 1949 précitée, les mots : "et constituées avant le 1er janvier 1998"
sont supprimés. Dans l'article 4 de cette même loi, les mots : "qui ont pris
naissance avant le 1er janvier 1998" sont supprimés.
« VI. - Les dispositions de la loi n° 49-420 du 25 mars 1949 précitée
s'appliquent, pour une année donnée, aux rentes viagères constituées entre
particuliers antérieurement au 1er janvier de l'année précédente.
« Le capital correspondant à la rente en perpétuel dont le rachat aura été
demandé postérieurement au 30 septembre de l'année précédant celle au titre de
laquelle intervient la révision des taux de majoration sera calculé, nonobstant
toutes clauses ou conventions contraires, en tenant compte de la majoration
dont cette rente a bénéficié ou aurait dû bénéficier en vertu des dispositions
de l'article 1er de la loi n° 49-420 du 25 mars 1949 précitée.
« VII. - Les actions ouvertes par la loi n° 49-420 du 25 mars 1949 précitée,
portant sur les taux de majoration applicables au titre d'une année donnée,
peuvent être intentées dans un délai de deux ans à compter de la publication de
l'arrêté portant relèvement des taux tel que prévu au I du présent article.
»
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 68.
(L'article 68 est adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'économie, et les finances l'industrie : I. - Economie, finances et
industrie et consommation.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures
cinq, sous la présidence de M. Jacques Valade.)
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE.
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté
par l'Assemblée nationale.
II. - INDUSTRIE (ET POSTE)
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'économie, les finances et l'industrie : II. - Industrie (et Poste).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Je souhaite, monsieur le secrétaire
d'Etat, attirer votre attention sur les pratiques manducatoires de l'astérie,
plus communément appelée étoile de mer.
(Sourires.)
Cet échinoderme enveloppe de ses cinq branches sa proie - une huître,
généralement - force le muscle abducteur de la victime et aspire, lentement
mais sûrement, le contenu de la coquille.
Certains pensent peut-être que je suis hors de mon sujet. Il n'en est rien !
L'astérie est, en effet, semblable au ministère des finances, et l'huître
ressemble à ce que fut, en son temps, le ministère de l'industrie.
(Sourires.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
C'est une huître perlière !
(Nouveaux
sourires.)
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial.
L'an dernier, il avait perdu ses crédits de
personnel, son muscle abducteur en quelque sorte. Voici que, cette année, il
est phagocyté au titre de l'exercice 2000 ; il ne manque même pas la coquille
vide : c'est l'état néant, aux côtés des crédits pour 1999, de la colonne 2000
dans le « bleu » budgétaire.
L'an dernier, monsieur le secrétaire d'Etat, vous affirmiez que le budget de
l'industrie n'était pas soluble dans celui des finances. Cette année, il y est
dissous. Je ne me réjouis pas d'avoir eu raison ! Dissous, mais pas encore
digéré. On peut donc, tel un médecin légiste, fouiller les entrailles du budget
des finances pour y retrouver les traces des crédits de l'industrie.
Cette recherche viscérale conduit à les découvrir sous la forme de quatre
agrégats dont la somme constitue l'élément de comparaison possible avec
l'exercice 1999, en se souvenant que le périmètre des crédits de l'industrie
est hautement déformable et, par conséquent, son contenu extrêmement
changeant.
Le total de ces quatre agrégats s'élève à 16,601 milliards de francs, soit
8,18 % de plus qu'en 1999.
L'importance de cette variation doit être tempérée par le fait que les
agrégats considérés accueilleront, en 2000, 924 millions de francs en
provenance de sources diverses : budget des charges communes - 80 millions de
francs -, budgétisations de fonds de concours - 497,5 millions de francs -,
financements parafiscaux - 247 millions de francs -, à quoi s'ajoute une
provision de 100 millions de francs de subventions aux établissements publics
dans les domaines de l'énergie et des matières premières.
Si l'on s'en était tenu au périmètre de l'an dernier, la progression se serait
limitée à 2,6 %, correspondant à un total de 15,677 milliards de francs.
Dans l'un et l'autre cas, on ne peut que constater l'extrême faiblesse, en
valeur absolue, des crédits censés représenter - selon l'orthodoxie budgétaire
- les moyens de la politique industrielle.
En effet, même si l'on retient le chiffre le plus élevé, on n'atteint pas 1 %
du total des dépenses du budget général, puisqu'il faut se contenter de 0,98
%.
On ne peut qu'en conclure que les crédits budgétaires de l'industrie -
absorbés ou pas - n'ont qu'une importance pratique des plus faibles.
Si l'on cherchait des raisons supplémentaires de s'en convaincre, il suffirait
de citer le chiffre récemment publié par un périodique économique à partir de
deux rapports, l'un émanant d'une commission d'enquête de l'Assemblée nationale
et l'autre de l'Inspection générale des finances : le montant des crédits
distribués annuellement aux entreprises par l'Etat atteint 170 milliards de
francs, soit dix fois plus que le total des quatre agrégats concernant
l'industrie dans le budget du ministère des finances. Toujours selon le
périodique considéré, « cette dépense n'est ni rationnelle ni contrôlée ».
Je vous serais obligé, monsieur le secrétaire d'Etat, de vouloir bien faire
connaître au Sénat ce qu'il faut penser de ces deux appréciations
particulièrement sérèves.
Revenant aux quatre agrégats, qui étaient cinq l'an dernier et six il y a deux
ans - toujours le périmètre déformable ! - on note qu'ils recouvrent
respectivement l'énergie et les matières premières, pour 27 % du total,
l'accompagnement des mutations industrielles, pour 29 %, un agrégat fourre-tout
intitulé « Action sur l'environnement des entreprises et modernisation des PME
», pour 27 %, et, enfin, la recherche industrielle et l'innovation, pour 17
%.
Il ne saurait être question, dans les limites de temps qui me sont imparties,
d'entrer dans le détail de ces différents agrégats, que l'on pourra retrouver
en se reportant à mon rapport écrit.
On doit toutefois signaler deux évolutions qui, sans être allées à leur terme
en tous domaines, n'en traduisent pas moins un effort d'orthodoxie budgétaire,
aussi louable que paradoxal dans la mesure où il s'applique à un budget
juridiquement disparu : il s'agit, d'une part, d'une meilleure prise en compte
des reports de crédits, véritablement excessifs dans le passé - ainsi que
l'avait signalé la Cour des comptes - et, d'autre part, de la budgétisation de
certains crédits échappant jusqu'alors à cette procédure.
Enfin, certaines variations particulièrement importantes, eu égard au montant
du total des crédits, sont à signaler. Les crédits consentis à l'aide à la
construction navale augmentent de près de 61 %, soit de 500 millions de francs,
pour atteindre 1 287 millions de francs, ce qui devrait correspondre aux
besoins réels de l'exercice.
La subvention à Charbonnages de France, de son côté, décroît pour le quatrième
exercice successif, en dépit de la médiocrité des résultats, et passe de 2 870
millions de francs à 2 840 millions de francs, qui seront complétés en cours
d'année par une dotation en capital provenant du compte d'affectation spéciale
des recettes de privatisation.
L'aide à La Poste au titre des frais de transport de la presse augmente de 50
millions de francs, pour atteindre 1 900 millions de francs.
Le soutien au développement de la recherche industrielle fléchit quelque peu,
se situant à 1 723 millions de francs.
Le Commissariat à l'énergie atomique, le CEA, recevra 2 071 millions de
francs, plus 1 % de subvention de fonctionnement, auxquels s'ajouteront 959,5
millions de francs de subvention à l'Institut de protection et de sûreté
nucléaire, ainsi qu'une provision de 100 millions de francs, qui devrait
permetre de faire face au coût de transformation de cet institut en
établissement public administratif indépendant du CEA.
Le CEA reçoit, par ailleurs, 3 050 millions de francs du ministère de la
recherche. Les crédits d'investissement restent constants à 750 millions de
francs. Les besoins du CEA en matière d'assainissement font l'objet d'un assez
long développement dans le rapport qui vous a été remis, mais on ne peut
omettre de signaler ici que la faiblesse des crédits en la matière risque, si
l'on ne prend pas les mesures nécessaires, de mettre en péril le patrimoine de
l'entreprise.
Après cette revue des crédits, nous en arrivons au stade habituel et final de
tous le rapports budgétaires, c'est-à-dire l'exposé au Sénat de la position de
la commission des finances et le vote ou le rejet du budget. Il me faut, en
l'espèce, déroger à cette pratique. Un non-budget ne peut, en effet, appeler
qu'un non-vote.
Le sort des crédits « agglomérés » de l'industrie sera finalement dépendant de
celui du budget du ministère des finances sur lequel la commission des finances
a porté un jugement négatif. Il ne me reste donc, monsieur le président,
monsieur le secrétaire d'Etat, me chers collègues, après cette ordonnance de
non-lieu, qu'à vous remercier de votre attention.
(Applaudissements sur les
travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Grignon, rapporteur pour avis.
M. Francis Grignon,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour l'industrie.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat,
mes chers collègues, les crédits de l'industrie ont été fondus, cette année, au
sein du budget du Grand Bercy, ce qui leur enlève toute lisibilité et amène à
se poser la question de l'importance que leur attache réellement le
Gouvernement.
Je ne reviendrai pas sur les chiffres ; notre collègue Jean Clouet, rapporteur
spécial, vient de les détailler. Je rappellerai simplement que ce budget est
largement absorbé - pour les deux tiers - par des dotations à divers
établissements publics, d'enseignement ou de recherche, auxquelles il faut
ajouter les crédits de reconversion et de restructuration pour mesurer la
faible proportion de crédits « offensifs », disponibles pour encourager et
diffuser l'innovation dans le tissu industriel français.
Ce sont les crédits « défensifs » qui augmentent le plus, et notamment
l'accompagnement des mutations industrielles - plus 9,7 % - parmi lesquels
figurent la subvention d'exploitation à Charbonnages de France - 2,8 milliards
de francs - et l'aide à la construction navale - 1,2 milliard de francs. Quelle
est réellement l'efficacité de cette aide, monsieur le secrétaire d'Etat,
devant les perspectives inquiétantes auxquelles fait face ce secteur ?
Je regrette que l'industrie, qui est le poumon de l'économie française, dont
elle représente 26 % du PIB, 82 % des exportations et 3,8 millions des emplois,
ait un rôle méconnu du grand public et surtout des jeunes : un récent sondage
paneuropéen auprès des étudiants a montré que les jeunes Français sont
particulièrement peu attirés par l'industrie ; seulement 15 % souhaitent y
travailler.
Plusieurs éléments me préoccupent.
Les petites entreprises industrielles sont d'abord les moins bien préparées au
passage à l'an 2000 et à l'adoption de l'euro. Elles vont avoir à supporter les
coûts de la réduction autoritaire du temps de travail à 35 heures, qui risque
de pénaliser la compétitivité d'une industrie fortement ouverte à l'export et
qui souffre déjà d'un coût du travail trop élevé.
Certains secteurs sont particulièrement fragiles. Dans le textile, plutôt que
de généraliser, comme le fait laBelgique, les allégements de charges pour les
rendre « eurocompatibles », le Gouvernement a choisi la voie du remboursement
des aides du plan textile, qui devront commencer en avril 2000 et qui
s'élèveront de 500 millions de francs à 600 millions de francs. Je crains que
cette charge ne mette en difficulté le secteur.
Les projets du Gouvernement de taxation de la consommation intermédiaire
d'énergie sont également inquiétants. Le secteur de la chimie, par exemple, qui
représente 180 000 emplois et 470 milliards de francs de chiffre d'affaires,
aura à subir, d'une part, l'élargissement de la TGAP, la taxe générale sur les
activités polluantes, qui pourrait faire passer sa contribution de 0,5 milliard
de francs en 1998 à 3,45 milliards de francs en 2000, et, d'autre part, la
taxation, en 2001, des consommations intermédiaires d'énergie, dont il est le
plus gros consommateur industriel, qui pourrait engendrer une charge
supplémentaire d'environ 1,7 milliard de francs. Dès lors, le surcoût total net
pour ce secteur s'élèvera à 4,4 milliards de francs d'ici à l'an prochain.
D'autres secteurs sont également menacés : l'aluminium et les cimenteries,
notamment.
Le « maquillage » environnementaliste de ces prélèvements, en particulier la
théorie du « double dividende », ne suffit pas, à mon sens, à les justifier.
C'est la compétitivité, donc les emplois, de notre industrie qui est en jeu.
Dans ces conditions, la commission des affaires économiques a émis un avis
défavorable à l'adoption des crédits relatifs à l'industrie dans le projet de
loi de finances pour 2000.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Besson, rapporteur pour avis.
M. Jean Besson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour l'énergie.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, en 1998, la France a connu, dans le domaine de l'énergie, une
situation particulièrement remarquable, mais qui est passée quelque peu
inaperçue. Nous avons, en effet, enregistré la plus faible facture énergétique
depuis 1970. Notre pays continue d'utiliser l'énergie de la façon la plus
efficace possible dans le monde occidental. Nous ne saurions cependant nous
reposer sur nos lauriers. Le doublement du prix du pétrole au premier semestre
1999 rend plus que jamais nécessaire la poursuite de la politique de maîtrise
de la demande d'énergie relancée en 1998.
Parmi les grands objectifs que nous nous sommes fixés en matière énergétique,
je considère que le maintien d'une capacité de production nucléaire et la
maîtrise des technologies y afférente sont déterminants. L'exemple de
l'Allemagne montre qu'un grand pays industrialisé dépourvu de ressources
énergétiques propres ne peut se passer du nucléaire. Dans cette perspective, la
construction de l'
European pressurized water reactor
, l'EPR, est une
nécessité incontournable.
Dans le droit-fil des observations de la commission d'enquête du Sénat,
présidée par M. Valade, sur la politique énergétique de la France, j'estime
également qu'il convient de renforcer aussi bien le contrôle de la sûreté des
installations nucléaires que celui de l'aval du cycle. Monsieur le secrétaire
d'Etat, dans quel délai le Gouvernement entend-il présenter au Parlement un
projet de loi sur ce point ?
S'agissant des liens entre la politique de l'énergie et la protection de
l'environnement, je suis, à titre personnel, favorable au principe d'une
extension de la taxe générale sur les activités polluantes aux consommations
intermédiaires d'énergie. Je note d'ailleurs que le Gouvernement a respecté les
engagements pris en 1999, en attribuant, pour 2000, un financement de 500
millions de francs à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie, l'ADEME. Il conviendrait, cependant, de mettre en oeuvre les trois
dernières dispositions, toujours inappliquées, de la loi sur l'air et
l'utilisation rationnelle de l'énergie.
Aucun progrès ne pourra être réalisé en matière de protection de
l'environnement sans limitation des émissions de gaz dues au développement des
transports. En apparence, notre pays se trouve dans une position favorable par
rapport à ses voisins européens, puisqu'il est seulement tenu de maintenir ses
émissions à leur niveau actuel. En réalité, comme nous sommes déjà parmi les
Etats dont les rejets sont les plus faibles, nous devrons réaliser des efforts
très pointus pour limiter une croissance des émissions qui semble
inéluctable.
C'est pourquoi il convient de prêter une attention particulière à la
négociation de la deuxième phase du programme européen « auto-oil ». En effet,
si, dès janvier 2000, les carburants distribués à la pompe seront plus «
propres », beaucoup reste à faire pour respecter nos engagements de Kyoto. Dans
ces conditions, les pouvoirs publics doivent soutenir puissamment la
modernisation du parc national de raffinage.
En ce qui concerne le gaz, il est indispensable, monsieur le secrétaire
d'Etat, de favoriser l'utilisation du gaz naturel véhicule, le GNV, et du gaz
de pétrole liquéfié, le GPL, qui pose cependant certains problèmes de sécurité
; ce qui s'est produit récemment dans la région de Lyon en témoigne.
Quelles mesures entendez-vous prendre concrètement, monsieur le secrétaire
d'Etat, afin d'assurer la sécurité des personnes, notamment celle des
sapeurs-pompiers ?
D'un point de vue général, la commission des affaires économiques demeure
convaincue de la nécessité de soutenir l'utilisation des carburants de
substitution dans les transports, en particulier des biocarburants.
Il est indispensable de procéder, dès que possible, à la transposition de la
directive « électricité », afin de permettre le développement des activités
d'Electricité de France à l'étranger.
Je tiens également à souligner combien il est nécessaire que les décrets
d'application de la loi permettent aux collectivités concédantes d'exercer
pleinement leur pouvoir de contrôle sur leurs concessionnaires, conformément à
un amendement que le Sénat a adopté.
Nous souhaitons, enfin, que la directive « gaz » soit également rapidement
transposée.
En ce qui concerne le secteur pétrolier, je me félicite que le système d'aide
aux petits distributeurs de carburants fonctionne désormais.
La part provenant des énergies renouvelables progresse, en particulier grâce à
l'électrification des sites isolés, notamment dans les départements
d'outre-mer, à la diffusion des chauffe-eau solaires, à la création de
chaufferies au bois dans des bâtiments collectifs et à la multiplication des
fermes d'éoliennes. Compte tenu de l'avance prise par l'Allemagne dans ce
secteur précis, notre pays doit poursuivre son effort.
Avant de conclure, je me permettrai d'indiquer que la commission des affaires
économiques regrette - on en a parlé à plusieurs reprises depuis deux ou trois
ans - que le Gouvernement tarde à publier les décrets d'application de la loi
relative à l'indemnisation des victimes d'effondrements miniers.
La politique énergétique se développe dans la longue durée, et je me réjouis
que le Gouvernement conserve le cap fixé depuis plusieurs décennies. Mais,
contrairement aux conclusions favorables de son rapporteur, la commission des
affaires économiques et du Plan a émis un avis défavorable à l'adoption de
crédits de l'énergie inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour les technologies de l'information et La Poste.
Monsieur le président,
monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits relatifs aux
technologies de l'information et à La Poste, qui s'élèvent à 2,774 milliards de
francs, ont bizarrement été rangés, cette année, au sein d'un agrégat
fourre-tout du budget du ministère de l'économie consacré aux actions sur
l'environnement et à la modernisation des entreprises. Faut-il y voir, monsieur
le secrétaire d'Etat, le signe d'une dilution de la volonté politique à l'heure
où les bouleversements rapides du paysage mondial rendent urgentes les prises
de décisions ?
Comment ne pas être frappé du décalage entre le rythme, rapide, d'évolution du
marché postal et celui, à petits pas, de notre opérateur national ? La Poste
dispose d'une rentabilité trop faible, son résultat net ne représentant que
0,36 % de son chiffre d'affaires, sur laquelle pèsera, en outre, le coût du
passage aux 35 heures qu'elle doit financer sans aide de l'Etat. Elle ne prend
qu'à petite vitesse les tournants stratégiques pour son avenir.
Le développement du commerce électronique lui offre des opportunités, dont
elle ne semble pas avoir pris toute la mesure.
La conclusion d'une alliance internationale dans la messagerie, vitale pour
son avenir, n'est toujours pas aboutie, à l'heure où les postiers allemands,
anglais et néerlandais lèvent des dizaines de milliards de francs pour prendre
position en Europe.
Mais la tutelle fait bien peu, en réalité, pour assurer l'avenir de
l'opérateur postal.
La Poste n'a toujours pas de capital.
La directive de 1997 d'ouverture à la concurrence a été transposée « à la
sauvette », par amendement à la loi d'orientation pour l'aménagement et le
développement durable du territoire. Vous savez tout le mal que le Sénat a
pensé de cette procédure, monsieur le secrétaire d'Etat.
Le complément législatif de cette moitié de transposition, promis à la
commission supérieure des postes et télécommunications, se fait toujours
attendre, alors que le Sénat réclame l'élaboration d'une grande loi postale.
La renégociation de la directive postale doit être un objectif majeur de la
présidence française de l'Union européenne, à compter du 30 juin prochain, pour
nous permettre de voir clair, au-delà de l'horizon 2003, sur le degré de
libéralisation du marché postal européen. Le Gouvernement en est-il
véritablement conscient ?
Les télécommunications sont entrées dans l'ère de la mondialisation, qui se
caractérise par une très vive croissance, des changements technologiques
perpétuels et une vague de concentrations par fusions-acquisitions d'une
ampleur planétaire jamais observée dans l'histoire boursière.
Face aux concentrations fulgurantes en cours, France Télécom, aujourd'hui
orphelin d'une stratégie internationale globale depuis sa rupture avec Deutsche
Telekom, semble condamné à régresser au niveau mondial : de quatrième opérateur
il y a trois ans, il est désormais relégué à la huitième place et devrait
bientôt se situer entre le douzième rang et le quatorzième rang mondial.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement est-il disposé à lui donner les
moyens d'être autre chose qu'un simple opérateur régional en utilisant, par
exemple, pour sa croissance externe, la marge laissée par les 12 % du capital
encore détenus par l'Etat au-delà des 50 % légaux ? Votre majorité y est-elle
prête ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, quand sera mis en place l'annuaire universel
des abonnés téléphoniques, fixes et mobiles ? Quand les tarifs téléphoniques
sociaux entreront-ils en vigueur ? Quand la taxe professionnelle de France
Télécom sera-t-elle transférée aux collectivités locales ?
M. Sautter avait pris l'engagement devant le Sénat, l'an dernier, d'y procéder
dans un délai d'un an. Certes, près de 6 milliards de francs sont en jeu ; mais
l'Etat n'a-t-il pas perçu, en 1999, 4,3 milliards de francs de dividendes en
tant qu'actionnaire de France Télécom ?
Au moment où commence à s'appliquer sur le territoire la loi Chevènement, avec
les changements qu'elle induit, plus de 15 000 communes attendent votre
réponse, monsieur le secrétaire d'Etat. Les bases actualisées fournies par
France Télécom sont maintenant à votre disposition. Qu'attendez-vous ?
Le manque de confiance dans les collectivités locales s'est d'ailleurs
manifesté lors de la discussion de l'amendement du Sénat au projet de loi
d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire sur les
infrastructures de « fibres noires ». En effet, le texte finalement adopté ne
lève pas les incertitudes juridiques et impose des conditions de location de
ces infrastructures propres à leur ôter toute rentabilité. D'ailleurs, un
recours a été déposé auprès de la direction de la concurrence de la Commission
européenne, qui était favorable à de telles initiatives. Cette question, que
vous avez cru évacuer par la porte, pourrait bien revenir par la fenêtre,
monsieur le secrétaire d'Etat !
La commission des affaires économiques et du Plan a donc émis un avis
défavorable à l'adoption des crédits consacrés à La Poste et aux technologies
de l'information dans le projet de loi de finances pour 2000, afin de marquer
sa désapprobation face au manque d'ambition qui caractérise le soutien apporté
par le Gouvernement à ces deux secteurs d'avenir.
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe socialiste, 32 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 9 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 13 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
dans cette discussion budgétaire, je souhaite attirer plus particulièrement
votre attention sur La Poste.
Monsieur le secrétaire d'Etat, l'an dernier, à pareille occasion, vous voulant
rassurant. vous avez conclu en ces termes : « Le Gouvernement a pour objectif
de conforter la présence postale territoriale et, naturellement, le réseau
postal rural. » Le Gouvernement a-t-il tenu ses engagements ? Les tiendra-t-il
avec le budget qu'il nous propose ? Le moratoire des services publics de 1993
avait conduit La Poste à ne fermer aucun bureau en zone rurale. Etes-vous prêt
à maintenir le moratoire en zones rurales ?
Vous déclarez vouloir mettre en oeuvre deux objectifs complémentaires :
maintenir et réorganiser le réseau postal.
Vous aviez promis le maintien de réseau postal, mais, en fait, vous tentez de
le réaliser dans des conditions qui paraissent peu acceptables ! Je souhaite
souligner le refus des élus ruraux quant aux pratiques qui se mettent
progressivement en place.
En tant que président de l'association des maires de mon département, en
liaison avec mes collègues, et en tant que contribuable, je tiens à souligner
que les administrés des zones rurales sensibles doivent parfois payer deux fois
le maintien de leur bureau de poste : une fois, par leurs impôts, une autre
lorsque leur commune cofinance. A titre d'exemple, dix communes de la Meuse ont
dû signer une convention avec La Poste à l'échelon départemental, les communes
fournissant le local et assurant les frais de fonctionnement, La Poste
finançant le personnel.
Si cette méthode peut, au premier abord, sembler satisfaisante, car elle
permet effectivement de maintenir une présence postale, elle est cependant
insidieuse. En effet, l'Etat se décharge progressivement de ses responsabilités
financières sur certaines collectivités locales. Cette pratique rompt avec le
principe d'égalité devant l'accès aux services publics, ce qu'un élu de la
République, comme tout citoyen ne peut accepter.
Monsieur le secrétaire d'Etat, entendez-vous développer ce dispositif dans les
zones rurales ?
Le Gouvernement déclare vouloir réorganiser et moderniser le réseau postal.
Soit ! S'il est nécessaire que le réseau puisse s'adapter à l'évolution de la
population, il doit le faire avec le souci constant de lutter contre la
désertification rurale. Cette réorganisation des bureaux de tri et de
distribution peut dissimuler de futures suppressions. A titre d'exemple, dans
mon département, le Gers, le bureau de poste de Castelnau-d'Auzan est en cours
de réorganisation avec celui d'Eauze. Les habitants de Castelnau craignent de
perdre un bureau de poste qui participe à l'activité de la commune et ils
estiment qu'ils ont droit au même service public que leurs concitoyens des
villes. Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous rassurer sur la
finalité de votre politique ?
Pour l'avenir, je formulerai d'autres inquiétudes. Pouvez-vous nous préciser
les conséquences de l'application des 35 heures sur la présence postale ?
Pouvez-vous nous assurer que la réduction du temps de travail ne va pas
entraîner mécaniquement la fermeture de certains bureaux ?
Lors du débat sur l'aménagement du territoire, vous vous étiez engagé à
déposer un projet de loi postale dans des délais raisonnables. Pouvez-vous nous
apporter des précisions sur son calendrier ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, la collectivité nationale dans son ensemble est
prête à assumer le coût des missions d'intérêt général, entre autres celles de
La Poste. Les Français subissant un niveau de prélèvements obligatoires sans
précédent, ils estiment que leurs impôts doivent au moins financer ces
services, évalués pour les zones rurales à 2 milliards de francs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est avec une attention toute particulière que
les petites communes rurales écouteront vos réponses. Comme la majorité du
groupe du Rassemblement démocratique et social européen, je suivrai l'avis de
la commission des finances concernant le budget de La Poste.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'innovation et la recherche industrielle constituent l'une des grandes
priorités de ce budget de l'industrie dans lequel sont intégrés les crédits
concernant La Poste et les télécommunications. M. Weber interviendra sur les
crédits de l'industrie. J'évoquerai, pour ma part, ceux de La Poste et des
télécommunications.
Le développement de l'accès à la société de l'information prend, dans vos
propositions budgétaires, une place essentielle, monsieur le secrétaire
d'Etat.
Cette orientation volontariste a notre adhésion, car nous devons soutenir, à
tous les niveaux, les initiatives qui s'appuient sur le triptyque université,
recherche, industrie.
Vous comprendrez dès lors, monsieur le secrétaire d'Etat, combien j'apprécie
l'effort important fait en direction du groupement des écoles des
télécommunications avec des créations de postes très significatives.
La volonté conjointe des ministères de l'industrie et de la recherche permet
de maintenir, en Bretagne, un savoir-faire en optroélectronique et
microélectronique des plus performant.
Monsieur le ministre, je vous en remercie sincèrement.
Les crédits proposés dans votre budget pour La Poste et les télécommunications
sont, à paramètre constant, en hausse de 4,12 %, après une progression de 1,34
% en 1999.
La croissance des moyens accordés à l'autorité de régulation des
télécommunications, l'ART, à l'agence nationale des fréquences, au GET, les
respects de l'engagement de l'Etat dans ses contributions aux charges de
pension et au financement du transport de la presse vont dans le bon sens.
Votre budget aura, dès lors, notre soutien.
Je souhaiterais dépasser les considérations d'ordre budgétaire pour inscrire
dans notre débat six points qui me semblent fondamentaux.
S'agissant tout d'abord de La Poste, la situation du service public postal
s'est objectivement améliorée depuis 1997.
La Poste est sortie de ses difficultés financières et s'est engagée dans une
dynamique de développement. Les relations sociales au sein de l'entreprise se
sont améliorées. Un effort volontariste a été engagé en direction des
personnels contractuels à statut précaire. Le dialogue avec les élus a été
rétabli.
Il s'agit bien pour l'opérateur à la fois d'être en capacité d'exercer des
missions de service public et d'être présent dans le secteur concurrentiel.
Nous ne pouvons, dès lors, nous trouver dans le camp de ceux et de celles qui,
présentant La Poste comme une entreprise en grand péril, prétendent « sauver La
Poste » en ouvrant la porte à plus de libéralisation, et nous réaffirmons notre
attachement au statut d'établissement public de La Poste. Le débat budgétaire
sera l'occasion pour vous, monsieur le secrétaire d'Etat, de présenter votre
conception du devenir de La Poste.
La transposition de la directive postale communautaire de 1997 a été
entreprise à l'occasion de la discussion de la loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement durable du territoire.
J'aimerais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez nous présenter
votre position quant à la proposition, qui a été évoquée à l'instant, de
révision de la directive européenne, tendant à libéraliser totalement le
secteur postal au 1er janvier 2003. Nous attendons que cette transposition se
fasse dans des conditions qui garantissent une offre de service universel de
qualité sur tout le territoire.
S'agissant maintenant de France Télécom, le chiffre d'affaires a atteint 161,7
milliards de francs, contre 153 milliards de francs en 1997. Il est encore en
forte progression en 1999.
Il est fondamental que, dans les télécommunications, secteur où les
innovations technologiques se produisent à une vitesse considérable, la
recherche reste une priorité.
Nous suivons de très près les crédits accordés au Réseau national de recherche
en télécommunications, le RNRT. Leur niveau est maintenu pour l'année 2000.
Le RNRT participe au développement indispensable de la société de
l'information en s'intéressant, notamment, à l'offre Internet de deuxième
génération - les fameux hauts débits - à la téléphonie mobile multimédia - le
sigle UMTS commence à apparaître - aux constellations par satellites.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous donner des assurances sur les
capacités françaises de conserver et d'enrichir le capital recherche et
serait-il possible d'avoir une évaluation globale des efforts consentis pour la
recherche en télécommunications dans notre pays ?
Il est essentiel de permettre au plus grand nombre d'accéder à la société de
l'information. Le Gouvernement, par votre nom, a pris l'initiative de proposer
à la Commission européenne de mettre le raccordement des écoles à Internet dans
le service universel.
Cette proposition ne semble pas avoir été reprise lors du dernier Conseil des
ministres européens des télécommunications.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la partie est-elle perdue ?
Nous pensons qu'il faut enrichir le service universel. Ne devrait-on pas, à
terme, envisager d'y inclure le mobile ?
Le dégroupage total, en faveur duquel vous vous êtes prononcé récemment, aura
des incidences sur le niveau des investissements et présenterait, selon
certains, des risques d'écumage abusif du marché.
Dès lors, quels avantages peut-il engendrer ? Si le dégroupage est appliqué à
la téléphonie fixe, permettra-t-il de faire baisser les tarifs des appels
locaux et, surtout, des abonnements, dont le prix est encore très élevé pour
les petits consommateurs ?
A l'heure de la mondialisation, nous assistons à un mouvement sans précédent
de concentrations.
Dans les domaines de la distribution postale et des télécommunications, la
concurrence entre opérateurs fait rage.
S'agissant tout d'abord de La Poste, sa stratégie internationale et son
insertion dans les champs européen et mondial constituent aujourd'hui des défis
majeurs, à un moment où elle se trouve confrontée à une concurrence d'une
extrême vigueur et au développement de nouvelles technologies, comme le
courrier et le commerce électroniques.
A l'heure où les opérateurs postaux allemand, britannique et néerlandais ont
pris des positions fortes en Europe, la France ne saurait rester à l'écart du
mouvement et elle doit continuer à rechercher des alliances.
A cet égard, je souhaiterais, à mon tour, que vous nous précisiez de quelle
manière la tutelle entend aider La Poste dans ses efforts de développement à
l'international.
S'agissant des choix internationaux de France Télécom, l'opérateur doit être
capable de répondre à trois objectifs : devenir un opérateur européen majeur ;
proposer aux usagers, aux entreprises en particulier, des services mondiaux à
un coût concurrentiel ; enfin, s'implanter sur les marchés mondiaux à fort
potentiel.
L'échec de l'alliance avec Deutsche Telekom contraint désormais à effectuer
des réorientations stratégiques urgentes.
Comment, monsieur le secrétaire d'Etat, vous paraît-il possible de conforter
l'entreprise sur le plan international tout en encourageant les améliorations
au bénéfice des usagers ?
Vous avez voulu et mis en place une méthode de concertation locale renouvelée
et renforcée, permettant à La Poste et aux acteurs locaux de trouver des
réponses aux nécessaires modernisation et adaptation du réseau postal.
La signature du contrat d'objectifs et de progrès, la création des commissions
de présence postale territoriale ouvrent la possibilité d'une «
décentralisation d'initiatives ».
L'avenir des points de contacts postaux en zone rurale comme dans les zones
urbaines en difficulté est lié à ce travail en commun, qui est souvent
difficile.
Au terme d'une première année d'existence des commissions départementales de
concertation, peut-on d'ores et déjà tirer un premier bilan de cette expérience
et connaître les mesures d'adaptation que le Gouvernement va en déduire ?
Enfin - et ce sera mon dernier point - il ne saurait être question d'occulter
la place que doivent prendre les deux opérateurs dans l'effort national de
lutte contre le chômage et la précarité, à travers l'aménagement et la
réduction du temps de travail.
La Poste est l'entreprise française ayant le plus fort effectif à devoir
passer aux 35 heures. On peut regretter, alors qu'elle réalise 50 % de son
chiffre d'affaires dans le secteur concurrentiel, que La Poste ne bénéficie pas
d'aides de l'Etat pour cette réduction du temps de travail, créatrice
d'emplois.
Un accord d'entreprise portant sur l'aménagement et la réduction du temps de
travail a été signé le 17 février 1999. Nous observons les négociations sur le
terrain. Est-il possible d'avoir des informations sur les premiers résultats
obtenus dans le cadre de ces négociations ?
A France Télécom, la négociation sur le passage aux 35 heures vient de
s'engager. La signature d'un accord-cadre, comme à La Poste, manifestant ainsi
une volonté d'atteindre des objectifs, peut-elle être espérée à court terme
?
Monsieur le secrétaire d'Etat, le développement de l'innovation, l'évolution
rapide des technologies, les modifications réglementaires et l'environnement
concurrentiel de plus en plus agressif ne vous facilitent pas la tâche.
Le groupe socialiste vous exprime sa confiance pour continuer dans la
direction prise depuis votre arrivée : défendre et promouvoir un service public
fort et performant, faire progresser la recherche, l'innovation et
l'investissement, participer aux efforts en faveur de l'emploi et de
l'aménagement du territoire.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Bernard Murat.
Et dans les zones rurales !
M. le président.
La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
double tutelle recherche-industrie du Commissariat à l'énergie atomique
m'incite à reprendre aujourd'hui l'intervention que j'ai faite hier auprès de
M. Allègre. Aussi, je demande à mes collègues qui l'ont déjà entendue de bien
vouloir me pardonner cette redite.
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de m'arrêter un instant sur les
dotations du Commissariat à l'énergie atomique.
Ce sujet est loin d'être anecdotique. En effet, cet établissement est la carte
maîtresse de l'avenir nucléaire de notre pays, et les préoccupations dont je
vais faire état ont été soulevées, lors du débat budgétaire à l'Assemblée
nationale, par tous les groupes politiques - sauf un ! - y compris par le
rapporteur spécial de la commission des finances et par le rapporteur pour avis
de la commission de la production et des échanges, comme par le rapporteur
spécial de la commission des finances du Sénat, M. Jean Clouet, voilà quelques
instants.
Hier, dans sa réponse, M. Allègre a cru devoir affirmer que cette mobilisation
ne pouvait se faire que parce que le CEA était un important lobby. Je ne puis
me satisfaire de cette réponse. Pour ma part, j'estime que les parlementaires
sont attachés à cette question parce qu'il s'agit d'un secteur capital de la
recherche. En effet, alors que les crédits d'investissements de cet
établissement ont presque totalement été débudgétisés en 1997, ce qui a
fragilisé durablement l'équilibre financier de celui-ci, le projet de loi de
finances pour 2000 me semble être un nouveau mauvais coup pour le CEA.
Le maintien apparent de la subvention de l'Etat, tout d'abord, est assez
largement illusoire, puisque cette subvention avait été diminuée de 300
millions de francs en 1999 et que le bouclage du budget de 1999 du CEA
s'avérera, de ce fait, acrobatique, voire impossible, malgré une ponction
supplémentaire sur les industriels de 160 millions de francs et une réduction
du programme d'investissement de 100 millions de francs. Par conséquent,
l'impasse s'élève à 40 millions de francs pour 1999.
Pour 2000, les perspectives ne sont guère réjouissantes car, si l'on analyse
le budget notifié par la tutelle à l'établissement, on s'aperçoit que l'impasse
pourrait même s'élever, à ma connaissance, à près de 246 millions de francs,
sur un budget total de 11,1 milliards. Son « équilibre » est en effet construit
sur des bases fragiles.
S'agissant des ressources, 50 millions de francs sont censés provenir du fonds
de la recherche technologique et du fonds national de la science qui
fonctionnent, on le sait, par appels à propositions. M. Allègre est favorable
au maintien de cette procédure. Il s'agit effectivement d'un principe tout à
fait recevable dans une économie ouverte, si les règles sont claires et
transparentes.
En outre, 21 millions de francs proviendraient d'un emprunt à CEA-Industrie,
qui financerait ce dernier par la vente partielle du capital de certaines
filiales. Est-il raisonnable de parier sur la cession d'une partie du
patrimoine, ce que M. le rapporteur spécial a appelé les « bijoux de famille »,
pour payer les frais de fonctionnement du CEA ?
Enfin, 165 millions de francs supplémentaires devraient être trouvés auprès
des industriels, qui financent déjà près de 40 % du CEA, ce qui représente une
proportion inégalée par rapport à ses concurrents étrangers. Malgré
l'excellence de ses travaux, le CEA ne manquera pas de trouver la pilule bien
amère, car on lui a déjà demandé un effort important l'an dernier !
En ce qui concerne les dépenses, le budget est construit sur une hypothèse de
gel des salaires et le coût de la mise en place des 35 heures n'apparaît
pas.
De plus - et c'est un point important - la taxation introduite par l'article
24 du projet de loi de finances pour 2000 pourrait coûter entre 10 millions et
130 millions de francs supplémentaires, selon le montant du coefficient
multiplicateur compris entre un et quatre, fixé à la discrétion du
Gouvernement, ce qui pourrait d'ailleurs se révéler contraire aux prérogatives
constitutionnelles du Parlement.
Je crains donc que le CEA ne puisse tenir son programme d'investissement et
poursuivre, notamment, l'indispensable processus d'assainissement de ses
centres civils.
La situation est préoccupante. Sont inscrits au chapitre 45-10 du ministère de
l'industrie, à l'article 50, 100 millions de francs qui correspondent à la
provision des frais de scission de l'Institut de protection et de sûreté
nucléaire, l'IPSN, et du CEA. Ne serait-il pas opportun, monsieur le secrétaire
d'Etat, de les intégrer à la dotation du CEA, au chapitre 45-10, article 40, et
de régler la question du financement des frais éventuels de scission IPSN-CEA
dans le collectif budgétaire, comme le propose le rapporteur spécial M. Jean
Clouet, car on ne sait pas exactement quand cette scission aura lieu ? Cela
pourrait être un début de solution. Sur ce point, M. Allègre ne m'a pas donné
de réponse claire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, que répondez-vous à cette proposition ?
Pouvez-vous nous dire comment vous comptez régler les problèmes qui se posent
pour assurer l'avenir du CEA ?
Enfin, pouvez-vous nous dire également quand sera prise la décision de
lancement du nouveau réacteur EPR ? Je crains que, si nous devions attendre
jusqu'à mai 2002, la France n'ait laissé passer sa chance.
(Applaudissements
sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'examen du projet de budget de l'industrie m'amènera à évoquer trois questions
: la place de La Poste en milieu rural, la libéralisation du secteur de
l'électricité et, enfin, les crédits du CEA.
En ce qui concerne les crédits de La Poste, je souhaiterais formuler une
remarque préliminaire.
Comme l'a rappelé M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, ces crédits ont
été purement et simplement absorbés au sein d'un ensemble si vaste qu'il
devient même malaisé de les identifier. Ils ne font plus l'objet d'une section
budgétaire distincte, mais ont été au contraire intégrés dans un agrégat
fourre-tout. Ma question est simple : la disparition d'un ministère clairement
identifié constitue-t-elle une nouvelle étape d'un désengagement total de
l'Etat de ce secteur d'activité ?
Or les missions de service public qu'elle remplit et ses capacités à créer de
la richesse et des emplois font de La Poste un acteur clef de l'économie tant
nationale que locale. Grâce à ses 17 000 points d'implantation, mais aussi de
par la fréquence des tournées des facteurs dans les zones rurales les plus
reculées, l'opérateur public joue un rôle essentiel dans l'aménagement
harmonieux de notre territoire. Je vous rappelle que, dans les petites
communes, les agences postales constituent souvent la principale, voire la
seule, activité économique.
Aujourd'hui, le secteur postal connaît un bouleversement à l'échelle
européenne. J'en veux pour preuve les offensives des autres entreprises
postales européennes, qui, dans un marché libéralisé, se sont engagées dans une
course à la croissance extérieure. Le rôle, les missions et le fonctionnement
du secteur postal, qui sont liés aux notions de service public et d'intérêt
général, vont donc connaître des transformations radicales.
Certes, ces mutations étaient nécessaires. Cependant, pour ma part, comme la
majorité des Français, je reste très attaché à une poste de proximité.
D'ailleurs, le Gouvernement lui-même avait promis une « poste moderne,
combative et proche du citoyen », une poste qui accorderait « une attention
toute particulière à l'amélioration de sa présence territoriale afin d'assurer
un service public de qualité accessible à tous ».
Dans les faits, monsieur le secrétaire d'Etat, le constat est bien différent :
on réduit les horaires d'ouverture des bureaux de poste, ou même on les ferme à
mi-temps, et les agents en congé ne sont pas remplacés. Dans mon département,
la Corrèze, la suppression des tournées locales pour neuf bureaux ruraux semble
acquise, contrairement à ce que vous aviez promis.
De même, le passage aux 35 heures, au lieu de permettre la création d'emplois,
entraîne une réduction des heures d'ouverture des bureaux, ainsi que la
suppression de postes de facteur. Il n'y a plus de service public, et les zones
les plus défavorisées sont les premières frappées, pour cause de rentabilité,
par ces mesures qui aggravent la fracture entre des départements riches,
toujours plus riches, et des départements pauvres, destinés, condamnés à
devenir plus pauvres, et ce alors même que les communes consentent d'importants
efforts pour la rénovation et la mise à disposition du contractuel occupant le
poste de receveur d'un logement, pour la réalisation de travaux au sein même du
bureau de poste, voire pour le détachement de personnels communaux faisant
fonction de préposés, en totale contravention avec les recommandations des
chambres régionales des comptes. C'est pourquoi le futur maillage postal de
notre territoire national m'inspire de sérieuses craintes.
En outre, avec mon ami Georges Mouly et l'ensemble des maires de mon
département, je m'interroge sur les conséquences de ces mesures pour la qualité
du service public que nous devons à nos concitoyens, sans pouvoir leur proposer
de palliatif aux carences constatées.
Ainsi, mes chers collègues, si nous devons accompagner la mutation du service
postal, nous avons aussi le devoir de veiller à la préservation de
l'aménagement harmonieux de notre territoire, en particulier dans les
départements les plus défavorisés, au nom de la solidarité nationale.
A cet égard, le contrat d'objectif et de progrès signé le 25 juin 1998 entre
La Poste et l'Etat fixe des orientations visant à préciser les conditions
d'évolution et d'amélioration du service postal, tant en zone rurale qu'en zone
urbaine, notamment dans les quartiers en difficulté. Là encore, monsieur le
secrétaire d'Etat, je me vois dans l'obligation d'attirer votre attention sur
la réalité que vivent les maires sur le terrain lorsqu'ils doivent faire face à
la fermeture, voire à la délocalisation des bureaux de poste.
