Séance du 17 novembre 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Publication du rapport d'une commission d'enquête
(p.
1
).
3.
Dépôt de rapports du Gouvernement et d'un rapport de la Cour des comptes
(p.
2
).
4.
Candidatures à des organismes extraparlementaires
(p.
3
).
5.
Candidature à une commission
(p.
4
).
6.
Rappel au règlement
(p.
5
).
MM. Patrice Gélard, le président.
7.
Financement de la sécurité sociale pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
6
).
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales.
Discussion générale
(suite)
: MM. Jean-Louis Lorrain, Jean Boyer, Guy
Fischer, Jacques Bimbenet, Claude Domeizel, Claude Huriet, François Trucy.
Clôture de la discussion générale.
8.
Nomination de membres d'organismes extraparlementaires
(p.
7
).
9.
Nomination d'un membre d'une commission
(p.
8
).
10.
Financement de la sécurité sociale pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
9
).
Mmes Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité ; Dominique
Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale ; M. Charles
Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales.
Suspension et reprise de la séance
(p.
10
)
Article 1er (et rapport annexé)
(réservé)
Articles additionnels après l'article 1er (p.
11
)
Amendement n° 1 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le
ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 2 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le
ministre. - Retrait.
Amendement n° 3 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le
ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 2 A à 2 C. - Adoption (p.
12
)
Articles additionnels avant l'article 2 (p.
13
)
Amendement n° 110 de Mme Borvo. - Mme Nicole Borvo, M. Charles Descours,
rapporteur ; Mme le ministre. - Rejet.
Amendement n° 111 de Mme Borvo. - Mme Nicole Borvo, M. Charles Descours,
rapporteur ; Mme le ministre. - Rejet.
Amendement n° 112 de Mme Borvo. - Devenu sans objet.
Article 2 (p. 14 )
M. Charles Descours, rapporteur ; Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Yves
Fréville, Philippe Richert, Guy Fischer, Alain Vasselle.
Amendements identiques n°s 4 de la commission, 75 de M. Lorrain et 90 de M.
Louis Boyer ; amendement n° 113 de Mme Borvo. - MM. Charles Descours,
rapporteur ; Louis Boyer, Guy Fischer, Mmes le ministre, Nicole Borvo. -
Adoption des amendements n°s 4, 75 et 90 supprimant l'article, l'amendement n°
113 devenant sans objet.
Article 3 (p. 15 )
Amendements identiques n°s 5 de la commission et 91 de M. Louis Boyer ;
amendement n° 114 de Mme Borvo. - MM. Charles Descours, rapporteur ; Louis
Boyer, Mmes Nicole Borvo, le ministre, M. Yves Fréville. - Adoption des
amendements n°s 5 et 91 supprimant l'article, l'amendement n° 114 devenant sans
objet.
11.
Candidatures à une commission mixte paritaire
(p.
16
).
Suspension et reprise de la séance (p. 17 )
PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
12.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
18
).
13.
Financement de la sécurité sociale pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
19
).
Article 4 (p. 20 )
MM. Auguste Cazalet, Dominique Braye, Gérard Miquel, Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Amendements identiques n°s 6 de la commission, 76 de M. Lorrain, 92 de M. Louis
Boyer et 103 de M. Adnot ; amendements n°s 66 à 73 de M. Braye. - MM. Charles
Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Yves Fréville,
Philippe Adnot, Dominique Braye, Mme le secrétaire d'Etat, M. Alain Vasselle. -
Retrait des amendements n°s 92, 66, 67 et 69 à 72 ; adoption des amendements
n°s 6, 76 et 103 supprimant l'article, les amendements n°s 68 et 73 devenant
sans objet.
Article additionnel après l'article 4 (p. 21 )
Amendement n° 74 de M. Braye. - MM. Dominique Braye, Charles Descours, rapporteur. - Retrait.
Article 4
bis.
- Adoption (p.
22
)
Article additionnel avant l'article 5 (p.
23
)
Amendement n° 96 de M. Arnaud. - MM. Philippe Arnaud, Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat, M. Claude Huriet. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 5 (p. 24 )
Amendement n° 7 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 5 (p. 25 )
Amendement n° 97 de M. Arnaud. - MM. Philippe Arnaud, le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat, M. Claude Huriet. - Rejet.
Article 5
bis.
- Adoption (p.
26
)
Article additionnel après l'article 5
bis
(p.
27
)
Amendement n° 84 du Gouvernement. - Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité ; MM. Charles Descours, rapporteur ; Alain Vasselle, Mme Nicole Borvo. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel avant l'article 6 (p. 28 )
Amendement n° 8 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre, M. Yves Fréville. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 6 (p. 29 )
Amendements n°s 9 rectifié
bis
de la commission et 115 de Mme Borvo. -
MM. Charles Descours, rapporteur ; Guy Fischer, Mme le ministre, M. Yves
Fréville. - Adoption de l'amendement n° 9 rectifié
bis,
l'amendement n°
115 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (p. 30 )
M. Jean Chérioux, Mme Nicole Borvo.
Amendements n°s 116 à 118 de Mme Borvo. - Mme Nicole Borvo, M. Charles
Descours, rapporteur ; Mme le ministre, M. Alain Joyandet, au nom de la
commission des finances. - Irrecevabilité des amendements n°s 116 et 117,
l'amendement n° 118 devenant sans objet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 7 (p. 31 )
Amendements n°s 119 et 120 de Mme Borvo. - Mme Nicole Borvo, M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le garde des sceaux, M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité des deux amendements.
Article 8 (p. 32 )
Mme Borvo.
Amendement n° 10 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le
ministre, M. Claude Huriet. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 (p. 33 )
Amendements n°s 11 à 13 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ;
Mme le ministre. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 10 (p. 34 )
Amendements identiques n°s 14 de la commission et 93 de M. Louis Boyer. - MM.
Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Louis
Boyer, Mme le ministre, M. Claude Domeizel. - Retrait de l'amendement n° 93 ;
adoption de l'amendement n° 14 supprimant l'article.
Renvoi de la suite de la discussion.
14.
Dépôt de projets de loi
(p.
35
).
15.
Retrait d'un texte soumis en application de l'article 88-4 de la
Constitution
(p.
36
).
16.
Dépôt de rapports
(p.
37
).
17.
Ordre du jour
(p.
38
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
PUBLICATION DU RAPPORT
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
M. le président.
J'informe le Sénat qu'a expiré ce matin le délai de six jours nets pendant
lequel pouvait être formulée la demande de constitution du Sénat en comité
secret sur la publication du rapport fait au nom de la commission d'enquête sur
la conduite de la politique de sécurité menée par l'Etat en Corse, créée en
vertu d'une résolution adoptée par le Sénat le 19 mai 1999.
En conséquence, ce rapport a été imprimé sous le n° 69 et mis en distribution
aujourd'hui, mercredi 17 novembre 1999.
3
DÉPÔT DE RAPPORTS DU GOUVERNEMENT
ET D'UN RAPPORT
DE LA COUR DES COMPTES
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre :
- le premier rapport sur la mise en oeuvre de la convention relative aux
droits de l'enfant, établi en application de l'article 76 de la loi n° 93-121
du 27 janvier 1993, portant diverses mesures d'ordre social ;
- le rapport d'exécution pour 1998 établi en application de l'article 6 de la
loi de programme du 6 janvier 1995 relative à la justice ;
- le rapport présentant un bilan de l'application de la loi n° 94-638 du 25
juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités
économiques dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à
Mayotte ;
Par ailleurs, M. le président a reçu, de M. le Premier président de la Cour
des comptes, un rapport relatif à la politique portuaire française.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
4
CANDIDATURES À DES ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de
trois organismes extraparlementaires.
La commission des affaires économiques a fait connaître qu'elle propose la
candidature de M. Henri Revol pour siéger au sein du comité consultatif de
l'utilisation de l'énergie.
La commission des affaires étrangères propose la candidature de M. Paul
d'Ornano pour siéger au sein du conseil d'administration de l'agence pour
l'enseignement français à l'étranger.
Enfin, la commission des finances propose la candidature de M. Auguste Cazalet
pour siéger au sein de la commission centrale de classement des débits de
tabac.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à
l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai
d'une heure.
5
CANDIDATURE À UNE COMMISSION
M. le président.
J'informe le Sénat que le groupe du Rassemblement pour la République a fait
connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la
commission des affaires sociales en remplacement de M. Simon Loueckhote,
démissionnaire.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
6
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous pouvons
légitimement nous demander si nous sommes encore dans un Etat de droit.
Je m'explique.
Depuis quand une circulaire, qui n'est pas une circulaire d'interprétation
mais une circulaire normative, peut-elle se substituer à un décret adopté en
Conseil d'Etat avec l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des
libertés ?
Depuis quand une circulaire peut-elle outrepasser les décisions du Conseil
constitutionnel, qui, selon les termes mêmes du deuxième alinéa de l'article 62
de la Constitution, « s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités
administratives et juridictionnelles » ?
Depuis quand peut-on obliger le Parlement à valider
a posteriori
une
circulaire, qui aura été déclarée contraire à la loi par le Conseil d'Etat,
pour tenir compte des situations personnelles ?
Nous ne sommes plus dans un Etat de droit lorsque le garde des sceaux se
permet de faire de telles choses ou lorsqu'il autorise le personnel placé sous
son autorité à rédiger de telles circulaires.
Enfin, depuis quand une circulaire peut-elle être adressée avant que la loi
ait été promulguée et publiée au
Journal officiel
?
Ces graves atteintes à la hiérarchie des normes m'amènent à m'adresser
solennellement à M. le président du Sénat pour qu'il demande à M. le Président
de la République, gardien de la Constitution en vertu de son article 5, de
veiller à ce que le texte constitutionnel et la hiérarchie des normes soient
respectés.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Christian de La Malène.
C'est un scandale !
M. le président.
Conformément à votre souhait, mon cher collègue, votre intervention sera
transmise à M. le président du Sénat.
7
FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 40,
1999-2000) de financement de la sécurité sociale pour 2000, adopté par
l'Assemblée nationale. [Rapport n° 58 (1999-2000) et avis n° 68
(1999-2000).]
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame la ministre, mes chers collègues, hier soir, au début de la séance de
nuit, notre collègue M. Machet a été victime d'un malaise alors qu'il était à
la tribune pour présenter son rapport. Je veux simplement, en cet instant, vous
donner de ses nouvelles : M. Machet est actuellement au repos, plus qu'en
observation, au Val-de-Grâce, et il devrait pouvoir rentrer chez lui dès
demain.
M. le président.
Nous vous remercions de ces bonnes nouvelles, monsieur le président.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Louis
Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quatre
ans déjà, le Sénat se réunissait pour débattre des grandes orientations du plan
Juppé. L'objectif majeur de la réforme engagée en 1996 était l'indispensable
rénovation du système de gestion paritaire hérité de l'ordonnance de 1945,
grâce, notamment, à un partage clair des responsabilités entre, d'un côté, les
partenaires sociaux, qui représentent les assurés, avec le patronat, et, de
l'autre, l'Etat, assisté en cela, évidemment, par la représentation
nationale.
Le grand mérite de cette réforme a été de mettre en place des outils
permettant une meilleure maîtrise des dépenses, et le Gouvernement reprend à
son compte la plupart de ces outils mis en place par son prédécesseur.
Je pense, en particulier, à l'Agence nationale d'accréditation, à la réforme
de l'organisation des caisses et aux agences régionales de l'hospitalisation,
dont le rôle est même élargi dans le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2000.
L'assurance maladie sera le premier point de mon propos.
Après des mois de tergiversations - certes, le sujet est difficile - nous
voilà donc engagés, madame la ministre, dans une politique particulièrement
sévère de régulation des dépenses de santé. Ce n'est pas mal. Je pense, en
particulier, à l'instauration de lettres clés flottantes, et à la délégation
d'objectifs au profit, si l'on peut dire, de la CNAMTS.
Il est vrai que la branche maladie est déficitaire de 12 milliards de francs
et que les dépenses de santé augmentent au rythme de 3,8 % par an depuis
1998.
Reprenant certaines propositions d'économies présentées par le directeur de la
CNAMTS, M. Johanet, le Gouvernement souhaite charger la caisse nationale
d'assurer le respect de l'objectif de dépenses par les professions médicales.
C'est elle qui fixera le montant prévisionnel d'évolution du poste honoraires
et, tous les quatre mois, elle devra faire le point pour décider des
modifications de la nomenclature à l'occasion d'un rapport d'étape.
Le président de la CNAMTS a parlé de situation ubuesque. Sans entrer dans la
polémique, il est vrai que cela se traduira par une cinquantaine de
négociations, profession par profession, trois fois par an. Nous espérons que
l'on pourra remédier à cet état de fait, car nous craignons que quelques
professions ne soient stigmatisées sans aucun approfondissement de leur
situation.
S'agissant du système des lettres clés flottantes - ce mot passe peut-être mal
! - les variations du taux de rémunération de l'acte en fonction des dépenses
constatées impliquent que les praticiens de la spécialité soient sanctionnés
collectivement, sans recherche des disparités.
Le système germanique, souvent invoqué, est différent : le praticien est lié
contractuellement, à titre personnel, avec les services sociaux du Land en
Allemagne ; il s'agit de mesures individuelles et la sanction l'est aussi.
Le traitement des indemnités journalières et des transports sanitaires, sous
contrôle de justification médicale, nous conduit à nous interroger sur
l'efficacité du procédé, et surtout sur sa rentabilité, au vu des moyens des
médecins conseils. Il ajoute à la suspicion, qui va à l'encontre du climat de
confiance indispensable pour traiter avec le corps médical.
Il serait plus utile de rechercher pourquoi les indemnités journalières
augmentent de 7,2 % et de vérifier les arrêts de longue durée. Les plans de
soins discutés avec les malades peuvent avoir leur utilité, car, on le sait 10
% des malades consomment 80 % des crédits de l'assurance maladie.
Il est donc nécessaire de redéfinir les besoins, encore que ceux qui souffrent
de maladies de longue durée soient parfaitement connus des caisses.
La Cour des comptes relève qu'il n'y a pas eu de véritable politique de
gestion du risque, c'est-à-dire de maîtrise des dépenses. Elle invoque
l'absence de stratégie nationale de la branche maladie. Quant aux contrôles,
ils sont, dit-elle, mal orientés et conçus comme devant déboucher sur des
sanctions dont le nombre et l'efficacité sont très faibles.
Je ne considère pas ces remarques comme des arguments politiciens. Nous ne
pouvons qu'admettre,
dixit
la Cour des comptes, que « la politique des
caisses peut être recadrée vers les risques les plus importants et les actions
financières les plus efficaces. » Il faut donc une analyse des risques, des
pratiques et aussi des comportements.
Si l'équilibre des comptes nécessite des outils efficaces d'analyse, des
moyens et moins d'opacité, la pratique médicale doit, elle aussi, changer. En
effet, la certitude du savoir et le manque d'écoute, peut-être pour des raisons
de temps, engendrent des dépenses souvent inutiles.
L'acte médical est en pleine transformation. Mais les bonnes pratiques ne
relèveront-elles que des conférences de consensus, validées par les caisses, du
respect de la discipline informatique, en particulier en télétransmissions, ou
de consultations assistées par ordinateur avec des logiciels agréés ? Le trait
est peut-être un peu appuyé, mais cette médecine de techniciens n'est
certainement pas la médecine que nous souhaitons, même s'il est vrai qu'il faut
tenir compte des technologies nouvelles.
A la tracasserie administrative, à la culpabilisation, nous opposons la
responsabilisation des praticiens, mais aussi des assurés, par le contrat.
L'accès aux soins passe aussi par l'accès aux nouvelles technologies. La
réforme du tarif interministériel des prestations sanitaires, le TIPS,
via
le comité économique des produits de santé, est indispensable, et
cela figure dans la loi.
La progression des dépenses de 15 % peut s'expliquer partiellement par des
raisons structurelles. Il faut mettre en place une nouvelle méthodologie de
négociation des prix, améliorer le rapport entre la qualité et le coût, et
accélérer les procédures de mise à disposition et la procédure de
référencement.
Alors que la loi de financement de la sécurité sociale s'est malheureusement
limitée à des débats sur l'allégement des cotisations sociales, au paritarisme,
ainsi qu'à l'autonomie des salariés et des patrons en matière d'assurances
maladie, nous souhaitons au Sénat instaurer un débat sur la santé publique.
Quant à la branche famille, qui constitue mon deuxième point, elle ne
bénéficie pas d'un effort financier vraiment significatif : 1 milliard de
francs de mesures nouvelles, alors que cette branche devrait être excédentaire
en 2000 de 6 milliards de francs, et ce après la stagnation des années 1998 et
1999.
Manifestement, la politique de la famille n'est pas une priorité du
Gouvernement. J'avais d'ailleurs dénoncé cette absence de politique lors de
l'examen des projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 et
1999.
Particulièrement critiquables sont sans doute les différentes ponctions qui
sont effectuées sur la branche famille. Il faut convenir que la loi de
financement est, à cet égard, de moins en moins lisible, avec la multiplication
des fonds, pour les 35 heures notamment, sans parler de la prise en charge, par
la CNAF, la Caisse nationale des allocations familiales, de la majoration de
l'allocation de rentrée scolaire. L'heure est à la débudgétisation massive -
près de 80 milliards de francs en 2000 - et aux financements croisés.
La loi de financement social gagnerait sans doute en transparence si les
recettes de la sécurité sociale étaient présentées par branche, à l'instar des
dépenses. C'est l'une des suggestions particulièrement opportunes de la Cour
des comptes. Ainsi pourrions-nous constater plus clairement les transferts
opérés de branche à branche, en l'occurrence au détriment des familles.
Une vraie politique familiale est pourtant possible. La loi « famille »,
initiée par Mme Simone Veil, en est l'illustration. Améliorer l'accueil des
jeunes enfants et l'AGED, l'allocation de garde d'enfant à domicile, étendre le
bénéfice de l'allocation parentale d'éducation, correspondent toujours à de
vraies priorités dans une société où l'urbanisation et le développement du
travail féminin sont des faits durables. On nous oppose le coût « exagéré » du
plan Veil alors que l'on s'apprête à engager notre pays dans une véritable
spirale dépensière avec les 35 heures.
Le désengagement de l'Etat à l'égard des familles rompt avec la tradition
d'une politique ambitieuse, d'autant plus nécessaire que les attentes sont
immenses.
Le nouveau souffle dont la politique familiale a impérativement besoin passe,
certes, par une augmentation de l'effort financier, mais aussi par une certaine
responsabilisation des familles. Dans un monde qui change, l'Etat ne peut
durablement répondre à l'ensemble des besoins de la société.
Une réforme de la politique familiale consisterait en priorité à améliorer
l'ensemble des dispositifs permettant aux parents de mieux concilier l'exercice
d'une activité professionnelle et la vie familiale.
Je pense par exemple au développement du temps partiel, qui, en France, est,
dans 60 % des cas, un temps partiel choisi. Ce n'est pas le travail à temps
partiel en tant que tel qui suscite les réticences de nombre de salariés mais
certains de ses effets pervers : la faiblesse des rémunérations, la faible
qualification, certaines failles de la protection sociale et la
non-réversibilité. Il convient donc d'agir sur ces différents aspects si on
veut favoriser une forme de travail qui corresponde véritablement tant aux
besoins des entreprises qu'aux attentes des salariés.
D'autres propositions me semblent intéressantes. Je pense à une réforme des
droits de succession afin de faciliter, par exemple, la transmission entre
grands-parents et petits-enfants, ou encore le développement d'une épargne
spécifique au niveau des familles.
La branche famille, ce ne sont pas que des lignes budgétaires, un concept
comptable, c'est aussi un support à un service public. La répartition des
prestations sociales et familiales est au bord de l'implosion. Les caisses
d'allocations familiales versent le RMI, l'allocation - aux adultes handicapés,
les aides au logement, etc. Elles sont confrontées à la montée de la précarité,
ce qui les amène à gérer près de trente prestations. Six millions de personnes,
soit 10 % de la population, dépendent des prestations versées par la branche
famille, et le nombre des allocataires progresse de 8 % par an.
La présidente de la CNAF - et d'autres avec elle - demande une simplification
administrative ; on dénombre en effet 15 000 règles et 270 modèles de pièces
justificatives. Ce programme de simplification peut être élaboré avec l'Etat.
Voilà un véritable projet politique.
A la veille de la mise en oeuvre de la couverture médicale universelle, qui va
nécessiter des millions de justificatifs de ressources, le climat dans les CAF
est tendu, vous le savez, tant au niveau des employés que des usagers. Parce
qu'il faut lutter contre la précarité, la demande sociale risque d'évincer la
politique familiale globale. C'est pourquoi il me semble primordial de rappeler
nos priorités non de façon incantatoire mais de façon volontariste.
Je conclurai par un autre dossier, non moins important, celui des
retraites.
Alors que la branche vieillesse risque d'être durablement déficitaire dans
l'avenir, diverses augmentations de dépenses sont annoncées mais aucune mesure
sérieuse n'est engagée afin de juguler, au début du prochain siècle, la dérive
des comptes des régimes de retraite par répartition.
Les experts et l'ensemble des responsables politiques ou syndicaux
reconnaissent à présent que, dès 2006-2010, la situation financière des régimes
par répartition risque d'être intenable. Beaucoup parlent de 300 milliards de
francs de besoins de financement en 2015 ! Les causes sont connues : la
réduction de la durée moyenne d'activité des salariés, un chômage persistant
et, surtout, l'arrivée à la retraite des générations nombreuses nées après la
Seconde Guerre mondiale, alors que le taux de natalité depuis les années
soixante reste insuffisant. En 2020, au niveau du seul régime général, une
personne seulement sera en âge de cotiser pour un retaité. Mais, comme je le
disais, ce fait est connu.
Face à la gravité de la situation, bien décrite par le rapport Charpin, la
création en 1999 d'un fonds de garantie doté de 2 milliards de francs, soit
l'équivalent d'une journée seulement de paiement des retraites, paraît une
réponse bien dérisoire. On nous annonce à présent 20 milliards de francs
environ en 2000, alors qu'il faudrait 3 à 4 points du PIB sur vingt-cinq ans et
qu'il ne nous reste que la période allant d'aujourd'hui jusqu'à l'année 2006
pour constituer des réserves. Par ailleurs, les financements envisagés en 2000
sont d'origines fort diverses et, point important, leur pérennité est loin
d'être assurée. Parallèlement, on ponctionne une partie des excédents du fonds
de solidarité vieillesse, le FSV, pour financer les 35 heures.
Par son attentisme, le Gouvernement donne l'impression de « jouer la montre ».
Après des auteurs peut-être trop réalistes, certains « apôtres », dénoncent
aujourd'hui l'agitation, la dramatisation du problème. Or, je crois que l'on
peut dire que sérénité n'est pas synonyme de passivité.
Parmi les solutions envisagées figure évidemment la constitution facultative
d'une épargne retraite par capitalisation.
Voilà un an environ, le Gouvernement nous a plus ou moins annoncé la mise en
place d'un système d'épargne retraite aux contours qui n'étaient pas encore
très nets... et qui ne le sont toujours pas ! Selon les dernières déclarations
de M. Strauss-Kahn, en octobre dernier, le Gouvernement, réfléchissait à une
réforme d'ensemble de l'épargne salariale. Très bien ! La proposition de loi
adoptée par le Sénat le mois dernier peut, à cet égard, servir de référence
dans l'avenir puisqu'elle garantit à la fois la pérennité des régimes
répartition et le bénéfice d'un complément de retraite par capitalisation en
faveur des futurs pensionnés. Il importe que l'ensemble des salariés ait accès
aux fonds de capitalisation ; ceux-ci existent d'ailleurs d'ores et déjà dans
certains secteurs d'activité, dans la fonction publique ou dans de grandes
entreprises.
S'agissant des régimes spéciaux, nous attendons toujours des mesures
concrètes, alors que le rapport démographique de certains régimes se détériore
de façon inexorable. Il revient au Gouvernement de prendre ses responsabilités
; la recherche de l'intérêt général contre tous les égoïsmes catégoriels n'est
ni une tâche aisée, ni « un long fleuve tranquille », nous le savons.
Une réforme d'ensemble est indispensable : la France de l'an 2000 a beaucoup
évolué depuis les années d'après-guerre et de la reconstruction. Les métiers
ont eux-mêmes changé. D'autres besoins apparaissent : que répondre, par
exemple, aux sapeurs-pompiers professionnels qui revendiquent un départ
anticipé à la retraite du fait de la pénibilité de leur travail ? Nous sommes
en pleine actualité.
Une autre réforme s'impose, celle des règles de cumul emploi-retraite, le
système actuel s'avérant complexe et injuste.
Enfin, votre projet de loi, madame la ministre, même s'il s'inscrit dans la
continuité, ne répond que très imparfaitement aux défis qui nous sont lancés et
auxquels notre protection sociale est confrontée : le vieillissement de la
population, les difficultés financières présentes ou futures des régimes de
retraite par répartition et l'augmentation structurelle des dépenses
d'assurance maladie. Le défi est gigantesque, nous le savons, et nous essayons
de le relever avec vous.
C'est pourquoi je soutiendrai, avec mes collègues du groupe de l'Union
centriste, la commission des affaires sociales du Sénat dans ses orientations,
en soulignant l'importance du travail qui a été réalisé et en souhaitant que
nos rapporteurs soient non seulement entendus mais écoutés.
(Applaudissements sur les través de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la
revalorisation des pensions de retraite, inscrite à l'article 11 de ce projet
de loi, ne doit pas faire oublier les ponctions opérées par ce gouvernement sur
les revenus des retraités depuis son arrivée au pouvoir.
(Protestations sur
les travées socialistes.)
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ça, il faut le faire !
M. Jean Boyer.
Le basculement des cotisations maladie des salariés vers la CSG a certes été
engagé par le précédent gouvernement mais vous l'avez poursuivi « au pas de
charge » - si je puis me permettre cette expression - sans établir
d'évaluation claire des conséquences de ce transfert sur les revenus.
M. François Autain.
C'est ce qu'il fallait faire !
M. Jean Boyer.
Or, si les cotisations sociales ne s'appliquaient qu'aux revenus d'activité ou
de remplacement, la CSG, elle, s'étend aux revenus de l'épargne.
M. François Autain.
Heureusement ! C'est fait pour ça !
M. Jean Boyer.
Le taux de la CSG a augmenté de plus de quatre points en 1998, passant de 3,4
% à 7,5 %. Dans le même temps, vous avez institué un nouveau prélèvement social
de 2 %, dont l'assiette est beaucoup plus large que les prélèvements auxquels
il est censé se substituer.
Avec l'augmentation du taux de la CSG, la création de cette nouvelle taxe et
le prélèvement de 0,5 % au profit de la caisse de remboursement de la dette
sociale, c'est au total un prélèvement social de 10 % qui s'applique aux
revenus du patrimoine et de placement.
Les retraités sont les principaux perdants de l'opération : les revenus du
patrimoine, patiemment constitués au cours d'une vie de travail, représentent
un quart de leurs revenus. Ce bond des prélèvements sur les revenus de
l'épargne de 3,4 % à 10 % pénalise des millions de retraités qui ont besoin de
ces revenus pour compléter leur pension.
Les retraités sont lésés et ils s'en rendent compte actuellement, puisque
notre débat coïncide avec l'arrivée au domicile des épargnants de l'appel du
Trésor public pour régler la facture de la CSG.
Ainsi, nombre de contribuables viennent enfin de comprendre comment se traduit
très concrètement la politique que vous avez engagée depuis deux ans : elle
n'avance guère en ce qui concerne les réformes relatives à la protection
sociale mais elle reste toujours aussi gourmande en impôts !
Quand vous affirmiez, madame la ministre, que ce choix politique permettrait
d'abonder le budget de la sécurité sociale de 25 milliards de francs
supplémentaires, bien peu de Français imaginaient qu'ils seraient
personnellement concernés.
Aujourd'hui, avec l'arrivée des feuilles d'impôts pour la CSG, ils commencent
à comprendre comment la méthode Jospin, si modérée en apparence dans l'annonce,
se traduit finalement par des impôts supplémentaires.
Ne serait-il pas souhaitable, madame la ministre, qu'une étude détaillée soit
faite des incidences sur les revenus des retraités de ces mouvements fiscaux,
d'une ampleur et d'une rapidité inégalées ? Les Français ont droit à la clarté.
Ils ont le droit de connaître les conséquences de ces réformes sur la
répartition des revenus dans notre pays.
(Applaudissements sur les travées
des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une fois
encore, devant notre assemblée, permettez-moi de me faire l'interprète des
retraités et des personnes âgées, de vous faire part de leur amertume à
l'examen des articles de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale
concernant la branche retraite.
Leurs organisations représentatives ont déjà collecté plus de 400 000
signatures pour attester d'un massif rejet des dispositions budgétaires et
fiscales qui, depuis plus de dix ans, rognent leur pouvoir d'achat.
M. Alain Gournac.
Ça, c'est vrai !
M. Guy Fischer.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale adopté par l'Assemblée
nationale le 2 novembre dernier apporte certes quelques modestes améliorations
à la situation des retraités. Mais l'on ne peut réellement prétendre qu'une
augmentation de 0,5 % des retraites, de 1 % du minimum vieillesse et de 2 % des
pensions de réversion constitue un effort suffisant.
Au moment où l'inflation est de 0,9 %, une nouvelle réduction du pouvoir
d'achat des retraités est-elle acceptable ? On sait en effet que celui-ci a
subi une baisse de plus de 10 % en une décennie du fait de l'alourdissement de
la contribution sociale généralisée, de la réduction du plafond de l'abattement
de 10 % de l'assujettissement à la contribution pour le remboursement de la
dette sociale, du supplément de loyer de solidarité et, plus récemment, du
moindre remboursement, voire du déremboursement, de certains actes et produits
indispensables ainsi que de la mise à l'écart de la couverture médicale
universelle des retraités relevant du fonds de solidarité vieillesse.
N'est-il pas consternant, au moment où la commission des comptes de la
sécurité sociale fait apparaître une situation proche de l'équilibre pour la
branche vieillesse, que M. Jean-Michel Charpin propose de porter la durée de
cotisations à quarante, voire à quarante-deux ans et demi, et le MEDIF à
quarante-cinq ans ?
Comment admettre que l'on maintienne l'indexation des pensions sur les prix,
et non sur les salaires, alors que la croissance devrait atteindre 3 % en l'an
2000, comme vient de la confirmer un récent rapport de l'OCDE ?
Enfin, est-il décent de refuser de relever le plafond de l'abattement de 10 %
dont bénéficient les retraités alors que la Bourse de Paris vient d'inscrire
son treizième record consécutif, portant sa progression à 28 % depuis le début
de l'année ?
Au risque de me répéter - mais, malheureusement, ce projet de budget se répète
aussi - je dirai qu'il est profondément injuste de refuser un effort
exceptionnel, alors que la conjoncture n'a jamais été aussi prometteuse.
La régulière érosion du pouvoir d'achat des retraités est d'autant plus
inacceptable que ces derniers jouent de plus en plus fréquemment un rôle
charnière entre les générations. En effet, de modestes retraités contribuent,
par la force des choses, à aider des enfants en difficulté, voire des
petits-enfants, étudiants ou chômeurs, qui n'ont pas encore fait leur entrée
dans la vie active.
M. Charles Descours,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Excellent !
M. Guy Fischer.
J'en viens maintenant, mes chers collègues, à deux aspects de la politique
concernant les retraités et les personnes âgées qui me préoccupent tout
particulièrement.
Dans cette assemblée, nous avons récemment débattu de deux propositions de loi
visant à réaffirmer le mécanisme de la loi dite « Thomas », en généralisant un
étage supplémentaire de retraite par capitalisation. Ces fonds de pension, ces
fonds de retraite, qu'importe comment on les nomme, feraient dépendre les
retraites des performances des marchés financiers, ajouteraient des éléments
d'instabilité sur les marchés financiers internationaux, ne permettraient pas
de verser une rente de 1 000 francs par mois à tous les retraités,
déplaceraient l'épargne - sans en créer - vers les produits les plus
subventionnés. En outre, ces fonds n'accorderaient aucun financement
supplémentaire aux petites, aux moyennes et aux très petites entreprises.
Les fonds déjà créés en France - je n'évoquerai pas ceux qui existent aux
Etats-Unis - sont un échec, ne serait-ce que dans la mesure où ils ne
concernent qu'environ 10 % des bénéficiaires potentiels.
Je crains de ce fait que le fonds de réserve créé l'an dernier ne soit une
préfiguration de ce « troisième étage » de notre système de retraite, et
j'adjure le Gouvernement de ne pas céder aux sirènes des systèmes de fonds de
pension à l'anglo-saxonne, ce qui conduirait à augmenter les prélèvements et à
réduire les prestations, à favoriser les salariés dont les revenus importants
permettent d'épargner pour leurs vieux jours au détriment des salariés modestes
et des chômeurs. Avec un tel dispositif, le principe de solidarité ne pourrait
qu'être gravement remis en cause.
J'en viens, enfin, à la loi du 24 janvier 1997 instaurant la trop inégalitaire
prestation spécifique dépendance et au souci des organisations de retraités de
mettre en place une prestation autonomie dans le cadre de la sécurité
sociale.
Les quarante-trois propositions de Mme PauletteGuinchard-Kunstler, ainsi que
les propositions figurant dans le Livre blanc en faveur d'une prestation
autonomie élaboré par les organisations représentatives de l'aide à domicile et
de l'accueil des personnes âgées, pourraient servir de base.
Dans le temps qui m'est imparti, je ne dresserai pas un bilan complet, je me
bornerai à rappeler le plafond trop bas des conditions de ressources, le
montant insuffisant de cette prestation en nature, les disparités scandaleuses
entre départements, entre PSD à domicile et en établissement, les critères
contestables établissant les stades de dépendance et l'inadaptation de la
grille AGGIR, autonomie gérontologie groupe iso-ressources.
La conjuguaison de ces divers éléments fait que des personnes qui touchaient
précédemment l'allocation compensatrice pour tierce personne en établissement
ne bénéficient désormais d'aucune aide, puisqu'elles n'entrent plus dans le
champ d'application de la PSD et que le plafond, bien trop bas, du recours sur
succession décourage nombre de personnes âgées modestes. Ces personnes âgées
ont épargné toute leur vie pour acquérir un logement ou une maison et elles
souhaitent transmettre le fruit de leur travail et de leurs économies de toute
une vie à leurs enfants.
Je vous demande instamment, madame la ministre, de maintenir au moins le
pouvoir d'achat des retraites, du minimum vieillesse et des pensions de
réversion, dans l'attente du résultat des consultations engagées par le
Gouvernement. Ces concertations approfondies devraient, à notre sens, porter
non seulement sur le pouvoir d'achat, mais également sur toutes les grandes
questions de société qui auront des conséquences sur le niveau de vie des
retraités et des personnes âgées : je pense bien sûr aux fonds de pension, à la
dépendance, mais également à la fiscalité, à la santé et à la protection
sociale. Enfin, je réaffirmerai notre attachement au système des retraites par
répartition et notre opposition résolue à tout système de capitalisation. Ce
sont des réponses à ces questions fondamentales que nous attendons, madame la
ministre. Je suis persuadé que vous saurez nous donner les assurances
nécessaires et j'espère vivement que le Gouvernement comprendra l'urgente
nécessité de maintenir le pouvoir d'achat des retraités et des personnes âgées,
et d'étudier l'avenir de notre système de retraites.
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Bimbenet.
M. Jacques Bimbenet.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c'est la
quatrième année consécutive que nous discutons d'un projet de loi de
financement de la sécurité sociale.
Les Français savent que leur assurance maladie est en déficit et chacun se
demande pour combien de temps encore.
Si l'on peut constater cette année un redressement des comptes, il est bien
évident que ce résultat est très largement dû à la croissance. Je ne peux que
me réjouir de ce retour à l'équilibre de la sécurité sociale, car il ne faut
pas oublier que le déficit était, en 1997, de 53 milliards de francs. Mais on
doit à la vérité, de dire que les temps n'étaient pas du tout les mêmes !
Néanmoins, cet examen me conduit à exposer quelques craintes.
La première concerne la création du fonds de financement de la réforme des
cotisations patronales de sécurité sociale. Ce fonds, institué pour financer en
partie les exonérations de charges patronales créées pour le passage aux 35
heures, sera notamment alimenté par une nouvelle taxe : la contribution sociale
sur les bénéfices des sociétés.
Sur la forme, ce fonds n'a pas sa place dans une loi de financement de la
sécurité sociale, laquelle devrait être consacrée aux seuls enjeux de la
protection sociale.
C'est, me semble-t-il, à tort que le Gouvernement fait figurer dans cette loi
le financement de la politique de l'emploi. Car, à l'évidence, il ne s'agit pas
d'une réforme de l'assiette des cotisations patronales.
Je ne m'étendrai pas longuement sur ce point car je ne souhaite pas que le
débat d'aujourd'hui soit occulté par le projet de loi sur les 35 heures, comme
il l'a malheureusement été à l'Assemblée nationale. Toutefois, il me paraît
fâcheux d'alourdir encore et encore la fiscalité de nos entreprises.
La France fait partie des pays de l'Union européenne où le taux d'imposition
des entreprises est le plus élevé. Une telle mesure risque de porter atteinte à
la croissance des entreprises et à leur compétitivité, entraînant une fois de
plus une vague de délocalisations.
Votre projet de loi, madame la ministre, prévoit de financer également ce
fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité
sociale par l'extension du champ d'application de la taxe générale sur les
activités polluantes, créée en 1999, aux produits phytosanitaires, aux lessives
et aux granulats.
Cette taxe servira dorénavant à financer un allégement de charges plutôt que
des mesures destinées à protéger l'environnement. Cette nouvelle affectation du
produit d'une taxe va permettre au Gouvernement, par le biais d'un artifice
comptable, de prétendre que les prélèvements obligatoires n'augmentent pas. Les
coûts de production augmenteront cependant, sans pour autant préserver
l'environnement.
Tout comme la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés, la taxe
générale sur les activités polluantes est affectée à une autre fin, à savoir le
financement des 35 heures. Personnellement, j'estime que c'est tout à fait
regrettable.
Par ailleurs, il sagit là d'une remise en question du principe «
pollueur-payeur », ce qui ne contribuera pas à convaincre les entreprises que
le Gouvernement fait de la protection de l'environnement l'une de ses
priorités.
Ma seconde crainte concerne l'avenir des retraites. Chacun de nous en a
conscience - et le rapport Charpin l'a mis en exergue - l'allongement de
l'espérance de vie, les conséquences du baby-boom de 1946, le chômage, ne
permettront pas à la France de préserver son système de retraite actuel.
D'ici à 2006, le nombre de retraités va considérablement augmenter et le
nombre d'actifs progressivement diminuer. Ce problème n'a donc rien de virtuel.
Il est inscrit dans la démographie, et les échéances se rapprochent.
Aussi, je ne peux qu'être réservé quant aux mesures proposées pour financer
les retraites. Tout d'abord, je m'interroge sur la réelle motivation du
Gouvernement, puisque les textes réglementaires relatifs au fonds de réserve
pour les régimes d'assurance vieillesse, institué par la loi de financement de
la sécurité sociale pour 1999, viennent juste d'être publiés au
Journal
officiel,
soit un an après le vote de la loi.
Pour ma part, je ne vois aucun inconvénient à ce que ce fonds de réserve
puisse bénéficier aujourd'hui de recettes exceptionnelles de caractère non
fiscal. Je pense notamment aux fonds des caisses d'épargne ou aux libéralités
de la Caisse des dépôts. L'an dernier, le Sénat n'a d'ailleurs pas supprimé le
fonds de réserve.
Je suis en revanche plus que réservé sur son alimentation par le détournement
des recettes de la sécurité sociale, qu'il s'agisse du prélèvement de 2 % sur
les revenus du patrimoine ou de la ponction sur les excédents de la branche
vieillesse.
En effet, tant que le Gouvernement n'aura pas annoncé ses orientations pour la
réforme des retraites, tant qu'il n'aura pas annoncé quels efforts doivent être
faits et comment ils doivent être répartis, il me semble tout à fait prématuré
de modifier, en aveugle, les flux financiers de la protection sociale.
L'avenir des retraites nécessite une véritable réforme et il serait
préjudiciable pour nos concitoyens de trop attendre.
Il est établi aujourd'hui que relever ce défi démographique et financier passe
par la création d'un système de retraite mixte, répartition-capitalisation.
C'est pour toutes ces raisons que je voterai le texte assorti des amendements
de la commission des affaires sociales.
(Applaudissements sur les travées du
RDSE, ainsi que sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon
intervention se placera dans le prolongement de celles de mes collègues
François Autain et Gilbert Chabroux.
Elle portera plus particulièrement sur la branche vieillesse de cette loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000.
Qu'il me soit permis à mon tour de souligner l'évolution favorable du budget
social. Cela a été dit et redit, mais il me plaît de rappeler que, grâce à
votre volonté opiniâtre et méthodique, madame la ministre, le déficit de la
sécurité sociale, qui était de 54 milliards de francs à votre arrivée, s'est
approché de zéro en deux ans, pour se transformer en un excédent prévisionnel
de 2 milliards de francs pour 2000, et cela, il faut le souligner, sans
augmentation des cotisations ni diminution des remboursements.
Même le rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance
vieillesse, notre collègue Alain Vasselle, observe que la branche vieillesse du
régime général avait connu, en 1998, un redressement spectaculaire de ses
comptes puisque le déficit n'était que de 224 millions de francs au lieu des
5,6 milliards de francs prévus, et que l'excédent pour 2000 serait de 8,3
milliards de francs.
M. François Autain.
On ne le dit pas assez !
M. Claude Domeizel.
Je le répète donc !
Le même rapporteur précise que n'y est pas étrangère la forte croissance
économique. J'ajouterai, pour ma part, que cette croissance est l'un des
révélateurs de la confiance des Français vis-à-vis de leur Gouvernement.
Pour vous, madame la ministre, et pour tout le gouvernement de Lionel Jospin,
c'est une réussite avec mention « bien », qui recueille l'assentiment d'une
large majorité de Français.
M. François Autain.
Mention « Très bien » !
M. Claude Domeizel.
J'en viens, comme je l'ai annoncé au début de mon propos, à la branche
vieillesse du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
Partout, que ce soit au travers de vos déclarations ou dans les textes
législatifs et réglementaires que vous élaborez, vous affirmez votre
attachement, comme celui du Gouvernement, à la retraite par répartition. La
preuve en est à nouveau donnée dans l'annexe au projet de loi en discussion
aujourd'hui, puisque, dans l'un des chapitres intitulé : « Consolider nos
régimes par répartition », il est écrit, dès la première phrase, que « Le
Gouvernement entend assurer la pérennité de nos régimes par répartition, dans
la concertation et le souci de l'équité entre générations et régimes. » Le
groupe socialiste du Sénat vous approuve sans réserve dans cette démarche.
En ce qui concerne le présent projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000, je note avec satisfaction vos prévisions en matière de
revalorisation des pensions, donc du pouvoir d'achat.
Je profite de cette occasion pour rappeler les avancées importantes qui ont
été obtenues en 1999 en faveur des conjoints survivants, soit près de 4
millions de nos concitoyens. L'allocation veuvage est désormais versée au taux
le plus intéressant pendant deux ans, au lieu d'un an précédemment, ce qui a
procuré un gain sensible aux personnes concernées. J'observe également que le
bénéfice de cet avantage est maintenu pendant trois ans pour les conjoints
survivants âgés de cinquante à cinquante-cinq ans lors du décès de leur
conjoint.
Je citerai également la revalorisation exceptionnelle de 2 % du minimum de
pension de réversion, à mettre en parallèle avec une inflation de 0,5 %. Cette
mesure concerne environ 600 000 conjoints survivants.
S'agissant du pouvoir d'achat des retraités, personne ne peut nier que, depuis
1997, il progresse tous les ans grâce à votre constante volonté de faire
participer les retraités à la croissance. Outre les 0,7 % de 1999, vous vous
engagez, pour 2000, à le majorer de 0,5 %, au lieu du 0,2 % théoriquement
attribué par la règle que le gouvernement précédent avait fixée voilà six ans.
On peut toujours juger cette progression insuffisante, mais cette augmentation,
qui a l'avantage d'exister, rompt avec les pratiques des gouvernements
précédents.
Certes, le Gouvernement Balladur avait mis en place en 1993 des règles de
revalorisation, mais cela ne peut pas masquer les prélèvements qui ont pesé sur
les retraites pendant cette même période.
Un bref rappel s'impose, surtout pour ceux qui, du côté droit de l'hémicycle,
feignent de l'oublier : 1993 fut l'année du 1,3 % de CSG ; 1996 fut celle du
1,2 % de cotisations maladie et du 0,5 % de CRDS ; 1997 fut celle du 0,2 % de
cotisations maladie et du 1 % de CSG. Vous savez compter : il s'agit d'une
augmentation de 4,2 % entre 1993 et 1997 !
La construction de notre organisation de retraites, qui date de 1945, est
solide et bien assise. Elle a fait ses preuves. Le système comporte cependant
des travers qui ne facilitent pas la tâche d'aujourd'hui. Mise en place à une
époque où le ratio démographique était très favorable, aucun dispositif n'a
malheureusement été prévu pour compenser les effets des évolutions
démographiques.
M. Alain Gournac.
C'est bien emballé ! Avec un papier cadeau !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ce qu'il dit est surtout vrai
!
M. Claude Domeizel.
La création d'un fonds de réserve intervient peut-être avec cinquante ans de
retard.
Rappelons qu'en 1945, lors de la construction de notre protection sociale, les
avis étaient partagés entre unité et multiplicité des régimes. Le fait d'avoir
choisi la seconde solution est loin d'être neutre dans la situation que nous
connaissons aujourd'hui.
Ces choix, opérés en 1945, expliquent avec certitude les difficultés que nous
connaissons aujourd'hui. Aussi, depuis des années, les gouvernements ont-ils
essayé d'y faire face, avec, il faut bien le reconnaître, des mesures de
bricolage.
Devant ce constat, pour rompre enfin avec une politique de navigation à vue,
et comme il s'y est engagé en juin 1997, le gouvernement de Lionel Jospin a
abordé avec méthode le problème des retraites.
Sur un tel dossier, il est indispensable de prendre le temps nécessaire, car
vous n'avez, nous n'avons pas le droit de nous tromper. Toute réforme pour
s'assurer des garanties du succès est rarement le fruit d'une génération
spontanée. Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à agir ainsi. Plusieurs pays
ont procédé de la sorte. Je ne reprendrai qu'un seul exemple, celui de la
Suède, qui vient de transformer la structure de son système de retraite avec un
processus de réforme qui s'est étalé sur une quinzaine d'années.
La retraite est en effet un dossier porteur d'enjeux sociaux et financiers
concernant l'ensemble de la société française pour plusieurs générations. Les
décisions en ce domaine méritent donc la plus grande attention et nécessitent
la mise en oeuvre d'une démarche concertée, afin de les inscrire dans la durée
et de préserver l'équité entre les générations successives.
Le Gouvernement a déjà pris des initiatives très positives en ce sens : le
rapport Charpin, publié à l'issue de la mission de diagnostic et de
concertation confiée au Commissariat général du Plan, a apporté une vision
pédagogique et complète des perspectives à long terme des régimes de retraite
en France ; il a également proposé plusieurs pistes qui devraient contribuer à
l'équilibre de notre système de retraite. Parmi celles-ci figure la création
d'un fonds de réserve des retraites destiné à atténuer l'impact du
vieillissement démographique sur l'équilibre financier des retraites par
répartition. J'y reviendrai.
Aussi approuvons-nous et soutenons-nous cette méthode, votre méthode :
première étape, faire le point de la situation, c'est le rapport Charpin ;
seconde étape, la concertation, c'est celle que vous avez menée avec les
partenaires sociaux dans le courant de l'été et prolongée ces dernières
semaines.
Travailler seul, dans la précipitation, conduirait à l'échec. M. Juppé en a
d'ailleurs fait l'expérience que l'on connaît.
M. François Autain.
Eh oui !
M. Claude Domeizel.
Nous attendons avec sérénité les propositions que M. Lionel Jospin doit
formuler dans ce domaine au début de l'année prochaine.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Il aura pris son temps !
M. Claude Domeizel.
J'ai bien dit qu'il fallait prendre son temps. C'est un problème trop
important pour qu'on fasse vite !
Je parle de sérénité, non seulement parce que nous faisons confiance au
Gouvernement, mais surtout parce que les propositions seront le fruit d'une
réflexion collective.
Il est regrettable toutefois de voir que certains s'évertuent à créer un
climat d'interrogation, voire d'inquiétude, au sujet de l'avenir du système par
répartition. Une telle attitude ne peut qu'encourager un glissement vers la
capitalisation.
Pour inverser cette tendance, il est urgent de rassurer toutes les
générations, les actifs comme les retraités.
Mais on ne peut rassurer que si les règles sont claires, précises et prévues
pour le long terme. Aussi faut-il envisager qu'un organisme de réflexion
permanent fixe les objectifs pour vingt-cinq ans ou trente ans, avec un
correctif tous les cinq ans. C'est ainsi que - pour ne citer qu'un exemple -
les taux de prélèvement maxima devraient être fixés dans le temps, selon un
échéancier, pour atteindre ce plafond.
Bref, il faut informer, sensibiliser à la planification retraite, sans cesse
persuader que nous disposons d'un bon système, un système qui doit demeurer.
Venons-en au fonds de réserve des retraites, dont l'abondement est prévu à
l'article 10 du projet de loi.
L'an dernier, à pareille époque, nous avons approuvé la création d'un tel
fonds. Que n'a-t-on pas entendu à son sujet dans les rangs de
l'opposition,...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Oui !
M. Claude Domeizel.
... particulièrement sur la somme qui y était consacrée ! Les fameux 2
milliards de francs que la droite jugeait insignifiants ! Pourtant, il fallait
bien commencer un jour !
Aujourd'hui, vous nous annoncez que 20 milliards de francs viendront s'y
ajouter. Nous nous en réjouissons, car vous donnez ainsi une impulsion non
négligeable pour atteindre les 66 milliards de francs nécessaires en 2006, ou
les 300 milliards de francs attendus en 2020.
A ce sujet, il est difficilement compréhensible que la commission des affaires
sociales s'obstine, cette année comme l'an dernier, à supprimer cet article 10,
sous le prétexte de l'insuffisance de ces 20 milliards ou 22 milliards en
2000.
M. François Autain.
Ils ne comprennent rien !
M. Claude Domeizel.
Mesdames et messieurs de l'opposition,...
M. Alain Gournac.
... de la majorité !
M. Claude Domeizel.
... vous ne pouvez décemment pas tenir deux langages : prétendre que vous êtes
favorables au fonds de réserve et en même temps vous opposer à l'alimentation
de ce fonds !
M. Charles Descours,
rapporteur.
C'est parce que nous sommes pour la CMU, que vous tuez !
M. Claude Domeizel.
Ou alors votre attachement à la répartition est moins ferme que vous ne le
prétendez.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Mais on est pour la CMU alors que, vous, vous êtes contre
!
M. Claude Domeizel.
Votre démarche, madame la ministre, s'appuie sur un cadrage à long terme pour
mettre en place les outils indispensables à l'adaptation continue du système
des retraites. Elle ne doit céder en rien au catastrophisme parfois annoncé,
mais que l'analyse ne justifie pas.
M. Alain Gournac.
Ah oui ?
M. Claude Domeizel.
Toutefois, la lisibilité de notre système de retraite est l'une des premières
conditions d'adhésion des Français aux réformes mises en oeuvre pour maintenir
les principes fondamentaux de notre système de retraite que sont la solidarité
et l'équité entre les générations.
A ce sujet, prenons garde aux injustices que peut comporter le système par
répartition, dans la mesure où il reporte tout le poids des engagements et des
risques sur les générations futures.
M. Alain Gournac.
Eh oui !
M. Claude Domeizel.
Le fonds de réserve figure indiscutablement parmi les initiatives les plus
novatrices et les plus susceptibles de répondre de façon adéquate aux principes
fondamentaux qui ont déjà été évoqués. Pour une mise en oeuvre immédiate, vous
avez logé provisoirement ce fonds au sein du fonds de solidarité vieillesse,
structure existante chargée de financer, au titre de la solidarité nationale,
divers avantages non couverts par les cotisations sociales.
Cependant, compte tenu de l'importance et de la spécificité des enjeux, des
masses financières en cause et de la lisibilité nécessaire du dispositif pour
les Français, il est clair que l'organisme chargé de gérer ce fonds ne peut
avoir parallèlement d'autre vocation.
C'est la raison pour laquelle il nous semble nécessaire que soit envisagé,
pour piloter le fonds de réserve, la création d'un établissement public
spécifique doté d'un conseil d'administration ayant pouvoir de décision.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Pourquoi le décret n'est-il pas paru... depuis un an ?
M. Claude Domeizel.
Le décret est sorti voilà quelques jours, ainsi que mon collègue M. Bimbenet
vient de le rappeler !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Non, il n'est pas sorti !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Depuis un mois !
M. Claude Domeizel.
Cette formule juridique permettrait en effet de garantir l'autonomie des
décisions, d'affirmer l'importance du fonds constitué pour accomplir une
mission spécifique et, enfin, d'assurer transparence et lisibilité.
S'agissant du pilotage du fonds, l'ensemble des parties prenantes, au premier
rang desquelles figurent les représentants des employeurs et des organisations
syndicales, devraient bien évidemment y être associées.
