La commission spéciale a rétabli le texte adopté par le Sénat en première lecture à l’article 1er, qui ouvre l’accès à l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, en réaffirmant des divergences de fond avec l'Assemblée nationale sur les conditions de cette évolution, notamment en termes de prise en charge par la sécurité sociale.
En matière d’accès aux origines (article 3), elle a rétabli le texte du Sénat qui prévoit le consentement du donneur au moment de la demande de la personne issue de son don et confie l’intermédiation au Conseil national pour l’accès aux origines personnelles. Elle s’est réjouie du maintien par les députés de la possibilité donnée aux personnes déjà nées d’AMP avec tiers donneur de saisir l’organe d’intermédiation pour solliciter le consentement des anciens donneurs concernés. Pour Muriel Jourda, rapporteur, "cet ajout du Sénat répond aux demandes des personnes actuellement en quête de leurs origines qui n’avaient pas été prises en compte dans le projet initial".
En matière de don d’organes post mortem (article 7), la commission spéciale a refusé la présomption du consentement des majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection avec représentation relative à la personne, dont le consentement ne peut précisément être présumé en raison de l’altération des facultés mentales ou corporelles. Pour le rapporteur Bernard Jomier, "nous sommes là au cœur du questionnement bioéthique. Faciliter le prélèvement d’organes, et ainsi des greffes parfois vitales, peut-il justifier de présumer le consentement de personnes particulièrement fragiles ? Nous avons répondu par la négative et fait primer le respect de la personne et du corps des majeurs protégés".
Parmi les autres points de divergence restant avec l’Assemblée nationale, figure l’encadrement des neurosciences (article 12). Selon Olivier Henno, rapporteur : "nul besoin d’interdire l’imagerie cérébrale fonctionnelle en matière judiciaire alors que le législateur de 2011 n’a jamais entendu permettre le recours à cette technique pour détecter le mensonge. Au contraire, cette technique peut être utile au juge, sans jamais se substituer à son appréciation : il serait dommage de s’en priver".
En matière de génétique et de recherche (articles 14, 15, 17 et 19 quater), la commission spéciale a veillé à concilier les avancées technologiques et scientifiques et le respect de la dignité humaine. Elle a ainsi actualisé les prérequis applicables aux recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires afin de les sécuriser sur le plan juridique. Elle a posé des garde-fous puissants contre des recherches particulièrement problématiques sur le plan éthique, en interdisant toute manipulation génomique sur l’embryon humain et en clarifiant le contenu de l’interdiction de création des embryons chimériques. "Notre objectif est bien de placer la génétique et la recherche au service de la santé humaine dans le respect des équilibres de l’éthique à la française", rappelle Corinne Imbert, rapporteure.
Pour Alain Milon, président, "au-delà du sempiternel procès en conservatisme fait par avance à notre institution, le dialogue entre les deux assemblées a conduit à de réelles avancées (accès aux origines des personnes déjà nées d’un don, don croisé d’organes , renforcement du dépistage néonatal afin de faciliter l’accès précoce des jeunes enfants atteints d’affections génétiques graves à des thérapies innovantes, diagnostic préimplantatoire avec recherche de compatibilité HLA…). Sur des sujets qui sollicitent fortement les convictions personnelles, les règles de bioéthique sont le produit d’un compromis social et politique à un moment donné. En révisant plus régulièrement ce texte, nous garantissons à nos concitoyens un accès aux progrès de la science dans le respect des règles éthiques".
Le projet de loi sera examiné en séance publique à compter du 2 février 2021.
Juliette ELIE
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