L'ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE EN FRANCE ENTRE 1980 ET 1997 Les leçons d'une dérive
MARINI (Philippe)
RAPPORT D'INFORMATION 413 (98-99) - COMMISSION DES FINANCES
Table des matières
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AVANT-PROPOS
-
I. LA CROISSANCE DE L'ENDETTEMENT PUBLIC EST VENUE D'UNE
POLITIQUE BUDGÉTAIRE TROP ACCOMMODANTE
- A. L'ACCUMULATION DE LA DETTE PUBLIQUE...
-
B. ... PROVIENDRAIT D'UNE POLITIQUE BUDGÉTAIRE
DÉLIBÉRÉE
- 1. Les conclusions de l'étude
-
2. Commentaires et précisions : l'impact des
politiques publiques et des circonstances économiques
- a) Un parti pris de méthode conduit à minimiser l'incidence des conditions économiques sur la formation des déficits publics et donc de l'endettement
- b) L'étude apporte un sérieux tempérament à sa conclusion principale selon laquelle l'endettement public proviendrait principalement d'un recours délibéré aux déficits
- c) L'étude permet d'identifier le rôle des orientations successives données à la politique des finances publiques
- II. L'ENDETTEMENT A APPAUVRI L'ÉTAT MAIS SERAIT SOUS CONTRÔLE
-
I. LA CROISSANCE DE L'ENDETTEMENT PUBLIC EST VENUE D'UNE
POLITIQUE BUDGÉTAIRE TROP ACCOMMODANTE
-
CONCLUSIONS DE L'ÉTUDE DE LA DIRECTION DE LA
PRÉVISION DU MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE, DES
FINANCES ET DE L'INDUSTRIE SUR L'ANALYSE DE
L'ÉVOLUTION DE L'ENDETTEMENT PUBLIC-
I. LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC A PRESQUE TRIPLÉ
ENTRE 1980 ET 1997
- A. LE RATIO D'ENDETTEMENT BRUT CONNAÎT UNE FORTE PROGRESSION DEPUIS 1991
- B. LA SITUATION FINANCIÈRE DES ADMINISTRATIONS FRANÇAISES APPARAÎT RELATIVEMENT FAVORABLE PAR RAPPORT AUX AUTRES PAYS EUROPÉENS AU REGARD DES STATISTIQUES DE DETTE BRUTE
- C. LA PART DES OBLIGATIONS ET DES TITRES DU MARCHÉ MONÉTAIRE S'EST FORTEMENT ACCRUE DANS LE PASSIF PUBLIC
-
II. LA PROGRESSION DE L'ENDETTEMENT BRUT EST
PRINCIPALEMENT DUE AUX DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
- A. L'ENDETTEMENT BRUT PEUT ÊTRE DÉCOMPOSÉ SUIVANT 4 DÉTERMINANTS
- B. LA PROGRESSION DU RATIO D'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
- C. LES DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS ONT ATTEINT EN MOYENNE 1 POINT DE PIB ENTRE 1980 ET 1997
- D. LE COÛT NET DES ACQUISITIONS DE CRÉANCES ENTRE 1980 ET 1997 REPRÉSENTE 3,3 POINTS DE PIB EN 1997
-
III. LE NIVEAU ÉLEVÉ DU COÛT MOYEN
RÉEL DE LA DETTE DEPUIS LA SECONDE MOITIÉ DES ANNÉES 1980
A CONTRIBUÉ AU RENFORCEMENT DU POIDS DE L'ENDETTEMENT PUBLIC
- A. SI LES TAUX D'INTÉRÊT AVAIENT ÉTÉ ÉGAUX AU TAUX DE CROISSANCE DU PIB DE 1980 À 1997, LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC AURAIT À PEINE DÉPASSÉE 40 POINTS DE PIB EN 1997
- B. LE RALENTISSEMENT DES PRIX AU COURS DES ANNÉES 1980 A TRANSITOIREMENT ENTRAÎNÉ UNE AUGMENTATION DU COÛT RÉEL DES EMPRUNTS EN COURS
- IV. LA RÉDUCTION DU PATRIMOINE NET DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AURAIT SERVI À FINANCER DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET DE TRANSFERT
- V. LA BAISSE GRADUELLE DU DÉFICIT PUBLIC PERMETTRA UNE DIMINUTION DU RATIO D'ENDETTEMENT AU SENS DE MAASTRICHT
-
I. LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC A PRESQUE TRIPLÉ
ENTRE 1980 ET 1997
-
ANNEXE 1
LA DETTE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AU SENS DE MAASTRICHT PRÉSENTE PLUSIEURS PARTICULARITÉS QUI VIENNENT PERTURBER LA LISIBILITÉ DES AJUSTEMENTS STOCK-FLUX -
ANNEXE 2
DÉCOMPOSITION DE L'ENDETTEMENT BRUT
SELON 4 DÉTERMINANTS -
ANNEXE 3
LE SOLDE STABILISANT LE RATIO
D'ENDETTEMENT PUBLIC -
ANNEXE 4
MÉTHODE DE VALORISATION DES ACTIFS FINANCIERS ET NON FINANCIERS EN COMPTABILITÉ NATIONALE -
ANNEXE 5
IMPORTANCE DES DÉCALAGES COMPTABLES ET DES CRÉDITS COMMERCIAUX À L'ACTIF - EXAMEN EN COMMISSION
N°
413
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 juin 1999
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur l' évolution de la dette publique (1980-1997) ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Finances publiques. |
AVANT-PROPOS
Le
présent rapport d'information est consacré à la
présentation des conclusions d'une étude réalisée
par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie
à la demande de la commission des finances du Sénat portant sur
l'analyse rétrospective de la dette publique depuis 1980.
Elle renoue avec une heureuse tradition de collaboration entre les services
techniques du ministère et ceux mis à la disposition des membres
de la commission des finances. Elle démontre par là qu'une telle
collaboration est possible dès lors que les responsabilités de
chacun sont clairement identifiées. Elle invite à prolonger
à l'avenir ce mode de relations.
Elle démontre aussi que la transparence de l'exécutif
vis-à-vis du Parlement est utile à l'intérêt
général.
Les leçons tirées de cette étude par votre commission
n'engagent naturellement pas le ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie.
Les commentaires ci-après mettent d'autre part l'accent sur
l'intérêt d'une approche patrimoniale des comptes de l'Etat. Il
est à souhaiter que les diverses commissions créées en ce
domaine débouchent enfin sur de véritables progrès
méthodologiques. En effet, l'analyse de la dette n'a de véritable
signification que par rapport à l'évolution des actifs qu'elle
finance. A cet égard, le principal enseignement de l'étude est
bien de démontrer que la spirale de l'endettement croissant s'est
accompagnée, depuis 1980, d'un appauvrissement très important du
patrimoine public..
Quelques précisions sur la méthodologie employée
La
notion de dette publique contenue dans le présent rapport est conforme
à la définition du critère du traité de Maastricht.
Elle recouvre donc
les engagements bruts des administrations publiques
à leur valeur faciale et sur la base d'un bilan consolidé
.
Plusieurs conséquences en découlent dont deux sont
importantes :
- les estimations ne prennent pas en compte les variations de la valeur de
marché des engagements, consécutives aux évolutions de
taux d'intérêt En période de baisse des taux
d'intérêt, ceci a pour effet de réduire le niveau apparent
de la dette
1(
*
)
;
- les engagements du secteur public ne sont pas comptabilisés,
même si pour certains d'entre eux ils apparaissent entièrement
équivalents à des éléments de dette publique. Sur
ce sujet, d'importantes évolutions sont en cours qui se traduiront par
une révision parfois très nette des niveaux de dette publique.
L'étude s'appuie sur une méthode expliquant la variation de
la dette à partir de 4 variables : le stock de dette initial, les
soldes primaires structurels, les soldes conjoncturels et le financement des
flux nets de créances
diminué des revenus financiers
procurés par les créances financières des administrations
publiques. Ces différentes notions doivent être sommairement
précisées.
On rappelle que le
solde primaire
est l'écart entre les recettes
et les dépenses, celles-ci étant diminuées des charges
d'intérêt. Un solde peut se décomposer en deux parties,
conjoncturelle ou structurelle. La partie
conjoncturelle
d'un solde est
celle qui résulte mécaniquement de l'évolution de
l'environnement économique, tandis que sa partie
structurelle
,
obtenue par différence, et censée refléter des choix de
politique des finances publiques constitue l'élément permanent du
solde à conjoncture donnée.
Cette distinction, qui est au centre de l'étude, est très
délicate à établir. Une grande diversité de
méthodes, toutes discutées dans les forums économiques
internationaux, s'offre à l'analyste. Les sujets de débat sont
nombreux mais ils portent principalement sur la référence
conjoncturelle à partir de laquelle estimer la partie conjoncturelle des
soldes -croissance tendancielle ou croissance potentielle
(1)
-
et sur les composantes des finances publiques que l'on peut estimer sensibles
aux variations de conjoncture. Sur ces points le parti pris
méthodologique de l'étude peut être jugé restrictif
puisqu'on s'y réfère à la croissance tendancielle et que
seules les recettes publiques sont considérées comme
dépendantes des variations conjoncturelles.
En ce qui concerne
les acquisitions de créances
, il s'agit
d'estimer l'impact de leur financement sur la dette publique brute. Il
convient, pour apprécier leur impact sur la dette, de diminuer les
acquisitions de créances des cessions de créances qui ont pu les
financer puisqu'alors la variation du patrimoine de l'Etat est nulle. Il est
plus contestable de les diminuer des produits attachés à la
détention d'actifs financiers par les administrations publiques. Ce
choix peut se recommander d'une certaine logique d'estimation de la valeur du
patrimoine public. Mais l'on aurait aussi bien pu traiter ces produits comme
des éléments courants du revenu des administrations publiques,
dénués d'une vocation naturelle à couvrir les charges
d'opérations patrimoniales. Cela aurait d'ailleurs été
conforme au traitement budgétaire de ces produits et à celui qui
leur est réservé en comptabilité nationale.
(1) La croissance tendancielle est la croissance
observée
sur
longue période. La croissance potentielle est la croissance qu'on aurait
constatée si les facteurs de production disponibles avaient
été pleinement employés sans susciter
d'inflation.
I. LA CROISSANCE DE L'ENDETTEMENT PUBLIC EST VENUE D'UNE POLITIQUE BUDGÉTAIRE TROP ACCOMMODANTE
A. L'ACCUMULATION DE LA DETTE PUBLIQUE...
1. La croissance de l'endettement public...
L'endettement public brut est passé de 21 à 58,1 points de produit intérieur brut (PIB) entre 1980 et 1997.
Ratio d'endettement des administrations publiques au sens de Maastricht
(En
points de PIB)
Sources : Banque de France et Direction de la
prévision
La dette
brute est passée de 589 milliards de francs en 1980 à
4.727 milliards de francs en 1997, soit une multiplication par plus de 8
et un accroissement annuel moyen de plus de 13 %. Sur la même
période, le PIB ne s'est, lui, élevé que de 6,4 %
l'an en moyenne.
La dette publique par actif occupé est ainsi passée de
27.084 francs en 1980 à 212.163 francs en 1997. Elle
représente désormais plus de 2 fois le revenu disponible
annuel par habitant.
2. ... a été essentiellement le fait de l'Etat...
L'accumulation de la dette publique a principalement été créée par l'Etat.
Endettement public
(en % du PIB) (1)
|
1980 |
1987 |
1991 |
1997 |
Etat |
22,3 |
32,6 |
33,8 |
55,8 |
Organismes divers d'administration centrale |
0,9 |
1,8 |
1,4 |
5,4 |
Administrations publiques locales |
9,8 |
9,9 |
9,5 |
10,2 |
Administrations de sécurité sociale |
4,7 |
2,9 |
3,5 |
7,2 |
Administrations publiques (comptabilité nationale, " base 80 ") |
37,6 |
47,2 |
48,2 |
78,5 |
Administrations publiques (au sens de Maastricht) |
21,0 |
33,8 |
35,6 |
58,1 |
( 1) La comptabilisation en comptabilité nationale et selon le traité de Maastricht fait apparaître deux écarts : la première est en valeur de marché et elle n'est pas consolidée.
Source : Banque de France
Responsable de 59 % du total de la dette en 1980, l'Etat
en
portait plus de 71 % en 1997.
Les collectivités locales, qui ont pourtant au cours de la
période dû assumer des transferts de compétences massifs
mal compensés, sont parvenues à contenir leur endettement
malgré l'importance des investissements publics qu'elles
assurent.
3. ... et a pesé sur ses marges de manoeuvre budgétaires
La structure de la dette publique s'est beaucoup modifiée au cours de la période.
Répartition de l'encours de dettes par catégorie
|
Répartition en % |
En points de PIB |
||||
|
1980 |
1990 |
1997 |
1980 |
1990 |
1997 |
Moyens de paiement et autres liquidités |
23,7 % |
14,2 % |
7,9 % |
8,9 |
6,7 |
6,2 |
Titres du marché monétaire |
7,9 % |
18,0 % |
20,6 % |
3,0 |
8,4 |
16,1 |
Obligations |
18,9 % |
29,5 % |
41,6 % |
7,1 |
13,8 |
32,7 |
Prêts à court terme |
26,0 % |
18,8 % |
15,8 % |
9,8 |
8,8 |
12,4 |
Crédits à moyen et long terme |
23,4 % |
19,4 % |
14,2 % |
8,8 |
9,1 |
11,1 |
Total |
100 % |
100 % |
100 % |
37,6 |
46,9 |
78,5 |
Source : Comptes nationaux, " base 80 "
La durée moyenne de la dette s'est allongée, les prêts
à court terme étant remplacés par un financement
obligataire.
Elle s'est renchérie, les moyens de paiement peu onéreux qui
représentaient un quart du financement en 1980 n'en couvrant plus que 8
% en 1997.
Cette modification de la structure de la dette publique est manifeste d'une
situation où l'Etat s'est trouvé de plus en plus soumis aux
contraintes d'un emprunteur quelconque.
Le poids des intérêts de la dette publique s'est ainsi
considérablement accru.
Poids
des intérêts versés dans le PIB
(Comptabilité
européenne utilisée lors de la notification du
1
er
mars 1999)
Les charges d'intérêt supportées par le budget de l'Etat qui absorbaient 5 % des recettes fiscales nettes en 1980 ont atteint 19,6 % des recettes fiscales en 1996. Un alourdissement considérable des contraintes budgétaires s'en est suivi.
La
dérive des charges de la dette a engendré un effet " boule
de neige " que seuls des excédents primaires auraient pu
contrecarrer. La progression spontanée des intérêts
entraîne en effet mécaniquement une augmentation des
déficits publics qui à son tour, est source d'endettement
supplémentaire à moins que le solde des autres opérations
budgétaires (recettes - dépenses hors intérêts) ne
vienne l'équilibrer.
Cet équilibrage suppose soit d'accroître les impôts, soit de
diminuer les dépenses.
On observera à ce stade que cette contrainte s'est
considérablement renforcée au tournant des années 90 mais
que, depuis 1997, elle s'atténue.
B. ... PROVIENDRAIT D'UNE POLITIQUE BUDGÉTAIRE DÉLIBÉRÉE
Cet aspect de l'étude contient des conclusions qui, d'une part, suscitent des questions et, d'autre part, sont affectées d'un parti pris de présentation qui conduit à sous-estimer certains enseignements forts des données rassemblées par l'étude.
1. Les conclusions de l'étude
a) La dérive de l'endettement aurait été provoquée par un recours délibéré au déficit budgétaire.