S'agissant des ressources du fonds, je note que vous persistez dans une
démarche de programmation à long terme des paramètres du fonds de réserve : ses
ressources doivent être en effet assurées, afin que les projections soient
techniquement crédibles et non sujettes à des hypothèses de ressources
exceptionnelles.
L'an dernier, déjà, la loi de financement de la sécurité sociale de 1999 lui a
octroyé comme ressources « tout ou partie du résultat excédentaire des
opérations de solidarité du fonds de solidarité vieillesse, dans des conditions
fixées par arrêté du ministre chargé du budget ». Il est à noter que les
projections de résultat du FSV pour les prochaines années, dans le cadre des
travaux menés pour le rapport Charpin, établissent que le solde cumulé des
résultats excédentaires du FSV pourrait être, selon les hypothèses retenues, de
l'ordre de 75 milliards à 100 milliards de francs en 2005.
Enfin, au risque de me répéter, je dirai qu'il est très important de mettre en
place une communication régulière relative à l'ensemble des projections et à la
situation du fonds de réserve. Cette communication doit être faite tant à
l'usage des décideurs qu'envers les Français, pour confronter la confiance
qu'ils ont dans leur système de retraite.
Je dirai un mot, avant de terminer, sur les ressources non permanentes prévues
à l'article 31.
Lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale de 1999, nous
avions proposé la suppression de l'avance de trésorerie autorisée à la CNRACL.
Cette année - j'y reviendrai, si le besoin s'en fait sentir, lors de la
discussion de cet article - nous ne nous opposerons pas au projet du
Gouvernement, approuvé par l'Assemblée nationale, pour montrer notre
satisfaction à l'égard d'un gouvernement...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Les contribuables locaux seront contents qu'on augmente de
0,5 % les impôts ! On leur dira que c'est le choix du Gouvernement.
M. Claude Domeizel.
... qui, sur la base d'une prévision sur deux ans - je dis bien « sur deux ans
», car le Gouvernement n'a pas les méthodes de M. Balladur
(Protestations
sur les travées du RPR.),
qui, entre Noël et le jour de l'an 1994, nous
annonçait une augmentation du taux de cotisation de 3,5 % - ...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Le Gouvernement a annoncé les 0,5 % de la même façon !
M. Claude Domeizel.
Je disais donc que, pour la première fois, une baisse de la surcompensation
instaurée dans la loi de finances de 1986 était amorcée.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
C'est vrai !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Ce sont les socialistes qui ont inventé la surcompensation
!
M. Claude Domeizel.
Permettez-moi, à cet égard, d'ouvrir une parenthèse. M. Fourcade a évoqué hier
cette question, qu'il connaît d'ailleurs bien puisque, lors de la création de
la compensation en 1974, il était ministre de l'économie et des finances, M.
Poncelet étant secrétaire d'Etat chargé du budget.
M. Charles Descours,
rapporteur.
On parle de la surcompensation.
M. Claude Domeizel.
Je vais y venir. Vous avez dit hier, monsieur Fourcade, que le taux
pondérateur de 38 % résultait d'une décision de M. Charasse.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Non, de PierreBérégovoy.
M. Claude Domeizel.
Or, ce n'est pas vrai.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Comment !
M. Claude Domeizel.
Ce taux résulte d'une décision prise par un décret du 26 août 1994 signé,
notamment, par M. Sarkozy.
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Domeizel.
M. Alain Gournac.
Il est à côté du sujet !
M. Claude Domeizel.
Je conclus, monsieur le président.
Une telle initiative de la part du Gouvernement, la première du genre,
méritait une attitude positive de notre part.
Sous réserve des quelques considérations que je viens d'énoncer, le groupe
socialiste est confiant pour aborder ce débat, notamment sur la branche
retraite, parce que cette loi de financement de la sécurité sociale pour 2000
confirme la volonté du Gouvernement de poursuivre l'objectif d'équilibre des
finances de notre protection sociale.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Très bien ! Bravo !
M. le président.
Je n'ai pas pour habitude de faire de rappel à l'ordre, monsieur Domeizel,
mais vous avez dépassé votre temps de parole de manière suffisamment
significative pour que je me sente autorisé à le faire.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Puis-je, madame la ministre, débuter mon intervention par une double question
?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je vous en prie.
M. Claude Huriet.
A quoi sert ce débat ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Bonne question !
M. Claude Huriet.
Plus précisément, quelle en est la réelle portée ? Quel est désormais le rôle
du Parlement en matière de financement de la sécurité sociale ?
En effet, lors de votre audition par la commission des affaires sociales, le
21 octobre dernier, nous avons été frappés par votre réflexion concernant
l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM. Vous avez indiqué
que son évolution serait désormais « rebasée » chaque année, à l'image,
avez-vous fait observer, du taux d'inflation ou du taux de croissance de la
masse salariale, qui sont calculés à partir des prévisions de réalisation.
Ainsi avez-vous clairement laissé entendre l'importance toute relative que le
Gouvernement attache à la détermination par le Parlement de l'objectif national
de dépenses de santé, qui ne serait donc qu'une donnée parmi d'autres, des
chiffres fixés par le législateur mais dont la valeur serait approximative.
Or la loi organique relative au financement de la sécurité sociale, dans le
premier paragraphe de l'article L.O. III-3, précise on ne peut plus clairement
que la loi de financement de la sécurité sociale « fixe, pour l'ensemble des
régimes obligatoires de base, l'objectif national de dépenses d'assurance
maladie ».
Sans que l'on méconnaisse les conséquences d'événements imprévisibles, la
fixation de l'ONDAM est donc au coeur du dispositif de la loi de financement.
Si sa valeur devient purement « indicative », non normative, si, chaque année,
un ONDAM « rebasé » masque la réalité, alors même que perdure un dérapage
inquiétant de nos dépenses de santé et que les réformes structurelles se font
attendre, quel intérêt y a t-il, mes chers collègues, à dépenser tant de temps
et d'énergie pour en débattre ?
La réalité des chiffres, c'est une augmentation de nos dépenses de 3,5 % en
1999 alors que la loi de financement avait fixé une progression de 2,6 % par
rapport à l'ONDAM de 1998.
La réalité des chiffres, c'est que l'ONDAM de 1998 a été dépassé de 9,8
milliards de francs et que celui de 1999 le sera de 13,1 milliards de
francs.
Depuis deux ans, on assiste ainsi à une progression soutenue des dépenses de
santé que seuls la forte augmentation des prélèvements et le retour de la
croissance ont réussi à masquer.
Une autre constatation renforce mes interrogations et mes doutes quant à
l'utilité de nos travaux. L'examen de l'annexe b, qui reprend, article par
article, l'état d'avancement de l'application de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999, montre le grand nombre d'articles encore en attente
de décrets d'application. Ils concernent des sujets aussi importants que le
dépistage du cancer, la création d'un conseil pour la transparence des
statistiques de l'assurance maladie, la mission d'évaluation des unions de
médecins exerçant à titre libéral ou le contenu du devis et de la facture
délivrés par les chirurgiens-dentistes.
Ainsi, la loi de financement de la sécurité sociale ne répond que très
imparfaitement à ses objectifs et le Parlement est en partie dessaisi de son
rôle en matière de contrôle financier et en matière de politique de santé.
Au-delà de ces réserves de portée générale, je souhaiterais concentrer mon
propos sur deux aspects de la loi de financement : la branche famille et la
branche maladie.
S'agissant de la branche famille, j'aborderai une question qui me tient
particulièrement à coeur, celle de la simplification des règles de droit.
Concernant la branche maladie, je concentrerai mon intervention sur les
contradictions et les blocages qui, me semble-t-il, résulteront des nouvelles
dispositions incluses dans la loi de financement.
Président depuis 1997 du conseil de surveillance de la caisse nationale des
allocations familiales, j'ai pris la mesure d'une institution dont les missions
ont largement évolué au fil du temps. A leur objectif initial de soutien aux
familles, les caisses d'allocations familiales ont ajouté désormais la tâche, ô
combien difficile, de prendre en charge toutes les personnes en situation de
précarité. Les CAF sont ainsi devenues une arme efficace de lutte contre la
pauvreté et l'exclusion.
Quarante pour cent des allocataires ne sont plus des « familles » et 30 %
d'entre eux ne vivent que des prestations versées par leur caisse. Au vu de ces
chiffres, on réalise sans peine l'importance sociale du rôle joué par les
CAF.
Cet élargissement de leurs missions a eu pour corollaire un accroissement
considérable de la complexité des règles de droit. Les CAF gèrent aujourd'hui
vingt-cinq prestations légales, qui représentent 15 000 règles de droit. Pour
ce faire, elles prennent en compte 250 faits générateurs pour lesquels elles
utilisent 270 modèles de pièces justificatives et en traitent 70 millions par
an. A ce bref panorama, il faut ajouter que les modifications des situations
personnelles des allocataires sont prises en compte en temps réel et que, de ce
fait, un tiers du fichier des CAF est modifié en moyenne chaque mois.
En outre, les règles de droit appliquées par les CAF sont très évolutives. Si
l'on prend le seul secteur des aides personnalisées au logement, ce sont plus
de 150 textes qui ont modifié le régime initial institué en 1977.
Cette inflation de la réglementation part d'un souci fort louable : la volonté
d'adapter les aides en « collant » à la situation des bénéficiaires, en prenant
en compte le maximum d'éléments de leur situation particulière.
Mais le mieux est devenu l'ennemi du bien ; la réglementation est devenue si
complexe qu'elle a perdu toute lisibilité pour ceux à qui elle est en priorité
destinée. Les plus modestes, les plus démunis se trouvent incapables de faire
valoir leurs droits. Toutes les associations de lutte contre la précarité qui
siègent au sein du conseil de surveillance de la CNAF ne cessent de nous
alerter sur cette réalité.
En 1998, sur dix-neufs mesures nouvelles mises en oeuvre, huit sont allées
dans le sens d'une plus grande complexité, telles les règles d'intéressement à
la reprise d'activité. Cette disposition, contenue dans l'article 9 de la loi
relative à la lutte contre les exclusions - disposition tout à fait louable -
permet de cumuler pendant quelques mois le maintien du versement d'une
allocation de RMI avec un emploi, disposition dont chacune doit se
féliciter.
Mais sa mise en oeuvre s'avère d'une complexité extrême, le calcul de
l'allocation variant en fonction de chaque type d'emploi éventuellement
retrouvé : stage, CES, CEC, CDD, CDI, etc.
L'incompréhension des personnes concernées est grande et le risque d'erreur,
et donc de versement indu, est très important lui aussi.
Ce bref exemple montre à quel point la question de la simplification des
règles de droit est de plus en plus d'actualité. Le conseil de surveillance de
la CNAF, lors de sa séance du 21 avril 1999, a constaté que les engagements
contenus sur ce point dans la convention d'objectif et de gestion signée entre
l'Etat et la CNAF n'avaient pas été tenus. Le conseil vous avait alors demandé,
madame la ministre, l'inscription de cette question à la conférence de la
famille.
Je réitère devant vous cette demande. La simplification de l'ensemble du
système de prestations, et pas seulement de l'APL, l'aide personnalisée au
logement, que le Gouvernement s'est engagé à remettre à plat, représente un
enjeu politique et social majeur ! Je dois aussi attirer votre attention, mes
chers collègues, sur la tendance qu'a parfois le législateur à accroître encore
la complexité des dispositions.
S'agissant de la branche maladie, le débat sur la loi de financement s'inscrit
cette année dans un climat délétère qui affecte les professionnels de santé et
un contexte marqué par des contradictions dont les effets risquent d'être
redoutables. Elles entraîneront des blocages préjudiciables à la mise en oeuvre
d'une politique de santé.
La contradiction essentielle contenue dans ce projet de loi réside, à mes
yeux, dans la séparation instaurée entre la régulation de l'hospitalisation,
désormais un domaine réservé de l'Etat, et la maîtrise des soins ambulatoires
confiée à la Caisse nationale d'assurance maladie, avec toutes les réserves
formulées par le rapporteur de la commission des affaires sociales, que je
félicite pour son excellent travail, sur la marge de manoeuvre réelle dont la
CNAM pourra disposer pour exercer cette mission.
Cette séparation des rôles au niveau national est, à mon sens, une erreur.
Elle va à l'encontre des évolutions récentes qui visaient à promouvoir la
fongibilité des enveloppes à un niveau pertinent, le niveau régional, dont
maintenant tout le monde parle sans trop savoir comment le mettre en oeuvre.
Elle méconnaît ainsi l'évolution de notre système de soins, qui tend au
développement des réseaux ville-hôpital, du secteur hospitalier ambulatoire et
de l'hospitalisation à domicile. L'hôpital et la médecine de ville commencent à
apprendre à travailler ensemble. Pourquoi prendre le risque de les séparer ?
Cette tendance à l'ouverture de l'hôpital sur l'extérieur et au
décloisonnement se retrouve d'ailleurs dans les observations de bon nombre
d'instances qui réfléchissent à l'avenir de notre système de santé. Ainsi, le
rapport de la dernière Conférence nationale de santé, à propos du
vieillissement, met l'accent sur l'importance qu'il y a à développer des
réseaux de santé gérontologiques associant médecine ambulatoire, hôpital et
secteur médico-social.
Dans la deuxième partie de son rapport, consacrée aux inégalités de santé, la
Conférence a adopté une résolution qui, en s'appuyant sur les conclusions du
rapport du Haut Comité de la santé publique, prône la fusion des cinq
enveloppes actuelles, la création d'une agence régionale de santé et celle
d'une enveloppe transversale spécifique des actions de santé. Cette dernière,
selon le rapport, « devrait inciter les différents acteurs de santé à apprendre
à travailler ensemble de manière coordonnée sur des programmes régionaux de
santé incluant, par définition, une dimension préventive au sens large du terme
».
A quoi sert donc la conférence nationale de santé si les décisions du
Gouvernement non seulement n'en tiennent aucun compte, mais la contredisent ?
Est-ce cela que vous appelez la « démocratie sanitaire » ?
Autre exemple de contradiction, certes plus ponctuel : la décision, prise en
juin 1998, de suspendre la mise en oeuvre de la troisième étape de
revalorisation des soins conservateurs de la nomenclature des soins dentaires.
Cela signe l'arrêt brutal d'un processus qui visait à corriger progressivement
une situation où la faiblesse de la prise en charge de certains soins primaires
entraîne trop souvent une renonciation à ces soins, ce qui induit
ultérieurement une augmentation des besoins en traitements prothétiques, plus
coûteux et fort mal remboursés par l'assurance maladie.
Deuxième constatation qui ne manque pas d'inquiéter : les blocages que l'on
constate dans les relations avec les professionnels de santé, qui augurent mal
un possible retour à une pratique conventionnelle constructive.
Sans aucun doute, ces blocages sont alimentés par deux facteurs essentiels,
dont la conjonction provoque un refus des professionnels de santé d'adhérer à
un système de maîtrise médicalisée des dépenses de santé, le terme lui-même
étant désormais pratiquement abandonné. Le premier est le caractère contestable
des données financières sur lesquelles s'appuient non seulement la définition
de l'ONDAM mais aussi toutes les mesures de correction des dérives de telle ou
telle activité. Le second est l'absence de référence aux besoins de santé, ce
qui conduit inéluctablement à une maîtrise exclusivement comptable.
S'agissant de la fiabilité des données sur lesquelles repose la maîtrise des
dépenses de santé, nous disposons cette année d'une référence indiscutable
grâce au travail approfondi de la Cour des comptes sur les outils de
connaissance, de pilotage et d'évaluation des données de santé. Quiconque en
prend connaissance mesure l'étendue du chemin restant à parcourir pour disposer
en temps utile de données fiables, susceptibles de donner lieu à des décisions
pertinentes et adaptées, et comprend par là même le refus des professions de
santé d'accepter des décisions qu'elles considèrent comme largement
arbitraires.
Concernant l'ONDAM et le suivi des dépenses tout au long de l'année, la Cour
constate : « La qualité des données utilisées pour construire l'ONDAM et en
suivre la réalisation est hétérogène. Il n'existe, ni au niveau national ni par
caisse, des données fiables sur la qualité moyenne de la liquidation elle-même.
» On retrouve ici la nécessité de simplifier un système d'informations qui, à
l'heure actuelle, produit des données par trois chaînes de remontée
différentes, présentant chacune des qualités et des faiblesses.
Il convient de souligner l'impérieuse et urgente nécessité de faire reposer
les politiques de maîtrise des dépenses sur des données sûres et reconnues.
C'est à ce prix seulement qu'elles ont quelque chance d'être acceptées. Or la
Cour constate que « l'inadéquation est grande entre l'état actuel de ces
systèmes et l'ambition de rendre opposables les données qu'ils produisent ».
Cette phrase n'explique-t-elle pas très largement l'incompréhension, les
heurts, l'impossibilité de dialoguer que l'on observe avec inquiétude,
s'agissant des contacts entre les professions de santé et les pouvoirs publics
?
Et l'on voudrait que les professions de santé adhèrent à des désicions prises
dans de telles conditions ! C'est impensable !
A cet égard, je regrette que le Conseil pour la transparence des statistiques
de l'assurance maladie ne soit pas encore installé.
La deuxième cause de blocage réside dans l'absence de prise en compte des
besoins de santé dans le pilotage du système de santé.
Tous les médecins, libéraux ou hospitaliers, y sont extêmement sensibles, car,
derrière la froideur des chiffres, se dessinent le visage de leurs malades et
l'obligation qui leur incombe de les soigner au mieux, en leur prodiguant le «
juste soin ».
Faute de temps, je ne donnerai qu'un seul exemple, qui concerne ma région. Il
s'agit d'un projet d'implantation d'un site inter-régional de production de
radio-émetteurs de positons à usage bio-médical. Cette technique d'imagerie
relativement nouvelle permet de visualiser la répartition dans l'organisme de
traceurs biologiques marqués par un radio-élement ; on la connaît davantage
sous le nom abrégé de PET-Scan.
Pour votre information, mes chers collègues, je vous signale que l'Allemagne
dispose à ce jour de vingt équipements de ce type, la Belgique d'une dizaine,
dont cinq pour la seule ville de Liège, alors que la France n'en a aucun.
Cette technique, qui existe depuis plusieurs années, connaît des applications
dans les domaines de la cardiologie, de la neurologie et de la cancérologie. En
ce qui concerne, par exemple, le dépistage de certains cancers dont la
fréquence est particulièrement importante en Lorraine, la précision du
diagnostic ainsi obtenu permettrait d'éviter de 12 à 15 % des interventions
mutilantes pratiquées actuellement.
Or les éléments de réponse que s'apprêterait à faire valoir votre
administration sont les suivants : « Les gamma caméras sont soumises à
autorisation au titre des équipements lourds. Votre région est normalement
dotée. A vous de "faire avec", en réduisant les indications cardiologiques ou
neurologiques au profit des indications cancérologiques. »
Si, malgré sa technicité, j'ai évoqué cet exemple, c'est parce qu'il est
révélateur d'une situation que les médecins ne peuvent, en conscience, accepter
: choisir ceux qui peuvent bénéficier d'un diagnostic ou d'un traitement, au
détriment des autres. Aucun d'entre eux ne conteste la nécessité d'« optimiser
» les moyens qu'ils revendiquent pour leurs malades, mais ils refusent que les
moyens - nécessairement limités, ils en conviennent - soient déterminés sans
référence aucune aux besoins de santé.
Disposer de données fiables, s'appuyer sur une référence aux besoins de santé,
définir des priorités à l'échelon pertinent, c'est-à-dire à l'échelon régional,
comme chacun s'accorde désormais à le reconnaître, telles sont, madame la
ministre, madame la secrétaire d'Etat, les conditions auxquelles doit
satisfaire une politique de santé à laquelle pourraient alors adhérer les
acteurs du système de soins.
La politique suivie par le Gouvernement me paraît s'éloigner, année après
année, de ces préoccupations. Au lieu de rechercher une détente, elle contribue
à crisper les relations entre les différents partenaires.
Avec les membres du groupe de l'Union centriste, je voterai les amendements
présentés par la commission des affaires sociales, afin de corriger, autant que
faire se peut, un projet de loi dont les fondements et les conséquences ne
manquent pas de nous inquiéter.
(Très bien ! et applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, je sais que mon passage à la tribune est salué avec le plaisir
que suscite le dernier intervenant dans la discussion générale et que, en
échange, j'aurai droit à une attention toute particulière !
(Sourires.)
Le Sénat examine le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
2000, et donc l'ensemble des problèmes qui y sont liés.
L'importance de ce budget, la succession ininterrompue de déficits
considérables, l'échec patent de tous les plans d'économie ont conduit les
gouvernements successifs à multiplier les solutions, à créer la CSG en 1991, à
en augmenter le taux en 1993, 1997 et 1998, à créer la CRDS, la contribution au
remboursement de la dette sociale, en 1996 et à la proroger en 1998.
Demain, faute d'une maîtrise convenable de ce budget, il ne sera possible ni
d'accroître les cotisations des salariés et des employeurs - ce n'est plus de
saison ! - ni d'augmenter ces impôts qui pèsent lourd sur le pouvoir
d'achat.
Mais compte tenu de la nature éminemment sociale et sensible de cette sécurité
sociale, il ne peut non plus être question d'une gestion purement comptable de
la dépense, gestion qui serait obligatoirement aveugle et injuste.
Il faut donc que tous les partenaires jouent le jeu honnêtement et dans la
transparence, cette transparence qui, comme vous le savez, madame la ministre,
madame la secrétaire d'Etat, fait encore gravement défaut, sinon à la CNAM
même, du moins dans de nombreuses régions, ce qui n'est pas bon pour le
dialogue.
Il faut également que les mesures autoritaires restent du domaine de
l'exception.
Madame la ministre, vous avez fixé pour l'an 2000 une enveloppe globale de 658
milliards de francs sans que nous puissions, à l'heure actuelle, aisément
déterminer la répartition que vous ferez entre les différents secteurs. Une
majoration de 2,5 %, ce serait très bien, compte tenu de la conjoncture, si la
progression des dépenses de santé en 1999, comme le rappelait Claude Huriet,
n'était pas déjà de 3,5 %.
M. François Autain.
Elles baissent !
M. François Trucy.
Peut-être, dans votre estimation de 2,5 %, avez-vous, madame la ministre,
provisionné quelque peu ce que l'on reproche aux gouvernements de ne jamais
prévoir, c'est-à-dire des dépenses exceptionnelles causées par l'épidémiologie,
le financement des progrès techniques ou des mesures nouvelles en matière de
prévention. Si c'est le cas, pouvez-vous nous le préciser ?
Car il faut être réaliste : après des années d'expériences cuisantes, nous
savons que ni les recettes de gestion - améliorables - de la CNAM ni les
efforts - encore insuffisants - de maîtrise des dépenses par les praticiens de
la santé ne progresseront suffisamment.
Les dépenses de santé ne peuvent qu'augmenter du fait du vieillissement de la
population et de la croissance du coût des techniques médicales. Alors, et
c'est l'argument majeur, mieux vaut la rationalisation que le rationnement.
La loi annuelle de financement de la sécurité sociale est donc une nécessité.
Elle relève d'un principe légitime et réclame toute notre attention.
Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, il reste à voir avec vous si
les mesures que vous proposez sont en cohérence avec le contexte et
susceptibles d'être efficaces.
La répartition des rôles entre le Gouvernement, le Parlement et les caisses
étant de plus en plus difficile à comprendre, mes questions auront une portée
assez large.
Ainsi, vous accordez, dans le texte, une plus large autonomie déléguée à la
CNAM. Quelle est la réalité de cette autonomie annoncée ? N'est-elle pas de
façade ?
En effet, si vous donnez à la CNAM les moyens légaux et réglementaires de
faire respecter la gestion de l'enveloppe de 247 milliards de francs pour les
soins de ville, vous précisez qu'en cas d'échec et de dérapages des dépenses
au-delà des objectifs vous interviendrez en sanctionnant les spécialistes - ou
les secteurs - « fautifs » par des baisses autoritaires de la valeur de leurs
lettres clefs.
Une plus large autonomie donnée à la CNAM signifie-t-elle que le plan
stratégique mis en débat par celle-ci en mars 1999 reçoit votre feu vert ?
Que retenez-vous ou qu'écartez-vous de ce plan ? Une prise de position claire
et officielle de votre part sur chacun des points de ce plan doit être, tôt ou
tard, connue de tous pour que ne persiste pas l'incertitude dans laquelle
vivent les partenaires. Sinon, le régime conventionnel, déjà mal en point, ne
guérira pas.
Ainsi, acceptez-vous que les praticiens doivent se soumettre à intervalles
réguliers à une recertification de leurs connaissances, condition de leur
conventionnement ? Si oui, comment concevez-vous cet énorme et difficile
contrôle des compétences ?
Retenez-vous la proposition de la CNAM de conventionner les professionnels de
santé en fonction des besoins sanitaires dans les régions où existerait une
surdensité médicale ? Dans l'affirmative, qui jugera s'il y a ou non surdensité
?
On vous prête l'intention de renoncer définitivement aux remboursements par
les médecins en cas de dépassement des objectifs de prescription de leur
régime. Conseil d'Etat ou non, ce système était très difficile à mettre en
oeuvre et éminemment injuste.
Cependant, si vous procédez, en cas de dérapage des dépenses et d'échec de la
CNAM, à des baisses autoritaires des tarifs de telle ou telle lettre clef, vous
disposerez d'un système plus simple, certes, mais tout aussi injuste que le
précédent puisque tous les spécialistes seront pénalisés en raison du
comportement d'un petit nombre d'entre eux.
Croyez-vous réellement possible, en tout état de cause, de procéder à des
bilans du respect de ces objectifs au quatrième et au huitième mois de l'année
?
Rendrez-vous obligatoire - comme ce serait souhaitable - les justifications et
motifs des arrêts de travail ?
Enfin, estimez-vous normal que la CNAM remette en cause sa part du financement
de l'assurance sociale vieillesse des médecins conventionnés - droit acquis en
1960, en échange du conventionnement - en fonction de critères de gestion
d'actualité ?
Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, à la logique du système
d'assurance créé à la Libération, et dont la gestion paritaire était confiée
aux cotisants, s'est, au fil du temps, ajoutée une logique de solidarité, qui a
étendu le bénéfice du système à un nombre sans cesse croissant d'assujettis, en
particulier les plus démunis et les plus dépendants.
C'est cette logique de solidarité qui justifie la perception des impôts
récents que sont la CSG et la CRDS, et qui sont légitimes. Mais quelle est la
légitimité du financement, directement ou indirectement, du coût de
l'application de votre projet de loi de réduction du temps de travail à 35
heures ?
Par ces dispositions, vous introduisez dans le projet de loi de financement de
la sécurité sociale une troisième logique ; c'est une logique d'organisation
sociale du travail qui est d'une autre nature, qui n'a pas sa place dans ce
projet de loi et qui n'est pas cohérente avec les objectifs et les missions
pour lesquelles la sécurité sociale a été initialement créée.
Le budget de la sécurité sociale est en passe de devenir un instrument parmi
d'autres de gestion des finances publiques puisqu'il inclut des dépenses qui
relèvent par nature du budget de l'Etat et utilise des impôts.
Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, le groupe des Républicains et
Indépendants attend vos réponses à ces questions. Surtout, il sera très
attentif aux avis que vous formulerez sur les propositions de la commission des
affaires sociales et de son très compétent rapporteur.
(Applaudissements sur
les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
8
NOMINATION DE MEMBRES D'ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires économiques, la commission des
affaires étrangères et la commission des finances ont proposé des candidatures
pour trois organismes extraparlementaires.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :
- M. Henri Revol membre du comité consultatif de l'utilisation de l'énergie
;
- M. Paul d'Ornano membre du conseil d'administration de l'Agence pour
l'enseignement français à l'étranger ;
- M. Auguste Cazalet membre de la commission centrale de classement des débits
de tabac.
9
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe du Rassemblement pour la République a
présenté une candidature pour la commission des affaires sociales.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M.
Jean-Pierre Vial membre de la commission des affaires sociales, en remplacement
de M. Simon Loueckhote, démissionnaire.
10
FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, je m'efforcerai, avec Dominique Gillot, de
répondre à vos questions, interpellations ou remarques.
Tout d'abord, je voudrais souligner quelques points d'accord avec votre
rapporteur, M. Descours, sur le redressement des comptes et sur la situation
économique.
Il est reconnu dans le rapport de la commission que les comptes de la sécurité
sociale se sont redressés, cela étant dû à une croissance des recettes que vous
attribuez, pour partie, aux mesures de redressement qui ont été prises,
notamment la loi de financement de la sécurité sociale de 1998, et, pour
partie, à la croissance économique.
Si à la fois votre rapporteur et MM. Huriet et Bimbenet le disent, c'est sans
doute qu'il y a une réalité à ne pas voir uniquement dans la croissance - du
reste, le secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité
sociale l'a dit également - le redressement des comptes de la sécurité sociale.
MM. Domeizel et Autain ont insisté longuement sur les raisons qui ont conduit à
la réduction de ce déficit.
Monsieur le rapporteur, vous expliquez la croissance économique par le fait
que la demande intérieure, à la fin de l'année 1997, c'est-à-dire après le
changement de Gouvernement, a pris le relais de la demande extérieure. Vous
notez même ceci dans votre rapport : « Contrairement aux "reprises" du début et
du milieu des années quatre-vingt-dix interrompues immédiatement, l'année 1997
a été suivie par deux années de croissance relativement forte. »
Vous vous félicitez de cette vigueur de la demande intérieure. Il est vrai
qu'elle nous met à l'abri des effets du ralentissement de l'économie mondiale -
nous l'avons vu au moment des crises asiatique et russe.
S'agissant plus particulièrement de l'année 2000, vous relevez - je le dis,
car une fois n'est pas coutume - la prudence des prévisions de croissance, donc
de recettes du Gouvernement - habituellement, on nous reproche d'être trop
optimistes, alors que les prévisions des deux années passées ont été respectées
- en citant les chiffres nettement supérieurs du bureau d'information et de
prévision économique, le BIPE, et de l'Observatoire français des conjonctures
économiques, l'OFCE.
De même vous soulignez que, selon les instituts indépendants, le chômage va
continuer à baisser sensiblement.
Par conséquent, fort logiquement, vous concluez que les prévisions
macroéconomiques du Gouvernement pour 2000 sont « tout à fait réalisables ».
Vous relevez que la croissance de la masse salariale reste forte en 1999 et
2000, bien que la croissance du produit intérieur brut soit inférieure à celle
de 1998. Vous en déduisez que la croissance française est devenue plus riche en
emplois et vous y voyez un effet positif des allégements des charges
sociales.
Je considère, pour ma part, que ces constats sont autant d'hommages à l'action
du Gouvernement...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Et à celle des précédents gouvernements !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ce n'est pas ce que vous
écrivez !
Ces constats, dis-je, sont autant d'hommages à l'action du Gouvernement, qui a
su soutenir la consommation, rétablir la confiance, mener une politique active
de l'emploi - réduction de la durée du travail, emplois-jeunes, soutien aux
nouvelles technologies -...
M. Charles Descours,
rapporteur.
C'est de la macroéconomie !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis en train de dire que
nous sommes d'accord, monsieur le rapporteur ! Je commence par un hommage à
votre clairvoyance sur la politique que nous menons et sur ses résultats !
Alors, ne vous contredisez pas vous-même !
Les dernières prévisions de l'OCDE pour 2000 et 2001 viennent conforter cet
hommage puisque, avec une croissance moyenne de 2,95 % et un taux de chômage
ramené en dessous de 10 % à la fin de 2000 - c'est ce que prévoit cet organisme
- la France serait en tête des grands pays de l'OCDE. En particulier, le taux
de chômage baisserait de 40 % de plus que dans le reste des pays de l'Union
européenne.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Nous sommes honnêtes ! J'espère que vous le serez aussi !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mais cet hommage a seulement
pour objet, si je puis dire, de préparer une critique du Gouvernement sur la
maîtrise des dépenses. A cet égard, je souhaite rappeler quelques données à MM.
Descours et Louis Boyer.
Sur deux ans, en 1998 et 1999, les dépenses d'assurance maladie devraient
augmenter de 7,1 %, soit un niveau équivalent à celui de la croissance du
produit intérieur brut.
On ne constate pas, je l'ai dit hier, le dérapage massif que certains se
complaisent à décrire. On observe simplement, dans un pays développé - et c'est
bien normal - des dépenses de santé qui s'accroissent parallèlement à la
richesse nationale. Habituellement, vous le savez, ces dépenses augmentent
plutôt davantage.
Par ailleurs, la croissance des dépenses de santé s'infléchit - bien entendu,
des progrès restent à faire - de 4 % en 1998 et de 3,1 % en 1999. Les chiffres
publiés lundi par la CNAMTS indiquent une progression, sur les neuf premiers
mois de l'année, égale à 2,7 % sur le champ de l'ONDAM. Nous pourrions donc
obtenir un résultat meilleur que la prévision ; mais il convient de demeurer
prudent en matière.
Autre signe d'infléchissement : si l'ONDAM devrait, pour le régime général,
être dépassé de 10,6 milliards de francs fin 1999, monsieur Huriet, 8,3
milliards de francs sont imputables à l'année 1998 et 2,3 milliards de francs «
seulement » - si je puis dire - à l'année 1999. D'ailleurs, je devrais dire 1,3
milliard de francs, car, au titre de l'année 1999, la contribution de
l'industrie pharmaceutique, de l'ordre de 1 milliard de francs, va être versée
au budget de la sécurité sociale.
En donnant ces chiffres, je fais moi-même la démonstration de l'intérêt du «
rebasage » de l'ONDAM. En effet, quelle serait l'utilité de fixer des objectifs
sur des résultats qui n'auraient pas été rétablis en fonction de la réalité ?
Cela aurait peu de sens, vous le reconnaîtrez, y compris pour l'analyse de ce
qui est en train de se passer.
Cette année, les dépenses sont conformes à l'objectif pour l'hôpital, les
cliniques et les honoraires des médecins. C'est dire combien l'objectif fixé
par le Parlement est considéré par le Gouvernement comme devant être atteint,
et nous avons pris des mesures pour qu'il en soit ainsi.
Sur les neuf derniers mois, la progression des honoraires des médecins est
nulle. Nous laissons donc à la CNAMTS une situation en ordre, que nous devons
d'ailleurs aux mesures correctrices prises, le plus souvent, je l'ai dit, en
accord avec les spécialistes concernés.
Madame Borvo, si je me réjouis de ces résultats en matière de maîtrise des
dépenses, c'est parce que, comme vous, je pense que le rétablissement de
l'équilibre de la sécurité sociale, voire l'apparition d'un excédent, doit nous
permettre non seulement d'améliorer la prise en charge de soins qui sont
actuellement mal remboursés - je fais allusion, bien entendu, à l'optique et
aux prothèses dentaires, domaines dans lesquels nous allons, vous le verrez,
progresser très rapidement - mais aussi de prendre en compte des besoins
nouveaux ; je pense aux nouvelles maladies, notamment à celles qui sont liées
au vieillissement de la population.
Il reste que certains postes subissent encore des évolutions trop rapides.
S'agissant des biens médicaux, nous proposons une réforme de même nature que
celle qui a été entreprise pour les médicaments, c'est-à-dire que nous allons
analyser les prix et les taux de remboursement en fonction du service médical
rendu, qu'il s'agisse des prothèses ou des fauteuils roulants.
En ce qui concerne les médicaments, si la croissance est encore importante
aujourd'hui, elle s'est infléchie, puisqu'elle est passée de 8 % en 1998 à 5 %
en 1999. Les chiffres qui viennent d'être publiés par un organisme
international montrent que la France connaît la progression la plus faible des
pays les plus développés, lesquels enregistrent une hausse de 8 % en moyenne.
Celle-ci s'établit en effet à 10 % en Allemagne et à 12 % aux Etats-Unis,
contre 5 % en France. Cela ne correspond pas encore à notre souhait, mais nous
progressons, et nous pouvons affirmer que ces résultats sont largement dus à la
politique structurelle qui a été engagée : le développement des médicaments
génériques, l'harmonisation des prix des équivalents thérapeutiques et la
réévaluation des médicaments en fonction du service médical rendu.
C'est donc dans ce contexte, meilleur que celui de l'an passé, que nous
pouvons aborder sous un jour nouveau les dispositifs de régulation.
J'ai entendu vos critiques sur le « rebasage », pour reprendre la terminologie
qui s'est malheureusement imposée. Il s'agirait d'un « artifice » selon M.
Descours, d'une « logique d'occultation » pour M. Oudin.
Je remarque par ailleurs que M. Descours a indiqué hier, comme il l'avait
écrit voilà quelques jours dans la presse médicale - heureusement, il ne tient
pas deux discours - qu'il souhaitait que ce « rebasage » ait néanmoins lieu. Il
a indiqué clairement qu'il n'était pas contre cette remise à zéro,...
M. Charles Descours,
rapporteur.
... que je n'étais pas contre, à condition que...
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je vous lis !
... qui devait « s'accompagner de mesures tendant à financer le déficit de
l'assurance maladie ».
Pour ma part, je ne fais jamais de citation tronquée, monsieur Descours !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Oh !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
C'est pourquoi je cite vos
propos jusqu'au bout.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Sauf pour les avis du Conseil d'Etat !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le « rebasage » consiste
simplement à apprécier le respect des objectifs votés par le Parlement par
rapport aux résultats de l'année passée et non par rapport aux résultats
cumulés de l'ensemble des années passées. C'est d'ailleurs ce qui se pratique
pour les grands agrégats économiques, notamment pour le budget de l'Etat. Ne
pas « rebaser » conduirait d'ailleurs à désespérer les professionnels de
santé.
Le dérapage s'élevait à 8,3 % en 1998, contre 1,3 % seulement en 1999, et il
sera peut-être réduit à zéro en 2000. Pourtant, nous aurions toujours ces
milliards de francs derrière nous, qui finalement décourageraient même ceux qui
ont envie de dégager des résultats.
Par conséquent, ne désespérons pas les professionnels. Soyons capables
d'analyser, année par année, les évolutions, pour prendre éventuellement les
mesures nécessaires - que j'essaierai d'ailleurs de vous communiquer.
Pour financer les déficits du précédent gouvernement, il a fallu créer la
Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, et la contribution pour
le remboursement de la dette sociale, la CRDS, que les Français paieront
jusqu'en 2014, vous l'avez dit, monsieur Descours. Eh bien ! nous n'aurons pas
recours à ce moyen ! Le déficit est supporté en trésorerie par le régime
général et nous sommes convaincus que les excédents à venir, du fait du
redressement des comptes, permettront de l'absorber.
Alors, pour que soient recevables vos critiques à notre encontre s'agissant de
la maîtrise des dépenses, encore faudrait-il, monsieur le rapporteur, monsieur
le président de la commission, que vous avanciez des propositions. L'année
dernière, vous proposiez des reversements individualisés ; ils ont disparu
cette année et nous nous en félicitons. Mais que mettez-vous à la place ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Vous aussi, vous proposez des reversements collectifs !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le rapporteur, je vous
ai écouté ! Ayez la gentillesse de faire de même !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je vous réponds !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Que proposez-vous cette année ?
Vous vous bornez à indiquer, dans l'un des amendements présentés, que la
convention prévoit des outils de maîtrise médicalisée des dépenses. Jusque-là,
nous ne pouvons qu'être d'accord, c'est d'ailleurs ce que nous faisons. Il
n'est pas nécessaire de légiférer à cet effet car la loi en vigueur le
permet.
En revanche, vous supprimez toutes les dispositions qui pourraient
concrètement inciter les médecins à s'associer à cette maîtrise médicalisée :
les contrats de bonne pratique et les accords de bon usage des soins.
Votre démarche relève donc de l'intention, vertueuse, je le concède, mais elle
reste purement incantatoire.
Le second alinéa de cet amendement tend à mettre en place un dispositif que je
n'ai pas bien compris, car il ne débouche sur rien. Vous dites que si, sur
l'année
n,
il y a un dépassement, on établit, l'année
n
+1, des
contrats régionaux. De ces contrats, on ne nous dit rien, sinon qu'ils
devraient permettre de réagir à un dépassement une fois l'année écoulée.
Comment ? Par quelles mesures ? Nul ne le sait !
Vous prévoyez, toujours en année
n
+1, un bilan de ces contrats en fin
d'année. Le dépassement de l'année
n
+1, est donc déjà bien loin. Si rien
n'a alors changé, quelles conséquences concrètes va-t-on en tirer ? Mystère !
Vous ne faites aucune proposition particulière ; à aucun moment on n'intervient
pour faire respecter l'ONDAM.
J'ai entendu M. Huriet dire que nous ne considérions pas l'ONDAM comme un
objectif. Si, nous considérons l'ONDAM comme un objectif ! C'est la raison pour
laquelle j'ai été amenée à prendre un certain nombre de décisions - je vais y
revenir. A la demande de la CNAMTS et de ses partenaires, nous donnons à cette
caisse les moyens, aujourd'hui, de prendre des décisions en cours d'année pour,
justement, faire en sorte que l'ONDAM soit respecté.
En juin 1998, nous avons constaté une forte progression des honoraires de
certains spécialistes, par exemple des radiologues. Qu'aurais-je dû faire si
j'avais appliqué le dispositif que vous proposez ? J'aurais dû attendre le
début de l'année 1999 pour étudier la question et pour demander que le problème
soit réglé au moyen des contrats régionaux. Quels contrats régionaux ? Sur
quelle base ? Qui les élabore ? Je l'ignore !
Ces contrats seraient entrés en application au mieux au second trimestre 1999.
Leur bilan aurait été dressé en mars 2000, c'est-à-dire deux ans après le
dérapage. Eh bien ! moi, pendant ce temps-là, j'ai agi ! D'ailleurs, si je ne
l'avais pas fait, vous me l'auriez reproché : vous m'auriez demandé quelle est
l'utilité de voter un ONDAM si vous ne faites rien pour le faire respecter ? »
Eh bien ! j'ai tenté de le faire respecter !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Vous l'avez « rebasé ».
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Non, je l'ai fait respecter,
puisque, cette année, les radiologues, les cardiologues, les laboratoires
biologiques, les dentistes, les cliniques, ont effectué des reversements à la
sécurité sociale. Ceux-ci ont permis d'éviter le dérapage des honoraires des
spécialistes, qui aurait perduré si j'avais appliqué le système que vous
proposez.
Monsieur Descours, j'entends déjà les critiques que vous m'auriez adressées si
nous n'avions pas pris les mesures que nous avons arrêtées.
Dans le fond, le dispositif que nous proposons - puisque vous ne nous faites
pas confiance ! - c'est celui que suggérait très récemment M. Balladur dans
Impact Médecin Hebdo
du 15 octobre 1999 : « Je souhaite que, par la voie
conventionnelle, les partenaires sociaux et les médecins définissent les seuils
au-delà desquels, dans les limites financières déterminées chaque année par le
Parlement, les taux de remboursement et les lettres clés seraient amenés à
varier. »
M. Jacques Barrot disait aussi, dans
Le Quotidien du Médecin
du 17
février 1998 : « Nous avons imaginé le système des reversements d'honoraires,
mais ce n'est pas le seul. On peut imaginer des lettres clés flottantes ou tout
autre dispositif. L'important c'est d'avoir un mécanisme qui empêche de se
retrouver comme autrefois dans des situations de déficit chronique. »
Eh bien ! c'est ce que nous faisons : nous donnons la possibilité à la CNAMTS,
comme elle le souhaite, d'agir sur l'ensemble des paramètres - la nomenclature,
les bonnes pratiques, l'élaboration et la mise en place de réseaux, le niveau
des honoraires - afin que l'ONDAM soit respecté.
A cet égard, je suis étonnée de constater qu'au moment même où nous proposons
à la CNAM, qui l'avait demandé, d'être autonome précisément pour ce qui est de
la médecine, au moment même où nous lui donnons les moyens complets
d'intervention dans ce domaine - je l'espère par la voie conventionnelle ou, à
défaut, sous sa propre responsabilité - certains, comme M. Trucy, mais aussi
comme vous, monsieur Descours, me disent : « Vous voulez agir seule. Vous
voulez étatiser. »
Nous avons été amenés à agir seuls cette année parce que l'ordonnance Juppé ne
permettait pas à la CNAM d'agir : à défaut d'autres accords avec les
spécialistes, la CNAM était dépourvue de tout moyen pour faire respecter
l'ONDAM.
Nous allons donc, cette année, donner à l'ensemble des professionnels de la
médecine de ville la possibilité de négocier avec les caisses et de trouver les
moyens de régulation.
D'ailleurs, cela peut jouer dans les deux sens. Ainsi, la convention des
généralistes, qui, l'année dernière, a donné lieu à une augmentation de la
lettre clé, n'a pas entraîné de dérapages et les objectifs fixés ont été
parfaitement respectés.
Donc, nous réformons le système par la loi en portant le débat devant le
Parlement, monsieur Descours. D'ailleurs, je me suis toujours réjouie que les
ordonnances Juppé aient prévu ce débat indispensable sur les grandes
orientations en matière financière comme en matière de politique de santé. J'ai
dit hier que Dominique Gillot et moi-même souhaitions instituer un débat
annuel, avant l'été, sur les grands objectifs de santé publique.
S'agissant des honoraires des médecins, si leur progression est nulle sur neuf
mois, le Gouvernement y est effectivement pour quelque chose : c'est bien en
travaillant avec les professionnels de santé, en signant des accords avec un
certain nombre de professionnels que nous avons effectivement réussi à inscrire
notre démarche dans une logique de travail en collaboration - dorénavant, ce
sera avec la CNAM - que ce soit sur la nomenclature, sur les bonnes pratiques
mais aussi sur des reversements, lorsque cela s'avère nécessaire, sous une
forme ou sous une autre.
La liste des professionnels avec lesquels nous avons conclu est longue. Elle
témoigne de la confiance retrouvée d'un corps médical que nous avions, à notre
arrivée, trouvé braqué.
Concernant les médecins spécialistes, nous avons agi parce que nous étions
contraints de le faire devant les dérapages constatés. Nous proposons, cette
année, de donner à la CNAM, et pour la première fois, une responsabilité pleine
et entière, dans des conditions claires et lisibles par tous, respectant ainsi
ce qui avait été demandé, du moins sur ce point particulier, dans le cadre du
plan stratégique.
Nous entendons, comme le souhaite M. Autain, donner sur ces bases une nouvelle
vigueur au dialogue conventionnel. En procédant ainsi, monsieur Giraud, nous ne
cloisonnons pas notre système de santé, au contraire, nous clarifions les
responsabilités et nous nous donnons les moyens de développer les réseaux et
les complémentarités sur le terrain.
En accordant ainsi une large délégation à la CNAM, nous montrons notre
confiance dans le paritarisme, pas par des mots, pas par des slogans, mais bien
dans la réalité des choses.
Ainsi, monsieur Descours, monsieur Boyer, vous qui nous reprochez de ne pas
avoir assez tenu compte du plan stratégique de la CNAM, que proposez-vous d'en
retenir ? En tout cas pas ce que nous proposons ici, c'est-à-dire de lui donner
la responsabilité totale dans le cadre de la médecine de ville. Et pourquoi
allez-vous voter contre la disposition qui organise un meilleur suivi des gros
consommateurs, disposition qui figurait dans le plan de la CNAM ?
J'ai bien noté, en tout cas, que M. Cabanel se félicitait que nous n'ayons pas
suivi la CNAM en matière de thermalisme !
M. François Autain.
Et pour cause !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Moi aussi, je m'en félicite, car je suis du même département,
tout comme M. le président !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ne nous faites pas, alors, des
reproches contradictoires !
Je voudrais préciser à M. Cabanel, en réponse à sa question, que l'arrêté qui
prolonge la dispense d'entente préalable n'est pas rétroactif, bien évidemment.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'essaie de faire des textes qui soient
conformes à la Constitution ; on peut parfois se tromper, mais, en
l'occurrence, cela n'a pas été le cas.
(Sourires.)
Notre ligne de conduite pour l'assurance maladie repose sur la
clarification des compétences, le développement des outils structurels et le
dialogue avec les professionnels. La loi de modernisation du système de santé,
que nous discuterons en l'an 2000, approfondira encore l'effort entrepris ;
mais le chemin parcouru est important.
Je voudrais revenir d'un mot sur le médicament, car M. Autain a posé une
question tout à fait importante pour l'avenir de la sécurité sociale. Un
laboratoire pourrait en effet s'abstenir de demander le remboursement de
certains médicaments pour faire pression sur les pouvoirs publics. Nous le
voyons actuellement à propos d'un médicament antigrippe. Il est vrai qu'à
partir du moment où le non-remboursement permet de faire de la publicité,
certains laboratoires ne demandent pas le remboursement, obtiennent
l'autorisation de mise sur le marché, développent la communication qu'ils
souhaitent, puis font pression sur les pouvoirs publics pour que le
remboursement soit accordé, mais à un tarif qui, parfois, ne correspond pas à
leur apport.
Ce médicament a suscité un débat très important. Alors que l'autorisation de
mise sur le marché a été accordée à l'échelon européen, certains pays, comme la
Grande-Bretagne, se refusent à mettre ce médicament sur le marché, car il
présente, semble-t-il, des problèmes pour certaines populations et le service
médical rendu n'apparaît pas évident.
Je n'en dirai pas plus, car nous attendons l'avis de la commission de
transparence. Mais je crois que la question, qui est un peu la même que celle
qui se pose aujourd'hui pour les pilules de troisième génération, mérite
approfondissement.
Pour ce qui est des pilules de troisième génération, nous n'arrivons pas à en
faire baisser le prix, un prix qui, à l'évidence, nous dit le rapport Spira,
n'est pas justifié par l'apport en termes de contraception ou de réduction des
effets secondaires. Nous n'avons aucune raison de rembourser des pilules qui
n'offrent pas un apport médical supérieur par rapport aux pilules des
générations antérieures. Pourtant, leur coût est aujourd'hui huit à dix fois
supérieur. Et les laboratoires, par le biais des plannings familiaux ou autres,
les distribuent aujourd'hui gratuitement, se ménageant ainsi une clientèle
captive, et font de la publicité, ce que ne peuvent pas faire les autres.
A nous de prendre la mesure des problèmes de plus en plus importants qui se
posent en la matière.
J'en arrive à la politique hospitalière.
M. Descours comme M. Francis Giraud nous ont reproché de ne pas nous
préocupper de la politique hospitalière. Je veux leur rappeler que ce sont eux
qui, en 1997 et en 1998, ont souhaité un ONDAM réduit par rapport aux
propositions du Gouvernement, au motif qu'il fallait faire des économies sur
l'hôpital.
(M. Charles Descours, rapporteur, fait un signe de dénégation.)
Mais si, monsieur Descours !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je n'ai jamais dit cela !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mais, vous avez, semble-t-il,
rompu avec cette tradition cette année, et croyez bien que je m'en réjouis.
Pour répondre à M. Trucy, j'indiquerai, comme je l'ai dit à de nombreuses
reprises, que je n'ai jamais suivi les propositions de la CNAM en ce qui
concerne la politique hospitalière. J'ai toujours pensé que ce n'était pas en
posant une règle de trois, dans un bureau, que l'on ferait évoluer la
recomposition hospitalière. Il faut au contraire partir des besoins de la
population, des bassins de vie, et analyser les besoins de santé, comme nous
l'avons fait dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire. D'ailleurs,
je remercie M. Descours d'avoir salué cette action.
Forts de ce qui est actuellement réalisé avec les schémas régionaux
d'organisation sanitaire, nous devons de plus en plus agir à l'échelon régional
pour faire évoluer l'hôpital public comme le secteur privé avec les besoins et
l'évolution des techniques, et pour réduire les inégalités.
La qualité et la sécurité des soins est l'un des trois axes de notre politique
hospitalière. C'est l'attente de nos compatriotes, qui s'est exprimée, avec
juste raison, lors des états généraux de la santé.
L'accrédition, maintenant opérationnelle, doit permettre de s'assurer de cette
qualité. Quarante établissements se sont déjà engagés dans la méthode mise en
place par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES
; deux cents devraient l'être à la fin de l'an 2000. Je confirme ces chiffres à
M. Descours.
Nous renforçons également notre politique de sécurité sanitaire. Des normes
techniques et sanitaires en matière de périnatalité et d'urgence ont été
élaborées pour garantir un niveau de sécurité homogène dans l'ensemble des
établissements et, comme vous le savez, la lutte contre les infections
nosocomiales a été renforcée par la loi du 1er juillet 1998.
Nous avons développé des recommandations de bonne pratique sur les greffes, le
sang et les médicaments, pour contribuer à accroître la sécurité de leur
utilisation. Des moyens ont été prévus et viennent d'être intégrés aux ARH, les
agences régionales de l'hospitalisation, dans le cadre de la procédure
budgétaire.
La réduction des inégalités est le deuxième axe de notre politique
hospitalière.
J'ai parlé, dans mon discours introductif, de la montée en charge des
permanences d'accès aux soins de santé destinées à accueillir les plus
démunis.
Je rappelle que la réduction des inégalités entre les régions est également
prioritaire. Nous avons fait le choix de déléguer une fraction très importante
des dotations, à hauteur de 2,24 % cette année sur les 2,5 % de l'ONDAM. La
politique de réduction des inégalités est donc poursuivie.
Si le projet de loi de financement de la sécurité sociale est adopté, les taux
en métropole, que nous avons, à la demande des deux assemblées, communiqués
avant le débat, varieront de 1,25 % à 3,8 %, afin de poursuivre l'effort engagé
pour rattraper le retard accumulé par certaines régions.
