SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Candidature à une commission
(p.
1
).
3.
Questions d'actualité au Gouvernement
(p.
2
).
PRISE EN CHARGE DE LA DÉPENDANCE
DES PERSONNES ÂGÉES (p.
3
)
MM. Michel Mercier, Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales.
RÉSEAU NATURA 2000 (p. 4 )
Mmes Janine Bardou, Corinne Lepage, ministre de l'environnement.
POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE ET « PAQUET-PRIX » (p. 5 )
MM. Paul Girod, Michel Barnier, ministre délégué aux affaires européennes.
GRÈVE DES INTERNES (p. 6 )
MM. Robert Pagès, Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
PRINCIPES DE LA CONVENTION MÉDICALE (p. 7 )
MM. Jean-Pierre Camoin, Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
PROJET DE LOI CONTRE LE RACISME (p. 8 )
MM. Michel Charzat, Jacques Toubon, garde des sceaux, ministre de la justice.
PLAN DE RESTRUCTURATION DE RENAULT (p. 9 )
Mme Annick Bocandé, M. Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
SITUATION DES ENTREPRISES PUBLIQUES (p. 10 )
MM. Yann Gaillard, Yves Galland, ministre délégué aux finances et au commerce extérieur.
HUITIÈME PLAN SOCIAL DE MICHELIN (p. 11 )
MM. Marcel Bony, Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
SITUATION EN ISRAËL
ET DANS LES TERRITOIRES PALESTINIENS (p.
12
)
MM. Maurice Lombard, Michel Barnier, ministre délégué aux affaires européennes.
COMMÉMORATION DE LA FIN DE LA GUERRE D'ALGÉRIE (p. 13 )
MM. Jean Clouet, Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement.
Suspension et reprise de la séance (p. 14 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
4.
Nomination d'un membre d'une commission
(p.
15
).
5.
Retrait de questions orales sans débat
(p.
16
).
6.
Traité sur la Charte de l'énergie.
- Adoption d'un projet de loi (p.
17
).
Discussion générale : Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement ; M.
André Boyer, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
7.
Accords concernant la protection de la Meuse et la protection de l'Escaut.
- Adoption de deux projets de loi (p.
18
).
Discussion générale commune : Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement ;
M. André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale commune.
Adoption des articles uniques des deux projets de loi.
8.
Convention sur la protection et l'utilisation des cours d'eau transfrontières
et des lacs internationaux.
- Adoption d'un projet de loi (p.
19
).
Discussion générale : Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement ; M.
André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
9.
Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification.
- Adoption d'un projet de loi (p.
20
).
Discussion générale : Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement ; M.
André Dulait, en remplacement de M. Pierre Biarnès, rapporteur de la commission
des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
10.
Communication de l'adoption définitive de propositions d'acte communautaire
(p.
21
).
11.
Dépôt de rapports
(p.
22
).
12.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
23
).
13.
Ordre du jour
(p.
24
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURE À UNE COMMISSION
M. le président.
J'informe le Sénat que le groupe socialiste a fait connaître à la présidence
le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission des affaires
économiques et du plan à la place laissée vacante par M. André Vallet,
démissionnaire.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
3
QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT
M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
PRISE EN CHARGE DE LA DÉPENDANCE
DES PERSONNES ÂGÉES
M. le président.
La parole est à M. Michel Mercier.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste ainsi que sur certaines
travées du RPR.)
M. Michel Mercier.
Ma question s'adresse à M. le ministre du travail et des affaires sociales.
La loi du 24 janvier 1997 qui vise, dans l'attente du vote d'une loi
instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à
mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une
prestation spécifique dépendance est maintenant promulguée. Nous attendons
depuis cette date les deux décrets qui doivent la rendre effective.
Toutefois, cette attente se nourrit d'un certain nombre d'inquiétudes
s'articulant autour des principes mêmes sur lesquels la réforme de 1997 a
tenté, pour la première fois dans notre pays, d'organiser une prise en charge
de la dépendance des personnes âgées.
Premier principe fondamental, la personne âgée dépendante peut, tant que son
état le permet, choisir de vivre sa vieillesse soit à domicile, soit en
établissement. Nous ne voudrions pas que les décrets à venir privilégient la
prise en charge de la dépendance en établissement sur la dépendance vécue à
domicile. Sur ce point, monsieur le ministre, nous attendons les
éclaircissements que vous voudrez bien nous apporter.
Second principe fondamental de la réforme, une prise en charge de la
dépendance centrée sur l'analyse individuelle des cas a été préférée à la mise
en place d'un système totalement administratif. C'est ainsi qu'une équipe
médico-sociale se rendra auprès de la personne âgée dépendante pour apprécier
son état et pour établir un plan d'aide, en concertation avec son entourage et
sa famille. Il faudra ensuite trouver une traduction financière à ce plan, soit
à travers un certain nombre d'heures effectuées par des personnes aidantes
payées par les collectivités départementales, soit à travers une somme qui sera
acquittée à l'établissement.
Nous souhaitons donc que le ou les décrets à venir respectent tout à fait
cette tarification fondée sur l'état de la personne, et n'en reviennent pas à
un système par trop administratif.
Enfin, cette réforme de la prise en charge de la dépendance ne vaut que s'il
est procédé à une véritable réforme globale de la tarification de la prise en
charge des personnes âgées dans les établissements spécialisés. Nous
souhaiterions donc savoir où en sont, à cet égard, les travaux menés par vos
services, monsieur le ministre.
Je vous rappelle...
M. Claude Estier.
La question !
M. Michel Mercier.
... que le texte que nous avons voté prévoyait également que 14 000 lits de
cure médicale autorisés mais non financés seraient pris en charge par
l'assurance maladie dans les deux ans qui viennent.
Nous attendons vos précisions sur l'ensemble de ces questions.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Monsieur Mercier, ce serait
une bien mauvaise action que de dénaturer une démarche qui a été très largement
inspirée par le Sénat. Par conséquent, il n'est pas question de ne pas tenir
compte non seulement de la lettre, mais aussi de l'esprit de la réforme qui a
été engagée dans cette maison.
Cela étant, nous avons effectivement deux problèmes techniques à régler.
Vous avez tout d'abord évoqué la dépendance des personnes classées, selon la
grille AGGIR - autonomie gérontologique-groupes ISO-ressources - en catégorie
IV et en catégorie V. Il est vrai que, à domicile, ces personnes ne perçoivent
pas la prestation spécifique dépendance, la PSD, puisqu'elles sont assurées des
services d'aides ménagères eux-mêmes financés par les caisses.
On devrait normalement raisonner en parallèle pour la situation des personnes
en établissement ; mais il est vrai que, aujourd'hui, les personnes classées
dans ces catégories IV et V bénéficient, dans certains cas, de l'allocation
compensatrice pour tierce personne, l'ACTP, ce qui pose un petit problème.
Je propose donc à MM. Mercier et Fourcade ainsi qu'aux nombreux sénateurs à
l'origine de cette réforme de nous rencontrer - je suis prêt à venir au Sénat -
pour trouver ensemble, dans l'esprit de la démarche qui a été la leur, une
solution à ce problème avant le 1er avril. C'est en effet au début du mois
d'avril que nous devons transmettre ce texte à la section sociale du Conseil
d'Etat. Par ailleurs, se pose le problème de la période transitoire, qui
précédera la mise en place définitive du système de tarification.
Monsieur Mercier, vous avez évoqué l'esprit de la réforme qui veut que la PSD
suive exactement l'état de dépendance de la personne. Vous vous êtes inquiété
que des références minimales soient évoquées. A cet égard, il me paraît
nécessaire d'apporter des explications.
Si références minimales il y a, elles seront assorties - monsieur Mercier,
vous n'y êtes pas pour rien ! - d'une très grande faculté laissée aux
départements d'y déroger en fonction de critères objectifs et légitimes.
Mme Hélène Luc.
Les départements participent, c'est clair !
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Cela permettra, au cours de
la période transitoire, à la fois d'assurer les personnes âgées d'un traitement
équitable et de laisser la souplesse qu'il convient à l'institution
départementale.
Telles sont les explications techniques que je voulais vous apporter, monsieur
Mercier. Je ne peux les développer plus, mais je suis convaincu que nous
arriverons à les faire coïncider avec la volonté du législateur.
Ensuite, monsieur Mercier, vous m'avez interpellé sur la réforme de la
tarification. Cette dernière a fait l'objet d'un travail intensif de la part de
l'administration, notamment de la direction de l'action sociale. Le texte est à
peu près en l'état, et l'heure de la concertation est maintenant arrivée. Je
suis donc tout prêt, le moment venu, à me rendre devant la commission des
affaires sociales du Sénat ou à recevoir les parlementaires les plus
particulièrement concernés, dont vous, monsieur Mercier.
Enfin, monsieur le sénateur - je sais que ce sujet vous tient très à coeur -
les 7 000 lits médicalisés prévus dans la loi de financement de la sécurité
sociale seront financés : les préfets de région ont reçu notification des
crédits correspondants, et il s'agit maintenant d'opérer une répartition en
tenant compte de quelques priorités ; en effet, ici et là, certains
départements accusaient des retards plus importants que d'autres.
J'ajoute qu'une deuxième étape nous permettra, l'année prochaine, de financer
les 7 000 autres lits médicalisés, et peut-être un peu plus. Il faut bien le
dire ! En effet, il importe de temps en temps, à mon avis, de reconnaître que
ce que certains avaient promis, d'autres le tiennent !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR
et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
Mme Hélène Luc.
C'est moins que la promesse du Président de la République !
RÉSEAU NATURA 2000
M. le président.
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
Ma question s'adresse à Mme le ministre de l'environnement et porte sur la
reprise du processus d'élaboration du réseau Natura 2000.
La procédure européenne Natura 2000 de protection des milieux fragiles
naturels du territoire a été relancée par M. le Premier ministre sur votre
proposition, madame le ministre, et, déjà, la désignation des sites à protéger
est en cours : le 7 mars, les préfets ont transmis leurs propositions aux
préfets de région, et ceux-ci vous ont communiqué leurs synthèses le 14
mars.
Sur la base de l'analyse qui sera faite alors au niveau national, des
concertations locales seront reprises et devraient être terminées à la fin de
l'été, en vue de transmettre à la Commission européenne des propositions
portant sur une liste de sites susceptibles de figurer dans le réseau Natura
2000.
Nous ne pouvons que nous réjouir de la révision à la baisse des zones
éligibles ; de nombreuses inquiétudes subsistent néanmoins, notamment sur la
durée de concertation extrêmement courte pour traiter d'un sujet aussi complexe
: quatre mois.
Comment voulez-vous, madame le ministre, que tous les acteurs concernés par ce
projet - élus et acteurs du monde rural - puissent donner un avis pertinent,
portant sur le volet scientifique de Natura 2000 et tenant compte également des
répercussions sur le développement économique ainsi que des conséquences
financières qu'impliquera l'application d'une telle mesure et sur lesquelles
nous n'avons, pour l'instant, aucune information précise ?
Il serait en effet très regrettable que ce projet, qui engage l'avenir de
nombreux secteurs de notre territoire, ne puisse pas bénéficier d'une réelle et
efficace concertation. Pour cela, il faut du temps. Aussi, madame le ministre,
pourquoi ne pas envisager d'allonger ce délai au-delà de la fin de l'été afin
d'engager un dialogue constructif ?
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
Madame le sénateur, l'énoncé de votre
question me laisse à penser que vous avez parfaitement compris l'esprit dans
lequel les conditions d'application de la directive européenne Natura 2000 ont
été arrêtées par M. le Premier ministre. Ce dernier - vous vous en souvenez -
avait décidé, en juillet dernier, de geler l'application de la directive dans
l'attente d'un certain nombre de réponses à des questions que nous souhaitions
poser à la Commission européenne.
Ces questions ont été posées. Elles ont fait l'objet d'un mémorandum du
Gouvernement qui a lui-même été adopté par la Commission européenne, le 24
janvier dernier. Ce mémorandum répond de manière très positive à des questions
très importantes, notamment la possibilité de poursuivre, dans leur état
actuel, les activités telles qu'elles s'exercent sur les sites Natura 2000, la
possibilité d'engager de nouvelles activités sur les mêmes sites et de
travailler ultérieurement par voie contractuelle et non par voie réglementaire,
afin de donner aux acteurs du milieu rural la possibilité de gérer eux-mêmes
ces sites comme ils l'entendent.
J'ai du reste rendu compte du contenu de ce mémorandum lors du très
intéressant séminaire qui s'est tenu ici même au Sénat, le 5 février dernier,
sur l'initiative de M. Paul Girod. J'avais la veille réuni autour de moi le
comité national de suivi et de concertation, composé des acteurs du monde
rural, pour examiner les conditions d'une telle relance. Ses membres ont
accueilli cette initiative de manière très favorable et ils l'ont fait savoir
en indiquant qu'ils participeraient très activement aux concertations locales
qui vont effectivement s'ouvrir pour une période de quatre mois, conformément
au décret du 5 mai 1995, publié avant mon entrée en fonction.
L'objectif que s'est fixé le Gouvernement, madame le sénateur, est de
transmettre cet été à la Commission européenne des propositions de sites
représentant environ 2,5 % du territoire national, ce qui est modeste. Ces
sites ne seront transmis - j'insiste sur ce point essentiel - que sous réserve
d'un accord préalable des partenaires locaux.
C'est la raison pour laquelle il a été demandé aux préfets d'essayer de
déterminer les sites verts, les sites orange et les sites rouges, autrement dit
ceux pour lesquels un accord était probable, improbable et impossible.
C'est à partir de ce premier travail auquel vous avez fait référence que va
donc débuter la concertation, par priorité, bien sûr, sur les sites verts, de
manière que nous puissions, dans une démarche concertée et totalement
contractuelle, trouver un accord avec les élus et les partenaires du milieu
rural.
M. le président.
Je vous prie de conclure, madame le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
J'en termine, monsieur le président.
Vous avez souhaité qu'il y ait une concertation ; celle-ci va se dérouler
pendant quatre mois, après quoi, en juillet, nous verrons ce qu'il en est.
Je veux simplement insister sur un point : pour que nous puissions continuer à
bénéficier des crédits communautaires, il est impératif que nous rentrions dans
la voie de Natura 2000.
C'est donc une voie modeste que je vous propose, mais je suis persuadée
qu'avec l'aide de tous nous obtiendrons un résultat positif dans les délais et
selon les modalités fixés par M. le Premier ministre.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE ET « PAQUET-PRIX »
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Je tiens, tout d'abord, à remercier Mme le ministre de l'environnement de sa
gentillesse.
En fait, ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, qui - nous
le comprenons bien - assiste aujourd'hui au congrès de la Fédération nationale
des syndicats d'exploitants agricoles, à Toulouse. Mais comme il s'agit d'une
affaire à la fois agricole et européenne, je ne doute pas que M. le ministre
délégué aux affaires européennes pourra me répondre.
Monsieur le ministre, les quinze ministres de l'agriculture de la Communauté
se sont réunis ces derniers jours pour examiner ce que l'on appelle le « paquet
prix » présenté par la Commission.
Selon mes informations, un certain nombre de prévisions sont à la baisse :
baisse des compensations de 7,3 % pour les céréales, de 4,2 % pour les
oléagineux et de 26,8 % pour la jachère.
Inutile de vous dire que l'agriculture du département que je représente ici
serait terriblement touchée par ces mesures, notamment en raison du fait que
s'arrêterait net son évolution vers les cultures non alimentaires ! Cela ne
manque pas de soulever un certain nombre de questions, notamment au regard des
biocarburants, au moment où la loi sur l'air va entrer en application.
