Réunie le jeudi 26 juillet 2018 sous la présidence de M. Gérard Dériot (LR – Allier), vice président, la commission des affaires sociales a examiné, en nouvelle lecture, le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, sur le rapport de M. Michel Forissier (Rhône Les Républicains), Mme Catherine Fournier (Pas-de-Calais – UC), M. Philippe Mouiller (Deux Sèvres Les Républicains) et Mme Frédérique Puissat (Isère – Les Républicains).
Le calendrier d’examen de ce texte, imposé par le Gouvernement, n’a pas permis un dialogue serein et approfondi entre le Sénat et l’Assemblée nationale en vue d’obtenir un accord sur le projet de loi. De fait, la commission mixte paritaire (CMP) du 16 juillet dernier a eu lieu sept heures après le vote du projet de loi au Sénat et s’est soldée par un échec après moins d’une demi-heure de débat.
L’annonce du Président de la République devant le Congrès le 9 juillet dernier de rouvrir par anticipation la négociation de la convention d’assurance chômage signée le 14 avril 2017 avait rendu hypothétique un accord en CMP. Si le Sénat a rejeté l’amendement du Gouvernement transcrivant cette annonce, l’Assemblée nationale l’a adopté en commission en nouvelle lecture. Cet amendement méconnait le travail des parlementaires, remet en cause l’équilibre du titre II du projet de loi et porte une atteinte au principe constitutionnel de la liberté contractuelle qui n’est vraisemblablement pas justifiée par un motif d’intérêt général suffisant.
En nouvelle lecture, la quasi-totalité des apports du Sénat ont été supprimés par l’Assemblée nationale. Pour mémoire, le Sénat avait adopté 215 amendements en commission et 169 en séance publique afin de rééquilibrer le texte sans remettre en cause ses objectifs initiaux.
Le Sénat avait considéré que la réussite de la réforme de l’apprentissage devait passer par l’implication de tous les acteurs de cette politique publique. À ce titre, il avait renforcé le rôle des régions dans la nouvelle gouvernance de l’apprentissage, en raison de leur expérience en la matière et de leurs compétences concernant la formation professionnelle et le développement économique des territoires.
S’agissant de la réforme de la formation professionnelle, l’Assemblée nationale a balayé la plupart des apports du Sénat visant à prévenir les effets pervers de la monétisation du compte personnel de formation et à garantir une gouvernance réellement quadripartite de la politique de formation professionnelle. En outre, l’Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements du Gouvernement ajoutant des dispositions nouvelles ou modifiant des dispositions adoptées dans les mêmes termes par les deux chambres, confirmant l’impression d’impréparation, voire d’improvisation qui entoure cette réforme.
Alors que le chômage demeure à un niveau élevé, l’annonce d’une renégociation anticipée de la convention d’assurance chômage inquiète un grand nombre de nos concitoyens, d’autant que le Gouvernement n’a toujours pas précisé les principaux objectifs de son futur document de cadrage.
La commission a souhaité marquer sa ferme opposition au Gouvernement, dont la méthode d’élaboration du texte depuis deux mois a été émaillée de maladresses, d’erreurs voire de fautes politiques, et rejeter le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, qui fait fi de la quasi totalité des apports du Sénat.
C’est pourquoi, sur proposition de ses rapporteurs, la commission a adopté une motion tendant à opposer la question préalable en application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement du Sénat en vue de son examen en séance publique lundi 30 juillet 2018.
Le Sénat sera vigilant sur la mise en œuvre de la présente loi, qui risque de se heurter à de nombreuses difficultés dans les mois à venir.
Juliette Elie
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