J'observe que la philosophie générale du Gouvernement est de faire mieux à un
coût moindre. Certes, cette ambition est louable. En effet, j'estime qu'il
devient urgent de diminuer les coûts de fonctionnement de l'Etat, des
collectivités locales et de leurs établissements publics.
Cela étant, au moment où les médias célèbrent le retour à la croissance, il me
semblerait plus cohérent que les excédents dégagés à l'échelon départemental
par La Poste contribuent à assurer l'équilibre financier des petits bureaux de
poste situés en milieu rural. Cela permettrait d'améliorer les résultats
financiers de La Poste tout en poursuivant l'implantation de petits bureaux de
poste dans nos campagnes.
J'aimerais maintenant évoquer l'ouverture du marché de l'électricité.
Si je suis favorable à une exception française raisonnée et intelligente, je
suis, en revanche, hostile à une exception française tendant au refus du jeu
des marchés et de la concurrence.
De ce point de vue, la directive européenne vise à introduire la concurrence
dans l'industrie électrique partout où cela est souhaitable et possible. La
France, qui s'est engagée, avec ses partenaires européens, à construire un
marché unique régi par la concurrence, doit tenir sa parole. Or le projet de
loi visant à transposer la directive en droit français est trop timoré. Le
Gouvernement s'est contenté de proposer un dispositif ayant pour objet
d'inscrire dans le droit français tout ce qu'il ne pouvait refuser d'y
inscrire, sauf à se mettre en infraction avec les règles établies par l'Union
européenne.
Le Sénat, quant à lui, avait formulé des propositions tendant à assurer
l'indépendance énergétique de la France, ainsi qu'à permettre à toutes les
entreprises d'être en situation d'affronter la concurrence. Le 18 novembre
dernier, lors de la réunion de la commission mixte paritaire chargée de trouver
un accord sur le texte définitif du projet de loi de transposition, aucun
compromis n'a pu être élaboré, malgré les efforts du Sénat.
Cette issue défavorable à la France est déplorable. Je condamne ici l'attitude
de la majorité plurielle, qui, pour des considérations idéologiques et
politiciennes liées à ses contradictions internes, a rejeté les avancées
modérées et honorables proposées par le Sénat. Celles-ci donnaient pourtant
satisfaction à la fois aux usagers, aux collectivités locales, à
l'établissement public Electricité de France et aux entreprises concernées par
l'ouverture du marché, tout en permettant de préserver notre indépendance
énergétique.
Préoccupé par l'état de sa majorité à la veille des élections européennes, le
Gouvernement avait déjà repoussé l'échéance d'une transposition qui devait
intervenir avant le 19 février 1999. Aujourd'hui, bien qu'une procédure
d'infraction contre la France ait été engagée par la Commission européenne et
bien que nombre de nos partenaires européens envisagent de prendre des mesures
de rétorsion, le Gouvernement persiste dans cette voie.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je regrette que le Gouvernement aille à
l'encontre des intérêts de la France. Que fait-on de la compétitivité de nos
entreprises ? Quelle place réservons-nous à notre commerce, tant national
qu'européen, donc international ? Des centaines de PME et de PMI françaises
restent à quai, pendant que d'autres s'adaptent, évoluent, conquièrent des
marchés et rendent à leur économie la compétitivité qui fait que les carnets de
commandes se remplissent et que le marché de l'emploi est conquérant, offensif,
concurrentiel. Que de temps perdu depuis un an à propos d'un texte pour lequel
le Gouvernement avait pourtant déclaré l'urgence !
Je conclurai en évoquant le CEA, pour lequel votre projet de budget affiche
des crédits en hausse de 71 millions de francs, soit 5,1 %. Or il ne s'agit que
d'un jeu d'écriture : les autorisations de programme stagnent, d'une part, et,
d'autre part, sur ces 71 millions de francs, 26 millions de francs sont
consacrés au financement de la séparation du CEA et de l'IPSN. Ainsi, cette
augmentation de crédits ne concernera que des dépenses de fonctionnement, alors
qu'il eût été nécessaire de majorer les crédits d'investissement du CEA. En
effet, il est essentiel de permettre à cet organisme de maintenir ouverte
l'option nucléaire à l'horizon de 2010 et de lui donner les moyens d'achever
les six grands chantiers qui sont actuellement en cours.
Je souhaite donc vous faire une suggestion, monsieur le secrétaire d'Etat : ne
pourrait-on pas affecter les 26 millions de francs alloués à la réalisation de
la scission à des opérations d'investissement, c'est-à-dire différer le
financement de la scission et redéployer ces crédits dans l'optique du
collectif budgétaire ?
Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les observations que je tenais à
formuler sur votre projet de budget pour 2000. Le groupe du RPR rejettera
celui-ci, car il désapprouve ses orientations et son manque d'ambition au
regard des légitimes attentes des Français.
3
SOUHAITS DE BIENVENUE
A` UNE DÉLÉGATION
PARLEMENTAIRE CHINOISE
M. le président.
Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer la présence dans notre tribune
officielle d'une délégation de la commission de la protection de
l'environnement et des ressources naturelles de l'Assemblée nationale populaire
de Chine, conduite par M. Li Meng, membre du comité permanent de l'Assemblée
populaire.
Cette délégation séjourne en France dans le cadre de la coopération engagée
entre l'Assemblée nationale populaire de Chine et le Sénat, concrétisée par
l'accord signé en septembre dernier à Pékin lors de la visite de M. le
président du Sénat.
Au nom de la Haute Assemblée, je souhaite la bienvenue à la délégation
chinoise et je forme des voeux pour que son séjour en France contribue à
fortifier les liens et l'amitié entre nos deux pays.
(M. le secrétaire d'Etat, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et
applaudissent.)
4
PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Economie, finances et industrie
(suite)
II. - INDUSTRIE (ET POSTE)
(suite)
M. le président.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'économie, les finances et l'industrie : II. - Industrie (et
Poste).
Dans la suite de la discussion, la parole est àM. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
crédits de l'industrie inscrits à ce projet de budget s'élèvent à 15,6
milliards de francs en moyens de paiement, soit, à périmètre constant, une
augmentation de 2,3 %.
Cette progression doit être appréciée au regard de la hausse des dépenses
totales de l'Etat, limitée cette année à 0,9 %. Surtout, elle s'inscrit dans un
mouvement de croissance des crédits de l'industrie depuis 1997, qui tranche
avec les années où la droite assumait la gestion du pays.
Pour autant, les moyens budgétaires consacrés chaque année à ce secteur vital
de notre économie sont sans commune mesure avec la place et le rôle qu'occupe
encore - et ce malgré les assauts de la mondialisation capitaliste - le secteur
industriel en France.
Ainsi, l'industrie manufacturière a consommé, pour l'année 1998, plus de 132
milliards de francs d'investissements et employé plus de 3 300 000 salariés,
soit 18 000 de plus qu'en 1997.
Une étude plus détaillée de la croissance de la production industrielle depuis
quelques années montre cependant que sa portée est limitée en matière de
création d'emplois et qu'elle cache mal une absence de stratégie industrielle
ambitieuse et cohérente.
Sur ce point, il suffit de considérer quelques indicateurs économiques, par
exemple la part de l'investissement manufacturier dans la valeur ajoutée, qui
n'a cessé de se réduire depuis dix ans, et le montant des dépenses de
recherche-développement et de formation, qui sont largement insuffisantes eu
égard à ce qu'elles représentent dans les autres grands pays industriels.
S'agissant de la structure de l'emploi industriel - qui représente seulement
18 % du total des emplois salariés - le recours aux contrats précaires et à
l'intérim tend de plus en plus à devenir la règle, ce qui fait du facteur «
travail » un élément flexible et malléable de la gestion des entreprises,
subordonné aux perspectives de croissance des marchés financiers.
Par conséquent, je ne vois, dans la configuration de ce secteur de l'économie,
aucune vision porteuse d'avenir, les mégafusions qui se multiplient répondant
davantage au souci de donner des gages aux actionnaires, qui exigent une
rentabilité maximale et rapide de leurs capitaux, qu'à celui de créer les
conditions d'une meilleure complémentarité entre les métiers pour faire face à
la concurrence internationale.
Ce constat n'a rien d'étonnant, dès lors que l'Etat a progressivement déserté
le terrain de la production industrielle pour laisser la place à la seule
logique du marché. L'Etat pouvait conduire une politique industrielle sur le
long terme qui soit favorable à la croissance et à l'emploi, tandis que la main
invisible du marché tâtonne et se laisse guider par les fluctuations erratiques
des valeurs financières internationales.
Comme l'a écrit mon ami Claude Billard, rapporteur pour avis de la commission
de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, si la logique
industrielle des grands pays est de moins en moins claire, la logique
financière, elle, est en revanche tout à fait évidente. C'est la preuve,
pense-t-il, « qu'une croissance non maîtrisée par la puissance publique peut
être l'ennemie de l'emploi ».
Sans une intervention volontariste de l'Etat plus marquée, votre rôle,
monsieur le secrétaire d'Etat, pourrait se résumer à celui d'« ambulancier »,
dont la tâche ingrate serait de ramasser les cadavres des victimes sacrifiées
sur l'autel du libéralisme.
La régulation, que l'on tente d'assimiler à la nouvelle doctrine politique du
xxie siècle, n'est en réalité que la réponse insignifiante apportée par les
pouvoirs publics pour remédier aux défaillances du marché et permettre ainsi à
celui-ci de poursuivre sa route jalonnée de concentrations, de fusions et de
restructurations, avec, à la clef, des milliers d'emplois supprimés.
En outre, comment l'Etat pourrait-il prétendre jouer efficacement son rôle
d'arbitre, dès lors que ce sont de plus en plus à des autorités de régulation
indépendantes qu'est confiée la mission de définir et d'appliquer les règles de
la concurrence dans des secteurs essentiels de notre économie ?
Ainsi, la commission de régulation de l'électricité, la dernière-née,
disposera, en son domaine, de pouvoirs exorbitants de proposition, de décision
et de sanction, sans que le Gouvernement ait la possibilité de faire valoir
l'intérêt national - et ce serait encore pire si les positions de la droite
sénatoriale avaient été adoptées !
Le désengagement de l'Etat ne coïncide-t-il pas, d'ailleurs, avec la montée en
puissance du phénomène de désindustrialisation, qui a pour effet de désagréger
le tissu social et de désarticuler les territoires ?
Notre assemblée a débattu récemment du projet de loi de libéralisation du
secteur de l'électricité. L'opérateur historique EDF, qui jouit d'atouts
industriels importants sur le territoire national, n'aurait-il pas tendance à
priviligier la conquête des marchés extérieurs par rapport à toute autre
considération liée, en particulier, au service public ?
De même, on peut s'interroger sur la validité des objectifs d'indépendance
énergétique et de sécurité d'approvisionnement, dès lors que les opérateurs
privés chercheront à produire au meilleur coût, quelles que soient les
orientations énergétiques fixées par ailleurs.
Dans ce contexte plein d'incertitudes, le moins que l'on puisse dire, c'est
que ce budget suscite des inquiétudes, à l'heure où certains moyens qui
participent de notre politique énergétique mériteraient d'être renforcés.
Je pense notamment à la dotation versée par l'Etat au Commissariat à l'énergie
atomique pour compenser la baisse des recettes extérieures, qui devrait
s'élever à environ 140 millions de francs. A ce jour, seuls 40 millions de
francs sont engagés, mais aucun versement n'a encore été effectué.
Comment faut-il comprendre le refus de l'Etat de faciliter le passage aux 35
heures en incitant le CEA à prendre sur ses fonds propres, au détriment de la
politique salariale et des programmes de recherche en cours ?
Si, comme vous le dites, monsieur le secrétaire d'Etat, l'option nucléaire
reste ouverte, comment justifier le maintien du CEA dans une situation
précaire, alors que des décisions d'importance majeure s'imposent, s'agissant,
par exemple, du lancement de l'EPR ?
Dans ce projet, dont la réalisation rapide est essentielle pour le
renouvellement dans les meilleures conditions de notre parc nucléaire, le CEA
devra jouer un rôle de premier plan.
L'an dernier, monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous annonciez que la
décision concernant la construction de l'EPR serait prise avant la fin de
l'année 1999. Etes-vous en mesure de nous confirmer le calendrier ou bien
faudra-t-il attendre, comme j'ai cru l'entendre, trois ou quatre ans
supplémentaires ?
Compte tenu des délais nécessaires avant l'exploitation d'une centrale et du
vieillissement prévisible du parc existant, n'y a-t-il pas urgence à faire un
choix qui s'imposera, tôt ou tard, dès lors que la France souhaite préserver sa
filière nucléaire ?
L'annonce, hier, de la fusion des activités nucléaires de Framatome et de
Siemens nous inquiète, monsieur le secrétaire d'Etat, en ce qui concerne tant
le programme EPR, l'emploi, le statut des salariés que la maîtrise publique de
la filière nucléaire dans notre pays et, en particulier, de la recherche dans
ce secteur.
A cet égard, comment faut-il interpréter les propos du président de Framatome,
selon lesquels l'entreprise publique française acquiert, par ce rapprochement,
« le statut d'une entreprise soumise à la concurrence » ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous préciser le contenu de
l'accord intervenu entre les deux opérateurs, notamment les garanties
présentées par Siemens ? Le partenaire allemand amorce-t-il ainsi un retrait
progressif de la production nucléaire, compte tenu des perspectives pour le
moins incertaines qui prévalent outre-Rhin ?
Le désengagement de l'Etat est également manifeste dans le secteur
charbonnier, auquel je reste profondément attaché.
La lecture de cette loi de finances fait apparaître deux paradoxes sur
lesquels je souhaiterais vous entendre, monsieur le secrétaire d'Etat.
Premièrement, l'évolution à la baisse de la dotation budgétaire consacrée à
Charbonnages de France se confirme cette année. Elle frappe, à hauteur de 30
millions de francs, le chapitre « exploitation » et s'inscrit par là même dans
la pleine application du pacte charbonnier signé par le Gouvernement
Balladur-Longuet en 1994 ; ce qui est nouveau, en revanche, c'est la réduction
de 20 millions de francs de la prise en charge par CdF des prestations versées
aux retraités mineurs et à la gestion de l'ancien patrimoine minier.
Or, ces charges iront croissant au fur et à mesure que l'exploitation des
derniers sites s'arrêtera. Cette situation contraint Charbonnages de France à
s'endetter toujours plus, ce qui ne peut que mettre à mal les engagements pris
concernant le statut des mineurs, en particulier en matière de retraite, de
logement ou de santé.
Le désengagement industriel opéré dans ce secteur, qui dispose pourtant encore
de ressources non négligeables, s'accompagne-t-il également d'un désengagement
« moral » à l'égard de salariés qui ont contribué à reconstruire la France
d'après-guerre ?
A ce propos, monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de recevoir les
résultats d'une mission confiée à M. Pierre Castagnou. Quelle suite
entendez-vous donner à ce rapport ? Notamment, par quelle voie êtes-vous prêt à
garantir la pérennité des droits des mineurs, spécifiques ou non au bassin du
Nord - Pas-de-Calais, au-delà de 2005 ?
Un second paradoxe ressort de ce budget : le soutien à la reconversion
industrielle des bassins miniers diminue. Les crédits du fonds
d'industrialisation du bassin minier, le FIBM, sont réduits de nouveau de 7,4 %
en 1999, et ceux du fonds d'industrialisation de la Lorraine, le FIL, de 10,2
%. Dans ce contexte, peut-on encore prétendre instaurer un environnement
favorable à la création d'entreprises ?
S'agissant des aides publiques à la construction navale, il faut noter une
progression sensible des crédits octroyés, qui s'élèvent à 1,287 milliard de
francs, soit une hausse de plus de 60 % en 1999.
Outre le coût social immédiat, il y a aussi, pour la puissance publique,
nécessité d'assurer, dès lors, la reconversion de régions qui se retrouvent du
jour au lendemain orphelines d'une industrie jadis florissante. La fermeture
des Ateliers et chantiers du Havre et ses conséquences en termes d'emplois et
d'aménagement du territoire illustrent de quelle manière, hélas ! l'Etat est de
plus en plus acculé à réparer les dégâts du libéralisme.
J'aborderai, enfin, le budget de la poste et des télécommunications, en
augmentation de plus de 4 %.
La priorité donnée, une fois de plus, aux crédits de l'autorité de régulation
des télécommunications, en augmentation de 4,03 %, et à l'agence nationale des
fréquences, en hausse de 14 %, témoigne des transferts de compétences de
l'opérateur historique France Télécom vers des structures propres.
Si l'on ne peut que se féliciter des moyens supplémentaires dégagés en faveur
de l'enseignement supérieur des télécommunications, il appartient, en revanche,
à l'Etat de réaffirmer le rôle essentiel que doit jouer le Centre national
d'études des télécommunications, le CNET, en matière de recherche
technologique.
En outre, il me semble que la dimension sociale de France Télécom, depuis sa
privatisation partielle, ne cesse de s'estomper, tant à l'égard des usagers que
de son personnel.
Ainsi, qu'en est-il de la tarification sociale promise en 1997 ? Alors que les
conditions de travail et les salaires se dégradent toujours davantage, que dire
de l'accord conclu sur les 35 heures, duquel aucune création nette d'emplois
n'est attendue ?
Un même constat peut être fait s'agissant de La Poste, qui, tout en étant la
plus importante entreprise de France à passer aux 35 heures, ne reçoit pour
autant aucune subvention de sa tutelle.
D'aucuns, jusqu'au sein de notre Haute Assemblée, d'ailleurs, n'hésitent pas à
envisager, avant l'échéance de 2003, date à laquelle une nouvelle
libéralisation est programmée, de demander le démantèlement du service public
postal.
Ainsi, notre collègue Gérard Larcher s'est récemment prononcé pour une
ouverture du capital en proposant, dans un premier temps, une recapitalisation
à partir d'une cession d'actifs de France Télécom pour mieux préparer, à terme,
la privatisation de La Poste.
Le Gouvernement doit, à notre avis, s'opposer catégoriquement à ce qui
reviendrait, en définitive, à dilapider les deniers publics pour le profit
d'intérêts privés.
Enfin, pour conclure, nous souhaitons également une clarification de la
position du Gouvernement sur l'avenir de Gaz de France, qui suscite de plus en
plus les convoitises des groupes pétroliers. Une forte pression semble
s'exercer en faveur de la transformation de Gaz de France en société anonyme,
qui viendrait en corollaire à la libéralisation du marché du gaz. Monsieur le
secrétaire d'Etat, c'est là une proposition qui nous inquiète beaucoup.
Malgré les insuffisances que nous avons relevées, nous voterons ce budget,
tout en souhaitant être rassurés sur les questions que je viens d'évoquer.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je parlerai essentiellement de la politique
d'innovation, si nécessaire à la France et si importante pour votre
ministère.
Le Sénat s'honore d'avoir largement participé, l'été dernier, à l'élaboration
de la loi sur l'innovation. Cette loi concerne, bien entendu, la recherche,
mais aussi l'industrie et les finances.
La situation est désormais meilleure, bien qu'il reste encore à lui apporter
des améliorations indispensables, notamment en matière d'incitation fiscale,
pour que les particuliers qualifiés de
business angels
puissent investir
massivement et que les entreprises innovantes, qui ont pour vocation de grandir
et de créer des emplois et de la richesse, puissent se développer rapidement,
sans oublier la mise en place d'un système de stock-options généralisé qui
s'ajouterait au système de bon de souscription pour création d'entreprise.
Devant la fuite des cerveaux que nous constatons tous avec regret, il est
nécessaire de montrer à ceux de nos compatriotes qui ont participé à la
nouvelle ruée vers l'or des
start-up
miracles de Californie que, chez
nous, les choses se sont améliorées.
Avec différents appuis publics et privés, je compte organiser un charter San
Francisco - Nice - Sophia-Antipolis pour montrer que, ici aussi, on peut, à
partir de matière grise, créer des emplois, des richesses et faire fortune.
Nous en convaincrons certains, qui ont le mal du pays. Mais si nous voulons en
convaincre plus, il faut faire mieux. Désormais, nous roulons bien, nous
roulons vite. Mais même si l'on roule à 100 kilomètres à l'heure, en Formule 1,
on est vite dépassé par ceux qui vont beaucoup plus vite, et le retard
s'aggrave.
C'est vrai par rapport à la Californie, au Maryland, à New York, à Boston,
mais c'est vrai aussi par rapport à d'autres pays plus proches de nous.
Déjà, le gouvernement allemand affiche qu'au mois de juin 2000 un réseau à
deux gigabits permettra de réunir les centres de compétence de toute
l'Allemagne. Je crains que nous n'en soyons pas encore là !
Par ailleurs, indépendamment de ce qu'a fait le gouvernement, il y a, en
Bavière, un programme budgétaire financé par le
Land
qui s'ajoute au
programme fédéral et qui dépasse 2,65 milliards de deutsche Mark. J'ai, sur ce
sujet, quantité de documents que je mettrai à votre disposition et à celle de
votre administration, monsieur le secrétaire d'Etat.
Transposé en France, cela représente de l'ordre de 50 milliards de francs,
pour la seule année 2000, pour une offensive
high-tech
.
Cette offensive pour le budget 2000 s'ajoute à d'autres offensives de même
style, qui ont déjà été réalisées et qui ont pour nom
Bayern on line
et
Offensive Zukunft Bayern
, ce qui triple à peu près la mise. En France,
cela représenterait un programme sur trois ans de 150 milliards de francs pour
une offensive ciblée et s'ajoutant aux programmes normaux.
En Bavière, l'argent provient de la privatisation d'une partie de sociétés
nationales du type de celles qui exploitent l'électricité ou le gaz - ou
d'autres entreprises analogues - en Bavière.
Connaissez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, des opérations menées par les
régions en France ou des contrats Etat-région de niveau comparable ? Je crains
que la réponse ne soit négative !
J'ajoute que, dans ses programmes, la Bavière prévoit des crédits
d'internationalisation et que - vous voudrez bien m'excuser de le mentionner -
elle veut nouer des liens avec la Californie, le Québec et Sophia-Antipolis, ce
dont je suis très heureux.
La conclusion que nous devrions en tirer, c'est que la France devrait, elle
aussi, avoir des stratégies nationales ciblées s'appuyant sur des réalisations
régionales dynamiques et les confortant. A cet égard, les technopoles
françaises peuvent très bien constituer le point de départ d'un développement
massif des nouvelles technologies.
C'est, on le sait, la seule façon de créer rapidement des emplois, des
richesses et une dynamique nouvelle. Les Etats-Unis, qui, à un moment donné,
étaient menacés dans leur suprématie par le Japon, ont pu reprendre l'offensive
et, dans le même temps, faire passer le chômage de 8 % à 4 %.
Cela mérite une réflexion politique approfondie à tous les niveaux des
pouvoirs publics français - national, régional, local - mais aussi l'appui des
médias.
J'en viens à mon second point : il est nécessaire que notre pays se dote d'une
véritable structure coordonnée de réflexion prospective.
Il existe, en France, en Europe et dans le monde, quantité d'équipes de
prospective qui, chacune, ont une thématique particulière. Or, avec les
nouvelles donnes et la rapidité de l'évolution des techniques et des
restructurations industrielles et financières, avec le développement des
relations et mondiales du
e-
commerce via Internet, qui va tout
bouleverser et menacer beaucoup d'emplois, nous devons avoir une vision globale
des stratégies industrielles, financières et politiques, aussi bien au niveau
national qu'au niveau local, car cela touche tous les éléments de notre
société.
Par conséquent, tous ceux qui réfléchissent sur le devenir de la sociologie,
sur les problèmes que connaissent les quartiers difficiles des villes, sur les
relations Nord-Sud, doivent être en réseau avec ceux qui s'occupent du
développement des télécommunications et du commerce international.
Voilà pourquoi nous travaillons à la création d'un Institut du futur, qui
fonctionnera en réseau avec de multiples équipes sur des programmes définis par
des comités
ad hoc,
avec les structures opérationnelles légères que,
désormais, les moyens télématiques permettent de mettre en contact.
Une telle structure se constitue à Sophia-Antipolis, où un certain nombre de
conventions ont déjà été passées avec l'Institut du futur de Menlo Park, en
Californie, ainsi qu'avec des structures telles que l'Ecole de Paris, pour la
gestion, l'Institut français des relations internationales, pour les aspects
géopolitiques, l'Institut régional de développement industriel, pour les
relations Nord-Sud, mais aussi avec le groupe de prospective du Sénat, l'Office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, ainsi que
de multiples structures industrielles ou financières.
Le financement initial nécessite un support de l'Etat - peut-être de votre
département, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est pourquoi je vous en parle -
et certainement des collectivités locales ainsi que d'un certain nombre de
grands groupes intéressés, que ce soit EDF, Alcatel ou des groupes européens ou
mondiaux.
Tels sont les deux points sur lesquels, monsieur le secrétaire d'Etat, je me
suis permis d'insister, tout en regrettant que votre secrétariat d'Etat ne soit
pas doté de moyens financiers comparables - toutes proportions gardées, parce
qu'il faudrait multiplier le chiffre par cinq - à ceux dont bénéficient nos
amis allemands, et notamment nos amis bavarois.
(Applaudissements sur les
travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Weber.
M. Henri Weber.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
avant toute chose, permettez-moi de dire combien il m'est agréable de discuter
le budget de l'industrie alors que tous les indicateurs témoignent des bons
résultats de la politique que ce budget incarne : politique de soutien à la
croissance, politique d'accompagnement en profondeur des mutations
industrielles, politique de régulation du marché. La voie tracée depuis plus de
deux ans par le Gouvernement a fait ses preuves. L'investissement industriel a
progressé de 8 % l'an dernier, et ce chiffre s'élève à 13 % dans les PMI, dont
nous savons tous ici qu'elles sont aujourd'hui les plus à même de créer de
l'emploi. Pour la première fois depuis de nombreuses années, l'emploi
industriel a progressé en 1998 de 50 000 unités, enrayant une longue spirale du
déclin.
A ceux qui ne voient dans ces bons résultats que le seul fruit du hasard ou
d'une conjoncture internationale porteuse, je répondrai par une simple
comparaison : depuis l'arrivée au pouvoir de la majorité plurielle, le budget
de l'industrie aura, au total, augmenté de 7 %...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
C'est exact !
M. Henri Weber.
... quand ses crédits avaient connu, durant les deux années précédentes, une
baisse cumulée de 17 %.
C'est donc dans le cadre d'une politique industrielle volontaire, soucieuse de
développer une croissance forte et riche en emplois que vous nous soumettez
aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, un budget en hausse de 2,3 %.
Celui-ci présente quelques innovations dans sa forme, puisque l'ancienne
section « industrie » des crédits du ministère de l'économie, des finances et
de l'industrie est fondue dans une section unique. Parallèlement, les dépenses
du secrétariat d'Etat à l'industrie sont réparties en quatre agrégats.
A travers cette modification formelle, il s'agit de s'orienter vers la
création d'un véritable pôle économique et industriel, ce que Dominique
Strauss-Kahn - auquel je tiens aujourd'hui à rendre un vibrant hommage - a
appelé un « ministère de la production », car ce budget de l'industrie
développe une ambition unique : celle de préparer l'avenir de l'industrie
française, en accompagnant et en anticipant ses mutations.
Cela passe par différents niveaux d'intervention, que je résumerai en trois
catégories : des efforts pour assurer la pérennité de notre tissu industriel,
le souci de développer autour des entreprises un environnement favorable à leur
performance, et la volonté d'anticiper les grandes évolutions à venir de notre
industrie.
La première priorité vise à assurer la pérennité de notre maillage industriel
et de ses infrastructures.
Cela nécessite tout d'abord de conforter notre indépendance énergétique. Il
s'agit de veiller à l'avenir de notre industrie dans le cadre d'une politique
énergétique maîtrisée, garante d'un service public modernisé et respectueuse de
l'environnement.
Les crédits alloués à ce titre sont consolidés, ce qui nous permet
d'appréhender sereinement les échéances à venir. A court terme se pose en effet
la question de la transposition des directives européennes relatives aux
marchés de l'électricité et du gaz.
L'Assemblée nationale a montré la voie d'une ouverture prudente et équilibrée
du marché de l'électricité, et je ne doute pas qu'une telle attitude
raisonnable accompagnera - au moins à l'Assemblée nationale - la transposition
de la directive sur le gaz.
Mais les enjeux énergétiques auxquels nous sommes confrontés vont plus loin.
Il s'agit de développer des techniques innovantes, afin de produire des
énergies moins polluantes et plus sûres. Je salue donc la consolidation des
crédits de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, dont je
souhaite qu'elle contribue à faire de la France un pays phare dans le domaine
des énergies alternatives : je pense notamment à la cogénération.
Il s'agit également d'envisager l'avenir de notre parc nucléaire, alors que
commence à se poser la question de son renouvellement.
Sécurité, transparence et responsabilité sont ici les maîtres mots de la
politique qu'attendent nos concitoyens. A ce titre, monsieur le secrétaire
d'Etat, je salue à mon tour la fusion entre Framatome et Siemens, intervenue
hier et qui fait de la nouvelle société ainsi constituée, détenue à 66 % par
Framatome, la première entreprise mondiale dans les services de combustibles et
d'équipements nucléaires, devant l'américain General Electric et le britannique
BNFL, qui vient d'acheter Westinghouse en 1998.
Je m'inquiète toutefois de constater que les crédits du CEA ne sont que
reconduits, quand les défis auxquels il lui faut faire face se multiplient. Il
serait en effet imprudent de vouloir assurer l'avenir de notre politique
énergétique en négligeant ce qui demeure, en la matière, notre principal
outil.
Dans ce même souci d'assurer la pérennité de notre maillage industriel et de
ses infrastructures, votre projet de budget prévoit 4,8 milliards de francs
pour la reconversion des bassins industriels en difficulté, soit une hausse de
9,5 %. Je ne peux que me féliciter de cet effort de solidarité nationale, qui
s'inscrit dans le long terme et qui touche l'élu de Seine-Maritime que je
suis.
Le second volet sur lequel je veux insister, monsieur le secrétaire d'Etat,
concerne la modernisation de l'environnement des industries françaises.
Il s'agit tout d'abord d'assurer la compétitivité des produits industriels
français, notamment par la reconnaissance des normes internationales de qualité
en vigueur ; il s'agit aussi d'accentuer les mesures en faveur de la qualité
prévues dans les chapitres « normes-qualité », qui progressent de 7 % en
autorisations de programme ; de même, l'augmentation de 14 % en autorisations
de programme et de 18 % en crédits de paiement des moyens du bureau national de
la métrologie permettra d'accomplir d'importants progrès.
Un autre élément important concernant l'environnement des entreprises est
constitué par les actions engagées en faveur du développement des petites et
moyennes entreprises, les PMI.
Je le rappelle, c'est dans ces PMI que réside en grande partie la richesse
industrielle de demain. Je me réjouis donc de constater que le soutien aux
projets de développement des PMI progresse de 7 % en crédits de paiement. De
même, la création de quarante sept emplois au sein du secrétariat d'Etat à
l'industrie et de douze emplois dans les directions régionales de l'industrie,
de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, contribuera utilement au
développement industriel de nos régions et, ainsi, à la création d'emplois
nouveaux.
Ces emplois que nos PMI créeront demain, votre budget s'en préoccupe, puisque
25 % des aides prévues au chapitre 66-01 seront affectées aux entreprises
médianes. Ce redéploiement traduit une volonté salutaire d'accompagner le
développement des industries nouvelles.
C'est à cette volonté que répond également, monsieur le secrétaire d'Etat,
votre souci de développer l'utilisation d'Internet par les PME-PMI. Leur
capacité à s'approprier la révolution numérique pour accroître leur
productivité, renforcer leur compétitivité et diversifier leurs marchés, est
aujourd'hui un facteur essentiel de leur réussite. L'effort de 1,5 milliard de
francs prévu à ce sujet me semble donc nécessaire.
Je ne doute pas, par ailleurs, que la loi sur la société de l'information,
annoncée par le Premier ministre à l'université de Hourtin, permettra de
renforcer encore les efforts en ce domaine.
Enfin, toujours dans le cadre d'une amélioration de l'environnement des
industries françaises, votre budget consacre des moyens importants à la
formation des futurs entrepreneurs. Dans les établissements qui dépendent de
votre secrétariat d'Etat, un effort est prévu pour le perfectionnement des
formations : je pense aux créations d'emplois dans les écoles des mines, ou au
soutien apporté à Supélec.
D'autre part, des orientations à long terme sont dessinées : mise en oeuvre de
la charte des écoles d'ingénieurs ; maillage de ces écoles avec leurs
homologues européens ; approfondissement des relations des écoles des mines
avec les grandes directions du ministère ; réflexion prospective pour le
renouvellement des concours, afin de répondre aux évolutions démographiques ;
redéfinition des cycles pédagogiques. Tels sont les ambitieux chantiers que
vous nous proposez. Nous ne pouvons qu'y souscrire.
M. Pierre Laffitte.
Bravo !
M. Henri Weber.
Le dernier point sur lequel je voulais insister, monsieur le secrétaire
d'Etat, est le développement d'actions en faveur de la recherche et de
l'innovation.
Nous voyons bien aujourd'hui que la part la plus dynamique de notre croissance
provient des nouvelles technologies, de l'utilisation de la recherche, de
l'innovation notre collègue Pierre Laffitte a parfaitement raison d'insister
sur ce point.
C'est pourquoi le retard français en termes de dépôts de brevets me semble
particulièrement préoccupant. Depuis de nombreuses années, le nombre des
brevets déposés en France est en effet en baisse constante, malgré une légère
reprise depuis deux ans.
Si je me fécilite de voir que votre budget prévoit le maintien de la capacité
de l'Agence nationale de valorisation de la recherche, l'ANVAR à 1,4 milliard
de francs, je me demande tout de même s'il ne conviendrait pas, à ce sujet,
d'engager des politiques plus ambitieuses. Je pense à une meilleure
interprénétation des univers, trop souvent cloisonnés, de la recherche et de la
technologie. Je pense aussi à la création, au-delà d'un crédit-recherche, d'un
crédit-innovation en faveur des petites entreprises innovantes. Je pense
également à la possible mise en place de structures juridiques et comptables
destinées à aider les chercheurs qui souhaiteraient développer leurs
compétences en créant des sociétés innovantes.
De même, si je me réjouis de constater que la collecte de capital-risque s'est
élevée l'an dernier à 11,5 milliards de francs, triplant ainsi en deux ans, je
souhaite que nos efforts en ce sens soient maintenus et même renforcés,
notamment en faveur des
start-up
. Je sais que vous partagez cette
préoccupation, monsieur le secrétaire d'Etat, et que M. Christian Sautter en a
fait l'une de ses priorités.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Tout à fait !
M. Henri Weber.
J'aimerais néanmoins avoir quelques détails quant aux mesures que vous comptez
prendre à ce sujet.
Ces quelques réserves - modestes - formulées, nous voterons votre bon budget,
monsieur le secrétaire d'Etat,...
M. Josselin de Rohan.
Nous ne le voterons pas !
M. Henri Weber.
... parce que c'est un budget de croissance, un budget d'emploi, un budget
d'avenir qui contribuera à pérenniser le dynamisme nouveau de notre économie.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Teston.
M. Michel Teston.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chères et chers
collègues, je veux saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour insister
plus particulièrement sur l'exigence fondamentale qui doit être la nôtre en
matière de présence postale sur l'ensemble du territoire, que ce soit dans les
zones rurales ou dans les quartiers urbanisés dits « sensibles ».
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Michel Teston.
Certes, depuis la loi du 2 juillet 1990, La Poste doit accorder une attention
toute particulière à l'amélioration de sa présence territoriale afin d'assurer
un service public de qualité accessible à tous.
De même, il faut rappeler que des orientations très positives ont été définies
dans le contrat d'objectifs et de progrès signé le 25 juin 1998 entre l'Etat et
La Poste, orientations qui visent à préciser les conditions d'évolution et
d'amélioration du service postal, tant en zone rurale qu'en zone urbaine.
De plus, ce même contrat d'objectifs et de progrès prévoit la mise en oeuvre
d'une concertation locale rénovée et renforcée. C'est ainsi que je veux rendre
hommage à la décision de créer dans chaque département une commission
départementale de présence postale territoriale, qui contribue à accompagner la
modernisation du réseau tout en permettant la nécessaire concertation avec les
élus sur les projets d'intérêt local.
Ne serait-il d'ailleurs pas souhaitable, monsieur le secrétaire d'Etat,
d'envisager le même dispositif pour France Télécom ?
Enfin, sur le plan financier, je tiens à souligner l'avancée positive que
constitue la proposition qui nous est faite d'augmenter de 50 millions de
francs l'aide au transport et à la distribution de la presse, qui sera portée à
1,9 milliard de francs.
Toutes ces mesures, ajoutées à la hausse globale d'un peu plus de 4 % des
crédits affectés à La Poste et aux télécommunications, témoignent, à
l'évidence, de la volonté du Gouvernement d'affirmer la présence de l'Etat,
dans un secteur où la concurrence devient chaque jour plus vive.
Néanmoins, si l'on peut se réjouir de cet engagement pour une présence postale
prenant en compte la diversité des territoires, l'instauration d'un véritable «
service postal universel » doit maintenant être concrétisé par un renforcement
de la garantie de maintien des services publics, par exemple dans les zones
rurales et de montagne les plus fragiles.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Michel Teston.
A l'heure des nouvelles technologies de communication, il ne faut pas oublier
que ces services ont constitué en milieu rural une avancée sociale majeure.
Privilège des citadins, la distribution du courrier à domicile ne concernait
pas, à l'origine, les millions de ruraux. Il a fallu attendre la grande réforme
postale de 1829 pour que bourgs et villages de France reçoivent la visite du
facteur, d'abord tous les deux jours, puis quotidiennement.
Bien sûr, les services de La Poste doivent s'adapter et se moderniser.
Néanmoins, cette réorganisation ne doit pas se faire au détriment de la
présence postale dans nos villages et nos quartiers récemment urbanisés.
Je suis, pour ma part, fortement convaincu que le développement de nos
communes, qui est un élément essentiel de la démocratie, est étroitement lié à
une offre de services publics de qualité. Mis à part l'éducation nationale, il
n'existe probablement aucun service public dont la présence soit aussi
importante pour l'aménagement du territoire que La Poste.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
Il convient d'ailleurs d'insister sur l'implication des personnels de La
Poste, agents qui sont animés d'une culture de service public exemplaire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons totalement confiance en votre
volonté d'oeuvrer pour le maintien de ce service postal universel, mais nous
resterons vigilants, comme nous le demandent avec insistance nos
concitoyens.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes,
ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier tous les orateurs. La qualité des
débats, celle des rapports présentés par M. Clouet, au nom de la commission des
finances, de MM. Grignon, Hérisson et Besson, pour la commission des affaires
économiques et du Plan, témoignent du réel intérêt que porte le Sénat à la
politique industrielle. Cet intérêt, j'ai pu l'apprécier également lors des
auditions devant les commissions respectives, sous les présidences de MM.
Lambert et François-Poncet, et ce même si je suis en désaccord avec trois des
quatre rapporteurs sur les conclusions qu'ils croient pouvoir tirer de leur
examen de mes crédits.
Mon action, ce budget 2000, je les résume en quelques mots qui constituent en
quelque sorte une réponse à MM. Clouet, Hérisson et Grignon : oui, nous avons
une ambition pour l'industrie !
Ambitieux, le budget qui vous est présenté l'est à plusieurs titres : il est
en progression, il est plus lisible, plus transparent et recentré sur les
dépenses d'intervention.
Ce budget atteint 16,6 milliards de francs de crédits - c'est plus, monsieur
Clouet, qu'une coquille d'huître vide
(Sourires) -
soit une progression
de 2,3 % par rapport à 1999, alors que l'évolution globale du budget de l'Etat
n'est que de 0,9 %, comme M. Lefebvre l'a relevé au début de son
intervention.
Le secteur secondaire est donc désormais un budget prioritaire et l'on ne peut
par conséquent pas parler, comme l'a fait M. Clouet. Par ma part, je dirai
plutôt à l'inverse que, dans l'huître, il y avait une perle : c'est le
remarquable effort consenti par ce gouvernement pour l'industrie et, en
particulier - j'y reviendrai -, pour l'innovation industrielle.
Ce budget bénéficie d'une présentation plus transparente. M. Weber l'a bien
montré, notant également que mes crédits augmentaient de 7 % entre la loi de
finances pour 1998 et la loi de finances pour 2000.
Ces 7 % font l'objet d'une présentation transparente au sein d'une section
budgétaire unique consacrant la réalisation d'un grand ministère cohérent,
chargé de l'économie, des finances et de l'industrie, un ministère de la
production comme a pu le dire - M. Weber le rappelait - Dominique Strauss-Kahn
avec justesse.
Quatre agrégats vous sont désormais présentés, agrégats qui retracent
l'activité du secrétariat d'Etat à l'industrie. Pour chaque action, des
indicateurs d'activité et de performance ont été établis, avec des objectifs
annuels qui améliorent très sensiblement la qualité de l'information
parlementaire quant à l'utilisation des crédits.
Près de 650 millions de francs sont budgétisés - j'aurais pu dire rebudgétisés
- traduisant clairement, par le chiffre et la volonté politique qu'il signifie,
cet impératif de vérité, de sincérité, de transparence, donc de contrôle
parlementaire, vérité qui m'anime.
Ce budget est enfin, ai-je dit en commençant, recentré sur des dépenses
d'intervention. L'Etat doit concentrer son action aujourd'hui sur les réussites
de demain. Si les dépenses ordinaires n'évoluent que de 1,2 % - il est normal
qu'elles soient contenues pour être plus efficaces avec des moyens qui
évolueront donc de 1,2 % - les dépenses en capital progressent de 4,5 % pour
les crédits de paiement et - j'y insiste, mesdames et messieurs les sénateurs -
de 8 % pour les autorisations de programme.
Mon ambition pour l'industrie, je souhaite la décliner, en 2000, en trois
volets : une ambition pour l'innovation, une ambition en faveur du
développement industriel, une ambition pour nos services publics.
Tout d'abord, j'ai une ambition en matière d'innovation.
Ce budget soutient l'innovation pour un montant de 2 850 millions de francs.
Nous poursuivons la politique et le programme de « technologies clés », nous
poursuivons le maintien de la capacité d'engagement de l'ANVAR à un niveau de 1
400 millions de francs, nous poursuivons un effort remarquable pour
l'innovation, stratégie fondamentale de mon secrétariat d'Etat avec les 1 836
millions de francs d'autorisations de programme du chapitre clé de la lecture
de notre politique industrielle, le chapitre 66-01. Je sais que les
connaisseurs que vous êtes, mesdames, messieurs les sénateurs, apprécieront cet
effort en faveur de l'innovation. Et ce chapitre augmente de 1 %.
Je suis tenté de dire : non au saupoudrage et oui aux aides structurantes ! Je
crois, monsieur Clouet, vous avoir entendu et pouvoir ainsi répondre aux
critiques que vous citez.
Nous avons une démarche rationnelle et une démarche contrôlée. Depuis les
Assises de l'innovation qui se sont tenues en 1998, les crédits du chapitre
66-01 ont été très rationnellement, profondément renouvelés. Ils sont
réorientés vers les entreprises médianes, qui constituent peut-être l'une des
faiblesses du paysage industriel français par rapport à celui de nos
concurrents, allemands en particulier ; 25 % de ce chapitre leur seront
consacrés dès l'an 2000. Grâce aux appels à projets gérés avec des comités
d'experts externes, de nombreuses et nouvelles entreprises bénéficient des
aides du secrétariat d'Etat à l'industrie. La montée en puissance des avances
remboursables - elles atteindront 40 % de ce chapitre en 2000 - augmente la
capacité d'action du secrétariat d'Etat à l'industrie. Enfin, des priorités
thématiques ont été affirmées : ce sont les technologies clés pour structurer
au niveau des régions des pôles de compétences, par exemple les biotechnologies
et la société de l'information.
