c) Le règlement de certaines difficultés hors des procédures légales
Par
ailleurs, la pratique du contrôle budgétaire soulève, du
point de vue de la Cour des comptes, un certain nombre de difficultés.
La critique la plus grave formulée par la Cour dès son rapport
public de 1991 et développée dans celui de 1995, tient
aux
difficultés budgétaires "réglées hors
procédures légales
".
A cet égard, avant de présenter les observations de la Cour, le
groupe de travail note que celle-ci défend le champ de compétence
des chambres régionales des comptes en se montrant très
réservée, voire en récusant les diverses formes de
"règlement amiable" d'un certain nombre de difficultés
pratiquées par les préfets.
Cette appréciation témoigne d'une une lecture rigide des
dispositions relatives au contrôle budgétaire.
•
S'agissant des
budgets non votés ou
votés et non transmis
dans les délais, la Cour a noté
en 1991 qu'à "compter des budgets de 1984 et
surtout de 1985, les
préfets ne se sont plus estimés obligés de saisir les
chambres [...]. C'est seulement lorsqu'ils ont la conviction que le budget ne
pourra pas être voté, fût-ce au prix d'un délai
supplémentaire, qu'ils se résolvent à alerter la
chambre
".
Reconnaissant que "
cette évolution
[n'était]
pas
sans avantages pratiques
", la Cour relevait néanmoins que cette
pratique tendait à aggraver le caractère tardif de la date
d'adoption des budgets locaux. Revenant sur ce point dans son rapport public de
1995, la Cour a cependant estimé qu'il était "
normal que le
préfet vérifie si ces situations sont seulement accidentelles, et
susceptibles d'être rapidement réglées par les
assemblées délibérantes elles-mêmes, plutôt
que de multiplier les saisines inutiles".
La Cour assortit tout de
même l'énoncé de cette "tolérance" d'une demande
tendant à ce que les préfets tiennent les chambres
régionales des comptes informées des situations où ceux-ci
s'abstiennent d'une saisine de la chambre régionale des comptes, ce que
le droit en vigueur ne prévoit pas.
•
S'agissant
des autres critères légaux
d'ouverture d'une procédure budgétaire
, la Cour insiste, en
revanche, dans son rapport public de 1995, sur la nécessité que
"
le représentant de l'Etat saisisse la chambre régionale dans
les conditions fixées par la loi
".
Soulignant que "
les exemples persistent, de cas où les chambres
régionales n'ont pas été saisies de situations
insincères ou déséquilibrées, qui étaient
pourtant connues
", la Cour indique que ces pratiques tendent à
favoriser l'aggravation de situations de déséquilibre.
Le groupe de travail relève cependant que dans son rapport public de
1991, la Cour des comptes avait émis des appréciations
relativement nuancées sur ces "
difficultés
réglées hors procédures légales
".
Ainsi, en ce qui concerne les
dépenses obligatoires
et les dettes
exigibles non acquittées, la Cour notait que les "
diverses
procédures informelles
" conduites entre le préfet et les
personnes demandant l'inscription des crédits obligatoires au budget
concerné donnaient "
souvent des résultats jugés
satisfaisants
".
Enfin, pour ce qui touche aux
budgets votés en
déséquilibre
, la Cour constatait de la même
façon qu'il "
arrive que des préfets s'efforcent d'obtenir de
la collectivité concernée une nouvelle délibération
rétablissant cet équilibre, plutôt que de saisir la
chambre
". Dans ce cas, la Cour des comptes adopte
une position plus
réservée considérant que "
ces pratiques ne semblent
pouvoir se justifier que dans les situations les plus claires et les plus
simples
lorsque le déséquilibre est flagrant, qu'il
résulte d'une simple erreur et qu'il est aisé à
redresser
".
•
L'analyse du contrôle budgétaire
effectuée par la Cour des comptes porte
, par ailleurs, sur les
"
difficultés budgétaires non décelées
".
A cette occasion, la Cour insiste sur
l'insuffisance des moyens dont
disposent les services des préfectures pour exercer cette mission
et, plus largement, sur les faiblesses de l'articulation de l'action conduite
dans ce domaine avec celle des services extérieurs du ministère
des finances et plus particulièrement ceux de la direction de la
comptabilité publique.
Soulignant que les
moyens des services des représentants de l'Etat
"
demeurent notoirement insuffisants, au regard de la tâche
considérable que la loi impose
, la Cour rappelle que "
les
différents documents budgétaires et comptables leur parviennent,
chacun, en quelques semaines groupées, pour la totalité des
communes et autres collectivités du ressort : ce qui représente
selon la taille des arrondissements et la dispersion des structures locales
,
de l'ordre de la centaine à celui du millier, ou davantage
pour
chaque catégorie d'actes ; le représentant de l'Etat dispose d'un
mois pour saisir la chambre, ses services étant réputés,
selon les cas, apprécier la réalité et la
sincérité des dépenses et recettes, l'équilibre
prévisionnel des budgets".