Rapport d'information n° 290 : Mission en Australie et en Nouvelle-Zélande du 7 au 16 février 1997
MM. Xavier de VILLEPIN, Jean-Luc BECART, Didier BOROTRA, André BOYER, Maurice LOMBARD et André ROUVIERE, Sénateurs
Commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées - Rapport n° 290 - 1996/1997
Table des matières
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PREMIÈRE PARTIE -
LES ENTRETIENS DE LA DÉLÉGATION :
RELANCE ET RENOUVEAU DES RELATIONS BILATÉRALES-
I. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À SYDNEY (8-11 FÉVRIER 1997)
- 1. L'entretien avec M. Bob Carr, Premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud
- 2. L'entretien avec M. Michaël Knight, ministre des Jeux olympiques de Nouvelle-Galles du Sud, et la visite au SOCOG (comité organisateur des Jeux olympiques)
- 3. L'entretien avec M. Peter Collins, chef de l'opposition libérale de Nouvelle Galles du Sud.
- 4. La visite de la délégation du Parlement de Nouvelle-Galles du Sud
- 5. Les contacts avec la Marine australienne
- 6. Les contacts de la délégation avec la communauté française et les médias australiens
-
II. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À CANBERRA (11-13 FÉVRIER 1997)
- 1. L'entretien avec M. Tim Fischer, vice-Premier ministre et ministre du commerce extérieur
- 2. L'entretien avec M. Alexander Downer, ministre des Affaires étrangères
- 3. L'entretien avec M. Ian Mc Lachlan, ministre de la Défense
- 4. Les autres contacts de la délégation en matière de défense
-
5. L'accueil de la délégation au Parlement australien
- a) Les entretiens avec Mme Margaret Reid, présidente du Sénat, et M. Bob Halverson, président de la Chambre des représentants
- b) La réunion avec le Président et des membres de la commission mixte (Sénat-Chambre des représentants) des Affaires étrangères, de la défense et du commerce
- c) Les autres contacts avec les parlementaires australiens
- 6. La réception à l'Ambassade de France, symbole de la " réconciliation " franco-australienne
-
III. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À WELLINGTON (13-15 FÉVRIER 1997)
- 1. L'entretien avec M. Jim Bolger, Premier ministre néo-zélandais
- 2. L'entretien avec M. Don McKinnon, ministre des affaires étrangères
- 3. L'entretien avec M. Lockwood Smith, ministre du commerce extérieur et de l'agriculture
- 4. L'entretien avec le secrétaire général du ministère de la défense et le chef d'état-major des armées
- 5. Les contacts de la délégation au Parlement néo-zélandais
- 6. Les contacts de la délégation avec la communauté française en Nouvelle-Zélande et les médias néo-zélandais
-
I. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À SYDNEY (8-11 FÉVRIER 1997)
-
DEUXIÈME PARTIE -
L'AUSTRALIE ET LA NOUVELLE-ZÉLANDE :
DEUX PARTENAIRES TRÈS ÉTROITEMENT LIÉS
MALGRÉ LEURS PARTICULARISMES
ET LEURS INÉVITABLES RIVALITÉS- I. DES DONNÉES POLITIQUES INTÉRIEURES NON DÉNUÉES DE SIMILITUDES
- II. DES ÉCONOMIES ASSAINIES PAR UNE LONGUE PÉRIODE DE LIBÉRALISME ÉCONOMIQUE
-
III. DES POLITIQUES EXTÉRIEURES AUX AMBITIONS ESSENTIELLEMENT RÉGIONALES
-
A. LES ORIENTATIONS DIPLOMATIQUES ET DE SÉCURITÉ DE L'AUSTRALIE
-
1. Les grands axes de la politique étrangère de Canberra
- a) L'insertion de l'Australie en Asie
-
b) Les autres lignes directrices de la diplomatie australienne
- (1) L'Australie demeure d'abord naturellement une nation du Pacifique sud, même si cette région ne constitue plus pour elle une priorité
- (2) Une alliance privilégiée avec les Etats-Unis
- (3) Des relations avec l'Europe qui doivent être renforcées
- (4) Le rôle de l'Australie dans les enceintes multilatérales
- 2. La politique de la défense australienne
-
1. Les grands axes de la politique étrangère de Canberra
-
B. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE DÉFENSE DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE
- 1. Les grandes orientations de la diplomatie néo-zélandaise
- 2. La politique de défense néo-zélandaise
-
A. LES ORIENTATIONS DIPLOMATIQUES ET DE SÉCURITÉ DE L'AUSTRALIE
-
TROISIÈME PARTIE -
LES RELATIONS BILATÉRALES :
LA FRANCE, PUISSANCE RECONNUE ET APPRÉCIÉE
DU PACIFIQUE SUD- I. LA NORMALISATION ET LE RÉCHAUFFEMENT DES RELATIONS POLITIQUES BILATÉRALES
-
II. LE DÉVELOPPEMENT DES RELATIONS ÉCONOMIQUES BILATÉRALES : L'OCÉANIE,
TREMPLIN VERS L'ASIE ?
- A. LES RELATIONS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES FRANCO-AUSTRALIENNES
- B. LES RELATIONS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES FRANCO-NÉO-ZÉLANDAISES
- III. UNE COOPÉRATION CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE DE QUALITÉ MALGRÉ DES MOYENS RÉDUITS
- LES CONCLUSIONS DE LA DÉLÉGATION
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 290
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997
Annexe au procès-verbal de la séance du 26 mars 1997.
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) à la suite d'une mission effectuée en Australie et en Nouvelle-Zélande du 7 au 16 février 1997,
Par MM. Xavier de VILLEPIN, Jean-Luc BÉCART, Didier
BOROTRA, André BOYER, Maurice LOMBARD et André ROUVIÈRE,
Sénateurs.
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet, François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton, vice-présidents ; Michel Alloncle, Jean-Luc Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë, secrétaires ; Nicolas About, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Mme Monique ben Guiga, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Jacques Habert, Marcel Henry, Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Régis Ploton, Guy Robert, Michel Rocard, André Rouvière, André Vallet.
Pacifique sud. - Australie - Nouvelle-Zélande - Rapports d'information.
Mesdames, Messieurs,
Une délégation de votre commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées a
effectué,
du 7 au 16 février 1997,
une
mission
d'information en Australie et en Nouvelle-Zélande.
Conduite par M.
Xavier de Villepin, président de la commission, cette
délégation était également composée de MM.
Jean-Luc Bécart, Didier Borotra, André Boyer, Maurice Lombard et
André Rouvière.
Cette mission parlementaire revêtait une
signification politique
forte.
Elle constituait en effet la
première visite politique
française de haut niveau
dans ces pays
depuis l'ultime
campagne d'essais nucléaires français à Mururoa et
Fangataufa, achevée début 1996.
Ces essais avaient -on le sait- fortement affecté, au moins sur le plan
politique, nos relations bilatérales avec l'Australie et la
Nouvelle-Zélande qui avaient pris la tête du mouvement de
protestations contre les expérimentations françaises,
tant
dans les enceintes internationales (action devant la Cour Internationale de
justice, approbation de la suspension de notre statut au dialogue du Forum du
Pacifique sud, soutien aux résolutions condamnant les essais au sein du
Commonwealth et à l'assemblée générale des Nations
unies) que sur le plan bilatéral, avec notamment le gel par Canberra et
Wellington de nos relations de défense dès juin 1995.
Plus d'un an après la fin des essais français début 1996,
l'affaire est aujourd'hui classée et le
dossier clos.
L'arrêt définitif des essais français a
été accompagné de la
signature
par Paris
-très importante pour l'Australie et la Nouvelle-Zélande-
des
protocoles au traité de Rarotonga
relatifs à l'instauration
d'une zone exempte d'armes nucléaires dans le Pacifique sud, puis de la
signature du CTBT
(traité d'interdiction complète des
essais) et du
démantèlement de nos sites
de Mururoa et
Fangataufa. Les gouvernements australien et néo-zélandais ont
alors progressivement entamé la
" normalisation "
de
leurs rapports avec Paris : levée des mesures de rétorsion prises
contre la France et relance du dialogue politique (avec notamment les visites
à Paris du ministre néo-zélandais du commerce
extérieur et du ministre australien des affaires
étrangères, respectivement en mai et septembre 1996).
Il est, dans ce contexte, apparu à votre commission
particulièrement opportun d'accomplir également, du
côté français, un geste politique significatif symbolisant
la volonté conjointe
d'accompagner et de favoriser ce processus de
relancer les relations politiques bilatérales
entre la France d'une
part, l'Australie et la Nouvelle-Zélande d'autre part.
Ce rétablissement, désormais acquis, permettra la poursuite du
développement des
échanges économiques, financiers et
commerciaux
entre la France et cette partie du monde qui ne manque pas
d'atouts pour constituer une base efficace pour la présence
française en Asie, qui représente aujourd'hui une priorité
affichée de la diplomatie et de l'économie françaises. Il
doit aussi favoriser la valorisation de
notre présence culturelle
dans la région et conforter la présence et l'action de
coopération française da ns le Pacifique sud.
C'est dans cet esprit que notre commission a retenu, dès l'année
dernière, le principe d'une mission d'information en Australie et en
Nouvelle-Zélande et a décidé d'y consacrer son principal
déplacement de l'année 1997.
M. Xavier de Villepin, président de la commission, a notamment
reçu à Paris, pour amorcer la
préparation de cette
mission,
S. Exc. M. Dominique Girard, ambassadeur de France en Australie,
dès août 1996 et M. Alexander Downer, ministre austalien des
affaires étrangères, lors de sa visite en France en septembre
dernier.
La délégation de la commission, une fois constituée, a
ensuite eu trois
réunions de travail
successives en janvier 1997,
avec :
- S. Exc. M. John Spender, ambassadeur d'Australie à Paris,
- S. Exc. M. Richard Woods, ambassadeur de Nouvelle-Zélande à
Paris,
- et M. François Dopffer, directeur d'Asie et d'Océanie au
ministère des Affaires étrangères.
Dans ce cadre, la mission de votre délégation -malgré la
brièveté de son déplacement- s'est effectuée dans
les meilleures conditions. Nous le devons d'abord, naturellement, à MM.
Dominique Girard et Jacques Le Blanc, ambassadeurs de France à Canberra
et à Wellington, et à leurs collaborateurs dont la
compétence, le dynamisme et la disponibilité ont assuré
l'excellent déroulement des travaux de la délégation.
Nous le devons surtout à la qualité et à la chaleur de
l'accueil réservé à la délégation
sénatoriale par les plus hautes autorités australiennes et
néo-zélandaises qui ont ainsi manifesté, une nouvelle
fois, leur volonté de donner une impulsion nouvelle et forte à
leurs relations avec la France, indiquant qu'ils avaient à la fois
compris et partagé le sens de la démarche de notre commission.
Que tous trouvent ici l'expression de la reconnaissance et de la gratitude de
chacun des membres de la délégation.
o
o o
PREMIÈRE PARTIE -
LES ENTRETIENS DE LA
DÉLÉGATION :
RELANCE ET RENOUVEAU DES RELATIONS
BILATÉRALES
A l'occasion de ses séjours successifs à Sydney et Canberra -en Australie- et à Wellington -en Nouvelle-Zélande-, la délégation a eu de multiples contacts avec les plus hautes autorités australiennes et néo-zélandaises, tant gouvernementales que parlementaires. Tous ont réservé un très bon accueil à la première mission officielle française depuis 1995, marquant ainsi, dans une excellente atmosphère, la volonté d'aller de l'avant dans les relations bilatérales après avoir scellé la " réconciliation " consécutive à la fin des essais nucléaires français.
I. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À SYDNEY (8-11 FÉVRIER 1997)
1. L'entretien avec M. Bob Carr, Premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud
Son séjour à Sydney a permis à la
délégation de constater à la fois l'importance et le
degré d'indépendance de la Nouvelle Galles du Sud qui constitue
le principal des Etats australiens
sur le plan économique,
démographique et culturel, et qui est aujourd'hui le seul à
être gouverné par le parti
travailliste.
M. Bob Carr, Premier ministre, a reçu la délégation le 10
février 1997 dans une atmosphère cordiale et chaleureuse.
Il a d'abord appelé de ses voeux un accroissement des
investissements
français
, pourtant déjà substantiels, dans son Etat et
souligné l'intérêt, pour des entreprises françaises
et européennes, de faire de Sydney
la base de leur
pénétration du marché asiatique.
Il a relevé
d'importantes potentialités de coopération, notamment dans le
domaine de l'électricité et du traitement des eaux.
Evoquant ensuite, à la demande de M. Xavier de Villepin,
président de la délégation, l'éventualité de
la construction d'une
liaison ferroviaire à grande vitesse entre
Sydney et Canberra
, M. Bob Carr a indiqué qu'il croyait à la
faisabilité du projet mais souligné qu'il devait être
réalisé à coût financier nul pour l'Etat de
Nouvelle-Galles du Sud.
M. Xavier de Villepin, président, ayant évoqué le
programme de
privatisations
en cours, le Premier ministre en a
précisé le déroulement et indiqué qu'une
privatisation de la gestion de l'aéroport de Sydney était
envisagée et pourrait fournir l'occasion de participation de
sociétés françaises.
M. Bob Carr a alors répondu aux questions des membres de la
délégation -MM. Xavier de Villepin, Maurice Lombard,
André Boyer, Jean-Luc Bécart, Didier Borotra et André
Rouvière- sur l'organisation des
Jeux olympiques
de l'an 2000.
