Lors de sa réunion du mercredi 28 novembre 2018, la commission des lois du Sénat a examiné les crédits de la mission « Immigration, asile, intégration » du projet de loi de finances pour 2019.
Concernant l’immigration régulière, toujours très dynamique, certains efforts consentis en matière d’intégration mettent en œuvre des préconisations anciennes et récurrentes du Sénat concernant l’accueil des étrangers primo-arrivants : meilleure insertion professionnelle, doublement des cours de langue, valeurs républicaines, etc.
Il reste néanmoins regrettable que le Gouvernement persiste à refuser d’abroger la « circulaire Valls », ou au minimum d’en durcir les règles, alors qu’elle a contribué à l'augmentation des régularisations de plus de 30 % en cinq ans.
En outre, selon M. François-Noël Buffet (Les Républicains – Rhône), rapporteur pour avis, « malgré des hausses ponctuelles, les moyens programmés par le présent budget sont fondés sur des hypothèses irréalistes et restent notoirement insuffisants au regard de la réalité des phénomènes migratoires auxquels la France est aujourd’hui confrontée ».
Ainsi, au risque de fausser d’emblée la sincérité de sa programmation budgétaire, le Gouvernement prévoit une stabilisation de la demande d’asile en 2019 et en 2020, alors même que la France reste exposée à une demande d’asile sans précédent (+19 % début 2018), et à des flux secondaires qui ne se tarissent pas (depuis l’Italie et l’Espagne). Faute de moyens suffisants, ni les délais cibles de traitement des demandes d’asile en 6 mois, ni l’objectif de 86 % de demandeurs d’asile hébergés ne semblent tenables.
Enfin, dans le domaine de la lutte contre l’immigration irrégulière, l’effort budgétaire se concentre presque uniquement sur la création de 450 nouvelles places en centres de rétention administrative. Alors que les taux d’occupation atteignent des records et que les personnels sont déjà extrêmement sollicités, les conséquences du doublement de la durée de rétention votée cette année ne sont pas pleinement prises en compte (renforts de personnel, activités des retenus, accompagnement associatif).
Surtout, l’effort est quasi nul depuis quatre ans sur les crédits dédiés à l’éloignement, alors que le Gouvernement ne semble toujours pas en mesure de réaliser un quelconque suivi des déboutés du droit d’asile. Pour M. Philippe Bas (Les Républicains – Manche), président de la commission des lois, « l’éloignement des étrangers en situation irrégulière est une politique en échec : comment pourrait-on se satisfaire de constater que près de neuf obligations de quitter le territoire sur dix ne sont pas exécutées ? ».
Les difficultés d’application du règlement Dublin – qui prévoit le transfert des demandeurs d’asile vers l’État de l’Union européenne responsable de leur traitement – minent la crédibilité de nos politiques d’éloignement, sans qu’une perspective de réforme se dessine à ce jour : début 2018, moins de 12 % des étrangers sous « statut Dublin » ont été effectivement transférés vers un autre État.
En conséquence, et à l’invitation de son rapporteur, la commission des lois du Sénat a donné un avis défavorable aux crédits de la mission « Immigration, asile, intégration » du PLF pour 2019.
Ces crédits seront examinés par le Sénat en séance publique le jeudi 6 décembre 2018.
Mathilde Dubourg
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