Séance du 18 mars 1999
M. le président. La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. M. le ministre de l'agriculture et de la pêche, à qui s'adressait ma question, étant malheureusement retenu en ce moment même au congrès de la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles à Versailles, je me tourne donc vers M. le ministre des relations avec le Parlement.
Dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, M. le ministre de l'agriculture et de la pêche s'est laissé imposer un compromis proposé par la présidence allemande du Conseil des ministres. Cet accord, qui confirme les propositions libérales de la Commission européenne émises depuis plus d'un an, n'est pas acceptable pour l'agriculture française.
A un moment où ces négociations conditionnent l'avenir de notre agriculture sur le plan tant national qu'européen et international, à un moment où notre pays doit à la fois réaffirmer la vocation exportatrice de son agriculture, en refusant le déclin auquel la conduirait le repli sur elle-même, et valoriser l'ensemble de son territoire, à un moment où l'ensemble des acteurs du monde rural manifestent leur profond désarroi, ce compromis affaiblit les organisations communes de marché et rompt les principes fondateurs de la politique agricole commune.
Le groupe du RPR s'oppose fermement à cette perspective. Cette opposition passe notamment par le refus d'une politique systématique de diminution des prix pour le secteur des céréales et de la viande bovine, et d'une réforme à la fois inutile et coûteuse en ce qui concerne le lait. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Ce compromis est, malheureusement, dans la logique de la politique du Gouvernement menée depuis plusieurs mois, que ce soit au travers du projet d'orientation agricole ou du projet de loi d'orientation pour l'aménagement du territoire, qui ne donnent pas, à l'aube du xxie siècle, une nouvelle dimension économique à l'agriculture et à la ruralité.
Cette politique a incontestablement fragilisé la France à la veille des négociations de Bruxelles. On est en effet peu crédible à combattre une démarche sur le plan international quand on organise par avance sa mise en application sur le plan national.
M. Dominique Braye. Exactement !
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Jean Bizet. En conséquence, à la veille de la réunion des 24 et 25 mars prochain,...
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Bizet.
M. Jean Bizet. ... qui devrait permettre la recherche d'un compromis final, que propose désormais le ministre de l'agriculture et de la pêche, qui a laissé la France s'isoler dans une position critique, pour défendre au mieux les intérêts de la France ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir excuser Jean Glavany, qui m'a chargé de vous apporter la réponse qu'il aurait aimé vous faire lui-même.
Comme le Président de la République et le Premier ministre ont eu l'occasion de le dire, l'esquisse de compromis établie sous la responsabilité de la présidence allemande, le 11 mars dernier, au Conseil agriculture, ne constitue en rien un accord définitif sur la réforme de la PAC.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Il n'y a pas eu de vote et la présidence allemande nous situe clairement dans la minorité. Le ministre de l'agriculture et de la pêche a déposé, dès le 11 mars, quatre réserves officielles de la France.
Il reste que des avancées ont été obtenues, le 11 mars, par M. Glavany, surtout par comparaison avec le précédent projet de compromis, établi le 25 février dernier avec l'évidente volonté d'isoler la France et de la contraindre au cofinancement.
L'abandon, pour l'heure, du cofinancement, qui, lui, aurait provoqué la rupture des principes fondateurs de la PAC, est une première avancée. Attendons, cependant, que tout soit signé pour en être assurés.
Deuxième avancée : un bon paquet « viande bovine », avec une baisse des prix limitée à 20 % (Exclamations sur les travées du RPR) au lieu de 30 %, là où les professionnels demandaient 15 %, et une bonne compensation pour le troupeau allaitant extensif, indispensable à l'équilibre de régions fragiles.
M. Jean Chérioux. C'est insuffisant !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Troisième avancée : un très bon paquet « vin », avec des possibilités d'expansion et de reconversion du vignoble. Les professionnels ne s'y trompent pas, qui manifestent afin que ces acquis ne soient pas remis en cause à Berlin.
Il reste cependant des points d'ombre : le lait, pour lequel les quotas ont été sauvegardés jusqu'en 2006 au moins, mais pour lequel une réforme inutile est envisagée ; les céréales, avec une baisse des prix excessive ; enfin, les oléagineux, à propos desquels une faute stratégique se prépare face aux Américains.
La négociation n'est cependant pas achevée d'ici à Berlin, et nous devons donc rechercher des améliorations du paquet agricole. Nos partenaires européens admettent tous que deux questions essentielles restent posées.
Comment traiter le dérapage budgétaire du 11 mars ? Répondre à cette question, c'est s'interroger sur des projets coûteux, comme la réforme du lait ou les baisses qu'il faut compenser.
Comment réorienter la PAC vers le développement rural pour prendre en compte la petite et moyenne exploitation, créer de l'activité et de l'emploi en milieu rural, préserver l'environnement, rééquilibrer les soutiens vers les zones de montagne par exemple et les productions fragiles, le tout en pleine cohérence avec le projet de loi d'orientation agricole ?
Des réponses devront être apportées à Berlin sur ces questions majeures, grâce au travail d'une délégation française qui demeurera unie, comme elle l'est depuis le début de cette difficile négociation européenne, dans la défense des intérêts de l'agriculture française, du pays tout entier et de la construction de l'Europe. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Je constate que tous les intervenants ont, jusqu'à présent, dépassé le temps de parole qui leur était imparti. Je vais donc être contraint de couper le micro des orateurs suivants dès qu'ils auront dépassé les deux minutes trente autorisées.
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