Union européenne et Roms : La Commission des affaires européennes du Sénat juge possible de préciser le droit français afin de régler le différend entre la France et la Commission européenne sur la transposition de la directive relative à la libre circulation et au droit au séjour des ressortissants communautaires
Dans sa réunion du 6 octobre 2010, la commission des affaires européennes du Sénat a estimé qu’il était possible de préciser le droit français pour mettre un terme au différend opposant le Gouvernement français à la Commission européenne sur la transposition de la directive du 29 avril 2004relative à la libre circulation et au droit au séjour des ressortissants communautaires.
Ces précisions porteraient d’abord sur le respect du principe de proportionnalité qui, selon la directive, doit conditionner la prise en compte d’une menace pour l’ordre public justifiant la mise en cause du droit au séjour d’un ressortissant communautaire. Elles prendraient aussi en compte expressément les garanties exigées par la directive pour la mise en œuvre des mesures d’éloignement du territoire d’un ressortissant communautaire. Le prochain examen par le Sénat, en janvier, du projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité peut donner l’occasion de compléter dans ce sens la transposition de la directive.
La Commission des affaires européennes du Sénat a par ailleurs appelé l’Union européenne à prendre toutes ses responsabilités afin de promouvoir une véritable politique communautaire de nature à favoriser l’intégration des Roms.
La Commission européenne a pris la décision, le 29 septembre, d’engager une procédure en manquement contre la France qui commencerait par l’envoi d’une mise en demeure demandant la transposition complète de la directive si, d’ici le 15 octobre, la France ne lui a pas transmis un projet de mesure de transposition ainsi qu’un calendrier précis pour son adoption.
A la demande du président Jean Bizet (UMP-Manche), les rapporteurs MM. Jean-René Lecerf (UMP-Nord) et Richard Yung (PS-Français établis hors de France) ont procédé à une analyse juridique de cette question. Ils sont allés à Bruxelles et ont recueilli les observations juridiques de la Commission européenne. Ils ont également entendu les services du Premier ministre et des ministères compétents.
Les rapporteurs ont indiqué que la Commission européenne jugeait nécessaire que les garanties prévues par la directive pour identifier l’existence d’une menace pour l’ordre public puissent faire l’objet d’une transposition. La Commission européenne souhaite aussi que les garanties entourant les mesures d’éloignement soient expressément transposées dans un texte spécifique. Le Gouvernement français fait, quant à lui, valoir que ces garanties sont toutes prévues dans le droit français. Certaines sont inscrites dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers. D’autres figurent dans le code de justice administrative ou dans d’autres textes. En outre, trouvent à s’appliquer dans ce domaine des principes de valeur constitutionnelle ou des principes généraux du droit dégagés par la jurisprudence.
Les rapporteurs ont fait valoir que la Cour de justice de l’Union européenne considère que la transposition en droit interne « n’exige pas nécessairement une reprise formelle et textuelle des dispositions de celle-ci dans une disposition légale ou réglementaire expresse et spécifique » et « peut se satisfaire d’un contexte juridique général » Mais la Cour de justice a également spécifié l’obligation pour les Etats membres d’adopter des dispositions juridiques « susceptibles de créer une situation suffisamment précise, claire et transparente pour permettre aux particuliers de connaître la plénitude de leurs droits et de s’en prévaloir devant la juridiction nationale. »
Les rapporteurs ont souligné qu’il fallait être attentif au souci de sécurité juridique pour permettre à chacun d’identifier ses droits de manière claire. Selon leur analyse, il serait possible d’apporter des précisions dans le droit français pour mieux répondre à cette exigence, sans mettre en cause l’équilibre de notre ordre juridique et tout en prenant garde de ne pas créer un précédent sur la procédure de transposition des directives qui doit garder une souplesse suffisante.
Contact presse : Ali Si Mohamed 01 42 34 25 11 a.si-mohamed@senat.fr