B. LES PROPOSITIONS
Conscient à la fois du devoir de mémoire de l'Etat vis-à-vis des Français et surtout, des nouvelles générations, mais également du défi qu'il représente, votre rapporteur souhaite émettre certaines propositions pour améliorer le travail effectué par la Délégation à la Mémoire et à l'Information Historique. Ces suggestions sont le résultat des nombreuses visites effectuées dans toute la France et des différents entretiens que votre rapporteur a eus avec les responsables de la Délégation à la Mémoire et à l'Information Historique et les associations du monde combattant. Empreintes d'un grand pragmatisme, elles proposent des améliorations ponctuelles, mais également des réformes d'une plus grande envergure afin de redonner à la politique de la mémoire la place centrale qu'elle mérite au sein du ministère des anciens combattants.
1. Des améliorations ponctuelles
a) Dans l'entretien et la rénovation du patrimoine
Votre rapporteur a déjà eu l'occasion de saluer
l'excellent travail effectué par le département du patrimoine et
les directions interdépartementales des anciens combattants pour
l'entretien et la restauration des sépultures de guerre. Toutefois, il a
également fait part de son inquiétude devant le ralentissement
des travaux depuis 1996.
Proposition n° 1 : respecter le programme de travaux pour les
sépultures de guerre 1996-2000 lancé par le ministère des
anciens combattants en accordant bien les 50 millions prévus pour
leur financement.
Proposition n° 2 : construire les bases prévues dans le
plan de modernisation de l'entretien des nécropoles nationales mis en
place en 1992.
Depuis quatre ans, l'administration des sépultures de guerre est
partagée entre, d'une part, la Direction de l'Administration
Générale, qui gère le titre III, et, d'autre part, la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
Historique, qui a en charge le titre V. Or, cette dualité n'est ni
justifiée ni efficace.
Proposition n° 3 : consacrer la compétence exclusive de la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
Historique pour toutes les questions relatives à l'entretien et à
la rénovation des sépultures de guerre.
Proposition n° 4 : clarifier les relations de l'Etat avec le Souvenir
Français en mettant fin à la participation financière de
cette association à la rénovation des nécropoles
nationales, propriété exclusive de l'Etat.
Proposition n° 5 : revaloriser l'indemnité forfaitaire
versée par l'Etat aux communes et bloquée à 8 francs par
tombe depuis 1981 afin de l'adapter au coût réel de l'entretien
des tombes dans les carrés communaux évalué à 36
francs par tombe.
Si votre rapporteur se félicite du bon entretien des nécropoles
nationales, il craint que leur trop grand dépouillement les rende
difficilement compréhensible au public. En outre, leur accès est
parfois rendu difficile par l'absence de panneaux de signalisation.
Proposition n° 6
: rendre les cimetières
militaires français plus accueillants en installant des bancs, en
construisant des panneaux précisant le contexte historique des
nécropoles nationales (résumé des opérations
militaires avec une carte comme support, nombre et nationalité des
participants...), en mettant à la disposition des visiteurs un plan des
tombes, la liste des noms des Morts pour la France et un livre d'or.
Proposition n° 7 : mieux signaler l'emplacement des
cimetières militaires par l'instauration systématique de panneaux
de signalisation .
b) Dans les relations avec les familles et les écoles
Chaque année, le ministère des anciens
combattants reçoit plus de 4.000 lettres de familles ou de proches
désireux d'obtenir des renseignements sur telle ou telle personne morte
au combat. Or, beaucoup de gens ne savent pas vers quelle autorité
s'adresser. Votre rapporteur a ainsi rencontré, à la
nécropole nationale de Minaucourt, un couple qui recherchait la tombe
d'un membre de leur famille mais qui, après s'être tourné
vainement vers la mairie de leur domicile, ne disposait d'aucun interlocuteur
pour poursuivre leurs recherches.
Proposition n° 8
: mettre à la disposition du
public, dans les mairies et les conseils généraux, des fiches
précisant les coordonnées de la direction
interdépartementale des anciens combattants de la région pour
toute demande de renseignements concernant une personne morte lors d'une
guerre.
La communication avec les établissements scolaires doit
également être améliorée. En effet, les aides mises
à leur disposition par le ministère des anciens combattants sont
trop confidentielles pour être réellement utilisées.
Proposition n° 9
:
systématiser l'information
sur les aides du ministère des anciens combattants à la
disposition des établissements scolaires en distribuant, dans chaque
collège et lycée, une brochure récapitulant les
différentes subventions gérées par la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
Historique et les possibilités de prêts de documents ou de
prêts d'expositions
.