Il a réaffirmé sa conviction que ces Jeux seraient un grand
succès et constitueraient une " vitrine " très utile
pour promouvoir le développement de Sydney. Il s'est dit confiant sur le
plan financier, au moment où son Etat réduisait son endettement,
allant jusqu'à espérer que l'organisation des Jeux pourrait
dégager un bénéfice. Il s'est montré plus
préoccupé par les problèmes d'hébergement des
visiteurs, de transports -notamment aérien-, et de
sécurité.
M. Bob Carr a indiqué aux membres de la délégation qui
s'inquiétaient de l'absence des
épreuves de slalom de
canoé-kayak en eaux vives
du programme des Jeux de Sydney que cette
question relevait du comité d'organisation, mais que cette
épreuve n'avait pu être retenue en raison du coût
élevé des infrastructures qu'elle exigeait, dont les Australiens
n'auraient plus ensuite l'usage.
Le Premier ministre a enfin souligné, en réponse à M.
Didier Borotra, la qualité des relations de son pays avec le Japon et
avec la Chine.
2. L'entretien avec M. Michaël Knight, ministre des Jeux olympiques de Nouvelle-Galles du Sud, et la visite au SOCOG (comité organisateur des Jeux olympiques)
a) L'entretien avec M. Michaël Knight
Au cours de son entretien avec la délégation, M.
Michael Knight, ministre des Jeux olympiques et des routes de Nouvelle Galles
du Sud et président du comité d'organisation des Jeux, a
souligné à la fois la très grande
responsabilité
que constituait l'organisation des Jeux olympiques et la conviction qu'ils
serviraient l'image de Sydney et de l'Australie dans le monde.
Il a souligné l'importance des dispositions à prendre en
matière de
sécurité
pour prévenir tous les
risques en ce domaine, depuis l'attaque d'un commando terroriste comme à
Munich, jusqu'à un acte de violence individuel comme à Atlanta,
en passant par les risques de débordement des foules comme lors de
certaines rencontres de football.
M. Michael Knight a ensuite répondu aux questions de
M. André Rouvière sur les
droits de retransmission
télévisée
des Jeux -déjà presque tous
vendus-, de M. André Boyer sur la construction du village olympique et
sur l'accent mis sur les
questions d'environnement
, de M. Didier Borotra
sur la répartition des rôles -s'inspirant du
précédent de Barcelone- dans l'organisation des Jeux. Le ministre
a précisé qu'il espérait que, malgré leur
coût, les Jeux olympiques permettraient de dégager
un
léger bénéfice
.
Abordant enfin, à la demande de M. Xavier de Villepin,
président, la question des
épreuves de slalom en eaux vives de
canoé-kayak
, M. Knight a indiqué très fermement qu'en
accord avec le CIO (comité olympique international) ces épreuves
ne figureraient pas au programme des Jeux de Sydney en raison à la fois
du coût élevé d'installations qui seraient ensuite inutiles
et de la volonté de ne pas augmenter encore le nombre des participants
aux Jeux. Il a précisé à M. Jean-Luc Bécart-qui
indiquait que les organisateurs australiens pourraient se rapprocher des
experts lillois qui avaient pu résoudre la même difficulté
dans le cadre de la candidature de Lille aux Jeux olympiques de 2004 et qui
soulignait le caractère très spectaculaire et
télégénique de cette épreuve de canoé- que
la décision concernant les Jeux de Sydney était définitive
et que, au demeurant, les contrats concernant les droits de retransmission
télévisée étaient d'ores et déjà
conclus.
b) L'organisation des Jeux olympiques
La délégation a ensuite
bénéficié d'une
présentation de l'organisation
et des sites des Jeux olympiques,
en présence de M. Greg Smith,
coordinateur du SOCOG.
Les Jeux olympiques de Sydney (du 15 septembre au 1er octobre 2000)
rassembleront 10 200 athlètes et 15 000 représentants des
médias, tandis que 5,5 millions de billets seront vendus à cette
occasion.
Le SOGOC bénéficiera du concours de 1 500 personnes à
temps plein et d'environ 40 000 volontaires. Vingt-huit disciplines
sportives se dérouleront sur trente-cinq sites différents
-auxquels s'ajouteront une centaine de lieux d'entraînement.
Les Jeux olympiques proprement dits seront suivis, du 18 au 29 octobre 2000,
des Jeux paralympiques. Enfin diverses manifestations culturelles
précéderont les Jeux, notamment le plus grand " relais de la
torche olympique " depuis la création des Jeux.
Il a enfin été précisé à la
délégation que le budget du SOCOG s'élevait à 9,7
milliards de francs et que tous les athlètes participant aux Jeux
seraient logés dans le même village olympique.
3. L'entretien avec M. Peter Collins, chef de l'opposition libérale de Nouvelle Galles du Sud.
Recevant à son tour la délégation
sénatoriale, M. Peter Collins, chef de l'opposition au gouvernement de
Nouvelle Galles du Sud, a principalement évoqué quatre sujets en
réponse aux questions des membres de la délégation :
- il a précisé que, tout en étant libéral, il
était fermement partisan de l'instauration en Australie de la
République, avec un chef d'Etat qui serait doté de
compétences limitées dans le cadre d'un régime
parlementaire ;
- s'agissant des Jeux olympiques, il a souligné les difficultés
réelles que soulevaient les problèmes de transports et
d'infrastructures ;
- M. Collins, après avoir affirmé sa francophilie et le fait que
la question des essais nucléaires était désormais close, a
souhaité que la France continue à jouer un rôle actif dans
le Pacifique sud où elle contribue à l'aide au
développement et à la stabilité de la région ;
- le chef de l'opposition, ancien officier de Marine, a enfin souhaité
une plus grande fréquence des visites de bâtiments de la Marine
française dans les ports australiens.
4. La visite de la délégation du Parlement de Nouvelle-Galles du Sud
La délégation sénatoriale a
également été reçue avec chaleur au Parlement de
Nouvelle-Galles du Sud par
M. John Murray,
"
speaker " de
l'Assemblée législative (chambre basse), avant de participer
à un déjeuner offert par
M. Max Willis
, président
du Conseil législatif (chambre haute).
Les échanges ont principalement porté sur les questions
institutionnelles :
- relations entre les différents Etats australiens et la
fédération,
- organisation des pouvoirs et rapport des forces politiques en Nouvelle Galles
du sud,
- et avenir du débat sur la monarchie ou la République en
Australie.
Il a été à cette occasion précisé que le
Parlement de Nouvelle Galles du Sud est le plus ancien du pays. Il
légifère dans le domaine de la santé, de
l'éducation, des transports, de l'énergie, de la police, de
l'agriculture et du développement industriel local. Il vote la loi de
finances et le gouvernement -dont tous les membres doivent être
parlementaires- est responsable devant lui.
Le Parlement est composé de deux assemblées :
l'Assemblée législative
, composée de 99 membres
élus pour quatre ans au scrutin majoritaire à un tour, et
le
Conseil législatif
, composé de 42 membres également
élus, pour huit ans, au suffrage universel selon un mode de scrutin
combinant scrutin majoritaire et représentation proportionnelle.
5. Les contacts avec la Marine australienne
Au cours de son étape de Sydney, la
délégation a eu plusieurs contacts avec les forces armées
et l'industrie d'armement australiennes.
Elle a visité, le 11 février 1997, le
quartier
général de la Marine australienne
où elle a
été reçue par le Commodore Jeff Walpole. Elle s'est
entretenue avec le chef d'état-major qui a notamment
précisé les relations de la Marine australienne avec ses voisins
asiatiques et l'attitude de l'Australie, plus souple que celle de la
Nouvelle-Zélande, quant aux visites des navires
" nucléaires " (porteurs d'armes nucléaires ou à
propulsion nucléaire).
Il a été en outre précisé que la marine
australienne rassemble 13 370 militaires d'active (sur un total de 53 800 pour
l'ensemble des forces armées australiennes), environ 2 000
réservistes et 3 500 personnels civils.
La délégation a ensuite visité un bâtiment de la
marine australienne, le
" Darwin "
, avant de
rencontrer des
représentants et de visiter les installations de la
société A.D.I.
(" Australian defence industries "),
entreprise d'Etat chargée, entre autres projets, de la construction des
chasseurs de mines Huon.
6. Les contacts de la délégation avec la communauté française et les médias australiens
a) La communauté française
Le séjour de la délégation à
Sydney a été naturellement pour elle l'occasion de plusieurs
contacts avec
la communauté française
locale, notamment
lors d'un dîner offert par le conseiller économique et commercial
-qui réunissait de nombreux représentants des milieux d'affaires-
et lors d'une réception donnée par le consul
général de France à Sydney qui a permis aux membres de la
délégation de rencontrer des représentants de l'ensemble
des composantes de notre colonie.
Les nombreux contacts noués à cette occasion ont permis à
la délégation d'apprécier le dynamisme de nos compatriotes
installés en Australie ainsi que la diversité des relations
établies entre les deux pays.
Le nombre des ressortissants
immatriculés
au consulat
général de Sydney est en croissance constante et approche les
8 000 en 1996.
L'immatriculation n'étant pas, on le sait,
obligatoire, on estime la population française dans la circonscription
consulaire de Sydney à environ
27 000 personnes
, dont 16 500 en
Nouvelle-Galles du Sud.
En matière d'enseignement, il faut souligner que le
lycée
Condorcet
-école française de Sydney- accueille en 1996-1997
environ 270 élèves, dont deux-tiers de binationaux, jeunes
Australiens ou étrangers tiers.
b) Les contacts avec la presse australienne
La délégation a enfin eu divers contacts avec
la
presse australienne
.
M. Xavier de Villepin, président, a en particulier
été l'invité de l'émission
télévisée de grande écoute " Lateline "
sur la chaîne publique ABC. Interrogé par Mme Maxime Mc Kew, il a
-durant une demi-heure- eu l'occasion d'évoquer les principaux sujets
suivants : la coopération dans le Pacifique sud, l'évolution du
processus des accords de Matignon en Nouvelle-Calédonie, la politique
nucléaire de la France, le développement de la coopération
franco-australienne et des échanges bilatéraux, la politique
asiatique française, la rénovation de l'OTAN dans la perspective
de l'émergence d'une identité européenne de
défense, et la politique française au Proche-Orient.
*
* *
II. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À CANBERRA (11-13 FÉVRIER 1997)
1. L'entretien avec M. Tim Fischer, vice-Premier ministre et ministre du commerce extérieur
Recevant la délégation sénatoriale le 12
février 1997 au nom du Premier ministre, M. John Howard,
empêché, M. Tim Fischer, vice-Premier ministre et ministre du
commerce extérieur, a d'abord été remercié par
M. Xavier de Villepin, président, pour le sauvetage des marins
français du " Vendée-Globe " par la marine australienne.
M. Xavier de Villepin, président, lui a remis un
message de M. Alain
Juppé,
Premier ministre, à son homologue australien.
M. Tim Fischer s'est ensuite félicité de l'aboutissement heureux
de certaines difficultés dans les
relations commerciales
bilatérales
: importations de viande de kangourou en France et
levée de l'embargo australien sur la signature de nouveaux contrats de
livraisons d'uranium à la France.
S'agissant de
l'accord-cadre entre l'Australie et l'Union
européenne
, dont la négociation se heurtait à une
clause, proposée par les Européens, relative aux droits de
l'homme, le vice-Premier ministre a estimé que cette question ne devait
pas être dramatisée et ne devait pas avoir un impact
négatif sur les échanges et le tourisme. Il a rappelé le
sang australien versé en Europe, au nom des droits de l'homme, durant
les deux conflits mondiaux. M. Xavier de Villepin, président, a
indiqué qu'il attirerait l'attention du ministère français
des Affaires étrangères sur les difficultés relatives
à la conclusion de cet accord-cadre et précisé que M.
Hervé de Charette avait retenu le principe d'un voyage en Australie
d'ici un an.
Le président de Villepin ayant regretté la faiblesse des
investissements australiens en France
-alors que le développement
des exportations françaises en Australie était lié
à l'accroissement important de nos investissements dans ce pays-, M.
Fischer, reconnaissant ce déséquilibre, a souhaité que les
entreprises australiennes établies en Europe n'installent pas
systématiquement leur siège social à Londres.
Abordant enfin les
questions agricoles,
M. Fischer -président du
parti national agrarien- a estimé que le mécanisme
européen des subventions agricoles avait des répercussions
négatives et que l'Union européenne devrait
nécessairement, dans la perspective de son élargissement,
réformer en profondeur la politique agricole commune. M. André
Boyer a alors rappelé les raisons sociales, économiques, mais
aussi écologiques, de notre politique agricole et de notre attachement
à nos traditions.
M. Xavier de Villepin, président, a souligné que l'Union
européenne a déjà fortement évolué et
progressé dans le sens souhaité par l'Australie. Il a ensuite
évoqué avec M. Fischer la conjoncture économique en France
et en Australie, et les perspectives relatives à la création de
l'euro -dont M. Xavier de Villepin a souligné sa conviction qu'elle
constituerait un progrès pour l'Europe et pour le monde.
2. L'entretien avec M. Alexander Downer, ministre des Affaires étrangères
Quatre thèmes principaux ont ensuite été
évoqués lors de l'entretien, particulièrement cordial et
chaleureux, accordé à la délégation par
M. Alexander Downer, ministre australien des Affaires
étrangères.
Evoquant tout d'abord, à l'invitation du président de Villepin,
la coopération franco-australienne dans le
Pacifique-sud,
M.
