La commission des lois du Sénat a fait, en avril dernier, un diagnostic sans complaisance sur la situation de la justice de notre pays.

En huit ans (2007-2015), le délai de traitement des procédures civiles est passé de sept mois à près d’un an pour les tribunaux de grande instance. Dans le même temps, le stock d’affaires en attente d’être jugées a cru de plus de 25 % pour les juridictions civiles. Chaque année, ce sont plus de 2,7 millions d’affaires civiles et plus de 1,2 million d’affaires pénales nouvelles dont les juridictions sont saisies.

La commission des lois du Sénat a donc adopté 127 recommandations qui ont fait l’objet, pour celles relevant de la compétence du législateur, de deux propositions de loi du président Philippe Bas (Les Républicains – Manche) : une proposition de loi d’orientation et de programmation des crédits de la justice pendant cinq ans et une proposition de loi organique, réformant en profondeur la justice. Ces deux propositions de loi ont été approuvées aujourd’hui en commission, sur le rapport conjoint de MM. François-Noël Buffet (Les Républicains – Rhône) et Jacques Bigot (Socialiste et républicain – Bas-Rhin). Elles seront examinées par le Sénat en séance publique les 24 et 31 octobre prochains.

Sur la proposition des rapporteurs, dans un esprit consensuel, la commission n’a apporté que des modifications limitées, validant ainsi une progression des crédits de la justice de 27,6 % de 2018 à 2022, soit 5 % par an en moyenne, pour atteindre près de 11 milliards d’euros. Elle a également approuvé la sanctuarisation des crédits de l’autorité judiciaire dans la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), la création du tribunal départemental unique de première instance, le renforcement de la conciliation, la mise en place d’un financement durable de l’aide juridictionnelle et d’un contrôle effectif de son attribution, ainsi que la clarification du régime de l’aménagement des peines, permettant ainsi d’améliorer l’organisation et le fonctionnement de la justice, civile comme pénale.

À l’issue des travaux de la commission, Philippe Bas a déclaré : "J’alerte le Gouvernement sur la nécessité d’aller vite. Le travail du Sénat est mis à la disposition de la garde des sceaux qui vient de lancer cinq chantiers pour la réforme de la justice. Le Gouvernement a posé les bonnes questions, le Sénat a proposé les bonnes réponses. L’augmentation des moyens de la justice est une nécessité. Elle n’a de sens que si elle s’inscrit dans un projet quinquennal. Une loi de programmation de la justice qui n’entrerait en vigueur qu’à partir de 2019 ne pourrait produire tous ses effets au cours du quinquennat. De même, serait vouée à l’échec toute augmentation de moyens qui ne serait pas assortie d’une réforme profonde de l’organisation, du fonctionnement et de la gestion des juridictions. La justice a besoin de crédits mais aussi de réformes !".

Il a rappelé que la dernière loi votée par le Parlement en matière d’orientation et de programmation pour la justice, examinée dès juillet et définitivement adoptée en septembre 2002, soit au tout début de la XIIe législature, avait permis la plus forte augmentation quinquennale du budget de la justice : + 37 % entre 2002 et 2007, contre + 19 % entre 2007 et 2012 et + 15,5 % entre 2012 et 2017.

Pour gagner un temps précieux pour la justice, aujourd’hui dans une situation d’urgence, Philippe Bas a souhaité que le Gouvernement inscrive ces deux propositions de loi sur le redressement de la justice à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dès la remise des conclusions des chantiers de la justice en janvier prochain, afin que le processus législatif enclenché aboutisse le plus rapidement possible, en indiquant que le Sénat serait naturellement ouvert aux propositions qui résulteront de ces chantiers et du débat à l’Assemblée nationale.

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Mathilde DUBOURG
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