"SANS VERTU DES ÉTATS, IL N'EST POINT DE PACTE DE STABILITÉ" POUR LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT
Réunie sous la présidence de M. Jean Arthuis (UC-UDF - Mayenne), président, la commission des finances du Sénat a examiné le rapport de M. Philippe Marini (UMP, Oise) rapporteur général, sur le pacte de stabilité et de croissance.
Tirant notamment les conséquences d'un déplacement à Bruxelles les 24 et 25 janvier 2005, au cours duquel il a, en particulier, rencontré M. Joaquín Almunia, commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires, M. Philippe Marini a analysé le projet de réforme du pacte de stabilité et de croissance tel qu'il résulte des réunions du Conseil ECOFIN du 20 mars 2005 et des conclusions du Conseil européen des 22 et 23 mars 2005.
M. Philippe Marini s'est félicité du fait que la limite de 3 % du PIB fixée pour le déficit public ait été confirmée. En particulier, il remarque que les conclusions du Conseil européen prévoient que la prise en compte de certains « facteurs pertinents » (comme les politiques visant à encourager la R&D et l'innovation) ne remet pas en cause le principe fondamental selon lequel « le dépassement de la valeur de référence est temporaire et le déficit reste proche de la valeur de référence ». Il rappelle, à cet égard, que, selon les estimations du gouvernement[1], pour avoir dans 20 ans une dette publique de 40 % du PIB sans prise en compte de la dette implicite, ou de 60 % du PIB avec prise en compte de la dette implicite, la France doit avoir un déficit structurel de 1 % du PIB. Il souligne que ce déficit structurel lui permettrait, en principe, de ne jamais avoir de déficit effectif supérieur à 3 % du PIB.
Il a cependant déploré que les règles du pacte de stabilité demeurent trop peu contraignantes en phase haute du cycle économique. Il a insisté sur le fait que c'était une politique budgétaire inadaptée avant le ralentissement de 2001 qui expliquait la situation de déficit excessif dans laquelle se trouvaient la France et l'Allemagne. Il a estimé que les Etats membres étaient placés face à leurs responsabilités : c'est à chaque Etat membre de s'organiser de manière à ne pas dépasser le seuil de 3 % du PIB, afin de ne pas faire exploser la charge de sa dette, ce qui aurait pour effet de réduire encore davantage ses marges de manœuvre budgétaires.
Il a relevé que la réforme reprend une partie des préconisations de la commission des finances, avec notamment une attention plus marquée aux cycles et à la dette, tout en regrettant qu'il n'ait pas été fait référence à la « règle d'or », tendant à consacrer l'emprunt à la seule couverture des besoins d'investissement amortissable.
Après avoir évoqué les avancées qui doivent intervenir dans le cadre du projet de Constitution européenne et notamment l'amorce de la zone euro comme cadre juridique pertinent, M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait des propositions concrètes afin de favoriser le succès de la réforme.
1) Tout d'abord, il a proposé de doter Eurostat d'un « comité des sages », constitué de personnalités incontestables de par leur expérience professionnelle et leur réputation dans les milieux académiques, afin de renforcer la légitimité des données économiques et comptables communautaires, en particulier en matière de finances publiques.
2) Ensuite, il a jugé nécessaire de renforcer le rôle du Parlement dans le suivi de la mise en œuvre du pacte de stabilité. Il a, en particulier, suggéré de profiter du débat d'orientation budgétaire (DOB) pour procéder, chaque année, à un examen approfondi de la mise en œuvre des engagements européens de la France en matière de finances publiques, et d'organiser des débats relatifs aux actes adoptés par les institutions communautaires à l'égard de la France, notamment dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution. Il a rappelé que le Conseil européen suggère que les Parlements nationaux tiennent « un débat sur le suivi à donner aux recommandations formulées dans le cadre de la procédure d'alerte rapide et de la procédure concernant les déficits excessifs ».
Il a conclu que la gouvernance de l'euro était, plus que jamais, dans ce cadre réajusté, un art d'exécution, et que le respect des règles était de l'intérêt des Etats eux-mêmes s'ils voulaient assurer, par delà la soutenabilité de leur dette, la croissance économique et le développement de l'emploi, et donc la crédibilité de l'euro.
A l'issue de cette présentation, M. Jean Arthuis a exprimé le souhait que le pacte de stabilité et de croissance ne devienne en aucune façon « le pacte de stabilité et de tolérance » à l'égard des déficits publics.
Contact presse : Stéphanie Garnier 01 42 34 25 12 ou 25 13 s.garnier@senat.fr
[1] « Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques », juin 2004.