Au sein du même chapitre 66-01, 1,5 milliard de francs environ est consacré à
la société de l'information. Je pense à l'action pour l'utilisation collective
d'Internet par les PME, le programme UCIPE, ouvert depuis 1999 à l'ensemble des
PME pourvu qu'elles agissent collectivement. Je pense, monsieur Trémel,
monsieur Laffitte, au réseau national de recherche en télécommunications, le
RNRT, qui, en 1995, a engendré 1 milliard de francs de recherche dans le
secteur. Et puisque plusieurs sénateurs m'ont interrogé sur ce réseau, j'ai le
plaisir d'indiquer que le soutien spécifique de l'Etat, ministère de
l'industrie et ministère de la recherche, a été de 200 millions de francs en
1998 et de 270 millions de francs en 1999, apportés directement au RNRT. A cela
s'ajoute d'ailleurs un montant d'aides de 50 millions de francs attribuées à
des PME par l'ANVAR. Nous proposons de reconduire ces efforts en l'an 2000.
Le deuxième appel à projets du RNRT en 1999 a permis à 120 projets d'être
déposés ; 40 de ces projets sont labellisés et font l'objet d'un financement en
1999, ou le feront en 2000. Les thèmes de recherche sont aussi importants que
le développement de la norme de troisième génération UMTS, que l'Internet à
haut débit, que les terminaux d'accès, qu'une foultitude d'acquisitions
innovantes pour lesquelles la France se place bien, grâce en particulier, en
effet, monsieur Laffitte, à de petites entreprises, à des petites
start-up
, comme l'on dit, qui, très rapidement, peuvent conquérir des
marchés et dont nous encourageons le succès dans le cadre de cette politique de
la société de l'information.
A cela s'ajoute le programme PRIAMM, nouveauté de 1999, qui permet d'inciter
les industries culturelles à s'approprier la révolution numérique, programme
que nous menons de concert avec Mme Trautmann, ministre de la culture et de la
communication.
En 2000, le Gouvernement présentera au Parlement une loi sur la société de
l'information qui portera sur la liberté de communication, le développement des
réseaux et la sécurité des transactions électroniques. Avec ce texte, qui se
nourrira de la grande consultation publique terminée dimanche 5 décembre et au
cours de laquelle nous avons reçu plus de 300 propositions, la France se
situera résolument parmi les pays pionniers en la matière, et je rassure à cet
égard M. Laffitte.
Nous avons vraiment l'intention, avec cette loi sur la société de
l'information, de continuer à placer la France dans les tout premiers. Nous
sommes à la troisième ou à la quatrième place dans le monde dans ce domaine, et
nous entendons y rester, voire gravir de nouveaux échelons.
M. Pierre Laffitte.
Il faudra de l'argent !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
En effet, il faudra des crédits, monsieur le sénateur
! Mais je suis en train de démontrer que les priorités du Gouvernement
témoignent de la réalité de notre politique industrielle en direction de ces
entreprises, de ces actions, de ces recherches et de ces innovations.
L'innovation industrielle est en effet déterminante dans une économie
mondialisée et à forte valeur ajoutée. J'en fournirai trois illustrations parmi
d'autres.
Première illustration : en France, 95 % de la croissance supplémentaire, en
1998, est liée aux technologies de l'information et de la communication.
Deuxième illustration : au cours du premier semestre de l'année 1999, 16 % de
brevets supplémentaires ont été enregistrés par rapport à la même période de
1997. Les choses bougent, et dans le bon sens puisque ce taux progressera
encore en 2000 sous l'effet de la baisse que je viens de décider de 50 % de la
taxe de recherche sur les brevets.
Troisième illustration : au mois de septembre, il n'y avait pas moins de 1 000
sites de commerce électronique, en France, soit une augmentation d'un tiers du
nombre des sites en quatre mois.
L'émergence d'une nouvelle économie est donc maintenant une réalité ; il
s'agit d'une croissance
high-tech
durablement élevée, créatrice
d'emplois, et ce dans tous les secteurs.
Nous nourrissons également l'ambition de contribuer au développement de
l'industrie tout entière. M. Lefebvre a d'ailleurs eu raison d'indiquer cette
inflexion nouvelle par rapport à la politique que nous avons connue avant
1997.
Nous devons agir, non seulement sur l'environnement des entreprises
industrielles, mais aussi directement sur les PMI et les secteurs en
mutation.
Tout d'abord, nous agissons sur l'environnement des entreprises pour dynamiser
le secteur industriel.
Au-delà des seuls effets de la politique économique et fiscale générale
illustrée dans la première partie du budget que j'ai défendue devant vous la
semaine dernière, nous fondons notre action sur le triptyque : formation,
qualité et sécurité.
La formation des entrepeneurs constitue, monsieur Grignon, l'une de mes
priorités. Les crédits pour les écoles - Mines, télécommunications et SUPELEC -
augmentent de 6 % par rapport à 1999 compte tenu, notamment, de la reprise par
le groupe des écoles des télécommunications de certaines équipes du Centre
national d'études des télécommunications à Lannion, monsieur Trémel, et à
Bagneux, avec 26 créations de postes de chercheurs pour le ministère en charge
de l'industrie.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Avec ce projet de budget, nous encourageons également
la qualité, la sécurité et l'environnement, qui sont essentiels pour la
compétitivité de toute notre industrie.
Les crédits pour la métrologie augmentent de 18,5 %, comme l'a souligné M.
Weber. Cela permettra, en cinq ans, de multiplier par deux le soutien que nous
lui apportons.
Le renouveau de la métrologie française est engagé, prenant appui d'ailleurs
sur le remarquable laboratoire public qui oriente l'ensemble de nos recherches
et de nos décisions dans ce domaine.
Les moyens pour la sécurité des mines découlant de la mise en oeuvre de la loi
« après mines », adoptée à l'unanimité par le Sénat, doublent, ce qui permet de
renforcer les actions de prévention des affaissements miniers. Les décrets
d'application seront prochainement publiés. M. Besson a eu raison de poser la
question.
En deuxième lieu, en se voulant de proximité et, donc, plus performant, ce
projet de budget vise plus que jamais la modernisation des petites et moyennes
entreprises, en particulier dans le cadre des contrats de plan Etat-région, qui
ne laissent évidemment, j'en suis convaincu, aucun sénateur indifférent !
Les crédits en faveur des PMI augmentent de 7 % en 2000, et 703 millions de
francs figurent au chapitre 64.92, autre chapitre emblématique de notre
action.
Quarante-sept emplois sont créés au sein du secrétariat d'Etat à l'industrie
pour l'essentiel sur le plan régional, naturellement, afin de conforter la
capacité de développement des directions régionales de l'industrie, de la
recherche et de l'environnement. Les petites et moyennes entreprises qui
soutiennent l'emploi en développant leurs innovations et leurs investissements
reçoivent l'appui des DRIRE.
Je cherche ce faisant à accroître l'efficacité de l'Etat dans son action en
faveur de l'industrie et de l'emploi. M. Weber l'a tout à l'heure suffisamment
expliqué à M. Clouet pour que je n'aie pas à y revenir longuement !
Cet effort se traduit par des procédures simplifiées de façon très
significative. Il faut en effet s'attacher à encourager la simplification et la
lisibilité de notre action en direction des entreprises. Il s'agit, par
exemple, du contrat unique de l'ANVAR, qui est remarquable et qui a été mis en
oeuvre dès le mois de septembre 1999. Il s'agit aussi de la procédure ATOUT, et
du contrat unique pour les DRIRE, qui sera créé dans les semaines à venir. Il
s'agit encore de la suppression de douze taxes industrielles, qui figurent
parmi les quarante-neuf suppressions annoncées par M. Sautter dans le projet de
loi de finances.
En troisième lieu, ce projet de budget accompagne les mutations de notre
industrie.
Des difficultés peuvent survenir çà et là dans certains secteurs, dans
certaines régions. Je ne manque jamais de vous rencontrer individuellement dans
de telles circonstances.
Ces difficultés sont d'ailleurs parfois lourdes. Je le sais d'expérience, en
tant qu'élu d'un département très industriel, et M. Lefebvre l'a rappelé pour
le Nord, ainsi que M. Weber, pour la Seine-Maritime.
Ces difficultés requièrent de l'Etat un accompagnement volontaire, qui jamais
ne cède à la fatalité, au fatalisme. Ainsi, 2 840 millions de francs sont
consacrés à Charbonnages de France sur un budget total de 4,8 milliards de
francs, en hausse de 9,5 % par rapport à 1999, destiné à l'ensemble de
l'accompagnement des difficultés industrielles.
Les autorisations de programme pour l'équipement naval s'accroissent
elles-mêmes de plus de moitié, ce qui traduit l'engagement du Gouvernement de
favoriser, dans le respect des règles communautaires, le développement de la
construction navale, notamment des remarquables Chantiers de l'Atlantique.
S'agissant des Chantiers de l'Atlantique, je dirai à M. Grignon, comme à Mme
Dieulangard, qui interviendra probablement dans quelques instants, que le
carnet de commandes de ces chantiers représente aujourd'hui plus de dix-huit
mois de pleine charge.
Onze paquebots sont en cours de construction ou en commande. Ce secteur
n'avait pas connu une situation aussi satisfaisante depuis de nombreuses
années.
Je suis heureux d'avoir été celui des ministres en charge de l'industrie qui a
pu, par une aide tout à fait cohérente avec ce que permettent les décisions
européennes du Conseil des ministres et le suivi qui en est assuré par la
Commission, donner un élan positif en matière d'innovation, de construction et
de réalisation de paquebots, en matière de rénovation du tissu industriel de la
Loire-Atlantique.
Enfin, les moyens du fonds d'industrialisation de la Lorraine, du fonds
d'industrialisation des bassins miniers, les crédits de politique industrielle
et du comité interministériel de restructuration industrielle sont consolidés à
hauteur de 305 millions de francs d'autorisations de programme.
A propos du FIBM, je tiens à rappeler à M. Besson que les reliquats importants
des années passées viennent abonder en cours d'année les crédits initiaux et
qu'ils ne font pas l'objet d'une régulation.
Vous l'aurez compris : sur ces crédits essentiels dans la résolution de
situations de crise, il existe, au sein du Gouvernement, une volonté de
transparence et de vérité sur les coûts comme une volonté de gérer ces aides au
quotidien avec une priorité donnée aux actions préservant et consolidant
l'emploi.
Ma politique en faveur de l'industrie textile en tient lieu d'illustration :
nous sortons progressivement du plan Borotra, sans fuite en avant, en
accompagnant au mieux ce secteur qui traverse souvent, c'est vrai, de lourdes
difficultés. Je suis naturellement à la disposition du groupe d'études «
textile » de la Haute Assemblée, auquel a longtemps oeuvré le regretté Maurice
Schumann, pour donner tous les apaisements et toutes les explications
nécessaires.
Concernant la taxe générale sur les activités polluantes, dont M. Grignon a
parlé, je suis particulièrement vigilant. Il ne saurait en effet être question
d'éroder la compétitivité de certains secteurs économiques, en particulier
celui de la chimie. Les travaux que j'ai engagés dans ce domaine le
garantiront. Nous aurons l'occasion, je l'espère, d'en rediscuter. Ne soyez pas
inquiets, nous veillons au respect de la compétitivité de tous les secteurs qui
pourraient être concernés par la TGAP.
Après l'innovation et le développement industriel, nous avons aussi une grande
ambition pour nos services publics, dans le domaine des communications, évoqué
par M. Hérisson, comme dans celui de l'énergie, dont a traité M. Besson.
La gestion des entreprises chargées d'une mission de service public ne
s'apprécie pas, pour l'essentiel, lors du vote du budget. Il faut d'ailleurs
s'en féliciter, parce que c'est la preuve, s'il en fallait une, de leur bonne
santé économique et sociale.
L'engagement budgétaire de l'Etat répond à des motifs précis. Dans le domaine
des télécommunications, les moyens de l'autorité de régulation des
télécommunications augmentent de 3,5 millions de francs et ceux de l'agence
nationale des fréquences, avec le transfert des activités radiomaritimes de
France Télécom à la NFR, progressent de 21 millions de francs.
Pour La Poste, la situation économique et sociale est sans commune mesure - en
positif - avec ce qu'elle était - en négatif - voilà deux ans. M. Trémel l'a
d'ailleurs reconnu. L'effort de l'Etat est porté à 1,9 milliard de francs en
faveur du transport de presse, conformément aux engagements que j'avais pris,
ici même, voilà un an, et au contrat d'objectifs et de progrès que j'ai signé
avec La Poste en juin 1998. M. Teston l'a d'ailleurs remarqué et en a souligné
le bien-fondé dans son intervention.
Cet engagement atteint 3 milliards de francs sur la durée du contrat
d'entreprise qui lie l'Etat à l'entreprise La Poste en matière de retraites.
Sur ces 3 milliards de francs, 600 millions de francs seront engagés dans le
projet de loi de finances pour 2000. Le Gouvernement accompagne ainsi La Poste,
comme il s'y était engagé clairement dans le contrat d'objectifs et progrès, ce
que reconnaît M. Teston et ce que doit reconnaître M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour les technologies de l'information et La Poste.
Oh non !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Concernant l'électricité, la loi de finances
rectificative dotera la commission de régulation de l'électricité d'environ 50
millions de francs dès 2000, ce qui lui permettra, avec environ cinquante
embauches dès la première année, d'assurer ses nouvelles missions, et donc une
bonne transposition, que je souhaite la plus rapide possible, de la directive
relative au marché intérieur de l'électricité.
La politique énergétique que je conduis s'appuie précisément sur des
entreprises de service public. Quels sont ces principes ?
Le premier est celui de la transparence, avec l'application résolue de tous
les aspects de la loi de 1991 sur l'aval du cycle nucléaire, loi qui a été
adoptée à l'unanimité. Les arbitrages de M. le Premier ministre pris en février
et en décembre 1998 ont été rappelés lors de tous les débats que nous avons eus
sur la politique énergétique de la France, en particulier à l'Assemblée
nationale le 21 janvier 1999.
L'installation de la commission locale d'information et de suivi du
laboratoire de Bure, dans la Meuse, qui précède l'ouverture des travaux de
celui-ci en est la plus récente illustration et marque la détermination du
Gouvernement à appliquer sans faille cette politique.
Les économies d'énergie, les carburants propres, tels que le gaz de pétrole
liquéfié et le gaz naturel véhicules, ainsi que la diversification des sources
d'énergie, au travers de l'ADEME, notamment, dont la très forte hausse des
crédits en 1999 est consolidée en 2000, avec 242 millions de francs
d'autorisations de programme en provenance du ministère de l'industrie,
constituent le deuxième axe de cette politique. Je citerai enfin la recherche
et l'innovation au travers du CEA, remarquable outil scientifique qui, avec
plus de 11 milliards de francs de crédits, voit ses moyens progresser de 1,1 %
à périmètre constant, et ce sans jeu d'écriture, monsieur Murat.
Je confirme à cette occasion à Mme Heinis que les budgets de 1999 et pour 2000
sont parfaitement équilibrés.
Je tiens, naturellement, à rendre un vibrant hommage à l'action et aux
résultats scientifiques des chercheurs du CEA, organisme remarquable qu'il est
bien dans l'intention du Gouvernement de conforter et de continuer de
développer, car nous en avons besoin pour notre politique énergétique et
nucléaire. C'est un organisme tout à fait exceptionnel dans le champ mondial de
la recherche, et je tiens à souligner combien le Gouvernement est fier que nous
ayons, en France, un CEA de ce niveau-là, de cette qualité-là.
(Très bien !
sur les travées socialistes.)
Je suis très attaché à une politique énergétique équilibrée - M. Besson l'a
excellemment rappelé - et donc au maintien d'une option nucléaire ouverte, au
meilleur niveau technologique du moment, ce qui suppose que nous soyons en
mesure de prendre les décisions structurantes qui s'imposent au moment où elles
s'imposent comme, par exemple, lorsqu'il nous faudra prendre la décision sur le
réacteur de nouvelle génération dit
European pressurized water reactor
,
l'EPRW évoqué à juste titre par MM Besson et Weber.
Enfin, je ne peux que me réjouir de l'annonce faite par Framatome et Siemens,
du regroupement de leur activité nucléaire sur les services, les combustibles
hors MOX, la construction de chaudières. Cela signifie, monsieur Lefebvre, non
pas un désengagement, mais, bien au contraire, une impulsion européenne
nouvelle dans le nucléaire et une capacité à réaffirmer, dans le concert
européen, l'importance de cette source d'énergie. Elle a vocation non seulement
à prendre aujourd'hui une part prépondérante dans le contexte énergétique
global français, d'autant qu'elle satisfait les engagements de Kyoto - pas un
seul atome de carbone n'est émis dans l'atmosphère -, mais aussi à toujours
plus s'affirmer sur le plan international.
Tout à l'heure, une délégation chinoise était dans la tribune officielle. Ce
pays aussi, on l'aura compris, peut faire l'objet d'offres intéressantes de la
part des entreprises européennes, en particulier de l'industrie française.
L'accord entre Framatome et Siemens n'est donc pas du tout indifférent à la
dynamique que nous souhaitons, je pense, sur toutes ces travées, et qui est
profitable à la fois pour l'emploi, pour l'économie, pour la science et la
technologie françaises.
A ce propos, je souhaite revenir un instant sur le travail de la commission
mixte paritaire sur le projet de loi de transposition de la directive «
Electricité ».
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Oh oui, alors ! Nous aussi !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je me dois de préciser dans cet aréopage, après avoir
lu certains articles mal fondés que le Gouvernement ne participe pas au travail
de cette commission.
Néanmoins, j'ai apprécié la volonté de la Haute Assemblée de faire progresser
ce texte important, et disant cela, je m'adresse à Bernard Murat. Je salue
également le travail technique et la volonté d'avancer du rapporteur Henri
Revol, du président de la commission Jean François-Poncet, du président Jacques
Valade.
Gardons-nous de dramatiser le retard qui a été pris. Je m'en suis expliqué
jeudi dernier à Bruxelles, au Conseil « Energie », avec mes homologues
européens. Le projet de loi de transposition sera examiné en nouvelle lecture à
l'Assemblée nationale le 18 janvier. Le 25 janvier, c'est le Sénat qui aura à
en discuter si la conférence des présidents, naturellement, en est d'accord. La
lecture définitive pourrait avoir lieu le 1er février et, si M. le Président de
la République l'accepte, la promulgation de la loi interviendrait à la
mi-février.
Concernant le gaz, monsieur Besson, le Gouvernement proposera au Parlement
d'examiner le projet de loi de transposition avant la date limite du 10 août
2000. Je tiendrai une ligne pragmatique - je l'affirme à M. Lefebvre - afin de
renforcer l'avenir industriel du gaz dans notre pays et de maintenir le service
public du gaz, une ligne telle que vous l'avez suggérée, monsieur le sénateur,
et telle que l'a suggérée M. Charles Fiterman, dans un excellent rapport au
Conseil économique et social pris en considération par le Gouvernement.
A
London Electricity
comme à Gaz de Berlin, nos partenaires savent que
les services publics français mettent en oeuvre des stratégies commerciales
offensives qui leur permettent d'affronter la concurrence internationale avec
succès.
Des services publics dynamiques ? Ils le sont !
Des services publics ouverts à l'international ? Il s'ouvrent progressivement
à l'international par de magnifiques succès ; je viens d'en évoquer deux.
Des services publics inscrits dans la durée ? Oui ! par une transposition
vigilante et concertée des directives européennes sans fragiliser le service
public !
Des services publics d'une réelle ambition sociale au travers d'accords sur
l'aménagement de la réduction du temps de travail exemplaires, d'une véritable
lutte contre la précarité.
Telle est notre vision, telle est ma vision des entreprises publiques, non
seulement dans le domaine de l'énergie, mais aussi, messieurs Hérisson, Trémel
et Delfau, dans le secteur des communications.
Je voudrais dire un mot, puisque j'y ai été invité, de l'aménagement et de la
réduction du temps de travail à France Télécom. C'est peut-être l'occasion de
mettre les points sur les « i ».
Le Gouvernement a demandé à France Télécom de mener une concertation plus
constructive avec les organisations syndicales et les personnels. Il est, à nos
yeux, nécessaire qu'un accord d'entreprise sur l'aménagement et la réduction du
temps de travail concernant tous les personnels, qu'ils soient fonctionnaires
ou contractuels, permette de trouver rapidement - j'insiste sur cet adverbe -
un bon équilibre entre le respect de la compétitivité de l'entreprise, les
conditions de travail des salariés et l'emploi.
France Télécom, qui a recruté 12 000 personnes - essentiellement des jeunes -
au cours des trois dernières années et qui forme chaque année plus de 1 000
jeunes en alternance, partage d'ailleurs cette préoccupation pour l'emploi, à
la différence d'autres opérateurs historiques qui ont engagé une réduction
forte de leur effectif en Europe. Pensez à la suppression de 40 000 emplois
chez Deutsche Telekom en Allemagne ! A cette occasion, France Télécom doit
s'attacher, comme les autres entreprises de télécommunications, à developper
l'emploi stable...
Mme Hélène Luc.
Absolument !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... et à contribuer, par son exemple, à montrer que le
développement des nouvelles technologies de l'information peut se traduire par
des emplois de qualité, avec de vraies perspectives d'évolution au sein des
entreprises du secteur.
La valeur de France Télécom, septième opérateur mondial et non pas
quatorzième, monsieur Hérisson,...
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Non, huitième !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... progresse, et l'entreprise ne cesse d'acquérir de
nouvelles positions à l'étranger.
L'année dernière, la Haute Assemblée avait souhaité que s'engage un travail
sur la taxe professionnelle de France Télécom. Ici, on doit être sensible à
l'évolution des impositions locales ! Ce travail est en cours.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Cela fait cinq ans que cela dure !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il est particulièrement complexe. J'ai donné des
instructions pour que ce travail débouche le plus rapidement possible et pour
que nous puissions soumettre ces propositions nouvelles aux collectivités
locales après en avoir discuté avec le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie.
Quant à La Poste, elle devrait voir son chiffre d'affaires progresser à un
rythme d'environ 7 % en 1999. Avec 1,8 milliard de francs investi cette année à
l'étranger, elle démontre sa capacité à se développer au niveau international,
même sans hausse du prix du timbre - je devance ainsi une question qui ne m'a
pas été posée par M. Larcher, mais que je souhaitais évoquer du haut de cette
tribune.
La démarche de modernisation des services publics, c'est aussi la mise en
place, dans chaque département, d'une commission de présence postale
territoriale qui, je vous le rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs,
résulte d'une concertation longue et approfondie avec l'Association des maires
de France, voilà un an et demi. Cette commission doit répondre, je pense, aux
souhaits de MM. de Montesquiou et Murat de traiter, au plus près des usagers,
du service rendu par La Poste, aussi bien en milieu rural que dans les 700
quartiers dits « zones urbaines sensibles » et définis par le ministère de la
ville.
Nous devrions encore enregistrer de réels progrès du point de vue de la
présence postale.
Le secteur postal fera l'objet, ainsi que vous l'avez indiqué, d'une
négociation européenne en 2000.
Comme vous le savez, monsieur Hérisson - je le dis également à l'attention du
groupe socialiste qui m'a interrogé sur ce point - j'ai fait valoir il y a dix
jours à M. Bolkestein, le commissaire chargé de ces questions, notre fermeté
sur le maintien d'un service réservé large - je pèse mes mots - et le
renforcement des exigences du service universel.
A cet égard, je compte sur vous, sur l'Assemblée nationale et sur les
représentants français au Parlement européen pour faire valoir, aux côtés du
Gouvernement, l'unité de vue de la France dans ce domaine. Nous nous battrons
sur ce point, et soyez certains que nous serons très fermes et très
déterminés.
En conclusion, ce projet de budget est résolument offensif. Formation,
innovation, qualité, telle est notre stratégie pour l'industrie. Pour les
services publics, trois mots clés : durée dans le service public, modernité par
le service public, exemplarité sur le plan social dans le service public.
La conjoncture industrielle est bonne. Les perspectives de production des
industriels pour 1999 sont à un niveau jamais atteint depuis 1980. L'évolution
de notre compétitivité est favorable, alors que régresse celle de nos
partenaires allemand et britannique. Ne l'oublions jamais dans nos
comparaisons. En 1998, nous avons assisté à une inversion de tendance : 50 000
emplois ont été créés dans l'industrie. Je suis convaincu que l'action de
l'Etat et la mise en oeuvre d'une véritable politique industrielle ne sont pas
pour rien dans ces bons résultats positifs.
Mesdames et messieurs les sénateurs, je regrette que les commissions saisies
au fond ou pour avis aient choisi de prendre pour cibles certains budgets -
peut-être pour des motifs plus idéologiques que techniques -...
Mme Hélène Luc.
Eh oui !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... en refusant leur adoption.
Le Gouvernement entend, quant à lui, bien assumer ses responsabilités.
Personnellement, j'ai la satisfaction, c'est vrai, de défendre devant vous un
bon budget pour une industrie française et des services publics français qui
vont de l'avant !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées
socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen des crédits figurant aux états B et C et
concernant l'économie, les finances et l'industrie : II. - Industrie (et
Poste).
Je rappelle au Sénat que ces crédits seront mis aux voix aujourd'hui même, à
la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 4 806 315 457 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 6 121 105 900 francs. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 1 607 450 000 francs ;
« Crédits de paiement : 1 158 870 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 7 383 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 2 113 280 000 francs. »
Sur ces crédits, la parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le secrétaire d'Etat, à l'occasion du vote de l'article 39 de la loi
de finances, je souhaiterais parler, trop brièvement, hélas ! de La Poste et
évoquer, plus rapidement encore, France Télécom.
Nos entreprises publiques se portent bien, y compris La Poste, qui termine un
exercice qui sera sans aucun doute bénéficiaire.
Vous êtes, monsieur le secrétaire d'Etat, leur tuteur et le garant qu'elles
assument leur double fonction : une présence sur le marché concurrentiel et
l'accomplissement de leur mission de service public. C'est sous cet angle que
je compte vous interroger.
S'agissant de La Poste, je suis, comme mes collègues, assailli des plaintes
justifiées des maires sur les réductions d'horaires, les fermetures
intempestives de bureaux, le non-remplacement des agents en congé ou en
formation, voire, parfois, la non-distribution du courrier le samedi matin.
Des cadres départementaux de La Poste affirment que la mise en place des 35
heures serait responsable de cette situation. La réduction du temps de travail
signifierait donc la réduction du service public. Comment accepter une telle
dérive ?
Une anecdote - exceptionnelle, j'en conviens - illustre la situation qui
s'établit dans certaines villes : un bureau de poste du quartier de la Savine,
à Marseille, appose un cachet mentionnant : « non distribué pour cause
d'insécurité » sur les plis et les colis d'une partie des rues de son
ressort.
Je peux comprendre l'attitude des postiers. Je ne peux penser en revanche - et
je sais que ce n'est pas le cas - qu'elle soit couverte de votre autorité.
Tel est le cadre de mon intervention, et je souhaiterais, partant de là, vous
poser toute une série de questions précises, monsieur le secrétaire d'Etat,
questions auxquelles vous avez déjà répondu en partie.
Abandonnée à l'arrivée de votre Gouvernement, la séparation en branches de La
Poste renaît sous le masque du programme SOFT - cela ne s'invente pas ! - qui
tend à verticaliser et à autonomiser les métiers, bref, à disloquer encore un
peu plus l'entité de La Poste.
Tous les syndicats, sans exception, ont protesté contre le risque de
privatisation rampante. Qu'en pensez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Vous aviez approuvé - c'est ma deuxième question - l'idée que la procédure des
contrats de plan Etat-région pourrait financer la redynamisation, la
modernisation et l'extension du réseau, notamment dans les quartiers urbains
difficiles. Avez-vous des informations sur le nombre de régions qui seraient
susceptibles de s'engager dans cette voie ?
Vous avez - troisième question - toujours plaidé pour la reconquête des
quartiers urbains par La Poste, service de proximité irremplaçable. Avez-vous
des informations sur ce sujet ? Plus précisément, est-ce que l'implantation des
maisons de service public, bien adaptées à ce milieu et désormais ayant force
de loi, bénéficiera d'un effort significatif l'année prochaine ?
Quatrième question : comme vous le savez, la présidence finlandaise de l'Union
européenne vient de proposer la mise en place d'un service bancaire de base
pour tous les citoyens sans exception. Ce projet sera-t-il repris par la
présidence française à partir de juin prochain et, dans l'affirmative, quelle
conséquence en tirez-vous pour le devenir de La Poste ?
Cinquième question : plusieurs de nos collègues ont évoqué la difficulté
qu'éprouve La Poste pour investir dans les acquisitions - même si elle l'a
fait, vous l'avez rappelé à l'instant - et dans le partenariat, nécessaire dans
la course à la taille critique dans laquelle elle est engagée à l'échelon
européen et mondial. Ces collègues en tirent parfois la conclusion qu'il faut
privatiser, ce que je ne peux accepter. Mais la question demeure : les 5,5
milliards de francs d'autofinancement de La Poste sur fonds propres sont-ils en
mesure de contrebalancer le développement de TNT, la poste hollandaise, depuis
sa privatisation en 1990, et les 40 milliards à 50 milliards de francs qui sont
consacrés par la poste allemande à sa croissance externe en deux ans ?
Ce problème vous préoccupe, je le sais. Quelles perspectives le Gouvernement
peut-il ouvrir ?
Sur un autre plan, et je reviens à l'intérieur de l'Hexagone, quel avenir
envisagez-vous pour l'ENSPTT, dont les personnels font un travail remarquable
et dont les étudiants sont fort satisfaits ?
J'en viens à ma dernière question, et, de ce point de vue, la réponse que vous
avez faite tout à l'heure ne m'a pas totalement éclairé.
Vous vous êtes engagé au printemps, devant le Parlement, à ouvrir un débat sur
l'actualisation de la loi de 1990 afin de faciliter l'adoption d'une nouvelle
loi postale, dont tout montre que le pays l'attend. Quel est votre calendrier
?
Faute de temps, je ne peux maintenant qu'effleurer l'autre sujet que je
voulais aborder : France Télécom.
Je commencerai par vous demander, monsieur le secrétaire d'Etat, ce que vous
comptez faire pour financer l'exploitation des cabines téléphoniques dans les
communes de moins de 1 000 habitants. Nombre de communes rurales s'inquiètent
d'un désengagement programmé de l'opérateur public.
Je m'indigne par ailleurs - le mot n'est pas trop fort - du blocage persistant
entre la caisse d'allocations familiales et France Télécom à propos des tarifs
sociaux pour le téléphone.
Plus de deux ans après le vote de la loi, et après la parution du décret - ce
n'est donc pas de votre fait - aucune mesure n'a été prise et l'Etat doit
reverser aux opérateurs privés les sommes collectées pour donner aux citoyens
les plus pauvres le droit de communiquer. Quelle initiative comptez-vous
prendre en la matière ?
Voilà quelques-unes des questions que je souhaitais vous poser. Je crains que
les contraintes liées à l'organisation du débat ne vous permettent pas de me
répondre au cours de la présente séance. Je me propose donc, monsieur le
secrétaire d'Etat, de vous faire tenir mes questions par courrier.
Au demeurant, en concluant cette brève intervention, je voudrais vous dire
que, même si j'ai évoqué, comme il est de règle dans un débat, un certain
nombre de difficultés et de préoccupations graves, compte tenu de l'effort que
fait le Gouvernement dans ce secteur, et peut-être de manière plus
spectaculaire encore dans le secteur de l'industrie, je voterai le moment venu
votre budget.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Ayant déjà répondu à une partie des questions posées
par M. Delfau et ne souhaitant pas allonger le débat, je répondrai à celui-ci
par écrit, d'autant que l'importance du sujet et la sagacité avec laquelle il
est intervenu m'y invitent.
Toutefois, je pense que M. Delfau sera d'accord avec moi pour ne pas réserver
à son usage exclusif les réponses que je lui apporterai, et je me propose donc
d'en communiquer la teneur aux commissions et aux groupes du Sénat.
M. François Trucy.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Permettez-moi cependant d'ajouter une précision,
monsieur le président, à propos des tarifs sociaux de France Télécom.
Devant les difficultés techniques, je me suis engagé dans une réflexion qui
pourrait déboucher sur l'édition de cartes prépayées, lesquelles, sous
certaines conditions, pourraient pallier le très grand retard de mise en oeuvre
de ces tarifs sociaux, répondant par là à la critique justifiée que vient de
faire M. Delfau.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
C'est également la mienne !
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je vous remercierai également, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir répondu
par avance à un certain nombre de mes questions.
Je saisis néanmoins l'occasion du vote des crédits de ce titre VI sur les
investissements pour insister à nouveau sur certains problèmes concernant la
construction navale.
L'an 2000 est la dernière année où la navale peut prétendre à de nouveaux
engagements au titre de l'aide. En 2001, ce sera fini en vertu du règlement
européen. Nous aurons encore des crédits de paiement et peut-être des
autorisations de programme au titre d'anciens engagements, mais il n'y aura
plus de nouveaux engagements puisque le règlement européen l'interdit. Nous
entrons dans une ère totalement nouvelle et il va falloir tirer toutes les
conclusions de ce changement radical.
Tout d'abord, il convient de promouvoir avec volontarisme une politique
extérieure européenne de défense de l'industrie. Le « laisser-faire » du temps
de Léon Brittan n'est plus de mise. Le Premier ministre l'a parfaitement
compris, lui qui a déclaré, le 25 juin, à Saint-Nazaire : « Le Gouvernement, et
particulièrement le secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Christian Pierret,
veilleront à ce que prévalent, dans la dure compétition que vous affrontez,
notamment en provenance d'Asie, des conditions transparentes et loyales. »
C'est cette orientation que vous avez fait prendre par le Conseil européen du 9
novembre qui représente un premier pas dans la bonne direction.
Le Conseil européen a en effet reconnu officiellement que l'industrie navale
européenne était soumise à une compétition déloyale venant de la République de
Corée. Par ailleurs - et c'est à votre insistance que cette résolution a été
prise - le Conseil a salué la détermination de la Commission de continuer à
préparer les éventuelles mesures de rétorsion appropriées.
Quoi qu'il en soit, la définition d'une politique extérieure commune prendra
du temps. Mais il existe, monsieur le secrétaire d'Etat, un outil disponible
immédiatement et fort efficace que ce gouvernement a créé. Il s'agit du GIE
fiscal, qui, non seulement a des effets bénéfiques sur le plan de charge de la
construction navale française, mais encore - et c'est très important - a permis
aux investisseurs étrangers d'aider au développement du secteur des croisières
de la marine marchande française. J'insiste sur ce point : il n'y avait pas de
navires de croisière français avant que certaines commandes d'armateurs
étrangers ne soient orientées, par des mesures fiscales, vers le pavillon
français.
Nous vous demandons, monsieur le secrétaire d'Etat, de veiller à ce que les
investisseurs étrangers puissent bénéficier, dans le cadre de la gestion du GIE
fiscal, d'un traitement favorable lorsqu'ils investissent en France dans les
chantiers français.
Au même titre qu'un armateur français, ils développent, quand ils commandent
en France, le secteur naval ainsi que la marine marchande et donc l'ensemble de
la filière.
Nous devons être vigilants afin que les chantiers de construction navale
restant en France puissent continuer à recevoir des commandes en dépit des
risques de concurrence déloyale, venant de la Corée notamment.
Nous savons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ferez preuve de ténacité,
de persévérance et de conviction dans le suivi du dossier relatif à la
construction navale ; soyez assuré de notre soutien.
(Applaudissements sur
les travées socialistes.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, je répondrai également par
écrit aux questions de Mme Dieulangard que je n'ai pas évoquées dans mon
intervention à la tribune.
Toutefois, madame la sénatrice, je veux vous dire tout de suite que le dernier
Conseil européen de l'industrie a été particulièrement attentif aux conditions
internationales de la concurrence, et que s'est dégagé un consensus pour que
l'Union européenne continue d'enquêter, de s'informer et d'agir afin de réguler
au niveau mondial les conditions de la concurrence des chantiers navals pour
assurer un avenir favorable à l'ensemble des chantiers navals de l'Union
européenne.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'économie, les finances et l'industrie : II. - Industrie (et Poste).
5
ÉLECTION À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
D'UN SÉNATEUR
M. le président.
M. le président a été informé, par lettre du 7 décembre 1999 de M. le ministre
de l'intérieur, que M. Michel Charzat a été proclamé député le 5 décembre 1999
dans la vingt-et-unième circonscription de Paris.
En application de l'article L.O. 137 du code électoral, M. Michel Charzat
cesse donc d'appartenir au Sénat. Toutefois, en vertu de l'article L.O. 180, la
vacance de son siège de sénateur ne sera proclamée qu'après l'expiration du
délai de recours contre l'élection ou, en cas de contestation, après la
décision du Conseil constitutionnel confirmant son élection à l'Assemblée
nationale.
6
LOI DE FINANCES POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Economie, finances et industrie
(suite)
III. - PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'économie,
les finances et l'industrie : III. - Petites et moyennes entreprises, commerce
et artisanat.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Robert,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
disposant d'un temps de parole réduit, je ne vous soumettrai qu'un « linéaire »
des sujets que la commission des affaires économiques tient à voir abordés.
Nous faisons d'ailleurs nôtre le rapport écrit de notre excellent collègue M.
René Ballayer, que je remercie, et cela me dispensera d'évoquer les aspects
strictement budgétaires.
Voici donc les points sur lesquels je souhaite attirer votre attention, madame
la secrétaire d'Etat.
S'agissant de la création d'entreprises, les nouveaux patrons de la génération
1998 ont créé plus de 200 000 emplois salariés. Hélas ! le nombre d'apprentis
diminue toujours. Cela me fait également penser à la réduction des contrats en
alternance, en dépit des financements somptuaires existants.
Le chiffre d'affaires du commerce est en progression de 3,8 %, et ce secteur a
créé 53 000 emplois. Malheureusement, il s'agit pour un un tiers d'emplois à
temps partiel. Ceux-ci sont-ils justifiés par la croissance de l'activité ou
procèdent-ils d'un esprit de rentabilité poussé ? Je souhaiterais évidemment
que la première hypothèse soit la bonne.
La concentration dans la grande distribution peut favoriser la tentation d'une
position dominante à l'égard des producteurs et des fournisseurs. Les
difficultés rencontrées ne seront jamais réglées par la loi ou par de nouvelles
réglementations. Seuls des accords contractuels équilibrés, librement discutés,
peuvent assurer la pérennité du réel dynamisme commercial actuel. Je crois
savoir, du reste, que vous examinez la possibilité de mettre en application,
comme nous le suggérons, des formules efficaces.
S'agissant des PME, la baisse de la TVA sur les travaux et la suppression de
l'imposition forfaitaire sur les sociétés dont le chiffre d'affaires est
inférieur à 500 000 francs sont des mesures raisonnables. Je les apprécie.
Les initiatives de la Banque de développement des PME sont à poursuivre. Je
note tout de même la présence de 24 milliards de francs d'avances sur les
marchés publics pour 6 750 entreprises. C'est bien ! Mais cela ne prouverait-il
pas que les délais de règlement de l'Etat et des collectivités publiques se
distinguent toujours par cette lenteur exagérée qui leur est coutumière ?
L'EPARECA, l'établissement public d'aménagement et de restructuration des
espaces commerciaux et artisanaux, au sein duquel j'ai l'honneur de représenter
le Sénat, est aujourd'hui opérationnel. Il se montre très rapidement efficace.
Les décisions qui viennent d'être prises le prouvent, et l'équipe qui a été
constituée - la chose n'était pas facile compte tenu de la mission de cet
établissement - me paraît de grande qualité.
L'accès des PME aux marchés publics reste trop difficile. Vous voyez ce que je
veux dire !
(Sourires.)
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à
l'artisanat.
Oh oui !
M. Jean-Jacques Robert,
rapporteur pour avis.
L'augmentation très importante du nombre de
dossiers examinés par les commissions départementales d'équipement commercial
provoque un retard inadmissible dans la création d'entreprises et, par
conséquent, d'emplois.
Je pense que vous n'avez pas du tout envie de laisser perdurer cette situation
d'engorgement.
Quand se décidera-t-on, pour réussir la simplification administrative -
éternelle incantation ! - à instituer un seul support pour un seul
destinataire, avec un seul chèque représentant l'ensemble des cotisations
sociales et fiscales ? Cela paraît si facile en le disant !
L'évolution des bonifications d'intérêts favorise l'accès au crédit bancaire
pour les entreprises : je vous mets cependant à nouveau en garde contre l'«
allergie viscérale » des banques à l'égard des petites entreprises. Elle
pourrait provoquer un échec partiel de votre projet, qui est pourtant
porteur.
Le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la
restructuration des activités commerciales et artisanales, le FISAC, fonctionne
bien. Mais notre commission s'étonne de voir que les zones rurales, qui
représentent plus de la moitié des dossiers soumis au FISAC, ne reçoivent qu'un
tiers des subventions. Cette insuffisance souligne la faible prise en compte
des objectifs d'aménagement du territoire dans la politique du Gouvernement.
Cela s'est déjà clairement manifesté, me semble-t-il, à travers le refus du
Gouvernement de prendre en considération les propositions de la commission
spéciale du Sénat lors de l'examen du projet de loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement durable du territoire.
J'en arrive, déjà, à ma conclusion.
Bien que votre projet de budget soit satisfaisant techniquement, la commission
des affaires économiques émet un avis défavorable quant à son adoption,
marquant ainsi la grande urgence qu'il y a, selon elle, pour le Gouvernement, à
favoriser enfin le développement économique et la création d'emplois en zone
rurale.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. René Ballayer,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, autant l'activité économique des PME
commerciales, artisanales et de service est importante et leur situation
complexe, mouvante et variée, autant le montant de ce budget est modeste et sa
structure simple. Cette modestie n'est pas représentative, comme j'ai coutume
de le répéter chaque année, de l'importance du rôle des entreprises concernées.
Celles-ci occupent, en effet, plus de la moitié de la population active.
Or le montant global de vos crédits budgétaires pour 2000, madame la
secrétaire d'Etat, n'est que de 386,9 millions de francs en dépenses ordinaires
et en crédits de paiement, et de 28,5 millions de francs en autorisations de
programme.
La structure de votre budget a été très simplifiée, pour ne pas dire trop
simplifiée.
Il n'y avait plus que trois chapitres en 1999, consacrés respectivement aux
interventions, aux bonifications d'intérêt et aux subventions d'investissement
de vos services.
Cette année est créée une quatrième ligne budgétaire, destinée au financement
de garanties d'emprunt accordées aux petites et moyennes entreprises.
Vos crédits vous permettent, madame la secrétaire d'Etat, de mener trois
principaux types d'actions : des actions de formation, pour un montant qui
dépasse légèrement 100 millions de francs ; des actions économiques, qui
mobilisent environ 140 millions de francs, dont 42 millions de francs dans le
cadre des contrats de plan Etat-région ; enfin, des actions tendant à favoriser
l'accès au crédit des PME, auxquelles sont consacrés 145 millions de francs,
dont 22 millions de francs au titre des garanties d'emprunt que j'évoquais à
l'instant.
Il ne faut cependant pas se fier au montant modeste de ces crédits et à la
simplicité de leur présentation.
En effet, si ce budget est limité, il ne représente tout d'abord qu'un
instrument parmi tant d'autres du financement de l'aide aux PME. Les concours
budgétaires de l'ensemble des ministères à ces entreprises dépassent 40
milliards de francs, et les dépenses fiscales en leur faveur sont de plusieurs
milliards de francs.
Votre secrétariat d'Etat, en particulier, madame, dispose d'un instrument
extrabudgétaire important : le FISAC, doté pour 2000 de 410 millions de francs,
c'est-à-dire plus que vos crédits budgétaires.
L'effet de levier des crédits de bonification d'intérêt est par ailleurs très
appréciable : pour une dépense de l'Etat de 150 millions de francs en 1999, un
milliard de francs a été prêté aux PME par les banques.
Ce budget est un important instrument d'incitation et d'accompagnement,
au-delà de l'intervention
stricto sensu
du secrétariat d'Etat. Il
contribue ainsi à mobiliser des financements non négligeables au profit
d'actions menées conjointement avec des partenaires comme les collectivités
territoriales ou les organismes consulaires, qui engagent leurs propres
ressources.
Il ne faut pas non plus se fier à la présentation, simplifiée à l'extrême, de
ce budget. Les actions en cause sont en réalité, à l'image même des PME, très
variées, morcelées et ponctuelles, donc complexes.
La notion d'« animation économique », par exemple, n'est pas facile à cerner,
et il est malaisé d'avoir une vue d'ensemble des actions menées pour la
revitalisation des zones rurales et de les comparer à celles qui sont
poursuivies, en milieu urbain, en faveur des quartiers sensibles.