2. Des réformes plus structurelles
a) Renforcer la politique de la mémoire vis-à-vis des jeunes
Votre rapporteur a déjà souligné le
manque d'ambition de la politique de la mémoire vis-à-vis des
jeunes. Jusqu'à présent, et en grande partie par manque de
moyens, la Délégation à la Mémoire et à
l'Information Historique se contente d'actions ponctuelles et bien
rodées (voyages scolaires, expositions, concours national du prix de la
Résistance...).
Proposition n° 10
:
donner à la politique de la
mémoire vis-à-vis des jeunes une vision globale et à long
terme par l'établissement de relations permanentes avec les
collèges et les lycées et l'organisation, chaque année,
d'une manifestation sur un thème lié à la mémoire
des conflits (exposition, documentaire, témoignage,
conférence...).
Proposition n° 11
: développer, en imitant le
modèle allemand, les camps d'été qui permettent, à
travers l'exécution de petits travaux d'entretien par les jeunes sur les
nécropoles nationales, de les sensibiliser à l'histoire de leur
pays
.
b) Mieux valoriser les archives et le patrimoine géré par la Délégation à la Mémoire et à l'Information Historique
La Délégation à la Mémoire et
à l'Information Historique est responsable de la gestion de l'ensemble
des fichiers concernant les soldats morts lors des deux premières
guerres mondiales, soit 13 fichiers contenant plus de 3 millions de
fiches. Jusqu'à présent, leur maniement est entièrement
manuel. Une première informatisation a été entreprise
à l'occasion de la construction du mémorial de Fréjus,
puisqu'un logiciel avait été créé pour rentrer sur
ordinateur toutes les données sur les morts d'Indochine. Toutefois,
cette opération n'a concerné que 2 % des fichiers du
ministère des anciens combattants, alors qu'elle constitue un gain de
temps considérable et assure une plus grande sécurité dans
le maniement des dossiers.
Proposition n° 12 : informatiser l'ensemble des fichiers
gérés par le
ministère des anciens combattants.
Votre rapporteur a constaté que le patrimoine (nécropoles
nationales, musée, hauts lieux) était bien entretenu par la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
Historique mais qu'il mériterait d'être mieux mis en valeur.
Proposition n° 13
: rendre les hauts lieux de
mémoire plus attractifs en les dotant de moyens techniques modernes
(salle de projection, guide vocal...) et en traduisant les commentaires des
panneaux d'information en anglais
.
Proposition n° 14 : mettre fin à la polémique
suscitée par l'existence d'une carte comptabilisant le nombre de
déportés résistants par département dans le
Mémorial des Martyrs de la Déportation.
Votre rapporteur tient aussi à rappeler qu'il n'existe pas de
Mémorial de la Déportation à la hauteur des terribles
événements qu'il aurait à présenter. Certes, le
camp de Natzweiler-Struthof constitue un témoignage poignant des
horreurs nazies, mais l'exposition permanente qu'il abrite, par sa petitesse et
l'absence de moyens techniques modernes comme, par exemple, une salle de
projection, ne remplit pas les conditions d'un musée moderne, capable
d'attirer un grand nombre de visiteurs. Plusieurs propositions sont en
concurrence, mais votre rapporteur estime que celle soutenue par la ville de
Compiègne mérite une attention particulière, dans la
mesure où cette ville a été un témoin direct de la
déportation à travers le camp de Royallieu, dans lequel 54.000
femmes et hommes déportés ont transité de 1940 à
1944.
Proposition n° 15
:
créer un grand
Mémorial de la Déportation à Compiègne qui
évoquerait, d'une manière à la fois historique et
pédagogique, la déportation dans sa réalité
.
c) Redéfinir la politique de la mémoire pour lui donner une véritable ambition
Il ne s'agit pas de modifier les missions accomplies par la
Délégation à la Mémoire et à l'Information
Historique, qui conservent toutes leur pertinence. Mais il apparaît
nécessaire de mieux les coordonner en les intégrant dans une
réflexion d'ensemble sur les objectifs à poursuivre et les moyens
pour y parvenir. Or, le cadre de l'année civile semble trop
étroit pour une telle ambition et ne permet aucune évaluation des
actions entreprises.
Proposition° 16
:
établir un programme
pluriannuel fixant les objectifs et les priorités de la politique de la
mémoire, prévoyant les moyens à mettre en uvre et
instaurant une évaluation des actions entreprises
.