Downer s'est réjoui de l'amélioration des relations
bilatérales et s'est félicité des contacts noués
à l'occasion de son séjour en Nouvelle-Calédonie en
décembre 1996. Il a réaffirmé l'approbation de son pays au
processus des
" accords de Matignon ".
Il a souligné
que, si l'Australie soutenait naturellement le principe
d'autodétermination, elle ne voyait aucun obstacle au maintien de liens
à l'avenir entre la Nouvelle-Calédonie et la France et verrait au
contraire
avec beaucoup d'inquiétude un éventuel retrait
français du Pacifique-sud
-qui laisserait inévitablement un
vide qu'il reviendrait à l'Australie de combler. M. Downer s'est enfin
réjoui des
projets de coopération franco-australienne,
dont il a souhaité le développement, au profit des pays
insulaires de la zone.
En réponse à M. Xavier de Villepin, président, qui
regrettait, une nouvelle fois, la faiblesse des
investissements australiens
en France,
le ministre des Affaires étrangères a reconnu que
les sociétés australiennes avaient tendance, pour des raisons
historiques et culturelles, à s'installer au Royaume-Uni, mais
estimé que cette situation s'améliorerait -en particulier avec la
création de l'euro- si la Grande-Bretagne, comme il était
probable, n'en faisait pas partie.
M. Downer a ensuite souhaité la suppression de
l'obligation de visa
pour les Australiens se rendant en France, soulignant que celle-ci
était, avec l'Espagne, le seul pays européen à maintenir
cette obligation. Il a souligné que l'Australie mettrait en place, en
avril prochain, un nouveau système informatique (" electronic
travel authority ") permettant d'écarter les voyageurs
indésirables, titulaires d'un casier judiciaire, dès le moment de
la délivrance du titre de transport. M. Xavier de Villepin,
président, s'est toutefois interrogé sur la possibilité de
voir ce système unilatéral australien permettre le respect du
principe de réciprocité.
Revenant enfin sur
l'accord-cadre Australie-Union européenne
, le
ministre a souhaité le soutien de la France à la proposition de
son pays tendant à faire référence, dans le
préambule de l'accord -et non dans le document lui-même- aux vues
communes des deux parties en matière de
droits de l'homme.
L'Australie ne saurait, en revanche, accepter une situation où sa
position dans ce domaine pourrait être interprétée de
manière unilatérale par un tiers, au risque de menacer la
pérennité de l'accord.
3. L'entretien avec M. Ian Mc Lachlan, ministre de la Défense
Rappelant d'abord sa récente visite en France, en
décembre dernier, M. Mc Lachlan, ministre de la Défense, s'est
félicité de la
complète restauration des relations
bilatérales en matière de défense
après la
crise de 1995. Il a annoncé à la délégation que le
nouvel attaché de défense
australien en France serait en
poste à Paris fin mars 1997. Il a enfin souhaité que soient
pleinement exploitées et développées, à l'occasion
des prochains contacts, les possibilités de
coopération
franco-australienne dans le
Pacifique sud
.
Abordant ensuite les projets de
réforme militaire
qu'il avait
initiés en Australie, le ministre de la Défense a exposé
à la délégation les raisons pour lesquelles il avait
lancé une "
revue de détail " des forces
armées australiennes
pour les adapter et leur insuffler en
particulier une plus grande mobilité. Il a rappelé que l'effort
de défense australien avait été réduit de
2,6 % à 1,8 % du PIB au cours des dix dernières
années, mais que la défense était aujourd'hui la seule
à être épargnée par les coupes budgétaires
actuelles, dans le cadre d'un programme couvrant les trois prochaines
années.
M. Mc Lachlan a enfin précisé les principaux axes de la
politique de défense australienne
dans le contexte
stratégique actuel. Après avoir souligné que
l'alliance
avec les Etats-Unis
en constituait la base, tandis que l'Australie
maintenait des relations très étroites avec
la
Nouvelle-Zélande
, il a insisté sur l'importance des relations
de Canberra avec ses voisins, en particulier
l'Indonésie
, avec
laquelle existait désormais une relation de sécurité
particulièrement importante. Le ministre a enfin indiqué la
qualité des relations de l'Australie avec les pays asiatiques, comme le
Japon ou la Corée du Sud, qui partageaient certains de ses
intérêts de sécurité, sans avoir pour autant les
moyens d'entretenir avec eux des relations de défense très
denses.
4. Les autres contacts de la délégation en matière de défense
- La délégation a par ailleurs participé
le 13 février, au ministère de la Défense, à une
table ronde réunissant des experts australiens de la défense,
civils et militaires, autour de
M. White
, conseiller
stratégique du gouvernement australien.
Après avoir rappelé les évolutions du contexte
géostratégique à l'issue de la guerre froide et les
conséquences internationales liées à la croissance
économique de la zone Asie-Pacifique, M. White a souligné que la
position stratégique australienne restait dominée par l'Asie et
son
alliance avec les Etats-Unis.
Mais il a relevé que,
contrairement à ce qui existait en Europe, il n'y avait aucune structure
asiatique susceptible de tirer les conséquences de la fin de la guerre
froide et aucun mécanisme multilatéral de gestion des crises. Il
a par ailleurs souhaité la pérennité de
l'engagement
américain dans la région.
M. White a ensuite répondu aux questions des commissaires. Il a
précisé à M. Xavier de Villepin, président, le
contenu des garanties résultant du
traité ANZUS
, devenu
bilatéral après la suspension des liens
américano-néo-zélandais, mais apportant une garantie de
sécurité forte à l'Australie même si les engagements
en résultant étaient moins forts que dans le cadre de l'OTAN.
Toute une gamme d'instruments bilatéraux techniques reliait par ailleurs
l'Australie aux Etats-Unis en matière de défense. L'Australie
n'avait pas pour autant demandé l'installation de bases
américaines sur son territoire, même si elle souhaitait favoriser
le maintien de la présence des Etats-Unis dans la zone.
M. White a également souhaité le développement de la
coopération franco-australienne
, en particulier dans le domaine
des technologies de pointe, compte tenu des capacités des entreprises
françaises et de la qualité de la base technologique de notre
pays en matière de défense.
En réponse à des questions de MM. André Rouvière et
Maurice Lombard, M. White a précisé les
relations entre
l'Australie et la Nouvelle-Zélande
en matière de
sécurité et de défense. Il a fortement souligné le
caractère exceptionnel et la densité des liens entre Canberra et
Wellington. La communauté des intérêts stratégiques
fondamentaux des deux pays n'empêchait naturellement pas des perceptions
différentes -l'Australie se sentant en particulier plus proche de l'Asie
que la Nouvelle-Zélande- et une relation bilatérale parfois
difficile à gérer. La proximité et l'étroitesse des
liens entre les deux pays - qui ont notamment combattu côte à
côte durant les deux conflits mondiaux - ne devaient pas pour autant
déboucher sur la création d'une armée commune. La
sévérité de la politique néo-zélandaise en
matière nucléaire affectait la coopération
trilatérale avec les Etats-Unis mais n'avait pas d'impact majeur sur les
relations transtasmanes.
A M. Jean-Luc Bécart qui estimait que la fin de la guerre froide avait
conféré aux Etats-Unis un rôle de super-puissance
hégémonique et que l'Australie pourrait diversifier ses appuis
politiques pour favoriser l'émergence d'un monde multipolaire, M. White
a opposé le fait que l'Australie et ses voisins asiatiques devaient
d'abord gérer leurs
relations avec la Chine et le Japon
-les deux
grandes puissances asiatiques- et que la présence américaine
avait, dans ce contexte, un effet stabilisant. Cette présence
n'était pas excessivement pesante puisque aucune force américaine
n'était stationnée sur le territoire australien. L'Australie ne
souhaitait pour autant naturellement pas entretenir avec les Etats-Unis des
relations exclusives.
M. White a alors estimé, en réponse à M. Jean-Luc
Bécart, que, s'agissant de la Chine, la question majeure pour l'avenir
était de savoir comment les autorités de Pékin, toujours
très centralisées malgré la révolution
économique chinoise, utiliseraient demain leur propre puissance. Il a
enfin convenu avec M. Bécart des opportunités très
intéressantes qu'offrait aujourd'hui le
Vietnam
, tant pour les
sociétés australiennes que pour les entreprises françaises.
- La délégation a complété ses contacts en
matière de défense par la
visite de l'Australian Defence Force
Academy "
(ADFA). Créée en 1986, déjà
renommée par son niveau remarquable dans le domaine militaire et
universitaire, l'ADFA a pour mission de préparer les leaders australiens
de demain -un peu à l'image de l'IHEDN français- mais a,
au-delà de son rôle d'enseignement et de formation militaires, un
rôle de recherche et d'enseignement universitaire.
La scolarité à l'ADFA s'étend sur trois années et
rassemble, au total, plus d'un millier d'étudiants (421 en
première année, 334 en deuxième année, et 313 en
troisième année), pour un taux moyen de réussite de 75 %.
- La délégation a enfin tenu à rendre hommage aux anciens
combattants australiens en visitant le remarquable et très
émouvant
" War Memorial "
de Canberra en l'honneur de
tous les Australiens morts au combat, en particulier lors des deux guerres
mondiales.
5. L'accueil de la délégation au Parlement australien
La délégation a naturellement eu, à
l'occasion de son séjour à Canberra, des entretiens et des
contacts multiples avec le Parlement australien qui constitue le
centre
incontesté de la vie politique nationale.
D'inspiration britannique, mais reposant sur une constitution écrite (de
1901) et non coutumière, et s'inscrivant dans le cadre d'un Etat
fédéral, le Parlement australien est composé de la
Chambre des représentants et du Sénat
, dont les membres
sont élus les uns et les autres au suffrage universel direct et qui
partagent à égalité le pouvoir législatif. Le
Sénat -qui représente les Etats fédérés et
où le gouvernement actuel ne dispose pas de la majorité- peut
donc refuser de voter une loi et contraindre le gouvernement à
démissionner.
a) Les entretiens avec Mme Margaret Reid, présidente du Sénat, et M. Bob Halverson, président de la Chambre des représentants
Accueillie avec chaleur, dès son arrivée
à Canberra, le 11 février, par Mme Reid et M. Halverson à
l'occasion d'un dîner offert en leur honneur au Parlement, les membres de
la délégation ont eu, le lendemain, un entretien de travail avec
la Présidente du Sénat et le Président de la Chambre des
représentants qui a principalement porté sur
l'organisation et
le fonctionnement du régime parlementaire australien.
En réponse aux questions des sénateurs, Mme Reid et M. Halverson
ont notamment apporté les précisions suivantes :
- le
" cabinet fantôme "
australien joue un rôle
important sans disposer naturellement d'un quelconque pouvoir exécutif ;
le leader de l'opposition dispose en particulier de prérogatives
importantes ;
-
les ministres sont membres du Parlement
et participent aux
votes ; la délégation a ainsi eu l'occasion de constater que
les membres du gouvernement australien avaient leurs bureaux à
l'intérieur même de l'enceinte du Parlement et interrompaient,
toutes affaires cessantes, leurs activités gouvernementales pour prendre
part à un scrutin public en séance plénière ;
-
le " speaker "
de la Chambre des représentants
-doté d'un uniforme comme dans le système de Westminster- ne
participe pas aux débats et est assisté de " speakers
adjoints " ;
- dans l'attente de l'introduction d'un vote électronique, les votes
s'effectuent en se plaçant à la gauche ou à la droite du
Président ;
- Le Parlement australien siège
entre 70 et 85 jours par an
; en
dehors de trois grandes périodes d'intersessions, il est tenu compte de
l'immensité du territoire australien en alternant quinze jours où
le Parlement siège et quinze jours d'interruption pour permettre aux
parlementaires de rejoindre leurs circonscriptions ;
- en cas de désaccord persistant, il peut être
procédé à une
double dissolution
de la Chambre des
représentants et du Sénat ;
- comme dans le système britannique, les
" whips "
de
chaque parti coordonnent et organisent le travail de parlementaires de base
(les " back benchers ") ; ils jouent un rôle efficace dans
la
lutte conre l'absentéisme parlementaire ;
-
les femmes
jouent un rôle substantiel dans la vie politique de
l'Australie -premier pays à leur avoir accordé le droit de vote-
sans être pour autant exceptionnellement nombreuses au sein des
assemblées fédérales.
b) La réunion avec le Président et des membres de la commission mixte (Sénat-Chambre des représentants) des Affaires étrangères, de la défense et du commerce
La délégation a, le même jour,
participé à une réunion avec
M. Ian Sinclair,
président de la commission mixte des Affaires
étrangères, de la défense et du commerce. Plusieurs autres
parlementaires ont également participé -entre deux votes en
séance publique- à cet échange de vues :
Mme Gallus,
MM. Dondas, Taylor et Brough.
M. Sinclair et M. Xavier de Villepin, président
,
ont notamment
évoqué, au cours du débat :
- les
opérations de maintien de la paix
accomplies sous
l'égide de l'ONU, notamment en Afrique (Somalie, voire Zaïre) ;
- le déroulement du processus des accords de Matignon en
Nouvelle-Calédonie ;
- et, plus généralement, les évolutions dans la
zone
Pacifique,
notamment à Hong-Kong.
