Les lois de financement de la sécurité sociale
DESCOURS (Charles)
RAPPORT D'INFORMATION 433 (98-99) - Commission des Affaires sociales
Table des matières
- I. LES LOIS DE FINANCEMENT : UN ACQUIS ESSENTIEL
-
II. LES LOIS DE FINANCEMENT : UN INSTRUMENT
PERFECTIBLE
-
A. UN LIEN DISTENDU AVEC LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE
DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE
- 1. Le rapport annexé ne remplit pas sa fonction
- 2. Les orientations de santé publique n'ont pas trouvé leur place dans les lois de financement
- 3. La multiplication de grands débats extérieurs aux lois de financement brouille leur contenu
- 4. La crainte d'une dérive vers le DMOS n'est pas tout à fait écartée
-
B. UNE RIGUEUR INSUFFISANTE DANS LA CONSTRUCTION DES
COMPTES
- 1. Le retard de production des comptes de la sécurité sociale reste un handicap majeur
- 2. La fiabilité des comptes de la sécurité sociale demeure incertaine
- 3. La lisibilité des dispositions financières est imparfaite
- 4. Le suivi de l'application est pour l'instant embryonnaire
- 5. La portée de l'ONDAM est encore ambiguë
- 6. L'équilibre est abordé de manière fragmentaire
- C. TROIS PRÉALABLES POUR PERMETTRE AUX LOIS DE FINANCEMENT DE JOUER PLEINEMENT LEUR RÔLE
-
D. DEUX ORIENTATIONS POUR RENDRE LE DÉBAT PLUS
TRANSPARENT ET PLUS EFFICACE
- 1. Redistribuer les débats pour recentrer les lois de financement
- 2. Clarifier les enjeux des finances sociales
-
A. UN LIEN DISTENDU AVEC LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE
DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE
- TRAVAUX DE LA COMMISSION
-
ANNEXE I
-
COMPTES RENDUS DES AUDITIONS
DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE8282 Avant publication, ces comptes rendus ont été soumis aux personnes auditionnées et les corrections qu'elles ont, le cas échéant, demandées ont été prises en compte. -
ANNEXE II
-
LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITE SOCIALE : DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES,
ORGANIQUES ET LÉGISLATIVES -
ANNEXE III
-
SCHÉMAS SUR LE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE -
ANNEXE IV
-
LISTE DES IMPOSITIONS AFFECTÉES
AUX ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE -
ANNEXE V
-
HISTORIQUE DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LES REVENUS DU CAPITAL -
ANNEXE VI
-
TABLE DES SIGLES UTILISÉS
N°
433
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 juin 1999
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur les lois de financement de la sécurité sociale ,
Par M.
Charles DESCOURS,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Jean Delaneau,
président
; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine
Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet,
vice-présidents
; Mme Annick Bocandé, MM. Charles
Descours, Alain Gournac, Roland Huguet,
secrétaires
; Henri
d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM.
Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux,
Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati,
Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet,
André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla,
Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques
Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM.
Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de
Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul
Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Sécurité sociale. |
Mesdames, Messieurs,
En 1996, le Parlement s'est doté d'un nouvel instrument : les lois
de financement de la sécurité sociale.
A la veille de l'examen du projet de loi de financement pour 2000, qui sera le
quatrième exercice du genre depuis l'entrée en vigueur de la
réforme constitutionnelle et organique de 1996, votre commission des
Affaires sociales a souhaité procéder, en quelque sorte, à
un premier bilan.
Pour ce faire, elle a souhaité constituer un groupe de travail
chargé, à la lumière de l'expérience acquise,
d'analyser les points forts des lois de financement de la
sécurité sociale mais également de réfléchir
à une amélioration de leur présentation, de leur
discussion et de leur suivi.
En procédant ainsi à une forme d'" audit " des lois de
financement, c'est-à-dire des conditions dans lesquelles sont
abordés les enjeux financiers et l'avenir de notre protection sociale,
votre commission s'inscrit dans le droit fil des travaux de réflexion
qui caractérisent les apports de notre Haute Assemblée au
débat public.
Constitué le 27 janvier 1999, le groupe de travail a
procédé, de février à avril dernier, à un
important programme d'auditions dont les comptes rendus figurent en annexe du
présent rapport.
Ces auditions ont largement contribué aux analyses et aux orientations
retenues par le groupe de travail. Elles l'ont conforté dans une double
conviction.
Les lois de financement de la sécurité sociale sont un acquis
essentiel que l'on doit à la détermination du gouvernement de M.
Alain Juppé et qui désormais fait l'objet d'un large consensus.
Mais elles sont également un instrument perfectible.
Deux conclusions résument les travaux conduits par votre
commission : d'abord, la nécessité d'une meilleure
articulation entre les lois de financement et, pour reprendre les termes de la
loi organique, "
les orientations de la politique de santé et de
sécurité sociale
" ; ensuite une indispensable
adaptation des calendriers, des procédures et des moyens à ce
rendez-vous majeur qu'est le débat devant le Parlement consacré
aux finances sociales.
"
Rien n'est plus aride que le domaine des finances publiques ;
rien ne mérite davantage l'attention
"
1(
*
)
. S'il fallait retenir une ambition pour le
présent rapport, ce serait probablement d'accélérer la
prise de conscience, pour l'ensemble des intervenants, de toutes les
implications que comporte cette nouvelle catégorie de loi que sont les
lois de financement de la sécurité sociale.
Liste
des membres du groupe de travail
sur les lois de financement de la sécurité sociale
MM.
Charles DESCOURS (RPR - Isère)
François AUTAIN (SOC - Loire-Atlantique)
Mme Nicole BORVO (CRC - Paris)
MM. Bernard CAZEAU (SOC - Dordogne)
Claude DOMEIZEL (SOC - Alpes-de-Haute-Provence)
Francis GIRAUD (RPR - Bouches-du-Rhône)
Alain GOURNAC (RPR - Yvelines)
Claude HURIET (UC - Meurthe-et-Moselle)
André JOURDAIN (RPR - Jura)
Dominique LECLERC (RPR - Indre-et-Loire)
Jean-Louis LORRAIN (UC - Haut-Rhin)
Jacques MACHET (UC - Marne)
Alain VASSELLE (RPR - Oise)
I. LES LOIS DE FINANCEMENT : UN ACQUIS ESSENTIEL
A. UN PROGRÈS ESSENTIEL DANS LA MAÎTRISE DES ENJEUX FINANCIERS DE LA PROTECTION SOCIALE
Depuis
quelque deux cents ans, le Parlement examine le budget de l'Etat. L'article 14
de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du
26 août 1789 est la traduction juridique d'un principe politique
qui, historiquement, a constitué un des premiers fondements des
démocraties parlementaires : le libre consentement à
l'impôt, exprimé par une assemblée émanant du
peuple
2(
*
)
:
" Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou
par leurs Représentants, la nécessité de la contribution
publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en
déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la
durée. "
A l'inverse, notre système de sécurité sociale a
été fondé en 1945 sur le principe de l'exercice d'une
activité professionnelle et sur le concept " d'assurances
sociales " ; en conséquence, le Parlement ne disposait pas de
droit de regard sur les masses financières affectées, tant en
recettes qu'en dépenses.
Mais la fiscalisation croissante des ressources de la sécurité
sociale et la déconnexion entre le versement de prestations et
l'exercice d'une activité professionnelle ont eu pour conséquence
une " publicisation " des finances sociales.
La révision constitutionnelle du 22 février 1996 a posé
les bases d'un édifice dont les constitutionnalistes et les historiens
reconnaîtront le caractère majeur : l'intervention du
Parlement en matière de finances sociales.
Cette intervention apparaissait depuis longtemps légitime.
1. Une intervention légitime du Parlement
a) Des masses financières supérieures au budget de l'Etat
Les dépenses et les recettes de la sécurité sociale atteignent un niveau supérieur à celles de l'Etat.
Comparaison de l'état A de la loi de finances
et
des
prévisions de recettes de la loi de financement en 1999
en milliards de francs
LFI 1999 |
LFSS 1999 |
||||
Recettes fiscales |
1.841,6 |
Cotisations effectives |
1.062,9 |
||
Recettes non fiscales |
183.3 |
Cotisations fictives |
194,8 |
||
Prélèvements sur les recettes de l'Etat |
- 271,2 |
Contributions publiques |
63,8 |
||
Fonds de concours |
|
Impôts et taxes affectés |
438,7 |
||
|
|
Transferts reçus |
5,2 |
||
|
|
Revenus des capitaux |
1,4 |
||
|
|
Autres ressources |
32,6 |
||
Total général |
1.753,5 |
Total des recettes |
1.799,5 |
Comptes 1997 des dépenses des assurances sociales
en milliards de francs
Régimes de la sécurité sociale |
Régimes d'indemnisation du chômage |
|
||
Régime général |
Autres régimes |
Total |
|
Total |
1.064,1 |
809,1 |
1.873,3 |
110,8 |
1.984,0 |
Source : Sesi-Compte de la protection sociale
Annexe
G -
PLFSS 1999, p 26
L'augmentation des prélèvements sociaux est une
tendance lourde, qui explique l'essentiel de la progression des
prélèvements obligatoires. En 1980, les
prélèvements au profit de l'Etat représentaient
18,2 % du PIB, tandis que les prélèvements au profit de la
sécurité sociale en représentaient 18,1 %. En 1997,
ces deux chiffres étaient respectivement de 15,3 % et de
22,3 %.
Les prélèvements obligatoires des administrations publiques en
France
|
1988 |
1994 |
1997 |
1998 |
1999 |
Prélèvements obligatoires/PIB (en %) |
43,8 |
44,1 |
46,1 |
45,9 |
45,7 |
dont Etat |
16,7 |
14,6 |
15,3 |
15,0 |
14,9 |
dont
Sécurité sociale
|
19,7 |
21,3 |
22,0 |
22,4 |
22,5 |
Source : Notes bleues de Bercy, 9 septembre 1998.
En 1998, la CSG est devenue la première imposition directe, avec un
produit de 318,5 milliards de francs, contre 304 milliards de francs pour
l'impôt sur le revenu. En 1999
3(
*
)
,
l'écart serait plus important, en raison de l'assiette beaucoup plus
dynamique de la CSG : 356 milliards pour la CSG, 315 milliards pour
l'impôt sur le revenu.
Mais il ne suffit pas de considérer le montant atteint par les
dépenses de sécurité sociale pour justifier l'intervention
du législateur.
b) Les finances sociales, partie intégrante des finances publiques
Plusieurs facteurs expliquent la
" publicisation "
croissante des finances sociales.
- la généralisation de la sécurité
sociale
Le système français de sécurité sociale est
fondé, à l'origine, sur les principes bismarckiens :
cotisations assises sur les salaires, répartition de la cotisation entre
l'employeur et le salarié, instauration d'un plafond de cotisations. Les
droits sociaux sont ainsi étroitement liés à l'exercice
d'une activité professionnelle. La logique est celle de l'assurance.
L'histoire de la sécurité sociale depuis 1945 montre un
glissement vers un système différent, celui de
l'universalité (principes de Beveridge).
La création du fonds national de solidarité en 1956 permet
d'assurer une prestation non contributive aux personnes âgées, le
minimum vieillesse.
La loi du 4 juillet 1975 supprime, à compter de 1978, la condition
d'activité professionnelle exigée pour le droit aux prestations
familiales. De fait, cette condition faisait l'objet, depuis 1946, de multiples
dérogations.
Le système de l'assurance volontaire (1967), puis de l'assurance
personnelle (loi du 2 janvier 1978), assure une première étape de
la généralisation de l'assurance maladie. Le projet de loi
portant création de la couverture maladie universelle, en cours de
discussion devant le Parlement, parachève cette
généralisation, en déconnectant définitivement le
droit à prestations de l'exercice d'une activité professionnelle.
- la fiscalisation des ressources de la sécurité
sociale
Cette fiscalisation était manifeste dès avant les lois de
financement, puisqu'en 1996 plus de 30 % des recettes étaient
constituées d'impôts et taxes affectés, des cotisations
fictives et des contributions publiques.
Les prévisions de recettes 1999 montrent que cette part
s'élève désormais à 41 %.
Structure des recettes de la sécurité
sociale
(au sens de la loi de financement)
(en milliards de francs)
|
Réal. 1996 |
% |
LFSS 1997 |
% |
LFSS 1998 |
% |
LFSS 1999 |
% |
Cotisations effectives |
1.160,3 |
72,18 |
1.152,4 |
69,49 |
1.034,1 |
60,02 |
1.062,9 |
59,07 |
Cotisations fictives |
175,9 |
10,94 |
181,9 |
10,97 |
186,9 |
10,85 |
194,8 |
10,83 |
Contributions publiques |
61,0 |
3,79 |
63,9 |
3,85 |
62,0 |
3,60 |
63,8 |
3,55 |
Impôts et taxes affectés |
170,3 |
10,59 |
223,6 |
13,48 |
403,0 |
23,39 |
438,7 |
24,38 |
Transferts reçus |
4,5 |
0,28 |
4,7 |
0,28 |
4,6 |
0,27 |
5,2 |
0,29 |
Revenus des capitaux |
2,1 |
0,13 |
1,8 |
0,11 |
1,3 |
0,08 |
1,4 |
0,08 |
Autres ressources |
33,4 |
2,08 |
30,0 |
1,81 |
31,1 |
1,80 |
32,6 |
1,81 |
Total recettes |
1.607,5 |
100 |
1.658,3 |
100,00 |
1.723,0 |
100,00 |
1.799,5 |
100,00 |
N.B . : les chiffres mentionnés pour 1997, 1998 et 1999 sont les prévisions de recettes fixées par la loi de financement.
- la prise de conscience du caractère non
extensible
des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques
La comparaison entre le poids des prélèvements obligatoires en
France et dans les autres pays de l'Union européenne montre que notre
pays se situe plutôt dans le peloton de tête : 46,3% du PIB en
1997
4(
*
)
, chiffre équivalant à
celui de la Belgique, dépassé par les seuls Suède
(54,1 %), Danemark (53,1 %) et Finlande (47,5 %) et supérieur
de plus de trois points et demi à la moyenne de l'Union
européenne (42,6 %).
Comme M. Didier Migaud l'exprime en tant que rapporteur du groupe de
travail de l'Assemblée nationale consacré à
l'efficacité de la dépense publique et au contrôle
parlementaire (janvier 1999) :
" Si une orientation d'ensemble des
prélèvements fiscaux vers une fiscalité plus juste et plus
efficace est nécessaire, il est exclu d'accroître davantage la
pression fiscale globale "
5(
*
)
.
Les critères de convergence pour l'union économique et
monétaire, définis par le Traité de Maastricht, ont rendu
nécessaire l'établissement d'un compte des administrations
publiques, regroupant les finances de l'Etat, de la sécurité
sociale et des collectivités locales.
Le besoin de financement ou la capacité de financement de ce compte est
rapporté au PIB.
Les engagements pris par la France dans le cadre du pacte de stabilité
adopté au Conseil européen d'Amsterdam (juin 1997), puis du
programme pluriannuel des finances publiques, montrent toute l'importance de la
variable finances sociales. Le résultat de l'année 1998 aurait pu
être meilleur que prévu sans un dérapage des
dépenses d'assurance maladie, tandis que l'amélioration
présentée pour les années qui viennent repose sur un
excédent des finances sociales (0,15 % du PIB en 1999, 0,3 %
du PIB en 2002).
c) L'échec du système de régulation issu des ordonnances de 1967
Les
ordonnances Jeanneney de 1967 avait laissé aux partenaires sociaux le
soin de veiller au rétablissement de l'équilibre des comptes
sociaux. Le système n'a pas fonctionné en période de crise
économique durable.
L'intervention du Parlement devenait d'autant plus nécessaire que
" les partenaires sociaux refusaient de prendre leur
responsabilité en matière d'équilibre financier des
régimes "
6(
*
)
.
Le régime général connaît ainsi un déficit
ininterrompu depuis 1989.
Solde
du régime général 1989 - 1999
Dès lors, il apparaissait logique de déléguer les pouvoirs financiers au législateur.
2. Une préoccupation ancienne
La
nécessité d'une intervention régulière des
représentants de la Nation dans un domaine aussi essentiel que la
protection sociale avait été ressentie depuis fort longtemps.
Avant l'institution des lois de financement, le Parlement n'était
d'ailleurs pas totalement incompétent vis-à-vis des finances
sociales :
- l'article 34 de la Constitution lui a réservé le pouvoir
de déterminer, parmi les principes fondamentaux de la
sécurité sociale, le régime financier des organismes de
protection sociale. Les ressources et charges de ces organismes entrent dans le
champ des dispositions de l'article 40 de la Constitution, selon une
décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 1961
7(
*
)
;
- le même article 34 lui a donné le pouvoir de voter le taux
et l'assiette des impositions de toutes natures, et donc de celles
perçues au profit de la sécurité sociale ;
- la création du budget annexe des prestations sociales agricoles
(BAPSA) lui a donné la faculté de voter
l'intégralité des ressources et des charges d'un régime de
protection sociale ;
- les lois de finances font apparaître les subventions de l'Etat aux
régimes spéciaux, ou les remboursements d'exonérations de
cotisations.
De plus, le Parlement disposait d'un certain nombre d'informations.
La loi du 24 décembre 1974 a créé l'obligation pour le
Gouvernement de présenter chaque année au Parlement, à
l'appui du projet de loi de finances, une annexe consacrée à
l'effort social de la Nation.
La loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la
sécurité sociale a rendu le Parlement destinataire d'un ensemble
complexe de rapports et de documents annexés.
Dans le rapport d'information d'avril 1994
8(
*
)
qu'il avait eu l'honneur de présenter au nom de la commission des
Affaires sociales, votre rapporteur indiquait :
"
Si les prérogatives actuelles du Parlement dans le domaine de
la sécurité sociale ne sont pas négligeables, aucune ne
lui permet actuellement d'avoir une vision d'ensemble de leurs implications, en
particulier financières, sur notre système de protection
sociale... A l'occasion de l'examen de textes législatifs, et en
particulier les projets de loi portant diverses mesures d'ordre social, le
Parlement est régulièrement conduit à se prononcer sur les
dispositions influant directement sur le niveau de la protection sociale.
Cependant, ces interventions sont parcellaires et il est très difficile
d'en mesurer pleinement les conséquences, ainsi que de les relier
à l'évolution globale des structures ou des comptes des
régimes de sécurité sociale
".
Et notre excellent collègue M. Patrice Gélard développait
dans son rapport sur le projet de loi constitutionnelle
9(
*
)
une métaphore particulièrement
pertinente :
" Le législateur, en matière de sécurité
sociale, est en quelque sorte dans la situation d'un architecte qui
définirait le nombre et la forme des pièces d'un bâtiment,
mais pas leurs dimensions respectives. Cet architecte ne serait donc pas
à même d'apprécier dès le départ la
superficie totale du bâtiment qu'il conçoit, ni son
coût ".
La réforme constitutionnelle de 1996 avait été
précédée de tentatives avortées, la plus
célèbre étant la loi organique relative au contrôle
du Parlement sur les finances des régimes obligatoires de
sécurité sociale, adoptée définitivement par le
Parlement le 8 décembre 1987, à l'initiative de Michel d'Ornano,
alors président de la commission des Finances de l'Assemblée
nationale.
L'annulation de cette loi par le Conseil constitutionnel a fermé la
possibilité d'une réforme par la voie organique. En effet, le
Conseil
10(
*
)
a estimé que les
dispositions de cette loi n'avaient pas
" pour objet la
détermination des matières qui sont du domaine de la
loi "
mais qu'elles étaient
" afférentes
à la procédure législative "
. Elles
échappaient ainsi
" à la compétence ouverte
à la loi organique par le septième alinéa de l'article 34
de la Constitution ".
Le passage par la voie constitutionnelle était devenu ainsi
nécessaire.
3. Une réforme constitutionnelle nécessaire
La loi
constitutionnelle du 22 février 1996 complète l'article 34
de la Constitution :
"
Les lois de financement de la sécurité sociale
déterminent les conditions générales de son
équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de
recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous
les réserves prévues par une loi organique
".
Par ailleurs, un nouvel article 47-1 décrit la procédure
d'adoption des projets de loi de financement de la sécurité
sociale, calquée très largement sur l'examen des projets de loi
de finances.
Procédure suivie pour l'adoption des lois de financement
Art. 47-1-
Le Parlement vote les projets de loi de
financement de la Sécurité sociale dans les conditions
prévues par une loi organique.
Si l'Assemblée nationale ne s'est pas prononcée en
première lecture dans le délai de vingt jours après le
dépôt d'un projet, le Gouvernement saisit le Sénat qui doit
statuer dans un délai de quinze jours. Il est ensuite
procédé dans les conditions prévues à
l'article 45.
Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de cinquante
jours, les dispositions du projet peuvent être mises en oeuvre par
ordonnance.
Les délais prévus au présent article sont suspendus
lorsque le Parlement n'est pas en session et, pour chaque assemblée, au
cours des semaines où elle a décidé de ne pas tenir
séance, conformément au deuxième alinéa de
l'article 28.
La Cour des comptes assiste le Parlement et le Gouvernement dans le
contrôle de l'application des lois de financement de la
sécurité sociale.
La discussion du projet de loi constitutionnelle devant le Parlement a permis
trois avancées majeures :
- les prévisions de recettes, en effet, ont été
ajoutées aux "
objectifs de dépenses
" ; il
aurait été difficile pour le Parlement, comme l'avait
indiqué le président de la commission des Affaires culturelles,
familiales et sociales d'alors, M. Bruno Bourg-Broc, de "
voter un
équilibre entre des dépenses... et des silences
" ;
- de ce qui était à l'origine une loi d'équilibre
votée chaque année, il a été décidé
de créer une nouvelle catégorie de loi, "
les
"
lois de financement, ouvrant ainsi la voie à d'éventuelles lois
de financement rectificatives ;
- enfin, il a été prévu que la Cour des comptes
assiste le Parlement dans le contrôle de
l'application
des lois de
financement. La formulation retenue, de préférence à celle
de "
mise en oeuvre
", se rapproche davantage -sans être
tout à fait identique- de celle d'un contrôle de
l'exécution, mission confiée à la Cour pour les lois de
finances.
4. Une loi organique équilibrée
La loi organique du 22 juillet 1996 a précisé le contenu des lois de financement.
a) Les prévisions de recettes par catégorie
Le
Parlement approuve les recettes de la sécurité sociale par
catégorie, à travers les "
prévisions de recettes
de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes
concourant à leur financement
" (article LO. 111-3 I 2° du
code de la sécurité sociale).
Le détail de ces catégories n'est pas donné par la loi
organique.
Depuis la première loi de financement, sept catégories de
recettes sont proposées :
-
Les
cotisations sociales effectives
comprennent tout
à la fois les cotisations effectivement prélevées sur les
différents types de revenus (salaires, revenus des entrepreneurs
individuels, revenus de remplacement,...) ainsi que les cotisations prises en
charge par l'Etat dans le cadre de sa politique de l'emploi pour alléger
les charges des entreprises et permettre l'embauche de certaines
catégories de chômeurs. Elles ne sont pas
considérées comme une contribution de l'Etat au financement des
caisses à qui ces cotisations sont dues. Les prises en charge de
cotisations par les caisses de sécurité sociale concernent les
praticiens et auxiliaires médicaux et s'ajoutent aux cotisations qu'ils
paient directement.
-
Les cotisations fictives
correspondent au cas où
l'employeur fournit directement des prestations sociales, sa contribution au
financement de ces prestations étant ainsi appelée,
conformément aux conventions de la comptabilité nationale. La
mise en évidence de ces cotisations fictives permet de faire une analyse
du financement de la sécurité sociale indépendamment de
son organisation institutionnelle. Suivant cette définition, le
financement de la protection sociale des fonctionnaires civils et militaires,
des agents titulaires de la SNCF, de la RATP et de la Banque de France
apparaît ainsi assuré tout à la fois par des cotisations
effectives et fictives.
-
Les contributions publiques
sont des participations du budget de
l'Etat à certains régimes de sécurité sociale pour
leur permettre de combler un déficit ou pour financer certaines charges
supplémentaires. Ces contributions recouvrent pour l'essentiel les
subventions d'équilibre versées à certains régimes
spéciaux, et des remboursements de prestations (allocations aux adultes
handicapés, par exemple). Elles sont prélevées sur
l'ensemble des recettes fiscales et ne constituent pas des recettes
affectées.
- Par ailleurs, certains régimes bénéficient
d'impôts ou de taxes
qui leur sont
affectés
de
façon durable.
-
Les transferts
entre régimes sont des transferts internes
à la protection sociale. Ils peuvent exister non seulement entre les
caisses de sécurité sociale mais aussi entre ces dernières
et les autres administrations et les employeurs quand ils agissent en tant que
gestionnaires d'un système de protection sociale. Ces transferts peuvent
prendre les formes suivantes :
compensations : il s'agit de dispositifs assurant une solidarité
financière totale ou partielle entre deux ou plusieurs régimes ;
prises en charge de cotisations, opérées par un
régime au profit de ses bénéficiaires (il s'agit notamment
des cotisations vieillesse des parents au foyer) ;
prises en charge par un régime de prestations versées par
un autre régime pour le compte du premier.
- Enfin,
les autres ressources
recouvrent des recettes de nature
très diverse, notamment les revenus des placements et les recours contre
tiers. Elles comprennent également les remboursements effectués
par les pays étrangers au titre des conventions internationales de
sécurité sociale, ainsi que diverses opérations de
régularisation.
b) Les objectifs de dépenses par branche
Le
Parlement approuve désormais les dépenses de la
sécurité sociale, à travers les "
objectifs de
dépenses par branche des régimes de plus de 20.000 cotisants
actifs ou retraités titulaires de droits propres
".
Ces dépenses correspondent aux opérations courantes des
régimes, effectuées en métropole et dans les DOM. Elles
recouvrent :
- les
prestations sociales
: il s'agit soit de prestations rendues
obligatoires par la législation, soit de prestations extralégales
(prestation d'action sanitaire et sociale), relevant de l'initiative de
l'organisme gestionnaire ;
- les
prestations de services sociaux
, qui visent pour l'essentiel
à abaisser le coût d'accès au système de soins de
santé : il s'agit notamment de la prise en charge partielle des
cotisations des praticiens et auxiliaires médicaux ;
- les frais de
gestion
engagés par les organismes de
sécurité sociale ;
- les
transferts
entre régimes de protection sociale ;
- les
frais financiers
et les
autres dépenses
.
Par assimilation au régime général, quatre branches ont
été retenues :
- la branche
maladie-maternité-invalidité-décès ;
- la branche accidents du travail ;
- la branche vieillesse ;
- la branche famille.
Les comptes de la sécurité sociale, traditionnellement
présentés toutes branches confondues, ont été
éclatés pour satisfaire à cette décomposition en
branches. Les règles comptables des organismes de sécurité
sociale fluctuant d'un régime à l'autre, un certain nombre de
conventions ont dû être adoptées :
- les dépenses de la
branche famille
sont pour l'essentiel
celles de la CNAF, qui retrace déjà dans ses comptes l'ensemble
des prestations légales servies par les différents organismes,
ainsi que les charges annexes supportées par les organismes du
régime général. Y sont ajoutés les frais de gestion
administrative et d'action sociale de régimes agricoles pour la partie
correspondant aux cotisations complémentaires familiales, ainsi que ceux
du régime minier ;
- la branche des
accidents du travail
rassemble, outre les
dépenses des fonds déjà existants (CNAMTS, salariés
agricoles, Mines, FCAT, FCATA, Fonds d'allocation temporaire
d'invalidité des agents des collectivités locales) les
dépenses effectuées directement par les régimes
d'employeurs, en contrepartie de cotisations dites " fictives " ;
- la définition d'une branche
maladie-maternité-invalidité-décès
pose un
problème particulier.
Le régime général et les régimes alignés sur
celui-ci rattachent les risques invalidité et décès au
risque maladie. Dans ces régimes, les prestations d'invalidité
sont servies par la branche maladie jusqu'à ce que les
bénéficiaires atteignent 60 ans. Les pensions de vieillesse se
substituent ensuite à celles-ci. Il n'en va pas de même des
régimes spéciaux les plus importants, dans lesquels une pension
d'invalidité peut continuer à être servie jusqu'au
décès de l'intéressé. Le parti retenu a
été de rattacher dans ce cas à la branche maladie les
dépenses d'invalidité afférentes à des
bénéficiaires de droits directs âgés de moins de
soixante ans.
La
branche vieillesse
rassemble les prestations d'assurance vieillesse
correspondant à des droits directs ou dérivés, les
prestations d'assurance veuvage, et les prestations d'invalidité servies
à des bénéficiaires de droits directs âgés de
plus de soixante ans, ou des bénéficiaires de droits
dérivés. Ces conventions sont identiques à celles
utilisées pour déterminer les transferts de compensation entre
régimes.
La grande nouveauté des lois de financement est de consacrer
implicitement la notion de
" branche "
pour l'ensemble des
régimes de sécurité sociale, et non pour le seul
régime général.
c) Un objectif particulier pour la branche assurance maladie : l'ONDAM
Le
Parlement fixe, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base,
l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).
L'Objectif national de dépenses de l'assurance maladie comprend :
- les dépenses de soins ambulatoires et d'hospitalisation des trois
risques maladie, maternité et accidents du travail ;
- les dépenses correspondant aux prestations en espèces des
deux risques maladie et accidents du travail (incapacité temporaire).
Outre les dépenses de gestion administrative et d'action sanitaire et
sociale et de prévention ainsi que les frais financiers, ne sont
exclues, en ce qui concerne les prestations, que les indemnités
journalières maternité et les rentes d'accidents du travail.
L'ONDAM est décliné en quatre sous-enveloppes, dont l'une (les
soins de ville) fait l'objet d'un avenant à la convention d'objectifs et
de gestion entre l'Etat et la CNAMTS.
Cette enveloppe " soins de ville " est elle-même ensuite
répartie entre les différents prescripteurs par les conventions
signées entre les caisses d'assurance maladie et les professionnels de
santé.
La déclinaison de l'ONDAM en quatre sous-enveloppes
L'ONDAM
est réparti en quatre sous-enveloppes :
- le montant des
soins de ville
;
- le montant des
dépenses sanitaires d'hospitalisation
publique
;
- le montant des
dépenses médico-sociales
;
- le montant des
dépenses sanitaires d'hospitalisation
privée.
Les ordonnances n° 96-344, 96-345 et 96-346 du 24 avril 1996 relatives
à l'organisation de la sécurité sociale, à la
maîtrise médicalisée des dépenses de soins et
à la réforme de l'hospitalisation publique et privée ont
précisé les conditions de la déclinaison de l'ONDAM.
Un avenant annuel à la convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat
et la CNAMTS détermine,
" en fonction de l'objectif annuel
d'évolution des dépenses d'assurance maladie voté par le
Parlement, l'objectif prévisionnel d'évolution des
dépenses de soins de ville (...) ainsi que les conditions et les
modalités de sa mise en oeuvre "
.
L'ordonnance n° 96-345 dispose que
" chaque année,
compte tenu de l'objectif prévisionnel d'évolution des soins de
ville, une annexe à la ou aux conventions
[entre les organismes
d'assurance maladie et les médecins]
fixe, pour les médecins
généralistes d'une part, pour les médecins
spécialistes d'autre part, l'objectif prévisionnel
d'évolution des dépenses d'honoraires, de
rémunérations, de frais accessoires et de prescription "
.
L'ordonnance n° 96-346 portant réforme de l'hospitalisation
publique et privée prévoit que
" chaque année, les
ministres chargés de la santé, de la sécurité
sociale, du budget et de l'économie déterminent, en fonction de
l'objectif national d'évaluation des dépenses d'assurance maladie
voté par le Parlement, l'objectif prévisionnel d'évolution
des dépenses des établissements (...) et, corrélativement,
le montant total annuel des dépenses hospitalières prises en
compte pour le calcul de la dotation globale et des tarifs de prestations des
établissements susvisés ".
Un mécanisme de même nature est prévu pour les cliniques
privées.
Enfin, l'article 33 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 encadre l'évolution des dépenses du secteur
médico-social.
d) Les plafonds d'avances de trésorerie
Enfin,
le Parlement fixe, pour chacun des régimes obligatoires de base comptant
plus de 20.000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits
propres ou des organismes ayant pour mission de concourir à leur
financement qui peuvent légalement recourir à des ressources non
permanentes, "
les limites dans lesquelles ses besoins de
trésorerie peuvent être couverts par de telles
ressources
".
Cette formulation complexe recouvre la réalité suivante :
chaque année, la loi de financement fixe le découvert maximum des
régimes dont la situation justifie le recours à l'emprunt ;
depuis la première loi de financement, le régime
général, le régime des exploitants agricoles, la caisse
autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, le Fonds
spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels
de l'Etat sont concernés. La Caisse nationale de retraite des agents des
collectivités locales (CNRACL) s'est ajoutée à cette liste
depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour
1998.
e) Une information abondante
L'information soumise au Parlement est abondante, comme en témoignent les annexes prévues par la loi organique.
Les
annexes de la loi de financement définies
par l'article
LO. 111-4 - II du code de la sécurité sociale
L'annexe
a)
présente les données de la situation sanitaire et
sociale de la population ;
L'annexe
b)
rend compte de la mise en oeuvre des dispositions des
lois de financement de la sécurité sociale de l'exercice
précédent ;
L'annexe
c)
décrit l'évolution prévisible,
pour l'année en cours et l'année suivante, des recettes et des
dépenses des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou
retraités titulaires de droits propres et, le cas échéant,
de leurs besoins de trésorerie en cours d'exercice, ainsi que les
perspectives d'évolution de ces recettes et de ces dépenses pour
les deux années postérieures ;
L'annexe
d)
décrit, pour l'année en cours et
l'année suivante, par catégorie, les ressources des
régimes obligatoires de base de sécurité sociale ;
L'annexe
e)
fait apparaître, pour l'année en cours,
les compensations financières entre régimes ;
L'annexe
f)
décrit, pour l'année en cours et
l'année suivante, les comptes prévisionnels des organismes ayant
pour mission de concourir au financement de ces mêmes régimes (FSV
- CADES) et, s'il y a lieu, à l'apurement de la dette ;
Enfin, l'annexe
g)
retrace, pour les trois années
précédentes, d'une part, les comptes de la protection sociale qui
regroupent l'ensemble des prestations sociales et les moyens de leur
financement en mettant en évidence leur place dans les équilibres
généraux économiques et financiers, d'autre part, l'effort
social de la Nation qui regroupe les prestations sociales et les charges qui en
découlent pour l'Etat, les collectivités locales, les employeurs,
les assurés et les contribuables.
Certaines de ces annexes (Effort social de la Nation) existaient
déjà, en tant qu'annexes aux projets de loi de finances ou
étaient prévues par la loi du 25 juillet 1994.
Ces annexes font partie intégrante du projet de loi de financement de
même que les annexes prévues par l'ordonnance portant loi
organique du 2 janvier 1959 font partie du projet de loi de finances.
En conséquence, le dépôt de la dernière annexe fait
courir le délai prévu par la Constitution à l'article
47-1.
f) Un domaine protégé
Si
l'article 40 de la Constitution, relatif à l'irrecevabilité
financière, s'applique dans des conditions de droit commun aux
amendements déposés sur les projets de loi de
financement
11(
*
)
, en revanche, le contenu
même des lois de financement est protégé, de manière
stricte, par le III de l'article LO 111-3 du code de la sécurité
sociale. Seules des lois de financement peuvent modifier les dispositions
relatives aux prévisions de recettes, aux objectifs de dépenses,
à l'ONDAM et aux plafonds d'avances de trésorerie.
Les dispositions introduites par voie d'amendement ne sont recevables que si
elles ont un effet direct sur l'équilibre financier des régimes
obligatoires de base ou si elles améliorent le contrôle sur
l'application des lois de financement de la sécurité sociale.
Les règlements des deux assemblées ont adopté des
dispositions similaires, mais qui ne se rejoignent pas tout à fait, pour
assurer la protection du domaine " réservé " des lois
de financement.
Les
règles de recevabilité posées
par les règlements
des deux assemblées
Art. L. 121-2 du règlement de l'Assemblée nationale
(introduit
par la résolution n° 582 du 3 octobre 1996)
Les amendements contraires aux dispositions du III de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale sont déclarés irrecevables dans les conditions prévues aux articles 92 et 98 (NB - règles d'irrecevabilité financière) .
Art.
49 du règlement du Sénat
Alinéas 7 et 8
(introduit
par la résolution n° 504 (1995-1996) du 3 octobre 1996)
7. - L'irrecevabilité des amendements
tirée
de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale peut
être soulevée par le Gouvernement, la commission des affaires
sociales, la commission saisie au fond ou tout sénateur.
L'irrecevabilité est admise de droit, sans qu'il y ait lieu à
débat, lorsqu'elle est affirmée par la commission des affaires
sociales. L'amendement est mis en discussion lorsque la commission des affaires
sociales ne reconnaît pas l'irrecevabilité.
8. - Lorsque la commission des affaires sociales n'est pas en
état de faire connaître immédiatement ses conclusions sur
l'irrecevabilité de l'amendement, l'article en discussion est
réservé. Quand la commission estime qu'il y a doute, son
représentant peut demander à entendre les explications du
Gouvernement et de l'auteur de l'amendement qui dispose de la parole pendant
cinq minutes. Si le représentant de la commission estime que le doute
subsiste, l'amendement et l'article correspondant sont réservés
et renvoyés à la commission. Dans les cas prévus au
présent alinéa, la commission doit faire connaître ses
conclusions sur la recevabilité avant la fin du débat, autrement,
l'irrecevabilité sera admise tacitement.
L'irrecevabilité s'applique à la fois :
- aux amendements sur les projets de loi de financement, afin
d'éviter les " cavaliers " sociaux ;
- aux dispositions des projets et propositions de loi qui
empiéteraient sur le domaine " exclusif " des lois de
financement.
A l'Assemblée nationale, l'irrecevabilité est examinée par
le bureau de la commission des finances, tandis que le Sénat
prévoit une procédure spécifique, laissant à la
commission des Affaires sociales le soin de se prononcer.
La méconnaissance de l'article LO. 111-3 du code de la
sécurité sociale est naturellement un motif possible de recours
devant le Conseil constitutionnel. Ce dernier
12(
*
)
a considéré que les dispositions de la
loi organique avaient pour objet "
de faire obstacle à ce que
les conditions générales de l'équilibre financier, telles
qu'elles résultent de la loi de financement de la sécurité
sociale de l'année, modifiée le cas échéant, par
des lois de financement rectificatives ne soient compromises par des charges
nouvelles résultant de l'application de textes législatifs ou
réglementaires dont les incidences sur les conditions de cet
équilibre, dans le cadre de l'année, n'auraient pu, au
préalable, être appréciées et prises en compte par
une des lois de financement susmentionnées ".
Le législateur peut modifier ainsi l'affectation des recettes de la
sécurité sociale, à condition que les dispositions
décidées n'entrent en vigueur qu'au cours de l'exercice
suivant
13(
*
)
.
B. UN ACQUIS DÉSORMAIS UNANIMEMENT RECONNU
1. Chaque année, un rendez-vous majeur
a) Un impact réel
Lors de
l'institution des lois de financement, la question de leur
" normativité "
s'est posée, qualifiée
par les parlementaires, puis par la doctrine, de
" différée "
,
" suspendue "
,
" indirecte "
, ou encore
" sui generis "
.
"
La loi de financement n'est pas véritablement une loi
budgétaire
", comme le note M. Loïc Philip
14(
*
)
, puisque le budget est "
un acte de
prévision et d'autorisation portant sur un ensemble de dépenses
et de recettes et qui a pour effet de limiter les pouvoirs des autorités
chargées de son exécution
".
En loi de finances, comme en loi de financement, les recettes restent des
prévisions. Elles dépendent étroitement de la
réalisation des mêmes hypothèses macro-économiques :
croissance du PIB et de la masse salariale, évolution de l'inflation,
etc.
Il reste toutefois une différence substantielle. Il appartient à
la loi de finances d'autoriser chaque année la perception des
impôts et taxes et cette autorisation vaut également pour les
prélèvements affectés à la sécurité
sociale.
D'une certaine façon, les prévisions de recettes des lois de
financement n'ont d'intérêt que si un préalable juridique
est acquis, le vote de l'article premier de la loi de finances.
Les dépenses sociales apparaissent, au premier abord,
éloignées des dépenses du budget de l'Etat.
Les dépenses de santé résultent d'un état de la
réglementation (taux de remboursement, tarif de responsabilité)
et du comportement des assurés et des prescripteurs.
Les dépenses famille et vieillesse sont la conséquence d'une
articulation entre, d'une part, la législation et la
réglementation en vigueur et, d'autre part, l'évolution
démographique.
Les régimes de sécurité sociale ne peuvent cesser leurs
paiements ou leurs remboursements faute de crédits disponibles. De fait,
les montants de dépenses par branche inscrits dans le projet de loi de
financement de la sécurité sociale restent des objectifs et ne
sont pas limitatifs, à la différence des crédits
budgétaires dont la loi de finances fixe le plafond.
Les autorisations budgétaires sont-elles pourtant dans la pratique d'une
nature essentiellement différente des objectifs de dépenses
figurant en loi de financement ? De nombreuses dépenses
budgétaires sont davantage constatées qu'autorisées :
charges obligatoires de la dette, remboursement des allégements de
charges sociales, traitements des fonctionnaires, etc. Certaines de ces
dépenses ont explicitement un caractère évaluatif.
La gestion des autorisations budgétaires laisse en outre une large place
à l'initiative réglementaire sous la forme de décrets
d'avance, d'annulation ou de report de crédits.
L'ONDAM et les plafonds d'avances de trésorerie ont un effet juridique
incontestable.
L'ONDAM est opposable -une fois décliné- aux prescripteurs et
s'impose à l'exécutif (dépenses hospitalières).
Les plafonds d'avances de trésorerie sont extrêmement
contraignants. La preuve -peut-être paradoxale- en est qu'un dispositif
d'urgence a dû être prévu par la loi organique. Il autorise
en cas d'urgence une majoration de ces plafonds par décret pris en
Conseil des ministres, après avis en Conseil d'Etat (article
LO. 111-5 du code de la sécurité sociale). Le Gouvernement
doit ensuite obligatoirement prévoir la ratification de ce décret
dans le plus prochain projet de loi de financement.
Au-delà de ce débat théorique, il reste que l'apport
essentiel des lois de financement est de constituer un rendez-vous annuel
consacré aux enjeux financiers de la protection sociale.
b) Un rendez-vous majeur
Avant la réforme de 1996, il n'existait aucune contrainte de redressement des comptes de la sécurité sociale. Le Parlement adoptait, de manière parcellaire, certaines dispositions des plans de redressement qui s'étaient succédé depuis le second choc pétrolier.
Les
plans de redressement de la sécurité
sociale
1975-1993
1975 |
Plan Durafour |
1976 |
Plan Barre-Beullac |
1977-1978 |
Plan Veil |
1979 |
Plan Barrot |
1981 |
Plan Questiaux |
1982-1983 |
Plan Bérégovoy |
1985 |
Plan Dufoix |
1986 |
Plan Séguin |
1988 |
Plan Evin |
1991 |
Plan Bianco |
1993 |
Plan Veil |
Les lois
de financement obligent le Gouvernement, dans le contexte difficile que
connaissent les finances sociales, à présenter chaque
année devant le Parlement un plan de financement, c'est-à-dire
les mesures ayant un effet sur les comptes sociaux dans un texte unique, devant
la représentation nationale.
Les commissions des comptes de la sécurité sociale doivent se
tenir dans les délais impartis (entre le 15 avril et le 15 juin pour
celle de printemps, au cours du mois de septembre pour celle d'automne).
Ces lois de financement, reposant sur des données votées, peuvent
ensuite faire l'objet d'un contrôle. La Cour des comptes consacre son
rapport sur la sécurité sociale à l'application de la loi,
ce qui permet au Parlement de disposer de sources incontestables. L'application
de la loi de financement pour 1997 a montré que des objectifs de
dépenses -sans être limitatifs- pouvaient être tenus.
Comme le soulignait M. Alain Juppé devant le Congrès du
Parlement, le 19 février 1996 :
"
Permettre au Parlement de se prononcer chaque année sur le
financement de la sécurité sociale est à la fois une
nécessité démocratique et la condition de l'instauration
d'un équilibre durable de notre système de protection sociale...
Pour construire ce nouvel équilibre, il est essentiel que le Parlement
puisse voter chaque année une loi de financement de la
sécurité sociale
".
Les trois premières lois de financement de la sécurité
sociale restent ainsi marquées par leur caractère de " plan
de redressement ", ajusté chaque année.
L'effet des lois de financement contribuera peut-être un jour à
assurer cet "
équilibre durable "
qu'appelait de ses
voeux M. Alain Juppé.
La " vitesse de croisière " sera alors atteinte, ce qui aura
pour effet l'apparition de nouvelles problématiques.
2. Un large consensus
Les
débats parlementaires sur la révision constitutionnelle et la loi
organique montrent que l'opposition d'alors fondait son vote négatif sur
l'ensemble du plan Juppé. Toutes les forces politiques se sont
déclarées en accord avec le principe général
d'étendre les pouvoirs du Parlement en matière sociale.
La contestation des lois de financement de la sécurité sociale
s'articulait en 1996 autour de trois arguments :
- les lois de financement ne peuvent pas être des lois de finances
ou des budgets sociaux ;
- le Parlement risque de " servir d'alibi " à la
politique gouvernementale en matière de sécurité
sociale ;
- le risque d'étatisation de la sécurité sociale est
consacré par les lois de financement.