Mais, au-delà du préjudice causé à mon département, je tiens à formuler trois
observations sur le fond monsieur le ministre.
En premier lieu, toute la base sur laquelle repose la politique agricole
commune actuelle s'en trouverait ébranlée puisque l'on considérerait comme
illégitime le fondement même du système actuel.
En deuxième lieu, il semblerait que la Commission s'engage dans une voie qui
consiste à pousser les agriculteurs à se battre entre eux - productions
végétales contre productions animales - puisque l'un des prétextes invoqués est
le problème de la viande bovine, alors qu'en réalité les dépenses à engager à
ce titre devraient pouvoir être financées sur le budget normal.
Enfin, en troisième lieu, dernière observation mais pas la moindre, ce serait
un désarmement unilatéral de l'Europe au moment même où les Américains viennent
d'accroître leur aide à leur agriculture au travers du
Fair Act.
Ce
serait nous rendre fragiles au moment des négociations de l'Organisation
mondiale du commerce de l'an 2000.
Monsieur le ministre, je crois ne pas être le seul, dans cet hémicycle, à être
extrêmement inquiet...
M. Philippe François.
Certainement !
M. Paul Girod...
devant les perspectives que de telles propositions commencent à dessiner
devant nous.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants).
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Barnier,
ministre délégué aux affaires européennes.
Monsieur Paul Girod, votre
question prouve - mais nous le savions déjà ! - que vous vous intéressez au
moins autant à l'agriculture qu'à l'environnement, ce qui n'est d'ailleurs
nullement contradictoire, bien au contraire.
Vous l'avez dit, les discussions viennent de commencer. Le conseil des
ministres de l'agriculture s'est réuni les 17, 18 et 19 mars, saisi qu'il était
des propositions de la Commission.
Ces propositions sont inacceptables pour la France
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste)
et M.
Philippe Vasseur l'a dit de manière aussi claire que possible à l'occasion de
cette réunion. J'observe d'ailleurs qu'il n'a pas été le seul à constater
qu'elles étaient minimalistes et négatives.
Je saisis l'occasion que vous me donnez pour rappeler devant le Sénat quelle
est aujourd'hui la position de la France. C'est une position extrêmement
claire.
Premièrement, nous souhaitons qu'une décision intervienne, avant le 30 juin
prochain, fixant le taux de jachère en dessous, bien évidemment, du taux de
base de 17,5 %. Cette mesure, vous le savez tous, est essentielle pour
l'ensemble des agriculteurs français, mais aussi pour remplir nos engagements
sur les marchés mondiaux, pour faire face à une demande intérieure qui ne
décroît pas et également - vous être nombreux à y être attentifs sur ces
travées - pour faire face à la demande de la filière des biocarburants.
(M.
Jacques Machet applaudit.)
Deuxièmement, nous demandons la fin du gel extraordinaire.
Troisièment, nous avons marqué notre hostilité à la diminution des aides aux
grandes cultures, qu'il s'agisse des céréales ou des oléagineux, en tout cas
telle qu'elle était proposée par la Commission c'est-à-dire sans une vraie
vision d'ensemble, sans cohérence avec une approche globale des réformes des
organisations communes de marché.
Bien entendu, nous avons, tout autant que la Commission, le souci de la
maîtrise budgétaire. Souvent, ici même, vous avez souhaité que le budget de la
Communauté n'augmente pas, que l'on ne fasse pas payer davantage les
contribuables pour l'Europe.
Mais la réforme, telle qu'elle nous est proposée, ce paquet prix - vous l'avez
très bien dit vous-même, monsieur Girod - remet en cause l'équilibre de la
réforme de la PAC. Il n'y a pas de perspective à moyen ou à long terme.
Surtout, il y a des échéances graves et importantes auxquelles nous ne
pourrions pas faire face convenablement : l'élargissement, les négociations de
l'OMC et l'approfondissement de la politique agricole commune.
Voilà donc la position de la France. Elle est, je le répète, extrêmement
claire. Elle a été affirmée avec beaucoup de détermination par M. Philippe
Vasseur, ministre de l'agriculture, au congrès de la FNSEA, à Toulouse.
Je suis heureux que cette question m'ait donné l'occasion de la confirmer
devant le Sénat.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
GRÈVE DES INTERNES
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Ma question s'adresse à M. le ministre du travail et des affaires sociales,
qui, je le regrette, vient de nous quitter.
Mme Hélène Luc.
Il a peur de répondre !
M. Robert Pagès.
Depuis le 11 mars, de nombreux internes des centres hospitaliers
universitaires sont en grève. Des chefs de clinique les ont rejoints.
Ils ne sont pas seuls à protester : le syndicat des médecins libéraux, la
fédération des médecins de France, la confédération des syndicats médicaux
français, mais aussi le syndicat national des psychiatres privés dénoncent tous
la convention médicale et la politique de rationnement des dépenses de
santé.
Avec la convention médicale, si un médecin dépasse le budget global, il ne
pourra plus soigner, ou tout soin effectué sera à sa charge.
On limite donc l'accès aux soins par des critères financiers. C'est la porte
ouverte à une médecine à deux vitesses.
La même méthode appliquée aux hôpitaux a produit des effets désastreux ;
certains services sont dans l'incapacité de pratiquer des opérations dès le
mois de novembre. Avec ces budgets, qui partout, y compris en région
parisienne, y compris dans les régions sous-équipées, réduisent les moyens dans
les hôpitaux, on prépare la suppression de milliers d'emplois et une baisse de
la qualité des interventions médicales.
Ainsi, dans certains hôpitaux, on n'achète plus certains médicaments
nécessaires mais jugés trop chers.
Comme nous disait une infirmière de l'institut Gustave-Roussy : « Je refuse de
choisir les patients qui pourront bénéficier du médicament qui leur fera mieux
supporter la chimiothérapie. »
Avec l'application du plan Juppé, c'est bien la qualité des soins qui est
remise en cause, sacrifiée à la satisfaction des critères d'austérité du traité
de Maastricht.
On annonce une rencontre entre M. le ministre du travail et des affaires
sociales et les internes. Acceptera-t-il de les entendre ? Il ne s'agit pas
d'un simple malentendu, comme il l'affirme.
Quand M. Barrot acceptera-t-il de négocier avec les médecins sur la convention
médicale ? Quand acceptera-t-il de négocier avec les praticiens hospitaliers,
les infirmières, les aides-soignantes, mais aussi avec les infirmiers
psychiatriques en lutte pour leur statut, afin d'instaurer non pas le
rationnement des soins, comme il le fait, mais d'apporter une réelle réponse
aux besoins en matière de santé dans notre pays ?
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
Je vous remercie,
monsieur le sénateur, de nous rejoindre dans notre combat pour défendre la
médecine libérale à la française !
(Rires et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. -
Protestations sur les travées du groupe communistre républicain et
citoyen.)
Mme Hélène Luc.
Vous ne manquez pas de toupet !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Cette prise de position du groupe communiste
républicain et citoyen constitue un événement d'importance que je voulais
souligner.
M. Robert Pagès.
Pas du tout !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Monsieur Pagès, vous avez évoqué plusieurs sujets :
l'hôpital, la médecine de ville, le problème propre aux psychiatres et, bien
entendu, le mouvement des internes.
Nous avons la chance, en France, d'avoir un système hospitalier
formidable,...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Et vous le cassez !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
... où toutes les professions de santé se dévouent
sans compter pour les autres, et je veux, ici, leur rendre hommage.
La logique profonde de la réforme est d'améliorer la qualité des soins...
Mme Hélène Luc.
Vous avez une drôle de manière de le faire !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
... et, surtout, d'assurer une répartition plus
égalitaire des dotations entre les budgets hospitaliers.
S'agissant de la médecine de ville, nous avons la chance, en France, d'avoir
un système à la fois libéral et solidaire : liberté pour le patient de
consulter le médecin qu'il souhaite ; liberté pour le médecin de soigner, de
s'installer où il le souhaite et de prescrire.
C'est précisément pour sauvegarder cette liberté de la médecine française,
rendue possible par la sécurité sociale, qui rembourse les malades, que nous
faisons cette réforme.
Mme Hélène Luc.
Pourquoi les médecins étaient-ils dans la rue dimanche dernier ?
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
J'ai de nombreuses fois rencontré les internes à
l'occasion de la réforme de la protection sociale, pour l'élaboration des
ordonnances.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Maintenant, ils comprennent !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Avec Jacques Barrot, nous sommes sur le terrain pour
discuter, écouter et comprendre les internes. Aujourd'hui, je leur dis que,
femmes et hommes de bonne volonté, nous avons tous le même objectif : sauver la
médecine libérale à la française, car, si nous la sauvons, c'est leur avenir
qui est assuré.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées
du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
PRINCIPES DE LA CONVENTION MÉDICALE
M. le président.
La parole est à M. Camoin.
M. Jean-Pierre Camoin.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité
sociale.
Dans le cadre de la réforme de la sécurité sociale, les différents partenaires
ont conclu récemment une convention médicale permettant de sauvegarder notre
protection sociale à la française, qui assure - rappelons-le - la coexistence
d'un système libéral et d'un système solidaire.
Or, dans les CHU de mon département, comme dans beaucoup d'autres hôpitaux de
France, le personnel hospitalier est préoccupé par le contenu de cet accord.
Mme Hélène Luc.
Tiens ! tiens !
M. Jean-Pierre Camoin.
A la suite des mouvements de grève qui se sont produits ces derniers temps,
les internes des hôpitaux ont obtenu qu'après leur installation comme médecin
de ville ils soient exonérés pendant sept ans de tout reversement d'honoraires
en cas de dépassement.
Malgré cela, le mouvement de protestation continue, et les revendications
semblent s'étendre à l'ensemble du contenu de la convention.
M. Robert Pagès.
Voilà !
M. Jean-Pierre Camoin.
Or, celle-ci ne fait que traduire les orientations des ordonnances de 1996 et
la loi de financement de la sécurité sociale, que le Parlement a votée : une
augmentation de l'enveloppe globale des dépenses de santé, contrairement à ce
qui a été affirmé tout à l'heure, permettra, sans aucun quota - c'est la
première fois depuis que l'on fait une réforme de la sécurité sociale -
d'assurer la qualité des soins par la maîtrise médicalisée des dépenses.
Cette réforme, qui est indispensable, est sans doute mal comprise ou dénaturée
par certains, comme nous venons encore de le voir.
(Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, il me semble essentiel que
vous réaffirmiez les principes qui la guident, afin de rassurer le corps
médical et de clarifier la situation actuelle.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Hélène Luc.
Venez avec moi à l'institut Gustave-Roussy, monsieur Camoin, vous verrez !
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
Monsieur le
sénateur, un mouvement de grève est toujours le signe d'une interrogation. A
cette interrogation, aujourd'hui comme hier, nous devons répondre par l'écoute,
la concertation et le dialogue. C'est ce que nous avons fait, avec Jacques
Barrot, depuis un an et demi ; c'est ce que nous continuerons de faire dans les
heures et les jours qui viennent, en allant sur le terrain à la rencontre des
internes.
S'agissant des questions qui sont posées et de ce que l'on entend ici ou là,
je veux procéder à deux ou trois rappels simples : non, il n'y a pas de quota
d'actes ; non, il n'y a pas de rationnement des soins ; non, il n'y a pas de
passage obligé chez le généraliste pour aller chez le spécialiste ; non, il n'y
a pas de sanctions financières aveugles, collectives, discriminatoires. Il faut
le réaffirmer, car trop d'idées fausses circulent.
En revanche, que permet cette réforme et que permet la convention médicale,
qui, je le rappelle, a été très librement négociée entre les syndicats de
médecins libéraux et la caisse nationale d'assurance maladie - car c'est cela
notre conception du dialogue social, liée au fait que nous ne voulons pas
étatiser la médecine ?
Les médecins pourront continuer à s'installer où ils le souhaitent et à
déployer leur activité dans un contexte de maîtrise médicalisée. Le secteur II,
bien évidemment, reste maintenu ; il n'a jamais été question de le remettre en
cause. Simplement, nous prenons en main le problème important de la démographie
médicale de manière à assurer des débouchés aux internes d'aujourd'hui, qui
constituent l'élite de la médecine de demain.
Il faut donc s'écouter, se parler, se comprendre : entre hommes et femmes de
bonne volonté, nous savons que, tous ensemble, nous voulons défendre une
médecine à la française, libérale et solidaire.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. Robert Pagès.
Et les hôpitaux ?
Mme Hélène Luc.
On se demande pourquoi ils sont en grève !
PROJET DE LOI CONTRE LE RACISME
M. le président.
La parole est à M. Charzat.
M. Michel Charzat.
Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. C'est
une question vraiment d'actualité, puisque nous sommes au milieu de la semaine
d'action contre le racisme.
Monsieur le ministre, depuis plusieurs mois, nous assistons à la
multiplication, à Paris, d'activités antisémites ou négationnistes,
c'est-à-dire niant la réalité de l'Holocauste.
Un tract anonyme, violemment antisémite, intitulé
L'Empire invisible,
a
été distribué dans de nombreuses boîtes aux lettres dans plusieurs
arrondissements de la capitale, notamment dans le XXe arrondissement.
Plus récemment, des tracts négationnistes ont été envoyés à un grand nombre de
directeurs d'école de Paris. Pour ce faire, les propagandistes ont utilisé un
fichier contenant des renseignements confidentiels sur les élèves de la
capitale, notamment leur nom, leur adresse, leur nationalité. Il s'agit du
fichier SAGESSE, système automatisé de gestion des effectifs scolaires des
secteurs et des écoles, géré conjointement par la direction de l'académie de
Paris et par la direction des affaires scolaires de la Ville de Paris.
M. Roland Courteau.
C'est grave !
M. Michel Charzat.
Mes chers collègues, faut-il s'étonner de l'augmentation des manifestations
insidieuses de racisme, quand des responsables politiques tiennent publiquement
des propos qui favorisent ces campagnes odieuses ?
(Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Raymond Courrière.
C'est honteux !
M. Michel Charzat.
Ainsi, MM. Le Pen et Mégret peuvent se réclamer de l'inégalité des races sans
que les pouvoirs publics puissent ou veuillent agir.
M. Raymond Courrière.
Ils ne veulent pas !
M. Michel Charzat.
Jusqu'à quand, mes chers collègues, l'Etat va-t-il laisser faire ? Serait-il
désarmé ? Jusqu'à quand, monsieur le garde des sceaux, pourrez-vous justifier
cette période de flottement ? Nous attendions la loi Toubon, qui devait être
destinée à renforcer la répression du racisme ; nous avons eu la loi Debré
contre les étrangers !
M. Nicolas About.
Mais vous ne savez donc parler que de Le Pen !
M. Michel Charzat.
Votre projet de loi, monsieur le garde des sceaux, ne peut être discuté,
faute, semble-t-il, de rapporteur à l'Assemblée nationale. Ma question est donc
naturellement la suivante : pourquoi ne pas déposer ce projet de loi devant le
Sénat ? Dans cette hypothèse, que je souhaite vivement voir se concrétiser, je
tiens à vous rassurer, monsieur le garde des sceaux, je serai volontaire pour
en être rapporteur.
Monsieur le garde des sceaux, mes collègues et moi-même attendons avec intérêt
votre réponse.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le sénateur, vous avez
évoqué la diffusion auprès d'un certain nombre de chefs d'établissements
scolaires parisiens de tracts et de documents révisionnistes.