Mais, au sein même des régions, il existe aussi des inégalités entre
établissements, et nous devons, là aussi, les réduire. A cet effet, nous avons
demandé aux ARH de s'appuyer sur les outils de connaissance de l'activité des
établissements de santé que sont les programmes de médicalisation du système
d'information, ou PMSI. Ces outils se perfectionnent et se développent dans des
secteurs nouveaux. Parallèlement, comme vous le savez, nous engageons des
travaux pour expérimenter la tarification à la pathologie, qui devrait, à
terme, permettre de comparer ce qui est comparable, tout en maintenant des
crédits spécifiques pour l'hôpital, car nous savons que celui-ci remplit des
tâches de service public. En effet, il ne sélectionne pas ses malades ni les
pathologies qu'il traite, il assure des missions de formation et de recherche,
et tout cela doit, bien évidemment, être pris en compte dans les enveloppes.
J'en viens au troisième axe de notre politique, qui concerne l'adaptation de
l'hôpital aux besoins.
Je ne reviendrai pas sur les schémas régionaux d'organisation sanitaire, les
SROS. Les urgences, la périnatalité, la cancérologie ont fait partie des
priorités nationales, qui ont été largement complétées. Par exemple, dix SROS
comportent un volet spécifique pour assurer l'accès aux soins des personnes en
situation de précarité. De même, de nombreux SROS redéploient aujourd'hui les
unités de soins de suite ou de réadaptation pour mieux les répartir
géographiquement. D'autres traitent les problèmes d'alcoolisme dans certaines
régions particulièrement concernées.
Les SROS permettent également le développement d'activités nouvelles ou
insuffisamment représentées. Tel est le cas du maintien de l'insuffisance
rénale chronique, des soins palliatifs ou du traitement de la douleur, sur
lesquels nous commençons à généraliser un certain nombre de pratiques. De même,
les alternatives à l'hospitalisation figurent souvent dans les priorités, ce
qui devrait nous permettre de rattraper notre retard en la matière.
Ainsi, notre politique hospitalière est, me semble-t-il, cohérente, efficace
et déterminée. Elle part des besoins de santé. Elle vise à atteindre la
meilleure qualité et, surtout, à donner à tous nos concitoyens, partout où ils
se trouvent, l'assurance d'être traités de la même manière en fonction de
l'état de gravité ou d'avancée de la maladie.
J'en viens à la réforme des cotisations patronales.
Comme l'a souligné François Autain, la réforme des cotisations patronales est
un dispositif essentiel pour l'emploi. J'avoue que je ne comprends pas bien
l'opposition systématique de la majorité sénatoriale,...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Et d'une partie de la majorité plurielle !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
... sauf à croire qu'il s'agit
d'une opposition de principe.
M. François Autain.
Ils sont souvent sectaires !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur Descours, comme votre
collègue Jean-Pierre Fourcade, vous vous dites favorable aux allégements de
charges sur les bas salaires. Or, lorsque vos amis étaient aux responsabilités,
vous avez sans cesse repoussé cette réforme pourtant nécessaire.
M. François Autain.
Absolument !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Aujourd'hui, alors que le
Gouvernement soumet au Parlement un dispositif qui exonère 85 % des cotisations
patronales par rapport au SMIC, qui concernera les deux tiers des salariés -
ceux qui se situent en deçà de 1,8 fois le SMIC - et qui, après prise en compte
du financement des 35 heures, conduira à une baisse du coût du travail de 5 %
en deçà de 10 000 francs par mois, alors donc que le Gouvernement vous soumet
un tel dispositif, vous qui, ici-même, en juin 1998, avez voté une proposition
de loi allant dans le même sens, vous vous y opposez !
M. Dominique Braye.
Eh oui !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Comprenne qui pourra !
M. Dominique Braye.
Eh oui !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
En plus, ce qui n'a pas été le
cas ni lorsque vos amis étaient au pouvoir ni en juin dernier, lorsque vous
avez présenté cette proposition de loi, cette fois-ci, nous avons le
financement.
M. Dominique Braye.
Avec quels moyens !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je relève une autre incohérence
entre les discours et les actes, monsieur Descours.
Vous vous déclarez d'accord pour ne pas asseoir les prélèvements sociaux
uniquement sur les salaires. Pourtant, lorsque le Gouvernement propose enfin au
Parlement un dispositif, qui, à prélèvement globalement constant, allège de 25
milliards de francs les charges qui pèsent sur les salaires, en les transférant
sur les revenus du capital et sur les entreprises capitalistiques, vous décidez
de supprimer les articles 2, 3 et 4 du projet de loi, qui organisent
précisément cet élargissement d'assiette.
M. Dominique Braye.
Mais non !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Autant je peux comprendre la
remarque de Mme Borvo quand elle estime qu'avec 7,5 milliards de francs en
2000, dont 4,3 milliards de francs sur les bénéfices, ce n'est encore qu'un
petit pas...
M. Dominique Braye.
Il faut bien leur donner quelques satisfactions, car vous leur faites avaler
beaucoup de couleuvres !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je note que ce sont toujours
les mêmes sénateurs qui font des remarques ! Il est regrettable, monsieur
Braye, que vous ne fassiez pas une grande intervention, qui me permettrait
enfin de comprendre quelles sont vos idées en matière de sécurité sociale !
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Dominique Braye.
Il faut bien, je le répète, donner des satisfactions aux membres de votre
majorité, pour les couleuvres que vous leur faites avaler !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le sénateur, il se
trouve que cela fait trois ans que je me bats pour faire en sorte que
l'assiette des cotisations sociales aille au-delà des seuls salaires. Que vous
ne soyez pas d'accord, monsieur le sénateur, chacun appréciera, notamment les
commerçants et les artisans, ainsi que les entreprises de services, qui
attendent cette réforme depuis maintenant trente ans.
(M. Dominique Braye
s'esclaffe.)
Et je ne vois pas pourquoi je ne dirais pas au groupe
communiste républicain et citoyen, qui soutient la même idée que moi, comme
l'ensemble des partis de la majorité, quand je partage et quand je ne partage
pas son point de vue.
Nous sommes, nous, au moins d'accord sur l'essentiel. Tout le monde ne peut
pas en dire autant !
(Sourires sur les travées socialistes.)
Ce qui vous gêne, peut-être, ...
M. Dominique Braye.
Non, cela m'amuse !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
... c'est que nous abordons
effectivement l'ensemble des paramètres susceptibles de diminuer le chômage,
sous tous leurs aspects et, je dois le dire, sans dogmatisme.
Nous abordons à la fois les nouveaux emplois, les nouvelles technologies, les
emplois-jeunes, la réduction de la durée du temps de travail, le soutien à la
consommation des ménages et, aujourd'hui, la baisse des charges, mais une
baisse par élargissement de l'assiette des cotisations, qui, contrairement à ce
qui a été fait par le passé, sera contrôlé. En effet, dans le projet de loi
relatif à la réduction négociée du temps de travail - je vais encore vous faire
plaisir en disant que c'est le groupe communiste qui a déposé les amendements
concernant cette disposition - le Gouvernement s'est engagé - l'ensemble du
Sénat pourrait d'ailleurs en être d'accord car cet engagement est sain pour la
démocratie - à mesurer les effets et les contreparties en matière d'emploi de
l'utilisation des fonds publics. Puisque nous baissons les charges, nous
faisons un rapport pour expliquer au Parlement comment l'argent public a été
utilisé et quels ont été les résultats en matière d'emploi.
M. Guy Fischer.
La droite n'a jamais voulu le faire !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je préfère écouter les 830 000
entreprises de l'UTA, l'Union professionnelle artisanale, qui, par
l'intermédiaire de leurs représentants, saluent cette réforme « qui répond
enfin à l'urgence de réduire le coût du travail dans les entreprises de
main-d'oeuvre ».
En ce qui concerne les circuits de financement, je voudrais d'abord saluer
l'innovation en matière de vocabulaire. Nous avions beaucoup entendu parler
d'usines à gaz, formulation reprise par MM. Oudin et Descours. M. Delaneau a
parlé de « plomberie », M. Fourcade de « raffinerie ». Je constate que
l'opposition nationale est toujours prête à innover pour qualifier ce qui, à
mon avis, n'est jamais qu'une usine à emplois, car notre objectif est bien de
créer des emplois.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
On verra !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Tout le monde l'a compris, vous
tentez, en l'occurrence, de faire un procès en sorcellerie financière, et je
reprends, là encore, les propos de M. Autain.
De quoi s'agit-il d'autre, en effet, quand ces critiques viennent d'une
opposition nationale qui a créé, lorsqu'elle était aux responsabilités, en
1994, le Fonds de solidarité vieillesse, qui était financé - excusez du peu ! -
par une partie de la CSG, par les taxes sur les alcools, par la taxe sur la
prévoyance et les produits financiers et par la C3S, la contribution sociale de
solidarité des sociétés ? En matière de complexité, nous sommes à bonne
école...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Mais vous continuez !
M. Dominique Braye.
Vous en rajoutez !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
... et nous avons de grands
maîtres !
De quoi s'agit-il d'autre quand M. Lambert parle d'argent détourné du fonds de
réserve pour les retraites, alors que les ressources qui devaient provenir du
FSV viendront de la sécurité sociale, et de manière plus assurée puisqu'il y a
transfert de recettes ?
De quoi s'agit-il d'autre quand M. Oudin prétend que nous avons utilisé les 14
milliards de francs d'excédents potentiels de la sécurité sociale pour financer
des dépenses nouvelles, alors que nous les mobilisons principalement pour
alimenter le fonds de réserve pour les retraites ?
De quoi s'agit-il d'autre quand M. Descours continue de prétendre qu'il y a
une contribution indirecte de la sécurité sociale au financement de la réforme
des cotisations patronales,...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Oui, je continue !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
... alors qu'elle contribue au
fonds de réserve pour les retraites ?
Mais, si vous n'êtes pas d'accord, il faudra le dire aux Français, car nos
concitoyens, qui attendent une réforme de nos systèmes de retraite,...
M. Dominique Braye.
Ils attendent toujours !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
... attendent de la solidarité
nationale qu'elle soit capable d'avoir un fonds de réserve pour les retraites à
la hauteur des problèmes qui sont soulevés.
M. Dominique Braye.
On en est loin !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Certes, mais c'est mieux que
lorsqu'il n'y avait rien !
M. Charles Descours,
rapporteur.
On en reparlera !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
De quoi s'agit-il d'autre quand
MM. Oudin et Lambert prétendent qu'il y a un trou dans le financement de la
réforme des cotisations patronales de 20 milliards de francs dès 2001, qui
conduirait à un triplement de la CSG, à un quadruplement de la taxe générale
sur les activités polluantes, la TGAP, et à un doublement des droits sur les
alcools ?
La réalité, c'est qu'il n'y a pas de prélèvement nouveau global, ni sur les
entreprises ni sur les ménages.
S'agissant des entreprises, la contribution sociale sur les bénéfices sera
reversée aux entreprises de main-d'oeuvre. Il s'agit donc d'un pur
rééquilibrage. En ce qui concerne les ménages, les droits sur les alcools ne
sont pas augmentés, ils sont simplement transférés du FSV vers le fonds de
baisse des charges. Il en va de même pour le tabac.
Enfin, je ne peux vous laisser dire qu'il y aurait douze prélèvements nouveaux
depuis 1997, dont cinq qui figureraient dans le projet de loi de financement de
la sécurité sociale pour 2000.
Je souhaiterais les reprendre successivement.
Pour ce qui est des droits sur les tabacs, il s'agit d'un transfert du budget
de l'Etat vers celui de la sécurité sociale, ce qui est d'ailleurs pertinent
sur le principe, vous en conviendrez.
Quant aux droits sur les alcools, il s'agit, là encore, d'un transfert, et
j'attends que l'on m'explique en quoi il est plus logique que ces droits soient
affectés à des validations de points de retraite plutôt qu'au fonds de
financement de la réforme des cotisations patronales.
La contribution sur les bénéfices se substitue à la surcontribution sur
l'impôt sur les sociétés, mais elle vient abonder la sécurité sociale, et c'est
une grande première.
La TGAP était affectée au budget de l'Etat ; elle est simplement transférée et
élargie à 1,3 milliard de francs en l'an 2000.
Quant à la contribution concernant les heures supplémentaires, elle ne
s'applique qu'aux entreprises qui ne seront pas à 35 heures, et a donc vocation
à disparaître.
MM. Lambert, Delaneau et Oudin, j'entends votre demande d'une meilleure
articulation de la présentation des finances sociales et des finances de
l'Etat. Justement, en créant ce fonds de baisse des charges, nous visons une
plus grande transparence et une plus grande clarification. Nous pourrons,
chaque année, ensemble, dans un débat démocratique, mesurer les contreparties
en termes d'emplois de ces réductions de charges. Cela fait longtemps que les
Français attendent qu'on leur dise comment sont utilisées ces réductions de
cotisations sociales.
J'en viens à la politique familiale.
Beaucoup d'entre vous se sont inquiétés de la politique familiale du
Gouvernement. Je remercie d'abord M. Chabroux de l'avoir soutenue en soulignant
qu'elle était organisée autour d'une exigence de justice et de solidarité. En
effet - il a eu raison de le dire - cette politique repose sur une méthode : la
concertation avec le mouvement familial et les partenaires sociaux,
matérialisée chaque année par la réunion de la conférence de la famille.
Ainsi, chaque année, nous définissons avec eux des priorités, à la suite
d'ailleurs du travail que Mme Dominique Gillot avait fait à la demande du
Premier ministre lorsqu'elle était député. Nous arrêtons des mesures et nous
les soumettons au Parlement lors du débat sur le projet de loi de financement
de la sécurité sociale.
Je rappelle les progrès réalisés depuis deux ans : l'allocation de rentrée
scolaire étendue à toutes les familles d'un enfant ; la réévaluation des
loyers-plafond des allocations de logement familial ; le bénéfice des
majorations pour âge ouvert aux titulaires du revenu minimum d'insertion ;
l'augmentation du budget d'action sociale de la CNAF - 1 milliard de francs
l'année dernière, 700 millions de francs cette année - pour soutenir le
développement des structures d'accueil des enfants ; le prolongement du
bénéfice des prestations familiales à vingt ans pour toutes les familles ; le
prolongement à vingt et un ans de l'âge limite pour bénéficier de l'allocation
de logement et du complément familial.
Il y a donc bien une vraie politique familiale qui se construit dans la durée
et dans la concertation, et qui s'appuie, à la différence de ce qui s'est passé
précédemment, sur des comptes de la famille qui sont aujourd'hui équilibrés.
En effet, lorsque j'entends sur certaines travées demander la prolongation à
vingt-deux ans de toutes les prestations familiales, je demande : comme
financez-vous cette mesure ? On ne peut à la fois demander une maîtrise des
dépenses et proposer, à l'instar de la loi Balladur, des engagements sans
prévoir leur financement.
M. Dominique Braye.
Et le projet de loi sur les 35 heures ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je dirai à M. Jean-Louis
Lorrain que, en vue de la prochaine conférence de la famille, nous travaillons,
à la demande des associations, sur deux grands thèmes : la simplification des
aides à la famille, dont il a parlé, et les aides au logement.
J'en viens aux retraites.
M. Vasselle nous a reproché, une fois encore, de ne pas aller assez vite.
Ainsi que je l'ai déjà dit et le Premier ministre s'est lui-même exprimé sur ce
sujet à plusieurs reprises, le Gouvernement est évidemment conscient qu'une
réforme des systèmes de retraite s'impose, afin de consolider les régimes par
répartition qui vont connaître, comme on le sait, des difficultés à partir de
2005.
Nous souhaitons respecter la méthode que le Premier ministre a définie et qui
est la suivante : d'abord, le diagnostic - il est réalisé - ensuite, le
dialogue - nous y sommes - enfin, des décisions - il les annoncera au début de
l'année prochaine.
Nous suivons cette méthode et ce calendrier sans succomber aux appels de ceux
qui voudraient que nous prenions immédiatement des mesures, sans d'ailleurs
nous préciser lesquelles, ou de ceux qui nous conseillent de repousser
indéfiniment le problème. Vous pouvez compter sur la détermination du
Gouvernement.
Négocier, se concerter, ce n'est pas temporiser. Ce sont d'ailleurs les mêmes
qui parlent d'étatisation et de non-négociation qui nous demandent aujourd'hui
de prendre des décisions sans cette concertation.
D'ores et déjà, le fonds de réserve pour les retraites a été constitué - je
rassure M. Descours : je comprends qu'il ne lise pas tous les jours le
Journal officiel
; moi-même, je ne le fais pas - contrairement à ce
qu'il a dit, et ce depuis le décret du 24 octobre. Les décrets et arrêtés
fixant le principe des 2 milliards de francs ont été publiés, et la somme
versée à ce fonds dès le 29 octobre.
Comme je l'ai dit dans mon discours introductif, les ressources de ce fonds
devraient dépasser légèrement les 20 milliards de francs à la fin de l'année
prochaine, au titre même de la loi de financement de la sécurité sociale.
Je me réjouis que les excédents de la C3S et le FSV puissent effectivement
aboutir à ce fonds de réserve. Ainsi, nous préparons bien l'avenir. Il est
préférable d'accumuler ces réserves pour les retraites, plutôt que de les
maintenir, comme le propose le président Delaneau, au sein de la CNAVTS.
Ce fonds de réserve va être mis en place sous la surveillance des partenaires
sociaux et, sans doute, des représentants du Parlement. C'est un des thèmes que
nous examinons actuellement avec l'ensemble des organisations patronales et
syndicales. Les sommes vont être placées. Elles vont être surveillées, si je
puis dire, et c'est bien normal, puisqu'il s'agit d'argent qui appartient à
l'ensemble des Français.
Je veux remercier M. Domeizel d'avoir souligné que nous avons progressé sur la
CNRACL. L'Etat, et je m'en félicite, partagera avec la collectivité et les
hôpitaux l'effort pour assurer l'équilibre en 2000 et en 2001. Ce n'est pas
parce que des réformes structurelles devaient êtres apportées que nous ne
devions pas nous préoccuper du déficit. Vous avez eu raison de le souligner,
monsieur Domeizel, il fallait avoir le courage de prendre ces mesures. Tous
ceux qui ont le sens des responsabilités partagent dans les collectivités
locales votre analyse.
Comme M. Domeizel, je m'étonne des propos tenus par M. Jean Boyer sur les
retraités. Je rappelle que leur pouvoir d'achat a augmenté de 1 % sur deux ans.
Certes, cette hausse peut paraître insuffisante. Si la situation de la sécurité
sociale était meilleure, si le problème des retraites était derrière nous,
peut-être pourrions-nous envisager une hausse plus importante. Mais je
rappelle, comme l'a fait M. Domeizel, que, entre 1993 et 1997, les prélèvements
pesant sur les retraités ont augmenté de 4,2 %, à savoir une hausse de 1,3 % de
CSG en 1993, de 1,2 % de cotisations maladie et de 0,5 % de CRDS en 1996, de
0,2 % de cotisations maladie et de 1 % de CSG en 1997 sans revalorisation des
retraites. Je veux bien que des critiques soient émises, mais encore
faudrait-il se les appliquer à soi-même. Une progression de 1 % du pouvoir
d'achat n'est peut-être pas énorme mais, par rapport à la situation précédente,
elle est inégalée, et j'emploie ce terme à dessein compte tenu de celui qui a
été utilisé par M. Jean Boyer sur la situation actuelle.
M. Domeizel a eu raison d'insister sur le bien-fondé de la modification des
règles en matière de pension de réversion que nous avons mise en place l'année
dernière ainsi que sur la revalorisation de ces pensions.
Enfin, j'ai annoncé une augmentation de 1 % du minimum vieillesse.
Je terminerai en apportant quelques réponses àM. Fischer sur les retraites. Il
le sait mais je souhaite le rappeler : la volonté du Gouvernement est d'abord
de renforcer les retraites par répartition. Aujourd'hui, dans notre pays, plus
personne n'ose soutenir que la retraite par capitalisation réglerait des
problèmes que la retraite par répartition ne saurait résoudre. Les mêmes
difficultés se poseraient, mais nous n'aurions pas la solidarité entre les
générations ni la solidarité résultant des minima. La première volonté du
Gouvernement est donc de faire en sorte que la retraite par répartition soit
consolidée. C'est sur ce thème que le Premier ministre s'exprimera.
Par ailleurs, nous nous sommes engagés à abroger la loi Thomas. Ce sera chose
faite dans le DMOS du printemps.
M. Guy Fischer.
Très bien !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'engagement est pris et sera
respecté.
Cela ne signifie pas qu'il ne faille pas aider ceux qui le souhaitent à mettre
en place des fonds d'épargne salariale à moyen et long termes. Toutefois, ces
fonds doivent être différents de ceux que prévoyait la loi Thomas. Aux termes
de ce texte, seuls certains salariés, je pense par exemple aux cadres,
pouvaient bénéficier du dispositif, en transférant parfois une partie de leur
salaire sur des fonds de pension, leur permettant ainsi de ne pas verser de
cotisations sociales, ce qui posait un problème à la sécurité sociale et aux
retraites par répartition. Cette loi leur octroyait des avantages fiscaux
exceptionnels.
La réflexion que nous engageons est d'une tout autre nature. MM. Balligand et
De Foucauld travaillent actuellement sur le thème de l'épargne salariale.
L'idée est la suivante : lorsqu'une personne le souhaite, et le choix doit être
individuel, elle doit pouvoir disposer d'une épargne salariale à moyen et long
termes, ouverte à tous avec les mêmes avantages fiscaux, dès lors que les
règles d'utilisation sont collectives et que l'utilisation est collective. Si
nous parvenons à instituer, par exemple, des fonds locaux de développement pour
aider les petites et moyennes entreprises, pour favoriser le développement
d'activités nouvelles et qui répondent à un certain nombre de règles tendant à
la sécurité financière de ces fonds ouverts à tous - alors qu'aujourd'hui seuls
ceux qui ont les moyens trouvent des placements à moyen et long termes offrant
des avantages fiscaux - nous permettrons à chacun de pouvoir souscrire une
épargne salariale à moyen et long termes pour conforter sa retraite et nous
contribuerons au développement économique de notre pays, et non au
développement de placements financiers ayant pour seul objet d'aider des
catégories qui sont déjà parmi les plus privilégiées. C'est la raison pour
laquelle la loi Thomas ne correspondait absolument pas à nos objectifs.
Aujourd'hui, nous travaillons sur un autre terrain.
Voilà, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je
souhaitais dire. J'ai été un peu longue, mais ce débat n'a de sens que s'il
nous permet de nous expliquer.
Loin de moi l'idée que tout est résolu - j'ai d'ailleurs énoncé les chantiers
qui nous attendent, pour que notre sécurité sociale soit en équilibre et pour
que les excédents à venir nous permettent de répondre aux attentes des Français
en matière d'aide aux familles et de remboursement des soins - notamment pour
les plus démunis et les personnes âgées.
C'est vers ces objectifs que tendent l'ensemble des propositions contenues
dans ce projet de loi.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Monsieur le
président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je
tiens à remercier à mon tour celles et ceux d'entre vous qui ont su dépasser le
nécessaire débat sur les équilibres budgétaires pour traiter des thématiques de
santé publique et d'action sociale qui en constituent le fondement.
J'ai noté avec intérêt que la plupart des questions qui m'ont été posées,
qu'il s'agisse de prévention ou de réduction de la mortalité évitable, ou
encore d'actions en matière de handicap, se rapportent directement à des
politiques de santé publiques qui constituent les priorités que le Gouvernement
entend mettre en oeuvre.
Vous confirmez ainsi l'intérêt de ce rendez-vous annuel qui permet l'ouverture
d'un débat, certes partiel, mais cependant utile, à l'occasion de l'article 1er
du PLFSS pour 2000.
A cet égard, je ne partage pas les réserves de Mme Borvo, qui déplore la
faible portée du rapport annexé à l'article 1er de la loi. Au contraire, grâce
à cet article, le Gouvernement peut rappeler le sens de l'action qu'il conduit
en soulignant les différentes priorités politiques mises en oeuvre et en
affichant des perspectives pour l'année qui vient.
Concernant la santé, tout d'abord, M. Giraud m'a interrogée sur les modalités
de renforcement de la surveillance de la grossesse par une consultation
systématique de prévention pour les femmes enceintes.
L'objectif visé par la politique de périnatalité consiste aujourd'hui à
améliorer le suivi médical, psychologique et social de la grossesse, notamment
en organisant des séances de préparation à la naissance mieux adaptées.
Un arrêté en cours de préparation va permettre aux sages-femmes de jouer
pleinement, dès le début de la grossesse, un rôle de prévention et d'éducation
pour la santé auprès des femmes enceintes et, plus largement, auprès des futurs
parents. Dès cette année, nous avons décidé d'augmenter de 10 % le nombre de
sages-femmes formées à cet effet.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Très bien !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Le nombre de séances de préparation à la naissance et
leur cotation seront réactualisés, après concertation avec les organisations
professionnelles. Vous le voyez, l'orientation affichée dans le rapport
s'appuie sur une politique volontariste en cours de mise en oeuvre, à laquelle
les moyens nécessaires sont affectés.
En ce qui concerne la douleur et les soins palliatifs, il est nécessaire de
réaffirmer que la prise en compte de la douleur à tous les stades ainsi que le
développement des soins palliatifs demeurent des priorités du Gouvernement. La
souffrance n'est ni un devoir ni une punition ; c'est l'apaisement qui est un
droit. Le plan triennal a d'ores et déjà permis des avancées considérables,
soutenues par plusieurs textes en 1999.
Ainsi, le décret du 3 mars 1999 a permis d'augmenter de sept à vingt-huit
jours la durée de prescription possible des antalgiques majeurs.
Une circulaire de février 1999 incite les équipes soignantes des
établissements à élaborer des protocoles de soins antidouleur et autorise les
infirmiers, dans le cadre de protocoles, à administrer eux-mêmes les
antalgiques. Le nombre et les moyens des structures de soins palliatifs ont été
renforcés. L'information sur ces structures est maintenant disponible sur
Internet et sur le minitel.
L'année 1999 a également été l'année d'une grande campagne d'information sur
la lutte contre la douleur auprès du grand public, campagne financée par l'Etat
à hauteur de deux millions de francs.
Concernant les soins palliatifs, je voudrais également rassurer M. Francis
Giraud quant à la publication des décrets d'application de la loi du 9 juin
1999 visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs. Grâce à elle,
les soins palliatifs, qui sont désormais inscrits et définis dans le code de la
santé publique, sont intégrés dans l'organisation hospitalière.
L'action des bénévoles est reconnue et encadrée.
L'accompagnement par la famille est facilité.
Les décrets d'application sont en cours d'élaboration, les Agences régionales
de l'hospitalisation, les ARH, ont pris en compte les soins palliatifs dans
leur schéma régional d'organisation sanitaire, les SROS, et une circulaire va
préciser les conditions de développement de l'hospitalisation à domicile
consacrée aux soins palliatifs.
Les actions engagées en 1999 seront poursuivies en l'an 2000 et, pour la
première fois, la formation à la prise en charge des soins palliatifs deviendra
une priorité de formation continue.
Comme vous le voyez, les soins palliatifs et la prise en compte de la douleur
figurent bien parmi les principales priorités du Gouvernement, assorties des
moyens nécessaires.
Monsieur Huriet, vous vous êtes inquiété des suites données aux travaux de la
conférence nationale de santé. N'avez-vous pas été rassuré par les grands
thèmes de mon intervention générale d'hier, qui reprennent la plupart des
préconisations de cet organisme, dont les travaux nous sont précieux ?
Je veux parler de la lutte contre les pratiques addictives et les dépendances
dangereuses pour la santé ou la sécurité publique, notamment en direction des
jeunes, de la prise en charge des personnes souffrant de maladies chroniques,
auprès desquelles est développée une éducation thérapeutique pour leur garantir
une meilleure qualité de vie. Cette démarche, qui s'adresse aux malades
atteints du sida et de cancers, sera étendue l'année prochaine à ceux qui
souffrent de diabète ou d'asthme. Les campagnes de dépistage du cancer vont
continuer et se développer.
Sont aussi à l'ordre du jour le suivi de la dépendance des personnes âgées
ainsi que la prévention des suicides et l'accompagnement des suicidants. Quant
à la réduction des inégalités devant l'accès aux soins, elle est l'un des
objectifs constamment poursuivi, notamment au travers de la mise en oeuvre des
SROS de deuxième génération.
Concernant les personnels médicaux hospitaliers, vous êtes plusieurs - je
pense notamment à votre rapporteur, M. Descours, et à M. Francis Giraud - à
avoir attiré l'attention du Gouvernement sur l'inquiétude que vous percevez
chez les praticiens hospitaliers et sur la désaffection des jeunes médecins
pour la carrière hospitalière.
Pour les praticiens hospitaliers, je souhaite vous rappeler les avancées
importantes réalisées, d'une part, grâce à la mise en place, par le décret du
25 juin 1999, de nouvelles modalités de recrutement, d'autre part, grâce à
l'évolution statutaire instaurée par les décrets du 6 juillet 1999.
Il s'agit de l'institution d'un repos de sécurité après les gardes ; de
l'harmonisation des carrières des praticiens temps plein et temps partiel, de
l'élargissement des conditions de reprise de services accomplis antérieurement
à l'entrée dans la carrière de praticien hospitalier ; de la création d'une
prime pour exercice dans plusieurs établissements ; enfin, de l'institution
d'une seconde demi-journée hebdomadaire d'intérêt général.
Encouragées par l'accueil positif que recueillent ces mesures auprès des
médecins hospitaliers, Martine Aubry et moi-même allons poursuivre le dialogue
avec eux.
Je veux également vous rappeler les mesures prises en faveur des médecins
urgentistes : la modification du concours national de praticien hospitalier
pour faciliter l'accès aux médecins urgentistes ; la revalorisation de la
rémunération des assistants des hôpitaux, titulaires de la capacité de médecine
d'urgence, enfin, la possibilité donnée aux structures d'urgence des CHU
d'employer des médecins assistants.
Sur le plan des effectifs, un effort considérable a été réalisé, avec la
création de 122 postes de médecins assistants. Par ailleurs, 230 postes de
praticiens hospitaliers seront créés dans le cadre d'un plan pluriannuel : 30
postes dès cette année, 100 en 2000 et 100 en 2001.
Comme vous le voyez - je m'adresse particulièrement à M. Cabanel, qui
s'inquiétait de la place des services d'urgence dans notre dispositif sanitaire
- le Gouvernement accompagne de manière résolue et déterminée la médicalisation
des services d'urgence, au service de la qualité des soins que nous devons aux
patients qui s'adressent à ces structures.
Vous le savez, les maladies professionnelles, dont a parlé Mme Borvo,
constituent une préoccupation permanente, tant de Martine Aubry que de
moi-même.
Sur le plan de la surveillance épidémiologique de ces maladies, il faut
rappeler l'instauration de l'unité santé-travail au sein de l'IVS, l'Institut
de veille sanitaire. Cette unité d'ores et déjà opérationnelle sera renforcée
de façon significative en 2000.
Les moyens nécesssaires ont été apportés pour conduire la réflexion sur les
liens entre santé et travail. Ainsi, l'an prochain, dix chercheurs
supplémentaires travailleront dans le département des risques environnementaux
et professionnels de l'IVS.
L'unité santé-travail a bien évidemment focalisé ses premiers travaux sur
l'amiante, mais nous lui avons aussi demandé de mener des programmes de
recherche sur les expositions physiques et chimiques au travail.
Concernant l'action sociale, je souhaite maintenant réafirmer l'engagement du
Gouvernement en réponse notamment aux interrogations de MM. Chabroux, Autain et
Francis Giraud, qui m'ont tous trois interpellée sur la situation des
structures de prise en charge des handicapés dans notre pays.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire dans mon intervention liminaire, la
politique en faveur des personnes handicapées occupe, dans le budget de la
solidarité comme dans les préoccupations de nombre d'entre vous, une place
centrale. Cette politique se veut globale et cohérente. Elle vise à favoriser
prioritairement l'intégration des personnes handicapées dans tous les
dispositifs de droit commun en milieu de vie ordinaire pour mieux répondre aux
attentes exprimées sans pour autant négliger l'adaptation et la qualité des
réponses des institutions et établissements spécialisés qui restent toujours
nécessaires.
Bien sûr, il faut une lecture coordonnée de la loi de financement de la
sécurité sociale et de la loi de finances de l'Etat pour prendre la mesure de
l'action entreprise en ce sens. Je rappellerai simplement que les dotations
prévues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui vous est
soumis aujourd'hui, au titre de l'ONDAM 2000, pour les personnes handicapées,
augmentent de plus de 24 %. Elles comportent des actions ciblées en faveur des
enfants, des autistes, des traumatisés crâniens et des porteurs de handicaps
rares.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur Giraud, notre pays souffre encore d'un
manque de places pour certains handicapés. Nous avons donc lancé en avril 1998
un programme pluri-annuel de créations qui prévoit 5 500 places supplémentaires
de maisons d'accueil spécialisées et de foyers à double tarification, 8 500
places supplémentaires de centres d'aides par le travail et 2 500 places
supplémentaires d'ateliers protégés d'ici à 2003. Ce programme se développe
régulièrement.
M. Jean-Louis Lorrain.
C'est insuffisant !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Ce plan ambitieux - et dont le démarrage est effectif
dès cette année - permettra de résorber la situation des jeunes adultes
maintenus en établissement d'éducation spéciale par le biais de l'amendement
Creton tout en faisant bénéficier les personnes en liste d'attente des places
nouvellement créées.
Là encore, c'est par une action déterminée dans la durée que nous réussirons à
corriger une situation qui, j'en suis bien consciente, n'est encore pas
optimale à ce jour.
Je pense, par ces différentes précisions, avoir convaincu M. Lambert que le
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 n'est pas,
contrairement à ce qu'il nous a dit hier, « muet sur la santé publique ».
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Charles Descours,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je voudrais répondre très brièvement sur quelques points à la
longue intervention...
M. François Autain.
Et intéressante !
M. Charles Descours,
rapporteur.
... de Mme Aubry, que je remercie.
Vous triomphez, madame le ministre, en annonçant la publication d'un arrêté
relatif au fonds de solidarité vieillesse. Or, il date du 24 octobre dernier,
c'est-à-dire qu'il est postérieur à la présentation par vos soins de ce projet
de loi en conseil des ministres.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le rapporteur, vous
avez dit qu'il n'avait jamais été publié ! Ma réponse se situait par rapport à
cette affirmation.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Il a vu le jour, certes, mais avec un an de retard, et sans
avoir totalement défini le fonctionnement du Fonds de solidarité vieillesse.
Par ailleurs, je voudrais souligner que la nature de l'ONDAM est loin d'être
bien définie.
Après avoir déclaré devant la commission qu'il s'agissait d'un indice, comme
un indice des prix, vous avez dit tout à l'heure que c'était un agrégat
économique... pour affirmer quelques instants plus tard qu'il s'agissait d'un
objectif voté par le Parlement.
Or, nous considérons que c'est la loi, que nous avons bel et bien votée, et
qui n'a donc rien à voir avec un indice de l'INSEE ou de je ne sais quel
organisme plus ou moins officiel. C'est bien une loi votée par le Parlement,
qui, comme la loi de finances, s'impose à l'Etat et au Gouvernement et leur
impose des contraintes. Il est hors de question de jouer avec l'ONDAM comme on
peut jouer, selon la conjoncture, avec un indice des prix !
A propos du dépassement, vous m'avez fait l'honneur de me citer. Or il se
trouve, madame la ministre, que je vous lis, moi aussi. Ainsi, le Gouvernement
a fait à Bruxelles, en décembre 1998, la déclaration suivante à propos du
programme pluriannuel sur les finances publiques à l'horizon 2002 : « Une
évolution contenue des dépenses d'assurance maladie est également possible. Le
programme retient une progression en volume de ces dépenses de 1,3 % en 2000...
» - nous allons nous prononcer sur une majoration de 2,5 % assortie d'un «
rebasage » de l'ONDAM « ... et une diminution par la suite de manière à limiter
à 3,5 % leur augmentation cumulée sur la période 2000-2002. »
Madame la ministre, confirmez-vous les objectifs que le Gouvernement a fixés à
Bruxelles l'année dernière ? Selon vous, « cela suppose de poursuivre de façon
volontariste les efforts de déclaration des dépenses ... et exige cependant des
réformes de structure ». C'est exactement ce que j'ai dit et j'espère, dans ces
conditions, que vous maintenez les propos que vous avez tenus en décembre
1998.
Et, puisque vous m'avez fait l'honneur de me lire, j'espère que vous avez fait
une lecture exhaustive et non orientée de mon rapport. En effet, vous avez
beaucoup parlé, pour vous en glorifier - mais vous en avez parfaitement le
droit ! - d'accords conclus directement entre le Gouvernement et les
représentants de certaines spécialités médicales. A ce sujet, permettez-moi
simplement de citer les propos qu'a tenus M. Spaeth dans sa réponse au
questionnaire de la commission des affaires sociales. « On indiquera les trois
points suivants : la multiplication d'accords avec certaines catégories de
spécialistes conduit à un morcellement accru du système de soins ; la passation
de ces accords rend plus difficile le partage des responsabilités défini par la
convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et la CNAMTS signée en avril
1997 ; les accords en question en constituent pas un mode de régulation adapté.
» Je persiste donc, je confirme et je signe.
Je reviendrai sur les autres points, notamment sur les contre-propositions que
j'ai présentées à l'article 17, lors de la discussion des articles.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Mes chers collègues, avant de passer à la discussion des articles, je vous
propose d'interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures
cinquante.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous passons à la discussion des articles
TITRE Ier
ORIENTATIONS ET OBJECTIFS
DE LA POLITIQUE DE SANTÉ
ET DE SÉCURITÉ SOCIALE
Article 1er (et rapport annexé) (réservé)
M. le président.
Je rappelle que l'article 1er et le rapport annexé ont été réservés
jusqu'après la discussion de l'article 31.
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président.
Par amendement n° 1, M. Descours, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Le quatrième alinéa de l'article L. 114-1 du code de la sécurité sociale est
remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Elle est assistée par un secrétariat général permanent, qui assure
l'organisation de ses travaux ainsi que l'établissement de ses rapports.
« Le secrétariat général de la commission des comptes de la sécurité sociale
est placé sous l'autorité d'un secrétaire général, nommé pour trois ans
renouvelable une fois, par le ministre chargé de la sécurité sociale, sur
proposition conjointe des présidents des deux assemblées. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers
collègues, les rapports de la commission des comptes de la sécurité sociale
sont transmis au Parlement et ils constituent des annexes importantes des
projets de loi de financement.
Ce que je vais dire sur les conditions de fonctionnement de la commission des
comptes, qui nous semblent particulièrement importantes, comme le sont la
qualité et l'objectivité de ses analyses, indispensables à la bonne
compréhension du nouveau contexte créé par la loi de financement et par le vote
par le Parlement, ne doit pas être pris comme un reproche fait à ce
gouvernement.
Nombre d'observateurs et de journalistes sont convaincus que la commission est
une instance délibérative présentant elle-même les comptes. Mme le ministre a
d'ailleurs fait une conférence de presse extrêmement suivie à l'issue de la
réunion de cette commission des comptes.
En fait, la commission des comptes est - je le dis sans agressivité - un «
habillage » de la direction de la sécurité sociale. En effet, les comptes sont
transmis au secrétaire général, seule personne véritablement « distincte » de
l'administration de la sécurité sociale, une semaine avant la réunion de la
commission. Le secrétaire général se borne ainsi à rédiger un « avant-propos »
de deux ou trois pages, où il insiste régulièrement sur le manque de moyens...
de l'administration elle-même.
Les comptes tendanciels, élaborés à l'occasion de la réunion de la commission
des comptes, permettent normalement de distinguer avec clarté tout ce qui est
réellement « tendanciel » et ce qui est « corrigé » ou proposé par le
Gouvernement dans le projet de loi de financement.
Comme nous l'avons déjà relevé, pour le déplorer, au cours de la discussion
générale et dans notre rapport écrit, le rapport de septembre 1999 marque une
évolution regrettable. En effet, de nombreuses décisions, qui n'étaient
pourtant pas votées par le Parlement à l'époque, ont été intégrées dans le «
compte tendanciel ».
Dès lors, la commission a été obligée de reconstruire un véritable compte
tendanciel, avant toute prise de décision, pour apprécier les véritables effets
de la politique du Gouvernement.
L'exemple le plus fâcheux, sur lequel on a déjà beaucoup parlé, est la
provision comptable de 5,5 milliards de francs opérée au détriment des branches
du régime général pour le financement des 35 heures, et donc inscrite dans les
dépenses par le secrétaire général. Paradoxalement, à la suite de la
protestation des partenaires sociaux, cette provision a été retirée au cours de
la lecture du projet à l'Assemblée nationale en échange, si je puis dire, d'une
perte de recttes.
A l'évidence, ce n'est pas la commission des comptes de la sécurité sociale
qui a décidé cette provision, ni même son secrétaire général, que nous ne
mettons pas en cause, mais, bien évidemment, le Gouvernement.
Madame le ministre, vous avez déclaré à l'Assemblée nationale : « Nous avions
inscrit par ailleurs dans les comptes de la sécurité sociale, provenant des
cotisations des employeurs et des salariés, une provision de 5,5 milliards de
francs pour le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales.
»
Il est donc apparu nécessaire à la commission de doter la commission des
comptes de la sécurité sociale d'un secrétariat général permanent, distinct de
la direction de la sécurité sociale. Ce secrétariat permanent aurait à sa tête
le secrétaire général de la commission des comptes, qui serait toujours nommé
par le ministre chargé de la sécurité sociale, donc par vous-même, madame
Aubry, mais sur proposition conjointe des présidents des deux assemblées.
On observera, d'ailleurs, que le Gouvernement souhaite faire jouer à la
commission des comptes un rôle plus important. Ainsi, l'article 11 du projet de
loi relatif à la réduction négociée du temps de travail, certes supprimé par le
Sénat, mais qui sera probablement adopté
in fine
, prévoyait, en son XVI,
une « consultation » de la commission des comptes de la sécurité sociale avant
de fixer les contributions des branches du régime général au financement des 35
heures. Quant à l'article 9 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000, il prévoit que la commission des comptes « constate » le
respect de la garantie de ressources accordée à la CNAF.
Ce pouvoir de la commission des comptes, si l'on veut qu'il soit crédible
auprès de l'opinion, doit donc s'appuyer sur une expertise autonome.
Une réforme plus globale de la commission pourrait être envisagée dans
l'avenir, par exemple en faisant coïncider le « périmètre » des régimes de base
obligatoires et des régimes complémentaires avec le « périmètre » des
administrations publiques de sécurité sociale.
Dans un premier temps, cet article additionnel vise à assurer une meilleure
information du Parlement et, au-delà, une plus grande transparence des comptes
sociaux.
Madame le ministre - disant cela, je ne vise personne - les comptes sociaux
sont aujourd'hui absolument inintelligibles pour la quasi-totalité de l'opinion
et pour une grande partie des parlementaires.
Vous parlez beaucoup de démocratie, notamment de démocratie sanitaire. Chiche
! Mais la démocratie sanitaire, cela signifie d'abord que le budget de la
sécurité sociale est compréhensible par les parlementaires, ce qui, je le
répète, n'est pas le cas aujourd'hui.
Il faut donc que nous ayons une expertise autonome : la commission des comptes
de la sécurité sociale, avec un secrétaire général indépendant, pourra en être
l'instrument.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Il n'y a pas, à ce jour,
d'exemple de nomination de ce type, c'est-à-dire d'un secrétaire général d'une
commission nommé en conseil des ministres sur proposition des présidents des
deux assemblées. La raison en est d'ailleurs simple : la séparation des
pouvoirs exécutif et législatif.
Je remarque aussi, monsieur le rapporteur, que la commission des comptes
existe en l'état depuis 1979. Vous avez fait une réforme constitutionnelle ; il
y a eu les ordonnances Juppé : à aucun moment, des modifications de cette
nature n'ont été proposées.
Il ne faut d'ailleurs pas se tromper sur la répartition des tâches entre
l'administration et le secrétaire général : à l'administration de confectionner
les comptes de la commission, car c'est effectivement elle qui a les données ;
au secrétaire de commenter les comptes qui lui sont transmis par
l'administration.
Aujourd'hui, le secrétaire général est un conseiller maître à la Cour des
comptes, ancien directeur de la prévision. Il en a toutes les compétences. J'ai
d'ailleurs relevé, monsieur le rapporteur, que, cette année, comme l'année
dernière, vous vous êtes félicité de l'excellence de son travail, lors de la
dernière réunion de la commission des comptes.
Il a formulé un certain nombre de remarques et de critiques, comme c'est son
rôle, car il est totalement indépendant dans sa façon de faire son rapport.
Qu'ensuite, des modifications soient apportées au projet que nous présentons à
la commission des comptes de la sécurité sociale, rien ne m'apparaît plus
naturel. En effet, à quoi servirait cette commission des comptes si nous
devions présenter un projet et, en tout état de cause, ne rien en modifier
avant de le soumettre au Parlement ?
Je suis surprise que vous vous étonniez que nous ayons pris en compte les
remarques des organisations patronales et syndicales, qui ne souhaitaient pas,
par exemple, que leurs contributions servent à financer une réduction des
charges sociales.
La démocratie, c'est de réunir les commissions, d'entendre leurs avis, de les
prendre en compte quand cela est possible et, ensuite, de présenter au
Parlement un projet de loi qui engage le Gouvernement et d'ouvrir le débat.
J'ajoute que, comme vous le savez - nous en avons déjà parlé - des efforts
très importants ont été faits par l'administration pour disposer dès l'année
prochaine d'une comptabilité en droits constatés et d'une comptabilité commune
à l'ensemble des caisses selon la formule ancienne, et ce dans un souci de plus
grande transparence. Comme vous, je crois que tout ce qui peut accroître la
transparence va dans le bon sens et c'est dans cette direction que travaille
mon administration.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Nous n'allons pas polémiquer. Je ne pensais pas que vous
alliez accéder immédiatement à ma demande. Mais pourriez-vous vous engager,
madame le ministre, à demander à M. le secrétaire général de la commission des
comptes de la sécurité sociale de présenter d'abord les comptes spontanés puis
les comptes modifiés après les propositions du Gouvernement ? Je suis pour un
exécutif fort, doté de certains pouvoirs.
Nous avons reproché à la commission des comptes d'avoir intégré immédiatement
les 5,5 milliards de francs de prélèvements, que le Gouvernement avait proposés
comme si cette mesure était acquise. La commission doit nous présenter les
comptes bruts, puis les comptes modifiés prenant en considération les projets
du Gouvernement. Il nous faut pouvoir distinguer les deux.
Une confusion s'est produite cette année, qui a donné lieu à certaines
polémiques. Je n'ai mis en cause ni les fonctionnaires ni le secrétaire général
de la commission des comptes de la sécurité sociale.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je ne comprends pas très bien
la question de M. Descours...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Ah !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Enfin ! j'ai quand même le
droit d'essayer de vous répondre !
Je ne comprends donc pas votre question car le secrétaire général de la
commission des comptes de la sécurité sociale présente les « comptes
tendanciels », c'est-à-dire avant que les mesures annoncées soit définitives,
mais en en tenant compte. Si la provision sur la baisse des charges sociales a
été intégrée dans le « compte tendanciel », c'est parce qu'elle figurait déjà
dans le projet de loi relatif à la réduction du temps de travail. D'ailleurs,
vous auriez reproché à la commission de ne pas l'avoir fait !
Cette décision avait été annoncée, mais il est vrai que nous avons changé
d'avis ensuite, pour les raisons que j'ai rappelées. Il était donc normal que
le secrétaire général de la commission des comptes intègre cet élément dans le
compte tendanciel.
Il est sain, quand des décisions sont annoncées en cours d'année, qu'elles
soient intégrées dans le compte tendanciel. Autrement, cela n'aurait aucun
sens.
Effectivement, cette année, nous avons été obligés de modifier un financement
annoncé. Nous avons été très clairs sur ce point. Vous nous avez d'ailleurs
vous-même dit combien il était important d'écouter les organisations patronales
et syndicales - je partage votre point de vue - et nous avons modifié le mode
de financement prévu.
J'insiste : le secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité
sociale fait très bien son travail, aujourd'hui comme hier, et ce dans la plus
grande transparence, en prenant en compte les dépenses envisagées, pour que la
commission des comptes de la sécurité sociale connaisse la réalité des
comptes.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je suis sûr, madame la ministre, que vous avez mieux compris
ma question que vous ne le prétendez !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Non !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 1er.
Par amendement n° 2, M. Descours, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi
rédigé :
« L'avis du Conseil d'Etat sur les projets de loi de financement de la
sécurité sociale est transmis au Parlement. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Cet article additionnel prévoit la transmission au Parlement
de l'avis du Conseil d'Etat sur les projets de loi de financement de la
sécurité sociale.
C'est avant tout un amendement d'appel.
Madame le ministre, vous avez été interrogée, à l'Assemblée nationale, sur le
sens de l'avis du Conseil d'Etat sur le présent projet de loi, le problème
majeur étant relatif aux « contributions » demandées aux organismes de sécurité
sociale dont le taux et l'assiette n'étaient pas définis par le projet de loi
initial.
Vous auriez pu choisir de ne pas répondre, ou vous auriez pu transmettre au
Parlement l'avis dans son intégralité. Mais vous avez simplement indiqué que
l'avis du Conseil d'Etat ne posait pas de problème particulier. Je vous cite :
« Je n'ai pas sous les yeux l'avis du Conseil d'Etat mais je vous en donnerai
lecture tout à l'heure... Je peux néanmoins vous rassurer dès à présent : le
Conseil d'Etat n'a évoqué aucun motif d'inconstitutionnalité, alors que le
problème que vous avez soulevé a bien évidemment été envisagé, comme tous les
autres. »
J'ai cherché cette « lecture » de l'avis du Conseil d'Etat dans la suite des
débats à l'Assemblée nationale : je ne l'ai pas trouvée.
Il est vrai que, devant la commission des affaires sociales, vous avez proposé
une lecture plus sincère de cet avis, en déclarant que le Conseil d'Etat «
n'avait émis aucune objection de principe à l'égard d'une contribution des
organismes de protection sociale au financement des 35 heures. Il avait
seulement observé qu'une telle contribution, dès lors qu'elle ne résultait pas
d'un accord avec les intéressés, était un impôt dont le Parlement devait fixer
l'assiette et le taux. »
Or cet avis complet du Conseil d'Etat était dans toutes les salles de
rédaction, et en particulier dans celle du
Monde,
qui l'a publié.
D'ailleurs, on trouve tout dans ce quotidien... l'avis du Conseil d'Etat, les
dossiers de justice...
J'ai donc lu cet avis, qui est très explicite : « En se bornant à prévoir que
le montant de cette contribution serait fixé puis réparti entre les divers
régimes sociaux assujettis en fonction du surcroît de recettes et des économies
de dépenses induites par la réduction du temps de travail, sans définir
autrement son assiette et son taux, le projet de loi ne satisfait pas, sur ce
point, à l'obligation constitutionnelle faite au législateur d'exercer la
totalité de sa compétence. »
Je suis prêt à retirer cet amendement, madame le ministre, après vous avoir
entendue. Mais je crois qu'il ne faut pas « faire parler » les avis du Conseil
d'Etat : ou vous les transmettez intégralement ou vous n'en parlez pas ! Mais
comme, désormais, tout se passera dans une transparence qui me semble,
d'ailleurs, un peu excessive, il faudra éviter que les avis du Conseil d'Etat
ne paraissent dans la presse et de ne nous en donner, à nous, que des
extraits.
J'attends donc votre réponse. Je répète que c'est un amendement un peu
provocateur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je fais partie de ceux, ou de
celles qui continuent à penser que la Constitution a un sens.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Tant mieux !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Nos institutions doivent
fonctionner ainsi qu'elle le prévoit.
J'ai dit quelle était la réalité des choses. A la question : « Le principe de
la contribution a-t-il été considéré comme inconstitutionnel par le Conseil
d'Etat ? », j'ai répondu par la négative car le Conseil d'Etat nous avait
simplement dit - vous avez lu mon intervention à l'Assemblée nationale - que si
nous souhaitions maintenir cette contribution, il faudrait - c'était quand même
la moindre des choses- en prévoir l'assiette et le taux. Nous-mêmes avions
d'ailleurs dit au Conseil d'Etat que nous étions en pleine concertation avec
les partenaires sociaux. Les choses étaient donc tout à fait claires.
Il n'y a pas de raison de changer une pratique qui est celle de nos
institutions. L'avis du Conseil d'Etat fait partie des éléments que le
Gouvernement prend en compte dans un texte tel qu'il le présente au Parlement.
Le Parlement est toujours libre de saisir ensuite le Conseil
constitutionnel.
Nos institutions fonctionnent bien en la matière et il n'y a pas de raison
d'en changer, quelle que soit la pression de tel ou tel. Monsieur le
rapporteur, dans une République, il est important de tenir face aux pressions
!
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je suis également respectueux de la Constitution et des
pouvoirs de l'exécutif. En conséquence, je retire l'amendement n° 2.
M. le président.
L'amendement n° 2 est retiré.
Par amendement n° 3, M. Descours, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Après l'article L. 114-1, il est inséré, dans le code de la sécurité
sociale, un article L. 114-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 114-2.
- Les régimes obligatoires de sécurité sociale
communiquent leurs comptes au secrétaire général de la commission des comptes
avant le 31 mars de l'année suivant l'exercice considéré.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article. »
« II. - Après l'article L. 114-1, il est inséré dans le code de la sécurité
sociale un article L. 114-3 ainsi rédigé :
«
Art. L. 114-3.