Il y a, dans l'évolution des crédits prévue pour 2000, des éléments de
stabilité et des facteurs de changement, des éléments positifs et d'autres
négatifs.
Ce qui ne change guère, tout d'abord, c'est le montant modeste de ce budget,
qui reste, depuis plusieurs exercices, à son niveau d'étiage, au-dessous de 400
millions de francs. On note même, pour 2000, un léger effritement puisque les
crédits diminuent de 1,7 million de francs, soit une baisse de 0,4 %.
Il est vrai que le FISAC augmente par ailleurs, passant de 400 millions de
francs à 410 millions de francs, et cela mérite d'être souligné.
La lisibilité des actions budgétaires demeure faible et la situation ne fait,
à cet égard, qu'empirer avec la disparition de la section du « bleu » de
l'économie, des finances et de l'industrie qui vous était consacrée. Les
crédits de votre secrétariat d'Etat sont regroupés dans un simple agrégat qui
ne permet pas de suivre l'évolution de ses moyens de fonctionnement.
Il y a cependant, cette année, dans votre projet de budget, une innovation
majeure et positive qui consiste dans la création d'une dotation pour faciliter
l'accès au crédit des très petites entreprises grâce à des garanties d'emprunt.
L'an 2000 verra aussi l'ouverture d'une nouvelle tranche de contrats de plan
Etat-région, bénéficiant d'une enveloppe de 351 millions de francs, majorée de
30 % par rapport au plan précédent, avec une diminution, en son sein, de la
part des opérations de restructuration de l'artisanat et du commerce, ce dont
je ne sais s'il faut se réjouir.
Enfin, les crédits du fonds d'aménagement des structures artisanales, le FASA,
augmentent substantiellement en 2000.
Voilà pour le changement.
L'évolution de votre budget et de votre politique fait apparaître des
priorités que j'approuve particulièrement.
Tout d'abord, vous accordez autant d'importance à la transmission et à la
reprise qu'à la création d'entreprise, ce qui me paraît capital pour éviter la
nécrose du tissu de nos PME.
Je souhaiterais, dans cet esprit, que l'agrément fiscal des plate-formes
d'initiative locale et la déductibilité fiscale des dons qui leur sont
consentis concernent les reprises aussi bien que les créations d'entreprise.
Vous vous battez, d'autre part, à juste titre, pour la simplification des
formalités administratives imposées aux PME, et qui les accaparent de façon
excessive. C'est effectivement une tâche tout à fait essentielle. Mais je
crains, de ce point de vue, que le passage aux 35 heures, en 2002, des
entreprises de moins de vingt salariés n'aille pas dans le sens que vous
souhaitez !
Quels sont, maintenant, les éléments moins positifs de ce budget ?
Tout d'abord, le fonds social européen ne participe plus au financement des
actions d'animation économique depuis 1999, seules dix-sept chambres de métiers
ayant pu produire les justificatifs demandés par la Commission européenne.
La responsabilité de cette situation est imputable non seulement à la
négligence des chambres, mais aussi, peut-être, à celle de leur tutelle...
Par ailleurs, la gestion du FISAC apparaît par trop centralisée et la lenteur
de ses procédures est souvent critiquée. Il est vrai que le renouvellement,
cette année, de la commission nationale, dont l'avis est sollicité sur chaque
dossier, n'a probablement pas facilité les choses.
Sans doute aussi les effectifs de vos délégations régionales au commerce et à
l'artisanat sont-ils insuffisants, de même, d'ailleurs, que ceux de votre
administration centrale, quelle qu'en soit la qualité.
Mais, pour vous aider à demander des renforts, il faudrait que nous puissions
identifier les dépenses correspondantes, ce qui, je l'ai déjà dit, n'est pas le
cas.
Enfin, madame la secrétaire d'Etat, j'aimerais vous interroger sur le sort qui
sera réservé à l'apprentissage artisanal, auquel je suis très attaché, dans la
réforme annoncée de la formation professionnelle.
Sera-t-il porté remède aux « dysfonctionnements » - je cite les termes
employés par vos services en réponse à mon questionnaire budgétaire de l'an
dernier - et aux « difficultés de financement » des centres de formation
d'apprentis ?
La commission des finances a décidé de rejeter globalement le budget de
l'économie, des finances et de l'industrie qui comprend, malheureusement, les
crédits des PME, du commerce et de l'artisanat. Si votre secrétariat d'Etat
disposait d'une dotation autonome, il en aurait été autrement !
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et des Républicains et
Indépendants.)
Mme le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe socialiste, 26 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 33 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 22 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 6 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est àM. Dussaut.
M. Bernard Dussaut.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
depuis un peu plus de deux ans, nous avons retrouvé le chemin de la croissance.
La France est considérée aujourd'hui comme l'une des économies les plus
dynamiques. Ainsi que l'a souligné le Premier ministre le 23 novembre dernier
au colloque de
La Tribune
« Objectif France 2001 », « l'OCDE nous
crédite, avec le FMI, de la plus forte croissance des grands pays
industrialisés pour les deux années à venir ».
Le chômage baisse régulièrement en France depuis vingt-huit mois. S'il demeure
beaucoup trop élevé encore, il n'en reste pas moins que, pour la première fois
depuis longtemps, on assiste à un manque de salariés dans certains secteurs,
notamment dans des secteurs d'activité constitués de petites entreprises, à
savoir dans les métiers de bouche et du bâtiment.
Nous nous trouvons donc dans une conjoncture globalement favorable au
commerce, à l'artisanat et à la création d'entreprise. On le dit depuis
quelques années, mais voilà aujourd'hui confirmé le potentiel économique des
petites et moyennes entreprises. Leur statut dans le paysage économique s'en
trouve conforté.
Le 23 octobre 1998, vous aviez présenté, madame le secrétaire d'Etat, avec M.
le Premier ministre, un certain nombre de mesures concrètes en faveur des
entreprises artisanales devant les aider à devenir modernes et compétitives.
Les orientations du projet de loi de finances pour 2000 marquent la volonté du
Gouvernement de poursuivre cette politique d'accompagnement pour la
modernisation et le développement de ces entreprises.
J'en viens aux crédits propres au ministère.
Le volume des crédits prévus pour 1999 est reconduit pour l'année 2000, et ce
après quatre années consécutives de baisse, entre 1993 et 1997. Toutefois,
force est de constater que, avec près de 387 millions de francs, très
précisément 386,9 millions de francs, c'est un budget qui demeure l'un des plus
petits soumis au Parlement.
M. Bernard Dussaut.
Je ne reviendrai pas sur le détail chiffré des crédits propres au ministère,
car ceux-ci ont été exposés par MM. les rapporteurs. Je formulerai toutefois
deux remarques.
La première concerne l'accès des chefs d'entreprise au financement, avec tout
d'abord l'enveloppe destinée aux bonifications d'intérêt. Elle est en baisse
pour l'année 2000, car les crédits sont redéployés vers le nouveau fonds de
garantie d'emprunts accordés aux petites et moyennes entreprises, qui se trouve
doté de 22 millions de francs.
Il est vrai qu'étant donné le taux très bas de l'emprunt la bonification
d'intérêt a moins de raisons d'être. Cette enveloppe bénéficiera donc aux chefs
d'entreprise pour leurs investissements dits « de contrainte », par exemple en
cas de mise en conformité de l'entreprise aux normes de qualité.
Ce type d'investissement est indispensable à un moment où plusieurs crises se
sont succédé. Mais il est sans retour réel sur le plan du bénéfice, car les
produits ou prestations ne seront pas facturés plus chers, d'où le bien-fondé
de cette aide.
Un autre point important dans l'accès au financement a trait aux relations
avec le milieu bancaire. Il ne s'agit pas de mesures budgétaires à proprement
parler, mais cela demeure un point essentiel.
Les conventions signées devraient améliorer le comportement des banques à
l'égard des petites entreprises, notamment en matière de caution solidaire. En
effet, cette pratique très regrettable met en péril non seulement les biens
propres de l'entrepreneur, mais également ceux de son conjoint, voire ceux de
ses enfants ou de ses parents. C'est très préoccupant et il devient urgent
d'obliger les banques à limiter la garantie au patrimoine professionnel affecté
pour préserver le patrimoine domestique personnel.
Ma seconde remarque concerne l'animation économique et plus particulièrement
le fonctionnement du FISAC, dont la dotation est portée à 410 millions de
francs.
La communauté de communes du Haut-Entre-Deux-Mers, que je préside, a déposé
une demande de participation du FISAC au titre d'une opération coeur de pays
dont l'instruction est en cours dans votre ministère. Je ne m'attarde pas sur
ce dossier particulier. Néamnoins, j'observe que plusieurs parlementaires ont
déjà évoqué la lourdeur et la lenteur d'instruction des dossiers.
Vous avez vous-même évoqué à l'Assemblée nationale, madame la secrétaire
d'Etat, l'éventualité d'une réforme du FISAC allant dans le sens d'une
déconcentration régionale de l'instruction des petits dossiers, tout en gardant
au ministère la gestion de l'attribution des enveloppes, afin, avez-vous dit,
de « gagner du temps sans figer les situations ». Cela me semble une avancée,
mais encore faudrait-il permettre aux délégations régionales au commerce et à
l'artisanat de bénéficier d'effectifs supplémentaires.
J'en viens aux mesures fiscales pour 2000.
Des mesures fiscales importantes permettront de poursuivre l'action très
positive des pouvoirs publics en faveur des petites et moyennes entreprises, du
commerce et de l'artisanat. En effet, les dispositions prises en 1999 se
trouvent renforcées et élargies dans le projet de loi de finances pour 2000.
Tout d'abord, le taux de TVA sur les travaux dans les logements a baissé : le
taux réduit à 5,5 % s'applique non seulement aux prestations de main-d'oeuvre,
mais aussi aux fournitures et aux matières premières nécessaires à la
réalisation des travaux et qui sont fournies et facturées par l'entreprise
prestataire.
La baisse du taux de la TVA sur les services d'aide à la personne aura
également des incidences bénéfiques. Les services fournis par les entreprises
agréées seront désormais également taxés à 5,5 %, ce qui devrait favoriser la
création de nombreuses petites entreprises issues, notamment, des
associations.
En ce qui concerne les charges de l'entreprise, le Gouvernement poursuit la
suppression de la taxe professionnelle sur les salaires. Vous l'avez rappelé, «
globalement, les entreprises réalisant moins de 50 millions de francs de
chiffre d'affaires paient 40 % de taxe professionnelle en moins, et ce sont les
PME qui ont le plus profité de cette mesure ».
Enfin, les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires inférieur à 500 000
francs et qui ne font pas de bénéfice seront concernées par l'exonération sur
l'imposition forfaitaire annuelle.
Je m'attarderai maintenant sur les conditions de création et de développement
des PME, du commerce et de l'artisanat. En effet, pour que puisse se développer
un tissu solide d'entreprises dans notre pays, il faut d'abord que l'existence
même de ces entreprises soit facilitée.
En ce qui concerne la question de la création et de la transmission des
entreprises, nous nous trouvons dans le cadre d'une problématique un peu
acrobatique. Certes, il faut favoriser la création d'entreprises, et le
Gouvernement y est attentif puisque, désormais, lors des constitutions de
société, les entreprises seront exonérées du droit fixe, qui s'élève à 1 500
francs.
Cela dit, l'assemblée permanente des chambres de métiers, l'APCM, nous donne
les chiffres suivants : en 1998, on a compté 59 000 créations, contre seulement
16 000 reprises. Mais on sait que 48 % des entreprises créées disparaissent
dans les cinq premières années.
Parallèlement - et j'en terminerai là avec les chiffres, mais ils sont parfois
très révélateur -, en 1998 toujours, 40 000 entreprises artisanales ont cessé
leur activité faute de repreneurs, ce qui n'a rien à voir avec un problème de
rentabilité. L'incitation à la transmission doit donc être accentuée.
On peut espérer que des mesures comme la baisse du taux d'imposition sur les
cessions de fonds de commerce à 4,8 % et l'existence de dispositifs comme les
contrats d'installation et de formation, les CIFA, permettront d'apporter une
amélioration dans ce domaine.
Toutefois, il faut sans doute revoir le fonctionnement des aides à la
cessation d'activité, qui se traduisent trop souvent par la disparition de
commerces ou d'ateliers d'artisans, alors que, quelques années plus tard, les
collectivités locales et l'Etat, avec le concours du FISAC, sont amenés à
financer la création d'un magasin ou d'un atelier.
Les conditions de développement des entreprises dépendent également fortement
de leur accès au marché.
Les relations des petites et moyennes entreprises, de nos artisans et de nos
commerçants avec la grande distribution demeurent très conflictuelles. Nous
espérons tous que les assises de la distribution et du commerce, annoncées pour
le début de l'année 2000, permettront de mettre à plat un certain nombre de
problèmes.
Par ailleurs, il est regrettable que nos petites et moyennes entreprises ne
soient surtout présentes que sur le seul marché intérieur. Actuellement,
seulement 2 % des entreprises artisanales exportent. Il nous faut les aider à
s'ouvrir au commerce extérieur.
Nous sommes riches d'une réelle tradition et d'un réel savoir-faire, et les
métiers d'art, notamment, doivent être mieux valorisés et conseillés pour se
tourner vers l'exportation.
Il est un autre écueil sur lequel butent nos PME : les retards de paiement. Le
Conseil des ministres de l'industrie de l'Union européenne a adopté, en avril
1999, une directive qui fixe, en l'absence de dispositions contractuelles entre
les parties, des intérêts de retard à un taux significatif. Cette directive
devrait être votée très prochainement par le Parlement européen. Pouvons-nous
espérer, madame la secrétaire d'Etat, qu'elle soit rapidement inscrite en droit
interne français ? Il y a en effet urgence : nos petites et moyennes
entreprises sont les principales victimes des délais de paiement excessifs.
Le développement de nos PME passe également par le développement d'un
environnement social favorable. Comme je l'ai indiqué dans mon introduction, le
chômage baisse régulièrement depuis dix-huit mois. Cela étant dit, nous sommes
loin du plein emploi et nous devons trouver d'autres voies dans l'organisation
du travail.
C'est dans cet esprit que les projets de loi relatifs à la réduction du temps
de travail ont été soumis au Parlement. Comme tout le monde l'a souligné, la
mise en place des 35 heures est difficile sur le plan de l'organisation, mais
les PME seront aidées : les petites entreprises qui souhaitent anticiper le
passage aux 35 heures avant l'échéance du 1er janvier 2002 pourront bénéficier
de l'aide incitative et de l'abattement des charges sociales. Elles pourront
également « aller aux 35 heures par étape », en percevant, dès la première
étape, la moitié de l'aide incitative et la totalité des abattements de charges
sociales. Ce dispositif est ouvert jusqu'au 1er janvier 2003.
Comme Mme Aubry et vous-même, madame la secrétaire d'Etat, l'avez rappelé à
plusieurs reprises, il faut que la réduction du temps de travail soit
l'occasion d'une nouvelle chance pour les petites entreprises avec une
modernisation et une réorganisation de ce secteur. Le développement de
groupements d'employeurs avec un salarié à plein temps pour plusieurs petites
entreprises est une piste très intéressante.
Cette réorganisation doit se faire aussi en direction des jeunes. Elle doit
être l'occasion d'une réhabilitation de l'apprentissage et de la formation
professionnelle, et d'une amélioration des conditions de travail. Ainsi que je
l'ai rappelé précédemment, certains secteurs manquent de main-d'oeuvre. Nous
sortirons de cette situation, pour le moins absurde, en prenant véritablement
en compte ces nouvelles donnes.
J'évoquerai enfin les indemnités journalières, car l'attractivité pour les
métiers de l'artisanat passe aussi par là. La loi de juillet 1995 a permis le
versement d'indemnités journalières en cas de maladie ou d'accident.
Aujourd'hui, il est possible d'envisager une amélioration des prestations en
abaissant le délai de carence, fixé à quinze jours, à trois jours en cas
d'hospitalisation et à sept jours en cas de maladie ou d'accident ne donnant
pas lieu à hospitalisation.
Il est à noter que la Caisse nationale d'assurance maladie, la CANAM, a émis
un avis favorable et que le ministère de l'emploi et de la solidarité a été
saisi afin qu'un texte réglementaire mette en place, pour le 1er janvier 2000,
l'amélioration de cette prestation.
En conclusion, une politique n'est rien sans les moyens financiers, mais,
surtout, sans projet global de société.
On l'a vu, madame la secrétaire d'Etat, le Gouvernement se donne les moyens de
ses ambitions avec la mise en place de dispositions réclamées depuis
longtemps.
Il ne s'agit là, en aucun cas, d'un saupoudrage supplémentaire. Nous l'avons
entendu et répété lors de la discussion du projet de loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement durable du territoire : les mentalités
doivent changer, et elles changent ; il nous faut définitivement abandonner une
logique de guichet pour aller vers une logique de projets ancrés sur des
territoires.
Je sais que ces idées vous sont chères, madame la secrétaire d'Etat : il
importe de « construire une nouvelle croissance solidaire à partir des
territoires, de donner aux PME la première place dans le développement durable
des territoires ».
Vous le rappelez souvent, l'artisanat et la petite entreprise jouent un rôle
déterminant dans l'économie locale. Vous estimez, et nous avec vous, que les
petites et moyennes entreprises ont toute leur place dans le développement
durable des territoires. Il semblerait que le travail de réhabilitation que
vous avez engagé porte ses fruits, accompagné, sans doute, par une prise de
conscience de nos compatriotes des plaisirs de la proximité, du dialogue et du
service personnalisé, tout cela parce qu'ils commencent aussi à avoir davantage
de temps libre.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera votre budget.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen).
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget du commerce et de l'artisanat dont nous sommes saisis est dans la
continuité des précédents : on note une stabilisation des crédits sur un total
qui reste évidemment limité.
Mon propos portera, en fait, sur la situation générale du secteur des petites
et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, qui m'inspire quelques
craintes, en particulier concernant le non-respect des règles de la concurrence
par la grande distribution et l'accès aux marchés publics.
Sur le premier point, si les règles relatives à l'interdiction des prix
abusivement bas et la revente à perte sont, dans l'ensemble, plutôt respectées,
il n'en est pas de même, malheureusement, pour celles qui concernent les
rapports entre fournisseurs et revendeurs. Vous le reconnaissiez ici vous-même,
madame la secrétaire d'Etat, à l'occasion d'une récente séance de questions
d'actualité au Gouvernement : « En France, nous avons beaucoup de textes, mais
nous avons aussi le record absolu des mètres carrés de grande distribution.
»
Dans un contexte de restriction réglementaire à l'ouverture de grandes
surfaces, on a assisté, ces dernières années, à de nombreux groupements. Ainsi,
en août dernier, s'est constitué en France un groupe qui représente désormais
près de 30 % du marché de la distribution et se trouve en deuxième position
mondiale, derrière le géant américain Wal-Mart.
En ce qui concerne les produits alimentaires, cinq centrales d'achat
contrôlent actuellement plus de 80 % des approvisionnements de la grande
distribution.
Une telle situation n'est pas sans poser de graves problèmes aux agriculteurs,
comme nous l'avons constaté avec la crise récente du secteur des fruits et
légumes. De façon plus générale, tous produits confondus, le rapport de force
entre fournisseurs et distributeurs devient malheureusement de plus en plus
déséquilibré, quels que soient nos efforts.
En l'occurrence, c'est la coopération commerciale régie par l'ordonnance du
1er décembre 1986 qui est en cause aujourd'hui. Par coopération commerciale,
j'entends l'ensemble des services spécifiques qui sont rendus par le
distributeur au fournisseur et qui font l'objet d'une rémunération
particulière, qu'il s'agisse de la publicité sur le lieu de vente, de
l'utilisation de catalogues ou du service après vente. Dans sa rédaction
actuelle, le texte de l'ordonnance de 1986 peut être, à cet égard, source
d'ambiguïtés ou de discriminations.
La loi Galland a tenté de clarifier les relations en modifiant une partie de
l'ordonnance. Ses objectifs étaient avant tout de faire cesser la revente à
perte, de simplifier les règles, notamment au titre de la facturation, et de
prohiber les prix abusivement bas. Consacrant d'importantes évolutions, cette
loi a été favorablement accueillie et rapidement adoptée par les opérateurs.
Cependant, d'autres pratiques, qui relèvent de l'abus de position dominante,
se sont multipliées au détriment des fournisseurs. Je pense, par exemple, aux
ristournes exceptionnelles, qui n'apparaissent pas sur les factures.
Ainsi la concurrence entre distributeurs s'est-elle déportée vers l'amont, où
chacun tente de conclure les contrats les plus rémunérateurs avec les
fournisseurs.
Le monde agricole est évidemment au premier rang des victimes de cette
nouvelle situation, de même que les milieux industriels et le petit
commerce.
Nous prenons acte des diverses réformes annoncées par le Gouvernement, qui
devraient être examinées avant l'été 2000.
Vous voulez, madame la secrétaire d'Etat, situer votre action dans le cadre
d'une démarche contractuelle, ce qui est, de notre point de vue, de bonne
politique. Dans le cadre d'une économie ouverte, rien ne pourra se faire
efficacement si c'est contre les professionnels.
J'aborderai également une autre forme de distorsion de concurrence, qui
concerne un secteur particulièrement exposé, celui de la restauration
traditionnelle, soumise au taux normal de TVA de 20,6 %.
En comparaison, l'application du taux réduit de TVA aux produits à emporter
est tout à fait inacceptable. Dans le cadre de débats budgétaires précédents,
avec plusieurs de mes collègues du groupe de l'Union centriste, je suis
intervenu à différentes reprises pour proposer, par voie d'amendements,
l'application du taux minoré ou, à défaut, d'un taux unique de 14 % à
l'ensemble du secteur de la restauration.
Le rapport Lorenzi, faisant suite au rapport Salustro, met en évidence une
distorsion à l'égard des autres grands pays touristiques en Europe. Ainsi, la
TVA sur la restauration traditionnelle atteint 10 % environ en Espagne, en
Grèce, en Italie et au Portugal, contre donc 20,6 % en France. Je ne suis
certes pas le premier à le dénoncer à cette tribune depuis plusieurs années, et
le problème reste entier.
Par ailleurs, le même rapport estime que le coût pour l'Etat de l'instauration
d'un taux intermédiaire de 14 % - moins de 3 milliards de francs de recettes
fiscales perdues - serait largement compensé par l'accroissement du chiffre
d'affaires et par la création d'environ 18 000 emplois directs et indirects.
A cet égard, pourquoi persiste-t-on à nous opposer une directive européenne,
quand le Gouvernement, s'il en avait réellemment la détermination et la
volonté, pourrait fort bien la faire modifier ?
Enfin, je conclurai sur un autre sujet qui préoccupe également les PME :
l'accès aux marchés publics.
Nous connaissons tous des PME qui, face à la lourdeur des procédures,
renoncent à soumissionner. A ce propos, une réforme du code des marchés publics
avec une attention particulière portée aux petites et moyennes entreprises est
plus que jamais nécessaire. Si, en effet, nous voulons renforcer la
compétitivité de nos entreprises artisanales et de nos petites et moyennes
entreprises, sans doute faudra-t-il, comme dans d'autres pays, leur réserver, à
terme, une part significative des marchés publics.
C'est l'un des points qui seront discutés dans le cadre de l'examen de la
proposition de loi sénatoriale « Entreprises et territoires », dans les
semaines qui viennent. Cette proposition de loi est l'une des réponses aux
revendications constantes de nos petites et moyennes entreprises en faveur d'un
cadre juridique et fiscal plus favorable, sans parler de la poursuite de
l'allégement des formalités administratives.
A règles spécifiques, interlocuteur particulier : c'est l'idée qui inspire le
projet d'une administration déconcentrée, une sorte de
small business
administration
à la française qui serait l'interface privilégiée entre les
PME et l'administration. Notre collègue de l'Union centriste Francis Grignon a
fait un excellent rapport sur cette question. Il en sera également question
lors de l'examen de notre proposition de loi.
Les dirigeants des petites et moyennes entreprises françaises attendent de
l'Etat qu'il joue à bon escient son rôle d'arbitre, tandis que leur secteur
traverse une période de mutations à la fois profondes et rapides. Autant que
des facilités de crédits ou des baisses de charges, ils attendent de leur
gouvernement des règles du jeu plus claires et plus équitables et souhaitent
que l'on cesse, dans notre pays, d'assimiler le cordonnier à la multinationale
!
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Mathieu.
M. Serge Mathieu.
Madame le secrétaire d'Etat, le budget des petites et moyennes entreprises, du
commerce et de l'artisanat est stabilisé pour l'an 2000, après trois années de
baisse. Ce n'est qu'un moindre mal ! Mais il ne représente que 0,02 % du budget
de l'Etat, ce qui est bien faible pour une action d'envergure.
Il ne faut pas, en effet, oublier combien nos artisans et nos entrepreneurs
paient cher votre politique macroéconomique, que ce soit l'impact des 35
heures, la hausse des cotisations sociales ou l'absence de simplification
administrative.
En outre, en dehors de l'aspect proprement budgétaire de son action que nous
discutons aujourd'hui, votre gouvernement annonce de nombreux textes, toujours
repoussés, jamais soumis à la représentation nationale et qui, pourtant,
intéressent au premier chef les entreprises, le commerce et l'artisanat.
A quand, par exemple, la réforme des marchés publics ? A quand le bilan des
relations en matière de distribution ? A quand la mobilisation de l'épargne de
proximité ? A quand la réforme des interventions économiques des collectivités
territoriales ?
En fait, nous constatons un manque total d'ambition de la part du
Gouvernement, qui devrait au contraire encourager les petites entreprises et
l'artisanat à se développer, à conquérir de nouveaux marchés, à résister à la
concurrence, à s'ouvrir à l'international.
Pourtant, nous savons tous que ce sont elles qui créent le plus d'emplois et
qui sont les garantes de la diffusion du tissu économique sur l'ensemble de
notre territoire.
Plus particulièrement, ce projet de budget ne contient aucune mesure
significative en faveur des activités économiques en milieu rural.
Pis encore, il ne répond pas aux interrogations que se posent nos artisans,
commerçants et entrepreneurs.
Je me permettrai, donc, ici, madame le secrétaire d'Etat, de m'en faire l'écho
et vous poserai plusieurs questions.
Que comptez-vous faire face à l'attitude de certaines banques qui n'hésitent
pas à recourir systématiquement à la caution solidaire, en reportant tous les
risques sur l'entrepreneur ?
Comment et quand comptez-vous mettre en place, à l'échelle nationale, le
système de bourse de transmission actuellement expérimenté à Limoges ? Vous
devez le savoir, la solution au problème de la transmission de l'entreprise est
capitale si l'on veut maintenir la vie économique dans nos villes et dans nos
campagnes. Est-ce que le Parlement sera prochainement saisi de ce dossier ?
Les crédits consacrés à l'animation locale sont en baisse. Pourquoi ? Ces
financements sont particulièrement utiles en milieu rural.
Comment entendez-vous remédier au déséquilibre du FISAC ? En effet, on
constate que, si les zones rurales représentent la moitié des dossiers soumis
au FISAC, elles ne reçoivent qu'un tiers des subventions. Est-ce là une
politique de rééquilibrage du territoire ?
Parallèlement, votre collègue ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement annonce une réforme des zones de revitalisation rurale.
Pouvez-vous nous tenir informés de sa teneur, notamment de son volet fiscal,
qui affectera nécessairement nos petites entreprises ?
Par ailleurs, combien de crédits entendez-vous affecter à l'opération « 1 000
villages de France » qui, mise en place en 1993, rencontre un franc succès ?
Enfin, comment comptez-vous inciter les commissions du commerce rural à se
constituer afin de permettre l'usage des fonds locaux d'adaptation du commerce
rural ?
En attendant vos réponses, madame le secrétaire d'Etat, je ne peux que vous
faire part de mon très grand scepticisme à propos du budget des PME, du
commerce et de l'artisanat pour 2000, qui n'est à la hauteur ni des attentes de
nos concitoyens ni d'une politique territorialement équitable.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec
389 millions de francs, le projet de budget des petites et moyennes industries,
du commerce et de l'artisanat est très modeste au regard de l'importance de ce
secteur.
Il ne représente, en effet - cela vient d'être rappelé - que 0,02 % du budget
de l'Etat et il est, en outre, cette année, noyé dans le tentaculaire budget du
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Or, comme le rappelle notre collègue M. René Ballayer dans son excellent
rapport, les PME occupent une place privilégiée dans notre économie. Elles
représentent, en effet, selon la définition européenne, c'est-à-dire quand
elles ont moins de 250 salariés, plus de 99,8 % des entreprises et 67 % de la
population active. Parmi elles, on compte 823 000 artisans occupant 10 % de la
population active.
Ainsi, comme le rappelait le Président de la République à l'occasion de
l'inauguration des nouveaux locaux de la chambre de métiers du Bas-Rhin, en
janvier dernier : « Dans l'économie de demain, les PME, les entreprises
familiales joueront un rôle décisif. Les petits entrepreneurs ne constituent
pas une survivance du passé. Ils sont la préfiguration d'une activité
économique à taille humaine telle qu'elle va désormais à l'évidence se
développer. »
Outre ce poids économique important, les PME jouent également un rôle
fondamental pour l'équilibre de notre territoire, notamment en milieu rural.
Au regard de ce double rôle, il convient, par conséquent, de valoriser et de
soutenir ce secteur par trois types de mesures : en matière de formation
professionnelle, en matière de simplifications administratives et fiscales et,
enfin, en matière d'animation économique du territoire.
En ce qui concerne, tout d'abord, la formation professionnelle en général et
l'apprentissage en particulier, madame la secrétaire d'Etat, force est de
constater que votre politique se cantonne trop souvent a des effets d'annonce
non suivis d'actions. En attendant, les dispositions que vous prenez dans ce
domaine sont loin d'être satisfaisantes.
Les crédits de formation inscrits à votre budget sont stables. Soit ! Mais les
crédits correspondants inscrits au budget du ministère de l'emploi accusent des
baisses inquiétantes : 3,2 % pour la formation en alternance et 4,5 % pour les
contrats d'apprentissage. C'est infiniment regrettable.
Par ailleurs, il convient de dénoncer les effets désastreux produits par la
mesure de recentrage des primes d'apprentissage sur les jeunes les plus en
difficulté, qui exclut ainsi de fait près d'un quart des apprentis, soit 50 000
jeunes.
Ces restrictions budgétaires sont d'autant plus malheureuses que
l'apprentissage a largement prouvé son efficacité. Le taux moyen d'insertion
dans le secteur artisanal des jeunes apprentis formés est d'environ 80 %, quel
que soit le métier. Ce dispositif, dont le succès repose sur les liens étroits
entre système de formation et monde de l'entreprise, mériterait d'être non pas
cantonné aux qualifications les plus faibles mais étendu à l'ensemble du
système éducatif, sur le modèle allemand.
Ce manque de considération pour l'apprentissage va, par ailleurs, rendre
encore plus difficile l'application des 35 heures dans les petites entreprises,
qui éprouvent déjà des difficultés pour recruter des jeunes formés à leurs
métiers.
Le second type de mesures qu'attendent nos petites entreprises a trait aux
simplifications administratives et à l'allégement de la fiscalité.
Sur ce point, il convient de souligner que le projet de loi de finances pour
2000 présente certaines avancées. On peut, par exemple, citer la baisse de la
TVA sur les travaux dans les logements ou encore la réduction des droits de
mutation sur les fonds de commerce et les cessions de clientèle.
Toutefois, ces efforts d'allégement et de simplification sont réduits à néant
par les mesures de complexification qui les accompagnent.
Je prendrai pour exemple la réduction de la TVA sur les travaux dans le
logement. Si elle répond incontestablement aux attentes des professionnels du
bâtiment, elle est tout de même d'une complexité et d'une opacité
exceptionnelles. Ainsi, certains cas ne sont nullement prévus, tels les locaux
mixtes. Ce manque de clarté risque de se retourner contre un secteur que cette
mesure est censée favoriser, faute d'avoir été préparée en concertation avec
les acteurs de terrain. Les entreprises concernées risquent, en effet, de voir
leur comptabilité alourdie et d'être soumises à des contrôles fiscaux
supplémentaires.
Enfin, certaines mesures sont toujours en attente. Je pense à l'extension du
principe du chèque-service aux entreprises de moins de dix salariés. Je pense
aussi à la baisse de la TVA dans la restauration, le Sénat ayant adopté, voilà
quelques jours, un amendement visant à ramener à 5,5 % le taux applicable à ce
secteur.
Pour terminer, je souhaite évoquer l'animation économique du territoire.
Le commerce et l'artisanat, en milieu rural notamment, constituent un facteur
essentiel de dynamisme et d'animation de nos territoires.
Sur ce point, il convient de saluer l'augmentation des crédits du fonds
d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des
activités commerciales et artisanales, qui passent de 400 millions à 410
millions de francs. Il est toutefois nécessaire d'améliorer l'efficacité de
celui-ci.
Selon moi, le regroupement des différentes catégories d'opérations éligibles
n'était pas vraiment utile. La multiplicité des procédures assurait, en effet,
une meilleure adaptation du fonds à la diversité des situations et des besoins
locaux.
En revanche, une déconcentration de la procédure d'examen des dossiers
s'impose. Celle-ci est, en effet, bien trop lourde et lente.
Permettez-moi, enfin, de regretter qu'une partie des crédits du FISAC soit
consacrée, en 1999, à la compensation du gel du versement des fonds du FSE, le
fonds social européen. Ce gel a entraîné une réduction des crédits affectés à
l'animation économique de 16,7 % du fait de la non-présentation des
justificatifs des dépenses engagées.
Les responsabilités sont certes partagées entre les chambre de métiers et vos
services, madame la secrétaire d'Etat, mais je vous invite néanmoins à vous
montrer plus vigilante à l'avenir.
Votre département ministériel, déjà beaucoup trop faiblement doté, ne peut se
payer le luxe de se passer des fonds européens.
Faute de temps, je n'évoque pas la nécessaire réforme des procédures d'accès
aux marchés publics, dont la complexité constitue pour l'artisan et la PME un
véritable handicap.
Pour conclure, madame la secrétaire d'Etat, votre politique n'étant pas à la
hauteur des besoins de nos petites entreprises, artisanales et commerciales,
mes collègues du RPR et moi-même suivrons, lors du vote des crédits de votre
département ministériel, l'avis exprimé par notre collègue M. Ballayer,
rapporteur spécial de la commission des finances.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
plusieurs orateurs ont souligné le rôle particulièrement important du secteur
des PME-PMI, du commerce et de l'artisanat dans notre économie. Compte tenu du
temps de parole réservé à mon groupe, je n'y reviendrai pas.
Je note toutefois, comme plusieurs études le démontrent, que la situation des
PME est loin d'être homogène. De grandes différences existent, notamment entre
les PME indépendantes et celles qui sont liées à un grand groupe.
L'idée communément acquise et selon laquelle ces secteurs auraient,
globalement, une politique de l'emploi dynamique doit être maniée avec
précaution. En effet, une étude de la division des synthèses des statistiques
d'entreprises de l'INSEE révélait, l'année dernière, que l'augmentation des
effectifs des PME de 20 à 500 salariés dans la dernière décennie relevait pour
beaucoup de l'effet d'optique. Ainsi, de 1984 à 1992, l'accroissement des
effectifs des PME, de l'ordre de 250 000, est, pour une grande part, lié au
glissement des grandes entreprises dans la catégorie des PME, à la suite de
baisses d'effectifs. Ce processus a « gonflé » de plus de 100 000 les emplois
des PME, mais ces entreprises ont, en fait, perdu 238 000 emplois.
Si l'on observe le nombre d'emplois dans les PME qui ont été au moins un an
dans cette catégorie, l'augmentation, entre 1984 et 1992, n'est plus que de 26
000 salariés. De plus, sur cette même période, si 1,4 million d'emplois a été
créé dans les PME par la création d'entreprises, 1,4 million d'emplois a
également été perdu par la disparition de PME.
Vous l'aurez compris, mon objectif, en citant ces chiffres, n'est pas de
verser dans le pessimisme, encore moins de culpabiliser les entrepreneurs de
PME-PMI, du commerce ou de l'artisanat. Mon souci est que nous appréhendions la
situation de ces secteurs le plus justement possible, afin d'adapter au mieux
l'effort de l'Etat, d'un point de vue tant quantitatif que qualitatif.
Bien entendu, l'effort financier des pouvoirs publics en faveur des PME n'est
pas limité à votre seul secrétariat d'Etat. Je souhaite néanmoins, madame la
secrétaire d'Etat, saluer votre action et votre dynamisme en leur faveur, comme
en faveur de la consommation, dont nous avons examiné les crédits ce matin.
En ce qui concerne votre secrétariat d'Etat, les crédits restent stables. Ils
s'élèvent à 386,9 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de
paiement. Les autorisations de programme progressent, elles, de 10,4 %, passant
de 25,9 millions à 28,5 millions de francs.
Par ailleurs, plusieurs mesures qui figurent dans le budget général
profiteront particulièrement aux PME. Je pense, bien entendu, essentiellement à
la baisse de la TVA sur les travaux dans les logements. Cette mesure est
d'autant mieux accueillie que M. Sautter vient d'annoncer que le crédit d'impôt
accordé aux entreprises faisant des acquisitions au taux de 20,6 % et
effectuant des travaux sur lesquels leurs clients paieront une TVA de 5,5 %
leur sera imputé par anticipation afin d'éviter toute avance de trésorerie.
Cette baisse de la TVA me paraît particulièrement intéressante à plusieurs
égards.
Avant tout, elle soutient le secteur du bâtiment, créateur d'emplois, et peut,
dans le même temps, constituer un moyen de lutte contre le travail « au noir »,
très présent dans cette activité ; mais elle est également un facteur,
essentiel à mes yeux, pour nourrir la croissance. Je ne saurais trop insister
sur le lien direct qui existe entre, d'une part, le développement de l'activité
des PME-PMI, du commerce ou de l'artisanat et, d'autre part, la consommation
des ménages. Voilà pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen est
favorable à tous les dispositifs qui favorisent de façon significative la
consommation et le pouvoir d'achat.
Je souhaite m'arrêter quelques instants sur la légitime exigence de
simplification administrative en faveur des PME. Dans le rapport de mon
excellent collège M. Jean-Jacques Robert, il est fait mention, dès
l'introduction, des contraintes administratives et des charges financières qui
pèsent sur l'activité des entreprises de ce secteur. M. le rapporteur pour avis
ne sera pas surpris de me voir mettre un bémol à cette analyse.
Une meilleure coordination des différentes administrations au service des
PME-PMI me paraît nécessaire, notamment avec l'instauration d'un guichet
unique, mais également grâce au développement d'un accès unique à Internet pour
effectuer les déclarations sociales.
Toutefois, cet effort de simplification, impulsé par Mme Lebranchu et qu'il
convient sans doute d'améliorer, ne doit pas conduire à la suppression des
contributions sociales de ces entreprises. Il en va de la responsabilité et du
devoir de solidarité de chacun des partenaires économiques, employeurs comme
salariés.
Pour mes collègues de la majorité sénatoriale, la simplification se résume à
la réduction des charges des entreprises. Cette solution a longtemps prévalu.
Or, force est de constater qu'elle n'a pas prouvé son efficacité en termes de
créations d'emploi.
Pourquoi, dès lors, ne pas privilégier d'autres mesures, notamment en matière
de crédit accordé aux PME ? Celles-ci sont placées dans des conditions de
crédit bien moins avantageuses que celles que connaissent les grandes
entreprises. Elles se heurtent à l'hostilité des banques qui leur demandent
toujours plus de garanties. Je salue, à cet égard, la création, dans le projet
de budget pour 2000, d'un fonds de garantie pour les petites entreprises, même
s'il reste modeste.
Il est urgent d'abaisser le taux des crédits destinés aux PME et d'allonger
les durées de remboursement. Une réflexion doit également être menée afin de
mettre en place des bonifications de crédit en fonction de la création
d'emplois. Des actions visant à densifier l'épargne de proximité, véritable
terreau pour les petites entreprises, doivent également être envisagées.
Je conclus en indiquant que le groupe communiste républicain et citoyen votera
votre projet de budget, madame la secrétaire d'Etat, tout en appelant de ses
voeux la recherche d'autres solutions, notamment en matière de fiscalité des
PME, permettant non seulement leur développement mais également la création
d'emplois !
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'une
des forces économiques de la France est son réseau de PME artisanales.
Le paradoxe veut que, bien qu'elles soient de très petite taille, ces
entreprises artisanales fassent vivre près de 2 300 000 personnes.
C'est aussi sans compter avec le rôle majeur qu'elles jouent dans la vitalité
du monde rural où, bien souvent, leur présence ne constitue, malheureusement,
que la seule activité économique des communes.
Aussi, madame la secrétaire d'Etat, je suis satisfait du budget de votre
département ministériel, car il reflète bien la conscience et la reconnaissance
du Gouvernement vis-à-vis de ce secteur d'activité.
Je n'entrerai pas dans le détail des diverses mesures fiscales et juridiques
que vous avez prises pour accroître encore les potentialités de développement
des PME. Ces mesures sont largement justifiées et porteuses d'avenir, notamment
dans notre lutte incessante contre le chômage. Nous en avons la preuve chaque
jour, avec le nombre d'embauches dans le bâtiment et la production.
Aussi, je pense que cet élan nouveau ne devrait pas être freiné dans les
années à venir par le manque de personnel.
Comme d'autres collègues de notre assemblée, j'ai volontairement choisi
d'aller visiter la chambre de métiers d'Indre-et-Loire, à Tours, pour me rendre
compte de l'excellent travail que ces chambres fournissent, notamment par le
biais des CFA, les centres de formation d'apprentis.
Le rôle des chambres de métiers me semble essentiel et capital pour
accompagner nos entreprises, tant dans leur gestion quotidienne que dans la
formation des futurs ouvriers, salariés et cadres.
J'ai constaté avec plaisir que vous aviez actualisé la taxe pour frais des
chambres de métiers.
M. le député Chonat vous a d'ailleurs transmis un document sur les ressources
des chambres de métiers, dont il nous faudra largement discuter.
La redéfinition des missions des chambres de métiers ainsi que les moyens
financiers qui leur sont dévolus doivent répondre à leur implication et à leur
participation aux efforts de croissance.
Je sais, madame la secrétaire d'Etat, que vos collègues du Gouvernement et
vous-même, vous vous intéressez tout particulièrement au développement des
métiers dits manuels, ou, tout simplement, professionnels. Tant mieux !
Trop longtemps dénigrés, trop longtemps marginalisés, ces métiers ouvrent aux
jeunes des perspectives en matière de carrière et de rémunération
particulièrement attractives et motivantes.
La formation dispensée par les CFA est essentielle et le rôle de ces centres
est capital. Je crois que, parfois, on ferait mieux d'accroître notre soutien
financier à ces structures qui dispensent des enseignements et des pratiques de
qualité recherchés par nombre d'artisans.
D'ailleurs, il est d'ores et déjà nécessaire d'accroître ces types de
formation car, compte tenu de la reprise économique, notamment dans le
bâtiment, grâce à vos bonnes mesures, certains corps de métiers manquent déjà
de jeunes bien formés.
Aussi, madame la secrétaire d'Etat, je ne peux que vous encourager à continuer
votre mission et, surtout, à tout mettre en oeuvre pour faire de l'artisanat un
pôle de référence en termes d'emploi.
(Applaudissements sur les travées
socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
souhaite formuler quelques propositions sur la création d'entreprises.
Aujourd'hui, une ère nouvelle s'annonce et notre économie est en train de
changer. C'est une chance formidable qu'il faut mettre à profit pour
rechercher, en France, une nouvelle fertilité.
Plus de 1 200 000 Français auraient aujourd'hui un projet d'entreprise. Même
si ce chiffre n'est pas tout à fait exact, il y a là un potentiel énergétique
exceptionnel pour notre pays. Cherchons à le libérer le mieux possible.
Il est vrai que, avec ce siècle qui s'achève, c'est une certaine conception de
la création d'entreprise qui est en train de disparaître. Le xxe siècle a fait
de celle-ci un parcours du combattant. La création d'entreprise a été présentée
comme une activité d'exception, particulièrement difficile, comme un parcours
hérissé d'obstacles infranchissables, exigeant de celui qui voulait s'y lancer
des mérites extraordinaires. Pour atteindre au statut de créateur, il fallait
passer par toutes les affres de la complexité. Ainsi, petit à petit, on a
installé dans la tête des jeunes l'idée que la création d'entreprise était
quelque chose de surhumain.