A la suite de cette diffusion, deux enquêtes administratives ont été
diligentées, l'une par l'académie, l'autre par l'inspection générale de la
Ville de Paris. Deux plaintes ont été déposées auprès du procureur de la
République, l'un par le directeur de l'académie, l'autre par le maire de Paris
lui-même.
Le procureur de la République a ouvert, j'y ai veillé, une enquête
préliminaire, s'agissant à la fois du détournement de fichier et de la
diffusion de propos et d'idées révisionnistes, sur la base de la loi sur la
presse de 1881. Le cas échéant, cette enquête préliminaire pourra donner lieu à
l'ouverture de l'information judiciaire nécessaire ; j'y veillerai encore,
monsieur Charzat, parce que, contrairement à ce que vous avez dit, s'il est un
domaine dans lequel l'action du Gouvernement et de la majorité ne peut être
suspectée de « flottement », c'est bien celui-là !
J'ai effectivement fait adopter en conseil des ministres un projet de loi au
mois d'octobre. Ne vous réjouissez pas trop vite, monsieur Charzat, ce projet
de loi viendra bien en discussion.
M. Michel Charzat.
Quand ?
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux.
Et vous verrez alors, monsieur Charzat, que ce projet
de loi sera adopté parce que chacun mesure de plus en plus combien il est
nécessaire.
M. Claude Estier.
Mais c'est ce que nous souhaitons !
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux.
Ce soir, j'ouvrirai à la Sorbonne, au nom du
Gouvernement, l'année européenne contre le racisme, qui a été décidée par
l'Union européenne.
Mme Hélène Luc.
Après le projet de loi Debré, ce n'est pas mal !
M. Alain Gournac.
Cela n'a rien à voir !
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux.
Monsieur Charzat, dans ce genre d'affaire, essayez un
instant d'abolir les clivages partisans, ceux qui peuvent séparer ce côté de
l'hémicycle de celui auquel vous appartenez.
Essayez de partager notre volonté de lutter efficacement contre le racisme et
la xénophobie. Croyez-moi, à Bruxelles, à Luxembourg, à Strasbourg, au Conseil
de l'Europe, et ici, à Paris, dans le XIIIe arrondissement, dont je suis maire,
je le fais tous les jours. Et je ne me pose aucune question, sûr de mes
convictions et sûr aussi que c'est l'intérêt de la France.
(Applaudissements
sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
PLAN DE RESTRUCTURATION DE RENAULT
M. le président.
La parole est à Mme Bocandé.
Mme Annick Bocandé.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'industrie, de la poste et des
télécommunications.
Monsieur le ministre, on a beaucoup parlé de la fermeture de l'usine Renault
de Vilvorde, en Belgique, et du drame humain que représente la suppression de 3
100 emplois.
M. Schweitzer, devant les commissions des affaires économiques et des affaires
sociales réunies, a très clairement expliqué la logique de l'entreprise Renault
face à une concurrence mondiale impitoyable.
Nous comprenons mieux la nécessité d'une restructuration de l'entreprise, dont
l'outil de production est historiquement dispersé et complexe.
Je souhaite cependant attirer votre attention et celle du Sénat sur ce
processus de reconcentration, même si Renault est une entreprise privée, nous
le savons tous.
Je ne cache pas l'inquiétude de l'élue de la Seine-Maritime que je suis. Il
faut en effet savoir que le secteur de l'automobile représente, dans mon
département, 13 000 à 15 000 emplois directs, et pas moins de 25 000 emplois
indirects.
Par ailleurs, le taux de chômage y dépasse de trois points la moyenne
nationale, avec 15,5 %.
Les responsables locaux souhaitent, très naturellement, en savoir plus sur le
plan de Renault à moyen terme et à plus long terme.
Après plusieurs plans sociaux, on annonce encore la suppression de 2 700
emplois, dont 1 200 sur les seuls sites de Cléon et de Sandouville. Même si
leur disparition n'est pas envisagée, qu'en est-il de plus petites unités comme
celle de Renault-Alpine, à Dieppe, avec ses 700 emplois, dont 300 à durée
déterminée ?
Dieppe a déjà souffert de cette logique de concentration avec le départ du
bureau d'études « le Berex » pour la commune de Villiers-Saint-Frédéric, en
Ile-de-France.
L'actualité « Renault » est avant tout un problème d'emplois ; mais c'est
aussi, par les mécanismes complexes de filialisation et de taxe
professionnelle, une nouvelle menace pour les finances de nos collectivités
locales.
Monsieur le ministre, depuis 1985, l'entreprise Renault restructure et
reconcentre. Devons-nous penser que d'autres sites, en France cette fois,
pourraient être non seulement touchés mais fermés ? L'Etat reste le principal
actionnaire, puisqu'il détient 46 % du capital. A ce titre, avez-vous des
informations à nous communiquer ?
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
Mme Hélène Luc.
Mais vous êtes de la majorité, et c'est elle qui est responsable de cette
politique !
M. Robert Pagès.
Pas de double langage !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Madame le
sénateur, je comprends l'inquiétude qui est la vôtre. Il est vrai que la
fermeture d'une usine comme celle de Vilvorde représente d'abord un drame
humain et toute une série de problèmes sociaux. C'est la raison pour laquelle
une décision comme celle-là doit être accompagnée d'un plan de reconversion
industrielle et d'un plan social.
Aussi, Renault va provisionner 2 400 millions de francs pour faire face à
l'exigence à la fois de ce plan social et de cette reconversion : 800 000
francs par emploi supprimé, c'est sans commune mesure avec ce qui peut être
fait dans des situations comparables.
Reste que, madame le sénateur, les restructurations industrielles sont
indispensables.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Et comment remplace-t-on les emplois supprimés ?
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
En effet,
entre 1995 et 1996, la branche « automobiles » a multiplié par deux son déficit
et, compte tenu du fait que Renault Véhicules industriels a basculé dans le
déficit, le cumul des pertes de Renault Véhicules industriels et de la branche
« automobiles » a été multiplié par quatre dans la même période. Si rien n'est
fait, 1997 sera pire encore. L'entreprise se trouve donc en face d'une
situation inextricable. L'organisation de la production en particulier est très
complexe, très dispersée et mal utilisée. Savez-vous, par exemple, que Fiat,
qui produit plus que Renault sur l'ensemble de l'espace européen, possède huit
usines de production alors que Renault en a dix ?
Pour répondre à votre question, je dirai que, si les restructurations
industrielles sont importantes et nécessaires, elles ne sont pas suffisantes.
Pour éclairer l'avenir de Renault, il est nécessaire de prévoir, de proposer et
de mettre en oeuvre un plan de développement pour l'entreprise fondé sur une
véritable stratégie industrielle.
Mme Hélène Luc.
Vous l'avez déjà annoncé pendant la campagne électorale ! Vous avez beaucoup
dit sur la « fracture sociale ». Et maintenant ? On attend !
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Il faut
d'abord maîtriser la productivité de l'outil de production, en particulier en
faisant un effort d'organisation du travail, par conséquent en mettant en
oeuvre l'aménagement et la réduction du temps de travail, ce qui exige un
dialogue social à l'intérieur de l'entreprise.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
On licencie d'abord et on dialogue après !
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Il faut,
dans ce plan de développement, songer à l'effet de taille, en développant, les
partenariats industriels de Renault qui aussi en en engageant d'autres
existent.
Il faut également mettre en oeuvre une possibilité d'autofinancement dans
l'entreprise qui permette de faire face à l'effort très important
d'investissement industriel qui l'attend. Enfin, il faut que Renault fasse un
effort à l'exportation, c'est-à-dire un effort d'implantation sur d'autres
marchés moins concurrentiels. Aujourd'hui, en effet, l'entreprise est
vulnérable parce qu'elle est à 80 % présente sur l'espace le plus concurrentiel
du monde, qui est l'espace européen.
Donc, aujourd'hui, l'objectif, mais aussi le défi, auquel se trouve confrontée
la direction de Renault, c'est la mise en place d'un plan de développement qui,
à partir d'une stratégie industrielle, ouvre une perspective plus large à cette
grande entreprise.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste).
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Que font les salariés pendant ce temps-là, ils attendent ?
SITUATION DES ENTREPRISES PUBLIQUES
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de
l'économie et des finances. Elle porte sur la situation des entreprises
publiques. On pourrait en dire beaucoup de choses, mais je me contenterai d'une
constatation : les Français sont effarés par certains chiffres d'endettement,
ou de pertes, dont les ordres de grandeur portent sur des dizaines et, qui
sait, peut-être même des centaines de milliards de francs.
M. Christian de La Malène.
Ah !
M. Yann Gaillard.
Ils s'interrogent sur la manière dont ont été gérées naguère des entreprises
qui, jadis, étaient pour eux un objet de fierté, et dont il faut espérer
qu'elles le redeviendront. Je citerai le Crédit Lyonnais, le GAN, voire le
Crédit Foncier, qui n'est pas juridiquement une entreprise publique, mais où
l'Etat exerçait une influence...
M. Jacques Mahéas.
Mauvaise influence !
M. Yann Gaillard
... de même ordre, ou bien, dans un autre secteur, Air France, dont le
président actuel mène un combat courageux, je tiens à le saluer, contre les
égoïsmes catégoriels.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
C'est bien sur l'Etat actionnaire et contrôleur que porte le regard
critique de nos compatriotes. Les gouvernements de la décennie quatre-vingt ont
non seulement eu la charge du secteur public ancien, mais l'ont encore étendu
par des nationalisations dont les résultats, sur une échelle moindre, ne sont
pas meilleurs ; je pense ici, notamment, à la Marseillaise de Crédit.
Mme Hélène Luc.
Et la privatisation de Renault ? C'est une réussite ?
M. Yann Gaillard.
Au vu de ces résultats, on est tenté par deux hypothèses : ou bien ces
gouvernements ont poussé à la faute des dirigeants trop dociles, ou bien ils
ont laissé errer des dirigeants mal inspirés et, qui sait, peut-être
incompétents. A quoi servaient, dès lors, les représentants désignés par l'Etat
actionnaire dans les conseils d'administration de ces entreprises publiques
?
M. Alain Gournac.
Bonne question !
M. Yann Gaillard.
La question que je vous pose, monsieur le ministre, car c'est l'avenir qui
nous importe maintenant, est celle de l'action que vous pouvez entreprendre
pour rendre aux Français la confiance dans leurs entreprises publiques, et
faciliter leur nécessaire privatisation. Pouvez-vous dire quelles mesures la
grande maison de Bercy, à laquelle j'ai eu l'honneur d'appartenir, même si elle
est critiquée, envisage de prendre pour promouvoir une véritable gestion
patrimoniale de l'Etat et pour clarifier les systèmes de contrôle et de tutelle
sur ces entreprises ?
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste
et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Trichet était directeur du Trésor !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Yves Galland,
ministre délégué aux finances et au commerce extérieur.
Monsieur le
sénateur, je vous remercie de votre appréciation positive sur Bercy. Il est
effectivement facile de critiquer l'administration des finances, pourtant elle
a beaucoup de vertus et un grand sens des responsabilités.
Il est évident, monsieur le sénateur, que l'Etat n'a pas eu une attitude
cohérente à l'égard des entreprises publiques. Vos analyses reflètent une
réalité que personne ne peut contester.
L'Etat, nous le savons, n'a pas la vocation d'être à la fois tuteur
régulateur, et, éventuellement, client. Par ailleurs, il a trop souvent été un
actionnaire passif. Vous demandez donc quelles réponses nous sommes à même
d'apporter à cette confusion néfaste des genres.
La première réponse est claire : la recherche des responsabilités sera lancée
et poursuivie en ce qui concerne le Crédit lyonnais, le GAN et le Crédit
Foncier.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
La seconde réponse est non moins claire : la poursuite du programme des
privatisations est prioritaire, elle permettra de recentrer l'Etat sur ses
missions de puissance publique et de donner aux entreprises privatisées les
marges de manoeuvre nécessaires.
M. Jacques Mahéas.
Grâce à des licenciements supplémentaires !
M. Yves Galland,
ministre délégué.
L'Etat restera actionnaire de certaines entreprises
publiques, c'est évident.
M. Jacques Mahéas.
C'est thatchérien !
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Dans ces conditions, il convient d'engager une réforme
du fonctionnement et du comportement des administrations en charge du contrôle,
pour bien séparer les fonctions de régulateur des fonctions d'actionnaire.
M. Jean Arthuis a d'ailleurs récemment indiqué qu'il préparait une réforme du
Trésor pour scinder les fonctions de l'Etat régulateur et celles de l'Etat
actionnaire. Et, si j'ai bien compris votre question, monsieur le sénateur,
vous pensez que cette réforme doit s'appliquer non pas uniquement au Trésor et
à Bercy, mais éventuellement aussi à d'autres ministères.
Des mesures vont être prises pour que les administrateurs qui représentent
l'Etat puissent mieux exercer leur rôle et, à cet égard, il faut qu'ils
bénéficient d'une formation appropriée.
De plus, il faut que l'Etat joue son rôle dans la définition de la stratégie
des entreprises publiques, qu'il dispose des instruments d'information
adéquats, des capacités d'expertise et d'information. En particulier, il doit
être très attentif aux investissements les plus importants.
Enfin, il convient que l'Etat entretienne, lors de l'examen des comptes, un
dialogue efficace avec les dirigeants des entreprises et les commissaires aux
comptes.
Monsieur le sénateur, voici les engagements que nous pouvons prendre : nous
rechercherons les responsabilités dans les affaires passées ; nous allons faire
en sorte que l'Etat se désengage des secteurs où il n'a pas la vocation d'être
et que, là où il sera présent, il assume la responsabilité d'actionnaire pour
assurer la viabilité, l'avenir et la pérennité des entreprises.
(Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de
l'Union centriste et du RPR.)
M. René Régnault.
Il ne reste plus grand-chose à faire !
HUITIÈME PLAN SOCIAL DE MICHELIN
M. le président.
La parole est à M. Bony.
M. Marcel Bony.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'industrie, de la poste et des
télécommunications.
Monsieur le ministre, l'actualité de ces quinze derniers jours,
malheureusement chargée en événements sociaux graves - je pense en particulier
à Renault - a occulté le huitième plan social de Michelin, qui annonce la
suppression de 1 445 emplois.
Cette décision n'en aura pas moins un impact important pour l'Auvergne, dans
la mesure où 1 052 emplois seront rayés d'un trait de plume à
Clermont-Ferrand.
M. René Régnault.
Ah là là !
M. Marcel Bony.
Ce huitième plan social est d'autant plus traumatisant - j'aurais même
tendance à dire provocateur - qu'il n'est pas « justifié » par de mauvais
résultats financiers, au contraire des précédents. En 1996, le chiffre
d'affaires a même progressé de 7,8 % et les bénéfices nets sont de plus de 3
milliards de francs pour le groupe. De plus, la capacité d'autofinancement
atteint près du double de celle de l'exercice précédent. Il s'agit donc
uniquement d'une stratégie d'entreprise visant à réduire annuellement les coûts
de un milliard de francs, et ce pendant trois ans.
Dans ce cadre, certains peuvent toujours, comme M. le ministre délégué au
budget, trouver que le plan Michelin traduit « un principe naturel » et «
s'étonner qu'on s'étonne » du paradoxe de son annonce quasi simultanée avec
celle de la santé éclatante de la multinationale.
D'autres peuvent dès lors se demander - j'en fais partie - comment le
Gouvernement peut, d'une part, ne pas condamner cette attitude utilisant les
effectifs comme seule variable d'ajustement et, d'autre part, promouvoir une
politique de l'emploi efficace.