L'étude impute la responsabilité principale de
l'accumulation de la dette publique à des déficits primaires
structurels excessifs.
La contribution des quatre variables identifiées comme potentiellement
responsables de la hausse du niveau de la dette publique est
présentée de manière éloquente dans le tableau
ci-dessous.
Contributions à la progression du ratio d'endettement brut
(en points de PIB)
|
31/12/79 |
31/12/97 |
Dette initiale |
21,7 |
24,7 |
Déficits primaires structurels |
|
29,3 |
Déficits conjoncturels |
|
0,9 |
Coût net des créances dont : |
|
3,3 |
- flux nets de créances |
|
34,6 |
- revenus des actifs financiers |
|
- 31,2 |
Total |
21,7 |
58,1 |
Calculs DP
La
progression de l'endettement public dans le PIB n'aurait été que
de 7,1 points de PIB
2(
*
)
si les soldes primaires
structurels avaient été équilibrés.
Une conclusion implicite semble s'imposer : les contraintes de
l'environnement économique n'expliquent pas la croissance de
l'endettement public.
L'impact des déficits conjoncturels tel qu'il est présenté
est, en effet, sur l'ensemble de la période, quasi-inexistant puisqu'il
s'élève en tout et pour tout à 0,9 point de PIB.
Cette conclusion est de nature à susciter une question de fond.
Si l'environnement économique a été tel que ses effets sur
l'endettement public peuvent être jugés nuls, la
légitimité économique des déficits publics
établie, en théorie, par leurs effets supposés de relance
n'est-elle pas remise en cause à son tour ?
b) L'accumulation de l'endettement public n'aurait pas été régulière au cours de la période
Trois
phases sont en effet distinguées dans l'étude :
de 1980 à 1987, le ratio augmente en moyenne de 2 points de PIB
par an ;
entre 1987 et 1991, la progression de ce ratio est beaucoup plus
modérée et ne s'élève en moyenne qu'à
0,5 point de PIB par an ;
de 1991 à 1997, la progression du ratio d'endettement brut est
très dynamique : + 3 points de PIB par an en moyenne.
Enfin, une quatrième phase est annoncée correspondant aux
années 1998 et 1999, présentées comme devant rompre avec
cette dernière phase et qui enregistreraient une nette réduction
de la progression du ratio d'endettement (+ 0,6 point en 2 ans).
2. Commentaires et précisions : l'impact des politiques publiques et des circonstances économiques
Les analyses soutenues dans l'étude ici présentée appellent deux nuances importantes et un complément d'appréciation afin d'examiner plus justement les conditions dans lesquelles l'endettement public a pu autant déraper.
a) Un parti pris de méthode conduit à minimiser l'incidence des conditions économiques sur la formation des déficits publics et donc de l'endettement
Si
l'impact des déficits conjoncturels sur la dette publique est aussi
faible dans l'étude, c'est parce qu'y est soutenue l'idée selon
laquelle l'économie française aurait, au cours de la
période, connu une croissance moyenne conforme à sa vocation.
L'effet des conditions économiques sur les finances publiques est alors
nécessairement quasi-nulle, par construction.
Dans l'étude, les soldes conjoncturels varient selon les
périodes. Ils sont tantôt positifs, tantôt négatifs
en fonction des évolutions conjoncturelles. Mais comme les soldes
conjoncturels sont calculés sur la base de la
croissance tendancielle
de l'économie française, elle-même calculée
à partir de l'alternance des phases d'expansion et de ralentissement qui
y sont décrites, la quasi-absence d'un déficit conjoncturel au
total peut paraître tautologique.
Une autre référence aurait été possible pour
calculer l'impact des conditions économiques sur les déficits
publics. On aurait pu s'appuyer sur l'écart entre la croissance
observée et la croissance potentielle. Une telle méthode, sans
doute plus significative de l'impact de l'environnement économique sur
les finances publiques, aurait permis de révéler les contraintes
de leur gestion liées à la composante économique des
soldes publics.
Le graphique ci-dessous rend compte de l'évolution de l'écart
entre le rythme effectif de croissance et la croissance potentielle. Il donne
un aperçu du renforcement de cette contrainte après 1992.
(1)
L'écart de croissance devient défavorable après 1992.
Source : Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et
des finances publiques.
b) L'étude apporte un sérieux tempérament à sa conclusion principale selon laquelle l'endettement public proviendrait principalement d'un recours délibéré aux déficits
La
responsabilité des déficits primaires excessifs dans
l'augmentation de l'endettement public est tempérée, mais pas
exonérée, par la prise en considération de l'impact du
niveau des taux d'intérêt sur la progression de la part de la
dette dans le PIB.
On rappelle que, au cours de la période sous revue, les taux
d'intérêt réels ont été constamment
supérieurs au taux de croissance réel à partir de 1981,
marquant ainsi une rupture par rapport aux années 70.
Cet
écart s'est considérablement creusé à partir de
1990 pour se réduire beaucoup depuis 1997.
Il a eu des effets importants sur le coût moyen de la dette.
Évolution des taux d'intérêts
réels et
du taux de croissance réelle.
Les deux
graphiques ci-dessus démontrent que le coût moyen de la dette suit
avec un certain retard l'évolution des taux d'intérêt.
Ainsi, la baisse des taux d'intérêt observée depuis 1995 ne
s'était pas encore entièrement traduite dans la réduction
du coût de la dette en 1997 mais devrait contribuer à
alléger significativement ce coût à l'avenir.
Ces graphiques démontrent aussi que le coût de la dette,
négatif en début de période du fait des nivaux d'inflation
alors atteints, s'est beaucoup accru sous la double influence de la
désinflation et de la hausse des taux d'intérêt nominaux.
Il a dépassé le taux de croissance à partir de 1983, ce
qui a accru les contraintes pesant sur la politique budgétaire.
L'effet " boule de neige " de la dette s'est amplifié,
augmentant le niveau des excédents primaires nécessaires pour
l'endiguer, alors même que les ressorts de la croissance qui auraient pu
favoriser ces excédents faisaient défaut
.
L'ampleur de la contrainte résultant de cette situation est
illustrée par une simulation montrant que, si le niveau des taux
d'intérêt avait été égal à celui du
taux de croissance, la dérive de l'endettement public aurait
été à peu près moitié moindre.
Décomposition du ratio d'endettement brut de 1997
(en points de PIB)
|
|
Poids pour des taux d'intérêt égaux au taux de croissance du PIB |
|
Dette initiale |
24,7 |
21,7 |
- 2,9 |
Déficits primaires structurels |
29,3 |
17,1 |
- 12,2 |
Déficits conjoncturels |
0,9 |
1,6 |
0,7 |
coût net des créances |
3,3 |
- 0,1 |
- 3,4 |
Total |
58,1 |
40,3 |
- 17,8 |
On doit
ajouter que l'impact de l'écart entre taux d'intérêt et
taux de croissance est concentré sur la fin de période. Entre
1991 et 1997, il atteint 14 points de PIB sur un total de
17,8 points, ce qui démontre assez l'ampleur des risques pris dans
la période antérieure.
Cette illustration ne doit cependant pas exonérer les déficits
publics de leur responsabilité dans l'augmentation de la dette publique
pour deux raisons principalement :
l'étude ne rend pas compte de l'effet qu'ont pu avoir les
déficits élevés sur la hausse des taux
d'intérêt. Or il est probable qu'un tel effet s'est produit.
compte tenu de l'environnement monétaire de la période, le
niveau de ces déficits se révèle inapproprié.
Plus généralement, la démonstration apportée par
l'étude est que le gonflement de la dette publique, comme celui de toute
dette d'ailleurs, expose le débiteur à un risque de taux
susceptible de le placer dans une situation critique.
c) L'étude permet d'identifier le rôle des orientations successives données à la politique des finances publiques
c1)
L'évolution des déficits publics
Le poids de la dette publique dans le PIB s'est accru de 12,8 points entre
1980 et 1987, puis de 1,8 point seulement entre 1987 et 1991 et, enfin, de
22,5 points entre 1991 et 1997.
Ces données comptables ne rendent cependant pas compte de
l'évolution des facteurs d'accroissement de la dette publique.
A partir du graphique ci-dessus il est possible de distinguer trois
périodes :
la première, de 1981 à 1986, où le solde conjoncturel est
proche de l'équilibre alors que le solde primaire structurel est
largement déficitaire ;
la deuxième, entre 1988 et 1991, où le solde conjoncturel
devient nettement excédentaire mais où le solde primaire
structurel est significativement déficitaire ;
la troisième enfin, à partir de 1993, où le solde
conjoncturel accuse de profonds déficits alors que les déficits
primaires structurels sont réduits et se transforment en
excédents à partir de 1996.
Cette périodisation est de nature à mieux identifier la
responsabilité dans la dérive de la dette publique des
décisions de politique budgétaire qui ont été
prises par chaque gouvernement.
Elle montre ainsi qu'un jugement global sur la responsabilité respective
de la conjoncture et des politiques budgétaires sur l'augmentation de la
dette publique peut être établi. A partir de 1993, les
déficits conjoncturels sont responsables du surcroît d'endettement
à peu près à parité avec les déficits
structurels, que les gouvernements en fonction à partir de cette date se
sont efforcés de réduire.
Il apparaît ainsi que, sans nécessité économique,
les marges de manoeuvre engendrées par la bonne conjoncture des
années 89 à 91 ont été dépensées au
lieu d'être employées à réduire l'endettement public
que les importants déficits délibérés du
début des années 80 et l'extension du secteur public avaient
suscité
3(
*
)
.
c2) Le rôle des politiques relatives au secteur public
A côté des déficits délibérés, il faut
aussi prendre en compte l'évolution des acquisitions nettes de
créances par l'Etat, c'est-à-dire l'évolution patrimoniale
du secteur public.
Flux nets de créances de l'Etat
(En points de PIB)
Le
financement de ces acquisitions a impliqué un endettement global de
34,6 points de PIB au cours de la période, soit la somme de
l'endettement qu'il a nécessité et des charges
d'intérêt associées.
Le graphique ci-dessus démontre que ce coût est imputable pour
l'essentiel au début des années 80.
Il a d'ailleurs entraîné des charges cumulatives puisque le
patrimoine financier des administrations publiques a un rendement net
négatif.
Le poids de l'interventionnisme public du début des années 80,
puis de la politique dite du " ni-ni ", sur la dette est, d'ailleurs,
minoré dans l'étude par une convention contestable.
On rappelle d'abord qu'affecter le produit des actifs publics à la
couverture des besoins de financement des acquisitions d'actifs constitue un
parti pris de méthode dont la justification est contestable.
Mais il faut surtout souligner que l'évaluation des produits des actifs
financiers publics opérée dans l'étude a pour effet de
réduire le coût en endettement supplémentaire des
acquisitions intervenues au cours de la période sous revue.
L'étude qui évalue ces produits à 31,2 points de PIB,
conclut que l'endettement brut causé par les acquisitions d'actifs
publics ne s'est élevé qu'à 3,3 points de PIB, soit
la différence entre la charge de ces achats et les revenus du patrimoine
public.
Il faut alors noter que, pour calculer les produits courants du patrimoine
public, sont cumulés les revenus du patrimoine constitué avant
1980 avec ceux des actifs qui ont été acquis depuis.
Ce choix renforce la critique de méthode mentionnée plus haut. Il
minore beaucoup la charge d'endettement supplémentaire engendrée
par le gonflement du secteur public.
Face à cette gestion contestable des finances publiques, un
changement de cap est intervenu à partir de 1994.
Il apparaît que, dès cette année, l'orientation de la
politique budgétaire a permis progressivement de contrecarrer l'effet
sur les finances publiques d'une conjoncture déprimée.
La réduction continue des déficits structurels primaires
s'étant prolongée, à partir de 1996 des excédents
structurels primaires compensent de plus en plus complètement les
déficits conjoncturels.
L'accroissement de la dette a ainsi pu être freiné alors que le
déficit de croissance atteignait son comble, comme dans l'ensemble des
pays européens, et alors que l'écart entre le coût moyen de
la dette et le taux de croissance provoquait une dérive spontanée
particulièrement rapide de la dette.
A ce sujet, il convient en effet de préciser que si les taux
d'intérêt et de croissance avaient été identiques
entre 1991 et 1997, la dette publique n'aurait augmenté que de
8,5 points entre ces dates.
II. L'ENDETTEMENT A APPAUVRI L'ÉTAT MAIS SERAIT SOUS CONTRÔLE
L'endettement public a suscité une situation
d'endettement
net qui, selon l'étude, atteindrait des proportions relativement
raisonnables et qui serait en voie de réduction.
L'augmentation de la dette brute des administrations publiques s'est en effet
accompagnée d'une dégradation du bilan de l'Etat.
L'étude insiste sur la relativité de cette contre-performance
qui, moins accusée que dans le reste de l'Europe, serait en passe
d'être maîtrisée. Ces dernières appréciations
appellent de sérieuses nuances.
A. UNE DÉGRADATION DU BILAN DE L'ÉTAT
1. La hausse de l'endettement net...
L'augmentation de la dette publique brute n'a pas
été
compensée par une accumulation d'actifs publics, bien au contraire.
Les actifs détenus par les administrations publiques, qui
s'élevaient en 1980 à 90,4 points du PIB, ne représentent
plus que 86,7 points du PIB en 1997. Les actifs non financiers seraient
restés stables (50 points de PIB) quand les actifs financiers auraient
diminué, passant de 40,4 points de PIB en 1980 à 36,7 points en
1997.
Comme, de son côté, l'endettement brut a beaucoup
augmenté, le bilan des administrations publiques s'est fortement
dégradé.
La valeur nette du patrimoine qui atteignait 53,3 points de PIB en 1980 n'est
plus que de 7,6 point de PIB en 1997.
Cette dégradation est encore plus marquée si l'on s'en tient au
bilan des actifs financiers. La situation à peu près
équilibrée de 1980 a fait place à un endettement net
à hauteur de 41,8 % du PIB en 1997.
Celui-ci résulte du tassement de la valeur des actifs financiers
(- 3,7 points de PIB) et de l'accumulation de l'endettement public
(+ 37,1 points).
Le tableau ci-après détaille l'évolution des actifs
financiers des administrations publiques.
Encours de créances
(en points de PIB)
|
1980 |
1997 |
Etat |
25,5 |
16,0 |
Organismes divers d'administration centrale |
2,4 |
6,0 |
Administrations publiques locales |
4,5 |
5,6 |
Administrations de sécurité sociale |
8,3 |
9,1 |
Total |
40,7 |
36,7 |
Moyens de paiement et autres liquidités |
6,1 |
4,5 |
Actions et autres participations |
16,2 |
10,3 |
Prêts de court à long terme |
16,5 |
19,6 |
Autres |
1,9 |
2,4 |
Total |
40,7 |
36,7 |
Source : Comptes nationaux " base 80 "
La baisse des créances financières est entièrement
imputable aux variations des créances de l'État qui
résultent des administrations publiques de la réduction de la
valeur de ses participations dans les entreprises publiques. Celle-ci ne
provient pas seulement des cessions de titres publics qui sont intervenues mais
aussi d'une réduction de la valeur des actifs financiers
4(
*
)
.
2. ....montre que l'endettement a servi à financer des dépenses courantes
L'augmentation considérable de l'endettement net
apporte
la démonstration que l'endettement brut a servi à financer des
dépenses courantes et non pas des investissements.
La charge nette des acquisitions de créances par les administrations
publiques a été limitée à 3,3 points de PIB entre
1980 et 1997 alors que l'endettement brut augmentait de 37,1 points de PIB.
