II. ENVIRONNEMENT INSUFFISAMMENT FAVORABLE
A LA CREATION ET A L'UTILISATION
DES NOUVELLES
TECHNIQUES D'INFORMATION ET DE COMMUNICATION
Pour que l'introduction des NTIC dans notre pays soit
favorable à l'emploi, il importe que nous en soyons non seulement des
utilisateurs mais aussi des créateurs.
Le développement d'activités nouvelles, l'amélioration de
la qualité des produits et des services, la recherche, grâce
à elles, de nouveaux débouchés et d'une croissance plus
soutenue doivent ainsi l'emporter sur des considérations tendant
à privilégier exclusivement les gains de productivité, la
défense des parts de marché et l'assainissement des bilans
financiers.
En effet, l'innovation crée des emplois quand elle débouche sur
une offre de nouveaux produits et services ; mais elle en détruit si
elle est réduite à la rationalisation d'activités
traditionnelles, au moyen de techniques ou de procédés venus
d'ailleurs.
Or, malgré une prise de conscience récente de ce problème
par les pouvoirs publics, l'environnement financier, fiscal et administratif
français demeure trop peu favorable à la
création
d'entreprises innovantes.
L'utilisation
des NTIC n'est pas non plus encore suffisamment
encouragée, notamment en ce qui concerne la tarification de l'usage des
réseaux.
A) LA CRÉATION D'ENTREPRISES INNOVANTES
N'EST PAS
ASSEZ ENCOURAGÉE
Les nouvelles techniques d'information et de communication
représentent un potentiel de croissance, donc d'emplois, important, que
ce soit dans les infrastructures, les équipements et services ou les
logiciels.
Elles contribuent ainsi (avec les autres technologies nouvelles) à un
tiers de l'augmentation annuelle du PIB américain.
Il est clair que l'avance considérable acquise par les Etats-Unis dans
ce domaine n'est pas due essentiellement à des géants bien
établis, comme IBM ou ATT (malgré l'inventivité des
BellLabs), mais à des firmes beaucoup plus récentes, comme Intel
(1968), Microsoft (1975), Oracle (1977) parties de presque rien pour devenir
aujourd'hui des acteurs majeurs au niveau mondial.
Intel et Microsoft font désormais partie de l'establishment. Mais tandis
que la concurrence d'AMD et Cyrix devient sérieuse pour le premier, la
dynamique d'Internet a eu sur le second des effets déstabilisateurs et
l'oblige à une vigilance et une adaptation permanentes. Les
succès du navigateur de Netscape, la stratégie des tenants des
ordinateurs de réseaux (Network Computer), et les promesses du langage
java le poussent notamment à réagir.
D'étonnantes percées sont possibles dans le domaine des serveurs
(Sun Microsystems), des matériels (3Com et US Robotics) et logiciels de
réseau (Oracle). Elles sont souvent le fait de petites
sociétés émergentes (start-up) dont les grands groupes
peuvent ensuite s'efforcer de prendre le contrôle (cf l'acquisition de
Web TV par Microsoft, ou de Nexgen, spécialisée dans les clones
de Pentium, par AMD etc..).
C'est l'éclosion de ce type d'entreprises qu'il nous faut absolument
favoriser en France.
Des opportunités de réussite éclatante leur sont ouvertes,
en particulier en matière logicielle (en dehors des logiciels
d'exploitation exclusivement américains) pour une mise de fond initiale
limitée, s'agissant d'investissement immatériel.
C'est ainsi que Business Object est devenu l'un des leaders mondiaux en ce qui
concerne l'aide à la décision par l'exploitation de base de
données, de même qu'O² Technology pour les systèmes de
gestion des bases de données objet ou ILOG dans l'optimisation des
ressources en temps réel.
Il n'est pas rare que de telles entreprises doublent leur chiffre d'affaires en
une année, la diffusion de logiciels n'étant soumise,
contrairement aux activités de services informatiques, à aucune
contrainte matérielle particulière.
Mais le démarrage d'une activité innovante, dans le cadre ou non
d'une entreprise nouvelle, suppose de rassembler autour de la promotion d'un
projet original, des ressources financières et humaines variées,
avec la bienveillante confiance du fisc et de l'administration.
Il ne s'agit pas d'une pratique isolée, développée ex
nihilo, mais souvent du produit d'une activité de recherche d'un ou
plusieurs laboratoires publics ou privés, d'un essaimage à partir
d'organismes publics (comme l'INRIA) ou d'entreprises du secteur concurrentiel
(Cf Dassault Systems).
Il n'y a pas ainsi nécessairement création d'une personne morale
nouvelle mais parfois seulement filialisation, réorientation ou
changement d'objet social, dans le cadre par exemple de la reprise d'une
entreprise en difficulté ou d'une prise de contrôle
extérieure.
Le recours à l'expertise, au conseil ou à la participation de
personnes expérimentées s'avère par conséquent
indispensable.
Or, le bilan global de la création d'activités innovantes en
France n'est pas satisfaisant. Des carences graves se manifestent malgré
les mesures prises qui se révèlent donc insuffisantes.
1. Un bilan global médiocre
Dans son livre blanc "
Pour la création d'un
environnement favorable
aux entreprises de croissance
",
l'association "
Croissance plus
" s'alarme :
"
La France dispose d'atouts considérables qui sont largement
sous-exploités aujourd'hui. Elle a une population
particulièrement bien éduquée. Ses ingénieurs sont
très recherchés. Cela devrait lui permettre d'être un
acteur important de la révolution technologique. Les Français ont
de plus la réputation méritée d'être
créatifs ".
Or, "
notre pays est en train de passer à côté de l'un
des plus formidables gisements de croissance, de richesse et d'emploi de
l'histoire de l'humanité. Il n'y a que deux éditeurs de logiciel
français parmi les 50 premiers mondiaux. Il n'y a aucun Français
parmi les 10 premiers constructeurs mondiaux d'ordinateurs et seulement
une société française parmi les 10 premiers mondiaux des
semi-conducteurs".
Depuis deux ans, le nombre de créations d'entreprises en France baisse
chaque année de 5.000.
M. LAFFITTE, dans son avis sur le budget de la recherche pour 1998, constate de
son côté que si la France figure au 4e rang des pays
industrialisés pour son effort en recherche et développement
technologiques, elle n'occupe que le 22
e
rang en termes de mise sur
le marché de produits ou de prise de brevets d'innovation.