Ma question est la suivante : monsieur le ministre, comment allez-vous mettre
en pratique l'avènement de l'entreprise citoyenne qu'appelait de ses voeux M.
le Président de la République ?
Autrement dit, avez-vous réellement la volonté de mettre un frein à l'immense
drame humain auquel la loi suprême mais irresponsable du marché et de la bourse
nous conduit chaque jour ? En corollaire, comment justifiez-vous, dans ce cas
précis, l'intervention de la collectivité au titre, du Fonds national pour
l'emploi et des conventions de conversion ?
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Monsieur
le sénateur, il est vrai que l'entreprise Michelin opère dans un secteur qui
est probablement l'un des plus concurrentiels qui soient. Vous faisiez état
d'une augmentation de 7 % de ses ventes, et vous avez raison. Cependant, il
faut que vous sachiez que, pendant ce temps, son principal concurrent, qui est
Bridgestone, a augmenté ses ventes de 16 %.
Il faut bien comprendre que les entreprises sont dans une situation de
concurrence croissante, en particulier dans le domaine des pneumatiques.
M. Raymond Courrière.
C'est ça l'entreprise privée !
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Or,
l'entreprise « citoyenne », c'est d'abord une entreprise compétitive, parce
que, si elle n'est pas compétitive, elle se condamne.
Mme Hélène Luc.
Pour que les entreprises soient compétitives, il faut que le pouvoir d'achat
augmente !
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Aujourd'hui, Michelin doit s'adapter aux conditions de la concurrence pour
sauver son activité, sauver ses emplois.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il faut donc licencier !
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Si elle
n'agit pas ainsi dès maintenant, elle se trouvera dans la situation de Renault,
avec toutes les conséquences sociales qui pourront en découler, voire la mise
en cause de son existence.
Je voudrais insister sur plusieurs points. Premièrement, la concurrence est
très forte parce qu'il y a deux concurrents sur le marché mondial, Goodyear et
Bridgestone. Deuxièmement, la pression des constructeurs automobiles sur les
équipementiers, en particulier sur les producteurs de pneus, est considérable,
tout simplement parce que leur situation difficile les amène à reporter sur eux
une partie de leurs difficultés. Enfin, troisièmement, l'entreprise, qui avait
il y a trois ans un endettement trois fois supérieur à ses fonds propres a,
certes, redressé sa situation financière - son endettement est aujourd'hui au
même niveau que ses fonds propres - mais, face à la concurrence, ce n'est pas
suffisant et il lui faut poursuivre ses efforts si elle veut maintenir son
activité et si elle veut continuer à être une des premières du monde.
(Exclamations sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Claude Estier.
Au détriment uniquement des emplois !
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Voilà
pourquoi elle a proposé un plan de 1 445 suppressions d'emplois, présenté le 6
mars devant le comité d'entreprise. Mais, grâce aux mesures d'aménagement et de
réduction du temps de travail, plus de 700 emplois ont pu être préservés, de
telle manière que l'opération, qui consiste à adapter les coûts de cette
entreprise aux conditions de la concurrence, se fera sans licenciements
secs.
En réalisant cette opération, l'entreprise s'engage dans l'avenir, maintient
sa compétitivité et, du même coup, sauve les emplois qui constituent
l'essentiel de l'organisation de l'entreprise.
(Vives protestations sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen. - Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il faut licencier, sinon on n'est pas compétitif ! C'est incroyable !
Où iront travailler les jeunes ?
SITUATION EN ISTRAËL
ET DANS LES TERRITOIRES PALESTINIENS
M. le président.
La parole est à M. Lombard.
M. Maurice Lombard.
Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères, qui, je le
regrette, n'a pu être présent parmi nous, et porte sur la situation en Israël
et dans les territoires palestiniens.
Au moment de la signature de l'accord d'Hébron, qui avait un caractère
symbolique, pour les questions qui se posaient entre M. Arafat et le
gouvernement israélien, il est apparu une détente dans les relations entre ces
deux parties, alors que la situation est extrêmement préoccupante pour la paix,
dans cette partie du monde.
Or, depuis, nous nous sommes aperçus que ces espoirs étaient en grande partie
menacés, d'abord, par la réalisation d'une importante colonie juive par le
gouvernement israélien entre la partie palestinienne de Jérusalem-Est et
Bethléem, qui crée une sorte de coupure entre deux zones palestiniennes.
On peut donc désormais craindre que ne se produisent à nouveau des
affrontements sanglants entre les deux communautés.
Pouvez-vous dire, monsieur le ministre, comment la France suit l'évolution de
la situation ?
Peut-on, par ailleurs, espérer que la pression internationale conduise M.
Netanyahou à abandonner le projet dont je viens de parler ?
M. René Régnault.
C'est une bonne question !
M. Maurice Lombard.
Peut-on espérer, en outre, que l'armée et la police israéliennes abandonneront
prochainement le blocus des villes qui ont été confiées à l'Autorité
palestienne par les accords d'Oslo et qu'elles évacueront les territoires
ruraux.
Enfin, est-il permis d'espérer, toujours dans le même esprit de détente,
monsieur le ministre, que le gouvernement israélien accepte de lever les
obstacles qu'il a dressés à l'exploitation de l'aéroport de Gaza...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très bien !
M. Maurice Lombard.
... ainsi qu'à la construction du port de Gaza, à laquelle la France, avec
d'autres partenaires, s'est engagée à participer financièrement ?
(Applaudissements sur quelques travées du RPR, de l'Union centriste et du
RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Barnier,
ministre délégué aux affaires européennes.
Monsieur le sénateur, votre
question me permet de faire le point sur une situation qui, bien qu'elle soit
plus lointaine que d'autres, concerne notre pays et l'ensemble de l'Union
européenne.
Il est clair qu'il existe à la fois des risques d'instabilité tout autour de
la Méditerranée, et des chances de stabilité, car ce sont effectivement des
chances pour nous, de ce côté-ci de l'Europe.
Vous avez fait part de votre inquiétude, monsieur Lombard, et il est vrai
qu'il existe aujourd'hui davantage de motifs d'inquiétude que de raisons
d'espérer.
Et pourtant ! l'espoir doit être préservé, au moins à terme, puisque, au fond,
le processus de paix est irréversible. En effet, tous les protagonistes, qu'ils
soient Syriens, Libanais, Israéliens ou Palestiniens, nous le savons bien,
veulent, ils le disent, que ce processus de paix aboutisse.
Mais, pour le court terme, il y a tout ce que vous avez dit, en particulier la
grande inquiétude engendrée par la décision du Premier ministre, M. Netanyah
ou, de construire une nouvelle colonie de peuplement à Har Homa.
Cette décision est tout à fait dommageable, malheureuse, non seulement parce
qu'elle remet en cause un
statu quo,
parce qu'elle nous paraît contraire
à la légalité internationale, mais encore parce qu'elle crée un climat dont
nous n'avions pas vraiment besoin et, surtout, comme vous l'avez souligné,
parce qu'elle brise un élan qui avait été créé, il y a quelques semaines, par
l'accord d'Hébron.
C'est le premier et le plus grave de nos sujets de préoccupation. Au-delà, et
à côté, monsieur Lombard, il y a le problème de la Syrie et du Liban.
Là aussi, nous avons des sujets de préoccupations, puisque les négociations
n'ont pas repris, que la tension reste vive au Sud-Liban et qu'en dépit du
travail tout à fait remarquable du groupe de surveillance qui a été institué
par l'arrangement du 26 avril 1996 - et vous connaissez le rôle de la France
dans ce sens - des risques existent. Rien ne peut remplacer, là aussi, une
vraie paix. Nous ne devons pas pour autant nous décourager, mesdames, messieurs
les sénateurs.
Vous m'avez en outre interrogé sur ce que fait la France, monsieur le
sénateur. Elle le fait directement, vous le savez, sous l'impulsion du chef de
l'Etat, par les visites du ministre des affaires étrangères dans cette zone à
plusieurs reprises ; elle le fait aussi par le biais de l'Union européenne,
dont le représentant sur place accomplit un bon travail. Nous continuerons à
agir en ce sens, pour préserver le processus de paix en dépit des
difficultés.
Votre dernière question, monsieur Lombard, portait sur un sujet très important
: le développement économique des territoires palestiniens, notamment de Gaza.
La réouverture de l'aéroport n'a pas été autorisée et des problèmes se posent
quant au port. Quelles que soient les difficultés, il me semble qu'une entente
est possible et que le souci de sécurité des Israéliens, qui est légitime, ne
doit pas, là non plus, servir de prétexte pour retarder les discussions.
A ce propos, je me souviendrai longtemps d'une conversation que j'ai eue à
Gaza avec M. Yasser Arafat. Il me disait alors : « Si les jeunes Palestiniens
n'ont pas une perspective, une raison d'espérer, le sentiment que ce que j'ai
fait avec Israël pour le processus de paix sert à améliorer leur vie
quotidienne, à leur donner une raison de bonheur personnel, le terrorisme
reprendra le dessus. »
Là comme ailleurs, le terrorisme est nourri par la misère. Il faut donc casser
ce cycle de la misère et celui du terrorisme.
C'est dans cette optique que les deux outils que vous avez évoqués -
l'aéroport et le port - sont très importants et que nous ferons tout ce que
nous pouvons faire, pour qu'ils fonctionnent afin de donner une chance de
développement économique aux territoires palestiniens.
(Applaudissements sur les travées du RPR, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
COMMÉMORATION DE LA FIN DE LA GUERRE D'ALGÉRIE
M. le président.
La parole est à M. Clouet.
M. Jean Clouet.
Ma question s'adressait à M. le ministre délégué aux anciens combattants et
victimes de guerre. Je crois qu'elle recevra une réponse de M. Roger Romani ;
je n'en suis pas particulièrement désobligé.
(Sourires.)
Monsieur le ministre, hier, 19 mars, la honte et l'horreur ont défilé
dans Paris au-dessus des cortèges.
La honte et l'horreur, ce sont des dizaines de milliers de Français et
d'Algériens, civils ou militaires, massacrés dans les conditions les plus
abominables après le prétendu cessez-le-feu du 19 mars 1962.
On ne célèbre pas une date porteuse d'autant d'atrocités.
M. Bernard Joly.
Il fallait y être en 1962 !
M. Jacques Mahéas.
Il y a eu trente mille morts ! Ce que vous dites est scandaleux !
M. Jean Clouet.
Mon cher ami, ou bien vous avez la mémoire courte, ou bien vous avez changé de
parti dans les trente secondes qui viennent de s'écouler !
(Rires.)
Deux anciens présidents de la République l'ont clairement affirmé, alors
qu'ils étaient en fonction.
M. Valéry Giscard d'Estaing a déclaré : « L'anniversaire des accords du 19
mars 1962, mettant fin à la guerre d'Algérie, n'a pas à faire l'objet d'une
célébration. »
M. Jacques Mahéas.
C'est quand même la fin de la guerre !
M. Jean Clouet.
Et François Mitterrand, dont vous avez sans doute entendu parler,...
M. Jean Delaneau.
Ils l'ont vite oublié !
M. Jean Clouet.
..., et à qui vous devez probablement votre siège, n'a pas été moins net !
M. Jean Chérioux.
Cela a l'air de vous gêner !
M. Jacques Mahéas.
Vous n'avez pas à insulter les anciens combattants !
M. Jean Clouet.
Il a déclaré : « S'il s'agit de marquer le recueillement national et d'honorer
les victimes de la guerre d'Algérie, je dis que cela ne peut pas être le 19
mars. »
M. Jacques Mahéas.
Il ne l'a pas dit !
M. Jean Clouet.
Si, il l'a dit en septembre 1981, mais vous n'étiez pas né à la politique,
sans doute.
M. Raymond Courrière.
Les anciens combattants sont libres ! Vous n'avez pas à les juger !
M. Alain Gournac.
Cela vous ennuie !
M. Jean Delaneau.
Cela semble vous gêner beaucoup !
M. le président.
Poursuivez, monsieur Clouet !
M. Jean Chérioux.
L'intolérance l'en empêche !
M. Jean Clouet.
Volontiers, monsieur le président, mais pas dans le brouhaha. Rétablissez le
silence.
M. Raymond Courrière.
C'est intolérable !
M. Jacques Mahéas.
On continuera à défiler !
M. Jean Clouet.
Les morts, les pauvres morts de la guerre d'Algérie ne sont pas la propriété
de tel ou tel !
M. Raymond Courrière.
Exactement ! Ils ne sont pas la vôtre !
M. Jean Clouet.
C'est à la France tout entière de prendre en charge leur souvenir !
M. Jean Delaneau.
Ils ne le supportent pas, c'est évident !
M. Raymond Courrière.
Vous n'avez pas à faire la leçon aux anciens combattants !
M. Jean Clouet.
Quelle est, à cet égard, monsieur le ministre, la position du Gouvernement ?
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Roger Romani,
ministre des relations avec le Parlement.
Monsieur le sénateur, vous
évoquez une question bien douloureuse, car elle touche à la mémoire d'une page
tragique de notre histoire.
M. Jacques Mahéas.
Tout à fait !
M. Roger Romani,
ministre des relations avec le Parlement.
Le ministre délégué aux anciens
combattants et victimes de guerre s'incline respectueusement devant le
sacrifice des jeunes Français qui ont passé de longs mois en Algérie, qui y ont
enduré des épreuves, qui y ont été blessés et qui y ont trouvé la mort.
M. Raymond Courrière.
Lui n'y était pas !
M. Henri de Raincourt.
Ils ont été torturés !
M. Roger Romani,
ministre des relations avec le Parlement.
La commémoration de la fin des
hostilités en Algérie pose cependant un problème délicat. Le Premier ministre a
chargé le ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre de
rechercher une date qui pourrait être reconnue par tous les combattants du
conflit d'Afrique du Nord.
Cette réflexion a été engagée et il est apparu qu'un accord était pour le
moment impossible à réaliser.
Vous conviendrez, monsieur le sénateur, qu'en tout état de cause il ne puisse
être envisagé d'officialiser une date qui ne ferait pas l'unanimité des
Français et, naturellement, de ceux qui furent conduits à accomplir leurs
devoirs militaires sur cette terre d'Algérie.
Le ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre voudrait,
devant la représentation nationale, rendre hommage à tous les morts.
Je tiens à rappeler que le Président de la République a rendu hommage « au
courage des forces régulières et des formations supplétives, unies
fraternellement dans les plis du drapeau français ». Il a évoqué cette
troisième génération du feu à laquelle il a voulu associer « tous ceux,
rapatriés, qui ont contribué à la grandeur de notre pays en incarnant l'oeuvre
civilisatrice de la France. Les uns et les autres ont mérité les honneurs de la
mémoire », a conclu le chef de l'Etat.
C'est à ce devoir de mémoire, mesdames, messieurs les sénateurs, que le
Gouvernement et la représentation nationale se consacrent. Ainsi, nous aurons
contribué à renforcer l'unité nationale
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.).
M. le président.
Nous en avons terminé avec les questions d'actualité du Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux pendant
quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze,
sous la présidence de M. Jean Delaneau.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour
la commission des affaires économiques et du Plan.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M.
Jean-Baptiste Motroni membre de la commission des affaires économiques et du
Plan à la place laissée vacante par M. André Vallet, démissionnaire.
5
RETRAIT DE QUESTIONS ORALES
SANS DÉBAT
M. le président.
J'informe le Sénat que la question orale sans débat n° 598 de M. Daniel Goulet
est retirée à la demande de son auteur de l'ordre du jour de la séance du mardi
25 mars 1997.