- Les organismes de sécurité sociale décrivent leurs
opérations à l'aide d'un plan comptable unique.
« Le suivi d'application de ce plan comptable est assuré par le secrétariat de
la commission des comptes de la sécurité sociale.
« Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »
« III. - Les dispositions du présent article s'appliquent pour la première
fois aux comptes de l'année 2001. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Cet amendement est peut-être plus consensuel que le
précédent. En tout cas, je ne pense pas le retirer, au contraire !
Il prévoit la transmission des comptes des organismes de sécurité sociale
avant le 31 mars de l'année suivant l'exercice et l'harmonisation des plans
comptables. Là aussi, il ne s'agit nullement d'un amendement polémique, mais
simplement d'améliorer la discussion des projets de loi de financement de la
sécurité sociale.
En effet, la discussion des lois de financement de la sécurité sociale, le
contrôle de leur application par le Parlement et par la Cour des comptes sont
pénalisés par les délais tardifs de remise des comptes.
Les progrès constatés au niveau des caisses du régime général et de l'ACOSS ne
doivent pas masquer les retards rencontrés pour certains régimes, dont le
régime agricole.
De plus, des « goulets d'étranglement » sont désormais nettement perceptibles
au niveau de la direction de la sécurité sociale, dont les cinquième et sixième
sous-directions sont sous-dotées en moyens, notamment en personnels.
Toutefois, je précise immédiatement - et je l'ai écrit dans le rapport - que
cela ne résulte pas du fait des personnels qui y travaillent actuellement.
D'ailleurs, vous l'avez dit, madame le ministre, tout comme votre prédécesseur
et Mme Veil voilà déjà plusieurs années.
Je fonde ce constat sur les auditions du groupe de travail constitué en
janvier 1999 par la commission sur les rapports de la Cour des comptes et sur
les fameux « avant-propos » rédigés par les trois secrétaires généraux de la
commission des comptes de la sécurité sociale qui se sont succédé depuis
1987.
Vous m'avez répondu l'autre jour, à la commission des comptes, que c'était la
première fois que je demandais le recrutement de nouveaux fonctionnaires et que
vous étiez surprise de ce changement d'attitude. Je vous rassure, madame le
ministre, je ne pense pas que l'on soit obligé de recruter de nouveaux
fonctionnaires : on pourrait procéder à des réaffectations, probablement au
sein même de la direction de la sécurité sociale - mais ce n'est pas son
travail - à l'intérieur du ministère de l'emploi et de la solidarité et, bien
sûr, du ministère très richement doté qu'est Bercy vers le ministère
relativement « pauvre » des affaires sociales.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
C'est une bonne idée !
(Sourires.)
M. Charles Descours,
rapporteur.
Sur ce point, nous vous soutiendrons, madame le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Présentez un amendement lors de
la discussion budgétaire !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Les lois de financement de la sécurité sociale imposent de
disposer des comptes à temps. Si les comptes étaient arrêtés beaucoup plus tôt
qu'à l'heure actuelle, le Parlement, les partenaires sociaux, la Cour des
comptes, la commission des comptes de la sécurité sociale, l'administration
elle-même, disposeraient de davantage de temps pour procéder à une analyse
approfondie de l'existant et pour élaborer, sur des bases solides, des
prévisions et des propositions.
La commission des affaires sociales propose, pour parvenir à un calendrier «
idéal » des lois de financement, d'adopter deux dispositions de principe :
premièrement, imposer aux régimes de sécurité sociale de communiquer leurs
comptes avant le 31 mars - toutes les entreprises le font - au secrétaire
général de la commission des comptes de la sécurité sociale ; deuxièmement,
retenir le principe d'un plan comptable unique pour les organismes de sécurité
sociale - depuis le temps qu'on nous en parle...
La commission ne souhaite pas se prononcer sur la nature de ce plan
comptable. Elle laisse à la mission interministérielle de réforme de la
comptabilité des organismes de sécurité sociale, la MIRCOSS, placée sous la
responsabilité de M. Alain Déniel, que nous avons auditionné, le soin de le
décider.
Les règles précises seraient fixées par décret. Je le sais bien, un plan
comptable unique ne résoudra pas tout. Il est nécessaire de prévoir une
instance de suivi, afin de traiter les problèmes d'application. Je souhaite que
ce soit le secrétariat permanent de la commission des comptes de la sécurité
sociale qui se charge de cette mission ce qui prouve bien, une nouvelle fois,
l'intérêt d'un tel organisme.
J'ai prévu un délai d'un an pour que la MIRCOSS achève ses travaux et que
l'administration ait le temps de se retourner. Ces dispositions ne seront donc
applicables qu'au 1er janvier 2001.
Je rappelle que voilà deux années consécutives que le secrétaire général de la
commission des comptes de la sécurité sociale ne reçoit les comptes que huit ou
dix jours avant la réunion de la commission des comptes de septembre. Cela
n'est pas tolérable. En disant cela, je le répète je ne critique ni une
administration ni le Gouvernement.
Je sais également que cela demandera des efforts aux régimes sociaux - mais il
importe que, à moyen terme - et pour éviter d'encourir les reproches de la Cour
des comptes - les comptes sociaux gagnent en fiabilité, en crédibilité et en
sincérité.
C'est donc dans un souci de transparence que je propose cet amendement, qui,
je le répète, n'est pas un amendement polémique.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement partage
évidemment la préoccupation de la commission visant à imposer un plan comptable
unique aux organismes de sécurité sociale et à accélérer la production et la
communication des comptes.
Des efforts ont déjà été faits, vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur.
La direction de la sécurité sociale s'est ainsi employée, en 1997 et 1998, à
donner des instructions en vue de réduire les délais de production des comptes
des organismes de sécurité sociale. Cet objectif a été rappelé à tous les
directeurs et agents comptables réunis lors de l'installation de la mission
interministérielle de réforme de la comptabilité des organismes de sécurité
sociale, en décembre 1998.
La Cour des comptes a d'ailleurs relevé, dans son dernier rapport au
Parlement, une réduction des délais de production des comptes des organismes de
sécurité sociale.
Nous poursuivrons ces efforts pour les comptes des années 1999 et 2000. Mais,
et c'est pourquoi votre amendement me paraît peu opportun en termes de
calendrier, la mission interministérielle de réforme de la comptabilité des
organismes de sécurité sociale n'a été instituée qu'en décembre 1998.
Cette mission est chargée de soumettre au Conseil national de la comptabilité
un plan comptable harmonisé des organismes de sécurité sociale et de proposer,
sur cette base, les conditions d'une accélération sensible des délais de
production des comptes annuels des différents organismes.
Elle a d'ores et déjà élaboré les nomenclatures de la comptabilité
générale.
Elle analyse actuellement les facteurs de retard dans la production des
comptes et il lui reste à réfléchir sur les modalités de centralisation des
comptabilités et à examiner les adaptations informatiques nécessaires.
Nous sommes donc tout à fait dans le même esprit : nous poursuivons
l'unification du plan comptable et nous essayons d'accélérer encore la
production des comptes afin de les fournir dans les plus brefs délais.
Je ne pense pas, pour autant, qu'il faille retenir votre amendement, qui fixe
des délais trop brefs et qui, en tout cas, propose une méthode trop autoritaire
par rapport à celle que nous avons retenue : la concertation avec l'ensemble
des caisses concernées pour mettre en place un système opératoire transparent
et rapide, comme nous le souhaitons les uns et les autres.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 1er.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
Articles 2 A, 2 B et 2 C
M. le président.
« Art. 2 A. _ I. _ L'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est ainsi
modifié :
« 1° Dans le 5° du II, après les mots : "loi", sont insérés les mots : ", ou,
en tout état de cause, est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de
l'article 80
duodecies
du code général des impôts" ;
« 2° Après le 5° du II, il est inséré un 5°
bis
ainsi rédigé :
«
5°
bis Les indemnités versées à l'occasion de la cessation de leurs
fonctions aux mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article
80
ter
du code général des impôts, ou, en cas de cessation forcée de ces
fonctions, la fraction de ces indemnités qui excède les montants définis au
deuxième alinéa du 1 de l'article 80
duodecies
du même code ; ».
« II. _ L'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Sont aussi prises en compte les indemnités versées à l'occasion de la
rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de
la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et
personnes visées à l'article 80
ter
du code général des impôts, à
hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le
revenu en application de l'article 80
duodecies
du même code. »
« III. _ Après le premier alinéa de l'article 1031 du code rural, il est
inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont prises en compte dans l'assiette des cotisations visées au premier
alinéa les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail
à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des
fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article
80
ter
du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces
indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de
l'article 80
duodecies
du même code. »
« IV. _ L'article 1062 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« Sont prises en compte dans l'assiette des cotisations visées au 2° les
indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à
l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des
fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article
80
ter
du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces
indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de
l'article 80
duodecies
du même code. »
« V. _ Après le premier alinéa de l'article 1154 du code rural, il est inséré
un alinéa ainsi rédigé :
« Sont prises en compte dans l'assiette des cotisations visées au premier
alinéa les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail
à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des
fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article
80
ter
du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces
indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de
l'article 80
duodecies
du même code. »
« VI. - La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 122-14-13 du
code du travail est supprimée. » -
(Adopté.)
« Art. 2 B. _ I. _ Le premier alinéa du III de l'article L. 136-6 du code de
la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le produit de cette contribution est versé à l'Agence centrale des
organismes de sécurité sociale sans déduction d'une retenue pour frais
d'assiette et de perception. »
« II. _ Les droits de consommation sur les tabacs prévus à l'article 575 A du
code général des impôts sont majorés à due concurrence. » -
(Adopté.)
« Art. 2 C. _ A la fin du troisième alinéa du III de l'article L. 136-6 du
code de la sécurité sociale, la somme : "160 F" est remplacée par la somme :
"400 F". » -
(Adopté.)
Article additionnels avant l'article 2
M. le président.
Par amendement n° 110, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 2, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le cinquième alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité
sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les frais de recouvrement, calculés à proportion des cotisation dues, sont à
la charge des employeurs. »
« II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 241-3 du même code, il est
inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Des frais de recouvrement, calculés à proportion des cotisations dues, sont
mis à la charge des employeurs. »
« III. -
a)
Dans le premier alinéa de l'article L. 241-5 du même code,
après les mots : "cotisations dues", sont insérés les mots : "et les frais de
recouvrement".
«
b)
En conséquence, au début de la seconde phrase du même alinéa, les
mots : "Elles sont assises" sont remplacés par les mots : "Ils sont assis".
»
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Cet amendement s'intègre dans la conception globale que nous proposons
concernant les cotisations sociales des entreprises. Il porte très précisément
sur le coût de recouvrement des cotisations dues par les entreprises.
Dans les faits, la mise en oeuvre des missions des unions de recouvrement a un
coût dont on est bien obligé de tenir compte.
Le fait de contrôler les déclarations des entreprises assujetties, de mettre
les assujettis en situation de payer effectivement leur dû constituent autant
d'actes générateurs de charges de gestion pour les unions de recouvrement.
Nous proposons donc, avec cet amendement, de procéder à la mise en place d'un
système qui permette à la fois, comme cela existe déjà pour la plupart des
impôts directs ou pour les contributions sociales que perçoit, pour le compte
des organismes sociaux, le Trésor public, de faire face, même symboliquement,
aux charges de gestion des organismes de recouvrement et de pallier les
insuffisances temporaires de règlement des cotisations dues par les entreprises
assujetties.
Cet amendement a donc pour objectif d'assurer une plus grande permanence et
une meilleure lisibilité des recettes de la protection sociale et d'obliger les
entreprises à assumer leurs responsabilités en matière de financement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commision ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Cet amendement vise, c'est clair, à mettre à la charge des
entreprises les frais de recouvrement des cotisations sociales. Il s'agit, là
encore, de leur imposer une charge nouvelle. Pourtant, le taux de recouvrement
de ces cotisations est excellent : il est bien meilleur que celui des impôts
!
Le taux des restes à recouvrer - les cotisations qui ne rentrent pas
spontanément au cours d'une année - était de 1,24 % en 1998, contre 1,38 % en
1997, et il n'est plus aujourd'hui que de 0,72 %.
L'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, fait un
excellent travail, et je crois que mettre à la charge des employeurs les frais
de recouvrement reviendrait à alourdir les cotisations supportées par les
entreprises.
Je ne vois pas très bien quel intérêt celles-ci auraient à s'acquitter en
temps et en heure de leurs obligations sociales puisqu'elles devraient de toute
façon régler les frais de recouvrement. J'ai donc peur, madame Borvo, que votre
amendement n'aille à l'encontre de l'objectif visé.
Je voudrais répéter ici, en tant que président du conseil de surveillance de
l'ACOSS, que les URSSAF effectuent un travail difficile, compte tenu notamment
de la complexité croissante, des différents dispositifs d'exonération, et que,
lors de chaque réunion du conseil de surveillance, on me demande de plaider
pour la simplification des processus de recouvrement. Mais cela est un autre
débat.
En tout état de cause, la commission a émis un avis défavorable sur cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je voudrais d'abord dire qu'en
vertu des principes qui régissent le recouvrement des cotisations de sécurité
sociale les employeurs sont bien sûr responsables du versement à la bonne date
des cotisations dont ils sont redevables, mais que, lorsqu'ils ne s'acquittent
pas de leurs obligations, ils doivent supporter l'ensemble des frais de
procédure exposés par l'URSSAF pour obtenir le paiement de sa créance.
En revanche, lorque l'on recourt non pas à la voie contentieuse, mais
simplement à une demande administrative de recouvrement, ce qui fait
effectivement partie du travail des URSSAF, l'adoption de l'amendement
soulèverait une difficulté, car soit on fait payer les seules entreprises qui
sont en retard dans le versement de leurs cotisations, ce qui rend plus
complexe encore le travail des URSSAF, soit on fait payer tout le monde, ce qui
risque d'entraîner un effet pervers, que M. le rapporteur vient de
souligner.
Je voudrais par ailleurs dire, comme les chiffres qui viennent d'être rappelés
en témoignent, que des efforts importants ont été accomplis et que le
recouvrement des cotisations sociales est bien meilleur que celui des impôts
d'Etat.
Je ne suis pas sûre que cette proposition permette d'améliorer encore le
rendement du recouvrement. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à
l'amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 110, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. Alain Joyandet.
La majorité plurielle est divisée !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
La richesse naît de la
diversité !
Mme Nicole Borvo.
La diversité fait parfois avancer les choses... Mais pas toujours !
M. Dominique Braye.
Pas souvent pour vous !
M. Hilaire Flandre.
Même motif, même punition !
M. le président.
Par amendement n° 111, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 2, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du
titre IV du Livre II du code de la sécurité sociale, il est inséré un article
additionnel ainsi rédigé :
«
Art. L...
- Le taux de la cotisation est modulé pour chaque
entreprise selon la variation des rémunérations telles que définies à l'article
L. 242-1 par rapport à la valeur ajoutée globale. Le comité d'entreprise ou, à
défaut, les délégués du personnel, informés de ce rapport, pourront en
contrôler l'application. »
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
La question essentielle du financement pérenne de notre système de sécurité
sociale est directement posée par ce projet de loi.
Ce projet, tel qu'il est, en liaison avec la réduction du temps de travail,
prévoit des exonérations de cotisations fondées sur l'idée que le coût du
travail est excessif pour des entreprises à fort coefficient de main-d'oeuvre,
il met donc en place un abaissement du coût du travail.
Comme vous le savez, nous pensons que cette conception a peu d'effets sur
l'emploi et qu'elle tire les salaires vers le bas.
Nous pensons en outre que la progression de la productivité par salarié a été
telle ces dernières années que les entreprises ont dégagé les moyens d'assumer
la réduction du temps de travail.
Un financement pérenne de la protection sociale, implique donc, à nos yeux,
qu'une démarche nouvelle imprègne la conception même des ressources mises à
disposition et prenne notamment en compte les conditions générales de
développement de l'activité.
Nous estimons ainsi qu'il est nécessaire de procéder à une individualisation
de la contribution de chaque entreprise au financement de la protection
sociale, individualisation fondée sur la manière dont la valeur ajoutée créée
dans le cadre de l'activité est utilisée, sur les choix, les changements
opérés.
M. Guy Fischer.
Voilà !
M. Alain Vasselle.
Ça, c'est de la simplification !
Mme Nicole Borvo.
Toute démarche de substitution du capital au travail serait pénalisée,
puisqu'une moindre progression de la part des salaires dans l'utilisation de la
valeur ajoutée serait pénalisée tandis que toute démarche de progression de la
masse salariale, soit par de nouveaux emplois, soit par des revalorisations de
salaires, serait validée par un allégement de la contribution au financement de
la protection sociale.
Plutôt que de faire de la valeur ajoutée un élément de définition de
l'assiette des cotisations sociales, ce qui pourrait avoir des effets pervers,
notamment en facilitant les opérations d'externalisation des coûts, nous en
faisons un élément de variation à partir de l'assiette actuelle que ce rapport
tend en fait à dynamiser.
Il convient également de préciser que cette définition de la valeur ajoutée
est sensiblement différente de celle qui est prise en compte pour la TVA, qui
est uniquement fondée sur l'activité d'exploitation et qui néglige les
utilisations purement financières, élément que nous prendrons en compte, pour
notre part.
Cet amendement vise donc clairement à créer les conditions d'un financement,
renouvelé dans son approche et durable dans sa définition, de notre protection
sociale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Depuis hier matin, Mme Aubry nous présente la création du
fonds prévu à l'article 2 comme une réforme des cotisations patronales. Non
seulement nous sommes contre le financement de ce fonds, mais nous considérons
en outre qu'il ne s'agit pas d'une véritable réforme des cotisations
patronales. De plus, comme nous demandons la suppression de l'article 2, nous
n'allons pas engager un débat sur ce thème !
Le rapport Chadelat demandé par le gouvernement Juppé, d'abord, le rapport
Malinvaud demandé par le gouvernement Jospin, ensuite, ont engagé la réflexion
sur la réforme des cotisations patronales. Je considère en revanche que ce que
vous nous avez présenté comme étant une réforme des cotisations patronales n'en
est pas une, madame le ministre.
Avant de vous donner l'avis de la commission, je souhaiterais donc entendre
l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le dispositif proposé par le
groupe communiste vise à moduler les cotisations patronales en fonction du
rapport entre la masse salariale et la valeur ajoutée.
Le rapport est difficile à établir et nous ne le connaissons que douze à
dix-huit mois après la fin de la période concernée. C'est la raison pour
laquelle il me semble extrêmement difficile de nous fonder sur un tel critère.
Je relève cependant que, nous aussi, nous l'avons étudié car nous considérions
qu'il s'agissait d'un moyen de bien prendre en compte la substitution du
capital au travail et les efforts réalisés par les entreprises de
main-d'oeuvre.
La deuxième possibilité - M. le rapporteur l'a rappelée - était évoquée dans
le rapport Chadelat, sur lequel nous avons demandé un avis à M. Malinvaud ;
elle consistait à prendre en compte la valeur ajoutée comme assiette d'une
partie des cotisations patronales. Pour ma part, j'y étais totalement
favorable.
Je voudrais toutefois rappeler à M. le rapporteur, si je puis me le permettre,
que la valeur ajoutée, c'est 55 % de salaire et 45 % autre chose. Dans ces 45
%, il y a les impôts - que nous n'allons pas taxer une seconde fois ! - il y a
les amortissements - qu'il n'est pas question de taxer une seconde fois - et il
y a bénéfices et les produits financiers. C'est précisément cette dernière
partie de la valeur ajoutée que nous retenons avec cette taxe, qui rapportera
au total, dans les quatre ans, 12,5 milliards de francs, pour élargir
l'assiette des cotisations patronales.
Je me réjouis donc de vous entendre dire, monsieur le rapporteur, qu'il ne
s'agit pas d'une vraie réforme des cotisations patronales. Dois-je entendre par
là que vous souhaitez que nous taxions davantage les profits, et ce dès
maintenant ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Voyons !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Si c'est le cas, déposez un
amendement et, si c'est la demande à la fois du groupe communiste républicain
et citoyen et de vous-même, le Gouvernement pourrait peut-être répondre
favorablement à cette demande dès cette année !
M. Guy Fischer.
Chiche !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
En ce qui me concerne, je
considère que le Gouvernement fait un premier pas, que c'est la première fois
qu'une réforme des cotisations patronales permet de taxer, premièrement, les
entreprises capitalistiques qui ont en général des activités polluantes et,
deuxièmement, les profits et les produits financiers.
Mme Borvo estime que c'est insuffisant. On peut le penser effectivement. En
tout cas, c'est la première fois que les cotisations patronales ne sont pas
assises uniquement sur les salaires.
C'est peut-être insuffisant, monsieur le rapporteur. Alors, allons plus loin !
Mais déposez un amendement pour que nous allions tous ensemble plus loin.
Je suis défavorable au critère reposant sur le rapport entre le salaire et la
valeur ajoutée, même si je comprends le raisonnement de Mme Borvo et si j'en
partage les objectifs.
Nous allons essayer d'atteindre le même objectif d'une autre façon. Peut-être
est-ce insuffisant. Disons que c'est un premier pas.
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Madame Aubry, s'il suffit que le groupe communiste
républicain et citoyen et la majorité sénatoriale soient d'accord pour que le
Gouvernement se rallie à leur point de vue, nous allons pouvoir en avoir une
illustration tout de suite, puisque le groupe communiste a déposé, à l'article
2, un amendement tendant...
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je n'ai pas dit ça ! Je suis
trop prudente !
(Sourires).
M. Charles Descours,
rapporteur.
J'avais donc mal compris, sans doute ! Cela aurait été trop
beau !
Cela étant, puisque vous êtes défavorable à cet amendement, la commission y
est également défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 111, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 112 n'a donc plus d'objet.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - Il e st inséré, au titre III du livre Ier du code de la
sécurité sociale, un chapitre Ier
quater
ainsi rédigé :
« Chapitre Ier quater
« Fonds de financement de la réforme
des cotisations patronales de sécurité sociale
«
Art. L. 131-8
. - Il est créé un fonds dont la mission est de
compenser le coût, pour la sécurité sociale, des exonérations de cotisations
patronales aux régimes de base de sécurité sociale mentionnées à l'article L.
131-8-1 et d'améliorer le financement de la sécurité sociale par la réforme des
cotisations patronales.
« Ce fonds, dénommé "Fonds de financement de la réforme des cotisations
patronales de sécurité sociale", est un établissement public national à
caractère administratif. Un décret en Conseil d'Etat fixe la composition du
conseil d'administration, constitué de représentants de l'Etat, ainsi que la
composition du conseil de surveillance, comprenant notamment des membres du
Parlement et des représentants des organisations syndicales de salariés et des
organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national. Ce décret
en Conseil d'Etat fixe également les conditions de fonctionnement et de gestion
du fonds.
«
Art. L. 131-8-1
. - Les dépenses du fonds sont constituées :
« 1° Par le versement, aux régimes de sécurité sociale concernés, des montants
correspondant :
«
a)
A la prise en charge de l'allégement visé aux articles L. 241-13-1
et L. 711-13-1 du présent code et aux articles 1031, 1062-1 et 1157-1 du code
rural au titre des dispositions correspondantes ;
«
b)
A la prise en charge de l'aide visée à l'article 3 de la loi n°
98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du
temps de travail ;
«
c)
A la prise en charge de la réduction visée aux articles L. 241-13
et L. 711-13 du présent code et aux articles 1031, 1062-1 et 1157-1 du code
rural au titre des dispositions correspondantes ainsi qu'au IV de l'article 1er
de la loi n° 95-882 du 4 août 1995 relative à des mesures d'urgence pour
l'emploi et la sécurité sociale.
« 2° Par les frais de gestion administrative du fonds.
« Les versements mentionnés aux
a, b
et
c
du 1° ci-dessus se
substituent à la compensation par le budget de l'Etat prévue à l'article L.
131-7 sous réserve que cette compensation soit intégrale. Dans le cas
contraire, les dispositions prévues à l'article L. 131-7 s'appliquent.
«
Art. L. 131-8-2
. - Les recettes du fonds sont constituées par :
« 1° Une fraction du produit du droit de consommation prévu à l'article 575 du
code général des impôts, dans les conditions fixées par la loi de finances pour
2000 ;
« 2° La contribution sociale sur les bénéfices des sociétés visée aux articles
235
ter
ZC et 1668 D du code général des impôts ;
« 3° La taxe générale sur les activités polluantes prévue à l'article 266
sexies
du code des douanes ;
« 4° Une fraction fixée à 47 % du produit du droit de consommation prévu à
l'article 403 du code général des impôts, à l'exception du produit de ce droit
de consommation perçu dans les départements de la Corse et du prélèvement
effectué au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles selon
les dispositions de l'article 1615
bis
du même code ;
« 5° La contribution visée aux articles L. 212-5 du code du travail et 992-2
du code rural ;
« 6° Les produits non consommés de l'exercice précédent ;
« 7° Une contribution de l'Etat, dans les conditions fixées par la loi de
finances.
« Les recettes et les dépenses du fonds doivent être équilibrées, dans des
conditions prévues par les lois de financement de la sécurité sociale. Le solde
annuel des dépenses et des recettes du fonds doit être nul.
«
Art. L. 131-8-3 et L. 131-8-4
. -
Supprimés
.
«
Art. L. 131-8-5
. - Les frais d'assiette et de recouvrement des
impôts, droits, taxes et contributions mentionnés à l'article L. 131-8-2 sont à
la charge du fonds, en proportion du produit qui lui est affecté ; leur montant
est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité
sociale.
«
Art. L. 131-8-6
. - Les relations financières entre le fonds et les
organismes de protection sociale, d'une part, le fonds et l'Etat, d'autre part,
font l'objet de conventions destinées notamment à garantir la neutralité en
trésorerie des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. »
« I
bis.
- Dans le 2° de l'article L. 135-3 du code de la sécurité
sociale, le taux : "55 %" est remplacé par le taux : "8 %".
« II. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier
2000. Les dispositions du 4° de l'article L. 131-8-2 du code de la sécurité
sociale et du I
bis
du présent article sont applicables aux versements
effectués au profit respectivement du fonds institué à l'article L. 131-8 du
code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l'article L. 135-1 du même
code à compter du 1er janvier 2000.
« A titre transitoire et jusqu'à la date de création du fonds institué à
l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, les produits mentionnés à
l'article L. 131-8-2, à l'exception de ceux mentionnés au 5°, sont versés à
l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, et les produits
mentionnés au 5° de l'article L. 131-8-2 sont centralisés par l'Agence centrale
des organismes de sécurité sociale. L'agence centrale suit lesdits produits
dans des comptes spécifiques ouverts à cet effet. »
Sur l'article, la parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, ce que je vais dire maintenant vaudra pour les articles 2, 3 et
4.
L'amendement de suppression que nous proposons à l'article 2 est cohérent avec
la position que vient d'adopter le Sénat sur le projet de loi dit de réduction
négociée du temps de travail, que nous appelons projet de loi sur les 35
heures. Je rappelle que nous avons dit oui à la réduction négociée, non à la
réduction imposée.
Nous pourrions rappeler de manière ironique, si nous étions méchants, les
déboires rencontrés par le Gouvernement pour financer ce fonds, la théorie
contestable du « recyclage », l'effrayante « logique » des « retours pour les
finances publiques ». Je pourrais ajouter que le financement de ce fonds n'est
pas bouclé, qu'il est porteur de dérapages futurs pour nos finances publiques,
qu'il met en cause, de manière préoccupante, l'équilibre futur du fonds de
solidarité vieillesse - Alain Vasselle l'a bien montré dans son intervention à
la tribune hier soir.
Je vais m'attacher à expliquer que la philosophie de ce fonds est
dangereuse.
Contrairement au Gouvernement, nous ne sommes pas contraints de compenser la
perte de compétitivité des entreprises par des allégements supplémentaires de
charges sociales, et c'est là ma réponse aux propos que vous avez tenus voilà
quelques minutes, madame la ministre.
Contrairement au Gouvernement, nous estimons que la marge de manoeuvre des
finances publiques ne doit pas être monopolisée par le financement des 35
heures. Il est vrai que ce n'est pas nous qui avions fait cette promesse
électorale...
Contrairement au Gouvernement, nous ne sommes pas obligés de trouver n'importe
quelle recette, en créant trois prélèvements supplémentaires - je ne sais pas
s'il y en a douze, mais sur les trois prélèvements supplémentaires, j'espère
que vous serez d'accord, tout de même - affectés à la sécurité sociale : la
TGAP, la CSB et la taxe sur les heures supplémentaires. Leur coût serait de 15
milliards de francs en 2000 et de plus de 30 milliards de francs « à terme ».
Ces prélèvements supplémentaires sur les entreprises, parfois sur les petites
entreprises, quand il s'agit de la TGAP - voire sur les salariés - sont
inacceptables.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Vous passez sous silence les allégements de charges !
M. Charles Descours,
rapporteur.
La commission estime que le Gouvernement commet une grave
erreur - je l'ai dit dans mon intervention initiale - en opérant une confusion
entre politique de l'emploi et financement de la sécurité sociale. Les crédits
pour la politique de l'emploi doivent être inscrits en loi de finances : nous
ne pouvons pas approuver cette débudgétisation.
Je sais que le fonds de solidarité vieillesse, qui a été créé en 1993, était
une première débudgétisation - je vous donne quelques arguments au cas où vous
les auriez oubliés ! Mais je vous fais confiance à cet égard.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je les ai moi-même rappelés
tout à l'heure !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Mais l'objet même du FSV, à savoir prendre en charge le
financement des avantages vieillesse à caractère non contributif, était bien un
objet de protection sociale. Aujourd'hui, le fonds de financement de la réforme
des cotisations patronales, lui, tend à diminuer le coût du travail en France :
son objet est celui d'une politique d'emploi.
Par ailleurs, si l'affectation des droits sur les tabacs à l'assurance maladie
peut se justifier aisément - vous l'avez d'ailleurs rappelé à la tribune -
cette affectation à un fonds d'allégement de charges ne correspond à aucune
logique.
Tout à l'heure, vous avez essayé de nous expliquer le contraire. Je suis
d'accord quand cela va à l'assurance maladie, mais je ne suis pas du tout
d'accord quand cela va à un fonds d'allègement des charges des entreprises ou
des employeurs.
Je tiens à signaler, mes chers collègues, qu'il n'existe pas de «
sous-affectation », dans ce fonds, d'une recette à une dépense. On ne peut pas
dire, par exemple, que la TGAP et la CSB « financent l'extension de la
ristourne Juppé ». Tout au plus peut-on constater, par exemple, que les
recettes de la TGAP et de la CSG que le Gouvernement attend pour 2000
correspondent au coût de l'extension de la ristourne Juppé tel qu'il
l'évalue.
Je tiens à rappeler qu'il n'y a pas de « réforme des cotisations patronales ».
Changer l'assiette des cotisations patronales, c'était introduire un autre mode
de calcul et vous y aviez pensé vous-même, en septembre 1998. Vous nous l'aviez
d'ailleurs dit à cette époque. Là, vous créez des prélèvements supplémentaires
affectés à la sécurité sociale ; ce n'est pas du tout pareil. Certes, on
imagine qu'il y aura des transferts entre entreprises « capitalistiques » et
entreprises « de main-d'oeuvre ». J'estime que nous ne disposons d'aucune
évaluation sur les conséquences du « basculement » que vous nous proposez.
Comme toute recette est affectée à une dépense dans ce fonds, votre réforme
des cotisations patronales s'appuie avant tout sur les tabacs - 40 milliards de
francs - et sur les alcools - 5,6 milliards de francs aujourd'hui et 11
milliards ou 12 milliards de francs demain.
Au-delà des choix politiques qui nous séparent légitimement, je crois que
l'article 2 est dangereux pour la sécurité sociale. Le concept « étendu » et «
vague » qu'en a le Gouvernement ne doit pas être accepté.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des affaires sociales
propose la suppression de l'article 2.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Les discussions que nous avons chaque année dans le cadre de ce projet de loi
de financement de la sécurité sociale sont, pour nous, l'occasion d'élaborer
des nouvelles stratégies afin d'assurer la pérennité et l'évolution de notre
système de protection sociale.
M. Dominique Braye.
Vive les 35 heures !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Faire face à ces défis requiert des élus que nous sommes de répondre à la
question capitale des ressources que notre collectivité est en mesure de
mobiliser afin d'assurer le système de protection sociale.
Progressivement, nous avons été amenés à constater l'inadéquation de
l'assiette traditionnelle des prélèvements sociaux que sont les salaires.
A l'analyse de la montée du chômage, il est apparu que le poids des
cotisations pouvait être un frein à l'embauche, singulièrement pour les bas et
moyens salaires.
En 1991, c'est le gouvernement de Michel Rocard qui lançait les bases d'une
réforme du financement de la protection sociale, en intervenant sur les
contributions des salariés à travers la CSG.
Ce basculement progressif et massif des cotisations maladies vers la CSG s'est
traduit par un gain du pouvoir d'achat des salariés de 1 %, et les recettes
pour la sécurité sociale ont été renforcées.
Aujourd'hui, c'est le gouvernement auquel vous appartenez et que nous
soutenons, madame la ministre, qui poursuit cette entreprise en direction des
cotisations patronales. L'article 2 crée à cet effet le nouveau fonds qui
permettra de financer les dispositifs d'allégements en organisant la
diversification des ressources permettant de soutenir cette politique.
Les parlementaires de l'opposition font feu de tout bois pour critiquer son
positionnement ainsi que ses différentes sources d'alimentation. On vient
d'entendre les propos de M. Descours. Certains, comme M. d'Aubert, prétendent
qu'il fallait avant tout commencer par diminuer les dépenses d'intervention en
matière de politique de l'emploi, en se gardant bien d'indiquer les actions qui
feraient les frais de ses coupes claires.
M. le rapporteur évoque, quant à lui, dans son rapport « une synthèse
monstrueuse de deux promesses électorales », la réforme des cotisations et la
réduction du temps de travail.
De toute évidence, les parlementaires de l'opposition se lancent dans un jeu
de surenchère verbale. Et je déplore la connotation péjorative qu'ils
attribuent au respect d'engagements pris devant les Français.
Nous nous sommes en effet engagés devant eux à réformer le système des
cotisations sociales et à promouvoir la réduction du temps de travail pour
favoriser la création d'emplois et améliorer les conditions de vie de nos
concitoyens.
Et nous revendiquons pleinement la corrélation entre l'un et l'autre. En
effet, l'extension importante de l'actuelle formule de la ristourne dégressive
va concerner près de 70 % des salariés et va permettre la prise en charge de
près de 86 % des cotisations pour un salaire égal au SMIC. Nous avons donc
souhaité lier son application à la mise en oeuvre de la réduction du temps de
travail afin d'en optimiser son impact sur la création d'emplois, qui demeure
la priorité du Gouvernement.
Le projet de loi procède donc à un allégement des prélèvements effectués sur
le facteur « travail ». C'est la ligne directrice des réformes lancées par la
gauche, que ce soit en matière de CSG ou de taxe professionnelle.
Il organise en conséquence une diversification des ressources qui viennent
abonder le fonds et qui doivent permettre de financer les allégements de
cotisations assises sur les salaires.
Il s'agit notamment de la contribution sociale sur les bénéfices, qui
concernera les entreprises enregistrant des bénéfices supérieurs à 50 millions
de francs. Compte tenu de l'abattement de 5 millions, on estime à 4 000 le
nombre des sociétés concernées l'année prochaine et le rendement est évalué à
4,3 milliards. La CSB participe donc au rééquilibrage entre entreprises de
main-d'oeuvre et entreprises capitalistiques dans le financement de la
protection sociale. Monsieur le rapporteur, vous estimez que cette mesure est «
révolutionnaire ». Mais ne croyez-vous pas que, face à des enjeux aussi
essentiels que la protection sociale et l'emploi, nous nous devons de proposer
des solutions novatrices et efficaces, même si elles doivent être
révolutionnaires ?
Le fonds sera également alimenté par la TGAP, dont le champ d'application est
élargi notamment aux lessives, à certains produits phytosanitaires utilisés
dans l'agriculture, dont on connaît l'impact préoccupant sur la pollution des
eaux et les effets induits en termes de coût pour leur traitement.
Certains contestent l'affectation de cette taxe ; c'est ignorer le rapport
direct entre ces pollutions et la santé de la population. Son rendement est
estimé à 3,2 milliards de francs.
Ces deux nouvelles ressources vont financer l'extension de la ristourne
dégressive jusqu'à 1,8 du SMIC dans le cadre du passage négocié aux trente-cinq
heures. Cet élargissement permet de combattre l'effet « trappe à bas salaires »
souligné par M. Malinvaud dans le précédent dispositif.
La fraction des droits sur le tabac continuera de financer la ristourne Juppé,
à hauteur de 39,5 milliards de francs, ce qui représente plus de la moitié des
dépenses du fonds pour 2000.
Enfin, l'aide structurelle de 4 000 francs sera assurée grâce à une
contribution de l'Etat de 4,3 milliards de francs, ainsi que par la taxation de
10 % des heures supplémentaires dans les entreprises dont les négociations sur
la réduction du temps de travail n'auront pas encore abouti.
Par ailleurs, le Gouvernement, fort du succès de l'expérience d'activation des
dépenses de l'UNEDIC, dans le cadre notamment de l'ARPE, avait sollicité les
organismes sociaux afin qu'ils participent au financement de cette aide. Cette
implication était parfaitement concevable dans la mesure où la réduction du
temps de travail crée des emplois et contribue donc à augmenter les recettes et
à diminuer les dépenses de ces organismes.
Certains syndicats s'étaient d'ailleurs exprimés voici quelques mois en faveur
d'une participation de l'UNEDIC à ce mouvement.
Le Gouvernement a pris acte des tensions qui existent actuellement au niveau
du paritarisme et a donc proposé de recourir à une fraction de la taxe sur les
alcools - à hauteur de 5,6 milliards de francs - qui jusqu'à maintenant
alimentait le FSV.
Ce fonds devrait donc fonctionner l'année prochaine avec des dotations à
hauteur de 65 milliards de francs.
Madame la ministre, incontestablement, la création de ce fonds, qui articule
étroitement lutte contre le chômage et financement de la protection sociale,
est une démarche audacieuse, innovante et efficace que les socialistes
soutiendront.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Dominique Braye.
L'alcool au secours du travail. Pour être innovant, on peut dire que c'est
innovant !
M. le président.
Mes chers collègues, je vous rappelle que les interventions sur un article ne
doivent pas dépasser cinq minutes.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Je m'interroge, madame le ministre, sur cette procédure de débudgétisation.
Car ce que nous mettons en cause, ce n'est pas l'allégement des charges
sociales sur les bas salaires, c'est la « machinerie administrative » -
j'essaie de trouver un nouveau mot - qui le finance.
Est-ce que cette procédure de débudgétisation est utile ? Est-elle sincère ?
Est-elle constitutionnelle ?
Première question : est-elle utile ?
Je pense qu'elle l'a été, qu'elle pouvait l'être lorsque vous envisagiez le
financement des 35 heures par la participation de l'UNEDIC et la participation
des organismes sociaux, car il fallait bien, à ce moment-là, un fonds destiné à
« ramasser », si vous me permettez cette expression, lesdites
participations.
Mais que reste-t-il maintenant, suite à la suppression de ces participations ?
Il ne reste que les financements d'Etat. Ce fonds est alimenté par cinq impôts
d'Etat pour 60 milliards de francs et par une subvention d'équilibre à guichet
ouvert de l'Etat, qu'il faudra ajuster en loi de finances rectificative à la
fin de l'année, puisqu'il est précisé à l'article 2 que les recettes doivent
équilibrer les dépenses. Aussi cette procédure a-t-elle, me semble-t-il, perdu
toute son utilité : nous sommes confrontés à un simple démembrement du budget
de l'Etat !
Deuxième question : cette procédure de financement est-elle sincère ?
Même si le rapport économique et financier de la loi de finances parle, en
l'espèce, d'une clarification des comptes, il ne s'agit - et c'est bien
pourquoi Bercy a accepté la formule - que d'une entreprise de camouflage de
l'augmentation globale des impôts pour cette année et les années à venir.
Pour cette année, madame le ministre, ce sont bien 12,5 milliards de francs
d'impôts supplémentaires qui échappent en effet à la loi de finances. J'espère
ne pas me tromper : la TGAP pour 1,2 milliard de francs, les 4,3 milliards de
francs de taxe additionnelle à l'impôt sur les sociétés et les 7 milliards de
francs pris sur les heures supplémentaires.
Dans huit jours, il sera facile d'annoncer brillamment ici que les impôts
n'augmentent en 2000 que de 0,9 % dans le budget de l'Etat... en oubliant que
des augmentations d'impôts d'un montant à peu près égal auront été mises au
vote huit jours auparavant.
Dans quelques années, ce sera combien ? Personne ne le sait exactement. On
parle de 40 milliards de francs.
Troisième question, sur laquelle je veux insister : cette réforme est-elle
constitutionnelle ?
Madame le ministre, vous avez à plusieurs reprises évoqué l'exemple du FSV.
Sur le plan de la constitutionnalité, c'est un excellent exemple car,
justement, on a une décision du Conseil constitutionnel concernant le FSV.
Le 29 décembre 1994, le Conseil constitutionnel, dans une décision de principe
concernant le FSV, rende d'ailleurs à la demande de nos collègues du groupe
socialiste, a considéré que les dépenses de l'Etat qui présentaient un
caractère permanent et étaient de nature législative ne pouvaient être
débudgétisées - il s'agissait dans l'espèce de retraites de fonctionnaires - au
regard des règles fondamentales de l'unité et de l'universalité budgétaires.
Or quelles sont les dépenses de ce fonds ?
Ce sont des dépenses d'interventions publiques du titre IV qui y figurent au
titre de la ristourne dégressive. Elles y sont inscrites, d'ailleurs, en vertu
d'un article du code de la sécurité sociale qui, me semble-t-il, n'a pas été
abrogé - l'article L. 131-7 - qui dispose que ce type de dépenses doit figurer
dans le budget de l'Etat. Comme cela a été dit excellement par M. le
rapporteur, ces dépenses correspondent à des allègements de charges sur les bas
salaires de divers types pris dans le cadre d'une politique de l'emploi.
On prétend qu'il s'agit d'un changement d'assiette des cotisations patronales.
Je veux bien. Mais si vraiment la nouvelle assiette repose sur un mélange de
tabac, de pollution, d'heures suppélementaires...
M. Dominique Braye.
d'alcool !
M. Yves Fréville.
... d'alcool et de bénéfices de grandes sociétés. Je ne vois pas très bien à
quelle rationalité économique cela peut obéir. Si vous nous aviez présenté un
véritable changement d'assiette, nous aurions pu en discuter, mais nous
refusons ce pot-pourri, ce pêle-mêle.
Les allégements de charges en cause doivent continuer à figurer dans le budget
de l'Etat, comme d'ailleurs continuent à y figurer, très curieusement, ceux qui
concernent la loi Robien.
Je pourrais tenir des propos similaires sur les recettes. Je donnerai un seul
exemple.
En dernière minute, les droits sur les alcools ont été transférés du FSV vers
ce nouveau fonds. Mais, mes chers collègues, c'est une loi de finances qui les
avaient affectés au FSV, et vous savez très bien que, en vertu de la règle du
parallélisme des formes et des dispositions de l'article 18 de l'ordonnance
portant loi organique sur les lois de finances, ce n'est qu'une loi de finances
qui pourra réaffecter, le cas échéant, ces droits de consommation sur les
alcools à un nouveau fonds.
Madame le ministre, les droits du Parlement en matière de contrôle de la
dépense publique et d'utilisation des impôts sont ici manifestement bafoués.
Par un véritable cavalier fiscal, vous dénaturez le sens des lois de
financement de la sécurité sociale. Je le regrette très vivement, et c'est pour
cette raison que mon groupe votera la suppression de cet article.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, mon intervention sera centrée sur la TGAP.
Lorsque, voilà un an, de brillants esprits, tous pétris de dogmes
environnementaux, ont décliné, par des démonstrations théoriques, les principes
de la fiscalité écologique, c'était pour marquer notre entrée dans une ère
nouvelle de la lutte contre la pollution et pour la sauvegarde de la nature.
La fameuse TGAP allait constituer le pilier de cette politique radicalement
différente et nouvelle dans son essence. Jusqu'à présent, le produit des
nombreuses taxes créées dans le dessein de limiter les activités ayant une
incidence négative sur l'environnement était affecté à la lutte contre les
sources de pollution, à la surveillance de l'état de l'environnement ou encore
à la réparation des dégâts écologiques.
Les taux de cette fiscalité étaient fonction de deux paramètres : d'une part,
la nécessité de dégager les ressources indispensables pour agir efficacement
dans le domaine de la surveillance, de la réduction des émissions polluantes et
des mesures compensatoires ; d'autre part, la volonté d'obtenir des niveaux de
taxation significatifs pour encourager les pollueurs à engager des politiques
plus compatibles avec les exigences environnementales.
La TGAP, telle que ses théoriciens l'ont présentée, repose sur le principe de
base que ses taux sont totalement indépendants des besoins de financement.
Par ailleurs, le principe qui était constant, à savoir l'affectation à
l'environnement de cette fiscalité dite écologique, est quant à lui
abandonné.
Nous avons été nombreux, dès le début, à émettre des doutes sur la sincérité
de ces propos et à nous opposer à ces réformes tant nous étions sceptiques
quant à leur opportunité et leur efficacité. Nous ne savions pas alors que les
faits allaient nous donner raison si rapidement et de façon si éclatante.
En effet, ce que tend à proposer le projet de loi de financement de la
sécurité sociale dans ses modalités - l'affectation de la fiscalité écologique
au financement des 35 heures - constitue l'abandon du principe fondateur de la
TGAP, voulu par ses initiateurs, c'est-à-dire la prétendue déconnexion entre
les taxes et les politiques auxquelles celles-ci sont affectées.
De fait, avant même de connaître dans le détail les modalités de calcul de la
TGAP - taux et assiettes - pour les années à venir, on annonce le produit
attendu. Cet aveu démontre que tout le dispositif est, en fait, organisé en
fonction des besoins de financement.
Le mécanisme intellectuel élaboré et qui devait constituer la révolution de la
politique environnementale de cette fin de siècle est enterré sans autre forme
de procès. La duperie n'aura pas duré un an !
Par ailleurs, alors que tout converge pour placer les questions
environnementales au coeur de l'action publique, avec des moyens suffisants et
pérennes, et que nos concitoyens expriment en la matière des attentes parfois
angoissées tant pour la santé que pour la prévention des risques, comme nous
l'avons encore constaté ces derniers jours, ou la qualité de vie, on décide de
priver ce secteur du produit de la fiscalité dite « écologiques » ! C'est du
détournement ou de la captation de fonds écologiques, doublés d'une erreur
pédagogique évidente.
Finalement, la seule question qui semble intéresser le Gouvernement est de
trouver des produits à taxer et de garnir les caisses avec, en corollaire,
l'aggravation des prélèvements obligatoires dans notre pays.
Vous comprendrez, mes chers collègues, que, dans ces conditions, je ne puisse
apporter mon soutien au projet de loi tel qu'il nous a été présenté. Je voterai
donc les amendements tendant à la suppression des articles 2 et 4 proposés par
la commission des affaires sociales.
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
L'article 2 constitue l'un des articles clés du projet de loi de financement
de la sécurité sociale pour 2000.
Il correspond à un débat déjà ancien, qui porte sur le financement pérenne de
la sécurité sociale et, singulièrement, sur ce que l'on appelle, un peu
abusivement à notre avis, les « charges sociales ».
En effet, ce que l'on appelle ainsi n'est, en fait et malgré certaines
apparences - je pense aux cotisations assises sur les salaires -, qu'un
prélèvement sur la valeur ajoutée créée par le travail permettant de transférer
à la société la satisfaction de certains besoins essentiels : être soigné en
cas de maladie, secouru en cas d'inactivité forcée par le fait du chômage ou de
l'incapacité à travailler, assuré, une fois la vie professionnelle accomplie,
d'un revenu de remplacement, en l'occurrence par le versement d'une pension ou
d'une retraite.
On ne peut et on ne doit jamais oublier que tels sont les principes essentiels
qui ont guidé les promoteurs de notre système de protection sociale. Toute
démarche qui tend à réduire les ressources mêmes de la protection sociale pèse,
à terme, sur la qualité de la réponse apportée par l'ensemble du système aux
besoins que je viens de rappeler.
Depuis plus de vingt ans, nous avons connu tout un ensemble de politiques
d'allégement de cotisations sociales. Ce mouvement va continuer d'ailleurs avec
les exonérations jusqu'à 1,8 SMIC, avec le projet de loi sur la réduction du
temps de travail.
Le coût de tous ces allégements se fait sentir sur les finances publiques et
sur la politique sociale.
A ceux qui s'offusquent des dispositions du présent texte, je rappellerai
qu'au courant de l'été 1995 ils avaient cru devoir majorer le taux normal de la
taxe sur la valeur ajoutée pour financer de nouvelles exonérations de
cotisations sociales !
Au demeurant, nous sommes quelque peu dubitatifs sur la manière dont le fonds
de financement va être financé, alors que, dans le projet de loi, il doit
l'être essentiellement par une partie du produit du droit de consommation sur
les tabacs ou sur des produits alcoolisés et accessoirement par la taxation des
entreprises et celle des activités polluantes.
Un examen attentif des comptes de la nation prouve en effet que le mouvement
de création d'emplois que nous avons constaté ces dernières années et qui s'est
amplifié, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, ne peut faire oublier que
la part des salaires dans la valeur ajoutée n'a pas connu l'évolution
attendue.
Dans les faits, il semble même que le mouvement de baisse relative que nous
avons connu depuis plusieurs années ne soit pas véritablement inversé et que le
niveau des salaires dans la valeur ajoutée reste proche de celui que l'on
observait il y quelques années.
Nous nous interrogeons donc sur la pertinence du choix opéré, notamment à
propos de la réforme des cotisations sociales des entreprises, appuyée sur les
travaux de certains économistes ou sur la réflexion des experts de l'OCDE ou du
FMI, et qui ne correspond, en fait, qu'à une partie de l'analyse que l'on peut
faire aujourd'hui sur le sujet.
On ne peut notamment oublier que la politique d'allégements des cotisations,
au-delà de son coût pour les finances publiques ou pour la protection sociale,
a constitué effectivement une trappe à bas salaires et qu'elle pose encore et
toujours des questions quant à la reconnaissance des qualifications des
salariés, de leur expérience ou de leur formation initiale.
C'est là le reproche essentiel que l'on puisse lui faire aujourd'hui et il
garde toute son actualité au moment où le champ d'application de cette
politique se trouve élargi.
Ces éléments, que nous portons au débat, seront évidemment développés de
nouveau lors de la discussion de l'article.
Nous tenions à les mentionner dès maintenant pour indiquer que le débat était
loin d'être clos.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, aux réflexions
tout à fait pertinentes formulées par le rapporteur, M. Charles Descours, et
par nos collègues Yves Fréville et Philippe Richert, je souhaite ajouter
quelques remarques supplémentaires sur l'absence de pertinence du dispositif
tel qu'il nous est présenté dans le projet de loi de financement de la sécurité
sociale à travers la création du fonds de financement.
Première remarque : dans sa réponse, à la fin de la discussion générale, Mme
le ministre a relevé certains propos tenus par différents orateurs, et
notamment le fait que M. Fourcade avait parlé d'une « raffinerie » à propos du
dispositif qui a été mis en place à la fois pour le financement des 35 heures
et pour le financement du fonds de réserve. Le moins que l'on puisse dire,
c'est que l'ensemble du dispositif qui a été prévu pour financer le fonds de
réserve et les 35 heures manque de lisibilité.
J'aimerais bien, madame la ministre, que vous m'expliquiez comment les
Français vont comprendre le mécanisme financier que vous avez imaginé avec vos
collaborateurs pour assurer le financement des 35 heures.
Deuxième remarque : madame la ministre, dans vos interventions, vous avez
donné le sentiment que la majorité sénatoriale ainsi que les gouvernements de
droite n'avaient jamais pris d'initiative en matière d'allégement des charges
sociales, que cela ne faisait pas partie de leur philosophie, de leur
volonté,...
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
J'ai dit le contraire !
M. Alain Vasselle.
... et que c'était grâce à l'arrivée de ce gouvernement qu'enfin une
politique d'allégement des charges sociales était conduite et, à travers elle,
une politique pour l'emploi.
Notre collègue Charles Descours a rappelé à juste raison que ce n'était pas
exact. En effet, l'allégement des charges sociales a toujours fait partie du
discours tenu par l'ensemble des membres de la majorité sénatoriale.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ça, c'est vrai ! Dans les
discours, oui !
M. Alain Vasselle.
Nous avons d'ailleurs traduit dans les faits, au moyen de divers textes de
loi, un début d'allégement, même si nous n'avons pas pu aller aussi loin que
nous le souhaitions. Vous n'avez fait que prendre le relais en ajoutant des
mesures allant dans le même sens. Donc, ne faites pas de mauvais procès aux
membres de la majorité sénatoriale.
Ma troisième remarque concerne le fonds de solidarité vieillesse.
Je tiens à rappeler, à la suite de notre collègue Yves Fréville, que le fonds
de solidarité vieillesse a été exclusivement créé - j'ai été le rapporteur du
texte l'instituant, alors que M. Balladur était Premier ministre et que Mme
Veil exerçait les fonctions qui sont les vôtres aujourd'hui, madame - pour
assurer le financement de dépenses de solidarité et de dépenses non
contributives. Ce fonds n'avait pas d'autre objet.
