La délégation aux droits des femmes du Sénat, présidée par Annick Billon (UC, Vendée), a souhaité saisir l’occasion de la Coupe du monde féminine, qui se tiendra pour la première fois en France, du 7 juin au 7 juillet 2019, pour mettre en valeur les footballeuses et montrer que les femmes peuvent aujourd’hui s’engager dans tous les domaines, y compris ceux que l’on pourrait spontanément, encore aujourd’hui, considérer comme masculin, dont le football fait partie.
Selon Annick Billon, présidente et co-rapporteure, "Cette thématique s’inscrit dans le cadre général de l’égalité entre les femmes et les hommes et illustre le souci constant de la délégation de promouvoir une meilleure visibilité des femmes, quel que soit le domaine où elles exercent leurs talents".
Le rapport de la délégation revient sur les origines de la pratique féminine du football en France : un sport à la fois ancien et nouveau, puisque sa pratique dans notre pays remonte à 1912, alors que sa reconnaissance par la Fédération française de football n’a été officielle qu’en 1970. Ainsi que l’a rappelé Céline Boulay-Espéronnier (LR, Paris), co-rapporteure, "L’histoire du football féminin éclaire bien des aspects actuels de la pratique féminine du football et des inégalités qui persistent actuellement aux dépens des joueuses, tant dans la pratique amateure que dans la compétition de haut niveau".
Le rapport montre que le contexte actuel est globalement favorable au développement du football féminin, d’une part grâce à l’engagement de la Fédération française de football (FFF) en faveur de la féminisation de la pratique et de la gouvernance du football, notamment depuis 2011, d’autre part parce que les joueuses bénéficient d’un réel capital de sympathie et incarnent des valeurs dans lesquelles le public se reconnaît volontiers.
De plus, les qualités techniques du football féminin sont désormais davantage reconnues, y compris par ceux qui dénigraient auparavant l’intérêt de ces matchs en termes de performance et de spectacle.
Le rapport dresse par ailleurs un constat des inégalités femmes-hommes à l’œuvre dans le football et souligne que ces inégalités reflètent celles qui existent dans la société. Footballeurs et footballeuses évoluent indéniablement dans des univers très différents, en termes de statut, de reconnaissance médiatique ou de rémunération, au point que l’une des interlocutrices de la délégation a parlé de « deux écosystèmes séparés ».
Ainsi, les joueuses de haut niveau ne sont pas considérées comme des professionnelles du point de vue juridique et sont rattachées à la Fédération française de football, qui gère la pratique amateure, contrairement à leurs homologues masculins qui relèvent de la Ligue de football professionnel. Cette spécificité juridique et statutaire a fortement interpellé la délégation. Selon Christine Prunaud (CRCE, Côtes‑d’Armor), co-rapporteure, "On ne saurait se satisfaire de cette situation qui a des conséquences multiples sur la vie des joueuses de haut niveau".
C’est pourquoi la délégation préconise plus particulièrement le rattachement, à terme, du championnat de football féminin à la Ligue de football professionnel, au même titre que le championnat masculin. Elle a jugé cette formule plus pertinente que la création d’une ligue féminine autonome, qui isolerait selon elle le football féminin et serait en contradiction avec l’objectif de mixité qu’elle défend.
Le périmètre du rapport ne se limite pas à la pratique de haut niveau mais envisage aussi les différents aspects d’un sport qui, dans un registre amateur, doit concerner tous les territoires et intéresser les femmes, quel que soit leur âge. De ce point de vue, la délégation a pu constater que l’accueil des fillettes et des adolescentes dans les clubs était perfectible. Elle insiste donc sur la nécessité de créer davantage de sections féminines pour renforcer le maillage territorial des clubs ouverts aux filles, notamment dans les territoires ruraux, et rappelle que la question des infrastructures est un point central pour accueillir les joueuses dans de bonnes conditions, a fortiori pour faire face à la hausse attendue des licenciées, dans le sillage du Mondial 2019. À cet égard, elle salue le soutien de la FFF à la structuration des clubs pour développer la pratique féminine.
Enfin, le rapport consacre de larges développements à la notoriété et à la visibilité des footballeuses, ainsi qu’aux enjeux de la médiatisation du football féminin, tout particulièrement dans le contexte de la Coupe du monde. Ainsi que l’a souligné Victoire Jasmin (SOC, Guadeloupe), co-rapporteure, "La médiatisation est un levier décisif pour accroître la reconnaissance et la mise en valeur du football féminin. La médiatisation est aussi un enjeu crucial pour évoluer vers la professionnalisation de cette discipline à l’égal des footballeurs. Elle est le pilier de la stabilisation du modèle économique du football féminin, à travers les droits télévisés, comme c’est déjà le cas dans le football masculin".
Aux termes de ses travaux, la délégation formule "cinq séries d’orientations souhaitables pour faire progresser l’égalité et la mixité dans le football à l’occasion du Mondial 2019", selon les mots d’Annick Billon, présidente et co-rapporteure.
La première série de conclusions salue l’engagement des acteurs – collectivités territoriales et FFF – en faveur de la féminisation du football et de la mise en valeur de la Coupe du monde.
La deuxième série d’orientations s’inscrit dans la perspective de la professionnalisation des joueuses de haut niveau, condition nécessaire à l’égalité entre footballeuses et footballeurs, s’agissant notamment des revenus et des primes.
La troisième piste de réflexion a trait à l’adaptation des infrastructures dans les territoires.
La quatrième perspective exprime l’intérêt de la délégation pour l’initiation au football en milieu scolaire, à destination des filles comme des garçons. Cet apprentissage ne peut que contribuer, selon la délégation, à renforcer les valeurs d’égalité et de mixité dès le plus jeune âge, qui ont toute leur place à l’école.
La cinquième et dernière piste concerne l’amélioration de la visibilité médiatique, non seulement des joueuses, mais aussi des journalistes, commentatrices, expertes et consultantes. La délégation préconise en particulier la mise à l’étude de l’harmonisation des calendriers des compétitions internationales masculines et féminines, en cohérence avec l’objectif de professionnalisation.
En conclusion, la délégation espère que la Coupe du monde laissera un héritage tangible en confirmant la dynamique récente observée dans le football féminin et en suscitant un véritable engouement en faveur de ce sport, dans tous les territoires.
Elle forme par ailleurs le vœu que la mobilisation des acteurs du football et des médias, constatée dans le contexte du Mondial, ne s’interrompe pas en juillet 2019 mais qu’elle se poursuive dans la durée et qu’elle soit l’occasion de nouveaux progrès en matière d’égalité et de mixité, dans le traitement médiatique des matchs féminins comme dans le quotidien des clubs et des joueuses.
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Pour aller plus loin, consulter : - la page Internet de la délégation dédiée à ses travaux sur le football féminin - les autres communiqués de presse de la délégation en lien avec ce rapport : http://www.senat.fr/presse/cp20190516a.html |
Juliette ÉLIE
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