En réponse à M. André Rouvière, le président
Sinclair a également précisé le fonctionnement et les
méthodes de travail de la commission mixte qui dispose notamment de
quatre sous-comités dont les travaux débouchent sur des
recommandations faites au gouvernement australien.
c) Les autres contacts avec les parlementaires australiens
Le séjour de votre délégation au
Parlement de Canberra lui a donné l'occasion de divers autres contacts
avec les parlementaires australiens :
- elle a participé le 12 février à un déjeuner avec
les membres du
groupe d'amitié interparlementaire France-Australie,
présidé par le sénateur Paul Calvert, qui fut
l'occasion d'échanges de vues particulièrement francs et cordiaux
avec les parlementaires australiens, portant notamment sur les relations
bilatérales, la francophonie, les relations entre l'Union
européenne et l'Australie, et les perspectives liées à la
création de l'euro ;
- elle a assisté aux
séances des questions orales,
successivement à la Chambre des représentants et au
Sénat ; directement inspirées du " question time "
britannique, ces séances se déroulent à la Chambre des
représentants en présence du Premier ministre, des membres du
gouvernement et de ceux du " cabinet fantôme " et donnent
lieu
à des échanges extrêmement brefs, vifs parfois violents ;
la sérénité des débats est apparue à votre
délégation beaucoup plus grande au Sénat ;
- les membres de la délégation ont enfin participé
à l'inauguration de
l'exposition photographique sur le Parlement
français
(Assemblée nationale et Sénat), ouverte le 12
février 1997 dans les locaux du Parlement de Canberra.
6. La réception à l'Ambassade de France, symbole de la " réconciliation " franco-australienne
Première visite
d'une délégation
parlementaire -ou gouvernementale- française en Australie
depuis
1995,
le séjour de votre délégation a permis, en
quelque sorte, de
sceller la " réconciliation " politique
entre les deux pays après la crise suscitée par notre ultime
campagne d'essais nucléaires.
Les multiples contacts de la délégation ont
démontré, dans une
atmosphère excellente,
toujours
cordiale, souvent chaleureuse, la disponibilité de ses interlocuteurs
australiens.
C'est ainsi que de très nombreuses personnalités australiennes
-trois ministres, les trois chefs d'état-major des armées, de
très nombreux parlementaires, journalistes et personnalités
diverses- se sont pressés, le 12 février 1997, dans les salons de
la résidence de l'Ambassadeur de France à l'occasion de la
réception qu'il offrait en l'honneur de la délégation.
S'il est clair que les essais et les questions nucléaires en
général n'ont pas disparu des esprits, il est entendu que
" la page est aujourd'hui tournée "
et que rien ne
s'oppose désormais au développement de relations
économiques et commerciales fructueuses et à l'approfondissement
de relations politiques et culturelles chaleureuses.
*
* *
III. LE SÉJOUR DE LA DÉLÉGATION À WELLINGTON (13-15 FÉVRIER 1997)
1. L'entretien avec M. Jim Bolger, Premier ministre néo-zélandais
Arrivée à Wellington le 13 février au
soir, la délégation sénatoriale a été
reçue le lendemain matin par M. Jim Bolger, Premier ministre
néo-zélandais.
Après avoir reçu de M. Xavier de Villepin, président, le
message de M. Alain Juppé,
Premier ministre, qui lui était
adressé, le Chef du gouvernement néo-zélandais s'est
félicité de la visite de la délégation
sénatoriale qu'il a considérée comme le signe du
rétablissement des relations de haut niveau
entre les deux pays
après la fin de nos essais, la fermeture du centre de Mururoa, la
conclusion du CTBT et la signature par la France du traité de Rarotonga.
M. Bolger a souligné que les relations bilatérales devaient
désormais aller de l'avant, Wellington considérant la
France
comme
un partenaire essentiel :
- en tant que membre de
l'Union européenne
avec laquelle les
échanges commerciaux, au-delà des débats normaux, se
développent,
- en raison de son
rôle sur la scène internationale
que la
Nouvelle-Zélande appréciait, notamment dans les opérations
de maintien de la paix,
- et en raison de sa
présence constructive dans le Pacifique
où elle participe activement à des opérations de
coopération multilatérale.
Interrogé par M. Xavier de Villepin, président, sur le prochain
Forum du Pacifique sud,
à Rarotonga, en septembre 1997, et sur
les déclarations du Premier ministre des îles Cook sur la
Polynésie française, M. Bolger a estimé que le Forum
veillerait sans doute à ne pas ouvrir un contentieux avec la France
à propos de la Polynésie française au risque de
compromettre le processus en cours en Nouvelle-Calédonie.
Sur ce dernier point, le Premier ministre néo-zélandais a
interrogé M. Xavier de Villepin, président, sur le
déroulement du processus des
accords de Matignon
et a
approuvé la recherche d'un accord susceptible de recueillir une large
adhésion de l'électorat calédonien.
En réponse à M. Xavier de Villepin, président, M. Bolger
s'est ensuite félicité des
relations statutaires entre les
îles Cook et la Nouvelle-Zélande
qu'il a qualifiées d'
" arrangement constitutionnel sans doute unique au monde ".
Il a
toutefois précisé que les îles Cook ne pouvaient à
la fois vouloir détenir tous les attributs de l'indépendance et
conserver tous les avantages du statut d'association : aide financière
et passeport néo-zélandais pour les ressortissants cookiers.
Le Premier ministre néo-zélandais a alors indiqué que le
rôdage de la nouvelle coalition gouvernementale ne lui permettait pas
d'effectuer de nombreux voyages à l'étranger en 1997, mais qu'il
se rendrait en principe au sommet du Commonwealth à Edimbourg en octobre
prochain et qu'il pourrait alors envisager de se rendre en France ou dans
d'autres pays européens s'il y était invité.
M. Bolger a enfin interrogé les membres de la délégation
sur les
perspectives de création de l'euro.
MM. Didier Borotra,
Jean-Luc Bécart, Maurice Lombard et Xavier de Villepin,
président, par-delà leurs différentes sensibilités
politiques, lui ont confirmé la probable mise en oeuvre de la monnaie
unique, conformément au calendrier prévu, en 1999.
2. L'entretien avec M. Don McKinnon, ministre des affaires étrangères
Ayant tenu à retarder son départ prévu
pour Auckland pour participer à un petit déjeuner de travail avec
la délégation, le 14 février au matin, M. Don McKinnon a,
à cette occasion, abordé quatre sujets principaux avec les
sénateurs.
- En ce qui concerne
les relations bilatérales
franco-néo-zélandaises,
le ministre a d'abord
réaffirmé que " les problèmes survenus
récemment étaient maintenant derrière nous " et qu'il
convenait désormais d'aller de l'avant sur la base de l'estime que les
Néo-Zélandais portent aux Français et à leur
culture. La visite sénatoriale intervenait à point nommé
pour
favoriser des contacts politiques
qu'il était important de
développer, dans l'attente d'une visite attendue du ministre
français des affaires étrangères.
- M. McKinnon a ensuite indiqué, en réponse à M. Xavier de
Villepin, président, que la Nouvelle-Zélande appréciait
vivement
la contribution de la France à l'évolution du
Pacifique
et était très attachée à la
présence de notre pays dans la zone. Il s'est également
félicité de la coopération conduite conjointement par
l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la France en matière de
surveillance maritime notamment.
Il n'y a pas, a souligné le ministre, de véritable débat
en Nouvelle-Zélande sur l'opportunité de la présence de la
France dans le Pacifique. Et les petits Etats insulaires étaient
conscients de l'importance des concours français et européens
pour leur développement.
-
En réponse à M. Xavier de Villepin, président,
sur les
îles Cook et le prochain Forum du Pacifique Sud,
M.
McKinnon a apporté les précisions suivantes : si le Forum du
Pacifique sud avait mieux à faire que de débattre de la
Polynésie française -comme semblait le souhaiter M. Geoffrey
Henry, Premier ministre des îles Cook-, il ne fallait pas surestimer
l'influence de la Nouvelle-Zélande ou de l'Australie dans la fixation
de l'ordre du jour du Forum et la question pourrait éventuellement
être évoquée " hors ordre du jour ".
Le ministre s'est cependant interrogé devant la délégation
sur une
participation éventuelle,
" d'une manière ou
d'une autre ",
des territoires français du Pacifique aux travaux
du Forum,
idée à laquelle la France est opposée.
M. McKinnon a également cité en exemple le
statut qui lie la
Nouvelle-Zélande aux îles Cook.
Mais, interrogé par M.
Xavier de Villepin, président, sur le fonctionnement de ce statut, il
est convenu que les îles Cook, qui agissaient à leur guise dans la
limite de leur modeste taille (20 000 habitants), devraient choisir entre le
respect de leur statut d'association et l'indépendance complète.
- Le ministre des affaires étrangères néo-zélandais
a enfin interrogé M. Xavier de Villepin, président, sur
l'évolution des discussions en cours
en Nouvelle-Calédonie.
Il s'est réjoui de la recherche d'une solution de nature à
éviter la division de l'électorat, partagé en deux camps
d'importance comparable.
3. L'entretien avec M. Lockwood Smith, ministre du commerce extérieur et de l'agriculture
Après s'être, à son tour,
félicité de la
normalisation et du renforcement des relations
bilatérales
franco-néo-zélandaises, M. Lockwood
Smith, à la fois ministre du commerce extérieur et de
l'agriculture -ce qui souligne le poids prépondérant de
l'agriculture en Nouvelle-Zélande- a orienté son échange
de vues avec la délégation sur les
rapports entre la
Nouvelle-Zélande et l'Union européenne.
Il s'est d'abord félicité de la conclusion de
l'accord
vétérinaire
récemment conclu entre son pays et l'Union
européenne, avec une contribution active de la France. Il s'est
également réjoui des positions du commissaire européen
Fischler qui seraient favorables à l'ouverture des
négociations agricoles
au sein de l'OMC dès 1999. Il s'est
enfin félicité
des perspectives d'évolution de la PAC
(politique agricole commune) évoquées par M. Fischler. Il
convenait en effet, selon le ministre néo-zélandais, de ne plus
fonder les subventions agricoles sur le soutien de la production -ce qui
faussait le commerce international- mais sur le
soutien de la
société rurale.
Répondant à M. Smith, M. Xavier de Villepin, président, a
rappelé que la France avait pour ambition de
maintenir une
agriculture forte
et que la PAC avait à cet égard
constitué un outil efficace. L'élargissement à venir de
l'Union européenne devait conduire à une nouvelle
évolution de la PAC, conformément aux voeux de la
Nouvelle-Zélande. M. André Boyer a, pour sa part, rappelé
que les aides à l'agriculture n'avaient pas comme seul but un soutien
des productions, d'ailleurs très régulées, mais
permettaient dans les zones rurales déshéritées et
menacées par la baisse démographique de garder vivant un
territoire menacé d'abandon, au prix de l'acceptation
concédée par les agriculteurs du rôle de " jardiniers
de la nature " très éloigné de leur conception de
producteurs. Et que cette mutation devait être accompagnée par des
programmes visant à la sauvegarde du patrimoine naturel et de l'espace
plutôt qu'à l'aide à la production.
Concluant l'entretien, M. Lockwood Smith a indiqué qu'il comprenait les
préoccupations françaises en matière agricole. Il
souhaitait seulement que les subventions agricoles ne perturbent pas les prix
mondiaux. Il se réjouissait enfin de la prochaine visite en
Nouvelle-Zélande, évoquée par le président de
Villepin, d'une délégation de chefs d'entreprises
français, conduite par M. Claude Bebear.
4. L'entretien avec le secrétaire général du ministère de la défense et le chef d'état-major des armées
Secrétaire à la Défense depuis 1991 -et
reconduit pour cinq ans à ce poste en 1996-
M. Gerald Hensley
a
eu un échange de vues approfondi, dans une excellente ambiance, avec la
délégation, en compagnie du chef d'état-major des
armées néo-zélandaises et de ses principaux conseillers.
M. Hensley a d'abord exprimé sa satisfaction de voir la reprise et le
développement des
relations bilatérales en matière de
défense.
Il a souligné à cet égard la visite,
en avril prochain, en Nouvelle-Zélande du général
commandant supérieur des forces françaises dans le Pacifique,
ainsi que la participation commune aux exercices
" Tasmanex "
prévus en 1998, dont il a précisé qu'il en attendait des
enseignements importants pour les forces armées
néo-zélandaises.
Le secrétaire à la défense a ensuite évoqué,
en réponse à MM. Xavier de Villepin, président, et Didier
Borotra, la participation aux
opérations de maintien de la paix
sous l'égide des Nations unies. Il a rappelé que la
Nouvelle-Zélande avait participé à de nombreuses missions
internationales, notamment en Bosnie, et indiqué que son pays
était favorable à la proposition canadienne de mise sur pied
d'une structure militaire de commandement des opérations de maintien de
la paix.
Interrogé par MM. André Rouvière et Didier Borotra sur les
relations
de la Nouvelle-Zélande, dans le domaine de la
défense,
avec l'Australie et avec les Etats-Unis,
M. Hensley a
précisé que les Néo-Zélandais souhaitaient des
relations bilatérales plus étroites avec l'Australie, dans la
mesure où une menace majeure contre l'Australie viserait
également la Nouvelle-Zélande. Ces relations constituaient la
clé de voûte de la politique de défense
néo-zélandaise.
La relation-clé avec les Etats-Unis était, pour sa part,
fortement perturbée par le
différend portant sur les navires
à propulsion nucléaire
(ou, a fortiori, porteurs d'armes
nucléaires). La situation demeurait pour l'essentiel bloquée dans
la mesure où elle résultait d'une loi
néo-zélandaise qui ne laissait place qu'à des
évolutions marginales.
