M. le président. La parole est à M. Courteau, auteur de la question n° 154, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Roland Courteau. Le 28 mai 1996, je m'adressais ici même au ministre de l'agriculture pour lui rappeler que, depuis de trop nombreuses années, des communes audoises des cantons d'Alaigne, Couiza, Limoux, Quillan, Saint-Hilaire, mais également des cantons d'Alzone, de Castelnaudary-nord, de Carcassonne et de Lagrasse étaient toujours dans l'attente de classement en zone de montagne.
Pourtant, cette demande, maintes fois renouvelée, a fait l'objet d'une étude du CEMAGREF - Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et forêts - de Grenoble, qui démontre que dix-neuf communes ont atteint et dépassé le handicap total requis pour prétendre au classement.
Dans sa réponse, le ministre de l'agriculture m'indiquait que la Commission de Bruxelles avait demandé aux différents Etats membres de réévaluer la pertinence du classement actuel en zone agricole défavorisée. Certes, il me précisait que la Commission de Bruxelles était particulièrement vigilante et sévère quant à l'application des critères de classement - altitude, différence d'altitude au sein d'une commune, etc. - mais il ajoutait : « Dès que l'instruction en cours aura pu aboutir à une définition claire des éléments techniques à fournir, un nouveau dossier sera constitué avec la liste des communes susceptibles d'être retenues par la Commission. »
« Ce sera alors l'occasion, précisait-il, de réétudier les dossiers des communes du département de l'Aude. »
Les mois ont passé, mais je ne vois toujours rien venir. J'en suis d'autant plus étonné que, à la suite d'une démarche que je qualifierai d'impatiente, que j'avais entreprise auprès de M. Jacques Santer, président de la Commission de Bruxelles, celui-ci m'a indiqué que sa compétence se bornait à vérifier la conformité aux critères communautaires de classement des communes proposés par les Etats membres, ces derniers décidant eux-mêmes du choix des communes soumises à l'examen de la Commission.
M. Santer, dans son courrier du 28 mai 1997, ajoutait : « Je note que ces communes... » - celles sur lesquelles j'avais attiré son attention - « ... ne font pas partie du groupe de communes communiqué à la Commission dont le classement ou le reclassement en zone défavorisée est considéré comme prioritaire par les autorités françaises. »
Ainsi, après des années d'attente et en dépit des engagements du prédécesseur de M. Le Pensec au ministère de l'agriculture, qui m'affirmait être attentif à ce dossier, force est de constater que nous avons encore été oubliés.
C'est pourquoi, en septembre dernier, j'ai transmis au ministère de l'agriculture une nouvelle proposition d'extension de la zone de montagne concernant le département de l'Aude.
Ma question est donc simple. Où en sommes-nous de ce dossier ? Dans la mesure où ces communes répondent aux critères exigés, le Gouvernement entend-il faire diligence pour que nos démarches aboutissent enfin ?
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, depuis 1975, plus de six mille communes ou parties de communes ont été classées en zone de montagne au titre de la directive du 28 avril 1975.
Un dossier de présélection portant sur cent quatorze communes a été adressé par la France en 1994 à la Commission des Communautés européennes.
A la suite de l'examen de ces propositions par la Commission et de sa décision du 13 février 1997, un arrêté interministériel a permis de ne classer en zone de montagne que douze communes, dont deux en partie.
D'après un bilan effectué récemment, trois cents communes, réparties sur dix-neuf départements, ont formulé des demandes de classement non satisfaites à ce jour, ce qui témoigne du caractère très sélectif de la procédure en vigueur. Aujourd'hui, toute nouvelle demande de classement en zone de montagne doit se faire en référence au règlement communautaire CE 950/97 du Conseil du 20 mai 1997 concernant l'amélioration des structures agricoles.
En application de ce règlement, la Commission prend en considération non seulement des critères physiques objectifs, comme la pente et l'altitude, analysés directement par un logiciel développé par le CEMAGREF, mais aussi des données à caractère économique, comme les types d'activités agricoles et l'économie de montagne, en exigeant que la zone concernée constitue un ensemble homogène. C'est au vu de tous ces éléments que la Commission se détermine.
Un réexamen global, à l'échelon français, de la situation des communes non retenues depuis 1994 pour une procédure de classement en zone de montagne par la Commission - y compris les vingt communes de l'Aude - pourrait être effectué, s'appuyant sur une nouvelle analyse sélective.
A cette fin, la Commission exige d'ores et déjà, pour quarante-deux communes, une procédure d'instruction complémentaire très détaillée et complexe, portant sur onze départements, à savoir le Haut-Rhin, les Pyrénées-Atlantiques, la Saône-et-Loire, les Vosges, l'Aveyron, le Lot, le Tarn, l'Ain, l'Ardèche, l'Isère et la Loire.
En ce qui concerne le département de l'Aude, compte tenu des exigences de la Commission, il est probable que la plupart des communes du dossier présenté ne satisfont pas à l'ensemble des critères retenus par l'Union européenne.
Néanmoins, le ministre de l'agriculture et de la pêche a pris note avec la plus grande attention du souhait de voir prise en considération la situation particulière de ce secteur géographique de l'Aude et s'est engagé à soutenir sa candidature devant la Commission.
M. Roland Courteau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Madame le ministre, comprenez l'irritation des élus de ces communes qui, je persiste à le dire, répondent en tous points aux critères exigés pour obtenir le classement en zone de montagne.
Si la direction départementale de l'agriculture de l'Aude, le préfet ainsi que les élus de la chambre départementale d'agriculture ont transmis, au cours de ces dernières années et de ces derniers mois, des propositions d'extension de la zone montagne, c'est bien qu'ils considèrent que les conditions sont remplies, et ces communes ont d'ailleurs atteint, voire dépassé, le handicap total requis pour prétendre au classement.
Il faudra donc réexaminer ce dossier - je fais confiance au ministre de l'agriculture et de la pêche - si l'on veut faire en sorte que la revitalisation et l'animation de l'espace rural ne soient pas des mots vides de sens.
Qu'il me soit permis d'aborder également un autre problème lié à l'animation de l'espace rural, particulièrement sensible dans nos départements.
J'aurai l'occasion d'y revenir lors de prochaines séances, mais je souhaite dès aujourd'hui évoquer un dossier qui relève strictement des compétences communautaires puisqu'il s'agit de modifier sans délais une directive communautaire dont l'application n'en finit pas de provoquer des contentieux en série et remet en cause les us et coutumes de régions entières. De surcroît, cette directive - on peut d'ailleurs douter de sa légalité - ne repose sur aucun fondement scientifique ni gestionnaire. Elle fait fi des spécificités locales et des phénomènes migratoires liés à la climatologie. Il s'agit bien de la directive européenne 79-409/CEE du 2 avril 1979 sur la convention relative aux oiseaux sauvages. Il convient de souligner les excès de cette directive et de mesurer les errements de la jurisprudence européenne, tout en revendiquant le retour à une application véritable du principe de subsidiarité.
Comme l'a écrit l'un de nos collègues, les pays de l'Europe du Nord commandent les pays de l'Europe du Sud et la France se voit imposer une législation cynégétique inadaptée.
En conclusion, si l'on ne peut qu'être favorable à toute action de préservation et de restauration du milieu, il importe cependant que les instances européennes se saisissent sans tarder de ce dossier. J'ai déjà alerté le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur ce point et je compte bien y revenir prochainement. Je vous demande, madame le ministre, de vous faire l'interprète de ce problème auprès du Premier ministre et de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
loi d'orientation agricole
et agriculture de montagne