Séance du 29 juin 1999
M. le président. Par amendement n° 18, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par le paragraphe III de l'article 20 pour l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale :
« Les organismes mentionnés au a de l'article L. 861-4 qui souhaitent être inscrits sur la liste prévue par cet article s'engagent à offrir aux bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la santé une couverture complémentaire prenant en charge, sous réserve de la réduction, de la suppression ou de la dispense de participation prévues par le présent code ou stipulées par les garanties collectives obligatoires professionnelles : ».
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Nous déroulons ici logiquement les modifications que nous avons apportées au texte initial du Gouvernement puisque, au-delà des RMIstes, nous prévoyons un certain nombre de contraintes pour ceux qui ne versent pas la participation qu'ils doivent verser aux termes de notre dispositif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 19, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose :
I. - A la fin du quatrième alinéa (3°) du texte présenté par le paragraphe III de l'article 20 pour l'article L. 861-3, de supprimer les mots : « dans des limites fixées par arrêté interministériel ».
II. - De supprimer le cinquième alinéa de ce texte.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Retour au texte de première lecture !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.) M. le président. Par amendement n° 20 rectifié, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose, après le cinquième alinéa du texte présenté par le paragraphe III de l'article 20 pour l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale, d'insérer dix alinéas ainsi rédigés :
« Pour la détermination des frais pris en charge au titre du présent article, une convention conclue entre, d'une part au moins deux des trois caisses nationales d'assurance maladie mentionnées à l'article L. 162-5 dont la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et d'autre part au moins une fédération représentative des mutuelles régies par le code de la mutualité et au moins une organisation représentative des entreprises régies par le code des assurances peut :
« a) Déroger aux articles L. 321-1 et L. 615-14 du présent code en ce qu'ils concernent les frais couverts par l'assurance maladie pour garantir la meilleure qualité des soins au meilleur prix ;
« b) Fixer la nature des frais mentionnés aux articles L. 321-1 et L. 615-14 pris en charge au titre du présent article pour tenir compte de la qualité et du prix du service médical rendu ;
« c) Fixer les critères de qualité et de prix auxquels doivent satisfaire les producteurs de biens et services médicaux pour bénéficier d'un agrément délivré par les signataires de la convention et ouvrant droit à la prise en charge des soins au titre du présent article ;
« d) Déterminer les modalités suivant lesquelles l'agrément prévu au c est délivré et porté à la connaissance des bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la santé, ainsi que les modalités suivant lesquelles la nature des frais mentionnés au a est portée à la connaissance des professionnels de santé et des assurés sociaux ;
« e) Fixer les conditions dans lesquelles des médecins conventionnés pourront accepter de renoncer à tout dépassement, sauf exigence particulière du malade, pour les bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la santé, les conditions dans lesquelles les chirurgiens-dentistes pourront accepter de limiter les dépassements susceptibles d'être autorisés par la convention nationale des chirurgiens-dentistes pour les soins visés au 3° ci-dessus et celles selon lesquelles les bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la santé pourront en avoir connaissance ;
« f) Fixer les conditions dans lesquelles est prise en compte la spécificité de la situation des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés et des personnes visées aux 3° et 4° de l'article L. 322-3.
« La convention, ses annexes et avenants n'entrent en vigueur qu'après approbation par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale pris après avis du conseil national de l'ordre des médecins et du conseil de la concurrence.
« En l'absence de convention, un arrêté ministériel pris dans les mêmes conditions détermine le panier de soins prévu au présent article.
« Le montant de la cotisation ou de la prime exigible pour cette couverture complémentaire est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et révisé chaque année. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. En cohérence avec sa proposition tendant à créer une allocation personnalisée à la santé dégressive en fonction des revenus, la commission propose de définir, dans l'article L. 861-3, le contenu de la couverture complémentaire maladie que s'engageront à proposer, à un tarif uniforme, les organismes de protection complémentaire qui accepteront de participer au dispositif.
J'ai entendu Mme Dieulangard parler, dans la discussion générale, de « panier de soins ». C'est un terme que je n'avais pas utilisé mais, comme il a été employé à de nombreuses reprises, je veux bien le faire mien.
Les amendements que la commission vous proposera d'adopter à ce sujet reprennent à leur compte les dispositions du projet de loi sur le caractère « différentiel » de cette couverture, qui s'appliquera sous réserve de la réduction ou de la suppression du ticket modérateur, prévues par le code de la sécurité sociale ou stipulées par les garanties collectives obligatoires professionnelles.
Ils retiennent aussi le principe du tiers payant, ainsi, bien entendu, que le dispositif permettant aux professionnels de santé d'obtenir un interlocuteur unique pour se voir adresser leur rémunération dans ce cadre.