Or, vous êtes en train de vous en servir à d'autres fins que celles auxquelles
a pensé initialement le législateur. Il fallait que ce soit dit à l'occasion de
l'examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Quatrième remarque : je considère que le dispositif qui tend à lier la
réduction du temps de travail et l'allégement des charges est mauvais, car
celle-là annule les effets de celui-ci, notamment pour les petites entreprises.
Ces dernières vont en effet être confrontées à des difficultés majeures dès que
la mise en place des 35 heures sera obligatoire. Leur faire croire qu'elles
vont tirer un avantage de la réduction du temps de travail à 35 heures par
l'allégement des charges qu'elles supportent aujourd'hui, c'est vraiment les
tromper. La vérité, c'est qu'on va les plonger dans une situation dont
certaines d'entre elles auront beaucoup de mal à se remettre.
Avant de conclure, je voudrais revenir sur le point qui a été, à juste titre,
développé par notre collègue Philippe Richert. Il s'agit du lien que vous créez
entre la taxation des activités polluantes et le financement des 35 heures.
J'aimerais que vous nous expliquiez ce qui le justifie car, je ne vous le cache
pas, il me paraît totalement incohérent. Du reste, il y a là une absolue
contradiction avec certains propos tenus par d'autres membres du Gouvernement,
notamment par Mme Voynet.
J'avais cru comprendre, lorsque la TGAP, la taxe général, sur les activités
polluantes, a été créée, qu'il s'agissait notamment de financer des actions
tendant à atténuer le caractère polluant d'opérations conduites par certaines
entreprises. Or ce ne sera plus le cas. Mme Dieulangard fait valoir qu'il
existe une cohérence dans la mesure où le produit de la TGAP permettra de
financer des dépenses de santé, mais je pense que les Français seraient plus
rassurés si ce produit était effectivement utilisé à garantir la sécurité
alimentaire ou à réduire les pollutions. Ils préféreraient que cet argent soit
affecté à l'amélioration de l'environnement, ce qui correspond à des dépenses
préventives, plutôt qu'au financement de dépenses curatives.
Les Français doivent le savoir, à partir du moment où vous affectez le produit
de la TGAP au financement des 35 heures, ce produit ne profitera plus à
l'ADEME, l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, et cela ne
manquera pas d'avoir pour eux de douloureuses conséquences. Il faudra trouver
d'autres ressources pour cet organisme, peut-être des concours budgétaires
inscrits dans la loi de finances, mais dont nous ne connaissons pas le niveau.
Cela risque aussi de se traduire par une diminution des concours financiers de
l'ADEME aux dépenses des collectivités locales au titre du traitement des
déchets et de la pollution de l'eau.
Il en résultera inévitablement une augmentation du coût du service que les
Français auront à supporter. Ainsi, en fait d'allègement des charges des
entreprises, on va faire subir aux Français le poids d'un impôt qui viendra
s'ajouter à tous ceux qui existent déjà, contribuant par là même à
l'augmentation des prélèvements obligatoires.
A cet égard, un article paru récemment dans un mensuel rappelle que la France
vient de battre son record en matière de prélèvements obligatoires puisque
ceux-ci représentent maintenant 45,3 % du PIB. Ainsi la France est vraiment le
champion des prélèvements obligatoires, et l'actuel gouvernement continue
d'apporter sa pierre à ce triste édifice, comme l'a fait justement remarquer M.
Fréville, à travers le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
C'est pourquoi nous soutiendrons la proposition de suppression de l'article 2.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 4 est déposé par M. Descours, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 75 est présenté par M. Jean-Louis Lorrain et les membres du
groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 90 est déposé par M. Louis Boyer et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants.
Tous trois tendent à supprimer l'article 2.
Par amendement n° 113, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de remplacer le 5° du texte
présenté par l'article 2 pour l'article L. 131-8-2 du code de la sécurité
sociale par trois alinéas ainsi rédigés :
« 5° Une contribution assise sur leur montant net versée par les sociétés, les
entreprises et autres personnes morales, assujetties en France à la déclaration
de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'article 206 du code général des
impôts. Des revenus de capitaux mobiliers, des plus-values, gains en capital et
profits réalisés sur les opérations menées sur titres, les opérations menées
sur les marchés réglementés et sur les marchés à terme d'instruments financiers
et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables.
« Pour les sociétés placées sous le régime de l'article 223 A du code général
des impôts, la contribution est due par la société mère.
« Le taux de cette contribution sociale sur les revenus financiers des
entreprises est fixé à 10 %. La contribution sociale est contrôlée et recouvrée
selon les mêmes règles que les cotisations sociales. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Charles Descours,
rapporteur.
J'ai déjà expliqué, monsieur le président, pourquoi je
propose à la Haute Assemblée de supprimer l'article 2.
M. le président.
La parole est à M. Richert, pour présenter l'amendement n° 75.
M. Philippe Richert.
Il a déjà été défendu, monsieur le président.
M. le président.
La parole est à M. Louis Boyer, pour présenter l'amendement n° 90.
M. Louis Boyer.
Le mode de fonctionnement du fonds instauré par l'article 2 présente plusieurs
défauts rédhibitoires.
Le dispositif d'accompagnement des 35 heures est compensé non pas par l'Etat
mais par de nouveaux prélèvements, contrairement au dispositif mis en place par
le gouvernement de M. Juppé.
Il accroît les taxes des entreprises, à travers la contribution sociale sur
les bénéfices des sociétés, pour un montant de 4,3 milliards de francs, et
l'extension de la TGAP.
Il procède à un prélèvement indirect sur la sécurité sociale. Si la ponction
des organismes de sécurité sociale est abandonnée, y est substituée une
fraction des droits sur les alcools prélevée sur le fonds de solidarité
vieillesse. Mais la sécurité sociale ne récupère pas les sommes qui devaient
lui être retirées puisqu'elles iront abonder le fonds de réserve pour les
retraites.
Les taxes sont détournées de leur objet. L'écotaxe, à travers la TGAP, est
consacrée non à l'amélioration de la qualité de l'air, de l'eau et de
l'environnement en général, mais au soutien de l'emploi. La taxe de 39,5
milliards sur les tabacs devrait être affectée aux soins des fumeurs et,
surtout, à la prévention, qui est aujourd'hui en partie délaissée. On peut en
dire autant des droits sur les alcools.
Enfin, le financement des 35 heures n'est pas bouclé puisqu'il manquera une
quinzaine de milliards de francs d'ici à quatre ans.
Par ailleurs, en intégrant ce fonds à la loi de financement de la sécurité
sociale, le Gouvernement suscite des confusions qui risquent de compromettre
cet exercice nouveau que constitue l'examen d'une loi sur le budget de la
sécurité sociale. Le financement de la politique de l'emploi devrait figurer
dans le budget de l'Etat.
C'est pour toutes ces raisons que nous préconisons, comme la commission, la
suppression de cet article.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 113.
M. Guy Fischer.
Cet amendement vise à substituer à la contribution de 10 % due au titre de la
taxation des heures supplémentaires entre 35 et 39 heures par les entreprises
non passées aux 35 heures une contribution sociale assise sur les revenus
financiers des entreprises.
Force est de rappeler que le recours aux heures supplémentaires demeure
relativement élevé, notamment dans certains secteurs d'activité directement
concernés par des activités saisonnières. Et cela concerne souvent les
entreprises où les niveaux moyens de rémunération sont les plus faibles.
Nous sommes donc confrontés à une situation pour le moins contradictoire :
d'un côté l'un des éléments de la politique de l'emploi - sans que nous
disposions d'ailleurs de critères d'évaluation de l'efficacité réelle de la
mesure - consiste à alléger le « coût du travail » non qualifié ; d'un autre
côté, le recours aux heures supplémentaires, lesquelles permettent parfois aux
salariés concernés de majorer un revenu pour le moins faible, sera pénalisé, ce
qui revient à dire que, à coût équivalent pour l'employeur, c'est le salarié
qui fera les frais de l'opération.
Que les choses soient claires : nous ne sommes pas des partisans forcenés de
l'allongement de la durée du travail et le récent débat sur l'incitation à la
réduction du temps de travail l'a assez largement montré.
Vous n'aviez pas cru, madame le ministre, devoir retenir notre proposition de
réduction du volant d'heures supplémentaires autorisé. Ce contingent n'a
toujours pas été réduit.
Une double démarche devrait à notre sens être menée : d'une part, une démarche
visant à revaloriser sensiblement les salaires les plus faibles, ce qui impose
notamment, indépendamment du relèvement du salaire minimum, qu'une attention
toute particulière soit portée sur la fixation des minima conventionnels
déterminés par la négociation collective dans les branches ; d'autre part, une
démarche visant à donner des moyens nouveaux aux salariés, à travers leurs
représentants, notamment pour transformer des heures supplémentaires en emplois
pérennes.
Cela étant, on demeure, en matière de cotisations sociales perçues au sein de
l'entreprise, placé dans le cadre de l'assiette actuelle, fondée sur les
niveaux de rémunération. Or chacun sait que les entreprises ont, ces dernières
années, très sensiblement accru leurs placements financiers et que le faible
niveau de l'investissement productif des entreprises tient aussi à une
croissance continue de la part de la valeur ajoutée mobilisée par des
placements de trésorerie.
Nous proposons donc, par une sorte de symétrie avec ce qui a été mis en place
pour les revenus de capitaux mobiliers perçus par les ménages, d'instaurer une
contribution sur les revenus financiers des entreprises et de substituer cette
contribution à celle qui est assise sur le recours aux heures
supplémentaires.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 113 ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je constate qu'il y a des nuances entre les conceptions des
différentes composantes de la majorité plurielle puisque le texte du
Gouvernement serait sensiblement modifié par l'amendement présenté par le
groupe communiste.
Cela étant, comme je propose de supprimer l'article, je pense que cet
amendement tombera. Si tel n'était pas le cas, j'émettrais un avis
défavorable... pour venir au secours du Gouvernement.
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements présentés à
l'article 2 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est défavorable
à tous ces amendements.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 4, 75 et 90.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Je ne voudrais pas qu'il y ait d'ambiguïté : les députés communistes ont voté
contre cet article du projet de loi, mais il va de soi que notre groupe votera
contre les amendements de suppression.
(Rires et exclamations sur les
travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il est clair que notre position est en effet complètement différente de celle
de la commission : quand nous proposons, nous, d'asseoir une contribution sur
les revenus financiers, le rapporteur rejette évidemment cette solution. Il est
donc normal que, même si nous n'approuvons pas cet article 2 en l'état, nous
n'en votions pas la suppression.
M. Alain Vasselle.
Ça, c'est logique !
Mme Nicole Borvo.
Voter ces amendements relèverait de tactiques politiciennes que nous ne
pratiquons pas !
M. Alain Vasselle.
Vous vous opposez à la fois à la majorité sénatoriale et au Gouvernement ! Il
faut avoir le courage de le dire !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4, 75 et 90, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2 est supprimé et l'amendement n° 113 n'a plus
d'objet.
Article 3
M. le président.
« Art. 3. _ Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Il est inséré un article 235
ter
ZC ainsi rédigé :
«
Art. 235
ter
ZC
. _ I. _ Les redevables de l'impôt sur les
sociétés sont assujettis à une contribution sociale égale à une fraction de cet
impôt calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés au I de
l'article 219 et diminué d'un abattement qui ne peut excéder 5 000 000 F par
période de douze mois. Lorsqu'un exercice ou une période d'imposition est
inférieur ou supérieur à douze mois, l'abattement est ajusté à due
proportion.
« La fraction mentionnée au premier alinéa est égale à 3,3 % pour les
exercices clos à compter du 1er janvier 2000.
« Sont exonérés les redevables ayant réalisé un chiffre d'affaires de moins de
50 millions de francs. Le chiffre d'affaires à prendre en compte s'entend du
chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou période
d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un
groupe mentionné à l'article 223 A, de la somme des chiffres d'affaires de
chacune des sociétés membres de ce groupe. Le capital des sociétés, entièrement
libéré, doit être détenu de manière continue, pour 75 % au moins, par des
personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le
capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques. Pour la
détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de
capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des sociétés de
développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas
prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au
sens du 1
bis
de l'article 39
terdecies
entre la société en cause
et ces dernières sociétés ou ces fonds.
« II. _ Pour les entreprises placées sous le régime prévu à l'article 223 A,
la contribution est due par la société mère. Elle est assise sur l'impôt sur
les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette
d'ensemble définis aux articles 223 B et 223 D.
« III. _ Pour les entreprises placées sous le régime prévu à l'article 209
quinquies
, la contribution est calculée d'après le montant de l'impôt
sur les sociétés, déterminé selon les modalités prévues au I, qui aurait été dû
en l'absence d'application de ce régime. Elle n'est ni imputable ni
remboursable.
« IV. _ Les avoirs fiscaux ou crédits d'impôt de toute nature ainsi que la
créance visée à l'article 220
quinquies
et l'imposition forfaitaire
annuelle mentionnée à l'article 223
septies
ne sont pas imputables sur
la contribution.
« V. _ Elle est établie et contrôlée comme l'impôt sur les sociétés et sous
les mêmes garanties et sanctions.
« VI. _ Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.
»
« 2° Il est inséré un article 1668 D ainsi rédigé :
«
Art. 1668 D
. _ I. _ La contribution sociale mentionnée à l'article
235
ter
ZC est recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les
mêmes garanties et sanctions.
« Elle est payée spontanément au comptable du Trésor chargé du recouvrement
des impôts directs, au plus tard à la date prévue au 2 de l'article 1668 pour
le versement du solde de liquidation de l'impôt sur les sociétés.
« Elle donne lieu au préalable à quatre versements anticipés aux dates prévues
pour le paiement des acomptes d'impôt sur les sociétés de l'exercice ou de la
période d'imposition. Le montant des versements anticipés est fixé à 3,3 % du
montant de l'impôt sur les sociétés calculé sur les résultats imposables aux
taux mentionnés au I de l'article 219 de l'exercice ou de la période
d'imposition qui précède et diminué d'un montant qui ne peut excéder celui de
l'abattement défini au premier alinéa du I de l'article 235
ter
ZC.
« Lorsque le montant des versements anticipés déjà payés au titre d'un
exercice ou d'une période d'imposition en application du deuxième alinéa est
égal ou supérieur à la contribution dont l'entreprise prévoit qu'elle sera
finalement redevable au titre de ce même exercice ou de cette même période,
l'entreprise peut se dispenser du paiement de nouveaux versements en remettant
au comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs, avant la date
d'exigibilité du prochain versement anticipé, une déclaration datée et
signée.
« Si la déclaration mentionnée à l'alinéa précédent est reconnue inexacte à la
suite de la liquidation de la contribution, la majoration prévue au 1 de
l'article 1762 est appliquée aux sommes non réglées.
« II. _ Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.
»
« 3° Au premier alinéa de l'article 213, après les mots : "la contribution
temporaire mentionnée à l'article 235
ter
ZB", sont insérés les mots : "
, la contribution sociale mentionnée à l'article 235
ter
ZC". »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 91 est déposé par M. Louis Boyer et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 114, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le deuxième alinéa du texte
présenté par le 1° de l'article 3 pour l'article 235
ter
ZC du code
général des impôts, de remplacer le taux : « 3,3 % » par le taux : « 5 % ».
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Charles Descours,
rapporteur.
C'est un amendement de conséquence par rapport à la position
qui vient d'être adoptée par le Sénat sur l'article 2.
Nous considérons que la contribution sociale sur les bénéfices est une
imposition supplémentaire. Nous ne pouvons pas admettre cette mise en cause de
la compétitivité de nos entreprises.
Je tiens à rappeler que le rendement de la CSB devrait être de plus de 4
milliards de francs en 2000 et concernerait 4 000 entreprises. Mais le plan de
financement à moyen terme prévoit un rendement de 12 milliards de francs. C'est
donc un prélèvement considérable qu'il faudrait opérer, ce qui supposerait de
relever le taux de cette contribution, probablement jusqu'à 10 %, ou d'abaisser
le chiffre d'affaires à partir duquel les entreprises en seraient
redevables.
On voit bien que le Gouvernement veut nous faire entrer dans une mécanique
infernale d'augmentation des prélèvements sur les entreprises. Nous ne pouvons
que proposer la suppression d'un tel article parce que nous sommes contre toute
augmentation des prélèvements sur les entreprises, eu égard au niveau que
ceux-ci ont atteint.
M. le président.
La parole est à M. Louis Boyer, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Louis Boyer.
Notre préoccupation est la même que celle que vient d'exprimer M. le
rapporteur.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 114.
Mme Nicole Borvo.
Cet amendement porte sur la question de la définition de la quotité de la
contribution des entreprises au fonds de financement de la réforme des
cotisations patronales, dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il tend à être
insuffisant.
En effet, l'article 3, dans sa rédaction actuelle, tend à la mise en place
d'une contribution fondée sur une majoration de 3,3 % du montant de l'impôt sur
les sociétés dû par les entreprises assujetties, et cela au bénéfice du fonds
de financement.
Cette majoration intervient, il convient de le rappeler, au moment où
disparaît la majoration exceptionnelle de l'impôt sur les sociétés instituée
par la loi portant diverses mesures d'urgence à caractère fiscal et financier,
adoptée au cours de l'été 1997.
Cette majoration dégagerait en 1999, dernière année d'application, un produit
d'environ 12,4 milliards de francs.
Eu égard à son taux - 10 % - on peut donc naturellement déduire que la
contribution définie à l'article 235
ter
ZC du code général des impôts,
qui procède d'ailleurs des mêmes conditions d'application que la majoration de
1997, serait d'un rendement égal au tiers de la somme perçue par l'Etat en
1999, soit un peu plus de 4,1 milliards de francs.
La majoration du taux de la contribution que nous proposons permet donc
d'espérer un rendement d'environ 6,2 millards de francs.
Encore convient-il de souligner que l'exécution budgétaire de 1999 devrait
amener une légère modification du montant définitif de la majoration due en
vertu de la loi de 1997 et donc une modulation à la hausse du produit de la
contribution créée par la présente loi de financement en 2000.
Nous nous devons de préciser que la majoration du taux de la contribution
pourra permettre soit de faire évoluer les autres paramètres de financement de
la réforme des cotisations patronales, soit de modifier les critères
d'intervention de ce fonds, soit encore d'accroître les capacités de
financement des prestations sociales.
La contribution que prévoit de mettre en place ce projet de loi de financement
de la sécurité sociale présente, malgré tout, le défaut de suivre assez
précisément les contours de l'impôt sur les sociétés, dont le rendement, même
s'il s'est accru ces dernières années, en raison bien sûr de la situation
financière florissante des entreprises, demeure toutefois encore par trop
éloigné de la réalité des profits réalisés.
On peut donc s'interroger sur l'opportunité de remettre en question l'économie
générale de notre impôt sur les sociétés afin d'accroître le rendement de la
contribution et d'en diversifier, à l'avenir, les usages.
En tout état de cause, et en l'attente de cette nécessaire remise en question,
nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter l'amendement n° 114.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 114 ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Compte tenu de ce que j'ai dit sur l'accroissement des
charges des entreprises, il est évident que la commission est opposée à cet
amendement. Cela étant, je pense que la suppression de l'article 3 le rendra
sans objet.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 5 et 91
ainsi que sur l'amendement n° 114 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Pour les raisons que j'ai
indiquées tout à l'heure, je ne souhaite pas une augmentation cette année de la
contribution sociale sur les bénéfices. J'émets donc un avis défavorable sur
l'amendement n° 114.
Je suis également opposée aux amendements de suppression.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 5 et 91.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Madame le ministre, donner et retenir ne vaut : on votera dans la loi de
finances une baisse de 10 % de l'impôt sur les sociétés alors qu'on l'aura
augmenté auparavant de 3,3 % pour certaines entreprises.
Mais, sans entrer dans ce débat d'ordre général, je souhaite formuler trois
remarques.
Premièrement, si nous adoptons l'article 3, nous créons un double effet de
seuil, d'une part, sur le chiffre d'affaires et, d'autre part, sur l'abattement
de 5 millions de francs.
S'il est logique d'imposer les bénéfices - et je parle en mon nom personnel -
je ne vois aucune raison de créer des effets de seuils sur la taille des
entreprises, au risque d'inciter les petites et moyennes industries à ne pas
grandir, alors que nous savons très bien que ce sont ces entreprises-là qui
doivent se développer dans notre pays.
Deuxièmement, avec l'article 3, nous offrons à la sécurité sociale la recette
la plus volatile qui soit : au cours des dernières années, le montant de
l'impôt sur les sociétés a d'abord diminué de près de moitié puis a quasiment
été doublé, passant de 100 milliards de francs à 200 milliards de francs.
Qu'arrivera-t-il si nous retenons une telle ressource pour la sécurité sociale
? Quand les affaires marcheront bien, en haut de cycle, l'Etat n'aura pas à
apporter sa participation, et tout ira bien. En revanche, lorsque les affaires
seront moins florissantes, et cela peut arriver, il faudra recourir à d'autres
impôts d'Etat. Bref, il ne s'agit pas d'une ressource stable.
Troisièmement, madame le ministre, j'aurais compris que vous nous proposiez la
valeur ajoutée comme assiette, mais des substituts aussi dérisoires à une taxe
sur la valeur ajoutée, faits d'un mélange d'impositions, d'une part, sur les
heures supplémentaires, représentant la partie « travail » de la valeur
ajoutée, d'autre part, sur les bénéfices de certaines entreprises, ne me
paraissent véritablement pas à la hauteur du problème.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Dominique Braye.
Bravo !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
La démonstration de M. Fréville
n'est pas totalement convaincante.
M. Dominique Braye.
Mais si !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Permettez que je réponde à M.
Fréville !
M. Alain Joyandet.
Ne nous regardez pas si méchamment ! Soyez plus décontractée, madame la
ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le sénateur, il est
très désagréable d'entendre toujours la même personne, dès que j'ouvre la
bouche, faire des remarques, alors que nous ne l'entendons jamais donner son
avis sur le fond !
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
M. Braye interviendra
sur l'article 4.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Tant mieux, cela me permettra
de lui répondre sur le fond !
Monsieur Fréville, le Gouvernement s'est précisément efforcé d'éviter les
effets de seuil. Certes, la contribution s'applique dès que le chiffre
d'affaires est supérieur à 50 millions de francs, mais n'oubliez pas
l'abattement de 5 millions de francs sur les bénéfices. Donc, par définition,
l'effet de seuil est supprimé.
C'est le cumul de ces deux conditions qui empêche l'effet de seuil que vous
dénoncez de manière, je dois le dire, peu convaincante.
M. Dominique Braye.
Quand je vous dis qu'il y a des usines à gaz, mon cher collègue !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?..
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 5 et 91, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 3 est supprimé et l'amendement n° 114 n'a plus
d'objet.
11
CANDIDATURES
À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que la commission des affaires culturelles m'a fait
connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à
la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions
restant en discussion de la proposition de loi portant diverses mesures
relatives à l'organisation d'activités physiques et sportives.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission
mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
Nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une
heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une
heure trente, sous la présidence de M. Guy Allouche.)
PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
12
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept
membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un
texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi
portant diverses mesures relatives à l'organisation d'activités physiques et
sportives.
La liste des candidats établie par la commission des affaires culturelles à
été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Adrien Gouteyron, James Bordas, Jean Bernard, André Bohl,
Pierre Jeambrun, Serge Lagauche et Mme Hélène Luc.
Suppléants : MM. Jean Bernadaux, Jean-Claude Carle, Jacques Donnay, Alain
Dufaut, Roger Hesling, Jean-Luc Miraux et Jean-François Picheral.
13
FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 94,
tendant à insérer un article additionnel avant l'article 4.
Article additionnel avant l'article 4
M. le président.
Par amendement n° 94, M. About et les membres du groupe des Républicains et
Indépendants proposent d'insérer, avant l'article 4, un article additionnel
ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa (
d
) du 5° de l'article 278
bis
du code
général des impôts est abrogé. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Article 4
M. le président.
« Art. 4. _ I. _ Le code des douanes est ainsi modifié :
« A. _ L'article 266
sexies
est ainsi modifié :
« 1° Au I, les mots : "à compter du 1er janvier 1999" sont supprimés ;
« 2° Le I est complété par un 5, un 6, un 7 et un 8 ainsi rédigés :
« 5. Toute personne qui livre pour la première fois après fabrication
nationale ou qui livre sur le marché intérieur en cas d'acquisition
intracommunautaire ou qui met à la consommation des préparations pour lessives,
y compris des préparations auxiliaires de lavage, ou des produits adoucissants
ou assouplissants pour le linge relevant respectivement des rubriques 34022090,
34029090 et 38091010 à 38099100 du tarif douanier ;
« 6. Toute personne qui livre pour la première fois après fabrication
nationale ou qui livre sur le marché intérieur en cas d'acquisition
intracommunautaire ou qui met à la consommation des grains minéraux naturels
d'un diamètre maximal de 125 millimètres relevant des rubriques 2505 et
25171010 du tarif douanier ;
« 7. Toute personne qui livre pour la première fois après fabrication
nationale ou qui livre sur le marché intérieur en cas d'acquisition
intracommunautaire ou qui met à la consommation des produits antiparasitaires à
usage agricole ou des produits assimilés relevant de la rubrique 3808 du tarif
douanier dont la mise sur le marché est autorisée en application de la loi n°
525 du 2 novembre 1943 relative à l'organisation du contrôle des produits
antiparasitaires à usage agricole et dans la composition desquels entrent des
substances classées dangereuses selon les critères définis par les arrêtés pris
pour l'application de l'article R. 231-51 du code du travail ;
« 8.
a.
Tout exploitant d'un établissement industriel ou commercial ou
d'un établissement public à caractère industriel et commercial dont certaines
installations sont soumises à autorisation au titre de la loi n° 76-663 du 19
juillet 1976 précitée ;
«
b.
Tout exploitant d'un établissement mentionné au
a
dont les
activités, figurant sur une liste établie par décret en Conseil d'Etat après
avis du Conseil supérieur des installations classées, font courir, par leur
nature ou leur volume, des risques particuliers à l'environnement. » ;
« 3° Le II est complété par un 3, un 4 et un 5 ainsi rédigés :
« 3. Aux produits mentionnés au 6 du I du présent article issus d'une
opération de recyclage ou qui présentent une teneur sur produit sec d'au moins
97 % d'oxyde de silicium ;
« 4. Aux préparations pour lessives, y compris les préparations auxiliaires de
lavage, aux produits adoucissants ou assouplissants pour le linge, aux grains
minéraux naturels, aux produits antiparasitaires à usage agricole et aux
produits assimilés mentionnés respectivement aux 5, 6 et 7 du I du présent
article lorsque la première livraison après fabrication nationale consiste en
une expédition directe à destination d'un Etat membre de la Communauté
européenne ou en une exportation ;
« 5. A l'exploitation d'installations classées par les entreprises inscrites
au répertoire des métiers. »
« B. _ L'article 266
septies
est complété par un 5, un 6, un 7 et un 8
ainsi rédigés :
« 5. La première livraison après fabrication nationale, la livraison sur le
marché intérieur en cas d'acquisition intracommunautaire ou la mise à la
consommation des préparations pour lessives, y compris des préparations
auxiliaires de lavage, ou des produits adoucissants ou assouplissants pour le
linge mentionnés au 5 du I de l'article 266
sexies
;
« 6. La première livraison après fabrication nationale, la livraison sur le
marché intérieur en cas d'acquisition intracommunautaire ou la mise à la
consommation des grains minéraux naturels mentionnés au 6 du I de l'article 266
sexies
;
« 7. La première livraison après fabrication nationale, la livraison sur le
marché intérieur en cas d'acquisition intracommunautaire ou la mise à la
consommation des produits antiparasitaires à usage agricole ou des produits
assimilés dans la composition desquels entrent des substances classées
dangereuses mentionnés au 7 du I de l'article 266
sexies
;
« 8.
a.
La délivrance de l'autorisation prévue par l'article 3 de la loi
n° 76-663 du 19 juillet 1976 précitée ;
«
b.
L'exploitation au cours d'une année civile d'un établissement
mentionné au
b
du 8 du I de l'article 266
sexies
. »
« C. _ L'article 266
octies
est complété par un 5, un 6 et un 7 ainsi
rédigés :
« 5. Le poids des préparations pour lessives, y compris des préparations
auxiliaires de lavage, ou des produits adoucissants ou assouplissants pour le
linge mentionnés au 5 du I de l'article 266
sexies
;
« 6. Le poids des grains minéraux naturels mentionnés au 6 du I de l'article
266
sexies
;
« 7. Le poids des substances classées dangereuses selon les critères définis
par les arrêtés pris pour l'application de l'article R. 231-51 du code du
travail qui entrent dans la composition des produits antiparasitaires à usage
agricole ou des produits assimilés mentionnés au 7 du I de l'article 266
sexies
. »
« D. _ L'article 266
nonies
est ainsi modifié :
« 1° Le tableau figurant au 1 est ainsi rédigé :
DÉSIGNATION DES MATIÈRES ou opérations imposables |
UNITÉ de perception |
QUOTITÉ (en francs) |
---|---|---|
Déchets |
||
Déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets ménagers et assimilés | Tonne | 60 |
Déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets ménagers et assimilés de provenance extérieure au périmètre du plan d'élimination des déchets, élaboré en vertu de l'article 10-2 de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975, dans lequel est située l'installation de stockage | Tonne | 90 |
Déchets industriels spéciaux réceptionnés dans une installation d'élimination de déchets industriels spéciaux | Tonne | 60 |
Déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets industriels spéciaux | Tonne | 120 |
Substances émises dans l'atmosphère |
||
Oxydes de soufre et autres composés soufrés | Tonne | 250 |
Acide chlorhydrique | Tonne | 250 |
Protoxyde d'azote | Tonne | 375 |
Oxydes d'azote et autres composés oxygénés de l'azote, à l'exception du protoxyde d'azote | Tonne | 300 |
Hydrocarbures non méthaniques, solvants et autres composés organiques volatils | Tonne | 250 |
Décollages d'aéronefs |
||
Aérodromes du groupe 1 | Tonne | 68 |
Aérodromes du groupe 2 | Tonne | 25 |
Aérodromes du groupe 3 | Tonne | 5 |
Lubrifiants, huiles et préparations
des huiles usagées |
||
Lubrifiants, huiles et préparations lubrifiantes | Tonne | 250 |
Préparations pour lessives, y compris les préparations auxiliaires de lavage, et produits adoucissants et assouplissants pour le linge |
||
- dont la teneur en phosphates est inférieure à 5 % du poids | Tonne | 470 |
- dont la teneur en phosphates est comprise entre 5 % et 30 % du poids | Tonne | 520 |
- dont la teneur en phosphates est supérieure à 30 % du poids | Tonne | 570 |
Grains minéraux naturels |
||
Grains minéraux naturels | Tonne | 0,60 |
Substances classées dangereuses qui entrent dans la composition des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés |
||
Catégorie 1 | Tonne | 0 |
Catégorie 2 | Tonne | 2 500 |
Catégorie 3 | Tonne | 4 000 |
Catégorie 4 | Tonne | 5 500 |
Catégorie 5 | Tonne | 7 000 |
Catégorie 6 | Tonne | 9 000 |
Catégorie 7 | Tonne | 11 000 |
Installations classées |
||
Délivrance d'autorisation : - artisan n'employant pas plus de deux salariés |
- | 2 900 |
- autres entreprises inscrites au répertoire des métiers | - | 7 000 |
- autres entreprises | - | 14 600 |
Exploitation au cours d'une année civile (tarif de base) | - | 2 200 |
« 2° L'article est complété par un 7 et un 8 ainsi rédigés :
« 7. Les substances classées dangereuses qui entrent dans la composition des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés mentionnés au 7 du I de l'article 266 sexies sont réparties en sept catégories affectées d'un taux unitaire spécifique en fonction de leurs caractéristiques écotoxicologiques et toxicologiques définies par les arrêtés pris pour l'application de l'article R. 231-51 du code du travail :
PHRASE DE RISQUE ÉCOTOXICOLOGIQUE
|
||||
---|---|---|---|---|
DANGER TOXICOLOGIQUE |
R 50/53, R 50 |
R 51/53 |
R 52/53, R 52 ou R 53 |
Autres |
T+ ou T aggravé par l'une des phrases de risque R 33, R 40, R 45, R 46, R 48, R 49 ou R 60 à R 64 | Catégorie 7 | Catégorie 6 | Catégorie 5 | Catégorie 4 |
T non aggravé par l'une des phrases de risque précitées ou Xn aggravé par l'une des phrases de risque R 33, R 40, R 48 ou R 62 à R 64 | Catégorie 6 | Catégorie 5 | Catégorie 4 | Catégorie 3 |
Xn non aggravé par l'une des phrases de risque précitées, Xi ou C | Catégorie 5 | Catégorie 4 | Catégorie 3 | Catégorie 2 |
Autres | Catégorie 4 | Catégorie 3 | Catégorie 2 | Catégorie 1 |
« 8. Le décret en Conseil d'Etat prévu au
b
du 8 du I de l'article 266
sexies
fixe un coefficient multiplicateur compris entre un et dix pour
chacune des activités exercées dans les installations classées, en fonction de
sa nature et de son volume. Le montant de la taxe effectivement perçue chaque
année par établissement au titre de chacune de ces activités est égal au
produit du tarif de base fixé dans le tableau figurant au 1 ci-dessus et du
coefficient multiplicateur. »
« E. _ L'article 266
decies
est complété par un 3 ainsi rédigé :
« 3. Les préparations pour lessives, y compris les préparations auxiliaires de
lavage, les produits adoucissants ou assouplissants pour le linge, les grains
minéraux naturels, les produits antiparasitaires à usage agricole et les
produits assimilés mentionnés respectivement aux 5, 6 et 7 du I de l'article
266
sexies
donnent lieu, sur demande, à remboursement de la taxe
afférente lorsqu'ils sont expédiés à destination d'un Etat membre de la
Communauté européenne ou exportés. »
« F. _ Il est créé un article 266
terdecies
ainsi rédigé :
«
Art. 266
terdecies
. _ Par dérogation aux dispositions des
articles 266
undecies
et 266
duodecies
, les services chargés de
l'inspection des installations classées contrôlent, liquident et recouvrent la
part de la taxe générale sur les activités polluantes assise sur la délivrance
de l'autorisation prévue par l'article 3 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976
précitée et sur l'exploitation au cours d'une année civile d'un établissement
mentionné au
b
du 8 du I de l'article 266
sexies
selon les
modalités suivantes :
« I. _ Au vu des renseignements transmis par le préfet, les services chargés
de l'inspection des installations classées dressent la liste des redevables,
fixent le montant de la taxe et, le cas échéant, des pénalités dues par chacun
de ceux-ci et prescrivent l'exécution de la recette correspondante.
« Ils notifient à l'assujetti le montant de la taxe et, le cas échéant, des
pénalités à acquitter par un avis qui indique les dates de mise en
recouvrement, d'exigibilité et d'application de l'intérêt de retard en cas de
non-paiement.
« La date d'exigibilité est fixée au dernier jour du deuxième mois suivant
celui de la mise en recouvrement.
« Le montant de la taxe non acquittée le 15 du mois qui suit celui au cours
duquel la taxe est exigible est majoré d'un intérêt de retard dont le taux
mensuel est fixé à 0,75 % du montant des sommes restant dues.
« L'encaissement de la taxe ainsi que, le cas échéant, des pénalités est
effectué par l'intermédiaire d'une régie de recettes fonctionnant dans les
conditions prévues par la réglementation applicable aux régies de recettes et
aux régies d'avance des organismes publics.
« A défaut de paiement et au plus tard deux mois après le 15 du mois qui suit
celui au cours duquel la taxe est exigible, le recouvrement des sommes impayées
est assuré dans les conditions prévues par la réglementation générale sur la
comptabilité publique au vu des ordres de recettes émis par l'ordonnateur dont
relève la régie de recettes mentionnée à l'alinéa précédent.
« II. _ La taxe générale sur les activités polluantes assise sur
l'exploitation d'un établissement mentionné au
b
du 8 du I de l'article
266
sexies
est due au 1er janvier de chaque année, ou ultérieurement à
la date de mise en fonctionnement de l'établissement ou éventuellement de
l'exercice d'une nouvelle activité. La taxe est due dans tous les cas pour
l'année entière. Son paiement incombe à la personne physique ou morale qui
exploite l'établissement à cette date.
« En cas de cessation d'activité ou de changement survenu dans un
établissement de nature à modifier sa situation au regard de cette taxe,
l'exploitant fait parvenir une déclaration au préfet dans un délai d'un mois à
compter de cet événement.
« Lorsque cette déclaration est inexacte ou n'est pas déposée dans ce délai,
les services chargés de l'inspection des installations classées notifient aux
assujettis, trente jours au moins avant l'émission du titre exécutoire, les
éléments servant au calcul de la taxe.
« En cas de défaut de déclaration dans le délai prescrit, les services
mentionnés ci-dessus procèdent à la taxation d'office et l'assortissent de
l'intérêt de retard et de la majoration prévus à l'article 1728 du code général
des impôts.
« En cas d'inexactitude de la déclaration, les rappels de taxe sont assortis
de l'intérêt de retard et, le cas échéant, de la majoration prévus à l'article
1729 du code général des impôts.
« Les majorations mentionnées aux quatrième et cinquième alinéas du présent II
sont notifiées, avec leur motivation, aux assujettis qui disposent d'un délai
de trente jours pour présenter leurs observations. Les services mentionnés
ci-dessus ne peuvent émettre le titre exécutoire qu'à l'expiration de ce délai.
»
« II. _ L'article 17 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux
installations classées pour la protection de l'environnement est abrogé.
« III. _ Les dispositions des I et II sont applicables à compter du 1er
janvier 2000. »
Sur l'article, la parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
ferai d'abord une remarque générale : je ne crois pas que les lois de
financement de la sécurité sociale aient été mises en place pour servir de
support à une fiscalité nouvelle. Honnêtement, ce n'est pas l'esprit des
ordonnances Juppé.
La théorie du double dividende est tout à fait intéressante, sur le plan
intellectuel. Cependant, madame la secrétaire d'Etat, le principe de réalité
oblige à prendre en compte les réactions des futurs assujettis aux nouveaux
prélèvements. Il conduit aussi à s'interroger sur la capacité des secteurs
concernés à supporter économiquement de nouveaux prélèvements.
Les commentaires et analyses que j'ai pu recueillir auprès d'industriels de
mon département concernant l'incidence de la TGAP sur l'activité de leurs
entreprises indiquent que telle n'a pas été votre démarche.
Le dispositif que vous préconisez n'est pas compris. Protection de
l'environnement ? Soit ! Nous y souscrivons tous.
Mais comment faire admettre un nouveau prélèvement à une entreprise - je pense
à la société Calliope, spécialisée dans les produits phytosanitaires, installée
à Noguères - qui a déjà investi 45 millions de francs pour la protection de
l'environnement lors de la construction de son usine ?
L'homologation de ces produits sur le marché français nécessite d'importants
investissements. Là encore, tout est mis en oeuvre pour que les produits
présentent toutes les garanties pour l'utilisateur, le consommateur et
l'environnement.
Les produits génériques qui sont aujourd'hui les plus taxés représentent une
économie très importante dans les intrants des agriculteurs pour la production
de leurs cultures : la TGAP sera répercutée à leur niveau par produit, donc
dans les charges des exploitations, et par conséquent sur l'utilisateur
final.
Il est décidément difficile de comprendre pourquoi une activité dont les
bénéfices économiques et de sécurité alimentaire et la contribution à la
compétitivité de notre agriculture sont reconnus est ainsi pénalisée.
La chimie est un autre secteur sur lequel l'incidence du dispositif mérite
d'être soulignée.
A titre d'exemple, l'usine Elf-Atochem de Mont sait que la mesure d'allégement
des charges sociales sur les bas salaires concernera moins de 20 % de ses 450
salariés.
Les activités chimiques du département des Pyrénées-Atlantiques ont évalué le
coût des mesures d'accompagnement des 35 heures - TGAP, CSB et future taxation
sur la consommation intermédiaire d'énergie - entre 50 millions et 80 millions
de francs. Ce sont donc 50 millions à 80 millions de francs de compétitivité et
de résultat qui risquent encore de s'envoler des Pyrénées-Atlantiques, pour un
retour de 10 % à peine au titre de la baisse des charges.
Cela ne peut que fragiliser encore plus certaines activités déjà lourdement
handicapées par l'éloignement des marchés, les grands marchés étant à 10 000
kilomètres des Pyrénées-Atlantiques. Cela ne peut qu'accentuer les distorsions
avec nos voisins ibériques et anéantir nos positions que la seule proximité ne
permettra plus de tenir.
Cela ne pourra que contrarier à terme, dans ce département, toute politique de
développement et de reconversion vers les industries chimiques.
C'est bien le paradoxe d'une mesure qui se veut sociale, paradoxe que je
tenais à souligner.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet
article soulève un certain nombre de problèmes : d'abord, dans le détail des
dispositions qu'il compte mettre en oeuvre, et ensuite, dans la confusion des
genres qu'il introduit, et à laquelle notre Haute Assemblée doit et va sûrement
s'opposer.
S'agissant du détail des dispositions, les amendements que j'ai deposés
tendent, d'abord, à remédier aux excès des mesures visant à élargir l'assiette
de la TGAP. Par exemple, sur les lessives et autres produits, je formulerai
deux remarques qui illustrent bien la conduite du Gouvernement.
La première : la TGAP devait avoir pour objet de dissuader les comportements
polluants, comme l'a d'ailleurs rappelé tout à l'heure Mme Dieulangard, en
insistant sur l'effet de la pollution sur la santé. Par conséquent et en l'état
actuel des connaissances scientifiques, il serait, à l'évidence, souhaitable
d'encourager les efforts des producteurs pour mettre sur le marché des produits
moins polluants, en donnant pour les lessives, par exemple, une prime fiscale
aux produits dont la teneur en phosphates est inférieure à 5 % de leur poids.
Taxer à 470 francs la tonne ces produits, c'est manifestement exagéré. De plus,
c'est faire fi des efforts de recherche entrepris par les industriels pour
produire des lessives moins nocives pour notre environnement ; c'est même les
décourager.
Ma seconde remarque est d'ordre plus général. Ne nous leurrons pas : imposer
les industriels sur ces produits revient à augmenter le prix à la consommation
de ces produits de première nécessité que sont les lessives et autres
adoucissants. Une fois de plus, ce sont les ménages qui seront pénalisés par
cette taxe, et au premier chef, bien sûr, ceux qui ont de faibles revenus.
En ce qui concerne les produits phytosanitaires, je partage l'avis de mon
collègue Auguste Cazalet. Je tiens tout de même à insister sur le fait que la
taxation au poids de tous les produits, qui varie seulement en fonction du
degré de toxicité des principes actifs entrant dans leur composition, ne prend
pas en compte le cas des produits génériques dont la valeur est moindre, et qui
seront donc proportionnellement pénalisés de façon beaucoup plus importante. Il
serait manifestement plus judicieux et plus juste de proposer un taux
d'imposition en fonction du prix de vente.
Mes amendements visent, d'autre part, à procéder à des améliorations du
dispositif existant afin de l'adapter à l'objectif de 2002, à savoir la fin de
la mise en décharge, sauf pour les déchets ultimes. C'est pourquoi je suggère
trois dispositions.
D'abord, je propose la suppression de la surtaxe de 50 % appliquée aux déchets
provenant de l'extérieur du périmètre du plan départemental d'élimination, afin
de favoriser les solutions de meilleure proximité et de rationalisation des
installations d'élimination des déchets, ce qui peut se faire parfois dans un
cadre interdépartemental, comme le préconise la circulaire du ministre de
l'environnement d'avril 1999.
Ensuite, je propose l'exonération des déchets ultimes dans la mesure où il
faut encourager les installations qui ont fait l'effort de se conformer aux
injonctions de la loi de 1992.
Enfin, en contrepartie de cette exonération, je propose l'élargissement de
l'assiette de la taxe aux décharges internes des entreprises. En effet, par le
biais de ces décharges internes où les déchets ne sont pas traités, près de 1,5
million de tonnes de déchets échappent à tout traitement, et par conséquent
échapperaient à toute imposition. Pourtant, cet avantage fiscal n'est nullement
justifié au regard de la protection de l'environnement ni même par rapport aux
objectifs de la loi de 1992. Avec le système qui nous est proposé, les
entreprises n'auront plus intérêt à faire traiter leurs déchets car cela les
obligerait à acquitter la TGAP, alors que si elles se contentent de les déposer
dans leurs décharges internes elles en seront exonérées.
Or, vous le savez tous, mes chers collègues, ces décharges internes posent
souvent un véritable problème car elles ne sont pas soumises aux normes de
sécurité draconiennes des lieux de stockage des déchets ultimes et ne font pas
l'objet des mêmes contrôles. Elles font donc peser de grands dangers sur
l'environnement, et nombreux sont les sites gravement pollués découverts
plusieurs années après le départ de certaines entreprises.
J'attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que si l'amendement
n° 66 a une portée indépendante de notre débat sur le projet de loi de
financement de la sécurité sociale, c'est normal car la TGAP n'aurait jamais dû
figurer dans ce texte.
Comme il me faudra sûrement le retirer pour soutenir l'amendement de
suppression de la commission, j'ai bien l'intention de saisir une occasion plus
favorable pour le déposer à nouveau.
En effet, je tiens à affirmer que j'adhère pleinement au choix de la
commission qui souhaite supprimer purement et simplement cet article 4.
La volonté du Gouvernement de faire financer les allègements de charges par la
politique de l'environnement va totalement à l'encontre de nos convictions.
Comme mes collègues de la majorité sénatoriale, je m'oppose avec vigueur au
transfert du produit de la TGAP pour financer la sécurité sociale. Il ne faut
pas mélanger les genres.
Parler de double dividende ne change rien au fond : ce terme technocratique et
confus a été choisi dans le seul but de faire prendre des vessies pour des
lanternes et de faire passer la politique sociale pour de la politique
environnementale !
Je vous rappelle, mes chers collègues, que la TGAP n'est rien d'autre que la
récente refonte avec budgétisation d'un ensemble de taxes parafiscales.
Auparavant directement versées au budget de l'ADEME, leur produit servait à
aider les collectivités locales à financer des installations de
retraitement.
M. le président.
Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Dominique Braye.
Aurais-je déjà épuisé les cinq minutes de temps de parole qui me sont
imparties, monsieur le président ?
M. le président.
Vous en êtes à six minutes trente !
M. Dominique Braye.
J'ai presque fini. Mais le sujet est intéressant et mérite explication...
Cette refonte et l'élargissement de l'assiette ont déjà permis une
substantielle augmentation de son rendement qui passera pour l'an 2000 de 1,9
milliard de francs à 3,2 milliards de francs.
On pourrait, à la rigueur, accepter cette progression si elle était suivie
d'un accroissement proportionnel des moyens mis à la disposition de la
politique de l'environnement. Or, la progression du budget de l'ADEME se limite
à 7 %. C'est dire qu'elle est sans aucune mesure avec l'explosion du produit de
la TGAP qui atteint, je vous le rappelle, 68 %.
Nous sommes donc autorisés à dire que la pompeuse théorie du double dividende
n'est qu'un tour de passe-passe destiné à masquer un gigantesque détournement
de la fiscalité écologique aux dépens de l'amélioration de l'environnement, ce
qui est tout de même, vous en conviendrez, un comble pour un gouvernement qui
compte parmi ses membres la tête de file des Verts !
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Braye.
M. Dominique Braye.
J'ai presque terminé, monsieur le président.
En effet, le premier dividende disparaît totalement quand la TGAP devient un
impôt de rendement
bis
destiné à financer par n'importe quel moyen la
dispendieuse loi sur les 35 heures. Avec vous, la TGAP ne signifie plus « taxe
générale sur les activités polluantes » mais « très grosses arnaque
politicienne ! »
(Rires sur les travées du groupe du RPR. - Protestations
sur les travées socialistes.)
M. Dominique Braye.
De plus, je tiens à souligner que le transfert financier...
M. le président.
Je vais devoir vous interrompre, monsieur Braye.
M. Dominique Braye.
Il me suffirait d'une minute, monsieur le président. Sinon, j'achèverai ma
démonstration dans une explication de vote...
M. Guy Fischer.
Si c'est pour entendre ça, vous devriez l'interrompre, monsieur le président
!
M. le président.
Vous en êtes déjà à huit minutes, monsieur Braye.
M. Dominique Braye.
Mes chers collègues, je terminerai donc mon intervention au moment de mon
explication de vote.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Guy Fischer.
Non ! On a déjà tout entendu !
M. le président.
La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet
article propose des orientations nouvelles sur ce que l'on appelle aujourd'hui
la fiscalité écologique.
Il est porteur de changements majeurs. Tout d'abord, l'assiette de la TGAP est
élargie à de nouveaux produits et la taxe prend en compte la toxicité de
certains produits chimiques courants. Ensuite, et on l'oublie souvent, quelques
taux sont modifiés. Je pense, en particulier, à l'augmentation de la taxe sur
les huiles.
Le recyclage des huiles usagées est encore trop décevant et, si les
industriels rejettent cette formule jugée anti-économique, c'est avec une
lenteur particulière qu'ils se hâtent à trouver d'autres formules plus
adaptées. C'est pourquoi les collectivités trouvent de plus en plus d'huiles
usagées dans les poubelles et les caniveaux.
S'il n'est pas certain que la majoration prévue de 200 à 250 francs réglera le
problème de façon définitive, du moins pourra-t-elle accélérer sa solution.
Pour plusieurs autres déchets, nous devrions nous inspirer de ce système ; je
pense notamment aux pneus usagés, véritable épine écologique pour les élus
locaux.
Il me semble néanmoins que, malgré les avancées de l'article 4, quelques
pistes n'ont pas été suffisamment creusées, notamment celle des décharges.
La question que je me pose est de savoir comment articuler la fiscalité et la
réglementation que nous connaissons tous. Je veux parler de l'échéance du 1er
juillet 2002, date à compter de laquelle la mise en décharge cessera d'être un
mode de traitement courant des déchets bruts.
Il me semble que deux pistes au moins méritent d'être évoquées.
La première piste concerne la modulation. L'article maintient un tarif de mise
en décharge à 60 francs la tonne. Il me semble que cette imposition unique ne
prend pas en compte la diversité des situations. Certaines décharges sont
équipées de simples torchères, d'autres de véritables dispositifs de
valorisation des biogaz. Quant aux dernières, qui n'ont rien du tout, elles ne
sont guère différentes des dépotoirs d'autrefois. Ces décharges sont
aujourd'hui taxées au même tarif. Je pense qu'il serait bon de prévoir, à
l'avenir, une fiscalité modulée selon la qualité des installations.
La seconde piste concerne les décharges internes des entreprises. Je parlerais
plutôt de décharges qualifiées d'« internes » tant que l'entreprise a une
activité et qui deviennent des décharges publiques quand l'activité cesse. En
effet, nous connaissons tous des situations qui contraignent les collectivités
locales à gérer des décharges abandonnées et des sites « orphelins » après
fermeture de l'entreprise.
La décharge, qui n'est en réalité privée que pendant un court moment, devient
collective pendant tout le reste de la longue vie des déchets. Ces décharges
internes sont aujourd'hui exonérées. Or, il me semble que cette différence de
traitement entre, d'une part, décharge réglementée et taxée et, d'autre part,
décharge libre et non taxée, est dangereuse. Les industriels peuvent en effet
être tentés de contourner la réglementation et de recourir davantage aux
décharges internes pour éviter les contraintes, les frais de transport, le coût
du service et les impôts. Je vois là un vrai problème.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Oui, mais cela n'a rien
à voir avec le financement de la sécurité sociale !
M. Gérard Miquel.
Il faut, bien sûr, éviter de taxer les déchets incompressibles issus de la
première transformation des minerais ; mais des solutions techniques
existent.
Je n'ai cependant pas déposé d'amendement à ce propos. Je néglige le fait que
la commission a proposé de supprimer l'article en discussion, ce qui rendrait
sans objet tous les autres amendements, fussent-ils parfaitement pertinents. Je
pense surtout que ces différents sujets méritent que soit engagée une réflexion
commune, associant notamment les élus locaux. Nous devons parfaitement calibrer
un texte en commençant par un travail de définition. Une taxation différenciée
suppose de qualifier les techniques correspondantes. De même, la taxation des
décharges internes suppose de qualifier précisément un déchet interne et de
pouvoir le quantifier. Un travail de préparation s'impose, et toute initiative
précipitée serait maladroite.
Voilà trois semaines, à l'Assemblée nationale, M. le secrétaire d'Etat au
budget s'est prononcé en faveur d'une concertation sur ce point. Peut-on en
savoir un peu plus ? Madame la secrétaire d'Etat, que pensez-vous des deux
orientations que je viens d'évoquer ?
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Monsieur le
président, je souhaite répondre aux orateurs qui viennent de s'exprimer.
Loin d'être une nouveauté annoncée aujourd'hui, le financement des allégements
de charges par l'écotaxe est une idée ancienne. Elle figurait d'ailleurs dans
la plate-forme du candidat Lionel Jospin aux élections présidentielles de
1995.
De surcroît, cette idée est partagée au niveau européen puisque cette réforme,
menée en Allemagne en 1999 et en Italie en 1998, doit être étendue l'année
prochaine à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas. C'est dire que la France n'est
pas isolée dans cette formule de financement des charges sociales par une
écotaxe.