Par ailleurs, la question orale sans débat n° 546 de M. Jean-Paul Delevoye est
retirée du rôle des questions orales sans débat en instance devant le Sénat.
6
TRAITÉ SUR LA CHARTE DE L'ÉNERGIE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 186, 1996-1997)
autorisant la ratification du traité sur la Charte de l'énergie (ensemble un
protocole). [Rapport n° 267 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, par le présent projet de loi, le Gouvernement demande au Sénat
d'autoriser la ratification du traité sur la Charte de l'énergie, signé à
Lisbonne le 17 décembre 1994.
Ce traité met en oeuvre les engagements de nature politique de la Charte
européenne de l'énergie, signée à La Haye quatre ans auparavant, le 17 décembre
1991, par cinquante et un Etats : les pays de l'OCDE, les républiques de
l'ex-URSS, les pays d'Europe centrale et orientale.
Due à une initiative de la Communauté européenne, la Charte européenne de
l'énergie a pour but de promouvoir la coopération dans le secteur énergétique
en Europe dans le contexte des profondes mutations politiques et économiques de
l'est du continent.
L'objectif est de contribuer au développement économique de l'Europe de l'Est
en facilitant l'exploitation des ressources considérables des pays de
l'ex-URSS, notamment la Russie, tout en assurant une meilleure sécurité
d'approvisionnement énergétique aux pays consommateurs de l'Europe de
l'Ouest.
A cette fin, la Charte énumère un certain nombre de principes : respect de la
souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles, non-discrimination,
fixation des prix selon les lois du marché, respect de l'environnement.
C'est pour donner un caractère contraignant à ces principes qu'a été négocié
et signé le traité sur la Charte de l'énergie.
Les quarante-neuf signataires sont : la Communauté européenne et ses Etats
membres, les pays d'Europe centrale et orientale, ceux de la Communauté des
Etats indépendants, dont la Russie, ainsi que le Japon, la Turquie,
l'Australie, la Suisse et la Norvège.
Négocié parallèlement au traité et signé en même temps que celui-ci, le
protocole sur l'efficacité énergétique pose les principes de la coopération
entre les parties pour promouvoir des politiques d'économie d'énergie et de
protection de l'environnement.
Pour ce qui est du contenu, le traité comporte quatre ensembles principaux de
dispositions, portant sur la protection et la promotion des investissements, le
commerce, le transit des matières et produits énergétiques, ainsi que sur
l'environnement.
Les dispositions du traité relatives à la promotion et à la protection des
investissements visent à établir la norme de traitement la plus favorable aux
investisseurs étrangers pour les investissements déjà réalisés ; il s'agit de
la phase de « post-investissement », au cours de laquelle s'effectue
l'exploitation. Les investisseurs bénéficient alors du traitement national,
ainsi que de la liberté de transfert des flux liés à un investissement. Les
accords internationaux existant entre deux ou plusieurs parties prévalent sur
le traité si leurs dispositions sont plus favorables pour l'investisseur.
Comme il est prévu dans le traité, un traité complémentaire est en cours de
négociation depuis 1995, en vue d'établir les mêmes normes pour la phase de «
pré-investissement », c'est-à-dire l'achat de sites et d'équipements, l'octroi
de licences, les privatisations, l'ouverture de monopoles.
Quant aux échanges commerciaux de matières et produits énergétiques, ils sont
régis par les dispositions de l'accord général sur les tarifs douaniers et le
commerce, auquel à succédé l'accord instituant l'Organisation mondiale du
commerce, et par ses instruments connexes. Les dispositions s'appliquent
également,
mutatis mutandis,
aux parties qui n'étaient pas membres de
l'OMC.
Il convient de noter que les échanges de matières nucléaires peuvent être
régis par des accords spécifiques. Ainsi, la Communauté européenne et la Russie
sont convenues que les échanges de ces matières entre elles seraient régis,
jusqu'à la conclusion d'un nouvel accord, par les dispositions de l'accord de
partenariat entre l'Union européenne et la Russie signé à Corfou en juin
1994.
De même, pour les autres Etats de la Communauté des Etats indépendants, sont
toujours d'application les dispositions de l'accord signé entre la Communauté
européenne et l'URSS à Bruxelles en décembre 1989.
Le traité institue le principe de la liberté de transit des matières et
produits énergétiques sur le territoire des parties. Ces dernières doivent
s'abstenir d'interrompre ou de réduire les flux d'énergie en cas de différend
sur les conditions du transit, jusqu'à ce que ce différend soit réglé selon les
modalités de conciliation prévues par le traité.
S'agissant de l'environnement, le traité s'inscrit dans l'objectif de
développement durable et reconnaît le principe selon lequel le pollueur
supporte les coûts de la pollution.
Sans préjuger les mesures précises touchant les activités pétrolières et
gazières en amont, il établit les axes d'une approche commune de la législation
en la matière et favorise la coopération dans les domaines du transfert de
technologies et des échanges d'informations.
Le traité prévoit par ailleurs une série de mécanismes pour le règlement des
différends.
Des dispositions transitoires ont été prévues pour les pays en transition vers
l'économie de marché qui ont besoin d'un temps d'adaptation supplémentaire. La
fin de la période transitoire, variable selon les pays, est fixée au plus tard
à 2001.
Sur le plan institutionnel, le traité établit une conférence de la Charte, à
laquelle est adjoint un secrétariat, structure souple établie à Bruxelles. La
conférence surveille et facilite la mise en oeuvre du traité et veille aux
négociations du second traité ainsi qu'à l'activité des groupes de travail.
Le traité entrera en vigueur lorsque trente Etats l'auront ratifié. En
attendant, les signataires l'appliquent provisoirement dans la mesure où cette
application provisoire n'est pas incompatible avec leur constitution et leur
législation.
Le traité sur la Charte de l'énergie, en favorisant la coopération énergétique
à l'échelle du continent européen, contribuera à assurer, pour la France comme
pour ses partenaires de l'Union européenne, la sécurité des approvisionnements
et incitera à mieux prendre en compte le respect de l'environnement. Il
garantira une meilleure protection des activités des opérateurs qui commercent
ou investissent en Europe de l'Est et dans l'ancienne URSS, et il facilitera
leurs démarches.
Les dispositions qu'il contient prennent toute leur importance si l'on
rappelle qu'un tiers du gaz importé par la France et 10 % de ses
approvisionnements en pétrole proviennent de Russie, traversant les territoires
des pays d'Europe centrale et orientale, notamment l'Ukraine.
Pour ce qui est des engagements internationaux, le traité fait application des
règles du GATT pour les pays non membres de l'OMC dans les matières
commerciales.
S'agissant des investissements, les accords internationaux plus favorables
pour l'investisseur prévalent sur les dispositions du traité : ainsi sont
préservées, le cas échéant, les dispositions plus avantageuses des accords
bilatéraux de protection des investissements signés par la France.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
principales dispositions du traité sur la Charte de l'énergie qui fait l'objet
du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Boyer,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers
collègues, le projet de loi qui nous est soumis a pour objet d'autoriser
l'adhésion de la France au traité sur la Charte de l'énergie, signé à Lisbonne
le 17 décembre 1994.
A l'origine de ce traité se trouve la Charte européenne de l'énergie, lancée
par le Conseil européen de Dublin le 25 juin 1990. Cette charte, qui a été
signée en 1991 par quelque cinquante pays Etats de la CEI, les pays d'Europe
centrale et orientale, les membres de l'Union européenne, ainsi que par les
Etats-Unis, le Canada, le Japon et l'Australie - avait un objectif essentiel :
faciliter la coopération énergétique entre des pays anciennement séparés par le
rideau de fer et aider les pays de l'Est dans leur transition vers l'économie
de marché, notamment en les rendant à même d'attirer les investissements
étrangers dans le secteur énergétique.
Ce traité a donc pour objet de donner force juridiquement contraignante aux
principes généraux contenus dans cette charte. Il tend à offrir un cadre
juridique stable aux activités internationales en matière de prospection, de
production, de transit, de commerce et d'investissement dans le secteur
énergétique.
Il comporte un mécanisme de règlement des différends commerciaux quasiment
calqué sur celui qui est désormais en cours dans le cadre de l'Organisation
mondiale du commerce.
D'ailleurs, l'une des caractéristiques de ce traité est qu'il fait
application, pour les pays signataires et pour le secteur de l'énergie, des
principes généraux du GATT, alors même que bon nombre des parties au traité ne
sont pas encore, à ce jour, membres de l'OMC, à commencer par la Fédération de
Russie. Ainsi a-t-on pu qualifier ce traité de GATT sectoriel et
géographique.
L'enjeu est fort important puisque les pays de l'Est, notamment la Russie et
ses partenaires de la CEI, détiennent des réserves énergétiques considérables
et du gaz naturel en particulier.
Le commerce des matières nucléaires fait l'objet d'un traitement à part
puisque, en ce qui concerne l'Union européenne, il continuera d'être régi par
l'article 22 de l'accord de partenariat passé en 1994 entre les Communautés
européennes et la Russie. Le dispositif retenu prévoit ainsi la possibilité
d'instaurer un régime protecteur au cas où « un produit est importé sur le
territoire d'une des parties contractantes dans des quantités tellement accrues
... qu'il porte ... préjudice aux fabricants nationaux ».
D'une façon générale, sur le plan du commerce des produits énergétiques -
pétrole, gaz naturel, charbon, énergie électrique - le traité fait référence
aux dispositions du GATT : lutte contre la concurrence déloyale, transparence
des législations, engagements à consolider les tarifs douaniers, suppression
progressive des obstacles non tarifaires, etc.
Pour ce qui est des investissements déjà réalisés, le traité invite au respect
de conditions stables, équitables et transparentes en appliquant le principe de
la nation la plus favorisée.
On notera que, s'agissant des conditions concernant les investissements
futurs, le traité se borne à des engagements vagues. Il est prévu qu'un nouveau
traité réglera cette question, essentielle pour les investisseurs étrangers
potentiels.
En ce qui concerne le droit de transit des produits énergétiques, le traité
engage les parties à ne pas interrompre ou gêner ce transit de produits entre
pays signataires. On se rappelle qu'en 1993 et 1994 l'Ukraine avait bloqué
l'acheminement de gaz russe à travers son territoire vers l'Europe
occidentale.
Ainsi, mes chers collègues, ce traité permettra de renforcer, pour la France,
comme pour ses partenaires européens, la sécurité des approvisionnements
énergétiques. Il protégera les opérateurs installés dans les territoires de la
CEI et des pays d'Europe centrale et orientale, notamment en facilitant les
démarches administratives.
D'autres négociations, en cours ou à venir, viendront donner au traité sa
pleine signification : le deuxième traité sur la phase de préinvestissement,
non incluse dans le présent document ; l'extension des dispositions
commerciales aux équipements énergétiques ; enfin, la mise en oeuvre effective
des engagements sur la consolidation des tarifs.
En proposant, pour les dispositions commerciales, une référence aux principes
du GATT originel, le traité fait en quelque sorte, au profit des pays qui n'en
sont pas encore membres, oeuvre pédagogique dans l'attente de leur adhésion,
pleine et entière, à l'accord de 1994 portant création de l'Organisation
mondiale du commerce.
Le traité permettra de valoriser, dans l'intérêt réciproque de tous les Etats
parties, les ressources énergétiques européennes et, par conséquent, de
contribuer au développement et à la croissance économique du continent.
Pour toutes ces raisons, je vous invite, mes chers collègues, à adopter le
projet de loi qui nous est soumis.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique
. - Est autorisée la ratification du traité sur la
Charte de l'énergie (ensemble un protocole) fait à Lisbonne le 17 décembre 1994
et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
7
ACCORDS CONCERNANT LA PROTECTION DE LA MEUSE ET LA PROTECTION DE L'ESCAUT
Adoption de deux projets de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 169, 1996-1997)
autorisant l'approbation de l'accord concernant la protection de la Meuse et du
projet de loi ( n° 168, 1996-1997) autorisant l'approbation de l'accord
concernant la protection de l'Escaut. [Rapport n° 198 (1996-1997)].
La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à une discussion
générale commune de ces deux projets de loi.
Dans la discussion générale commune, la parole est à Mme Le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, les accords concernant la protection de la Meuse et de l'Escaut
contre la pollution ont été signés à Charleville-Mézières le 26 avril 1994.
Ces accords, dont les textes sont quasiment identiques, visent à mettre en
place une politique de coopération en matière de protection de la qualité de
l'eau et de systèmes d'alerte en cas d'accident. Ils reposent, en outre, sur
l'interdiction des pollutions pouvant causer des dommages substantiels aux
intérêts des Etats riverains et l'obligation de prendre des mesures pour
prévenir de telles polutions.
Pour être efficace, une telle politique de coopération doit être décidée et
mise en oeuvre à l'échelle du bassin versant. C'est pourquoi le champ
d'application des accords s'étend à l'ensemble des bassins, c'est-à-dire le
fleuve lui-même, ses affluents, tous les cours d'eau se jetant directement ou
indirectement dans le fleuve et les territoires dont les eaux de ruissellement
s'écoulent dans le fleuve.
Des accords de même nature existent de longue date pour le Rhin, la Moselle,
la Sarre et le lac Léman. Ceux qui concernent la Meuse et l'Escaut viennent
donc parachever le dispositif concernant la protection des fleuves
transfrontaliers.
Les textes s'appuient sur un certain nombre de principes qui connaissent
d'importants développements depuis la conférence de Rio ; il s'agit des
principes de précaution, de prévention, d'application des meilleures
technologies disponibles et des meilleures pratiques environnementales, ainsi
que du principe du pollueur-payeur.
La protection de la qualité des eaux de la Meuse et de l'Escaut, la lutte
contre les risques de pollution des nappes phréatiques et l'action en faveur de
la restauration de la diversité biologique constituent autant de contributions
à l'effort global en faveur de la protection de l'environnement et de la santé
des populations.
Les deux commissions instituées par les accords ont pour rôle de formuler des
recommandations à l'égard des parties contractantes. Celles-ci sont adoptées à
l'unanimité. Chaque commission met en place un secrétariat, de dimension
modeste, qui l'assiste dans ses tâches, coordonne et anime les travaux.
Il est important de souligner que les activités des commissions associent de
façon étroite les services centraux de l'Etat - les départements ministériels
les plus concernés sont ceux des affaires étrangères, de l'environnement, de
l'industrie, de l'agriculture et de l'équipement - les services décentralisés -
les direction régionales de l'industrie, de la navigation ou de l'environnement
- les agences de l'eau et les représentants des collectivités locales.
Les mesures prises au sein des commissions s'intégreront, le moment venu, dans
les programmes d'intervention des agences de l'eau Rhin-Meuse et
Artois-Picardie. Le septième programme des agences, concernant les années 1997
à 2001, a été adopté récemment.
Le budget annuel de chacune de ces commissions s'élèvera à 2 millions de
francs environ. Les contributions de la France, fixées par les règles de
répartition prévoyant 16 % du budget total pour la Meuse et 30 % pour l'Escaut,
en fonction de l'importance du bassin versant, de la densité des populations et
de la densité industrielle, seront donc comprises entre 320 000 et 600 000
francs.
Ces accords, qui lient la Belgique, les Pays-Bas et la France, ont une
particularité qui est liée à la situation interne de la Belgique : ils
constituent la première application des lois de décentralisation aux régions
belges des compétences en matière d'environnement, y compris à l'échelon
international.
