Lors de sa réunion du mercredi 28 novembre 2018, la commission des lois du Sénat a donné un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission "Sécurités" du projet de loi de finances pour 2019.
Le président Philippe Bas (LR – Manche) a regretté que "l’augmentation du budget de la sécurité prévue pour 2019 demeure déséquilibrée et très largement insuffisante au regard de la situation particulièrement dégradée des forces de sécurité intérieure, de la grave insuffisance de l’équipement de nos forces et du contexte sécuritaire qui reste très tendu sur notre territoire. Ce projet de loi de finances ne répond pas aux attentes fortes ni aux besoins aigus des forces de l’ordre, sur lesquels une commission d’enquête sénatoriale a récemment tiré la sonnette d’alarme et auxquels le Sénat accorde, depuis des années, une attention toute particulière".
Henri Leroy (Les Républicains - Alpes-Maritimes), rapporteur pour avis des programmes "Gendarmerie nationale", "Police nationale" et "Sécurité et éducation routières", a observé qu’en dépit d’une progression de ces crédits à hauteur de 3,63 % en autorisations d’engagement et de 1,84 % en crédits de paiement, le budget de la mission "Sécurités" pour 2019, hors programme "Sécurité civile", n’apportait pas de réponse satisfaisante aux difficultés rencontrées par les forces de sécurité intérieure.
Certes, comme pour les précédents exercices budgétaires, l’accent est mis sur l’augmentation des effectifs, avec la création de 2 378 emplois supplémentaires dans la police et la gendarmerie.
Henri Leroy a toutefois observé que ce renforcement des effectifs ne saurait, sans être accompagné des réformes structurelles adéquates et d’un fort redressement des crédits d’équipement et des moyens de fonctionnement des forces de sécurité, exercer un réel effet de levier pour renforcer la présence des forces de l’ordre sur le terrain.
Il a ainsi déploré que l’effort budgétaire sur les moyens humains masque une sous-dotation manifeste des crédits de fonctionnement et d’investissement, dont la part dans le budget global ne cesse de diminuer : "la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure repose non seulement sur le nombre de personnels actifs, mais également sur l’aptitude de l’État à équiper et à entretenir ses forces. L’augmentation des effectifs doit se poursuivre mais en l’accompagnant d’un redressement conséquent des crédits de fonctionnement et d’investissement. C’est la capacité d’intervention des policiers et gendarmes que nous risquons, à défaut, d’affaiblir. À quoi bon, en effet, augmenter les effectifs si nos policiers et nos gendarmes manquent de véhicules, d’équipements informatiques et de munitions ? ".
Par ailleurs, pour Mme Catherine Troendlé (Les Républicains - Haut-Rhin), rapporteur pour avis du programme "Sécurité civile", le budget 2019 de ce programme "ne comporte aucune surprise".
Certes, les crédits destinés à assurer le fonctionnement des moyens relevant de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l’intérieur sont satisfaisants dans leur globalité et mis au service de priorités identifiées les années précédentes, telles que la flotte aérienne et le renforcement des capacités de déminage.
Toutefois, a-t-elle souligné, "ce budget ouvre dangereusement la voie d’une sécurité civile à deux vitesses avec, d’un côté, des crédits importants alloués à juste titre aux moyens de la sécurité civile d’État et, de l’autre côté, une sécurité civile territoriale laissée en marge, au moment où les départements et les intercommunalités se heurtent à de graves difficultés financières". En effet, bien que les services départementaux d’incendie et de secours soient financés principalement par les collectivités territoriales, départements en tête, le projet de loi de finances 2019 ne prévoit pas les adaptations fiscales et les concours ciblés nécessaires à l’amélioration de leurs investissements.
En conséquence, et malgré une augmentation des crédits et des effectifs, la commission des lois n’a pas été en mesure de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission "Sécurités" du projet de loi de finances pour 2019.
Ces crédits seront examinés par le Sénat en séance publique le jeudi 6 décembre 2018.
Mathilde Dubourg
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