2004/163
Paris, le 9 novembre 2004
M. Michel Barnier évoque devant les sénateurs la crise en Côte d'Ivoire et les mesures envisagées
Pour les ressortissants français
Réunie sous la présidence de M. Serge Vinçon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a procédé à l'audition de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères.
M. Michel Barnier a tout d'abord remercié le président Serge Vinçon pour son témoignage de solidarité et de compassion à l'égard des familles des soldats français victimes d'une attaque aérienne délibérée en Côte d'Ivoire.
M. Michel Barnier a rappelé que depuis plusieurs semaines le gouvernement français, en liaison avec l'Union africaine et l'ONU, suivait avec beaucoup d'inquiétude l'évolution de la situation en Côte d'Ivoire, caractérisée par des blocages et des retards dans la mise en œuvre des engagements de Marcoussis et d'Accra.
Face à cette situation, le président Gbagbo a pris, de manière unilatérale, l'initiative d'une action visant à recouvrer le contrôle du territoire ivoirien et à accélérer le désarmement des rebelles. En dépit de mises en garde formulées dès mercredi dernier par le président Chirac contre toute violation du cessez-le-feu, les forces gouvernementales ivoiriennes ont poursuivi leurs actions. Après les bombardements intervenus sur les positions rebelles, elles ont procédé, d'une manière ne laissant aucun doute sur son caractère délibéré, à une attaque aérienne ayant provoqué samedi matin la mort de 9 soldats français et d'un civil américain auxquels s'ajoutent 38 blessés.
M. Michel Barnier a affirmé que la France ne pouvait rester sans réaction et qu'en usage de son droit de légitime défense, elle avait procédé à la destruction de tous les appareils susceptibles de renouveler ce type d'attaque. Il a en outre souligné que, comme il l'avait lui-même directement précisé au président Gbagbo, les instructions données depuis lors aux forces françaises visaient exclusivement à porter secours à nos ressortissants et à sécuriser l'aéroport et les diverses installations françaises à Abidjan. Il a rappelé que la France n'entendait en rien remettre en cause l'ordre institutionnel ivoirien, contrairement aux accusations lancées sur les ondes dans les appels à manifestation, et qu'elle inscrivait pleinement son action dans le cadre d'un mandat des Nations Unies. Il a ajouté que le président M'Beki venait d'arriver à Abidjan pour exprimer au président Gbagbo, au nom de l'Union africaine, notre volonté commune de trouver une issue à cette crise extrêmement grave.
M. Michel Barnier a ensuite estimé que la crise en cours devait être l'occasion de relancer le processus politique, avec l'appui de l'Union africaine et dans le cadre des Nations Unies, en concrétisant le désarmement et en adoptant les réformes institutionnelles prévues dans les accords de Marcoussis, notamment la révision des conditions d'éligibilité à la présidence de la République.
M. Jean-Pierre Plancade (socialiste, Haute-Garonne) a considéré que la France avait réagi avec mesure et modération aux attaques dont elle a fait l'objet en Côte d'Ivoire. Il a jugé désormais urgente la mise en œuvre des accords de Marcoussis et d'Accra III.
M. Robert Del Picchia (UMP, Français établis hors de France) a demandé des précisions sur le contenu de la résolution en cours d'examen aux Nations Unies.
Mme Monique Cerisier-Ben Guiga (socialiste, Français établis hors de France), a rendu hommage aux efforts accomplis durant ces derniers jours par le poste diplomatique d'Abidjan, les militaires du 43ème BIMA et la cellule de crise du Ministère des affaires étrangères. Elle a souhaité connaître les mesures envisagées pour l'accueil en France des ressortissants français désireux de quitter la Côte d'Ivoire.
M. Michel Barnier a précisé que le ministère des affaires étrangères venait d'affréter 3 avions en vue d'acheminer du ravitaillement en Côte d'Ivoire et de permettre le départ des ressortissants qui le souhaiteraient. Actuellement, 2.000 personnes sont regroupées dans l'enceinte du 43ème BIMA à Port-Bouet, 800 dans les installations de l'ONUCI et 500 à l'hôtel Ivoire. Des capacités d'accueil ont été mobilisées en tant que de besoin.
Pour le ministre des affaires étrangères, la réponse à la crise ne peut qu'être politique et se situe dans le cadre des Nations Unies. Elle passe par un mandat renforcé de l'ONUCI et l'obligation imposée aux différents responsables ivoiriens d'honorer leurs engagements. C'est pourquoi, en vue d'accélérer ce processus politique, la résolution en cours d'examen au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies devra comporter des dispositions précises concernant l'embargo sur les armes et d'éventuelles sanctions en cas de crimes contre les droits de l'homme et à l'encontre de tous ceux qui feraient obstacle au processus de paix.
M. Michel Barnier a également évoqué devant les sénateurs la situation dans les territoires palestiniens à la suite de la détérioration de l'état de santé du président Yasser Arafat. Répondant sur ce point aux questions de MM. Jean-Pierre Plancade (socialiste, Haute-Garonne) et Daniel Goulet (UMP, Orne), il s'est prononcé pour une relance du processus de paix dans le cadre du Quartet et en s'appuyant sur la feuille de route.
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