Concernant la taxation, le Gouvernement est effectivement conscient des
difficultés que pourrait entraîner cette contribution pour les entreprises
grosses consommatrices d'énergie. Un Livre blanc a été publié, précisément pour
recueillir l'avis des acteurs économiques. La question est posée et le débat
reste entier. Le dispositif n'entrera définitivement en vigueur qu'en 2001.
Nous sommes donc dans une phase d'observation et de concertation avec les
acteurs économiques.
Monsieur Miquel, vous nous invitez à aller plus loin dans la fiscalité
écologique. Ce débat a déjà été ouvert à l'Assemblée nationale par une députée
fortement intéressée par cette question.
M. Sautter a fait une réponse d'ouverture en indiquant que, pour mieux adapter
cette taxe écologique aux activités que vous décrivez, il comptait étudier
l'incidence et la diversité des taxes sur les décharges à l'occasion de
l'élaboration des mesures qui vont être décidées dans le courant de l'année
prochaine.
M. le président.
Je suis saisi de treize amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. Descours, au nom de la commission.
L'amendement n° 76 est déposé par MM. Lorrain et Fréville et les membres du
groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 92 est présenté par M. Louis Boyer et les membres du groupe
des Républicains et Indépendants.
L'amendement n° 103 est déposé par M. Adnot.
Tous quatre tendent à supprimer l'article 4.
Par amendement n° 68, MM. Braye et Hérisson proposent d'insérer, après le 1°
du A du I de l'article 4, deux alinéas ainsi rédigés :
« ... Le deuxième alinéa (1) du I est ainsi rédigé :
« 1. Tout exploitant d'une installation de stockage de déchets ménagers et
assimilés non exclusivement utilisée pour les déchets que l'entreprise produit
ou tout exploitant d'une installation d'élimination de déchets industriels
spéciaux par incinération, co-incinération, stockage, traitement
physico-chimique ou biologique. »
Par amendement n° 73, MM. Braye et Hérisson proposent d'insérer, après le 1°
du A du I de l'article 4, deux alinéas ainsi rédigés :
« ... Le quatrième alinéa (3) du I de l'article 266
sexies
du code des
douanes est ainsi modifié :
« 3. Aux déchets ultimes issus des prestations de collecte, de tri et de
traitement portant sur des matériaux ayant fait l'objet d'un contrat entre la
collectivité locale ou son groupement et un organisme agréé au titre de la loi
du 15 juillet 1975 et destinés à une installation de stockage des déchets
ménagers et assimilés exploitée conformément à la réglementation en vigueur et
inscrite au Plan d'élimination des déchets ménagers et assimilés. »
Par amendement n° 95, M. About et les membres du groupe des Républicains et
Indépendants proposent :
I. - De supprimer le quatrième alinéa (7) du 2° du A du I de l'article 4.
II. - Dans le troisième alinéa (4) du 3° du A du I de l'article 4, de
supprimer les mots : « aux produits antiparasitaires à usage agricole et aux
produits assimilés mentionnés respectivement aux 5, 6 et 7 du I du présent
article ».
III. - De supprimer le quatrième alinéa (7) du B du I de l'article 4.
IV. - De supprimer le dernier alinéa (7) du C du I de l'article 4.
V. - Dans le second alinéa (3) du E du I de l'article 4, de supprimer les mots
: « les produits antiparasitaires à usage agricole et les produits assimilés
mentionnés respectivement aux 5, 6 et 7 du I de l'article 266
sexies
».
Par amendement n° 69, MM. Braye et Hérisson proposent de remplacer le premier
alinéa du B du I de l'article 4 par trois alinéas ainsi rédigés :
« 1° Le deuxième alinéa (1) de l'article 266
septies
du code des
douanes est ainsi rédigé :
« 1. Le stockage définitif des déchets par les exploitants mentionnés au 1 du
I de l'article 266
sexies
; ».
« 2° Le même article est complété par un 5, un 6, un 7 et un 8 ainsi rédigés :
».
Par amendement n° 70, MM. Braye et Hérisson proposent de remplacer le premier
alinéa du C du I de l'article 4 par trois alinéas ainsi rédigés :
« 1° Le deuxième alinéa (1) de l'article 266
octies
du code des douanes
est ainsi rédigé :
« 1. Le poids des déchets stockés par les exploitants mentionnés au 1 du I de
l'article 266
sexies
; ».
« 2° Le même article est complété par un 5, un 6 et un 7 ainsi rédigés : ».
Par amendement n° 72, MM. Braye et Hérisson proposent de supprimer la deuxième
ligne (Déchets réceptionnés dans une installation de stockage de déchets
ménagers et assimilés de provenance extérieure au périmètre du plan
d'élimination des déchets, élaborée en vertu de l'article 10-2 de la loi n°
75-633 du 15 juillet 1975, dans lequel est située l'installation de stockage)
du tableau figurant au 1° du D du I de l'article 4.
Par amendement n° 67, M. Braye propose :
A. - A la quatorzième ligne (« - dont la teneur en phosphates est inférieure à
5 % du poids ») du tableau du 1° du D du I de l'article 4, de remplacer la
quotité : « 470 » par la quotité : « 200 ».
B. - A la quinzième ligne (« - dont la teneur en phosphates est comprise entre
5 % et 30 % du poids ») du tableau du 1° du D du I de l'article 4, de remplacer
la quotité : « 520 » par la quotité : « 250 ».
C. - A la seizième ligne (« - dont la teneur en phosphates est supérieure à 30
% du poids ») du tableau du 1° du D du I de l'article 4, de remplacer la
quotité : « 570 » par la quotité : « 350 ».
Par amendement n° 66, M. Braye propose, à la quatorzième ligne (« dont la
teneur en phosphates est inférieure à 5 % du poids ») du tableau du 1° du D du
I de l'article 4, de remplacer la quotité : « 470 » par la quotité : « 150
».
Par amendement n° 71, M. Braye propose :
A. A la dix-huitième ligne (Catégorie 1) du tableau figurant au 1°) du D du I
de l'article 4, de remplacer la quotité : « 0 » par la quotité : « 150 ».
B. A la dix-neuvième ligne (Catégorie 2) du même tableau, de remplacer la
quotité : « 2 500 » par la quotité : « 500 ».
C. A la vingtième ligne (Catégorie 3) du même tableau, de remplacer la quotité
: « 4 000 » par la quotité : « 1 000 ».
D. A la vingt et unième ligne (Catégorie 4) du même tableau, de remplacer la
quotité : « 5 500 » par la quotité : « 1 500 ».
E. A la vingt-deuxième ligne (Catégorie 5) du même tableau, de remplacer la
quotité : « 7 000 » par la quotité : « 3 000 ».
F. A la vingt-troisième ligne (Catégorie 6) du même tableau, de remplacer la
quotité : « 9 000 » par la quotité : « 4 000 ».
G. A la vingt-quatrième ligne (Catégorie 7) du même tableau, de remplacer la
quotité : « 11 000 » par la quotité : « 5 000 ».
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Imaginons que des citoyens du Lot, des Yvelines ou des
Pyrénées-Atlantiques écoutent nos débats et nous entendent parler de pneus ou
d'huiles usagés, de taxation sur les déchets, alors qu'ils croyaient assister à
la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale...
Répondez-moi sincèrement : ne nous prendraient-ils pas pour des fous ? C'est
pourtant ce que nous sommes en train de faire. Pour ma part, je proposerai la
suppression de cet article.
Madame le secrétaire d'Etat, c'est la première fois que nous nous
affrontons...
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Le mot est un peu
fort !
(Sourires.)
M. Charles Descours,
rapporteur.
... vous au Gouvernement, moi comme rapporteur. Mais, lorsque
vous étiez député, nous avons collaboré en commission mixte paritaire. Je vous
ai suivie sur certaines questions, notamment sur celle des malentendants.
Vous nous avez répondu que, dans d'autres pays, comme l'Allemagne, la
fiscalité écologique pouvait financer des allégements de charges sociales.
Certes, mais, le plus souvent, la sécurité sociale est financée par la
fiscalité. C'est ainsi qu'en Espagne, le taux de financement de la sécurité
sociale par la fiscalité est de 100 %. Dès lors que ce principe est admis, peu
importe l'origine des taxes.
Il se trouve qu'en France, ce sont principalement les cotisations qui
financent la sécurité sociale. Ainsi le veut notre tradition sociale depuis
1945. Peut-être même est-elle plus ancienne.
Ces traditions sont bien différentes.
En ce début de soirée, je vais m'autoriser un mauvais jeu de mots, dont vous
voudrez bien m'excuser. Puisque, pour financer les 35 heures, le Gouvernement
inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale une taxe sur les
activités polluantes, permettez-moi de relever cette évidence : il pollue le
débat !
(Sourires.)
Je vais vous proposer la suppression de cet article et vous en donner les
raisons.
Lorsque la TGAP a été créée, l'année dernière, il s'agissait, dans l'esprit du
Gouvernement, « d'assurer une plus grande cohérence dans le financement de sa
politique de protection de l'environnement ».
Cette mesure devait permettre « au ministère de l'environnement d'assurer
pleinement son rôle dans la politique environnementale en France ». Pourquoi
pas ?
Le rendement de la TGAP devrait être de 1,9 milliard de francs en 1999. Il
serait de 3,25 milliards de francs en 2000.
Le Gouvernement a annoncé récemment, le 20 mai 1999, que la TGAP serait
élargie à la prévention des pollutions globales, au premier chef celles qui
conduisent à l'émission de gaz à effet de serre. En effet, la France s'est
engagée, dans le cadre du protocole de Kyoto adopté en décembre 1997, à
stabiliser en 2010 ses émissions au niveau atteint en 1990 - je crois
sincèrement que bien lui en a pris - alors que les Etats-Unis ont accepté de
payer pour polluer, attitude scandaleuse pour un grand pays.
Mais le Gouvernement a décidé que l'extension aux consommations intermédiaires
d'énergie de la TGAP ne rentrerait en application qu'à compter du 1er janvier
2001. Un Livre blanc a été diffusé, présentant les orientations retenues par le
Gouvernement.
Entre le vote de la loi de finances pour 1999 et l'examen du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000, le financement des 35 heures est
devenu une priorité pour le Gouvernement. Abracadabra... abracadabran...
Décidant donc d'affecter cette TGAP à ce financement, le Gouvernement s'est
forgé une nouvelle argumentation. Moi, j'adore ce vocabulaire : « le double
dividende » ! Pourquoi pas le double-six... ou le double je ne sais pas quoi
!
Je cite : « Instrument d'incitation et de prévention, la TGAP, élargie aux
consommations intermédiaires d'énergie, permet, aux côtés du premier dividende
qu'elle procure... »... Ici, je ne comprends pas s'il s'agit d'un terme
boursier.
M. Guy Fischer.
En matière de dividendes, c'est pourtant vous les spécialistes !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je consulterai le groupe communiste républicain et citoyen
sur le sujet.
M. Guy Fischer.
Vous vous trompez d'interlocuteur !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je termine la citation : « ... d'allouer les ressources
dégagées au service d'un second dividende, le dividende pour l'emploi. » Et
voilà pourquoi votre fille est muette !
Je ne suis pas un spécialiste de la fiscalité écologique. Je ne souhaite donc
pas me prononcer sur la pertinence et sur l'opportunité de la hausse de la
TGAP, de l'extension de son assiette et de ses quotités. J'avoue mon
incompétence à ce sujet - je me demande d'ailleurs si je peux être rapporteur
d'un texte qui contient des éléments que je ne connais guère, même si je
connais la sécurité sociale - et je ne suis donc pas à même de discuter de
l'opportunité de fixer à 96 %, 97 % ou 98 % le pourcentage d'oxyde de silicium
nécessaire aux granulats « sur produit sec » pour échapper à la TGAP !
Toutefois, j'ai pu observer les réactions des producteurs de lessives -
réactions relayées par nos collègues à l'instant - nous expliquant que les
lessives phosphatées sont moins nocives pour l'environnement que les lessives
non phosphatées, ainsi que les réactions du monde agricole, qui regrette que
cette taxe sur les produits phytosanitaires réduise à néant les efforts engagés
sur une démarche volontaire pour limiter les pollutions agricoles.
Comment se fait-il que, avant de rédiger cet article, le Gouvernement ne se
soit pas concerté mieux avec ces deux acteurs importants du monde économique
que sont les producteurs de lessives et les agriculteurs ? Je crois que
l'hostilité dont ils nous ont fait part et qui a été relayée à l'instant par
certains d'entre nous est tout à fait fondée.
Le rendement attendu dès 2001 pour la TGAP serait de 12,5 milliards de francs,
dites-vous. La France, qui assurera la présidence de l'Union européenne à
partir du 1er juillet 2000 et qui sera chargée de mettre au point une directive
européenne sur ce sujet, préjuge donc, en affectant la TGAP à un fonds
d'allègement des charges sociales, le destin d'une telle taxe :
a
priori
, une écotaxe devrait normalement financer des opérations de
dépollution ou des programmes de reconversion industrielle. Mais je suis sans
doute trop simpliste, trop primaire, pas assez subtil !
Vouloir affecter, comme l'a dit notre collègue Dominique Braye, une recette
pérenne de 12,5 milliards de francs quelle que soit la pollution réellement
constatée, cela me semble étrange. Si la pollution diminue, il apparaît logique
que le montant de la TGAP diminue également ! Pourquoi en faire un impôt de
rendement ?
Je pense aussi que, au bout du compte, cette taxe sera à la charge des
ménages. Mais je ne désespère pas que, l'année prochaine, au moment de la
discussion de la loi de finances, ou nous explique qu'il faut revoir le taux de
TVA sur les lessives pour compenser la TGAP incluse dans le projet de loi de
financement de la sécurité sociale de 2000...
Voilà pourquoi la commission des affaires sociales vous propose, mes chers
collègues, un amendement de suppression.
Cela étant, cette suppression n'ira vraisemblablement pas jusqu'au bout, et je
tiens à dire que les remarques qui ont été présentées tout à l'heure par nos
collègues sur toutes les travées de cet hémicycle posent un vrai problème sur
le fond de cet article une fois qu'il aura été voté après l'échec de la
commission mixte paritaire : ce qu'ont dit Auguste Cazalet, Dominique Braye et
Gérard Miquel montre bien que, à travers un amendement de circonstance, nous
allons vers des complications extraordinaires. Comment concilier cette taxe
écologique, par exemple, avec les dispositions de la loi sur les déchets et
avec les mesures qu'ont prises de nombreux gouvernements successifs ?
Je vous demande donc, mes chers collègues, de voter cet amendement de
suppression.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour présenter l'amendement n° 76.
M. Yves Fréville.
J'ai très peu de choses à ajouter à ce qu'a dit M. le rapporteur. Je souhaite
toutefois réagir aux propos de Mme le secrétaire d'Etat.
Vous dites, madame le secrétaire d'Etat, que l'écotaxe faisait partie du
programme de M. Jospin. J'en déduis que ce programme était assez imprécis !
(Mme le secrétaire d'Etat proteste.)
A Mme Aubry, qui nous reproche souvent de présenter des propositions
imprécises, je tiens à rappeler que, voilà un an, lorsque la majorité de
l'Assemblée nationale a adopté la TGAP, c'était pour supprimer l'affectation
d'un impôt créé pour financer l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie, afin d'obéir au principe « pollueur-payeur ». On a donc supprimé
l'affectation, et toute la majorité d'applaudir... Mais voilà qu'un an après,
virage complet sur l'aile, on rétablit ladite affectation pour la sécurité
sociale.
Il n'y a donc aucune logique écologique derrière cette proposition, mais
uniquement - et M. Descours l'a excellemment montré - une logique de
produit.
L'exemple des lessives est particulièrement net ! Permettez-moi d'y revenir.
Il paraît que cette mesure rapportera 500 millions de francs. Mais, à l'examen
du barème, on constate deux choses.
Premièrement, quand il n'y a pas de phosphate, on ne devrait logiquement pas
payer d'impôt, cela paraît évident : je n'ai pas beaucoup de connaissances en
chimie, mais je crois quand même que ce sont les phosphates qui sont les agents
pollueurs. Ou alors il faudra nous expliquer que, un peu de phosphate, c'est
bien ! Toutefois, même en l'absence de phosphate, on va taxer quand même.
Deuxièmement, j'ai lu les débats de l'Assemblée nationale et j'ai constaté que
M. Bateux avait déposé un amendement très intéressant, en nous expliquant que
non seulement on devrait taxer en l'absence de phosphate mais que, lorsqu'il y
en avait beaucoup, on devrait diminuer le montant de la taxe. La différence,
qui était ainsi de 260 francs à l'origine, a été réduite à 100 francs.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
C'est l'amendement
Fabius !
M. Yves Fréville.
J'ignore ce qui a amené M. Bateux à déposer son amendement ! Et si, en
Normandie, il existe des cas particuliers, cela démontre que la loi n'était pas
aussi générale qu'elle le semblait. Or quand une loi n'est pas générale,
qu'elle n'a pas d'incidence sur la pollution et qu'on ne voit pas pourquoi elle
est affectée à ceci plutôt qu'à cela, sa suppression - défendue par M. le
rapporteur - s'impose.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Louis Boyer, pour défendre l'amendement n° 92.
M. Louis Boyer.
Je retire cet amendement au profit de l'amendement n° 6 de la commission,
monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 92 est retiré.
La parole est est à M. Adnot, pour défendre l'amendement n° 103.
M. Philippe Adnot.
La présentation de cet amendement va me donner l'occasion d'interpeller Mme le
secrétaire d'Etat, puisque je n'ai pas obtenu de réponse à la question que j'ai
posée hier concernant l'amortissement de la dette de la CADES.
Je m'interroge : est-ce un oubli ? Ce serait fâcheux ! Est-ce du mépris pour
les parlementaires, qui ne devraient pas connaître ces choses ? Ce serait
fâcheux ! Est-ce de votre part une méconnaissance du sujet qui vous empêche de
répondre ? Ce serait également fâcheux ! J'attends donc votre réponse.
En ce qui concerne la TGAP, vous ne m'avez pas non plus répondu.
Vous n'arrêtez pas de dire que cet impôt est neutre. Ce n'est pas vrai ! Vous
avez été amenée à le créer parce que vous avez imposé une charge aux
entreprises avec les 35 heures. Vous avez prévu d'accorder des allégements pour
compenser cette charge, ce qui est neutre, mais vous avez créé pour cela un
nouvel impôt ! Il y a donc deux charges pour un allégement, ce qui n'est pas
neutre.
La vérité est que vous avez créé un prélèvement supplémentaire, nous le
répéterons aussi souvent que vous essaierez de mentir aux Français en leur
faisant croire que vous n'avez pas créé ce prélèvement.
J'ajoute que ce prélèvement ne sera pas neutre parce que ce ne seront pas ceux
qui vont le payer qui vont en retirer le bénéfice. Comme je vous l'ai expliqué
hier soir, ceux qui vont payer appartiennent aux secteurs primaire et
secondaire qui sont les secteurs les plus fragiles dans la compétition
internationale. Or ceux qui vont en bénéficier sont les secteurs qui
enregistrent des créations d'emploi. Ce n'est donc absolument pas neutre !
La raison pour laquelle je défends cet amendement de suppression est qu'il
faut rétablir cette vérité. Vous faites un prélèvement supplémentaire, nous
n'en voulons pas. Vous détournez l'utilisation de ces fonds à partir d'une
caution morale qui vous sert d'alibi, vous prétendez taxer afin de réduire la
pollution, mais ce n'est pas vrai.
Notre collègue M. Fréville vient de nous rappeler que l'amendement Bateux a
été voté à l'Assemblée nationale. C'est un formidable aveu ! Parce que, dans la
circonscription de M. Fabius, il y a une usine qui produit des lessives
contenant du phosphate, l'Assemblée nationale a adopté un amendement pour taxer
moins de telles lessives et taxer plus celles qui n'en contiennent pas. C'est
bien l'aveu que la volonté est non de protéger l'environnement, mais de dégager
des recettes supplémentaires !
C'est d'autant plus grave au moment où nous connaissons, en France, un
événement d'une gravité exceptionnelle : l'argent prélevé dans le domaine de
l'environnement ne devrait-il pas servir à venir en aide aux trois départements
qui ont été gravement touchés par les récentes inondations ?
Ce que vous faites là est très grave, et je le regrette. C'est pourquoi je
m'associe à la commission pour vous demander la suppression de l'article 4.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Braye, pour présenter les amendements n°s 68 et 73.
M. Dominique Braye.
Comme l'a dit M. le rapporteur, nous ne sommes pas ici pour parler de
problèmes de pollution, mais pour examiner le projet de loi de financement de
la sécurité sociale.
Certes, nous devrons y revenir, et je m'associe tout à fait à ce qu'a dit
notre collègue Gérard Miquel au sujet des décharges internes, objet des
amendements n°s 68 et 73.
En la matière, le pilotage à vue du Gouvernement et ses explications
a
posteriori
ne sont pas convaincants.
Je tiens à souligner à cet égard combien le transfert financier entre les
comptes de l'Etat et ceux de la sécurité sociale ont été l'occasion de
manoeuvres pour le moins approximatives, sinon peu orthodoxes par rapport au
droit budgétaire, notre collègue M. Fréville l'a souligné plusieurs fois déjà
ce soir. En effet, nous le savons bien, la disposition d'affectation des
crédits de la TGAP a été ajoutée à la sauvette, dans des conditions que nous
connaissons tous, lors de la première lecture du projet de loi de finances par
l'Assemblée nationale.
De plus, en raison du calendrier législatif, ces crédits, non encore examinés
comme recettes par le Sénat dans le projet de loi de finances, sont néanmoins
examinés comme dépenses dans le projet de loi de financement de la sécurité
sociale ... les dépenses destinées à financer un système déjà voté dans le
cadre du projet de loi portant réduction du temps de travail.
Les allégements de charges ont donc été votés avant d'être financés !
Tout cela me semble un montage bien peu régulier, bien peu orthodoxe et,
surtout, bien peu démocratique. En tout cas, je tiens à le dire ce soir, cette
procédure est en totale contradiction avec le discours que Mme Aubry nous tient
depuis deux jours sur le respect des règles qui régissent le fonctionnement de
notre pays.
Mes chers collègues, je ne vous l'apprend pas, nous sommes dans un Etat de
droit, ce qui signifie que des textes, comme la Constitution ou l'ordonnance de
1959, doivent être respectés.
Le Parlement - en tout cas le Sénat - est extrêmement soucieux du respect des
textes qui régissent notre vie politique. Aussi attend-il du Gouvernement qu'il
les respecte lui aussi. Mme le ministre nous a dit le faire à plusieurs
reprises ; malheureusement, nous sommes obligés de constater que les actes ne
sont pas en accord avec les discours.
Telles sont les raisons, mes chers collègues, qui nous amèneront à soutenir la
position de la commission des affaires sociales en supprimant l'article 4.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
L'amendement n° 95 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Braye, pour défendre l'amendement n° 69.
M. Dominique Braye.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 69 est retiré.
Je vous redonne la parole, monsieur Braye, pour défendre l'amendement n°
70.
M. Dominique Braye.
Je retire également cet amendement : nous aurons l'occasion de discuter à
nouveau de cette question lors de l'examen d'un prochain projet de loi
concernant l'environnement.
Et je vous indique d'ores et déjà, monsieur le président, que je retire aussi
les amendements n°s 72, 67, 66 et 71.
M. le président.
Les amendements n°s 70, 72, 67, 66 et 71 sont retirés.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 68 et 73 ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
M. Braye vient de retirer un certain nombre d'amendements et
je l'en remercie.
Le Sénat va, je l'espère, supprimer cet article « ridicule », pour reprendre
le titre d'un film. Mais l'Assemblée nationale, à l'issue de la navette, va
sans doute le rétablir. Néanmoins, les réserves qui viennent d'être émises par
nos collègues, y compris d'ordre constitutionnel - bien sûr, nous saisirons le
Conseil constitutionnel - subsisteront. Nous prenons date et nous affirmons
solennellement que cet article, s'il est rétabli, entraînera, dans son
application, au sein de tel ou tel secteur de l'industrie ou dans les décharges
internes des entreprises, d'énormes problèmes. Ses conséquences sont
aujourd'hui imprévisibles, et il faudra sans aucun doute modifier ce texte par
le biais d'un DMOS, ou je ne sais quel DDOF. Ce texte n'est qu'un texte de
circonstance, dont le seul objet, je le répète, est de financer les 35
heures.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 6, 76, 103,
et sur les amendements n°s 68 et 73 ?
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Je ne vais sans doute surprendre personne : le
Gouvernement est défavorable à ces amendements, et je m'en explique.
Au risque de vous faire affront, monsieur le rapporteur, je vous croyais plus
malin que vous ne tentez de me le faire croire ce soir.
Chaque fois, vous répétez qu'il s'agit de financer les 35 heures. Or, vous
savez très bien qu'il s'agit de financer non pas les 35 heures mais les
allégements de charges.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Oui, oui...
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Pourtant, Mme Aubry l'a répété un certain nombre de
fois, cela répond à vos voeux maintes fois exprimés. Mais maintenant que c'est
nous qui le proposons, vous feignez de ne pas comprendre, et vous tentez de
vous en tirer par une pirouette et des phrases pseudo-magiques. Je ne suis pas
dupe.
Avec l'article 4, le Gouvernement a décidé de poursuivre dans la voie d'une
fiscalité écologique fondée sur le principe pollueur-payeur. Les lessives
polluent, les granulats minéraux naturels polluent, les produits
antiparasitaires à usage agricole polluent. C'est la raison pour laquelle nous
appliquons une taxe sur ces produits polluants, et même l'habitant du fin fond
de la Lozère peut très bien le comprendre.
M. Michel Mercier.
Ce n'est pas gentil pour les habitants de la Lozère !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
C'est M. le rapporteur qui a pris cet exemple, pas moi
!
M. Charles Descours,
rapporteur.
J'ai pris pour exemple les départements des sénateurs qui
sont intervenus dans le débat !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Vous prétendez que cette taxe mettra les industriels
en difficulté. La concertation a été menée avec les producteurs de lessives,
avec les agriculteurs, avec le ministère de l'environnement. Tout a été fait
dans la plus grande transparence.
Votre argumentation vous honore, mais elle est politique.
M. Alain Vasselle.
Vous, vous n'en avez pas !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Si, nous en avons une ! Nous sommes constants dans nos
choix. Il s'agit bien d'une réforme globalement neutre et qui conduit même à
une baisse des prélèvements sur les entreprises en 2000.
Evidemment, globalement la baisse des charges représente 7,5 milliards de
francs et les financements 5,8 milliards de francs. Le différentiel est donc de
1,7 milliards de francs. En conséquence, on ne peut pas dire que les
entreprises seront globalement pénalisées ; ce point fait d'ailleurs l'objet
d'une petite polémique au sein de la majorité plurielle.
Certes, on peut continuer d'argumenter sur cette question, mais le
Gouvernement est défavorable à la suppression de cet article. Nous continuerons
avec détermination à financer la réforme des cotisations patronales de sécurité
sociale.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendement identiques n°s 6, 76 et 103.
M. Dominique Braye.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Madame la secrétaire d'Etat, il y a une chose que je ne peux pas laisser dire,
c'est que vous auriez fixé la taxe en fonction du pouvoir polluant des
éléments.
Notre collègue Philippe Adnot vient de démontrer, s'agissant des lessives, que
l'examen des amendements qui ont été déposés à l'Assemblée nationale mettait en
évidence que des produits non toxiques étaient taxés et que l'Assemblée
nationale avait même proposé de taxer plus fortement certains produits reconnus
comme étant moins toxiques que d'autres.
Par ailleurs, M. Miquel vient d'évoquer, comme je l'avais fait avant lui, les
décharges internes, qui seront exemptées de la taxe alors que tout le monde
reconnaît qu'elles sont des sources de pollution très importantes. Pour de
multiples raisons, vous n'avez pas voulu les taxer. Je crois qu'il s'agit ici
d'un pilotage à vue. Il a fallu trouver non pas le financement de l'abaissement
des charges sociales, mais bien le commencement du début du financement des 110
milliards de francs nécessaires à la mise en oeuvre de la loi sur les 35
heures. Je rejoins ici M. Descours pour dire qu'il s'agit bien de financer
cette loi.
J'ajouterai que, en ce qui concerne la non-imposition des décharges internes,
nous instaurons une différence de traitement entre des pollueurs qui n'est
nullement justifiée et sur laquelle il faudra s'expliquer.
En effet, nous allons créer par la loi deux catégories de pollueurs, certains
étant taxés et d'autres non. Le Gouvernement devra s'en expliquer, car, comme
vous le savez, il existe des textes relatifs à l'égalité de traitement des
contribuables. Mais c'est là un autre débat !
Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai la suppression de l'article
4.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Madame le secrétaire d'Etat, il est vraiment difficile d'assumer une promesse
électorale avec un minimum de cohérence !
Vous avez tenté de répondre à l'argumentation développée par les membres de la
majorité sénatoriale. Je constate que, sur l'article 2, des orateurs étaient
intervenus dans un sens à peu près identique à celui qui vient d'être suivi par
nos collègues, mais d'une manière plus spécifique, sur certains aspects
techniques des dispositions législatives tendant à la taxation d'un certain
nombre d'activités et de produits.
Qui ne dit mot consent. Mme Aubry s'est contentée d'émettre un avis
défavorable sur l'amendement défendu par M. Descours et tendant à supprimer
l'article 2.
Or, nous avons affirmé tout à l'heure, notamment MM. Adnot et Richert, qu'en
définitive les dispositions du présent projet de loi traduisent un manque de
lisibilité du dispositif prévu par le Gouvernement pour assurer le financement
des 35 heures, mais également, pour partie, celui du fonds de réserve pour les
retraites.
Cette première remarque a été faite ; elle n'a pas été relevée par le
Gouvernement : il l'admet donc.
Seconde remarque : ces dispositions vont se traduire par un alourdissement des
charges, mêmes si vous tentez de faire valoir et de monter en épingle le fait
que la TGAP va permettre un allégement des charges des entreprises.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Voilà !
M. Alain Vasselle.
Certes, mais ce dispositif s'accompagne d'un certain nombre d'autres charges
et de taxes, comme l'a relevé notre collègue Yves Fréville, dont la TGAP. De
plus, il a pour conséquence majeure, madame le secrétaire d'Etat - et je
termine mon argumentation sur ce point - de faire supporter à terme aux
Françaises et aux Français - il faut qu'ils le sachent, et je ne sais pas si
nous aurons la chance d'être relayés par les médias pour faire valoir les
conséquences qui résulteront de ces dispositions législatives - un surcoût pour
le traitement des déchets, voire pour le prix de l'eau.
Pour le traitement des déchets, c'est une certitude, car le produit de la taxe
qui permettait d'alimenter le budget de l'ADEME et qui va être remplacée par la
TGAP a eu pour conséquence, en 1999, de réduire le montant des fonds de
concours de l'Etat au profit de l'ADEME. Cet organisme a été contraint de
diminuer ses taux de concours au profit des collectivités locales en ce qui
concerne toutes les opérations d'investissement relatives au traitement des
déchets, que ce soit par incinération ou par la collecte sélective.
Or, que je sache, Mme Voynet est intervenue à plusieurs reprises, sur les
ondes ou dans les médias, pour faire valoir qu'elle mettait en avant la
collecte sélective et qu'elle encourageait avec force les collectivités à
s'engager dans cette voie. Mais elle n'a pas les moyens de sa politique. La
preuve en est que les moyens dont elle aurait pu disposer, vous les détournez
de leur finalité pour les consacrer à une autre politique, pour tenir une
promesse électorale dont vous n'aviez pas mesuré le coût financier.
Il faut savoir également - M. André Boyer l'a rappelé tout à l'heure - que
nous allons vers une impasse de 15 à 20 milliards de francs. En 2000, il nous
faudra trouver 20 milliards de francs pour assurer l'équilibre du financement
des 35 heures.
Force est de constater que ce gouvernement navigue à vue. Il augmente les
charges, contrairement à ce qu'il dit. Ce sont les Françaises et les Français
qui paieront à travers les services que mettent en place les collectivités
locales. Ce n'est pas le Gouvernement qui sera en première ligne. Les maires,
ainsi que les conseils généraux et les conseils régionaux qui aident les
maires, seront les victimes de cette politique. Ils supporteront l'impopularité
des dispositions que vous aurez fait adopter par votre majorité à l'Assemblé
nationale.
Vous, vous êtes tranquille. Certes, la France et les Français se feront une
opinion sur la politique gouvernementale mais, en tout état de cause, la
politique que vous entendez conduire entrera en application grâce au soutien de
votre majorité à l'Assemblée nationale. Je le regrette, mais je n'en mettrai
que plus d'ardeur pour apporter mon soutien à l'amendement de suppression de
notre rapporteur, M. Descours.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?..
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 6, 76 et 103, repoussés par le
Gouvernement.
Mme Nicole Borvo.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4 est supprimé et les amendements n°s 68 et 73 n'ont
plus d'objet.
Article additionnel après l'article 4
M. le président.
Par amendement n° 74, MM. Braye et Hérisson proposent d'insérer, après
l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa, il est inséré, dans l'article 22-1 de la loi n°
75-633 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux,
un alinéa ainsi rédigé :
« De même sont exonérés de la surtaxe de 50 % visée au deuxième alinéa les
déchets ménagers et assimilés provenant de l'extérieur du périmètre du plan
d'élimination des déchets en vigueur, dès lors que leur acheminement est
effectué par route pour les départements limitrophes au centre de traitement et
par voie ferrée ou par voie fluviale dans les autres cas. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
La limitation au périmètre du plan départemental d'élimination des déchets, du
stockage et du traitement des déchets ménagers et assimilé n'est manifestement
pas compatible avec le principe issu du droit communautaire relatif à
l'exigence de la meilleure proximité pour l'élimination de ces déchets.
Je tiens à attirer l'attention de mes collègues sur le fait que tous les plans
départementaux qui sont fondés actuellement sur le principe de proximité
risquent, plus ou moins rapidement, d'être mis en péril par un jugement du
Conseil d'Etat qui devrait être rendu dans les jours prochains.
Afin de permettre une organisation plus souple de l'élimination
interdépartementale des déchets, il serait souhaitable de ne pas pérenniser une
surtaxe conçue en un autre temps et qui entrave les initiatives locales
destinées à rationaliser les lieux de stockage au-delà de la stricte limite
départementale. La rationalisation des équipements locaux et la réduction des
pollutions atmosphériques qui lui sont liées doivent être encouragées par les
pouvoirs publics.
C'est pourquoi, naturellement, je vous propose de supprimer cette surtaxe.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Mon cher collègue, j'ignore si la limitation au périmètre du
plan départemental d'élimination des déchets est compatible ou non avec le
principe issu du droit communautaire, mais ce que je sais c'est qu'une telle
préoccupation est fort éloignée du projet de loi de financement de la sécurité
sociale. En conséquence, je vous demande de retirer votre amendement.
M. le président.
Monsieur Braye, maintenez-vous votre amendement n° 74 ?
M. Dominique Braye.
Je ne peux pas résister à la demande de M. le rapporteur et je retire cet
amendement.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je vous remercie.
M. le président.
L'amendement n° 74 est retiré.
Article 4 bis
M. le président.
« Art. 4
bis
. - Les jeunes agriculteurs bénéficient d'une exonération
partielle des cotisations techniques et complémentaires d'assurance maladie,
invalidité et maternité, de prestations familiales et d'assurance vieillesse
agricole dont ils sont redevables pour eux-mêmes et au titre de leur
exploitation. Cette exonération est applicable pendant les trois années civiles
qui suivent celle au cours de laquelle ils bénéficient des prestations
d'assurance maladie du régime des personnes non salariées agricoles et
remplissent, en qualité de chef d'exploitation, des conditions, définies par
décret, relatives à la taille économique maximale de leur exploitation. Pour
bénéficier de l'exonération, ils doivent être âgés de dix-huit ans au moins et
de quarante ans au plus à la date de leur affiliation au régime de protection
sociale des personnes non salariées agricoles ; un décret détermine les
dérogations qui peuvent être apportées à ces limites d'âge.
« Les cotisations visées à l'alinéa précédent sont réduites de 65 % au titre
de la première année civile au cours de laquelle est accordée l'exonération, de
55 % au titre de la seconde et de 35 % au titre de la troisième. Le plafond de
ces exonérations et le montant minimal de cotisations dont les jeunes
agriculteurs sont redevables sont déterminés par décret. » -
(Adopté.)
Article additionnel avant l'article 5
M. le président.
Par amendement n° 96, M. Arnaud propose d'insérer, avant l'article 5, un
article additionnel ainsi rédigé :
« A l'article 1613
bis
du code général des impôts, le premier alinéa
est ainsi rédigé :
« Les boissons constituées par un mélange préalable de boissons passibles d'un
droit mentionné aux articles 402
bis
, 403, 438, 520 A (
a
du I) du
code général des impôts ou de boissons ayant un titre alcoolmétrique n'excédant
pas 1,2 % vol. et de boissons alcooliques passibles d'un droit mentionné aux
articles 402
bis
, 403, 438, 520 A (
a
du I) du code général des
impôts, lorsqu'elles sont conditionnées pour la vente au détail en récipients
de moins de soixante centilitres, font l'objet d'une taxe perçue au profit de
la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés dès lors
que le mélange ainsi obtenu titre plus de 1,2 % vol. »
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
Au travers de cet article additonnel, qui me paraît bien placé avant l'article
5, je souhaite seulement attirer l'attention du Gouvernement et la vôtre, mes
chers collègues, sur une situation pour le moins paradoxale, voire
contradictoire au regard des objectifs qui ont été définis par le Gouvernement
et par le Parlement dès 1996, confirmés en 1997 et en 1998, et qui visaient à
lutter contre l'alcoolisme des jeunes en taxant les produits hypocrites que
nous avions convenance à appeler les « premix ».
Le décret d'application comporte une ambiguïté et conduit à une situation
paradoxale. Ainsi, une bière mélangée à de la limonade est surtaxée au titre
des « premix » alors qu'une bière mélangée à un whisky, c'est-à-dire une bière
dite « boostée », n'est pas taxée.
Nous avions cherché à surtaxer les « premix » parce qu'il s'agit de produits
de consommation courante pour les jeunes mais « dopés » au niveau de
l'alcool.
De la même façon, un spiritueux à 40° ou 42°, s'il est mélangé à un jus de
fruit, ce qui aura pour effet de le ramener à un taux de 20° ou 25°, sera
surtaxé.
Je pense qu'il y a une erreur dans la rédaction du décret. J'attire votre
attention, madame la secrétaire d'Etat, sur le fait que l'application de ce
décret engendre des effets pervers et des situations pour le moins curieuses.
Il serait donc souhaitable d'en revenir au texte et à l'esprit de la loi votée
en 1996, confirmée en 1997 et en 1998. Nous sommes aujourd'hui en 1999,
peut-être pouvons-nous apporter cette correction !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Dès que sont apparus sur le marché les « premix », la
commission des affaires sociales du Sénat s'est opposée à ces produits, qui
aboutissaient à favoriser l'alcoolisme des jeunes. Par leur aspect plus
engageant qu'une boisson alcoolisée, on encourageait en effet les jeunes à
consommer de l'alcool, alors qu'ils auraient pu éprouver une certaine
réticence.
Nous avons donc toujours approuvé la surtaxation des « premix ».
Il n'en demeure pas moins que l'amendement de notre collègue M. Arnaud pose un
vrai problème.
Si ce qu'il dit est exact - le Gouvernement vous le dira - je suis pour que
l'on fixe la taxe au même niveau. Je suis aussi favorable à une taxation à un
niveau élevé et pour le mélange d'un alcool et d'un jus de fruit, et pour le
mélange de deux alcools.
Je considère que ces alcools hypocrites favorisent l'alcoolisme et que nous
devons les dénoncer. Le jeunes ont suffisamment de problèmes pour qu'il ne soit
pas besoin d'ajouter celui-là.
J'aimerais connaître l'avis du Gouvernement sur ce texte extrêmement
pointu.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Je partage tout à fait votre sentiment sur la taxation
des « premix », monsieur le rapporteur. Ce sont des boissons qui ont été
fabriquées pour rendre attractive la consommation d'alcool, sous un air un peu
plus ludique.
Il s'agit d'un mélange d'alcool et de boisson non alcoolisée, donc de deux
produits vraiment différents, et la taxation a été fixée en conséquence.
En revanche, M. Arnaud envisage le cas de mélanges de deux types d'alcool, qui
sont aujoud'hui taxés de manière différente car ils appartiennent à une
catégorie différente.
Une taxation particulière sur des mélanges entraînerait une complication ; un
tel dispositif nécessite donc un approfondissement, une étude particulière, de
façon à éviter des contentieux - certains sont déjà en cours au niveau
communautaire - et il convient d'en attendre l'issue.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Face à la complexité du système, je serais tenté de m'en
remettre à la sagesse du Sénat.
Toutefois, à titre personnel, je voterai cet amendement. Si la majorité
sénatoriale me suit, je n'y verrai pas d'inconvénient car cela obligera le
Gouvernement à regarder de près, pendant la navette, ce qui se passe, y compris
en matière de droit communautaire.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 96.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Je voterai cet amendement car je n'ai pas compris, madame le secrétaire
d'Etat, les explications que vous venez de donner.
Vous faites référence à une directive européenne que M. Arnaud n'a pas
mentionnée. Mais, surtout, vous dites que le Gouvernement envisage d'attendre
le résultat des actions contentieuses en cours.
Voilà qui ne me convient pas du tout. Nous sommes là pour légiférer. Le
législateur n'a pas à « courir » après la jurisprudence. Le fait que des
actions contentieuses soient engagées ou non n'a, pour moi, aucun
importance.
La cause est juste, vous l'avez reconnu vous-même. Dans ces conditions, je ne
vois pas ce qui s'oppose à l'adoption de l'amendement n° 96.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 96, repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Le groupe socialiste s'abstient.
Mme Nicole Borvo.
Le groupe communiste républicain et citoyen également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, avant l'article 5.
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - I. - L'article L. 139-1 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 139-1
. - L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale
centralise la part du produit des contributions attribuée aux régimes
obligatoires d'assurance maladie en application du IV de l'article L. 136-8 et
la répartit entre les régimes obligatoires d'assurance maladie.
« Chaque régime d'assurance maladie, à l'exception de la Caisse nationale de
l'assurance maladie des travailleurs salariés, reçoit un montant égal à celui
perçu en 1998 au titre de la répartition tant de ces contributions que des
droits de consommation sur les alcools corrigé de l'impact sur douze mois de la
revalorisation du taux de la contribution sociale généralisée intervenue au 1er
janvier 1998. Ce montant est réactualisé au 1er janvier de chaque année en
fonction de l'évolution de l'assiette de la contribution visée à l'article L.
136-1 entre les deux derniers exercices clos.
« Ces montants et les modalités de leur versement sont fixés par arrêté
conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget après
consultation d'une commission de répartition de la contribution sociale
généralisée, composée notamment de représentants des régimes concernés et
présidée par le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité
sociale.
« La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés reçoit
le solde de la contribution sociale généralisée après la répartition prévue au
deuxième alinéa du présent article.
« La commission de répartition dresse, au terme d'un délai de cinq ans, un
bilan de l'application des présentes dispositions qu'elle présente au Parlement
et propose, le cas échéant, une modification des modalités de calcul des
montants versés à chaque régime. »
« II. - A l'avant-dernier alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité
sociale, le taux : "5 %" est remplacé par le taux : "45 %".
« III. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° L'article L. 139-2 est abrogé ;
« 2° A l'article L. 241-1, les mots : "et une fraction du produit des droits
visés à l'article L. 139-1, à concurrence du montant correspondant à
l'application des dispositions de l'article L. 139-2" sont supprimés ;
« 3° Au dernier alinéa de l'article L. 612-1, les mots : "et une fraction du
produit des droits visés à l'article L. 139-1, à concurrence du montant
correspondant à l'application des dispositions de l'article L. 139-2" sont
supprimés ;
« 4° Au dernier alinéa de l'article L. 711-2, les mots : "et une fraction du
produit des droits visés à l'article L. 139-1, à concurrence du montant
correspondant à l'application des dispositions de l'article L. 139-2" sont
supprimés.
« IV. - Le code rural est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa de l'article 1031, les mots : "et une fraction du
produit des droits visés à l'article L. 139-1 du même code, à concurrence du
montant correspondant à l'application des dispositions de l'article L. 139-2 du
même code" sont supprimés ;
« 2° A l'article L. 1106-6-3, les mots : "et une fraction du produit des
droits visés à l'article L. 139-1 du même code, à concurrence du montant
correspondant à l'application des dispositions de l'article L. 139-2 de ce
code" sont supprimés.
« V. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter de la
répartition effectuée au titre de l'année 2000.
« Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 139-1 du
code de la sécurité sociale, le montant des contributions dues au titre de
l'exercice 2000 est déterminé par la double application aux montants fixés pour
1998 du taux d'évolution de l'assiette annuelle de la contribution entre 1998
et 1997. »
Par amendement n° 7, M. Descours, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - L'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 139-2. - L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale
centralise la part des contributions attribuée aux régimes obligatoires
d'assurance maladie en application du IV de l'article L. 136-8 et la répartit
selon la clef suivante :
« - Caisse nationale d'assurance maladie des travaileurs salariés : 87,000 %
;
« - Régime des salariés agricoles : 2,290 % ;
« - Caisse nationale militaire de sécurité sociale : 1,540 % ;
« - Régime des exploitants agricoles : 1,818 % ;
« - Caisse autonome d'assurance maladie des professions indépendantes : 5,370
% ;
« Autres régimes d'assurance maladie : 1,982 %.
« Les montants des contributions attribuées aux régimes d'assurance maladie
sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et
du budget après consultation d'une commission de répartition de la contribution
sociale généralisée, composée notamment de représentants de régimes concernés
et présidée par le secrétaire général de la commission des comptes de la
sécurité sociale.
« La commission de répartition dresse chaque année un bilan de l'application
des présentes dispositions qu'elle transmet à la commission des comptes de la
sécurité sociale.
« II. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter de la
répartition effectuée au titre de l'année 2000. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
L'article 5 est un article à 250 milliards de francs ! Je
vais donc être conduit à exposer assez longuement l'amendement.
Cet article porte sur la répartition de la CSG maladie et des droits sur les
alcools entre les différents régimes d'assurance maladie. Le système mis en
place en 1997, lors du premier « basculement » CSG-cotisations d'assurance
maladie, n'a pas « supporté », si je puis m'exprimer ainsi, le deuxième «
basculement » et nous n'avons fait que dénoncer cette complexité depuis le
début de la discussion.
La première opération de répartition s'effectue au regard des pertes de
cotisations estimées, à partir d'une base 1996 qui devient de plus en plus
hypothétique et lointaine.
La deuxième opération de répartition consiste à faire bénéficier la CNAMTS, la
Caisse nationale de l'assurance maladie des travaileurs salariés, et la CANAM,
la Caisse nationale d'assurance maladie - pour les « non-non » - du « solde »
de CSG.
Mais tout cela se fait en fonction des déficits comptables estimés. Par
exemple, comme la CNAMTS était censée être en équilibre en 1999, le solde de
CSG qui lui a été affecté n'était pas suffisant. En conséquence, pour 2 000,
elle reçoit environ 3 milliards de francs de plus de CSG, au titre de la
régularisation de l'exercice 1999, tandis que la CANAM bénéficie de 3 milliards
de francs de moins. Mais, en contrepartie, la CANAM perçoit un montant de C3S
beaucoup plus élevé que l'an dernier.
La Cour des comptes - ce n'est pas n'importe qui - avait regretté ces règles
effroyablement complexes en 1997 et en 1998. Je les avais moi-même relevées
dans mon rapport d'information fait au nom de la commission des affaires
sociales du mois de juin dernier sur les lois de financement de la sécurité
sociale.
En conséquence, je me félicite de la présence de cet article dans cette loi de
financement. Nos intentions ne sont pas « homicides » comme avec les
amendements sur les articles 2, 3 et 4. Je propose en effet que le Parlement
adopte une clef de répartition de la CSG entre les régimes d'assurance maladie
fixée en pourcentage. Cela me paraît plus clair et plus transparent.
Le système que propose le Gouvernement repose sur une répartition en montants,
sur une base 1998 réévaluée et réestimée pour 2000.
Les régimes d'assurance maladie sont « sûrs » de recevoir leur CSG, la CNAMTS
prenant les risques d'un moindre rendement de CSG que prévu. En contrepartie,
elle bénéficie de meilleures rentrées de CSG.
Le système du Gouvernement, à mon sens, a pour principal inconvénient de
laisser à la seule CNAMTS la fraction de droits sur les alcools affectée à
l'assurance maladie. Lors de la première substitution, en 1997, comme les
pertes de cotisations étaient supérieures au rendement attendu de la CSG, ces
droits sur les alcools ont été « ajoutés ».
Désormais, comme la CSG est « montée en puissance », ces deux recettes doivent
être séparées, pour des raisons de transparence et de lisibilité.
En ce qui concerne la CSG, il peut apparaître légitime qu'un montant important
soit affecté à la CNAMTS, après compensation aux différents régimes des pertes
de cotisations, en raison notamment des charges spécifiques grevant le régime
d'assurance maladie le plus important. Il suffit de penser au financement de la
couverture maladie universelle.
Mais, pour les droits sur les alcools, la justification de cette imposition
aux régimes d'assurance maladie est bien, théoriquement, de compenser pour
chaque régime les ravages, en termes de santé publique, de l'alcoolisme.
Je vous propose, mes chers collègues, de conserver la répartition actuelle des
droits sur les alcools - 40 % pour les régimes d'assurance maladie, 5 % pour
les CNAMTS, 55 % pour le FSV, qui est certes très complexe, mais résulte d'un
choix du Gouvernement opéré lors de la discussion de la loi portant création de
la couverture maladie universelle.
Le système que je propose aboutit à peu près aux mêmes résultats que le
système du Gouvernement. Si la prévision de CSG pour 2000 s'avère exacte, ce
mécanisme sera favorable à la CNAMTS de 800 millions de francs, la CNAMTS
bénéficiant, en effet, de la C3S.
Je ne considère pas avoir trouvé un système « parfait ». Je pense que cette
question extraordinairement technique cache des enjeux financiers
considérables. Il me semble important de ne pas adopter l'article 5 en l'état
sans avoir pris le temps de la réflexion.
Je ne sais si j'ai simpifié le texte du Gouvernement, mais, vous le
comprendrez, le financement de la sécurité sociale est déjà à ce point complexe
que, même quand on essaie de le simplifier, il reste encore beaucoup à
faire.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Vous avez fait un développement assez long de votre
proposition, monsieur le rapporteur, que vous nous présentez comme une mesure
de simplification.
Actuellement, la CSG maladie, ainsi qu'une partie des droits sur les alcools,
pour un montant de 4,8 milliards de francs, est répartie entre les différents
régimes d'assurance maladie, selon les règles suivantes : chaque régime reçoit
l'équivalent des recettes de cotisations qu'il aurait eu sans la substitution
CSG - cotisations 1997 et 1998. Ces recettes fictives doivent être recalculées
chaque année, ce qui est de plus en plus difficile. Le solde va à la CNAMTS ou
éventuellement à la CANAM, en fonction du déficit prévu, puis on régularise
l'année suivante. La régularisation peut être importante : c'est le cas
notamment en 2000 pour 1999, puisqu'elle s'élève à 3 milliards de francs.
Ce qui est proposé pour 2000, c'est que chaque régime reçoive, chaque année,
ce qu'il a reçu en 1998, majoré de la croissance des recettes de la CSG depuis
cette date. Le calcul est donc plus simple. Ensuite, le solde va à la CNAMTS
ainsi que toute la fraction de droits sur les alcools. C'est transparent ! Les
calculs sont beaucoup plus simples. Il n'y a plus de régularisation ni de
répartition entre caisses des droits sur les alcools.
Votre proposition, quant à elle, consiste, d'une part, à répartir la CSG
maladie au moyen d'une clé en pourcentage, les plus petits régimes ayant un
pourcentage global à se partager et, d'autre part, à laisser inchangée la
répartition actuelle de la fraction de droits sur les alcools répartie entre
les régimes d'assurance maladie.
Probablement parce que vous avez eu des difficultés de rédaction, ce deuxième
aspect est inapplicable, puisque les règles actuelles vont être entièrement
abrogées par l'amendement. Cette maladresse mise à part, votre proposition est
plus compliquée que la nôtre, puisqu'elle crée deux systèmes de répartition
avec deux règles différentes : un pour la CSG, un pour la fraction droits sur
les alcools. Votre système est plus compliqué que le système actuel que vous
prétendez pourtant simplifier.
Par ailleurs, il n'est pas exact que la complexité actuelle des droits sur les
alcools résulte de la loi portant création de la couverture maladie
universelle. Elle provient de la première opération de substitution
CSG-cotisations décidée par le gouvernement Juppé. Comme la substitution
proprement dite était déficitaire, on avait ajouté une fraction des droits sur
les alcools à répartir entre les régimes maladie. La loi portant création de la
couverture maladie universelle a simplement eu pour effet le transfert d'une
partie des droits sur les alcools du FSV à la seule CNAM sans répartition entre
les caisses d'assurance maladie.
Votre proposition aboutirait, selon vous, à donner 800 millions de francs
supplémentaires à la CNAM par rapport à la proposition que nous faisons. C'est
peut-être exact, mais cela provient seulement du fait que vous avez fixé le
pourcentage attribué à la CNAM pour parvenir à ce résultat.