Il faut ici souligner une conclusion importante de l'étude selon
laquelle les actifs financiers publics ont pour effet de dégrader
structurellement la situation financière des administrations publiques.
Le rendement moyen de leurs actifs financiers est en effet inférieur en
moyenne de 4 points au coût moyen de la dette publique depuis 1980.
Une telle situation inviterait à analyser plus en détail les
causes de cet écart et en particulier à analyser les performances
du secteur public en le comparant avec le coût du passif de
l'Etat.
B. UNE DÉGRADATION SEULEMENT RELATIVE ?
La nette
dégradation de l'endettement public fait l'objet d'appréciations
nuancées dans l'étude : la situation serait en France
meilleure que dans le reste de l'Europe ; elle serait désormais
sous contrôle.
Ces deux jugements appellent en eux-mêmes des observations
critiques.
1. La dérive de l'endettement public a été particulièrement accusée en France
Au
regard du critère de dette publique dans le PIB prévu par le
traité de Maastricht, il est vrai que la France occupait en 1997 une
situation relativement moins mauvaise que celle de nombre de ses partenaires de
l'Union européenne.
Cette situation doit toutefois être appréciée en
tendance : la dérive de la dette a été en France
relativement plus accusée que chez ses partenaires malgré une
situation de départ moins tendue et elle continue de se dégrader
aujourd'hui, alors que la dérive est inversée dans tous les pays
de l'Union à l'exception du cas particulier du Luxembourg.
Ainsi, la France est le pays dans lequel le ratio dette 1996/dette 1991 est le
plus élevé d'entre les principaux pays européens
comparables.
Dettes brutes des administrations publiques au sens de Maastricht
|
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
Allemagne |
41,5 |
44,1 |
48,2 |
50,1 |
58,2 |
58,1 |
Royaume-Uni |
35,7 |
41,9 |
48,5 |
50,1 |
51,5 |
51,5 |
Italie |
101,3 |
108,4 |
119,4 |
125,4 |
124,9 |
124,4 |
Belgique |
130,1 |
131,1 |
137,2 |
136,1 |
134,3 |
132,3 |
Pays-Bas |
78,9 |
79,9 |
81,4 |
78,1 |
78,1 |
77,1 |
Espagne |
45,8 |
48,3 |
59,9 |
62,3 |
64,6 |
65,2 |
France |
35,7 |
39,6 |
45,8 |
48,5 |
51,2 |
52,8 |
Cette situation apparaît comme le reflet d'une capacité d'ajustement budgétaire globalement plus réduite en France qu'ailleurs et notamment qu'en Allemagne malgré les perturbations résultant pour ce pays de son unification.
Capacité ou besoin (-) de financement des administrations des pays industrialisés
(en % du PIB)
|
1985 |
1986 |
1987 |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
France |
- 2,9 |
- 2,7 |
- 1,9 |
- 1,7 |
- 1,2 |
- 1,6 |
- 2,2 |
- 3,8 |
- 5,7 |
- 5,6 |
- 5,0 |
- 4,1 |
Allemagne |
- 1,2 |
- 1,3 |
- 1,9 |
- 2,2 |
0,1 |
- 2,1 |
- 3,3 |
- 2,8 |
- 3,2 |
- 2,4 |
- 3,3 |
- 3,4 |
Royaume-Uni |
- 2,8 |
- 2,4 |
- 1,4 |
1,0 |
0,9 |
- 1,2 |
- 2,6 |
- 6,3 |
- 7,8 |
- 6,9 |
- 5,5 |
- 4,9 |
Italie |
- 12,6 |
- 11,6 |
- 11,0 |
- 10,7 |
- 9,9 |
- 10,9 |
- 10,2 |
- 9,5 |
- 10,0 |
- 9,6 |
- 7,0 |
- 6,8 |
Belgique |
- 8,7 |
9,2 |
- 7,4 |
- 6,6 |
- 6,3 |
- 5,4 |
- 6,5 |
- 7,2 |
- 7,5 |
- 5,0 |
- 4,1 |
- 3,4 |
Pays-Bas |
- 3,9 |
- 3,5 |
- 5,1 |
- 4,2 |
- 4,7 |
- 5,0 |
- 2,9 |
- 3,9 |
- 3,2 |
- 3,4 |
- 4,0 |
- 2,8 |
Espagne |
- 6,9 |
- 6,0 |
- 3,1 |
- 3,3 |
- 2,8 |
- 4,1 |
- 5,4 |
- 3,6 |
- 6,8 |
- 6,3 |
- 6,6 |
- 4,5 |
UE |
- 4,8 |
- 4,5 |
- 3,9 |
- 4,0 |
- 2,8 |
- 3,7 |
- 3,6 |
- 5 ,9 |
- 6,7 |
- 6,1 |
- 5,4 |
- 4,7 |
Etats-Unis |
- 3,1 |
- 3,4 |
- 2,5 |
- 2,0 |
- 1,5 |
- 2,5 |
- 3,2 |
- 4,4 |
- 3,6 |
- 2,3 |
- 2,0 |
- 1,5 |
Canada |
- 6,8 |
- 5,4 |
- 3,8 |
- 2,5 |
- 2,9 |
- 4,1 |
- 6,6 |
- 7,4 |
- 7,3 |
- 5,3 |
- 4,1 |
- 1,8 |
Japon |
- 0,8 |
- 0,9 |
0,5 |
1,5 |
2,5 |
2,9 |
3,0 |
1,4 |
- 1,6 |
- 2,3 |
- 3,7 |
- 4,4 |
OCDE (*) |
- 3,5 |
- 3,4 |
- 2,4 |
- 1,8 |
- 1,4 |
- 2,3 |
- 2,4 |
- 3,9 |
- 4,5 |
- 3,8 |
- 3,6 |
- 3,2 |
(*) 15 pays : CEE + Etats-Unis + Canada + Japon
2. L'endettement public serait désormais sous contrôle
a) Les scénarii du " programme de stabilité "
Le tableau ci-dessous décrit l'évolution de l'endettement public associée au programme de stabilité notifié par le gouvernement à la Commission européenne.
Ratio d'endettement
(en points de PIB)
|
|
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Hypothèse prudente |
Dette brute |
58,2 |
58,9 |
59,0 |
58,8 |
58,3 |
Croissance 2000-2002
|
Dette nette des actifs détenus par le Fonds de réserve |
58,2 |
58,8 |
58,8 |
58,4 |
57,6 |
Hypothèse favorable |
Dette brute |
58,2 |
58,7 |
58,5 |
57,9 |
57,1 |
Croissance 2000-2002
|
Dette nette des actifs détenus par le Fonds de réserve |
58,2 |
58,7 |
58,1 |
57,1 |
55,6 |
Note : le relèvement du ratio dette sur PIB en
1999
dans le scénario de croissance de 2,5 % par rapport à la
projection du Rapport économique, social et financier -58,7-
résulte de l'hypothèse de croissance pour l'année
1999 : 2,4 % contre 2,7 % dans le rapport.
Le ratio d'endettement brut qui, entre 1998 et 2002, ne diminuerait que dans
l'hypothèse d'une croissance soutenue de 3 % l'an en moyenne serait
stabilisé si la croissance atteignait 2,5 % entre 2000 et 2002.
Ces
résultats seraient obtenus grâce à la réduction des
déficits publics plus ou moins rapide selon la qualité de
l'environnement économique.
Solde des administrations publiques
(en points PIB)
|
|
|
Hypothèse prudente |
Hypothèse favorable |
||||
|
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2000 |
2001 |
2002 |
Capacité / besoin de financement |
|
|
|
|
|
|
|
|
Administrations publiques |
- 2,9 |
- 2,3 |
- 2,0 |
- 1,6 |
- 1,2 |
- 1,7 |
- 1,2 |
- 0,8 |
Administrations centrales |
- 2,9 |
- 2,6 |
- 2,3 |
- 2,1 |
- 1,8 |
- |
- |
- |
Etat |
- 3,05 |
- 2,7 |
- 2,5 |
- 2,2 |
- 2,0 |
- |
- |
- |
Organismes divers d'administration centrale |
0,15 |
0,1 |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
- |
- |
- |
Administrations de sécurité sociale |
- 0,15 |
0,15 |
0,2 |
0,2 |
0,3 |
- |
- |
- |
Administrations publiques locales |
0,15 |
0,15 |
0,1 |
0,2 |
0,3 |
- |
- |
- |
Solde primaire
|
0,6 |
1,1 |
1,3 |
1,5 |
1,8 |
1,5 |
1,9 |
2,2 |
Source : pour 1998 et 1999, Rapport économique,
social et financier. Pour les années 2000 à 2002, projections du
gouvernement. La décomposition des soldes par sous-secteur, dans le
scénario favorable, dépendra des choix faits en matière de
réduction des prélèvements obligatoires.
Avec une croissance de 2,5 %, le déficit serait ramené de
2,3 à 1,2 point du PIB entre 1999 et 2002, une croissance plus
rapide permettant de le réduire à 0,8 point de PIB.
La projection relative à l'endettement précise que les
excédents sociaux seraient affectés à partir de 2000
à un Fonds de réserve pour les retraites si bien que
l'endettement net des administrations publiques serait en retrait plus
prononcé.
Dans l'hypothèse d'une croissance à 2,5 %, les dotations au
Fonds s'élèveraient à 0,7 point de PIB en
cumulé ; dans l'hypothèse favorable (+ 3 % de
croissance), ils seraient de 1,5 point de PIB.
b) Une réduction de la dette faible et précaire
Le
programme de stabilité présenté par le gouvernement
comporte un certain nombre d'ambiguïtés qu'il faut rappeler.
Mais avant cela, certains éléments, peu mis en évidence
dans l'étude doivent être mentionnés afin de prendre toute
la mesure des problèmes posés par l'endettement public.
b1) Le hors-bilan de l'Etat est source d'un endettement potentiel
considérable
La " bonne nouvelle " apportée par l'étude d'une
maîtrise du ratio d'endettement public au sens de Maastricht devrait
être démentie par une réforme des modes de calcul de ce
ratio.
L'Office européen des statistiques -Eurostat- envisage en effet une
réforme des modes de calcul de la dette des administrations publiques au
terme de laquelle la dette des entités du secteur public dont le
financement à partir de leurs ressources propres n'atteindrait pas un
niveau minimum serait agrégée à la dette des
administrations publiques.
Cette réforme conduirait en particulier à augmenter la dette
publique des dettes des structures de défaisance -EPFR, EPRD- et
s'accompagnerait d'une hausse du ratio dette publique/PIB au-delà du
seuil de 60 %.
Cette élévation du ratio relève largement d'un changement
d'affichage qui ne modifie pas les problèmes de fond posés par la
dette publique.
Mais ces progrès de transparence débouchent sur un panorama de
l'endettement public plus sombre encore que celui qui est dessiné dans
l'étude.
D'autres éléments du " hors bilan " de l'Etat devraient
d'ailleurs être pris en compte, comme les garanties et les passifs
liés aux charges de pension dont on rappelle qu'ils ont
été estimés à 50 % du PIB entre 1999 et 2040.
b2) Le programme de stabilité n'est pas à la hauteur des
enjeux
La décrue de l'endettement public dans la projection du gouvernement
reste limitée
si l'on considère les enjeux qui s'attachent
à sa réduction, la consolidation de la situation
financière de l'Etat, le provisionnement des lourdes charges à
venir, la réduction souhaitable des prélèvements
obligatoires...
Ce résultat médiocre serait atteint dans des conditions de
croissance pourtant favorables
à une réduction franche de
la dette
. Le scénario le moins favorable repose sur une croissance
de 2,5 %, soit 0,5 point de plus chaque année que la
croissance annuelle moyenne entre 1980 et 1997.
Un environnement économique moins porteur se traduirait par une
dégradation du solde public et donc de l'endettement. Le tableau
ci-après traduit les effets d'une moindre croissance sur le
déficit.
(en % du PIB)
|
Impact d'une diminution de 1 % du PIB |
Impact d'un taux de croissance inférieur de 1 % par an pendant 5 ans |
||
|
à 1 an |
à 2 ans |
à 5 ans |
|
Hypothèse de ralentissement de la consommation |
- 0,32 |
- 0,48 |
- 0,84 |
- 4,2 |
Hypothèse de ralentissement de la demande extérieure |
- 0,17 |
- 0,24 |
- 0,38 |
- 1,90 |
La
réduction de l'endettement public suppose une autre politique que celle,
d'ailleurs peu claire, qui est annoncée.
D'une part, il faut souligner le choix fermement affirmé d'une fixation
d'un objectif de dépenses publiques en francs constants (+ 1 %
l'an). Dans le programme, la progression des dépenses est fixée
ne varietur
. La fixation irrévocable des dépenses
publiques est justifiée par l'idée qu'elle permettrait d'assurer
non seulement la réalisation des priorités du gouvernement, mais
aussi la fonction dévolue à la politique budgétaire de
jouer le
rôle de stabilisation automatique
.
Face à une évolution conjoncturelle défavorable, le
gouvernement s'accommoderait d'un creusement du déficit public afin de
contrecarrer l'infléchissement de l'activité.
Le gouvernement semble donc faire le choix d'une politique budgétaire
contracyclique.
On peut en conclure qu'une aggravation des déficits conjoncturels ne
serait plus compensée par un redressement des soldes structurels, sauf
circonstances tout à fait exceptionnelles.
D'autre part, la fixation à 1 % en volume de l'augmentation
annuelle des dépenses publiques n'est pas
" irréaliste " en tant que telle mais elle suscite des
interrogations importantes compte tenu de ses ambiguïtés propres et
de la programmation retenue.
La première question concerne la portée en termes nominaux de
cette norme de progression
. Sa résolution dépend de
l'évolution des prix : si l'inflation devait être de
1,5 %, la progression des dépenses publiques en valeur serait de
2,5 %, si l'inflation devait être de 0,5 %, l'augmentation en valeur
des dépenses publiques serait de 1,5 %. La marge d'incertitude
relative à l'ensemble des dépenses publiques est donc importante,
de l'ordre de 44 milliards par an.
La seconde question est relative à la vraisemblance de l'objectif
retenu
. S'agissant de l'Etat, la question ne se pose pas si l'on retient
l'hypothèse qu'il est en mesure de maîtriser l'évolution de
ses dépenses. En revanche, la question se pose avec acuité pour
les administrations publiques locales et les administrations de
sécurité sociale plus encore. L'Etat n'a en effet pas, au
même degré, de capacité de maîtrise pour ces deux
types d'agents.
On se bornera ici à évoquer les dépenses sociales
qui, selon le gouvernement, s'accroîtraient de
1,5 % l'an
. On
observe que cette prévision est en rupture avec la croissance en volume
des prestations sociales
entre 1991 et 1997
qui s'est
élevée à
2,5 % l'an.
On peut également rappeler que dans la projection de l'OFCE
5(
*
)
sur la période 1998-2003, le volume des
prestations sociales s'accroîtrait de 2,3 % par an.
Il est intéressant de relever les causes de cet écart. S'agissant
de l'assurance-maladie, le gouvernement table sur une augmentation de l'ordre
de 1,2 % par an contre 2,7 % pour l'OFCE. En moyenne, elle fut de
1,9 % entre 1991 et 1997, années de faible croissance. Or, les
périodes de croissance soutenue sont propices à une augmentation
de la consommation médicale puisque l'élasticité de cette
consommation par rapport au revenu est fortement croissante.