La commission veut autoriser les régimes obligatoires d'assurance maladie et les fédérations représentatives des organismes assureurs, de prévoyance et mutualistes, à établir ensemble une convention, ce qu'elles ont déjà fait.
J'ai entendu que cela nous était reproché par certains au cours de la discussion. Nous croyons cependant que, dans ce domaine, la discussion qui existe entre le régime de base et les régimes complémentaires, que ce soient les organismes mutualistes, les assureurs ou les régimes de prévoyance, doit privilégier le dialogue avant qu'il soit nécessaire de recourir à la loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable : la définition des biens pris en charge par la sécurité sociale au titre de la CMU est une prérogative du Parlement et du Gouvernement. Je crois qu'il y aurait confusion à introduire des responsabilités différentes.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Le débat relatif au panier de soins a été récemment introduit par la CNAM.
Les professionnels estiment qu'il leur appartient de définir ce panier et que tel n'est pas le rôle du Gouvernement. Nous estimons, quant à nous, que c'est le Parlement, dans la mesure où il représente le peuple, qui doit définir ledit panier de soins.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement et le Parlement !
M. Charles Descours, rapporteur. Non ! Le Gouvernement n'est pas l'élu du peuple !
Cela étant, nous n'allons pas régler en l'instant, à minuit cinq, à la veille d'une session qui s'achève la question de savoir qui détermine le panier de soins pour le contrôle des dépenses de santé !
M. Paul Girod. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. J'ai entendu M. le secrétaire d'Etat nous dire que cette question était de la compétence du Parlement et du Gouvernement.
Il me semble que la Constitution établit des délimitations assez nettes entre ce qui est du ressort législatif et ce qui est du ressort réglementaire ! J'aimerais donc que M. le secrétaire d'Etat nous dise quelle partie de l'amendement n° 20 rectifié il considère comme étant de nature législative et quelle est la partie, en revanche, pour laquelle il revendique la totale responsabilité du Gouvernement dans la mesure où elle lui semble réglementaire.
Je suis par nature un peu réticent devant ce genre d'interpénétration des deux domaines, mais, là, j'aimerais savoir où nous en sommes.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Dans ces conditions, je vais vous infliger la réponse complète que j'avais préparée.
Si l'amendement n° 20 rectifié était adopté, c'est par convention entre les caisses et les organismes complémentaires, même s'il est prévu un agrément ministériel, que seraient définis les biens remboursés aux bénéficiaires de la couverture maladie universelle. Ces conventions pourraient même déroger aux articles fixant les biens couverts au même titre que la couverture de base.
J'ai dit tout à l'heure que j'était opposé à cet amendement : la définition des biens pris en charge par la sécurité sociale au titre de la CMU est une prérogative du Parlement et du Gouvernement. Il n'est, bien sûr, pas question de déroger à cette règle : quelque respectables que soient les fédérations d'assurance ou les fédérations de mutuelles, elles n'ont pas vocation à définir les données fondamentales de la politique sanitaire et sociale de notre pays, même si, en effet, le débat a lieu, monsieur Descours.
De même, relèvent de la politique de l'Etat les conditions dans lesquelles les handicapés et les grands malades bénéficient d'une prise en charge améliorée de la part de la sécurité sociale.
Monsieur le rapporteur, vous introduisez donc là une confusion, à mon avis dangereuse, dans les responsabilités respectives de l'Etat, des caisses et des organismes complémentaires.
Je me suis déjà élevé contre cette confusion lorsqu'elle s'est exprimée dans un protocole technique entre la CNAM, la FSA et une autre mutuelle.
Je souligne également que vous renvoyez à ces conventions le soin de définir dans quelles conditions les médecins du secteur II s'engageront à respecter les tarifs de la sécurité sociale sans dépassement. C'est une régression importante par rapport au texte du Gouvernement, qui prévoit que, pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle, les médecins du secteur II ne peuvent pas pratiquer de dépassement de tarif. Pourquoi ce recul, alors même que les syndicats de médecins n'ont pas critiqué cette disposition ?
Enfin, cet amendement pose le principe d'une contribution des bénéficiaires. Nous nous sommes déjà largement expliqués sur ce point et il ne faut pas transiger sur l'accès aux soins des plus modestes.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je ne voudrais pas donner à cette polémique des proportions exagérées, mais le problème est de savoir le rôle que nous faisons jouer aux partenaires sociaux.
Je rappelle que, depuis 1945, ce sont les partenaires sociaux qui gèrent la sécurité sociale. Je j'ai dit à Mme Aubry lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale et elle nous a alors détaillé tous les accords qu'elle avait signés avec les professionnels de santé.
Quand le gouvernement précédent a édicté ses ordonnances, la question que nous nous sommes tous posée était la suivante : y a-t-il un pilote dans l'avion ?