A cela s'ajoutaient toutes les attitudes négatives habituelles à l'égard des
petites structures du territoire provincial. Créer une entreprise nouvelle,
petite et située en province, ce n'était pas très valorisant !
Ce siècle a donc préféré les grandes structures, le gigantisme, la
concentration. Il a préféré les grandes métropoles, et les cadres employés par
les grandes sociétés ont pris le pas sur les petits entrepreneurs. Au fond, il
ne faut pas s'étonner si, aujourd'hui, dans notre pays, on attend d'avoir
quarante ans pour créer son entreprise. Cette étape correspond en fait à une
certaine maturité professionnelle.
Mais un nouveau siècle approche. Les choses changent avec les nouvelles
technologies, le local peut rejoindre le mondial, et il n'est pas nécessaire
qu'une entreprise soit très grande pour être internationale. La démarche
entrepreneuriale traditionnelle, structurée et hiérarchique, qui voulait que
l'on commence par s'installer en Poitou, avant, si tout allait bien, de
s'installer en Bretagne, puis en Allemagne, et de conquérir progressivement des
marchés de plus en plus difficiles, est devenue caduque.
Désormais, un client ou un fournisseur vous introduit dans son réseau, et vous
fait bénéficier de ses contacts sur toute la surface du globe. Cela permet aux
petites entreprises d'être beaucoup plus internationales qu'elles ne l'étaient
auparavant, et les petites structures sont bien adaptées aux changements
rapides de l'économie moderne.
Par ailleurs, les dispositifs destinés à faciliter la création d'entreprise,
qui étaient souvent trop complexes à mettre en oeuvre, ont évolué. Pendant
longtemps, les financements ont été beaucoup trop difficiles à trouver, mais
quelques progrès ont été enregistrés à cet égard. Les créateurs d'entreprise
peuvent ainsi recourir aux services de la Banque de développement des PME, à
des avances remboursables et à un certain nombre d'autres dispositifs
financiers. La « boîte à outils » se diversifie, et nous comblons notre retard,
y compris en ce qui concerne le capital-risque.
Dans le même ordre d'idées, j'ai entendu de nombreux collègues parler de la
simplification administrative. Mais la vraie simplification viendra par
l'électronique, par les nouvelles technologies de communication, qui amèneront
la disparition spontanée de nombreux formulaires et documents de toute
nature.
Ainsi, la création d'entreprise deviendra beaucoup plus accessible pour les
jeunes, et il n'est sans doute plus temps de présenter ce défi comme impossible
à relever ni de faire de chaque entrepreneur un héros.
Au fond, le salariat est-il l'unique voie professionnelle envisageable ? A
l'époque où je suis sorti de l'école de commerce, il fallait entrer chez
Procter & Gamble si l'on voulait faire du marketing, chez Arthur Andersen si
l'on voulait faire de l'audit... Plus c'était grand, plus c'était sûr !
Aujourd'hui, on entre chez Paribas, et l'on se retrouve à la BNP, dans le
meilleur des cas
(Sourires)
; on entre chez Elf, et l'on se retrouve
chez Total, quand tout va bien.
(Nouveaux sourires.)
Les grandes
structures d'aujourd'hui, avec leurs capitaux flottants, sont-elles si sûres
que cela ? Pour un jeune qui se forme actuellement à l'université, la création
de sa propre activité n'est-elle pas le moyen de maîtriser son propre avenir,
largement aussi facilement que par le biais d'un travail salarié soumis à un
capital fluctuant, qui n'a pas toujours conscience des territoires et des
nationalités ? La création d'entreprise n'est-elle pas une perspective
économique très attirante pour les jeunes qui exerceront leur activité
professionnelle au cours de ce nouveau siècle ? Je crois que si, et qu'il vaut
la peine de mobiliser les énergies de notre pays pour les aider à réaliser
leurs projets.
Pour atteindre cet objectif, nous devons à mon sens faire porter notre action
à la fois sur l'amont et sur l'aval.
En effet, pendant très longtemps, en France, on a considéré que la création de
l'entreprise n'était qu'une phase très brève de la vie de celle-ci. Or, il faut
d'abord élaborer un projet - c'est l'étape en amont - puis, une fois que les
statuts ont été déposés, bénéficier d'un accompagnement - c'est l'étape en aval
- car l'on sait que, trois à cinq ans après leur création, les jeunes
entreprises restent très fragiles.
En amont, il faut donc instituer une sorte de droit à la création d'entreprise
pour tous les jeunes, notamment ceux qui sortent de nos établissements de
formation avec une qualification. Nous devons leur donner leur chance de
construire eux-mêmes leur propre parcours.
Mais le droit à la création suppose d'abord que l'on sensibilise les jeunes au
monde de l'entreprise.
Quand j'ai eu vingt ans, comme un certain nombre d'entre vous, mes chers
collègues, il m'a été donné de rencontrer la République pendant trois jours. On
m'a alors présenté le service militaire et les grandes institutions de notre
pays. Aujourd'hui, offrons la possibilité à nos jeunes, trois jours durant, de
rencontrer des chefs d'entreprise - quelle que soit la taille de celle-ci - et
des créateurs, ceux qui ont réussi comme ceux qui ont connu des difficultés.
Faisons en sorte qu'ils dialoguent avec des banquiers, des syndicalistes,
qu'ils acquièrent leurs premières notions de la vie en entreprise. La
sensibilisation, c'est cela.
Ensuite, il faudra accompagner les jeunes qui décident de réaliser un
projet.
A ce propos, ce qui me frappe dans la région que j'ai l'honneur d'administrer,
c'est la formidable disponibilité des aînés, notamment des cadres et des jeunes
retraités. Ils sont prêts à donner de leur temps et de leur énergie pour aider
leurs cadets. Des tuteurs, il s'en trouvera autant que de besoin pour
accompagner les jeunes et leur prêter la main afin qu'ils puissent créer leurs
propres entreprises. Une considérable énergie bénévole est disponible !
Il faut aussi aider au « prédémarrage » de l'entreprise, selon une formule qui
nous vient du Québec. En effet, les Québécois ont été les premiers à développer
une telle politique d'aide non pas à la création d'entreprise, mais à
l'élaboration d'un projet. Une somme représentant l'équivalent de 5 000 à 50
000 francs français est attribuée au futur entrepreneur pour faire un voyage
d'étude, évaluer les perspectives de réussite ou les débouchés dans tel ou tel
secteur.
En résumé, s'agissant de l'amont, il nous faut développer la culture du projet
dans les lycées et dans l'enseignement supérieur, et instaurer un véritable
droit à la création. Il est très insuffisant que seulement 3 % des anciens
élèves des écoles de commerce de notre pays fondent une entreprise. Travaillons
en amont avec la fraction la plus jeune de la population !
En ce qui concerne l'aval, c'est de toute une « boîte à outils » dont doivent
disposer les créateurs à partir du moment où les statuts ont été déposés. Je
serai bref sur ce sujet : madame le secrétaire d'Etat, une proposition de loi
élaborée dans cette assemblée vous attend ; tout est prêt, le travail est mâché
; vous n'avez plus qu'à signer, et une grande et belle loi « Lebranchu » verra
le jour, permettant que la création d'entreprise soit reconnue dans ce pays !
(Sourires.)
Un certain nombre de mesures peuvent être mises en place, touchant tout
d'abord au financement. Des avancées peuvent être obtenues dans ce domaine,
grâce notamment à l'épargne de proximité. Pour que ceux qui disposent d'un peu
d'argent dans nos villes et nos provinces, certains médecins, avocats ou
commerçants - du moins ceux qui ont résisté ! - puissent participer au
développement de l'économie locale, favorisons l'émergence de fonds communs de
placement de proximité. Que l'épargne régionale soit investie dans les projets
régionaux ! Il existe déjà, à cet égard, un dispositif précurseur, les FCPI,
les fonds communs de placement dans l'innovation. Accordons une petite
incitation fiscale pour que, sur un territoire donné, qu'il s'agisse d'une
ville, d'un département ou d'une région, les entreprises puissent faire appel
avec succès à l'épargne de proximité ! Si ma mémoire est bonne, environ 160 000
entreprises sont nées en 1998, dont 130 000 avec un capital initial de moins de
35 000 francs.
L'argent existe dans nos villes et nos régions, encore faut-il l'orienter vers
le financement des jeunes entreprises plutôt que vers d'autres formes de
placement.
A cette fin, il serait bon, je le répète, de prévoir un avantage fiscal
comparable à celui qui est lié aux FCPI. D'autres suggestions de ce type
figurent dans notre proposition de loi.
En outre, nous devons aussi penser à tout ce qui concerne les aspects
juridiques et sociaux de la création d'entreprise.
Ainsi, il faudrait mettre au point un statut particulier pour les salariés qui
quittent leur emploi afin de fonder une entreprise. En effet, ils ne
bénéficient pas, en l'état actuel des choses, d'indemnités de chômage, et ils
se lancent dans l'aventure entrepreneuriale sans disposer d'aucune protection
sociale en cas de difficultés.
Par ailleurs, nous devons élargir les possibilités, pour les créateurs
d'entreprise, d'occuper un emploi salarié à temps partiel, en instituant là
encore un statut spécial en leur faveur. Une telle politique pourrait notamment
être mise en oeuvre au sein des « incubateurs d'entreprises ».
Enfin, il est nécessaire de bâtir des réseaux d'accompagnement locaux de la
création d'entreprise. Le réseau « Entreprendre en France », notamment, a
montré la voie à suivre. Tout doit être mis en oeuvre pour combattre ce qui est
le plus choquant aujourd'hui dans notre société de la communication, à savoir
la solitude de l'entrepreneur.
Madame le secrétaire d'Etat, la création d'entreprise mérite que vous fassiez
d'elle votre priorité, car elle a trop souvent été négligée dans ce pays. Nous
ne devons pas compter, pour développer nos territoires, sur l'implantation
d'usines Toyota ou Daewoo, qui disparaissent quelquefois trop rapidement et
fragilisent les économies locales. La véritable énergie de ce pays, c'est sa
jeunesse : faisons en sorte que les jeunes Français, en devenant des acteurs,
participent au bonheur de la France !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel.
Remarquable !
M. le président.
La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'examen du projet de budget des petites et moyennes entreprises, du commerce
et de l'artisanat est un moment privilégié, car il permet de saluer, en cet
hémicycle, tout le dynamisme, toute la volonté dont font preuve les
commerçants, les artisans et les gérants des petites et moyennes entreprises.
Ces derniers, pour beaucoup, ont résisté avec vaillance à la crise ; ils jouent
un rôle dans la création d'emplois, ils représentent la vie de nos villes et
l'espoir de nos villages.
Je vois dans votre projet de budget, madame la secrétaire d'Etat, quelques
points positifs, dont les mesures prises pour soutenir la transmission ou la
création de nouvelles entreprises. Cela constitue, bien évidemment, une avancée
; mais s'agissant, je le répète, d'un secteur dynamique, qui a un fort
potentiel de création d'emplois, je dois cependant aussi souligner quelques
motifs d'inquiétude.
La première source d'inquiétude provient du fait que votre projet de budget
n'augmente pas par rapport à l'an dernier, ce qui, compte tenu d'une inflation
faible mais réelle, constituera une diminution.
Ensuite, il convient de relever que nous étudions là l'un des plus petits
budgets de l'Etat, ce qui est une seconde source d'inquiétude, surtout si l'on
relève que le nombre des créations d'entreprises a baissé en 1998 par rapport à
1997, et que, en dix ans, on a constaté pratiquement une diminution de 20 % du
nombre de créations annuelles d'entreprises, qui est passé de 204 000 à 167 000
environ, soit près de 40 000 créations de moins. Sur dix ans, cela fait
beaucoup. Il est donc nécessaire de très vite corriger le tir et de mener une
politique ambitieuse pour aider ce secteur clé de notre économie.
De plus, le fait que les crédits de fonctionnement de votre secrétariat d'Etat
soient transférés au budget du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie ne peut que laisser augurer de nouvelles difficultés, compte tenu
de la rigidité habituelle de ce ministère face aux initiatives de
simplification.
Mais, au-delà des chiffres, je souhaite aborder quelques points rappelant la
vie de nos entreprises et leurs difficultés.
Tout d'abord, s'il est vrai que quelques mesures ont permis une certaine
simplification, notamment pour les artisans et les commerçants, il subsiste
dans les esprits, mais aussi dans les faits, une tracasserie administrative
quotidienne insupportable pour tous les entrepreneurs.
Nos entreprises souffrent de l'excès de réglementation qui caractérise notre
pays.
J'ai discuté récemment avec la conjointe collaboratrice d'un artisan - je
reviendrai d'ailleurs, plus tard, sur ce statut particulier. Elle m'a expliqué
que, constatant une erreur dans le calcul de sa taxe professionnelle, elle
avait dû, pour justifier de cette erreur, se déplacer auprès de l'agent du
Trésor public, qui avait voulu lui prouver point par point qu'elle avait tort,
avant de s'apercevoir que, finalement, c'étaient les services fiscaux eux-mêmes
qui étaient dans l'erreur.
Son calvaire ne s'est pas arrêté là. Elle a dû s'expliquer par plusieurs
lettres recommandées avec accusé de réception et entreprendre de multiples
autres démarches, pour finalement obtenir au bout de trois ans le remboursement
de cette taxe injustement perçue par l'Etat. Heureusement encore qu'elle
travaillait avec son mari, sans quoi celui-ci aurait perdu des heures
précieuses dans ces démarches stériles, au détriment du temps passé au service
du développement de son entreprise !
Et ce n'est là qu'un exemple parmi bien d'autres !
Je souhaite exprimer un autre motif d'inquiétude, relatif à l'accès des
petites structures aux marchés publics.
Nombre de petits entrepreneurs ne soumissionnent pas - ils sont plus de 40 %
dans ce cas - en raison de la trop grande complexité qu'il y a à répondre à
l'offre. Il est vrai que réunir toutes les pièces réclamées pour ces dossiers
relève de la gageure pour les entreprises. Et que faire, là encore, face à
cela, lorsque l'on est simple artisan ?
Le gouvernement précédent avait dans ses dossiers une réforme des marchés
publics qui semblait recueillir des échos favorables sur toutes les travées de
notre assemblée. Pourquoi ne pas remettre à l'ordre du jour ce projet plein de
bon sens ?
Je viens de vous citer un exemple dans lequel le rôle du conjoint
collaborateur s'impose manifestement. Je sais, madame la secrétaire d'Etat, que
vous avez annoncé un projet visant à l'amélioration de la situation des
conjoints collaborateurs. A l'heure où la parité est sur toutes les lèvres et
dans toutes les discussions, telle soeur Anne, les femmes d'artisans ne voient
toujours rien venir ! Dans quel délai pensez-vous faire des propositions dans
ce sens afin de les rassurer ?
Je veux maintenant aborder la situation des commerces, et plus
particulièrement des centres-villes.
Nous sommes là face à un grand problème économique mais aussi culturel, car
les commerces sont l'animation de nos villes et ils ont souvent un rôle vital
dans la pérennisation de nos villages.
La situation est inquiétante. Si, en Grande-Bretagne, deux tiers des actes de
commerce sont réalisés dans les centres-villes, on tombe à moins d'un tiers en
France.
Je ne vous ferai pas l'affront, madame la secrétaire d'Etat, d'affirmer que
vous êtes responsable de ce fait, bien évidemment. Je ne veux pas non plus
jeter l'opprobre sur tel ou tel partenaire - ce n'est pas le propos.
En fait, il conviendrait que chacun des interlocuteurs se pose les vraies
questions et décide de discuter avec ses voisins ; j'entends par là les
pouvoirs publics, les chambres consulaires, les représentants d'unions de
commerçants.
Pour ce qui est du problème des grandes surfaces, plutôt que de se lancer dans
un combat stérile, je souhaiterais que l'on s'attache à organiser des
opérations positives et que tous les partenaires - grandes surfaces, bien sûr,
pouvoirs publics, commerces, élus - se réunissent afin de réfléchir
ensemble.
Ainsi, lorsqu'une grande surface doit s'installer en périphérie d'une ville,
pourquoi ne pas négocier avec elle la possibilité de créer, dans le centre de
la commune, une enseigne qui servirait à drainer la clientèle, de sorte que
tous les commerces environnants en bénéficient ? Ce serait une bonne manière,
premièrement, de réconcilier tout le monde et, deuxièmement, de redynamiser nos
centres-villes.
En tout cas, il est primordial que les chambres consulaires se saisissent de
ces problèmes et mènent enfin des actions concrètes dans ce domaine, qui est le
fondement de leur existence. J'aurai d'ailleurs l'occasion de vous poser
prochainement une question sur les chambres de métiers et sur leur mode
d'élection, qui est plus que complexe.
Je veux, enfin, aborder le grand sujet d'inquiétude qu'est pour les artisans,
les commerçants et les très petites entreprises l'application de la loi sur les
35 heures. Je sais que je touche là à un sujet sensible, mais il est
indispensable d'insister sur le fait que cette loi va mettre en péril plus
d'emplois dans ce secteur de l'économie qu'elle n'en créera.
Madame la secrétaire d'Etat, en préparant mon intervention, je lisais les
interventions de nos collègues députés.
J'ai notamment trouvé intéressante l'intervention de notre collègue député
Nicolas Forissier, qui, pour résumer, expliquait, exemple à l'appui, qu'une
entreprise de dix-huit personnes devrait dépenser, pour l'application des 35
heures, les deux tiers de son bénéfice net après impôt.
Il est donc évident que cette mesure va, comme le disait notre collègue,
amputer l'autofinancement des entreprises et les mettre en péril pour agir face
à la concurrence.
Le Gouvernement s'en est lui-même rendu compte, puisqu'il a dû multiplier les
dispositifs parallèles pour permettre à certaines PME de mettre en place les 35
heures.
Il n'en reste pas moins qu'elles sont nombreuses à attendre 2002 pour le
faire, et que, pour les artisans, malgré certains accords passés avec des
grands syndicats - sans, d'ailleurs, en référer à la base - cette obligation
représente encore plus de difficultés.
Telles étaient les quelques remarques que je souhaitais vous présenter, madame
la secrétaire d'Etat. Malgré toute votre détermination et votre engagement
personnel connu en faveur des petites et moyennes entreprises, du commerce et
de l'artisanat, je doute, hélas ! que votre budget - comme, d'ailleurs,
l'ensemble du budget pour 2000 présenté par le Gouvernement - permette de
répondre aux besoins des entreprises, et donc de notre économie.
(Très bien
! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget des PME, du commerce et de l'artisanat qu'il nous est proposé d'examiner
aujourd'hui s'élève, comme l'an dernier, à 387 millions de francs. Ce budget
est modeste au regard du nombre d'entreprises françaises, mais l'Etat, dans le
domaine économique, doit garder un rôle d'initiateur et non d'opérateur, de
manière à ne pas brider l'initiative individuelle.
Je formulerai une remarque avant d'analyser certaines orientations de ce
budget. Dès le 15 septembre, le Gouvernement annonçait une mesure fiscale
importante : la baisse de la TVA de 20,6 % à 5,5 % sur les travaux dans les
logements. Avec les Français, et comme les parlementaires qui souhaitent de
longue date promouvoir la baisse des charges et des impôts pour favoriser
l'emploi et dissuader le travail illégal, je me réjouis de cette décision.
Votre prédécesseur, M. Jean-Pierre Raffarin, s'était engagé à le faire
lorsqu'ils était ministre, mais le contexte de rééquilibrage budgétaire
indispensable ne le lui avait pas permis, madame la secrétaire d'Etat. Je suis
heureux de cette baisse de TVA.
J'apporterai toutefois deux bémols.
Le premier porte sur la méthode. Techniquement, cette baisse est incluse dans
le projet de loi de finances pour l'an 2000, mais elle a été anticipée au 15
septembre 1999. Elle s'applique même aux acomptes versés avant cette date,
quelle que soit la date d'achèvement des travaux. Vous avez préféré l'effet
d'annonce, que vous pouvez, certes, justifier par la finalité, au respect de la
représentation nationale dans son ensemble.
Deuxième bémol : on peut regretter la complexité de la mise en oeuvre de cette
décision, si simple en apparence. Ces distinctions, notamment entre les
matériaux achetés par les artisans et ceux qui le sont par les particuliers,
peuvent conduire à la désillusion. L'application du taux de TVA réduit est
également à comparer systématiquement aux travaux qui étaient auparavant
déductibles de l'impôt sur le revenu.
Dans votre budget, je me réjouis particulièrement de la place accordée à la
formation professionnelle, à hauteur de 101 millions de francs, sans toutefois
préjuger de la bonne utilisation de ces fonds. C'est un choix pour l'avenir, et
c'est sans doute le meilleur que vous ayez fait dans ce budget, sous réserve,
je le répète, que ces sommes soient bien utilisées.
Je suis moins enthousiaste sur la diminution drastique des prêts bonifiés et
l'utilisation des moyens du fonds d'intervention pour la sauvegarde de
l'artisanat et du commerce, le FISAC.
J'attache un intérêt tout particulier au dispositif des prêts bonifiés. En
1996, votre prédécesseur avait demandé au député que j'étais d'évaluer
l'efficacité de ces prêts bonifiés à l'artisanat. L'écart des taux entre les
taux bonifiés et les taux réels n'était pas si important. Pourtant, l'effet
incitatif et déclenchant de ce dispositif avait été clairement démontré et un
doublement de l'enveloppe avait été obtenu dans un contexte de rigueur
budgétaire.
Je regrette que, dans ce budget, vous diminuiez cette enveloppe de moitié. Je
sais bien que votre décision est motivée par la baisse des taux d'intérêt ; en
tout cas, je le suppose. Il eût cependant été intéressant de poursuivre un
dispositif qui demeure efficace et qui est recherché par les artisans, à en
croire les taux de consommation de crédit.
J'attire votre attention sur la justification de la bonification d'intérêt
dans une période de faible inflation, et donc de taux réels non négligeables,
ainsi que sur l'incertitude quant à l'évolution des taux dans les années à
venir.
La répartition des recettes du FISAC, d'un montant de 410 millions de francs,
c'est-à-dire supérieur à votre budget, est préoccupante. Le nouveau dispositif
recherche un équilibre entre les opérations de modernisation et de rénovation
du commerce en zone urbaine, coûteuses et souvent pluriannuelles, et les
opérations individuelles de maintien des commerces de proximité en zone rurale,
plus nombreuses mais d'un coût plus faible. Les aides apportées dans les zones
rurales sont donc encore insuffisantes, et vous savez pourtant l'importance du
maintien du dernier commerce pour la vitalité des petites communes.
Cela s'inscrit, hélas ! dans la politique d'aménagement du territoire du
Gouvernement, qui privilégie les villes et oublie trop souvent les campagnes.
Pourtant, 70 % des Français souhaiteraient vivre, dans les dix ans à venir,
dans une petite commune rurale ou dans une ville moyenne de province.
Concernant le FISAC, je m'étonne également que les fonds non consommés à la
fin de l'année soient réintégrés dans le budget de l'Etat. Prélevés sur les
entreprises, ces fonds devraient uniquement servir à développer des actions
favorisant le commerce et l'artisanat. Madame la secrétaire d'Etat,
envisagez-vous de reporter désormais les crédits non consommés du FISAC sur
l'année suivante ?
Votre budget aurait pu contenir de nouvelles mesures, comme l'obligation d'un
minimum de formation pour les nouveaux commerçants ou - c'est encore plus
important - une réforme du statut du conjoint de l'artisan et du commerçant,
réforme que l'on attend toujours, comme s'en sont inquiété nombre d'orateurs
avant moi.
Il devient, par exemple, urgent d'agir pour inciter les banques à ne plus lier
la délivrance d'un prêt au principe de la caution solidaire du conjoint.
Comptez-vous présenter prochainement un projet de loi complet sur le statut du
conjoint, qui viendrait utilement compléter la loi du 10 juillet 1982 ?
Madame la secrétaire d'Etat, je ne saurais être trop critique sur ce budget.
Toutefois, je suivrai les conclusions de la commission.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Bécot.
M. Michel Bécot.
Madame le secrétaire d'Etat, avant d'aborder des sujets qui intéressent plus
spécifiquement les PME, je dirai un mot de l'évolution générale de votre
budget, ainsi que des ressources extra-budgétaires provenant du FISAC.
Avec près de 400 millions de francs prévus en 2000, les crédits du secrétariat
d'Etat restent stables, ce dont il faut se féliciter. On peut néanmoins
regretter, notamment, la diminution de la part relative au soutien du
financement des PME.
Mais l'aspect le plus visible et original de l'action gouvernementale, ce sont
les interventions du FISAC. Le fonds d'intervention pour la sauvegarde de
l'artisanat et du commerce revêt effectivement un caractère stratégique face
aux évolutions récentes que connaît le secteur du commerce et de l'artisanat.
La concurrence grandissante de la grande distribution sur le plan européen rend
indispensable le renforcement des interventions de ce fonds.
Dans mon département, les Deux-Sèvres, une opération a été engagée dans ce
cadre à partir de 1993, l'opération « 1 000 Villages de France ». Il s'agit,
bien sûr, de favoriser l'installation de commerces dans les communes
rurales.
C'est un succès incontestable. On peut toutefois regretter les délais toujours
longs des versements. Je rejoins donc là l'une des demandes des rapporteurs du
Sénat concernant le FISAC, à savoir une accélération et une meilleure
transparence des procédures.
J'en viens aux problèmes que connaissent les PME en France.
Tous les responsables politiques reconnaissent aujourd'hui l'importance de la
contribution des PME à la croissance économique et à l'emploi. Elles assurent
48 % des exportations et représentent une large majorité de la population
active de notre pays. Vitales pour la création de travail et de richesses, en
particulier dans les départements ruraux, les PME-PMI doivent obtenir de l'Etat
un cadre mieux adapté à leur développement.
Partant de ce principe, nous divergeons sans doute un peu avec le Gouvernement
sur les priorités et les modalités.
Gisements potentiels d'emplois, les PME françaises en ont créé trois fois
moins qu'en Allemagne ou aux Pays-Bas entre 1988 et 1997. Pourquoi ce décalage
? Les causes sont nombreuses et complexes. Nos rapporteurs en ont déjà
stigmatisé quelques-unes : l'insuffisance du financement, le niveau trop élevé
des charges, la complexité de la réglementation.
Parmi les problèmes évoqués par les différents rapports parlementaires figure
en première place l'insuffisance des créations d'entreprises elles-mêmes.
Ainsi, en 1998, nous aurons créé 40 000 entreprises de moins qu'en 1989.
Une revue du secrétariat d'Etat n'évoquait-elle pas en juin dernier le «
hiatus qui s'installe : malgré la reprise de la production industrielle, le
nombre de créations d'entreprises stagne ou même décroît » ?
Comme le constate, en effet, le récent rapport Besson à l'Assemblée nationale,
il y a en France une vraie inégalité d'accès à la création d'entreprise. A ce
sujet, je remercie notre collègue Jean-Pierre Raffarin, qui a parlé avec brio,
tout à l'heure, du droit à la création d'entreprise.
Cette inégalité concerne la formation et l'information souvent déficientes des
éventuels créateurs, mais elle est surtout d'ordre financier : nous vivons dans
un pays où la prise de risque n'est pas suffisamment mutualisée.
La responsabilité en revient sans doute, au moins en partie, à l'Etat. Comme
le notait le Conseil national du crédit dans un rapport publié en avril
dernier, les mesures prises au niveau financier en faveur de la création
d'entreprises ont été surtout consacrées aux PME innovantes, qui ne
représentent pourtant que 1 % des créations constatées.
N'oublions pas non plus la responsabilité des établissements financiers, dont
le réseau local est trop souvent insuffisant et l'attitude quelque peu frileuse
à l'égard de l'initiative privée.
S'agissant de la fiscalité, en particulier de la TVA, un progrès incontestable
a été réalisé avec la décision d'appliquer le taux réduit aux travaux
d'entretien des locaux d'habitation. Mais il faut se montrer un peu plus
ambitieux encore : la liste des secteurs à haute intensité de main-d'oeuvre,
telle qu'elle ressort de la dernière directive, est encore trop limitative.
Ainsi se trouve exclu, pour le moment, un secteur comme la restauration
traditionnelle et l'hôtellerie, dont la marge de progression en termes
d'emplois et de chiffre d'affaires est encore très importante dans un pays
comme le nôtre, premier pays touristique au monde !
Un autre domaine intéressant les PME nécessiterait un effort tout particulier,
à savoir le commerce extérieur. Ce dernier, même s'il est excédentaire de 100
milliards de francs environ cette année, reste encore fragile, car ses
résultats reposent encore sur 5 % des entreprises françaises seulement.
Mais le préalable reste encore et toujours la simplification des procédures et
l'unification des structures d'aide aux PME. Les entreprises exportatrices
françaises sont en relation avec un trop grand nombre d'administrations : CFCE,
CFME, ACTIM, postes d'expansion économique, etc. Trop souvent, elles ont
réellement du mal à trouver les bonnes filières et les bons interlocuteurs.
Evoluons donc vers un guichet unique, en matière tant de commerce extérieur
que de création d'entreprise. Continuons à simplifier les formalités et les
déclarations fiscales ou sociales.
Madame la secrétaire d'Etat, vos efforts en ce domaine sont louables, et nous
nous y associons, dans la continuité de l'action de notre collègue Jean-Pierre
Raffarin. Cependant, il est dommage, reconnaissez-le, que les mesures positives
prises à votre niveau soient trop souvent contrebalancées par de nouvelles
contraintes imposées sur l'initiative de certains de vos collègues du
Gouvernement. Je pense, bien sûr, à la réduction de la durée du travail à 35
heures, mesure unilatérale imposée aux PME en 2002 contre la volonté de la
majorité d'entre elles.
(Mme le secrétaire d'Etat sourit.)
Il s'agit d'une mesure absurde, antiéconomique, alors que la loi Robien
offrait déjà un socle solide pour les entreprises qui souhaitaient s'engager
dans la voie du partage du temps de travail, dans la souplesse et la
concertation.
En conclusion, avant d'aborder le xxie siècle, il faut des réformes allant
dans le sens de la simplification et de l'allégement fiscal. Le renforcement de
notre réseau de PME, en France et sur les marchés extérieurs, est à ce prix. Or
force est de constater, malheureusement, que la politique gouvernementale dans
son ensemble ne tient pas compte suffisamment de cet impératif.
Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe de l'Union centriste suivra l'avis
des commissions des finances et des affaires économiques et ne votera donc pas
le projet de budget des petites et moyennes entreprises, du commerce et de
l'artisanat pour 2000.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Raffarin.
Excellente intervention !
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heure trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une
heures trente.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'économie, les finances et l'industrie : III. - Petites et moyennes
entreprises, commerce et artisanat.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à
l'artisanat.
Monsieur le rapporteur spécial, le diagnostic que nous
portons sur les PME est très largement convergent. Je vous remercie de
l'intérêt que vous portez, cette année encore, à ce projet de budget.
Je remercie également M. le rapporteur pour avis avec lequel j'ai toujours
plaisir à échanger des propos, même si ce n'est pas toujours simple parce que
nous ne sommes pas forcément d'accord. J'apprécie la pertinence et la grande
liberté de ses analyses, qui sont pour moi, comme tous les arguments que j'ai
entendus en commission, une invitation à mieux faire au sens premier du
terme.
Je tiens enfin à vous remercier tous et toutes de l'intérêt qu'illustrent vos
questions et vos propositions à l'égard de ce projet de budget que j'ai
l'honneur de présenter et de défendre devant vous.
Ce projet de budget pour 2000 a été construit autour de deux priorités qui
reposent sur deux convictions.
Première priorité : accompagner, en la renforçant, la politique économique
générale du Gouvernement en faveur des entreprises. Il faut témoigner de la
volonté de croissance.
Les PME doivent être des acteurs de premier plan de la croissance économique
et de l'emploi, comme l'ont dit MM. Dussaut et Ballayer.
Seconde priorité : créer les conditions d'une réelle solidarité des
entreprises les unes envers les autres. Une croissance économique durable est
possible pour notre pays à condition de la bâtir sur des fondations solides,
c'est-à-dire à partir d'un échange économique équitable.
Je vais maintenant vous parler de nouveau de ma première conviction : le
développement des PME, du commerce, de l'artisanat ou des services se construit
à partir de territoires identifiés et structurés.
J'ai une autre conviction : l'économie de marché n'est un ordre des choses
acceptable que s'il obéit à des règles et à une éthique. C'est indispensable,
cela fonde le rôle de la puissance publique et lui indique le chemin.
Le projet de loi de finances pour l'an 2000 poursuit l'orientation prise dans
les budgets de 1998 et de 1999 pour les PME.
En 1999, les PME ont bénéficié les premières de la suppression de la part
salariale de la taxe professionnelle, ce qui représentait un allégement de 7
milliards de francs.
La mesure la plus importante, rappelée par M. Jean-Jacques Robert et par Mme
Odette Terrade notamment, est certainement, cette année, la baisse de la TVA
sur les travaux dans les logements. Le taux de la TVA baisse de 15 points, ce
qui représente 19,7 milliards de francs d'allégement d'impôt.
Depuis le 1er décembre - je vais répondre ainsi à des inquiétudes qui ont été
exprimées par beaucoup d'entre vous - les entreprises qui achètent leurs
fournitures au taux de 20,6 % pour des travaux facturés à 5,5 % peuvent
anticiper le crédit d'impôt qui leur est dû. C'est une mesure très favorable
pour la trésorerie des PME du secteur du bâtiment.
Si nous avons pris cette décision et si nous l'avons annoncée dès le lendemain
ou presque, monsieur de Montesquiou, c'est à la demande des entreprises.
En effet, si nous avions inscrit ce dispositif dans le projet de loi de
finances, les particuliers prêts à faire les travaux chez eux auraient attendu
que la loi soit promulguée. Il en serait résulté un trou de consommation de
deux mois. C'était un peu beaucoup !
C'était délicat et nous étions dans l'obligation de décider vite. Nous aurions
pourtant préféré en débattre avec vous.
M. Aymeri de Montesquiou.
Nous en sommes d'accord !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
La baisse de la TVA est une mesure importante pour
augmenter la croissance économique. En même temps, je suis persuadée que
l'augmentation de l'activité peut aider des entreprises à organiser un passage
aux 35 heures qui en a inquiété plus d'un sur ces travées.
Le passage aux 35 heures n'est pas toujours facile ! Nous en sommes tous
convaincus, et je n'ai jamais dit le contraire. Des mesures d'accompagnement
sont donc nécessaires.
La baisse de la TVA engendredra à peu près 30 000 emplois, selon les
professionnels du bâtiment eux-mêmes. A cela s'ajoutent 10 000 emplois au
minimum chez les fournisseurs de matériaux.
J'attire votre attention sur le fait que, si la très grande majorité des
professionnels du bâtiment n'a pas augmenté ses prix depuis la baisse de la
TVA, en revanche, nous avons déjà constaté une certaine dérive des prix des
matériaux. Il serait dommage que ce que nous avons voulu faire en baissant la
TVA sur les travaux d'entretien soit repris en amont par des augmentations trop
fortes du coût des fournitures.
Il est vrai que le renforcement de la demande crée des tensions dans certains
secteurs plus particuliers des métiers de l'artisanat. Les deux rapporteurs
d'abord, puis MM. Fatous, Ostermann et Dussaut l'on dit et redit.
C'est pourquoi, une campagne nationale, relayée localement en fonction des
besoins constatés des spécialités, sera lancée au début de l'année
prochaine.
Cette campagne, élaborée grâce à une contribution du ministère de l'emploi et
de la solidarité, sera accompagnée d'une révision du contenu et des modalités
de l'apprentissage.
Il faut effectivement adapter l'apprentissage. Sa durée doit être à géométrie
variable et s'étendre sur un an, deux ans ou trois ans, selon les besoins réels
des jeunes et des entreprises.
La baisse de la TVA sur les services n'a été citée qu'une fois, par M. Bécot.
Il est vrai qu'on en parle moins. Ce sont pourtant les personnes handicapées et
les personnes âgées qui en bénéficieront en premier, ainsi que les gardes
d'enfants, les soutiens scolaires et les aides ménagères.
Nous donnons un contenu concret à l'économie solidaire que nous voulons mettre
en place. Ce n'est pas une mesure de portée symoblique, puisque son coût est de
100 millions de francs.
Un premier bilan de la baisse de TVA depuis le mois de juin 1997 fait
apparaître un total de 28,8 milliards de francs, dont 19,8 milliards de francs
pour le budget pour 2000. Il s'agit là d'un effort sans précédent en faveur des
petites entreprises.
Dans une démarche cohérente d'amélioration de la fiscalité, le Gouvernement
prend un certain nombre de mesures ciblées.
La première série de mesures fiscales concerne cette TVA. Je ferais à ce
propos une incidente sur la restauration servie à table et la restauration à
emporter, la baisse de la TVA ayant été adoptée pour la seule restauration à
emporter.
Je rappelle quand même à l'ensemble du Sénat que des traiteurs ainsi qu'un
certain nombre de tenants des métiers de bouche ne souhaitent pas que la TVA
soit ramenée à 5 % pour l'ensemble de la restauration. Les traiteurs sont eux
aussi concernés par la TVA sur les repas à emporter, et ils ne voient pas
forcément bien cette mesure proposée en faveur de l'ensemble de la restauration
française.
Il faut savoir aussi que la restauration, contrairement à ce qui a pu être dit
tout à l'heure, n'est pas forcément un secteur de haute concurrence, dans la
mesure où l'on ne passe pas nécessairement la frontière pour un déjeuner.
Il faut que nous étudiions précisément ce que serait le coût d'une mesure de
ce type, son impact exact sur les prix et l'accès à la restauration. Or nous
n'avons pas suffisamment d'expertises de ce type.
Il n'est cependant pas exact que nous nous soyons opposés à la baisse de la
TVA sur la restauration prise par la commission européenne. Dominique
Strauss-Kahn était présent à la négociation, et il a fait partie de ceux qui
ont défendu la baisse de la TVA sur la restauration.
D'autres métiers auraient également besoin de cette baisse de la TVA, en
particulier ceux qui assurent les services, aussi bien dans les centres-villes
que dans les bourgs et les galeries marchandes. Ils sont trop souvent oubliés
alors que c'est peut-être par eux qu'il faudrait commencer. En disant cela, je
pense aux cordonniers, par exemple, et à tous ces métiers qui disparaissent
alors même qu'ils sont nécessaires et qu'ils témoignent d'un vrai savoir-faire
qui doit être protégé.
Voilà pourquoi je reste persuadée qu'il faut envisager la baisse de TVA dans
son ensemble et ne pas simplement s'arrêter à la restauration, même si je
comprends les restaurateurs et même si le mouvement général relatif à une
certaine forme de restauration américaine conduit à défendre des positions
encore plus dures à l'égard de ce taux de TVA.
Ces mesures fiscales n'auraient pas atteint leur objet si nous ne parlions pas
aussi de celles qui visent à la création des entreprises. MM. Demuynck et
Dussaut, notamment, ont cité le droit fixe de 1 500 francs pour constitution de
société qui est désormais supprimé.
Au moment où l'on avait fait passer le délai de création d'une entreprise à
vingt-quatre heures, le coût de cette inscription avait été multiplié par
trois. Désormais, c'est gratuit, et c'est une économie de 200 millions de
francs qui bénéficiera à 140 000 créateurs, ce qui n'est pas anodin.
Le taux des droits de mutation sur les fonds de commerce et les cessions de
clientèle passera de 11,40 % à 4,80 % par alignement sur les taux des droits de
cession des parts sociales. C'est la mise à égalité des fonds de commerce et
des entreprises. La mesure pourrait concerner 60 000 mutations et faire
réaliser une économie globale de 700 millions de francs. C'est aussi une mesure
forte, qui était attendue depuis longtemps.
La suppression de l'imposition forfaitaire annuelle, dont vous avez presque
tous parlé, pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500
000 francs, est non seulement une mesure d'allégement, puisque l'économie pour
les PME s'élève à 300 millions de francs, mais aussi une mesure de simplication
importante.
Parmi les autres dispositifs pérennisés figure le report d'imposition des
plus-values de cession de titres dont le produit est investi dans les fonds
propres des entreprises créées depuis moins de quinze ans. Ainsi, les
entrepreneurs débutants trouveront plus facilement conseil et soutien
financier.
Ces mesures seront complétées à l'occasion des assises de la création
d'entreprise, que nous organiserons, sous l'égide du Premier ministre, en mars
prochain. Nous avons déjà organisé des réunions préparatoires sur le
territoire. Après ces assises et la remise du rapport Besson, un certain nombre
de mesures seront proposées.
M. Raffarin a dit tout à l'heure qu'il s'agissait d'un axe fort. Je partage
son analyse.
L'économie évolue aujourd'hui, et il faut parler et agir globalement. Je
rappelle cependant que le peu de création d'entreprises résulte des difficultés
auxquelles était confrontée notre économie. La période de croissance que nous
traversons est relativement récente. En outre, nous n'avons pas assez dit et
redit que les emplois seraient créés dans les nouvelles technologies de
l'information et de la communication mais aussi dans les services.
Un certain nombre de secteurs n'ont pas été pris en compte, ni par le système
social ni par le système fiscal français. Or il s'agissait bien de rebâtir une
société - je partage également cette analyse - même si l'on a parlé, pendant de
trop longues années, de crise économique, ce qui en a découragé plus d'un.
Il fallait surtout dire qu'il s'agissait non pas d'une crise économique, mais
d'une mutation technologique forte, qui fait que les productions de masse sont
désormais derrière nous ; j'en veux pour preuve le fait que nous assistons à
plus de restructurations que de créations.
Les productions de masse ont, petit à petit, laissé du champ à un certain
nombre d'entreprises qui bénéficient de l'externalisation des fonctions des
grandes entreprises. Par ailleurs, la majorité des entreprises ont désormais
besoin d'entreprises de services à leurs côtés.
C'est ainsi qu'il faut penser globalement l'évolution de notre société. Ce
n'est pas d'une crise dont nous sortons, c'est à une mutation technologique que
nous assistons, et il faut savoir l'affronter.
Un intervenant a regretté que les jeunes sortant de telle ou telle école
n'entrent pas immédiatement dans le cycle de la création.
Mais nous sommes dans une « société trombinoscope » - comme je le dis si
souvent -, dans une société où le premier espoir des parents est que les
enfants obtiennent d'abord le baccalauréat puis, si possible, un diplôme de
niveau supérieur et soient enfin embauchés par une grande entreprise ou dans la
haute fonction publique. C'est le rêve, le désir de tout un chacun dans ce
pays.
Lors de réunions concernant l'apprentissage, je n'ai jamais rencontré un seul
défenseur de l'orientation des jeunes vers l'apprentissage qui ait fait cette
démarche pour son fils ou pour sa fille. C'est donc bien d'un phénomène global
dont il s'agit.
Mais il faut savoir également que, pour créer une entreprise, il faut
aujourd'hui allier une formation générale et un savoir-faire : bac + 2 et un
CAP, bac +
n
et un apprentissage ou une alternance.
Des ouvertures de ce type sont nécessaires, car il est vrai que si les
savoir-faire sont une clé d'entrée dans la création d'entreprises, ils ne sont
peut-être plus suffisants pour adapter l'entreprise à l'évolution rapide du
monde dans lequel nous vivons. Il est vrai aussi que le créateur d'une
entreprise artisanale sera confronté à un marché totalement ouvert, puisque,
faisant lui-même du commerce électronique, il aura globalisé la plus grande
part de son accès à ses clients.
Ces évolutions impliquent une réforme de fond qui doit être discutée avec M.
Claude Allègre, pour l'éducation nationale, et avec Mme Péry, pour la formation
professionnelle.
Même si cela n'a rien de comparable avec les trois jours du service national,
la créativité doit être intégrée dans les enseignements très tôt, et elle doit
faire partie du cursus. Ce n'est pas toujours le cas aujourd'hui et nous savons
tous bien que, si les élèves ont le choix, ils manquent généralement plutôt le
cours consacré au savoir-faire technologique que le cours portant sur une
matière fondamentale.
Il y a vraiment un apprentissage de la créativité à faire. Des expériences
sont en cours qui sont porteuses d'espoirs de créations, en particulier le fait
que des universités travaillent aujourd'hui avec des chambres de métiers afin
que des étudiants en université puissent faire des stages dans des entreprises
artisanales. A nous de transformer ces expériences et d'apporter aux créateurs
d'entreprise les quelques mesures qui leur manquent et qui sont, effectivement,
de deux types.