Si l'on ajoute que les dépenses de maladie sont très
dépendantes des évolutions concernant la masse salariale
hospitalière, qui ne devrait pas diverger sensiblement des
évolutions de la masse salariale privée, il y a peu de chances
que le programme du gouvernement se réalise.
Curieusement, les autres dépenses sociales s'accroissent plus vite dans
le programme du gouvernement alors que leur évolution spontanée
devrait être plutôt favorable à une croissance moins rapide
que celle des " dépenses-maladie " : le chômage
baisserait, le volume supplémentaire de retraités serait faible.
Le programme de stabilité n'emprunte donc pas la voie d'une
réduction sûre et efficace de la dette publique.
L'une des
leçons importantes de l'étude est que les périodes de
conjoncture économique favorables doivent être l'occasion de
cumuler les excédents conjoncturels avec les excédents
structurels.
Or, le programme de stabilité maintient des déficits structurels.
C'est d'autant moins compréhensible que les charges
d'intérêt devraient être allégées au cours de
la période.
L'objectif de progression des dépenses publiques tel qu'il est retenu
par le gouvernement n'est pas de nature à créer les marges
suffisantes pour une réduction franche de la part de la dette publique
dans le PIB.
La réduction du poids des dépenses publiques dans le PIB serait,
au mieux, de deux points.
Part des dépenses publiques dans le PIB
(En %)
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Ecart 2002/1999 |
54,3 |
53,5 |
53 |
52,2 |
51,5 |
- 2 |
L'évolution des dépenses publiques
décrite
dans le programme ne traduit pas de mouvement vers une réduction
significative du format de l'Etat : on peut parler d'ajustements à la
marge plutôt que d'une réforme de l'Etat
. Ces ajustements
pourront être difficiles, ils le seront d'ailleurs d'autant plus qu'ils
devront être réalisés à structure constante, mais
ils déboucheront
in fine
sur la poursuite du modèle
d'intervention publique existant.
Or, c'est bien celui-ci qui est la cause structurelle de l'endettement public
en France.
CONCLUSIONS DE L'ÉTUDE DE LA DIRECTION DE LA
PRÉVISION DU MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE, DES
FINANCES ET DE L'INDUSTRIE SUR L'ANALYSE DE
L'ÉVOLUTION
DE L'ENDETTEMENT PUBLIC
SOMMAIRE
Pages
I. LE
RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC A PRESQUE TRIPLÉ ENTRE 1980 ET 1997
33
A. LE RATIO D'ENDETTEMENT BRUT CONNAÎT UNE FORTE PROGRESSION DEPUIS 1991
34
B. LA SITUATION FINANCIÈRE DES ADMINISTRATIONS FRANÇAISES
APPARAÎT RELATIVEMENT FAVORABLE PAR RAPPORT AUX AUTRES PAYS
EUROPÉENS AU REGARD DES STATISTIQUES DE DETTE BRUTE 36
C. LA PART DES OBLIGATIONS ET DES TITRES DU MARCHÉ MONÉTAIRE
S'EST FORTEMENT ACCRUE DANS LE PASSIF PUBLIC 37
II. LA PROGRESSION DE L'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX
DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
38
A. L'ENDETTEMENT BRUT PEUT ÊTRE DÉCOMPOSÉ SUIVANT
4 DÉTERMINANTS 38
B. LA PROGRESSION DU RATIO D'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX
DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS 39
C. LES DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS ONT ATTEINT EN MOYENNE
1 POINT DE PIB ENTRE 1980 ET 1997 40
D. LE COÛT NET DES ACQUISITIONS DE CRÉANCES ENTRE 1980 ET 1997
REPRÉSENTE 3,3 POINTS DE PIB EN 1997 41
III. LE NIVEAU ÉLEVÉ DU COÛT MOYEN RÉEL DE LA
DETTE DEPUIS LA SECONDE MOITIÉ DES ANNÉES 1980 A CONTRIBUÉ
AU RENFORCEMENT DU POIDS DE L'ENDETTEMENT PUBLIC
44
A. SI LES TAUX D'INTÉRÊT AVAIENT ÉTÉ ÉGAUX AU
TAUX DE CROISSANCE DU PIB DE 1980 À 1997, LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC
AURAIT À PEINE DÉPASSÉE 40 POINTS DE PIB EN 1997 44
B. LE RALENTISSEMENT DES PRIX AU COURS DES ANNÉES 1980 A TRANSITOIREMENT
ENTRAÎNÉ UNE AUGMENTATION DU COÛT RÉEL DES EMPRUNTS
EN COURS 47
IV. LA RÉDUCTION DU PATRIMOINE NET DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
AURAIT SERVI À FINANCER DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET DE
TRANSFERT
48
A. L'INTÉRÊT D'UNE ANALYSE EN TERMES DE COMPTES DE PATRIMOINE 48
B. LA DETTE NETTE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES FRANÇAISES A FORTEMENT
PROGRESSÉ DEPUIS 1980 49
C. LA DÉGRADATION DU PATRIMOINE NET DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES DEPUIS
1980 52
V. LA BAISSE GRADUELLE DU DÉFICIT PUBLIC PERMETTRA UNE DIMINUTION DU
RATIO D'ENDETTEMENT AU SENS DE MAASTRICHT
54
A. LE DÉFICIT PUBLIC DEVRAIT SE RÉDUIRE DE 2,3 POINTS DE PIB EN
1999 À ENVIRON 1 POINT DE PIB EN 2002 54
B. LE RATIO D'ENDETTEMENT AU SENS DE MAASTRICHT DEVRAIT ÊTRE
RÉDUIT DE 0,5 À 1,5 POINT DE PIB ENTRE 1999 ET 2002 55
ANNEXE 1 : LA DETTE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AU SENS DE MAASTRICHT
PRÉSENTE PLUSIEURS PARTICULARITÉS QUI VIENNENT PERTURBER LA
LISIBILITÉ DES AJUSTEMENTS STOCK-FLUX
57
ANNEXE 2 : DÉCOMPOSITION DE L'ENDETTEMENT BRUT SELON 4
DÉTERMINANTS
59
ANNEXE 3 : LE SOLDE STABILISANT LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC
60
ANNEXE 4 : MÉTHODE DE VALORISATION DES ACTIFS FINANCIERS ET NON
FINANCIERS EN COMPTABILITÉ NATIONALE
62
ANNEXE 5 : IMPORTANCE DES DÉCALAGES COMPTABLES ET DES
CRÉDITS COMMERCIAUX À L'ACTIF
63
La note jointe analyse l'évolution du ratio d'endettement brut des
administrations publiques au sens de Maastricht, qui a fortement
progressé entre 1980 et 1997, passant de 21,0 à 58,1 points de
PIB. Elle permet de dégager les conclusions suivantes :
- à taux d'intérêt donnés, la progression du ratio
d'endettement brut entre 1980 et 1997 est principalement attribuable aux
déficits primaires structurels successifs, à hauteur de 30 points
de PIB
Les intérêts générés par la dette initiale
(au 31 décembre 1979), les déficits conjoncturels et le
financement des acquisitions de créances entre 1980 et 1997 net des
revenus financiers perçus par les administrations publiques ont une part
plus limitée dans la variation de l'endettement public.
- selon une seconde décomposition, le niveau élevé des
taux d'intérêt réels du marché entre 1980 et 1997 a
renchéri le coût moyen réel de la dette et a ainsi
amplifié l'accroissement de l'endettement public
A titre illustratif, si les taux d'intérêt avaient
été égaux année après année aux taux
de croissance du PIB de 1980 à 1997, le ratio d'endettement public
aurait à peine dépassé 40 points de PIB en 1997, soit
près de 20 points en dessous du niveau effectif (58,1 points de PIB).
- la progression de l'endettement brut a servi en partie à financer des
dépenses de fonctionnement et de transfert
Le poids dans la richesse nationale des actifs financiers et non financiers
détenus par les administrations publiques est resté quasiment
stable depuis 1980. La croissance rapide de la dette publique brute ne
s'explique donc pas par un rôle accru des administrations publiques en
tant qu'actionnaire, intermédiaire financier ou investisseur. Par
déduction, la diminution de la valeur nette du patrimoine des
administrations publiques semble avoir servi à financer des
dépenses de fonctionnement et de transfert.
Au cours des années à venir, la baisse graduelle du
déficit des administrations publiques devrait permettre une
décrue du ratio d'endettement public. Cette nouvelle évolution,
en rupture par rapport aux années passées, aura pour effet de
continuer à réduire la progression du service de la dette.
Combinée avec l'accumulation de réserves au sein du fonds pour
les retraites dont la création a récemment été
décidée par le Gouvernement, la diminution de l'endettement
contribuera à faire face au choc démographique qui interviendra
à partir de 2005.
Le poids dans la richesse nationale de l'endettement brut des administrations
publiques au sens de Maastricht a fortement progressé entre 1980 et
1997, passant de 21,0 à 58,1 points de PIB. La présente
étude propose une analyse rétrospective de cette évolution
en quatre parties.
1. La première partie présente une analyse quantitative et
qualitative de l'endettement public. Si le ratio d'endettement brut
connaît une forte progression depuis 1991, la situation d'endettement des
administrations françaises reste actuellement relativement plus
favorable que celle des autres pays européens. Par ailleurs, la
croissance du passif public s'est accompagnée d'une large modification
de sa structure, avec une part des obligations et des titres du marché
monétaire fortement accrue.
2. La seconde partie souligne la responsabilité, à hauteur de 30
points de PIB, des déficits primaires structurels successifs dans la
progression du ratio d'endettement brut entre 1980 et 1997.
3. La troisième partie étudie l'impact du niveau des taux
d'intérêt sur l'évolution de la dette publique.
4. La quatrième partie présente une analyse en termes de comptes
de patrimoine. Le passif financier est alors étudié au regard des
actifs financiers et non financiers détenus par les administrations
publiques.
5. La dernière partie présente l'évolution future de
l'endettement public telle qu'elle peut être estimée au regard du
programme pluriannuel de finances publiques à l'horizon 2002 qui vient
d'être remis à la Commission européenne. La baisse
graduelle des déficits publics, de 2,3 points de PIB en 1999 à
environ 1 point de PIB en 2002, permettrait une réduction de 0,5
à 1,5 point de PIB du ratio d'endettement entre 1999 et 2002.
Cette étude se focalise sur l'endettement public au sens de Maastricht,
c'est-à-dire exprimé dans une comptabilité dont les
concepts s'écartent légèrement de ceux de la
comptabilité nationale. Or, seule cette dernière offre un cadre
complet d'analyse. Dès lors, on effectue de nombreuses
interprétations à partir de la comptabilité nationale, qui
sont ensuite traduites selon les concepts retenus par le traité de
Maastricht.
I. LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC A PRESQUE TRIPLÉ ENTRE 1980 ET 1997
Le poids dans la richesse nationale de l'endettement brut des administrations publiques, au sens de Maastricht, a fortement progressé entre 1980 et 1997, passant de 21,0 à 58,1 points de PIB. Cependant, la situation financière des administrations françaises reste relativement plus favorable que celle des autres pays européens. D'autre part, la croissance du passif public s'est accompagnée d'une large modification de sa structure, avec une part des obligations et des titres du marché monétaire fortement accrue.
A. LE RATIO D'ENDETTEMENT BRUT CONNAÎT UNE FORTE PROGRESSION DEPUIS 1991
Après avoir diminué tout au long des
années
1970, le poids dans la richesse nationale de l'endettement brut des
administrations publiques au sens de Maastricht
6(
*
)
a presque triplé entre 1980 et 1997, passant de
21,0 à 58,1 points de PIB en 17 années. On peut mettre en
évidence trois phases dans l'évolution de ce ratio d'endettement
brut :
- de 1980 à 1987, ce ratio augmente en moyenne de 2 points de PIB par an
;
- entre 1987 et 1991, la progression de ce ratio est beaucoup plus
modérée et ne s'élève en moyenne qu'à 0,5
point de PIB par an ;
- de 1991 à 1997, la progression du ratio d'endettement brut est
très dynamique : +3 points de PIB par an en moyenne.
Les années 1998 et 1999 devraient rompre avec cette dernière
phase et enregistreraient une nette réduction de la progression du ratio
d'endettement (+0,6 point en 2 ans).
Ratio
d'endettement brut des administrations publiques
(en points de PIB, au sens de Maastricht)
Sources : Banque de France & Direction de la Prévision
Une décomposition par sous-secteur montre que la dette de l'Etat a connu la progression la plus importante, son poids dans la richesse nationale augmentant de 33,5 points de PIB entre 1980 et 1997. Si les administrations locales ont gardé un endettement relativement stable en points de PIB, les organismes divers d'administration centrale et les administrations de sécurité sociale présentent de fortes variations de leur endettement, en particulier entre 1991 et 1997. Ces variations sont dues aux reprises successives des dettes entre ces deux sous-secteurs, en particulier de celles de l'ACOSS par des organismes divers d'administration centrale (Fonds de solidarité vieillesse 7( * ) - FSV - en 1993 et Caisse d'amortissement de la dette sociale - CADES - en 1996 8( * ) ).
Endettement public
Source : Banque de France
Il faut signaler que la méthode actuelle d'évaluation du passif des administrations publiques ne permet pas de prendre en compte la masse des dépenses obligatoires et incompressibles à laquelle ces dernières devront faire face dans le futur, notamment les pensions des retraites 9( * ) . Le passif des administrations peut alors paraître sous-estimé par la comptabilité nationale. Dans le cas d'un recensement de ces engagements, il faudrait néanmoins comptabiliser les actifs implicites des administrations publiques, comme les cotisations aux régimes de retraite.
B. LA SITUATION FINANCIÈRE DES ADMINISTRATIONS FRANÇAISES APPARAÎT RELATIVEMENT FAVORABLE PAR RAPPORT AUX AUTRES PAYS EUROPÉENS AU REGARD DES STATISTIQUES DE DETTE BRUTE
Une comparaison européenne, réalisée sur la base des statistiques de dette brute, montre que la situation financière des administrations publiques françaises reste relativement plus favorable que celle des autres pays européens, et ce en dépit de la progression rapide de l'endettement brut survenue au cours des années 1990. En 1997, la France a présenté un ratio d'endettement brut inférieur à 60%. Seuls le Luxembourg, le Royaume-Uni et la Finlande ont pu comme la France respecter en niveau le seuil de 60 %.
Ratio
d'endettement brut au sens de Maastricht
(en points de PIB, chiffres 1997)
Source : Commission européenne
C. LA PART DES OBLIGATIONS ET DES TITRES DU MARCHÉ MONÉTAIRE S'EST FORTEMENT ACCRUE DANS LE PASSIF PUBLIC
La structure du passif des administrations publiques s'est fortement modifiée au fur et à mesure de son accroissement au cours des années 1980. Le recours croissant aux marchés obligataire et monétaire par l'Etat - et dans une moindre mesure par la Caisse d'Amortissement de la Dette Social et les collectivités locales - a accru dans le passif la part des obligations (de 19% du passif en 1980 à 42% en 1997) et des titres du marché monétaire - BTAN et BTF (de 8% en 1980 à 21% en 1997), la part des liquidités et des crédits à moyen et long terme se réduisant.
Répartition de l'encours de dettes par catégories
Source : Comptes nationaux, « base
80 »
II. LA PROGRESSION DE L'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
La progression entre le 1er janvier 1980 et le 31 décembre 1997 du ratio d'endettement brut, soit 36,4 points de PIB, est principalement due aux déficits primaires structurels successifs, ces derniers atteignant en moyenne 1 point de PIB au cours de cette période. Les intérêts générés par la dette initiale (au 31 décembre 1979), les déficits conjoncturels et le financement des acquisitions de créances entre 1980 et 1997 net des revenus financiers perçus par les administrations publiques ont une part plus limitée dans la variation de l'endettement public (moins de 8 points de PIB).