En réponse aux questions de MM. Xavier de Villepin, président, et
Didier Borotra sur les
relations stratégiques dans la région,
M. Hensley a souligné que l'émergence éventuelle d'une
marine de haute mer chinoise puissante modifierait sans aucun doute la
situation politico-stratégique dans le Pacifique. De façon
générale, les
relations triangulaires Chine-Etats-Unis-Japon
devaient constituer le pivot central autour duquel s'organiserait la
sécurité dans la zone Asie-Pacifique.
Le secrétaire à la Défense et ses collaborateurs ont
également précisé
les fondements et l'évolution
de la politique de défense néo-zélandaise
.
M. Hensley a en particulier souligné que la
Nouvelle-Zélande, sans faire aujourd'hui l'objet d'une quelconque
menace, effectuait les trois quarts de ses échanges avec la
région Asie-Pacifique
et était de ce fait
particulièrement attachée à la sécurité et
la stabilité de la région.
La défense néo-zélandaise devait par ailleurs faire face
à de très fortes
contraintes budgétaires,
le
pouvoir d'achat de la défense néo-zélandaise ayant
baissé de 32 % depuis 1989. Un
travail d'évaluation et de
réflexion
était en cours pour proposer au gouvernement les
options qui permettraient de maintenir, dans les années à venir,
les capacités de défense du pays à un niveau satisfaisant.
M. Xavier de Villepin, président, a enfin conclu ce vaste tour d'horizon
en précisant, à l'intention de ses interlocuteurs
néo-zélandais, les grandes orientations de la
réforme
de la défense française
ainsi que la portée et les
conditions du
rapprochement de la France vers l'OTAN.
5. Les contacts de la délégation au Parlement néo-zélandais
a) La table ronde avec les membres de la commission des Affaires étrangères et de la Défense du Parlement néo-zélandais
A l'occasion de ses contacts avec les parlementaires
néo-zélandais, votre délégation a ressenti la
vigueur du
sentiment antinucléaire -
largement partagé par
l'opinion- en Nouvelle-Zélande à l'occasion du passage
annoncé au large des côtes néo-zélandaises, d'un
bateau,
à destination du Japon,
transportant des
déchets nucléaires recyclés.
Cela n'a pas empêché la très grande courtoisie et la
volonté de se tourner vers l'avenir de la table-ronde qui a
réuni, au Parlement de Wellington, autour de la délégation
des
parlementaires néo-zélandais,
membres de la future
commission des Affaires étrangères et de la défense en
cours de reconstitution après les élections
générales,
représentant l'ensemble de l'éventail
politique
du pays. Il s'agissait de :
- Mme Joy Mc Lauchlan, présidente de la commission
" sortante ", membre du parti national,
- Mme Ann Batten, membre du parti " New Zealand First ",
- M. Mike Moore, ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires
étrangères, membre du parti travailliste et du " cabinet
fantôme ",
- M. Geoff Braybrooke, également membre du parti travailliste,
- M. Derek Quigley, membre du parti Act (" association des
consommateurs
et contribuables "),
- M. Matt Robson, membre de l'Alliance,
- et M. Wayne Mapp, membre du parti national.
Trois thèmes
principaux ont été
évoqués au cours de cette table-ronde.
Les perspectives de
l'Union européenne
, et notamment la mise en
place de
la monnaie unique,
ont suscité un vif
intérêt de la part des députés
néo-zélandais. MM. Didier Borotra, Xavier de Villepin,
président, André Rouvière, Jean-Luc Bécart et
Maurice Lombard ont répondu aux interrogations de leurs interlocuteurs
et ont notamment précisé : les " critères de
convergence " fixés par le traité de Maastricht, la
volonté de la France de participer dès 1999 à la
création de ce pôle monétaire européen, les raisons
de la montée du vote d'extrême-droite en France, et les
débats relatifs à l'avenir de la construction européenne,
notamment au regard de la souveraineté nationale.
Les parlementaires néo-zélandais ont ensuite souligné leur
large approbation, maintenant que les essais nucléaires étaient
achevés,
du principe de la présence de la France dans le
Pacifique,
dont l'action et l'aide au développement étaient
appréciées, notamment en matière de
sécurité, de pêche ou d'investissements. Seul le
degré
de la présence française était
discuté par certains parlementaires néo-zélandais qui
étaient particulièrement attentifs au processus en cours en
Nouvelle-Calédonie.
En revanche, le
volet nucléaire
de la présence
française a été clairement critiqué par les
députés néo-zélandais. Il a été
souligné que le Parlement et l'opinion néo-zélandais
étaient sur ce point
unanimes contre toute exploitation du Pacifique
à des fins nucléaires.
Les parlementaires
néo-zélandais ont en particulier indiqué qu'ils
n'acceptaient pas que leur zone économique exclusive pût
être mise à contribution pour
le transport vers le Japon de
déchets nucléaires retraités.
Un député
de l'Alliance a ainsi remis à la délégation le texte d'un
message
demandant : que la Nouvelle-Zélande soit consultée
sur la route de ce bateau, le " Pacific Teal ", que ce
bâtiment
évite la zone économique exclusive de la Nouvelle-Zélande,
que la France respecte le " code de bonne conduite " de
l'AIEA en la
matière et oeuvre pour qu'il soit mis un terme à ces transports
de produits radioactifs par obligation faite aux pays producteurs de
déchets nucléaires de les retraiter chez eux.
M. Xavier de Villepin, président, a alors précisé que les
informations relatives au " Pacific Teal " avaient été
données et que toutes les mesures de sécurité
nécessaires à un transport de ce type, au demeurant
fréquent, avaient été prises. Il a enfin rappelé
les importantes
évolutions de la politique nucléaire de la
France :
arrêt des essais, signature du CTBT,
démantèlement du site de Mururoa et signature du traité de
Rarotonga, toutes ces évolutions allant de pair avec la volonté
maintenue de la France de conserver une défense forte et adaptée.
b) L'entretien avec M. Michael Cullen, adjoint au leader de l'opposition travailliste
A l'occasion de la rencontre de la délégation
avec M. Michael Cullen, adjoint au leader de l'opposition travailliste -Mme
Helen Clark, alors absente de Wellington- trois thèmes principaux ont
été évoqués.
S'agissant des
relations bilatérales,
M. Cullen a jugé
d'emblée
très opportune
la visite sénatoriale qui
marquait la reprise de rapports qui n'auraient, selon lui, jamais dû se
détériorer à ce point. La question des essais
nucléaires appartenait maintenant au passé et l'opposition
néo-zélandaise souhaitait une relance réelle des relations
entre les deux pays. Restait toutefois, a relevé M. Cullen, le transport
de déchets nucléaires, le passage du " Pacific Teal "
au large des côtes néo-zélandaises risquant de susciter
encore des remous.
En réponse aux questions de M. Cullen sur l'avenir de la construction
européenne,
M. André Boyer a rappelé que celle-ci
avait depuis ses débuts assuré la paix et la
prospérité et que le souci commun des européens devait
viser à bâtir une Union libre, pacifique, généreuse
et solidaire. Il a souligné que la politique agricole commune (PAC)
évoquée avait été perçue comme une
contrainte par les agriculteurs français, eux-mêmes initialement
opposés aux règles contraignantes de la PAC, mais qui avaient
dû accepter la régulation de leurs productions et le principe
contre nature de la jachère. Et que ce n'était pas un moindre
effort que d'avoir consenti dans les zones rurales menacées de
désertification à jouer le rôle de " jardiniers de la
nature " qui heurtait leur conception du métier d'agriculteur mais
qui revêt une grande importance au plan écologique. Le choix de la
construction européenne, a souligné M. André Boyer,
était un choix fondamental de développement économique et
d'échanges mais pour un monde meilleur.
M. Xavier de Villepin, président, a alors évoqué avec M.
Cullen l'impact possible des prochaines élections britanniques sur les
relations entre Londres et l'Union européenne, dans l'hypothèse
où le parti travailliste l'emporterait.
M. Cullen s'étant enfin inquiété de savoir si la France
serait encore en mesure de jouer un " rôle
d'intermédiaire " entre les Etats-Unis et la Russie dans
le
dossier de l'élargissement de l'OTAN
-compte tenu notamment de ses
différends avec Washington sur des questions telles que celles du
commandement sud de l'Alliance- M. Xavier de Villepin, président, a
indiqué que la France plaidait pour un accord entre l'Alliance et la
Russie afin de favoriser une nouvelle architecture de sécurité en
Europe.
6. Les contacts de la délégation avec la communauté française en Nouvelle-Zélande et les médias néo-zélandais
- L'étape de Wellington, malgré sa
brièveté, a enfin, bien sûr, été l'occasion
pour la délégation sénatoriale de rencontrer de nombreux
représentants de
la commuauté française en
Nouvelle-Zélande
, notamment lors de la réception offerte en
son honneur par l'Ambassadeur de France.
Le nombre de Français immatriculés en Nouvelle-Zélande
était de
1 407
au 1er janvier 1997. Si l'on ajoute environ
700 Français non immatriculés, la communauté
française est la 9e en Nouvelle-Zélande (après les
communautés australienne, britannique, néerlandaise, chinoise,
américaine, japonaise, allemande et italienne). Il est à noter
que près de la moitié des immatriculés sont
double-nationaux. Ces Français de Nouvelle-Zélande sont à
45 % installés à Auckland et à 18 % à Wellington.
- Comme au Parlement, les questions nucléaires ont été
à nouveau évoquées par les
médias
néo-zélandais
à l'occasion de la visite
sénatoriale, le prétexte en étant la question du transport
des déchets nucléaires recyclés (liée au passage du
" Pacific Teal ").
Si la sensibilité antinucléaire demeure ainsi très vive en
Nouvelle-Zélande, la visite de la délégation du
Sénat -la première visite politique française de haut
niveau dans ce pays depuis l'automne 1994- a été marquée
par le souci des autorités néo-zélandaises de tourner la
page du nucléaire et de reprendre des relations suivies avec la France
en raison notamment de son rôle -apprécié- dans le
Pacifique et de l'importance de sa position au sein de l'Union
européenne.
*
* *
DEUXIÈME PARTIE -
L'AUSTRALIE ET LA
NOUVELLE-ZÉLANDE :
DEUX PARTENAIRES TRÈS ÉTROITEMENT
LIÉS
MALGRÉ LEURS PARTICULARISMES
ET LEURS
INÉVITABLES RIVALITÉS
Observations préliminaires : les soeurs rivales de l'Océanie
- La carte d'identité de l'Australie.
Trente fois plus vaste et cinq fois plus peuplée que la
Nouvelle-Zélande, l'Australie est naturellement la puissance dominante
de l'Océanie.
S'étendant sur plus de 7,7 millions de kilomètres carrés,
l'Australie est la terre des paradoxes.
Ile-continent,
elle a quatorze
fois la taille de la France et est presque aussi vaste que les Etats-Unis hors
Alaska. Mais, avec
18 millions
d'habitants, elle est à peine plus
peuplée que les Pays-Bas et sa croissance démographique est
faible (1,02 %). La densité de sa population -2,3 habitants au km²-
est l'une des plus faibles du monde et l'Australie abrite la population la plus
urbanisée de la planète (88 %), dont 3,8 millions vivent à
Sydney et 3 millions à Melbourne.
L'Australie est un pays très riche sur le plan agricole et en
matières premières minérales dont le
produit national
brut
s'élève à 453 milliards de dollars australiens
(le dollar australien valant environ 4 F). Le PNB par habitant dépasse
25 000 dollars australiens.
La part des principaux secteurs
d'activités dans le PNB australien, est la suivante :
- 10 % dans le secteur primaire,
- 15 % dans le secteur secondaire,
- et 75 % dans le secteur tertiaire.
Sur le plan institutionnel, enfin, l'Australie est une
démocratie
fédérale
constituée de sept Etats et territoires. La
Constitution, entrée en vigueur le 1er janvier 1901, met en place un
régime parlementaire bicaméral
composé d'un
Sénat fédéral de 76 membres (élus au suffrage
universel) et d'une Chambre des représentants de 148
députés. Le Chef de l'Etat reste la Reine Elizabeth II
représentée sur place par le
gouverneur
général
(actuellement Sir William Deane en poste depuis
février 1996).
-
La carte d'identité de la Nouvelle-Zélande.
D'une superficie de
270 000 km²
-soit l'équivalent de la
Grande-Bretagne ou deux fois et demie le territoire de la Corée du
Nord-, la Nouvelle-Zélande n'est évidemment pas
géographiquement comparable à l'Australie. La
référence à la " grande soeur " australienne est
inévitable même si les résultats sont, dans certains
domaines, supérieurs à ceux de " l'île de
l'Ouest " de l'autre côté de la mer de Tasmanie -par analogie
à l'île du Nord et à l'île du Sud qui composent la
Nouvelle-Zélande.
La population néo-zélandaise est limitée à
3,6
millions d'habitants
(dont plus de 2,6 millions dans l'île du Nord),
soit moins que Hong-Kong et à peine plus que Singapour. Elle comprend
près de 10 % de Maoris,
mais aussi 4 % d'habitants d'origine
polynésienne et 1 % d'origine asiatique. La densité de la
population -13,5 habitants au km²- y est sensiblement plus importante
qu'en Australie, de même que la croissance démographique
(1,4 %).
Sur le plan économique, le PNB néo-zélandais
s'élève à 83,5 milliards de dollars
néo-zélandais (le dollar néo-zélandais valant
environ 3,75 F), et le PNB par habitant est estimé à plus de
23 500 dollars néo-zélandais.
La répartition de ce
PNB entre les principaux secteurs d'activités est la suivante :
- 8,4 % dans le secteur primaire,
- 28,5 % dans le secteur secondaire,
- et 63,1 % dans le secteur tertiaire.