La première consiste à faciliter l'accès au crédit. Nous avons presque tous
les outils pour cela. Il nous suffit simplement de les réécrire à partir de ce
que nous avons fait avec la SOFARIS, la SIAGI et la SOCAMA.
La seconde mesure revient à apporter aux créateurs le filet de protection dont
ils ont besoin, car un cadre licencié dispose de plus de moyens financiers pour
attendre le prochain poste que quelqu'un qui a pris le risque de créer une
entreprise et qui échoue. On ne peut pas aborder la question de la création
d'entreprise sans aborder celle de l'échec. Ce dernier fait partie du risque
d'entreprendre ; il faut donc que nous le gérions ensemble,
a minima
bien évidemment, car il est hors de question de porter tout le monde !
De la même manière, je reste persuadée que les réseaux d'accompagnement
doivent être aidés au-delà du bénévolat, lequel ne suffira pas. M. Raffarin a
cité tout à l'heure le réseau « Entreprendre en France », mais il en existe
d'autres. Aujourd'hui, quatre réseaux fonctionnent grâce à la prime à la
création d'entreprises, et il faut faire en sorte que tous les territoires
soient maillés par des réseaux de ce type, ce qui n'est pas le cas.
Pour citer votre collègue député Eric Besson, auteur du rapport sur la
création d'entreprises « il n'y a pas aujourd'hui d'égalité de droit devant le
droit d'entreprendre ». C'est cela qu'il faut créer sur le territoire, car les
créateurs potentiels n'ont pas toujours la chance d'appartenir à une famille
dont les biens peuvent servir de caution à la banque.
Voilà, s'agissant de la création, ce que nous voulons faire au mois de mars.
J'espère qu'avec ces quelques mesures nous finirons par déclencher un réflexe
de création, à condition bien sûr qu'en amont, sur les formations, nous ayons
gagné le réflexe de la créativité.
Les créateurs ont besoin aussi d'avoir en face d'eux des entrepreneurs qui
changent de langage et qui ne qualifient pas leur situation de très difficile.
Ils devraient par exemple applaudir lorsque la taxe professionnelle baisse et
faire savoir aux créateurs potentiels que 1 057 000 entreprises seront
exonérées en l'an 2000 de la part salariale de la taxe professionnelle et que,
fiscalement, les choses vont mieux, et même de mieux en mieux !
Un mot, pour terminer, de « l'impôt papier », car vous avez pratiquement tous
cité cette demande de simplification.
Madame Terrade, il ne faut pas confondre simplification administrative et
suppression de la fiscalité ou des cotisations sociales. Malheureusement, un
mouvement s'est développé en France et appelle généralement à une
simplification extrême qui consiste dans le non-paiement des cotisations
sociales. Nous sommes tous, je crois, trop attachés au système de mutualisation
des risques essentiels liés à la santé et à la retraite pour accepter une telle
suppression.
J'étais ce matin aux 50 ans de ORGANIC et de la CANCAVA. Les caisses et les
mandants de ces caisses veulent effectivement avoir suffisamment de rentrées
d'argent pour assurer, aux uns et aux autres, les prestations dont ils ont
besoin. Mais aucune demande de suppression de la cotisation n'a été émise.
En revanche, apparaissent des demandes d'adaptation de la cotisation. C'est
pourquoi, par le biais d'un amendement qui a été déposé par le Gouvernement au
Sénat, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, Martine Aubry a déjà proposé que la première année de cotisations soit
allégée et qu'avant le quatrième mois ne soit plus appelée qu'une cotisation
minime, qui n'atteindra, la deuxième année, que 55 000 francs.
En effet, comme les avances remboursables fonctionnent, comme les prêts
garantis fonctionnent, il ne faut pas, selon nous, que la totalité de l'avance
remboursable soit récupérée trois mois après par les cotisations sociales. Par
conséquent, oui pour simplifier, aménager, reporter en cas de création, mais
non pour supprimer. Ou alors il faut parler d'un autre régime que le nôtre,
mais je ne pense pas que ce soit ce que souhaitent les entreprises.
Les autres simplifications engagées depuis l'automne 1997 sont désormais
entrées dans les faits. Mais il faut maintenant que la commission pour les
simplifications administratives pilote la mise en oeuvre de nouvelles actions.
Nous ciblons notre démarche sur les petites entreprises, c'est-à-dire que nous
agissons en fonction de ce qu'elles nous demandent. Les chambres de métiers et
les chambres de commerce devraient nous aider à collecter et à faire remonter
leurs souhaits, car ce qui nous paraît compliqué n'est pas toujours vécu comme
tel par ces petites entreprises.
S'agissant de l'informatique, je rejoins ce qui a été dit par plusieurs
d'entre vous : la mise en réseau va vraiment nous aider.
En l'an 2000, ce sont quarante-neuf impôts et taxes qui seront supprimés, dont
vingt-huit concernent directement les PME. Au 30 mars 2000, les PME auront
toutes un accès unique à Internet pour leurs déclarations sociales, grâce à la
mise en place d'un portail unique et sécurisé, comme vous l'avez dit madame
Terrade. Il est vrai que cette proposition nous avait été faite en particulier
par les conjointes des chefs d'entreprises, dont le statut a si souvent été
évoqué tout à l'heure. Nous avons pu la concrétiser grâce à la collaboration de
l'ensemble des services sociaux, partenaires de cette ouverture du portail
unique.
Un guichet unique expérimental sera mis en place cet hiver pour les
déclarations des travailleurs saisonniers des métiers du tourisme en Savoie.
Nous voulons vraiment avancer sur ce dossier, d'abord parce que le travail
saisonnier n'est pas bien géré aujourd'hui et qu'il n'existe pas, dans ce
domaine, de bourse d'échanges, à l'image de ce qui se pratique en Limousin pour
la transmission. Nous devons donc faire un effort particulier.
Il ne faut pas confondre le travail précaire et le travail saisonnier. Si
certaines entreprises recourent au travail précaire de façon parfois un peu
abusive - on a cité à cette tribune la grande distribution, mais il en existe
d'autres - il est des entreprises qui sont fortement marquées par la
saisonnalité et pour lesquelles nous devons trouver une solution, car ces
entreprises offrent des emplois qu'il nous est actuellement difficile de
pourvoir. C'est ainsi qu'il nous a fallu procéder à des échanges à l'échelon
européen, pour satisfaire la demande des stations de sports d'hiver français
!
Nous devons donc, c'est important, faciliter les démarches pour les
travailleurs saisonniers et prendre en compte la saisonnalité, afin qu'elle ne
soit pas considérée comme une précarité. Nous maîtriserons mieux ce problème
après l'expérience qui a été acceptée par les acteurs économiques de la
Savoie.
Le budget du secrétariat d'Etat a été construit avec la volonté de donner aux
mesures fiscales leur pleine signification économique.
Je n'oublie pas, comme le rappelaient MM. Bécot et Dussaut, l'action en faveur
du soutien à l'exportation et à l'investissement à l'étranger des PME grâce à
de nouvelles procédures ; je pense au FASEP, le fonds d'études et d'aide au
secteur privé, pour les petits projets, fonds qui n'est pas suffisamment connu.
Mon collègue François Huwart reviendra sans doute tout à l'heure sur cette
grande réforme du secrétariat d'Etat au commerce extérieur.
Cette idée selon laquelle les petites entreprises doivent avoir leur guichet
spécial, leur fonds spécial et leur assurance de prospection spéciale est en
effet fondamentale, car c'est ce qui, effectivement, leur posait le plus de
problèmes. Je rassure MM. Bécot et Dussaut sur ce point ! Il existe maintenant
un dispositif spécifique. Notre problème, aujourd'hui, est de faire en sorte
que les chambres de métiers et les chambres de commerce et d'industrie s'en
saisissent pour en faire un outil connu et utilisé par les petites entreprises
qui sont fortement capables d'exporter - je pense en particulier, comme cela a
été dit tout à l'heure, aux métiers d'art. Un des grands prix d'exportation, on
s'en souvient, a été attribué aux luthiers français, qui ont des marchés
importants aux Etats-Unis.
Le budget de mon secrétariat d'Etat a été élaboré en fonction de deux autres
exigences : rechercher le plus grand effet de levier et favoriser les actions
créatrices d'emplois.
Dans cette tâche, notre travail est facilité par la situation budgétaire
globale du ministère, qui, après avoir connu trois années consécutives de
baisse, poursuit depuis l'an dernier une orientation plus positive.
Le budget que je présente devant vous, vous l'avez rappelé, totalise 386,9
millions de francs, le même montant que l'an dernier. La différence qui a été
notée tient à la réserve parlementaire.
A ce budget, il convient d'ajouter les fonds du FISAC qui atteindront 410
millions de francs en l'an 2000, soit une augmentation de 10 millions de francs
par rapport à 1999. Je signale à M. Mathieu, qui semble l'avoir oublié, qu'une
telle augmentation est rare dans les différents budgets de l'Etat, en tout cas
suffisamment rare pour être soulignée !
Vingt millions de francs vont, chaque année, au commerce multiservices - MM.
Mathieu et de Montesquiou s'en inquiétaient - ce qui fait que l'épure est
toujours de 43 millions de francs pour le commerce multiservices.
Parmi les mesures nouvelles du budget, trois sont particulièrement
significatives : la création d'un fonds de garantie pour les petites
entreprises, les contrats de plan et la réforme du FISAC.
Les prêts bonifiés - vous en avez presque tous parlé - ont eu, par le passé,
leur utilité. Aujourd'hui, leur avantage est moins net, parce que les taux
d'intérêt ont baissé, en même temps que l'offre de crédits devenait plus
abondante.
Nous les avons réservés essentiellement à ce qui est l'adaptation aux normes -
c'est un dossier difficile dans lequel il y a généralement un investissement
sans retour sur investissement puisqu'il s'agit d'adapter une entreprise -
notamment aux équipements concernant l'an 2000. A cet égard, je pense au bogue
et, si vous avez encore un peu de temps, aidez-nous à dire aux commerçants que
la majorité des terminaux de paiement pourront passer l'an 2000 à condition
qu'ils aient été vérifiés !
Ces prêts bonifiés sont également réservés aux équipements concernant l'euro.
En effet, si l'euro a été très bien pris en compte par les citoyens de ce pays
au moment de sa mise en place, petit à petit, il s'est éloigné des
préoccupations, et trop peu de comptabilités de petites entreprises sont
réalisées en euros. A partir du 15 janvier, lorsque nous aurons surmonté les
éventuelles difficultés liées au bogue de l'an 2000 - il ne faut pas mélanger
les messages - nous devrons nous remettre rapidement au travail sur
l'adaptation à l'euro des petites entreprises, des commerçants et des artisans,
ce qui sera sûrement notre axe fort pour l'année à venir.
Bien entendu, la suppression complète et immédiate des prêts bonifiés n'aurait
pas de sens, sauf à dire qu'un petit montant va nous servir à expérimenter
lesdits fonds de garantie pour les petites entreprises. On ne peut pas
prétendre que les petites entreprises n'ont pas accès aux crédits et ne pas
faire un effort pour créer un fonds de garantie. Pour répondre au souci que
vous aviez exprimé l'an dernier sur la difficulté d'accès aux crédits
bancaires, nous avons trouvé la garantie des petits projets, ceux qui nous
concernent ce soir.
Parmi les dossiers, les difficultés sont dues davantage à l'absence de crédits
de ce type qu'à la mise aux normes pour d'autres équipements traditionnels.
Les 22 millions de francs consacrés au titre des mesures nouvelles
nécessiteront un examen de notre et de votre part. Il s'agit de voir comment
cela a fonctionné pour, éventuellement, aller au-delà l'an prochain. Ils
permettront de garantir des prêts pour un montant jusqu'à 25 fois supérieur.
C'est donc un moyen de faire évoluer le comportement de certaines banques en
matière de garanties réelles et de sûretés personnelles.
Avec le fonds de garantie, le banquier doit renoncer à la garantie
hypothécaire, qui plus est sur la résidence principale. Je compte bien faire
bouger les lignes sur la caution trop souvent exigée du conjoint - MM. Dussaut,
Mathieu et de Montesquiou ainsi que d'autres en ont parlé tout à l'heure - sans
pour autant obliger les banques à prêter leur garantie au petit bonheur des
projets. Il n'est pas dans notre intention de rendre les choses trop faciles et
de faire prendre des risques aux banques, à la BDPME à la SOFARIS, à la SIAGI
et à la SOCAMA. Mais si les garanties sont suffisantes, on ne doit pas dépasser
la demande normale de l'entreprise privée qu'est la banque.
Les conjointes d'artisans, de commerçants et de chefs d'entreprise se
plaignent de devoir systématiquement apporter leur caution solidaire alors que,
pour des sommes bien supérieures à celles qu'empruntent leurs conjoints, les
entrepreneurs soumis au régime des SARL ne sont pas astreints aux mêmes
obligations. Il faut revoir la situation de façon calme et efficace. Nous
sommes actuellement en période de croissance, et les fonds disponibles ne sont
pas rares. Nous n'avons pas à gérer la rareté. Gérons donc les fonds
disponibles avec, certes, le maximum de sérieux, mais sans exiger des garanties
excessives. Nous reviendrons sur ce sujet lors de la discussion sur le projet
de loi de régulation économique, et j'espère être alors en mesure de vous
proposer des dispositions de nature à régler ce qui est une réelle tension.
Je reste par ailleurs persuadée que ni mon secrétariat d'Etat ni le ministère
de l'économie, des finances et de l'industrie ne résoudront entièrement le
problème posé par les conjointes d'artisans. Il faudra soumettre le problème à
la Chancellerie. En effet, il réside non pas dans l'entreprise elle-même, mais
dans l'accident de la vie. A ce niveau, la protection des conjoints doit donc
être assurée différemment dans notre droit. Il faudra travailler sur ce point
indépendamment de ce que nous pourrons faire pour les garanties.
Cet accompagnement des nouvelles entreprises que nous mettons en place doit
aussi être générateur de sécurité de la part des banques.
L'accompagnement, dont a parlé M. Raffarin, est sûrement l'un des axes les
plus forts parmi ceux sur lesquels nous devons travailler avec nos partenaires
consulaires, avec les conseils régionaux ; certains d'entre vous ont évoqué les
collectivités territoriales. Le projet de loi de M. Zuccarelli permettra
d'entrer dans ce type de système ressemblant aux actuelles plates-formes
d'initiative locale.
L'accompagnement est effectivement nécessaire. Le taux de réussite est
d'environ 80 % quand les entreprises sont accompagnées, de 50 % quand elles ne
le sont pas.
Il faudra donc que, avec les chambres consulaires en particulier, nous
passions des contrats d'objectif sur ce point, de façon que l'accompagnement
soit assuré sur chaque territoire. Ce dispositif pourra s'appuyer sur une
politique rénovée des contrats d'installation et de formation d'artisans, les
CIFA.
J'ai noté que, sur toutes les travées, vous demandiez que la transmission soit
facilitée. Outre ce que j'ai dit tout à l'heure sur les droits concernant les
fonds de commerce, je reste persuadée que l'expérience limousine de la bourse
des transmissions est une expérience à reproduire sur l'ensemble du territoire.
Je ne pense pas que ce soit le métier de l'Etat de le faire tout seul. Il y a
des établissements publics consulaires qui peuvent être un relais efficace dans
cette mise en confrontation entre ceux qui ont une entreprise à transmettre et
ceux qui pourraient la reprendre.
Nous serons, nous, prêts à discuter de ce sujet lors de la phase finale de la
négociation des contrats de plan Etat-région. Si la région a des projets de ce
type à nous proposer, nous les soutiendrons parce que nous pensons que l'échec
de la transmission est effectivement souvent l'échec de la rencontre entre un
entrepreneur qui part en retraite et un entrepreneur qui cherche à se lancer
dans une activité.
Je n'ai pas retenu, ce matin, la proposition des commerçants et artisans qui
demandent que soit mise en place une cessation progressive d'activité des
artisans en vue d'une reprise. Je pense que, avec le CIFA et un certain nombre
d'outils de ce type, nous avons suffisamment d'instruments pour éviter de créer
des départs en retraite trop précoces.
Les organisations patronales ne peuvent pas à la fois affirmer que l'âge de la
retraite est trop bas et demander la cessation progressive d'activité pour les
entrepreneurs. Il importe de trouver une logique dans tout cela, et nous la
trouverons.
Les contrats de plan, qui sont une autre priorité du budget, prennent appui
sur des politiques menées à l'échelon national telles que la formation, qui
sera dotée en l'an 2000 de 101,21 millions de francs, ou sur le Fonds
d'aménagement des structures artisanales, le FASA, dont les crédits sont passés
en deux ans de 2,5 millions de francs à 7 millions de francs et qui finance des
actions en faveur de la sécurité alimentaire, de la qualité ou de l'innovation
technologique. En effet, les petites entreprises sont capables d'innovations
technologiques ; encore faut-il leur donner le coup de main nécessaire.
Puisque les demandes exprimées par les régions et retranscrites par les
préfets portent, de façon nouvelle, sur le commerce et l'artisanat, qui sont
reconnus comme des vecteurs de l'activité économique sur les territoires, il
est indispensable de chercher à donner une cohérence forte aux contrats de plan
2000-2006.
J'ai retenu deux axes principaux pour les nouveaux contrats de plan, à savoir
les investissements immatériels et les actions d'investissement groupés.
Les investissements immatériels répondent à un besoin exprimé par les PME sur
l'ensemble des territoires. Il s'agit le plus souvent de conseil en matière
technologique, en matière de ressources humaines, d'organisation du travail, de
gestion des normes sanitaires ou de sécurité, de création de réseaux ou de
recours à l'exportation. C'est sur ces sujets que la demande est la plus forte
et que nous sommes prêts à contractualiser.
L'expérience du bogue de l'an 2000 ou le passage à l'euro ont démontré la
nécessité de créer les conditions d'un accès plus simple, pour toutes les
entreprises, à des expertises parfois très pointues. La nouvelle entreprise ou
la PME exprime des besoins qui sont aujourd'hui, en termes de qualité et en
volume, comparables, voire supérieurs à ceux des grandes entreprises ; on
l'oublie malheureusement trop souvent.
Il faudra en même temps fournir un appui aux groupements d'employeurs, qu'ont
évoqué Mme Terrade ainsi que M. Fatous, et aussi M. Dussaut, à propos des 35
heures.
Je crois que les groupements d'employeurs sont une des réponses possibles au
problème que pose effectivement, dans certains métiers, la mise en application
des 35 heures.
Nous pouvons contractualiser sur l'aide à la création des groupements
d'employeurs partout où ceux-ci l'exigent. Je ne citerai que l'exemple de
Vannes, précisément parce qu'il s'agit d'un groupement d'employeurs qui s'est
constitué sans nous : nous l'avons simplement accompagné. En tout cas, là où se
constituent des groupements d'employeurs, ils fonctionnent bien au regard de la
réduction du temps de travail.
Les actions d'investissements groupés participent aussi à l'organisation des
territoires innovants.
Les contrats de plan peuvent favoriser une meilleure diffusion des nouvelles
technologies en matière de communication et de commerce électronique.
Il m'importe que les petites entreprises et le commerce, qu'il soit
traditionnel, franchisé ou en coopérative, aient accès au commerce électronique
avant que celui-ci n'ait été capté par de grands donneurs d'ordres, qui sont
capables de tisser totalement la toile et de laisser peu de place à nos petites
et moyennes entreprises.
Pour cette raison, je suis particulièrement vigilante, y compris en ce qui
concerne les opérations du FISAC pour des villes ou des pays, à ce que le
commerce électronique soit un des axes de réflexion et de travail.
Une installation permettant d'accéder à une page de commerce électronique
coûte entre 30 000 francs et 50 000 francs. Une fois que les pages sont
réalisées, il faut accéder à la clientèle et diffuser ses produits. Or cela,
beaucoup de petites entreprises, aujourd'hui, ne savent pas le faire. Il y a
donc là un vrai sujet de réflexion collective à mener sur tous les
territoires.
Je souhaite évoquer brièvement l'animation économique, dont plusieurs orateurs
ont parlé à la suite de l'exposé de M. Ballayer.
Pour ce qui est de la politique d'aide à l'animation économique des
organisations professionnelles et des chambres de métiers, je rappelle que,
compte tenu des insuffisances constatées dans le suivi de l'affectation des
crédits répartis de 1994 à 1997 au titre du FSE, le Fonds social européen, il
n'y a pas eu de crédits européens pour 1999.
Malgré cette contrainte, j'ai décidé, cette année, de réaliser un effort
exceptionnel pour maintenir la dotation à l'animation économique à un niveau
compatible avec la poursuite d'une action de qualité en ce domaine.
Je rappelle que les crédits hors FSE consacrés à l'animation économique
s'élevaient, en 1997, à 111,7 millions de francs, en 1998, à 114,8 millions de
francs, et qu'ils seront, cette année, de près de 151 millions de francs.
Ma dernière priorité concerne le FISAC, dont nous redessinons ensemble le rôle
chaque année.
J'ai fixé trois objectifs au FISAC pour l'an 2000.
Le premier est de mieux articuler la diffusion des projets innovants avec les
opérations conduites dans les contrats de plan, le FASA et l'action des réseaux
des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers. Un crédit
FISAC, c'est aussi l'occasion d'organiser l'ensemble des acteurs autour d'un
projet commun.
Le deuxième objectif est d'améliorer la gestion des dossiers de montant
modeste. De ce point de vue, je ne suis pas hostile à une plus grande
déconcentration de la procédure, que M. Ostermann appelle de ses voeux. Mais je
veux aussi rappeler mon attachement au rôle de péréquation opéré par le FISAC.
Je pense qu'il ne faut pas figer les enveloppes par région. Sinon, cela
signifie qu'on fige l'enveloppe sur l'année
n
, et la région considérée
ne pourra plus avoir plus de crédits qu'elle n'en a eu au titre de l'année
n
, alors même que les produits seront plus nombreux. Le fait de remonter
au niveau national permet de « péréquer » tous les ans en fonction des besoins
réels et des projets réellement portés sur les territoires.
Le troisième objectif est de rechercher une plus grande clarté dans le
fonctionnement du FISAC, et notamment une meilleure information du Parlement.
Cela ne devrait pas poser de problème. Vous pourrez disposer d'un compte rendu
sur les activités du FISAC.
Les fonds de garantie, les contrats de plan et le FISAC sont trois moyens de
soutenir les projets individuels et collectifs sur les territoires. Si nous
conjuguons bien ces trois moyens, les entreprises auront les mêmes chances de
développement sur tout le territoire.
Je traiterai maintenant brièvement des marchés publics, sur lesquels MM.
Fatous, Demuynck, Hérisson et Robert m'ont interrogée. Notre projet de réforme
est prêt, à la suite de la concertation qui a été menée en 1999. J'espère
disposer bientôt d'un rapport législatif. Le seul problème qui reste à
résoudre, concernant le dossier des marchés publics, est de lui trouver une
place dans les travaux parlementaires. Comme je ne peux pas vous obliger à
travailler entre le 24 décembre et le 1er janvier, je suis obligée d'attendre
un support législatif.
Nous essaierons de trouver cette place dans le cadre du projet de loi sur les
régulations économiques que M. le Premier ministre a annoncé.
En tout cas, des dispositions législatives sont nécessaires pour répondre aux
attentes des PME concernant les conditions d'allotissement, les conditions du
paiement direct et les problèmes de garantie de bonne fin. Ce sont les trois
points essentiels que les petites entreprises soulèvent le plus souvent, outre,
bien entendu, la simplification de l'accès aux marchés.
Pour les marchés publics comme pour les autres dossiers, il faudra songer non
seulement au papier mais aussi aux réseaux et à la sécurisation de ceux-ci. En
effet, il est possible de répondre à un marché public sur le Net à condition
que les données et les coordonnées de l'entreprise soient sécurisées, ce qui
n'est pas encore le cas actuellement sur tous les réseaux.
Je vous donne donc rendez-vous pour prendre ces dispositions aussitôt que le
calendrier parlementaire nous en donnera la possibilité.
Je vous ai dit ma conviction de la nécessité d'une meilleure régulation et de
la mise en oeuvre d'une éthique en économie. Je réponds en cela à tout ce qui a
été dit tout à l'heure sur la grande distribution, sur les donneurs d'ordres ou
sur les délais de paiement.
S'agissant des délais de paiement, la directive sera, je pense, adoptée par le
Parlement européen en mars 2000. Nous espérions qu'elle le serait ce mois-ci,
mais nous étions trop optimistes.
Si tout se passe bien, nous pourrons, lors de la présidence française,
transposer en droit français cette directive européenne, qui maintient le
contrat, qui rend les pénalités automatiques et cessibles. Ce serait
l'aboutissement de deux ans de travail sur cette directive relative aux délais
de paiement.
Nous avons d'ailleurs eu la chance de pouvoir avoir un axe d'accord avec les
Britanniques pour que cette directive soit enfin rédigée comme nous le
voulions, les uns et les autres.
Outre les délais de paiement, qui sont un sujet majeur, le Premier ministre
nous a demandé, à la suite de tables rondes organisées sur l'initiative de
Christian Pierret, pour le textile, de Jean Glavany, pour les fruits et légumes
- d'autres sont en cours qui portent sur d'autres types de production - de
promouvoir ce qu'on peut appeler le « contrat amiable » en ce qui concerne les
relations avec la grande distribution et les donneurs d'ordres. Nous voulons en
effet - et plusieurs d'entre vous se sont exprimés en ce sens - que ce soient
les acteurs eux-mêmes qui règlent au maximum les problèmes intéressant leurs
relations réciproques. Je crois, comme vous, qu'il faut faire plus de
régulation que de réglementation.
La France est sûrement le pays qui a le plus de réglementation intéressant
l'ensemble des formes de distribution et celui, en même temps, celui qui a le
plus de mètres carrés. L'excès de réglementation peut donc ne pas aboutir à ce
que l'on recherchait au départ. Sans doute aurait-on mieux fait, parfois, de
parler de régulation.
Nous ferons donc en sorte de privilégier la régulation. Mais ce qui ne sera
pas réglé par le contrat le sera par le code de bonne conduite des pratiques
commerciales défini dans le cadre du texte sur les régulations économiques.
Nous avons donné une chance aux acteurs de réguler eux-mêmes, de proposer ces
codes de bonne conduite dont ils parlaient ; nous constaterons ce qui aura été
mis en oeuvre à cet égard lorsqu'il n'y aura rien à constater nous ferons
notre travail gouvernemental en proposant au Parlement les quelques mesures de
régulation qui manqueront à cet échafaudage qui paraît actuellement un peu
difficile à faire tenir.
L'action de mon ministère ne se résume pas à l'énoncé de lignes de crédits
budgétaires ; je viens de le montrer. Le secteur dont j'ai la responsabilité
est très vaste : il couvre les PME, le commerce, l'artisanat, les services, les
professions libérales et la consommation.
Chacun de ces secteurs a ses particularités, mais ils expriment tous un besoin
commun, celui d'une régulation économique plus forte. Plus il y a d'économie de
marché, plus la régulation est nécessaire. C'est cela qui a été dit par
beaucoup au moment des premières négociations de l'OMC. C'est cela, peut-être,
qui a été mal compris par beaucoup de citoyens.
Puisque François Huwart sera devant vous tout à l'heure, et qu'il évoquera
certainement l'échec de Seattle, qui n'est qu'un échec temporaire, je voudrais
dire que, en tant que responsable des secteurs que je viens d'énumérer, j'ai
besoin de l'OMC parce que la majorité des petites entreprises, sur un marché
qui est de toute façon mondial, ont besoin d'une régulation et que, en dehors
de l'OMC, je ne vois pas d'où viendrait cette régulation. Notre langage commun
devrait viser à expliquer ce que signifie la régulation internationale en
termes d'obligations à l'égard des acteurs économiques les plus faibles comme à
l'égard des pays les plus faibles.
Je crains qu'un discours un peu plus démagogique - si je puis me permettre un
terme qui, sûrement, n'est jamais utilisé ici
(Sourires)
- ne fasse
croire qu'il suffit de « fermer » l'OMC et que tout ira bien. Ce n'est
évidemment pas concevable puisque le marché est déjà international. Ce que je
disais tout à l'heure sur le commerce électronique, par exemple, nous oblige
même à poser, au niveau de l'OMC, les problèmes de garantie de contrat, de
signature, de paiement électronique, de sécurisation, etc., mais aussi de
normes fiscales et sociales.
Tout cela nécessitera énormément de travail, à condition, bien sûr, que les
citoyens comprennent pourquoi nous faisons ce travail et qui nous voulons
protéger.
Je reste persuadée, enfin, que la régulation économique est le complément
indispensable d'un développement économique durable. C'est aussi le moyen de
créer des solidarités, qui font trop souvent défaut aux entreprises. Je tiens
fréquemment aux chefs d'entreprise les propos suivants : vous êtes solidaires
contre les 35 heures, mais êtes-vous certains d'être tous solidaires entre vous
? Pour ma part, je n'en suis pas convaincue !
Il faut donc recréer les conditions d'un dialogue équilibré, comme l'a demandé
M. Hérisson. Cette tâche de médiation est l'une de mes priorités. Je le ferai
aux côtés du Premier ministre, aussi bien aux assises du commerce et de la
distribution qu'à celles de la création, parce que, là aussi, il faudra parler
d'équilibre. Je donne rendez-vous à M. Jean-Jacques Robert, rapporteur pour
avis, ainsi qu'aux orateurs qui ont évoqué cette question, notamment M. Bernard
Dussaut, lors de ces assises, afin que nous examinions ensemble le moyen de
faire mieux.
Quant au souci annexe d'assurer un équilibre entre les différentes sortes de
commerce, le problème se pose entre les centres-villes et les périphéries,
entre les centres-villes et les bourgs ruraux, et entre les bourgs ruraux
eux-mêmes. Avec la loi Besson, d'un côté, la régulation, de l'autre, nous
devrions non pas créer un nouveau déséquilibre, mais réussir à instaurer
l'équilibre nécessaire. Je crains qu'un nouvel excès de textes ne soit pas
forcément bienvenu pour notre appareil commercial.
S'il est temps que les pratiques de la grande distribution changent, je
reconnais aussi que la grande distribution française fait obstacle,
actuellement, à l'entrée sur le marché intérieur d'autres acteurs qui ne
seraient peut-être pas faciles à gérer.
Par conséquent, tout cela demande beaucoup d'anticipation, beaucoup d'études.
Mais il importe aussi que les règles de l'équilibre soient partagées, ce qui
n'est pas encore le cas aujourd'hui. La concurrence doit revêtir un caractère
plus collectif. Elle doit être ancrée dans des territoires et non pas être
sous-tendue par une doctrine totalement désincarnée.
Je veux apporter la démonstration, par mon action au sein du Gouvernement, que
le vaste secteur dont j'ai la charge peut être le moteur d'un nouveau mode de
croissance économique fondé sur la solidarité. Pour ce faire, il me faut le
plein soutien de la représentation nationale. Je regrette que, pour des raisons
qui sont les vôtres, mesdames, messieurs les sénateurs, ce ne soit pas tout à
fait le cas ce soir. Mais ce le sera sûrement un autre jour.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen des crédits figurant aux états B et C et
concernant l'économie, les finances et l'industrie : III. - Petites et moyennes
entreprises, commerce et artisanat.
Je rappelle au Sénat que ces crédits seront mis aux voix aujourd'hui même, à
la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 4 806 315 457 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 6 121 105 900 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 1 607 450 000 francs ;
« Crédits de paiement : 1 158 870 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 7 383 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 2 113 280 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion les articles 69, 69
bis,
69
ter
et 69
quater,
qui sont rattachés pour leur examen aux crédits des petites et
moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.
Article 69
M. le président.
« Art. 69. - L'article 1601 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1601. -
Une taxe additionnelle à la taxe professionnelle est
perçue au profit des chambres de métiers, des chambres régionales de métiers et
de l'assemblée permanente des chambres de métiers.
« Cette taxe est acquitée par les chefs d'entreprises individuelles ou les
sociétés soumises à l'obligation de s'inscrire au répertoire des métiers. Les
personnes physiques titulaires de l'allocation supplémentaire mentionnée à
l'article L. 815-2 ou à l'article L. 815-3 du code de la sécurité sociale sont
dégrevées d'office de la taxe.
« Cette taxe est composée :
« - d'un droit fixe par ressortissant, arrêté par les chambres de métiers dans
la limite d'un montant maximum fixé à 623 francs ;
« - d'un droit additionnel, dont le produit est arrêté par les chambres de
métiers ; celui-ci ne peut excéder 50 % du produit du droit fixe.
« Toutefois, à titre exceptionnel, les chambres de métiers sont autorisées à
porter le produit du droit additionnel jusqu'à 75 % du produit du droit fixe,
afin de mettre en oeuvre des actions ou réaliser des investissements dans le
cadre de conventions, qui peuvent être pluriannuelles, conclues avec l'Etat.
« Le présent article n'est pas applicable dans les départements du Bas-Rhin,
du Haut-Rhin et de la Moselle. »
Par amendement n° II-8, M. Ballayer, au nom de la commission des finances,
propose :
I. - De compléter le quatrième alinéa du texte présenté pour l'article 1601 du
code général des impôts par les mots : « qui peut être révisé lors du vote de
la loi de finances de l'année ».
II. - Dans le sixième alinéa du texte présenté pour l'article 1601 du code
général des impôts, de remplacer le taux : « 75 % » par le taux : « 60 % ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. René Ballayer,
rapporteur spécial.
l'Assemblée nationale a modifié cet article rattaché
au budget des PME du commerce et de l'artisanat, relatif à l'actualisation de
la taxe pour frais des chambres de métiers, qui est, comme vous le savez, une
taxe additionnelle à la taxe professionnelle.
Cet amendement a deux objets : premièrement, améliorer la rédaction de
l'article 1601 du code général des impôts qui autorise la perception de la taxe
pour frais ; deuxièmement, ramener de 75 % à 60 % du produit fixe la majoration
exceptionnelle du droit additionnel qui peut être autorisée pour financer les
investissements prévus par des conventions conclues avec l'Etat.
Sans compromettre l'amélioration d'ensemble apportée par l'Assemblée nationale
à la rédaction de l'article 1601 du code général des impôts, la commission des
finances vous propose, mes chers collègues, de lui apporter deux corrections
mineures.
Si la première peut paraître superflue, elle aurait néanmoins l'avantage de
rassurer les chambres de métiers. Elle tend à préciser, ce qui va sans dire
s'agissant d'une disposition du code général des impôts, que le montant maximal
du droit fixe par ressortissant peut être révisé lors du vote de la loi de
finances.
Cette précision est peut-être inutile, mais elle figurait dans l'article 1601
du code général des impôts. Elle devait bien avoir un fondement !
La seconde modification prévue par l'amendement n° II-8 tend à revenir au taux
antérieur de 60 % du produit du droit fixe, au lieu de 75 %, pour le plafond de
la majoration exceptionnelle du droit additionnel qui est autorisée pour
l'exécution d'actions ou de programmes prévus par des conventions conclues avec
l'Etat. Cette majoration frapperait, semble-t-il, en priorité les
ressortissants des chambres de métiers dont le produit de droit fixe diminue,
c'est-à-dire les circonscriptions dans lesquelles l'artisanat n'est pas
a
priori
le plus prospère.
La commission des finances estime qu'il serait préférable, dans ces
conditions, de faciliter autrement que par une augmentation des cotisations des
intéressés le financement des investissements prévus : il faudrait faire
davantage appel à la solidarité nationale au moyen de subventions ou d'un
mécanisme de péréquation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
En ce qui concerne le premier alinéa de l'amendement,
il est vrai que la loi de finances peut modifier chaque année l'article 1601 du
code général des impôts. Par conséquent, je ne peux y être ni favorable ni
défavorable ; je ne vois pas l'intérêt de cette mesure. J'ignore la raison pour
laquelle les chambres de métiers s'inquiètent. J'ai donc du mal à vous
répondre.
M. René Ballayer,
rapporteur spécial.
Cela existait avant !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Pour ce qui est du second alinéa, c'est le rapport du
député Chouat qui a mis en lumière la nécessité d'offrir aux chambres de
métiers, parce qu'elles le demandent, la possibilité d'avoir plus de ressources
si elles mènent des actions importantes dans le domaine de la création ou du
développement des entreprises.
Je vous rejoins totalement en ce qui concerne la péréquation, monsieur le
rapporteur spécial. Si l'assemblée permanente des chambres de métiers pouvait
elle-même instituer une péréquation entre les chambres de métiers, j'en serais
ravie. Mais cela ne correspond absolument pas à une demande actuelle des
chambres de métiers, même si elles savent que, un jour ou l'autre, elles auront
à poser le problème en ces termes.
Aujourd'hui, une majoration supérieure à 60 % n'est réclamée que par une
trentaine de chambres de métiers sur les cent deux qui pourraient en exprimer
la demande. Par conséquent, les cas de conventions retenant des taux supérieurs
à 60 % seraient rares. La rédaction retenue par l'Assemblée nationale me semble
convenir à la demande actuelle des chambres de métiers. Une réforme plus
profonde du système de péréquation pourrait être envisagée, mais cela
nécessiterait un autre travail. Je ne peux donc émettre qu'un avis défavorable
sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 69, ainsi modifié.
(L'article 69 est adopté.)
Article 69
bis
M. le président.
« Art. 69
bis
. - Après l'article 1601 du code général des impôts, sont
insérés deux articles 1601 A et 1601 B ainsi rédigés :
«
Art. 1601 A.
- Un droit égal à 10 % du montant maximum du droit fixe
tel qu'il est fixé à l'article 1601 est perçu au profit d'un fonds destiné à
financer des actions de promotion et de communication au profit de l'artisanat.
Il est recouvré dans les mêmes conditions que la taxe pour frais de chambres de
métiers. Les ressources de ce fonds sont gérées par un établissement public à
caractère administratif créé à cet effet par décret en Conseil d'Etat.
«
Art. 1601 B.
- Une contribution est perçue en vue de financer des
actions de formation continue et est affectée conformément aux dispositions des
articles 4 et 5 de la loi n° 82-1091 du 23 décembre 1982 relative à la
formation professionnelle des artisans. Elle est égale à 0,29 % du montant
annuel du plafond de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année
d'imposition et est recouvrée dans les mêmes conditions que la taxe pour frais
de chambres de métiers.
« Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, cette
contribution est réduite de moitié et est intégralement affectée à
l'établissement public visé à l'article 5 de la loi n° 82-1091 du 23 décembre
1982 précitée. »
Par amendement n° II-15 rectifié
bis,
MM. Ostermann, Eckenspieller,
Grignon, Haenel, Hoeffel, Lorrain, Richert et Bohl proposent :
A. - De compléter
in fine
le texte présenté par cet article pour
l'article 1601 A du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article n'est pas applicable dans les départements du Bas-Rhin,
du Haut-Rhin et de la Moselle.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de
compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'absence de perception du
droit destiné au fonds de promotion et de communication dans les départements
du Bas-Rhin, du Haut-Rhin, de la Moselle est compensée par la majoration, à due
concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
C. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. -
».
La parole est à M. Bohl.
M. André Bohl.
Cet amendement a pour objet d'établir une certaine cohérence dans la rédaction
des articles 69 et 69
bis
. En effet, l'article 1601 du code général des
impôts auquel nous venons de faire allusion n'est pas applicable dans les
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
Or l'article 1601 A fait référence à cet article 1601 pour fixer une taxe de
10 %, et il n'est pas mentionné que ledit article n'est pas applicable dans les
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
Outre ce besoin de clarification, l'article 69
bis
vise à supprimer
l'exonération du droit destiné au fonds de promotion et de communication dont
les ressortissants des chambres de métiers d'Alsace et de Moselle n'étaient pas
contributaires jusqu'à présent. Cette exonération tient aux particularités du
droit local qui régit l'artisanat. Les artisans non affiliés à un groupement ne
participent pas aux élections des chambres de métiers.
Par ailleurs, les titres de « maître » ne sont pas les mêmes en Alsace et en
Moselle que dans le reste du pays. Il faut savoir que les titres de « maître
artisan » ou de « maître d'apprentissage confirmé » n'existent pas en Alsace et
en Moselle. En revanche, il y a des maîtres boulangers, des maîtres pâtissiers,
des « maîtres en son métier ».
Ainsi, une campagne de presse incitant les artisans formateurs à revendiquer
le titre de « maître d'apprentissage confirmé » et à s'adresser à la chambre de
métiers à cet effet n'aurait non seulement aucune utilité, mais ne ferait que
gêner l'activité des chambres de métiers d'Alsace et de Moselle.
De même, un appel à voter, dans le cadre des élections à la chambre de
métiers, passé sur les ondes sur la base des modalités nationales, ne peut
qu'induire en erreur les artisans du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle
qui votent non pas au suffrage universel direct, mais au sein de leurs
corporations, selon des règles spécifiques.
La chambre de métiers d'Alsace ainsi que celle de Moselle disposent, en outre,
d'un budget « communication » propre, qui leur permet de faire face à leurs
besoins en la matière.
Le présent amendement vise, par conséquent, à supprimer la mise à contribution
des artisans d'Alsace et de Moselle au fonds national de promotion et de
communication, et à maintenir ainsi les dispositions en vigueur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. René Ballayer,
rapporteur spécial.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Je suis totalement défavorable à cet amendement.
En effet, aucune des particularités des chambres de métiers d'Alsace n'est
remise en cause. Le fonds de promotion institué par la loi de 1996 tend à faire
en sorte que tous les artisans de France participent à une grande campagne pour
la revitalisation de l'artisanat, de l'apprentissage, des métiers, des
savoir-faire et de la technologie. Vous l'avez tous demandé !
Ces campagnes sont faites à la télévision, laquelle est reçue dans toutes les
régions de France. Je trouverais donc injuste - je vous le dis très honnêtement
- que tous les corps de métiers, sur l'ensemble du territoire, ne participent
pas à la campagne « L'artisanat, première entreprise de France », qui est payée
entièrement par les artisans, même si l'Etat apporte sa contribution via la
mise à disposition des personnels, et qu'une partie des artisans n'apportent
pas leur contribution financière. On en appelle simplement à la solidarité pour
la promotion de l'artisanat !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-15 rectifié
bis
.
M. André Bohl.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bohl.
M. André Bohl.
Madame la secrétaire d'Etat, nous avons suffisamment de difficultés avec nos
particularismes. En Moselle, voilà quelques années, la création de la chambre
régionale de Lorraine a engendré des drames, et il nous a fallu quatre ans pour
les aplanir.
Nous sommes confrontés à des problèmes particuliers, vous le savez très bien !
Vous nous avez appelés tout à l'heure à faire une promotion pour l'euro. Nous
sommes dans des conditions tout à fait spécifiques en matière d'artisanat.
C'est la raison pour laquelle je suis obligé de maintenir cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-15 rectifié
bis
, repoussé par le
Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 69
bis,
ainsi modifié.
(L'article 69
bis
est adopté.)
Articles 69
ter
et 69
quater
M. le président.
« Art. 69
ter
. - I. - Il est inséré, dans le livre des procédures
fiscales, un article L. 135 J ainsi rédigé :
«
Art. L. 135 J.
- Afin de procéder à des rapprochements avec le
répertoire des métiers, les chambres de métiers peuvent se faire communiquer
par l'administration fiscale la liste nonimative des assujettis à la taxe pour
frais de chambres de métiers.
« Les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 135 B sont applicables
aux informations ainsi transmises. »
« II. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 113 du livre des procédures
fiscales, après la référence : "L. 135 I", est insérée la référence : "L. 135
J". » -
(Adopté.)
« Art. 69
quater
. - Le E de l'article 44 de la loi de finances pour
1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« Ce rapport présente, en outre, les conséquences de la réforme sur la
répartition de la taxe pour frais de chambres de métiers et de l'imposition
additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit des chambres de
commerce et d'industrie entre l'ensemble de leurs redevables. » -
(Adopté.)
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'économie, les finances et l'industrie : III. - Petites et moyennes
entreprises, commerce et artisanat.
Commerce extérieur
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le commerce extérieur.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour commencer, je rappellerai que le
commerce extérieur de la France a dégagé un excédent de 148 milliards de francs
en 1998 et qu'il témoigne à nouveau d'un dynamisme remarquable depuis cet
été.
La bonne performance de notre commerce extérieur dans un contexte de
dégradation de la conjoncture internationale et de reprise de la consommation
intérieure souligne le caractère structurel de l'exédent que nous connaissons
depuis plusieurs années.
