Séance du 16 novembre 1998







M. le président. « Art. 2 bis . - Le dernier alinéa de l'article L. 131-7-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces taux particuliers sont également applicables aux assurés d'un régime français d'assurance maladie, exonérés d'impôts directs en application d'une convention ou d'un accord international. »
Sur l'article, la parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Introduit par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des affaires culturelles, familiales et sociales, cet article 2 bis tend à prévoir le paiement des cotisations maladie pour les fonctionnaires internationaux de nationalité française travaillant et vivant en France.
Madame la ministre, je prends la parole sur cet article pour attirer l'attention sur le fait qu'il a pour objectif de remédier au dysfonctionnement résultant de la substitution de la cotisation sociale généralisée aux cotisations d'assurance maladie.
Du fait du transfert de la majeure partie des cotisations d'assurance maladie vers la CSG, décidé par la loi de financement pour 1998, les fonctionnaires internationaux de nationalité française, travaillant et vivant en France, ne paient désormais plus qu'une cotisation maladie très réduite. Or ils ne paient pas non plus ni d'impôt direct, ni de CSG, du fait d'accords - dits de siège - conclus entre les organismes internationaux et la France.
L'article vise à rétablir des taux particuliers de cotisations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès, taux prévus à l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.
J'avais souligné, lors du débat portant sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, les complexités entraînées par ce basculement massif des cotisations d'assurance maladie vers la CSG.
Je constate que nous devons réparer - aujourd'hui pour la première fois - dans le projet de loi de financement pour 1999 - c'est également valable pour l'article 10 relatif à la cotisation sur les contrats d'assurance automobile - les conséquences de cette mesure mise en place trop hâtivement, conséquences qui n'avaient pas été appréciées de façon exhaustive, et nous l'avions souligné à l'époque.
Je profite de cette occasion, madame la ministre, pour effectuer un rapide bilan de la substitution de la CSG aux cotisations d'assurance maladie.
Je ne suis pas persuadé que les intérêts des non-salariés aient été aussi bien défendus que ceux des salariés.
Le cas des fonctionnaires est en outre particulièrement significatif, puisque l'on a compensé la perte de pouvoir d'achat résultant de l'assujettissement à la CSG de leurs primes.
Toutefois, je voudrais insister sur le fait - les responsables des collectivités locales ne me démentiront pas - qu'une décision de l'Etat qui compense pour ses fonctionnaires une perte de pouvoir d'achat prévisible entraîne un surcoût financier pour les collectivités locales et pour les hôpitaux.
Pourrions-nous connaître le coût de cette mesure de compensation à la fois pour le budget de l'Etat et pour ceux des collectivités locales et des hôpitaux ?
En ce qui concerne la CSG sur les revenus de remplacement, les règles complexes d'exonération donnent des résultats curieux. Les effets de seuil sont très importants. Je cite l'exemple, dans mon rapport écrit, des titulaires de pensions civiles d'invalidité : leur CSG est passée de 3,4 % à 6,2 %, sans baisse de cotisations maladie, puisqu'il n'y en a pas sur ces prestations. Je sais bien que les plus modestes ne sont pas touchés, car ils ne sont pas imposables, mais je crois qu'il y a quand même là un problème. S'agissant des prélèvements sociaux sur l'épargne, tout le monde se rend compte qu'une taxation à 10 % n'a pas le même sens - c'est une évidence ! - qu'une taxation à un taux plus bas.
En outre, sur l'aspect financier, la substitution était censée rapporter 4,6 milliards de francs en 1998. Vous pouvez lire dans mon rapport écrit que nous avons estimé ce gain à environ - je dis bien « environ », parce que les chiffres ne sont pas clairs - seulement 1 milliard de francs. Si nous avons tort, il faut que vous nous le disiez, madame la ministre, et, bien sûr, nous ferons amende honorable.