Dans le domaine institutionnel, enfin, la Nouvelle-Zélande est
également
une démocratie parlementaire membre du Commonwealth.
La couronne britannique y est représentée par le gouverneur
général (actuellement Sir Michael Hardy Boys). Le Parlement,
monocaméral, est constitué par une Chambre des
représentants composée de 120 députés.
*
* *
I. DES DONNÉES POLITIQUES INTÉRIEURES NON DÉNUÉES DE SIMILITUDES
A. LA SITUATION POLITIQUE AUSTRALIENNE
1. Le paysage politique australien
a) Les grands axes de l'évolution politique depuis 1945
Après la seconde guerre mondiale -qui a conduit
l'Australie, après la chute de Singapour en 1942, à se
détacher progressivement de l'Empire britannique pour devenir
l'allié et le relais naturel des Etats-Unis dans la région-
l'île-continent a connu pendant plus de deux décennies une
prospérité et une élévation de son niveau de vie
exceptionnelles, parfois présentées comme
" l'âge
d'or " de l'Australie.
Deux millions d'immigrants, essentiellement
européens, sont alors venus s'installer dans le pays.
La vie politique australienne est alors dominée par le parti
libéral et un Premier ministre régulièrement
réélu
de 1949 à 1966, Sir Robert Menzies.
Ses
successeurs, également libéraux, poursuivront jusqu'en 1972 une
politique de fidèle alliance avec les Etats-Unis, notamment au Vietnam.
En 1972,
après vingt-trois années de pouvoir de la
coalition conservatrice, une
majorité travailliste conduit M. Gough
Whitlam
au poste de Premier ministre. De profondes réformes sont
engagées, de la fin de la présence australienne au Vietnam
jusqu'à la mise en place d'un système de protection sociale
universel en passant par l'abolition de la politique du " Keep
Australia
White " et la restitution de leurs terres ancestrales aux
aborigènes. Mais les difficultés économiques et sociales,
l'inflation et le chômage étant aggravés par la crise
internationale, conduisent le gouverneur général, dans des
conditions controversées, à faire appel
en 1975
au leader
de l'opposition
M. Malcolm Fraser,
choix confirmé par les
électeurs à trois reprises lors des élections
législatives suivantes.
Ce gouvernement conservateur restera ainsi au pouvoir
jusqu'en 1983,
date à laquelle
les travaillistes
accèderont une
nouvelle fois aux responsabilités du gouvernement fédéral.
Ils y demeureront cette fois jusqu'en 1996, sous les directions successives de
M. Bob Hawke,
jusqu'en 1991, puis de son ancien ministre des finances,
M. Paul Keating.
Les travaillistes ont alors engagé, avec l'appui
du puissant syndicalisme australien, une véritable
révolution
libérale
(privatisations, réformes de structures, fin de
l'indexation des revenus sur les prix...) afin de permettre
l'intégration de l'Australie dans une économie asiatique en
pleine expansion, alors que le pays était jusqu'alors doté d'une
économie fortement administrée. La récession de
l'économie mondiale, s'ajoutant à la persistance de
déséquilibres, a toutefois porté un coup à la
réussite des réformes engagées par les travaillistes qui
n'ont ainsi pu enrayer l'érosion progressive de leurs positions.
b) L'alternance du 2 mars 1996 et le retour au pouvoir d'une coalition libérale-nationale
Alors que M. Paul Keating, leader charismatique mais quelque
peu autocratique, avait fixé trois rendez-vous à son pays au
tournant du siècle -la République, la réconciliation
nationale avec les aborigènes et l'arrimage définitif de
l'Australie à l'Asie-, les élections législatives du 2
mars 1996 ont marqué le retour au pouvoir de la coalition
nationale-libérale comme aboutissement d'un glissement de l'opinion
australienne entamé depuis plusieurs années au niveau des Etats
fédérés.
La
coalition formée du parti libéral,
formation de centre
droit,
et du parti national,
plus conservateur et représentant
les intérêts du monde rural, a en effet remporté une longue
série de
succès aux élections locales,
successivement dans l'Etat de Victoria et en Tasmanie (en 1992), en
Australie occidentale (en 1993) et dans le Queensland (en février 1996).
La Nouvelle-Galles du Sud est ainsi aujourd'hui le seul des sept Etats et
territoires australiens à être dirigé par les
travaillistes, sous l'autorité du gouvernement de M. Bob Carr qui vise
à maintenir ses positions dans la perspective des élections de
1999 qui précèderont de peu les Jeux olympiques qui se
dérouleront en l'an 2000 à Sydney.
La coalition dirigée par
M. John Howard
-jusqu'alors chef de
l'opposition depuis janvier 1995, après l'avoir déjà
été de 1985 à 1989 avant de laisser provisoirement la
place à M. Alexander Downer- a ainsi remporté, après
treize années d'opposition, les élections du 2 mars 1996 sur la
base d'un programme consensuel effaçant les aspérités
thatchériennes de ses prédécesseurs et
bénéficiant de la lassitude des Australiens à
l'égard du gouvernement travailliste. Cette victoire électorale a
été très nette puisque la coalition a remporté
54 % des suffrages et 94 sièges sur 148 à la Chambre des
représentants
(dont 76 pour le parti libéral et 18 pour le
parti national). Le parti travailliste (Australian Labour Party ou ALP) n'a
conservé que 49 sièges, avec 45 % des voix ; trente
députés sortants travaillistes, dont sept ministres, ont
été battus.
M. John Howard a constitué
une équipe gouvernementale
resserrée
de 23 membres au sein de laquelle les postes
économiques et sociaux reviennent à des personnalités aux
convictions libérales affirmées -notamment M. Peter Costello,
ministre des finances- tandis que M. Alexander Downer y détient le
ministère des Affaires étrangères, élargi à
la coopération, et que M. Tim Fischer cumule ses fonctions de
président du parti national avec celle de vice-Premier ministre et de
ministre du commerce extérieur. Le parti national, dont le poids
électoral tend à diminuer au profit des libéraux, ne
détient toutefois que 5 portefeuilles sur 23.
Malgré la relative inexpérience de nombreux ministres -justifiant
les rumeurs successives de remaniement ministériel-, le nouveau
gouvernement a atteint les principaux objectifs qu'il s'était
assignés depuis un an et le Premier ministre, M. John Howard, s'est
imposé comme un dirigeant sérieux et responsable et comme un
habile tacticien qui bénéficie
d'une popularité
personnelle particulièrement élevée.
c) Une opposition affaiblie
La position actuelle du gouvernement australien paraît
aujourd'hui d'autant plus solide que l'opposition y semble durablement
affaiblie. Les observateurs prédisent ainsi -à tort ou à
raison- le maintien de la majorité actuelle au moins pour deux
législatures (c'est-à-dire jusqu'en 2002), appréciation
confortée par les derniers résultats d'élections
partielles.
-
Le parti travailliste,
qui a subi en mars 1996 son revers le plus
cinglant depuis soixante ans, ne semble pas représenter à court
terme une alternative crédible. Son leader, l'ancien Premier ministre
Paul Keating, s'est retiré de la vie politique et a été
remplacé par son ancien ministre des finances, M. Kim Beazley. Il
a
perdu une partie de son électorat populaire et ouvrier
du fait de la
politique libérale de modernisation de l'économie conduite depuis
1983 (déréglementation bancaire, privatisations,
démantèlement des barrières tarifaires, flottement du
dollar australien...) parallèlement à la stratégie
d'insertion de l'Australie en Asie. Fortement lié au mouvement syndical,
le Labour s'efforce ainsi de reconquérir son influence traditionnelle
aupès de la classe ouvrière et des minorités non
anglo-saxonnes (catholiques, asiatiques...).
- Le parti travailliste est de plus confronté à
la concurrence
des autres formations d'opposition
qui conservent en particulier, en tant
que partis charnières,
un rôle déterminant au
Sénat.
Les
Verts et le parti démocrate
-dirigé
par Mme Cheryl Kennot- jouent ainsi un rôle important dans la vie
politique et parlementaire australienne et privent le gouvernement de M. Howard
de majorité à la Chambre haute. Ils jouent également un
rôle comparable dans certains Etats fédérés,
notamment en Tasmanie.
2. Les grands thèmes de la vie politique intérieure australienne
a) Les réformes économiques et sociales
Malgré cette conjonction des oppositions
-travaillistes, démocrates et écologistes- au Sénat, le
nouveau gouvernement est parvenu à faire adopter les premiers projets de
son
programme économique
dont trois axes principaux doivent
être soulignés :
-
la rigueur budgétaire
est la caractéristique majeure de
la nouvelle loi de finances qui prévoit sur deux ans un effort
exceptionnel de réduction de dépenses publiques et des
diminutions drastiques des effectifs de la fonction publique (25 000 agents) ;
- en second lieu,
la déréglementation du marché du
travail
a fait l'objet de mesures destinées à accroître
la flexibilité du marché du travail et visant à favoriser
les petites entreprises ; moins importantes qu'initialement prévu, ces
mesures de compromis ont, semble-t-il, désarmé l'hostilité
de la centrale syndicale ACTU qui rassemble encore 37 % des salariés (au
lieu de 50 % en 1982) ;
- enfin, le programme gouvernemental prévoit la poursuite du processus
de
privatisations
malgré l'opposition qu'elles suscitent,
notamment dans le secteur du transport maritime, des
télécommunications et de la banque.
Le gouvernement a toutefois jusqu'ici adopté une certaine prudence dans
la mise en oeuvre des réformes annoncées. La question est
aujourd'hui posée de savoir s'il pourra aller plus vite et plus loin
-comme le souhaitent les milieux d'affaires qui préconisent un
rythme
de réformes
plus soutenu- ou s'il devra se contenter de mesures
prudentes et limitées pour ne pas accroître les tensions
syndicales et risquer de remettre en cause treize années de relative
paix sociale et de modération salariale résultant de la large
association du mouvement syndical à la conduite de la politique
économique sous le gouvernement travailliste.
b) La question de l'identité australienne
Le gouvernement doit également gérer avec
délicatesse les débats relatifs à
l'identité
australienne
et au
multiculturalisme
de l'île-continent qui
témoignent d'un certain malaise identitaire et de la fragilité du
consensus qui semblait s'être dégagé à ce sujet.
L'Australie -qui fascine un peu partout dans le monde et attire un très
grand nombre de demandes d'immigration- attache en effet une grande importance
à la question de son identité. Si son caractère de
société multiculturelle doit lui permettre de répondre au
défi de la mondialisation -peut-être plus aisément que les
vieilles nations européenes- des débats importants -notamment
entre la majorité et l'opposition- portent sur deux questions
essentielles : celle de la communauté aborigène et celle de
l'immigration, notamment asiatique.
- S'agissant des mesures en faveur de
la communauté aborigène
(240 000 personnes, soit 1,6 % de la population)
,
le gouvernement
travailliste avait engagé une politique de réconciliation
nationale qui fait aujourd'hui l'objet d'un réexamen prudent afin de ne
pas attiser un risque de contestation aborigène violente. La
question
des droits fonciers
reconnus depuis 1993 aux descendants des premiers
occupants provoque de vifs débats dans la mesure où la nouvelle
législation abolit la théorie de la " terra nullius "
en vigueur depuis 1788 et fait obstacle à l'exploitation minière
et agricole. Dans le même temps, la commission pour le
développement économique des aborigènes (ASTIC) fait
l'objet d'un projet de réforme contesté et les aides
financières à la promotion des aborigènes sont atteintes
par l'extrême rigueur budgétaire. De manière
générale, la question aborigène resurgit du fait d'
une
nouvelle lecture de l'histoire
conçue désormais au
départ avec l'idée d'une invasion et non plus celle,
établie jusqu'alors comme un postulat, d'une implantation pacifique des
colons.
- En ce qui concerne
le développement de l'immigration asiatique
(qui représente aujourd'hui 5 % des résidents australiens et
pourrait atteindre 15 % en 2050), le nouveau gouvernement est également
plus sensible que son prédécesseur travailliste aux
craintes
identitaires de l'opinion.
Mais il souhaite aussi ménager les
partenaires asiatiques de l'Australie par le maintien d'une
politique
migratoire libérale.
C'est dans ce double esprit que doivent
être appréciées la réduction limitée du flux
annuel de nouveaux immigrés (de 93 000 à 76 000) ou la
sévérité accrue du régime de regroupement familial.
Mais la classe politique australienne quasi unanime a condamné les
thèses xénophobes et populistes
développées
notamment par le Sénateur Pauline Hanson -qui ont pourtant reçu
à l'automne dernier un vaste écho médiatique- et s'efforce
d'empêcher l'émergence d'un mouvement de contestation radicale de
l'immigration asiatique et de la société multiculturelle
australienne, prouvant que l'angoisse du " péril jaune "
demeure dans la conscience australienne et que les fantômes de la
" politique de l'Australie blanche " pourraient être
prêts à resurgir.
c) La question constitutionnelle et le débat sur la République
La question constitutionnelle et de
l'avènement
d'une Répulique australienne "
n'apparaît pas aujourd'hui
au premier rang des priorités de la coalition libérale-nationale,
traditionnellement plus attachée aux liens avec la Couronne britannique.
Elle n'en constitue pas moins, sinon un enjeu majeur, du moins un thème
important du débat politique australien.