Dans le projet de loi de finances pour 2000, les crédits affectés au commerce
extérieur s'élèvent à 3,3 milliards de francs en crédits de paiement ; ils sont
en augmentation de 12,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999.
Les autorisations de programme sont, quant à elles, en diminution de 11 %, soit
4,2 milliards de francs.
Ce projet de budget du commerce extérieur s'inscrit dans la continuité et
poursuit la mise en oeuvre des orientations définies depuis plusieurs
années.
Quatre caractéristiques principales doivent être soulignées, à savoir la
stabilisation des moyens alloués au réseau de l'expansion économique, un appui
financier accru aux petites et moyennes entreprises, la poursuite de
l'adaptation des procédures financières d'appui au commerce extérieur et,
enfin, un changement important de la nomenclature budgétaire, avec le
basculement d'une partie des chapitres inscrits sur le budget des charges
communes sur le fascicule de l'économie, finances et industrie, ainsi que le
regroupement des crédits de l'expansion économique sur quatre chapitres
budgétaires. Il faut reconnaître que votre budget, monsieur le secrétaire
d'Etat, n'en est pas rendu plus limpide pour autant, même si cette nouvelle
nomenclature va dans le sens d'une simplification.
Les crédits destinés aux services de l'expansion économique sont, avec 1,43
milliard de francs, en hausse de 9,1 % par rapport à la loi de finances
initiale pour 1999. Cette augmentation s'explique par une croissance importante
des dépenses en personnel, malgré la suppression de six nouveaux emplois. Il
convient de rappeler que la direction des relations économiques extérieures a
perdu plus de 20 % de ses effectifs depuis 1991 et a procédé à des
redéploiements importants en direction des pays émergents. La politique de
diminution des effectifs me semble cependant devoir aujourd'hui atteindre ses
limites.
Les efforts de la direction des relations économiques extérieures pour adapter
son réseau de postes à l'étranger se sont accompagnés de la modernisation des
moyens d'information, de mise en réseau et de communication, qui ont permis,
avec l'introduction de la facturation des prestations, une offre de services
standardisée et plus conforme aux attentes des entreprises françaises.
Plusieurs mesures marquent encore cette année votre volonté d'améliorer et de
garantir le service rendu aux entreprises, notamment la certification ISO 9001
de l'ensemble des postes d'expansion économique.
L'augmentation de vos crédits est en partie liée à une dotation exceptionnelle
de 115 millions de francs destinée à financer le pavillon français à
l'exposition universelle de Hanovre, qui aura lieu entre mars et octobre 2000,
pavillon dont le coût total s'élève à 150 millions de francs. Je souhaite
souligner que ce projet a été conduit avec un réel souci de maîtrise des coûts,
car le bâtiment construit sera réutilisé par une entreprise française, après
l'exposition.
Les crédits affectés aux organismes d'appui au commerce extérieur sont en
légère baisse, passant de 245 millions de francs à 242 millions de francs. La
dotation du centre français du commerce extérieur, le CFCE, passe de 128
millions de francs à 125 millions de francs, sans entraîner une diminution de
la capacité d'action de cet organisme dont la restructuration a permis de
dégager des économies importantes.
Les crédits de l'agence pour la promotion internationale des technologies et
des entreprises françaises, ou CFME-ACTIM, sont reconduits à 116,4 millions de
francs, pour la deuxième année consécutive. Cette dotation devrait,
semble-t-il, permettre de maintenir le niveau d'activité de cet organisme,
alors que le montant diminue en francs constants depuis deux ans. Or, pour ce
qui est de leur présence dans les manifestations commerciales internationales,
les entreprises françaises, en particulier les PME, souffrent de la comparaison
avec leurs homologues de nos principaux voisins européens.
Le projet de loi de finances rectificative prévoit un abondement de la
dotation du CFME-ACTIM, afin de prendre en compte les difficultés financières
rencontrées cette année, du fait d'une diminution du nombre de volontaires du
service national en entreprise au cours du premier semestre de 1999. Monsieur
le secrétaire d'Etat, quelles sont les garanties d'un maintien du niveau
d'activité du CFME-ACTIM pour les prochaines années, alors qu'une diminution
des ressources issues de la gestion des volontaires du service national sera
inévitable ?
La restructuration des organismes d'appui au commerce extérieur a porté ses
fruits, mais doit maintenant se prolonger avec le regroupement physique du
centre français du commerce extérieur, et du CFME-ACTIM, qui est envisagé
depuis quatre ans. Une installation dans la zone dite « Seine-Rive gauche »,
qui est une hypothèse, présenterait l'avantage d'une proximité avec les
services de la rue de Bercy. Elle devrait permettre des économies de
fonctionnement et la poursuite du développement des synergies entre les deux
organismes. Cette occasion doit être saisie, car l'accès à l'information et la
simplification des procédures sont des conditions majeures du développement de
la dimension internationale de nos PME.
Les efforts pour inciter les petites entreprises à développer une stratégie
d'exportation commencent tout d'abord au plan local. Le montant des crédits du
commerce extérieur inscrits dans les contrats de plan Etat-région a été fixé à
352 millions de francs, en augmentation de près de 30 % par rapport aux
précédents contrats de plan. Ces aides s'adressent aux PME et constituent une
première étape, essentielle, dans leur développement international. Je ne peux
que me féliciter de cette progression, moi qui avais souligné, l'année passée,
l'insuffisance de ces crédits.
La priorité accordée aux PME constitue un engagement fort, qui nécessite un
élargissement de la gamme des services proposés aux entreprises ainsi que des
efforts importants en matière d'accès à l'information.
La mise en place de l'opération « le Fil de l'export », pilotée par le centre
français du commerce extérieur, semble répondre à une demande de la part des
entreprises, puisque quelque cent appels sont traités chaque jour. Le
développement des sites Internet consacrés au commerce extérieur permet
également aux entreprises de disposer rapidement d'éléments d'information sur
un pays donné.
D'autres mesures ont été décidées pour adapter l'action du réseau de
l'expansion économique. La création d'une « mission PME » à la direction des
relations économiques extérieures et de « correspondants PME » dans les postes
d'expansion économique permet aux petites entreprises de disposer d'un contact
spécialisé et bien identifié dans chaque poste.
Des expériences intéressantes sont également menées, notamment la prospection
des petites entreprises par les directions régionales du commerce extérieur,
les DRCE ainsi que le portage des projets des PME par des grandes entreprises
françaises. Avec la réorganisation des moyens en faveur des PME,
l'administration ne doit plus seulement répondre aux demandes des entreprises
mais également susciter leurs vocations à l'international.
Concernant les procédures financières de soutien à l'exportation, il convient
de souligner la création d'un volet garantissant les entreprises contre les
risques économiques dans le cadre du fonds d'études et d'aide au secteur privé,
le FASEP. Le fonds de garantie « développement international » de la Banque de
développement des PME a également été réformé et recentré sur les petites et
moyennes entreprises.
L'ensemble des procédures de soutien financier à l'exportation est marqué par
une réorientation en direction des pays solvables, à la suite de la crise
financière des pays émergents. Dans le même temps, les crédits en faveur de
l'assurance-prospection passent de 265 millions de francs à 290 millions de
francs, ce dont je ne peux que me réjouir étant donné l'effet de levier
important de ce dispositif.
Les prêts du Trésor, dont les montants n'ont cessé de diminuer au cours des
dernières années, ont enfin été réformés autour de la « réserve pays émergents
» et sont désormais destinés à aider des projets spécifiques de développement,
sans qu'une répartition des crédits par pays soit réalisée au préalable.
Pour conclure, il convient de souligner que, après la mise en oeuvre de trois
plans triennaux successifs de suppression d'emplois, la direction des relations
économiques extérieures, la DREE, s'engage désormais dans une démarche portant
sur l'ensemble de ses missions pour la période 2000-2002, à travers un contrat
d'objectifs passé avec la direction du budget. Ce contrat prévoit la
modernisation des outils de gestion, avec la création d'une dotation globale
qui permettra une optimisation de l'utilisation des crédits.
Vos services, monsieur le secrétaire d'Etat, sont depuis plusieurs années un
laboratoire d'expérimentation des nouvelles politiques de gestion des finances
publiques, qui se traduisent par des économies substantielles et par une
souplesse plus importante dans l'utilisation des crédits.
La commission des finances a donné un avis défavorable à l'ensemble des
crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Pourtant,
je crois pouvoir affirmer ici qu'elle ne saurait désapprouver les initiatives
fortes que vous prenez, monsieur le secrétaire d'Etat, pour optimiser la
gestion de vos crédits. Pour ma part, je considère que le projet de budget du
commerce extérieur est positif, car il prépare l'avenir et témoigne d'une
volonté d'innovation et de modernisation au service de nos entreprises.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du groupe du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Souplet,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
j'ai écouté avec beaucoup d'attention l'analyse budgétaire faite par notre
collègue rapporteur de la commission des finances, et je voudrais, autant que
faire se peut, éviter les redites. C'est pourquoi je centrerai mon propos sur
certains aspects de la politique en faveur du commerce extérieur qui ont attiré
l'attention de la commission des affaires économiques.
Si, jusqu'en 1998, la croissance mondiale a été exceptionnellement dynamique,
depuis, les entreprises françaises ont été confrontées à un environnement
mondial déstabilisé. L'excédent commercial de la France s'en ressent : de 173,5
milliards de francs en 1997, il est passé à 148 milliards de francs en 1998 et
devrait s'établir à près de 110 milliards de francs en 1999, soit une
diminution de plus de 25 % ! On nous dit que la compétitivité des produits
français est aujourd'hui structurelle, et je veux bien le croire ; ce recul est
néanmoins, pour la commission des affaires économiques, une source
d'inquiétude.
Cette situation doit, en effet, inciter le Gouvernement à réduire les coûts de
production des entreprises ou, tout du moins, à ne pas leur imposer de
contraintes supplémentaires. De ce point de vue, la contribution des 35 heures
à notre compétitivité me semble très discutable.
Cette situation suppose également que l'on accroisse l'efficacité de la
politique de soutien aux exportations dont nous avons à examiner ici la
traduction budgétaire.
Je voudrais, avant d'aborder ce budget, dire également un mot de la conférence
de Seattle. Je suis convaincu, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'Union
européenne a eu raison d'aborder cette conférence avec des objectifs ambitieux.
Nous avons toujours tout à gagner à un accroissement et à une meilleure
régulation des échanges internationaux. Cela étant, il ne fallait pas nous
laisser enfermer dans une négociation sur les seuls secteurs de l'agriculture
et des services. Dans cette perspective, un report me paraît préférable à un
mauvais accord. D'après les médias, car les seules informations que nous ayons
eues en France venaient d'eux, les Etats-Unis ont été « jusqu'au-boutistes ».
Le président, en tout cas, pourra dire demain aux électeurs qu'ils ont bien
résisté et qu'ils n'ont rien concédé !
(Sourires.)
Mais les menaces de
rétorsions ne sont pas des arguments qui incitent les partenaires à lâcher du
lest.
Quelles sont, aujourd'hui, les perspectives pour une reprise des négociations
? J'imagine, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous allez nous éclairer sur ce
point.
La commission des affaires économiques a, lors de l'examen de ce budget, tout
d'abord relevé des motifs de satisfaction, par exemple, la poursuite de la
réforme des organismes d'appui au commerce extérieur.
Après le regroupement, au sein d'une structure unique, du comité français des
manifestations économiques à l'étranger, le CFME, et de l'agence pour la
coopération technique, industrielle et économique, l'ACTIM, le Gouvernement a
procédé à un recentrage de l'activité du CFCE et à un renforcement de ses liens
avec les autres organismes de soutien au commerce extérieur, et la commission
s'en félicite. Cette réforme permettra, en effet, de simplifier l'accès des
entreprises aux soutien public.
En revanche, la commission regrette que la fusion des trois organismes ne soit
pas achevée. Cela fait près de quatre ans que la réforme a été lancée.
J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous allons bientôt aboutir.
A côté des motifs de satisfaction, certains dossier suscitent des
interrogations. C'est le cas de la mise en place du volontariat civil qui
remplacera le service militaire.
Comme vous le savez, les coopérants du service national constituaient un
instrument important, tant pour la formation des jeunes générations à
l'international que pour l'implantation des entreprises françaises à
l'étranger. Il est essentiel que les pouvoirs publics se mobilisent pour
promouvoir ce volontariat à l'international et qu'ils se donnent les moyens
financiers de rémunérer correctement les volontaires.
Le nombre de ces volontaires sera-t-il suffisant ? Nul ne le sait, ce qui est
pour les PME, pour les postes d'expansion économiques et pour l'ACTIM - ses
recettes en dépendent - une source d'inquiétude.
J'en viens, mes chers collègues, à la politique de soutien au développement
international des petites et moyennes entreprises, qui constitue, pour la
commission, un motif de contrariété, et ce pour trois raisons.
Premièrement, la proportion des PME françaises qui sont engagées de façon
durable dans une stratégie de développement international reste encore trop
faible. Les comparaisons internationales en témoignent, en particulier avec nos
voisins.
Deuxièmement, le réseau d'appui aux exportations au niveau régional est,
certes, apprécié des PME qui l'utilisent, mais reste encore trop peu connu. Ce
réseau gagnerait donc, aujourd'hui, à être plus accessible et mieux coordonné.
Le regroupement des différentes directions régionales du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie peut être, à cet égard, une bonne
chose, à condition que la préoccupation du commerce extérieur soit, dans cette
réforme, bien prise en compte.
Troisièmement, la commission regrette que la diminution continue depuis dix
ans des crédits consacrés aux grands contrats ne profite pas aux dispositifs de
soutien aux PME.
Le budget du commerce extérieur a diminué, depuis 1991, de 80 %. C'est
considérable. Dans le même temps, les crédits alloués aux dispositifs en faveur
de l'information des PME ou de leur présence dans les foires internationales
n'ont guère progressé. Il est vrai que, pendant la même période, le solde du
commerce extérieur est passé de moins 64 milliards de francs à plus 148
milliards de francs, ce qui, pour certains, jette un doute sur l'efficacité de
l'attribution de ces crédits.
Compte tenu des observations qui précèdent, partagée entre des motifs de
satisfaction et de contrariété, la commission des affaires économiques et du
Plan a souhaité s'en remettre à la sagesse du Sénat sur l'adoption des crédit
du commerce extérieur pour 2000.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 15 minutes ;
Groupe socialiste, 12 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 10 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe,
5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est àM. Ferrand.
M. André Ferrand.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
deux excellents rapports que nous venons d'entendre couvrent l'ensemble de ce
qu'il faut retenir et commenter s'agissant du très important budget du commerce
extérieur.
Vous l'aurez compris, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est en termes d'enjeux
pour notre pays, et non pas, bien sûr, sur le plan de son enveloppe financière,
en réalité relativement modeste, que je considère votre budget comme très
important.
Je souhaite donc limiter autant que possible les redondances et concentrer mon
intervention sur quelques points auxquels il faut accorder la priorité, comme
me l'ont montré mes fréquents déplacements à l'étranger et mes rencontres avec
les acteurs engagés dans la bataille de l'internationalisation de notre
économie.
Au nom du groupe des Républicains et Indépendants, je voudrais, tout d'abord,
constater, pour vous en féliciter, que vous êtes, malgré la déconvenue de
Seattle, un secrétaire d'Etat heureux. En effet, l'économie internationale est
actuellement porteuse et la situation en France est favorable. Notre pays
semble s'être engagé résolument dans la bonne voie. Dans la foulée des succès
de nos grandes entreprises, les PME commencent à trouver le chemin de
l'étranger ; nos jeunes s'enhardissent et, grâce aux stages et à la
généralisation des voyages, à la « culture CSNE » - coopérant du service
national en entreprise - et aussi « ONG » - organisation non gouvernementale -
ils acquièrent le goût de l'expatriation ; nos cadres, nos techniciens
deviennent de plus en plus naturellement mobiles. Nous comblons à grands pas
notre retard initial en ce qui concerne les nouvelles technologies, domaine
dans lequel nos spécialistes sont appréciés sur le marché mondial. Ainsi, nos
échanges avec le reste du monde sont devenus structurellement excédentaires, et
au niveau tant sectoriel que géographique les soldes tendent vers des résultats
satisfaisants.
Il faut donc, monsieur le secrétaire d'Etat - je suis d'ailleurs certain que
vous en êtes convaincu - profiter de cet ensemble de facteurs positifs pour
accélérer la vitesse de ce cercle vertueux. Nous le savons, nous sommes loin
d'avoir le pied au plancher. Il existe dans notre pays un tel réservoir
d'imagination, d'énergie et aussi, car cela est nécessaire, de possibilités
financières que nous avons le devoir de faire encore beaucoup mieux.
Comment y parvenir ? C'est, bien sûr, la question, J'organiserai ma réponse
autour de trois thèmes, en évoquant pour chacun d'eux non pas tous les sujets
qui en relèvent, même s'il en est d'importants, mais seulement ceux qu'il m'a
été donné de connaître directement.
D'abord, il faut faire en sorte d'accélérer l'internationalisation des
mentalités. Ensuite, il faut promouvoir une excellence française en matière de
nouvelles technologies de l'information et des communications, ainsi que dans
les biotechnologies. Enfin, il faut poursuivre la modernisation du dispositif
d'appui à l'internationalisation de notre économie.
S'agissant du premier point, c'est-à-dire l'évolution de notre culture
nationale vers l'ouverture sur le monde, j'ai évoqué tout à l'heure le rôle que
l'institution des coopérants du service national à l'étranger, et plus
particulièrement en entreprise, avait joué sur ce plan. Nous espérons tous que
le projet de loi concernant le volontariat civil, que nous avons voté ici même
à l'unanimité le 13 octobre dernier, sera très prochainement adopté
définitivement afin que ce texte soit promulgué et que les textes d'application
soient publiés dès que possible, car il y a urgence.
Nous savons combien, afin d'assurer le succès de ce nouveau dispositif, il
sera important de le rendre attractif et de bien et rapidement communiquer.
Mais déjà, et cela a été dit, la diminution du nombre des CSNE a eu pour effet
- secondaire, il est vrai, mais indirectement gênant pour l'aide aux PME - de
diminuer les recettes du CFME-ACTIM qui les gère et qui est rémunéré pour cela
par les entreprises.
Or, les PME ont besoin du CFME-ACTIM, en particulier pour les aider à
participer aux salons, foires et expositions, où elles doivent être
présentes.
Le CFME-ACTIM doit donc disposer des moyens permettant d'accomplir cette
mission essentielle pour laquelle, déjà, les crédits de base mis à sa
disposition lui sont chichement comptés.
On sait que, en 1999, 5 millions de francs ont été inscrits dans la loi de
finances rectificative pour compenser cette perte de recettes. Il est
nécessaire qu'en 2000, si le besoin s'en faisait sentir, un même scénario soit
mis en place.
Enfin, il me semble essentiel que tous les acteurs publics et privés de notre
commerce extérieur, qu'ils soient en France ou à l'étranger, trouvent les
moyens de multiplier les contacts directs entre, d'une part, notre système
d'appui à l'étranger et, d'autre part, le vivier des PME qui ont leur siège
dans les régions, afin de les sensibiliser et de les engager à
s'internationaliser.
Le deuxième point de mon intervention concerne la promotion de l'excellence
française dans le secteur des nouvelles technologies de l'information et de la
communication, ainsi que dans le domaine, non moins important, des
biotechnologies.
Je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que, au sein du Gouvernement,
plusieurs de vos collègues sont sans doute plus que vous responsables de ce
secteur vital pour l'avenir. Mais il est essentiel que le secrétaire d'Etat au
commerce extérieur, ainsi que ses services, soit partie prenante.
Il nous appartient de mettre en place le cadre financier, fiscal et social
qui, dans le respect des valeurs de la République, optimisera les conditions
dans lesquelles pourront s'épanouir tous les talents et se développer les
entreprises les plus innovantes et les plus conquérantes.
Ainsi, les succès français dans ce domaine, souvent remarquables, profiteront
à notre pays, où ils créeront des emplois et tireront la croissance.
J'ai gardé pour la fin, monsieur le secrétaire d'Etat, l'évocation du grand
chantier de la modernisation de notre système d'appui à l'internationalisation
de notre économie et je commencerai, une fois n'est pas coutume, par des
compliments.
Ils concernent la poursuite, menée avec constance, par la DREE, la direction
des relations économiques extérieures, de l'opération de modernisation de son
réseau engagée voilà dix ans. Depuis dix ans, on a fait mieux avec moins de
personnel, que l'on a redéployé ; on a stabilisé les dotations budgétaires et
on s'attache à mieux servir les entreprises clientes ; on développe des projets
: l'Intranet, la marche vers la qualité totale avec la certification ISO 9001
pour les postes d'expansion économique, puis, j'imagine pour l'administration
centrale, voire demain, peut-être, des indicateurs de performance - pourquoi
pas ? - du
benchmarking ?
La DREE gérée comme une entreprise ? Ce serait à coup sûr un exemple pour
l'ensemble de nos administrations publiques !
Il resterait alors à concevoir un système de rémunération lié aux résultats,
afin de soutenir l'effort entrepris pour mettre progressivement en place sur le
terrain des équipes enthousiastes et très professionnelles.
Le chantier de simplification de la lecture du système des aides et d'une
meilleure communication en direction des PME afin qu'elles obtiennent
facilement les informations dont elles ont besoin, en particulier dans les
régions, le mythe du « guichet unique », a débouché sur le démarrage récent de
l'opération « Fil de l'export ». Il semble que les premiers résultats de cette
expérience digne d'encouragements ne soient pas encore à la hauteur des
espérances de ceux qui l'ont engagée. Sans doute faudra-t-il adapter, corriger,
améliorer et, surtout, faire connaître, communiquer. Le centre français du
commerce extérieur doit avoir les moyens financiers d'une telle action.
Le CFME et l'ACTIM se sont rapprochés. On attend maintenant qu'ils fassent de
même avec le CFCE dans de nouveaux locaux. Cela aussi va dans le sens de la
simplification, donc de la modernisation. Pouvez-vous nous confirmer, monsieur
le secrétaire d'Etat, que ce projet progresse d'une manière satisfaisante ?
A l'étranger, monsieur le secrétaire d'Etat, notre dispositif ne fonctionne
jamais aussi bien que quand existe une réelle et harmonieuse synergie entre
acteurs des secteurs public et privé, mais aussi entre les « autres » services
de l'ambassade et le poste d'expansion économique.
Cela fonctionne évidemment mieux quand les personnes concernées ont des atomes
crochus, mais un des moyens simples qui facilite cette harmonie est de faire en
sorte que tous nos services, qu'ils relèvent de Bercy ou du Quai d'Orsay,
soient regroupés dans les mêmes locaux. C'est là une excellente manière de
montrer à nos interlocuteurs étrangers notre cohésion dans l'action. Cela rend
également plus aisée la coopération, qui devient de plus en plus nécessaire,
entre les conseillers commerciaux et les conseillers de coopération et d'action
culturelle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mon ambition a été, je vous l'ai dit, de
profiter de ce moment privilégié qu'est l'examen de votre budget pour vous
demander de bien vouloir porter vos efforts sur l'ensemble de tous ces points
qui me paraissent importants. J'espère vivement avoir été entendu.
Il nous faut plus de PME à l'international pour avoir plus de Français qui, à
travers l'Europe et le monde, portent les valeurs et la culture d'une
mondialisation que j'aimerais qualifier de mondialisation « à la française »,
si j'étais sûr que cette formulation évoque pour tous la hauteur des principes
auxquels je souhaite me référer.
Je terminerai par une invitation.
Vous nous avez informés, lors de votre audition par la commission des affaires
économiques, de votre projet d'organiser au printemps prochain, ai-je compris,
un « colloque pour l'emploi français à l'étranger ». Je m'en félicite vivement,
car c'est une excellente manière de développer chez nous cette ouverture vers
l'international que nous appelons de nos voeux.
Avec l'assentiment, j'en suis sûr, de tous mes collègues sénateurs des
Français établis hors de France et en plein accord avec la présidence du Sénat,
nous vous proposons de nous associer à votre initiative et à l'organisation de
cette manifestation qui pourrait, si vous le vouliez, avoir lieu ici même au
Palais du Luxembourg, où nous serions honorés et heureux de vous accueillir.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en
1998, pour la septième année consécutive, la France a dégagé un excédent
commercial, qui s'est établi à 145 milliards, malgré une baisse de la demande
mondiale due aux crises asiatique et russe. L'excédent français reste donc
important, bien qu'en baisse sensible par rapport au record de 173 milliards de
francs en 1997.
Faut-il pour autant réduire le déjà modeste budget du commerce extérieur, dont
les autorisations de programme baisseront de 11 %, pour s'établir à 4,2
milliards de francs en 2000 ?
Plusieurs raisons militent pour ne pas baisser la garde budgétaire malgré les
succès certains de notre balance commerciale.
Notre pays est le quatrième exportateur mondial et nos performances
proviennent surtout des secteurs de l'agroalimentaire et des services. Dans les
produits les plus dynamiques pour l'avenir, les télécommunications et
l'informatique, nous sommes encore faibles.
Plus des deux tiers de nos échanges s'effectuent avec les pays de l'Union
européenne, et nos parts de marché vont en se réduisant à mesure que les
distances avec la France s'accroissent. Un effort doit être fait pour
intensifier les échanges avec l'Asie, qui représente la moitié de la population
mondiale, avec les Etats-Unis pour leur bonne gouvernance, également avec les
pays d'Amérique latine où notre influence culturelle est grande. Notre commerce
reste très insuffisant avec le Mexique en particulier, où les Etats-Unis se
taillent la part du lion, soit 80 %, à la suite de l'Accord de libre échange
nord-américain, l'ALENA. Mais le nouvel accord signé le 22 novembre entre
l'Union européenne et le Mexique devrait permettre de redresser la situation
après sa ratification par les deux parties.
La situation monétaire actuelle est favorable, avec des taux fixes dans
l'espace communautaire de l'Euroland et, heureuse surprise ! une parité quasi
équivalente entre l'euro et le dollar, qui constitue un atout pour nos
exportations hors Union européenne. Cette situation favorable pourrait ne pas
perdurer.
D'importants changements interviennent dans la conduite du commerce
international, avec de nouvelles préoccupations : l'environnement, la santé
publique et les mesures sociales. C'est la société civile qui avait fait
capoter au début de l'année les négociations commerciales de l'AMI, l'accord
multilatéral sur l'investissement ; son influence a été également considérable
à Seattle. Dans l'échec de l'ouverture du nouveau cycle de l'Organisation
mondiale du commerce, l'OMC, un élément positif est apparu, la cohésion de
l'Union européenne qui, en parlant d'une seule voix, a constitué un véritable
contrepoids à l'influence des Etats-Unis. La reprise des négociations
multilatérales est, certes, souhaitable, mais les équilibres sont d'ores et
déjà bien différents.
Enfin, l'instabilité de la conjoncture internationale ainsi que l'important
ralentissement du commerce mondial, dont la progression a été réduite à 3,5 %,
contre 10 % en 1997, doivent aussi être pris en compte.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement doit rester vigilant.
Je terminerai en posant deux questions auxquelles nos deux rapporteurs et le
précédent intervenant se sont déjà référés.
La première est relative aux volontaires civils pour la coopération
internationale. Peut-on espérer, monsieur le secrétaire d'Etat, que la loi sur
le statut de ces volontaires sera prochainement votée par l'Assemblée nationale
et que les décrets d'application seront ensuite rapidement publiés ?
La seconde concerne tous les différents organismes de soutien au commerce
extérieur. Un rapprochement CFME-ACTIM a déjà eu lieu. Mais un véritable
regroupement dans des installations communes s'effectuera-t-il prochainement
?
En conclusion, je voterai le petit budget de 4,2 milliards de francs du
commerce extérieur, persuadé que son influence sur le chômage est déterminante
et que l'expansion de nos échanges extérieurs constitue la meilleure façon de
réduire l'énorme budget de soutien à l'emploi, qui se montera, lui, à 122
milliards de francs en l'an 2000.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
plus personne n'ignore aujourd'hui l'objet de la conférence ministérielle de
l'Organisation mondiale du commerce, qui s'est achevée voilà quelques jours à
Seattle. Tous les projecteurs de la planète se sont en effet tournés vers
l'Etat de Washington, contribuant ainsi à la mise en débat public des questions
liées au commerce mondial.
Même si la société civile est plutôt critique à l'égard de la mondialisation,
peut-on lui reprocher de vouloir tenter de s'approprier un débat qui doit,
d'une certaine façon, engager son avenir ? Je ne le pense pas.
Toujours est-il que les 135 pays membres de l'OMC se sont retrouvés afin
d'élaborer le programme du prochain cycle de négociations, dit « cycle du
Millénaire ».
Il n'était pas nécessaire d'être un voyant extralucide pour être conscient de
la difficulté de la tâche, dès lors que les intentions des deux plus importants
protagonistes, l'Europe et les Etats-Unis, étaient d'entrée de jeu
divergentes.
D'un côté, l'Union européenne prônait une approche globale et un engagement
unique.
De l'autre, les Etats-Unis limitaient leur ambition à un cycle étroit
comprenant l'élimination des subventions directes aux exportations agricoles,
l'accès aux marchés des services, l'instauration de normes sociales minimales,
ainsi que l'application des accords conclus lors du précédent cycle de
l'Uruguay.
Le déficit commercial américain ayant atteint un niveau record, les Etats-Unis
étaient en effet partisans d'une négociation classique, limitée à des questions
sectorielles, leur préoccupation essentielle étant l'accès à de nouveaux
marchés.
S'il est légitime que chaque pays cherche à défendre ses intérêts propres, les
Etats-Unis, en tant que pays hôte assumant la présidence de la conférence,
avaient plus que les autres le devoir de faciliter la recherche de compromis.
Le moins que l'on puisse dire est qu'il n'ont pas oeuvré en ce sens. De
multiples voix s'accordent à affirmer que cette intransigeance n'est pas
étrangère à la perspective de l'élection présidentielle américaine. Je le
crois, en partie.
Conscients qu'ils ne devaient pas se laisser enfermer dans un tête-à-tête
américano-européen, qui aurait eu pour conséquence inévitable de reléguer les
pays en développement au rang de « témoins forcés », les Quinze ont cherché à
étendre le champ du
round
à de nouveaux sujets, comme la concurrence et
les investissements.
S'agissant de la question agricole - je sais qu'elle vous préoccupe beaucoup,
monsieur le secrétaire d'Etat - qui était au coeur des négociations, chacun a
vite compris que l'intention des Américains était de conduire Bruxelles à
réduire de façon drastique les aides agricoles, alors même que les aides
publiques à l'agriculture américaine sont supérieures de 50 % à celles dont
bénéficient les agriculteurs européens. De plus, l'Europe a, quant à elle, déjà
tenu les engagements pris lors du cycle de l'Uruguay en matière d'ouverture de
marché, de réduction des aides ou de niveau de soutien des prix, en réformant
sa politique agricole commune conformément à l'Agenda 2000 adopté en mars à
Berlin.
La Commission européenne, à qui les Quinze avaient confié un mandat aux
contours précisément définis, à savoir la défense du modèle agricole européen
privilégiant la préférence communautaire et une stratégie exportatrice
garantissant la qualité des produits et la sécurité alimentaire, se devait de
ne pas accepter une remise en cause des politiques de soutien à l'agriculture
européenne, lesquelles ont suffisamment demandé de sacrifices aux acteurs du
monde agricole.
Aujourd'hui, les analyses des possibles causes de l'échec vont bon train :
mauvaise organisation, procédures et structures inadaptées, pressions
incontrôlées de la société civile, contexte américain que j'ai déjà évoqué,
etc. Vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, avez plaidé, je vous cite, pour
« une OMC plus réformée, plus démocratique, plus citoyenne ».
Les yeux de tous les observateurs internationaux étaient légitimement rivés
sur Seattle, dès lors que l'issue de la conférence allait être déterminante
pour les échanges économiques et commerciaux.
Face à cette conjoncture économique et commerciale mondiale incertaine, la
France a besoin de consolider et de conquérir de nouvelles parts de marché à
l'étranger. Exporter n'est-il pas, en effet, l'un des principaux moteurs de la
croissance ?
Alors que vous étiez conscient qu'un échec n'était pas à exclure, pourquoi,
dans le budget, avoir baissé de 15 % en crédits de paiement les aides à
l'exportation et avoir baissé les subventions aux organismes de soutien aux
PME-PMI ?
Permettez-moi de vous demander, monsieur le secrétaire d'Etat, quelles sont
vos intentions au lendemain de ces négociations.
(Applaudissements sur les
travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
crédits du commerce extérieur ne semblent pas présenter, en eux-mêmes,
d'évolution sensible. Tout juste pouvons-nous constater, cette année, que le
mouvement de réduction d'effectifs qui affecte les différents services du
ministère de l'économie et des finances épargne quelque peu les services
dévolus à la promotion de l'industrie et des productions françaises à
l'étranger.
On observera d'ailleurs qu'il y a, en cette année 1999, comme cela se produit
depuis plusieurs années, un excédent commercial important de notre pays, qui
atteste des points forts de notre économie - agriculture, industrie des biens
d'équipement, par exemple - et témoigne des positions conquises sur les marchés
internationaux par nos entreprises.
Pour autant, cette situation, si elle est satisfaisante, puisqu'elle participe
de la croissance relativement soutenue de la production que nous enregistrons
ces dernières années et que nous devrions encore connaître en l'an 2000,
appelle un certain nombre d'observations à la lumière de l'actualité récente,
et notamment de l'échec de la conférence de Seattle.
Cet échec de la conférence de l'Organisation mondiale du commerce était
prévisible.
Si l'on a, en effet, pu sentir à certains moments s'exprimer une volonté de
compromis de la part du commissaire européen, M. Lamy, force est de constater
que, du côté de la partie américaine, aucun autre mandat ne semblait avoir été
donné que celui d'obtenir de l'Union européenne des concessions
inadmissibles.
En fait, on avait assigné à Mme Barshefsky un seul mandat : comment donner
corps et fondements à la volonté hégémonique des Etats-Unis en matière de
commerce international, quitte, d'ailleurs, à embarquer dans cette démarche une
partie des pays en voie de développement, ainsi instrumentalisés aux seules
fins de la bonne santé financière des groupes transnationaux d'origine
américaine.
Que la conférence de Seattle se soit conclue par un constat de désaccord
n'est, finalement, que tout à fait logique et ne fait qu'ouvrir un cycle de
négociations qui seront certainement âpres et difficiles. Cela ne peut
réellement nous surprendre, compte tenu de l'intransigeance des Etats-Unis,
surtout dans une période pré-électorale.
Cet échec de Seattle est aussi, quoiqu'on en dise, une réussite, celle de la
mobilisation de l'opinion publique internationale, y compris à proximité
immédiate du lieu de la conférence, contre une logique de marchandisation de
toute activité humaine, logique où aucune entrave environnementale, sociale ou
éthique n'aurait de place.
Vous comprendrez que nous marquions notre satisfaction au vu de la position
que le Gouvernement français a cru bon d'adopter, quand bien même cette
position est, pour partie, liée aux mouvements de l'opinion !
L'expérience n'est donc pas sans intérêt et traduit, en fait, une attention
nouvelle au problème des relations économiques internationales, ce qui est
positif.
Nul doute que notre pays doit encore oeuvrer, dans les faits, et notamment
dans le cadre de sa politique de coopération économique, à la définition de
relations économiques plus équilibrées, plus respectueuses des potentiels de
croissance de chacune des parties de la planète, des relations qui prennent en
compte les priorités que sont le respect de l'environnement, l'avancée des
normes sociales, les conditions du développement des sociétés des pays les
moins avancés, notamment en réponse aux besoins en matière de santé et
d'éducation.
Ce rôle que doit jouer notre pays est d'autant plus important que nous avons
noué des liens particuliers de coopération qu'il nous faut aujourd'hui
valoriser et faire fructifier.
Sinon, les conditions seraient réunies pour que ces nations, dans un commerce
mondial livré aux seules règles du marché, voient leurs atouts dilapidés.
De ce point de vue, vous comprendrez qu'il n'est pas juste, notamment, que
l'Afrique ne pèse que pour 2 % dans le volume mondial des échanges.
Monsieur le secrétaire d'Etat, telles sont les quelques observations que nous
voulions formuler à l'occasion de l'examen de votre budget, que notre groupe
adoptera.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain
et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
souhaite, en préliminaire, faire une remarque d'ordre technique : nous
examinons un budget dont on pourrait grandement améliorer la présentation.
En effet, l'éparpillement en trois fascicules n'en facilite pas la lecture,
que ce soit pour les services financiers, les charges communes ou les comptes
spéciaux du Trésor. Le décryptage du document budgétaire ne permet pas
d'appréhender clairement la réalité des aides fournies par l'Etat aux
entreprises françaises exportatrices.
L'âpreté des négociations à Seattle, où se sont courtoisement affrontées les
diverses délégations, démontre la place prépondérante prise par le commerce
international, en raison de la part des exportations dans les produits
intérieurs bruts des divers pays, et donc de leurs répercussions sur
l'emploi.
Plus d'un Français sur cinq travaille pour l'exportation. Nous vendons de la
haute technologie, mais aussi du savoir-faire ancestral. C'est dire que
l'ensemble de notre appareil productif est concerné.
La politique du commerce extérieur n'est pas un champ clos où s'affrontent
majorité et opposition. Le fait, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ayez
convié des parlementaires de toutes tendances à Seattle - je vous en donne acte
- en est la meilleure illustration.
Dans le même ordre d'idées, le changement de majorité politique n'a pas
entraîné de changement de politique du commerce extérieur, à la nuance près que
M. Strauss-Kahn déclarait vouloir privilégier la consommation intérieure,
quitte à augmenter le prix de nos produits et, en conséquence, à nous rendre
moins concurrentiels sur les marchés extérieurs.
Les mêmes faiblesses subsistent et les mêmes points forts demeurent, avec
cependant des concurrents nouveaux très pugnaces dans les produits de haute
technologie, avec une montée en puissance de produits venant notamment de la
Corée, de l'Inde ou du Brésil, mais aussi dans les produits traditionnels,
comme les produits de luxe ou les produits agro-alimentaires, où l'Italie est
un concurrent très sérieux. Et je n'aurai garde d'oublier les nouveaux pays
viticoles comme le Chili, l'Argentine, l'Australie ou l'Afrique du Sud, qui
nous concurrencent sur les marchés extérieurs et même chez nous, avec le quota
de 5 %.
Cette forte concurrence s'est traduite par une part plus faible de la France
dans le commerce mondial. Malgré des excédents records, elle est passée, entre
1997 et 1999, de 5,9 % à 3,8 %, ce qui montre une dégradation très sensible,
compensée par un développement général du commerce international mais qui sera
durement ressentie si cette croissance se transforme en une récession.
Les entreprises françaises veulent à la fois plus d'Etat et moins d'Etat.
L'équilibre est donc, pour vous, difficile, mais c'est au niveau de la toile de
fond et des outils mis à disposition des entreprises que vous avez une capacité
à agir.
Je choisirai quelques exemples.
Parmi ces outils, la COFACE, la compagnie française d'assurance pour le
commerce extérieur, société privée mais prestataire privilégié de l'Etat,
constitue l'instrument idéal pour accompagner les entreprises françaises à
l'étranger. Encore faudrait-il que le ministère des finances anticipe mieux
l'évolution politique des relations de notre pays avec certains partenaires et
donne plus souvent son aval !
Ainsi, l'Iran, sous l'impulsion de son président, M. Mohamed Khatami, va
devenir un marché considérable. Or nos relations économiques ne sont pas à la
hauteur de nos relations politiques. Quant à la Libye, dont nous étions un
partenaire majeur, nous avons quasiment abandonné son marché au Royaume-Uni, à
la Corée, à l'Italie surtout, et même aux Etats-Unis.
Une coordination plus étroite devrait être mise en place entre le ministère
des finances et le ministère des affaires étrangères. Tous les ans, ce dernier
accorde des visas à des étudiants étrangers. Or ces visas sont accordés en
fonction d'une tradition historique s'appuyant souvent davantage sur un passé
colonial que sur les réalités économiques. Il me semble indispensable de faire
beaucoup plus de prospective et d'accueillir des étudiants venant de puissances
économiques actuelles ou en devenir, qui constituent déjà ou qui constitueront
des marchés.
Vous devriez informer le ministère des affaire étrangères de vos prévisions
quant à l'évolution des différents marchés afin qu'il module les contingents de
visas.
J'aimerais aussi souligner - comme l'ont fait certains de nos collègues -
l'importance de l'Agence pour la promotion internationale des technologies et
des entreprises françaises, née de la fusion du comité français des
manifestations économiques et de l'ACTIM.
Dans le budget pour 2000, ses crédits devraient s'établir à plus de 116
millions de francs. Mais la ventilation des crédits entre ces deux agences
permettait auparavant une vision plus claire de deux activités très
différentes.
Quoi qu'il en soit, la prise en charge d'étudiants étrangers sur notre
territoire est très inférieure, toutes proportions gardées, aux efforts que
font les Etats-Unis et le Japon pour former les futurs techniciens. Or ces
derniers seront les meilleurs vecteurs pour importer les produits de leur pays
de formation.
Je voudrais aussi insister sur l'indispensable coordination qui devrait
exister ente les postes d'expansion économique et les ambassades, mais qui
n'existe pas toujours. Pour ma part, je considère que toute notre activité dans
un pays doit se placer sous la responsabilité de l'ambassadeur, et ce dans tous
les domaines. C'est vrai en théorie, ce n'est pas toujours vrai en pratique
!
Une vraie coordination devrait exister également entre le Gouvernement et le
Parlement, comme cela se passe dans les pays anglo-saxons. Il serait utile que
l'information recueillie par les parlementaires lors de leurs missions à
l'étranger, dans les groupes d'amitié ou lors de leurs divers entretiens
officiels, soit systématiquement exploitée pour promouvoir l'exportation de nos
entreprises sur des marchés étrangers.
M. Louis Althapé.
Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou.
Un geste symbolique, mais important pour souligner notre détermination à bâtir
l'Europe, consisterait à considérer qu'avec le marché unique européen, dans
lequel l'euro est utilisé comme monnaie unique, les ventes françaises dans les
Etats membres de l'Union ne sont plus comptabilisées en tant qu'exportations.
Cela, monsieur le secrétaire d'Etat n'ébrécherait pas votre tableau de chasse,
puisque nos échanges en direction des pays de l'Union sont quasiment
équilibrés.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sachez que j'accorderai une attention positive
à vos réponses.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du
RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Dussaut.
M. Bernard Dussaut.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'an dernier, j'intervenais sur le projet de budget du commerce extérieur dans
un contexte économique mondial difficile, marqué par la dégradation de la
situation au Japon - et, surtout, dans les pays émergents d'Asie du Sud-Est,
qui ont été responsables du net ralentissement du commerce mondial en 1998 en
raison d'une très forte contraction de leur demande intérieure -, ainsi que par
un recul des importations de pays de l'OPEP, l'Organisation des pays
exportateurs de pétrole.
Aujourd'hui, la situation internationale semble définitivement sortir d'une
grave crise conjoncturelle. Les données sont donc différentes.
En fait, le commerce extérieur français a mieux résisté aux chocs des crises
successives : vous avez dit dernièrement, monsieur le secrétaire d'Etat, que la
balance commerciale devrait avoisiner 110 milliards de francs, ce qui serait un
bon résultat compte tenu de la conjoncture.
Ce budget est discuté, actualité oblige, en pleines négociations de l'OMC sur
le lancement d'un nouveau cycle de libéralisation commerciale, qui a obligé
chaque Etat à se positionner en tant qu'Etat souverain mais aussi en tant
qu'Etat membre, comme la France, au sein de l'Union européenne.
J'aborderai dans cette brève intervention l'échec de Seattle, même s'il est
minimisé par tous les dirigeants. L'incapacité à élaborer une déclaration
commune définissant l'agenda d'un nouveau cycle de négociations pour
libéraliser les échanges commerciaux mondiaux est révélateur d'un malaise
grandissant des partenaires de l'OMC, qui jugent les règles de fonctionnement
et les procédures de cet organisme « médiévales ».
Dans ce projet budget pour 2000, les crédits consacrés à l'intervention
directe de l'Etat s'élèvent à 3,31 milliards de francs en crédits de paiement,
soit une augmentation de 12,6 % par rapport à la loi de finances de 1999.