En conséquence, trois partenaires belges ont signé ces textes et sont parties
aux accords : la Wallonie, la Flandre et la région de Bruxelles-capitale.
Je souhaite, enfin, mentionner un point auquel nous sommes particulièrement
attachés : les langues de travail des commissions sont le français et le
néerlandais.
Ces accords auront pour effet de motiver les maîtres d'ouvrage publics ou
privés et de provoquer une concertation propre à entraîner des progrès majeurs
dans la situation de ces deux cours d'eaux.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales dispositions de l'accord concernant la
protection de l'Escaut et de l'accord concernant la protection de la Meuse qui
font l'objet des deux projets de loi aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers
collègues, les deux projets de loi qui nous sont soumis ont pour objet
d'autoriser l'approbation de deux accords signés le 26 avril 1994 à
Charleville-Mézières et tendant à protéger respectivement la Meuse et l'Escaut
contre la pollution. Chacun des deux accords réunit cinq parties : la France,
les Pays-Bas, la région Bruxelles-capitale, la région wallonne et la région
flamande.
Ces deux textes se donnent pour objectif de constituer un cadre de coopération
entre les parties pour prévenir et réduire les pollutions aquatiques au niveau
de chacun des deux bassins hydrologiques de la Meuse et de l'Escaut.
S'agissant de la Meuse, le travail accompli au cours des quinze dernières
années a permis une amélioration très sensible de la situation sur la totalité
du bassin. Toutefois, en raison, d'une part, de la densité de la population et,
d'autre part, des activités industrielles et agricoles, la qualité de l'eau de
la Meuse et de la plupart de ses affluents reste dégradée par des rejets
insuffisamment épurés des eaux domestiques usées ainsi que des rejets d'origine
industriel et agricole.
Pour ce qui concerne l'Escaut, la dégradation sensible de son bassin
hydrologique en fait un fleuve pollué. Les apports de pollution sont, en effet,
estimés à 15 million d'équivalent-habitant pour l'ensemble des Etats concernés,
à savoir 2,5 millions provenant des rejets industriels directs, 11 millions des
rejets d'égouts non traités et 1,5 millions pour les rejets des stations
d'épuration et les rejets urbains.
Les principes généraux et les objectifs de chacun des deux accords sont
identiques. Il s'agit du principe de précaution, selon lequel la mise en oeuvre
de mesures préventives s'impose même si le lien entre la cause et l'effet n'est
pas scientifiquement démontré, du principe de prévention, incitant à la mise en
oeuvre de technologies propres dans des conditions économiques acceptables, du
principe de maîtrise et de réduction, par priorité, à la source de la pollution
et, enfin, du principe pollueur-payeur, déjà inscrit dans la législation
communautaire.
La commission internationale pour la protection de la Meuse bénéficiera d'un
secrétariat permanent installé à Liège. Il comprendra un secrétaire de
nationalité française et un secrétaire-adjoint de nationalité belge. Le coût de
fonctionnement de la commission sera supporté par les parties et, pour ce qui
concerne la France, la cotisation représentera 500 000 francs.
La commission internationale pour la protection de l'Escaut disposera, pour sa
part, d'un secrétariat installé à Anvers et animé par des représentants
néerlandais et wallons. La part de la France s'élèvera à 30 %, soit environ 300
000 francs.
Ces différents instruments juridiques illustrent une préoccupation croissante
de la communauté internationale à l'égard de la préservation durable, en
quantité et en qualité, du bien précieux et rare que constitue l'eau
aujourd'hui. Ils sont également l'occasion de rappeler l'efficacité des
structures juridiques mises en place dans notre pays pour mettre en oeuvre la
politique de l'eau et l'excellence de l'école française de l'eau.
Pour cet ensemble de raisons, je vous recommande, au nom de la commission des
affaires étrangères, l'adoption de ces deux projets de loi.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
ACCORD CONCERNANT LA PROTECTION DE LA MEUSE
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du premier projet de loi.
«
Article unique. -
Est autorisée l'approbation de l'accord concernant
la protection de la Meuse, fait à Charleville-Mézières le 26 avril 1994, et
dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
ACCORD CONCERNANT LA PROTECTION DE L'ESCAUT
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du second projet de loi.
«
Article unique. -
Est autorisée l'approbation de l'accord concernant
la protection de l'Escaut, fait à Charleville-Mézières le 26 avril 1994, et
dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
8
CONVENTION SUR LA PROTECTION ET L'UTILISATION DES COURS D'EAU TRANSFRONTIÈRES
ET DES LACS INTERNATIONAUX
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 170, 1996-1997)
autorisant l'approbation de la convention sur la protection et l'utilisation
des cours d'eau transfrontières et des lacs internationaux. [Rapport n° 199
(1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la France a signé le 18 mars
1992 à Helsinki la convention sur la protection et l'utilisation des cours
d'eau transfrontières et des lacs internationaux, élaborée sous les auspices de
la commission économique pour l'Europe des Nations unies.
Cette convention-cadre a pour objet d'amener les Etats riverains des mêmes
eaux, superficielles ou souterraines, qui marquent leurs frontières, à coopérer
en vue de prévenir, de maîtriser, de réduire l'impact transfrontière de la
pollution et de protéger l'environnement des eaux, y compris le milieu
marin.
Le principe et les grandes lignes de cette convention ont été approuvés lors
de la conférence de Sofia en novembre 1989, qui, dans le cadre du processus de
paix en Europe résultant de la conférence sur la sécurité et la coopération en
Europe, entendait apporter une contribution concrète à la prévention et au
règlement pacifique des différends nés de problèmes d'environnement.
Son champ d'application concerne tout préjudice important causé à l'état des
eaux transfrontières d'un Etat par une activité humaine exercée, en tout ou
partie, dans un Etat riverain.
Les parties sont guidées par les principes de précaution et du pollueur-payeur
et invitées à recourir aux meilleures pratiques environnementales ainsi qu'aux
meilleures technologies disponibles. Elles doivent également fixer des régimes
d'autorisation et des normes de rejet ainsi que, le cas échéant, des objectifs
de qualité des eaux.
Les deux lois françaises sur l'eau du 16 décembre 1964 et du 3 janvier 1992,
ainsi que les directives communautaires en vigueur, toutes transposées en droit
interne, couvrent déjà l'ensemble des matières traitées par la convention :
ainsi, bien qu'intervenant dans le domaine de la loi, la mise en oeuvre de
cette convention ne nécessitera pas de modifications du droit français.
De même, dans le domaine des accords par cours d'eau, que la convention
recommande de conclure ou d'adapter, la France satisfait à l'essentiel des
obligations prescrites, puisque tous ses grands fleuves et le lac Léman font
l'objet d'accords de protection et bénéficient de structures permanentes de
coopération.
Cette convention, ratifiée par dix-neuf Etats, dont neuf de l'Union
européenne, et par cette dernière est entrée en vigueur à l'automne 1996.
La France, qui mène une coopération internationale très active dans le domaine
de l'eau, estime que son approbation devrait contribuer à la diffusion du
savoir-faire de l'école française de l'eau.
En effet, le marché de l'exportation des sociétés françaises oeuvrant dans ce
secteur devrait s'accroître partout où des organismes de coopération et des
programmes d'action seront mis en place pour l'application de cette convention.
Une approbation rapide permettra donc à la France de participer, dès la
première réunion des parties, à la conception et à la réalisation de ces
programmes.
Par ailleurs, cette approbation n'entraînera pas pour la France d'incidence
financière significative, hormis la contribution au futur budget de ladite
convention, qui devra être adopté à l'unanimité à la première réunion des
parties prévue au début du mois de juillet 1997.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention
sur la protection et l'utilisation des cours d'eau transfrontières et des lacs
internationaux, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre
approbation.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, ce projet de loi est étroitement lié aux deux textes que le Sénat
vient d'adopter, puisque l'objectif de cette convention est de constituer un
cadre aux coopérations bilatérales ou multilatérales engagées pour protéger
l'environnement aquatique, pour prévenir et maîtriser la pollution des cours
d'eau transfrontières et pour assurer une utilisation rationnelle des
ressources en eau.
La convention, signée à Helsinki le 18 mars 1992 par vingt-deux pays, a été
élaborée sous les auspices de la commission économique pour l'Europe des
Nations unies, l'une des cinq commissions économiques régionales figurant parmi
les organes subsidiaires du Conseil économique et social de l'ONU. Elle a son
siège à Genève et rassemble les cinquante-cinq Etats du continent européen,
ainsi que les Etats-Unis et le Canada.
Je crois utile de rappeler l'approche française en matière de préservation de
la qualité de l'eau : sous la tutelle du ministère de l'environnement, les
agences de l'eau et les comités de bassin constituent les outils privilégiés
d'une gestion intégrée du milieu aquatique et une structure remarquable de
l'action conduite dans le domaine de l'eau.
Ainsi, les six agences de l'eau existantes mettent en oeuvre les orientations
définies par leurs comités de bassin, véritables « parlements locaux de l'eau
», pour protéger les ressources en eau et assurer leur dépollution.
Dans le cadre de l'Union européenne, la Commission a participé, au nom de la
Communauté, aux négociations préparatoires de la convention d'Helsinki. Elle
est donc partie à cet instrument international, qui prévoit par ailleurs des
conditions spécifiques d'exercice du droit de vote respectivement par l'Union
et ses pays membres.
Un projet de « directive mère » sur la qualité écologique de l'eau est
actuellement à l'étude : la politique communautaire de l'eau devrait se trouver
ainsi juridiquement clarifiée.
Quelles sont les principales dispositions de la convention d'Helsinki ?
Les Etats signataires sont invités à tout mettre en oeuvre pour prévenir,
maîtriser et réduire toute pollution sur les eaux des fleuves transfrontières
et des lacs internationaux.
Les mesures devront être fondées sur les trois principes qui ont été
précédemment évoqués, à savoir : le principe de précaution, le principe du
pollueur-payeur, initié par la législation communautaire, et la préservations
des ressources en eau sur le long terme.
Le cadre que constitue la convention d'Helsinki est déjà abondamment rempli
par les nombreux accords que la France a passés avec ses voisins. Les eaux du
lac Léman, de la Sarre, de la Moselle, du Rhin, plus récemment de la Meuse et
de l'Escaut, font toute l'objet d'une coopération bilatérale ou multilatérale
dans le cadre de commissions internationales.
De même, sur le fond des dispositions et des orientations proposées par la
convention, l'adéquation de la politique suivie par la France, y compris dans
le cadre des normes communautaires, est d'ores et déjà acquise.
Cette convention constituera cependant un outil précieux à l'égard notamment
de pays d'Europe centrale et orientale où les préoccupations environnementales
ne constituent pas encore pour tous des priorités. Ce sera l'occasion pour
l'Union européenne mais aussi pour la France de promouvoir un « savoir-faire »
en la matière et d'aider ses futurs partenaires à élaborer les normes
écologiques les plus exigeantes possible pour la qualité du milieu aquatique,
en accord avec les possibilités économiques des pays concernés, pour participer
à la préservation d'un bien rare.
Je ne peux donc, au bénéfice de ces observations, que vous recommander, mes
chers collègues, l'adoption de ce projet de loi.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. -
Est autorisée l'approbation de la convention sur la
protection et l'utilisation des cours d'eau transfrontières et des lacs
internationaux, faite à Helsinki le 17 mars 1992, et signée par la France le 18
mars 1992, dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
9
CONVENTION DES NATIONS UNIES
SUR LA LUTTECONTRE LA DÉSERTIFICATION
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 246, 1996-1997),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention
des Nations unies sur la lutte contre la désertification dans les pays
gravement touchés par la sécheresse et la désertification, en particulier en
Afrique (ensemble quatre annexes). [Rapport n° 254 (1996-1997)].
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai l'honneur de vous présenter
maintenant le projet de loi autorisant la ratification de la convention des
Nations unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement
touchés par la sécheresse et la désertification, en particulier en Afrique.
La genèse de cette convention remonte à la conférence des Nations unies sur
l'environnement et le développement, qui s'est tenue à Rio en 1992.
La communauté internationale a, dans les vingt dernières années, pris une
conscience plus aiguë de l'importance de la désertification dans de nombreuses
régions du monde, mais plus particulièrement en Afrique, et de ses conséquences
humaines, environnementales et économiques.
En 1997, à l'occasion de la conférence des Nations unies sur la
désertification, un plan d'action pour combattre la désertification avait été
adopté, qui n'avait pas eu tous les effets escomptés. Le phénomène de
désertification a donc continué à s'aggraver.
C'est pourquoi la question a été de nouveau soulevée, sur l'initiative des
gouvernements africains, lors de la conférence de Rio. La France a alors appuyé
cette initiative des pays africains et obtenu le soutien de la Communauté
européenne. La conférence de Rio a validé l'idée d'une nouvelle approche plus
intégrée et codifiée par une convention internationale. Elle a invité
l'assemblée générale des Nations unies à établir un comité intergouvernemental
de négociation pour élaborer, avant la fin du mois de juin 1994, un texte de
convention de lutte contre la désertification. Se rangeant à cet avis,
l'assemblée générale a créé le comité par sa résolution n° 47-188 du 22
décembre 1992.
A l'issue de cinq sessions, le comité intergouvernemental de négociation a
adopté le 17 juin 1994, à Paris, le texte de la convention, qui a été signée
par plus de quatre-vingts pays, lors d'une cérémonie organisée sous la
présidence du ministre français de l'environnement à Paris, les 14 et 15
octobre 1994. Aujourd'hui, cent quinze pays ont signé cette convention et plus
de soixante l'ont ratifiée.
Notre pays avait tenu à ce que la dernière session de négociation et la
signature de la convention se déroulent en France à son invitation, de façon à
témoigner toute l'importance que notre pays attache à un phénomène qui affecte
au premier chef nombre de pays africains avec lesquels il entretient des liens
anciens et étroits.
La convention, qui est entrée en vigueur le 26 décembre 1996, comporte un
corps principal ainsi que quatre annexes régionales. Elles sont partie
intégrante de la convention et concernent l'Afrique, l'Amérique latine, l'Asie
et la Méditerranée septentrionale.
Prenant en compte les échecs antérieurs, la convention innove dans quatre
domaines principaux.
Elle envisage toutes les dimensions de la désertification, qu'il s'agisse des
aspects climatiques, physiques et, surtout, socio-économiques.
Elle donne aux populations locales l'initiative des actions à entreprendre et
privilégie une approche nouvelle du bas vers le haut, créant ainsi un cadre de
démocratie participative.
Elle prévoit un dispositif institutionnel de mise en oeuvre et de suivi à tous
les niveaux d'intervention qui conserve, aux pays concernés, le rôle
prépondérant dans l'application de la convention et encourage un partenariat
entre les différents niveaux, notamment en ce qui concerne l'élaboration des
plans d'actions nationaux.
Elle établit un mécanisme mondial, organe régulateur des programmes et de
leurs financements dont les modalités de fonctionnement seront déterminées par
la conférence des parties.
Cette convention comporte des engagements pour les pays affectés comme pour
les pays donateurs.
Premièrement, les pays en voie de développement s'engagent à accorder une
priorité absolue à la lutte contre la désertification et à y consacrer des
ressources suffisantes, en rapport, bien sûr, avec leur situation et leurs
moyens.
Deuxièmement, ils s'engagent à établir des stratégies et des priorités dans le
cadre des plans ou des politiques de développement durable pour lutter contre
la désertification.