Le balancement circonspect du texte de la motion présentée par
Charles Metzinger et les membres du groupe socialiste du Sénat, tendant
à opposer la question préalable sur le projet de loi organique
(2
ème
lecture, 19 juin 1996) est tout à fait
intéressant :
" Les auteurs de cette motion, bien que favorables à l'extension
des pouvoirs du Parlement en matière de sécurité sociale,
estiment qu'il n'y a pas lieu de délibérer de ce texte notamment
parce qu'il s'inscrit dans le cadre d'une réforme générale
de la sécurité sociale qu'ils combattent et parce qu'il est la
traduction de la révision constitutionnelle du 22 février 1996
à laquelle ils se sont opposés. "
15(
*
)
Les débats sur le dernier projet de loi de financement de la
sécurité sociale montrent toutefois, à l'évidence,
qu'un consensus s'est désormais formé sur l'utilité des
lois de financement.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
déclarait ainsi, le 27 octobre 1998, devant l'Assemblée
nationale
16(
*
)
:
" Nous avons
besoin d'un vrai débat. Il est donc légitime que l'avenir de la
protection sociale fasse l'objet d'un débat démocratique, il le
mérite "
.
Les oppositions les plus déterminées aux lois de financement se
sont tues. Ainsi, la confédération syndicale Force
Ouvrière non seulement ne demande pas la suppression de cet instrument,
mais propose un renforcement de l'intervention du Parlement, par la tenue d'un
débat d'orientation au printemps.
17(
*
)
Les auditions menées par le groupe de travail rendent compte de
l'assentiment des acteurs de la loi de financement. Responsables des caisses,
techniciens, membres de la Cour des comptes, tous s'accordent à
reconnaître que les lois de financement constituent un
" progrès indubitable "
(M. Bernard Caron) ou
" considérable "
(M. Raoul Briet) et à
souligner les
" effets positifs de ces lois sur la conduite de l'action
publique "
(M. Jean-Paul Probst). Les lois de financement
permettent un débat politique, national et annuel dont
" la
qualité s'améliore "
(M. Jean-Marie Spaeth).
3. Trois écueils évités
Les lois
de financement ont su éviter trois écueils qui les
menaçaient pourtant directement.
Le premier d'entre eux concernait
" le risque d'étatisation
de la sécurité sociale "
et un recul
démocratique.
En fait, les partenaires sociaux,
" la démocratie
sociale ",
se trouvent renforcés par les conventions
d'objectifs de gestion, qui consacrent le passage d'une gestion sous tutelle
à une gestion partenariale,
" grâce à laquelle les
partenaires sociaux disposent de responsabilités et d'une marge de
manoeuvre accrues "
18(
*
)
.
Le renforcement de la démocratie politique permet ainsi de mieux
refonder la démocratie sociale.
Le second de ces écueils aurait pu être celui d'un conflit des
lois de financement et des lois de finances.
Fondées sur les mêmes hypothèses macro-économiques,
préparées très en amont selon une coordination très
satisfaisante entre direction de la sécurité sociale et direction
du budget et de la prévision, ces lois ne présentent pas de
contradiction majeure. Il est ainsi particulièrement essentiel que ces
deux lois de finances publiques soient examinées par le Parlement
à l'automne.
Le troisième de ces écueils, concernant directement les
parlementaires, aurait pu tenir à un calendrier impossible, tenant
à la discussion simultanée des deux projets de loi.
Les échéances fixées par la loi organique
Articles
LO. 111-6 et LO. 111-7 du code de la sécurité sociale.
LO. 111-6
- Le projet de loi de financement de la sécurité
sociale de l'année, y compris le rapport et les annexes
mentionnés aux I et II de l'article LO. 111-4, est déposé
sur le bureau de l'Assemblée nationale au plus tard le 15 octobre ou, si
cette date est un jour férié, le premier jour ouvrable qui suit.
LO. 111-7 -
L'Assemblée nationale doit se prononcer, en
première lecture, dans le délai de vingt jours après le
dépôt d'un projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Le Sénat doit se prononcer, en première lecture, dans un
délai de quinze jours après avoir été saisi.
Si l'Assemblée nationale n'a pas émis un vote en première
lecture sur l'ensemble du projet de loi de financement de la
sécurité sociale dans le délai prévu à
l'article 47-1 de la Constitution, le Gouvernement saisit le Sénat du
texte qu'il a initialement présenté, modifié, le cas
échéant, par les amendements votés par l'Assemblée
nationale et acceptés par lui. Le Sénat doit alors se prononcer
dans un délai de quinze jours après avoir été saisi.
Si le Sénat n'a pas émis un vote en première lecture sur
l'ensemble du projet dans le délai imparti, le Gouvernement saisit
à nouveau l'Assemblée nationale du texte soumis au Sénat,
modifié, le cas échéant, par les amendements votés
par le Sénat et acceptés par lui.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est
ensuite examiné selon la procédure d'urgence dans les conditions
prévues à l'article 45 de la Constitution.
En donnant aux commissions des Affaires sociales des deux assemblées la
compétence de fond, tout en laissant aux commissions des Finances le
soin de rapporter pour avis, la discussion des lois de financement a pu
toujours se dérouler dans les délais prescrits par la
Constitution et par la loi organique, sans que les débats sur les lois
de finances en aient pâti.
Les commissions parlementaires et les lois de financement
La
commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale a divisé, depuis la discussion du projet de
loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, son rapport
en quatre tomes :
- Recettes et équilibre général (M. Alfred Recours) ;
- Assurance maladie et accidents du travail (M. Claude Evin) ;
- Assurance vieillesse (M. Denis Jacquat) ;
- Famille (Mme Dominique Gillot).
La commission des Affaires sociales du Sénat a retenu une organisation
qui n'a pas été modifiée depuis le premier projet de
loi :
- Equilibres financiers généraux et assurance maladie (M. Charles
Descours) ;
- Famille (M. Jacques Machet) ;
- Assurance vieillesse (M. Alain Vasselle) ;
- Examen des articles (M. Charles Descours).
Sans aller jusqu'à l'organisation retenue par les commissions des
finances pour l'examen du budget, force est de noter une similitude entre le
rapporteur " équilibre général " de la loi de
financement et le rapporteur général des lois de finances.
Calendrier parlementaire des lois de financement de la sécurité sociale
Dispositions constitutionnelles ou organiques |
Projet de loi de financement pour 1997 |
Projet de loi de financement pour 1998 |
Projet de loi de financement pour 1999 |
•
Dépôt du projet de loi, y compris le rapport et les annexes, au
plus tard le 15 octobre ou, si cette date est un jour férié,
le premier jour ouvrable qui suit
|
Dépôt du projet de loi le mercredi 9 octobre 1996
(projet mis en distribution le jeudi 10 octobre 1996)
|
Dépôt le mercredi 8 octobre 1997 (projet mis en
distribution le mercredi 15 octobre 1997)
|
Dépôt le mercredi 7 octobre 1998
|
• L'Assemblée nationale doit se prononcer en 1 ère lecture dans le délai de 20 jours après le dépôt |
Discussion à l'Assemblée nationale les 29, 30 et
31 octobre 1996
|
Discussion à l'Assemblée nationale les 27, 28,
29, 30
et 31 octobre 1997
|
Discussion à l'Assemblée nationale les 27, 28,
29 et
30 octobre 1998
|
• Le Sénat doit se prononcer en 1 ère lecture dans un délai de 15 jours après avoir été saisi |
Dépôt Sénat rattaché à la
séance du 5 novembre 1996 (projet mis en distribution le vendredi 8
novembre 1996)
|
Dépôt Sénat rattaché à la
séance du mercredi 5 novembre 1997
|
Dépôt Sénat rattaché à la
séance du mercredi 4 novembre 1998
|
• Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de 50 jours, les dispositions du projet peuvent être mises en oeuvre par ordonnance |
Lecture
des conclusions de la CMP le 28 novembre 1996 dans les deux assemblées
|
Nouvelle
lecture à l'Assemblée nationale le mardi 25 novembre 1997
|
Nouvelle
lecture à l'Assemblée nationale le 26 novembre 1998 et le
1
er
décembre 1998
|
Au Sénat, cette discussion a lieu avant l'examen en séance publique du projet de loi de finances ; à l'Assemblée nationale, la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est interrompue pour faire place à la discussion de la loi de financement. De fait, les délais dont dispose l'Assemblée nationale par rapport au Sénat pour débattre du budget (quarante jours contre quinze jours) permettent une telle interruption.
*
*
*
En trois
ans, la discussion des lois de financement de la sécurité sociale
est devenue un rendez-vous important des acteurs de la protection sociale et un
moment fort de la vie parlementaire. La nécessité de ce
débat et son cadre sont désormais acceptés par tous.
A ce titre, la réforme constitutionnelle et organique de 1996 se
révèle être un plein succès. Mais elle est
également un bouleversement dont on ne mesure probablement pas encore
toutes les implications.
Des habitudes anciennes demeurent ; les procédures et les
institutions ne se sont pas encore pleinement adaptées à ce
nouveau contexte.
L'instrument lui-même, tel qu'il a été
élaboré par la loi organique, et " testé "
pendant trois ans, est perfectible.
II. LES LOIS DE FINANCEMENT : UN INSTRUMENT PERFECTIBLE
A. UN LIEN DISTENDU AVEC LES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE
Le législateur organique de 1996 a été soucieux de ne pas réduire la loi de financement à une simple juxtaposition de chiffres, en prévoyant l'adoption d'un rapport annexé, amendable par les parlementaires.
1. Le rapport annexé ne remplit pas sa fonction
a) Un texte d'une qualité décevante
Le
premier alinéa du I de l'article LO. 111-3 du code de la
sécurité sociale constitue, en quelque sorte, le " volet
qualitatif " des lois de financement.
" Chaque année, la loi de financement de la
sécurité sociale : 1° Approuve les orientations de
la politique de santé et de sécurité sociale et les
objectifs qui déterminent les conditions générales de
l'équilibre financier de la sécurité sociale "
.
Le I de l'article LO. 111-4 précise que
" le projet de
loi de financement de la sécurité sociale est accompagné
d'un rapport présentant les orientations de la politique de santé
et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent
les conditions générales de l'équilibre financier de la
sécurité sociale "
.
Il résulte implicitement de ces deux articles de la loi organique que le
rapport fait l'objet d'un vote par le Parlement, qui dès lors dispose,
en bonne logique, d'un pouvoir d'amendement.
Il est à noter que, sur ce point, la conception de l'Assemblée
nationale a prévalu, le Sénat ayant souhaité, lors de la
première lecture de la loi organique, que le rapport reste une annexe,
à l'image du rapport annexé au projet de loi de finances (article
32 de l'ordonnance portant loi organique du 2 janvier 1959).
Le mécanisme d'un rapport annexé, amendable par les
parlementaires, n'est pas une innovation des lois de financement. La loi du
29 juillet 1982 portant réforme de la planification a ainsi
prévu que la première loi de planification comporterait
l'approbation d'un rapport préparé par le Gouvernement et
indiquant les domaines dans lesquels il est recommandé que s'engagent
des négociations entre partenaires sociaux et économiques en
fonction des objectifs définis.
La loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 a
également permis l'approbation d'un rapport figurant en annexe. Le
Conseil d'Etat a jugé, dans sa décision
" Confédération nationale des groupes autonomes de
l'enseignement " du 2 mai 1990, que ce rapport avait une valeur
législative.
Mais, pour la première fois, le mécanisme d'un rapport
annexé, amendé par les parlementaires, devenait annuel.
M. André Fanton, rapporteur de la commission spéciale sur le
projet de loi organique, justifiait ainsi un tel rapport
19(
*
)
:
" En effet, si l'on supprime le
débat sur la politique de santé, on en revient à ce que
nous n'avons pas voulu, à ce que le Parlement n'a pas voulu, y compris
dans la réforme de la Constitution, c'est-à-dire que le
débat sur la sécurité sociale soit uniquement un
débat de comptables. Nous avons beaucoup insisté pour qu'il y ait
un débat sur la politique de santé, lequel débat, pour
avoir une valeur autre que littéraire, devrait avoir des
conséquences juridiques. Nous avons donc proposé un débat
complet, assorti du droit d'amendement sur un rapport concernant la politique
de santé, à l'image de ce qui est fait pour les lois de
planification. "
Dès octobre 1996, à l'occasion de la discussion de la
première loi de financement, M. Bruno Bourg-Broc, rapporteur au nom de
la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale, se montrait critique :
" Le document annexé au présent projet par le
Gouvernement est assez décevant. Il se présente davantage comme
un " exposé des motifs ", voire comme une note technique que
comme un rapport devant présenter clairement des
" orientations ". On y trouve actuellement mêlées des
données sanitaires, économiques, démographiques et
sociales, qui trouveraient mieux leur place dans un exposé des motifs,
voire dans une annexe que dans un rapport soumis au débat et susceptible
d'être amendé. Devant faire corps avec le texte de loi, le
présent rapport doit être, en quelque sorte, l'explication des
données chiffrées du projet de loi, qui en constituent la
traduction financière "
20(
*
)
.
M. Georges Sarre, député de Paris, expliquait, le 25 juin 1997,
que ce rapport était
" imprécis "
et
" imprécatoire "
21(
*
)
.
Cette première impression est confirmée par la lecture
a
posteriori
des trois premiers rapports annexés.
Le rapport annexé est à la fois :
- un exposé des motifs des dispositions du projet de loi ;
- un rappel des priorités de santé publique ;
- une succession de déclarations d'intention ;
- une expression d'engagements de la part du Gouvernement.
L'Assemblée nationale consacre pourtant une longue discussion aux
amendements sur le rapport annexé ; un nombre non
négligeable de ces amendements est d'ailleurs adopté
22(
*
)
.
Ainsi, le rapport annexé finit par regrouper les dispositions qui ne
peuvent ou que le Gouvernement ne souhaite pas voir figurer dans le corps
même du projet de loi : annonce de projets de loi ultérieurs
assortis d'engagement de délais quant à leur dépôt
(
cf. encadré ci-dessous
), annonce d'abrogation de loi
votée (
idem
) ou encore, engagement d'étudier telle ou
telle mesure souvent d'ordre réglementaire.
Il joue ainsi le rôle d'un exutoire pour des dispositions qui,
dépourvues de portée normative, permettent au Gouvernement,
souvent à bon compte, de donner des apaisements au Parlement.
Le rapport annexé à la loi de financement pour 1997,
adopté par l'ancienne majorité parlementaire, constitue un cas
particulier. Les engagements qu'il comportait ne pouvaient lier en effet le
nouveau Gouvernement.
Mais les rapports 1998 et 1999 montrent que ces engagements ne sont pas
toujours tenus :
Les " engagements " des rapports annexés : morceaux choisis
Rapport
annexé à la loi de financement pour 1998
" Le Gouvernement s'engage à accélérer la
révision de la nomenclature "
" Le Gouvernement définira un cadre qui permette au dispositif de
la formation médicale continue de fonctionner correctement en
répondant aux impératifs de qualité, d'adéquation,
de transparence qui, seuls, peuvent garantir son efficacité et son
adéquation aux objectifs généraux de la politique de
santé "
Rapport annexé à la loi de financement pour 1999
La réforme des cotisations patronales :
" Le Gouvernement
souhaite engager une telle réforme. (...) La concertation avec les
organisations d'employeurs et de salariés sera poursuivie en vue de
fixer les orientations et les modalités précises avec l'objectif
d'aboutir à un projet de loi
au
premier semestre
1999
"
La couverture maladie universelle :
" Le Gouvernement
déposera un projet de loi
au cours de l'automne 1998
"
" Le Gouvernement s'engage en 1999 à définir une
véritable politique de gériatrie et de gérontologie
s'appuyant sur la formation de l'ensemble des personnels de santé et sur
la coordination des acteurs intervenant dans le soin des personnes
âgées ".
Les infections nosocomiales
:
" Le Gouvernement s'engage
à présenter au Parlement un programme de lutte contre les
infections nosocomiales dès le début de l'année
1999 "
L'épargne retraite :
" La loi n° 97-277 du 25
mars 1997 créant les plans d'épargne retraite ne constitue pas
une bonne solution pour l'avenir de notre système de retraite. (...) En
conséquence, le Gouvernement proposera au Parlement en 1999,
dès qu'un support législatif le permettra
, l'abrogation de
cette loi. "
Les engagements figurant dans le rapport annexé ne valent ni plus ni
moins qu'une déclaration consignée au Journal officiel des
débats parlementaires.
Certains engagements sont rapidement périmés. Ainsi, l'engagement
de déposer le projet de loi portant création d'une couverture
maladie universelle "
au cours de l'automne
" pouvait
être rangé au nombre des engagements non tenus dès avant la
promulgation de la loi (23 décembre 1998) ; le projet n'a, du
reste, été déposé que le 3 mars 1999.
Il est fâcheux que l'acte législatif soit ainsi
dévalorisé. Car, si les engagements non tenus sont légion
et les lois privées d'application nombreuses, il est rare que la cause
soit entendue avant même la publication de la loi au Journal officiel.
Dès lors, il n'est guère étonnant que la discussion du
rapport annexé ait montré, dès le troisième
exercice, des signes d'essoufflement.
La
discussion du rapport annexé : un exercice fastidieux
(le cas de
l'Assemblée nationale)
|
PLFSS 1997 |
PLFSS 1998 |
PLFSS 1999 |
Débat général sur le rapport annexé en première lecture (en pages de J.O.) |
6 |
2,5 |
0,5 |
Nombre d'amendements au rapport annexé déposés en première lecture |
|
|
|
Discussion des amendements au rapport annexé (en pages de J.O.) |
|
|
|
La
discussion du rapport annexé au Sénat est beaucoup plus rapide,
en raison notamment, en 1997 et en 1998, de l'adoption d'un amendement unique
de la commission des Affaires sociales, procédant à la
réécriture du texte proposé.
La nature du rapport annexé a conduit l'Assemblée nationale
à adapter sa procédure d'examen.
Dès lors que son contenu s'apparente à une forme d'exposé
des motifs du projet de loi, le débat général dont le
rapport faisait l'objet est apparu redondant par rapport à la discussion
générale du projet de loi lui-même. Seuls deux orateurs se
sont exprimés avant l'examen des amendements au rapport annexé
lors de la discussion du projet de loi de financement pour 1999.
De même, il est apparu nécessaire de réserver la discussion
et le vote du rapport (annexé traditionnellement à l'article
premier des projets de loi de financement) jusqu'à la fin de l'examen
des articles.
Cette démarche n'est pas contestable dès lors qu'il serait
absurde de voter en bloc les exposés des motifs avant d'aborder dans le
détail les articles correspondants.
Il en résulte toutefois -et cette évolution se poursuivra
probablement- un désintérêt progressif pour une discussion
renvoyée à la fin des débats, à une heure souvent
tardive où chacun a hâte d'en finir
23(
*
)
.
En outre, cet ordre de discussion souligne, s'il en était besoin, que
le rapport annexé ne comporte pas les grandes orientations susceptibles
d'éclairer la discussion des articles mais résume et commente ces
derniers.
On observera enfin que ce rapport annexé, intitulé initialement
" rapport du Gouvernement ", est désormais un rapport sans
auteur depuis la discussion par le Sénat en première lecture du
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
1998.
b) Une absence de portée normative
Une
décision récente du Conseil d'Etat, l'arrêt
" Rouquette " du 5 mars 1999, est venue jeter à bas ce
qu'il restait de l'édifice ou du moins devrait conduire les
parlementaires à douter du bien-fondé des amendements qu'ils
souhaitent apporter au rapport annexé.
Le Conseil a en effet considéré que "
les orientations et
les objectifs présentés par le rapport accompagnant la loi de
financement de la sécurité sociale ne sont pas revêtus de
la portée normative qui s'attache aux dispositions de
celle-ci "
.
Les requérants soutenaient que le décret du
26 février 1998 relatif aux allocations familiales
méconnaissait le rapport annexé de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998. En effet, le rapport mentionnait
implicitement un revenu net supérieur à 25.000 francs, alors
que le décret fixe comme plafond un revenu net mensuel de 18.000 francs.
La décision de la Haute juridiction administrative n'allait pas de soi.
On en voudra pour preuve la lecture des conclusions du commissaire du
Gouvernement.
En effet, ce dernier avait affirmé la " valeur
législative " incontestable du rapport annexé, publié
au Journal officiel à la suite de la loi de financement. Il proposait
que
" l'appréciation de la partie normative des rapports
annexés aux lois de financement "
soit
" avant tout une
affaire d'espèce "
. Il indiquait qu'aucune disposition de la
Constitution ne conduisait à considérer que le caractère
normatif est défini par le vote de dispositions par article.
Faisant observer que le rapport était allé au-delà de ce
que prévoyait la loi organique et contenait des dispositions
extrêmement précises, le commissaire du Gouvernement
ajoutait :
" Il ne nous semble pas sain que le Gouvernement puisse
faire figurer des dispositions extrêmement précises dans un
rapport soumis à l'approbation du Parlement, puis soutenir qu'elles
n'ont pas pour effet de le lier juridiquement "
.
Le Conseil d'Etat, qui n'a pas suivi sur ce point le commissaire du
Gouvernement, a consacré l'absence de portée normative de
dispositions longuement débattues et amendées par le
Parlement.
Il reste qu'il est ainsi paradoxal que la commission mixte paritaire statuant
sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de
la sécurité sociale pour 1999 ait échoué sur le
rapport annexé à l'article premier, c'est-à-dire sur un
dispositif sans valeur normative.
Cette situation n'avait pas échappé au rapporteur de la
commission mixte pour le Sénat qui avait demandé, sans
succès, la réserve du rapport annexé selon la
procédure qui avait été suivie en première lecture
tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat.
En quelque sorte, plus un dispositif normatif sera consensuel, plus le rapport
annexé risquera, en contrepartie, d'être " durci " par
quelque engagement ou déclarations emblématiques, à usage
interne de la majorité gouvernementale, rendant impossible un accord en
commission mixte paritaire. Cette situation, jointe à l'urgence qui
s'applique de droit aux projets de loi de financement, est préoccupante
pour le bon fonctionnement du bicamérisme.
2. Les orientations de santé publique n'ont pas trouvé leur place dans les lois de financement
Les ordonnances de 1996 ont créé en matière de santé publique un nouvel organisme, la conférence nationale de santé, qui s'ajoute au Haut comité de la santé publique. Une " chaîne vertueuse ", où chacun trouvait sa place, était ainsi prévue : le Haut comité, " instance d'experts ", élabore un rapport annuel, transmis à la conférence nationale de santé et au Parlement. La conférence nationale de santé, préparée par des conférences régionales, regroupe les " professionnels " et retient des orientations de santé publique. Ces orientations se retrouvent ensuite dans le contenu des lois de financement. Ainsi, la décision politique est préparée très en amont.
Composition du Haut comité de la santé
publique
et de la conférence nationale de santé
Le
Haut comité de la santé publique
, créé par
le décret du 3 décembre 1991, est placé auprès du
ministre chargé de la santé. Il est composé de 6 membres
de droit et de 20 membres nommés par arrêté en raison
de leur compétence dans le domaine de la santé.
Les six membres de droit sont :
- le directeur général de la santé ;
- le directeur des Hôpitaux ;
- le directeur de la Sécurité sociale ;
- le directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs
salariés ;
- le directeur général de l'Institut national de la
santé et de la recherche médicale ;
- le directeur de l'Ecole nationale de santé publique.
La
conférence nationale de santé
est composée de
soixante-dix-huit membres nommés par arrêté du ministre
chargé de la santé. Elle réunit :
- Trente-huit membres représentant les professionnels, institutions
et établissements de santé, dont dix-neuf représentants
des professionnels de santé exerçant à titre
libéral, désignés sur proposition du Centre national des
professions de santé et dix-neuf représentants des institutions
et établissements publics et privés de santé et des
professionnels qui y exercent ;
- Vingt-six membres représentant chacune des conférences
régionales de santé, désignés, après avis du
préfet de région, parmi les participants à la
conférence régionale, à l'exception des personnes qui
produisent, offrent ou délivrent des biens ou des services
médicaux donnant lieu à prise en charge par l'assurance
maladie ;
- Quatorze personnalités qualifiées.
Au vu de trois années de lois de financement, il semble que le
schéma prévu fonctionne difficilement.
Premièrement, il apparaît difficilement envisageable que le
rapport du Haut comité soit annuel, de même que celui de la
conférence nationale de santé. Le Haut comité avait rendu
un rapport de très grande qualité en 1994 sur la santé des
Français. Un bilan 1994-1998 a été publié à
la fin de l'année dernière. La coordination entre le Haut
comité et la conférence nationale a été
établie de manière pragmatique, par un partage des travaux
" dans l'air du temps "
, selon l'expression de M. Gilles
Brucker. Il apparaît ainsi que la conférence nationale de
santé a pu aller au-delà de son rôle, en se lançant
dans un travail d'expertise.
Les
missions du Haut comité de la santé publique
et de la
conférence nationale de santé
Le Haut comité de la santé publique
" Le Haut Comité de la santé publique
(HCSP)
apporte au ministre chargé de la santé des éléments
d'aide à la décision sur des problèmes de santé
publique ou d'organisation des soins.
Il développe l'observation et établit, sous forme de rapport, des
bilans réguliers de l'état de santé de la population ; il
contribue à la définition des objectifs de la politique de
santé.
Consulté sur des questions spécifiques, le HCSP constitue des
groupes de travail temporaires dont le mandat est d'établir un
état de la question et de formuler des propositions, sous forme d'avis.
Ces recommandations participent à l'élaboration de mesures
législatives et réglementaires.
Il fait des propositions pour le renforcement des actions de prévention,
en particulier dans le domaine de l'information et de l'éducation du
public en matière de santé.
Dans le cadre des ordonnances du 24 avril 1996 relatives à la
réforme de la protection sociale, le HCSP établit un rapport
annuel destiné à la conférence nationale de santé
et au Parlement. ".
La
conférence nationale de santé
Article L.766 du code de la
santé publique (ordonnances du 24 avril 1996)
"
Le ministre chargé de la santé
réunit
chaque année une conférence nationale de santé. Cette
conférence a notamment pour objet :
a) d'analyser les données relatives à la situation sanitaire
de la population ainsi que l'évolution des besoins de santé de
celle-ci ;
b) de proposer les priorités de la politique de santé
publique et des orientations pour la prise en charge des soins compte tenu de
l'évolution des techniques préventives, diagnostiques et
thérapeutiques.(...)
La conférence nationale de santé est destinataire d'un rapport du
Haut comité de la santé publique ; elle fait appel, en tant que
de besoin, aux services, organismes et personnes compétents en
matière de santé ; elle consulte les organismes qui assurent le
remboursement des dépenses de soins.
Ses analyses et propositions font l'objet d'un rapport au Gouvernement dont il
est tenu compte pour l'élaboration du projet de loi de financement de la
sécurité sociale. Les rapports du Haut comité de la
santé publique et de la conférence nationale de santé sont
transmis au Parlement.
Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions
d'application du présent article.
Deuxièmement, le calendrier suivi ne permet pas de suivre la
chaîne prévue (experts, professionnels, politiques). La
conférence nationale de santé se réunit de manière
trop tardive pour influer significativement sur le contenu du projet de loi de
financement. Les dix orientations de santé publique retenues par la
première conférence nationale de santé ont
été ainsi rajoutées au rapport annexé de la
première loi de financement,
in extremis
, par l'Assemblée
nationale en première lecture. Les trois premières lois de
financement montrent, toutefois, une évolution significative.
Les réunions de la conférence nationale de santé
Préparation du projet de loi de financement 1997 :
1
er
, 2 et 3 septembre 1996
Préparation du projet de loi de financement 1998 : 30 juin,
1
er
et 2 juillet 1997
Préparation du projet de loi de financement 1999 : 22, 23 et 24
juin 1998
M. François de Paillerets, président de la Conférence
nationale de santé, a indiqué au groupe de travail son souhait de
réunir à l'avenir la conférence dans le courant du mois de
mars, ce qui laisserait à la Direction Générale de la
Santé la possibilité de tenir réellement compte des
travaux de la conférence nationale afin de proposer des dispositifs
normatifs dans le corps même du texte de loi.
Comme les réunions du Haut comité sont liées directement
à la réunion de la conférence nationale, puisque les
professionnels doivent "
s'approprier
", selon le mot de M.
Gilles Brucker, les travaux d'experts, il serait nécessaire que ces
réunions aient lieu dès les mois de janvier-février.
Même si le rapport annexé tient compte des travaux du Haut
comité et de la conférence nationale de santé, son absence
de portée normative limite fortement l'intérêt de telles
dispositions. Dans le même temps, l'intégration de dispositions
dans le corps même du projet de loi se heurte au dispositif
d'irrecevabilité retenu par le législateur organique. En effet,
" les orientations de santé publique "
ont rarement une
incidence financière directe, immédiate et conséquente sur
les comptes des régimes d'assurance maladie.
En sens inverse, ces orientations peuvent mobiliser des crédits
budgétaires en lois de finances.
Les membres de la conférence nationale de santé et du Haut
comité de la santé publique, auditionnés par le groupe de
travail, ont reconnu la difficulté d'une articulation entre leurs
travaux et les lois de financement.
L'adjonction d'un nouvel
" acteur "
avec
les Etats
généraux de la santé, a tendance, de surcroît,
à
" brouiller le schéma "
.
3. La multiplication de grands débats extérieurs aux lois de financement brouille leur contenu
Alors même que se mettait en place le cadre d'un débat annuel au Parlement et qu'il était demandé à ce dernier d'examiner les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale, le Gouvernement n'a eu de cesse de multiplier les forums réunissant les experts et/ou le grand public.
a) Les Etats généraux de la santé
La
juxtaposition des travaux du Haut comité de la santé publique, de
la conférence nationale de santé et du Parlement n'est pas
apparue suffisante, d'où la création des Etats
généraux de la santé. Annoncés par la
déclaration de politique générale de M. Lionel Jospin, le
19 mai 1997, ces Etats généraux ont vu leur
" démarche " présentée par une communication en
conseil des ministres le 13 mai 1998. Il s'agit d'une
" multitude de
réunions auxquelles chacun peut participer, plutôt qu'une grande
messe "
, selon l'expression utilisée par le communiqué
de presse du secrétariat d'Etat à la santé du
28 janvier 1999.
L'articulation des travaux du Haut comité de santé publique, de
la conférence nationale de santé avec les Etats
généraux de la santé apparaît difficile à
définir
24(
*
)
. Les conférences
régionales de santé ont été annulées en
1999, tandis que la réunion de la conférence nationale de
santé pour 1999 est suspendue à la conclusion des Etats
généraux de la santé.
b) La conférence nationale de la famille
La
conférence nationale de la famille a été instituée
par l'article 41 de la loi n° 94-624 du 25 juillet 1994 relative
à la famille qui prévoit que
" le Gouvernement organise
chaque année une conférence nationale de la famille à
laquelle il convie le mouvement familial et les organismes
qualifiés "
.
La première conférence s'est réunie le 6 mai 1996,
à Matignon, sous l'égide du Premier ministre, M. Alain
Juppé.
Elle a été suivie par la mise en place de cinq groupes de travail
chargés d'examiner l'ensemble des problèmes des familles et
d'entreprendre une réflexion approfondie sur la politique familiale. La
coordination de ces travaux a été confiée à un
comité de pilotage présidé par Mme Hélène
Gisserot, procureur général près la Cour des comptes. Ces
cinq ateliers ont travaillé de juin à novembre 1996 et ont
réuni quelque 500 experts et responsables associatifs à de
nombreuses auditions. Le résultat a été la remise en
février 1997 d'un rapport, dénommé rapport Gisserot.
La seconde conférence s'est réunie le 17 mars 1997. Ses
orientations n'ont pas été retenues par le nouveau Gouvernement,
qui a annoncé la mise sous condition de ressources des allocations
familiales.
La troisième conférence de la famille a été tenue
le 25 juin 1998. La loi de financement de la sécurité sociale
pour 1999 a ainsi entériné les décisions annoncées
lors de la conférence nationale de la famille, à savoir le retour
à l'universalité des allocations familiales, mais
également le décalage de la majoration d'âge des
allocations, mesure défavorable de 870 millions de francs pour les
familles.
Le Gouvernement considère volontiers que ces décisions, qui ont
été
présentées
lors de la conférence
nationale de la famille, ont été
décidées
par la conférence, ce qui n'est pas exact, la conférence n'ayant
en elle-même aucun pouvoir de décision. Mme Martine Aubry
indiquait ainsi devant l'Assemblée nationale, le 27 octobre 1998 :
" Notre politique familiale présentée à la
conférence de la famille a reçu un large accord parce qu'elle a
été préalablement débattue et discutée avec
les syndicats et les associations familiales "
. Toute discussion ou
contestation parlementaire apparaît ainsi contradictoire avec les travaux
de la réunion de la conférence nationale de la famille.
c) La mission sur les retraites
La
mission confiée au commissariat général du Plan, dite
mission Charpin, a permis un diagnostic complet, sans être
" partagé "
, s'appuyant sur les
précédentes analyses dégagées par les nombreux
rapports qui se sont succédé depuis le Livre blanc de 1991.
Force est de constater que la méthode suivie sur la réforme des
retraites a pour effet de ne pas associer le Parlement dans le processus de
réflexion.
Pour votre rapporteur, il ne s'agit pas de méconnaître la
très grande qualité des travaux d'experts et de concertation
réalisés tant au sein de la conférence nationale de la
famille que du Haut comité de la santé publique ou encore du
commissariat général du Plan.
Mais il apparaît que cette expertise sert ensuite le Gouvernement
à justifier des décisions politiques, qui sont, en fait, peu ou
mal débattues. Pourtant,
il existe un cadre juridique annuel qui
devrait permettre l'expression de ce débat : les lois de
financement de la sécurité sociale.
4. La crainte d'une dérive vers le DMOS n'est pas tout à fait écartée
Contrairement aux deux premières lois de financement, la
troisième loi de financement suscite un certain nombre de craintes
relatives à une
" dérive "
de cet
instrument le rapprochant d'un projet de loi portant diverses mesures d'ordre
social (DMOS).
La jurisprudence du Conseil constitutionnel a évolué sur
" le domaine protégé " des loi de financement.
La décision n° 96-379 DC du 16 juillet 1996 sur la loi
organique indiquait que "
les dispositions
[des lois de
financement]
devaient concerner les conditions générales de
l'équilibre financier "
.
Ce considérant du Conseil constitutionnel semblait écarter qu'une
disposition ponctuelle, ayant une incidence financière mineure sur un
des régimes sociaux, puisse être présente en loi de
financement.
La décision n° 96-384 DC du 15 décembre 1996 sur la loi
de financement pour 1997 a marqué
" une première
inflexion "
25(
*
)
.
Des dispositions relatives à la contribution sociale
généralisée (assiette, taux et modalités du
recouvrement de la CSG) pouvaient être introduites dans la loi de
financement malgré leur caractère très technique, car
chacune d'elles avait un effet
" direct "
et
" significatif "
sur l'équilibre financier de la
sécurité sociale (ce qui est incontestable pour l'assiette et le
taux) ou était
" le complément
nécessaire "
de mesures qui ont un tel effet (ce qui
apparaît relever du bon sens pour les modalités de recouvrement).
Troisième étape, la décision n° 97-393 du 18
décembre 1997 sur la loi de financement pour 1998 recourt au seul
critère de l'incidence financière " significative ".
Une disposition fixant rétroactivement la base mensuelle des allocations
familiales (BMAF) et validant ainsi des actes administratifs annulés par
le Conseil d'Etat apparaît ainsi régulière
" eu
égard à l'exigence constitutionnelle qui s'attache à
l'équilibre financier de la sécurité sociale et compte
tenu des sommes en jeu "
.
Néanmoins, le Conseil constitutionnel n'a guère les moyens
d'exercer un contrôle sur les évaluations fournies par le
Gouvernement. De toute manière, fixer une séparation entre le
" significatif " et le " non significatif " apparaît
difficile.
Cette jurisprudence autorise l'introduction dans les lois de financement de la
sécurité sociale de toute norme ayant une incidence
financière, même mineure, sur l'équilibre des
régimes. Est-ce pour autant le véritable " danger " qui
guette les lois de financement ? Si "
le spectre du DMOS est loin
d'être écarté "
26(
*
)
, c'est bien davantage du fait d'articles n'ayant
aucune incidence financière sur l'équilibre des régimes de
sécurité sociale.
La présence d'articles étrangers au domaine des lois de
financement dans le corps du texte même du projet de loi semble pouvoir
être évitée, à partir du moment où le
Gouvernement suit l'avis du Conseil d'Etat. En revanche, il dispose de la
possibilité d'amender.
Dispositions de la loi de financement pour
1999
apparemment
étrangères au domaine des lois de financement
Disposition |
Objet |
Article 16 III (introduit par amendement en première lecture à l'Assemblée nationale)) |
Pérennisation du congé de fin d'activité au-delà du 31 décembre 2000 |
Article 21 (disposition originelle du texte) |
Création d'un système national d'informations inter-régimes |
Article 28 II (introduit par amendement en première lecture à l'Assemblée nationale) |
Fourniture d'un devis par les dentistes |
article 41 (introduit par amendement en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale) |
Allocation de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante |
Le
Conseil constitutionnel estime qu'il ne peut être
" directement
saisi de la conformité d'une disposition de la loi de financement de la
sécurité sociale à l'article L.O. 111-3 lorsque cette
disposition est issue d'un amendement dont la question de la
recevabilité n'a pas été soulevée selon la
procédure prévue par le règlement de celle des
assemblées du Parlement devant laquelle cet amendement a
été déposé, dès lors que les parlementaires
qui soulèvent un tel grief appartiennent à cette
assemblée "
(décision n° 98-404 DC du
18 décembre 1998). Cette jurisprudence s'applique tant aux
amendements d'origine parlementaire qu'aux amendements d'origine
gouvernementale. Or, comme le notent MM. Gilles Arathoon et Simon Corley,
" les contrôles de recevabilité ne s'appliquent en
pratique qu'aux amendements des parlementaires, pas à ceux du
Gouvernement, pour d'évidentes raisons d'équilibre politique,
mais aussi dans la logique institutionnelle de la
V
ème
République "
27(
*
)
.
Dès lors, il existe un " trou " dans le dispositif :
" l'appartenance au champ des lois de financement des amendements du
Gouvernement n'est contrôlée ni par les instances parlementaires,
ni par le Conseil en l'absence d'une contestation préalable (de
l'opposition) en séance publique "
28(
*
)
.
Force est d'ailleurs de constater que cette jurisprudence va au-delà des
décisions sur les deux premières lois de financement. En effet,
la formulation de la décision n° 96-384 DC du 19
décembre 1996 et de la décision n°97-393 DC du 18
décembre 1997 était différente :
" le Conseil
constitutionnel ne peut être directement saisi de la conformité
d'une disposition d'une loi de financement de la sécurité sociale
à l'article L.O. 111-3 précité lorsque cette disposition
est issue d'un amendement dont la question de la recevabilité n'a pas
été préalablement soulevée devant le
Parlement "
. Cette formulation laissait à penser que des
députés pouvaient fort bien contester une disposition, même
si elle n'avait pas été contestée à
l'Assemblée nationale, pourvu qu'elle ait été
évoquée au Sénat. Depuis la décision
n° 98-404 DC, cette possibilité n'existe plus.
L'absence d'inscription à l'ordre du jour parlementaire d'un DMOS depuis
avril 1996 joue incontestablement un rôle ; le Gouvernement est
soumis à une " pression " pour proposer des dispositions par
voie d'amendements aux projets de loi de financement, et
bénéficier ainsi de la procédure d'urgence.
B. UNE RIGUEUR INSUFFISANTE DANS LA CONSTRUCTION DES COMPTES
Si le volet qualitatif des lois de financement est décevant, il serait réducteur de croire que le débat parlementaire se résume à " un débat de comptables " , d'autant plus que la question des comptes est loin d'être définitivement réglée.
1. Le retard de production des comptes de la sécurité sociale reste un handicap majeur
a) Une disponibilité qui reste préoccupante
L'accélération de la remise des comptes des
organismes
de sécurité sociale a été considérée,
par toutes les personnes auditionnées par le groupe de travail, comme
une priorité. Les résultats définitifs de l'année
1997 n'ont été connus, pour certains, qu'au début du mois
de septembre, alors que la commission des comptes de la sécurité
sociale s'est réunie le 22 septembre 1998.
La réunion de la commission des comptes de la sécurité
sociale du 31 mai 1999 n'a pas montré de progrès notables,
restant consacrée à des résultats -toujours non
définitifs- portant sur les seuls comptes 1998 du régime
général.
La commission des comptes de la sécurité sociale
Cette
commission est présidée par le ministre en charge de la
sécurité sociale. Elle est composée de parlementaires,
d'un membre du Conseil économique et social, d'un membre de la Cour des
comptes, de représentants des organisations professionnelles, syndicales
et sociales, de représentants des conseils d'administration des
organismes de sécurité sociale, des organismes mutualistes, des
professionnels de santé et de personnalités qualifiées.
Deux textes majeurs fixent ses missions : le décret n° 87-441
du 23 juin 1987 et l'article 15 de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994.
La commission analyse les comptes des régimes de sécurité
sociale. Elle est assistée par un secrétaire
général permanent qui assure l'organisation de ses travaux ainsi
que l'établissement de ses rapports.
Deux réunions annuelles sont prévues :
- la première entre le 15 avril et le 15 juin, consacrée aux
comptes du seul régime général ; il s'agit des
comptes quasi définitifs pour l'année n-1 et d'une nouvelle
estimation des comptes de l'année n ;
- la seconde entre le 15 septembre et le 15 octobre, consacrée aux
comptes de l'ensemble des régimes obligatoires de sécurité
sociale. Cette réunion permet de prendre connaissance des comptes
définitifs de l'année n-1, d'affiner l'estimation des comptes de
l'année n, et de présenter les comptes tendanciels de
l'année n+1.
Tous les comptes sont établis par
" les directions
compétentes des ministères concernés "
,
c'est-à-dire la direction de la sécurité sociale. Les
comptes fournis par les caisses de sécurité sociale sont ainsi
" retraités ".
M. Alain Déniel a considéré devant le groupe de travail
que la dissolution de l'Assemblée nationale avait été un
" miracle "
, car elle avait empêché la
réunion de la commission des comptes du printemps 1997, qui n'aurait pu
de toute façon avoir lieu pour des raisons techniques. Pour certains
observateurs, le risque d'un défaut de réunion de la commission
des comptes de la sécurité sociale du mois de septembre du fait
d'une impossibilité technique ne peut être tout à fait
écarté.
On observera, pour preuve d'une défaillance " technique "
toujours possible, que la production des annexes au projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998 a été
très tardive, et évoquée devant le Conseil constitutionnel.
Cette absence de disponibilité handicape le pilotage des finances
sociales, en réduisant le temps d'analyse des comptes, tant au niveau de
la commission des comptes qu'à celui de la Cour des comptes,
chargée d'effectuer un bilan de l'application de la loi de
financement.
b) La réforme des droits constatés n'a pas permis une accélération de la remise des comptes
L'application du principe de comptabilisation en droits constatés aux opérations des organismes de la sécurité sociale constitue pour la Cour des comptes " un progrès -dans la voie de la clarification des comptes de la sécurité sociale- dont il importe de souligner l'importance " 29( * ) .
Encaissements-décaissements et droits
constatés :
les deux principes de comptabilisation
Une
comptabilité en
encaissements - décaissements
consiste
à n'enregistrer les opérations qu'à partir du moment
où celles-ci sont recouvrées (cotisations) ou payées
(prestations).
Pour résumer, une comptabilité en encaissements -
décaissements est une comptabilité de trésorerie.
Une comptabilité en
droits constatés
consiste à
rattacher à un exercice les dépenses et les recettes dès
la naissance du fait générateur. En fin d'exercice, les
opérations qui ont pris naissance dans l'année mais qui n'ont pas
donné lieu à encaissement ou paiement sont rattachées
à l'exercice comptable sous forme de produits à recevoir
(créances), de provisions ou de charges à payer (dettes).
Pour résumer, une comptabilité en droits constatés est une
comptabilité de créances et de dettes.
Avant la réforme, les comptes des caisses du régime
général étaient en encaissements-décaissements.
Néanmoins, elles utilisaient déjà, pour certaines
opérations, la technique des droits constatés (exemple de
certaines avances ou compensations de l'Etat).
En revanche, les régimes complémentaires et les compagnies
d'assurance étaient déjà en droits constatés.
L'histoire de la réforme des droits constatés montre une certaine
unanimité des acteurs ; de plus, les avantages d'une
comptabilité en droits constatés sont bien réels.
En 1990, M. Claude Evin, alors ministre de la solidarité, a
demandé à un groupe de travail interministériel,
placé sous la responsabilité d'un expert comptable, M. Robert
Mazars, d'étudier la comptabilité et les conditions de
consolidation des comptes de la sécurité sociale. Le rapport
Mazars -rendu public en décembre 1990 par M. René Teulade- a
formulé un certain nombre de propositions, parmi lesquelles l'adoption
du principe des droits constatés. A la suite du rapport Mazars, tant les
rapports de la Cour des comptes, rendus chaque année au Parlement
à la suite de la loi de 1994, que les rapports de la Commission des
comptes de la sécurité sociale ont plaidé pour la mise en
oeuvre rapide de cette réforme.
Un groupe de travail
30(
*
)
, associant les
administrations de l'Etat et les représentants des caisses a
été constitué en 1994. Le décret
n° 96-448 du 23 mai 1996, a officialisé la comptabilisation en
droits constatés dans les organismes du Régime
général à compter du 1
er
janvier 1996.
Puis, il a été décidé d'appliquer la réforme
dans les autres régimes à partir du 1
er
janvier
1997. Trois décrets du 18 mars 1997 ont étendu le principe des
droits constatés aux organismes d'assurance maladie et maternité
des travailleurs salariés des professions non agricoles, aux
organisations d'assurance vieillesse de ces professions (ORGANIC, CANCAVA et
CNAVPL notamment) et aux organismes tels que la Caisse mutuelle d'assurance
maladie des cultes (CAMAC), la Caisse mutuelle d'assurance vieillesse des
cultes (CAMAVIC), la Caisse des français à l'étranger
(CFE), la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et
employés de notaires (CRPCEN) ou la Caisse autonome nationale de
sécurité sociale dans les mines (CANMSS). Enfin, un décret
du 31 mai 1997 étend le principe au régime agricole.
La réforme des droits constatés est ainsi une réforme qui
s'est poursuivie sur un certain nombre d'années, sous des ministres
différents. Les avantages attendus sont, en effet, importants :
Les avantages attendus de la réforme des droits constatés
Le
mécanisme des droits constatés en matière de
sécurité sociale présente -pour la Cour des comptes-
quatre avantages :
1) Un résultat indépendant des événements
venant perturber le règlement des cotisations ou le paiement des
prestations ;
2) Une étape importante vers l'harmonisation des
comptabilités et des méthodes comptables de l'ensemble des
régimes ;
3) Un cadre comptable similaire pour l'ensemble des régimes, les
régimes complémentaires et les mutuelles ;
4) Une transparence financière entre les différents acteurs
de la sécurité sociale, puisque les droits constatés font
apparaître les créances et les dettes respectives de chacun.
La mise en oeuvre de la réforme elle-même ne semble pas poser de
problèmes majeurs, contrairement aux craintes émises en 1994.
Ces craintes pouvaient se justifier.
Un organisme de
sécurité sociale n'est pas une entreprise privée. La
définition d'un fait générateur -qui va de soi dans le
cadre d'une activité lucrative- apparaît beaucoup plus complexe.
La notion de résultat est beaucoup moins pertinente.
Grâce à l'opiniâtreté et au pragmatisme du groupe de
travail, grâce aux efforts réalisés par les agents
comptables, des réponses ont été apportées aux deux
principales questions, à savoir la définition des faits
générateurs et les modalités de rattachement à
l'exercice.
Mais, comme le fait remarquer M. Philippe Nasse, secrétaire
général de la commission des comptes, l'application des droits
constatés devrait avoir pour effet automatique une
accélération de la remise des comptes de la
sécurité sociale, la période complémentaire
étant désormais très réduite.
Ce n'est
malheureusement absolument pas le cas.
2. La fiabilité des comptes de la sécurité sociale demeure incertaine
a) L'absence de plan comptable unique des organismes de sécurité sociale
Contrairement aux comptes de l'Etat, qui reposent sur un
réseau hiérarchisé et unique, les comptes de la
sécurité sociale ne sont qu'une agrégation de comptes
d'organismes locaux, placés sous la responsabilité de caisses
nationales.
Il n'existe pas actuellement de plan comptable unique des organismes de
sécurité sociale. Une mission interministérielle sur
l'harmonisation des plans comptables des organismes de sécurité
sociale a été mise en place en décembre 1998. Les travaux
de cette mission, placée sous l'autorité de M. Alain
Déniel, auditionné par le groupe de travail
31(
*
)
, semblent être en bonne voie, après un
début poussif (sept mois se sont écoulés entre l'annonce
de cette mission interministérielle et le début de ses travaux).
L'utilisation de comptes hétérogènes n'est qu'une des
conséquences de cette absence de normalisation.
b) L'utilisation de comptes hétérogènes
Comme le
note la Cour des comptes, la loi organique de 1996 n'a pas défini la
notion de " branche ". Cette notion n'a été clairement
identifiée que pour le seul régime général, par la
loi du 25 juillet 1994 sur la sécurité sociale.
En l'absence de définition générale, le Gouvernement a
adopté un certain nombre de conventions pour la ventilation des
dépenses qui sont précisées à l'annexe
c)
du
projet de loi.
Or, de nombreux régimes n'individualisent pas leurs dépenses de
charges annexes par branche et l'annexe
c)
de la loi de financement
n'apporte aucune précision sur la ventilation de ces charges qui ne
correspondent pas à des prestations versées
32(
*
)
.
Par ailleurs, la Cour des comptes relève que le concept de
dépenses utilisé par la loi organique ne recoupe pas exactement
celui d'emplois retenu dans les comptes présentés à la
Commission des comptes de la sécurité sociale, les
différences résultant :
- du traitement des dépenses et des recettes des
départements d'outre-mer dans les comptes de la sécurité
sociale ;
- des doubles emplois qui apparaissent dans ces comptes de la
sécurité sociale du fait des transferts internes aux
régimes de base considérés et des dépenses qui
constituent la contrepartie des cotisations prises en charge par les
régimes de sécurité sociale ;
- de l'exclusion des régimes de base de moins de
20.000 cotisants ou bénéficiaires de droits propres.
Enfin, la direction de la sécurité sociale utilise deux cadres
comptables pour les comptes présentés à la Commission des
comptes de la sécurité sociale.
Le premier, utilisé pour le seul régime général,
classe les comptes en " recettes " et en
" dépenses ". La différence forme la
variation du
fonds de roulement
.
Le second, utilisé pour les autres régimes, classe les comptes en
" emplois " et en " ressources ". La différence
forme le
solde des opérations courantes
.
Ce second cadre comptable est utilisé par les annexes du projet de loi
de financement.
La question des transferts entre branches du régime
général, par exemple, est traitée par la Cour des comptes
dans son rapport 1997
33(
*
)
. On résumera
ainsi le problème : comment traiter les transferts entre branches
du régime général, alors même que la loi du 25
juillet 1994 a réaffirmé la gestion séparée des
branches ? A l'heure actuelle, la convention retenue est la
suivante : l'objectif de dépenses de la branche versante inclut les
transferts versés aux autres branches, tandis que l'objectif de
dépenses de la branche bénéficiaire est
présenté net des transferts reçus des autres branches. La
Cour des comptes a proposé une formule différente, consistant
à conserver les transferts versés aux autres branches, mais
à ne pas faire apparaître les transferts dans l'objectif de
dépenses de la branche bénéficiaire. Un état des
transferts entre branches serait souhaitable.
De manière générale, la Cour insiste dans son rapport 1998
sur le flou des notions de " branche ", de
" régime ", de " risque ", de " caisse "
ou de " fonds ". Cette critique est liée à
l'organisation même des régimes de sécurité sociale,
historiquement très complexe.
Les finances sociales diffèrent des finances de l'Etat sur un point
essentiel : l'ordonnance organique de 1959 a posé le principe de
l'universalité budgétaire, tandis que l'article L. 253-1 du code
de la sécurité sociale affirme le principe de l'affectation des
recettes de la sécurité sociale :
" Les ressources
recouvrées en exécution du présent code ne peuvent
être affectées à une institution autre que celle au titre
de laquelle elles sont perçues "
.
Comme le note M. Rémi Pellet
34(
*
)
,
" il est très important de savoir si les cotisations et
contributions sociales sont affectées aux branches, aux régimes,
aux fonds ou à toute autre entité comptable propre à la
sécurité sociale "
.
La notion de référence, consacrée par la loi organique de
1996, est celle de " régime ". La règle apparaît
toutefois relative, en raison de l'existence de compensations
inter-régimes et du partage du produit d'une même contribution
sociale entre plusieurs régimes.
La définition d'un régime est également floue ; un
régime peut être un ensemble de " couvertures sociales "
ou de " branches " (le régime général) ou se
réduire à la couverture d'un risque (régimes d'assurance
maladie).
De ce point de vue, la complexité des règles fixées par le
législateur et le pouvoir réglementaire dans le domaine des
finances sociales, plus encore qu'ailleurs, pose problème.
c) La confusion du spontané et du normatif
Le
rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale du
mois de septembre, annexe implicite des lois de financement, élabore les
comptes
" tendanciels "
1999, en partant d'un certain nombre
d'hypothèses (évolution de l'ONDAM, du plafond de la
sécurité sociale, etc.).
Si ces hypothèses ne sont pas modifiées par le Gouvernement,
elles vont être ainsi à la base des discussions
législatives, alors même que le Parlement n'aura aucun moyen de
les remettre en cause. Par exemple, l'évolution moyenne de 2,7 % du
" plafond " de la sécurité sociale a été
" arrêtée " par la commission des comptes de la
sécurité sociale, qui a appliqué l'article D. 242-17
du code de la sécurité sociale.
La détermination de l'évolution de l'ONDAM par la commission des
comptes, signalée par votre rapporteur lors de la discussion du projet
de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, a
été tout à fait étonnante pour deux raisons
principales.
- les prévisions ont pris en compte des mesures gouvernementales,
et notamment le plan Aubry assurance maladie de l'été 1998,
à hauteur des effets souhaités par le Gouvernement ;
- les dépenses d'assurance maladie ont été
calculées sur la base d'un ONDAM progressant de 2,6 %, ce qui est le
chiffre retenu par le Gouvernement dans le projet de loi.
La définition d'un ONDAM tendanciel mérite certes discussion :
doit-il être une simple reconduction de l'existant (ONDAM de
l'année précédente) ou une prévision s'appuyant sur
l'évolution spontanée des dépenses d'assurance maladie ?
De manière générale, le
" tendanciel "
,
le
" prévisionnel "
et le
" correctif "
font l'objet d'une confusion importante. Ainsi,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a
annoncé le contenu du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999 lors de la commission des comptes de
la sécurité sociale du 22 septembre 1998. Le dossier de
presse est distribué à ce moment, et non lors de l'examen du
projet en conseil des ministres, alors même que le contenu de
l'avant-projet de loi n'est pas encore rendu public.
d) La modification du mode d'affectation des recettes
L'affectation des recettes entre les différentes
branches du
régime général et des organismes concourant à leur
financement (FSV, CADES) s'effectuait avant 1998 au niveau central de l'ACOSS
selon une méthode " statistico-comptable ".
Cette affectation est désormais réalisée selon le
système RACINE qui ventile à la source -au niveau des URSSAF- les
recettes de la sécurité sociale.
Ce système a permis de confirmer que la méthode jusqu'alors
choisie était plus que défaillante, comme le montre le tableau
ci-après :
Encaissements CGSS - URSSAF
Comparaison attributions Racine/attributions forfaitaires - Année
1998
|
Répartition comptable
|
Attributions forfaitaires en trésorerie
|
|
||||||
|
Montant (MDF) |
% |
Montant (MDF) |
% |
Ecart (MDF) |
||||
CNAMTS (mal. + CSG) |
475,047 |
43,95 |
480,866 |
44,47 |
- 5,819 |
||||
CNAMTS A.T. |
39,665 |
3,67 |
39,732 |
3,67 |
- 0,067 |
||||
CNAVTS |
277,128 |
25,64 |
271,904 |
25,14 |
+ 5,224 |
||||
CNAF |
163,637 |
15,14 |
166,139 |
15,36 |
- 2,502 |
||||
Total branches |
955,477 |
|
958,641 |
|
- 3,164 |
||||
FSV |
46,881 |
4,34 |
47,648 |
4,40 |
- 0,767 |
||||
CADES |
17,809 |
1,65 |
17,792 |
1,65 |
+ 0,017 |
||||
Rég. Oblig. Assur. mal. |
21,428 |
1,98 |
20,891 |
1,93 |
+ 0,523 |
||||
SOUS-TOTAL |
1 041,594 |
96,37 |
1 044,972 |
96,63 |
- 3,377 |
||||
Autres tiers |
39,283 |
3,63 |
36,423 |
3,37 |
+ 2,860 |
||||
TOTAL |
1 080,877 |
100,0 |
1 081,394 |
100,0 |
- 0,517 |
Source : ACOSS
La variation entre les soldes présentés en loi de financement
(octobre 1998) et ceux présentés en mai 1999 n'est pas seulement
due au dérapage des dépenses d'assurance maladie :
Variation du fonds de roulement du régime général
en millions de francs
|
LFSS 1999 |
CCSS mai 1999 |
écarts |
CNAMTS |
- 105 |
- 12.288 |
- 12.176 |
CNAMTS AT |
1.299 |
1.221 |
- 78 |
CNAVTS |
- 3.868 |
3.586 |
7.454 |
CNAF |
2.871 |
2.298 |
- 573 |
Ensemble |
198 |
- 5.176 |
- 5.374 |
Source : DSS - 6 A
Il est aujourd'hui quasiment impossible de déterminer les modifications
s'expliquant par la mise en place du système RACINE et les variations
résultant à la fois de l'évolution de la situation
macro-économique depuis septembre 1998 et de la hausse des
dépenses d'assurance maladie.
Le système RACINE a toutefois permis une accélération
très nette de la connaissance des recettes du régime
général. En effet, les données finales de
répartition des produits et des encaissements 1998 ont été
communiquées aux caisses nationales et aux " tiers " (CADES,
FSV) à la fin du mois de février 1999, celles relatives au
recouvrement direct de l'ACOSS au début du mois de mars.
Lors de la réunion de la commission des comptes de la
sécurité sociale du 31 mai 1999, Mme Martine Aubry a
annoncé la tenue d'une mission de l'IGAS, qui vient s'ajouter aux
différents rapports produits par le cabinet Mazars, choisi par l'ACOSS
pour l'aider dans la mise en oeuvre de ce nouveau système.
3. La lisibilité des dispositions financières est imparfaite
a) Des rapports complexes entre les régimes
La
complexité des règles fixées par le législateur et
le pouvoir réglementaire est, en matière de
sécurité sociale, avérée depuis longtemps.
Elle brouille la compréhension des circuits de financement.
Le mécanisme de répartition de la CSG semble être un
modèle de complexité jamais atteint auparavant.
Le
principe de la répartition de la CSG entre les régimes
d'assurance maladie
Extraits du rapport 1998 de la Cour des comptes, p. 79-83
Elle se
fait en deux temps (art. L. 139-2) :
- la première répartition a pour objet de compenser
exactement, pour chaque régime d'assurance maladie, la perte de
ressources résultant de la diminution des taux de cotisation d'assurance
maladie au 1
er
janvier 1997 ;
(...)
L'article R. 139-1 en fixe le mode de calcul:
" la
répartition prévue au 1° de l'article L. 139-2 est
effectuée au prorata et dans la limite de la perte des cotisations
d'assurance maladie induite pour chacun des régimes, au cours de
l'exercice considéré, par la diminution des taux de cotisation
d'assurance maladie applicable aux revenus perçus ou versés
à compter du 1
er
janvier 1997. La perte des cotisations
est égale au produit du montant correspondant aux cotisations
effectivement encaissées au cours de l'exercice, rapportées aux
taux de cotisation applicables pour chaque catégorie de cotisation, par
la diminution de taux appliquée à chacune des catégories
de cotisations au 1
er
janvier 1997, en application de la
substitution de contribution mentionnée à
l'article L. 139-2. "
.
- la seconde répartition est effectuée
" au prorata des
déficits comptables de l'exercice considéré ".
Ces répartitions posent des problèmes d'évaluation
difficiles :
- pour la première, il faut estimer les pertes de recettes
consécutives à la baisse de la cotisation maladie, ce qui suppose
une bonne connaissance de l'assiette de chaque régime par
catégorie de cotisants
35(
*
)
;
- pour la seconde, il faut anticiper les déficits du régime
général et de la CANAM.
Dans les deux cas, on a été contraint de mettre en place un
système d'acomptes et de régularisations complexe et peu lisible.
Une simplification de ces mécanismes de répartition paraît
souhaitable.
(...)
Les modalités de répartition définies par la loi de
financement visent à compenser exactement les pertes de cotisations des
régimes et à affecter le supplément de recettes à
la CNAM (et la CANAM en 1997).
L'option retenue est que la substitution de CSG à des cotisations
maladie, si elle assoit le financement de l'assurance maladie sur des bases
plus justes et entraîne un gain de pouvoir d'achat pour les revenus du
travail (baisse de taux associée à un élargissement de
l'assiette), n'ait aucune incidence sur les ressources des régimes
autres que le régime général : ils continueront de
recevoir ce qu'ils auraient reçu si les cotisations étaient
restées à leur niveau antérieur.
En substituant de la CSG à des cotisations maladie, on remplace des
cotisations à base professionnelle (les recettes de chaque régime
sont proportionnelles aux revenus des cotisants de ce régime) par un
prélèvement global sur la quasi-totalité des revenus au
sein duquel on ne peut évidemment plus distinguer ce qui provient de
salariés du secteur privé, d'agents de la fonction publique,
d'entreprises nationales, de professions indépendantes.
Cependant, on a souhaité reprofessionnaliser cette recette, en calculant
ce qu'aurait été le produit des cotisations en l'absence de
substitution. Ce choix conduit à des calculs compliqués qui
devront désormais être répétés chaque
année.
Une autre option aurait été de figer d'emblée la
répartition entre régimes, comme on l'a fait pour le partage des
droits sur les boissons entre le FSV et la branche maladie (dans les
proportions 60-40) sans se préoccuper de compenser exactement le
supplément de recettes apporté au FSV par l'élargissement
de l'assiette de la CSG. Tous les régimes auraient alors
bénéficié d'une assiette (celle de la CSG) progressant
comme la richesse nationale (au lieu d'assiettes en déclin pour
plusieurs régimes).
Ce faisant, on aurait évidemment modifié l'évolution des
ressources des régimes par rapport à la situation
antérieure de financement sur la base de cotisations. Les dynamiques des
assiettes de la CSG et des cotisations allant à certains régimes
sont en effet très différentes.
Cette seconde option aurait été beaucoup plus facile à
gérer. Elle n'avait pas moins de signification que la première
dans un contexte marqué par la multiplicité des transferts entre
les régimes concernés et leur caractère souvent
conventionnel.
L'existence de
transferts entre régimes
, liés notamment
à la compensation, de
transferts entre branches
et
l'affectation de recettes à plusieurs bénéficiaires
compliquent la lisibilité des comptes de la sécurité
sociale.
L'ensemble de ces mécanismes fausse la situation réelle des
régimes de sécurité sociale et aboutit, par exemple,
à une situation absurde où la CNRACL structurellement
excédentaire est autorisée -ou quasiment contrainte- à
emprunter par les lois de financement de la sécurité sociale pour
1998 et 1999.
L'existence de recettes affectées à plusieurs
bénéficiaires rend la gestion de ces impositions coûteuses,
comme l'a montré un rapport récent de l'Inspection
Générale des Finances (avril 1999). En effet, il est
nécessaire de prévoir des mécanismes de
répartition, ainsi que des imputations comptables.
La répartition des droits sur les alcools, dits " droits
403 ", risque ainsi d'être affectée par le projet de loi
portant création de la couverture maladie universelle :
Les droits 403 sur les alcools
Ces
droits de consommation sur les alcools, dits " droits 403 ", du nom
de l'article du code général des impôts les
définissant, étaient affectés à l'origine au seul
Fonds de solidarité vieillesse. Depuis la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, ces droits sont répartis entre
le FSV (60 %) et les régimes d'assurance maladie (40 %).
Il s'agit de l'ensemble des droits, à l'exception de ceux perçus
dans les deux départements de la collectivité territoriale de
Corse et du prélèvement effectué au profit du BAPSA
(article 1615 bis du code général des impôts).
Les droits 403 devraient rapporter, en 1999, 4,2 milliards de francs aux
régimes d'assurance maladie et 6,3 milliards de francs au FSV.
Le projet de loi portant création de la CMU complique le
système :
- 55 % seraient affectés au FSV,
- 40 % aux régimes d'assurance maladie,
- 5 % au profit de la seule CNAMTS.
Or, la CNAMTS bénéficie déjà d'une cotisation sur
les boissons alcooliques, instituée par l'article 26 de la loi
n° 83-25 du 19 janvier 1983 (article L. 245-7 du code de la
sécurité sociale). Le montant de la cotisation est actuellement
fixé à 0,84 franc par décilitre ou par fraction de
décilitre (article L. 245-9).
La CNAMTS bénéficierait ainsi de trois ressources
distinctes :
- un peu plus de 84 % de 40 % des droits 403 ;
- 5 % des droits 403 ;
- le produit de la taxe sur les alcools.
Enfin, les droits de consommation sur les tabacs sont affectés à
la fois au budget de l'Etat et à la CNAMTS :
La répartition des droits de consommation sur les tabacs
Ces
droits sont ceux prévus à l'article 575 du code
général des impôts. Le barème des droits,
établi par l'article 575 A du même code, a été, en
dernier lieu, modifié par l'article 33 de la loi de finances
rectificative pour 1998 (loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998).
Ces droits sont affectés au budget de l'Etat, en dehors d'une part
affectée à la CNAMTS, fixée à 6,39 % par la
loi de finances pour 1997, puis à 9,1 % par la loi de finances pour
1998.
Seule la loi de finances, en vertu de l'article 18 de l'ordonnance
n° 59-2 du 2 janvier 1959, portant loi organique relative aux
lois de finances, peut procéder à une telle affectation.
Pour 1999, la recette attendue par la CNAMTS est de l'ordre de
4,2 milliards de francs.
b) Des relations confuses entre l'Etat et la sécurité sociale
Les
relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale
sont complexes
36(
*
)
. Elles ont tendance à
l'être chaque année davantage. Cette question recouvre des aspects
multiples :
L'Etat employeur
La question du contrôle de la cohérence entre les versements de
cotisations de l'Etat et l'assiette salariale correspondante se pose. Le bilan
des encaissements 1997 montre une progression de l'assiette salariale du
secteur public de 1,4 %. Ce chiffre ne correspond pas à
l'évolution de la masse salariale brute résultant de
l'évolution des rémunérations et du glissement vieillesse
technicité (GVT).
La Cour des comptes a confirmé que le calcul des cotisations patronales
de l'Etat employeur était effectué sur la base d'une assiette
minorée. Le décret n° 95-38 du 6 janvier 1995 limite
l'assiette aux traitements soumis à retenue pour pensions
(2
ème
alinéa de l'article D. 712-38 du code de la
sécurité sociale), alors que les articles L. 241-6 et
L. 242-1 précisent la règle générale :
l'assiette est constituée par la totalité des sommes
versées aux salariés.
Même si elle n'est pas en mesure de chiffrer précisément le
manque à gagner pour le régime général
37(
*
)
, elle l'a estimé de 10 à
15 milliards de francs par an
38(
*
)
.
Le contrôle apparaît difficile, les URSSAF n'ayant pas
d'habilitation juridique pour effectuer le contrôle des versements de
l'Etat employeur au régime général. C'est seulement depuis
1997 que la part patronale des cotisations maladie des fonctionnaires est
versée aux URSSAF et non plus à l'ACOSS. Enfin, la loi du 25
juillet 1994 sur la sécurité sociale a donné mission
à la Cour des comptes d'opérer le contrôle de
déclaration de l'assiette des administrations centrales et services
déconcentrés de l'Etat.
Cette situation est dénoncée depuis de nombreuses années
-à juste titre- par les employeurs privés, qui -strictement
encadrés par la réglementation- s'y conforment sous le
contrôle exigeant des URSSAF.
Les exonérations de cotisations
Grâce aux travaux de la commission des comptes et de la Cour des comptes,
on dispose désormais d'une bonne évaluation du montant des
cotisations exonérées et non remboursées par l'Etat :
16,9 milliards de francs en 1998
, correspondant à des mesures
prises avant la loi du 25 juillet 1994, c'est-à-dire avant que ne soit
posé le principe de la compensation intégrale.
Ces exonérations concernent principalement les contrats emploi
solidarité, les contrats emplois consolidés, l'embauche premier
salarié et le temps partiel.
Elles sont en croissance malgré leur date déjà ancienne en
raison d'une interprétation de la loi du 25 juillet 1994 très
défavorable aux régimes de sécurité sociale et,
pour tout dire, douteuse : en effet, ni les majorations
d'exonérations décidées ultérieurement à la
loi du 25 juillet 1994, ni les prorogations de dispositif ne sont
compensées.
Exonérations de cotisations non compensées
en milliards de francs
1996 |
1997 |
1998 (prévisions) |
1999 (prévisions) |
15,0 |
16,8 |
16,9 |
17,3 |
source : CCSS, septembre 1998.
Le montant des exonérations de cotisations patronales compensées
intégralement par l'Etat a connu une très vive augmentation
à partir de 1996, année marquée par la fusion des deux
dispositifs généraux d'allégement de charges sur les bas
salaires -exonération de cotisations d'allocations familiales et
ristourne dégressive-, par la montée en charge du contrat
initiative emploi et par les premiers effets de la " loi Robien ".
Exonérations de cotisations prises en charge par l'Etat
Année |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Montant en millions de francs |
29.531 |
53.216 |
66.492 |
65.525 |
61.402 39( * ) |
source : CCSS, septembre 1998.
Le versement de prestations pour le compte de l'Etat
Des prestations sont gérées et versées par le
régime général pour le compte de l'Etat. Il s'agit
principalement de la CNAF, qui a été jugée la mieux
placée pour gérer ce type de prestations, pour des raisons de
proximité. L'Etat rembourse ensuite la sécurité sociale.
Malheureusement, le plus souvent, l'Etat ne verse pas de participation aux
frais de gestion. Le montant total des prestations versées pour le
compte de l'Etat est de l'ordre de 91,8 milliards de francs. L'Etat participe
à hauteur de 380 millions de francs (seule l'allocation de logement
à caractère social fait l'objet d'une participation aux frais de
gestion). Si l'Etat versait aux caisses un montant de 3 % pour participation
aux frais de gestion de l'ensemble des prestations servies pour son compte, il
devrait s'acquitter de 2,7 milliards de francs.
Prestations versées en 1999 par les régimes
sociaux
pour le compte de l'Etat
(prévisions)
en milliards de francs
Minima sociaux |
|
RMI |
26,4 |
AAH |
24,8 |
API |
4,2 |
Allocation spéciale d'invalidité |
1,6 |
Logement (APL, ALS, ALT) |
|
Aides au logement FNH |
16,6 |
Aides au logement FNAL |
18,1 |
Aide au logement ALT |
0,1 |
TOTAL |
91,8 |
En sens
inverse, l'Etat fait payer à l'ACOSS un taux de
prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement
opéré sur le produit des prélèvements sociaux sur
les produits du patrimoine de 0,5 %
40(
*
)
.
A l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999, les deux assemblées avaient
d'ailleurs souhaité -à l'initiative de M. Alfred Recours,
rapporteur pour les équilibres généraux à
l'Assemblée nationale- supprimer cette " ponction ". La loi de
finances rectificative pour 1998 a immédiatement rétabli cette
disposition. L'article 5 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 n'est ainsi jamais entré en vigueur.
Les charges de trésorerie
La charge de trésorerie pesant sur le régime
général -pour certaines prestations- est loin d'être neutre.
La majoration de l'allocation de rentrée scolaire est principalement
à l'origine du décret n° 98-753 du 26 août
1998
41(
*
)
, qui a relevé le plafond des
avances de trésorerie au régime général de 20
à 31 milliards de francs.
Des prestations liées aux fonds logement sont remboursées
ex
post
par l'Etat. A l'inverse, le versement de prestations comme le revenu
minimum d'insertion (RMI) et l'allocation aux adultes handicapés (AAH)
font heureusement l'objet d'une mensualisation.
Les effets de trésorerie de la CSG ne sont pas négligeables ; la
CSG sur patrimoine est recouvrée selon les mêmes règles que
l'impôt sur le revenu, par voie de rôle. Elle est reversée
à l'ACOSS le 15 décembre de chaque année, à la
différence de la CSG sur les placements (prélèvement
libératoire), versée en plusieurs acomptes, mais le plus souvent
en fin d'année.
La création par la loi de financement pour 1998 d'une contribution
unique de 2 % affectée à la CNAVTS et à la CNAF, se
substituant aux deux contributions de 1 % existantes, a également
modifié le reversement de cette contribution, en l'alignant sur le
système mis en place pour la CSG sur patrimoine ou sur placements.
Dans son rapport adressé au Parlement pour justifier un plafond des
avances de trésorerie au régime général
supérieur à celui fixé par la loi de financement pour
1998, le Gouvernement évoque lui-même cet argument, après
ceux relatifs à la majoration de l'allocation de rentrée scolaire
et au dérapage des dépenses d'assurance maladie.
Le régime des fonctionnaires de l'Etat
L'Etat sert les prestations familiales pour les agents de droit public qu'il
rémunère (art. D. 212-3 du code de la sécurité
sociale).
Le taux de cotisation est inférieur au droit commun pour tenir compte du
coût administratif du service et de l'action sociale exercée par
l'Etat.
La comptabilité budgétaire de l'Etat ne décrit pas le
régime des prestations familiales des agents de droit public de l'Etat.
Elle cumule toutes les prestations, qu'elles soient servies en métropole
ou dans les départements d'outre-mer. Le solde compensatoire
métropole n'a pas de sens : ce n'est pas la différence entre
les cotisations versées par l'Etat employeur et les prestations
versées par l'Etat, remboursées par la CNAF.
Comme l'indiquait la Cour des comptes en juillet 1997
42(
*
)
:
" Les comptes de l'Etat se
présentent comme s'il avait en charge les prestations et versait une
subvention au régime général, sous l'apparence d'un solde
compensatoire. Ils traduisent là l'Etat puissance publique plus que
l'Etat employeur. "
La question du Budget annexe des prestations sociales agricoles
Le BAPSA a été créé par l'article 58 de la loi de
finances pour 1960 (n° 59-1454 du 26 décembre 1959). Il est
régi par les articles 1003-1 à 1003-7 du code rural.
Le système des budgets annexes est un cadre juridique (art. 20 à
22 de l'ordonnance de 1959) créé pour les services de l'Etat
producteurs de biens et services marchands. Un régime de
sécurité sociale -financé par des
prélèvements obligatoires, des transferts et des subventions
diverses- correspond difficilement à cette définition.
L'institution des lois de financement aurait pu remettre en cause l'existence
du BAPSA, qui n'est qu'un cadre comptable.
En raison de la structure démographique très défavorable
du monde agricole, le régime des exploitants agricoles est l'un des
régimes de sécurité sociale qui dépend le plus de
la solidarité des autres régimes et du contribuable. Le BAPSA
n'est pas un cas unique ; plusieurs régimes spéciaux
bénéficient de subventions d'équilibre, sans faire pour
autant l'objet d'un budget annexe : SNCF, marins, mineurs...
L'existence d'un budget annexe des prestations sociales agricoles donne au
monde agricole l'assurance que ce budget annexe sera toujours
équilibré, parce que le budget général assurera -en
dernier ressort- cet équilibre. Il apparaît à l'analyse que
le statut de budget annexe n'est pas -en lui-même- source
d'équilibre systématique. L'exécution du BAPSA peut
révéler un excédent ou un déficit (art. 1003-6 du
code rural). Un fonds de roulement existe.
La lecture comparée du fascicule budgétaire (" bleu ")
BAPSA et des comptes prévisionnels du régime des exploitants
agricoles présentés en annexe du projet de loi de financement
laisse apparaître une différence de présentation. Le BAPSA
est, en effet, plus détaillé, notamment en ce qui concerne les
recettes ; l'annexe de la loi de financement les regroupe par
catégories, alors que le BAPSA permet d'identifier chacune des
cotisations ou des impositions.
Pour 1998, le projet de BAPSA a été construit " à
droit constant ", sans tenir compte de la poursuite du basculement des
cotisations sociales maladie sur la CSG et de la mise sous condition de
ressources des allocations familiales proposée par le projet de loi de
financement.
Pour 1999, le projet de BAPSA n'était pas non plus cohérent avec
le projet de loi de financement. D'une part, les mesures " famille "
n'ont pas été prises en compte, en dehors du retour à
l'universalité des allocations familiales. D'autre part, la part
d'excédent de contribution sociale de solidarité sur les
sociétés (C3S) affectée au BAPSA était de
600 millions de francs dans le bleu budgétaire et d'un milliard de
francs dans le projet de loi de financement.
Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998 comme lors de la
discussion de la loi de finances pour 1999, un amendement de coordination a
été nécessaire pour mettre en conformité la loi de
finances avec la loi de financement.
c) Des frontières indécises entre lois de finances et lois de financement
(1) Une confusion entre recettes approuvées dans le cadre des lois de financement et recettes approuvées dans le cadre des lois de finances
Des
" jeux de miroir " existent entre loi de finances et loi de
financement, comme le montre l'exemple des droits 406 A, supprimés
à la fois par la loi de finances pour 1999 et par la loi de financement
pour 1999.
Outre qu'il est quelque peu absurde de demander deux fois au Parlement
d'approuver la même disposition, cette recette était
intégralement affectée à un
" organisme concourant
au financement de la sécurité sociale "
, à savoir
le FSV. Il aurait été infiniment plus logique de voir figurer
cette disposition en loi de financement, même si l'administration
à l'origine de cette suppression était la Direction
Générale des Impôts
43(
*
)
.
Les administrations de l'Etat ne semblent pas avoir pris parfaitement
conscience de l'existence des lois de financement, dont la raison d'être
est pourtant bien de traiter les questions relatives aux dépenses et aux
recettes intégralement affectées à la
sécurité sociale.
Le régime fiscal des impositions et cotisations de la
sécurité sociale est également en cause.
Le débat à l'Assemblée nationale sur la
déductibilité du point de CSG maladie transféré par
la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 est,
à cet égard, particulièrement intéressant
44(
*
)
.
L'inscription dans le projet de loi de financement de la
déductibilité de la CSG aurait été
considérée par le Conseil d'Etat comme un " cavalier
social ".
Notre collègue M. Yves Fréville, alors député
d'Ille-et-Vilaine, s'en étonnait :
" Si nous voulons
discuter de cotisations ou d'impôts affectés à la
sécurité sociale (...) nous devrons bien, l'accessoire suivant le
principal, définir le régime fiscal de ces cotisations et de ces
déductions. La meilleure preuve est que, selon l'ordonnance organique
sur les lois de finances, toute disposition fiscale peut figurer dans n'importe
quelle loi. (...) Je souhaite très vivement que le Conseil
constitutionnel, qui aura un jour à se prononcer, dise très
clairement que cette interprétation prive le débat de son
importance, dise que l'accessoire suit le principal et que nous pouvons
discuter ici des conséquences fiscales de mesures qui concernent
l'équilibre financier de la sécurité
sociale "
(2) Une confusion entre prestations sociales et prestations gérées pour le compte de l'Etat
La
gestion pour le compte de l'Etat de prestations (RMI, AAH) a pour
conséquence, dans les comptes de la CNAF, des dépenses
" compensées " par un remboursement de l'Etat.
Mais la distinction entre les prestations légales et les prestations
gérées pour le compte de l'Etat semble délicate, puisque
le RMI n'apparaît pas dans les comptes présentés en loi de
financement, à la différence de l'AAH.
Certes, le RMI n'est pas une prestation de sécurité sociale,
à l'inverse de l'AAH, mais le traitement des deux dépenses prises
en charge
in fine
par les finances de l'Etat est différent. Comme
le note l'enquête conjointe de l'Inspection Générale des
Affaires Sociales et de l'Inspection des Finances de janvier 1999, l'AAH est
" un minimum social de nature ambiguë "
.
La structure des lois de financement dépend ainsi de choix dont la
justification est peu évidente.
Le gonflement des masses financières peut être aléatoire
comme le montre la majoration de l'allocation de rentrée scolaire. Cette
décision prise en cours d'année entraîne une augmentation
de l'objectif de dépenses de la branche famille et une augmentation
à due concurrence des prévisions de recettes au titre du
remboursement à la CNAF par l'Etat de cette prestation.
De sorte qu'analyser l'application des lois de financement revient à
constater le gonflement des masses financières pour souligner ensuite
qu'un tel gonflement n'a guère de signification.
d) L'absence surprenante de la dette sociale
Par
ailleurs, la dette sociale est absente dans les lois de financement de la
sécurité sociale. Comme le montre un observateur
critique
45(
*
)
, cette
" disparition "
est fondée sur une
interprétation du 2° de l'article LO. 111-3 selon lequel
la loi de financement de la sécurité sociale
" prévoit, par catégorie, les recettes des régimes
obligatoires de base et des organismes créés pour concourir
à leur financement "
.
Les annexes jointes au projet de loi semblent distinguer entre les organismes
ayant pour mission de concourir au financement des régimes et ceux qui
concourent à l'apurement de la dette. De fait, les comptes de la CADES
sont présentés au sein de l'annexe
f),
mais les
recettes et les dépenses ne figurent pas dans les articles de la loi de
financement relatifs aux prévisions de recettes et aux objectifs de
dépenses.
S'agissant des objectifs de dépenses par branche, il serait probablement
difficile d'y faire figurer les comptes de la CADES, à moins de
créer une ligne ad hoc. En revanche, concernant les recettes, il est
tout à fait étonnant que la contribution pour le remboursement de
la dette sociale, qui est présente sur toutes les fiches de paie,
n'apparaisse pas dans la catégorie des recettes inscrites en loi de
financement. Il reste que cette inscription au sein des recettes aurait pour
effet d'accroître l'hétérogénéité du
champ des dépenses et des recettes figurant en loi de financement.
De fait, le Conseil constitutionnel a reconnu, dans sa décision
n° 97-393 DC sur la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1998, que les opérations de la CADES contribuait à
l'équilibre financier du régime général de la
sécurité sociale :
" Considérant que l'article contesté opère un
nouveau transfert de dette de l'Agence centrale des organismes de
sécurité sociale à la Caisse d'amortissement de la dette
sociale ; qu'en raison de l'ampleur de la dette ainsi
transférée, cette mesure permettra d'alléger les frais
financiers du régime général de la sécurité
sociale et de réduire ses besoins de financement externes dans une
proportion contribuant ainsi de façon significative à son
équilibre financier "
.
4. Le suivi de l'application est pour l'instant embryonnaire
Le suivi de l'application 46( * ) de la loi de financement de la sécurité sociale est, par nature, très récent. Il ne semble pas avoir fait de progrès majeurs depuis trois ans.
a) L'absence d'un tableau de bord des finances sociales
Il est
pourtant essentiel, pour les pouvoirs publics, de disposer d'un tableau de bord
des finances sociales,
d'un instrument technique fiable
, avant de
procéder à des
décisions politiques
.
Le suivi infra-annuel des dépenses qui a suscité le plus de
critiques, est paradoxalement celui qui est aujourd'hui le plus avancé.
La CNAMTS diffuse des statistiques à 45 jours, regroupant les trois
principaux régimes d'assurance maladie ; elle a désormais
identifié la quasi-totalité des prescripteurs. Ces statistiques
respectent les masses votées en lois de financement : objectifs de
dépenses de la branche assurance maladie, ONDAM.
Le suivi infra-annuel des recettes reste, à l'inverse, embryonnaire. La
mise en place du système RACINE ne date que de janvier 1998. Il est
particulièrement difficile de disposer de chiffres sûrs sur
l'accroissement des cotisations sociales, mois par mois. Pour l'année
1998, date de première application du système, les régimes
de sécurité sociale et les organismes concourant à leur
financement n'ont disposé des premiers chiffres qu'au mois d'octobre.
La commission des comptes de la sécurité sociale de printemps,
consacrée au seul régime général, ne permet pas de
disposer d'évaluations sur les objectifs de dépenses et sur les
prévisions de recettes votés par le Parlement.
Elle procède, en revanche, à une actualisation des comptes des
régimes de sécurité sociale en fonction des
décisions prises lors de l'examen par le Parlement du projet de loi de
financement. Ces décisions peuvent modifier sensiblement les chiffres
présentés par les annexes des lois de financement. Dès
lors, il apparaît curieux qu'il faille attendre six mois pour que cette
évaluation soit rendue publique.
De manière générale, le fonctionnement des commissions des
comptes ne semble pas s'être suffisamment adapté à la
création des lois de financement. La commission des comptes de la
sécurité sociale de septembre 1998 ne comportait ainsi aucune
évaluation sur la réalisation de l'ONDAM 1998.
Bien plus, l'annexe
b)
au projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999, censée retracer l'application
des mesures de la loi de financement, ne comportait aucune évaluation
des objectifs de dépenses, des prévisions de recettes et de
l'ONDAM, qui sont pourtant des dispositions votées explicitement par le
Parlement. Ce dernier se prononce sur la loi de financement de l'année
n+1, sans disposer d'une évaluation révisée des chiffres
de l'année n.
b) La multiplication des annexes aux projets de loi de financement
La
production des annexes de la loi de financement est, pour l'administration de
la sécurité sociale, une lourde charge. Il importe de
vérifier si le contenu des différents fascicules est
nécessaire au contrôle du Parlement, et suffisant pour
apprécier les dispositions du projet de loi.
Le législateur n'a pas simplifié le contenu de l'annexe
b)
, puisque l'article 3 de la loi de financement pour 1997 n°
96-1160 du 27 décembre 1996 a demandé la remise de sept
rapports supplémentaires :
- le bilan des contrôles médicaux effectués dans le
secteur de l'hospitalisation ;
- l'état de la réforme de la nomenclature
générale des actes professionnels ;
- l'exécution budgétaire de la loi de financement ;
- le bilan des expérimentations des " filières et
réseaux de soins " ;
- la mise en oeuvre des références médicales
opposables ;
- les restructurations hospitalières ;
- le bilan de l'exécution du programme de médicalisation des
systèmes d'information ;
- le bilan des contrôles d'attributions des prestations familiales.
De surcroît, l'article 25 de la loi n° 97-1164 du 19 décembre
1997 de financement de la sécurité sociale pour 1998
-créant le fonds d'accompagnement social pour la modernisation des
hôpitaux (FASMO)- dispose que
" pour l'information du Parlement,
le Gouvernement lui présentera, chaque année, pendant six ans, un
rapport attaché à l'annexe visée au b du II de l'article
LO. 111-4 du code de la sécurité sociale sur l'utilisation du
fonds ".
La décision du Conseil constitutionnel n° 98-404 du 18
décembre 1998 sur la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 est venue préciser le cadre dans lequel s'exercent les
demandes supplémentaires des parlementaires. Pour le Conseil,
" seule la loi organique peut déterminer les rapports qui
doivent être annexés aux projets de loi de financement de la
sécurité sociale "
; le I de l'article 28 de la loi
déférée, demandant un rapport sur
" l'état de la santé bucco-dentaire de la
population "
et joint à l'une des annexes au projet de loi de
financement, est contraire à la Constitution, puisque
" adopté au terme d'une procédure
irrégulière "
.
Cette décision peut se justifier par la volonté de limiter la
multiplication vaine de documents n'ayant qu'un rapport anecdotique avec le
financement de la sécurité sociale. Elle est toutefois
sévère et fige le contenu des annexes, dont on peut d'ailleurs
regretter qu'elles aient été aussi strictement définies
dans la loi organique.
Rien n'empêche au demeurant le législateur de demander un rapport
déposé au même moment que la date du dépôt du
projet de loi, fixée par la loi organique (15 octobre au plus
tard).
c) Les freins à la mission de la Cour des comptes
Le contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale par la Cour des comptes, prévu par l'article 47 alinéa 1, a suscité beaucoup d'espoirs. Le rapport de la Cour pourrait permettre au Parlement de dépasser les imperfections du rapport de la commission des comptes et les imprécisions des annexes.
La Cour des comptes, la sécurité sociale et le Parlement
Deux
innovations fondamentales ont tout d'abord été introduites par la
loi du 25 juillet 1994 :
- l'article 6 (devenu
article L. 111-6 du code des juridictions
financières
) fait obligation à la Cour de rendre compte, dans
son rapport annuel sur l'exécution du budget, de la manière dont
l'Etat acquitte ses cotisations ou verse ses contributions au régime
général de sécurité sociale.
- l'article 13 prévoyait la transmission d'un rapport annuel sur la
sécurité sociale comprenant trois parties : une analyse des
comptes de l'ensemble des organismes soumis au contrôle de la
juridiction, une synthèse des avis des CODEC et les observations
éventuelles de la Cour adressées aux autorités de tutelle.
A la suite de la révision constitutionnelle du 22 février 1996 et
du
dernier alinéa du nouvel article 47-1 de la constitution
" La Cour des comptes assiste le Parlement et le Gouvernement dans le
contrôle de l'application des lois de financement "
,
le
nouvel article L.O. 132-3 du code des juridictions financières
,
introduit par la loi organique n° 96-646 du 22 juillet 1996, a repris la
rédaction de l'article 13 de la loi de 1994, en l'adaptant :
" Chaque année, la Cour des comptes établit un rapport
sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale.
Ce rapport présente, en outre, une analyse de l'ensemble des comptes des
organismes de sécurité sociale soumis à son contrôle
et fait une synthèse des rapports et avis émis par les organismes
de contrôle placés sous sa surveillance. Ce rapport est remis au
Parlement sitôt son arrêt par la Cour des comptes.
Les réponses faites aux observations de la Cour des comptes sont jointes
au rapport. "
Par ailleurs,
l'article L. 132-3-1 du code des juridictions
financières
dispose que
" la Cour des comptes peut
être saisie par la commission parlementaire compétente de toute
question relative à l'application des lois de financement et
procède, dans ce cadre et à la demande de cette commission, aux
enquêtes sur les organismes soumis à son contrôle. "
" En l'absence d'informations pertinentes "
47(
*
)
, ce contrôle ne répond pas tout à
fait aux attentes. La Cour a rendu son premier rapport, le
13 octobre 1998, portant sur l'application d'une loi de financement
(celle de 1997). Seules les pages 47 à 96 de ce rapport par ailleurs
très volumineux et très complet sont liées directement
à la mission constitutionnelle de la Cour.
Ce contrôle de l'application des lois de financement reste, par ailleurs,
fragmentaire ; la Cour des comptes s'est, par exemple, prudemment abstenue
d'effectuer un bilan financier de l'effectivité des mesures de
redressement annoncées en septembre 1996.
Le
développement du rapport de la Cour des comptes
sur la
sécurité sociale
Année |
Nombre de pages |
1996 |
467 |
1997 |
514 |
1998 |
1.047 |
Le reste du rapport comprend des informations très utiles, mais non directement liées au contrôle de l'application de la loi de financement.
5. La portée de l'ONDAM est encore ambiguë
L'Objectif national de dépenses d'assurance maladie
(ONDAM)
est à l'évidence devenu l'acronyme central des lois de
financement de la sécurité sociale.
Le débat se concentre sur l'évolution des prérogatives du
Parlement ; or, la sanction d'un dépassement de l'ONDAM est
aujourd'hui inexistante.
a) Le " brouillard " de la répartition entre enveloppes
La loi de financement de la sécurité sociale donne au Parlement le pouvoir de voter le montant de cet ONDAM, selon une précision tout à fait étonnante.
Les ONDAM 1997 - 1999
|
LFSS 1997 |
LFSS 1998 |
LFSS 1999 |
Montant (en milliards de francs) |
600,2 |
613,8 |
629,9 |
Taux de variation |
1,7 % |
2,2 % |
2,6 % |
N.B.
Montants indiqués par les lois de financement.
Depuis la première loi de financement de la sécurité
sociale, certains parlementaires -et non des moindres- jugent l'instrument
insuffisant et souhaitent que le Parlement se prononce sur la
répartition des enveloppes.
M. Jean-Luc Préel, député UDF, a ainsi
déposé le 25 février 1998 une proposition de loi
organique, visant à élargir le contenu des lois de financement de
la sécurité sociale
48(
*
)
, pour que
les lois de financement fixent "
le montant des contributions des
régimes obligatoires de base au financement des établissements
publics nationaux intervenant en matière de santé
publique
".
Fort logiquement, M. Jean-Luc Préel s'expliquait ainsi le 30 octobre
1998
49(
*
)
:
" Je regrette que nous
ne votions pas la répartition de l'ONDAM entre les soins ambulatoires et
l'hospitalisation. En effet, tous les professionnels que nous rencontrons
s'imaginent que ce sont les députés qui déterminent
l'enveloppe de chaque profession. Quel pouvoir avons-nous dans l'imaginaire de
nos concitoyens ! En fait, il n'en est rien : nous ne votons même pas la
répartition entre les soins ambulatoires et l'hospitalisation. "
Lors du débat sur le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999, à l'initiative de M. Evin,
rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail et de MM.
Préel, Foucher, Gengenwin et Bur, l'Assemblée nationale avait
ajouté à l'article du projet de loi fixant l'ONDAM pour 1999
l'alinéa suivant :
" Avant la première lecture du projet de loi de financement de
la sécurité sociale par l'Assemblée nationale, le
Parlement est informé de la répartition prévisionnelle de
l'objectif national de dépenses d'assurance maladie "
.
Cette précision n'apportait pas de véritable révolution,
la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale disposant de la répartition en quatre
sous-enveloppes de l'ONDAM environ quinze jours avant le début de la
séance publique. Le Gouvernement s'était toutefois opposé
à cet amendement, arguant de sa non-compatibilité avec les
dispositions de la loi organique.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 98-404 DC du
18 décembre 1998, a constaté que la disposition introduite
par l'Assemblée nationale empiétait sur le domaine
réservé par la Constitution à la loi organique et devait
être dès lors
" déclarée contraire à
la Constitution comme ayant été adoptée au terme d'une
procédure irrégulière "
. Cette décision
n'était pas tout à fait évidente ; le Parlement ne
demandant pas à voter la répartition de l'ONDAM, mais à
être informé. M. Claude Evin avait indiqué qu'il s'agissait
d'un moyen de
" tester le Conseil constitutionnel, qui (...) ne saurait
s'opposer à une meilleure information du Parlement "
50(
*
)
.
Force est de constater que la situation n'est pas satisfaisante.
D'un côté, comme le note M. Jérôme Cahuzac,
rapporteur pour avis de la commission des Finances de l'Assemblée
nationale, "
on imagine mal qu'en loi de finances initiale on demande
au Parlement de voter l'ensemble du titre IV sans connaître les
ventilations ministère par ministère. "
.
De l'autre, la comparaison avec les crédits budgétaires inscrits
en loi de finances ne vaut pas raison car elle fait peu de cas des
responsabilités qui sont celles des partenaires sociaux dans la gestion
de l'assurance maladie et de la nécessité de développer
une politique conventionnelle.
Tout au plus, peut-on considérer qu'être informé
solennellement de cette répartition sans pourtant la voter serait
l'approuver implicitement, ce qui serait certainement la pire des solutions et
constituerait un nouveau risque " d'instrumentalisation " du
Parlement.
En outre, figer législativement la répartition de l'ONDAM entre
prescripteurs est incompatible avec deux autres préoccupations :
une certaine fongibilité des enveloppes, notamment à partir d'un
coût par pathologie ; le souci d'aller vers une forme de
régionalisation de la politique d'assurance maladie qui rend difficile
la multiplication des répartitions selon plusieurs critères.
En réalité, la véritable question est celle du contenu de
l'ONDAM en termes de santé publique.
Passée la constitution de l'agrégat comptable initial dans la loi
de financement pour 1997, il importe de donner un sens à l'approbation
par le Parlement de son évolution ultérieure.
Or, la fixation par les lois de financement pour 1998, puis 1999 d'un taux de
progression de l'ONDAM repose davantage sur la reconduction de moyens,
calculée de façon plus ou moins réaliste ou rigoureuse,
que sur l'analyse des besoins que la collectivité est prête
à satisfaire dans le domaine de la santé publique.
b) Une dérive auquel le Parlement assiste impuissant
Au-delà de ce débat sur l'évolution des
pouvoirs du Parlement sur l'ONDAM, il convient d'insister sur un point majeur,
relevé par le président de la CNAMTS : la sanction
éventuelle d'un dépassement de l'ONDAM est, à l'heure
actuelle, inexistante. L'ONDAM 1998 a été voté par les
parlementaires à hauteur de 613 milliards de francs. Il sera
supérieur à 622 milliards de francs.
Aucune
conséquence n'est tirée de ce dépassement, ce qui
apparaît choquant.
Il existe pourtant la possibilité de
recourir à des lois de financement en cours d'année,
baptisées -par une analogie probablement abusive avec les lois de
finances- lois de financement rectificatives, mais qui permettraient de
" rectifier le tir ".
Le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de
septembre 1998 abordait une question plus technique, celle de la
détermination des parts de chaque régime dans l'ONDAM.
Cette détermination apparaît nécessaire alors que l'on
souhaite organiser un suivi statistique de la politique de
maîtrise : "
l'importance des questions
précédemment soulevées plaide pour une procédure
publiquement consensuelle de détermination des parts de chaque
régime dans l'ensemble de l'ONDAM et pour que toutes les commissions des
comptes soient des commissions tous régimes (...) afin que soit
assurée une cohérence entre le plan de la maîtrise des
dépenses qui est d'emblée tous régimes, et celui de la
situation financière des organismes de sécurité sociale
qui doit se conformer à l'existence de comptes individualisés par
régime
"
51(
*
)
.
Le rapport de mai 1999 de la commission des comptes de la
sécurité sociale construit un ONDAM régime
général en multipliant l'ONDAM tous régimes par la part
que devrait représenter en 1999 le régime général
dans l'ensemble des dépenses d'assurance maladie des
régimes : "
cette part estimée peut être en
appliquant à la part estimée pour 1998 la dérive moyenne
de 0,3 point de la part du régime général constatée
au cours des dernières années
"
52(
*
)
.
Améliorer la transparence des conditions de répartition de ces
enveloppes entre professionnels de santé, entre régimes et entre
régions, est certainement nécessaire.
La question du suivi de l'exécution de l'ONDAM demeure
posée.
6. L'équilibre est abordé de manière fragmentaire
a) L'absence d'un équilibre global
La loi
organique de juillet 1996 a, en quelque sorte, organisé une absence
d'équilibre des lois de financement de la sécurité
sociale : les objectifs de dépenses sont prévus par
branche
, et pour les seuls régimes de plus de
20.000 cotisants, les prévisions de recettes sont définies
par
catégorie
sans recouvrir pour autant le même champ que
les objectifs de dépenses, les plafonds d'avances de trésorerie
concernent enfin les
régimes
.
Il n'y a donc pas d'article d'équilibre en loi de financement comme il
peut en exister en loi de finances. Les données sur lesquelles se
prononcent le Parlement ne permettent pas davantage de reconstituer un
équilibre par branche.
Pourtant, l'article 34 de la constitution dispose que "
les lois de
financement de la sécurité sociale déterminent les
conditions générales de son équilibre financier et, compte
tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de
dépenses "
.
Le Conseil constitutionnel a rendu, en décembre 1997, une
décision où il se réfère à
" l'exigence constitutionnelle qui s'attache à
l'équilibre financier de la sécurité sociale "
pour justifier,
" compte tenu des sommes en jeu "
, la
validation rétroactive de la BMAF (base mensuelle des allocations
familiales) pour 1996 et les exercices ultérieurs.
Comme des commentateurs ont pu le noter,
" on pourrait même
s'interroger sur la constitutionnalité d'une loi de financement qui,
à la différence des deux premières, entérinerait un
déficit sans afficher un objectif clair de retour à
l'équilibre accompagné de mesures sérieuses de
redressement financier "
53(
*
)
.
b) Les comptes du régime général au centre du débat
De fait,
cette absence d'un équilibre des lois de financement a conduit le
Parlement à débattre du seul équilibre des comptes du
régime général.
Les lois de financement proposent des mesures de redressement, portant sur le
seul régime général, alors que les prévisions et
les objectifs votés par les parlementaires concernent l'ensemble des
régimes.
Le débat se concentre, en effet, sur le tableau présenté
à l'annexe
c)
du projet de loi de financement et qui figure
en bonne place dans le dossier de presse du projet de loi.
Ce tableau détaille l'impact des mesures proposées par le
Gouvernement sur les comptes des branches du régime
général, en partant des comptes tendanciels annoncés par
la commission des comptes du mois de septembre, pour aboutir à des
soldes prévisionnels " après loi de financement ".
Cette situation n'est guère satisfaisante car elle conduit le Parlement
à se prononcer sur les comptes prévisionnels d'un régime
de sécurité sociale géré par les partenaires
sociaux, ce que souhaitait précisément éviter la loi
organique. Le Parlement entérine de surcroît cet équilibre
du régime général sans naturellement le voter
explicitement.
Enfin, cette restriction du débat au seul régime
général est fâcheuse pour deux raisons :
- ne parler que du déficit du régime général
fait porter sur ce seul régime la responsabilité des
dérapages ;
- en sens inverse, les effets du projet de loi de financement sur les
autres régimes sont passés sous silence.
A titre d'exemple, le fait d'avoir attribué la deuxième
répartition CSG et droits sur les alcools prioritairement à la
CNAM, par la loi de financement pour 1998, a eu pour effet de diminuer son
déficit ; en revanche, cette mesure a été
défavorable à la CANAM. Les intérêts propres des
non-salariés, échappant à la " norme " du
régime général, sont souvent méconnus.
Il est important de rappeler que la loi du 25 juillet 1994, en affirmant le
principe de séparation des branches, a affirmé
l'objectif
d'équilibre de chaque branche du seul régime
général.
Les contraintes d'équilibre sur la
sécurité sociale sont aujourd'hui, à la fois
dépourvues de sanction explicite par le Parlement, et en même
temps multiples.
c) Un plafond d'avances de trésorerie non significatif
Le
rapport 1998 de la Cour des comptes consacre un long développement
à "
l'ambiguïté
" et aux
"
limites
" de la notion de plafonds d'avance
54(
*
)
.
En effet, les besoins de trésorerie des régimes soumis à
plafond ne reflètent pas seulement le solde de leurs recettes et de
leurs dépenses (c'est-à-dire leur solde comptable), mais
également les éventuels décalages de trésorerie
auxquels ils sont soumis.
Plafonds d'avances de trésorerie 1997 - 1999
en milliards de francs |
LFSS 1997 |
LFSS 1998 |
LFSS 1999 |
Régime général |
66,0 |
20,0 |
24,0 |
Régime des exploitants agricoles |
8,5 |
8,5 |
10,5 |
CNRACL |
|
2,5 |
2,5 |
Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines |
2,3 |
2,3 |
2,3 |
Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat |
0,8 |
0,5 |
0,5 |
Or,
l'article de la loi organique du 22 juillet 1996 était un moyen pour le
Parlement d'exercer un contrôle, principalement sur les comptes du
régime général, "
l'objectif étant de
contenir le déficit qui ne doit pas dépasser a priori celui
inscrit dans les comptes du régime général annexés
à la loi de financement
"
55(
*
)
.
L'application des deux premières lois de financement s'est traduite par
une modification des plafonds du régime général par voie
réglementaire. Le relèvement du plafond d'avances du
régime général opéré par le décret
n° 98-753 du 26 août 1998 a été justifié
essentiellement par la majoration de l'allocation de rentrée scolaire et
le dérapage des dépenses d'assurance maladie.
Le profil d'avances de trésorerie du régime général
proposé en loi de financement initiale sera toujours faux à
partir du moment où n'est pas prise en compte la majoration de
l'allocation de rentrée scolaire décidée en cours
d'année.
En outre, comme le montre le tableau ci-après, au sein même du
régime général,
le
lien n'apparaît
guère univoque entre le niveau du déficit et le plafond du
recours à l'emprunt
.
De sorte que le plafond des avances de trésorerie se
révèle décevant comme instrument de contrôle des
déficits.
Les avances de trésorerie et le solde du régime général 1997 - 1999
en milliards de francs |
LFSS 1997 |
LFSS 1998 |
LFSS 1999 |
Plafond inscrit en loi de financement |
66,0 |
20,0 |
24,0 |
Solde prévu du régime général |
- 29,7 |
- 12,0 |
0,0 |
Solde du régime général (estimations) |
- 33,7 |
- 17,0 |
- 5,2 |
Plafond après mesure réglementaire |
80,0 |
31,0 |
|
les propositions de la commission des affaires sociales
" On ne change pas la société par
décret "
, avait mis en garde le sociologue Michel Crozier. A
l'évidence, la sécurité sociale ne se réforme pas
uniquement au moyen de textes juridiques.
" 1995, c'est hier "
, comme l'a rappelé M. Jean-Marie
Spaeth lors de son audition devant le groupe de travail. Pour preuve, la loi du
25 juillet 1994, véritable " loi matrice "
annonçant la loi organique du 22 juillet 1996, n'a pas encore
épuisé toutes ses richesses.
Aussi n'est-il pas étonnant que l'institution des lois de financement
n'ait pas eu le temps de produire tous ses effets.
Mais avant que ces lois ne soient figées dans leur pratique, il importe
que le Parlement puisse réfléchir aux ajustements et
améliorations possibles de ce nouvel instrument. Tel était
l'objet du groupe de travail constitué au sein de votre commission des
Affaires sociales.
Il serait regrettable en effet de considérer que la loi organique du
22 juillet 1996 est d'ores et déjà un texte intangible,
comme l'est devenue l'ordonnance portant loi organique du 2 janvier 1959
relative aux lois de finances
56(
*
)
.
Dès lors, une amélioration significative du contenu des lois de
financement nécessite
trois préalables
, sur lesquels le
Parlement doit se montrer particulièrement vigilant.
C. TROIS PRÉALABLES POUR PERMETTRE AUX LOIS DE FINANCEMENT DE JOUER PLEINEMENT LEUR RÔLE
1. Disposer des comptes à temps
Les
dates d'arrêté des comptes n'ont jamais eu, dans l'histoire de la
sécurité sociale, autant d'importance.
Si les comptes
étaient arrêtés beaucoup plus tôt qu'à l'heure
actuelle, le Parlement, les partenaires sociaux, la Cour des comptes,
l'administration elle-même, disposeraient de davantage de temps pour
procéder à une analyse approfondie de l'existant et pour
élaborer, sur des bases solides, des prévisions et des
propositions.
Le calendrier que subissent actuellement les partenaires sociaux, qui doivent
se prononcer en moins d'une semaine sur des dispositions complexes, ne doit pas
être considéré comme une fatalité.
De même, il semble légitime que le Parlement puisse disposer de
davantage de temps pour à la fois :
- apprécier l'application de la loi de financement n-1 à
travers les rapports de la commission des comptes et de la Cour des
comptes ;
- étudier les prévisions révisées de
l'année n et celles élaborées pour l'année
n+1 ;
- évaluer enfin les propositions du Gouvernement concernant
l'année n+1.
L'unique solution est d'accélérer de manière
significative la sortie des comptes des organismes de sécurité
sociale.
Le groupe de travail s'accorde pour reconnaître qu'il faut fixer
clairement un objectif : les comptes des organismes de
sécurité sociale de l'année n doivent être
arrêtés définitivement avant le 31 mars de l'année
n+1.
La commission des comptes de la sécurité sociale de printemps
deviendrait une commission " tous régimes ", et non plus
seulement consacrée au régime général. Cette
commission effectuerait ainsi le bilan de l'exercice n-1, avec quatre mois
d'avance par rapport à la situation actuelle.
La deuxième réunion annuelle de la commission des comptes de la
sécurité sociale aurait lieu au tout début du mois de
septembre, et non à la fin du mois de septembre, à partir du
moment où les prévisions macro-économiques auront
été retenues -dans le cadre de la préparation du projet de
loi de finances- dès la fin du mois de juillet.
Cette réunion devrait s'en tenir aux prévisions
révisées de l'exercice n et aux prévisions tendancielles
de l'exercice n+1. Le Gouvernement pourrait, s'il souhaite annoncer le
même jour les principales mesures de l'avant-projet de loi -les
délais étant de toute façon très restreints-
organiser une réunion spécifique, afin de ne pas confondre
l'analyse des soldes tendanciels ou spontanés et la présentation
des mesures de redressement et leur impact sur les comptes.
L'avant-projet de loi pourrait être ainsi transmis aux différents
régimes dès cette date. Adopté en conseil des ministres
vers le 15 septembre, le texte serait immédiatement déposé
à l'Assemblée nationale.
Le calendrier idéal des lois de financement
janvier - février
: travaux du Haut
comité
de la santé publique ;
mi-mars
: réunion de la conférence nationale de
santé ;
31 mars
: date d'arrêté des comptes pour tous les
organismes de sécurité sociale ;
fin mai
: réunion de la commission des comptes de la
sécurité sociale tous régimes - publication des
résultats de l'année n-1 - révision de la prévision
de l'année n ;
fin juillet
: remise du rapport de la Cour des comptes sur
l'application de la loi de financement n-1 ;
début septembre
: réunion de la commission des
comptes de la sécurité sociale - révision des
prévisions de l'année n - prévisions des comptes
tendanciels de l'année n+1 ;
début septembre :
présentation des principales
mesures du projet de loi ;
première quinzaine de septembre
: consultation des
partenaires sociaux ;
vers le 15 septembre
: adoption par le Conseil des ministres ;
15-20 septembre
: début des travaux en commission à
l'Assemblée nationale ;
15 octobre
: date officielle du dépôt de la
dernière annexe au projet de loi, afin de faire courir les délais
prévus par la Constitution et la loi organique.
Non seulement l'Assemblée nationale et le Sénat disposeraient de
trois semaines supplémentaires par rapport au calendrier actuel, mais
les deux assemblées verraient leurs tâches allégées,
puisqu'elles prendraient connaissance des comptes de l'année n-1
dès le mois de mai.
La Cour des comptes aurait également le loisir, à partir du
moment où la commission des comptes de printemps porterait sur des
résultats définitifs de tous les régimes, de
procéder à sa mission constitutionnelle de contrôle de
l'application de la loi de financement de l'année n-1, et pourrait
remettre son rapport dans le courant de l'été.
Votre rapporteur considère que le Parlement se doit d'exiger des
" comptes à temps "
et de ne pas
" relâcher cette pression ".
Il a été
encouragé dans cette voie par les différentes
personnalités entendues par le groupe de travail.
Les travaux de la mission Déniel, qui s'attaque à ce difficile
problème, en analysant toutes les raisons de retard et en
édictant des normes comptables qui s'appliqueront de manière
unique pour tous les organismes de sécurité sociale,
méritent non seulement d'être encouragés mais
également soutenus.
L'objectif d'une remise des comptes avant le 31 mars doit être ainsi
clairement affiché et un " plan de marche " établi,
prenant en compte la nécessaire formation des personnels et l'adaptation
des systèmes d'information pour que cet objectif puisse être
atteint dans un délai de trois ans.
Votre rapporteur estime que cette échéance doit d'ores et
déjà être inscrite dans la loi.
2. Redéployer les moyens administratifs
La direction de la sécurité sociale s'est vu confier de nouvelles missions, sans bénéficier de véritables moyens supplémentaires.
Evolution des effectifs réels de la direction de la
sécurité sociale
du 1
er
janvier 1990 au
1
er
janvier 1999
Date |
Catégorie A |
Catégorie B |
Catégorie C |
Total |
1 er janvier 1990 |
120 |
42 |
90 |
252 |
1 er janvier 1991 |
110 |
41 |
88 |
239 |
1 er janvier 1992 |
109 |
35 |
86 |
230 |
1 er janvier 1993 |
114 |
35 |
86 |
226 |
1 er janvier 1994 |
125 |
33 |
77 |
234 |
1 er janvier 1995 |
127 |
38 |
82 |
247 |
1 er janvier 1996 |
131 |
37 |
76 |
244 |
1 er janvier 1997 |
132 |
38 |
77 |
247 |
1 er janvier 1998 |
133 |
37 |
74 |
244 |
1 er janvier 1999 |
134 |
37 |
67 |
238 |
Source : Direction de la sécurité
sociale
Force est de constater que l'effort de recrutement de personnels de
catégorie A a débuté en 1992, pour
s'accélérer entre 1993 et 1996, puis stagner depuis. Par
ailleurs, la création des lois de financement n'a pas
entraîné les mêmes conséquences pour les
sous-directions de la sécurité sociale.
Seule la cinquième sous-direction (financement et gestion de la
sécurité sociale) était à l'origine directement
concernée ; une sixième sous-direction de la
prévision et des études financières a heureusement
été créée, mais le bureau chargé des comptes
de la sécurité sociale, devenu bureau 6A, n'a pas vu ses
effectifs augmenter pour autant. Deux contrats de catégorie A seraient
toutefois en cours de recrutement.
Les six sous-directions de la direction de la sécurité sociale
-
1
ère
sous-direction : financement de l'offre de soins
- 2
ème
sous-direction : accès aux soins
- 3
ème
sous-direction : retraites
- 4
ème
sous-direction : famille, accidents du travail et
handicaps
- 5
ème
sous-direction : financement et gestion de la
sécurité sociale
- 6
ème
sous-direction : prévision et
études financières
Un renforcement des moyens est nécessaire d'un point de vue quantitatif.
Un redéploiement au sein du ministère de l'emploi et de la
solidarité, dont les effectifs budgétaires
s'élèvent à 24.300 personnes en 1999, le permettrait au
demeurant.
Mais il doit être également qualitatif. M. Raoul Briet, directeur
de la sécurité sociale, a insisté lors de son audition par
le groupe de travail sur la nécessité de recruter des profils
nouveaux pour le bon accomplissement des nouvelles missions de la
Direction : fiscalistes, statisticiens, informaticiens.
Une solution simple consisterait à réaffecter du personnel entre
ministères. Or, cette solution s'avère quasiment impossible. Il
est très étonnant de constater, une fois encore, l'extrême
difficulté de l'Etat à redéployer ses effectifs en raison
notamment de l'opacité et de
l'hétérogénéité des régimes de
rémunération.
La direction de la sécurité sociale cumule un certain nombre de
fonctions. Comme l'a noté M. Alain Déniel, elle est à la
fois "
la direction du budget, la direction de la prévision et
la direction de la comptabilité publique
" des finances
sociales.
Les mêmes fonctionnaires sont investis de trois missions :
- tutelle des régimes ;
- comptes de la commission des comptes ;
- préparation du projet de loi de financement, et notamment des
annexes.
La création d'une nouvelle direction, chargée du financement de
la sécurité sociale, pourrait être un objectif de moyen
terme, à condition de ne pas reproduire le cloisonnement que
connaît le ministère des Finances.
La modernisation de l'administration de tutelle n'est pour autant pas
suffisante. Il apparaît essentiel de responsabiliser les organismes de
sécurité sociale. De ce point de vue, les conventions d'objectifs
et de gestion prévoient la conclusion de contrats d'objectifs et de
gestion entre l'organisme national et les organismes locaux : la CNAMTS et
les CRAM, l'ACOSS et les URSSAF, la CNAF et les CAF, etc. Les contrats
d'objectifs et de gestion devraient comporter des engagements des caisses
locales pour accélérer la sortie de leurs comptes.
Une question demeure néanmoins posée, relative à la
politique comptable des organismes de sécurité sociale. A l'heure
actuelle, cette politique (provisions, charges à payer) n'est
déterminée ni par le directeur de l'organisme, ni par le conseil
d'administration, mais par le comptable. Il serait souhaitable que la
responsabilité en incombe au directeur de l'organisme.
L'accélération de la sortie des comptes reste également
suspendue à la redéfinition des processus d'affectation des
recettes. Le projet RACINE devrait permettre une nette amélioration de
la répartition des encaissements. Il importe que ce projet soit soutenu
et que différents moyens soient mis en oeuvre pour mieux évaluer
ses effets.
Mais certaines des recettes des organismes de sécurité sociale
sont précisément liées à l'évaluation des
déficits comptables : CSG et C3S, dont la répartition
dépend elle-même de la répartition de la CSG.
Un système de répartition forfaitaire de la CSG entre les
différents régimes d'assurance maladie, fixée de
manière législative, serait préférable au
mécanisme complexe mis en oeuvre.
Il importe également de faire évoluer la culture comptable des
organismes de sécurité sociale -marqués par le souci du
" chiffre vrai "
, selon l'expression de M. Alain
Déniel- pour concilier la double exigence d'efficacité et
d'exactitude s'attachant aux comptes sociaux.
Au-delà d'une réorganisation administrative et de simplifications
législatives, il serait judicieux qu'une responsabilité politique
soit plus clairement engagée, à travers la nomination d'un
secrétaire d'Etat qui, au sein du Gouvernement, serait
spécifiquement chargé de la sécurité sociale, des
différentes réformes engagées et du suivi de ses comptes.
Ce secrétaire d'Etat pourrait utiliser sa légitimité
politique pour précipiter les évolutions. M. Alain Déniel
a rappelé le rôle joué, dans ce domaine, par M. Jean
Farge à la fin des années soixante-dix.
3. Clarifier le contexte institutionnel
Le
schéma vertueux que proposait Alain Juppé dans la
déclaration du Gouvernement du 15 novembre 1995 visait à
établir une chaîne des responsabilités : le Parlement,
"
la clef de voûte d'une nouvelle architecture de
responsabilité
"
57(
*
)
, fixe
les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses de la
sécurité sociale tandis que les caisses adoptent des
"
relations conventionnelles avec l'Etat pour clarifier les
responsabilités et définir les objectifs et les
moyens
". Il revient au Gouvernement de déterminer les
orientations générales de la politique de santé et
d'assurance maladie, tandis que les régimes d'assurance maladie -et
principalement la CNAMTS- assurent la gestion quotidienne du système,
dans le respect des objectifs fixés par le Parlement.
Cette " révolution culturelle de la sécurité
sociale " n'a pas eu lieu, l'Etat restant dans une logique
centralisée.
a) L'Etat reste dans une logique centralisée de la gestion de l'assurance maladie
Le
Gouvernement est retombé dans les travers d'une tutelle pesante et
vétilleuse. La cohérence de la politique d'assurance maladie
apparaît ainsi difficile à entrevoir.
Mme Martine Aubry a ainsi cru bon de présenter, le 6 juillet 1998, un
plan d'économies d'environ 3 milliards de francs, l'essentiel
(1,8 milliard de francs) étant à la charge des laboratoires
pharmaceutiques.
Dès le 26 juin 1998, le Gouvernement avait reporté, par
arrêté, une mesure de revalorisation de la nomenclature de
chirurgie dentaire, au mépris des engagements conventionnels, puisque
cette revalorisation était prévue par l'arrêté
interministériel du 30 mai 1997.
Le 11 août 1998, un arrêté a baissé de 13,5 % la
valeur de la lette-clé Z1 (électroradio, gastro-entéro,
onco-radio). Le Gouvernement a annoncé qu'il entendait
" récupérer " 450 millions de francs et a donc
consenti à caractériser cette baisse de " temporaire ".
Après le déremboursement du médicament MAXEPA
(Laboratoires Pierre Fabre), le Gouvernement a pris un arrêté du 3
août 1998 diminuant de 65 % à 35 % le taux de
remboursement de 28 présentations de médicaments
vasodilatateurs.
Devant les réactions des professionnels s'indignant que de telles
mesures soient prises sans qu'ils aient été entendus par la
commission administrative compétente, un arrêté du
21 août 1998 a retiré l'arrêté
précédent.
Le Gouvernement est intervenu, avec le plan d'économies du mois de
juillet 1998, dans la gestion courante de l'assurance maladie, la
plaçant ainsi dans une situation délicate vis-à-vis des
professionnels avec lesquels elle est appelée à négocier
des engagements conventionnels de maîtrise des dépenses. A la
même date, Mme Martine Aubry avait ainsi ces mots quelque peu malheureux
pour définir les missions de la Caisse nationale d'assurance
maladie :
" La Caisse doit mieux fonctionner pour sortir des
statistiques fiables, pour contrôler les médecins et les
dépenses qui dérivent ".
Confiner la CNAMTS à la fonction d'effectuer des contrôles et de
" sortir des statistiques " apparaît particulièrement
réducteur.
La mission confiée à l'IGAS le 15 juin 1998 pour contrôler
ces statistiques n'a produit aucun résultat, en dehors d'une
déstabilisation de la CNAMTS elle-même. Un Conseil de transparence
de l'information médicale, organisme à l'utilité douteuse,
a été créé par la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999.
Les décisions gouvernementales concernant les chirurgiens-dentistes ont
ainsi donné lieu à une vive réaction des caisses
d'assurance maladie, exprimée par une lettre des trois présidents
(CNAMTS, MSA, CANAM) à Madame la ministre de l'emploi et de la
solidarité (8 octobre 1998).
Lettre envoyée par les présidents des
caisses
d'assurance maladie
à Mme Martine Aubry le 8 octobre 1998
Madame la Ministre,
Par un arrêté du 26 juin 1998, le Gouvernement a reporté la
mesure de revalorisation de la Nomenclature de chirurgie dentaire qui devait
entrer en vigueur le 1
er
juillet. Cette revalorisation,
prévue par l'arrêté interministériel du 30 mai 1997,
figurait pourtant au nombre des engagements de la Convention Nationale qui lie
la profession à l'assurance maladie, convention approuvée elle
aussi par arrêté interministériel du même jour.
Les caisses nationales avaient, à l'époque, regretté cette
décision, qui aboutissait à rompre unilatéralement un
accord conventionnel important, et surtout fragilisait ce très important
changement d'attitude de la profession, laquelle s'engageait enfin dans la voie
-vertueuse- d'une revalorisation des soins dentaires conservateurs, et d'une
maîtrise concomitante des dépassements tarifaires sur les actes
prothétiques.
Au mois de juin dernier, vous avez présenté cette mesure comme
conservatoire, et résultant de l'évolution de 5,5 % des
dépenses de chirurgie dentaire sur les cinq premiers mois de 1998, que
vous jugiez préoccupante.
A la vérité, cette tendance du début 1998 ne
dépassait que d'assez peu le taux de croissance de 4,2 % qui avait
été anticipé et souhaité par les caisses, au cours
des négociations conventionnelles de l'annexe tarifaire pour 1998
(délibération du Conseil d'Administration de la CNAMTS du 28
avril 1998 implicitement approuvée par les autorités de tutelle).
Le taux d'évolution global des dépenses ambulatoires (2,1 %)
ne saurait en effet servir de référence pour des secteurs dans
lesquels l'assurance maladie doit massivement se réinvestir pour combler
un retard préjudiciable aux assurés.
Au surplus, cette première tendance ne paraît pas se confirmer au
vu des chiffres disponibles à la fin du mois de juillet. La hausse des
dépenses remboursables de chirurgie dentaire se situe en effet à
un niveau de 4,1 %, c'est-à-dire non seulement en net retrait par
rapport aux premiers chiffres de 1998, mais surtout dans la cible que visait le
projet d'annexe conventionnelle. (...)
Cette situation préoccupante nous conduit, Madame la Ministre, à
souhaiter que le Gouvernement réexamine la position provisoire qui fut
la sienne au mois de juin dernier, et donne un signal très clair aux
chirurgiens-dentistes en confirmant que la mesure de suspension de la nouvelle
nomenclature sera rapportée avant la fin de l'année. (...)
Nous vous prions d'agréer, Madame la Ministre, l'expression de notre
respectueuse considération.
Jean-Marie SPAETH, Jeannette GROS, Marcel RAVOUX
Cet épisode montre une confusion fâcheuse. Les professionnels de
santé -estimant que le pouvoir de décision se situe au sein
même du ministère- ne sont pas encouragés à signer
des accords conventionnels avec les caisses d'assurance maladie.
Le Gouvernement appuie sa politique de maîtrise des dépenses de
santé sur trois accords partiels avec les professions de
santé : les radiologues, les chirurgiens-dentistes et les
cardiologues
58(
*
)
. Il fixe des orientations sans
même en informer les caisses d'assurance maladie. Il se réserve le
droit de recourir éventuellement à la baisse des lettres-clefs.
Le discours de Mme Martine Aubry, prononcé à la commission des
comptes du 31 mai 1999, était tout à fait
révélateur ; il n'abordait la CNAMTS qu'en fin de parcours.
Consciente des réactions provoquées -dont celle de votre
rapporteur- au sein de la commission des comptes de la sécurité
sociale, Mme Martine Aubry a modifié son propos devant les journalistes
présents à la conférence de presse qui a suivi la
réunion de la commission. Il ressortait, en effet, des comptes rendus de
cette conférence de presse que la CNAMTS devait rapidement proposer des
mesures au Gouvernement pour qu'elle puissent être
intégrées dans le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2000.
Or, lorsque la CNAMTS avait adopté un plan stratégique le 31 mars
1999, la seule réaction de Mme Martine Aubry avait été de
constater que la CNAMTS n'était responsable ni de la politique
hospitalière, ni de celle du médicament.
L'effort de responsabilisation des caisses ne saurait être ainsi remis
en cause. Aussi votre rapporteur estime-t-il qu'il est impératif de
revenir à l'esprit des ordonnances de 1996.
b) L'Etat conserve le pouvoir de nomination des directeurs des caisses du régime général
A
l'occasion de la démission de M. Bertrand Fragonard, directeur de la
CNAMTS, le 2 juin 1998, et de son remplacement par M. Gilles Johanet, la
question de la nomination des directeurs des caisses a été
évoquée. Le directeur d'une caisse nationale est nommé en
Conseil des ministres, est révocable par le ministre, mais est
censé mener la politique définie par le conseil d'administration
de sa caisse.
Cette situation apparaît pour le moins paradoxale. Sans aller
jusqu'à une nomination du directeur par le conseil d'administration de
la caisse, il serait envisageable de prévoir que cette nomination soit
prise sur proposition du conseil d'administration.
Au-delà, l'institution par les ordonnances Juppé de conseils de
surveillance présidés par les parlementaires est un moyen pour le
Parlement, par le contrôle de la mise en oeuvre des conventions
d'objectifs et de gestion, de vérifier que le Gouvernement et les
conseils d'administration des caisses restent dans leur rôle.
Ces conseils de surveillance, mis en place à l'automne 1997, n'ont
certainement pas pris encore toute leur ampleur.
*
* *
Des
comptes à temps et un contexte institutionnel clarifié devraient
permettre au Parlement de se prononcer sur les lois de financement en
connaissance de cause, c'est-à-dire de voter clairement ce qui
relève de sa compétence.
Or, il semble à votre rapporteur que le Parlement se trouve aujourd'hui
dans une situation paradoxale : il ne parvient pas à exercer sa
compétence dans des conditions satisfaisantes ; mais
parallèlement, le Gouvernement lui prête volontiers des
responsabilités qui ne sont pas les siennes, d'où un risque
" d'instrumentalisation ".
Ainsi, un commentateur même averti reste persuadé que le Parlement
se prononce sur l'équilibre du régime général ou
sur les différentes enveloppes de l'ONDAM. Il n'en est rien.
Les orientations proposées par votre rapporteur tendent
précisément à ce que le Parlement exerce pleinement -et de
façon suffisamment claire- ses prérogatives pour ne pas
empiéter sur les responsabilités propres à chacun des
acteurs de notre protection sociale.
D. DEUX ORIENTATIONS POUR RENDRE LE DÉBAT PLUS TRANSPARENT ET PLUS EFFICACE
Les lois
de financement de la sécurité sociale, pour être davantage
compréhensibles, devraient être des textes législatifs
simples, recentrés sur les enjeux du financement de la protection
sociale.
D'où l'urgence de redistribuer les débats et de clarifier les
enjeux des finances sociales.
1. Redistribuer les débats pour recentrer les lois de financement
a) Instituer des lois pluriannuelles d'orientation
Les lois
de financement de la sécurité sociale ne seraient pas conformes
à l'ambition qui était celle des auteurs de la réforme, si
elles se limitaient à une vision purement comptable de notre
système de protection sociale.
A l'évidence, ces lois financières doivent traduire -comme le
veut la loi organique- "
les orientations de la politique de
santé et de sécurité sociale "
59(
*
)
.
Il reste que ces orientations ne relèvent guère de
l'annualité et fort heureusement ne sauraient être remises en
cause chaque année. Elles doivent, au contraire, s'inscrire dans la
durée.
Le professeur Joël Ménard a décidé de quitter en mai
1999 ses fonctions à la tête de la Direction
Générale de la Santé (DGS) "
pour des raisons
strictement personnelles
". Dans un entretien au
Monde
60(
*
)
, il a estimé que l'une
des fonctions de la DGS devait résider
" dans la coordination
des différentes structures et agences en charge de la veille et de la
sécurité sanitaires "
mais également de
définir et de mettre en oeuvre "
des plans de
santé
", organisant dans différents secteurs de la
pathologie humaine, des programmes quinquennaux. Il a ajouté :
"
Au-delà de ce qui a été, fort heureusement,
réalisé avec la création des agences de
sécurité sanitaire, seule une telle programmation nous permettra
de progresser dans la définition d'une véritable politique de
santé
".
Aussi, le groupe de travail est-il favorable à l'institution de lois
d'orientation qui pourraient être quinquennales, dont les lois de
financement seraient, d'un point de vue financier, la traduction annuelle.
Ces lois permettraient, par exemple, de prévoir, dans un texte unique,
l'examen des moyens affectés à la prévention et à
l'éducation à la santé dans le budget du
secrétariat d'Etat, actuellement étudiés en lois de
finances, et dans le budget des caisses d'assurance maladie,
évoqués à la marge en loi de financement.
De telles lois d'orientation seraient davantage en phase avec les travaux des
instances existantes. Elles s'appuieraient sur les études des experts
réunis au sein du Haut comité de la santé publique, ainsi
que sur les travaux des professionnels qui siègent à la
Conférence nationale de santé.
La mise en place de ces lois d'orientation permettrait dès lors de faire
l'économie du rapport annexé à chaque projet de loi de
financement dont on a vu qu'il ne pouvait pas remplir sa fonction.
b) Prévoir régulièrement des lois portant diverses mesures d'ordre social
" Diverses mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire " (DMOSSS), " diverses dispositions d'ordre social " (DDOS), " diverses mesures d'ordre social " (DMOS) : les appellations varient pour identifier des projets de loi qui ont fait régulièrement partie, de 1990 à 1996, du calendrier législatif.
Les DMOS depuis 1990
Titre |
Dépôt initial |
Numéro JO |
Loi portant diverses mesures d'ordre social |
22 mai 1991 |
Loi n° 91-738 du 31 juillet 1991 |
Loi portant diverses dispositions d'ordre social |
6 novembre 1991 |
Loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 |
Loi portant diverses mesures d'ordre social |
21 octobre 1992 |
Loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 |
Loi portant diverses dispositions d'ordre social |
26 octobre 1994 |
Loi n° 95-116 du 4 février 1995 |
Loi portant diverses mesures d'ordre sanitaire et statutaire |
4 janvier 1996 |
Loi n° 96-452 du 28 mai 1996 |
Le
dernier DMOS date de 1996. Coïncidence, les lois de financement,
créées en 1996, connaissent une certaine dérive vers le
DMOS. De plus en plus de dispositions ont certes
un rapport avec la
sécurité sociale
, sans avoir une relation directe avec
le
financement de la sécurité sociale
.
Ainsi, Mme Martine Aubry justifiait les diverses dispositions figurant dans le
projet de loi de couverture maladie universelle par l'absence
" pénalisante "
61(
*
)
d'inscription à l'ordre du jour d'un DMOS depuis deux ans.
Le régime agricole a pu " bénéficier " du
support de la loi d'orientation agricole, discutée entre octobre 1998 et
mai 1999. Pas moins de vingt articles ont été adoptés dans
ce cadre.
Il n'est pas exagéré de penser que plusieurs dizaines d'articles
seraient aujourd'hui nécessaires au bon fonctionnement des
régimes autres que le régime agricole.
Avec l'inscription régulière à l'ordre du jour d'un
DMOS, les lois de financement pourraient être
" recentrées " sur un texte relativement court, ce qui
permettrait davantage de temps pour aborder non seulement les comptes et les
mesures financières de redressement, mais également le contenu
des objectifs.
c) Réaffirmer le rôle du Parlement dans le débat public
Les
règles constitutionnelles enserrent le débat sur les lois de
financement dans des délais stricts alors que dans le domaine de la
protection sociale, un certain nombre de " chantiers " ouverts ou qui
pourraient l'être, appellerait des débats approfondis.
Partant du même constat, le Gouvernement a choisi de conduire les
différents
" diagnostics "
et
" dialogues "
en dehors du Parlement
62(
*
)
: mission du commissariat général
du Plan sur les retraites, conférence de la famille, Etats
généraux de la santé.
Il est regrettable que la représentation nationale soit exclue des
grands débats sur l'avenir de notre protection sociale.
Ainsi, au printemps 1998, un débat sur les prestations familiales,
à la suite de la conférence nationale de la famille, aurait
été certainement très utile.
De même, au printemps 1999, un débat sur la réforme des
retraites, à la suite de la remise du rapport de M. Jean-Michel Charpin,
s'imposait.
Certes, le Gouvernement n'est toujours pas en état de présenter
devant le Parlement de véritables orientations. Ainsi, muni des
conclusions du rapport Charpin, a-t-il annoncé l'ouverture d'une
nouvelle concertation sur la base de quelques principes très
généraux. Il reste qu'à tout le moins, les travaux du
commissariat général du Plan auraient pu être l'occasion
pour le Gouvernement de recueillir le point de vue de la représentation
nationale.
De tels débats sur de grands " chantiers " pourraient, en
fonction de l'actualité, prendre place au printemps et contribueraient
ainsi, en amont, à l'examen du projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
d) Recentrer les lois de financement sur les enjeux des finances sociales
La
" redistribution " des débats autour de notre protection
sociale, loin d'affaiblir la portée des lois de financement, devrait
permettre d'approfondir le débat sur les enjeux des finances sociales.
Actuellement, le débat sur les objectifs de dépenses
apparaît ainsi très insuffisant.
Si le taux de progression de l'ONDAM fait l'objet d'un examen attentif
dès lors que cet objectif se veut opposable aux prescripteurs, les
objectifs de dépenses par branche, purement indicatifs, apparaissent
davantage comme des constatations que des choix.
Or, pas plus que les lois de finances, les lois de financement
n'échapperont, dès lors qu'elles auront acquis un peu de
maturité, à la problématique des " services
votés ".
Le vote des objectifs de dépenses devrait donner lieu à un
véritable examen du contenu et de la cohérence de ces objectifs
et non pas seulement de leur taux de progression. Il devrait être
l'occasion d'une réflexion sur la simplification des règles
régissant les prestations
63(
*
)
, d'une
interrogation sur les coûts de gestion qui, à hauteur de 50
milliards de francs, sont agrégés aux prestations versées.
Il conviendrait dès lors de s'interroger sur les moyens d'organiser de
façon plus méthodique l'examen de l'article arrêtant les
objectifs de dépenses des différentes branches. Serait-il
inconcevable que le Sénat, à l'instar de la procédure
adoptée tout au long de la deuxième partie de la loi de finances
consacrée aux votes des crédits par titre et par
ministère, vote les objectifs de dépenses " ligne par
ligne " à l'issue d'une discussion spécifique
consacrée à chacune d'elles ?
2. Clarifier les enjeux des finances sociales
a) Assurer une plus grande cohérence des lois de financement
Les recettes de la loi de financement méritent une attention toute particulière.
(1) Améliorer la présentation des recettes
La
présentation des sept catégories de recettes n'est pas
satisfaisante.
Les cotisations prises en charge par l'Etat appellent plus
particulièrement l'attention.
La Cour des comptes, dans son rapport 1997
64(
*
)
,
proposait au Gouvernement
" d'étudier une présentation
(...) faisant apparaître séparément les cotisations
(sociales) réellement encaissées et les compensations
d'exonérations "
. La ministre de l'emploi et de la
solidarité, répondant
65(
*
)
à une question de notre collègue M. Emmanuel Hamel,
indiquait :
"La présentation actuelle comptabilise en effet en cotisations les
exonérations prises en charge par l'Etat et les régimes de
sécurité sociale, et cela serait, selon la Cour des comptes,
" source de confusion ". Cette proposition est actuellement à
l'étude, car il est vrai que cette présentation introduit souvent
une vision erronée de la structure du financement de la
sécurité sociale. La part importante des cotisations dans les
ressources de la sécurité sociale ne doit pas cacher qu'en
réalité depuis une décennie la part de cotisations
à la charge des employeurs a fortement baissé au profit d'un
financement par le budget de l'Etat sous forme de " prise en charge de
cotisations ". Toutefois la suggestion de la cour appelle deux remarques.
D'une part, la présentation actuelle est conforme aux normes
internationales de comptabilité nationale, et, malgré ses
inconvénients, elle a le mérite de garantir les comparaisons
internationales sur la base de concepts standardisés. Il s'agit bien de
" cotisations " prises en charge, calculées pour chaque
cotisant, et non de transferts globaux comme le sont les flux de compensation
ou les subventions. D'autre part, la présentation actuellement retenue,
tant dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité
sociale que dans l'annexe de la loi de financement de la sécurité
sociale, distingue clairement les cotisations payées effectivement par
les assurés et les employeurs, et les cotisations prises en charge par
l'Etat et les régimes de sécurité sociale. Seule l'annexe
[sic]
66(
*
)
de la loi de financement de la
sécurité sociale agrège l'ensemble de ces cotisations en
une ligne " cotisations effectives " et pourrait faire l'objet d'une
présentation améliorée. "
Votre rapporteur estime que le vote proposé aux parlementaires repose
sur des recettes trop agrégées. La ligne " cotisations
prises en charge " devrait ainsi faire l'objet d'une mention
spécifique.
Les affectations des recettes sont par trop complexes
La liste des
" impositions de toute nature "
affectées
en tout ou partie à la sécurité sociale est
longue
67(
*
)
.
Nombre d'impositions affectées à la sécurité sociale
Nombre d'impositions affectées à la sécurité sociale (y compris BAPSA) |
21 |
dont Impositions affectées en intégralité à un organisme de sécurité sociale |
16 |
dont Impositions partagées |
5 |
Cinq
impositions sont ainsi partagées
68(
*
)
entre plusieurs
bénéficiaires :
- les droits 403 sur les alcools ;
- la contribution sociale de solidarité sur les sociétés
(C3S) ;
- la contribution sur les ventes en gros ;
- le prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les
produits de placement ;
- la contribution sociale généralisée.
Les affectations croisées nuisent d'une part, à
l'intelligibilité des flux financiers non seulement lors de leur examen
par le Parlement mais également à l'égard des
contribuables. Ils autorisent d'autre part, toutes les
" tuyauteries " entre régimes ou branches de la
sécurité sociale, permettant -au passage- de diminuer des
excédents de certaines branches pour remédier aux déficits
d'une autre.
Le montage financier présenté par le Gouvernement, dans le cadre
du projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle,
pour tirer la conséquence de la suppression de la prise en charge des
cotisations d'assurance personnelle en est l'illustration frappante : le
prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les produits
de placement actuellement partagé entre la CNAF et la CNAVTS
bénéficiera à l'avenir également à la CNAMTS.
Le projet de loi accroît en outre la complexité de la
répartition des droits sur les alcools.
En dehors du cas particulier de la CSG qui, historiquement, s'est pour
partie substituée aux cotisations sociales, le principe devrait
être de prévoir -pour une recette- une affectation
intégrale et unique.
(2) Progresser dans la notion d'équilibre
L'absence d'un équilibre des lois de financement de la
sécurité sociale voulue par la loi organique a conduit
progressivement le Parlement à se prononcer implicitement sur les
comptes prévisionnels du régime général.
Cette situation, on l'a vu
69(
*
)
, n'est
guère satisfaisante.
Aussi votre rapporteur s'interroge-t-il sur les moyens de progresser dans la
notion d'équilibre, qui reste fondamentale dans la réforme
constitutionnelle de 1996, sans porter pour autant atteinte aux
responsabilités des partenaires sociaux en matière de gestion des
caisses de sécurité sociale.
Il lui semble qu'un rapprochement du champ des dépenses et des
recettes
70(
*
)
devrait permettre de
définir un " indicateur d'équilibre " qui n'a pas de
signification intrinsèque, mais qui permettrait un suivi année
après année.
" L'indicateur d'équilibre " des lois de financement de la sécurité sociale
en milliards de francs |
1997 |
1998 |
1999 |
Prévisions de recettes |
1.658,3 |
1.723,0 |
1.799,5 |
Objectifs de dépenses |
1.697,6 |
1.731,2 |
1.789,1 |
Solde |
- 39,3 |
- 11,8 |
+ 10,4 |
N.B.
Les montants sont ceux prévus par les lois de financement.
Cet " indicateur d'équilibre " pourrait être retenu par
les commissions des comptes de la sécurité sociale, afin de
disposer d'un suivi infra annuel de l'exécution des lois de financement.
Certes, le Parlement dispose d'un autre indicateur d'équilibre portant
sur le solde des administrations de sécurité sociale,
défini dans le cadre de nos engagements européens. Ce solde
concerne toutefois un champ différent de celui des lois de financement,
puisqu'il inclut les régimes complémentaires vieillesse (ARRCO,
AGIRC) et le régime d'assurance chômage (UNEDIC). La
multiplication des " champs " différents des finances sociales
est d'ailleurs un problème
71(
*
)
.
Une étape supplémentaire conduirait à s'interroger sur la
notion d'équilibre par branche, dès lors que la loi organique a
fait le choix d'une telle présentation des objectifs de dépenses.
Le contexte des lois de financement est à cet égard très
différent des règles applicables en matière de loi de
finances -privilégiant l'unité du budget de l'Etat- alors que la
loi du 25 juillet 1994 pose le principe, pour ce qui est du régime
général, de l'autonomie des différentes branches.
Or, cet équilibre par branche au sein des lois de financement de la
sécurité sociale est impossible à déterminer.
Pour la branche famille, il n'existe pas de différence entre
l'équilibre régime général et l'équilibre
tous régimes, les comptes de la CNAF centralisant ceux de l'ensemble de
la branche. Pour la branche maladie, le régime général
représente une part très importante des dépenses (plus de
82 %).
En revanche, pour la branche vieillesse, l'équilibre est très
difficile à déterminer, le régime général
représentant moins de 50 % des dépenses.
La réflexion sur un équilibre par branche apparaît pourtant
essentielle au regard des implications considérables du débat qui
semble s'ouvrir sur l'affectation des excédents de la branche famille au
financement des charges de la branche vieillesse.
(3) Améliorer les annexes du projet de loi
Les
annexes
a)
et
g)
, qui ne sont pas liées directement au
projet de loi, pourraient être utilement allégées.
En revanche, un effort de clarification pourrait être engagé sur
les annexes
b)
,
c)
et
d)
et
e)
:
- en proposant à l'annexe
b)
une évaluation des
prévisions de recettes et des objectifs de dépenses et de l'ONDAM
pour l'année en cours ;
- en évaluant à l'annexe
c)
les effets financiers du
projet de loi sur les autres régimes que le régime
général ;
- en faisant coïncider le champ de l'annexe
d)
avec l'article
fixant les prévisions de recettes ;
- en comportant un relevé des recettes par branche à cette
même annexe
d)
;
- en mentionnant les transferts entre branches du régime
général à l'annexe
e)
.
b) Assurer une plus grande cohérence des finances publiques
(1) Transformer le débat d'orientation budgétaire en débat sur les finances publiques
Lors de
la discussion de la loi organique de 1996, M. Jacques Barrot, alors ministre
des affaires sociales, s'était engagé à organiser au
printemps 1997 un débat d'orientation sur le financement de la
sécurité sociale, à l'image des débats
d'orientation budgétaire. Un tel débat ne s'est tenu ni en 1997,
en raison de la dissolution de l'Assemblée nationale, ni en 1998.
Certes, un débat spécifique consacré au financement de la
sécurité sociale est concevable.
Néanmoins, deux raisons plaident pour que ce débat s'inscrive
dans le cadre de l'actuel débat d'orientation budgétaire.
La première raison est liée au processus de qualification
à l'euro, tout comme les engagements souscrits au titre du Pacte de
stabilité et de croissance de juin 1997 et du programme pluriannuel des
finances publiques, qui imposent la référence au
" besoin
de financement des administrations publiques "
, dépassant le
cadre de la loi de finances, et incluant les finances des collectivités
locales et de la sécurité sociale.
La seconde raison est liée à la nature des lois de financement de
la sécurité sociale, qui forment une seconde catégorie de
lois de finances publiques.
L'évolution logique serait que le débat d'orientation
budgétaire, spécifiquement consacré aux ressources et
dépenses de l'Etat, devienne un
" débat d'orientation sur
l'évolution des finances publiques "
, selon l'expression du
Président Jean-Pierre Fourcade
72(
*
)
.
Le débat d'orientation budgétaire, qui s'est tenu au Sénat
le 25 juin 1998, a montré que le Gouvernement était resté
à la " croisée des chemins ". Certes, trois des quatre
objectifs fixés dans le rapport déposé par le Gouvernement
à l'occasion du débat concernaient, de près ou de loin,
les finances sociales. Mais le Gouvernement, en l'absence du ministre de
l'emploi et de la solidarité, n'a pas indiqué de
véritables orientations sur ce que serait le projet de loi du
financement de la sécurité sociale, les analyses
consacrées aux finances sociales étant restées très
insuffisantes.
A titre anecdotique, on rappellera que les ministres des finances et du budget
expliquaient, à l'occasion de leur audition devant la commission des
Finances de l'Assemblée nationale, le dérapage des
dépenses d'assurance maladie par une simple épidémie de
grippe, alors qu'au même moment, Mme Martine Aubry ne voyait aucune
raison sanitaire à cette dérive.
La proposition d'organiser un véritable débat sur les finances
publiques, au cours du mois de juin, est pertinente. Elle permettrait d'amorcer
un débat au Parlement, qui pourrait se continuer avec les organismes
professionnels
73(
*
)
pendant trois mois, avant
que le Gouvernement ne dépose le projet de loi devant le Parlement.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au Budget, avait donné
acte de cette proposition : "
Peut-être faudra-t-il qu'en
1999, dans le prochain débat d'orientation budgétaire, nous
trouvions ensemble une façon de traiter plus directement de la question
de la sécurité sociale
"
74(
*
)
.
Pourtant, le débat d'orientation budgétaire de juin 1999 ne
semble pas se présenter d'une manière profondément
différente.
Le rapport de la commission des comptes de mai 1999 indique ainsi qu'il est
"
regrettable que le débat sur les orientations
budgétaires qui se tiendra prochainement au Parlement ne soit nourri que
par les prévisions de la commission des comptes et des budgets
économiques de la Nation, au lieu de l'être, aussi, par celles
émanant de la commission des comptes de la sécurité
sociale
"
75(
*
)
.
Le rapport sur l'évolution de l'économie nationale et des
finances publiques présenté par MM. Strauss-Kahn et Sauter en mai
1999 pour le débat d'orientation budgétaire du printemps ne
modifie pas la prévision d'un excédent des comptes sociaux pour
1999 (0,15 %)
76(
*
)
. Cette prévision
tient compte d'un excédent supposé de l'UNEDIC.
Une harmonisation des documents présentés au Parlement serait
ainsi un minimum souhaitable.
(2) Mieux distinguer les finances de l'Etat des finances sociales
Ce
débat sur les finances publiques ne peut être réellement
lisible que si les finances sociales sont clairement distinguées des
finances de l'Etat.
A cet égard, il apparaît urgent d'établir un bilan des
relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
Ce bilan ferait apparaître une neutralité de ces relations
financières
77(
*
)
. Il reste toutefois
à formaliser une telle analyse.
Votre rapporteur estime également que la création d'un
véritable régime de retraite pour les fonctionnaires de l'Etat
est une des conditions
sine qua non
d'une plus grande lisibilité.
En ce qui concerne les charges de trésorerie, il serait souhaitable que
l'Etat veille à une parfaite neutralité de ses relations avec
l'ACOSS. Cet engagement doit être scrupuleusement respecté dans le
cadre de la correction d'objectifs et de gestion Etat/ACOSS.
Certaines recettes de la sécurité sociale restent votées
en loi de finances. Cette situation qui relève d'une forme de
conservatisme nuit à la lisibilité des flux financiers.
L'existence d'une recette commune au budget général de l'Etat
et à la sécurité sociale -les droits de consommation sur
les tabacs (dits " droits 575 ")- pose d'infinis problèmes.
Prévoir en loi de financement le taux d'affectation des droits de
consommation sur les tabacs à la CNAMTS se heurte ainsi à
l'article 18 de l'ordonnance portant loi organique du 2 janvier 1959. Seule la
loi de finances peut déterminer la quote-part de cette taxe
affectée à la sécurité sociale.
Toute augmentation du produit des droits de consommation sur les tabacs au
profit de la sécurité sociale suit une procédure
complexe : le produit supplémentaire est évalué dans
l'article du projet de loi de financement relatif aux prévisions de
recettes. Mais cette évaluation est en quelque sorte virtuelle ou
privée de base légale tant que l'affectation n'a pas
été votée en loi de finances.
En matière de droits sur les tabacs, il serait donc plus intelligible de
séparer les financements affectés à l'Etat et les
financements affectés à la sécurité sociale.
Deux solutions sont possibles :
- soit l'on décide de créer une taxe additionnelle de
santé publique affectée intégralement à la
sécurité sociale
78(
*
)
, à
l'image de la cotisation sur les boissons alcooliques supérieures
à 25° créée en 1983, en diminuant à due
concurrence les droits 575 ;
- soit l'on affecte intégralement les droits 575 à la
CNAMTS.
Cette dernière solution, qui devrait être progressive et
compensée compte tenu des masses en jeu, aurait le mérite de
mettre fin à une forme de confusion des genres quant au fondement de
cette imposition : il est clair que pour l'assurance maladie cette recette
compense le coût du tabagisme et qu'au nom des impératifs de
santé publique, il serait souhaitable que disparaissent à la fois
la dépense et la recette ;
a contrario
les droits sur les
tabacs perçus au profit du budget de l'Etat constituent un
" impératif de finances publiques ".
Il convient de rappeler que les droits sur les alcools ont connu une
évolution similaire ; ils ont été
intégralement affectés au FSV en 1993, puis répartis entre
FSV et régimes d'assurance maladie à partir de 1997.
c) Renforcer le contrôle de l'application des lois de financement
Les
rapporteurs des lois de financement disposent de prérogatives
importantes depuis l'adoption de l'article 2 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997.
En application de cette disposition, les rapporteurs adressent au Gouvernement
un questionnaire tant sur l'exécution de la loi de financement que sur
le projet de loi de financement de l'année suivante.
Cet article fonde également la prérogative de contrôle sur
pièce et sur place des " rapporteurs sociaux " tout au long de
l'année
" auprès des administrations de l'Etat et des
établissements publics compétents "
79(
*
)
.
Les commissions parlementaires ont accès à la source -à
travers les conseils de surveillance de l'ACOSS, de la CNAF, de la CNAVTS et de
la CNAMTS- à des renseignements et des informations dont elles
étaient jusqu'à présent destinataires de manière
indirecte.
Cette information doit pouvoir être disponible, à travers les avis
rendus au Parlement sur l'application des conventions d'objectifs et de
gestion, avant l'examen du projet de loi de financement.
Pour contrôler l'application des lois de financement, le Parlement
dispose constitutionnellement de l'assistance de la Cour des comptes.
Il importe à l'évidence que la coopération entre les
commissions parlementaires compétentes et la Haute juridiction soit
renforcée. Il est vrai que les méthodes et les contraintes de la
Cour et du Parlement ne sont pas identiques. La démarche
collégiale et contradictoire de la Cour est quelquefois difficilement
compatible avec l'urgence qui s'attache à certaines demandes
d'enquête formulées par les commissions parlementaires.
Lorsqu'elle est possible, l'insertion, dans le programme prévisionnel de
la Cour, de ces demandes d'enquête serait une première
réponse, à condition toutefois que les commissions puissent
prendre connaissance suffisamment à l'avance de ce programme, du moins
avant qu'il ne soit totalement " bouclé ".
Il est en outre nécessaire qu'un dialogue se noue entre le Parlement et
la Cour à l'occasion du rapport de la Haute juridiction sur
l'application des lois de financement.
L'amélioration des délais de remise des comptes par les
organismes de sécurité sociale
80(
*
)
devrait permettre, à terme, à la Cour
de développer ses analyses et de communiquer son rapport au Parlement
dans le courant de l'été ou tout début septembre.
Les commissions des Affaires sociales au Sénat, des Affaires
culturelles, familiales et sociales à l'Assemblée nationale,
pourraient en prendre une connaissance approfondie et élaborer un
questionnaire sur les points qui retiennent particulièrement leur
attention, en vue de l'audition début octobre des magistrats de la Cour.
Cette procédure, mise en oeuvre dans le cadre du rapport sur les lois de
règlement du budget, permettrait à la Cour de préparer des
réponses " collégiales et contradictoires " qui
demandent naturellement davantage de temps mais sont préférables
à un échange impromptu en séance de commission dans des
domaines souvent d'une grande technicité.
d) Définir une pratique de lois de financement rectificatives
L'une
des interrogations majeures de la représentation nationale à
l'égard des lois de financement est probablement celle de
l'évolution en cours d'année des masses financières tant
en dépenses qu'en recettes sur lesquelles elle s'est prononcée en
loi de financement initiale.
Force est de constater que les deux dernières lois de financement ont vu
une lente dégradation des " conditions générales de
l'équilibre " sans que le Parlement en ait été saisi
par la voie d'un projet de loi de financement rectificatif pourtant
explicitement prévu par la loi organique.
Votre rapporteur avait ainsi souligné que le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1999 devrait probablement
faire l'objet d'une révision en cours d'année, car fondé
sur des hypothèses macro-économiques trop favorables et sur le
pari que la dérive des dépenses d'assurance maladie allait
être contenue par le plan Aubry de juillet 1998.
Le Gouvernement peut être amené à revenir vers le Parlement
en cours d'année pour deux raisons :
- lorsque le plafond d'avances de trésorerie aux régimes de
sécurité sociale devient insuffisant ;
- ou lorsque l'adoption de mesures correctrices est jugée
nécessaire en cours d'année.
Il est vrai que ces mesures correctrices relèvent largement du pouvoir
réglementaire, à l'exception des mesures portant sur le taux et
l'assiette des prélèvements affectés à la
sécurité sociale.
Dès lors, il est indispensable de redonner à l'instrument du
plafond d'avances de trésorerie son rôle originel de
contrôle du déficit.
Votre commission des Affaires sociales a manifesté ce souci à
deux reprises :
- une première fois, en refusant dans le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998 une
" majoration de confort " du plafond de recours à l'emprunt. A
l'époque, le rapporteur de l'Assemblée nationale avait
souhaité une telle majoration
" afin d'éviter au
Gouvernement de se voir reprocher de tarder à adresser un rapport au
Parlement en cas de décret visant à relever ce
plafond "
81(
*
)
.
Votre commission
n'aurait pas songé à adresser un tel reproche au Gouvernement car
elle estimait que ce relèvement exigeait un projet de loi de financement
rectificatif et qu'en outre, il convenait, en loi de financement initiale, de
calculer au plus juste les plafonds d'avances de trésorerie ;
- une deuxième fois, en refusant dans le projet de financement de
la sécurité sociale pour 1999 de ratifier le décret du 26
août 1998 qui, en dépit de la majoration finalement
décidée en loi de financement initiale, avait dû
procéder à un relèvement supplémentaire. La
commission avait alors estimé qu'il convenait de porter un coup
d'arrêt au recours systématique à la voie
réglementaire et privilégier le dépôt d'un projet de
loi rectificatif.
Votre rapporteur estime en effet que le plafond d'avances de trésorerie,
qui est la disposition la plus " normative " ou contraignante des
lois de financement, doit être, en cas de relèvement, l'occasion
d'un débat au Parlement sur l'évolution des masses
financières votées en loi de financement initiale.
Pour le reste, un débat d'orientation budgétaire élargi
aux finances publiques permettrait de faire le point à la fin du premier
semestre sur l'évolution des comptes sociaux, à partir du moment
où la commission des comptes de la sécurité sociale du
mois de mai deviendrait une commission " tous régimes ".
Votre rapporteur souhaite vivement que cesse la pratique systématique
d'un relèvement par voie réglementaire des plafonds d'avances de
trésorerie.
Il estime qu'il revient à une loi de financement rectificative de
procéder à cet ajustement conforme à la lettre et l'esprit
de la loi organique.
Cette autorisation parlementaire constitue une contrainte salutaire
conduisant le Gouvernement à devoir s'expliquer devant la
représentation nationale sur une dérive des comptes sociaux.
*
* *
Votre
rapporteur souhaite naturellement que le débat puisse se poursuivre sur
les analyses et les propositions que comporte le présent rapport.
Nombre de ces propositions tendent à réformer des pratiques,
bousculer des habitudes ou appellent des initiatives de la part du
Gouvernement. Celles d'entre elles, qui nécessitent une intervention
législative, feront l'objet d'une proposition de loi et, le cas
échéant, d'amendements au prochain projet de loi de financement
de la sécurité sociale.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
Le
mercredi 16 juin 1999
, sous
la présidence de M. Jean Delaneau,
président
, la commission a entendu une
communication
de
M. Charles Descours
sur les
lois de financement de la
sécurité sociale
.
M. Charles Descours
a observé de manière
préliminaire que le Sénat jouait pleinement son rôle de
chambre de réflexion en procédant à un " audit "
des lois de financement de la sécurité sociale. Il a
rappelé que la commission des affaires sociales avait
décidé du principe d'un groupe de travail sur les lois de
financement de la sécurité sociale dès le mois de novembre
1998. Il a souligné combien le programme complet d'auditions avait
nourri les analyses et les propositions du groupe de travail,
arrêtées le 9 juin dernier.
M. Charles Descours
a tout d'abord constaté que les lois de
financement représentaient désormais un acquis incontestable. Il
a rappelé que l'intervention du Parlement était légitime,
à partir du moment où les dépenses de la
sécurité sociale dépassaient celles de l'Etat, où
la fiscalisation croissante des recettes de la sécurité sociale
s'accompagnait d'une déconnexion entre l'exercice d'une activité
professionnelle et le droit à prestations et où le déficit
continu du régime général depuis 1989 montrait que les
partenaires sociaux n'avaient pas pu jouer le rôle que leur assignaient
les ordonnances de 1967.
Il a fait valoir que les finances sociales étaient devenues des finances
publiques à part entière. Observant qu'elles n'étaient pas
pour autant assimilables aux finances de l'Etat, il a estimé qu'elles
nécessitaient un instrument spécifique et original, celui des
lois de financement de la sécurité sociale, permettant au
Parlement de fixer les objectifs de dépenses par branche des
régimes de plus de 20.000 cotisants, les prévisions de recettes
par catégorie, l'objectif national des dépenses d'assurance
maladie (ONDAM) et les plafonds d'avances de trésorerie aux
régimes dont la situation justifie le recours à l'emprunt.
Se réjouissant que les lois de financement constituent un moment fort du
calendrier parlementaire, il a précisé que ce rendez-vous majeur
conduisait chaque année le Gouvernement à devoir présenter
devant le Parlement les mesures tendant à assurer l'équilibre des
comptes sociaux.
Il a observé que les lois de financement de la sécurité
sociale faisaient désormais l'objet d'un large consensus, tant des
forces politiques que des partenaires sociaux.
Il a estimé qu'elles avaient su éviter trois
écueils : le risque d'étatisation de la
sécurité sociale, l'éventualité d'un conflit avec
les lois de finances et la crainte d'un calendrier parlementaire impossible
à tenir.
M. Charles Descours
a considéré que l'instrument
apparaissait cependant perfectible.
Il a regretté que le " volet qualitatif " soit
décevant, le " rapport annexé " à l'article
premier -amendable par les parlementaires- ne remplissant pas sa mission
" d'éclairage des dispositions financières ". Il a
rappelé que ce rapport était à la fois un exposé
des motifs des dispositions du projet de loi, un rappel général
des priorités de santé publique, une succession de
déclarations d'intention et une expression d'engagements de la part du
Gouvernement. Il a précisé qu'un arrêt du Conseil d'Etat du
5 mars 1999 était venu définitivement conclure que ces
dispositions n'avaient aucune portée normative.
Il a considéré que les orientations de santé publique
n'avaient pas trouvé leur place dans les lois de financement.
Il a observé que de grands débats extérieurs aux lois de
financement (Etats généraux de la santé, conférence
nationale de la famille, mission confiée au commissariat
général du Plan) s'étaient multipliés et que la
représentation nationale en était la grande absente.
Il a constaté que la jurisprudence souple du Conseil constitutionnel et
l'absence d'inscription à l'ordre du jour d'un projet de loi portant
diverses mesures d'ordre social (DMOS) pouvaient faire craindre une
dérive des lois de financement vers de tels types de projets de loi.
M. Charles Descours
a indiqué que les lois de financement
n'étaient pas pour autant devenues des lois de finances sociales, en
raison notamment des délais de production des comptes des organismes de
sécurité sociale. Il a regretté que ce retard handicape
à tous les niveaux le pilotage des finances sociales et que l'analyse
des comptes manque de substance, faute de suffisamment d'éléments
fournis en temps utile.
Il a observé que la fiabilité de ces comptes demeurait
incertaine, en raison de l'absence de plan comptable unique des organismes de
sécurité sociale.
Il a noté que les lois de financement étaient des textes
financiers peu lisibles, du fait de l'existence de transferts entre
régimes, liés notamment à la compensation, de transferts
entre branches et de l'affectation de recettes à plusieurs organismes
bénéficiaires. Il a mentionné ainsi le mécanisme de
répartition infiniment complexe de la contribution sociale
généralisée (CSG) entre les différents
régimes d'assurance maladie.
Il a déploré le manque de lisibilité des relations
financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
Il a observé que -compte tenu des incertitudes pesant sur les comptes-
il n'était guère étonnant que le suivi de l'application
des lois de financement reste embryonnaire. Il a constaté que les
commissions des comptes de la sécurité sociale n'avaient pas
tiré les conséquences des lois de financement, en ne
présentant aucune estimation des objectifs de dépenses et des
prévisions de recettes adoptés par le Parlement.
Il a souligné que les travaux de la Cour des comptes étaient
également affectés par l'incertitude pesant sur les comptes
sociaux et que le contrôle de l'application des lois de financement
restait insuffisant.
Abordant la question de l'objectif national de dépenses d'assurance
maladie (ONDAM), il a rappelé que le Parlement votait un objectif
global, sans être formellement informé de la répartition
entre les différentes enveloppes de dépenses. Il a
considéré que la comparaison avec les crédits
budgétaires inscrits en loi de finances ne se justifiait pas, en raison
des responsabilités des partenaires sociaux dans la gestion de
l'assurance maladie et de la nécessité de développer une
politique conventionnelle. Il a noté que la fixation législative
de la répartition de l'ONDAM entre prescripteurs était
incompatible avec deux autres préoccupations : une certaine
fongibilité des enveloppes, notamment à partir d'un coût
par pathologie, et le souci d'aller vers une forme de régionalisation de
la politique d'assurance maladie.
Il a souligné que la véritable question était celle du
contenu de l'ONDAM en termes de santé publique. Il a
considéré qu'une fois passée la constitution de
l'agrégat comptable initial dans la loi de financement pour 1997, il
importait de donner un sens à l'approbation par le Parlement de son
évolution ultérieure ; il a observé que la fixation
par les deux dernières lois de financement d'un taux de progression de
l'ONDAM reposait davantage sur la reconduction de moyens calculée de
façon plus ou moins réaliste que sur l'analyse des besoins de
santé publique.
Il a constaté en outre que le Parlement assistait impuissant au
dépassement du montant de l'ONDAM fixé en loi de financement et
que le Gouvernement ne tirait pas les conséquences d'un tel
dépassement.
M. Charles Descours
a rappelé que la loi organique du
22 juillet 1996 avait organisé, en quelque sorte, une absence
d'équilibre de la loi de financement, afin de respecter la marge de
manoeuvre des partenaires sociaux, chargés de gérer au quotidien
la sécurité sociale. Il a remarqué toutefois que -faute de
pouvoir se prononcer sur un équilibre des lois de financement- le
Parlement entérinait un " équilibre " du seul
régime général, annoncé dans la presse et
explicité par une annexe du projet de loi de financement, situation que
voulait justement éviter la loi organique.
Rappelant que le plafond d'avances de trésorerie était
originellement un moyen pour le Parlement de contrôler en
exécution le déficit des régimes sociaux, il a
constaté que du fait de relations de trésorerie complexes entre
l'Etat et la sécurité sociale et de l'utilisation à deux
reprises de la procédure réglementaire d'urgence pour relever le
plafond de ces avances, cet instrument avait perdu beaucoup de sa signification.
M. Charles Descours
a reconnu que le groupe de travail ne
prétendait pas avoir trouvé une solution à toutes les
questions complexes évoquées, mais qu'un certain nombre de
propositions pouvaient être formulées.
M. Charles Descours
a considéré que trois
préalables étaient nécessaires pour permettre aux lois de
financement de jouer pleinement leur rôle.
Il a estimé que le premier préalable était de disposer des
comptes à temps. Il a proposé qu'un objectif soit clairement
fixé, pour une clôture des comptes des organismes de
sécurité sociale de l'année n au 31 mars de
l'année n+1. Il a indiqué qu'un " plan de marche "
devait être établi, prenant en compte la nécessaire
formation des personnels et l'adaptation des systèmes d'information pour
que cet objectif puisse être atteint dans un délai de trois ans.
Il a précisé que le deuxième préalable était
de redéployer les moyens administratifs, la Direction de la
sécurité sociale devant à l'évidence disposer de
moyens quantitatifs et qualitatifs supplémentaires, au prix d'un
redéploiement des effectifs.
Il a considéré que le troisième préalable
consistait à clarifier le contexte constitutionnel, le Gouvernement
étant retombé dans les travers d'une tutelle pesante, intervenant
dans la gestion courante de l'assurance maladie et signant des accords
disparates avec les professions médicales.
M. Charles Descours
a présenté ensuite deux orientations
pour rendre le débat plus transparent et plus efficace.
Il a estimé que la première orientation consistait à
redistribuer les débats, en instituant des lois d'orientation de
santé publique et de sécurité sociale quinquennales, dont
les lois de financement seraient -d'un point de vue financier- la traduction
annuelle. Il a observé que la mise en place de ces lois d'orientation
permettrait de faire l'économie du rapport annexé à chaque
projet de loi de financement.
M. Charles Descours
a insisté sur la nécessité de
prévoir régulièrement des lois portant DMOS, afin
d'alléger les lois de financement de dispositions n'ayant qu'un rapport
parfois lointain avec le financement de la sécurité sociale.
Il a considéré qu'il était nécessaire de
réaffirmer le rôle du Parlement dans le débat public, en
prévoyant -en fonction de l'actualité sociale- la tenue au
printemps d'un débat d'orientation sur un thème spécifique
de la protection sociale.
Il a estimé qu'il serait alors possible de recentrer les lois de
financement sur les enjeux des finances sociales, le Parlement étant en
mesure de réfléchir davantage au contenu des objectifs de
dépenses, plutôt qu'à leur seule évolution.
M. Charles Descours
a expliqué que la deuxième orientation
consistait à clarifier les enjeux des finances sociales en simplifiant
les mécanismes de financement et en progressant dans la notion d'un
équilibre des lois de financement, par la définition d'un
équilibre par branche. Il a rappelé que le contexte des lois de
financement était fondamentalement différent des règles
applicables en matière de loi de finances -privilégiant
l'unité du budget de l'Etat- puisque la loi du 25 juillet 1994 posait le
principe de l'autonomie des différentes branches du régime
général.
Il a estimé qu'il était également nécessaire de
mieux apprécier la cohérence des finances publiques. Il a
considéré qu'il était nécessaire d'instituer un
véritable débat d'orientation sur les finances publiques, le
débat d'orientation budgétaire actuel restant trop allusif sur
les finances sociales. Il a précisé qu'il était
nécessaire de mieux distinguer les finances de l'Etat des finances
sociales, en établissant un bilan exact de leurs relations
financières et en supprimant les affectations de recettes communes au
budget de l'Etat et à la sécurité sociale.
Evoquant le contrôle de l'application des lois de financement de la
sécurité sociale, il a indiqué qu'il était
nécessaire d'établir une relation régulière entre
les commissions et la Cour des comptes, ce qui signifiait une prise de
connaissance en amont du programme de travail de la Cour et un véritable
dialogue à l'occasion de la remise du rapport annuel sur la
sécurité sociale.
Il a constaté qu'il était également souhaitable de
définir une pratique de lois de financement rectificatives, lorsqu'une
dérive majeure des comptes sociaux était constatée,
notamment lorsqu'il était nécessaire de relever les plafonds
d'avances de trésorerie. Il a observé que le respect de la
neutralité des opérations de trésorerie entre l'Etat et la
sécurité sociale était d'autant plus nécessaire,
afin que ces plafonds correspondent à un déficit comptable et non
à un besoin de trésorerie.
M. Charles Descours
a conclu son propos en observant qu'il ne proposait
pas de bouleverser les lois de financement, mais d'opérer un certain
nombre de " réglages fins ".
Il a souhaité que les analyses et les propositions du groupe de travail
permettent d'améliorer la connaissance des lois de financement de la
sécurité sociale et d'accélérer la prise de
conscience, à tous les niveaux, des implications que comporte la mise en
place de telles lois.
M. Jean Delaneau, président,
après avoir remercié
M. Charles Descours de la clarté de son exposé sur des sujets
pourtant complexes, a estimé que les analyses et les orientations
présentées permettraient d'éclairer la discussion des
prochaines lois de financement.
M. Jean Chérioux
, après avoir salué le travail
difficile effectué par M. Charles Descours, a noté le
souhait de développer une coopération régulière
entre la commission et la Cour des comptes. Citant l'exemple de la loi famille
du 25 juillet 1994, il a considéré toutefois que la Cour des
comptes n'était plus dans son rôle lorsqu'elle en venait à
critiquer les orientations retenues par le législateur.
M. Francis Giraud
a constaté qu'il était difficile de
percevoir la cohérence de l'action des différents organismes et
groupes d'experts dans le domaine de la santé publique. Il s'est
félicité de la proposition faite par le rapporteur d'une loi
d'orientation de santé publique, exercice certes délicat, mais
indispensable. Il a remarqué que l'examen du projet de loi portant
création d'une couverture maladie universelle (CMU) avait
été l'occasion d'une discussion d'un panier de soins pour les
titulaires de la CMU, alors qu'il était aujourd'hui impossible de le
connaître pour l'ensemble des assurés.
M. François Autain
a reconnu que la matière était
particulièrement complexe. Il a déclaré souscrire à
un certain nombre de propositions faites par M. Charles Descours.
Il a ainsi noté que des lois d'orientation de santé publique, sur
une période de cinq ans, permettraient de mieux coordonner les travaux
du Haut comité de la santé publique et de la conférence
nationale de santé. Il a regretté l'impression de redondance
laissée par les rapports de la conférence nationale de
santé. Il a observé que les crédits budgétaires du
ministère de la santé devaient également faire partie
d'une programmation pluriannuelle.
Abordant le contexte institutionnel, il a observé que les professionnels
de santé avaient naturellement tendance à s'adresser au
Gouvernement. Il a estimé que la principale question posée
était celle de la légitimité des conseils d'administration
des caisses.
Il a souscrit à la proposition d'un véritable débat sur
les finances publiques.
Enfin, il a fait part de son scepticisme quant aux perspectives de
simplification du financement de la protection sociale.
M. Dominique Leclerc
s'est interrogé sur la
crédibilité du Parlement à voter un ONDAM chaque
année, alors que la politique de santé restait aussi
difficilement lisible. Il a souscrit à la proposition de lois
d'orientation de santé publique, instituant un cadre pluriannuel.
Evoquant les travaux du Parlement européen en matière de lutte
contre le saturnisme, il a observé que le cadre national n'était
plus forcément le seul adapté pour définir une politique
de santé.
Dénonçant le manque de transparence des comptes, il s'est
élevé contre leur construction actuelle. Il s'est
étonné du montant encore important des exonérations de
cotisations de sécurité sociale non compensées par l'Etat.
Il a regretté que seule la Caisse nationale d'assurance maladie des
travailleurs salariés (CNAMTS) dispose des statistiques des
dépenses d'assurance maladie.
M. Guy Fischer
a souligné le caractère prioritaire d'une
définition d'une politique de santé publique, en matière
de soins et de prévention. Il a observé que les lois de
financement avaient défini un ONDAM qui n'était pas
maîtrisé. Il a souscrit à la proposition de lois
d'orientation de santé publique, à condition que celles-ci
permettent de définir les véritables besoins, par exemple des
hôpitaux. Evoquant les conventions signées entre le Gouvernement
et les professions médicales, il a reconnu qu'elles montraient une
certaine confusion.
Il a souligné l'incertitude affectant les comptes de la
sécurité sociale et rappelé que la contribution sociale
généralisée (CSG) était devenue la première
imposition directe en France.
M. Bernard Seillier
a rendu hommage à la volonté de
procéder à un rapport d'évaluation et de
méthodologie. Il s'est interrogé sur la possibilité
d'étendre ce type d'évaluations à des instruments
très concrets, comme le mécanisme de régulation affectant
les cliniques privées.
M. Alain Vasselle
s'est interrogé sur l'existence d'instruments
permettant de mesurer l'efficacité de la politique de santé.
M. Claude Huriet
a marqué son inquiétude devant la
multiplication de grands débats extérieurs aux lois de
financement. S'interrogeant sur la conception exacte d'une
démocratisation des choix de santé, il a souscrit à la
proposition d'une loi pluriannuelle.
Il a estimé que les ajustements de recettes effectués par
l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)
laissaient perplexe sur la réalité des déficits et des
équilibres présentés alors même que ces
données financières sont avancées pour justifier des
mesures correctrices.
Abordant les relations entre le Gouvernement et la CNAMTS, il s'est
interrogé sur le pouvoir exact de l'Etat et des partenaires sociaux. Il
a rappelé que les conseils de surveillance, institution toute
récente, avaient pour mission d'effectuer un contrôle de la mise
en oeuvre des conventions d'objectifs et de gestion. Il a observé que
leurs avis rendus au Parlement devraient permettre d'y voir plus clair.
Répondant aux différents intervenants,
M. Charles Descours
a constaté qu'effectivement les orientations et propositions qu'il
présentait avaient un fort contenu " méthodologique "
qui dépassait les clivages politiques.
Il a reconnu, en réponse aux interrogations de M. Jean Chérioux,
que la Cour des comptes n'avait pas pour mission de donner son avis sur les
décisions politiques prises, mais de contrôler efficacement les
comptes de la sécurité sociale.
Il a estimé que la détermination du panier de soins,
évoqué par M. Francis Giraud, était une
compétence revendiquée par tous les acteurs : Gouvernement,
professionnels de santé, conseils d'administrations des caisses
d'assurance maladie et Parlement.
Revenant sur les observations formulées par M. François Autain,
il a observé que l'institution de lois pluriannuelles permettrait
justement de traiter à la fois des moyens de prévention
dépendant du budget des régimes d'assurance maladie et des
crédits ministériels de la santé.
Répondant à M. Dominique Leclerc, il a rappelé qu'il
était nécessaire de faire la distinction entre les
exonérations de cotisations décidées avant 1994
-restées non compensées- et celles décidées
après 1994, intégralement compensées. Il a expliqué
que l'Etat n'estimait pas toutefois nécessaire de rembourser les
dispositifs d'exonération qui font l'objet d'une prorogation ainsi que
d'une majoration de taux.
Il a indiqué que les données chiffrées étaient
normalement à la disposition des professions de santé, à
travers leurs unions régionales.
Répondant à M. Alain Vasselle, et après avoir
indiqué que l'Agence nationale d'accréditation et
d'évaluation en santé (ANAES) n'avait pas atteint son objectif,
il a précisé que les instruments de mesure de la politique de
santé ne faisaient pas partie du sujet abordé par le groupe de
travail.
Revenant sur la multiplication des débats extérieurs aux lois de
financement, il a considéré que la loi d'orientation était
justement un moyen d'éviter que le Parlement n'en soit exclu.
Il a souscrit à la remarque de M. Claude Huriet visant à rappeler
le rôle joué par les conseils de surveillance.
La commission a alors
approuvé la communication de M. Charles
Descours et décidé de sa publication sous la forme d'un rapport
d'information.
SOMMAIRE DES ANNEXES
Pages
ANNEXE I - COMPTES RENDUS DES AUDITIONS DU GROUPE DE
TRAVAIL SUR
LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
114
ANNEXE II - LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITE SOCIALE :
DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES, ORGANIQUES ET LÉGISLATIVES
156
ANNEXE III - SCHÉMAS SUR LE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE
164
ANNEXE IV - LISTE DES IMPOSITIONS AFFECTÉES AUX ORGANISMES DE
SÉCURITÉ SOCIALE
167
ANNEXE V - HISTORIQUE DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LES REVENUS
DU CAPITAL
171
ANNEXE VI - TABLE DES SIGLES UTILISÉS
172
ANNEXE I
-
COMPTES RENDUS DES AUDITIONS
DU GROUPE
DE TRAVAIL SUR LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE82(
*
)
Mercredi 17 février 1999
---
Audition de M. Gilles Brucker, vice-président (depuis 1998),
et de M.
Etienne Caniard, membre du Haut comité de la santé
publique
(1991-1998)
M.
Gilles Brucker a précisé que le Haut comité de la
santé publique (HCSP) avait été presque entièrement
renouvelé fin décembre 1998. La plupart des membres du
comité précédent, ayant effectué deux mandats de
trois ans, ne pouvaient être reconduits.
Il a rappelé que le Haut comité était chargé
d'apporter au ministre chargé de la santé des
éléments d'aide à la décision sur les
problèmes de santé publique ou d'organisation des soins. Il a
considéré que cette mission impliquait que le Haut comité
prenne en compte non seulement l'épidémiologie, mais
également la sociologie et l'économie.
Interrogé sur l'évolution du rôle du Haut comité
dans le cadre des ordonnances de 1996 (établissement d'un rapport
destiné à la Conférence nationale de santé et au
Parlement) et sur le bien-fondé, dans ces conditions, d'une
présidence de ce comité par le ministre chargé de la
santé, M. Gilles Brucker a considéré que le Haut
comité ne devait pas être enfermé dans une logique
politique, qu'il bénéficiait d'une autonomie quant au choix des
thèmes -le Haut comité peut en effet s'autosaisir- et à la
façon de les traiter. Il a estimé que le Haut comité
élaborait ses conclusions en toute indépendance et qu'il devait
pouvoir s'exprimer si les décisions du ministre n'étaient pas
conformes aux recommandations formulées.
M. Etienne Caniard a précisé que le Haut comité avait
effectué un bilan de ses sept premières années de
fonctionnement et s'était notamment posé deux questions :
celle précisément de la présidence du ministre mais
également celle du rôle du directeur général de la
santé qui fait fonction de secrétaire général du
Haut comité.
Sur le premier point, le Haut comité a considéré que le
problème n'était pas celui de la tutelle du ministre. Au
contraire, le Haut Comité aurait parfois gagné à une
présence plus réelle des ministres.
S'agissant des six membres de droit
83(
*
)
, leur
présence apparaît plutôt bénéfique car elle
garantit une réflexion pragmatique au sein du Haut comité et
assure un lien entre ces réflexions et leur mise en oeuvre rapide. Il
est donc utile que ces membres de droit soient présents plutôt que
représentés. A cet égard, M. Etienne Caniard a
regretté la faible implication du représentant de la Caisse
nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).
Pour ce qui est du directeur général de la santé,
M. Etienne Caniard a souligné que sa fonction de secrétaire
général pouvait poser un problème d'indépendance en
termes de moyens et entraîner un risque
d'"
instrumentalisation
" du Haut comité par la
Direction générale de la santé. Il a toutefois
précisé que cette situation ne s'était pas
rencontrée.
Abordant l'articulation des travaux du Haut comité avec ceux de la
Conférence nationale de santé, M. Gilles Brucker a rappelé
qu'elle se traduisait formellement par la remise du rapport annuel du Haut
comité à la Conférence nationale. Il a souligné que
la composition des deux organismes était très différente,
le Haut comité réunissant des experts, la Conférence
nationale rassemblant des représentants des professionnels, institutions
et établissements de santé ainsi que des représentants des
conférences régionales. Il a estimé qu'une bonne
articulation des travaux des deux organismes impliquerait que ceux du Haut
comité interviennent très en amont de la Conférence
nationale, cette dernière devant être le lieu où les
professionnels de santé "
s'approprient
" les
propositions des experts.
Dans la réalité, le rapport du Haut comité n'intervenant
que quelques semaines avant la réunion de la Conférence
nationale, le risque de "
doublonnage
" est important et
partiellement conjuré par un partage de fait des sujets "
dans
l'air du temps
" entre le Haut comité et les groupes de travail
de la Conférence nationale.
S'agissant des liens entre les travaux du Haut comité et ceux du
Parlement dans le cadre notamment de l'examen des lois de financement de la
sécurité sociale, M. Gilles Brucker a souligné que
des rencontres de travail périodiques avec les parlementaires
étaient une demande forte du Haut comité.
Il s'est interrogé sur le lien entre le vote d'une enveloppe de
dépenses et la prise en compte de priorités de santé
publique. Il a estimé que la réponse était difficile
à cette question récurrente. De même a-t-il
considéré que le "
préambule
" de la loi
de financement
84(
*
)
et son dispositif
apparaissaient bien déconnectés.
M. Gilles Brucker a souligné que le Haut comité était
un outil au service de ceux qui ont en charge la définition d'une
politique de santé. Il a observé que seul le Parlement -relais de
l'expression des citoyens- était à même de se prononcer sur
les "
enjeux vastes et complexes
" d'une telle politique.
Se référant aux lois d'orientation ou de programme qui permettent
de dépasser l'annualité budgétaire, M. Etienne Caniard a
estimé que l'adoption, à échéance
régulière, par le Parlement de "
loi d'orientation
sanitaire
" pouvait être une réponse aux insuffisances
dans ce domaine des lois de financement de la sécurité sociale.
Il a observé que le Haut comité, en 1994, soit avant la
réforme de 1996, avait demandé que soit étudiée
cette possibilité.
M. Claude Huriet, membre du Haut comité de 1991 à 1998, a
rappelé que la création du Haut comité avait eu pour
objectif, en regroupant un certain nombre de comités spécifiques,
d'appréhender la santé publique comme un tout. La composition du
Haut comité lui a semblé satisfaisante ; seule l'absence
d'un vétérinaire était regrettable.
Il a estimé en revanche que l'évolution des tendances dans le
domaine de la santé publique n'était pas telle qu'elle justifiait
un rapport annuel du Haut comité. S'interrogeant sur le rôle et
l'efficacité du Haut comité, il a constaté que ni le
Gouvernement, ni le Parlement -dont le rôle se limite à cautionner
une enveloppe de dépenses limitative- n'utilisait les travaux du Haut
comité ; il a souligné toutefois l'exception notable qu'ont
constituée les propositions du Haut comité sur la médecine
pénitentiaire. Il a considéré que les moyens propres du
ministère de la santé étaient sans lien avec les questions
soulevées par le Haut comité dans le domaine de l'alcoolisme, du
tabagisme ou du cancer.
M. Claude Huriet a estimé enfin que l'intervention de la
Conférence nationale de santé -et plus encore des
conférences régionales- avait eu plutôt pour effet de
"
brouiller le schéma
".
Audition de M. Jean-Marie Spaeth,
président de la
Caisse nationale d'assurance maladie
des travailleurs salariés
M.
Jean-Marie Spaeth a estimé que notre système de
sécurité sociale était marqué par trois grandes
dates : 1945-46, 1967, 1995-96.
Considérant que "
1995, c'était hier
", il a
souligné que l'adaptation des différents acteurs de la protection
sociale (Gouvernement, Parlement, caisses, professionnels et assurés)
à cet acte fondamental qu'était la fixation par le Parlement de
l'enveloppe des dépenses de santé serait nécessairement
progressive.
Il a considéré qu'à partir du moment où les
parlementaires fixaient un objectif de dépenses, il leur appartenait de
définir le contenu de cette enveloppe et de s'interroger sur ce qui
devait se passer en cas de dépassement de cet objectif. Il s'est
inquiété à ce propos des dépassements de l'ONDAM
constatés en 1998 et de leurs conséquences prévisibles sur
l'exercice 1999.
M. Jean-Marie Spaeth a souligné que les lois de financement
constituaient un progrès considérable même si l'objectif de
dépenses qu'elles comportent a été initialement construit
sur un état de fait : les dépenses constatées en 1996.
Il a constaté que les débats parlementaires s'enrichissaient
d'année en année, et qu'un contenu -certes très
insuffisant- était donné à l'ONDAM.
Il a toutefois considéré que la détermination par les lois
de financement d'un objectif de dépenses, sans que soit
arrêtée la définition du "
panier de biens et de
services pris en charge
" revenait "
à mettre la
charrue avant les boeufs
".
La définition d'un tel " panier ", qui doit impliquer le
régime de base et la couverture complémentaire, en raison d'un
désengagement de la sécurité sociale, lui paraissait
inéluctable à l'avenir. Ce "
panier de biens et de
services
" doit pouvoir évoluer en fonction des besoins de la
société concernant, par exemple, le traitement de la douleur ou
le vieillissement de la population. M. Jean-Marie Spaeth a estimé que la
fixation de ce panier, qui doit définir ce que la collectivité
estime nécessaire de couvrir pour l'ensemble de la population, ne
pouvait revenir, en dernier ressort, qu'à la représentation
nationale.
S'agissant de la responsabilité économique des professions de
santé, il a observé que l'agrégation de pratiques
individuelles de qualité pouvait suffire à garantir la
qualité de l'ensemble du système de soins, d'où la
nécessité de réfléchir aux réseaux de soins
et à des modes de paiement innovants, différents du paiement
à l'acte et qui favoriseraient une meilleure organisation des
professionnels. Il a, à cet égard, constaté que le Conseil
constitutionnel, dans sa décision sur la loi de financement pour 1999,
reconnaissait la responsabilité économique des professionnels
mais exigeait qu'elle soit mise en oeuvre auprès de chaque professionnel
selon des critères "
objectifs et rationnels
".
M. Jean-Marie Spaeth, abordant la question de la responsabilité des
différents partenaires, a appelé à une "
bonne
répartition des rôles
" ; il a estimé que la
restructuration de l'offre de soins relevait plutôt de la CNAM, car cette
dernière "
peut faire des choses que le politique ne peut pas
faire
". Il a déploré l'absence de politique lisible
concernant le médicament, il a souligné la
nécessité d'accepter la sélectivité (lieu
d'implantation, préretraites, numerus clausus) et estimé que
l'utilisation des lettres clefs flottantes agissait sur le revenu des
médecins, mais n'avait aucune influence sur l'organisation du
système de soins.
Répondant aux questions des membres du groupe de travail, M. Jean-Marie
Spaeth a estimé que les travaux de la Conférence nationale de
santé et des conférences régionales étaient
intéressants mais qu'il était difficile de définir des
priorités de santé publique sans avoir défini le
"
minimum
", un "
socle "
; il lui a
semblé que la fixation annuelle de l'ONDAM était
nécessaire mais pas suffisante car cet objectif devait être mis en
perspective avec une politique sanitaire qui s'inscrit nécessairement
dans un cadre pluriannuel.
M. Jean-Marie Spaeth a, par ailleurs, considéré qu'il ne
serait pas opportun que le Parlement vote un ONDAM par secteur et qu'il
était préférable que cette répartition fasse
l'objet d'une délégation au gestionnaire de l'assurance
maladie ; il a estimé au demeurant qu'il était souhaitable
d'aboutir à une fongibilité des enveloppes, notamment à
partir d'un coût par pathologie.
Audition de M. François de
Paillerets,
président
de la conférence nationale de santé, de M. Mathieu Méreau,
membre du bureau de la conférence nationale, collège des
régions et de M. Jacques Vleminckx, collège des professions
libérales
M.
François de Paillerets a observé que le transfert vers le
Parlement des décisions financières dans le domaine de la
sécurité sociale avait été "
bien
reçu par tout le monde
" et avait favorisé une prise de
conscience des problèmes de santé, tant d'un point de vue
médical qu'économique, et contribué à combler le
"
déficit de
culture de santé publique
"
qui marque notre pays.
Il a toutefois constaté qu'une approche réaliste des trois
derniers exercices obligeait à la modestie. Même s'il était
difficile de faire mieux, on ne peut être satisfait de projets de loi de
financement de la sécurité sociale fondés sur une
photographie des dépenses remboursées, ces dépenses,
liées à l'offre de soins, étant actualisées d'une
marge calculée de façon arbitraire, alors qu'il conviendrait de
partir des
besoins
de santé.
M. Mathieu Méreau a souligné que le principe d'une enveloppe de
dépenses plafonnée à répartir pouvait être
dangereux s'il n'était pas mis en oeuvre de façon réaliste.
Il a constaté que les lois de financement de la sécurité
sociale comportaient, en parallèle, l'affirmation de priorités et
l'existence de moyens financiers mais que les liaisons étaient absentes
entre ces deux éléments. Citant l'exemple d'une
surmortalité due aux cancers broncho-pulmonaires diagnostiquée
dans la région Nord-Pas de Calais, il a estimé que la
répartition de l'ONDAM devait prendre en compte de tels enjeux de
santé publique.
M. Jacques Vleminckx a rappelé que la Conférence nationale de
santé était une "
force de proposition
", et non
une instance de décision. Il a indiqué que le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998 avait pris en
compte, dans son rapport annexé, un grand nombre d'orientations de la
Conférence nationale de santé, contrairement à la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1999, qui contient, en
revanche, des dispositions de santé publique dans le corps même du
texte de loi, ce qui constitue une première. Il a noté que les
grandes orientations dégagées par la Conférence depuis
1996 "
faisaient leur chemin
" au sein de la direction
générale de la santé. Il a observé que la tenue des
Etats généraux de la santé perturbait en 1999
l'organisation des travaux de la Conférence nationale de santé.
M. François de Paillerets a rappelé que la convocation de la
Conférence nationale de santé était de la
compétence du ministre de la santé, et qu'aucune date n'avait
été encore arrêtée. Le souhait des membres est de
tenir cette réunion à la mi-mai (23-25 juin en 1998), la date
idéale se situant début mars, afin de pouvoir influer de
manière significative sur le processus décisionnel.
Il a indiqué que les travaux de la Conférence ne se limitaient
pas à sa réunion annuelle qui dure trois jours. Dès la fin
d'une conférence, les thèmes de la prochaine sont
envisagés à travers différents groupes de travail. Ainsi
le groupe "
inégalités de santé inter et intra
régionales
", constitué il y a trois ans, s'est remis au
travail dès décembre 1998.
M. François de Paillerets a souligné que la Conférence
nationale de santé "
n'inventait rien
" ; ses
travaux étaient toujours consécutifs à des travaux
conduits en amont, principalement ceux du Haut comité de la santé
publique, mais également ceux de la Direction générale de
la santé et de l'INSERM. La Conférence nationale de santé
est "
un filtre entre la fonction d'expertise et la fonction de
décision
". Si la Conférence "
n'invente
rien
", elle contribue à "
accélérer les
projets pertinents
" en se les appropriant.
M. François de Paillerets a toutefois reconnu qu'un manque de
lisibilité et de communication existait entre les travaux du Haut
comité et ceux de la Conférence du fait essentiellement de
simultanéité des effets d'annonce auxquels donnent lieu la remise
très rapprochée dans le temps des deux rapports.
M. Mathieu Méreau a rappelé que la composition de la
Conférence nationale de santé était très
différente de celle du Haut comité et que la Conférence
était un lieu de "
confrontation
", dans le bon sens du
mot, entre acteurs libéraux, représentants des
établissements, représentants des régions et personnes
qualifiées.
Il a souligné que la tenue de conférences tous les ans
représentait un rythme de travail très soutenu et impliquait des
moyens logistiques importants. Il a estimé nécessaire que le
secrétariat de la Conférence, assuré par la Direction
générale de la santé, soit renforcé.
M. François de Paillerets a indiqué que les travaux de la
Conférence nationale de santé, en 1998, s'étaient inscrits
dans la continuité des années précédentes. Il a
ainsi observé que les trois thèmes étudiés en 1998
figuraient parmi les dix priorités retenues par la première
Conférence nationale de santé (1996). L'examen de ces
priorités sera ainsi achevé en 1999, chaque conférence
annuelle s'étant appropriée trois thèmes.
Abordant le chiffrage des propositions, M. François de Paillerets a
indiqué que la Conférence n'était pas compétente
pour l'effectuer elle-même mais souhaitait qu'une instance externe puisse
s'en charger.
Concluant son propos, M. François de Paillerets a estimé qu'un
jour se poserait la question de la définition d'un "
panier de
soins remboursés
". Il a considéré que si la
Conférence présentait la composition qu'il fallait pour
établir une "
hiérarchie des éléments du
panier
" et déterminer les critères de décision,
la décision elle-même ne devait pas lui revenir.
Jeudi
4 mars 1999
---
Audition de M. Jean-François Chadelat,
Inspecteur
général des affaires sociales
M.
Jean-François Chadelat, chargé d'une mission d'appui en 1998
auprès du secrétaire général de la commission des
comptes de la sécurité sociale, a expliqué que la sortie
du dernier rapport de la commission des comptes de la sécurité
sociale de septembre 1998 s'était déroulée dans des
conditions particulièrement difficiles, en raison du retard mis à
connaître avec précision les recettes des différentes
branches.
Il a rappelé que le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale de printemps 1998 faisait déjà
apparaître une sous-estimation inexpliquée des cotisations de la
Caisse nationale d'assurance vieillesse. En tant qu'administrateur de la CNAM,
M. Jean-François Chadelat a approuvé les comptes 1997 de cet
organisme lors du conseil d'administration du 25 juin 1998 ; or, la
ventilation des cotisations n'était pas alors stabilisée. De
nouveaux chiffres ont été notifiés par l'ACOSS fin juillet
1998.
Le montant global des cotisations encaissées ne pose pas de
problème : le taux de recouvrement des URSSAF est excellent. En
revanche, l'affectation des recettes entre les différents organismes,
que doit réaliser l'ACOSS, est déficiente.
Avant le 1
er
janvier 1998, l'ACOSS utilisait une méthode
qualifiée de " statistico-comptable " ; un ajustement
était réalisé en fin d'année.
Depuis le 1
er
janvier 1998, le système RACINE, permet de
ventiler à la source au niveau des URSSAF les différents
encaissements, en partant des bordereaux récapitulatifs de cotisations.
La mise en oeuvre de ce projet -dont les principes sont tout à fait
excellents- n'a pas été très satisfaisante en 1998. La
montée en puissance du système RACINE a été longue
à se dessiner. La responsabilité de l'ACOSS est ainsi en
première ligne. Les contrôles opérés sont
délicats, comme l'a souligné, dans son rapport de mai 1998, la
mission conjointe de l'Inspection Générale des Affaires Sociales
et de l'Inspection Générale des Finances.
La polémique autour des chiffres des dépenses d'assurance maladie
est -en comparaison- tout à fait disproportionnée. La CNAM a
toujours produit ses statistiques dans une optique comptable. La loi de
financement et la définition de l'ONDAM ont obligé la CNAM
à fournir des chiffres en fonction des prescripteurs, ce qui a
doublé la charge de travail. Le taux d'erreur (prescripteurs non
identifiés) tend à diminuer. La vraie question est
désormais celle des recettes. Pour reprendre l'exemple de la CNAM,
celle-ci est capable de fournir des statistiques de dépenses avec 45
jours de décalage. L'ACOSS devrait diffuser des données
stabilisées sur les recettes selon les mêmes délais.
L'objectif devrait être de disposer des chiffres complets le 31 mars
de l'année suivante et qu'aucun chiffre ne soit modifié à
partir de cette date.
A la décharge de l'ACOSS, la complexité et l'empilement des
mesures décidées par le législateur et le pouvoir
réglementaire jouent également un rôle. L'exercice de
compensations liées au transfert de cotisations d'assurance maladie sur
la contribution sociale généralisée (CSG) a
compliqué le système. La répartition suppose non seulement
que l'on sache précisément le montant de ce qui a
été encaissé au titre de la CSG déductible, ce qui
est relativement simple, mais aussi des cotisations qui "
auraient
été versées en l'absence de réforme
", ce
qui est beaucoup plus complexe. Des arrêtés répartissent en
bout de course les affectations de recettes (CSG et droits alcools, C3S) en
fonction des dépenses des régimes.
Citant également l'exemple des exonérations de cotisations, M.
Jean-François Chadelat a considéré que la démarche
de simplification était tout à fait essentielle.
M. Jean-François Chadelat a estimé que les moyens de la Direction
de la Sécurité sociale n'étaient pas suffisants. Evoquant
son arrivée à la Direction en 1971, il a indiqué qu'elle
disposait à l'époque de 350 agents, alors qu'elle n'en dispose
plus que de 250 aujourd'hui. Presqu'aucune conséquence n'a
été tirée de la création des lois de financement de
la sécurité sociale, alors que le dépôt du projet de
loi et de ses annexes au 15 octobre est une obligation constitutionnelle.
Il a regretté que l'ensemble des subventions de l'Etat aux
régimes sociaux ne fasse pas l'objet d'un vote isolé et
spécifique du Parlement. Evoquant le système mis en place pour le
retour à l'universalité des allocations familiales (prise en
charge par l'Etat de l'allocation parent isolé), il a indiqué que
ce système lui apparaissait un bon exemple de ce qu'il fallait faire, au
lieu d'inventer un nouveau mécanisme complexe de reversement de
"
ce qui aurait été économisé si les
allocations familiales étaient restées sous condition de
ressources
".
M. Jean-François Chadelat a estimé que les lois de financement
resteraient
" l'élément le plus important du plan
Juppé "
. Le Gouvernement s'est mis dans
" l'obligation
de faire "
: avant les lois de financement, il existait des plans
de financement de la sécurité sociale, qui étaient
numérotés consciencieusement ; depuis la réforme de
1996, il existe de fait un plan de financement tous les ans. Il a jugé
que la présentation des comptes par la commission des comptes de la
sécurité sociale entre le 20 et le 25 septembre, suivie de la
présentation du projet de loi de financement en conseil des ministres le
premier mercredi d'octobre, "
étaient tout à fait
pédagogiques
".
Audition de M. Jean Marmot, ancien secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale
Après avoir précisé qu'il s'exprimait
à
titre personnel, et non en tant que magistrat de la Cour des comptes, M. Jean
Marmot a souhaité formuler trois observations liminaires.
Première observation : ce que l'on appelle
" Sécurité sociale " en France n'est jamais qu'un
regroupement artificiel -parce que lié aux circonstances historiques de
la libération- des branches maladie, accidents du travail, famille et
vieillesse. Dans les autres pays occidentaux, on y inclut également
l'assurance chômage et la dépendance. Les lois de financement de
la sécurité sociale continuent à s'inscrire dans la
conception française traditionnelle.
Ces risques ont un " rythme de vie " distinct : conjoncturel
pour l'assurance maladie, tandis que la branche vieillesse construit son
équilibre sur un demi siècle. Les modes de financement sont
également différents. Le financement partiel par un impôt
proportionnel (la CSG) concerne désormais les branches famille, maladie
et vieillesse (via le FSV). En revanche, les risques accidents du travail et
chômage sont légitimement financés par des
prélèvements sur la masse salariale.
M. Jean Marmot s'est déclaré, en conséquence,
" partisan déterminé de la séparation des
risques
"
. Il a expliqué qu'il était absolument
nécessaire de
" bétonner la séparation des
financements et des problèmes de trésorerie "
. La loi du
25 juillet 1994, qui affirme le principe de la séparation des
branches, est malheureusement restée au stade des intentions.
Deuxième observation : les lois de financement ont le redoutable
inconvénient de centrer les débats sur l'annualité, alors
qu'un cadre pluriannuel est nécessaire.
Troisième observation : la Sécurité sociale a besoin
d'outils de gestion modernes. La réforme de la tenue de sa
comptabilité en droits constatés doit être poursuivie
à travers la mission confiée à M. Alain
Déniel
85(
*
)
. L'étape suivante,
après l'édiction de normes comptables claires, est la
certification des comptes. Les comités départementaux d'examen
des comptes des organismes de sécurité sociale (CODEC) ne
remplissent pas une telle fonction auprès des caisses locales. La Cour
des comptes ne certifie pas les comptes consolidés établis par
les organismes nationaux. La certification apparaît désormais
nécessaire, parce que les comptes sont opposables, et ont un effet sur
le revenu des professions médicales.
La commission des comptes de la sécurité sociale n'est pas saisie
des comptes établis par les comptables des caisses, mais des comptes
"
retravaillés
" par la Direction de la
Sécurité sociale. La commission des comptes devrait
"
franchir une nouvelle étape
" en devenant l'outil de
préparation de la décision gouvernementale.
Les lois de financement ont une immense vertu : elles remettent le
Parlement au centre des véritables choix démocratiques. Certes,
elles sont perfectibles, mais une remise en cause de la loi organique les
régissant serait actuellement prématurée ; il serait
préférable d'attendre d'avoir l'expérience d'une dizaine
d'années avant de l'envisager.
Concernant le rapport de la Cour des comptes, M. Jean Marmot a estimé
qu'il serait souhaitable qu'il se centre sur l'application de la loi de
financement comme le prévoit la loi organique, quitte à
être
" austère "
et relativement bref. Le
Parlement pourrait opportunément contribuer à orienter la
programmation des autres travaux de la Cour relatifs à la
sécurité sociale et à l'organisation sanitaire et sociale .
M. Jean Marmot a estimé que les dépenses de santé
continueraient d'augmenter à l'avenir mais que les moyens de financement
collectifs pouvant leur être affectés étaient
nécessairement contraints. Il est donc important de distinguer
" l'assurance maladie " de la " santé ", en
définissant, parmi les dépenses de santé, celles
éligibles en tout ou partie au remboursement collectif.
M. Jean Marmot a insisté sur l'importance, dans le cadre de la
préparation de la loi de financement, d'un débat d'orientation
qui pourrait intervenir au printemps, à l'issue du premier rapport de la
commission des comptes de la sécurité sociale. Ce débat
d'orientation pourrait être centré chaque année sur un
sujet particulier (assurance maladie, vieillesse, hospitalisation, accidents du
travail, famille, etc.).
Interrogé sur la commission des comptes de la sécurité
sociale, il a souligné qu'à la différence de la commission
des comptes de la Nation, son secrétaire général, depuis
la réforme intervenue en 1987, n'était plus un
" récitant parlant au nom du Ministre "
et qu'il
convenait donc qu'il exprime son opinion personnelle en pleine
indépendance.
Interrogé sur les mesures de simplification à mettre en oeuvre,
M. Jean Marmot a cité l'exemple de la couverture maladie
universelle, qui risque de compliquer le système, alors que le projet
initial d'assurance maladie universelle visait à simplifier de
manière radicale -au moins à terme- l'assurance maladie notamment
en supprimant le lancinant problème des " compensations ". Il
a évoqué la question du Fonds de solidarité vieillesse,
organisme dont les missions étaient au départ tout à fait
claires et qui est progressivement devenu un "
brouillard
"
à la suite notamment de l'affectation des excédents de C3S.
Interrogé sur la situation de l'ACOSS, il a estimé que la
ventilation des recettes entre les différentes branches n'y était
pas actuellement réalisée de manière satisfaisante. Il a
estimé qu'il était pourtant tout à fait possible qu'une
banque unique (l'ACOSS) puisse gérer, de manière lisible, des
comptes différents.
Mercredi 10 mars 1999
---
Audition de M. Philippe Nasse, secrétaire général de la
commission des comptes de la sécurité sociale
Invité à recenser les obstacles à une
accélération de la remise des comptes sociaux, M. Philippe Nasse
a tout d'abord rappelé que, si le plan comptable général
date de 1947, aucun plan comptable unique n'existe actuellement dans les
organismes de sécurité sociale. Il a fait observer que,
théoriquement, depuis la mise en oeuvre du principe des droits
constatés, il ne devrait plus y avoir d'obstacle à une remise
rapide des comptes.
En effet, lorsque la comptabilité est effectuée selon le principe
des encaissements/décaissements, il existe une période
complémentaire durant laquelle le comptable rattache un certain nombre
d'opérations à l'exercice de l'année civile
précédente. Cette période complémentaire dure en
principe jusqu'à fin mars, elle fait l'objet systématiquement de
prolongation jusqu'à fin avril et en réalité
" traîne " jusqu'au 20 ou 30 mai.
Lorsque la comptabilité est effectuée selon le principe des
droits constatés, les comptables n'ont besoin que d'une période
complémentaire "
technique, qui sert d'inventaire
" de
l'ordre d'une quinzaine de jours. Dans la logique de comptes établis en
droits constatés, il n'existe donc plus à proprement parler de
période complémentaire.
M. Philippe Nasse a expliqué que la situation de 1998 avait
été particulièrement difficile. L'ACOSS a
expérimenté pour la première année son
système RACINE, qui -comme tout système informatique- a connu des
problèmes de mise en place. L'URSSAF de Paris a connu également
une grande restructuration de ses systèmes d'information. En
conséquence, les comptes 1997 de certaines branches n'ont
été connus que très tardivement (approbation des comptes
de la CNAF le 8 septembre 1998). La répartition des recettes selon
les différentes branches a été effectuée de
manière probablement imparfaite. En comparaison, l'ACOSS vient de
fournir ses comptes 1998 le 8 mars 1999, soit deux mois plus tôt que
l'année dernière.
Les solutions pour accélérer la sortie des comptes sont de deux
ordres :
"
tenir ferme sur la logique des droits
constatés sans période complémentaire "
et
étudier de près les problèmes légitimes qui se
posent aux comptables pour le passage d'une comptabilité de caisse
à une comptabilité en droits constatés. Ce sont ces
problèmes que traite la mission interministérielle sur
l'harmonisation des plans comptables, animée par M. Alain Déniel,
mise en place à l'automne 1998. M. Philippe Nasse a
précisé que cette mission était placée sous
l'autorité d'un comité de pilotage qu'il présidait.
La question du provisionnement, et des reprises sur provisions, est ainsi une
question difficile. Dans une entreprise privée, la direction
générale fixe cette politique de provisionnement ; dans un
organisme de sécurité sociale, le comptable seul est dans la
situation de le faire, mais cela implique qu'il soit à même de
faire notamment des hypothèses de non recouvrement. Il s'agit de l'un
des thèmes abordés par la mission Déniel. Quatre groupes
de travail ont été constitués. Les travaux de cette
mission avancent. L'objectif d'aboutir à un plan comptable unique pour
les organismes de sécurité sociale pour la fin de l'année
1999 semble pouvoir être atteint.
Un des autres sujets de la mission Déniel est l'ONDAM. Il n'est pas
habituel pour des comptables de différencier les dépenses selon
les catégories juridiques de prescripteurs. Mais, là aussi, M.
Philippe Nasse a affirmé qu'il existait des solutions. L'ONDAM est bien
mesuré à la CNAMTS et à la CANAM, alors que la MSA a
encore "
des efforts à faire
".
La situation est facilitée pour la branche famille, puisque la CNAF
agrège l'ensemble des comptes ; en revanche, l'harmonisation des
pratiques comptables se pose avec acuité pour la branche vieillesse, qui
fait l'objet d'agrégats n'ayant actuellement guère de
signification, puisque "
les lignes sont différentes suivant les
régimes "
. M. Philippe Nasse a rappelé que la loi du 25
juillet 1994 a défini la notion de branche pour le seul régime
général, alors que la loi organique du 22 juillet 1996 concerne
l'ensemble des régimes.
La mission Déniel devrait pouvoir construire un dictionnaire, qui
explicitera le contenu des comptes et qui définira la situation des
restes à recouvrer. Ce plan comptable unique devra être
approuvé par le Conseil national de la comptabilité et faire
l'objet d'un "
dispositif d'entretien
" pour permettre son
actualisation régulière. Il faudra également régler
les problèmes d'adaptation des systèmes d'information et
prévoir une formation adéquate des comptables.
M. Philippe Nasse a estimé que l'objectif devait être une
approbation des comptes de l'année N au plus tard le 31 mars de
l'année N + 1. Il a considéré toutefois qu'il ne serait
pas bon que le législateur impose la réalisation de cet objectif
dès le 31 mars 2000, car une telle échéance
n'était pas réaliste.
Interrogé sur les moyens dont dispose le secrétaire
général de la commission des comptes de la sécurité
sociale, M. Philippe Nasse a expliqué qu'il disposait potentiellement,
pour l'accomplissement de sa mission, de toutes les directions du
ministère de l'Emploi et de la solidarité. La tâche de la
Direction de la Sécurité sociale est naturellement beaucoup plus
substantielle. Mais il s'agit d'une
" direction de
gestion "
; seul un bureau des comptes, à l'effectif de
six cadres, travaille étroitement avec le secrétaire
général lors des réunions de la commission des comptes.
M. Philippe Nasse a jugé que ces moyens étaient insuffisants,
qu'ils avaient même plutôt diminué, et que la tenue de la
commission des comptes de septembre 1998 avait été
particulièrement
" périlleuse "
.
Evoquant la construction du budget général de l'Etat, il a
rappelé que la Direction du Budget commençait à travailler
sur le budget 2000 dès décembre 1998, que les comptes 1998 de
l'Etat avaient été disponibles fin février 1999 de
manière assez précise, et définitivement fin mars 1999.
Pour les comptes de la sécurité sociale, ce travail de
préparation est absolument impossible, en raison d'une sortie des
comptes très tardive.
Interrogé sur le fait que les prévisions du rapport de la
commission des comptes de septembre 1998 anticipaient des décisions
déjà prises, M. Philippe Nasse a expliqué que les
deux exemples cités (progression d'un ONDAM à 2,6 %, diminution
du taux de cotisation de la branche accidents du travail) n'étaient pas
à mettre sur le même plan.
En ce qui concerne la branche accidents du travail, des réunions
paritaires avaient eu lieu, et la décision apparaissait
inéluctable ; ne pas retenir l'" hypothèse
technique " de la diminution du taux de cotisation aurait fait
apparaître artificiellement des excédents importants.
En revanche, M. Philippe Nasse a rappelé qu'il avait lui-même
formulé, dans le rapport de la commission des comptes
86(
*
)
, des observations au sujet de la progression retenue
de l'ONDAM.
Rappelant ce qu'il considérait être les éléments
d'un compte tendanciel (traduire le cadrage macro-économique des projets
de loi de finances, extrapoler les "
vitesses acquises
" et
prendre en compte les mesures déjà décidées), il a
estimé que les prévisions de dépenses d'assurance maladie,
calées sur une progression de l'ONDAM de 2,6 % en 1999 (telle que
retenue par le projet de loi de financement) supposaient, en 1999, non
seulement l'arrêt mais encore la résorption du dérapage de
1998 (+ 6 milliards de francs estimés en septembre 1998 qui
sont devenus en réalité + 9 milliards de francs).
En quelque sorte, pour ce qui est des dépenses d'assurance maladie, le
compte 1999 tendanciel, arrêté en septembre 1998, supposait acquis
le succès de la politique annoncée par le Gouvernement.
M. Philippe Nasse a rappelé que les prévisions étaient
effectuées par le Gouvernement, et non par le secrétaire
général de la commission des comptes de la sécurité
sociale, et qu'elles avaient forcément un contenu
" politique
"
.
La prévision des recettes s'appuie sur le rapport économique et
financier des projets de loi de finances ; ainsi, il n'y a pas de risque
de contradiction entre lois de finances et lois de financement, ce qui est
heureux.
Pour les dépenses,
" aucun Gouvernement ne peut laisser ses
services prévoir l'échec de sa politique "
, ce qui est
tout à fait normal. Les comptes présentés en septembre
1998 avaient ainsi trois statuts différents : les comptes 1997
étaient
" observés "
, les comptes 1998
constituaient
" une vraie prévision "
, les comptes 1999
étaient en fait
" tendanciels "
.
M. Philippe Nasse a rappelé que l'expression
" comptes
tendanciels "
, qui n'est peut-être pas très heureuse,
était celle retenue depuis de longues années par la commission
des comptes de la sécurité sociale. La Direction de la
Sécurité sociale et le secrétaire général de
la commission des comptes n'ont disposé de toute façon que de
très peu de temps pour discuter de la "
vraisemblance
"
des hypothèses qui sous-tendent le compte tendanciel. En effet, les
comptes 1997, qui servent de base à la construction des comptes 1998 et
1999, n'ont été connus que très tardivement :
" pour discuter clairement des comptes, il faudrait du temps "
.
Interrogé sur la présentation par le Gouvernement, le jour de la
réunion de la commission des comptes, de l'avant projet de loi de
financement, M. Philippe Nasse a estimé qu'effectivement,
" on
ne parlait plus des comptes "
. Il a indiqué que la solution
consistant à tenir deux réunions à quinze jours
d'intervalle, lui paraissait illusoire. Il a considéré, en
revanche, qu'à condition de disposer plus tôt des comptes, la
réunion de printemps de la commission des comptes pourrait porter sur
l'ensemble des régimes, et non exclusivement sur le régime
général -
" le régime général
n'étant pas la loi de financement, même si c'est un gros
morceau "-
et serait le bon moment pour disposer d'une
prévision réellement tendancielle. Lors de la réunion
d'automne, la prévision serait reprise en intégrant les effets de
la politique publique.
M. Philippe Nasse a souhaité aborder la question de la complication
opérée par la compensation CSG/cotisations sociales. La
première attribution de CSG compense les pertes de cotisations, puis la
seconde modifie les comptes des organismes de sécurité sociale,
en fonction du déficit de la CNAMTS, puis de la CANAM. Il a
constaté qu'il manquait
" un tableau de financement de la
sécurité sociale "
allant au-delà des 12 chiffres
qui résument la loi de financement (7 prévisions de recettes,
4 objectifs de dépenses et l'ONDAM).
Audition de M. Xavier Prétot, inspecteur à l'Inspection générale de l'administration, professeur associé à l'université de Paris II
M.
Xavier Prétot a souhaité formuler plusieurs observations
liminaires.
Première observation : le contenu des lois de financement fait
l'objet d'une dérive. Ces lois évoluent de plus en plus vers un
contenu "
mixte
", associant les dispositions obligatoires de
la loi de financement et des dispositions de type " diverses mesures
d'ordre social (DMOS) ". M. Xavier Prétot a observé, de
fait, l'absence de tels projets de loi depuis trois ans. Il a
considéré que cette évolution brouillait le sens des lois
de financement. Prenant l'exemple de la loi de financement pour 1999, il a
considéré que l'amélioration de la prise en charge des
maladies professionnelles, avec la modification du point de départ de la
prescription biennale, aurait mérité un débat plus
approfondi par le Parlement. Il a considéré que le lien entre ces
dispositions et les conditions de l'équilibre financier de la
sécurité sociale était loin d'être évident.
La multiplication de cavaliers sociaux lui a semblé ainsi tout à
fait dommageable.
Deuxième observation : la cohérence de la loi n'est pas
assurée. Le choix en 1996 d'inscrire dans la loi de financement des
prévisions de recettes et des objectifs de dépenses, sans que ces
données puissent être réellement confrontées,
élude le problème du déficit et des moyens de le traiter.
Certes, les objectifs de dépenses ont un contenu plus normatif que l'on
aurait pu croire en 1996. Mais la loi organique pose un problème qu'il
faudra sans doute revoir.
Troisième observation : les objectifs de dépenses n'ont de
sens que s'ils sont liés à des orientations de politique
sanitaire et sociale, qui sont censées être fixées par le
rapport annexé au projet de loi. La décision récente du
Conseil d'Etat relative au plafond de ressources applicable aux allocations
familiales, précisant que le rapport n'a aucun contenu normatif, pose
problème, puisqu'il faut rappeler que le rapport annexé à
la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 avait
prévu que le plafond de revenus serait de 25.000 francs, alors que le
décret d'application a fixé ce plafond à environ 18.000
francs. Le rapport pourrait certes être inséré dans le
corps même du projet de loi ; encore faudrait-il qu'il soit
suffisamment précis pour que ses dispositions aient une valeur
juridique. La jurisprudence du Conseil d'Etat sur les lois de programmation
s'inscrit dans une perspective différente, puisque le Conseil d'Etat
censure les contradictions flagrantes entre les mesures d'application et les
orientations prises par le législateur.
Quatrième observation : les lois de finances et les lois de
financement entretiennent une relation étroite, en raison notamment des
interventions budgétaires de l'Etat. Pour l'instant, les
problèmes ont été résolus
" au coup par
coup "
, mais des contradictions flagrantes pourraient apparaître
un jour. Il faut prendre conscience que des recettes et des dépenses
identiques sont approuvées dans les deux lois. M. Xavier Prétot a
fait observer que le Conseil constitutionnel, dans sa décision sur le
projet de loi de finances pour 1999 (réduction de l'avantage
résultant du quotient familial), a pris en compte, pour une
appréciation d'ensemble de la politique familiale, le fait que les
allocations familiales avaient été rétablies dans leur
universalité par la loi de financement pour 1999. Il a rappelé
qu'en 1996, la Direction du Budget avait souhaité être
associée aux travaux d'élaboration du projet de loi de
financement, mais que cette responsabilité a finalement
été confiée à la Direction de la
Sécurité sociale, dont les effectifs et les conditions de
fonctionnement ne sont pas du tout comparables.
M. Xavier Prétot a considéré que le risque
d'instrumentalisation du Parlement, conduisant à lui imputer des
décisions qui vont au-delà des votes que la loi organique lui
demande de formuler, était effectif. Les votes du Parlement sont, en
effet, déclinés à la fois par des mesures
réglementaires d'application et par des règles fixées par
les conventions médicales, susceptibles, les unes et les autres, d'aller
très au-delà des objectifs fixés en termes
généraux par la loi.
Il a considéré que le problème de la gestion du risque se
posait principalement pour la branche maladie. La gestion du risque maladie est
assurée par les professionnels de santé et les organismes de
sécurité sociale pour les dépenses de ville. Pour les
dépenses d'hospitalisation, la gestion est assurée par les
organismes de sécurité sociale, réunis en URCAM, et
l'Etat, via les ARH. La répartition des enveloppes régionales ne
peut se faire qu'au niveau national, même si la gestion quotidienne
pourrait être assurée par des agences régionales de
santé. Le système des enveloppes a pour conséquence des
" dépenses grises "
, résultant des transferts de
dépenses entre l'hôpital et la médecine de ville,
aujourd'hui encore mal connus.
M. Xavier Prétot a considéré que la situation
n'apparaissait pas stabilisée quant aux responsabilités des
différents acteurs (Gouvernement, Parlement, partenaires sociaux). Il
lui a semblé révélateur que les plans de financement de
l'assurance maladie portent le nom du Ministre, et non du président de
la CNAM. L'universalisation et la fiscalisation posent la question de la
légitimité des partenaires sociaux pour gérer l'assurance
maladie. Une question identique se pose pour la branche famille.
Néanmoins, la solution de l'étatisation n'est pas
forcément la bonne. Comme le montre la réforme Juppé, qui
s'est bornée à prévoir la présence de
personnalités qualifiées au sein des conseils d'administration
des caisses, il n'existe pas réellement de solution alternative au
paritarisme.
La répartition des compétences entre Gouvernement, Parlement et
partenaires sociaux reposait, entre 1967 et 1995, sur le schéma
suivant : le Parlement fixait les règles de droit, le Gouvernement
les appliquait et les partenaires sociaux géraient les risques. Ce
système n'a jamais fonctionné : l'Etat a dû s'investir
dans la gestion du risque. La
" chaîne des
responsabilités "
voulue par Alain Juppé entre
Gouvernement, Parlement et partenaires sociaux ne s'est pas davantage mise en
place.
Il est curieux qu'un certain nombre d'impositions affectées à la
sécurité sociale soient définies par la loi de finances.
La fixation du taux des cotisations relève du pouvoir
réglementaire ; le Parlement vote une prévision englobant
l'ensemble des recettes affectées à la sécurité
sociale, mais il n'autorise par leur perception, comme il autorise, dans le
cadre de la loi de finances, celle des impositions de toutes natures.
M. Xavier Prétot a estimé que le Parlement devrait pouvoir fixer
le taux des cotisations, à la différence du taux des prestations,
qui doit rester de la compétence du pouvoir réglementaire. En ce
qui concerne l'assiette, le Parlement dispose déjà de la
compétence (article 34 de la Constitution). Certes, il existe un
raisonnement juridique suivant lequel, s'il existe une contradiction manifeste
entre les taux fixés par le pouvoir réglementaire et les
prévisions de recettes fixées par le Parlement, il pourrait y
avoir motif à annulation par le juge administratif de la mesure
réglementaire, mais de toute façon, cette annulation
n'interviendrait que deux ans après.
En ce qui concerne le Conseil constitutionnel, autant sa jurisprudence sur les
cavaliers sociaux a semblé
" laxiste "
à M.
Xavier Prétot, autant sa jurisprudence sur les demandes de
compléments et d'annexes lui est apparue sévère. La
jurisprudence du Conseil constitutionnel oblige à réformer la loi
organique chaque fois que le Parlement voudra ajouter une annexe au dossier du
projet de loi, ce qui apparaît absurde concernant un rapport sur
l'état de l'hygiène bucco-dentaire (décision de
décembre 1998).
M. Xavier Prétot a considéré qu'il manquait aux lois de
financement un outil qui se rapproche de celui des lois de règlement. Le
cadre actuel est celui d'un
" blanc-seing demandé au
Parlement "
. Même si les lois de règlement du budget de
l'Etat ne constituent pas nécessairement un exemple, il faudrait, d'une
manière ou d'une autre, que le Parlement débatte des conditions
dans lesquelles la loi de financement a été
exécutée, à partir du rapport de la commission des comptes
de la sécurité sociale.
Audition de M. Gabriel Mignot, président de la
6ème
chambre,
Mme Anne-Marie Boutin et de M. Claude Thélot (Cour des
comptes)
M.
Gabriel Mignot a considéré que les relations entre la Cour des
comptes et le Parlement ne présentaient pas de caractéristiques
particulières dans le domaine des finances sociales. La Cour des comptes
peut réaliser, à la demande du Parlement, des
" enquêtes "
, comme elle peut
" répondre
à des questions précises "
.
87(
*
)
Les
demandes d'enquête,
qui supposent
" d'aller sur le
terrain "
, nécessitent du temps et doivent faire l'objet d'une
procédure contradictoire et d'une approbation collégiale. Le
délai de réponse ne peut guère être inférieur
à un an. L'idéal, selon M. Gabriel Mignot, serait que le
Parlement formule ses demandes au moment de l'examen du projet de loi de
financement, afin de disposer des enquêtes de la Cour au moment de
l'examen du prochain projet de loi de financement.
Les
questions
peuvent porter sur une partie du rapport annuel de la Cour
ou sur un élément du projet de loi, de la même
manière que la commission des Finances pose des questions sur le projet
de loi de règlement ou sur le rapport que lui consacre la Cour. La
réponse de la Cour est fournie alors le plus tôt possible et
appartient à la commission, qui décide de la publier ou non.
Les comptes de la sécurité sociale recouvrent à la fois
les comptes des organismes proprement dits, les comptes de la protection
sociale et les agrégats de la loi de financement. Pour obtenir les
documents nécessaires à l'établissement du jaune
budgétaire
" L'effort social de la Nation ",
la
Direction de la sécurité sociale envoie au mois de mars un
questionnaire. Les réponses ne sont centralisées qu'au mois de
juin. Trois grandeurs comptables se retrouvent ainsi articulées les unes
par rapport aux autres.
La réforme comptable n'est pas encore stabilisée. D'une part,
elle ne s'applique pas à tous les régimes. D'autre part, pour
ceux qui sont déjà passés aux droits constatés, il
ne s'agit pas encore d'une
" routine "
. L'application de la
réforme pose le problème des provisions et des reprises de
provisions. L'objet de la mission Déniel est d'aboutir à un plan
comptable unique et obligatoire. L'établissement de ce plan comptable ne
sera pas encore suffisante pour accélérer la sortie des comptes.
Il sera nécessaire de prévoir un effort d'adaptation des
systèmes d'information, ainsi qu'un effort de formation des personnels
des organismes de sécurité sociale. Il faudra organiser une
meilleure coopération entre ordonnateurs et comptables. La
concrétisation des effets de la réforme prendra, en
conséquence, du temps.
Interrogé sur l'ACOSS, M. Gabriel Mignot a considéré que
le projet RACINE était intellectuellement bien construit, mais posait un
certain nombre de problèmes quant à l'affectation des recettes
aux branches par les URSSAF. Un certain nombre des recettes ne peuvent, de
surcroît, être affectées sans connaître le niveau des
dépenses.
Sur ce dernier point, Mme Anne-Marie Boutin a évoqué le
mécanisme de répartition de la CSG entre les caisses, qui
dépend non seulement des pertes de cotisation mais également du
déficit des organismes. Elle a estimé que ce mécanisme
était une "
usine à gaz
". Elle a rappelé
qu'une disposition de la loi de financement pour 1999 avait fait échec
à l'application de la règle des droits constatés pour la
répartition des excédents de CSG et de C3S. Elle a estimé
qu'une répartition forfaitaire, suivie d'une régularisation, lui
semblait beaucoup plus simple.
Interrogé sur les moyens de surmonter les obstacles à une remise
accélérée des comptes sociaux, M. Gabriel Mignot a
estimé que le Parlement devait tout d'abord jouer un rôle
très ferme pour demander les comptes dans les délais. Il a ainsi
observé qu'un certain nombre de caisses locales ne laissaient pas
" remonter " leurs comptes tant qu'ils n'avaient pas
été approuvés par leur conseil d'administration alors
qu'une centralisation immédiate était indispensable. Le
dictionnaire comptable, mis au point par la mission Déniel, et qui
permettra une unicité des pratiques, sera probablement prêt
à la fin de l'année 1999, mais sa mise en oeuvre ne sera
effective qu'à partir des années 2001/2002.
Abordant le contenu du rapport annuel de la Cour, M. Gabriel Mignot a
distingué ce qui relève, d'une part, des prescriptions du code
des juridictions financières (application de la loi de financement de la
sécurité sociale, analyse des comptes et synthèse des
travaux des CODEC)
88(
*
)
et, d'autre part, du
résultat des enquêtes et autres travaux de la Cour. Il a
indiqué qu'à condition de pouvoir disposer des comptes en
mars-avril, le rapport consacré spécifiquement à
l'application de la loi de financement de l'année n-1 pourrait
être déposé avant l'été de l'année n.
M. Claude Thélot a indiqué que cet objectif lui semblait
réalisable à un horizon de 4/5 ans, à condition
" d'être tenace "
sur les délais de remise des
comptes, leur qualité et leur mode d'agrégation.
Concernant les moyens de l'administration de la sécurité sociale,
M. Gabriel Mignot a indiqué qu'ils lui semblaient notoirement
insuffisants tant en nombre -il suffit de comparer la Direction du Budget et la
Direction de la Sécurité sociale-, qu'en profil de
compétence. M. Claude Thélot a constaté que les
compétences requises pour établir des
" comptes
sérieux, à temps et bien construits "
n'étaient
pas historiquement très présentes à la Direction de la
Sécurité sociale. Mme Anne-Marie Boutin a relevé que la
même équipe restreinte devait "
tout faire en même
temps
" : préparation du rapport de la commission des
comptes de la sécurité sociale, préparation du projet de
loi de financement et de ses annexes, réponses aux questionnaires
parlementaires. Elle a confirmé qu'il n'existait pas de système
d'information comptable travaillant en continu, mais que la Direction de la
Sécurité sociale devait s'appuyer sur le questionnaire
envoyé aux caisses pour l'élaboration du fascicule
"
effort social de la Nation
".
M. Gabriel Mignot a rappelé que la fonction de la commission des comptes
de la sécurité sociale devrait être de préparer des
prévisions d'évolution spontanée des comptes et
d'apprécier l'impact des mesures proposées. En
réalité, la construction des comptes qui lui sont fournis
s'apparente à une
" boîte noire ou du moins
grise ".
La Commission, ne disposant que de huit jours pour
" éclairer cette grisaille ",
ne peut apporter que peu
de
" valeur ajoutée ".
M. Gabriel Mignot a estimé que la Cour des comptes était en
mesure de procéder, à l'occasion de son rapport sur l'application
d'une loi de financement, à une estimation pertinente du rendement
financier des mesures de redressement et de le comparer aux annonces faites
lors de la présentation du projet de loi.
Interrogé sur l'absence d'une loi de règlement pour les lois de
financement, M. Gabriel Mignot a estimé que le parallèle entre
lois de finances et lois de financement était, sur ce point, fallacieux.
Mme Anne-Marie Boutin a confirmé que tant que
" les lois de
financement ne seraient pas des lois de finances sociales "
,
l'introduction d'une loi de règlement serait impossible.
Concernant l'articulation des contrôles de la Cour et des contrôles
sur pièce et sur place des rapporteurs des projets de loi de financement
de la sécurité sociale, M. Gabriel Mignot a estimé
que, sauf exception, les contraintes lourdes et les méthodes
spécifiques du contrôle
" sur pièce et sur
place ",
notamment dans le domaine comptable, étaient peu
adaptées au travail parlementaire.
Il a considéré que la proposition faite par l'Assemblée
nationale de rencontres régulières entre les rapporteurs des
projets de loi de financement et les rapporteurs de la Cour des comptes pour
approfondir tel ou tel point du rapport lui apparaissait davantage de nature
à approfondir les relations entre la Cour des comptes et le Parlement.
Mercredi 17 mars 1999
--------
M. Didier Banquy, sous-directeur à la direction du Budget, et
M. Jean-Luc Tavernier, sous-directeur à la direction de la
Prévision
M. Didier Banquy a précisé qu'au sein de la
Direction du budget qui comporte 7 sous-directions, la 6
ème
sous-direction " sociale " comprenait trois bureaux. Le bureau 6A
traite des questions du travail et de l'emploi, le bureau 6B des finances
sociales et des transferts sociaux (politique de la famille, santé,
aléa thérapeutique, dépendance...) et le bureau 6C des
régimes de retraite et des anciens combattants. La 6ème
sous-direction compte au total 21 cadres A et 5 secrétaires.
Il a rappelé qu'outre la préparation du projet de loi de
finances, son élaboration et le suivi de son exécution, l'action
de la direction du Budget s'inscrit dans une démarche
" globale " des finances publiques c'est-à-dire incluant
l'ensemble des questions relatives aux finances publiques et donc, notamment,
aux comptes des administrations sociales, conformément au
périmètre retenu par le Traité de Maastricht pour
l'appréciation du déficit des administrations publiques.
En étroite coopération avec la direction de la prévision,
la présence de la direction du budget est donc forte sur le cadrage
général ; elle établit dès les mois de
décembre n-2-janvier n-1 des prévisions
financières pour l'année n des différents
régimes de sécurité sociale et émet des
propositions dans le cadre de la préparation des arbitrages qui se
tiennent en juin-juillet n-1 et qui concernent à la fois le budget
de l'Etat et les finances sociales.
La direction du Budget est en revanche beaucoup moins présente à
l'occasion du débat de la loi de financement lui-même et de sa
mise en oeuvre dont la responsabilité incombe au ministère de
l'Emploi et de la Solidarité (direction de la Sécurité
sociale).
La direction du Budget souhaite développer la synthèse globale
des finances publiques, qui comprend les finances de l'Etat, les finances
sociales et les finances des collectivités locales. M. Didier
Banquy a observé qu'il était, à cet égard,
souhaitable
" d'enrichir le débat d'orientation
budgétaire "
, en l'élargissant aux finances sociales.
M. Jean-Luc Tavernier a observé que le programme de
stabilité des finances publiques rendait nécessaire un tel
débat, qui serait à même -au-delà des chiffres- de
définir des tendances de fond sur le financement de la solidarité.
Si la synthèse des finances de l'Etat est correctement assurée,
les finances sociales sont encore
" au stade de la
compilation "
. Les informations contenues dans les projets de loi de
financement et les projets de loi de finances sont à peu près
exhaustives, mais ne sont ni simples, ni lisibles. Les lois de financement ne
sont pas encore totalement satisfaisantes ; elles centrent le débat
sur le seul régime général, qui certes couvre 100 %
des dépenses de la branche famille et plus de 80 % de la branche
maladie, mais seulement moins de 50 % des dépenses de retraite.
Une véritable synthèse des finances sociales est actuellement
difficile à réaliser pour trois raisons : la
multiplicité des
périmètres
, les différences
de
nomenclatures
et l'hétérogénéité
des
normes comptables
.
Il existe cinq
périmètres
différents pour
définir les finances sociales :
- le périmètre des lois de financement lui-même
hétérogène, qui concerne les régimes obligatoires
de base de plus de 20.000 cotisants, pour les dépenses, et
l'ensemble des régimes obligatoires et du Fonds de solidarité
vieillesse pour les recettes ;
- le périmètre de la Commission des comptes de la
sécurité sociale, qui ajoute aux régimes de base les
régimes complémentaires ;
- le périmètre des comptes des administrations sociales, qui
ajoute au périmètre de la Commission des comptes de la
sécurité sociale le régime UNEDIC ; ce
périmètre est utilisé pour déterminer le chiffre
retenu pour le calcul du déficit des administrations publiques au sens
du traité de Maastricht ;
- le périmètre de l'Effort social de la Nation, qui ajoute
au périmètre précédent les régimes
d'intervention sociale des administrations publiques (principalement, les aides
au logement et l'aide sociale) ;
- le périmètre des comptes de la protection sociale, fournis
en annexe
g)
des lois de financement, et qui ajoute au
périmètre précédent les régimes
d'employeurs, les régimes d'intervention sociale des administrations
privées et les mutuelles.
Des éléments ne se retrouvent ni en lois de finances, ni en lois
de financement, comme le régime UNEDIC.
Il est nécessaire -à l'évidence- de simplifier et de
clarifier ces différents périmètres, même si ce
n'est pas une tâche facile.
La difficulté de parvenir à une véritable synthèse
des finances sociales s'explique également par l'existence de
nomenclatures différentes de prévision et
d'exécution
. Prenant l'exemple de l'ONDAM, M. Didier Banquy a
indiqué que la prévision était faite par prescripteurs
(professions de santé), mais que l'exécution était connue
par type d'actes. Il est ainsi difficile -mais non impossible- de savoir en
cours d'année "
si l'on tient en exécution
" les
prévisions.
La remise à plat de l'ONDAM représente un travail important,
faisant intervenir un nombre d'acteurs très différents :
Etat, caisses de sécurité sociale, professions de santé...
Il est nécessaire d'entreprendre ce chantier, afin de mieux piloter le
dispositif.
La troisième raison de l'impossibilité de parvenir à une
synthèse satisfaisante des finances sociales tient à l'absence de
définition de
normes comptables
homogènes
au sein
des organismes de sécurité sociale. M. Didier Banquy a
rappelé que le ministère de l'Economie, des Finances et de
l'Industrie et le ministère de l'Emploi et de la Solidarité
étaient à l'origine de la mission conduite par M. Alain
Déniel, afin d'aboutir à un plan comptable unique fin 1999.
L'indépendance des caisses de sécurité sociale, qui sont
-au moins pour le régime général- des
établissements publics, n'est pas un argument susceptible d'être
invoqué. Le retard de production des comptes accentue l'impression d'un
manque de transparence, préjudiciable aux régimes de
sécurité sociale eux-mêmes. Pour M. Didier Banquy, la
production des comptes dans des délais plus courts que ceux
observés aujourd'hui est une nécessité absolue pour
améliorer la lisibilité de ces comptes et la qualité de la
gestion.
Puis, M. Jean-Luc Tavernier a présenté la direction de la
Prévision. Cette direction prépare les deux commissions des
comptes de la nation, tenues en avril et en septembre. Les prévisions de
la direction de la prévision sont celles du Gouvernement mais elles sont
confrontées dans la transparence avec celles des autres experts dans le
cadre de la commission des comptes, de la nation et des réunions
techniques qui la précèdent. M Jean-Luc Tavernier a ainsi
constaté que les erreurs massives de prévisions en 1993 et 1996
avaient été communes à l'ensemble des conjoncturistes. Le
rythme des réunions n'est pas suffisant pour prendre en compte les
inflexions très fortes de conjoncture. A l'inverse, des réunions
trop précipitées auraient pour inconvénient de ne pas
disposer du recul nécessaire.
En matière d'hypothèses macro-économiques, ces
prévisions sont automatiquement retenues par la Commission des comptes
de la sécurité sociale. Les contacts entre les trois directions
(direction du Budget, direction de la Prévision, direction de la
Sécurité sociale) sont ainsi très fréquents,
dès le début de l'année.
La direction de la Prévision est par ailleurs chargée de
réaliser le compte provisoire des administrations publiques, au cours du
mois de janvier de l'année n+1. Le périmètre retenu est
celui de la comptabilité nationale : Etat, régimes de
sécurité sociale, régimes complémentaires et
d'assurance chômage, collectivités locales. Chaque type
d'administration publique a ses spécificités. Pour l'Etat, les
prévisions d'exécution sont facilitées en dépenses
par le caractère limitatif des autorisations budgétaires. Pour
les collectivités locales, il est très difficile de
prévoir leurs recettes et leurs dépenses. La
sécurité sociale est
" entre les deux "
. La
situation financière de l'UNEDIC dépend directement de la
conjoncture et des décisions des partenaires sociaux. Les
prévisions sur les dépenses famille et vieillesse, qui
dépendent des évolutions démographiques, présentent
relativement peu d'erreurs. Pour les dépenses d'assurance maladie, la
prévision est beaucoup plus difficile et fortement influencée par
les mesures de régulation.
Interrogé sur les moyens mis à disposition de la direction de la
sécurité sociale, M. Didier Banquy a indiqué qu'ils
étaient en voie de renforcement et qu'il était souhaitable qu'une
partie des moyens supplémentaires accordés au ministère de
l'emploi et de la solidarité soit affectée effectivement à
cette direction. M. Jean-Luc Tavernier a fait remarquer que le processus
des lois de financement aidait cette direction à prendre davantage
d'autorité.
M. Didier Banquy a expliqué que le prélèvement de
0,5 % pour frais d'assiette et de recouvrement -représentant
200 millions de francs- ne concernait que la CSG sur les revenus du
patrimoine et de placement, mais non les droits sur les alcools et les tabacs,
sauf pour la partie alcools affectée au FSV
89(
*
)
. Le principe de facturation des relations entre
l'Etat et la sécurité sociale n'est pas un mauvais principe. La
sécurité sociale gère actuellement un certain nombre de
prestations gratuitement pour l'Etat. La différence de traitement des
relations financières Etat/sécurité sociale n'est pas pour
autant établie. L'établissement d'un bilan global des sommes en
jeu ne ferait pas apparaître de déséquilibre notable dans
les relations Etat/sécurité sociale.
La majoration de l'allocation de rentrée scolaire n'a
représenté ni en 1997, ni en 1998, une charge de
trésorerie pour l'ACOSS. En 1997, un décret d'avances a
été pris, permettant de verser à l'ACOSS 6,4 milliards de
francs au 1
er
septembre, ce qui a été noté dans
le rapport de la Cour des comptes. En 1998, le Gouvernement s'étant
engagé à ne pas opérer de régulation
budgétaire en cours d'année, il ne pouvait procéder par
décret d'avance nécessairement gagé par des annulations de
crédits. Aussi, l'Etat a-t-il anticipé tout d'abord au
1
er
septembre le versement des remboursements de cotisations
exonérées pour les mois de septembre, octobre et novembre, puis
au 9 octobre le versement correspondant au mois de décembre.
La suppression du BAPSA, dont la conformité à l'ordonnance
portant loi organique du 2 janvier 1959 a été remise en cause de
façon indirecte par le Conseil constitutionnel en 1997, est à
l'étude. Il est à noter que les charges de personnels ont
été basculées du BAPSA au budget du ministère de
l'Agriculture en loi de finances pour 1999.
Invité à se prononcer sur la pertinence d'un fascicule du type
" Voies et moyens " pour les impôts et taxes affectés
à la sécurité sociale -faisant apparaître pour
chaque recette l'évaluation initiale et l'évaluation
révisée de l'année n-1-, l'effet de l'évolution
spontanée et l'écart dû à l'aménagement des
droits et l'évaluation proposée pour l'année n-,
M. Didier Banquy a estimé que ce type de document pourrait
être incorporé dans le rapport économique, social et
financier du projet de loi de finances, qui est le premier document
distribué aux parlementaires.
Interrogé sur la cohérence des prélèvements
obligatoires, M. Jean-Luc Tavernier a considéré que les
assiettes des prélèvements sociaux étaient relativement
simples, mais que les règles d'affectation (circuit de la CSG et de la
C3S, par exemple) étaient complexes. L'impact économique de la
CSG, son effet redistributif, est ainsi presque impossible à
étudier.
M. Didier Banquy a estimé qu'une simplification du système
était indispensable et qu'une
" meilleure lisibilité des
dispositifs permettrait de faciliter les choix politiques "
.
M. Jean-Luc Tavernier a observé que cette complexité
était liée à l'organisation de la sécurité
sociale en France, avec l'existence de régimes multiples et de branches
autonomes. Il a relevé que l'éventuelle affectation des
excédents de la branche famille, de la branche maladie et de l'UNEDIC au
fonds de réserve pour les retraites constituait un exemple de
complexification éventuelle des circuits financiers entre les
régimes, qui pouvait cependant avoir une forte pertinence
économique.
M. Didier Banquy a fait observer en outre que le Parlement n'intervenait
que sur une partie des ressources des régimes sociaux.
M. Hervé Le Floc'h Louboutin,
directeur du
service
de législation fiscale
M.
Hervé Le Floc'h Louboutin a tout d'abord précisé que
l'évolution du financement de la protection sociale et la
création des lois de financement de la sécurité sociale
n'avaient pas entraîné d'évolution des méthodes et
de l'organisation du service de la législation fiscale.
Abordant la répartition des compétences en matière
d'impôts affectés à la sécurité sociale,
M. Hervé Le Floc'h Louboutin a expliqué que le service de la
législation fiscale disposait, concernant la contribution sociale
généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de
la dette sociale (CRDS), d'une compétence générale pour
fixer les
règles relatives à la
territorialité
. Pour la CSG et la CRDS sur les revenus
d'activité et de remplacement, la direction de la sécurité
sociale est compétente pour fixer les
règles d'assiette
,
même si le service de la législation fiscale est
associé ; pour la CSG et la CRDS sur les revenus du patrimoine et
les produits de placement, ainsi que pour le prélèvement social
de 2 %, le service de la législation fiscale est compétent
-naturellement en association avec la direction de la sécurité
sociale- pour fixer les règles d'assiette, qui se calent sur
l'impôt sur le revenu.
M. Hervé Le Floc'h Louboutin a admis que ce partage des
compétences pouvait apparaître complexe sur le papier mais
était en fait très cohérent. Il a observé que le
législateur, avec pragmatisme, avait constitué des
" chaînes " de compétence, liant l'assiette, le
recouvrement et le contrôle, qu'il serait sage de ne pas rompre.
La sécurité sociale assure le recouvrement et le contrôle
de la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement. La direction
générale des impôts est compétente sur le
recouvrement et le contrôle de la CSG sur les revenus du patrimoine. Les
chaînes les plus performantes en matière de recouvrement ont
été choisies. Le prélèvement à la source
pour la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement était
la meilleure solution. Les réactions à l'augmentation du taux de
la CSG auraient d'ailleurs été différentes, si le
recouvrement était effectué par voie de rôle comme pour la
CSG sur les revenus du patrimoine.
Interrogé sur les moyens d'assurer la cohérence de la politique
des prélèvements obligatoires, M. Hervé Le Floc'h
Louboutin a considéré que cette cohérence pouvait
être appréciée selon plusieurs niveaux, notamment au sein
du prélèvement social ou au sein de l'ensemble des
prélèvements obligatoires.
La cohérence de la CSG sur les revenus du patrimoine est assurée
par un alignement de l'assiette de ce prélèvement sur celle de
l'impôt sur le revenu. La distorsion d'assiette entre l'impôt sur
le revenu et la CSG sur les revenus d'activité a été
voulue dès l'origine de la CSG. Il serait ainsi dangereux de vouloir
" rapprocher les assiettes "
. L'impôt sur le revenu fait
l'objet de nombreuses critiques : une concentration élevée,
une assiette étroite et des taux élevés. L'existence de la
CSG remédie à ces défauts.
M. Hervé Le Floc'h Louboutin a observé que le comportement
vis-à-vis de l'impôt sur le revenu était quelque peu
irrationnel. Son rendement n'est pas plus élevé que dans les
autres pays européens. Pour les revenus très
élevés, la pression fiscale est à peine supérieure.
L'impôt sur le revenu fait l'objet , de la part du contribuable, d'une
" crispation " qui, en réalité, devrait s'adresser au
le poids des prélèvements sociaux à l'origine des
phénomènes de délocalisations.
Interrogé sur les droits sur les tabacs et les alcools, et sur les jeux
de miroirs existant entre projets de loi de finances et de financement,
M. Hervé Le Floc'h Louboutin a considéré qu'à
la relecture de la loi organique du 22 juillet 1996, il n'avait pas
" d'états d'âme particuliers "
.
Le paragraphe I de l'article LO. 111-3 dispose que les lois de
financement comportent des prévisions par catégorie des recettes
de l'ensemble des régimes obligatoires ; le paragraphe III est une
disposition visant à écarter les " cavaliers
sociaux " : "
les lois de financement ne peuvent comporter
que des dispositions affectant l'équilibre financier des régimes
obligatoires de base "
.
Il est ainsi difficile d'établir une frontière entre les
dispositions affectant l'équilibre financier qui
doivent
se
trouver obligatoirement en lois de financement et celles qui
peuvent
se
trouver en lois de financement.
En ce qui concerne la suppression de l'article 406 A (droits de
fabrication sur les alcools affectés au FSV), le ministère de
l'Economie et des Finances était à l'origine de cette
disposition. Elle a été inscrite dès l'origine dans le
projet de loi de finances et a été reprise par le projet de loi
de financement.
En ce qui concerne les droits sur les tabacs,
" le débat est
né en loi de financement "
, puis a été
concrétisé en loi de finances rectificative pour 1998.
M. Hervé Le Floc'h Louboutin a considéré que les lois
de finances apparaissaient être le cadre naturel des dispositions
affectant les droits sur les alcools et sur les tabacs. Premièrement,
ces sujets sont fortement encadrés sur le plan communautaire ;
deuxièmement, plus de 90 % des droits sur les tabacs sont
affectés au budget de l'Etat. Interrogé sur la possibilité
de créer une taxe additionnelle de santé publique,
intégralement affectée à la sécurité
sociale, il a constaté qu'un doute existait quant à la
compatibilité de cette taxe avec le droit communautaire.
M.
Raoul Briet, Directeur de la Sécurité sociale
et M. Dominique
Libault, sous-directeur
M. Raoul Briet a souhaité formuler quatre
observations
liminaires.
Première observation : les lois de financement constituent un
progrès indubitable dans le pilotage des finances sociales, parce
qu'elles obligent l'Etat à expliciter ses choix dans des conditions
strictement " calées " avec le projet de loi de
finances ; le Gouvernement doit ainsi rendre ses arbitrages à la
bonne date et sur les mêmes bases.
Deuxième observation : la préparation technique des projets
de loi de financement, par les contacts entretenus tous les deux mois avec la
direction du Budget, a progressé depuis l'origine. Le calendrier
fixé est précis ; à partir du moment où le
passage du projet de loi est fixé le 4 octobre en conseil des ministres,
le compte à rebours technique est déterminé. La date de la
réunion de la commission des comptes de la sécurité
sociale de septembre est ainsi prévue à 2 jours près,
dès le mois de mars, alors qu'avant les lois de financement, les
commissions des comptes d'automne se tenaient en novembre ou décembre,
ou parfois même ne se tenaient pas. La préparation du projet de
loi de financement pour 2000 débute ainsi dès le mois de mars.
Les procédures sont rodées, des mécanismes sont
fixés au sein des trois directions (direction du budget, direction de la
prévision, direction de la sécurité sociale), ainsi qu'au
sein du Ministère de l'emploi entre direction des hôpitaux,
direction générale de la santé et direction des affaires
sociales pour la préparation de l'ONDAM. Les choix principaux sont
soumis à l'arbitrage du cabinet entre le 15 mai et le 15 juin.
Troisième observation : la compétence du ministère de
l'Emploi et de la Solidarité est un des acquis importants des lois de
financement. La direction du budget se concentre désormais sur l'effort
social de la Nation et les perspectives générales des finances
publiques.
Quatrième observation : la complexité des lois de
financement est liée aux choix décidés par le pays
(notamment, maintien des régimes autonomes).
M. Raoul Briet a ainsi considéré que le calendrier
résultant des lois de financement était
" très
sain "
pour les finances sociales et
" très
vertueux "
mais avait imposé une évolution brutale dans
le contexte
" décentralisé, épars et divers "
qui caractérise le
" monde social ".
Des informations régulières sont données au Gouvernement
sur l'exécution de la loi de financement pour 1998. Mais ces
informations ne sont pas centrées sur les " agrégats de la
loi de financement ".
Interrogé sur l'accélération de la production des comptes,
M. Raoul Briet a reconnu qu'il s'agissait effectivement d'une
priorité. Il a estimé toutefois qu'il ne fallait pas
" caricaturer les choses "
. Le dialogue établi avec les
agents comptables des caisses nationales du régime général
porte ses fruits. Les comptes 1998 seront disponibles avec un mois à
deux mois d'avance par rapport aux comptes 1997. Il faut naturellement encore
progresser, mais "
il ne suffit pas d'être très
sévère
". La culture des organismes de
sécurité sociale est celle d'une autonomie très
importante, il n'existe pas de hiérarchie comparable à celle de
la Direction de la comptabilité publique. Du côté des
dépenses, les comptes de la CNAM ne sont jamais que l'agrégation
des comptes des caisses primaires d'assurance maladie. Pour les recettes, les
exigences pesant sur les présidents, les directeurs et les agents
comptables des URSSAF sont désormais très importantes. Des
conventions homogènes doivent être définies et
appliquées.
M. Dominique Libault a rappelé que, concernant la mise en oeuvre de la
comptabilité en droits constatés, l'ACOSS avait fait appel au
cabinet Mazars Guérard. Les conclusions de ce cabinet sont que les
comptes des organismes de sécurité sociale sont d'une
complexité inouïe par rapport à ceux des entreprises.
L'exigence de fiabilité est beaucoup plus importante que pour les
entreprises, puisqu'un solde global doit être déterminé
pour chaque branche. La CNAM a besoin de l'ACOSS pour déterminer ses
recettes ; parallèlement, l'ACOSS a besoin de la CNAM pour
déterminer le rendement de la CSG sur les indemnités
journalières. Un certain nombre de relations complexes entre l'ACOSS et
les organismes de sécurité sociale fait que plusieurs bouclages
sont nécessaires pour parvenir à des comptes à peu
près stables. Une clôture en janvier ou en février est
ainsi
" une vue de l'esprit "
. Une clôture des comptes
avant la fin du mois de mars apparaît, en revanche, possible.
Interrogé sur la répartition des recettes suivant les branches
effectuée par l'ACOSS, M. Dominique Libault a rappelé que le
souci de faire remplir aux sociétés un document unique, le
bordereau récapitulatif de cotisations sociales (BRC), avait pour
conséquence, en aval, une complexité importante de traitement
pour les URSSAF. La mise en place du système RACINE, à partir du
1
er
janvier 1998, représente certainement un grand
progrès par rapport aux clefs forfaitaires. Les objectifs de ce projet
ont été validés par la mission commune conduite par
l'Inspection Générale des Finances (IGF) et l'Inspection
Générale des Affaires sociales (IGAS). Il faut désormais
"
prendre du recul
" pour mieux apprécier la mise en
oeuvre de RACINE. Sur une masse de 1.200 milliards de francs, il est
possible que le système des clefs forfaitaires ait abouti à des
erreurs de plus ou moins 3 milliards de francs.
M. Raoul Briet a constaté que trop souvent
" le milliard au
dessus de la ligne zéro était considéré comme le
paradis "
et que
" le milliard en dessous, l'enfer "
,
alors que le débat devrait se concentrer sur
" les tendances de
fond "
. Il a observé qu'au plan technique trois chantiers
considérables avaient été ouverts en même
temps : la mise en oeuvre des droits constatés, un calendrier plus
serré et une ventilation des recettes plus sincère dans un
contexte rendu de surcroît plus complexe par le développement des
exonérations liées à la politique de l'emploi.
Les progrès constatés concernent le régime
général. Pour les autres régimes, l'habitude est de ne les
examiner qu'à l'occasion de la commission des comptes de septembre.
Pourtant, le sujet est lié, puisque les comptes du régime
général dépendent d'autres régimes, comme celui de
la MSA. La production des comptes de ce régime n'est pas encore tout
à fait satisfaisante. Or, le ministère de tutelle de la
protection sociale agricole n'est pas le ministère des Affaires sociales.
La mission interministérielle sur l'harmonisation des comptes des
organismes de sécurité sociale s'est mise en place en
décembre 1998, après avoir été
décidée en avril 1998, en raison du temps qu'il a fallu pour
arrêter les mises à disposition des personnes nécessaires.
Il s'agit d'une équipe de six à sept personnes, qui travaille au
rythme soutenu de 3 réunions hebdomadaires. L'idée d'inclure
l'UNEDIC dans les compétences de la mission a été
finalement abandonnée.
Interrogé sur les moyens de la direction de la sécurité
sociale (DSS), M. Raoul Briet a indiqué que l'effectif au
1
er
janvier 1999 s'élevait à 238 agents, dont 134
de catégorie A, en diminution globale par rapport à 1996, mais
avec une proportion de cadres A qui augmente légèrement. La
sous-direction de la prévision et des études financières a
été créée en juillet 1998. Cette sous-direction,
placée sous la responsabilité de M. Eric Dubois, administrateur
de l'INSEE, comprend un effectif de 24 personnes dont 20 cadres A.
Au sein de la direction de la sécurité sociale, le bureau 5A,
constitué de 4 cadres A, travaille sur le projet de loi
lui-même. Il assure par ailleurs des tâches de suivi de la
trésorerie et d'organisation des régimes. Le bureau 6A est
chargé des annexes
" non littéraires "
de la loi
de financement.
M. Dominique Libault a constaté qu'il n'existait qu'une personne
chargée au sein de la DSS de suivre la comptabilité des
organismes de sécurité sociale. M. Raoul Briet a fait
observer qu'il n'existait aucun inspecteur des impôts affecté
à la DSS. Même si les rapports de travail avec le service de la
législation fiscale sont
" bons "
, un tel
" profil " serait nécessaire au sein de la direction de la
sécurité sociale en raison de l'évolution de ses
responsabilités. Les lois de financement rendent obligatoire un
recrutement en dehors du vivier classique de l'administration de la
sécurité sociale, ce qui allonge considérablement les
délais et ne va pas sans problèmes. Les pointes de travail sont
très importantes. Un complément indemnitaire semble ainsi
inévitable. Les améliorations récentes
décidées en ce domaine vont incontestablement dans cette
direction.
Interrogé sur les annexes de la loi de financement, M. Raoul Briet
a considéré que l'ampleur des annexes
a)
(données
sur la situation sociale et sanitaire) et
g)
(comptes de la protection
sociale) pouvait être réduite. Il a observé que l'annexe
b)
, relative à la mise en oeuvre des dispositions de la loi de
financement, n'avait pas pour objet d'apprécier l'effet financier des
mesures de redressement -compétence qui relève de la Cour des
comptes dans son rapport publié l'année suivante-, mais portait
sur l'application juridique de la loi de financement. Il a
considéré que le contenu de l'annexe
e)
allait
au-delà d'une description des compensations financières entre
régimes, en présentant, par exemple, les transferts de
financement liés au déficit de l'assurance personnelle.
Mercredi 24 mars 1999
--------
Audition de M. Jean-Luc Cazettes, président du conseil
d'administration et de M. Patrick Hermange, directeur de la CNAVTS
M. Jean-Luc Cazettes a estimé qu'un bilan assez
largement positif pouvait être dressé des trois premières
lois de financement. La loi de financement de la sécurité sociale
constitue un progrès considérable et permet d'avoir une vision
globale de la sécurité sociale qui manquait auparavant. Elle
facilite l'établissement à date fixe d'un bilan de l'année
écoulée -même si la production des comptes est tardive- et
permet d'opérer un regroupement des diverses mesures financières
et législatives dans un même document.
La préparation du projet de loi de financement de la
sécurité sociale est l'occasion d'une collaboration
étroite entre les ministères et les organismes de
sécurité sociale afin d'élaborer les mesures
destinées à adapter la législation ou à
remédier aux déséquilibres financiers.
M. Patrick Hermange a souligné que l'élaboration du projet
de loi de financement exigeait un travail considérable pour le
Ministère de l'emploi et de la solidarité, qui manquait des
moyens humains nécessaires pour mener à bien cette tâche
dans de bonnes conditions.
M. Jean-Luc Cazettes a considéré que le mérite de la
loi de financement de la sécurité sociale était de donner
une plus grande sécurité juridique aux organismes de
sécurité sociale en termes de mise en oeuvre et
d'exécution de certaines dispositions législatives ou
réglementaires dès lors qu'elles constituent des engagements du
Gouvernement pour contribuer à l'équilibre technique.
Il a jugé que si la loi de financement de la sécurité
sociale avait permis une certaine appropriation par le Parlement des enjeux de
la protection sociale, les responsabilités entre les différents
acteurs n'étaient pas encore bien définies.
Les partenaires sociaux sont certes davantage associés
qu'antérieurement grâce à la consultation
systématique des conseils d'administration des caisses sur le projet de
loi de financement. Toutefois, les délais accordés aux caisses
pour examiner le projet de loi sont beaucoup trop courts -en moyenne trois
à cinq jours- et ne permettent pas d'examiner de manière
approfondie les dispositions prévues ou de formuler des propositions
alternatives. Citant l'exemple du fonds de réserve pour les retraites,
introduit, au dernier moment, dans le projet de loi, il a constaté que
souvent les représentants de la tutelle dans les conseils
d'administration des caisses n'avaient pas toujours les réponses aux
questions posées.
Une plus large participation des partenaires sociaux à
l'élaboration du projet de loi de financement ne pourrait donc
être envisagée qu'à condition que ceux-ci disposent de
délais supplémentaires - quinze jours au moins - pour examiner le
texte préparé par le Gouvernement. Un pré-cadrage en
juin-juillet pourrait en outre être envisagé de manière
à ne pas découvrir dans l'urgence, en septembre, le contenu du
projet de loi.
M. Jean-Luc Cazettes a rappelé que l'équilibre défini
par la loi de financement était cependant très fortement
dépendant des hypothèses macro-économiques retenues par le
Gouvernement, qui n'étaient connues qu'à la fin du mois
d'août. Il est donc délicat d'engager un véritable
débat avant cette date.
M. Jean-Luc Cazettes a estimé que les conseils d'administration
s'impliquaient fortement dans la préparation et le suivi des conventions
d'objectifs et de gestion, compléments indissociables de la loi de
financement de la sécurité sociale. Le conseil d'administration
de la CNAVTS a en outre constitué en son sein un groupe
" études et prospectives " présidé par
M. Jean-Baptiste de Foucauld.
M. Jean-Luc Cazettes a regretté que le Gouvernement s'oppose
parfois à certaines décisions du conseil d'administration de la
CNAVTS telles que la décision du 4 février 1999, fixant à
73,80 francs le taux horaire de l'aide ménagère, contre
81 francs depuis le 1
er
juillet 1998.
Il a expliqué que la décision de diminuer le taux de l'aide
ménagère était la conséquence de l'adoption,
à l'article 5 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999, de l'exonération totale de cotisations sociales
patronales sur les rémunérations des aides à domicile
employées par des personnes morales (associations et centres communaux
d'action sociale). Selon M. Jean-Luc Cazettes, cette exonération
n'a pas été compensée par l'Etat et entraîne une
diminution de recettes de 250 millions de francs pour le régime
général. La décision de diminuer le taux de l'aide
ménagère visait à compenser cette perte de recettes, mais
aussi à tenir compte de la diminution du prix de revient de l'heure par
les associations dès lors qu'elles sont désormais
exonérées totalement de charges patronales pour les aides
ménagères qu'elles emploient en contrat à durée
indéterminée.
M. Jean-Luc Cazettes a estimé que la tutelle du ministère de
l'Emploi et de la Solidarité sur les caisses restait très
présente et que la répartition des compétences entre les
différents acteurs se caractérisait par un " flou
artistique ".
M. Patrick Hermange a fait remarquer que les sujets d'affrontement entre
la caisse et sa tutelle étaient heureusement rares.
M. Jean-Luc Cazettes a estimé que les conseils de surveillance
commençaient à trouver leur place dans le processus, en
particulier dans le suivi de la convention d'objectifs et gestion. Il a
jugé qu'il revenait au Parlement de tirer le meilleur parti des avis qui
lui étaient adressés par les conseils de surveillance.
Interrogé sur la notion d'équilibre dans les lois de financement
de la sécurité sociale, M. Jean-Luc Cazettes a
considéré que le législateur avait, dans la loi organique
du 22 juillet 1996, volontairement fixé des objectifs
hétérogènes en matière de recettes, des
dépenses et de plafond de recours à l'emprunt. Il a estimé
que le législateur avait alors souhaité donner au Parlement un
rôle d'orientation globale de la sécurité sociale et
n'avait pas voulu qu'il se substituât au Gouvernement et aux caisses pour
la détermination de l'équilibre financier de chacun des
régimes.
Considérant que le Parlement disposait des éléments de
contrôle nécessaires (rapports de la Commission des comptes de la
sécurité sociale, de la Cour des comptes et des présidents
des conseils de surveillance), M. Jean-Luc Cazettes a jugé que si
le Parlement était amené à voter de façon plus
précise les recettes et les dépenses par branche ou par
régime, "
il n'y aurait plus aucune marge de manoeuvre pour le
Gouvernement et les caisses
" et notamment pour les conventions
d'objectifs et de gestion qui constituent un élément positif
introduit par les ordonnances de 1996, même si elles portent
essentiellement sur la gestion et non sur le risque.
M. Jean-Luc Cazettes a reconnu que l'approche par risque, qui
présentait au plan conceptuel une légitimité certaine,
compliquait les présentations dès lors que les travaux en amont
étaient effectués par régime. En outre, l'approche par
branche, en particulier pour la vieillesse, est incomplète puisque les
régimes spéciaux ne sont traités que globalement, toutes
branches confondues. Il serait par conséquent utile de ne pas concentrer
le discours sur le seul régime général, malgré
l'importance de ce dernier. Sur le fond, le problème est de savoir
comment rendre plus lisibles et plus harmonieuses les différentes
approches, par branche et par régime.
M. Jean-Luc Cazettes a estimé que les situations financières
différentes des branches ne semblaient pas devoir compromettre le
principe de séparation des branches. Il a considéré que
les mécanismes de transferts entre branches n'étaient pas en
eux-mêmes critiquables s'ils reposaient sur des données objectives.
MM. Jean-Luc Cazettes et Patrick Hermange se sont interrogés sur la
justification du financement par la branche vieillesse de certains avantages
familiaux accordés aux retraités tels que les majorations de
pensions. Ils se sont demandés si ces avantages ne devraient pas
plutôt être financés par la branche famille.
M. Patrick Hermange a estimé que la question de savoir si les aides
aux familles devaient être perçues au moment où les enfants
étaient à la charge des familles ou au moment de la retraite des
parents méritait de faire l'objet d'un débat de politique
familiale.
Interrogé sur la situation de la branche vieillesse du régime
général, M. Jean-Luc Cazettes a souligné que la
CNAVTS plaidait depuis plusieurs années pour le retour à un
équilibre durable de ses comptes.
Il a expliqué qu'il n'y avait pas aujourd'hui à proprement parler
d'accumulation de dettes au niveau de la CNAVTS, grâce au
mécanisme de reprise de la dette par la CADES. Il a
considéré que le système de répartition
n'impliquait pas qu'il ne puisse pas y avoir, selon les exercices,
excédent ou déficit. Mais il est vrai que la puissance publique
ne peut pas laisser perdurer des déficits répétés,
même au prix d'une reprise de dette, dès lors que la gestion de
cette dernière se traduit par un report sur les
générations futures de charges imputables aux
générations présentes. Une telle pratique tend à
miner le principe même de la solidarité et de
l'équité entre générations.
Evoquant la date de publication des comptes de la CNAVTS, M. Patrick
Hermange a souligné que des efforts importants étaient
effectués pour accélérer la sortie des comptes et disposer
d'éléments fiables pour la fin avril. Les délais actuels
sont explicables par la complexité de notre système de
sécurité sociale, l'atomisation et l'indépendance
juridique des caisses de base, l'insuffisance des instruments comptables et
informatiques pour la consolidation des recettes par branche pour le
régime général.
Les travaux actuellement menés par la mission interministérielle
chargée d'harmoniser les plans comptables des organismes de
sécurité sociale devraient permettre une plus grande
homogénéité des données et faciliter la
préparation des documents fournis pour la Commission des comptes de la
sécurité sociale et la préparation de la loi de
financement. Pour la CNAVTS, une sortie plus rapide des comptes dépend
toutefois d'une connaissance plus précoce qu'à l'heure actuelle
des recettes encaissées par les URSSAF au titre de la branche vieillesse
du régime général.
Audition de M. Jean-Paul Probst, président du Conseil d'administration, et de M. Etienne Marie, directeur de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)
Interrogé sur le jugement qu'il portait sur
l'expérience de trois lois de financement de la sécurité
sociale, M. Jean-Paul Probst a souligné les effets positifs de ces lois
sur la conduite de l'action publique.
La loi de financement incite en effet à arrêter au plus tôt,
au cours de l'année (n), les comptes de l'année (n-1). Les
caisses d'allocations familiales n'ont eu à cet égard aucune
difficulté à arrêter fin février 1999 leurs comptes
1998. L'établissement des comptes de la CNAF suppose en revanche de
connaître le montant des recettes du régime général,
établi par l'ACOSS, ainsi que les recettes et les dépenses des
autres régimes versant des prestations familiales (MSA, secteur public)
qui sont consolidées dans les comptes de la CNAF.
M. Jean-Paul Probst a estimé que le calendrier de sortie des comptes
s'était considérablement amélioré en 1999. Il a
ajouté que la loi de financement de la sécurité sociale
avait également recalé le calendrier de la Commission des comptes
de la sécurité sociale, laquelle se réunissait
désormais en mai et en septembre. Par le passé, la Commission des
comptes de la sécurité sociale s'était souvent
réunie de manière très irrégulière.
M. Jean-Paul Probst a constaté que la loi de financement de la
sécurité sociale obligeait à une coordination avec la loi
de finances initiale, comme l'avait illustré cette année la prise
en charge par le budget de l'Etat de l'allocation de parent isolé (API).
Il a ajouté que la loi de financement imposait au Gouvernement
d'arrêter ses mesures pour l'année (n) en septembre (n-1), ce qui
facilitait le travail de préparation réglementaire et la
tâche des organismes gestionnaires comme la CNAF.
Abordant les aspects négatifs de la procédure
d'élaboration des lois de financement de la sécurité
sociale, M. Jean-Paul Probst a constaté que l'association des
partenaires sociaux à la détermination en amont des recettes et
des dépenses était très faible. Les recettes
dépendent de politiques macro-économiques globales qui
échappent aux partenaires sociaux ; les dépenses sont le
résultat de décisions politiques, généralement
annoncées lors de la conférence de la famille, pour lesquelles un
simple avis est demandé aux partenaires sociaux.
M. Jean-Paul Probst a regretté le délai très court
laissé aux partenaires sociaux pour l'examen du projet de loi de
financement de la sécurité sociale : entre une
réunion de la Commission des comptes de la sécurité
sociale généralement très tardive en septembre et la date
limite de dépôt du projet de loi fixée par la loi
organique, les partenaires sociaux disposent de quelques jours à peine
pour se prononcer sur un ensemble de mesures aux conséquences parfois
complexes.
M. Jean-Paul Probst a souligné en outre que les annexes du projet de loi
n'étaient pas transmises lors de l'examen du texte par le conseil
d'administration de la CNAF.
Il a considéré que la loi de financement de la
sécurité sociale était fondamentalement un texte juridique
et financier et non un texte définissant une véritable politique
publique, où le Parlement fixerait des objectifs, définirait des
indicateurs de suivi et procéderait à une évaluation des
résultats.
M. Jean-Paul Probst a constaté que le rapport annexé et les
annexes au projet de loi présentaient un caractère très
littéraire. Il a souligné que la seule norme pour la branche
famille figurant dans le projet de loi était un objectif de
dépenses. Or, cet objectif de dépenses n'est pas cohérent
avec le périmètre des comptes que consolide la CNAF et se trouve
chaque année démenti par la majoration de l'allocation de
rentrée scolaire (ARS) qui ne figure pas dans le projet de loi.
M. Jean-Paul Probst a estimé que les partenaires sociaux avaient le
sentiment de ne pas pouvoir peser sur les dépenses et ne
s'intéressaient donc pas véritablement au suivi de cet objectif
de dépenses.
Il a jugé que les comptes de la CNAF n'étaient pas suffisamment
lisibles. Pour améliorer la clarté de ses comptes, la caisse a
suggéré de regrouper au sein de trois fonds distincts les
dépenses relatives à la politique familiale, aux aides au
logement et aux minima sociaux. Les propositions en ce sens formulées
auprès du Ministère de l'emploi et de la solidarité sont
en cours d'examen.
M. Jean-Paul Probst a considéré que la seule évaluation de
la loi de financement de la sécurité sociale était
réalisée par la Cour des comptes. Le rapport de cette juridiction
est devenu un élément essentiel, même si l'audit
très complet ainsi réalisé ne peut pas être toujours
très approfondi.
M. Jean-Paul Probst s'est dit satisfait du lien établi directement entre
le Parlement et les gestionnaires des caisses par le biais du conseil de
surveillance. Il a fait remarquer que l'existence du projet de loi de
financement de la sécurité sociale - lequel ne peut contenir
que des mesures ayant un réel impact financier sur la protection
sociale - conduisait à limiter le nombre des projets de loi portant
diverses mesures d'ordre social (DMOS). De multiples mesures nécessitant
une modification législative restent par conséquent en suspens,
ce qui est très regrettable.
M. Jean-Paul Probst a considéré que la direction de la
sécurité sociale du Ministère de l'emploi et de la
solidarité était sous-dotée en moyens humains pour assurer
la conception et le suivi des lois de financement de la sécurité
sociale. Il a jugé nécessaire de la renforcer, le cas
échéant par des moyens humains mis à sa disposition par
les caisses de sécurité sociale dans la clarté juridique.
Interrogé sur l'idée d'une loi d'orientation pluriannuelle dans
le domaine de la sécurité sociale, M. Jean-Paul Probst a
estimé que les gestionnaires des caisses étaient demandeurs d'une
meilleure lisibilité sur plusieurs exercices de l'évolution des
prestations et des actions menées.
Abordant la situation financière de la branche famille, M. Jean-Paul
Probst a reconnu que l'excédent de cette branche conjugué
à l'équilibre de la branche maladie et au déficit de
l'assurance vieillesse pouvait compromettre à terme le principe de
séparation des branches. Il a craint que l'on multiplie les transferts
de charge au détriment de la branche famille, comme on l'avait fait
à de nombreuses reprises par le passé, ce qui serait contraire
à la transparence des comptes de la branche et préjudiciable
à la politique familiale.
Evoquant les avantages familiaux accordés en matière de pensions
de retraite, qui représentent 75 milliards de francs par an, soit
40 % du montant des prestations familiales, M. Jean-Paul Probst a
rejeté toute perspective de faire supporter cette dépense
à la branche famille. Il a regretté que l'on dépense de
telles sommes à ce titre et a jugé plus utile d'aider les
familles lorsqu'elles ont des enfants à charge que quarante ans
après.
M. Jean-Paul Probst a estimé que les frontières incertaines entre
la CNAF et l'Etat faisaient supporter un risque de trésorerie à
la branche famille. Ce risque a certes été limité par la
convention signée en mai 1995 entre l'Etat et l'ACOSS mais il reste deux
domaines où la CNAF fait régulièrement une avance de
trésorerie à l'Etat :
- la majoration de l'allocation de rentrée scolaire qui, en 1998,
n'a pas été remboursée immédiatement par l'Etat,
contrairement à 1997 ;
- les aides personnelles au logement qui ont conduit la branche famille
à faire des avances de trésorerie de 4 milliards de francs en
1997 et de 2 milliards de francs en 1998.
M. Jean-Paul Probst a souhaité que l'Etat rembourse immédiatement
les sommes que la branche famille avance pour son compte. S'agissant de la
majoration de l'ARS, il a considéré qu'il convenait de la
prévoir l'année (n-1) dans le budget de l'Etat et dans les
comptes prévisionnels de la branche famille.
M. Jean-Paul Probst a considéré qu'il existait une bonne logique
dans le financement, par les cotisations sociales et la CSG, des prestations
familiales et dans le financement, par l'Etat, des trois minima sociaux (AAH,
API, RMI). Le vrai problème réside davantage dans le financement
des aides personnelles au logement : chacune des trois aides existantes
(ALS, APL, ALF) est financée par des recettes différentes. Il
convient par conséquent d'unifier ces trois aides et leur financement.
En conclusion, M. Jean-Paul Probst a souhaité un calendrier
d'élaboration du projet de loi de financement de la
sécurité sociale moins tendu, une rationalisation des comptes de
la CNAF, une cohérence accrue de ces comptes avec la loi de financement
et une évolution vers une loi de financement de la
sécurité sociale qui fixerait à l'Etat non seulement des
objectifs en termes financiers, mais aussi en termes de politiques publiques.
Il s'est enfin interrogé sur les raisons pour lesquelles la CNAF
continuait à assurer la gestion du Fonds d'aide et de soutien aux
travailleurs immigrés et à leurs familles (FASTIF).
M. Etienne Marie, a estimé que les solutions permettant de consolider
plus rapidement les comptes des régimes publics seraient la passation de
conventions beaucoup plus précises entre eux et la CNAF
(conformément à la convention d'objectifs et la gestion), le
versement des cotisations de ces régimes à l'ACOSS et la mise
à disposition des sommes nécessaires aux prestations par la CNAF,
enfin le service des prestations à leurs ressortissants par les CAF.
Audition de M. Bernard Caron, président du Conseil d'administration, et de M. Jean-Louis Buhl, directeur de l'ACOSS
Précisant qu'il s'exprimait à la fois comme
président du Conseil d'administration de l'ACOSS et représentant
du MEDEF, M. Bernard Caron a qualifié de
" nuancé "
son jugement sur l'expérience de
trois lois de financement de la sécurité sociale. S'il a
considéré que la démarche globale ainsi introduite avait
constitué un progrès certain, il a toutefois estimé que le
problème fondamental des lois de financement était leur
caractère à la fois très éclaté, un peu
" bric-à-brac "
, et très agrégé,
contrairement à la loi de finances qui comportait une
présentation détaillée des différentes recettes et
dépenses, ce qui contribuait à leur opacité.
Regrettant que l'ONDAM ne soit pas différencié selon les
régimes, M. Bernard Caron a jugé qu'il serait utile de faire
figurer dans la loi de financement ou dans ses annexes le détail des
différents agrégats ainsi qu'un rapprochement des recettes et
dépenses pour chaque régime.
Il a constaté que, dans la mesure où rien n'obligeait le
Gouvernement à présenter une loi de financement de la
sécurité sociale rectificative, aucune information n'était
donnée quant à la manière dont on comblait les
déficits lorsque les recettes s'avéraient insuffisantes. Il a
considéré qu'aucun commissaire aux comptes ne certifierait
aujourd'hui les comptes de la sécurité sociale.
Abordant les responsabilités supplémentaires données au
Parlement et au Gouvernement par les ordonnances de 1996, M. Bernard Caron
a estimé que le rôle des partenaires sociaux consistait
essentiellement à faire de la figuration pendant que l'Etat
détenait le réel pouvoir de décision. Il a souligné
que le MEDEF réclamait depuis la création de la
sécurité sociale, en 1945, une clarification des rôles
respectifs de l'Etat et des partenaires sociaux. L'Etat, responsable des grands
équilibres, doit se contenter de fixer des enveloppes globales et
laisser les caisses de sécurité sociale gérer librement
ces enveloppes.
M. Bernard Caron a considéré que les conseils
d'administration des caisses avaient pour l'essentiel un rôle de conseils
d'orientation consultatifs. Leur avis sur les textes législatifs et
réglementaires est toujours demandé dans l'urgence et le
Gouvernement en tient, en pratique, très rarement compte. Rien n'oblige
d'ailleurs l'autorité de tutelle à motiver le non-respect de cet
avis, ce qui n'est pas satisfaisant.
Interrogé sur la notion d'équilibre, abordée dans les lois
de financement à travers des données très
hétérogènes, M. Bernard Caron a considéré
que cette situation n'était pas satisfaisante et estimé
" nécessaire et indispensable "
un véritable
équilibre des lois de financement.
Interrogé sur la fiabilité de la répartition des recettes
entre branches par l'ACOSS, M. Jean-Louis Buhl a souligné que cette
répartition était désormais, depuis le
1
er
janvier 1998, strictement comptable grâce au
système RACINE. Avant cette date, la répartition s'effectuait au
niveau de l'ACOSS, sur des bases statistiques, après encaissement global
par les URSSAF. Ce système était à la fois
compliqué et lent. Depuis la mise en place du système RACINE, la
répartition des recettes par branche se fait dans les URSSAF, avec une
précision très fine.
M. Jean-Louis Buhl a précisé que la mise en place de RACINE
avait abouti à une répartition des recettes entre branches
présentant quelques écarts avec ce qui pouvait être attendu
de l'ancienne méthode ; il a convenu que ce changement de
méthode avait pu
" troubler "
mais il a constaté
que "
la vérité comptable se trouve du côté
de RACINE
". Pour l'année 1998, cette répartition a
été donnée aux différentes caisses le
15 février 1999. La Commission des comptes de la
sécurité sociale peut donc se réunir début mai si
les caisses ont arrêté le volet dépenses de leurs comptes
à cette date.
M. Jean-Louis Buhl a souligné que l' ACOSS avait su faire face dans
les délais à trois réformes successives : la
séparation des branches en 1995, la réforme des droits
constatés en 1997 et la mise en place de RACINE en 1998.
Après avoir déclaré que RACINE constituait un
progrès radical, M. Jean-Louis Buhl a signalé que certains
encaissements n'avaient toutefois pas pu être ventilés entre
branches pour des raisons techniques (absence de déclaration de
l'entreprise, déclaration inexploitable...). Ces sommes
s'élèvent à 12 milliards de francs à la fin
1998 et devront être réparties entre branches sur une base
forfaitaire avant de faire l'objet d'une régularisation.
A cet égard, M. Bernard Caron a tenu à souligner que, du fait des
différentes législations, les déclarations souscrites par
les entreprises pouvaient comporter jusqu'à quarante assiettes
différentes pour les cotisations, que celles-ci devaient être
ensuite réparties entre quatre branches de sorte que l'exercice pour les
URSSAF était particulièrement complexe.
Interrogé sur la convention signée entre l'Etat et l'ACOSS en
1995, M. Bernard Caron a expliqué que celle-ci formalisait les
dettes de l'Etat à l'égard des caisses de sécurité
sociale et prévoyait des échéanciers de remboursement dans
un souci d'assurer la neutralité de la charge de trésorerie pour
les caisses. L'Etat rembourse ainsi chaque année 60 à
70 milliards de francs d'exonérations de cotisations sociales
à l'ACOSS. S'agissant du RMI et de l'AAH, le versement de l'Etat
s'opère par douzièmes ; s'agissant des exonérations
de cotisations sociales, le remboursement s'effectue selon des
échéanciers mensuels ou trimestriels.
M. Bernard Caron a jugé très positif le principe de cette
convention et a souhaité que cette dernière intègre
également un échéancier des remboursements des aides au
logement, afin d'assurer une meilleure neutralité de la charge de
trésorerie pour la branche famille.
Mardi
13 avril 1999
---
Audition de M. Alain Déniel,
Conseiller-maître à la Cour
des comptes
M. Alain
Déniel a rappelé les efforts, réalisés depuis vingt
ans, visant, d'une part, à aboutir à de véritables comptes
de la sécurité sociale, fondés sur des informations
juridiquement précises et, d'autre part, à utiliser les comptes
dans de meilleures conditions, en accélérant les délais de
sortie. Il a rendu hommage à deux personnalités ayant joué
un rôle important dans l'histoire des finances sociales : tout
d'abord, M. Jean Farge, secrétaire d'Etat à la
sécurité sociale, à l'origine de la création de la
commission des comptes, et premier responsable politique à
s'intéresser aux comptes de la sécurité sociale ;
ensuite, M. Jean Marmot, secrétaire général de la
commission des comptes de la sécurité sociale de 1986 à
1997, à l'origine de la réforme des droits constatés.
Le rapport Mazars, commandé en 1990 par M. Claude Evin, alors ministre
des Affaires sociales, étudiait les possibilités d'une
réforme comptable. Cette réforme était une étape
nécessaire avant de procéder à l'harmonisation des
comptes. La décision d'adopter une comptabilité en droits
constatés a été prise en 1994.
" La
réflexion a eu lieu après la décision "
, avec
la commission présidée par M. Etienne Delaporte, puis par M.
Alain Déniel, réunissant les autorités de tutelle de
l'Etat et les agents comptables des caisses concernées. La
réforme des droits constatés s'applique au régime
général depuis le 1er janvier 1996 et aux autres régimes
depuis le 1er janvier 1997. La commission a prolongé ses travaux pour en
suivre l'exécution. Les problèmes de mise en oeuvre (par exemple,
définition du fait générateur) n'ont pas été
très nombreux
" en raison de l'application d'un dispositif
pragmatique "
: la comptabilité des organismes de
sécurité sociale n'est pas une comptabilité totalement en
droits constatés.
M. Alain Déniel a rappelé que des insuffisances avaient
été relevées à de nombreuses reprises, notamment
par la Cour des comptes : les plans comptables utilisés sont
hétérogènes ; les comptes de la
sécurité sociale sont connus très tardivement. La
réforme des droits constatés ne surmontait pas ces insuffisances,
mais elle constituait une étape essentielle dans la recherche de
solutions.
L'article D. 253-52 du code de la sécurité sociale pose le
principe de l'utilisation, par les organismes de sécurité
sociale, d'un plan comptable unique, particulier au regard des règles de
la comptabilité générale. En fait, ce plan comptable
unique n'existe pas. La signification et la fiabilité des informations
agrégées sont insuffisantes. L'utilité des informations
comptables est
" relativement douteuse "
; par ailleurs,
il n'existe pas traditionnellement de
" pression fondamentale pour
accélérer la sortie des comptes "
, même si les
textes actuels obligent les caisses de base à fournir leurs comptes au
1er avril au plus tard et les caisses nationales avant le 30 juin.
Concernant les délais de production des comptes, de graves
problèmes demeurent, liés à la centralisation et aux
relations inter-régimes. La clôture de l'exercice 1996 a
posé de grandes difficultés ; en quelque sorte, la
dissolution de l'Assemblée nationale a été providentielle
puisqu'elle a permis d'annuler la réunion de la commission des comptes
au printemps 1997.
Pour l'exercice 1997, les délais ont été relativement
convenables pour le régime général ; en revanche, les
comptes des autres régimes ont été connus à la
dernière minute. En ce qui concerne l'exercice 1998, il semble que le
système RACINE ait relativement bien fonctionné. Il est toutefois
nécessaire de renforcer les contrôles et les obligations de
délais pesant sur les URSSAF, désormais chargées de
ventiler à la source les recettes de la sécurité sociale.
La mission interministérielle chargée de l'harmonisation des
plans comptables des organismes de sécurité sociale a pris la
suite de la commission chargée du suivi et de l'application des droits
constatés. En effet, cette commission finissait par se heurter
-au-delà des bonnes volontés de ses participants- à la
forte tradition d'autonomie des organismes de sécurité
sociale :
" pour régler le sujet, il fallait le traiter de
manière ambitieuse "
avec une impulsion forte des pouvoirs
publics. Premièrement, donner une vocation interministérielle
à cette mission (Economie et Finances, Emploi et
Solidarité) ; deuxièmement, fixer des objectifs
clairs : harmonisation des plans comptables, accélération de
la sortie des comptes, amélioration de la préparation et du suivi
des lois de financement ; troisièmement, annoncer des
échéances : le rapport de cette mission sera disponible
dès septembre 1999. Entre le 11 mai 1998 (date officielle de l'annonce
de la création de cette mission) et le 9 décembre 1998
(débuts effectifs de ses travaux), il a fallu déterminer la
composition du comité de pilotage, prévoir les moyens humains
nécessaires sous forme de mises à disposition ou de
détachements et trouver des locaux.
Invité à recenser les moyens mis à la disposition de la
mission, M. Alain Déniel a indiqué qu'ils étaient
moins nombreux que ceux prévus initialement :
- un chef de mission ;
- un directeur départemental du Trésor ;
- une secrétaire ;
- quatre agents des caisses (à temps partiel).
Six groupes de travail ont été constitués, se
réunissant au rythme d'une réunion tous les quinze jours. M.
Alain Déniel aurait souhaité que le ministère des Affaires
sociales
" puisse participer de manière permanente "
aux travaux. Il a regretté que
" personne de l'INSEE ne se soit
joint pour le moment à la mission "
mais le Directeur
général de l'INSEE vient de remédier à cette
situation.
Puis, M. Alain Déniel est revenu sur les objectifs des travaux de la
mission interministérielle.
Le premier objectif est d'harmoniser les plans comptables. Il s'agit de
définir des nomenclatures identiques, des schémas
d'écriture, un dictionnaire et une comptabilité patrimoniale, ce
qui représente
" un travail austère "
. Le
principe de réalité (
" esprit d'efficacité
plutôt que d'esthétique comptable "
) guide la
mission ; le plan comptable général est le modèle
suivi, en l'adaptant aux spécificités de la
sécurité sociale.
Le second objectif est l'accélération de la sortie des comptes.
M. Alain Déniel a estimé que l'attention portée
à ce sujet par le cabinet de Mme la Ministre de l'Emploi et de la
Solidarité était un facteur très positif. Les causes de
retard ont fait l'objet d'un examen précis. L'ACOSS, avec l'aide du
cabinet Mazars, s'efforce de remédier aux retards qui lui sont
directement imputables, notamment par l'existence d'une période
complémentaire de deux mois.
De façon plus générale, les conditions pour
accélérer la sortie des comptes sont les suivantes :
- harmoniser les plans comptables, en réalisant des interfaces
informatiques permettant une remontée et une centralisation des comptes
en temps réel ;
- sortir de la
" routine comptable "
, en remettant en
cause les calendriers habituels et la culture comptable des organismes de
sécurité sociale qui vise à produire des comptes exacts,
le
" chiffre vrai "
;
- éviter de
" confondre l'essentiel et
l'accessoire "
; par exemple, la CNAMTS commande pour l'ensemble
des caisses d'assurance maladie les feuilles de soins. Cette opération
fait l'objet d'imputations comptables extrêmement fines, mais infiniment
complexes pour un enjeu financier faible ;
- coordonner le calendrier des caisses nationales. Les réunions
fréquentes des agents comptables des caisses nationales,
" qui
n'avaient pas l'habitude de se voir "
, leur font prendre conscience
des besoins des autres et de la nécessité de ne pas
déterminer leur calendrier selon leurs seules contraintes. Cette prise
de conscience s'étend au-delà du régime
général puisque le régime agricole, par exemple, a
décidé de sortir ses comptes avec trois mois d'avance par rapport
à d'habitude.
Interrogé sur l'état d'avancement des travaux de la mission
interministérielle, M. Alain Déniel a indiqué que
l'échéancier semblait pouvoir être tenu, puisque le plan
comptable harmonisé, les schémas des écritures et le
dictionnaire comptable seraient probablement disponibles en septembre 1999. Il
a rappelé qu'il serait toutefois prématuré de fixer des
dates d'obligation de sortie des comptes qui ne seraient pas tenues ou mal
tenues. Il importe, en effet, pour que la réforme soit menée
à bien, de modifier les systèmes informatiques et de former le
personnel. De plus, il est nécessaire de désigner une institution
chargée d'assurer la maintenance du plan comptable harmonisé.
Evoquant l'administration de la sécurité sociale, il a
remarqué que cette direction cumulait, vis-à-vis des finances
sociales, les missions qu'exercent, pour les comptes de l'Etat, la Direction de
la comptabilité publique, la Direction de la Prévision, et la
Direction du Budget sans disposer, loin s'en faut, de moyens
équivalents.
ANNEXE II
-
LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA
SÉCURITE SOCIALE : DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES,
ORGANIQUES
ET LÉGISLATIVES
Constitution du 4 octobre 1958 (révision du 19
février 1996)
Art. 34
Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique.
Art. 47-1
Le
Parlement vote les projets de loi de financement de la Sécurité
sociale dans les conditions prévues par une loi organique.
Si l'Assemblée nationale ne s'est pas prononcée en
première lecture dans le délai de vingt jours après le
dépôt d'un projet, le Gouvernement saisit le Sénat qui doit
statuer dans un délai de quinze jours. Il est ensuite
procédé dans les conditions prévues à
l'article 45.
Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de cinquante
jours, les dispositions du projet peuvent être mises en oeuvre par
ordonnance.
Les délais prévus au présent article sont suspendus
lorsque le Parlement n'est pas en session et, pour chaque assemblée, au
cours des semaines où elle a décidé de ne pas tenir
séance, conformément au deuxième alinéa de
l'article 28.
La Cour des comptes assiste le Parlement et le Gouvernement dans le
contrôle de l'application des lois de financement de la
sécurité sociale.
LOI
ORGANIQUE DU 22 JUILLET 1996
Loi n° 96-646 du 22 juillet 1996, art.
1
er
(articles LO. 111-3 à LO. 111-7 du code de la
sécurité sociale)
Article
LO. 111-3
-
I
. Chaque année, la loi de financement de la
sécurité sociale :
1° Approuve les orientations de la politique de santé et de
sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les
conditions générales de l'équilibre financier de la
sécurité sociale ;
2° Prévoit, par catégorie, les recettes de l'ensemble
des régimes obligatoires de base et des organismes créés
pour concourir à leur financement ;
3° Fixe, par branche, les objectifs de dépenses de l'ensemble
des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants
actifs ou retraités titulaires de droits propres ;
4° Fixe, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base,
l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ;
5° Fixe, pour chacun des régimes obligatoires de base
visés au 3° ou des organismes ayant pour mission de concourir
à leur financement qui peuvent légalement recourir à des
ressources non permanentes, les limites dans lesquelles ses besoins de
trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources.
II
. La loi de financement de l'année et les lois de financement
rectificatives ont le caractère de lois de financement de la
sécurité sociale.
Seules des lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en
vertu des 1° à 5° du I.
III
. Outre celles prévues au I, les lois de financement de la
sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions
affectant directement l'équilibre financier des régimes
obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur
l'application des lois de financement de la sécurité sociale.
Tout amendement doit être accompagné des justifications qui en
permettent la mise en oeuvre.
Les amendements non conformes aux dispositions du présent article sont
irrecevables.
Article LO. 111-4 - I.
- Le projet de loi de financement de la
sécurité sociale de l'année est accompagné d'un
rapport présentant les orientations de la politique de santé et
de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les
conditions générales de l'équilibre financier de la
sécurité sociale.
II
. Sont jointes au projet de loi des annexes :
a
) Présentant les données de la situation sanitaire
et sociale de la population ;
b
) Rendant compte de la mise en oeuvre des dispositions des lois de
financement de la sécurité sociale de l'exercice
précédent ;
c
) Décrivant l'évolution prévisible, pour
l'année en cours et l'année suivante, des recettes et des
dépenses des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou
retraités titulaires de droits propres et, le cas échéant,
de leurs besoins de trésorerie en cours d'exercice, ainsi que les
perspectives d'évolution de ces recettes et de ces dépenses pour
les deux années postérieures ;
d
) Décrivant, pour l'année en cours et l'année
suivante, par catégorie, les ressources des régimes obligatoires
de base de sécurité sociale ;
e
) Faisant apparaître, pour l'année en cours, les
compensations financières entre régimes ;
f
) Décrivant, pour l'année en cours et l'année
suivante, les comptes prévisionnels des organismes ayant pour mission de
concourir au financement de ces mêmes régimes et, s'il y a lieu,
à l'apurement de la dette ;
g
) Retraçant pour les trois années
précédentes, d'une part, les comptes de la protection sociale qui
regroupent l'ensemble des prestations sociales et les moyens de leur
financement en mettant en évidence leur place dans les équilibres
généraux économiques et financiers, d'autre part, l'effort
social de la nation qui regroupe les prestations sociales et les charges qui en
découlent pour l'Etat, les collectivités locales, les employeurs,
les assurés et les contribuables.
III
. Est également joint le rapport de la Cour des comptes
prévu par l'article LO. 132-3 du code des juridictions
financières.
IV
. Tous les trois ans, le Gouvernement adresse au Parlement, en
même temps que le projet de loi de financement, un document
présentant la liste des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale et précisant le nombre de leurs cotisants
actifs ou retraités titulaires de droits propres.
Article LO. 111-5 -
En cas d'urgence, les limites
prévues au 5° du I de l'article LO. 111-3 peuvent être
relevées par décret pris en Conseil des ministres après
avis du Conseil d'Etat. La ratification de ces décrets est
demandée au Parlement dans le plus prochain projet de loi de financement
de la sécurité sociale.
Article LO. 111-6
- Le projet de loi de financement de la
sécurité sociale de l'année, y compris le rapport et les
annexes mentionnés aux I et II de l'article LO. 111-4, est
déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale au plus tard
le 15 octobre ou, si cette date est un jour férié, le premier
jour ouvrable qui suit.
Article LO. 111-7 -
L'Assemblée nationale doit se prononcer,
en première lecture, dans le délai de vingt jours après le
dépôt d'un projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Le Sénat doit se prononcer, en première lecture, dans un
délai de quinze jours après avoir été saisi.
Si l'Assemblée nationale n'a pas émis un vote en première
lecture sur l'ensemble du projet de loi de financement de la
sécurité sociale dans le délai prévu à
l'article 47-1 de la Constitution, le Gouvernement saisit le Sénat du
texte qu'il a initialement présenté, modifié le cas
échéant, par les amendements votés par l'Assemblée
nationale et acceptés par lui. Le Sénat doit alors se prononcer
dans un délai de quinze jours après avoir été saisi.
Si le Sénat n'a pas émis un vote en première lecture sur
l'ensemble du projet dans le délai imparti, le Gouvernement saisit
à nouveau l'Assemblée nationale du texte soumis au Sénat,
modifié, le cas échéant, par les amendements votés
par le Sénat et acceptés par lui.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est
ensuite examiné selon la procédure d'urgence dans les conditions
prévues à l'article 45 de la Constitution.
RÈGLEMENT DES ASSEMBLÉES
Article 121-2 du règlement de l'Assemblée nationale
(introduit
par la résolution n° 582 du 3 octobre 1996)
Les amendements contraires aux dispositions du III de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale sont déclarés irrecevables dans les conditions prévues aux articles 92 et 98.
Art.
92 du règlement de l'Assemblée nationale
1. - Les dispositions de l'article 40 de la
Constitution peuvent être opposées à tout moment aux
propositions, rapports et amendements par le Gouvernement ou par tout
député.
2. - Pour les propositions ou rapports, l'irrecevabilité est
appréciée par le bureau de la commission des Finances, de
l'Economie générale et du Plan. Celui-ci peut également,
à tout moment, opposer de sa propre initiative cette
irrecevabilité.
3. - La procédure législative est suspendue en
l'état jusqu'à la décision du bureau de la commission des
Finances qui entend l'auteur de la proposition ou du rapport et peut demander
à entendre le Gouvernement en ses observations.
4. - Pour les amendements, l'irrecevabilité est
appréciée dans les conditions prévues au dernier
alinéa de l'article 98.
5. - Sont opposables dans les mêmes conditions, les
dispositions de la loi organique relative aux lois de finances.
Art.
98 du règlement de l'Assemblée nationale
Alinéa 6
S'il apparaît évident que l'adoption d'un amendement aurait les conséquences prévues par l'article 40 de la Constitution, le Président en refuse le dépôt. En cas de doute, le Président décide, après avoir consulté le président ou le rapporteur général de la commission des Finances, de l'Economie générale et du Plan, ou un membre du bureau désigné à cet effet ; à défaut d'avis, le Président peut saisir le Bureau de l'Assemblée.
Art.
49 du règlement du Sénat
Alinéas 7 et 8
(introduit
par la résolution n° 504 du 3 octobre 1996)
7. - L'irrecevabilité des amendements
tirée
de l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale peut
être soulevée par le Gouvernement, la commission des affaires
sociales, la commission saisie au fond ou tout sénateur.
L'irrecevabilité est admise de droit, sans qu'il y ait lieu à
débat, lorsqu'elle est affirmée par la commission des affaires
sociales. L'amendement est mis en discussion lorsque la commission des affaires
sociales ne reconnaît pas l'irrecevabilité.
8. - Lorsque la commission des affaires sociales n'est pas en
état de faire connaître immédiatement ses conclusions sur
l'irrecevabilité de l'amendement, l'article en discussion est
réservé. Quand la commission estime qu'il y a doute, son
représentant peut demander à entendre les explications du
Gouvernement et de l'auteur de l'amendement qui dispose de la parole pendant
cinq minutes. Si le représentant de la commission estime que le doute
subsiste, l'amendement et l'article correspondant sont réservés
et renvoyés à la commission. Dans les cas prévus au
présent alinéa, la commission doit faire connaître ses
conclusions sur la recevabilité avant la fin du débat, autrement,
l'irrecevabilité sera admise tacitement.
TEXTES RELATIFS À LA COUR DES COMPTES
Article L.O. 132-3 du code des juridictions
financières
(loi organique n° 96-646 du 22 juillet 1996)
Chaque année, la Cour des comptes établit un rapport sur
l'application des lois de financement de la sécurité sociale. Ce
rapport présente, en outre, une analyse de l'ensemble des comptes des
organismes de sécurité sociale soumis à son contrôle
et fait une synthèse des rapports et avis émis par les organismes
de contrôle placés sous sa surveillance. Ce rapport est remis au
Parlement sitôt son arrêt par la Cour des comptes.
Les réponses faites aux observations de la Cour des comptes sont jointes
au rapport.
Article L. 111-5 -
La Cour des comptes contrôle les institutions
de la sécurité sociale.
(Article 6 de la loi du 25 juillet 1994)
Article L. 111-6 -
Conformément aux
dispositions du second alinéa de l'article L. 243-7 du code de la
sécurité sociale, le contrôle de l'application de la
législation de sécurité sociale par les administrations
centrales et es services déconcentrés de l'Etat, pour les
contributions et cotisations dont ils sont redevables envers le régime
général, est assuré par la Cour des comptes, qui fait
état des résultats de ce contrôle dans le rapport sur le
projet de loi de règlement.
Article L. 132-3-1 du code des juridictions financières
La Cour des comptes peut être saisie par la commission parlementaire
compétente de toute question relative à l'application des lois de
financement et procède, dans ce cadre et à la demande de cette
commission, aux enquêtes sur les organismes soumis à son
contrôle.
CONTRÔLE DE L'APPLICATION DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA
SÉCURITÉ SOCIALE PAR LE PARLEMENT
Loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 de financement
de la
sécurité sociale pour 1997 (extraits)
Art. 2
- Les membres du Parlement qui ont la charge de
présenter, au nom de la commission compétente, le rapport sur les
projets de loi de financement de la sécurité sociale suivent et
contrôlent, sur pièces et sur place, l'application de ces lois
auprès des administrations de l'Etat et des établissements
publics compétents. Réserve faite des informations couvertes par
le secret médical ou le secret de la défense nationale, tous les
renseignements d'ordre financier et administratif de nature à faciliter
leur mission doivent leur être fournis. Ils sont habilités
à se faire communiquer tout document de quelque nature que ce soit.
Art. 3
- Pour l'information du Parlement, le Gouvernement lui
présente chaque année un rapport rattaché à
l'annexe visée au
b
du II de l'article LO. 111-4 du code de
la sécurité sociale et comprenant les éléments
suivants :
- le bilan des contrôles médicaux effectués dans le
secteur de l'hospitalisation ;
- l'état de la réforme de la nomenclature
générale des actes professionnels ;
- l'exécution budgétaire de la loi de financement ;
- le bilan des expérimentations des " filières et
réseaux de soins " ;
- la mise en oeuvre des références médicales
opposables ;
- les restructurations hospitalières ;
- le bilan de l'exécution du programme de médicalisation des
systèmes d'information ;
- le bilan des contrôles d'attributions des prestations familiales.
Art. 8
- Lorsqu'il prend le décret visé à
l'article LO. 111-5 du code de la sécurité sociale, le
Gouvernement dépose au Parlement, dans un délai de quinze jours,
un rapport présentant les raisons du dépassement des limites
prévues au 5
e
du I de l'article LO. 111-3 du même
code et justifiant l'urgence qui exige ce recours à la voie
réglementaire.
Loi
n° 97-1164 du 19 décembre 1997 de financement
de la
sécurité sociale pour 1998 (extrait)
[Article créant le
Fonds d'accompagnement social
pour la modernisation des hôpitaux]
Extrait de l'article 25 - Pour l'information du Parlement, le Gouvernement lui présentera, chaque année, pendant six ans, un rapport attaché à l'annexe visée au b du II de l'article LO. 111-4 du code de la sécurité sociale sur l'utilisation du fonds.
ANNEXE III
-
SCHÉMAS SUR LE FINANCEMENT DE LA
SÉCURITÉ SOCIALE
Les deux schémas suivants présentent les :
- Principales impositions affectées en
1999 ;
- Principaux concours budgétaires en 1999.
ANNEXE IV
-
LISTE DES IMPOSITIONS
AFFECTÉES
AUX ORGANISMES DE SÉCURITÉ
SOCIALE
Nom de l'imposition |
Description |
Bénéficiaires |
Prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placement |
Texte
institutif :
|
CNAVTS
|
Contribution sociale généralisée |
Textes institutifs :
|
Régime général et autres régimes
d'assurance maladie
|
Contribution pour le remboursement de la dette sociale
|
Textes institutifs
:
|
CADES |
Contribution sociale de solidarité sur les sociétés |
Organisme gestionnaire :
|
CANAM
|
Contributions sur les ventes en gros |
Organisme gestionnaire :
|
CNAMTS
|
Taxe sur les boissons alcooliques |
Organisme gestionnaire :
|
CNAMTS |
Contribution des entreprises assurant l'exploitation en France d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques |
Organisme gestionnaire :
|
CNAMTS |
Taxe sur les primes d'assurance automobile |
Organisme gestionnaire :
|
Régime général et autres régimes
d'assurance maladie
|
Droit de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels |
Texte
institutif :
|
Fonds de solidarité vieillesse |
Droit de plaidoirie |
Organisme gestionnaire :
|
CNBF |
Droit de consommation sur les produits intermédiaires |
Textes institutifs :
|
Fonds de solidarité vieillesse |
Taxe sur les prémix |
Textes institutifs :
|
CNAMTS |
Droit de consommation sur les alcools |
Textes institutifs :
|
Fonds de solidarité vieillesse, Corse, BAPSA et les régimes obligatoires d'assurance maladie |
Droit sur les bières et les boissons non alcoolisées |
Textes institutifs :
|
Fonds de solidarité vieillesse |
Taxe sur les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire |
Organismes gestionnaires :
|
Fonds de solidarité vieillesse |
Redevance due par les titulaires de titres d'exploitation de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux |
Textes institutifs :
|
CANSSM |
Taxe sur les tabacs |
Textes institutifs :
|
CNAMTS |
Taxe sur les primes d'assurance |
Textes institutifs :
|
FCATA |
Cotisation incluse dans la taxe sur la valeur ajoutée (de 0,70 % dans chacun des taux de TVA) |
|
BAPSA |
Taxe sur les farines |
|
BAPSA |
Taxe sur les corps gras alimentaires |
|
BAPSA |
ANNEXE V
-
HISTORIQUE DES PRÉLÈVEMENTS
SOCIAUX SUR LES REVENUS DU CAPITAL
Ordonnance du 30 avril 1983 |
Création d'un prélèvement sur l'ensemble des revenus affectés à la CNAF |
Article 115 de la loi de finances pour 1984 |
Ce prélèvement est complété par un prélèvement de 1 % sur les produits de placement |
Article 106 de la loi de finances pour 1985 |
Seul le prélèvement de 1 % sur les produits de placement à revenu fixe perçus à compter du 1 er janvier 1985 est maintenu |
Loi du 10 juillet 1987 |
Création d'un prélèvement de 1 % affecté à la CNAVTS sur les produits du patrimoine et de placement (à la fois revenus soumis à l'impôt sur le revenu et revenus de placement soumis à prélèvement obligatoire) |
Loi de finances pour 1991 |
Création de la CSG famille (1,1 %) |
1 er juillet 1993 |
Création de la CSG affectée au FSV (1,3 %) |
Ordonnance du 24 janvier 1996 |
Création du CRDS (0,5 %) |
Loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 |
Extension d'assiette de la CSG sur les revenus du patrimoine
perçus à compter de 1996 (déclarés en 1997) et aux
revenus de placement perçus à compter de 1997
|
Loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 |
Unification des deux prélèvements CNAF et CNAVTS
(création d'un prélèvement social de 2 %) et
alignement de son assiette sur celle de la CSG.
|
Projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle |
Eclatement du produit du prélèvement social de 2 % entre la CNAMTS (28 %), la CNAF (22 %) et la CNAVTS (50 %). |
ANNEXE VI
-
TABLE DES SIGLES
UTILISÉS
AAH |
Allocation aux adultes handicapés |
ACOSS |
Agence centrale des organismes de sécurité sociale |
AGIRC |
Association générale des institutions de retraite |
AN |
Assemblée nationale |
ARRCO |
Association des régimes de retraite complémentaires |
ARS |
Allocation de rentrée scolaire |
ATIACL |
Allocation temporaire d'invalidité des agents des collectivités locales |
AVPF |
Assurance vieillesse des parents au foyer |
AVTS |
Allocation aux vieux travailleurs salariés |
BAPSA |
Budget annexe des prestations sociales agricoles |
BMAF |
Base mensuelle de calcul des allocations familiales |
CADES |
Caisse d'amortissement de la dette sociale |
CAMAC |
Caisse mutuelle d'assurance maladie des cultes |
CAMAVIC |
Caisse mutuelle d'assurance vieillesse et invalidité des cultes |
CANAM |
Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes |
CANCAVA |
Caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse des artisans |
CCMSA |
Caisse centrale de la mutualité sociale agricole |
CCSS |
Commission des comptes de la Sécurité sociale |
CDC |
Caisse des dépôts et consignations |
CEC |
Contrat emploi consolidé |
CES |
Contrat emploi solidarité |
CGI |
Code général des impôts |
CGSS |
Caisse générale de Sécurité sociale des DOM |
CIE |
Contrat initiative emploi |
CMU |
Couverture maladie universelle |
CMP |
Commission mixte paritaire |
CNAF |
Caisse nationale des allocations familiales |
CNAMTS |
Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés |
CNAVPL |
Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés |
CNAVTS |
Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés |
CNBF |
Caisse nationale des barreaux français |
CNMSS |
Caisse nationale militaire de Sécurité sociale |
CNRACL |
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales |
CODEC |
Comité départemental d'examen des comptes des organismes de sécurité sociale |
COG |
Convention d'objectifs et de gestion |
CRDS |
Contribution pour le remboursement de la dette sociale |
CRPCEN |
Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires |
CSG |
Contribution sociale généralisée |
CSSS ou C3S |
Contribution sociale de solidarité sur les sociétés |
CUDC |
Compte unique de disponibilités courantes |
DSS |
Direction de la sécurité sociale |
FATIACL |
Fonds de l'allocation temporaire invalidité des agents des collectivités locales |
FSI |
Fonds spécial d'invalidité |
FSV |
Fonds de solidarité vieillesse |
GVT |
Glissement, vieillesse, technicité |
IGAS |
Inspection générale des affaires sociales |
MSA |
Mutualité sociale agricole |
ONDAM |
Objectif national de dépenses d'assurance maladie |
OQN |
Objectif quantifié national |
OQR |
Objectif quantifié régional |
ORGANIC |
Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce |
PIB |
Produit intérieur brut |
RDS |
Remboursement de la dette sociale |
RMI |
Revenu minimum d'insertion |
SMIC |
Salaire minimum interprofessionnel de croissance |
TVA |
Taxe à la valeur ajoutée |
UNEDIC |
Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce |
URSSAF |
Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales |
1
Selon l'expression de M. Guy
Carcassonne.
2
Histoire pluriséculaire commencée en Angleterre par
la Grande Charte (1215), arrachée à Jean sans Terre par les
barons anglais à la suite de la bataille de Bouvines (1214).
3
Source : rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale de mai 1999, p. 31.
4
Selon l'office européen de statistiques Eurostat, dont le
système de comptabilisation majore de 0,2 point le taux des
prélèvements obligatoires en France en 1997.
5
Groupe de travail sur l'efficacité de la dépense
publique et le contrôle parlementaire. Contrôler réellement,
pour dépenser mieux et prélever moins, Assemblée nationale
XI
ème
législature 1999, p. 37.
6
Michel Borgetto " Sécurité sociale et
démocratie sociale : état des lieux ", Revue
française des finances publiques, n° 64, novembre 1998,
p. 36.
7
Décision n° 60-11 DC sur la loi relative aux
assurances agricoles.
8
Rapport n° 370 (1993-1994) " L'avenir de la
protection sociale et la place du Parlement dans sa définition ",
p. 15 et 16.
9
Rapport n° 188 (1995-1996), p. 14.
10
Décision n° 87-234 DC du 7 janvier 1988.
11
" Les propositions et amendements formulés par les
membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour
conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la
création ou l'aggravation d'une charge publique. "
12
Décision n° 97-388 DC du 20 mars 1997 sur la loi
créant les plans d'épargne retraite.
13
Le projet de loi portant création d'une couverture maladie
universelle en est un bon exemple.
14
" Nouvelles réflexions sur la nature et le
devenir des lois de financement de la sécurité sociale ",
Droit social n° 9/10 septembre-octobre 1997, p. 785.
15
Cf. les trois arguments de contestation mentionnés plus
haut.
16
Journal officiel débats Assemblée nationale,
1
ère
séance du 27 octobre 1998, p. 7361.
17
Dans ses quarante propositions sur la sécurité
sociale annoncées le 15 septembre 1998.
18
Michel Borgetto, op. cit., p. 37.
19
Journal officiel des débats, Assemblée nationale,
1
ère
séance du 13 juin 1996, p. 4245.
20
Rapport Assemblée nationale X
ème
législature n° 3053 , p. 113.
21
" Réflexions pour une politique de
santé ", Espace Social Européen, Documents et
Synthèses n° 29, p. 9, mars 1998.
22
Sur 90 amendements déposés en première
lecture sur le rapport annexé du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999, 30 ont été
adoptés.
23
Le Président de séance a introduit ainsi la
discussion du rapport annexé (JO Débats AN,
2
ème
séance du 30 octobre 1998, p. 7771) :
" En espérant ne pas vous donner l'impression de vouloir
réduire le débat et de limiter votre droit à intervenir,
je vous fais remarquer que tous les sujets ou presque qui font l'objet de ces
amendements ont été débattus au cours des quatre
journées consacrées à l'examen de ce texte. "
24
Le Gouvernement semble l'avoir implicitement reconnu, puisque ces
Etats généraux, annoncés par la déclaration de
politique générale du Premier ministre du 19 juin 1997 pour le
début de l'année 1998, n'ont été
véritablement lancés qu'au mois de décembre 1998.
25
Rémi Pellet, " Le Conseil constitutionnel et
l'équilibre financier de la sécurité sociale " -
Droit social, janvier 1999.
26
Jean-Michel Bélorgey, " A quoi servent les lois de
financement de la sécurité sociale ? " Droit social
n° 9/10 septembre 1998, p. 813
27
En effet, le Conseil constitutionnel a refusé
d'intégrer les règlements des assemblées au " bloc de
constitutionnalité " : " dès lors, l'application
de procédures prévues par ces règlements à des
initiatives extérieures aux assemblées, par exemple à des
amendements du gouvernement, est difficilement envisageable ", G. Arathoon
et S. Corley, " Les lois de financement de la sécurité
sociale : l'inévitable référence aux lois de
finances ", Revue française des finances publiques, n° 64,
novembre 1998, p. 73.
28
G. Arathoon et S. Corley, op.cit.
29
Cour des comptes, rapport sur la sécurité sociale
de septembre 1997, p. 51.
30
Dénommé groupe Delaporte, puis groupe
Déniel, du nom de son animateur.
31
Cf. compte rendu de cette audition à l'annexe I.
32
Rapport 1997 de la Cour des comptes sur la sécurité
sociale, p. 12.
33
Rapport 1997 de la Cour des comptes sur la sécurité
sociale, p. 43-45.
34
" Régimes, branches et fonds de la
sécurité sociale : essai de définition juridique et
financière ", Revue du droit sanitaire et social 35 (1),
janvier-mars 1999, p. 13-28.
35
Le problème se posera notamment pour les
régimes dont les cotisations d'assurance maladie auront totalement
disparu à la suite de la seconde substitution de CSG en 1998.
36
Les schémas -simplifiés- de l'annexe III tentent
d'en rendre compte.
37
En raison de " nombreux problèmes techniques,
notamment dans le cas des agents non titulaires de l'Etat ", Rapport de la
Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour
l'année 1996, juillet 1997, p. 325.
38
Audition du 1
er
octobre 1997 de M. Pierre Joxe,
Premier président de la Cour des comptes et Mme Marie-Anne Boutin,
rapporteur général par la commission des Affaires culturelles,
familiales et sociales de l'Assemblée nationale (Rapport n°385
1997-1998, p. 65).
39
Hors les 3,5 milliards de francs au titre de la réduction
du temps de travail prévus par le projet de loi de finances.
40
Arrêté du 26 août 1998, paru au Journal
officiel du 8 septembre 1998, p. 13689.
41
Journal officiel du 28 août 1998, p. 13216.
42
Rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de
finances 1997, juillet 1997, p. 331.
43
Cf. compte rendu de l'audition de M. Hervé Le Floc'h
Louboutin à l'annexe I.
44
Débats Assemblée nationale, 2
ème
séance du 30 octobre 1996, p. 6260.
45
Rémi Pellet, " Le Conseil constitutionnel et
l'équilibre financier de la sécurité sociale ". Droit
social n° 1, janvier 1999, p. 21-32.
46
Le législateur organique ayant
préféré ce terme à celui d'exécution.
47
Selon l'expression de la Cour. Elle indique par ailleurs que
" l'analyse a été limitée par la mise à
disposition tardive des données chiffrées définitives, qui
ne sont parvenues à la Cour qu'à la mi-septembre. ". La Cour
constate en outre " qu'elle n'est toujours pas en mesure de
présenter une analyse des comptes de l'ensemble des organismes de
sécurité sociale, puisque ces comptes n'étaient toujours
pas disponibles à la date d'approbation de ce rapport ". (Rapport
1998, p. 3).
48
AN, XI
ème
législature, n° 725.
49
Journal officiel, Débats Assemblée nationale,
2
ème
séance du 30 octobre 1998, p. 7755.
50
Journal officiel Débats Assemblée nationale, p.
7758.
51
Rapport commission des comptes de la sécurité
sociale, septembre 1998, p. 69.
52
Rapport commission des comptes de la sécurité
sociale, mai 1999, p. 43.
53
G. Arathoon et S. Corley, " Les lois de financement de
la sécurité sociale : l'inévitable
référence aux lois de finances ", Revue française des
finances publiques n° 64, novembre 1998, p. 98.
54
Rapport de la Cour des comptes 1998 sur la Sécurité
sociale, p. 60 et 61.
55
Selon l'expression de la Cour, rapport 1998 sur la
Sécurité sociale, p. 60.
56
L'ordonnance organique relative aux lois de finances n'a
été modifiée que deux fois en quarante ans : en 1971
et en 1995 (pour tenir compte de l'instauration de la session unique).
57
Selon l'expression utilisée par la déclaration du
Premier ministre du 15 novembre 1995.
58
Accord annoncé le 31 mai 1999, lors de la réunion
de la commission des comptes de la sécurité sociale.
59
Cf. deuxième partie, A -1. " Le rapport annexé
ne remplit pas sa fonction ".
60
Le Monde, 20 mai 1999, p. 11.
61
Audition devant la commission des Affaires sociales du 18 mai
1999, Bulletin des commissions n° 28 (1998-1999), p. 4167.
62
Cf. deuxième partie, A -3. " La multiplication de
grands débats extérieurs à la loi de financement brouille
leur contenu ".
63
Notre collègue M. Claude Huriet, président du
conseil de surveillance de la CNAF, a fait valoir l'urgence de cette
simplification dans le domaine des prestations familiales.
64
Rapport 1997 sur la sécurité sociale, p.145.
65
Publiée dans le Journal officiel Questions Sénat du
19 novembre 1998, page 3709.
66
Il faut lire " l'article de la loi fixant les
prévisions de recettes ".
67
Cf. annexe IV " Liste des impositions affectées
à la sécurité sociale ".
68
Sans compter les droits sur les tabacs, dont la recette est
partagée entre l'Etat et la CNAMTS.
69
Cf. deuxième partie B, 6.
70
Les objectifs de dépenses concernent les régimes de
plus de 20.000 cotisants, les prévisions de recettes, l'ensemble des
régimes. La masse financière que représentent les
régimes de moins de 20.000 cotisants n'est pas au demeurant
considérable (environ 3 milliards de francs).
71
cf. compte rendu de l'audition de M. Didier Banquy à
l'annexe I.
72
Débats Sénat, séance du 25 juin 1998, p.
3505.
73
Il est à noter que Force Ouvrière a repris
l'idée d'un débat d'orientation dans ses quarante propositions
sur la sécurité sociale annoncées le 15 septembre 1998.
74
Débats Sénat, séance du 25 juin 1998, p.
3540.
75
Rapport de la commission des comptes de la sécurité
sociale, mai 1999, p. 9.
76
Le journal " La Tribune " du 1
er
juin
1999 titrant : " Bercy saute à pieds joints par dessus le
déficit de la Sécu. " (p. 9).
77
Cf. compte rendu de l'audition de M. Didier Banquy,
sous-directeur à la direction du budget à l'annexe I.
78
Taxe prévue dans le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998, mais supprimée par le ministre
de l'économie et des finances en nouvelle lecture.
79
Voir le texte de cet article en annexe II.
80
Cf. supra A - 1 " Disposer des comptes à temps ".
81
Rapport AN n° 385 (XI
ème
législature) tome I, p. 185.
82
Avant publication, ces comptes rendus ont été
soumis aux personnes auditionnées et les corrections qu'elles ont, le
cas échéant, demandées ont été prises en
compte.
83
Le directeur général de la santé ; le
directeur des Hôpitaux ; le directeur de la Sécurité
sociale ; le directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie des
travailleurs salariés ; le directeur général de l'Institut
national de la santé et de la recherche médicale ; le directeur
de l'Ecole nationale de santé publique.
84
Rapport annexé à l'article premier du projet de
loi de financement
" sur les orientations de la politique de
santé et de sécurité sociale et les objectifs qui
déterminent les conditions de l'équilibre financier ".
85
C'est-à-dire la mission interministérielle
chargée d'harmoniser les plans comptables des organismes de
sécurité sociale décidée en mai 1998, et mise en
place à l'automne 1998.
86
Cf. rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale (septembre 1998), édition provisoire page
15 : " C'est pour la maladie que ce compte (1999) a clairement la
nature d'un objectif ambitieux. Il est difficile d'en apprécier la
validité tant que ne sont pas connues les mesures destinées
à permettre de l'atteindre.
" On peut cependant rappeler les ordres de grandeur suivants. Les comptes
de 1998 présentent un dérapage des dépenses maladie
à hauteur de 6 milliards de francs environ par rapport aux objectifs de
l'ONDAM voté. La poursuite à l'identique de ce dérapage,
en 1999, porterait les dépenses 12 milliards de francs au dessus du
niveau retenu dans le compte 1999 présenté dans ce rapport, soit
un total à résorber de 18 milliards de francs sur les
15 mois qui restent à courir. Supposer l'extrapolation du
dérapage est largement arbitraire car ceci suppose que les causes du
dérapage sont totalement stables et pérennes. Nous constatons ici
combien manque un diagnostic approfondi, allant au-delà de la simple
constatation de l'accélération des dépenses et s'attachant
à en déterminer les raisons. Le chiffre obtenu n'est qu'un ordre
de grandeur qu'il faudrait pouvoir préciser pour prendre la mesure des
efforts de natures diverses que suppose sa résorption. "
87
Cf. Art. L. 132-3-1 du code des juridictions
financières : -" La Cour des comptes peut être saisie
par la commission parlementaire compétente de toute question relative
à l'application des lois de financement de la sécurité
sociale et procède, dans ce cadre et à la demande de cette
commission, aux enquêtes sur les organismes soumis à son
contrôle. ".
88
Cf. Art. L.O. 132-3 du code des juridictions
financières : " Chaque année, la Cour des comptes
établit un rapport sur l'application des lois de financement de la
sécurité sociale. Ce rapport présente, en outre, une
analyse de l'ensemble des comptes des organismes de sécurité
sociale soumis à son contrôle et fait une synthèse des
rapports et avis émis par les organismes de contrôle placés
sous sa surveillance. ".
89
60 % des droits de consommation institués
à l'article 403 du code général des
impôts.