Notons par ailleurs que les autorisations de programme, créditées de 4,4
milliards de francs, sont en diminution de 11 %.
Trois éléments caractérisent ce projet de budget. Je les aborderai brièvement,
en m'efforçant de montrer qu'ils sont significatifs de la volonté du
Gouvernement d'apporter un appui financier et logistique plus approprié dans
ses missions.
Le premier élément est la poursuite de la réforme du service de l'expansion
économique à l'étranger.
Les crédits destinés au service de l'expansion économique s'élèvent, à
structure constante, à 1,43 milliard de francs, en hausse de 9,1 %. Cette
progression s'explique par l'augmentation des dépenses de personnel et par une
dotation exceptionnelle pour l'organisation de l'exposition universelle de
Hanovre, en 2000.
Engagée dans un processus de restructuration à travers un programme
pluriannuel de réduction de ses effectifs budgétaires, la direction des
relations économiques extérieures, la DREE, respecte ce programme avec le souci
constant d'adapter ses réseaux aux évolutions du commerce international. Elle a
considérablement modifié ses méthodes de travail afin d'adapter son offre de
service aux demandes des entreprises françaises.
Cet effort d'adaptation se traduit effectivement par des mesures de
modernisation importantes des moyens d'informatisation, de mise en réseau et de
communication.
Dans ce contexte, il faut parler de la restructuration des organismes d'appui
au commerce extérieur.
Les moyens destinés au Centre français du commerce extérieur diminuent de 2,4
% pour s'élever à 125 millions de francs. La baisse de cette dotation est liée
aux économies dégagées par la réforme du CFCE et n'affecte en rien ses moyens
d'action.
Les crédits attribués à l'Agence pour la promotion internationale des
technologies et des entreprises françaises sont stabilisés après la diminution
de 1999. Ces crédits sont importants, car ils permettent de maintenir le volume
d'activité de l'organisme à son niveau actuel, soit 200 opérations collectives
dont quatre expositions françaises et quatre-vingt-sept expositions collectives
d'entreprises françaises dans les salons internationaux.
J'en viens au deuxième élément fort de ce budget, avec la réorganisation des
moyens en faveur des PME.
Pour l'an 2000, les principaux dispositifs d'appui aux entreprises mobilisent
333,25 millions de francs, soit une hausse de 3,5 % par rapport à 1999.
L'assurance prospection aide l'exportateur à faire face à ses dépenses de
prospection sur les marchés étrangers et l'indemnise en cas d'insuccès
commercial. Le montant retenu pour cette assurance prospection s'élève à 290
millions de francs, en augmentation de 9,4 % par rapport à 1999.
Dans le cadre de la réorganisation des moyens en faveur des PME, je tenais à
féliciter le Gouvernement de l'importante augmentation des autorisations de
programme prévues au titre du volet « commerce extérieur » des contrats de plan
pour 2000.
Cette dotation s'élève à 45 millions de francs, soit une augmentation de 40,6
%. Ces aides du volet extérieur des contrats de plan Etat-région s'adressent
aux PME qui, disposant de produits compétitifs, sont peu exportatrices et ont
besoin de ce soutien public pour s'engager sur le marché international.
Le troisième élément fort de ce budget est la réduction du coût budgétaire des
procédures financières de soutien à l'exportation.
Je n'en citerai que trois.
Premièrement, les procédures gérées par Natexis Banque pour le compte de
l'Etat voient leurs crédits diminuer de 150 millions de francs pour 2000 et
s'élever à 400 millions de francs. Rappelons que la loi du 29 décembre 1997
précise le mandat confié à Natexis Banque par l'Etat pour la gestion des
procédures de stabilisation de taux d'intérêt, ainsi que pour la gestion de
certains accords de consolidation.
Deuxièmement, le coût budgétaire de l'assurance-crédit géré par la COFACE pour
le compte de l'Etat est nul en 1998, car le montant des récupérations a dépassé
celui des indemnités de 6 milliards de francs.
Enfin, troisièmement, les crédits relatifs aux protocoles financiers sont en
diminution : la dotation du fonds d'études et d'aide au secteur privé, le
FASEP, du fonds ingénierie et du fonds consacré aux pays de l'Est diminue de 53
% en autorisations de programme, à 280 millions de francs. Cette baisse
s'explique par l'arrivée à terme de dépenses exceptionnelles, notamment du
fonds de garantie pour le Maroc.
Permettez-moi maintenant d'évoquer brièvement la situation du commerce
extérieur français en 1998 et ses perspectives pour 1999 et 2000.
En 1998, pour la septième année consécutive, le commerce extérieur de la
France avait dégagé un excédent de 145 milliards de francs, soit environ 1,6 %
du produit intérieur brut.
Il faut insister sur la bonne performance du commerce extérieur français dans
un contexte de dégradation de la conjoncture internationale. Les deux tiers de
nos exportations étant orientées vers les pays européens, nous subissons malgré
tout, cette année, l'effet amplificateur du ralentissement conjoncturel
européen de l'hiver dernier. Mais la reprise anticipée de la croissance en
Europe nous montre déjà une amélioration des prévisions pour 1999 ; pour 2000,
elles devraient progresser entre 5 et 6 %, et le solde de la balance
commerciale devrait augmenter considérablement.
Je pense qu'il appartient aux pouvoirs publics de mener une politique efficace
de soutien aux exportations tout en s'adaptant aux nouvelles règles
internationales. Vous avez su, au travers de ce budget, marquer votre
détermination à cet égard, comme vous avez su, à Seattle, marquer la volonté du
Gouvernement français et de l'Union européenne d'aller vers un échec plutôt que
d'accepter « un mauvais accord ».
Je souhaiterais terminer mon propos sur ce sujet d'actualité.
Si les négociations doivent reprendre dans les mois à venir, elles ont
pourtant été suspendues ce vendredi 3 décembre, et l'agriculture a été à
l'origine du principal désaccord.
Les Américains et leurs alliés souhaitaient que les 135 pays de l'OMC
s'engagent, dans le texte final, à « éliminer » progressivement les subventions
aux exportations, tandis que les Européens s'y opposaient. Ce ne fut pas une
véritable surprise ! Vous aviez d'ailleurs déjà, monsieur le secrétaire d'Etat,
lors du débat sur l'OMC à cette même tribune, le 23 novembre dernier, fait part
de vos inquiétudes à ce sujet.
Mes collègues socialistes qui sont alors intervenus, plus particulièrement
Jean-Marc Pastor et François Marc, en ont fait le thème fort de leur discours.
Ils ont bien démontré que, sous couvert de ce problème de subventions à
l'exportation, on s'affrontait en fait sur des choix de société pour
l'avenir.
Les Américains n'acceptent pas que l'Union européenne parle d'une seule voix,
en la personne de M. Lamy, et qu'elle fasse valoir comme base de discussion
sérieuse les accords de Berlin sur la PAC réformée. Nous avons ainsi vu que les
points de désaccord ne se sont pas limités à l'agriculture.
Il n'est pas question, comme vous l'avez clairement exprimé à Seattle,
monsieur le secrétaire d'Etat, de renoncer à l'OMC. L'OMC a été conçue pour
mettre en place un système de règles et de transparence dans les échanges entre
les nations, pour éviter les excès redoutés de la dérégulation.
Mais organiser les règles d'échange des marchandises, c'est d'abord les
définir, les caractériser, voire les différencier, comme l'a rappelé M. Jacques
Bellanger le 23 novembre 1999 à cette tribune. C'est donc définir des droits
nouveaux au niveau mondial dans le domaine sanitaire et social, avec des normes
minimales à faire respecter par tous les pays ; c'est apporter des aides aux
pays les moins avancés et les faire participer aux débats ; c'est faire
reconnaître de nouvelles normes environnementales ; c'est imposer le principe
de précaution pour la santé des habitants de la planète ; c'est continuer à
faire bénéficier les oeuvres de l'esprit d'un traitement d'exception pour se
prémunir contre le risque d'uniformisation et de standardisation de la
création.
Tous ces points ont été abordés, mais des blocages sérieux ont vu le jour, de
la part tant des Etats-Unis que de l'Union européenne ou de certains pays en
voie de développement, comme l'Inde.
J'affirmerai enfin que l'échec de la conférence est celui, avant tout, du
fonctionnement de l'OMC. Il est aussi, quelque part, une victoire pour les ONG,
qui voulaient faire entendre les voix dissonantes de la société civile
mondiale.
Je souhaite que tous les dirigeants de la planète prennent la mesure de ce
formidable message que ces milliers de manifestants ont exprimé : le monde
n'est pas à vendre, il est temps de revoir sérieusement le nouveau cycle de
négociations visant à libéraliser les échanges mondiaux en se fondant sur des
critères différents.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe socialiste votera ce projet de
budget.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, avant de vous exposer les orientations du budget du
commerce extérieur en lui-même, je souhaite revenir, comme vous m'y avez
invité, sur la conférence de Seattle, qui s'est tenue la semaine dernière.
Au cours de ces négociations difficiles, mais que nous avions souhaitées
transparentes, j'ai beaucoup apprécié la présence, à mes côtés, au sein de la
délégation française, de représentants de la souveraineté nationale. Pour le
Gouvernement, le « contrôle citoyen » de l'OMC passe d'abord par la
concertation avec les élus que vous êtes. Je vous remercie, monsieur de
Montesquiou, de m'en avoir donné acte. C'est à cette condition, selon nous, que
les règles de l'OMC continueront d'être le fruit de la volonté des Etats.
Cette concertation entamée voilà plusieurs mois s'est donc poursuivie à
Seattle sous le signe, je le crois, de l'entente mutuelle. Je tiens d'ailleurs
à remercier les membres de la Haute Assemblée de l'attention et du soutien
qu'ils ont apportés à nos efforts pour promouvoir un cycle de négociations
équilibré. J'ai la conviction que cette vision partagée renforce la légitimité
de nos engagement internationaux.
Certes, l'absence de résultat est préjudiciable - comment ne pas en convenir ?
- dans la mesure où l'on pourrait considérer que l'on ne rassemble pas 135
Etats pendant une semaine pour constater l'absence d'entente. Toutefois, comme
je l'avais déclaré à mon départ, mieux valait ne pas signer d'accord que
s'engager sur un mauvais accord. Par ailleurs, il est évident que la
cristallisation sur un certain nombre de dossiers comme l'agriculture n'a pas
été une bonne chose.
Sur ce point, nous avons refusé le passage en force que les Etats-Unis,
soutenus par le groupe de Cairns, tentaient de nous imposer, et je crois que
les Français nous en saurons gré. Nous sommes attachés à un modèle agricole
européen qui est aussi, pour nous, d'une certaine façon, un modèle de
société.
Par ailleurs, bien d'autres sujets que celui de l'agriculture posaient des
difficultés et nous souhaitions qu'ils soient intégrés à l'agenda. Je pense aux
sujets de régulation, tels que les normes sociales, la concurrence, les
investissements, et le lien entre le commerce et l'environnement, mais aussi
aux questions de mise en oeuvre des accords précédents qui préoccupent
particulièrement les pays en voie de développement.
De cette réunion de Seattle, je tirerai quelques brèves réflexions.
Tout d'abord, l'Union européenne a fait preuve de cohésion dans la difficulté,
ce qui est tout à fait décisif.
Ensuite, le commissaire Lamy a joué son rôle de négociateur pour l'Union
européenne de façon efficace en testant la résistance et les possibilités
d'accord d'un certain nombre de partenaires. Il l'a fait en débloquant la
situation, en prenant l'initiative, de sorte que, aujourd'hui, l'Union
européenne n'apparaît pas comme la perdante de ces négociations, à la
différence des Etats-Unis.
Enfin, nous devons retenir que, désormais, dans le commerce mondial, il n'y a
pas uniquement la confrontation transatlantique Union européenne - Etats-Unis,
mais également les pays en voie de développement et les pays les moins avancés
dont le rôle est désormais incontournable et à l'égard desquels l'Europe a fait
preuve de plus de souplesse et de préoccupation qu'un certain nombre de grands
partenaires.
Mais, dans les semaines à venir, nous ne pourrons pas faire l'économie d'une
réflexion sur le fonctionnement de l'OMC et sur la nécessité d'instaurer une
plus grande lisibilité dans celui-ci.
Bien évidemment, le Gouvernement, comme dans le passé, souhaite que vous soyez
associés à nos futurs travaux.
Pour répondre à M. Souplet et à M. Dussaut, je dirai en quelques mots comment
je définirais les tâches qui sont les nôtres.
Il nous appartient toujours, aujourd'hui plus qu'hier, de travailler à établir
le cadre transparent, stable et équitable des échanges internationaux. La
logique qui doit prévaloir à l'OMC est double. C'est celle d'une libéralisation
réciproque et de la soumission de chacun des Etats membres à une discipline
multilatérale.
A Seattle, l'Europe ne souhaitait pas seulement qu'il soit question
d'abaissement des tarifs ; elle voulait aussi que soient améliorées les
disciplines relatives à l'égalité de traitement, à l'harmonisation des
procédures douanières et que soient instaurées des règles communes en matière
de concurrence, d'investissements et de marchés publics, sujets de régulation
et de maîtrise de la mondialisation par excellence, afin de garantir aux
entreprises des stratégies d'internationalisation durables. Même si ces
objectifs sont aujourd'hui différés, ils n'en resteront pas moins au coeur des
politiques que nous mènerons dans les enceintes multilatérales.
Parallèlement, il incombe aux partenaires du commerce extérieur de former,
dans ce cadre, une véritable chaîne de compétences pour aider les entreprises
françaises à tirer parti de la croissance mondiale.
C'est pourquoi les efforts que nous menons dans les enceintes multilatérales
doivent être articulés avec une politique spécifique destinée plus
particulièrement aux PME et aux PMI, qui représentent un relais efficace dans
la politique de croissance au service de l'emploi dont le Gouvernement a fait
sa priorité.
Le budget que j'ai l'honneur de vous présenter se veut fidèle à cet
objectif.
Je veux ajouter quelques mots quant au contexte avant d'aborder le sujet
lui-même.
Les performances du commerce extérieur sont, vous le savez, très fortement
liées aux variations de la conjoncture internationale.
Même s'il est certain que le niveau de 1997, année record, ne sera pas
atteint, les résultats du commerce extérieur pour l'année 1999 s'annoncent
favorables, et je veux répondre sur ce point aux préoccupations de plusieurs
orateurs, dont M. Dussaut.
Sur les neuf premiers mois de l'année, l'excédent s'élève déjà à 95,4
milliards de francs contre 109,8 milliards de francs sur la même période en
1998.
Ce chiffre global masque un semestre très contrasté. Le recul des premiers
mois traduit la phase de ralentissement économique traversée fin 1998-début
1999 résultant de l'effet décalé de la crise asiatique. Par ailleurs, la hausse
continue du prix du baril de pétrole depuis le début de l'année a eu pour
conséquence directe un alourdissement de notre facture énergétique.
En revanche, il est clair que, depuis le mois de juin, les éléments de reprise
de la demande mondiale ont immédiatement trouvé un écho dans le solde mensuel
de nos échanges, qui est passé à 11,8 milliards de francs en juin pour
atteindre, en juillet, le niveau record de 20,2 milliards de francs. En
septembre, c'est un excédent de 15,3 milliards de francs qui vient d'être
enregistré.
L'année dernière, sur la même période, l'excédent se maintenait au niveau de
1997, mais les répercussions de la crise sur nos échanges n'étaient pas encore
perceptibles. Toutefois, on peut dire aujourd'hui que le ralentissement des
échanges extérieurs est très clairement derrière nous.
En effet, comme le révèle d'ailleurs la dernière enquête de conjoncture de
l'INSEE, les carnets de commandes étrangers se regarnissent à nouveau. La
croissance reste soutenue aux Etats-Unis et permet donc, à la faveur d'un
contexte de change favorable que vous avez souligné, un courant d'exportations
très dynamique vers l'Amérique du Nord. Les échanges commerciaux avec l'Asie
progressent également en glissement trimestriel de 17,6 % à l'exportation et de
8,2 % à l'importation. Enfin, les prévisions de croissance en Allemagne, en
Italie et au Royaume-Uni s'améliorent, avec un impact important pour nos
échanges, puisque les deux tiers de nos ventes et de nos achats s'effectuent au
sein de l'Union européenne.
Dans les mois à venir, le solde n'atteindra pas le niveau exceptionnel de
juillet. Pour autant, on ne saurait y lire le symptôme d'une nouvelle
dégradation de nos échanges extérieurs ; c'est le simple effet d'une croissance
durable de nos importations plus rapide que la croissance de nos exportations.
Nous devons le reconnaître et nous en féliciter. C'est le signe que la demande
intérieure est bien orientée, que nos entreprises investissent. En même temps,
je crois pouvoir dire que, pour autant, nos échanges commerciaux n'en seront
pas affectés au total.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez indiqué un résultat possible
d'environ 110 milliards de francs pour cette année. Je crois que nous y serons.
Je crois même pouvoir formuler avec prudence le pronostic que nous pourrions
aller au-delà.
Les performances du commerce extérieur, comme certains d'entre vous l'ont
souligné, sont positives pour notre croissance. La dégradation de
l'environnement extérieur a eu, en France, des effets que je viens de qualifier
de modérés. Elle a été plus sévère pour d'autres pays, pour l'Allemagne et pour
l'Italie, notamment. Mais, au total, c'est durablement que notre commerce
extérieur est excédentaire. Et c'est la preuve que, depuis un certain nombre
d'années, nos entreprises ont réussi parfaitement leur intégration au commerce
mondial.
J'en viens maintenant à la présentation du budget proprement dit. Vous l'avez
souligné, les crédits alloués au commerce extérieur pour l'an 2000 s'élèvent en
autorisations de programmes et en dotations ordinaires à 4,24 milliards de
francs, soit une réduction de 11 % par rapport au budget voté en 1999, et à
3,31 milliards de francs en crédits de paiements et dotations ordinaires, soit
une progression de 12,6 %.
Ces mouvements à la hausse et à la baisse sont pour l'essentiel, comme vous
l'avez remarqué, d'ordre technique. Ils résultent de reports de crédits et de
dotations non reconductibles pour les fonds de garantie. L'augmentation de 9,5
% par rapport à la loi de finances de 1999, hors charges communes, s'explique
surtout par le poste exceptionnel de la foire de Hanovre. Cette dotation de 115
millions de francs a été inscrite dans le projet de loi de finances pour
financer le pavillon français de cette exposition.
A ce propos, je remercie certains d'entre vous d'avoir constaté que nous avons
dans cette affaire géré les derniers publics avec un grand sens de
l'économie.
Mis à part ces quelques distorsions et cette dépense exceptionnelle, le budget
que nous proposons affiche une grande stabilité, laquelle n'est pas synonyme
d'immobilisme, au contraire. Puisque les perspectives sont bonnes, puisque
l'économie française a tout à gagner à valoriser ses capacités exportatrices,
il nous appartient, pour renforcer la présence internationale de nos
entreprises, tout particulièrement des PME-PMI, qui réclament, à juste raison,
une politique adaptée, de tirer parti de la modernisation de notre
administration centrale, du redéploiement géographique de notre réseau
extérieur et de la réforme des organismes d'appui.
S'agissant des moyens de fonctionnement, le réseau de l'expansion économique à
l'étranger est globalement maintenu en matière de moyens de fonctionnement. Dix
emplois sont supprimés, soit 0,8 % de ses effectifs budgétaires.
Comme l'a souligné M. Massion, qui s'est livré à une analyse très fine de ces
projets de fonctionnement, le plan triennal 1997-1999 conclu entre la direction
des relations économiques extérieures et la direction du budget est maintenant
terminé.
Sur son initiative, la direction va entamer une expérience pluriannuelle très
innovante en matière de finances publiques, avec l'inscription de l'ensemble
des crédits de personnel, de fonctionnement, d'informatique et d'immobilier des
postes d'expansion économiques et des directions régionales du commerce
extérieur sur seulement six chapitres budgétaires au lieu de treize.
Je crois qu'il en résultera une forte souplesse et une gestion fine. Je pense
aussi qu'il faut se féliciter que la DREE soit en la matière exemplaire en
termes de modernisation de l'administration.
Je retiens, par ailleurs, les suggestions de M. de Montesquiou sur la
coordination nécessaire entre les consulats et les postes d'expansion
économique. Je rappelle que sept expériences ont déjà été menées sur ce point.
Elles seront vingt au total dans les années qui viennent. C'est une idée à
retenir.
J'en viens aux organismes d'appui au commerce extérieur, dont vous savez
qu'ils sont des relais indispensables entre l'administration centrale, les
postes d'expansion et les entreprises françaises. Ils répondent à deux missions
: fournir des informations sur les marchés étrangers, tant en matière de
réglementation qu'en matière d'opportunités ; favoriser les contacts des
entreprises avec les partenaires locaux, privés et publics, à travers
l'organisation de foires et d'expositions.
La réforme engagée voilà plusieurs années pour mieux intégrer, à travers la
coopération de ces organismes, les différentes étapes d'une démarche
d'exportation, commence à porter ses fruits.
J'en profite pour répondre aux soucis que vous avez exprimés sur le
rapprochement entre le CFCE et le CFME-ACTIM. Je crois pouvoir dire que nous
sommes aujourd'hui à la veille de la phase opérationnelle. Les problèmes
d'ordre patrimonial sont en voie de règlement, et j'ai maintenant la certitude
que ces deux organismes seront réunis sur un site proche de Bercy avant
2002.
Les dotations du CFCE et du CFME-ACTIM ont été fixées aux montants demandés
par eux. Elles répondent à la fois aux dépenses de fonctionnement et à la
poursuite des réformes engagées.
Le CFCE - je crois que les chiffres n'ont guère bougé - avait obtenu 128
millions de francs en 1999, dont 8 millions de francs de crédits non
reconductibles.
En 2000, la dotation est de 125 millions de francs, dont 5 millions de francs
non reconductibles. Elle devrait permettre au CFCE de poursuivre sa réforme.
L'esprit de cette réforme, c'est évidemment celui d'une simplification des
procédures destinées aux entreprises, notamment aux PME vers lesquelles je
souhaite que notre politique soit significativement orientée. C'est pourquoi,
je me félicite aussi, comme certains d'entre vous, de la mise en place, au sein
du CFCE, d'une mission « Artisanat et très petites entreprises ».
Aujourd'hui, en effet, vous l'avez dit, seulement 2 % des entreprises
artisanales exportent, principalement en direction de l'Allemagne, du Benelux,
de la Suisse et de l'Italie. Cet isolement n'est pas volontaire, et il faut le
rompre. De ce point de vue, je pense que nous y parviendrons avec l'aide des
nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Dans cette perspective, le centre français du commerce extérieur a mis en
place, en collaboration avec le secrétariat d'Etat aux petites et moyennes
entreprises, au commerce et à l'artisanat, une mission « Artisanat et petites
entreprises », chargée de repérer et de piloter les nouveaux venus à l'export,
de croiser l'offre française exportable avec la demande étrangère.
L'implantation locale des entreprises artisanales, qui fait leur force et leur
vitalité, ne doit plus - nous en sommes convaincus - constituer un obstacle à
leur ouverture.
C'est aussi pourquoi les aides à l'exportation doivent transiter par les
organismes locaux, qui sont les interlocuteurs privilégiés des artisans et des
indépendants.
La mondialisation et les politiques concrètes au niveau local et régional, en
prise avec les réalités du terrain, sont donc conciliables et même
complémentaires. Je tiens à vous dire que, pour ma part, j'attache une grande
importance à cet équilibre.
Par ailleurs, et dans la mesure où le CFCE facture ses prestations, il est
indispensable d'élaborer une nouvelle approche clientèle : en raison des
nouvelles technologies et de la multiplication des réseaux, le marché de
l'information subit une profonde mutation, source d'opportunités, mais aussi de
concurrences nouvelles.
Or il est important qu'un organisme public comme le CFCE continue à jouer un
rôle essentiel d'information sur les marchés étrangers, et donc d'orientation
des stratégies exportatrices. Il y va de la cohérence et de la pérennité de
notre politique commerciale, qui se doit d'avoir des objectifs de moyen, voire
de long terme.
La subvention pour le CFME-ACTIM a été reconduite, permettant à l'organisme de
maintenir son programme d'action, qui concerne essentiellement l'organisation
de grandes manifestations. Les trois grandes expositions prévues pour l'an 2000
se tiendront à Budapest en avril, à Istanbul en juin et à Séoul en octobre.
Pour l'année 2001, trois expositions se tiendront également à Mexico et à
Pékin. Enfin, un projet en cours d'élaboration devrait concerner Prague.
Vous vous êtes interrogés sur les incertitudes planant sur les recettes
procurées au CFME-ACTIM par la gestion des CSNE. Nous sommes bien conscients de
ce problème. C'est pourquoi, en concertation avec la direction du budget, une
enveloppe de 10 millions de francs sera directement allouée à cet organisme
dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1999 qui vous sera
soumise prochainement. J'espère ainsi avoir répondu à M. Massion.
Evidemment, nous souhaitons que le futur statut du volontariat, adopté par le
Sénat le 13 octobre dernier et qui devrait vous être présenté à la fin du mois
de janvier, permette un véritable développement de l'emploi des jeunes diplômés
à l'export : je m'accorde à reconnaître avec vous qu'avec 1,7 million
d'expatriés la France se situe très en retrait par rapport à ses partenaires,
alors même qu'une corrélation forte existe entre l'expatriation et nos
performances à l'étranger.
Nous sommes donc très attachés à renforcer, via le volontariat civil, la
présence économique de la France à l'étranger. Chaque fois que cela sera
nécessaire, nous prendrons nos responsabilités quel que soit le cas.
L'assurance-crédit alimentera encore les recettes de l'Etat pour un montant
qui devrait se situer autour de 8 milliards de francs. Malgré la crise
économique et financière qui s'est étendue à la Russie et à l'Amérique latine,
je tiens à vous préciser que les résultats de l'assurance-crédit se sont
maintenus, au premier semestre de 1999, à un niveau très satisfaisant.
Les dons d'aide extérieure sont fortement réduits avec la fin des dépenses
exceptionnelles, et le recours à la loi de finances rectificative de fin
d'année pour l'inscription de la dernière tranche du fonds de garantie
permettra de régler ces questions.
La dotation de 280 millions de francs permet en revanche d'augmenter
légèrement le FASEP-Etudes, qui n'était que de 200 millions de francs.
Enfin, les prêts du Trésor affichent une diminution de 100 millions de francs
par rapport à la loi de finances initiale de 1999.
J'en viens à l'aide aux PME et aux PMI que les contrats de plan permettront
d'apporter.
Pour le volet commerce extérieur, la dotation des contrats de plan a été fixée
à près de 420 millions de francs pour la période 2000-2006 - première et
seconde enveloppes comprises - contre 231 millions de francs seulement pour le
plan précédent, avec une dotation de 45 millions de francs pour le projet de
loi de finances pour 2000 et le reste à répartir pour les années suivantes.
J'insiste sur ce point très important. Les moyens mis à la disposition des
régions pour leur développement international vont être considérablement
accrus, selon le souhait du Premier ministre.
Par ailleurs, et vous y avez fait allusion, il faut prendre en compte le
projet de rapprochement des DRCE avec les DRIRE et avec les DRCA, dans le cadre
de la « mission 2003 ». Ce rapprochement aura sans doute pour conséquence
l'unicité des budgets et il permettra de créer un guichet unique sur le plan
régional. C'est là aussi une volonté de simplification, dont bénéficieront
directement les PME et les PMI.
M. Cornu a évoqué la diminution des moyens consacrés à l'appui des PME-PMI. Je
lui rappelle que l'assurance prospection progresse de 9 %, passant de 265
millions de francs à 290 millions de francs.
Le fonds de garantie, nouveau volet destiné au secteur privé, plus
spécifiquement aux PME, a aussi été doté de 300 millions de francs. Cela mérite
d'être souligné.
J'en viens à l'opération connue sous le nom de « Fil de l'export ». Nous
sommes en procédure d'évaluation. Globalement, cela nous paraît répondre à la
préoccupation qui était celle du projet. Bien entendu, nous procéderons à une
réévaluation en cours de projet et, le cas échéant, nous réorienterons cette
démarche pour essayer de l'adapter.
En conclusion, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs,
j'espère qu'à travers les chiffres et les priorités budgétaires du ministère
dont j'ai la charge vous aurez pu apprécier les objectifs qui sont les nôtres
et que l'on pourrait résumer ainsi : exporter plus, parce que, de toute
évidence, nos entreprises ont un potentiel à faire valoir qui aura des
retombées bénéfiques en matière de croissance et d'emploi, exporter mieux,
parce que, ce qui compte aussi, c'est la pérennité et la cohérence des
stratégies. Il est important que de véritables politiques d'exportation à
l'échelle régionale soient mises en place, et je m'y emploierai.
Il y va, en effet, de l'intégration réussie de la France, non seulement de ses
entreprises qui sont déjà très performantes, mais aussi de ses territoires dans
le processus de mondialisation. C'est une ambition à laquelle je suis, comme
vous tous, particulièrement attaché.
Enfin, je souhaite ici vous remercier, mesdames et messieurs les sénateurs,
messieurs les rapporteurs, pour l'objectivité et le caractère constructif des
débats que nous avons eus tant en commission que ce soir.
(Applaudissements.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C, et concernant l'économie, les finances et l'industrie.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'économie, les finances et
l'industrie autres que le commerce extérieur, les petites et moyennes
entreprises et le commerce et l'artisanat ont été examinés aujourd'hui même.
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat,
mes chers collègues, nous avons en effet examiné successivement les différents
fascicules qui composent le budget de l'économie, des finances et de
l'industrie.
Selon la nomenclature budgétaire qui a été établie cette année par le
Gouvernement, nous ne pouvons nous exprimer que par un seul et même vote sur
l'ensemble de ces fascicules, et, en particulier, nous n'avons pas la
possibilité de nous exprimer spécifiquement sur les crédits du commerce
extérieur, les vôtres monsieur le secrétaire d'Etat.
C'est regrettable, car des appréciations nuancées et diverses ont été
formulées à propos de ces différents domaines de l'action gouvernementale :
entre l'artisanat, le commerce extérieur, les services financiers, c'est-à-dire
l'activité administrative du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, des analyses différentes peuvent être faites. Or, nous nous
trouvons, en quelque sorte, contraints à ce vote bloqué d'ensemble au terme des
différentes discussions.
A la suite des différents avis qui ont été émis par chacun de nos excellents
rapporteurs spéciaux - Marc Massion pour le commerce extérieur, René Ballayer
pour les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat, Jean
Clouet pour l'industrie, Bernard Angels pour les services du ministère - il
faut donc que je puisse, au nom de la commission des finances qui en a
délibéré, vous proposer un avis global, qui est un avis défavorable à
l'ensemble du bloc ainsi défini.
En effet, s'agissant des crédits des services traditionnels du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, le rejet peut s'appuyer, en premier
lieu, sur le maintien en dehors de ce budget de certains moyens qui devraient y
être retracés.
Des progrès ont certes été réalisés dans la voie de certaines
rebudgétisations, mais nous ne sommes pas encore parvenus au terme de cet
effort. De plus, l'augmentation du volume des crédits destinés aux services
administratifs du ministère va quelque peu à contresens des critères que nous
nous sommes fixés en termes de meilleure efficacité de la dépense publique
consacrée à la marche des administrations de l'Etat.
Je me bornerai à rappeler un chiffre qui a été souvent cité et qui est issu
d'un rapport récent de l'Inspection générale des finances elle-même. Ce rapport
mentionne en effet un coût de gestion des impôts en France très supérieur à la
moyenne d'un échantillon international de neuf pays : 1,60 % de la totalité des
impôts recouvrés, contre 1,10 % pour cet échantillon.
Enfin, beaucoup de réformes de structures sont reportées, tout
particulièrement la nécessaire unification à terme des services de la direction
générale des impôts et de la comptabilité publique, voire de la direction
générale des douanes. Il convient d'imaginer pour l'avenir des structures qui,
par exemple - c'est un schéma parmi d'autres - puissent regrouper, d'un côté,
l'ensemble des services d'assiette et, de l'autre, l'ensemble des services de
recouvrement, plutôt que d'avoir à la fois des services d'assiette et de
recouvrement dans chacune de ces anciennes régies financières.
Des éléments négatifs sont également présents au sein du budget du commerce et
de l'artisanat, où l'individualisation des dépenses de fonctionnement est
devenue impossible, tandis que se poursuit un important mouvement de
débudgétisation, notamment en ce qui concerne le FISAC. Nous avons quelque
peine à y voir clair dans cette nomenclature un peu fluctuante.
En matière de politique industrielle, notre rapporteur spécial a formulé de
nombreuses critiques, qui portaient en particulier sur la concentration des
aides aux entreprises et sur l'insuffisante transparence de certaines
procédures. Il a, par ailleurs, déploré que certains organismes de recherche,
notamment le Commissariat à l'énergie atomique, qui est sous la tutelle
conjointe de la recherche et de l'industrie, ne reçoivent pas le soutien
nécessaire pour bon nombre de leurs programmes d'investissements.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, s'agissant du commerce extérieur, des
avis divers ont été émis, par exemple quant à la baisse des crédits des
organismes d'appui au commerce extérieur ; mais vous avez, pour une large part,
répondu aux préoccupations exprimées.
Comme il me faut vous recommander, mes chers collègues, pour ce vote bloqué,
une seule et même position, je me vois dans l'obligation d'émettre un avis
défavorable à l'adoption de l'ensemble des crédits relatifs à l'économie, aux
finances et à l'industrie, en vertu de la stratégie qui a été arrêtée par la
commission des finances et mise en oeuvre depuis le début de l'examen des
fascicules budgétaires.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 4 806 315 457 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 6 121 105 900 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 1 607 450 000 francs ;
« Crédits de paiement : 1 158 870 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 7 383 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 2 113 280 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le commerce extérieur, ainsi que l'ensemble des dispositions
concernant l'économie, les finances et l'industrie.
7
TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de Constitution :
Projet de décision-cadre sur l'échange des résultats des analyses d'ADN ; note
de la présidence au groupe « Coopération policière ».
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1358 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de Constitution :
Proposition de règlement du Conseil portant reconduction en 2000 des mesures
prévues au règlement (CE) n° 1416/95 établissant certaines concessions sous
forme de contingents tarifaires communautaires en 1995 pour certains produits
agricoles transformés.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1359 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de Constitution :
Proposition de règlement du Conseil adoptant des mesures autonomes et
transitoires concernant l'importation de certains produits agricoles
transformés originaires de Pologne et de Bulgarie.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1360 et distribué.
8
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la réduction négociée du temps de travail.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 115, distribué et renvoyé à la commission des affaires sociales.9
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de MM. Pierre Laffitte, René Trégouët et Guy Cabanel une proposition de loi tendant à généraliser dans l'administration l'usage d'Internet et de logiciels libres.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 117, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.10
RETRAIT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu une lettre par laquelle M. Pierre Laffitte déclare retirer la
proposition de loi tendant à généraliser dans l'administration l'usage
d'Internet et de logicels libres (n° 495, 1998-1999) qu'il avait déposée avec
plusieurs de ses collègues le 20 septembre 1999.
Acte est donné de ce retrait.
11
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Louis Souvet un rapport, fait au nom de la commission des
affaires sociales, sur le projet de loi, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la réduction négociée du
temps de travail (n° 115, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 116 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean Chérioux un rapport fait au nom de la commission des
affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Jean Chérioux, Jacques
Bimbenet, Paul Blanc, Louis Boyer, Jean Delaneau, Christian Demuynck, Charles
Descours, Jacques Dominati, Michel Esneu, Francis Giraud, Alain Gournac, André
Jourdain, Dominique Leclerc, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin,
MM. André Pourny, Henri de Raincourt, Louis Souvet, Martial Taugourdeau, Alain
Vasselle et Guy Vissac, tendant à favoriser le développement de l'actionnariat
salarié (n° 52, 1999-2000) et sur la proposition de loi de M. Jean Arthuis et
les membres du groupe d'Union centriste, relative au développement du
partenariat social (n° 87, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 118 et distribué.12
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 8 décembre 1999 :
A neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 88 et 89, 1999-2000). (M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.)
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Outre-mer (et article 72) :
M. Henri Torre, rapporteur spécial (rapport n° 89, annexe n° 34) ;
M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques et du Plan (avis n° 91, tome XXII) ;
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour avis de la commission des affaires
sociales (aspects sociaux, avis n° 93, tome VII) ;
M. José Balarello, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (départements d'outre-mer, avis n° 94, tome VII) ;
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (territoires d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie, avis
n° 94, tome VIII).
Défense (articles 40 et 41) :
1. Rapporteurs spéciaux :
Exposé d'ensemble, dépenses en capital : M. Maurice Blin (rapport n° 89,
annexe n° 43) ; dépenses ordinaires : M. François Trucy (rapport n° 89, annexe
n° 44).
2. Rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la
défense et des forces armées :
Nucléaire, espace et services communs : M. Jean Faure (avis n° 92, tome IV),
section Gendarmerie : M. Paul Masson (avis n° 92, tome V) ; section Forces
terrestres : M. Serge Vinçon (avis n° 92, tome VI) ; section Air : M.
Jean-Claude Gaudin (avis n° 92, tome VII) ; section Marine : M. André Boyer
(avis n° 92, tome VIII).
Jeunesse et sports :
M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 89, annexe n° 32) ;
M. James Bordas, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles (avis n° 90, tome IX).
Délai limite pour les inscriptions de parole
dans les discussions précédant l'examen
des crédits de chaque ministère
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu
pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements
aux crédits budgétaires pour le projet
de loi de finances pour 2000
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires
et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2000 est fixé à la
veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles
de la deuxième partie, non joints à l'examen
des crédits du projet de loi de finances pour 2000
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la deuxième
partie, non joints à l'examen des crédits du projet de loi de finances pour
2000, est fixé au vendredi 10 décembre 1999, à seize heures.
Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
modifiant le code général des collectivités territoriales et relatif à la prise
en compte du recensement général de population de 1999 pour la répartition des
dotations de l'Etat aux collectivités locales (n° 56, 1999-2000) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
jeudi 9 décembre 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : jeudi 9 décembre 1999, à seize
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 8 décembre 1999, à zéro heure cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ÉLECTION À l'ASSEMBLÉE NATIONALE
D'UN SÉNATEUR
M. le président du Sénat a été informé, par lettre du 7 décembre 1999 de M. le
ministre de l'intérieur, que M. Michel Charzat a été proclamé député le 5
décembre 1999 dans la 21e circonscription de Paris.
En application de l'article L.O. 137 du code électoral, M. Michel Charzat
cesse donc d'appartenir au Sénat. Toutefois, en vertu de l'article L.O. 180, la
vacance de son siège de sénateur ne sera proclamée qu'après l'expiration du
délai de recours contre l'élection ou, en cas de contestation, après la
décision du Conseil constitutionnel confirmant son élection à l'Assemblée
nationale.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Accès des rhumatologues à la radiologie
675.
- 7 décembre 1999. -
M. Michel Teston
attire l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale
sur les préoccupations exprimées par les rhumatologues et relatives à l'une des
mesures du plan stratégique de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM)
prévoyant de réserver l'accès à la radiologie aux seuls chirurgiens,
radiologues et cardiologues, excluant notamment les rhumatologues. Cette
interdiction présente pour les professionnels concernés des inconvénients tant
sur le plan économique que social. En effet, ils estiment qu'elle conduirait à
multiplier les dépenses de santé, ce qui va, bien entendu, à l'encontre de la
politique de maîtrise de celles-ci, puisque l'examen clinique et le bilan de
radiologie devront dorénavant faire l'objet de deux consultations distinctes.
De plus, les personnes âgées qui représentent une part importante de la
clientèle des rhumatologues et qui rencontrent des difficultés de transport
soit en raison de leur âge, soit de leur handicap apprécient la qualité du
service rendu par le rhumatologue, qui peut, dans un même temps, les examiner
et réaliser le bilan radiologique. C'est pourquoi il lui demande quelle est sa
position dans ce dossier, notamment dans le cadre du débat sur la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000.
Baisse des effectifs de la direction de l'équipement
du Pas-de-Calais
676.
- 7 décembre 1999. -
M. Léon Fatous
souhaite interpeller
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur la baisse des effectifs des directions de l'équipement, et plus
particulièrement celle du Pas-de-Calais. En effet, même si le ministère a
considérablement ralenti depuis 1997 la baisse des effectifs de l'équipement,
il s'avère que cette dernière reste plus importante que les autres, pour le
département du Pas-de-Calais. Cette situation et inquiétante pour un
département et une région qui ont toujours été sous-administrées (différentiel
de 20 % par rapport aux autres départements). Aussi il voudrait savoir s'il
sera tenu compte de cette situation.
Fermeture du secteur psychiatrique
du centre hospitalier Vauclaire
677.
- 7 décembre 1999. -
M. Bernard Cazeau
attire l'attention de
Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
sur l'avenir du centre hospitalier Vauclaire située à Montpon-Ménestérol. En
effet, la presse nationale et locale s'est fait l'écho des inquiétudes des
professionnels de santé, des élus et de la population quant à la recomposition
hospitalière avec la mise en place de la seconde génération des schémas
régionaux d'organisation sanitaire (SROS) qui tracent pour chaque région et
pour les cinq années à venir (1999-2004), les priorités en termes de santé
publique et d'amélioration de l'organisation de l'offre de soins. Toutefois, ce
SROS arrêté en septembre 1999 ne traite pas le sujet de la psychiatrie qui a
fait l'objet d'un schéma quinquennal adopté en 1997. Or, le centre de Vauclaire
a la particularité d'être un établissement exclusivement réservé au secteur
psychiatrique. Ces précisions apportées n'obèrent pas pourtant les inquiétudes
liées aux perspectives de ce centre hospitalier dans la mesure où son avenir et
sa pérennité passent par une large ouverture sur l'extérieur et un
rapprochement entre la population et les structures de prise en charge. A la
lecture du SROS du secteur psychiatrique, il n'apparaît nulle part,
explicitement, l'éventuelle fermeture du centre de Montpon-Ménestérol, ce qui
constitue un élément de satisfaction, mais le SROS met en revanche l'accent sur
la complémentarité qui doit jouer entre les hôpitaux de Périgueux, Bergerac,
Sarlat et Vauclaire. L'adapatation du dispositif de soins pour le rendre
accessible dans l'espace et dans le temps amène à penser qu'il pourrait s'agir
d'un rédéploiement dans l'espace. Auquel cas on peut supposer qu'il se fasse au
détriment de Vauclaire. L'augmentation de capacité de Périgueux par exemple et
le renforcement de la coopération pourraient se solder à terme par des
suppressions de lits, ainsi que par des transferts du personnel de Vauclaire.
Devant ces interrogations et ces incertitudes, et rappelant son attachement au
maintien de la qualité des services de santé dans le département de la
Dordogne, il souhaiterait connaître très précisément quelles seront les
modalités de ce redéploiement.
Situation sanitaire en Haute-Normandie
678. - 7 décembre 1999. - M. Thierry Foucaud attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur la situation sanitaire en Haute-Normandie. En effet, le schéma régional d'organisation sanitaire et sociale publié récemment reconnaît dans cette région une situation sociale dégradée, une situation sanitaire préoccupante et révèle parallèlement que la Haute-Normandie se caractérise par une densité médicale, paramédicale et un niveau d'équipement en lits d'hospitalisation inférieur à la moyenne nationale dans les différentes disciplines. Pourtant malgré ce constat, la Haute-Normandie verra son enveloppe hospitalière globale n'augmenter que de 2,55 %, soit 0,05 % de plus que la moyenne nationale. Cette envelope ne permettra même pas de préserver les moyens actuels. La réalité des établissements hospitaliers aujourd'hui, ce sont des réductions de personnel, des fermetures de lits et de services alors que la pénurie notamment de lits de médecine, de soins, est criante. Le décalage entre les besoins exprimés par les établissements et les dotations accordées ne cesse de croître. 1 500 agents hospitaliers de Rouen soutenus par les médecins se sont mis en grève et ont manifesté à plusieurs reprises ces dernières semaines pour dénoncer l'insuffisance des moyens budgétaires affectés à leurs établissements. Il en est de même dans nombre d'hôpitaux de Seine-Maritime et de l'Eure. C'est la raison pour laquelle il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour remettre à niveau les effectifs et doter la Haute-Normandie des crédits nécessaires au rattrapage de ses retards en matière de politique de santé.