Séance du 2 novembre 1999
M. le président. La parole est à M. Bonnet, auteur de la question n° 606, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Christian Bonnet. Le samedi 2 janvier 1999, sept étudiants, à la suite d'une imprudence extravagante, ont mobilisé, pour les secourir sur un rocher voisin du Mont-Saint-Michel, quarante hommes, deux hélicoptères, un canot de la Société nationale de sauvetage en mer, la SNSM, et l'un des participants a seulement indiqué : « Nous avions l'impression de participer à une superproduction. »
Cet été, deux jeunes inconscients - et, en l'occurrence, singulièrement coupables, nous allons le voir - louent un bateau sur la presqu'île de Quiberon, avec lequel ils font une sortie en mer. Ils ne sont pas rentrés le soir. On met alors immédiatement en alerte deux vedettes de la SNSM, une vedette de la gendarmerie, un hélicoptère de la protection civile et une vedette des affaires maritimes, qui patrouillent toute la nuit. Or les gendarmes de Belle-Ile découvrent le lendemain ces jeunes, qui étaient tout simplement restés coucher à Belle-Ile sans prévenir qui que ce soit alors qu'ils devaient rentrer la veille au soir.
Je connais et respecte bien évidemment les lois internationales concernant les secours en mer, qu'elles soient écrites ou non écrites, et tout autant la loi française de 1967, qui pose le principe de la gratuité de tels secours. Mais je connais aussi la loi « montagne » de 1985. Certes, celle-ci est limitée au ski alpin et au ski de fond, mais notre collègue M. Amoudry vient de déposer une proposition de loi tendant à étendre ce texte pour permettre aux communes de bénéficier au moins d'une contribution de la part de ceux qui, à la suite d'imprudences ou de négligences caractérisées, ont amené des secouristes à venir à leur secours, parfois au péril de leur vie.
Dans des cas semblables à celui de l'été dernier que je viens de citer - il n'est pas le seul et a représenté une somme supérieure à 300 000 francs - qui exigent la mise en oeuvre de moyens considérables pour aller rechercher en mer des personnes dont c'est peu de dire qu'elles ont fait preuve d'inconscience, il me paraît indispensable de frapper ces personnes au moins au portefeuille, comme on dit vulgairement. C'est la raison pour laquelle j'ai posé cette question.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Chevènement, qui est retenu par le conseil de sécurité intérieure.
M. Christian Bonnet. Je vous en prie.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Il aurait aimé, j'en suis persuadé, répondre à cette question que vous connaissez fort bien car elle se pose fréquemment dans votre région. Elle correspond à des situations que l'opinion publique suit souvent avec beaucoup d'attention.
Je rappellerai l'état du droit et de la législation.
Comme vous venez de l'indiquer, il en va différemment pour les secours en mer - qui sont gratuits - et pour les secours en montagne.
La décision de mise en oeuvre des moyens de secours relève des autorités locales : maire, préfet ou, éventuellement, préfet maritime, et une telle responsabilité doit être appréciée in situ. La mise en oeuvre de ces moyens intervient conformément aux instructions du Premier ministre - la dernière en date est une circulaire du 30 juillet 1998 relative à la coordination dans la zone côtière des moyens de sécurité, de recherche et de sauvetage des personnes en détresse en mer.
A l'échelon national, l'article 17 de la loi du 7 juillet 1967, que vous connaissez bien, établit la gratuité des secours aux personnes en mer et dans les eaux intérieures. Ce principe a été confirmé dans une instruction du Premier ministre en date du 29 mai 1990.
Comme vous l'avez vous-même indiqué, la gratuité des secours aux personnes en mer constitue un principe mondialement reconnu, appliqué par l'ensemble des Etats, et qui n'a jamais fait l'objet d'une remise en question auprès de l'Organisation maritime internationale.
Sur le fond, il n'en reste pas moins que la responsabilité des usagers dans la pratique des loisirs tant en mer qu'en montagne peut donner lieu à un vrai débat.
Dans le cas de la montagne, il faut rappeler que c'est la loi du 9 janvier 1985, dite « loi montagne », qui a créé pour les communes la possibilité - mais non l'obligation - d'organiser le remboursement des opérations de secours, et ce uniquement dans le cadre de deux activités sportives identifiées : le ski alpin et le ski de fond.
Il convient de rappeler ici que tout le dispositif pénal existant permet aux victimes ou à leurs ayants droit, ainsi qu'aux autorités publiques concernées, d'engager des actions de recherche en responsabilité pénale contre les personnes qui auraient un comportement manifestement et volontairement imprudent « pouvant exposer autrui à un risque de mort et de blessures », aux termes de l'article 223-1 du code pénal.
Tels sont, monsieur le sénateur, les quelques éléments de réponse qu'aurait souhaité vous apporter lui-même M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Christian Bonnet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet. Je remercie M. Masseret de la réponse qu'il m'a faite, réponse à laquelle, pour dire le vrai, je m'attendais.
Mais, le hasard faisant bien les choses, M. le ministre de l'équipement est présent au banc du Gouvernement. Aussi me permettrai-je de lui poser une question.
Ne serait-il pas envisageable, monsieur le ministre, de faire bénéficier la Société nationale de sauvetage en mer des amendes qui pourraient être infligées aux personnes qui font preuve d'une inconscience totale et qui mettent en péril la vie de certains sauveteurs ?
Ce serait d'autant plus justifié que, monsieur le ministre, à ma stupeur, j'ai vu, moi qui suis ces affaires - mais sans doute cela vous a-t-il échappé, dans la masse des affaires dont vous êtes responsable - que la subvention d'équipement à la Société nationale de sauvetage en mer, qui s'élevait à 9,7 millions de francs dans les budgets de 1997, de 1998 et de 1999, vient d'être réduite de 1 million de francs et fixée à 8,7 millions de francs. Je suis persuadé qu'il m'aura suffi d'appeler votre attention sur ce point pour que correction intervienne !
DISSOLUTION DE LA COMPAGNIE DÉPARTEMENTALE
D'INTERVENTION DE LA SEINE-SAINT-DENIS