Au contraire, notre proposition simplifie le système, tout en donnant à chaque
régime une somme aussi proche que possible de celle qu'il aurait eue avec les
règles actuelles, afin de ne léser personne. Je demande donc le rejet de
l'amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?... Je mets aux voix n° 7, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 5 est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 5
M. le président.
Par amendement n° 97, M. Arnaud propose d'insérer, après l'article 5, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le code général des impôts est ainsi modifié :
« I. - Au 1° du I de l'article 403, le tarif "5 474 francs" est remplacé par
le tarif "5 450 francs".
« Au 2° du I du même article, le tarif "9 510 francs" est remplacé par le
tarif "9 467 francs".
« II. - Au dernier alinéa du
a)
du I de l'article 520 A, le tarif "17
francs" est remplacé par le tarif "14,50 francs".
« III. - Au 2° de l'article 438, le tarif "22 francs" est remplacé par le
tarif "29,60 francs".
« Au 3° du même article, le tarif "7,60 francs" est remplacé par le tarif "10
francs". »
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
Je sais bien qu'en défendant cet amendement je risque de revenir sur des
débats que nous avons déjà eus, mais, comme je sais que l'Assemblée nationale
rétablira le financement des 35 heures par un prélèvement sur les droits
acquittés sur les alcools, je le défends tout de même.
J'étais déjà opposé à l'augmentation de la taxe sur les alcools en 1996, 1997
et 1998, tout simplement parce que je souhaitais que l'assiette soit élargie à
l'ensemble des produits alcoolisés. Il s'agissait alors, nous disait-on, de
lutter contre l'alcoolisme et, par ailleurs, d'alimenter le fonds vieillesse
mais seuls les spiritueux et les bières étaient appelés à contribuer.
Aujourd'hui, il s'agit de financer les 35 heures. Cette mesure nous est
présentée - je ne la commenterai pas - comme une avancée sociale. C'est donc
une amélioration des conditions de vie des travailleurs. Or, pour financer
cette amélioration du confort de ceux qui travaillent, qui sollicite-t-on, par
une taxe sur les produits qu'elles fabriquent ? Des régions qui, aujourd'hui,
sont en situation de crise dramatique. C'est comme si, madame la secrétaire
d'Etat, en pleine période de crise des mines de charbon affectant une grande
région française, on taxait davantage le charbon pour financer une semaine
supplémentaire de congés payés à ceux qui, ailleurs sur le territoire, ont la
chance de travailler.
Dans ces conditions, comprenez que je considère comme tout à fait inacceptable
de financer la loi sur les 35 heures par une taxe sur les alcools. Entendez
notre cri de détresse ! Je me demande vraiment comment le Gouvernement pourra
expliquer à des travailleurs d'une région sinistrée qu'ils seront appelés à
financer un progrès social dont ils ne bénéficieront pas.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Nous connaissons très bien les difficultés économiques que
connaît votre département, monsieur Arnaud.
L'amendement que vous avez déposé a pour objet de modifier le subtil équilibre
trouvé depuis 1996 entre la taxation des alcools forts et celle du vin.
J'ignore si cet équilibre est juste, mais je rappelle que, depuis le vote de la
loi Evin, intervenu en 1991, des tentatives ont été faites, y compris par M.
Evin lui-même lorsqu'il n'était plus ministre, pour l'affiner. Ce que je sais,
c'est que la position de la commission des affaires sociales du Sénat est
constante depuis 1996 : il convient, à notre sens, de ne pas toucher cet
équilibre, afin d'éviter de ranimer les guerres de religion liées à cette
question.
Nos collègues représentant les départements sinistrés par les récentes
intempéries ne sont pas présents ce soir dans cet hémicycle, mais leur région
est grande productrice de vin et ils s'étaient farouchement élevés contre la
loi Evin, ainsi que contre les tentatives ultérieures de faire évoluer la
taxation du vin.
Voilà pourquoi nous sommes défavorables à votre amendement, monsieur Arnaud,
tout en étant conscients des difficultés que rencontre votre département.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
L'argumentation soutenue par M. le rapporteur est
très raisonnable. Le Gouvernement n'envisage pas non plus de modifier la
fiscalité sur les alcools sans concertation préalable avec les professionnels
concernés. L'adoption de votre amendement, monsieur Arnaud, nous mettrait en
difficulté vis-à-vis d'eux. Nous ne souhaitons pas toucher à l'équilibre qui
existe aujourd'hui. Aussi, le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à
l'amendement n° 97.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 97.
M. Philippe Arnaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
Tout en comprenant parfaitement la position de la commission ainsi que celle
du Gouvernement, je maintiens mon amendement, en raison du détournement
d'affectation de ressources qui est opéré et que le Gouvernement aura quelque
difficulté à expliquer en certaines régions viticoles.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Pour les raisons que M. le rapporteur vient d'exprimer, je ne pourrai pas
voter cet amendement, tout en comprenant, et pour cause ! puisque la Lorraine
s'est trouvée, elle aussi, dans une situation dramatique voilà quelque temps -
situation à laquelle Philippe Arnaud a fait indirectement allusion - le drame
que vivent les viticulteurs dans son département.
Je profite de l'occasion, madame le secrétaire d'Etat, pour vous demander où
en est le rapport d'évaluation sur la loi Evin. En effet, la loi Evin a été
l'un des premiers textes sur lequel le Parlement et le Gouvernement de l'époque
ont souhaité qu'une évaluation soit faite.
Que je sache, la date prévue pour le dépôt de ce rapport doit être dépassée
depuis au moins deux ou trois ans. Chaque fois que l'on discute de textes
concernant l'alcool et l'alcoolisme, on est amené à faire référence à la loi
Evin. Or, aujourd'hui, ni le Parlement, ni le Gouvernement ne sont éclairés sur
les conditions d'application de cette loi et sur les conséquences, que j'espère
favorables, de sa mise en oeuvre.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 97, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5 bis
M. le président.
« Art. 5
bis
. - I. - L'article L. 651-9 du code de la sécurité sociale
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces majorations de retard peuvent faire l'objet d'une remise totale ou
partielle décidée par le directeur de l'organisme visé à l'article L. 651-4.
Ces décisions peuvent faire l'objet d'un recours devant les tribunaux des
affaires de sécurité sociale qui statuent en dernier ressort. »
« II. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux demandes de
remises de majorations postérieures au 1er janvier 2000.
« III. - Les modalités d'application du présent article sont fixées par
décret. » -
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 5 bis
M. le président.
Par amendement n° 84, le Gouvernement propose, après l'article 5
bis
,
d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Sans préjudice du précédent alinéa, les cotisations mentionnées au premier
alinéa dues au titre de la première année civile d'activité sont calculées à
titre provisionnel sur une base forfaitaire qui ne peut excéder 18 fois la
valeur de la base mensuelle de calcul des prestations familiales en vigueur au
1er octobre de l'année précédente ; celles dues au titre de la deuxième année
civile d'activité sont calculées à titre provisionnel sur une base forfaitaire
qui ne peut excéder 27 fois cette valeur.
« II. - L'article L. 612-4 du code de la sécurité sociale est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, le montant de la
cotisation annuelle assise sur le revenu forfaitaire visé à l'article L. 131-6
ne peut excéder, au titre de la première année civile d'activité, celui qui
serait dû sur 18 fois la valeur de la base mensuelle de calcul des prestations
familiales en vigueur au 1er octobre de l'année précédente et, au titre de la
deuxième année civile d'activité, celui qui serait dû sur 27 fois cette
valeur.
« III. - Les dispositions du I et du II sont applicables aux cotisations dues
par les travailleurs non salariés des professions non agricoles débutant leur
activité à compter du 1er juillet 2000. »
La parole est à Mme le minsitre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Cet amendement s'inscrit dans
la volonté du Gouvernement de développer la création d'entreprises, donc la
création d'emplois.
Notre pays, nous le savons, grâce à son potentiel de croissance et à sa
main-d'oeuvre qualifiée, a de bonnes perspectives dans ce domaine.
Les petites entreprises, qui sont d'ailleurs souvent le fruit de projets
personnels, constituent un atout pour l'emploi ; ce sont elles qui,
aujourd'hui, « portent » le développement de nouveaux services dont la société
a besoin, le développement de nouvelles technologies et assurent une croissance
riche en emplois.
Depuis deux ans, le Gouvernement s'efforce de favoriser la création
d'entreprises.
Sur le plan financier, dès l'élaboration de la loi sur les emplois-jeunes et
de la loi sur la lutte contre les exclusions, nous avons décidé de créer un
système d'avances remboursables.
Dans la loi de finances et la loi sur l'innovation, nous avons décidé de
favoriser l'émergence des projets les plus risqués.
Nous avons également fait des progrès en matière de simplification
administrative, même s'il en reste encore à faire, en instituant un régime
fiscal pour les micro-entreprises pouvant être adapté aux créateurs, ou encore
en quérant une simplification des formalités, permettant la création
d'entreprises en vingt-quatre heures.
La mission menée par Eric Besson au nom de la commission des finances de
l'Assemblée nationale a ouvert des pistes importantes en matière de financement
et d'accompagnement des créateurs, de simplification des dispositifs.
Les assises régionales de la création d'entreprises qui ont été tenues par Mme
Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux PME, organisées dans trois régions,
ont aussi montré des voies à suivre.
De tous ces travaux, il ressort notamment qu'il nous faut encore simplifier et
alléger les cotisations sociales des créateurs et diminuer les risques qu'ils
encourent.
La création d'une entreprise est en effet un processus exigeant, qui suppose à
la fois de l'imagination, de la volonté, du professionnalisme. Il implique que
le créateur affronte une diversité de sujets. Le rôle des pouvoirs publics, de
l'ensemble des institutions qui travaillent en amont au moment de la création,
de la banque aux réseaux consulaires, doit être de faciliter et d'accompagner
ce processus.
Mme Marylise Lebranchu coordonne actuellement la préparation des assises
nationales de la création d'entreprises, à l'occasion desquelles d'autres
aspects ne manqueront pas d'être évoqués.
Dans l'immédiat, cet amendement apporte une pierre supplémentaire à l'édifice
concernant la très grande majorité des créateurs d'entreprise, puisqu'il
modifie les cotisations sociales du créateur, qu'il soit artisan ou commerçant,
qu'il démarre sous statut indépendant, en tant que gérant majoritaire d'une
SARL ou en tant qu'associé unique.
Actuellement, les revenus du début de l'activité n'étant pas encore connus,
les cotisations des travailleurs indépendants sont acquittées dès le premier
mois - c'est d'ailleurs un problème - sur une base forfaitaire qui varie selon
les catégories de cotisations. Lorsque le revenu est connu - en général deux
ans après - les cotisations sont régularisées. En attendant, la charge de
trésorerie est souvent lourde pour le créateur, surtout si le revenu tiré de
l'activité est faible dans un premier temps.
Pour les cotisations d'assurance maladie, le revenu forfaitaire retenu pour
les deux premières années est égal à 69 456 francs.
Pour les cotisations d'assurance vieillesse, le revenu forfaitaire retenu est
égal à 57 880 francs la première année et à 86 820 francs la seconde année.
Pour les cotisations d'allocations familiales, la CSG et la CRDS, le revenu
forfaitaire est égal à 38 370 francs pour les deux premières années.
On voit bien la complexité du problème.
Nous proposons une harmonisation à la baisse des assiettes forfaitaires du
début d'activité et un allégement des cotisations sociales dues au titre des
deux premiers exercices.
Le texte pose donc le principe d'un revenu forfaitaire maximum de 38 370
francs, soit dix-huit fois la base mensuelle des allocations familiales pour la
première année civile d'activité, et de 57 550 francs pour la deuxième année,
pour toutes les cotisations et contributions.
Par ailleurs, le Gouvernement modifiera les dispositions réglementaires
relatives au recouvrement de ces diverses cotisations afin que le créateur
d'entreprise n'ait aucune cotisation à payer avant le quatrième mois
d'activité.
Notre souci est que l'entrepreneur puisse enregistrer ses premières entrées de
trésorerie avant les appels de cotisations.
La baisse de cotisations sera ainsi de 30 % pendant la première année. Cette
baisse se prolongera la seconde année. Elle sera d'au moins 15 % pour un
artisan percevant le revenu moyen. La mesure sera applicable aux créateurs dont
l'activité démarrera après le 30 juin 2000. Les dispositions d'application pour
chacune de ces cotisations seront prises par décret.
Finalement, l'amendement n° 84 favorise la création d'entreprises, améliore la
trésorerie de l'entrepreneur et facilite la lisibilité des cotisations sociales
pour les créateurs. Il est tout particulièrement fait pour que les projets les
plus modestes puissent émerger. Il vise donc à établir une égalité des chances
dans la création d'entreprises, qui n'est pas toujours assurée aujourd'hui dans
notre pays.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Monsieur le président, je pense que les collaborateurs de Mme
le ministre ont eu le temps de préparer la réponse à la question posée par
notre collègue Claude Huriet sur le rapport relatif à l'application de la loi
Evin. S'il en est ainsi, je souhaiterais que Mme la ministre nous fasse part de
cette réponse dès maintenant. Dans le cas contraire, je souhaiterais qu'on nous
la communique demain matin.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'évaluation de la loi Evin a
donné lieu à un rapport qui a été rendu public aujourd'hui même.
M. Charles Descours,
rapporteur.
On a une de ces chances ces jours-ci !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le rapporteur, voilà
trois ans que nous l'attendions : il vaut mieux qu'il sorte aujourd'hui que
jamais.
(M. Charles Descours, rapporteur, proteste.)
Vous n'êtes jamais content ! Vous me posez une question, je m'apprête à
vous répondre positivement et vous n'êtes pas content. Je ne sais plus que
faire pour vous satisfaire !
(Sourires.)
Dominique Gillot et moi nous faisons tout pour vous être agréables, mais,
décidément, nous n'y arrivons pas !
Le commissariat général du plan a enfin rendu son évaluation, évaluation qui
est positive, sur le tabac, qu'il s'agisse de l'interdiction de la publicité,
de la protection des non-fumeurs ou de la politique des prix, même si des
efforts doivent encore être faits en milieu scolaire et chez les jeunes.
Le Gouvernement a multiplié par cinq le budget consacré à la prévention du
tabagisme depuis deux ans. Vous savez que le rapport que nous a remis M.
Recours contient des propositions pour lutter contre le tabagisme chez les
jeunes. Nous y travaillons actuellement avec Mme Gillot.
En ce qui concerne l'alcool, le bilan est plus contrasté, en particulier sur
l'interdiction de la publicité. Mais on sait qu'en matière de lutte contre
l'alcoolisme la démarche doit être plus globale. Aujourd'hui la MILDT, la
mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie
s'apprête à travailler sur la prévention des dépendances.
Telle est la première réponse que nous pouvons vous apporter, dans la mesure
où nous n'avons pas encore eu le temps de nous pencher de manière très
approfondie sur les conclusions de ce rapport, qui vient de nous être remis.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Charles Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Madame le ministre, je me réjouis que nous puissions disposer
de ce rapport dans les prochains jours.
S'agissant de l'amendement n° 84, puisque nous en sommes à échanger des
amabilités - ne suffit-il pas que l'on demande un rapport pour apprendre qu'il
vient de sortir ? -, nous y sommes favorables.
Nous y sommes favorables non seulement pour faire plaisir au Gouvernement,
mais aussi parce qu'il vise à harmoniser et à alléger les bases de calcul des
cotisations et des contributions sociales des jeunes entrepreneurs.
Il est vrai que, actuellement, des bases forfaitaires différentes selon les
risques sont utilisées. Pour les non-salariés, la cotisation est calculée en
pourcentage du revenu professionnel de l'avant-dernière année. Or, pour les
jeunes créateurs d'entreprise, par définition, ce revenu n'existe pas.
Le système tend à prendre comme référence la base mensuelle des allocations
familiales et à calculer les cotisations sociales à partir de cette base.
L'allégement est notable : 30 % la première année, 15 % la seconde année. Nous
souhaitons simplement que le décret d'application soit publié rapidement. Vous
avez affirmé, madame la ministre, que le dispositif serait applicable le 1er
juillet 2000 ; nous en prenons acte.
En 2000, le coût sera de 300 millions de francs, ce qui revient une fois de
plus à diminuer les excédents de la C3S. Là encore, c'est malheureusement de la
tuyauterie ! Quand on diminue les excédents de la C3S, on diminue le FSV. Et
c'est effectivement la C3S qui sera mise à contribution pour combler le besoin
de financement de la CANAM, de l'ORGANIC et de la CANCAVA.
Bien entendu, il y a là un geste d'allégement que nous apprécions, mais, en
l'occurrence, rien ne sort de la poche de l'Etat. Ce sont les caisses qui sont
mises à contribution. En tout cas, il est heureux qu'un geste soit fait en
faveur des non-salariés, qui sont généralement quelque peu oubliés dans les
lois de financement de la sécurité sociale.
J'en profite pour vous demander, madame le ministre, tout en sachant que cette
question relève plutôt d'un de vos collègues, si vous ne pourriez pas faire
étudier la faculté, pour les travailleurs non-salariés, de bénéficier, comme en
matière d'impôt sur le revenu, de reports d'un exercice déficitaire à un
autre.
La rédaction actuelle de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale
interdit les reports déficitaires qui permettent de lisser les pertes d'un
exercice déficitaire sur trois ou cinq ans. Quels que soient les problèmes que
cela pose, il me semble qu'il serait préférable d'harmoniser, sur ce point, les
règles fiscales et sociales.
De plus, il existe toujours des cotisations minimales perçues par les régimes
des non-salariés non agricoles. La prise en compte des reports déficitaires ne
conduirait pas à supprimer toutes les cotisations sociales.
Les jeunes entrepreneurs, qui seront certainement heureux de cet amendement,
apprécieraient beaucoup que ma suggestion puisse être mise en oeuvre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le rapporteur,
s'agissant de la proposition que vous venez de formuler, il est difficile
d'imputer, en matière de prélèvements sociaux, les déficits enregistrés une
année sur une autre année. Nous ne sommes pas dans le cadre de la fiscalité. La
fiscalité est progressive, contrairement aux cotisations sociales, qui sont
proportionnelles au revenu.
Dès lors que le prélèvement a un caractère progressif, ce qui est le cas en
matière d'impôt sur le revenu, la prise en compte du déficit d'une année dans
l'imposition d'une autre année se justifie. Dès lors qu'il est proportionnel,
au contraire, il n'existe pas de raison majeure de procéder à tel report.
Un travailleur indépendant est redevable de cotisations sociales qui sont
strictement fonction du revenu propre à chaque année. Il n'y a pas lieu de
minorer la capacité contributive que le travailleur indépendant a dégagée au
cours d'une année donnée du montant du déficit qu'il a pu enregistrer lors de
l'année précédente.
Ceci n'est évidemment qu'une première réponse, à chaud, mais je suis prête à
examiner ce problème de plus près.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 84.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je voudrais simplement relever la nature du financement de cette disposition
tout à fait intéressante en faveur des artisans et des commerçants,
c'est-à-dire le prélèvement sur une partie de l'excédent de la C3S.
Si ce financement de 300 millions de francs ne faisait qu'amputer l'excédent
global de la C3S, qui vient alimenter le fonds de solidarité vieillesse, il n'y
aurait pas lieu d'en être préoccupé. En effet, aujourd'hui, cet excédent global
atteint 8,3 milliards de francs. Mais il va aussi subir les effets du
dispositif imaginé pour le financement des 35 heures et pour celui du fonds de
réserve.
Or nous savons que le fonds de solidarité vieillesse est soumis à l'effet de
ciseaux : lorsque la conjoncture est porteuse, ce fonds se porte bien et ne
suscite aucune inquiétude particulière, comme nous le constatons depuis trois
ou quatre ans ; en revanche, aussitôt que la conjoncture s'inverse, l'effet
contraire se produit puisque le fonds de solidarité a pour objet de financer
des dépenses non contributives de solidarité, mais aussi de prendre en charge
des périodes de chômage. Il est bien évident, que si le chômage venait à
redémarrer, le fonds de solidarité vieillesse risquerait de se trouver à
nouveau en difficulté.
Dès lors, il est fort dangereux d'affecter une partie des ressources du fonds
de solidarité vieillesse à des dépenses pérennes. Bien entendu, lorsqu'on se
trouve dans une situation plutôt bonne, la tentation est forte de prélever sur
des recettes destinées à alimenter un fonds qui paraît chaque année en
excédent. Malheureusement, un retournement de situation peut avoir des effets
désastreux, et il est nécessaire qu'un fonds comme celui-ci conserve une marge
de manoeuvre suffisante.
Je crains que les différentes mesures qui sont prévues dans ce projet de loi
de financement de la sécurité sociale ne fragilisent à terme le fonds de
solidarité vieillesse. C'est la raison pour laquelle je me permets de formuler
ces quelques observations, tout en saluant cet amendement qui va permettre
d'alléger, pendant deux ou trois ans, les charges des artisans et des
commerçants. C'est une excellente initiative. Nous avons d'ailleurs toujours
dit qu'il fallait tendre vers l'allégement des charges des entreprises.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Je ne suis pas hostile à ce qu'on favorise les petites entreprises nouvelles
créatrices d'emplois, mais je pense qu'il serait préférable d'alléger les
charges financières plutôt que d'alléger toujours les charges sociales.
C'est la raison pour laquelle je m'abstiendrai.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, accepté par la commission.
M. Guy Fischer.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 5
bis.
Article additionnel avant l'article 6
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Descours, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, avant l'article 6, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Après l'article L. 225-6, il est inséré, dans le titre II du livre II du code de la sécurité sociale, un chapitre 5 bis ainsi rédigé :
« Chapitre 5
bis
«
Affectation des résultats comptables
des branches du régime général
«
Art. L. 225-7. -
Chaque branche du régime général dispose
d'une section comptable distincte de celle de ses opérations courantes.
« Après la clôture de l'exercice, le résultat comptable de la branche est
imputé sur cette section comptable.
« Le placement des sommes inscrites à cette section comptable est effectué par
l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans le respect de la
séparation des branches.
« Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
La loi du 25 juillet 1994 a réaffirmé le principe de gestion
commune de trésorerie par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale,
l'ACOSS, mais a également prévu une individualisation de la trésorerie des
branches, qui disposent ainsi d'intérêts créditeurs et débiteurs résultant de
la gestion de trésorerie. La commission des affaires sociales est très
attachée, je le rappelle, à cette individualisation de la trésorerie des
branches.
Lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999,
l'Assemblée nationale, suivant au pied de la lettre une recommandation de la
Cour des comptes, a supprimé une disposition de l'article 2 de la loi du 25
juillet 1994 qui prévoyait la possibilité pour les conseils d'administration
des caisses nationales de placer des « éventuels excédents durables de
trésorerie ». Cette disposition n'était pas, il faut le reconnaître, d'une
clarté absolue. Mais votre commission s'était opposée à cette suppression,
qu'elle avait jugée pour le moins « prématurée ».
Aucune disposition du code de la sécurité sociale n'est prévue actuellement
pour l'affectation des excédents comptables.
La commission des affaires sociales constate que le Gouvernement met en place,
dans la confusion, des mécanismes de transferts qui se font au détriment de la
sécurité sociale dans son ensemble mais qui visent notamment la branche
famille. Aussi souhaite-t-elle, dans le respect de l'autonomie des branches de
la sécurité sociale, que celles-ci bénéficient des excédents qu'elles créent,
comme c'est le cas pour la CNAF ou la CNAV, ou assument
a contrario
des
dettes qu'elles génèrent, comme c'est le cas pour la CNAM.
Il y va de la clarté dans laquelle doit se poursuivre le redressement des
comptes sociaux et de la responsabilisation de chacun.
Dans le rapport annexé à la loi de financement pour 1998, le Gouvernement
affirmait sa « volonté de restructurer l'équilibre financier, gravement
compromis aujourd'hui, de la branche famille » et décidait la mise sous
conditions de ressources des allocations familiales.
Le fait que la branche famille enregistre aujourd'hui des excédents n'a rien
de surprenant : le contraire serait même étonnant dans un contexte de
croissance.
Les réserves qu'elle peut accumuler aujourd'hui lui permettront demain
d'éviter une nouvelle remise en cause des fondements de notre politique
familiale.
De même, la branche vieillesse est dans l'oeil du cyclone à la veille du choc
démographique de 2005. Dans cette attente, il est sain qu'elle puisse
constituer des réserves productives d'intérêts et il est prudent que ces
réserves restent en son sein plutôt que de migrer vers un fonds de réserve dont
les missions sont aussi incertaines ; mais j'ai cru comprendre qu'elles se
précisaient au fur et à mesure de la sortie des décrets.
A terme, si la sécurité sociale présente des excédents durables, au-delà des
cycles conjoncturels, il importera d'ouvrir, dans la transparence et le respect
des partenaires sociaux, un débat sur l'affectation de ces réserves :
amélioration des prestations, diminution des prélèvements actuels ou encore
remboursement anticipé de la dette sociale, c'est-à-dire diminution des
prélèvements qui pèsent sur les générations à venir jusqu'en 2014, et je crois
qu'à cet égard M. Adnot attend toujours la réponse à la question qu'il a posée
hier.
Aussi la commission propose-t-elle que chaque branche dispose d'une section
comptable distincte de celle de ses opérations courantes, sur laquelle serait
affecté le résultat comptable de l'exercice clos précédent. Un déficit d'une
année pourrait être ainsi « financé » par un excédent d'une année suivante,
selon un système de « stabilisateurs automatiques ».
En 1998, seule la branche accidents du travail a été excédentaire de 1,6
millard de francs. Les déficits des branches vieillesse - 0,2 milliard de
francs - famille, - 1,9 milliard de francs - et maladie - 15,9 milliards de
francs - doivent être financés : cela représente un total de 18 milliards de
francs. La CADES n'ayant repris « que » 12 milliards de francs par
anticipation, il reste ainsi 6 milliards de francs de déficit supplémentaires à
répartir entre les trois branches.
En 1999, la branche maladie serait déficitaire de 12,1 milliards de francs.
Les trois autres branches seraient à l'équilibre.
C'est pour éviter des passages de branche à branche, pour défendre l'autonomie
financière des branches et pour accroître la clarté du financement de la
sécurité sociale que la commission vous propose d'adopter l'amendement n° 8.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je peux tout d'abord redire, en
réponse à M. Adnot, que la CADES dégagera bien des excédents suffisants pour
rembourser la dette : il n'y a donc pas d'inquiétude à avoir de ce côté.
En ce qui concerne l'amendement n° 8, qui vise à introduire pour chaque
branche du régime général une section comptable distincte de celle des
opérations courantes, je dois dire que je comprends mal le but que vous
cherchez à atteindre, monsieur le rapporteur.
En effet, le plan comptable ne prévoit pas de section comptable qui pourrait
recevoir en affectation le résultat d'un exercice, mais il prévoit que ce
résultat doit être soit viré au report à nouveau de l'organisme, soit affecté à
un compte de réserve figurant au bilan de l'organisme. Il y a donc bien, dans
le droit commun actuel, un traitement comptable des résultats qui me paraît de
nature à satisfaire votre demande, en tout cas telle que vous l'avez
présentée.
Par ailleurs, si votre souci est l'individualisation des branches, je vous
rappelle que chaque branche a ses propres comptes. Seule la trésorerie fait
l'objet d'une gestion commune par l'ACOSS. Il est vrai que les reports à
nouveau des différentes branches ont été remis à zéro en 1994, mais c'est une
décision qu'a prise le gouvernement de M. Balladur. Depuis, les résultats sont
bien enregistrés au bilan de chaque branche.
J'ajoute que le Premier ministre s'est engagé, et cela figure dans le projet
de loi de financement de la sécurité sociale, à garantir les ressources de la
branche famille, justement pour éviter des opérations du type de celle qui ont
eu lieu en 1994.
Enfin, nous avons décidé - et je crois que nous allons dans le sens de ce que
vous recherchez - d'affecter les excédents de la branche vieillesse au fonds de
réserve des retraites pour éviter que cet argent puisse être utilisé
autrement.
Par conséquent, je ne vois pas l'intérêt de cet amendement et je n'y suis pas
favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Par cet amendement, la commission pose une vraie question : comment isoler les
problèmes de trésorerie de chaque branche ?
J'ai sous les yeux le rapport du ministre de l'emploi et de la solidarité sur
les avances de trésorerie au régime général de sécurité sociale en 1999.
S'agissant précisément de la branche famille, dont parlait Mme la ministre il y
a quelques minutes - elle prenait l'exemple de 1994 ; moi, je reste en 1999 -
je lis ceci : « Les caisses d'allocations familiales ont versé au mois d'août
la majoration de l'allocation de rentrée scolaire décidée par le Gouvernement
en juillet lors de la conférence de la famille. Cette dépense pèse dans un
premier temps sur la trésorerie de l'ACOSS, puisqu'elle ne pourra être
remboursée par l'Etat qu'en toute fin d'année ou au début de l'année 2000,
après le vote de la loi de finances rectificative. »
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Cela n'a rien à voir !
M. Yves Fréville.
En d'autres termes, c'est l'ACOSS qui doit supporter les conséquences
financières du retard mis par l'Etat à lui payer l'allocation de rentrée
scolaire.
Par conséquent, sans entrer dans les détails techniques, je pense que
l'amendement déposé par M. Descours montre bien qu'un véritable problème se
pose pour isoler la trésorerie des différentes branches.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je ne suis pas sûr que l'amendement que j'ai présenté soit
techniquement impeccable.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
En tout cas, il ne résout pas
le problème posé !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Mais vous avez très bien compris mon objectif, madame le
ministre. Il s'agit de faire en sorte une branche dégage que, quand un excédent
de trésorerie, celui-ci reste dans cette branche, afin d'éviter les montages
que nous avons dénoncés en début de séance, notamment le « siphonnage » des
résultats, tel que le Gouvernement l'avait prévu initialement.
Donc, pour éviter ce « siphonnage », et la tentation est toujours grande, nous
devons inscrire dans la loi que chaque branche conservera ses excédents de
trésorerie.
Je maintiens donc l'amendement n° 8 ; il est possible qu'il faille le modifier
sur le plan technique, mais le principe d'autonomie des branches et du maintien
des excédents éventuels dans les branches doit être vraiment intangible.
Nous nous étions beaucoup battus, en 1994, pour que la loi à laquelle j'ai
fait référence soit adoptée. Elle l'a été. Mais il faut de temps en temps faire
des piqûres de rappel, car tous les gouvernements ont des tentations,
tentations que l'on peut d'ailleurs comprendre.
(Sourires.)
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Si je puis me permettre,
certains gouvernements ont plus la tentation que d'autres...
M. Charles Descours,
rapporteur.
Attendez...
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
En 1994, le gouvernement
Balladur a utilisé 60 milliards de francs d'excédents cumulés de la branche
famille pour financer la branche maladie, qui connaissait certaines
difficultés.
La question que pose M. Fréville n'a véritablement rien à voir avec
l'amendement déposé par M. le rapporteur, de sorte que, si cet amendement était
adopté, il ne la réglerait en rien.
En effet, ce que demande M. le rapporteur - j'ai maintenant mieux compris -
c'est qu'il soit affiché de manière claire dans la loi que les excédents de
chaque branche restent « à perpétuité », si je puis dire, dans la même branche.
En revanche, monsieur Fréville, vous posez un problème de trésorerie : vous
estimez que la sécurité sociale n'a pas à consentir d'avances pour des dépenses
par ailleurs prévues.
Mais je vous rassure : étant donné que l'allocation de rentrée scolaire, dont
M. le Premier ministre a annoncé la pérennisation, sera bientôt une allocation
pérenne de la branche famille, laquelle, en fonction de ses capacités, la
prendra en compte, elle sera donc inscrite de manière permanente dans les
comptes de la sécurité sociale.
C'est une autre façon de régler le problème que vous avez soulevé, auquel
l'amendement de M. le rapporteur ne répond, lui, absolument pas.
M. Yves Fréville.
La question demeure posée !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Madame le ministre, je sais que vous avez de la mémoire. Je
souhaite qu'elle ne soit pas sélective ! Je rappelle que, si les partenaires
sociaux se sont mobilisés lorsque vous avez présenté ce projet de loi en
conseil des ministres, c'était au motif d'une ponction sur les excédents des
caisses de sécurité sociale de 5,5 milliards de francs.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mais non !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Comment « non » ?
M. Alain Vasselle.
Mais si !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Enfin ! madame le ministre, il y avait bien une ponction de
5,5 milliards de francs sur les excédents des caisses de sécurité sociale ?
M. Alain Vasselle.
Tout à fait !
M. Charles Descours,
rapporteur.
Ce que je veux éviter, c'est le renouvellement de tels
événements. Et, tant que le sort des excédents n'est pas réglé par la loi, tous
les gouvernements peuvent céder à la tentation de s'en emparer.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
J'aime que les choses soient
claires et précises : lorsque nous souhaitions prendre des recettes à venir,
nous ne faisions pas de prélèvements sur les excédents du passé. Votre
amendement, s'il était voté, n'empêcherait pas ce que vous voulez éviter. Je me
permets de vous le dire, monsieur Descours, pour que vous puissiez
éventuellement compléter votre texte. Ce serait dommage de ne pas atteindre les
objectifs que vous vous fixez.
(Sourires.)
D'ailleurs, je ne suis pas la seule à ne pas avoir bien compris
l'objectif de votre amendement : M. Fréville ne l'a pas plus compris non
plus.
Donc, non seulement cet amendement ne répond pas au problème posé, mais encore
je ne souhaite pas moi-même répondre de manière positive.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je persiste et je signe !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Vous ne vous rendez pas
service. Moi, j'essaie de vous aider !
(Nouveaux sourires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, avant l'article 6.
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - Pour 2000, les prévisions de recettes, par catégorie, de
l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour
concourir à leur financement sont fixées aux montants suivants :
(En milliards
de francs.)
«
Cotisations effectives
1 043,0
«
Cotisations fictives
201,5
«
Contributions publiques
67,1
«
Impôts et taxes affectés
515,6
«
Transferts reçus
4,7
«
Revenus des capitaux
1,7
«
Autres ressources
34,1
« Total des recettes
1 867,7
»
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 9 rectifié, M. Descours, au nom de la commission des
affaires sociales, propose :
A. - A la première ligne (Cotisations effectives) du tableau figurant à cet
article, de remplacer la somme : « 1 043,0 » par la somme : « 1 086,8 » ;
B. - A la troisième ligne (Contributions publiques) du même tableau, de
remplacer la somme : « 67,1 » par la somme : « 62,8 » ;
C. - A la quatrième ligne (Impôts et taxes affectés) du même tableau, de
remplacer la somme : « 515,6 » par la somme : « 461,6 » ;
D. - En conséquence, à la dernière ligne (Total des recettes) du même tableau,
de remplacer la somme : « 1 867,7 » par la somme : « 1 853,2 ».
Par amendement n° 115, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent :
I. - A la première ligne (Cotisations effectives) du tableau figurant à cet
article, de remplacer la somme : « 1 043,0 » par la somme : « 1 073,0 ».
II. - En conséquence, à la dernière ligne (Total recettes) du même tableau, de
remplacer la somme : « 1 867,7 » par la somme : « 1 897,7 ».
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 9
rectifié.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Monsieur le président, le Sénat venant d'adopter l'amendement
n° 84, je souhaite rectifier cet amendement, en minorant de 300 millions de
francs les cotisations des non-salariés.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 9 rectifié
bis,
par lequel M.
Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
A. - A la première ligne (Cotisations effectives) du tableau figurant à cet
article, de remplacer la somme : « 1 043,0 » par la somme : « 1 086,5 » ;
B. - A la troisième ligne (Contributions publiques) du même tableau, de
remplacer la somme : « 67,1 » par la somme : « 62,8 » ;
C. - A la quatrième ligne (Impôts et taxes affectés) du même tableau, de
remplacer la somme : « 515,6 » par la somme : « 461,6 » ;
D. - En conséquence, à la dernière ligne (Total des recettes) du même tableau,
de remplacer la somme : « 1 867,7 » par la somme : « 1 852,9 ».
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 115.
M. Guy Fischer.
Cet amendement sera, pour certains, provocateur.
(Sourires.)
Il vise en
effet à majorer de 30 milliards de francs les prévisions de recettes de la
branche accidents de travail par une augmentation correspondante du taux de
cotisation des employeurs à cette branche.
Mon propos sera nuancé, car, vous l'aurez compris, il s'agit pour nous surtout
de poser un vrai problème et d'obtenir une réponse de la commission et du
Gouvernement.
Répondant à une question orale posée le 30 mars dernier par notre collègue
Marie-Claude Beaudeau, concernant la santé au travail, Mme la secrétaire d'Etat
aux droits des femmes et à la formation professionnelle déclarait, entre autres
: « En ce qui concerne la tarification, il est clair que les conséquences
financières des accidents du travail et des maladies professionnelles doivent
être imputées à la branche accident du travail de la sécurité sociale. C'est
une question de principe et une démarche cohérente pour inciter l'employeur à
la prévention. »
Depuis deux ans, le Gouvernement s'est engagé à améliorer la sécurité au
travail et à mieux prendre en charge les maladies professionnelles afin de
garantir les droits des victimes, des mesures particulières ont été prises en
faveur des victimes de l'amiante.
Le rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
2000 confirme que la démarche de prévention des risques professionnels, pour
éviter, notamment, la survenance de cancers, des maladies mentales ou des
lésions par efforts répétés, devait être privilégiée et renforcée. La réforme
de la médecine du travail est, à ce titre, importante.
Toutefois, la question essentielle, la question de fond, celle du financement
de la protection des risques au travail, n'a toujours pas été posée.
Nous savons tous que, en principe, il appartient aux entreprises, donc à
l'employeur, de supporter les charges liées aux accidents du travail, les
cotisations de ces derniers étant fonction des risques qu'ils font courir aux
salariés, du nombre de maladies ou d'accidents que l'activité génère et de la
nature de cette dernière.
De fait, les salariés et les médecins du travail subissent de nombreuses et
diverses pressions pour que les maladies professionnelles ne soient pas
déclarées et reconnues en tant que telles.
Il en résulte que, concrètement, l'assurance maladie supporte la prise en
charge des soins afférents aux maladies professionnelles non reconnues, en lieu
et place des entreprises.
Le rapport Déniel ainsi que le rapport du Haut comité de la santé publique
font état d'importantes sous-déclarations pour les maladies
professionnelles.
Le cas des cancers professionnels peut être utilement retenu à titre
d'illustration. La sécurité sociale reconnaît, chaque année, cent à deux cents
cas de cancers professionnels, alors que le ministère les évalue à dix
mille.
Outre le préjudice pour les victimes, il s'agirait de 30 milliards de francs à
la charge de l'assurance maladie, alors que cette somme devrait être imputée
aux entreprises responsables.
La loi de financement de la sécurité sociale de 1997 a institué un versement
de la branche accidents du travail vers la branche maladie pour compenser les
dépenses supportées par cette dernière.
L'évaluation faite par M. Déniel du montant de cette non-prise en charge
s'élevait à 900 millions de francs en 1997.
Depuis, la commission Levy-Rosenwald a préconisé la reconduction du versement
de 1 milliard de francs.
A juste raison, M. Claude Evin note qu'« une interrogation subsiste quant au
montant de ce versement. »
Considérant qu'il convient d'initier un débat à ce sujet, dès à présent, nous
proposons de majorer de 30 milliards de francs les prévisions de recettes de la
branche accidents du travail.
Cela doit se traduire par une augmentation correspondante du taux de
cotisation que les employeurs versent à cette branche, permettant effectivement
de prendre en charge les salariés victimes.
Chers collègues, ce soir, nous voulions poser un vrai problème qui, jusqu'à
présent, n'a pas reçu de réponse satisfaisante.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 115 ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Notre collègue Guy Fischer soulève un vrai problème.
Cependant, il ne faut pas mettre sur le même plan les accidents du travail et
les maladies professionnelles. Je crois très sincèrement que les accidents du
travail sont déclarés, et même parfois plus qu'ils ne le devraient. En
revanche, le problème est plus complexe pour les maladies professionnelles.
Je rappelle que, dans la loi de financement de la sécurité sociale de 1997,
qui avait été présentée par Alain Juppé et son gouvernement, une revalorisation
de 1 milliard de francs avait été inscrite, supérieure donc aux 900 millions de
francs qui avaient été demandés dans le rapport Déniel.
Aujourd'hui, il faut peut-être aller plus loin, mais la somme est, de toute
manière, de l'ordre du milliard de francs, d'après le rapport que vous avez
cité, alors que vous proposez 30 milliards de francs, monsieur Fischer ! Je
rappelle tout de même que la branche accidents du travail et maladies
professionnelles représente 52 milliards de francs : avec ce que vous proposez,
il s'agirait rien moins que d'un doublement.
S'il y a un problème concernant les maladies professionnelles, il faut
l'étudier, et notamment examiner les propositions présentées dans le rapport
Déniel. Quant à inscrire 1 milliard de francs dans le projet de loi de
financement pour 2000, je laisse au Gouvernement le soin de le faire, lui, car
il n'a pas, lui, à justifier ses transferts, contrairement à nous, qui devons
toujours trouver des compensations budgétaires.
La commission des affaires sociales est donc défavorable à l'amendement n°
115, sans méconnaître qu'il y a probablement un problème pour certaines
maladies professionnelles.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 9 rectifié
bis
et 115 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est défavorable
à l'amendement n° 9 rectifié
bis.
L'amendement n° 115, qui vise à majorer de 30 milliards de francs le
reversement forfaitaire de la branche accidents du travail et maladies
professionnelles à la branche maladie pose effectivement un vrai problème,
ainsi que M. Descours vient de le dire.
Dès 1997, le rapport déposé par la commission présidée par M. Déniel a mis en
évidence l'ampleur de la sous-déclaration des maladies professionnelles ou des
accidents du travail qui pèsent de manière anormale sur la branche maladie. On
constatait cependant l'absence de données statistiques permettant de chiffrer
ce phénomène de manière complète, raison pour laquelle on préconisait de
retenir un montant minimal dont la réalité était attestée par des données
scientifiques avérées. Mme Levy-Rosenwald, à qui nous avons demandé
d'approfondir la question, a dressé le même constat. Dans la mesure où il
n'existait pas de données statistiques précises sur l'ampleur de cette
sous-déclaration, je lui ai demandé de poursuivre ses travaux et ses enquêtes
afin de nous donner un chiffrage qui nous permettrait de vérifier si le montant
du versement forfaitaire mis à la charge de la branche ATMP est suffisant ou
non. J'espère que nous aurons dans les mois à venir des propositions pour
avancer en ce domaine.
J'ai vraiment la conviction, sans être capable de chiffrer ce montant, grâce à
des témoignages individuels de salariés, qu'il existe une sous-déclaration,
notamment en matière d'accidents du travail. En effet, l'entreprise, en
particulier lorsqu'elle est au taux individualisé, craint une majoration de
celui-ci et demande aux salariés de ne pas déclarer lesdits accidents. Il est
très difficile de connaître la réalité de ce phénomène. Il faut attendre la
deuxième phase des études pour prendre une décision appropriée. A l'évidence,
le problème que vous avez soulevé est réel.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9 rectifié
bis.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Nous voterons, bien sûr, cet amendement, puisqu'il ne fait que traduire dans
les chiffres les décisions prises par le Sénat à l'article 2.
D'abord, je me permettrai de faire remarquer à Mme le ministre, en sachant
très bien qu'elle n'est pas responsable de cette situation, que nous n'avons
pas, dans cet article d'équilibre, une vision globale de toutes les recettes de
la sécurité sociale, puisque les 28 milliards de francs de la CADES n'y
figurent pas. Cette décision a été prise en son temps, lors de l'examen du
projet de loi organique. Il y a encore 28 milliards de francs d'impôt
supplémentaires qui sont levés à ce titre pour couvrir les déficits de la
sécurité sociale.
J'en viens à ma deuxième remarque, et là je me tourne vers M. le rapporteur,
qui n'est pas plus responsable de cette situation que Mme le ministre ne
l'était de la situation précédente.
La Cour des comptes dit très clairement qu'il serait tout à fait souhaitable
que nous ayons une présentation de l'article d'équilibre par branche. La
discussion que nous venons d'avoir sur les accidents du travail montre très
bien que cela manque. Nous pourrions, les uns et les autres, nous retrouver un
jour pour modifier la loi organique afin que l'article d'équilibre nous donne
des renseignements précis branche par branche. Certes, les jugements politiques
resteraient ce qu'ils sont, mais nous verrions apparaître les problèmes réels,
ce qui n'est pas le cas actuellement.
Ma dernière remarque concerne le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale
et que l'amendement de la commission vise très judicieusement à corriger. Là,
je m'adresse à Mme le ministre. S'agissant du total des recettes de la sécurité
sociale, si on compare le chiffre qui figure dans le projet de loi initial et
celui qui résulte des amendements ayant été adoptés à l'Assemblée nationale, on
constate bien une diminution des recettes de 5,6 milliards de francs. Nous
retrouvons ici la discussion récurrente sur la diminution des recettes de la
sécurité sociale du fait du transfert des droits sur les alcools. Je me permets
simplement de constater que cette diminution de 5,6 milliards a bien été
effectuée.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié
bis,
repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 115 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, ainsi modifié.
(L'article 6 est adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES
ET À LA TRÉSORERIE
Section 1
Branche famille
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - I. - L'article L. 551-1 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 551-1
. - Le montant des prestations familiales est déterminé
d'après des bases mensuelles de calcul revalorisées par décret, une ou
plusieurs fois par an, conformément à l'évolution des prix à la consommation
hors tabac prévue dans le rapport économique, social et financier annexé à la
loi de finances pour l'année civile à venir.
« Si l'évolution constatée des prix à la consommation hors tabac est
différente de celle qui avait été initialement prévue, il est procédé à un
ajustement destiné à assurer, pour l'année civile suivante, une évolution des
bases mensuelles conforme à l'évolution des prix à la consommation hors tabac.
»
« II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter du 1er janvier
2000.
« Pour l'année 2000, il est fait application du mécanisme d'ajustement
découlant du deuxième alinéa de l'article L. 551-1 du code de la sécurité
sociale au titre de l'évolution constatée en moyenne annuelle de l'indice des
prix hors tabac de l'année 1999. Le montant des bases mensuelles issu de ce
calcul est majoré, à titre exceptionnel, de 0,3 %. »
Sur l'article, la parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Les articles 7, 8 et 9 forment un tout. Pour autant, je serai aussi concis que
possible.
Madame la ministre, vous n'avez consacré qu'un paragraphe à la politique
familiale dans votre intervention hier. Vous vous contentiez d'indiquer que
vous en poursuivrez la rénovation. C'est pourquoi il ne me semble pas inutile
de m'interroger sur ce que doit être une vraie politique familiale.
Une vraie politique familiale se doit d'être tout d'abord globale,
c'est-à-dire une politique qui prend en compte aussi bien les paramètres
économiques que les paramètres sociaux et, enfin, la dimension culturelle de la
famille au regard tant de sa structure que de ses missions, notamment sur le
plan éducatif.
Une vraie politique familiale se doit aussi d'être universelle, c'est-à-dire
qu'elle doit concerner toutes les familles, je dis bien « toutes ». S'il est
indéniable que certaines, les plus modestes, doivent bénéficier d'une attention
particulière, les autres, plus aisées, ne doivent pas pour autant être laissées
de côté.
Asseoir une politique familiale sur des niveaux de ressources pour justifier
certaines mesures restrictives, c'est aller radicalement à l'encontre de ce
principe d'universalité.
Une vraie politique familiale doit permettre de concilier la vie
professionnelle et la vie familiale.
L'assouplissement du temps choisi, et j'insiste sur le terme « choisi », doit
être la première des ambitions. M. le Président de la République a d'ailleurs
récemment rappelé que « 80 % des femmes en âge de travailler exercent un
métier. C'est une aspiration très profonde. Elle n'est pas négociable. »
Toutefois, lorsque les femmes souhaitent se consacrer à leurs enfants, il faut
leur en donner les moyens ; c'est la liberté de choix.
Mes propos ne relèvent pas de la polémique partisane. Ils traduisent, en
effet, ce que pensent l'ensemble des familles. Il n'y a pas un iota entre la
définition que je viens d'exposer et celle de l'Union nationale des
associations familiales qui, je le rappelle, est l'interlocuteur privilégié des
pouvoirs publics aux termes de la loi elle-même.
Les principes étant posés, que dire de la voie dans laquelle vous vous engagez
?
Si je ne doute pas de vos ambitions, peut-être pas trop éloignées des nôtres
au fond, tout au moins si l'on en juge par vos déclarations, encore que la
priorité accordée au PACS par rapport à d'autres mesures favorables aux
familles pourrait m'en faire douter, nous divergeons en tout cas sur les moyens
à mettre en oeuvre.
Face aux mesures que vous proposez pour la branche famille, c'est plutôt la
déception qui l'emporte du côté des familles.
Vous annoncez un excédent de 1,41 milliard de francs, mais il s'agit - nous
l'avons dénoncé suffisamment ici - d'un artifice. M. le rapporteur, notamment,
a indiqué qu'il visait à masquer un excédent spontané réel de 6 milliards de
francs.
En effet, vous effectuez un certain nombre de ponctions à la source.
Ainsi, un milliard de francs ont été détournés vers le fonds de réserve pour
les retraites, lui-même privé de recettes affectées au financement des 35
heures. En définitive, indirectement ce sont donc les familles qui financeront
la réduction du temps de travail. J'ajoute que vous rompez délibérément avec la
règle de la séparation des branches, règle d'or des lois de financement de la
sécurité sociale.
En outre, 2,5 milliards de francs passent à la trappe par la débudgétisation
de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire - vous l'avez d'ailleurs
indiqué très clairement tout à l'heure - le financement de celle-ci étant mis
en définitive à la charge de la CNAF, puisque vous en faites une allocation.
Mais il est vrai qu'il est facile d'être généreux avec l'argent des autres.
Finalement, il reste seulement 1,41 milliard de francs pour l'élaboration
d'une vraie politique familiale.
Les dispositions que vous proposez ne sont pas mauvaises en soi, mais elles
sont par trop timides au regard de ce qui aurait pu être fait à partir de cet
excédent spontané de 6 milliards de francs.
Certes, on peut apprécier le coup de pouce de 0,3 % accordé aux prestations
familiales et prévu à l'article 7. Cependant, l'article 8, présenté comme une
avancée sociale, constitue en réalité un recul par rapport à la loi de 1994
relative à la famille qui prévoyait avant le 31 décembre 1999 le recul à
vingt-deux ans de l'âge limite pour l'ouverture des droits. Je suis surpris,
madame la ministre, que vous ne vous tourniez pas vers moi en entendant mes
propos.
Certes, je connais vos arguments concernant cette fameuse loi de 1994. Il est
vrai que les dépenses constatées la première année se sont avérées supérieures
à celles qui étaient prévues initialement. Mais je me permets de vous faire
remarquer que ce dépassement était essentiellement imputable au succès
extraordinaire de l'allocation parentale d'éducation qui a dépassé toutes les
prévisions, ce qui prouve que cette mesure répondait bien à un besoin profond
de nos concitoyens, puisque plus de 500 000 familles en ont alors bénéficié. En
outre, elle avait entraîné d'importantes économies pour l'indemnisation du
chômage.
Enfin, l'article 9 institue la garantie de ressources pour la branche famille,
point qui a beaucoup été évoqué tout à l'heure. Je constate que, pour le
moment, vous vous livrez au contraire, comme M. le rapporteur l'a dit, à un «
siphonnage » des excédents de la branche famille.
Aussi, vous comprendrez, madame la ministre, que les mesures que vous proposez
ne soulèvent pas un grand enthousiasme de notre part. C'est d'autant plus grave
que les 6 milliards de francs d'excédent spontané vous en auraient donné les
moyens !
Vous comprendrez également que, dans ces conditions, nous attendions avec
impatience l'inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale de la
proposition de loi sur la famille que le Sénat a adoptée en juin dernier.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Dans leurs missions quotidiennes, les caisses d'allocations familiales - dont
relèvent 10 millions d'allocataires - servent une multitude de prestations,
mais elles développent aussi des services aux usagers, tel le réseau d'aide aux
parents destiné à conforter leur rôle éducatif.
Face aux demandes sociales toujours plus fortes auxquelles elles doivent faire
face en raison de l'augmentation du nombre de personnes en difficulté, qui
vivent en grande partie grâce aux prestations d'aide sociale, mais aussi du
fait de l'accroissement et de la complexité des allocations distribuées, de
nombreuses caisses sont aujourd'hui au bord de l'asphyxie, principalement parce
que, dans le même temps, leurs effectifs n'ont pas évolué.
Le système informatique des caisses d'allocations familiales n'est, bien sûr,
pas sans défaut et sa mise en place a nécessité du temps. Toutefois, il faut
admettre qu'il n'a fait qu'aggraver et révéler une situation déjà tendue, faute
de personnels suffisants pour aller au-devant des allocataires et pour les
accueillir dans des conditions satisfaisantes, compte tenu des nouvelles
missions qui incombent aux caisses.
Le résultat, nous le connaissons tous depuis les dysfonctionnements de cet
été, notamment en région parisienne, et singulièrement à Paris où j'ai eu
l'occasion de me rendre sur place pour constater ce qu'il en était.