Nous avons essayé - ce n'est pas ce que nous avons le mieux réussi, d'ailleurs ! - de déterminer le rôle qui revenait aux conseils d'administration des caisses et celui qui revenait au Gouvernement.
Aujourd'hui - j'ai le regret de vous le dire, monsieur le secrétaire d'Etat, bien que je sache que cela ne résulte pas de votre seul fait - j'ai l'impression que le rôle des conseils d'administration des caisses est complètement passé sous silence et que le Gouvernement étatise de fait la sécurité sociale, puisqu'il veut tout définir. Or, si le panier de soins ne doit pas résulter d'un dialogue entre les conseils d'administration des organismes d'assurance maladie, la CNAM ou les autres caisses et les organismes complémentaires, je ne vois pas à quoi servent ces différents partenaires. Si l'on veut étatiser la sécurité sociale, qu'on le dise !
Le régime de la sécurité sociale est modifié. Or je ne crois pas du tout que ce soit le choix du Gouvernement, ni celui de l'ensemble du Parlement, puisque j'ai longtemps entendu ici ou là dénoncer ce risque.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 20 rectifié.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Nous examinons ici un point tout à fait crucial du texte.
Avec l'amendement n° 20 rectifié, la commission fait une suggestion tout à fait essentielle : quel espace doit-on laisser à la négociation conventionnelle entre les caisses et les fédérations ou organisations représentatives des entreprises prestataires ? Il me semble qu'il est difficile de contourner ce débat !
Peut-être faut-il préciser que cet amendement ne se substitue pas à d'autres textes d'ordre public, mais qu'il vient apporter des précisions sur le régime de certains remboursements de frais de certaines prestations sociales. Je n'ai pas le sentiment, tel qu'il est rédigé, que cet amendement n° 20 rectifié soit contraire aux principes généraux de la sécurité sociale !
Ce qui me paraît particulièrement important dans cette approche, c'est que l'on respecte une neutralité complète, que l'on s'en remet aux partenaires sociaux pour choisir le bon système de couverture, pour moduler cette couverture et pour décider si les mutuelles interviennent ou bien si ce sont des entreprises régies par le code des assurances.
Il me semble que c'est là une vision des choses tout à fait responsabilisante pour les partenaires sociaux, qui ne s'oppose pas par ailleurs à la mise en oeuvre des responsabilités reconnues à l'Etat par les textes d'ordre public préexistants.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 21, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer l'avant-dernier alinéa du texte présenté par le paragraphe III de l'article 20 pour l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer le rôle du médecin référent.
Je rappelle que, mis à part le syndicat MG France, les autres syndicats de médecins ont refusé cette notion, et j'ai également entendu Mme Borvo exprimer tout à l'heure, dans la discussion générale, des réserves sur le médecin référent.
Je ne peux pas accepter cet article tel qu'il est proposé. Nous en revenons donc à notre texte de première lecture.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 92, M. Jean-Louis Lorrain propose de compléter le texte présenté par le paragraphe III de l'article 20 pour l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret fixe dans les départements d'outre-mer le plafond de ressources en dessous duquel les personnes mentionnées au 1er alinéa de l'article L. 861-1 du présent code ont droit à une dispense d'avance de frais. »
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Le renoncement aux soins est accentué dans les départements d'outre-mer, compte tenu d'un coût des médicaments supérieur de 30 % à celui de la métropole.
En raison du nombre élevé de RMIstes et de sans-emploi, certains conseils généraux, comme celui de la Réunion, ont adopté un plafond de ressources - en dessous duquel est accordé le bénéfice de l'aide médicale - nettement supérieur au plafond moyen des départements métropolitains.
Cet amendement vise donc à fixer par décret, en concertation avec les partenaires sociaux, un plafond différent dans les départements d'outre-mer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. La commission souhaite d'abord entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. A l'exception de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est une collectivité territoriale où, en effet, le plafond des ressources doit être adapté à ses spécificités, il semble au Gouvernement que le plafond de 3 500 francs, qui tient compte de la diversité des situations des départements français, est justifié.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Depuis de nombreuses années, et quels que soient les gouvernements qui nous l'ont demandé, nous avons accepté de fixer des minima sociaux identiques pour tous les départements français, qu'ils soient d'outre-mer ou métropolitains. Je l'ai dit en commission à M. Lorrain, nous ne pouvons nous déjuger et c'est pourquoi la commission est plutôt défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 92.
M. Paul Girod. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi « à l'exception de Saint-Pierre-et-Miquelon » ?
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Parce qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon la situation sanitaire, telle que je la connais, n'est évidemment pas la même que dans les autres départements et territoires d'outre-mer : les transferts sanitaires y sont très importants et les frais très différents.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 92, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L.861-4 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE