III. LES CONDITIONS D'APPLICATION DE LA CMU ONT AUSSI AGGRAVÉ SON CARACTÈRE " NON PARTENARIAL "
Le
rapporteur de votre commission avait dénoncé, dans son rapport
comme lors de la discussion au Parlement du projet de loi instituant une
couverture maladie universelle, le caractère très insuffisamment
partenarial du projet gouvernemental, tant en ce qui concerne la
définition du panier de soins qu'au regard des modalités
pratiques d'exercice du droit à la CMU.
Cette critique se révèle plus que confirmée dans la mise
en oeuvre de la loi : non seulement le contenu du panier de soins a
été insuffisamment négocié, mais, dans sa mise en
oeuvre, la CMU s'est éloignée encore un peu plus d'un
scénario partenarial.
A. LE CONTENU DU PANIER DE SOINS A ÉTÉ INSUFFISAMMENT NÉGOCIÉ
Le
rapporteur de votre commission avait regretté, lors des débats
parlementaires, que le projet de loi exclue toute négociation concernant
le droit à dépassement pour les actes dispensés aux
bénéficiaires du droit à la protection
complémentaire CMU. La loi définitivement adoptée a
malheureusement confirmé les dispositions du projet de loi. En ce qui
concerne les actes dispensés par les professionnels de santé, la
loi n'a en effet laissé aucune place, ni à des mesures
réglementaires d'application susceptibles de faire l'objet d'une
concertation, ni à la négociation.
La situation était
a priori
un peu différente en ce qui
concerne les biens médicaux.
En effet, la définition du panier de soins pris en charge au titre de la
CMU, prévue par l'article L. 861-3 du code de la
sécurité sociale, a fait une plus large place aux mesures
réglementaires d'application. C'est le cas notamment des soins dentaires
prothétiques ou d'orthopédie dento-faciale et des dispositifs
médicaux à usage individuel admis à remboursement.
L'article L. 861-3 dispose en effet que la liste des dispositifs et
la limite du montant des frais pris en charge seront précisées
par arrêté ministériel.
En outre, l'article L. 165-1 a prévu que les organismes
d'assurance maladie, les mutuelles, les institutions de prévoyance et
les sociétés d'assurance pouvaient conclure des accords locaux ou
nationaux avec les distributeurs de dispositifs, notamment en ce qui concerne
la qualité, les prix maximum et les modalités de dispense
d'avance de frais.
Ce même article prévoyait qu'en l'absence d'accord, ou si les
accords conclus ne répondent pas aux exigences légales, un
arrêté fixerait les obligations s'imposant aux distributeurs.
1. Un simulacre de négociation
Selon
les représentants des professionnels de santé rencontrés
par vos rapporteurs, les conditions de préparation des textes
réglementaires n'ont permis aucun accord véritable, compromettant
ainsi l'applicabilité des textes et l'adhésion des professionnels
à la réforme.
Selon ces responsables, alors que la loi était promulguée depuis
la fin du mois de juillet dernier, les négociations n'ont pu commencer
qu'à la
fin du mois d'octobre
.
La ministre, Mme Martine Aubry, n'a ainsi reçu les
représentants des syndicats des chirurgiens-dentistes que le
16 décembre 1999
.
En conclusion de leur entretien, elle leur a demandé de lui soumettre
des propositions concernant la liste des actes pouvant constituer le
"
panier CMU
" et leur valorisation, ce qui fut fait.
Le Président de l'Union des jeunes chirurgiens-dentistes a ensuite
reçu une réponse, datée du ...
30 décembre
1999
(la CMU devant entrer en vigueur le 1
er
janvier 2000)
ainsi rédigée :
Le 30 décembre 1999
" Monsieur le Président,
" J'ai bien reçu les propositions de votre organisation concernant
les modalités d'application de la couverture maladie universelle en
matière de soins dentaires et, plus généralement, vos
souhaits quant à une réforme de la nomenclature.
" Conformément aux dispositions de la loi sur la couverture maladie
universelle, et afin d'assurer sa mise en oeuvre dès le
1
er
janvier prochain, je suis amenée à prendre
par arrêté les mesures relatives aux soins dentaires.
" (...) "
" Martine AUBRY "
2. Les dispositifs réglementaires sont difficilement applicables
Ainsi,
l'arrêté du 31 décembre 1999 pris pour l'application
des articles L. 162-9 et L. 861-3 du code de la
sécurité sociale prévoit que le montant total des frais
pris en charge en matière de soins dentaires prothétiques ou
d'orthopédie dento-faciale :
" ne peut excéder un plafond fixé à
2.600 francs par bénéficiaire, par période de deux
ans s'ouvrant à la date d'ouverture du droit à la protection
complémentaire en matière de santé. Ce plafond n'est pas
applicable :
- aux frais afférents à des prothèses amovibles, d'au
moins 10 dents et aux traitements d'orthopédie dento-faciale ;
- en cas d'impérieuse nécessité médicale
constatée par le service du contrôle médical de la caisse
d'assurance maladie du bénéficiaire des soins "
.
De même, l'arrêté du 31 décembre 1999 pris pour
l'application des articles L. 165-1 et L. 861-3 du code de la
sécurité sociale prévoit que les frais exposés, en
sus des tarifs de responsabilité, au titre de la protection
complémentaire en matière de santé, pour les
prothèses auditives pour adultes :
" sont pris en charge
dans la limite de 1.600 francs par période de deux ans s'ouvrant
à la date d'ouverture du droit à la protection
complémentaire en matière de santé "
.
Tous les responsables des caisses rencontrés par vos rapporteurs ont
confirmé que leurs systèmes informatiques savent gérer des
données au regard des périodes d'ouverture des droits, mais ne
savent pas contrôler des plafonds de dépenses sur deux ans...
Dans l'attente d'une éventuelle solution apportée à ces
difficultés, ce type de dépenses est ainsi géré...
manuellement par les personnels des caisses.
Les professionnels, eux aussi, s'inquiètent : si le patient ne leur
dit rien, comment connaîtront-ils le montant des dépenses
engagées par celui-ci auprès d'autres professionnels, au cours
des deux années précédentes ? Seront-ils
remboursés en cas de non-prise en charge, notamment lorsqu'il s'agit de
répondre à une demande de réparation de prothèse,
qui ne fait pas l'objet d'une entente préalable ?
La complexité de la procédure prévue par les
arrêtés s'accroît bien entendu lorsque l'assuré a
choisi un organisme de protection sociale complémentaire, et non sa
caisse primaire, pour gérer sa couverture complémentaire.
Le caractère non négocié des dispositions
réglementaires concernant le panier de soins se lit également
dans la définition des actes pris en charge au titre de la CMU.
Ainsi, selon un chirurgien-dentiste rencontré par vos rapporteurs, la
liste des actes remboursables comporte des actes qui ne sont plus
pratiqués depuis des dizaines d'années, comme les
"
couronnes ajustées
" ou
"
façonnées
", ou les "
dents à
tube
"...
3. De lourdes conséquences financières pour certains professionnels
Si la
majorité des professionnels concernés par les tarifs
ministériels a une clientèle variée et ne subira pas de
préjudice économique grave du fait de l'institution de la CMU, il
n'en est pas de même de tous ceux qui exercent dans des quartiers, villes
ou villages défavorisés et dont une proportion importante de la
clientèle bénéficiera des "
tarifs CMU
",
des "
prothèses CMU
" et des "
lunettes
CMU
", vendues bien évidemment avec des taux de marge
très faible. Il en sera évidemment de même pour beaucoup de
centres de santé.
Votre commission a souhaité reproduire ici, en l'anonymisant, une note
interne faisant des prévisions de pertes financières probables
d'un centre de santé dentaire en conséquence de la mise en oeuvre
de la CMU.
B. COMME IL ÉTAIT À CRAINDRE, LA MISE EN oeUVRE DE LA CMU S'ÉLOIGNE BEAUCOUP D'UN SCÉNARIO PARTENARIAL ENTRE ORGANISMES DE BASE ET ORGANISMES COMPLÉMENTAIRES
Les
textes d'application de la loi instituant une couverture maladie universelle
comme sa mise en oeuvre pratique, dans bien des départements et dans
bien des circonstances, ont été à l'encontre d'un
véritable partenariat entre organismes de base et organismes
complémentaires.
Est révélatrice, à cet égard, la très faible
proportion de bénéficiaires de la CMU ayant choisi de confier
à des mutuelles ou des assureurs la gestion de leur couverture
complémentaire. Celle-ci ne traduit pas, en l'état, une
volonté des bénéficiaires de la CMU d'écarter ces
organismes, ou un faible degré de confiance à leur
égard : elle résulte essentiellement de beaucoup de
"
mauvaises manières
" faites aux organismes
complémentaires, comme de l'impréparation des textes
réglementaires concernant le tiers payant.
Cette disproportion entre le nombre de bénéficiaires ayant choisi
les organismes de base et ceux qui se sont adressés à des
organismes complémentaires alimente, sur le terrain, quelques
rivalités : alors que ces derniers (organismes
complémentaires) se plaignent du sort qui leur est
réservé, les premiers soulignent l'attachement "
de
façade
" de certains organismes complémentaires à
la réussite de la CMU : tout cela n'augure pas bien de la
suite...
1. Une très faible proportion des bénéficiaires de la CMU a choisi de confier la gestion de sa couverture complémentaire à des assureurs ou des mutuelles
Certes,
la situation est variable en fonction des départements. Ainsi, dans le
Morbihan, en Ardèche, dans le Tarn ou l'Aveyron, la moitié des
nouveaux bénéficiaires ont choisi un organisme
complémentaire.
De même, dans la Somme, la caisse primaire d'assurance maladie d'Amiens
dont vos rapporteurs ont rencontré les responsables, distribue aux
bénéficiaires de la CMU une fiche d'information leur indiquant
qu'ils ont intérêt à choisir une complémentaire.
Fiche distribuée aux bénéficiaires de la CMU par la CPAM d'Amiens
Informations sur le choix de l'organisme complémentaire |
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Vous avez
le droit
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Vous
devez choisir un
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Choix de la CPAM comme organisme complémentaire |
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Choix
d'un organisme complémentaire
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Si il y a
un changement dans votre situation
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Alors,
l'organisme complémentaire doit
|
Source : Sécurité sociale - Caisse
primaire de
la Somme
En effet, si un bénéficiaire de la CMU perd ses droits à
la suite d'une amélioration de sa situation, il n'aura droit à
une prolongation de sa couverture pendant un an, avec un tarif
préférentiel, qu'auprès d'un organisme
complémentaire.
Certes aussi, tous les responsables nationaux des régimes de base
-régime général, assurance maladie des
indépendants, régime agricole- rencontrés par vos
rapporteurs n'apparaissent pas du tout enclins, comme il leur a pourtant
été reproché, à favoriser une quelconque
"
captation de clientèle
" : ils savent bien, en
effet, que si les régimes de base prétendent gérer aussi
la couverture complémentaire des Français, rien ne s'opposera
à ce que les organismes complémentaires aient une revendication
réciproque concernant la couverture de base.
Mais les chiffres sont là :
• au niveau national,
17,7 %
seulement des nouveaux
bénéficiaires de la CMU enregistrés au sein du
régime général ont choisi de confier la gestion de leur
couverture complémentaire à des mutuelles ou des compagnies
d'assurance ;
• sur
106.000
bénéficiaires de la CMU
enregistrés au sein du régime agricole (ce chiffre inclut aussi
les personnes " basculées " de l'aide médicale),
2.000
seulement ont choisi un régime complémentaire ;
• sur les
84.280
bénéficiaires de la CMU
enregistrés dans le régime des professions indépendantes
(ce chiffre inclut également les anciens bénéficiaires de
l'aide médicale),
1.752
seulement ont choisi de confier la
gestion de leur complémentaire à une mutuelle ou une compagnie
d'assurances autres que les organismes conventionnés du régime.
Le tableau suivant reflète bien la disparité des situations entre
les différentes CPAM :
Répartition des CPAM par taux d'accords CMU
avec
choix
d'un organisme complémentaire
Taux d'organisme complémentaire |
Nombre de CPAM |
Importance des CPAM |
Taux moyen |
40 % et plus |
20 |
9,4 % |
52,1 % |
20 à 40 % |
44 |
23,4 % |
28,4 % |
10 à 20 % |
31 |
28,3 % |
15,8 % |
Moins de 10 % |
23 |
26,8 % |
6,2 % |
0 % |
7 |
12,0 % |
0,0 % |
Ensemble |
125 |
100,0 % |
17,7 % |
Pour
20 CPAM, les accords allant à des complémentaires
représentant plus de 40 % des accords qu'elles ont traités.
Ces CPAM ont traité 9,4 % de l'ensemble des accords traités par
l'ensemble des CPAM connues.
Pour cette catégorie, le taux moyen d'organisme complémentaire
est de 52,1 %.