Nous n'avons pas présenté, madame la ministre, d'amendement visant à prendre en compte telle ou telle catégorie. En effet, après le basculement massif de 1998, il faut, dans ce domaine, la paix législative et réglementaire. Il importe que nous apprécions, calmement, avec les chiffres définitifs de 1998, les gains et les pertes des pouvoirs d'achat des uns et des autres.
Je pense qu'il sera nécessaire - je le dis sans passion - dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 de réparer des erreurs, ou des inconséquences, résultant de ce basculement massif.
Les coûts doivent être des coûts réels et nous devons savoir, catégorie par catégorie, ce que cela a coûté aux uns et aux autres.
Je l'avais dit l'année dernière dans mon rapport et je le redis cette année : la substitution aux cotisations d'assurance maladie de la CSG à 7,5 % n'est pas neutre pour toutes les catégories ; j'y reviendrai tout à l'heure en défendant un amendement. Aujourd'hui, des retraités non imposables paient 4 000 francs de CSG !
Un bilan s'impose. Il est peut-être trop tôt pour le dresser aujourd'hui, mais je souhaiterais vivement qu'il soit fait dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, afin que nous n'ayons plus à connaître de chiffres aussi disparates que 4,6 milliards de francs de gain prévisionnel et 1 milliard de francs de gain réalisé.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le rapporteur, je vais vous apporter quelques précisions chiffrées.
Tout d'abord, s'agissant du coût de la compensation pour les fonctionnaires de la substitution de la CSG aux cotisations d'assurance maladie, il est, pour les hôpitaux - je peux vous citer le chiffre avec certitude puisqu'il relève de mon ministère - de 330 millions de francs. Nous l'avions d'ailleurs annoncé l'année dernière ; il était inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale.
Pour la fonction publique d'Etat - j'en demanderai confirmation au ministère du budget - il doit être de quelque 900 millions de francs ; je l'avais également annoncé l'année dernière.
Malheureusement, je ne dispose pas ici des chiffres pour les collectivités locales.
A propos de la question que vous avez posée sur la CSG sur le patrimoine, sur les revenus des retraités non imposables, etc., je voudrais vous rappeler les principes qui fondent notre action.
Tout d'abord, la CSG est un impôt à assiette large, et c'est tout son intérêt. D'aucuns ont déclaré que des retraités ou des personnes touchant des pensions d'invalidité ont dû acquitter la CSG alors qu'ils ne s'y attendaient pas. Mais tout salarié paie une CSG dès le premier franc, même un travailleur à temps partiel gagnant entre 1 500 francs et 2 000 francs par mois ! Tout l'intérêt de cette cotisation réside dans l'étendue de son assiette, car elle prend en compte l'ensemble des éléments de revenus.
Les personnes qui sont non imposables au titre de leur retraite, ou au titre de pensions diverses et variées, ne paient pas la CSG sur ces revenus.
Les chiffres qui viennent d'être publiés sur les revenus généraux en France, notamment sur ceux des professions libérales, montrent que certains retraités ayant exercé une activité libérale perçoivent des retraites extrêmement faibles - ce qui est lié au fait que les régimes n'existaient pas précédemment - mais qu'ils disposent d'un patrimoine important et de revenus tirés de ce patrimoine qui sont élevés. Cela entraîne un paiement de la CSG, ce qui n'était pas le cas auparavant.
Aussi, cette année, un certain nombre de personnes paient une CSG alors même que leurs retraites sont faibles. Mais il convient de considérer l'ensemble des revenus de la personne, et pas seulement le montant de la retraite ou de la pension d'invalidité.
Très franchement, la substitution aux cotisations d'assurance maladie de la CSG est, à cet égard, une juste mesure : elle exonère ceux qui perçoivent de modestes retraites ou pensions d'invalidité, mais elle frappe les détenteurs d'un patrimoine important. Il n'y a rien là que de très normal, dès lors que les salariés - j'insiste sur ce point - dès le premier franc perçu, acquittent la CSG.
Telles sont les réponses que je souhaitais apporter en l'instant.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2 bis.

(L'article 2 bis est adopté.)

Article 3