Il convient à cet égard de rappeler que, si l'Australie n'a
guère modifié sa loi fondamentale d'inspiration britannique
depuis 1901,
l'Australia act de 1986
a déjà
découplé définitivement le Commonwealth australien du
Parlement de Wetsminster. Le précédent Premier ministre,
M. Keating, travailliste, avait prévu l'organisation d'un
référendum pour transformer l'Australie en république
à l'horizon 2001, pour le centenaire de la Fédération. Et,
en dépit de ses convictions personnelles monarchistes, le nouveau
Premier ministre, M. Howard, s'est engagé à organiser une
convention constitutionnelle et une consultation populaire sur ce
thème
.
S'il existe encore sur ce terrain un certain clivage traditionnel entre
travaillistes républicains et libéraux majoritairement
monarchistes, l'issue d'une telle consultation ne ferait, aux yeux des
observateurs, guère de doute. L'opinion australienne, à
l'exception des personnes les plus âgées ou de certains milieux
d'ascendance anglo-saxonne, paraît en effet majoritairement favorable
à la désignation du Chef de l'Etat australien par le corps
électoral. Une majorité semble ainsi, si la question est
posée, devoir se dégager en faveur de l'avènement d'une
République australienne au terme d'une évolution qui
apparaît inévitable. Si la question est politiquement sensible et
pose des problèmes constitutionnels délicats, chacun admet
aujourd'hui que l'évolution vers la république est
désormais dans l'ordre des choses.
B. LA SITUATION POLITIQUE NÉO-ZÉLANDAISE
1. Le paysage politique néo-zélandais
a) La reconfiguration du panorama politique
Marquée par l'expansion économique et par
l'urbanisation -notamment de la population maorie-, la Nouvelle-Zélande
de l'après-guerre n'a pas échappé ensuite aux crises de
années 1970 et 1980 qui ont notamment provoqué une profonde
modification des orientations économiques du pays dans les années
1980.
Traditionnellement caractérisée par un
bipartisme
à
la britannique fondé sur le parti national et le parti travailliste, le
gouvernement conservateur de M. Robert Muldoon (national) dut alors
céder la place à un
gouvernement travailliste
qui -sous
l'impulsion du Premier ministre, M. David Lange, et dans un premier temps, de
son ministre des finances, M. Roger Douglas- mit en oeuvre,
à partir
de 1984
, dans un renversement des rôle politiques habituels, une
restructuration radicale de l'économie
fondée sur le
libéralisme économique, les privatisations et la
déréglementation.
Les conséquences sociales -notamment en termes de chômage- de cet
ultra-libéralisme et ses retombées politiques aboutirent à
la démission de M. Lange en 1989 puis au très net
succès du
parti national,
dirigé par M. Jim Bolger, aux
élections de 1990, succès renouvelé d'extrême
justesse en 1993 (avec une marge de 0,35 % sur le parti travailliste)
malgré des résultats économiques flatteurs.
Dans le même temps, un
nouveau mode de scrutin
incluant pour la
première fois une dose importante de proportionnelle (55 sièges
sur 120 dans le cadre d'un système du double vote baptisé MMP
pour " mixed member proportional ") a été introduit par
voie référendaire en 1993 et a favorisé, à travers
la prolifération des formations politiques, une certaine
reconfiguration du paysage politique néo-zélandais
-même si le parti national et le parti travailliste demeurent les
plus importants.
Si le
parti national
est parvenu à gérer avec
modération et habileté une situation délicate en
s'appuyant sur les résultats économiques du gouvernement, le
parti travailliste,
aujourd'hui dirigé par Mme Helen Clarke, a
décliné et s'efforce de surmonter une double crise
d'identité et de stratégie qui lui impose de dépasser la
contradiction apparente entre ses aspirations sociales traditionnelles et les
principes libéraux.
Constituée en décembre 1991,
l'Alliance
-composée
de cinq partis distincts- a effectué rapidement une percée
spectaculaire sur la scène politique néo-zélandaise avant
de perdre beaucoup de son élan en raison de l'imprécision de son
programme et de l'annonce du retrait de la vie publique de son chef, M. Jim
Anderton, qui est ensuite revenu sur sa décision.
L'Alliance
pourrait toutefois jouer un rôle dans l'avenir dans le cadre d'une
coalition gouvernementale, aux côtés vraisemblablement du parti
travailliste.
Mais c'est surtout la montée en puissance du parti populiste et
nationaliste
" New Zealand First "
qui est venu, tout
récemment, modifier la donne politique néo-zélandaise sous
l'impulsion de son leader, M. Winston Peters, transfuge du parti national,
d'origine partiellement maorie, réputé pour son abattage et son
éloquence, et qui a remis au premier plan la question de l'immigration.
b) Les élections législatives du 12 octobre 1996 et la nécessaire constitution d'un gouvernement de coalition
Dans ce contexte, les élections législatives du
12 octobre dernier ont donné les résultats suivants :
-
le parti national
au pouvoir sous la direction de M. Bolger est
arrivé en tête mais n'a obtenu que 33,8 % des voix et 44
sièges à la Chambre des représentants sur 120 ;
-
le parti travailliste
n'a pas profité du recul gouvernemental
et a également sensiblement reculé avec 28,2 % des voix et 37
députés ;
- il en est allé de même de
l'Alliance
qui n'est
arrivée qu'en quatrième position avec 10 % des voix (au lieu de
18 % en 1993) et 13 députés ;
-
" New Zealand First "
est ainsi apparu comme le
principal
bénéficiaire de la consultation en obtenant 17 sièges de
députés et 13,3% de voix, lui octroyant un rôle clé
dans la formation de toute coalition ;
- une cinquième formation
" Act New Zealand "
est
enfin représentée au Parlement avec 8 sièges et 6,1 %
des voix.
Le parti national ayant ainsi perdu la majorité absolue au Parlement
-tout en devançant les travaillistes-
le nouveau mode de scrutin a
imposé la formation d'un gouvernement de coalition
et a fait de
" New Zealand First ",
trois ans après sa
constitution,
l'arbitre de la situation politique
et un acteur désormais majeur
de la scène néo-zélandaise.
Cette formation populiste, un moment tentée d'appuyer une coalition de
gauche rassemblant le parti travailliste et l'Alliance, a finalement choisi,
fin 1996, de soutenir, à l'issue de deux mois d'intenses tractations, un
gouvernement de coalition avec le parti national.
M. Bolger, malgré le revers qu'ont constitué les élections
de 1996 pour le parti national, a ainsi finalement pu constituer, le 11
décembre dernier, un nouveau gouvernement, M. Winston Peters devenant
vice-Premier ministre et ministre de l'économie.
c) Une coalition à la cohésion incertaine
La constitution du gouvernement de coalition -qui comprend 5
membres de " New Zealand First " sur les 20 membres du
Cabinet-
appelle trois observations :
- elle est d'abord fondée sur un accord de gouvernement qui laisse
présager
un certain infléchissement de la politique
économique ultra-libérale
du gouvernement
néo-zélandais : augmentation des dépenses publiques
(l'excédent budgétaire pour 1999 devrait être réduit
à 2,4 % du PIB au lieu de 5,5 % dans les prévisions initiales),
élargissement à 3 % (au lieu de 2 %) de l'objectif assigné
à la Banque centrale en matière d'inflation, limitation de la
concurrence dans certains services publics (santé, logement),
- la
cohésion
de la nouvelle coalition apparaît à
bien des égards
fragile
: d'abord en raison des
divergences
profondes
entre ses deux composantes et de l'opposition ancienne entre MM.
Bolger et Peters -qui avait été évincé du
gouvernement en 1991 par le Premier ministre ; ensuite parce que la
cohésion interne de New Zealand First
pourrait elle-même
souffrir de son alliance avec le parti national alors que la majeure partie de
ses électeurs souhaitaient un rapprochement avec la gauche, notamment au
sein de l'électorat maori (10 % de la population) ; enfin,
naturellement, du fait des
critiques de l'opposition
et notamment du
parti travailliste qui pourrait profiter de l'association de New Zealand First
à la gestion gouvernementale ;
- toutefois, certaines informations recueillies par votre
délégation peuvent aussi bien laisser croire à une
coalition moins chaotique que prévu dans la mesure où les deux
partenaires ont naturellement intérêt au succès de leur
" réconciliation " : M. Bolger, au pouvoir depuis 1990, peut
bénéficier de son alliance avec M. Peters pour conduire
une
politique plus sociale et favoriser un désamorçage du contentieux
maori ;
quant à New Zealand First, son avenir dépend
désormais directement du succès de l'expérience qui est
désormais engagée.
2. Les grands thèmes de la vie politique néo-zélandaise
a) Les orientations économiques et sociales du gouvernement
L'un des atouts politiques de la coalition pourrait en effet
résulter du
léger infléchissement
donné par
l'accord de gouvernement
au dogme ultra-libéral
qui a
fondé jusqu'ici l'action du gouvernement de M. Bolger.
Ainsi le salaire minimal est augmenté et doit passer en mars 1997 de
6,37 à 7 dollars de l'heure. De nouvelles dépenses publiques sont
prévues dans le secteur de la santé et dans le système
éducatif. Dans le domaine des entreprises publiques, les compagnies
d'électricité, la poste et des chaînes de
télévision doivent être écartées du processus
de privatisations.
En contrepartie, les réductions d'impôts prévues par le
parti national pour l'été 1997 ont été
repoussées d'un an et l'objectif en matière d'inflation a
été assoupli.
Malgré les critiques inhérentes à tout compromis et les
incertitudes qui demeurent, le programme économique et social du
gouvernement peut être ainsi considéré comme de nature
à correspondre aux aspirations de l'opinion néo-zélandaise
en maintenant une politique économique d'essence très
libérale tout en essayant de gommer les plus fortes
inégalités.
Mais bon nombre d'autres sujets sont susceptibles de confronter le gouvernement
à des difficultés, à commencer par la question maorie qui
n'est pas réglée par l'accord de gouvernement et constituera sans
doute un élément déterminant de la solidité de la
coalition.
b) La résurgence de la question maorie
Après une longue période de calme apparent,
après les incidents sporadiques des années 1970, la
contestation maorie
est réapparue fin 1994 à l'occasion de
manifestations ponctuelles de violences visant notamment des symboles de la
" domination pakeha ",
c'est-à-dire des
Néo-Zélandais blancs d'origine anglo-saxonne. Ainsi, la
fête nationale du 6 février -qui commémore le
traité de Waitangi de 1840
entre les tribus maories et la
couronne britannique- a-t-il été marqué en 1995 par des
violences qui ont provoqué une nouvelle prise de conscience du
problème qui en a fait un des enjeux forts de la dernière
campagne électorale et constitué un des thèmes
privilégiés de M. Peters.
Dans son expression extrême, la contestation maorie remet en cause les
institutions néo-zélandaises et
revendique la
souveraineté maorie,
à commencer par les
terres
spoliées
par les colons britanniques au cours du siècle
dernier. De son côté, le gouvernement estime que le traité
de Waitangi consacre un partenariat et non un quelconque droit à
l'auto-détermination, encore moins au séparatisme, sous peine de
remettre en cause l'unité du pays.
Cette question maorie appelle deux remarques principales :
- la question maorie, si elle ne doit pas être surestimée, est
évidemment préoccupante pour la Nouvelle-Zélande dans la
mesure où elle
altère l'image du modèle
d'intégration néo-zélandais,
conduit et défendu
par les gouvernements successifs depuis des décennies ; par les
réalités sociales
qu'elle souligne, la question
apparaît ainsi révélatrice dans la mesure où la
communauté maorie fait figure de laissée-pour-compte -même
si les activistes maoris restent marginalisés au sein de leur propre
communauté ;
- la façon dont
la nouvelle coalition
gèrera, dans ces
conditions, le dossier maori fait encore l'objet de grandes incertitudes ;
l'accord de gouvernement n'ayant pas clarifié les choses sur ce point
-même si le parti national a renoncé à plafonner à
un milliard de dollars les indemnisations à verser aux tribus maories et
si des commissions ont été créées pour examiner les
principaux problèmes de la communauté- la question reste
posée ; c'est en particulier un enjeu majeur pour " New Zealand
First " pour éviter qu'une plus grande frustration n'apparaisse
chez les Maoris si les mesures prises n'étaient pas, comme il est
probable, à la hauteur des espoirs suscités durant la campagne
électorale par le parti de M. Peters.
c) La question des flux migratoires
Il en va largement de même de la question de
l'immigration dont M. Peters avait fait un de ses chevaux de bataille
favori en s'élevant notamment contre les proportions prises par
l'immigration d'origine asiatique
. Est ainsi apparue l'existence dans
l'opinion d'un terreau hostile, à tout le moins, à un
développement de l'immigration sur une grande échelle. Des
réactions de rejet sporadiques en résultent, y compris d'ailleurs
au sein de la communauté maorie dont une partie voit dans l'immigration
extra-océanienne une menace supplémentaire contre les garanties
résultant du traité de Waitangi.
La
question
est naturellement délicate -parce qu'elle touche
fondamentalement à celle
de l'identité
néo-zélandaise-
dans un pays d'à peine 3,5 millions
d'habitants, où la densité de la population est l'une des plus
faibles du monde mais où les équilibres ethniques sont
intrinsèquement fragiles.
New Zealand First a dû, sur ce point, abandonner certains des ses
engagements de campagne visant à réduire une immigration
jugée incontrôlée et destructrice de l'identité
nationale. L'accord de gouvernement ne prévoit à cet égard
que de maintenir les flux migratoires actuels et d'organiser au printemps 1997
une " conférence sur la population ".
d) L'éventualité du passage à la République
Le débat sur l'éventualité du passage
à la Répulique revêt enfin en Nouvelle-Zélande une
acuité moins grande qu'enAustralie.
