C. DES MESURES QUI COMPORTENT DE GRAVES RISQUES POUR LE FINANCEMENT DE NOTRE ÉCONOMIE, LA CROISSANCE ET L'EMPLOI

Enfin, votre commission des finances considère que les prélèvements opérés sur l'épargne font peser un double risque sur le fonctionnement de notre économie. D'une part, elles risquent d'hypothéquer la reprise de la consommation actuellement constatée. D'autre part, elles rendront plus difficile le financement de notre économie.

1. LE RISQUE RÉCESSIF

L'augmentation massive des prélèvements sur l'épargne, près de quatre fois le prélèvement opéré par le gouvernement Juppé lors de la loi de finances pour 1996, est susceptible de constituer un frein à la reprise de la croissance.

En premier lieu, il y a un risque que les prélèvements opérés sur les ménages les incite à épargner davantage afin de reconstituer leur patrimoine au niveau désiré .

On suppose en effet que l'épargne est relativement insensible aux variations de fiscalité. Cependant, si l'on prend en compte les apports théoriques de Milton Friedman, on peut considérer que les ménages souhaitent détenir une fraction constante de leur revenu sous forme d'encaisses liquides et sous forme d'actifs financiers.


Lorsque le prix des actifs financiers augmente subitement (par exemple une hausse de la Bourse), la valeur de la fraction du revenu détenue sous cette forme est supérieure à la valeur souhaitée. Les ménages ont alors tendance à se considérer plus riches et réduisent leur effort d'épargne ; la consommation augmente : c'est "l'effet de richesse".

A rebours, si une taxation supplémentaire réduit le montant de leur épargne, les ménages vont s'efforcer de reconstituer leur patrimoine au niveau désiré et pour ce faire vont accroître leur effort d'épargne : c'est " l'effet de pauvreté ".

Cet "effet de pauvreté" est d'autant plus à craindre que, d'une part, l'évolution récente des marchés financiers a pu modifier la perception qu'ont les ménages de leur patrimoine et, d'autre part, le besoin d'épargner pour compléter les retraites reste fort.

Par ailleurs, on peut redouter, comme on l'a vu, des phénomènes de délocalisation de l'épargne susceptibles de rendre plus difficile l'ajustement épargne-investissement.

En outre , on peut penser que la taxation accrue de l'assurance-vie provoquera des transferts d'épargne vers d'autres formes de placement , notamment les livrets défiscalisés, ce qui pourrait affecter la tenue du marché obligataire. A cet égard, il convient de souligner qu'en 1996 les entreprises d'assurance ont souscrit 52 % des émissions obligataires du Trésor et que l'année 1998 semble particulièrement mal choisie pour procéder à une réforme d'ensemble de l'assurance-vie dans la mesure où arriveront à échéance près de 100 milliards de francs de contrats souscrits en 1990, soit le double des "tombées" habituelles.

Si de tels phénomènes se produisaient ils provoqueraient, toutes choses égales par ailleurs, une diminution de la demande de titres ce qui aurait pour effet d'entretenir des pressions à la hausse sur les taux d'intérêt français.

Ce risque récessif ne doit pas être exagéré. Mais il existe. Beaucoup plus important et beaucoup plus probable est le risque de financement.

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