Des courriers sont traités avec deux mois de retard. De nombreux dossiers sont
en souffrance. Des personnels sont exposés à la violence, à l'incompréhension
des familles allocataires, pour lesquelles les versements retardés,
interrompus, sont extrêmement pénalisants. Il arrive que la CNAF fournisse à
certaines familles 80 % de leur budget !
Autant dire que, pour les personnes les plus fragilisées, les ruptures de
paiement sont autant d'obstacles qui compromettent le maintien dans le
logement, la vie au quotidien tout simplement.
Madame la ministre, pour mettre en oeuvre la politique sociale, familiale que
le Gouvernement s'est fixée, les caisses d'allocations familiales comme les
caisses primaires d'assurance maladie sont des maillons essentiels. Il convient
d'entendre les inquiétudes des personnels et de donner rapidement aux caisses
les moyens humains et les ressources suffisantes pour qu'elles remplissent
pleinement leurs missions, ô combien utiles.
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Tous deux sont présentés par Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 116 a pour objet :
I. - De rédiger comme suit le texte présenté par l'article 7 pour l'article L.
551-1 du code de la sécurité sociale :
«
Art. L. 551-1
- Le montant des prestations familiales est déterminé
d'après des bases mensuelles de calcul revalorisées par décret, une ou
plusieurs fois par an, conformément à la progression générale des salaires
moyens ou du salaire minimum interprofessionnel de croissance. »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, insérer
après le I de l'article 7 un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Le taux de la cotisation prévue à l'article L. 136-6 du code de la
sécurité sociale est relevé à due concurrence des pertes de recettes résultant
de la modification du montant des prestations familiales visé à l'article L.
551-1 du code de la sécurité sociale. »
L'amendent n° 117 vise :
I. - Dans le second alinéa du texte proposé par le paragraphe I de l'article 7
pour l'article L. 551-1 du code de la sécurité sociale, à remplacer les mots :
« différente de » par les mots : « supérieure à » ;
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, à
insérer après le I de l'article 7 un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la modification de la base de
calcul de l'ajustement visé au second alinéa de l'article L. 551-1 du code de
la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par le relèvement du taux
de la cotisation prévue à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale.
»
La parole est à Mme Borvo, pour présenter ces deux amendements.
Mme Nicole Borvo.
L'article 7 fixe les règles de revalorisation des bases mensuelles fondant le
calcul des prestations familiales et détermine ainsi l'évolution du pouvoir
d'achat des familles.
Le Gouvernement fait le choix de pérenniser l'indexation du montant des
prestations familiales sur l'indice des prix. De surcroît, il reconduit un
mécanisme de réajustement mis en place par la loi de 1994 relative à la famille
et permettant de corriger, de compenser le trop-perçu d'une année sur l'autre
du fait d'une surévaluation de l'inflation.
Bien que vous conserviez ainsi, madame la ministre, une certaine marge de
manoeuvre de l'évolution des prestation s'agissant, il n'en demeure pas moins
que le dispositif choisi peut se révéler pénalisant pour le budget familial.
En 1996, alors que l'indice des prix atteignait à peu près 1,9 %, la droite,
qui prétend être seule capable de mener une politique généreuse en faveur des
familles, n'a-t-elle pas usé de ce mécanisme pour « geler » l'évolution des
prestations ?
Je vous concède que, cette année, le taux de revalorisation des bases
mensuelles, au regard d'une application à la lettre de la règle posée, aurait
dû être de 0,2 %.
Au 1er janvier 2000, le Gouvernement a décidé une majoration exceptionnelle de
0,3 %. S'agit-il d'un véritable coup de pouce, comme cela a été dit, ou d'un
simple correctif destiné à rendre moins choquant un dispositif qui n'est pas
bon ?
Les familles subiront une baisse de leur pouvoir d'achat, l'évolution
prévisionnelle des prix pour 2000 étant de 0,9 % et celle du PIB de 1,2 %.
Pour l'ensemble des allocataires des caisses, notamment pour le tiers d'entre
eux qui disposent d'un revenu mensuel inférieur à 4 200 francs, cette décision,
vous l'avouerez, n'est pas très positive.
La croissance est là, et je m'en réjouis. Il est juste que les familles
bénéficient des fruits de celle-ci. L'équilibre de la branche et la
confirmation de l'excédent donnaient une marge de manoeuvre plus large pour
mener une politique qui soit réellement en faveur des familles.
Ne pouvant nous satisfaire de cette situation, nous proposons, par
amendements, d'indexer les prestations familiales non sur l'évolution des prix,
mais sur celle du salaire moyen, ce qui a le double avantage d'assurer la
progression du pouvoir d'achat des familles, dont les besoins sont croissants,
et de mettre fin au débat sur le mécanisme pervers de régularisation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur Chérioux,
permettez-moi de vous redire que, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en
1997, le déficit de la branche famille s'élevait à 14,5 milliards de francs.
Certes limité à 500 millions de francs en 1995, le dérapage entraîné par
l'application de la loi « famille » atteignait 5,6 milliards de francs en
1998.
Si je rappelle ces chiffres, c'est pour mettre en évidence la difficulté de
l'exercice qui consiste à faire des prévisions. C'est aussi pour montrer qu'une
réforme comme celle que nous présentons, qui sera financée à hauteur de 85 %
d'ici à cinq ans - je fais évidemment allusion à la baisse des charges sociales
- est difficilement critiquable.
Pour revenir aux amendements n°s 116 et 117, le Gouvernement n'y est pas
favorable.
Madame Borvo, le Gouvernement a apporté un complément de 0,3 % au-delà de la
revalorisation des prix cette année. Cela peut évidemment vous paraître
insuffisant ; je ne pense pourtant pas qu'il soit possible d'aller plus
loin.
Depuis deux ans, nous avons arrêté des priorités dans la branche famille avec
les associations familiales, dont M. Chérioux me dit qu'elles ne sont pas
satisfaites - on peut toujours demander plus ! - et les organisations
syndicales.
Elles ont souhaité que l'allocation de rentrée scolaire bénéficie cette année
à tous les parents. Cette mesure a été mise en oeuvre dès la rentrée
dernière.
Elles ont souhaité que les allocations familiales soient prolongées jusqu'à
l'âge de vingt ans et les compléments jusqu'à vingt et un ans.
Elles ont également souhaité que les modes de garde pour les enfants des
familles les plus défavorisées fassent l'objet d'un effort très important. Nous
avons donc accordé un milliard de francs en 1998 et 700 millions de francs
cette année à la caisse d'action sociale de la CNAF.
Ces mesures ont été retenues au détriment d'une revalorisation plus importante
des allocations familiales. Vous avez le droit de le regretter. Si, comme tout
le laisse à penser, les résultats sont meilleurs dans les années qui viennent,
sans doute pourrons-nous aller plus loin.
Le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendement, qui tombent par ailleurs
sous le coup de l'article 40.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Si l'article 40 s'applique, nous ne saurions être plus
royalistes que le roi !
MM. Jean Chérioux et Alain Vasselle.
Est-il évoqué ou invoqué ?
M. le président.
Madame la ministre, pouvez-vous être plus précise ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je répare immédiatement mon
imprécision : j'invoque l'article 40, monsieur le président.
M. le président.
L'article 40 est-il applicable, monsieur Joyandet ?
M. Alain Joyandet,
au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Il l'est, monsieur le président !
M. le président.
En conséquence, les amendements n°s 116 et 117 sont irrecevables.
Par amendement n° 118, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent :
I. - De supprimer la première phrase du second alinéa du II de l'article 7.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de
compléter,
in fine,
l'article 7 par un paragraphe additionnel ainsi
rédigé :
« ... - La perte de recette résultant de la suppression de l'application pour
2000 du mécanisme d'ajustement découlant du second alinéa de l'article L. 551-1
du code de la sécurité sociale est compensée à due concurrence par un
relèvement du taux de la cotisation prévue à l'article L. 136-6 du code de la
sécurité sociale. »
Madame Borvo, compte tenu de la décision qui vient d'être prise, je suppose
que cet amendement n'a plus d'objet.
Mme Nicole Borvo.
Effectivement, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 118 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 7
M. le président.
Par amendement n° 119, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 7, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de la sécurité
sociale, le mot : "deuxième", est remplacé par le mot : "premier". »
« II. - Le taux de la contribution visée à l'article L. 136-6 du code de la
sécurité sociale est relevé à due-concurrence. »
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Si vous le permettez monsieur le président, je présenterai par la même
occasion l'amendement n° 120.
M. le président.
Par amendement n° 120, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 7, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale
est complété par une phrase ainsi rédigée : "Elles sont dues pour chaque enfant
ne dépassant pas l'âge limite ouvrant droit au versement."
« II. - Le taux de la cotisation prévue à l'article L. 136-6 du code de la
sécurité sociale est relevé à due concurrence. »
La parole est Mme Borvo, pour défendre les amendements n°s 119 et 120.
Mme Nicole Borvo.
Vous avez décidé, madame la ministre, d'impulser une politique familiale plus
équitable, moins inégalitaire, qui ambitionne de soutenir toutes les familles,
intégrant les mutations de notre société et cohérente avec l'ensemble des
politiques publiques.
Un soutien particulier est apporté aux familles les plus modestes. En cela, la
réforme du quotient familial, l'extension de l'allocation de rentrée scolaire,
les majorations pour âge des allocations des bénéficiaires du RMI sont des
mesures positives. Je m'en réjouis.
Une réflexion est engagée concernant l'aide aux jeunes adultes et le
développement de l'accueil du jeune enfant. Il est effectivement important
d'assurer une certaine diversité des modes de garde et de mettre en place une
tarification plus juste afin que les parents aient réellement le choix entre un
mode collectif ou individuel de garde. Comme beaucoup, je souhaite que l'APE,
qui a connu un certain succès, faute notamment de modes de garde appropriés,
accessibles, puisse être ajustée, afin qu'elle cesse d'éloigner durablement les
femmes de l'emploi.
Les femmes aspirent indéniablement à se ménager du temps pour s'occuper de
leurs enfants. Pourquoi, alors, ne pas envisager de prolonger le congé
maternité ?
A 81 %, les femmes interrogées récemment dans un sondage CSA
Le
Parisien
y sont favorables.
Enfin, pourquoi, madame la ministre, ne pas donner un signe fort en
reconnaissant les familles dès leur constitution, en aidant ces dernières dès
le premier enfant ?
Actuellement, alors que les allocations familiales se prétendent universelles,
plus de deux millions d'enfants n'en bénéficient pas, tout simplement parce
qu'ils sont uniques, ou provisoirement uniques. Pour faire face au coût
qu'engendre la venue de l'enfant, les changements et contraintes nouvelles dans
le mode de vie, une telle mesure serait juste et largement appréciée par les
familles.
Mme Gillot, dans son rapport sur la famille, annonçait l'idée de retenir « que
ce qui fait famille, c'est la présence de l'enfant, et qu'il est du devoir des
pouvoirs publics de veiller à ce que le devenir de cette troisième personne
soit garanti dans les meilleures conditions de justice sociale et de protection
juridique. »
Nos amendements tendant à insérer des articles additionnels s'inscrivent tout
à fait dans cette démarche. Nous prévoyons non seulement le versement des
allocations familiales dès le premier enfant, mais aussi d'en maintenir le
bénéfice aux familles dont l'un des enfants atteint l'âge de vingt ans.
Le financement des mesures que je vous propose d'adopter pourrait très bien
être recherché, comme le préconisait
Famille de France
, en juin 1999,
dans l'augmentation des cotisations patronales à la branche famille.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 119 et 120 ?
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le versement des allocations
familiales dès le premier enfant représenterait un coût supérieur à 14
milliards de francs, soit dix fois l'excédent prévisionnel de la branche
famille pour l'an 2000 ! Il me semble donc très difficile d'envisager de le
mettre en oeuvre.
Nous avons d'ailleurs décidé en 1999 de verser l'allocation de rentrée
scolaire à l'ensemble des familles, y compris aux 350 000 familles qui ont un
seul enfant. Le coût de cette mesure, qui était réclamée par les associations
familiales, s'est élevé à 560 millions de francs.
Les familles qui comptent un seul enfant ont par ailleurs droit à d'autres
prestations, telles que l'allocation pour jeune enfant, les aides au logement,
l'allocation au soutien familial et l'allocation de parent isolé.
La Délégation interministérielle à la famille se penche actuellement sur
l'accueil du jeune enfant, quel que soit son rang : premier, deuxième ou
autre... Les idées actuellement évoquées dépassent la durée du congé de
maternité, qui relève plutôt d'aspects biologiques, pour envisager l'accueil du
jeune enfant, pour la création éventuelle d'un congé complémentaire. C'est l'un
des thèmes qui seront abordés lors de la prochaine conférence de la famille, en
liaison avec les associations familiales et syndicales.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à votre proposition.
J'en viens au maintien des allocations familiales pour les familles de deux
enfants lorsque l'aîné atteint l'âge limite de vingt ans. Pour éviter dans ce
cas une diminution brutale des prestations familiales, le Gouvernement a choisi
de relever à vingt et un ans l'âge limite d'attribution de deux prestations
spécifiques : le complément familial et les aides au logement, qui,
contrairement aux allocations familiales, sont attribuées sous condition de
ressources. Le choix de ces prestations réaffirme ainsi la volonté claire du
Gouvernement de soutenir en priorité les familles modestes.
Par ailleurs, de nombreuses mesures ont déjà été prises en faveur des jeunes
adultes. Pour tenir compte de la durée plus longue de la cohabitation des
jeunes adultes avec leurs parents, l'âge limite pour les prestations familiales
a été porté à dix-neuf ans en 1998, puis à vingt ans en 1999.
Mais, au-delà du soutien financier, l'une des priorités du Gouvernement
consiste à encourager les jeunes adultes à acquérir leur propre autonomie pour
se prendre eux-mêmes en charge. Les mesures visant, à travers le programme
TRACE, les emplois-jeunes, à réduire le chômage des jeunes doivent permettre à
ceux-ci de devenir plus vite autonomes et de quitter leur famille.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 119 et 120 tout en
reconnaissant que l'accueil de l'enfant, notamment du premier enfant, mérite
encore des améliorations.
Cela dit, j'invoque l'article 40 à l'encontre de ces deux amendements.
M. le président.
Monsieur Joyandet, l'article 40 est-il applicable ?
M. Alain Joyandet,
au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Il l'est, monsieur le président.
M. le président.
En conséquence, les amendements n°s 119 et 120 sont irrecevables.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - I. - L'article L. 512-3 du code de la sécurité sociale est ainsi
modifié :
« 1° Le 3° est abrogé ;
« 2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, pour l'attribution du complément familial et de l'allocation de
logement mentionnés aux 3° et 4° de l'article L. 511-1 et à l'article L.
755-21, l'âge limite peut être différent de celui mentionné au 2° du présent
article. »
« II. - Les dispositions du 2° du I sont applicables, à compter du 1er janvier
2000, au titre des enfants nés à compter du 1er janvier 1980.
« III. - L'article 22 de la loi n° 94-629 du 25 juillet 1994 relative à la
famille est abrogé au 31 décembre 1999.
« IV. - A l'article L. 755-21 du code de la sécurité sociale, il est inséré,
après le premier alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret fixe l'âge limite pour l'ouverture du droit à cette allocation
pour tout enfant dont la rémunération n'excède pas le plafond mentionné au 2°
de l'article L. 512-3 à condition qu'il poursuive des études, ou qu'il soit
placé en apprentissage ou en stage de formation professionnelle au sens du
livre IX du code du travail, ou qu'il se trouve, par suite d'infirmité ou de
maladie chronique, dans l'impossibilité constatée de se livrer à une activité
professionnelle. »
Sur l'article, la parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Afin d'apporter un plus aux familles, comme le Gouvernement s'y était engagé
lors de la conférence de la famille du 7 juillet dernier, l'attribution du
complément familial et de l'aide au logement est prolongée jusqu'à vingt et un
ans.
Pour de nombreuses familles confrontées à la prise en charge de plus en plus
tardive des grands adolescents poursuivant leurs études ou de jeunes adultes
touchés par le chômage, notamment, c'est évidemment une mesure positive.
Toutefois, ce n'est qu'un début de réponse. Le Gouvernement en est d'ailleurs
pleinement conscient puisqu'il a accepté, à la demande des parlementaires
communistes, de poursuivre la réflexion sur la politique à mener en direction
des jeunes adultes sur la base d'un rapport qui devrait être remis avant l'an
prochain.
Il est en effet impératif de procéder à un examen de l'ensemble des aides
apportées à la famille et d'envisager d'accompagner les jeunes vers
l'autonomie, tant sociale et professionnelle qu'économique.
A juste titre, Mme Gillot notait, dans son rapport « de « synthèse et de
propositions pour une politique familiale rénovée », qu'il « s'agit d'une
question d'ordre national qui dépasse la sphère familiale. » J'en suis
d'accord.
A priori,
cette démarche n'est pas partagée par la commission des
affaires sociales. Elle regrette en effet que le Gouvernement abroge l'article
22 de la loi du 25 juillet 1994, qui permettait un relèvement progressif
jusqu'à vingt-deux ans de l'âge limite d'ouverture du droit à l'ensemble des
prestations familiales.
Les amendements déposés sur cet article et qui reviennent à admettre qu'on
peut prolonger indéfiniment les allocations familiales ne peuvent nous
satisfaire car elles ne permettront nullement de régler les problèmes auxquels
sont confrontés les familles mais aussi les jeunes adultes.
M. le président.
Par amendement n° 10, MM. Machet et Descours, au nom de la commission des
affaires sociales, proposent de rédiger ainsi le III de l'article 8 :
« III. - L'article 22 de la loi n° 94-629 du 25 juillet 1994 relative à la
famille est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa du I et à la fin du II, la date : "31 décembre
1999" est remplacée par la date : "31 décembre 2002".
« 2° A la fin de la première phrase du II, la date : "31 décembre 1998" est
remplacée par la date : "31 décembre 2001". »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je défendrai cet amendement à la place de M. Machet.
Je rappelle que l'article 22 de la loi du 25 juillet 1994 relative à la
famille prévoyait, avant le 31 décembre 1999, le relèvement progressif jusqu'à
vingt-deux ans de l'âge limite d'ouverture du droit à l'ensemble des
prestations familiales.
Cet objectif, qui n'a pas été atteint, reste particulièrement pertinent à nos
yeux.
Le Gouvernement ne partage pas cette analyse.
Soucieux de faire disparaître une disposition dont la portée symbolique est
évidente, il propose d'abroger l'article 22, alors qu'il cessera d'être
applicable le 31 décembre 1999.
Attachée au maintien de cet article, la commission des affaires sociales ne
peut accepter qu'on renonce ainsi aux objectifs définis en 1994. Elle vous
propose donc d'adopter un amendement supprimant l'abrogation de l'article 22 et
prolongeant l'application de cet article de trois années, c'est-à-dire jusqu'au
31 décembre 2002.
Le délai supplémentaire ainsi laissé sera vraisemblablement suffisant pour
atteindre l'objectif fixé en 1994.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable, monsieur le
président.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Je suis, bien entendu, favorable à l'amendement de la commission des affaires
sociales, même si, après l'argumentation que j'ai développée lors de la
discussion générale, je serais tenté d'aller dans le sens de toute
simplification de la législation et de la réglementation qu'ont à appliquer les
caisses d'allocations familiales : je rejoins en cela les explications de notre
collègue Mme Borvo.
Madame la ministre, je sais combien il est difficile pour un ministre de
répondre à l'ensemble des questions et des remarques qui sont formulées par les
parlementaires lors d'une discussion générale, mais je vous avais interrogée à
propos de la démarche que le Gouvernement s'était engagé à effectuer dans le
cadre de la convention d'objectifs et de gestion qu'il a signée avec la caisse
nationale d'allocations familiales en matière de simplification, et je n'ai pas
obtenu de réponse.
Vous savez, puisque ce n'est pas la première fois que je vous en ai
entretenue, l'importance qu'en tant que président du conseil de surveillance et
en son nom j'accorde à cette démarche. Pourriez-vous nous dire, ce soir ou en
quelque autre occasion, quelle est la volonté du Gouvernement sur ce point pour
inverser une tendance qui a des effets pervers désormais incommensurables, car
la surcharge des personnels des caisses d'allocations familiales est une chose,
mais lesdits effets pervers pour les bénéficiaires des prestations servies par
les caisses est autre chose, et le problème est de plus en plus ardu.
Il est indispensable que non seulement le Parlement, pour ce qui le concerne,
mais aussi le Gouvernement puissent inverser cette tendance, car cette
inflation de textes entraîne désormais des complications insupportables.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je voudrais répondre une
deuxième fois - car je lui ai déjà répondu tout à l'heure - à M. Huriet.
La simplification de l'ensemble des prestations - comme des aides diverses,
d'ailleurs - est à l'ordre du jour de la prochaine conférence de la famille. Au
demeurant, un groupe de travail existe aujourd'hui réunissant l'Etat, la
délégation à la famille et la CNAF sur les aides aux logements. Par ailleurs,
nous travaillons à la fois sur les modes de garde et sur les prestations
familiales.
Je crois, effectivement, qu'une simplification est nécessaire. Il faut
cependant faire attention car, aujourd'hui, ce qui apparaît comme une
complexité, c'est aussi la prise en compte de situations différentes : le
niveau financier des familles, par exemple, ou encore l'âge ou le nombre des
enfants, et la simplification ne va pas obligatoirement dans le sens de
l'équité.
Permettez-moi aussi de dire que, au moment où nous entrons dans le monde de
l'informatique, il est un peu paradoxal de poser des problèmes de complexité
qui n'ont pas été posés précédemment. Ce qui ne signifie pas pour autant qu'il
n'y en a pas ! Nous devons toutefois préserver nos objectifs : aider les
familles nombreuses, aider les familles les plus modestes, aider ceux qui ont
des charges particulières.
Au regard de ces objectifs, si nous pouvons arriver à simplifier, nous le
ferons, et nous y travaillons actuellement.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Madame la ministre, je ne veux pas prolonger le débat sur ce
point, mais la simplification est vraiment nécessaire. Le conseil de
surveillance de l'ACOSS nous a d'ailleurs présenté une telle demande lors de sa
dernière réunion. Nous gérons aujourd'hui 300 lignes différentes et tous les
partenaires qui étaient autour de la table ce jour-là - et ils étaient nombreux
- ont souhaité une telle simplification.
Aujourd'hui, malgré les programmes informatiques, la complexité est telle
qu'il existe des blocages, que les caisses dénoncent. M. Huriet s'est expliqué
au nom des familles et la demande est unanime de la part des partenaires de
l'ACOSS.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, ainsi modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - La Caisse nationale des allocations familiales bénéficie d'une
garantie de ressources pour la période courant du 1er janvier 1998 au 31
décembre 2002.
« Les ressources de la Caisse nationale des allocations familiales perçues au
titre de l'année 2002 ne seront pas inférieures aux ressources de cette caisse
pour l'année 1997 revalorisées, déduction faite de la subvention versée par
l'Etat au titre de la majoration d'allocation de rentrée scolaire et d'un
montant équivalent aux ressources transférées en 2000 à la Caisse nationale de
l'assurance maladie des travailleurs salariés en vertu de l'article 10 de la
loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie
universelle.
« Dans le cas contraire, constaté à l'issue de la période mentionnée au
premier alinéa par la Commission des comptes de la sécurité sociale, un
versement à la Caisse nationale des allocations familiales permet, dans les
conditions prévues par la loi de financement de la sécurité sociale, de combler
la différence observée.
« La revalorisation mentionnée au deuxième alinéa est égale à l'évolution du
produit intérieur brut en valeur aux prix courants sur l'ensemble de la période
visée au premier alinéa, mentionnée dans le rapport sur les comptes de la
nation. »
Par amendement n° 11, MM. Machet et Descours, au nom de la commission des
affaires sociales, proposent, dans le premier alinéa de cet article, de
remplacer le millésime : « 1998 » par le millésime : « 1999 » et le millésime :
« 2002 » par le millésime : « 2003 »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Monsieur le président, si vous m'y autorisez, je défendrai en
même temps les amendements n°s 11 et 12, qui ont le même objet.
M. le président.
J'appelle donc en discussion l'amendement n° 12, présenté par MM. Machet et
Descours, au nom de la commission des affaires sociales, et visant, dans le
deuxième alinéa de l'article 9, remplacer le millésime : « 2002 » par le
millésime : « 2003 » et le millésime : « 1997 » par le millésime : « 1998 »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Ces deux amendements visent à conférer une plus grande
efficacité à la garantie de ressources de la branche famille, instituée par le
présent article.
Il décale d'une année cette garantie de ressources afin qu'elle couvre la
période 1999-2003 et non la période 1998-2002, et qu'elle prenne comme base de
référence l'année 1998 et non l'année 1997.
Si la philosophie du système n'a pas changé, les dates d'application en ont
été modifiées pour le conforter.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amnedement n° 12, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 13, MM. Machet et Descours, au nom de la commission des
affaires sociales, proposent de rédiger comme suit la fin du troisième alinéa
de l'article 9 :
« ... un versement de l'Etat à la Caisse nationale des allocations familiales
permet, dans les conditions prévues par les lois de finances et de financement
de la sécurité sociale, de combler la différence observée. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de précision qui dispose que
l'éventuel versement compensateur à la branche famille proviendra - ce qui
n'était pas suffisamment précisé - de l'Etat, comme c'était le cas dans le
dispositif institué par la loi « famille » de 1994 et comme vous l'avez
vous-même confirmé, madame la ministre, devant notre commission, le 21 octobre,
en déclarant que l'Etat serait garant des ressources de la branche famille.
Nous espérons que le Gouvernement sera favorable à cet amendement de
précision.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je confirme ce que j'ai dit
devant la commission : je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Section 2
Branche vieillesse
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - I. - A la section 2 du chapitre Ier du titre V du livre II du
code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 251-6-1 ainsi rédigé
:
«
Art. L. 251-6-1
. - La Caisse nationale d'assurance vieillesse des
travailleurs salariés affecte au fonds de réserve pour les retraites mentionné
au deuxième alinéa de l'article L. 135-1 :
« 1° Le résultat excédentaire de l'exercice clos de chacun des fonds dont elle
a la gestion, à l'exception de celui du régime spécial mentionné à l'article L.
715-1 ; un arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du
budget fixe chaque année la date de ce versement ;
« 2° Le cas échéant, en cours d'exercice, un montant représentatif d'une
fraction de l'excédent prévisionnel de l'exercice tel que présenté par la
Commission des comptes de la sécurité sociale lors de sa réunion du second
semestre de ce même exercice ; un arrêté conjoint des ministres chargés de la
sécurité sociale et du budget détermine les montants à verser ainsi que les
dates de versement. »
« II. - L'article L. 135-6 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le 3° devient le 4° ;
« 2° Il est inséré un 3° ainsi rédigé :
«
3°
Les montants résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 ;
»
« 3° Il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
«
3°
bis Une fraction égale à 49 % du produit des prélèvements visés
aux articles L. 245-14 à L. 245-16 ; ».
« III. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter de
l'exercice comptable 1999.
« IV. - Le II de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
«
II. -
Le produit des prélèvements mentionnés au I est ainsi réparti
:
« - 49 % au fonds mentionné à l'article L. 135-6 ;
« - 8 % à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés
;
« - 30 % à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs
salariés ;
« - 13 % à la Caisse nationale des allocations familiales. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 14 est présenté par MM. Vasselle et Descours, au nom de la
commission des affaires sociales.
L'amendement n° 93 est présenté par M. Louis Boyer et les membres du groupe
des Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 14.
M. Alain Vasselle,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame le ministre, mes chers collègues, sur l'initiative de notre commission,
le Sénat n'avait pas rejeté, lors de l'examen du projet de loi de financement
de la sécurité sociale pour 1999, le principe d'un fonds de réserve pour les
retraites.
Nous avions cependant, à l'époque, souligné que la constitution d'un tel fonds
n'avait véritablement de sens que si un certain nombre de conditions étaient
respectées.
La première était que la constitution d'un fonds de réserve supposait que les
pouvoirs publics mènent effectivement une politique de retraite dans une
perspective à long terme, ce qui n'est manifestement pas le cas pour le
moment.
La deuxième condition était que ce fonds de réserve ait une mission claire et
définie de manière préalable, en l'occurrence le lissage de la hausse des
cotisations. Or aucun objectif n'a encore été assigné au fonds créé par la loi
de financement de la sécurité sociale pour 1999. Comme l'ont rappelé tout à
l'heure Mme le ministre et notre rapporteur M. Descours, seul un décret paru au
Journal officiel
le 24 octobre 1999 - c'est-à-dire il y a à peu près
trois semaines - a prévu les modifications relatives au comité de surveillance
du FSV ; mais la finalité des modalités de gestion du fonds de réserve reste
encore totalement floue.
La troisième condition est la suivante : le fonds de lissage ne résout pas le
problème du financement futur des retraites et ne peut donc constituer qu'une
mesure d'accompagnement d'une réforme d'ensemble des retraites. Or cette
réforme n'est toujours pas engagée.
Quatrième condition, la constitution d'un fonds de lissage exige des
ressources importantes et durables : de 400 à 500 milliards de francs au moins
en 2020 pour le seul régime général. Au regard de ces besoins, et même si l'on
tient compte de la montée en puissance qui fera suite à l'adoption des
dispositions prévues par le présent projet de loi de financement de la sécurité
sociale, les 2 milliards de francs dont dispose le fonds de réserve paraissent
bien dérisoires ! Près d'une année après sa création, le fonds de réserve
reste, de ce point de vue, un fonds très virtuel...
Permettez-moi à ce sujet une parenthèse : je serai curieux de savoir, madame
le ministre, comment cette somme sera placée. En effet, le décret prévoit que
les disponibilités du fonds peuvent faire l'objet de placements dans des
conditions définies par le ministre chargé de l'économie et des finances, ce
qui - vous le reconnaîtrez - n'est pas très explicite et n'indique pas
réellement comment ce fonds sera géré. Mais je ferme là la parenthèse.
Alors que la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 avait prévu
que les excédents du fonds de solidarité vieillesse alimenteraient le fonds de
réserve, le Gouvernement a finalement décidé d'amputer ces excédents en en
diminuant les recettes et de faire bénéficier le fonds de réserve d'une
fiscalité affectée par l'intermédiaire de 49 % du prélevement social de 2 % sur
les revenus du patrimoine correspondant aux 5,5 milliards de francs que n'a pas
versés le régime général au financement des 35 heures.
La commission des affaires sociales considère que ce tour de passe-passe est
inacceptable, car il fait financer de manière directe le fonds de réserve par
toutes les branches de la sécurité sociale - ce que nous dénonçons depuis
l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale - y compris par les
branches maladie et famille, au mépris du principe de la séparation des
branches.
Il prive, ce faisant, la CNAMTS d'une recette qui avait été attribuée pour
financer la couverture maladie universelle décidée au début de l'été,
c'est-à-dire il y a peu de temps. Par ailleurs, il contribue à faire financer
de manière indirecte les 35 heures par la sécurité sociale.
Parallèlement, le Gouvernement racle les fonds de tiroirs en mettant à
contribution de manière ponctuelle les caisses d'épargne et la Caisse des
dépôts et consignations.
Cette agitation un peu désordonnée, cette politique au coup par coup, révèle
l'absence totale de plans de financement à moyen ou à long terme pour le fonds
de réserve. Le Gouvernement, à l'évidence, s'efforce de masquer une terrible
réalité, il nous donne le sentiment de ne pas savoir comment alimenter
durablement ce fonds.
Enfin, la cinquième des conditions que j'ai évoquées est que la constitution
d'un tel fonds exige de définir de manière préalable les conditions de sa
gestion financière. Or, pour le moment, rien n'a été fait.
Aucune des cinq conditions que j'ai énumérées n'est aujourd'hui respectée. Le
fonds de réserve n'est, dès lors, pour le Gouvernement, qu'un alibi destiné à
masquer son incapacité à entreprendre les vraies réformes nécessaires à assurer
la pérennité à long terme de notre système de retraite.
Pas plus que l'an dernier, la commission des affaires sociales ne souhaite
supprimer le fonds de réserve pour les retraites, qui peut servir de réceptacle
à des recettes non fiscales - par exemple les sommes provenant de la réforme
des caisses d'épargne - ou à des libéralités spontanées, telles que celles de
la Caisse des dépôts et consignations.
En revanche, la commission est opposée à une ponction sur les réserves de la
sécurité sociale, opérée par le biais de contributions directes ou indirectes,
avant que les lignes directrices de la réforme des retraites n'aient été
clairement définies et ladite réforme effectivement engagée.
C'est la raison pour laquelle je vous propose, mes chers collègues, au nom de
la commission des affaires sociales, d'adopter un amendement de suppression de
cet article 10, non pas, je le répète, parce que nous sommes opposés sur le
principe à la constitution de ce fonds de réserve, mais parce que nous n'avons
obtenu, depuis maintenant plus d'un an, aucun élément qui nous permette
d'apprécier comment ce fonds sera géré et comment il sera alimenté d'une
manière durable et à un niveau correspondant aux besoins du financement des
retraites à partir de 2006.
M. le président.
La parole est à M. Louis Boyer, pour présenter l'amendement n° 93.
M. Louis Boyer.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 93 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 14 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis un peu étonnée de la
proposition de M. Vasselle, ou plutôt de son absence de proposition.
Je crois qu'il est quand même un peu paradoxal de dire, comme ce fut le cas
l'année dernière, que ce fonds de réserve était attendu mais que son montant
était négligeable, puis, alors que nous l'abondons cette année pour arriver à
un montant de plus de 20 milliards de francs, de nous le reprocher.
Je dois dire qu'après vous avoir entendu, monsieur Vasselle, je ne comprends
plus grand-chose.
Vous dites que vous êtes favorable à la constitution d'un fonds de réserve,
mais vous affirmez en même temps qu'il ne peut en aucun cas y avoir de
prélèvement complémentaire, ni d'impôt, ni de cotisations sociales, ni de
ressources provenant de la Caisse des dépôts et consignations, ni de recours
aux fonds de mutualisation des caisses d'épargne, que nous avons mobilisés.
Dans ces conditions, comment voulez-vous financer ce fonds de retraite ?
Plus globalement, j'entends toutes ces critiques de l'opposition, qui nous
presse de prendre des mesures sur les retraites, mais je n'ai toujours pas
compris quelles étaient ses propositions. Vous ne voulez pas d'un fonds de
réserve augmentant les impôts, les cotisations ou les prélèvements de quelque
ordre que ce soit. Alors, que souhaitez-vous ? Repousser à soixante-cinq ans ou
à soixante-dix ans l'âge de la retraite ? Augmenter les cotisations des
entreprises et des salariés de 10 % à 15 % ? Il faudra bien, à un moment, le
dire !
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Ce n'est pas nous qui
gouvernons, madame la ministre !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Bien évidemment ! Mais ne
reprochez pas à ceux qui gouvernent de mettre de l'argent de côté pour essayer
de régler le problème des retraites, ce qui n'a pas été fait jusqu'à présent
!
Il y a une certaine contradiction à dire qu'il faut absolument traiter le
problème en instituant un fonds tout en refusant obstinément toutes les
resources susceptibles d'alimenter ce fonds.
Je veux bien que l'on ne soit pas à une contradiction près, mais, à un moment
donné, en démocratie, il faut assurer la cohérence des discours ! Or,
excusez-moi de vous le dire, là, elle ne l'est pas !
En effet, nous ne faisons que ce que nous avions dit, c'est-à-dire qu'au-delà
de la dotation de l'année dernière nous affectons dans ce fonds de réserve - et
quoi de plus normal ! - non seulement les excédents de la CNAV de 1999, qui
s'élèvent à 4,4 milliards de francs, ainsi que ceux de 2000, mais aussi des
prélèvements non pas sur les contributions des employeurs et des salariés,
comme vous le disiez, mais sur les revenus du capital.
Aujourd'hui, pour les Français, ce problème passe avant celui du chômage, et
tout le monde reconnaît qu'il faut constituer des réserves.
La Caisse des dépôts et consignations a proposé au ministère de l'économie,
des finances et de l'industrie, ce qui est à l'étude, de verser 3 milliards de
francs à ce fonds de réserve, et par ailleurs, le Gouvernement a décidé d'y
affecter 4 milliards de francs des fonds de mutualisation des caisses
d'épargne.
Nous serons ainsi à plus de 20 milliards de francs en fin d'année.
Bien sûr, ce n'est qu'un début, mais si, chaque année, nous obtenons des
résultats similaires, nous parviendrons à traiter une partie non négligeable du
problème des retraites.
Des décisions seront annoncées par le Premier ministre au mois de janvier
prochain. Nous souhaitons, grâce aux excédents de la CNAV ou aux recettes
exceptionnelles issues de la mutualisation des caisses d'épargne, alléger les
difficultés du traitement des retraites.
Vous êtes défavorables à ces mesures, mais je ne comprends toujours pas
quelles sont celles que vous préconisez pour résoudre ce problème.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
J'ai écouté avec une extrême attention Mme le ministre
essayer de convaincre la Haute Assemblée qu'en définitive elle était en
contradiction avec elle-même parce que, en n'acceptant pas l'alimentation du
fonds, elle s'opposait de fait à sa constitution, et ce pour laisser à penser à
l'opinion publique que la majorité sénatoriale ne veut pas soutenir le
Gouvernement qui engage une réforme nécessaire en matière de retraites.
Je m'inscris en faux contre cette assertion de Mme le ministre selon laquelle
la majorité sénatoriale serait incohérente !
Nous avons indiqué très clairement en 1999, je le répète, et nous le
réaffirmons à l'occasion du projet de loi de financement de 2000, ne pas être
opposés au principe de constitution d'un fonds de réserve. Encore faut-il qu'il
corresponde à quelque chose, que nous sachions comment il va être géré, comment
il sera alimenté de manière pérenne, comment il progressera pour satisfaire les
besoins dès 2006.
Nous ne pouvons pas, nous, Parlement, puisque le projet de loi de financement
a pour objet justement de nous permettre de contrôler les dépenses de la
sécurité sociale, donner un chèque en blanc au Gouvernement, qui nous propose
une gestion « à la petite semaine » consistant à mettre 2 milliards de francs
une année, à rajouter 10 milliards de francs un peu plus tard, puis 5 ou 6
milliards cette année, prélevés les excédents de la branche famille et de la
branche maladie. Ce n'est certainement pas la bonne méthode pour alimenter de
façon pérenne ce fonds de réserve.
Vous savez pourtant, madame le ministre, et le Gouvernement aussi, qu'une
véritable réforme des retraites passe par une réforme de structures. Or les
seuls gouvernements qui ont eu le courage d'engager des réformes de structures,
ce sont les gouvernements Balladur et Juppé. Pour votre part, vous restez
l'arme au pied, arguant que vous poursuivez la concertation et que ce n'est
qu'à son issue que vous envisagerez les réformes de structures nécessaires.
Vous savez très bien que, en alimentant ce fonds au niveau où vous
l'alimentez, ses réserves seront insuffisantes pour faire face aux besoins en
2006. Inévitablement, il faudra augmenter le montant des cotisations. Ne créez
donc pas d'illusion, ne laissez pas croire aux Français que la constitution de
ce fonds de réserve permettra de régler leurs problèmes de retraite,...
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Personne n'a dit cela !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... qu'en 2006 on rasera gratis et que, à cette date,
l'ensemble des actifs n'auront pas à mettre la main à la poche pour assurer
l'équilibre des retraites... et en 2020
a fortiori,
en 2040 plus encore
puisque les experts chiffrent les besoins à plusieurs centaines de milliards de
francs !
Madame le ministre, il faut revenir à la réalité des faits. N'intentez pas un
mauvais procès à la majorité sénatoriale. Lorsque vous serez en mesure de nous
apporter des éléments fiables sur la manière dont ce fonds sera alimenté de
façon durable, dont il sera géré et dont il progressera pour atteindre les
objectifs que vous entendez fixer et sur lesquels nous sommes disposés à vous
soutenir, nous serons prêts à adopter les propositions que vous nous ferez pour
alimenter ce fonds.
Pour le moment, il ne nous est pas possible d'approuver votre proposition,
faute d'éléments suffisamment fiables.
En outre, s'agissant des 2 milliards de francs, je souhaiterais que vous nous
précisiez les modalités de leur gestion. Par qui seront-ils gérés ? Comment
vont-ils évoluer ? Quelle sera leur affectation ? Nous ne disposons d'aucune
information sur ces points.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Claude Domeizel.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
M. Vasselle et la majorité sénatoriale sont en train de se prendre à leur
propre piège.
L'année dernière, ils nous ont dit qu'ils étaient pour le fonds de réserve,
mais que 2 milliards de francs, c'était une somme ridicule. Aujourd'hui, alors
qu'il disposera de 20 milliards de francs, ils tentent de trouver d'autres
arguments.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce sont exactement les mêmes !
M. Claude Domeizel.
Monsieur Vasselle, j'ai lu votre rapport écrit. Sur une vingtaine de pages,
vous expliquez le bien-fondé du fonds de réserve et même comment il faut
l'alimenter. Et vous concluez : « Aucune de ces conditions n'étant aujourd'hui
remplie, le fonds de réserve n'est qu'un alibi à l'immobilisme gouvernemental.
» Je ne comprends pas très bien où est l'immobilisme alors que le Gouvernement
va de l'avant !
Je conçois qu'on soit favorable au fonds de réserve et que l'on n'approuve pas
les moyens proposés pour l'alimenter - c'est la position de M. Vasselle. Alors,
monsieur Vasselle, faites des propositions !
Mais vous n'en faites pas, par manque de courage, alors que vous expliquez
durant vingt pages de votre rapport écrit comment il faut faire !
Le groupe socialiste se prononce pour ce fonds. La proposition du Gouvernement
lui convient, même si elle aurait peut-être pu être aménagée. Aussi, nous
voterons contre l'amendement de suppression de l'article 10, car cet amendement
est, à nos yeux, je l'ai déjà dit dans la discussion générale, la preuve que
vous tenez un double langage.
M. Louis Boyer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Louis Boyer.
M. Louis Boyer.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 10
est censé traiter des retraites. La modicité de son contenu est à la mesure de
l'importance de l'enjeu du financement des retraites futures.
Il n'est pas fait grand-chose pour conforter notre système de retraite par
répartition. Il faut dès maintenant conforter la retraite par répartition.
Les données démographiques sont connues de tous. Certes, le régime général est
équilibré ; il fera même cette année des bénéfices, que vous allez ponctionner.
Mais, à brève échéance, il sera de nouveau en déficit. L'avenir des régimes
spéciaux n'est pas mieux assuré. Les millions de retraités actuels se demandent
si leur revenu sera assuré et à quel niveau. L'impact financier de l'attentisme
est bien connu : plus on tarde, plus les difficultés financières se répercutent
sur le paiement des pensions.
Face à des enjeux de cette importance, le Gouvernement ne répond que par des
atermoiements en proposant que quelques milliards de francs d'excédents soient
versés au fonds de réserve. Mais ce sont des dizaines de milliards de francs
qui sont en jeu : 66 milliards de francs par an dès 2006, plus de 300 milliards
de francs chaque année à partir de 2015. Votre fonds de réserve permettra au
mieux de couvrir le tiers du déficit qui apparaîtra en 2006. Ce fonds n'est
qu'un alibi pour masquer l'inaction. Sur les régimes spéciaux, rien non plus
n'est fait pour réduire l'inégalité entre salariés du public et salariés du
privé.
Nous préconisons, en outre, la création de plans d'épargne retraite par
capitalisation.
Alors que tous les grands pays ont adopté un système par capitalisation pour
assurer l'avenir et ajouter un étage aux régimes en place, nous déplorons votre
refus purement idéologique de vous engager à temps dans une voie qui aurait dû
être ouverte depuis longtemps et qui a été explorée par la loi Thomas de
1997.
Nous souhaitons donc la suppression de cet article 10.
M. Claude Domeizel.
C'est incohérent !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 10 est supprimé.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
14
DÉPÔT DE PROJETS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
de la convention entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République d'Estonie en vue d'éviter les doubles impositions
et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le
revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 78, distribué et renvoyé à la
commision des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la
nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale
dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
de la convention entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République de Lettonie en vue d'éviter les doubles
impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts
sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 79, distribué et renvoyé à la
commision des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la
nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale
dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
de la convention entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République de Lituanie en vue d'éviter les doubles
impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts
sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 80, distribué et renvoyé à la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale
dans les conditions prévues par le règlement.
15
RETRAIT D'UN TEXTE SOUMIS
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 17 novembre 1999, l'informant que la proposition de décision du Conseil portant attribution d'une aide macrofinancière supplémentaire à la Bulgarie (n° E 1330) a été transmise par erreur le 9 novembre 1999 et qu'il y avait lieu, en conséquence, de procéder au retrait de ce texte.
16
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Lucien Lanter un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration général sur la proposition de loi organique de M. Gaston
Flosse et des membres du groupe du Rassemblement pour la République, tendant à
améliorer le régime électoral applicable à la formation de l'Assemblée de la
Polynésie française (n° 471, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 76 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean Huchon un rapport fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, portant ratification des ordonnances n° 98-520 du 24 juin 1998, n°
98-521 du 24 juin 1998, n° 98-523 du 24 juin 1998, n° 98-526 du 24 juin 1998,
n° 98-776 du 2 septembre 1998, n° 98-777 du 2 septembre 1998 prises en
application de la loi n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du
Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à
l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer (n° 423,
1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 77 et distribué.
J'ai reçu de M. Henri Torre un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification des
ordonnances n° 98-524 du 24 juin 1998, n° 98-525 du 24 juin 1998, n° 98-581 du
8 juillet 1998, n° 98-775 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi
n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par
ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à
l'adaptation du droit applicable outre-mer (n° 422, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 81 et distribué.
17
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, jeudi 18 novembre 1999, à neuf heures trente, quinze
heures et éventuellement le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 40, 1999-2000) de financement de
la sécurité sociale pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Rapport (n° 58, 1999-2000) de MM. Charles Descours, Jacques Machet et Alain
Vasselle, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 68, 1999-2000) de M. Jacques Oudin, fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la conférence
ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce à Seattle :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 22 novembre
1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi organique de
M. Gaston Flosse et des membres du groupe du Rassemblement pour la République
tendant à améliorer le régime électoral applicable à la formation de
l'assemblée de la Polynésie française (n° 76, 1999-2000):
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois (n° 62, 1999-2000) sur :
- la proposition de loi de M. Bernard Joly visant à généraliser l'interdiction
des candidatures multiples aux élections ;
- la proposition de loi de M. Philippe Marini et plusieurs de ses collègues
portant diverses dispositions relatives aux élections municipales, cantonales
et législatives ;
- la proposition de loi de M. Michel Dreyfus-Schmidt et des membres du groupe
socialiste tendant à interdire les candidatures multiples aux élections
cantonales ;
- la proposition de loi de M. Michel Dreyfus-Schmidt et des membres du groupe
socialiste relative à l'élection des députés et à l'élection des conseillers
généraux ;
- et la proposition de loi de M. Georges Gruillot et plusieurs de ses
collègues relative aux conditions d'éligibilité des candidats aux élections
cantonales et aux déclarations de candidatures au deuxième tour des élections
cantonales et législatives :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jacques
Pelletier permettant au juge des tutelles d'autoriser un majeur sous tutelle à
être inscrit sur une liste électorale (n° 63, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi organique de
M. Jacques Pelletier relative à l'inéligibilité des majeurs sous tutelle (n°
67, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 73, 1999-2000) sur :
- la proposition de loi de M. Joseph Ostermann et plusieurs de ses collègues
relative au régime local d'assurance maladie complémentaire obligatoire des
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle applicable aux assurés
des professions agricoles et forestières ;
- et la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et M. Roger Hesling relative
au régime local d'assurance maladie complémentaire obligatoire des départements
du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle applicable aux assurés des
professions agricoles et forestières :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification des
ordonnances n° 98-522 du 24 juin 1998, n° 98-731 du 20 août 1998, n° 98-773 du
2 septembre 1998 prises en application de la loi n° 98-145 du 6 mars 1998
portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures
législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit
applicable outre-mer (n° 420, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification des
ordonnances n° 98-580 du 8 juillet 1998, n° 98-582 du 8 juillet 1998, n° 98-728
du 20 août 1998, n° 98-729 du 20 août 1998, n° 98-730 du 20 août 1998, n°
98-732 du 20 août 1998, n° 98-774 du 2 septembre 1998 prises en application de
la loi n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre,
par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à
l'adaptation du droit applicable outre-mer (n° 421, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification des
ordonnances n° 98-524 du 24 juin 1998, n° 98-525 du 24 juin 1998, n° 98-581 du
8 juillet 1998, n° 98-775 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi
n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par
ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à
l'adaptation du droit applicable outre-mer (n° 422, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification des
ordonnances n° 98-520 du 24 juin 1998, n° 98-521 du 24 juin 1998, n° 98-523 du
24 juin 1998, n° 98-526 du 24 juin 1998, n° 98-776 du 2 septembre 1998, n°
98-777 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi n° 98-145 du 6 mars
1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les
mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit
applicable outre-mer (n° 423, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 novembre 1999, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 18 novembre 1999, à zéro heure
vingt-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
M. Louis Althapé a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 497 (1998-1999) de M. Daniel Eckenspieller relative aux enquêtes publiques et modifiant la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement.
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
M. Robert Del Picchia a été nommé rapporteur du projet de loi n° 48
(1999-2000) autorisant la ratification du protocole, établi sur la base de
l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, relatif au champ d'application
du blanchiment de revenus dans la convention sur l'emploi de l'informatique
dans le domaine des douanes et à l'inclusion du numéro d'immatriculation du
moyen de transport dans la convention.
M. Robert Del Picchia a été nommé rapporteur du projet de loi n° 49
(1999-2000) autorisant la ratification de la convention, établie sur la base de
l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, sur l'emploi de l'informatique
dans le domaine des douanes.
M. Robert Del Picchia a été nommé rapporteur du projet de loi n° 50
(1999-2000) autorisant la ratification du protocole, établi sur la base de
l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, concernant l'interprétation, à
titre préjudiciel, par la Cour de justice des Communautés européennes, de la
convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes.
M. Robert Del Picchia a été nommé rapporteur du projet de loi n° 51
(1999-2000) autorisant la ratification de l'accord relatif à l'application
provisoire entre certains Etats membres de l'Union européenne de la convention,
établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, sur
l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes.
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Jean Chérioux a été nommé rapporteur de sa proposition de loi n° 52 (1999-2000) tendant à favoriser le développement de l'actionnariat salarié.
COMMISSION DES FINANCES
M. Michel Mercier a été nommé rapporteur du projet de loi n° 56 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, modifiant le code général des collectivités territoriales et relatif à la prise en compte du recensement général de la population de 1999 pour la répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales.
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
COMITÉ CONSULTATIF DE L'UTILISATION DE L'ÉNERGIE
Lors de sa séance du 17 novembre 1999, le Sénat a reconduit M. Henri Revol dans ses fonctions de membre du comité consultatif de l'utilisation de l'énergie.
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L'AGENCE
POUR L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER
Lors de sa séance du 17 novembre 1999, le Sénat a reconduit M. Paul d'Ornano dans ses fonctions de membre du conseil d'administration de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.
COMMISSION CENTRALE DE CLASSEMENT
DES DÉBITS DE TABAC
Lors de sa séance du 17 novembre 1999, le Sénat a reconduit M. Auguste Cazalet dans ses fonctions de membre de la commission centrale de classement des débits de tabac.
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION PERMANENTE
Dans sa séance du mercredi 17 novembre 1999, le Sénat a nommé M. Jean-Pierre
Vial membre de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Simon
Loueckhote, démissionnaire.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Remboursement des traitements
des maladies orphelines
655.
- 17 novembre 1999. -
M. Francis Grignon
attire l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale
sur le remboursement des traitements de certaines maladies dites orphelines. En
effet, la maladie de Biermer, maladie génétique grave et orpheline peut être
soignée par des injections régulières de vitamines B 12. Or ce traitement n'est
nullement remboursé par la sécurité sociale. Il lui demande donc si, dans ce
type de cas, qui ne doit être le seul, il ne serait pas envisageable de prévoir
un remboursement par la sécurité sociale, remboursement qui serait ainsi
fonction de la pathologie et non du médicament.
Contribution représentative du droit de bail
sur les locations de chasse en Alsace-Moselle
656. - 17 novembre 1999. - M. Francis Grignon attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conséquences de l'article 12 de la loi de finances rectificative pour 1998 n° 98-1267 du 30 décembre 1998 remplaçant les droits d'enseignement à la charge des locataires par une contribution annuelle représentative du droit de bail à la charge quant à elle des bailleurs. Alors que le droit de bail était traditionnellement payé directement par le locataire de la chasse, la commune doit désormais acquitter la nouvelle contribution puis la récupérer auprès du locataire. Cette mesure soulève un certain nombre de difficultés dans le cas des locations de chasse par les communes d'Alsace et de Moselle. En effet, ces dispositions ne trouvent pas une application satisfaisante du fait des dispositions particulière du droit local, car les communes d'Alsace et de Moselle gèrent la chasse pour le compte des propriétaires fonciers. De plus, ces nouvelles dispositions créent un échelon supplémentaire dans la perception de la contribution, ce qui a pour effet de transférer la responsabilité de la déclaration et du paiement de la contribution à la commune. Ainsi, la mise en oeuvre de cette contribution impose aux communes des procédures supplémentaires, ce qui ne va pas dans le sens d'une simplification administrative. Il lui demande donc s'il ne serait pas envisageable de revenir à la situation antérieure d'un droit payé directement par les locataires de la chasse.