2. Beaucoup de " mauvaises manières " faites aux organismes complémentaires.
* Il convient d'abord de rappeler que les
3,1 millions
d'ex-bénéficiaires de l'aide médicale qui ont
été "
basculés
" automatiquement, au
1
er
janvier 2000, dans le régime CMU n'ont, à
aucun moment, eu le choix de l'organisme gestionnaire de leur protection
complémentaire.
Ce choix leur sera offert après qu'aura été
effectué, à une date qui, on l'a vu, demeure
indéterminée, le contrôle de leurs ressources leur ouvrant
de nouveaux droits à la CMU.
Il y a fort à parier, cependant, que la proportion de ces
3,1 millions de personnes qui choisiront un organisme
complémentaire sera très faible.
En effet :
- pendant près d'un an, leur caisse d'assurance maladie de base
aura géré leur couverture complémentaire : sauf
incident, ils n'auront pas de raison particulière de la quitter ;
- la possibilité du choix de l'organisme gestionnaire leur sera
mentionnée par lettre, dont on n'imagine pas qu'elle puisse
s'accompagner, pour chacune des 3,1 millions des personnes, de la liste
des organismes complémentaires participant à la CMU : cette
liste constitue en effet un document comprenant, selon les départements,
50 à 100 pages...
- il serait "
humain
" de la part des personnels des
caisses confrontés à des retards importants dans leur travail
qu'ils ne fassent pas preuve d'une diligence extraordinaire pour inciter les
3,1 millions de personnes en question à se présenter aux
guichets des caisses pour remplir de nouveaux formulaires confiant la gestion
de leur couverture aux organismes complémentaires...
Tout porte ainsi à croire que les statistiques concernant les organismes
gestionnaires de la CMU complémentaire ne se
rééquilibreront pas en faveur des organismes
complémentaires. En fait, c'est même plutôt une
dégradation de cet équilibre qui est attendue au cours des
prochains mois.
* D'autres "
mauvaises manières
", volontaires
ou non, ont caractérisé l'établissement des listes
préfectorales des organismes participant à la CMU.
La lettre suivante adressée par le directeur de MAAF-Santé au
Délégué général de la FNIM illustre ainsi
les difficultés qu'ont rencontrées certaines mutuelles...
Il convient de rappeler que l'absence d'inscription d'organismes
complémentaires sur les listes préfectorales, non seulement les a
empêchés de participer au lancement de la CMU, mais a aussi
entraîné, conformément à la loi, la radiation de
leurs adhérents qui venaient d'obtenir le bénéfice de la
CMU...
Selon la Mutualité française,
" le choix de l'organisme
complémentaire impliquait de disposer de la liste des organismes
participants. Or, cette liste n'a été constituée
définitivement que fin mars et, dans certains départements, les
derniers arrêtés préfectoraux n'ont toujours pas
été pris.
" C'est sans doute sur cet aspect que les disparités les plus
importantes existent, puisque le choix, pour les nouveaux
bénéficiaires, d'un organisme complémentaire, et
très largement de la Mutualité, a très bien
fonctionné dans certains départements, très mal dans
d'autres.
" Face à cette situation, le ministère a
décidé, dans l'urgence, un répertoire national des
mutuelles participant à la CMU ".
* Autres "
mauvaises manières
",
également : elles concernent la faculté offerte aux
organismes complémentaires qui le souhaitent d'aider les demandeurs dans
leurs démarches.
Lors de la discussion du projet de loi, le Sénat avait souhaité
inscrire les organismes de protection complémentaire dans
l'article L. 861-5, aux côtés des services sociaux et
associations ou organismes à but non lucratif agréés par
le représentant de l'Etat ainsi que des établissements de
santé, dans la liste des organismes habilités, avec l'accord du
demandeur, à transmettre à la caisse primaire la demande de CMU
et les documents correspondants.
Le Gouvernement, pour des raisons que le rapporteur de votre commission n'avait
pu comprendre, s'était opposé à cette participation des
mutuelles et des compagnies d'assurance à la mise en oeuvre de la CMU...
Les mutuelles avaient cependant compris que leur statut d'"
organisme
à but non lucratif
" leur aurait permis d'exercer cette
fonction d'accompagnement social... Mal leur en a pris : ce rôle
leur a été refusé, comme leur a été
refusé de disposer des imprimés administratifs de demande
qu'elles auraient pu distribuer à leurs adhérents ou aux
personnes qui s'adressaient à elles...
Devant l'ampleur des réactions -légitimes- des organismes
complémentaires, la ministre a changé d'avis : le
29 mars dernier, elle a enfin adressé aux préfets et aux
fédérations d'organismes complémentaires une lettre
reconnaissant le "
rôle éminent
" confié
par la loi à ces organismes...
Ces lettres précisent bien que les organismes complémentaires
peuvent disposer des dépliants, guides et formulaires officiels
concernant la CMU...
Ces lettres, comme il était à craindre, ont été
interprétées de façon restrictive par la CNAMTS, qui ne
semble pas disposée à devenir le fournisseur des organismes
complémentaires en dépliants, guides et formulaires...
La note ci-jointe, adressée aux directeurs de CPAM, précise bien
qu'il appartient aux fédérations d'organismes
complémentaires de commander auprès de la société
Graphilabel les films nécessaires à la fabrication des
formulaires CMU... et que les caisses ne doivent donc pas honorer les demandes
qui leur seraient adressées par des mutuelles ou des compagnies
d'assurance... Vive le partenariat !
* Enfin, -et il ne s'agit pas, ici, de "
mauvaises
manières
"-, l'absence de procédure nationale de tiers
payant coordonné dégrade considérablement les conditions
d'un véritable partenariat entre organismes de base et organismes
complémentaires.
L'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale a en
effet institué une méthode de tiers payant qui, si elle ne change
rien par rapport aux techniques actuelles de tiers payant pour les
assurés, est bien meilleure pour les professionnels de
santé : ceux-ci recevront en effet, pour les
bénéficiaires de la CMU, un paiement unique comprenant à
la fois la part de base et la part complémentaire.
Cette exigence de paiement unique impose, bien entendu, aux organismes de base
et aux organismes complémentaires de se "
coordonner
".
Le décret n° 99-1079 du 21 décembre 1999 relatif
aux modalités d'application de la dispense d'avance de frais de soins de
santé et modifiant le code de la sécurité sociale a
prévu deux procédures alternatives, au choix de l'organisme
complémentaire, pour la mise en oeuvre du tiers payant
coordonné :
-
Procédure A
: la caisse d'assurance maladie liquide
la part obligatoire (pour son compte) et complémentaire (pour le compte
de l'organisme complémentaire) et paie le professionnel de
santé ;
-
Procédure B
: la caisse d'assurance maladie liquide
la part obligatoire (pour son compte), transmet " l'image
décompte " à l'organisme complémentaire qui liquide
sa part ; le paiement du professionnel de santé est effectué
pour le compte de ces deux organismes par un organisme financier régi
par la loi bancaire, sur ordre de paiement émanant de l'organisme de
base.
A ce jour -soit près de six mois après l'entrée en vigueur
de la CMU-, les deux arrêtés devant définir les
modalités pratiques de ces deux procédures ne sont toujours pas
publiés : le tiers payant coordonné, qui constituait un
avantage important, tant pour les bénéficiaires de la CMU que
pour les professionnels de santé, ne fonctionne pas selon des
règles nationales.
Certains responsables de caisses d'assurance maladie rencontrés par vos
rapporteurs en tirent de bonne foi argument pour indiquer aux
bénéficiaires de la CMU qu'ils n'ont, pour l'instant, pas
intérêt à confier la gestion de leur couverture
complémentaire à une mutuelle ou une assurance...
*
* *
Ainsi,
aux principaux effets pervers de la loi instituant une couverture maladie
universelle, les mesures réglementaires et les conditions d'application
de cette loi ont ajouté des défauts supplémentaires :
inutile complexité des procédures, négociations
bâclées avec les professionnels de santé et
" mauvaises manières "
faites aux organismes de
protection sociale complémentaire.
Il en résulte, d'ores et déjà, pour les
bénéficiaires -en moindre nombre que ce qui était
prévu-, pour les agents des caisses, mais aussi pour les professionnels
de santé libéraux, pour les établissements de santé
et pour les centres de santé, beaucoup d'incertitudes et beaucoup de
tracasseries inutiles.
Il en résulte aussi, pour les organismes complémentaires, une
déception à la mesure de leur degré d'implication dans la
réussite de cette réforme.
Votre commission souhaite que le travail de contrôle qu'elle a entrepris
soit pris en compte par le Gouvernement, dans l'intérêt de tous.