Troisièmement, ils s'engagent à s'attaquer aux causes profondes de la
désertification et à accorder une attention particulière aux facteurs
socio-économiques qui contribuent à la propagation de ce phénomène.
Quatrièmement, ils s'engagent à sensibiliser les populations des régions
affectées avec l'appui des organisations non gouvernementales, en particulier
les femmes et les jeunes, sur leur rôle essentiel dans la lute contre la
désertification.
Cinquièmement, ils s'engagent à créer un environnement porteur en renforçant,
si cela est nécessaire, la législation existante ou, le cas échéant, en
adoptant de nouvelles lois.
Les pays développés s'engagent à appuyer activement, individuellement ou
conjointement, l'action menée par les pays en développement affectés, en
particulier en Afrique, et par les pays les moins avancés.
Ils s'engagent à fournir des ressources financières importantes et d'autres
formes d'appui pour aider les pays en développement affectés, en particulier en
Afrique, pour élaborer et mettre en oeuvre leurs plans d'action et leurs
stratégies à long terme.
Ils s'engagent à favoriser la mobilisation de ressources financières
adéquates, y compris par le biais du Fonds pour l'environnement mondial, dans
le cadre des quatre domaines d'intervention de ce fonds.
Ils s'engagent à encourager la mobilisation de fonds provenant du secteur
privé et d'autres sources non gouvernementales.
Enfin, ils s'engagent à promouvoir et à faciliter l'accès des pays affectés à
la technologie, aux connaissances et au savoir-faire appropriés.
L'idée fondamentale qui a présidé à la négociation de la convention et à
l'adoption des dispositions qui viennent d'être exposées est la suivante : dans
le passé, ce n'est pas tant le volume de l'aide que les conditions de son
utilisation et, surtout, le manque de coordination des programmes mis en oeuvre
qui ont conduit à l'échec des actions entreprises.
Aussi l'accent est-il mis sur la coordination au niveau des Etats, au niveau
global, sur le plan opérationnel comme sur celui de la mobilisation des
ressources existantes, notamment par l'intermédiaire du mécanisme mondial.
Les annexes régionales sont d'importance inégale. L'annexe africaine est, de
loin, et pour cause, la plus longue et la plus précise, ce qui traduit la
priorité accordée à l'Afrique. Par ailleurs, en dehors de la convention, des
mesures d'urgence en faveur de l'Afrique ont été adoptées très rapidement et
ont permis un début de mise en oeuvre de la convention avant même son entrée en
vigueur.
L'annexe pour la Méditerranée septentrionale, voulue par l'Espagne, diffère
des autres annexes en ce qu'elle prévoit expressément que les pays affectés de
la région concernée ne peuvent prétendre à aucune aide financière dans le cadre
de la convention.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales dispositions de la convention qui fait
l'objet du projet de loi proposé aujourd'hui à votre approbation, et qui a déjà
été approuvé le 6 mars dernier par l'Assemblée nationale.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait,
en remplacement de M. Pierre Biarnès, rapporteur de la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées.
Monsieur le président,
madame le ministre, mes chers collègues, je vais vous présenter les conclusions
du rapporteur M. Biarnès, qui ne pouvait être parmi nous aujourd'hui. Je
m'acquitte d'autant plus volontiers de cette tâche qu'une expérience
professionnelle en Afrique m'a rendu particulièrement attentif au problème de
la désertification.
Le phénomène de la dégradation des terres touche, d'après les conclusions du
sommet qui s'est tenu à Rio en 1992, le quart de la surface émergée du globe et
près de 900 millions de personnes. L'Afrique est naturellement le premier
continent concerné puisque les deux tiers de sa superficie se composent de
déserts ou de zones sèches.
Le processus apparaît complexe et ne se réduit pas à l'image de la dune de
sable qui avance de façon inexorable. La désertification se révèle plutôt comme
l'accumulation de zones de destruction disséminées.
Les causes du phénomène sont aujourd'hui clairement identifiées, même si les
chercheurs ne s'accordent pas toujours sur leur importance respective. Certes,
on ne saurait tenir pour négligeables les changements climatiques et
l'augmentation de la température moyenne au cours des dernières années. La
sécheresse n'épargne même pas l'Afrique de l'Ouest subsaharienne : le régime
général des pluies y est très largement déficitaire depuis 1968. Cependant, la
responsabilité éminente incombe à l'activité de l'homme. M. Biarnès avait
souligné devant notre commission les conséquences de la croissance
démographique et de l'intensification des modes de culture sur l'équilibre
écologique des terres arides.
La complexité du phénomène de désertification ne se prête certes pas à des
solutions faciles. Une stratégie efficace requiert en effet une évolution des
méthodes agricoles ancestrales. Ainsi, elle peut entraîner une remise en cause
des pouvoirs traditionnels dans les zones rurales, et susciter à ce titre de
nombreuses résistances sociologiques.
La convention des Nations unies relative à la désertification, soumise
aujourd'hui à l'examen de notre assemblée, est-elle à la mesure des difficultés
et des enjeux soulevés par le problème de la dégradation des terres ? M.
Biarnès a exprimé à ce sujet un certain scepticisme.
Certes, il faut reconnaître à la convention des acquis indéniables. En premier
lieu, elle a le mérite de présenter dans un cadre contractuel, agréé par la
communauté internationale, des principes qui, jusqu'à présent, n'avaient guère
de valeur juridique. Ensuite, elle présente une méthodologie fondée sur la
consultation des populations concernées. Outre cette attention particulière aux
souhaits des intéressés, les références répétées à l'obligation de poursuivre
la décentralisation ne sont pas indifférentes au regard des orientations
politiques des pays concernés par la désertification. Ainsi, une lutte efficace
contre la désertification plaide en faveur du renforcement nécessaire de la
démocratie dans l'ensemble de ces pays.
Malgré ces acquis, la convention ne comprend guère d'engagements rigoureux, ni
pour les pays touchés par la désertification, ni pour les pays développés. En
particulier, elle ne prévoit aucune ressource financière nouvelle. Le mécanisme
financier qu'elle met en place n'a en effet d'autre vocation que de mobiliser
les instruments de financement existants bilatéraux ou multilatéraux.
En conclusion, si la convention des Nations unies manque peut-être d'ambition,
la volonté de pragmatisme qui l'inspire peut cependant, à terme, constituer la
clé du succès. Trop de plans ou de programmes présentés comme des remèdes
définitifs contre la désertification se sont heurtés aux réalités du terrain et
ont connu l'échec.
Au-delà même des seuls principes, la convention pose le cadre d'une
concertation régulière entre pays menacés par la désertification et bailleurs
de fonds. La première conférence des parties devrait se réunir à Rome en
septembre 1997 ; elle disposera d'un secrétariat permanent ainsi que d'un
comité des sciences et des technologies composé d'experts. Cette coopération
paraît indispensable : pays en développement et pays riches ont une
responsabilité partagée pour lutter contre un désastre écologique qui nous
concerne tous.
La France a joué un rôle moteur dans la négociation de cette convention. Elle
ne doit pas baisser la garde au moment même où la communauté internationale
semble se désintéresser de l'Afrique. Il lui faudra user de son influence pour
que les nobles intentions qu'exprime la convention trouvent leur traduction sur
le terrain. C'est en formulant ce voeu que je vous invite, mes chers collègues,
à approuver le présent projet de loi.
Je terminerai par une remarque d'ordre général puisque les Nations unies ont
été évoquées tant dans le présent rapport que dans le précédent rapport sur la
convention d'Helsinki. Il paraît de plus en plus urgent, même si des
financements nouveaux ne sont pas sollicités aujourd'hui, que les finances des
Nations unies soient éclaircies et que les Etats-Unis, pour ne parler que
d'eux, se mettent à jour de leurs dettes, ce qui constituera un progrès
sensible pour la marche de cette organisation internationale.
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique.
_ Est autorisée la ratification de la convention des
Nations unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement
touchés par la sécheresse et la désertification, en particulier en Afrique
(ensemble quatre annexes), adoptée le 17 juin 1994, signée par la France le 14
octobre 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
10
COMMUNICATION DE L'ADOPTION DÉFINITIVE
DE PROPOSITIONS D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication,
en date du 19 mars 1997, l'informant que :
La proposition d'acte communautaire E 54 « proposition de règlement CEE du
Conseil relatif à l'assistance mutuelle entre les autorités administratives des
Etats membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue
d'assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole, et
abrogeant le règlement CEE 1468/81 » a été adoptée définitivement par les
instances communautaires par décision du Conseil du 13 mars 1997.
La proposition d'acte communautaire E 736 « proposition de décision du Conseil
concernant la conclusion de l'accord de coopération douanière sous forme
d'échange de lettres entre la Communauté européenne et le Royaume de Norvège »
a été adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du
Conseil du 13 mars 1997.
La proposition d'acte communautaire E 751 « proposition de décision du Conseil
concernant la conclusion, au nom de la Communauté, d'un accord entre la
Communauté européenne et les Etats-Unis mexicains en matière de coopération
relative au contrôle des précurseurs et des substances chimiques utilisés
fréquemment pour la fabrication illicite de drogues ou de substances
psychotropes » a été adoptée définitivement par les instances communautaires
par décision du Conseil du 13 mars 1997.
La proposition d'acte communautaire E 777 « proposition de règlement CE du
Conseil modifiant le règlement CEE n° 1172/95 du Conseil, relatif aux
statistiques des échanges de biens de la Communauté et de ses Etats membres
avec les pays tiers, en ce qui concerne le territoire statistique » a été
adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil
du 13 mars 1997.
La proposition d'acte communautaire E 780 « proposition de règlement CE du
Conseil concernant la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres
entre la Communauté européenne et Chypre portant adaptation du régime à
l'importation dans la Communauté d'oranges originaires de Chypre et modifiant
le règlement CE n° 1981/94 » a été adoptée définitivement par les instances
communautaires par décision du Conseil du 12 mars 1997.
11
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Jean-Marie Girault un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, portant réforme de la procédure criminelle (n° 192, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 275 et distribué.
J'ai reçu de M. Paul Masson, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom
de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses
dispositions relatives à l'immigration.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 277 et distribué.
12
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Adrien Gouteyron un rapport d'information fait au nom de la
commission des affaires culturelles sur le thème des « stages diplômants ».
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 276 et distribué.
13
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mardi 25 mars 1997 :
A neuf heures trente :
1. Questions orales sans débat suivantes :
I. - Mme Hélène Luc tient à attirer l'attention de M. le ministre de
l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les
conditions d'études et de fonctionnement qui ne cessent de se dégrader pour les
instituts universitaires de technologie (IUT) du fait des insuffisances de
dotation budgétaire se cumulant d'année en année. Au moment où la voie
technologique est présentée comme étant prioritaire dans les études supérieures
et alors que les IUT ont apporté la preuve de leur efficacité et de leur
performance en la matière, on ne peut que s'étonner d'un tel traitement de la
part des pouvoirs publics.
C'est pourquoi elle lui demande de lui faire part de ses intentions quant à la
demande exprimée par la communauté des étudiants et des enseignants et à
laquelle elle souscrit totalement, d'un plan d'urgence et de rattrapage pour
les IUT dès le premier trimestre 1997, qui constitue la condition indispensable
pour rétablir la situation de ces établissements. (N° 551.)
II. - M. Marcel Charmant rappelle à Mme le ministre de l'environnement que,
par directives du 2 avril 1979 et du 17 avril 1981, la Communauté européenne a
classé les cormorans, sousespèces
sinensis
et
carbo,
dans la
liste des oiseaux menacés nécessitant des mesures de protection. Il est donc
interdit de les tuer ou de porter atteinte à leurs nids ou à leurs oeufs. Cette
mesure de protection s'est révélée efficace puisque l'effectif des cormorans
protégés est passé de 50 000 individus en 1979 à plus de 650 000 aujourd'hui en
Europe.
Son efficacité n'est pas sans poser de problèmes, dans le Val de Loire
notamment. En effet, la concentration et la prolifération dans le lit de la
Loire de ces oiseaux exclusivement piscivores a des conséquences dramatiques
sur la population piscicole des plans d'eau et piscicultures, mais également
sur la faune du fleuve lui-même. A raison de 500 grammes de poisson par jour et
par individu, les cormorans auront consommé en France près de neuf tonnes de
poisson cet hiver.
Les mesures prises en 1992 au titre de la prévention des dégâts aux
piscicultures se sont révélées insuffisantes et le milieu naturel est lui aussi
atteint par ce fléau.
En réponse à un député, il a été proposé de permettre un prélèvement de 10 %
de la population pour réguler la prolifération des cormorans et d'envisager une
déconcentration des procédures permettant aux préfets d'aller au-delà de ce
seuil dans les régions où les populations piscicoles sont particulièrement
menacées.
La vallée de la Loire est de celles-là et les fédérations de pêche
s'inquiètent de plus en plus de l'extension du phénomène. Les associations de
pêche ont pu constater que les efforts qu'elles réalisent pour empoissonner les
plans d'eau sont immédiatement anéantis par le passage des cormorans. Ce qui
est évident pour les milieux confinés devient également préoccupant pour le
milieu naturel. Les quelques pêcheurs professionnels qui subsistent en Loire
s'alarment eux aussi de l'importance des prélèvements opérés par les cormorans,
sur les salmonidés notamment.
La protection d'une espèce d'oiseau aboutit donc à une aberration car elle met
en péril la survie d'autres espèces. Sans vouloir remettre en cause les mesures
prises pour assurer la protection des cormorans, il convient de s'interroger
sur la durée et le maintien de toutes les mesures de protection. Peut-on encore
considérer que les cormorans, qui sont aujourd'hui 650 000 en Europe, sont
encore une espèce menacée ? Doit-on maintenir un tel niveau de protection ou
doit-on considérer qu'une régulation est nécessaire pour éviter le déséquilibre
ainsi créé ?
C'est pourquoi il lui demande la mise en oeuvre au plus tôt de mesures
efficaces pour réguler la population de cormorans présente dans le Val de
Loire. (N° 584.)
III. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre du travail et
des affaires sociales sur la situation scandaleuse faite à un grand nombre de
chauffeurs de taxis parisiens qui sont victimes du système de la location.
Depuis 1973, ce système est à l'origine de la dégradation de la situation des
chauffeurs de taxi et de celle du Taxi en général. En effet, dans le système de
la location, le patronat ne se pose plus en tant que tel, mais en tant que
propriétaire, et nie la notion de salaire, ce qui est inadmissible, car cette
notion recouvre toute la législation sociale contenue dans le code du
travail.
Cela a des effets redoutables pour les chauffeurs de taxi victimes de ce
système féodal : la location est de plus en plus chère alors que les recettes
diminuent. Les chauffeurs sont obligés de travailler soixante à soixante-dix
heures par semaine pour un revenu net ne dépassant pas vingt francs de l'heure.
De plus, ils n'ont ni droit au chômage, ni droit aux congés payés. Cette
situation intolérable va également à l'encontre de l'intérêt du service au
public que constitue le taxi.
Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce qu'il compte faire pour abroger
toutes les lois, ordonnances ainsi que tous les décrets qui sont à l'origine du
système de location et pour établir une obligation de contrat de travail entre
les patrons et les chauffeurs de taxi, rétablissant le rôle d'employeur que
devraient avoir ces patrons qui se comportent comme des rentiers. (N° 585.)