A. L'ENDETTEMENT BRUT PEUT ÊTRE DÉCOMPOSÉ SUIVANT 4 DÉTERMINANTS
La
variation annuelle de la dette brute des administrations publiques peut
s'écrire comme la somme du déficit public de l'année et
des flux nets de créances
10(
*
)
:
Dette
t
- Dette
t-1
= Déficit public
t
+
Acquisitions nettes de créances
t
Entre 1980 et 1997, les déficits publics ont représenté en
moyenne 2,4 points de PIB et les acquisitions nettes de créances, 1
point de PIB
11(
*
)
. Cependant, cette
présentation ne permet pas de déterminer la contribution des
déficits successifs et de l'acquisition d'actifs financiers au niveau de
la dette actuelle. En effet, les séries de dettes, créances et
déficits interagissent : le service de la dette accumulée en t-1
dégrade le déficit en t et ce dernier bénéficie des
revenus des actifs financiers précédemment accumulés par
les administrations publiques.
On met alors en évidence 4 déterminants de la progression de
l'encours de dette publique entre 1980 et 1997
12(
*
)
:
- la dette initiale au 31 décembre 1979 ;
- les déficits primaires structurels, le terme "primaire" signifiant
dans cette étude hors intérêts versés et revenus
d'actifs financiers reçus ;
- les déficits conjoncturels
13(
*
)
;
- le financement des flux nets de créances (i.e. acquisitions - ventes)
entre 1980 et 1997 net des revenus financiers procurés par l'ensemble
des actifs financiers (y compris les créances acquises avant 1980).
Ces 4 déterminants, en y ajoutant les intérêts qu'ils
génèrent "en cascade" - c'est-à-dire que les
intérêts versés doivent être financés par
emprunt, ce qui entraîne le paiement de nouveaux intérêts -
permettent de décomposer la progression de l'endettement
public
14(
*
)
.
B. LA PROGRESSION DU RATIO D'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
La dette
initiale qui représentait 21,7 points de PIB au 31 décembre 1979
contribue à hauteur de 24,7 points de PIB au ratio d'endettement public
de 1997.
• Les déficits primaires structurels (avec une contribution de
29,3 points de PIB) sont en grande partie responsables de la variation du
ratio d'endettement entre 1980 et 1997 (+36,4 points).
• Les déficits conjoncturels - qui, lorsqu'ils se transforment en
excédents conjoncturels dans les phases hautes du cycle, permettent aux
administrations publiques de recevoir des intérêts - ne sont
responsables de la progression de l'endettement qu'à hauteur de 0,9
point entre 1980 et 1997.
• Par ailleurs, le coût net des acquisitions de créances
représente au sein du ratio d'endettement 3,4 points de PIB. Le
coût du financement des flux nets de créances entre 1980 et 1997
qui représente 34,6 points de PIB en 1997 est en grande partie
compensée par le gain des actifs financiers détenus, à
hauteur de 31,2 points de PIB en 1997.
Contributions à la progression du ratio d'endettement brut
(en points de PIB)
Calculs DP
C. LES DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS ONT ATTEINT EN MOYENNE 1 POINT DE PIB ENTRE 1980 ET 1997
Avec une
contribution de 29,3 points de PIB, les déficits primaires structurels
sont en grande partie responsables de la variation du ratio d'endettement entre
1980 et 1997 (+36,4 points).
Les causes de cette évolution se situent tant au niveau des
dépenses que des recettes :
* la détérioration du solde primaire structurel est pour une
large part imputable à l'évolution des dépenses publiques ;
* la réduction du poids des impôts dans le PIB au début des
années 1990, due en particulier aux allégements fiscaux
consentis, a dégradé le solde structurel.
• la politique des pouvoirs publics a permis d'améliorer
récemment le solde primaire structurel. Ce dernier s'est établi
à 0,7 point de PIB en 1997, à 0,8 point en 1998 et devrait
s'améliorer encore de 0,1 point de PIB en 1999.
Par ailleurs, les déficits conjoncturels - qui, lorsqu'ils se
transforment ont en excédents conjoncturels dans les phases hautes du
cycle, permettent aux administrations publiques de recevoir des
intérêts - ne sont responsables de la progression de l'endettement
qu'à hauteur de 0,9 point entre 1980 et 1997. Le solde conjoncturel est
nul en moyenne sur la durée d'un cycle, les périodes
d'"excédent conjoncturel" étant compensées par celles de "
déficit conjoncturel ". Ainsi, les années 1993 à 1997 qui
présentent des déficits conjoncturels importants (de l'ordre de 1
point de PIB) succèdent à la période 1988-1991
15(
*
)
pendant laquelle les excédents conjoncturels
ont pu atteindre 1,6 point de PIB (1990). La contribution des soldes
conjoncturels à la variation d'endettement sur un cycle peut alors
être nulle, et dépend de l'évolution des taux
d'intérêt entre la période de basse conjoncture et celle de
conjoncture haute.
Solde
primaire structurel / solde conjoncturel
(en points de PIB)
Calculs DP
D. LE COÛT NET DES ACQUISITIONS DE CRÉANCES ENTRE 1980 ET 1997 REPRÉSENTE 3,3 POINTS DE PIB EN 1997
L'acquisition d'actifs financiers présente un
coût mais
permet aux administrations publiques de recevoir des revenus de ces actifs. On
définit alors le coût net des acquisitions de créances
entre 1980 et 1997 comme la différence entre le coût du
financement de ces acquisitions et le gain procuré par les revenus
financiers de l'ensemble des actifs financiers des administrations publiques (y
compris les actifs détenus avant 1980)
16(
*
)
.
Le coût du financement des flux nets de créances entre 1980 et
1997 représente 34,6 points de PIB en 1997
Entre 1980 et 1997, les acquisitions nettes de créances ont
représenté en moyenne 1 point de PIB et leur financement a
contribué à hauteur de 34,6 points de PIB à la progression
de la dette publique brute. Ces acquisitions ont concerné en moyenne
à parts relativement égales les quatre sous-secteurs des
administrations publiques :
Moyenne annuelle 1980-1997 des flux nets de créances
(en points de PIB, hors consolidations entre sous-secteurs)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
La contribution de l'Etat aux flux de créances a fortement fluctué au cours de cette période, en raison notamment des politiques de nationalisations et de privatisations. Ainsi, après les nationalisations du début des années 1980, les participations de l'Etat ont diminué au cours des vagues successives de privatisations (premières privatisations en 1986-1987, cessions minoritaires d'actifs de 1991 à 1993 puis nouvelles privatisations à partir de 1993). Par ailleurs, certaines opérations exceptionnelles comme la reprise par l'Etat de la dette de l'ACOSS en 1994 à hauteur de 110 MdsF ont entraîné de fortes variations du solde du Trésor à la Banque de France 17( * ) (gonflement en 1993, dégonflement en 1994).
Flux nets de créances de l'Etat
(en points de PIB)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Pour les autres administrations (ODAC, APUL, ASSO), les flux nets de créances ont été plus réguliers depuis le début des années 1980, d'environ 0,4 point de PIB par an pour chaque sous-secteur. Leur composition est en outre très différente de celle des flux de créances de l'Etat. Pour ces sous-secteurs, la progression annuelle de l'actif financier s'explique en moyenne (1980-1997) pour prés de 70 % - contre moins de 20% pour l'Etat - par l'accroissement des crédits à court et à long terme 18( * ) . Le reste de la progression s'explique par un accroissement des liquidités détenues par les administrations et par des acquisitions de produits financiers (actions, OPCVM), notamment par les organismes de Sécurité sociale.
Décomposition des flux nets de créances des APU
hors Etat
(moyenne 1980-1997, hors consolidations entre sous-secteurs)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Les
revenus issus des actifs financiers entre 1980 et 1997 représentent 31,2
points de PIB en 1997
Entre 1980 et 1997, les revenus des actifs financiers (actions, obligations,
titres du marché monétaire et crédits) ont
représenté en moyenne 1 point de PIB par an et ont permis de
réduire de 31,2 points de PIB la variation du ratio de dette brute entre
1980 et 1997. Une analyse plus complète des revenus des actifs
financiers est menée ci-après, au cours de la présentation
des comptes de patrimoine.
En définitive, on peut estimer que le coût net des
opérations sur actifs financiers sur cette période
s'élève à 3,3 points de PIB d'endettement brut
supplémentaire.
III. LE NIVEAU ÉLEVÉ DU COÛT MOYEN RÉEL DE LA DETTE DEPUIS LA SECONDE MOITIÉ DES ANNÉES 1980 A CONTRIBUÉ AU RENFORCEMENT DU POIDS DE L'ENDETTEMENT PUBLIC
Le niveau élevé du coût moyen réel de la dette 19( * ) depuis la seconde moitié des années 1980 résulte en grande partie du haut niveau des taux d'intérêt réels. Le coût moyen réel est supérieur au taux de croissance 20( * ) réelle depuis la seconde moitié des années 1980 et contribue ainsi au renforcement du poids de l'endettement public. Ce coût moyen élevé résulte aussi de l'effet mécanique du ralentissement de la hausse des prix au cours des années 1980 sur une dette à taux fixe.
A. SI LES TAUX D'INTÉRÊT AVAIENT ÉTÉ ÉGAUX AU TAUX DE CROISSANCE DU PIB DE 1980 À 1997, LE RATIO D'ENDETTEMENT PUBLIC AURAIT À PEINE DÉPASSÉE 40 POINTS DE PIB EN 1997
Depuis une quinzaine d'années, les taux d'intérêt réels apparaissent relativement élevés, qu'on les compare au taux de croissance potentielle de moyen terme (soit environ 2,2% en termes réels) ou à un taux réel " neutre " associé à la règle de Taylor 21( * ) (soit 3% pour les taux à 3 mois et 4 % pour les taux à 10 ans). De 1982 à 1995, les taux réels du marché ont été supérieurs à ces références. En outre, ils ont fortement progressé de 1980 au début des années 1990 pour atteindre des niveaux historiquement élevés (les taux réels à 3 mois atteignant ainsi 8% en 1992).
Evolution des taux d'intérêt réels et du taux de
croissance réelle
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Si ces taux réels ont décru depuis 1992, ils ont entraîné une augmentation du coût réel de la dette. Le coût moyen réel de la dette est ainsi supérieur au taux de croissance réelle depuis la seconde moitié des années 1980, entraînant année après année un alourdissement en termes de richesse nationale de l'endettement public au 31 décembre de l'année précédente et des intérêts associés. En effet, pour un emprunt donné, le nominal et les intérêts qu'il induit progressent plus rapidement que la richesse nationale 22( * ) lorsque les taux d'intérêt sont supérieurs au taux de croissance de l'économie.
Source : Comptes nationaux, « base 80 », calculs
DP
Afin de
mettre en relief cet alourdissement mécanique, on peut comparer la
situation actuelle à la situation théorique où les taux
d'intérêt sont égale année après année
au taux de croissance. Si les taux d'intérêt avaient
été égaux au taux de croissance du PIB de 1980 à
1997, le ratio d'endettement public aurait à peine
dépassée 40 points de PIB en 1997 (contre 58,1 points). Une
analyse selon la décomposition présentée dans la partie II
souligne les caractéristiques suivantes :
- Financée par des emprunts dont la rémunération aurait
été égale au taux de croissance courant de la richesse
nationale, la dette initiale de 1980 n'aurait pas contribué à
l'accroissement du ratio d'endettement. La contribution à
l'accroissement n'a été que de 2,9 points de PIB, ce faible
niveau résultant du financement initial à des taux
d'intérêt réels négatifs de la dette au 31
décembre 1979.
- Financés par des emprunts dont la rémunération est
égale au taux de croissance courant, les déficits primaires
structurels enregistrés depuis 1980 n'auraient contribué
qu'à hauteur de 17,1 points de PIB à l'augmentation du ratio
d'endettement, contre 29,3 actuellement. L'écart atteint alors 12,2
points de PIB, les déficits primaires structurels ayant
été quasi continuellement financés à des taux
d'intérêt supérieurs au taux de croissance.
Décomposition du ratio d'endettement brut de 1997
(en points de PIB)
Calculs DP
B. LE RALENTISSEMENT DES PRIX AU COURS DES ANNÉES 1980 A TRANSITOIREMENT ENTRAÎNÉ UNE AUGMENTATION DU COÛT RÉEL DES EMPRUNTS EN COURS
Le
ralentissement des prix, particulièrement marqué au cours des
années 1980
23(
*
)
, a influé
l'évolution des taux nominaux. Or, la dette publique en France est
principalement une dette à taux fixe et dont la maturité moyenne
atteint plusieurs années (en 1997, la durée de vie moyenne de la
dette de l'Etat est supérieure à six ans). Les taux courants
nominaux ne s'appliquent donc pour l'essentiel qu'au financement des nouveaux
déficits et à la partie de la dette qui arrive à
échéance. Ils se répercutent donc avec une certaine
inertie
24(
*
)
sur le coût moyen nominal.
Dès lors, la désinflation peut avoir un effet transitoire sur le
niveau du coût réel de la dette.
Plus précisément, la forte désinflation des années
1980 a entraîné une augmentation du coût réel des
emprunts publics courants
25(
*
)
. On peut estimer
que, si le coût nominal de la dette avait suivi instantanément la
désinflation
26(
*
)
, le poids dans le ratio
d'endettement de 1997 des déficits primaires enregistrés entre
1980 et 1997 serait de 26,1 points de PIB contre 30,2
27(
*
)
actuellement.
Poids des déficits primaires dans le ratio d'endettement brut de 1997
(en points de PIB)
Calculs DP
IV. LA RÉDUCTION DU PATRIMOINE NET DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AURAIT SERVI À FINANCER DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET DE TRANSFERT
Le poids dans le PIB des actifs financiers et non financiers détenus par les administrations publiques sont restés quasiment stables depuis 1980. La croissance rapide de la dette publique brute ne s'explique donc pas par un rôle accru des administrations publiques en tant qu'actionnaire, intermédiaire financier ou investisseur physique. Par déduction, la diminution de la valeur nette du patrimoine des administrations publiques semble avoir servi à financer des dépenses de fonctionnement et de transfert.
A. L'INTÉRÊT D'UNE ANALYSE EN TERMES DE COMPTES DE PATRIMOINE
L'attention portée à l'évolution de la
dette
brute s'explique par la grande disponibilité de ce concept, qui permet
de comparer sur une base commune le poids de l'endettement public dans les
différents pays, et d'évaluer à travers celui-ci
l'évolution de leur solvabilité.
Néanmoins, cette analyse présente certaines limites, car elle ne
permet pas de prendre en compte explicitement l'impact de la politique
budgétaire sur l'évolution des actifs physiques et financiers des
administrations. Or, ceux-ci sont eux-mêmes générateurs de
revenus budgétaires qu'il convient de prendre en compte, qu'il soient
directs (revenus de la propriété et de l'entreprise :
intérêts, dividendes versés par les entreprises publiques,
revenus de la terre et des actifs incorporels, etc ...) ou indirects, comme par
exemple l'impact des infrastructures routières et portuaires sur
l'activité économique et donc sur l'assiette des recettes
fiscales.
Ainsi, un accroissement de la dette publique ne se traduit pas
nécessairement par une dégradation de la solvabilité
à long terme des administrations. Une augmentation de la dette servant
à financer l'acquisition d'un actif (financier ou physique) de rendement
actualisé net positif ne dégrade pas la solvabilité des
APU. Le patrimoine net des administrations (actifs - passifs) devrait
même augmenter à terme.
Pour juger du caractère soutenable d'une politique budgétaire, il
apparaît nécessaire d'analyser simultanément son impact sur
le passif et sur l'actif physique ou financier des administrations.
B. LA DETTE NETTE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES FRANÇAISES A FORTEMENT PROGRESSÉ DEPUIS 1980
La dette
publique nette, définie comme la différence entre la dette brute
et les créances des administrations publiques françaises, a
fortement progressé en parts de richesse nationale depuis 1980 du fait
de la progression du passif financier corrélative à une
légère diminution des actifs financiers.
Une légère diminution des actifs financiers en points de
PIB
Le poids des actifs financiers détenus par les administrations publiques
dans la richesse nationale a légèrement diminué de 40,4
points de PIB en 1980 à 36,7 points en 1997.
La structure de ces créances a néanmoins fortement
évolué au cours de cette période. Le poids de l'Etat a
diminué relativement aux autres administrations. Du point de vue de la
nature des créances, le poids des prêts de court à long
terme s'est renforcé au détriment des actions et des moyens de
paiements. Ces évolutions s'expliquent en grande partie par les vagues
successives de privatisations menées par l'Etat (premières
privatisations en 1986-1987, cessions minoritaires d'actifs de 1991 à
1993 puis nouvelles privatisations à partir de 1993). Au total, les
actions et autres participations de l'Etat ont fortement diminué, de
15,7 points du PIB en 1980 à 8,2 points en 1997. Par ailleurs, l'Etat,
dont les crédits à l'économie ont continué à
décroître de 8,4 à 6,9 points du PIB entre 1980 et 1997, a
été relayé en la matière par les autres secteurs de
l'administration (en particulier les ODAC et les APUL).
Encours de créances
(en points de PIB)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Une
forte dégradation de l'endettement net
Si l'on rapporte ces actifs financiers au passif des administrations publiques,
le bilan apparaît fortement négatif en comptabilité
nationale : la dette nette des administrations (passifs - actifs financiers)
représente, en comptabilité nationale, 41,8% du PIB en 1997. Ce
bilan était légèrement positif en 1980 mais l'augmentation
de l'endettement brut - mise en évidence dans les chapitres
précédents - conjuguée au tassement des actifs financiers
a entraîné une forte progression de la dette nette.
Décomposition de la dette nette (en points de PIB)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Des
actifs financiers qui dégradent structurellement l'endettement net
Les actifs financiers détenus par les administrations font
bénéficier celles-ci de revenus dont le rendement moyen
28(
*
)
est en moyenne inférieur d'environ 4 points au
coût moyen de la dette publique depuis 1980. Cet écart entre
rendement des actifs financiers et coût de l'endettement brut
dégrade à long terme l'endettement net.
En particulier, les créances détenues par l'Etat et les
administrations publiques locales ont en moyenne un rendement inférieur
aux créances détenues par les particuliers sur ces
administrations
29(
*
)
. En effet, l'Etat continue
à remplir un rôle (certes bien moindre qu'auparavant)
d'intermédiaire financier, en empruntant sur les marchés pour
offrir ensuite des prêts à des taux avantageux afin de satisfaire
certains objectifs (développement du logement social, politique
commerciale, ...). En outre, les bénéfices des entreprises
publiques ne sont pas systématiquement prélevés par
l'actionnaire
30(
*
)
.
Par ailleurs, une grande partie des créances des administrations locales
ont un rendement quasiment nul, que ce soit les liquidités, les avances
(arrhes et acomptes) consenties dans le cadre d'opérations
d'investissement et les créances liées aux transferts avec l'Etat
(opérations en instance).
Moyennes des écarts entre rendement apparent des actifs financiers
et coût moyen de la dette publique (1980-1997)
Source : Comptes nationaux, calculs DP
Une
situation cependant plus favorable que la plupart des autres grands pays de
l'OCDE
Une comparaison internationale, réalisée sur la base des
statistiques de dette nette collectées par l'OCDE montre que la
situation financière des administrations publiques françaises
reste relativement plus favorable que celle des autres pays européens,
et ce en dépit de la progression rapide de l'endettement survenue au
cours des années 1990.
En 1997, la France se situe parmi les pays dont la dette nette est la plus
faible (41,8 points de PIB contre 58 en moyenne dans les pays européens
et 49,5 en Allemagne), bien que loin derrière la Suède (21,6) et
le Japon (18,3). Pour ce dernier pays, les actifs financiers couvrent
près de 80 % d'un endettement public brut pourtant
élevé (87,1 points de PIB). Par rapport aux pays dont
l'endettement brut est équivalent ou supérieur (Royaume-Uni,
Allemagne, Espagne, Etats-Unis), la France est celui dont l'endettement
rapporté aux actifs est le plus faible, ce qui représente un gage
de plus grande solvabilité à long terme.
Cependant, il convient de noter que cette comparaison repose sur des bases
relativement fragiles, en raison de
l'hétérogénéité des séries de dette
nette collectées par l'OCDE : problèmes de valorisation, de
consolidation entre administrations, différences de champ d'un pays
à l'autre. La méthode d'évaluation des actifs
détenus par les administrations publiques ne fait pas encore l'objet
d'une harmonisation statistique systématique, ce qui incite à
considérer ces résultats avec précaution.
C. LA DÉGRADATION DU PATRIMOINE NET DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES DEPUIS 1980
Des
actifs non financiers quasiment stables autour de 50 points du PIB
D'après les comptes de patrimoine de l'INSEE, les actifs non financiers
représentent 4 021,7 MdsF en 1997, soit légèrement moins
de 50 points de PIB. Ces actifs regroupent les actifs corporels ou non-
reproductibles (stocks, logements, ouvrages d'infrastructure, matériels
de transport et d'équipement) reproductibles (terrains, ressources du
sous-sol), "détenus " par les administrations
31(
*
)
.
Depuis 1980, les actifs non financiers restant quasiment stables autour de
50 points du PIB, en dépit d'un léger tassement dans les
années 1986-1990.
Une valeur nette du patrimoine en forte décroissance
La valeur nette du patrimoine des administrations publiques françaises
(actifs - passifs) représentait 7,6 points du PIB à la fin de
1997. Les actifs détenus par les administrations (86,2 points du PIB)
compensent donc l'endettement brut de celles-ci vis-à-vis du reste de
l'économie (78,5).
En 1980, cette valeur nette du patrimoine représentait 53,3 points de
PIB. Cette dernière s'est considérablement contractée en
raison de l'accroissement rapide de l'endettement brut public
corrélativement à une stabilisation tant des actifs financiers
que non-financiers détenus par les administrations publiques.
Comptes de patrimoine
(en points de PIB)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
De
façon plus générale, il est difficile de mesurer de
façon satisfaisante l'impact précis des actifs physiques sur le
solde des administrations. En effet, si les revenus perçus sous forme de
dividendes peuvent être aisément isolés et rapportés
à la part de l'actif détenu sous formes d'actions, il est plus
malaisé d'estimer précisément l'impact des actifs non
financiers, en particulier des infrastructures publiques (routes,
aérodromes, ports, mobilier urbain, etc....) sur la croissance
économique (externalités positives) et donc sur les
rentrées fiscales à long terme. Cet impact ne peut cependant pas
être négligé.
La croissance rapide de la dette publique brute depuis 1980 ne s'explique pas
par un rôle accru des administrations publiques en tant qu'actionnaire,
intermédiaire financier ou investisseur physique. La montée de
l'endettement brut n'est pas compensée par une augmentation à due
concurrence des actifs financiers et physiques. On assiste donc une diminution
de la valeur nette du patrimoine des administrations publiques.
V. LA BAISSE GRADUELLE DU DÉFICIT PUBLIC PERMETTRA UNE DIMINUTION DU RATIO D'ENDETTEMENT AU SENS DE MAASTRICHT
La consolidation des finances publiques menée à partir de 1997 a permis d'infléchir la forte progression du ratio d'endettement enregistrée depuis le début des années 1990. L'objectif du Gouvernement, rappelé dans le programme pluriannuel de finances publiques à l'horizon 2002 qui vient d'être remis à la Commission européenne, consiste désormais à réduire à moyen terme le poids de l'endettement public par une baisse graduelle des déficits publics.
A. LE DÉFICIT PUBLIC DEVRAIT SE RÉDUIRE DE 2,3 POINTS DE PIB EN 1999 À ENVIRON 1 POINT DE PIB EN 2002
Le
programme pluriannuel de finances publiques à l'horizon 2002 repose sur
deux jeux d'hypothèses de croissance. Dans l'hypothèse la plus
favorable, la croissance serait de 2,7 % en 1999 et de 3% l'an de 2000
à 2002. Dans une deuxième hypothèse, la croissance serait
de 2,4 % en 1999 et de 2,5 % par an en moyenne de 2000 à 2002.
La programmation repose sur une réduction régulière
d'environ 0,5 point de PIB par an du déficit public, celui-ci
passant de 2,3 points de PIB en 1999 à 0,8 point en 2002 sous
l'hypothèse d'une croissance de 3 % par an de 2000 à 2002.
L'amélioration concerne principalement l'Etat (près de
0,3 point par an) et les administrations de sécurité sociale
(environ 0,15 point par an). L'excédent primaire des administrations
publiques progresse de 1,0 point de PIB en 1999 à 2,2 points en 2002.
Dans l'hypothèse d'une croissance limitée à 2,5 % par
an de 2000 à 2002, la réduction du déficit serait de
près de 0,4 point de PIB par an.
Le déficit structurel se réduirait pour sa part de 0,8 point de
PIB entre 1999 et 2002 dans l'hypothèse d'une croissance de 2,5 %
à partir de 2000. Cette amélioration résulte d'une
croissance de l'ensemble des dépenses publiques à un rythme
sensiblement inférieur à celui de la croissance potentielle.
Soldes des administrations publiques
(en points de PIB)
|
|
|
Hyp. Prudente |
|
|
Hyp. favorable |
|
|
|
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2000 |
2001 |
2002 |
Capacité / besoin de financement |
|
|
|
|
|
|
|
|
Administrations publiques |
-2,9 |
-2,3 |
-2,0 |
-1,6 |
-1,2 |
-1,7 |
-1,2 |
-0,8 |
Administrations centrales |
-2,9 |
-2,6 |
-2,3 |
-2,1 |
-1,8 |
- |
- |
- |
Etat |
-3,05 |
-2,7 |
-2,5 |
-2,2 |
-2,0 |
- |
- |
- |
Organismes divers d'administration centrale |
0,15 |
0,1 |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
- |
- |
- |
Administrations de sécurité sociale |
-0,15 |
0,15 |
0,2 |
0,2 |
0,3 |
- |
- |
- |
Administrations publiques locales |
0,15 |
0,15 |
0,1 |
0,2 |
0,3 |
- |
- |
- |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Solde primaire |
|
|
|
|
|
|
|
|
Administrations publiques |
0,6 |
1,1 |
1,3 |
1,5 |
1,8 |
1,5 |
1,9 |
2,2 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Source : pour 1998 et 1999, Rapport économique, social et financier. Pour les années 2000 à 2002, projections du gouvernement. La décomposition des soldes par sous-secteur, dans le scénario favorable, dépendra des choix faits en matière de réduction des prélèvements obligatoires.
B. LE RATIO D'ENDETTEMENT AU SENS DE MAASTRICHT DEVRAIT ÊTRE RÉDUIT DE 0,5 À 1,5 POINT DE PIB ENTRE 1999 ET 2002
Dans l'hypothèse où la croissance atteindrait 3%, la baisse du ratio d'endettement serait importante. Le poids de l'endettement public dans la richesse nationale, qui représenterait 58,7 points de PIB en 1999, diminuerait dès 2000 et devrait approcher 57 points de PIB en 2002. Dans l'hypothèse d'une croissance de 2,5 %, le ratio d'endettement brut au sens de Maastricht baisserait de 58,9 points en 1999 à 58,3 points de PIB en 2002.
Ratio d'endettement
(en points de PIB)
Note : le relèvement du ratio dette sur PIB en 1999 dans le
scénario de croissance de 2,5% par rapport à la projection du
Rapport économique, social et financier - 58,7 - résulte de
l'hypothèse de croissance pour l'année 1999 : 2,4% contre 2,7%
dans le rapport).
Ces évolutions d'endettement brut prennent en compte le fait que les
excédents sociaux sont mobilisés dans cette programmation pour la
constitution de provisions au sein du Fonds de réserve. Ce fonds pour
les retraites est destiné à préparer les régimes de
retraite aux incidences financières du choc démographique de
2005-2010. Une telle opération ralentira donc à moyen terme la
baisse du ratio d'endettement brut au sens de Maastricht. Mais le ratio de
dette nette des dotations au Fonds de réserve diminuerait dès
2000 quelle que soit l'hypothèse de croissance retenue, et atteindrait
57,6 points de PIB en 2002 dans l'hypothèse prudente et 55,6 points
de PIB dans l'hypothèse favorable.
ANNEXE 1
LA DETTE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AU
SENS DE MAASTRICHT PRÉSENTE PLUSIEURS PARTICULARITÉS QUI VIENNENT
PERTURBER LA LISIBILITÉ DES AJUSTEMENTS STOCK-FLUX
1 La
dette publique au sens de Maastricht exclut de son champ les décalages
comptables (F66) et les crédits commerciaux à court et long terme
(F65 + F75),
tous les Etats membres n'étant pas en mesure de fournir
des informations fiables sur ces opérations. Ceci pose un
problème dans la mesure où ces crédits de fait
(décalages comptables
32(
*
)
) ou de jure
(crédits commerciaux) constituent bien un mode de financement des
opérations réelles, car ils viennent minorer les émissions
de titres nécessaires pour une année donnée.
La conséquence de ce traitement est l'apparition d'une progression de la
dette publique au cours des années ultérieures
indépendantes des déficits et des acquisitions de
créances. En effet, le remboursement d'un crédit commercial
arrivant à échéance nécessite un financement
nouveau (émission de BTF, d'OAT ou de BTAN) et implique donc un
accroissement de la dette au sens de Maastricht.
Il en fut ainsi par exemple pour la suppression en 1993 du décalage d'un
mois du remboursement de la TVA aux entreprises : cette reconnaissance de dette
de l'Etat vis-à-vis des entreprises, qui a été
initialement évaluée à 93 MdsF, a été
comptabilisée sous forme de crédits commerciaux à long
terme, et n'a donc pas affecté à due concurrence la dette au sens
de la comptabilité européenne en 1993. La prise en compte de
cette dette sera ainsi effectuée de manière progressive, au fur
et à mesure de l'amortissement des titres de créances
distribués aux entreprises en 1993.
2 La dette au sens de Maastricht est exprimée en valeur nominale
,
c'est à dire selon la valeur d'émission des titres de dette.
Cette convention tend à simplifier l'articulation entre stock et flux,
puisqu'elle dispense de prendre en compte les variations de la valeur de
marché des titres émis dans les années
antérieures
33(
*
)
. Elle pose
néanmoins un problème particulier : la valeur nominale des titres
à moyen-long terme libellés en monnaie étrangère
(obligations d'Etat et bons du Trésor libellés en ECU), qui est
calculée au dernier cours de l'année des différentes
monnaies, est susceptible de se modifier d'une année sur
l'autre.
ANNEXE 2
DÉCOMPOSITION DE L'ENDETTEMENT
BRUT
SELON 4 DÉTERMINANTS
On met
en évidence 4 déterminants de la progression de l'encours de
dette publique entre 1980 et 1997 :
- la dette initiale au 31 décembre 1979 ;
- les déficits primaires structurels, le terme " primaire " signifiant
dans cette étude hors intérêts versés et revenus
d'actifs financiers reçus ;
- les déficits conjoncturels ;
- le financement des acquisitions de créances entre 1980 et 1997 net des
revenus financiers procurés par l'ensemble des actifs financiers (y
compris les créances acquises avant 1980).
Ces 4 déterminants, en s'ajoutant aux intérêts qu'ils
génèrent " en cascade " - c'est-à-dire que les
intérêts versés doivent être financés par
emprunt, ce qui entraîne le paiement de nouveaux intérêts -
expliquent en totalité la progression de l'endettement brut public.
En pratique, on suppose que les déficits primaires (structurels et
conjoncturels), les acquisitions de créances ainsi que les emprunts
arrivant à échéance sont financés - ou
refinancés - par emprunt (avec une durée de vie moyenne de 7
années) aux taux courants de marché (modélisés par
une moyenne pondérée des taux monétaires - 20% - et des
taux obligataires - 80%
34(
*
)
). Les charges
d'intérêt ainsi que les dettes qu'elles génèrent
sont alors rattachées à chaque déterminant.
Un problème apparaît au niveau de la dette initiale dont on
connaît mal la structure (taux d'intérêt initiaux,
échéances), ce qui empêche d'estimer la charge
d'intérêt qu'elle génère après 1980. On
évalue alors ce montant par la différence du total des
intérêt versés - donnée disponible - et des
intérêts générés par les déficits
primaires et le coût net des acquisitions de créances -
données estimées. Le calcul a posteriori du taux apparent
associé permet de valider cette méthode.
En définitive, on obtient 4 catégories d'endettement dont la
somme s'écarte très légèrement de l'endettement
effectif (écart inférieur à 0,1 point de PIB, qui est
ventilé à proportion entre les 4 déterminants).
ANNEXE 3
LE SOLDE STABILISANT LE
RATIO
D'ENDETTEMENT PUBLIC
La
variation de l'endettement public peut être assimilée en
première approximation - c'est-à-dire en négligeant les
flux nets de créances - au déficit public : pour stabiliser la
dette en valeur nominale, il est donc nécessaire de dégager un
simple équilibre des comptes publics.
Cependant, il n'est pas nécessaire que la dette soit stabilisée
en francs courants pour que l'endettement reste sur une trajectoire soutenable.
En effet, lorsque la richesse nationale s'accroît, un pays peut soutenir
le service d'une dette accrue dans les mêmes proportions. Mieux vaut donc
considérer le ratio rapportant la dette au PIB.
Le solde public entraînant la stabilité de ce ratio,
c'est-à-dire le solde stabilisant l'endettement public en part de PIB,
fait intervenir à la fois le niveau de la dette et la croissance
nominale de l'activité : une croissance nominale plus forte diminue en
effet d'une année sur l'autre le poids de la dette héritée
de la période précédente. Cet effet d'érosion, via
la croissance économique, du poids relatif de la dette est d'autant plus
important que le poids de cette dette est initialement
élevé
35(
*
)
. Ceci tendrait à
indiquer qu'il est d'autant plus facile de stabiliser son ratio d'endettement
que le niveau de départ de la dette est élevé et que
l'inflation est forte. Une telle analyse est cependant largement trompeuse.
D'une part, plus la dette est élevée, plus la part des
dépenses qui est consacrée au paiement d'intérêts
sur la dette est élevée et donc plus l'effort à fournir en
matière d'autres dépenses et de recettes pour atteindre un
même niveau de déficit est important. D'autre part, une inflation
élevée conduit, à un terme plus ou moins lointain à
une élévation des taux d'intérêt : ce qui est
gagné d'un côté par l'érosion de la dette est perdu
de l'autre par l'alourdissement des paiements d'intérêt.
Il est de ce fait plus pertinent de présenter aussi un indicateur de
solde primaire stabilisant l'endettement public en part de PIB. Il s'agit du
solde primaire, c'est-à-dire hors charges d'intérêt,
permettant de stabiliser la dette exprimée en part de PIB. Le solde
primaire stabilisant le ratio d'endettement est en effet d'autant plus
élevé que le poids de l'endettement dans le PIB est important et
que la différence entre le taux d'intérêt nominal et le
taux de croissance du PIB en valeur est forte
36(
*
)
.
Depuis un quinzaine d'années, le coût apparent de la dette est
devenu supérieur au taux de croissance du PIB en valeur, si bien qu'il
est nécessaire pour les finances publiques de dégager un
excédent primaire.
Dette
et déficit public
Calculs DP
ANNEXE 4
MÉTHODE DE VALORISATION DES ACTIFS
FINANCIERS ET NON FINANCIERS EN COMPTABILITÉ NATIONALE
La
méthode utilisée pour estimer et valoriser les actifs des
administrations pose quelques problèmes qui incitent à
relativiser les résultats présentés dans cette
étude :
- Les actifs financiers (valeurs mobilières) détenus par les APU
sont évalués comme les passifs à leur valeur de
marché, quand celle-ci est disponible, ce qui n'est pas toujours le cas,
en particulier pour les entreprises publiques. Pour mesurer la valeur de
celles-ci, les comptes de patrimoine utilisent leur situation nette annuelle,
ce qui peut poser problème dans certains cas. Ainsi, la
dégradation de la situation nette de certaines GEN au début des
années 1980 induit mécaniquement à partir de 1982 une
baisse de la valeur de l'encours des actions et autres participations de l'Etat
(en % du PIB). Le cas de Renault montre cependant que la valeur
actualisée de l'entreprise était sous-évaluée par
la situation nette annuelle, qui ne tenait pas compte des perspectives de
bénéfices futurs (qui se sont d'ailleurs
matérialisés par la suite).
- Les actifs non-financiers regroupent les actifs corporels reproductibles
(stocks, logements, ouvrages d'infrastructure, matériels de transport et
d'équipement) ou non-reproductibles (terrains, ressources du sous-sol),
"détenus" par les administrations.
Les actifs non financiers sont évalués à leur coût
de renouvellement, qui varie au cours du temps en fonction des prix des
éléments composant l'actif, et des éventuels changements
de classification, comme la transformation de terrains non-bâtis (actifs
fixes non-reproductibles) en terrains bâtis (actifs fixes
reproductibles
37(
*
)
). L'estimation fournie est
plus incertaine que pour les actifs financiers, d'autant plus que seuls les
actifs fixes reproductibles font l'objet d'un calcul d'amortissement
38(
*
)
.
En dernier lieu, les actifs incorporels (brevets, licences)
éventuellement détenus par les administrations ne sont pas
recensés dans les comptes de patrimoine. Ceux-ci n'apparaissent que dans
le patrimoine des ménages et des sociétés et
quasi-sociétés.
ANNEXE 5
IMPORTANCE DES DÉCALAGES COMPTABLES
ET DES CRÉDITS COMMERCIAUX À L'ACTIF
Le poids
de ces postes comptables dans la variation de l'actif des APU, et leur impact
sur la progression de la dette brute
39(
*
)
,
invite à étudier plus précisément leur contenu. Les
opérations retracées par la comptabilité nationale dans
ces rubriques sont les suivantes :
- Les crédits commerciaux à court (F65) et long terme
(F75)
désignent des crédits liés à une
livraison de biens et services. Pour les administrations publiques, il peut
s'agir notamment d'avances (arrhes, acomptes) consenties à des
fournisseurs avant la livraison définitive du bien, notamment dans le
cadre d'opérations d'investissement s'étalant sur plusieurs
années. Le poste enregistre également des créances entre
administrations (opérations en instance), liées aux multiples
transferts internes aux sous-secteurs des APU, notamment entre l'Etat et les
collectivités locales ou les régimes de sécurité
sociale. Enfin, sont également classés en crédits
commerciaux les impôts non recouvrés, ainsi que les factures
restant impayées (ex.: hôpitaux).
- Les décalages comptables (F66)
sont des opérations de
crédit spontanées, qui permettent de corriger comptablement le
déséquilibre résultant du rattachement à des
périodes différentes de la fourniture d'un bien et de son
règlement, sans qu'il y ait volonté explicite de faire
crédit. Ce décalage peut survenir notamment dans le cas d'un
service fourni en continu (eau, électricité,
téléphone, etc...), mais donnant lieu à des
règlements périodiques. Pour les administrations publiques, les
décalages comptables reflètent aussi certaines opérations
spécifiques :
* les flux relatifs aux dépenses et aux recettes de la période
complémentaire de l'exécution budgétaire sont
enregistrés en décalages comptables (au passif pour les
dépenses, et à l'actif pour les recettes), de même que les
dépenses engagées par anticipation, c'est à dire au titre
de l'exercice budgétaire suivant. Ces dernières sont
enregistrées à l'actif ;
* enfin, on enregistre également en décalages comptables à
l'actif les produits effectivement encaissés, mais non
enregistrés dans les comptes, en l'absence de pièces
justificatives. Ces produits sont en effet imputés provisoirement dans
un compte d'attente ou de régularisation (compte n° 47 pour les
collectivités locales).
Il convient de remarquer que les " décalages comptables " constituent
aussi pour les comptables nationaux un poste d'ajustement, permettant
d'équilibrer les comptes quand des écarts apparaissent entre les
emplois et les ressources ; ceci peut survenir notamment quand l'enregistrement
d'une même opération n'est pas effectué de façon
identique par le verseur et le bénéficiaire. Mais
d'éventuelles erreurs d'estimation sur l'ampleur ou la ventilation
actif/passif (en partie arbitraire) des décalages comptables n'affectent
pas a priori la qualité de l'estimation de la dette au sens de
Maastricht, qui les exclut de son champ au passif.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une séance tenue le mardi 8 juin 1999, sous la présidence de
M. Alain Lambert, président, la commission a procédé
à l'audition de M. Jean-Luc Tavernier, sous-directeur de la
prévision, sur l'étude remise par le ministère de
l'économie et des finances, relative à l'évolution de la
dette publique en France.
M. Alain Lambert, président, a rappelé, à titre liminaire,
l'intérêt porté, depuis plusieurs années, par la
commission des finances, à la dette publique, à ses
différentes composantes et à son évolution. Puis, il a
évoqué la demande adressée par la commission des finances
à la direction de la prévision, consistant à analyser
rétrospectivement l'évolution de l'endettement public entre 1980
et 1997. Il s'est félicité que la commission des finances puisse
ainsi accéder à une partie, même minime, des moyens dont le
Parlement dote chaque année l'exécutif.
M. Jean-Luc Tavernier s'est à son tour réjoui, au travers de la
présentation de cette étude commandée à la
direction de la prévision de pouvoir renouer avec une longue tradition
de relations suivies avec la commission des finances du Sénat, qui
s'était révélée tout à fait utile. Puis il a
présenté l'analyse descriptive de la dette réalisée
sur une période de vingt ans et indiqué que celle-ci, compte tenu
de son intérêt, serait par ailleurs publiée dans le rapport
annuel de l'INSEE sur les comptes économiques de la Nation.
Il a tout d'abord évoqué la forte croissance, entre 1980 et 1997,
du ratio dette publique rapportée au PIB, qui avait presque
triplé, passant de 21 points à 58,1 points, soit un chiffre
proche du plafond fixé en ce domaine par le Traité de Maastricht.
Il a néanmoins relevé que la situation française restait
proche de celle de la plupart des autres pays européens, puisque le
ratio était en moyenne de 69,5 % au sein de l'Union européenne.
Aussi en a-t-il tiré deux conclusions importantes. Il a d'une part
souligné que l'accroissement du poids de la dette s'expliquait à
la fois par l'accumulation de déficits publics excessifs, et par le
niveau des taux d'intérêt réels qui avaient
été supérieurs au taux de croissance. Il a relevé,
d'autre part, que la progression de la dette brute ne s'étant pas
accompagnée d'une accumulation d'actifs, le patrimoine net des
administrations publiques avait donc diminué durant cette même
période.
Il a alors souligné l'intérêt de bien distinguer,
s'agissant de l'évolution des déficits publics, les
modalités de leur constitution, en isolant l'impact de l'endettement
public susceptible de provoquer "l'effet boule de neige",
générateur de plus de déficit. Puis, évoquant le
critère de Maastricht relatif au poids de la dette publique par rapport
au PIB, il a précisé qu'il s'agissait non pas d'éviter les
déficits publics en tant que tels, mais de lutter contre les
déficits excessifs et de les apprécier au regard du principe de "
soutenabilité budgétaire ". Il a ensuite précisé
que la responsabilité des déficits publics dans
l'évolution du ratio avait été atténuée par
l'effet de la croissance du PIB. Puis il a tenu à souligner que les taux
d'intérêt réels, dont le niveau était
répercuté avec quelque retard cependant sur le coût moyen
de la dette, avaient été, depuis 1980, supérieurs au taux
de croissance. Aussi, après avoir relevé qu'il existait en 1993
un décalage de 8 points entre le coût réel apparent de la
dette et le taux de croissance, il a souligné que si le coût
moyen de la dette avait été égal sur la période
1980-1997 au taux de croissance nominal, le ratio d'endettement public n'aurait
pas dépassé 40 points de PIB en 1997 contre 58,5 actuellement. Il
en a conclu que la très forte augmentation de ce ratio pendant cette
période pouvait être expliquée par deux
phénomènes de même ampleur et de même effet : la
hausse des déficits publics et l'existence de taux
d'intérêts réels élevés.
Il a ensuite présenté la notion de " solde stabilisant " qui
correspond au besoin de financement des administrations publiques qui
permettrait de stabiliser d'une année sur l'autre le poids de la dette
au sein du PIB. Ainsi, en 1998, alors que les déficits publics
s'étaient élevés à 2,9 points de PIB, le solde
stabilisant avait été estimé à 2,3 points de PIB,
soit un écart de 0,6 point. Il a par ailleurs indiqué que
pour 1999, le solde des comptes publics était estimé à 2,3
points, soit un niveau identique à celui du solde permettant de
stabiliser le poids de la dette dans le PIB.
Il a en effet rappelé que le " solde primaire stabilisant "
c'est-à-dire le solde calculé hors charges
d'intérêts, inéluctables, devait être d'autant plus
élevé que la dette publique était importante et que
l'écart entre le coût apparent de celle-ci et le taux de
croissance du PIB était important. Il a ainsi précisé
qu'en 1998 le solde primaire permettant de stabiliser la dette était,
compte tenu des dépenses liées aux intérêts, de 1,2
point de PIB, et qu'il supposait donc que les administrations publiques
dégagent une capacité nette de financement. A contrario, ce solde
stabilisant était négatif à hauteur de 1,1 point en
1980, la différence avec la situation observée actuellement
provenant de l'évolution des charges d'intérêt
résultant des taux d'intérêt réels et du niveau de
la dette qui avaient fortement accru les contraintes de gestion des finances
publiques.
Il a ensuite évoqué l'évolution de la dette nette qui
avait crû depuis 1980 dans les mêmes proportions que la dette
brute, ce qui permettait d'en déduire que l'acquisition d'actifs
financiers n'était pas à l'origine de l'accroissement de la dette
brute. Il a également relevé que, par voie de conséquence,
le patrimoine net des administrations publiques avait fortement diminué
depuis 1980, passant de 53,3 points du PIB à 7,6 points du PIB en 1998
mais qu'il restait en tout état de cause positif.
Il en a conclu que la diminution graduelle du déficit public permettrait
de réduire le ratio d'endettement au sens du Traité de Maastricht
et rappelé que celui-ci devrait diminuer de 0,5 à 1,5 point de
PIB entre 1999 et 2002. Cette baisse serait portée entre 1 et 3 points
de PIB si le fonds de réserve pour les retraites était
constitué exclusivement d'obligations d'Etat.
M. Alain Lambert, président, l'a remercié pour cette
présentation et souligné l'intérêt de cette
étude qui, à sa manière, tentait de s'affranchir des
contraintes de l'annualité budgétaire.
M. Philippe Marini, rapporteur général, après avoir
dressé un parallèle entre la façon dont la dette et ses
intérêts était comptabilisés au sein du budget de
l'Etat et au sein des budgets des collectivités locales, a tenu à
relever que la progression de la dette publique avait servi à financer
des dépenses courantes de fonctionnement. Il a par ailleurs
souhaité obtenir des précisions quant aux éléments
présentés en matière d'analyse patrimoniale dans la mesure
où l'on notait, au même moment, un accroissement de l'endettement
public, ainsi qu'une diminution de la valeur des actifs financiers
détenus par l'Etat. Après avoir noté que le rendement de
ces actifs était très sensiblement inférieur au coût
moyen de la dette, il a douté de l'efficacité de la gestion par
l'Etat de son patrimoine financier.
Il s'est enfin interrogé sur les modalités de calcul de la
valorisation des participations de l'Etat et sur la manière dont
étaient appréciées, dans ce cadre, les subventions
versées par l'Etat. Il a enfin souhaité obtenir des
précisions sur la prise en compte des éléments figurant au
"hors-bilan" de l'Etat et du secteur public, et évoqué à
ce titre les incertitudes pesant sur les modalités futures de
financement des retraites ou sur le coût des garanties accordées
aux structures de défaisance.
M. Jean-Luc Tavernier a rejoint le constat fait par M. Philippe Marini,
consistant à noter que l'accroissement de la dette publique avait servi
à financer des dépenses courantes, et non à
accroître les actifs détenus par l'Etat. Il a par ailleurs
estimé difficile de porter un jugement impartial sur les
modalités et l'efficacité de la gestion par l'Etat de ses actifs
financiers, en rappelant qu'il était malaisé en ce domaine de
définir un indicateur qui soit totalement pertinent et
véritablement opérationnel. Il a relevé que la
rentabilité réelle des actifs de l'Etat avait été
inférieure de 4 points au coût moyen de la dette.
S'agissant des modalités de calcul de la valorisation des participations
de l'Etat, il a précisé que ce calcul se faisait soit par
référence à la valeur du marché, soit en fonction
des règles particulières propres à la comptabilité
nationale, qui s'appuyaient notamment sur la notion de " situation nette
annuelle ".
Il a enfin indiqué, à propos de la comptabilité
patrimoniale, qu'une réflexion était actuellement menée en
ce domaine, mais que celle-ci se révélait délicate
à poursuivre, car elle nécessitait au préalable une
harmonisation des définitions utilisées. Il a rappelé
l'effort de transparence conduit actuellement, s'agissant de la
détermination des principaux éléments du "hors bilan". Il
a ainsi estimé le coût des structures de défaisance
à environ 2 points de PIB, celui des garanties accordées en
matière de crédit ou de prêt au logement entre 2 et 4
points de PIB, et indiqué que le coût réel de la dette
implicite des régimes de retraite par répartition était
difficile à cerner précisément. Il a ainsi fait
référence à une étude menée par l'OCDE sur
la période 1974-2070 qui faisait état d'un besoin cumulé
de financement de plus de 100 points de PIB. De même, il a indiqué
qu'une étude menée par la direction de la prévision sur la
période 1998-2100 concluait, selon les hypothèses de
départ retenues en termes de taux d'actualisation ou de niveau du
chômage, à des besoins de financement variant de 50 à 300
points de PIB.
M. Jean-Philippe Lachenaud a tout d'abord rappelé les différences
existant entre le budget de l'Etat et celui des collectivités locales en
matière de prise en compte de la dette et souhaité que cette
étude puisse contribuer à convaincre l'opinion publique de
l'intérêt de réduire le poids et le montant de la dette
publique.
S'agissant du niveau des taux d'intérêt réels, il s'est
demandé si celui-ci n'était pas dû justement à
l'importance des déficits publics, et à l'effet d'éviction
que ceux-ci pouvaient entraîner. Il s'est enfin interrogé sur
l'opportunité d'affecter une partie des ressources issues des
privatisations au désendettement du secteur public.
M. Maurice Blin s'est demandé si, que ce soit en France ou dans les
autres pays européens, le niveau élevé des taux
d'intérêt réels n'était pas dû à la
faiblesse des capitaux disponibles. Il a par ailleurs souhaité savoir si
le niveau de ces taux n'était pas susceptible d'avoir des
conséquences excessives sur les choix d'investissements des entreprises
et, partant, de lourdes conséquences sociales.
M. Jean-Luc Tavernier a précisé à M. Jean-Philippe
Lachenaud que, au-delà du contenu même du pacte de
stabilité et des critères qu'il contenait, tous les pays
européens partageaient aujourd'hui la même volonté
d'adopter des politiques budgétaires plus rigoureuses et une politique
monétaire plus souple. Il a également estimé que les
politiques budgétaires menées, notamment en France, avaient eu un
effet sur le coût moyen de la dette en accroissant fortement les besoins
de financement des administrations publiques.
En réponse à M. Maurice Blin, il a estimé que le niveau
des taux d'intérêt réels était actuellement revenu
à une situation plus normale, ceux-ci n'étant que
légèrement supérieurs au taux de croissance réel,
et qu'il convenait d'éviter, à ce titre, le retour à des
situations extrêmes telles que la France avait pu les connaître,
dans des sens opposés cependant, au cours des années 1970 et des
années 1980.
M. Alain Lambert, président, a indiqué que la présente
étude serait publiée sous la forme d'un rapport d'information de
la commission des finances et préconisé que des études
similaires soient réalisées à l'avenir dans les
mêmes conditions. Il a souhaité qu'elles puissent notamment porter
sur l'évolution comparée des dépenses de fonctionnement et
d'investissement de l'Etat.
1
De 283,3 milliards de francs au
31 décembre 1997.
2
Soit le cumul des variations de dette liées à la
dette initiale, aux déficits conjoncturels et aux achats nets d'actifs.
3
Ce que reconnaît implicitement l'étude en indiquant
" Le fait saillant de la période considérée est la
dégradation du déficit structurel masquée par les
excédents conjoncturels ".
4
Les modalités d'évaluation des actifs financiers
publics posent de tels problèmes méthodologiques que les
estimations qui sont faites doivent être prises avec beaucoup de
précautions.
5
"2003 - Perspectives macroéconomiques ".
Délégation du Sénat pour la Planification. M. Joël
Bourdin n° 63 - 1998-1999.
6
La définition de la dette au sens de Maastricht est
présentée en annexe 1. Les séries d'endettement au sens de
Maastricht n'ont pu être reconstituées qu'à partir de 1980.
Des séries en comptabilité nationale disponibles pour les
années antérieures à 1980 font apparaître une
réduction du ratio d'endettement de 53,4 points en 1970 à 37,6
points en 1980. Cette évolution devrait apparaître pour les
séries au sens de Maastricht.
7
A partir du 1
er
janvier 1996, une modification de
classement comptable fit passer le FSV du secteur des ODAC à celui des
administrations de sécurité sociale.
8
L'année 1997 se caractérise par une
progression simultanée de l'endettement de ces sous-secteurs. Cette
évolution s'explique pour l'essentiel par la reprise, par la CADES, de
la dette de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale
(ACOSS) à l'égard de la Caisse des Dépôts et
Consignations (CDC) au 1
er
janvier 1998, représentative
des déficits cumulés du régime général de la
sécurité sociale en 1996 et 1997 (75 MdsF) ainsi que d'une
avance de trésorerie de 12 MdsF destinée à couvrir le
déficit prévisionnel de 1998. Cette opération, neutre
à terme au niveau de l'endettement public, n'aurait eu aucun impact
dès 1997 si la CADES n'avait dû constituer dès la fin 1997
une trésorerie - et donc s'endetter - afin de rembourser le
crédit de la CDC dès le début de l'année 1998.
9
Ainsi, par exemple, le volume des pensions des
fonctionnaires de l'Etat devrait s'accroître considérablement dans
les années à venir. Le passif correspondant au paiement des
pensions de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'Etat entre
1999 et 2040 - calculé d'après les chiffres
présentés par la commission Charpin - représenterait
actuellement plus de la moitié de la richesse nationale.
10
Néanmoins, le champ et la méthode de calcul de
la dette au sens de Maastricht diffèrent de ceux retenus par le
système français de comptabilité nationale pour calculer
la dette des administrations publiques. Ceci a pour conséquence
d'introduire plusieurs « coins » dans le schéma ici
présenté (cf. annexe 1).
11
La variation moyenne du ratio d'endettement brut est
égale à la somme de ces deux valeurs moyennes, à laquelle
il faut déduire l'effet de la croissance du PIB.
12
Dans ce chapitre sont étudiés les
déterminants au cours de la période 1980-1997 de la progression
de l'encours de dette. La dette de référence est donc la dette
au 31 décembre 1979 (soit 21,7 points de PIB) et non la dette au 31
décembre 1980 (soit 21,0 points de PIB) reprise dans les tableaux
et graphiques des autres parties de cette étude.
13
Les déficits conjoncturels sont en fait égaux aux
déficits primaires conjoncturels.
14
La méthode d'estimation des différentes
contributions à l'accroissement de l'encours de dette est
expliquée en annexe.
15
Le fait saillant de la période considérée
est la dégradation du déficit structurel masquée par les
excédents conjoncturels.
16
Cette définition peut apparaître hybride. Il aurait
été intéressant de séparer, au niveau des revenus
reçus par les administrations publiques, les revenus issus des
créances acquises avant 1980 et les revenus issus des créances
acquises entre 1980 et 1997 mais cette ventilation n'est pas disponible.
17
Le poste « Monnaie interbancaire » retrace
les variations et engagements monétaires entre agents financiers. Les
variations des comptes ouverts à la Banque de France au nom des
institutions financières tenues de constituer des réserves
figurent à ce poste.
18
Une analyse plus complète est présentée en
annexe.
19
Le coût moyen nominal de la dette publique est égal
aux intérêts versés rapportés à l'encours de
dette brute détenus à la fin de l'année
précédente. Le coût moyen réel est ce coût
moyen nominal déflaté par les prix de la consommation des
ménages.
20
Les taux d'intérêt réels estimés sont
les taux d'intérêt exprimés en moyenne annuelle et
déflatés par le prix de la consommation des ménages.
21
La règle de Taylor indique quel est le niveau des taux
d'intérêt adaptés aux conditions internes d'une
économie. Ainsi, le taux d'intérêt réel
évoluerait autour d'un taux réel « neutre »
selon l'écart d'inflation à une cible prédéfinie et
en fonction de l'écart de l'activité avec son potentiel.
22
En particulier, ce raisonnement est à la base du
concept de « solde stabilisant » qui est
présenté en annexe 3.
23
Les
prix de la consommation des ménages est ainsi
passé de 13,1% en 1980 à 3,1% en 1990. Ce dernier indice a connu
ensuite une nouvelle décroissance pour atteindre 1,3% en 1997.
24
Toutes choses égales par ailleurs, le coût nominal
de la dette est inférieur aux taux d'intérêt nominaux
courants lorsque les taux d'intérêt progressent; la situation
s'inverse pour des taux d'intérêt décroissants.
25
L'effet est plus ambigu au niveau du coût réel des
nouvelles émissions. Cette étude se focalisant sur les
déterminants directs de la progression de la dette publique, certaines
interactions économiques, telles l'impact de la désinflation sur
le niveau des taux d'intérêt réels, ne sont volontairement
pas abordées.
26
Les taux d'intérêt nominaux sont alors égaux
aux prix à la consommation auxquels sont ajoutés les taux
d'intérêt réels effectifs du marché.
27
Ce chiffre correspond à la somme des contributions des
déficits primaires structurels (29,3 points de PIB) et des
déficits conjoncturels (0,9 point de PIB).
28
On rapporte pour ce calcul les revenus de la
propriété perçus par les APU (intérêts,
dividendes, et autres), à l'exclusion des revenus de la terre (R43),
à l'encours des actifs financiers détenus à la fin de
l'année précédente, soit r
n
= (R41 + R44 +
R45)
n
/ (F00-80)
n-1
.
29
Les ODAC et les ASSO présentent des écarts de
rendement plus faibles.
30
Les revenus perçus sous forme de dividendes peuvent
être aisément isolés et rapportés à la part
de l'actif détenu sous formes d'actions. Le rendement réel des
participations de l'Etat est négatif depuis 1980.
31
Le domaine public « naturel » (paysages,
espace aérien, eaux territoriales, etc....) est exclu du champ de la
comptabilité nationale, car il n'a pas été acquis à
titre onéreux. D'autre part, les biens durables militaires (porte-avions
par exemple), considérés comme issus d'un investissement en
comptabilité budgétaire (ils sont inscrits au titre V) sont
exclus du patrimoine des APU par la comptabilité nationale, qui les
classe en consommations intermédiaires.
32
Ceux-ci sont des crédits de fait qui permettent de
corriger les écarts résultant du rattachement à des
périodes différentes de la réalisation d'une
opération économique et de son règlement. Les flux
relatifs aux recettes et aux dépenses de la période
complémentaire de l'exécution budgétaire (janvier-mars)
sont ainsi comptabilisés en décalages comptables dans les
opérations financières de l'Etat.
33
La dette publique publiée par l'INSEE et le SESOF est au
contraire exprimée en valeur de marché, ce qui nécessite
de réévaluer chaque année le stock des obligations d'Etat
en fonction des variations de leurs cours. Au 31 décembre 1997, la
valeur de marché de la dette publique était supérieure de
283,3 MdsF à sa valeur nominale.
34
Les résultats finaux sont peu sensibles aux changements
de durée moyenne de la dette publique et à la pondération
entre taux monétaires et taux obligataires.
35
Formellement, on peut écrire :
avec : D
t
= dette publique à la date t, S
t
=
solde public à la date t et y
t
= PIB nominal à la date
t
d'où
Le solde qui stabilise le ratio d'endettement public peut donc
s'écrire:
où le g
t
est le
taux de croissance de y
t
36
Formellement on peut écrire :
où r
t
est le taux
d'intérêt nominal apparent de la dette,
r
t
. D
t-1
le service de la
dette, et SP
t
le solde primaire.
Le solde primaire stabilisant le ratio d'endettement public peut donc
s'écrire ;
37
Les terrains sont alors comptabilisés
différemment, leur valeur étant enregistrée avec celle des
constructions qu'ils supportent.
38
La dépréciation (par suite d'usure, d'obsolescence
ou en cas de dommages accidentels) du stock des actifs fixes reproductibles est
mesurée chaque année par la « consommation de capital
fixe ».
39
Il convient de souligner ici qu'un accroissement des
décalages comptables ou des crédits commerciaux à l'actif
d'une administration peut contribuer à accroître la dette brute au
sens de Maastricht. Ceci n'est pas contradictoire avec le fait que celle-ci
soit corrigée des décalages comptables et des crédits
commerciaux au passif. En effet, un flux net de décalages comptables
à l'actif peut être financé par exemple par un emprunt
auprès d'un établissement financier (F71) ou par une
émission d'obligations (F40), et affecter ainsi à due concurrence
la dette Maastricht.