IV. - M. Francis Grignon attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation
déficitaire en encadrement que connaît l'enseignement catholique en Alsace, et
en particulier dans l'académie de Strasbourg. Il souhaite, en effet, souligner
que le ministre, dans sa réponse à la question écrite n° 19064 du 28 novembre
1996 relative à ce sujet, ne s'est référé qu'à l'enseignement privé dans sa
globalité qui souffrirait d'une situation, selon lui, « légèrement déficitaire
dans l'académie de Strasbourg ». Or, l'objet de la question était d'attirer son
attention sur l'enseignement catholique en particulier, qui, lui, souffre d'une
situation véritablement déficitaire. Il souhaite lui préciser que parmi les
quatre postes supplémentaires accordés pour l'année scolaire 1996-1997 à
l'ensemble de l'enseignement privé alsacien, un poste et demi était déjà
réservé avant les négociations académiques, réduisant d'autant le nombre de
postes à attribuer. Il lui fait ainsi remarquer que, puisqu'une des composantes
de l'enseignement privé avait préalablement fait connaître les besoins d'un de
ses établissements, il aurait été souhaitable d'ajouter cette dotation
particulière à la dotation générale, évitant ainsi son amputation. Il lui
demande par conséquent si cette méthode ne lui semblerait par envisageable pour
les années à venir. (N° 586.)
V. - M. Pierre Martin interroge M. le ministre de l'industrie, de la poste et
des télécommunications sur la réorganisation que la poste envisage pour son
réseau de l'ouest du département de la Somme, et sur l'inquiétude des élus du
département sur les conséquences qui en découleraient pour les petites communes
rurales. (N° 587.)
VI. - M. Pierre Martin interroge M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche, d'une part, sur les mesures qu'il
envisage à terme de prendre pour remplacer le moratoire, qui ne constitue
qu'une solution transitoire, pour pallier la fermeture des classes en milieu
rural, et, d'autre part, sur les réponses qu'il pense pouvoir fournir pour
mettre fin à l'inégalité des communes en matière d'accueil scolaire des élèves
scolarisés par dérogation dans une commune différente de leur commune de
résidence. (N° 589.)
VII. - M. Michel Mercier attire l'attention de M. le ministre de l'économie
et des finances sur le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de
la valeur ajoutée pour l'année 1996.
En effet, depuis 1996, la cotisation à retenir pour déterminer le montant du
plafonnement pour les entreprises dont le siège se situe dans une communauté de
communes créée en 1996 est non pas la cotisation due au titre de l'année 1996,
mais une cotisation de référence calculée avec les bases de 1996 et les taux
d'imposition de 1995 ou de 1996 s'ils sont inférieurs.
L'article 34 de la loi de finances rectificative qui supprime cet effet
pervers ne paraît applicable qu'à compter de 1997, alors qu'il avait
précisément pour objet de supprimer cette conséquence de la loi de finances
pour 1996.
Aussi, il lui demande s'il n'estime pas opportun que soit remédié à cette
situation afin que le texte voté atteigne totalement son objectif. (N° 590.)
VIII. - M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur
sur les conséquences financières des fortes chutes de neige qui ont touché plus
particulièrement le département de la Drôme en janvier dernier.
Ces intempéries ont provoqué le blocage de tous les axes de communications en
vallée du Rhône et ont nécessité la mise en place du plan ORSEC. Elles ont, par
ailleurs, occasionné de très importants dommages tant aux particuliers qu'aux
collectivités locales.
Il semblerait que la reconnaissance de catastrophe naturelle, procédure régie
par la loi du 13 juillet 1982 modifiée, ne puisse pas s'appliquer en
l'occurrence ou du moins ne puisse s'appliquer que de manière très partielle.
En effet, cette procédure ne concerne pas les dommages occasionnés par la
neige, pour lesquels les personnes pouvaient s'assurer.
Cependant, ces très fortes chutes de neige ont engendré directement ou
indirectement, pour les collectivités locales notamment, une surcharge
financière importante que, compte tenu de leur budget restreint, elles ne
peuvent assumer.
C'est pourquoi il semble que la solidarité nationale doit dans cette hypothèse
jouer.
En 1992, en 1993 et en 1994, des fonds exceptionnels ont été versés à notre
département pour des dégâts dus aussi à des intempéries.
Il lui demande si, en la circonstance, il envisage de débloquer à nouveau des
fonds pour aider les communes concernées. (N° 591.)
IX. - M. Xavier Dugoin attire l'attention de M. le ministre du travail et des
affaires sociales sur le projet de suppression de l'antenne de la caisse
d'allocations familiales d'Arpajon.
Devant les conséquences graves et très préjudiciables tant pour le personnel
que pour les allocataires, il lui demande les mesures qu'il entend prendre afin
que soit maintenue sur Arpajon, un des pôles du département, cette antenne
répondant aujourd'hui rapidement et humainement par un service social de
qualité et de proximité aux besoins de ses usagers. (N° 592.)
X. - M. Alfred Foy appelle l'attention de M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur les conditions
d'éligibilité au Fonds de compensation de la TVA, le FCTVA, pour les
communautés de communes. A la suite de la promulgation de la loi n° 92-125 du 6
février 1992, de nombreuses communes ont été incitées à se regrouper, avec la
promesse d'un remboursement de la TVA l'année même de l'investissement sans
exclure aucun type d'investissement. L'article 42-3 de la loi de finances
rectificative pour 1988 n° 88-1193 du 29 décembre 1988 a prévu que les
immobilisations cédées ou mises à disposition au profit de tiers ne peuvent
donner lieu à l'attribution du FCTVA. La circulaire INT B 94 00257 C du 23
septembre 1994 a malheureusement confirmé dans son article 2-2-2-2 que toute
opération réalisée pour le compte d'un tiers non éligible était exclue du champ
d'attribution de ce fonds.
Or, de nombreuses communautés de communes, fortes des promesses qui leur
avaient été faites en 1992, ont, avant cette circulaire, engagé des dépenses
importantes pour équiper, par exemple, des terrains destinés à devenir zones
d'activités économiques. Elles ont aujourd'hui le sentiment d'avoir été mal
informées, et se retrouvent souvent dans des situations difficiles, elles sont
obligées d'emprunter parce que leurs plans de financement initiaux avaient été
calculés hors taxe. Certes, grâce à l'intervention du Sénat, l'article 33 de la
loi de finances pour 1997 n° 96-1181 du 30 décembre 1996 a complété l'article
L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales par un alinéa
prévoyant que « les établissements de coopération intercommunale bénéficient,
en lieu et place des communes membres propriétaires, des attributions du FCTVA,
à compter du 1er janvier 1997, dans l'exercice de leurs compétences relatives à
la voirie ». Mais ce geste, si nécessaire soit-il, demeure insuffisant pour
compenser l'amertume des communautés de communes face au désengagement de
l'Etat ; celles-ci sont en effet démotivées, ce qui est d'autant plus
regrettable que, actuellement, la France a besoin de mobiliser toutes les
énergies.
Dans le cadre de l'aménagement du territoire et de la revitalisation des zones
rurales, il souhaiterait donc savoir s'il ne serait pas envisageable de
réexaminer les modalités d'attribution du FCTVA. (N° 593.)
XI. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le fait que, pour
la rentrée 1997, l'académie de Paris propose 58 fermetures de classes, 29
blocages et seulement 32 ouvertures et 43 ouvertures réservées.
Si ces propositions sont moins provocatrices que celles de l'an dernier, elles
sont cependant loin de répondre aux besoins des écoles parisiennes.
En maternelle, c'est le statu quo puisqu'il est envisagé autant de fermetures
que d'ouvertures. Or, Paris est, depuis plusieurs années, à la traîne pour la
scolarisation des enfants de moins de trois ans, particulièrement dans l'est
parisien.
Pour l'enseignement spécialisé, le solde est encore une fois négatif : 15
fermetures sont annoncées contre seulement 3 ouvertures et une ouverture
réservée. De telles propositions conduiraient à une nouvelle dégradation de
l'aide aux enfants en difficulté.
Cette carte scolaire ne permet pas d'améliorer sensiblement les conditions
d'enseignement dans les écoles parisiennes et risque de creuser encore les
inégalités.
Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce qu'il compte entreprendre pour
mettre en place un collectif budgétaire qui permettrait de revoir à la hausse
le nombre de postes créés et programmer des constructions d'écoles nouvelles
afin d'alléger les effectifs et scolariser tous les enfants de 2 à 3 ans
actuellement sur liste d'attente. (N° 594.)
XII. - M. Marcel Deneux attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la
santé et à la sécurité sociale sur la situation des professionnels de biologie
médicale dont le projet d'accord pour 1997 avec les Caisses d'assurance maladie
semble compromettre gravement l'activité future.
Ces professionnels de grande qualité, dont la compétence est reconnue par tous
et qui constituent un maillon essentiel de notre système de santé, sont en
effet durement frappés par la réduction des dépenses de santé.
Le principe de cette réduction n'est contesté par personne, mais il convient
qu'elle pèse équitablement sur les différentes composantes du système
relativement à leur poids en son sein.
Or, il apparaît que les biologistes ont été les premiers à prendre leurs
responsabilités dans la maîtrise des dépenses de santé et ont par ailleurs subi
indirectement les contraintes imposées aux prescripteurs.
Ces différents éléments ont très sensiblement fragilisé cette profession qui
se retrouve ainsi en péril avec le projet de convention pour 1997.
Il lui demande de bien vouloir le rassurer sur l'avenir de ces professionnels,
car en découle aussi l'avenir de notre santé publique. (N° 595.)
XIII. - M. Marcel Deneux attire l'attention de M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur la situation
des cadres recrutés par la voie du troisième concours des instituts régionaux
d'administration.
Ce concours, institué par la loi du 26 juillet 1991, a pour objectif de faire
bénéficier la fonction publique de personnels issus du secteur privé dont
l'expérience et les compétences sont de nature à faciliter et à accélérer la
réforme de l'Etat.
Bien entendu, pour que cet objectif soit effectivement atteint, il convient
d'assurer ces agents d'un traitement et d'un déroulement de carrière qui ne les
dissuadent pas de se présenter au concours, et que les années passées dans le
secteur privé ne soient pas perdues et oubliées.
Il faut rappeler que ces candidats exerçaient des responsabilités élevées dans
le secteur privé ; d'ailleurs, les jurys d'admission ont reconnu leur haut
niveau de connaissances. Or, à ce jour, aucune disposition ne permet de prendre
en compte cette expérience professionnelle antérieure.
Il est donc souhaitable qu'un minimum d'ancienneté soit retenu en termes de
rémunération et d'avancement d'échelon. Cela se fait pour les candidats issus
des concours internes et ne pose aucun problème. La prise en compte d'un
minimum d'ancienneté permettrait en outre à ces fonctionnaires d'accéder, comme
leurs camarades, à des corps supérieurs pour lesquels les nominations au tour
extérieur s'effectuent notamment sur des critères d'ancienneté.
Il le remercie de bien vouloir lui faire part des mesures qu'il compte prendre
pour remédier à ce problème. (N° 596.)
XIV. - M. Alfred Foy attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les méfaits d'une
réduction du temps consacré à l'enseignement de l'histoire-géographie et de
l'éducation civique qui se produiraient en cas d'adoption de l'actuel projet
relatif à l'organisation des enseignements du cycle central de collège.
En effet, celui-ci prévoit la disparition d'une grille horaire nationale et la
remplace par des horaires modulables à l'intérieur d'une fourchette, propre à
chaque discipline, soit entre trois et quatre heures hebdomadaires pour
l'histoire-géographie et l'éducation civique. Cet aménagement de rythmes
scolaires, tel qu'il est prévu, ne manquerait pas de porter atteinte, une fois
encore, à l'enseignement de l'instruction civique, dont on ne soulignera jamais
assez le rôle fondamental quant à sa mission d'éducation à la citoyenneté et
aux valeurs républicaines.
C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir l'assurer que toutes les
dispositions seront prises afin de maintenir une programmation horaire
suffisante à l'enseignement de cette discipline. (N° 597.)
XV. - M. Jean Chérioux appelle l'attention de M. le ministre du travail et
des affaires sociales sur les difficultés d'application de l'article 46 de la
loi n° 95-116 du 4 février 1995, qui a modifié, sur l'initiative du Sénat,
l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale relatif aux règles de cumul
emploi-retraite.
Cet article visait à permettre à des personnes exerçant une activité non
salariée de percevoir une pension de vieillesse à laquelle leur activité
salariée leur a ouvert droit, sans renoncer pour autant à leur activité non
salariée. Cette condition de cumul d'activités s'apprécie à la date d'effet de
la pension du régime des salariés.
Toutefois, la Caisse nationale d'assurance vieillesse - CNAVTS - considère que
les personnes qui, à cette date, relèvent du régime d'assurance chômage, tout
en exerçant une activité non salariée, ne peuvent bénéficier de cette
disposition. Or, les périodes de chômage sont assimilées à des périodes de
travail effectif pour la détermination des droits à pension en vertu de
l'article L. 351-3 du code de la sécurité sociale.
De plus, les statistiques publiées par la CNAVTS révèlent que les deux tiers
des personnes partant actuellement à la retraite sont déjà inactifs et que,
parmi eux, 40 % sont des personnes au chômage. Il s'agit d'une réalité dont cet
organisme ne semble pourtant pas avoir tiré toutes les conséquences.
Par ailleurs, une circulaire en date du 1er décembre 1995 relative au cumul
emploi-retraite a admis que, dans certains cas, la condition de pluriactivité
simultanée pouvait être appréciée à la date de cessation des activités
salariées.
Enfin, il convient de tenir compte de l'esprit de la loi de 1995 tel que l'a
défini le législateur. Le rapporteur de ce texte au Sénat avait souligné la
nécessité de remédier à la situation inéquitable faite aux personnes exerçant
une activité mixte et le ministre en charge des affaires sociales avait même
déclaré qu'il fallait prendre en compte les « situations individuelles ».
En conséquence, il souhaite savoir si le Gouvernement entend prendre les
mesures de nature à permettre une application de la loi conforme à l'intention
du législateur ou s'il conviendrait de préciser, par voie d'amendement, la
portée de l'article 46 de la loi de 1995. (N° 599.)
A seize heures :
2. Discussion du projet de loi (n° 192, 1996-1997), adopté par l'Assemblée
nationale, portant réforme de la procédure criminelle.
Rapport (n° 275, 1996-1997) de M. Jean-Marie Girault, fait au nom de la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 24 mars 1997, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 25 mars 1997, à dix-sept
heures.
Délais limites
Proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale, en
deuxième lecture, relative à l'examen des pourvois devant la Cour de cassation
(n° 227, 1996-1997).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 25 mars 1997, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION PERMANENTE
Dans sa séance du jeudi 20 mars 1997, le Sénat a nommé M. Jean-Baptiste
Motroni membre de la commission des affaires économiques et du Plan à la place
laissée vacante par M. André Vallet, démissionnaire.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Conséquences de la création
de la Conférence européenne permanente
619. - 20 mars 1997. - M. Daniel Hoeffel demande à M. le ministre des affaires étrangères comment il compte coordonner l'action de la Conférence européenne permanente dont il a annoncé récemment le projet de création, avec l'action conduite par le Conseil de l'Europe, qui regroupe d'ores et déjà quarante pays européens, et dont les chefss d'Etat et de Gouvernement doivent se réunir en octobre 1997. L'efficacité de la construction européenne ne dépend-elle pas d'abord de la coordination des structures de coopération déjà existantes ? Ne vaut-il pas mieux éviter la multiplication d'instances nouvelles qui comportent des risques de doubles emplois et qui concourront en définitive au brouillage de l'image de la construction européenne, déjà trop souvent perçue comme peu lisible ?