Le Premier ministre, M. Bolger, l'a toutefois relancé il y a deux ans en
évoquant la possibilité pour la Nouvelle-Zélande de se
doter d'un régime républicain à l'horizon de l'an 2000. Le
débat ne fait sans doute que commencer et ne revêt pas une grande
actualité.
Néanmoins, une telle éventualité ne saurait être
écartée compte tenu de l'évolution des
rapports, de
facto distendus, entre Wellington et Londres
au cours des dernières
années en raison du désintérêt croissant du
Royaume-Uni pour le Pacifique sud. Un certain consensus est ainsi apparu en
faveur de la suppression du recours au Conseil privé de Londres en tant
que Cour suprême de justice ou de la suppression du système des
honneurs ou décorations qui exige encore aujourd'hui l'approbation
favorable de la couronne britannique.
Un détachement progressif vis-à-vis du Royaume-Uni, surtout si
l'Australie allait dans le même sens, n'est donc pas à exclure
même s'il ne paraît pas revêtir une actualité
immédiate.
*
* *
II. DES ÉCONOMIES ASSAINIES PAR UNE LONGUE PÉRIODE DE LIBÉRALISME ÉCONOMIQUE
A. LA SITUATION ÉCONOMIQUE AUSTRALIENNE
1. La libéralisation de l'économie australienne
a) Des réformes de structures courageuses
L'évolution récente de l'économie
australienne se caractérise d'abord par la
révolution
libérale
conduite, dès les années 1980, par les
gouvernements travaillistes
, avec l'appui du puissant syndicalisme
australien, dans un pays jusqu'alors doté d'une économie
fortement administrée.
La prospérité australienne reposait en effet jusqu'aux
années 1970 sur l'exportation de matières premières et de
produits alimentaires. L'industrie -dont les travailleurs
bénéficiaient d'un système développé de
protection sociale et de salaires élevés - était
abritée par de forts tarifs douaniers, essentiellement pour le
marché intérieur.
Mais l'
entrée dans la Communauté européenne de la
Grande-Bretagne
-avec laquelle l'Australie faisait 40 % de son commerce il
y a trente ans, pour moins de 3 % aujourd'hui- a favorisé la prise de
conscience par l'Australie de la nécessité de diversifier son
économie pour la mettre en mesure d'affronter la concurrence
internationale et de mieux intégrer une économie asiatique en
pleine expansion.
C'est ainsi que d'
importantes réformes
ont été
entreprises par les gouvernements dirigés par MM. Bob Hawke et Paul
Keating : ils ont mis un terme à l'indexation des revenus sur les prix ;
ils ont entrepris des
privatisations
d'entreprises publiques et des
réformes de structures
de plusieurs secteurs économiques,
notamment le secteur bancaire ; enfin, un programme vigoureux de
baisse des
droits de douane
a été mis en oeuvre, particulièrement
dans le secteur agricole.
Ces modifications structurelles, coïncidant avec la récession de
l'économie mondiale, ont au début de la décennie 1990
provoqué une sévère
récession
: la
croissance a été négative en 1990-1991 et le
chômage
a atteint alors 11 % de la population active, frappant
tout particulièrement les jeunes.
L'Australie a ensuite tiré bénéfice, à partir de
1992, des réformes accomplies, l'économie ayant été
assainie par la purge ainsi subie. L'Australie a connu une forte
croissance
de 1992 à 1995
avec près de 4 % de progression annuelle du
PIB. La vigueur de l'activité économique n'a pas
entraîné de fortes tensions sur les prix et l'
inflation
-qui était assez forte jusqu'à la fin des années 1980- a
été
maîtrisée
et n'a dépassé 2
% qu'en 1995, ce qui constitue un résultat spectaculaire obtenu
grâce à la modération de la croissance des salaires depuis
1995. Enfin, le
chômage
-traditionnellement assez
élevé dans une économie longtemps très
réglementée où les systèmes
d'assurance-chômage sont généreux- a été
réduit
à 8,5 %.
b) La persistance de déséquilibres structurels
Ces succès incontestables ont été
toutefois hypothéqués par la persistance de
déséquilibres structurels de l'économie australienne.
- Le
commerce extérieur
du pays présente d'abord des
apparences plus proches de celles d'un pays en voie de développement que
de celles d'une puissance industrielle, les
produits primaires
représentant près des deux-tiers des exportations. L'Australie
est de surcroît dépendante d'un faible nombre de marchés,
notamment le Japon qui absorbe le quart des exportations australiennes.
Cette caractéristique de l'économie australienne trouve son
origine dans la
faiblesse industrielle
d'un pays qui souffre à la
fois d'un marché intérieur limité, d'un éloignement
géographique pénalisant, d'une relative pénurie de
main-d'oeuvre qualifiée et d'un syndicalisme encore puissant
hérité des "trade-unions" britanniques.
De ce fait, l'Australie est
particulièrement sensible à
l'évolution de la demande
: sur le plan intérieur, toute
croissance de la demande entraîne une hausse rapide des importations, le
tissu industriel national étant trop faible pour la satisfaire ; et sur
le plan extérieur, tout ralentissement de l'économie mondiale a
un impact direct sur les exportations de matières premières
australiennes. Cette contrainte extérieure forte explique que la
croissance de l'économie australienne ne puisse être que
modérée et équilibrée.
- Ce déficit structurel de la balance commerciale se traduit aussi par
une lourde dette extérieure
, constituée en forte partie
des dettes contractées par des opérateurs financiers australiens
lors de prises de contrôle de sociétés
étrangères. L'Australie enregistre chaque année
d'importantes entrées nettes de capitaux, principalement à
destination du secteur privé. La dette extérieure de l'Australie
a ainsi continué à croître : elle a doublé entre
1984 et 1988, dépassé les 100 milliards de dollars en 1990 et
atteint en 1996 188 milliards -soit près de 39 % du PIB.
2. Une économie australienne assainie
a) Une croissance maintenue dans un environnement stabilisé
La conjoncture économique australienne se
caractérise toutefois aujourd'hui par une croissance maintenue, une
inflation contenue et un certain redressement des comptes extérieurs qui
doivent lui permettre de surmonter ces handicaps structurels.
-
Une croissance soutenue
. Entrée dans un cycle de croissance
positive fin 1991, conformément au rythme des économies
anglo-saxonnes, qui a connu son apogée en 1994 (avec une croissance de
5,1 %, et 7 % hors secteur agricole), l'économie australienne est
aujourd'hui dans une phase de
légère
décélération. La croissance reste néanmoins
soutenue, sur un
rythme annuel de l'ordre de 4 %
(3,5 % pour cette
année).
Cette croissance maintenue a été principalement favorisée
par la consommation des ménages qui a progressé plus rapidement
que les autres composantes du PIB. Elle doit être également
tirée par les investissements productifs privés qui sont
favorisés par la baisse des taux, la fin du marasme immobilier, la
fermeté du dollar australien et la confiance des milieux d'affaires.
-
Une inflation maîtrisée
. L'inflation a été
par ailleurs réduite à un niveau satisfaisant (3,1 % en
1995-1996) après un léger dérapage l'année
précédente (4,5 %). L'indice des prix à la consommation se
situe au même niveau que l'inflation "sous-jacente", concept
utilisé en Australie pour mesurer la dérive structurelle des
prix. Pour l'avenir immédiat, il est prévu que l'inflation
tendancielle poursuive sa décrue (2,75 % en juin 1997), grâce
notamment à la baisse des prix à l'importation.
Cette maîtrise de l'inflation a été favorisée par :
-
une politique monétaire rigoureuse
, l'objectif assigné
à la Reserve Bank étant de maintenir l'augmentation tendancielle
des prix dans la fourchette de 2 à 3 % par an,
- et
une politique des revenus sage
: les gouvernements travaillistes
avaient obtenu que cette politique soit "co-parrainée" par la
puissante
confédération syndicale ACTU, atténuant ainsi les
revendications salariales ; cette
cogestion
de la politique des revenus
a cependant été
abandonnée
par le gouvernement
libéral qui compte sur le démantèlement progressif des
conventions collectives et la généralisation des accords
d'entreprises pour limiter les hausses salariales.
-
Un certain redressement des comptes extérieurs.
L'Australie est
enfin parvenue à corriger sensiblement l'important déficit
structurel de sa balance des transactions courantes qu'illustre le tableau
ci-dessous :
Principaux soldes de la balance des transactions
courantes
(en milliards de dollars australiens)
|
1989-1990 |
1990-1991 |
1991-1992 |
1992-1993 |
1993-1994 |
1994-1995 |
1995-1996 |
Solde commercial |
-2428 |
2911 |
3797 |
591 |
-589 |
-8269 |
-1823 |
Solde des invisibles |
-4139 |
-2553 |
-1899 |
-2188 |
-960 |
-1377 |
93 |
Solde des revenus de facteur |
-17180
|
-18060
|
-15656 |
-13949 |
-14800 |
-18354 |
-19447 |
Balance des transactions courantes |
-21460
|
-15329 |
-11573 |
-14884 |
-16171 |
-27476 |
-19968 |
Après s'être fortement dégradée en 1994-1995, la balance commerciale s'est améliorée l'an dernier, les exportations progressant de 10,3 % tandis que les importations n'augmentaient que de 5,6 %. On relève en particulier que la part des pays asiatiques dans le commerce international australien progresse : elle est passsée de 46 à 55 % entre 1988 et 1996.
b) Des handicaps qui doivent être surmontés
Cet environnement économique favorable doit permettre
à l'Australie de surmonter les handicaps qui caractérisent sa
situation économique.
- Le gouvernement s'efforce d'abord de corriger
une épargne
nationale insuffisante
. Cette insuffisance, constante depuis les
années 1970 -époque où avaient été prises de
nombreuses mesures caractéristiques de l'Etat-providence- est
illustrée par le niveau particulièrement bas du taux
d'épargne des ménages (qui ne s'élevait en 1995-1996
qu'à 2,5 % du PIB), l'un des plus faibles de l'OCDE.
L'épargne nationale ne permet ainsi pas de couvrir l'ensemble des
besoins de financements et est donc à l'origine du
déficit des
transactions courantes
. C'est ce qui justifie l'effort entrepris par le
gouvernement pour
réduire le déficit budgétaire
(4
% du PIB en 1993-1994, 2,1 % en 1995-1996, prévisions de 1,1 % en
1996-1997 et de 0,3 % en 1997-1998) et susciter un renouveau de
l'épargne privée au travers des fonds de pension.
De même, la
dette extérieure
a fortement cru (même si
elle a été légèrement réduite (de 41,4 % du
PIB en 1991-1992 à 38,6 % en 1995-1996). La situation reste cependant
maîtrisable : la bonne tenue du compte en capital permet d'assurer le
financement du compte courant dans des conditions satisfaisantes et
le
service de la dette décroît
avec la chute des taux et
n'atteint que 11,3 % des exportations.
- L'autre problème majeur de l'économie australienne reste
le
chômage
, même s'il a déjà été
fortement résorbé -de 11,1 % en août 1993 à 8,1 % en
janvier 1996- grâce à la dynamique de la croissance
économique, alors que 770 000 emplois (soit 6,6 % de la population
active) étaient créés durant la même période.
Car le marché du travail est redevenu morose -le taux de chômage
variant aujourd'hui autour de 8,5 %- alors que la population active continue
d'augmenter (+ 1,5 % par an) et que le taux de croissance actuel ne permet pas
d'y remédier.
Le nouveau gouvernement mise sur la
déréglementation du
travail
pour résorber le chômage et démanteler les
politiques d'aides à l'emploi du gouvernement précédent.
Mais il est à craindre que cette déréglementation ne
puisse avoir d'effets que sur le moyen terme.
Au total, l'économie australienne -naturellement riche et
favorisée- bénéficie des cycles de croissance
américains et asiatiques et connaît aujourd'hui
une situation
globalement satisfaisante
, malgré la question du chômage (qui
ne constitue d'ailleurs pas elle-même un sujet de préoccupation
aigu).
L'économie australienne croît
mais à un rythme
beaucoup
moins rapide que l'environnement asiatique
dans lequel elle
s'intègre pourtant de plus en plus. L'Australie, à
l'évidence, se rapproche plus d'un
modèle de
développement européen
que de la forte croissance du
modèle asiatique. Elle demeure fortement
dépendante de
financements extérieurs
et s'efforce d'inspirer confiance aux
investisseurs étrangers pour assurer le financement de son
déficit structurel des paiements courants.
C'est la raison pour laquelle les Australiens souhaitent que de nombreuses
entreprises étrangères
s'implantent dans leur pays et
qu'elles fassent des grandes villes australiennes -comme Sydney, Melbourne ou
Perth- leur
base d'intervention dans la région Asie-Pacifique
.
Les résultats n'ont pas été jusqu'ici à la hauteur
des espérances australiennes. Mais les opportunités et les
conditions favorables proposées -à commencer par la
qualité de vie
australienne et la
communauté
culturelle
qui unit l'Australie aux Européens -méritent sans
aucun doute d'être prises en considération par les investisseurs
français potentiels.
B. LA SITUATION ÉCONOMIQUE NÉO-ZÉLANDAISE
1. Une décennie de réformes économiques profondes
a) Un "laboratoire" du libéralisme économique
Longtemps considérée comme l'un des pays les
plus protectionnistes du monde, la Nouvelle-Zélande s'est engagée
à partir de 1984, sous l'impulsion initiale du ministre travailliste des
finances de l'époque M. Roger Douglas, dans
une spectaculaire
transformation de ses structures économiques
et est en quelque sorte
devenue, en l'espace d'une dizaine d'années, une sorte de
"laboratoire" du libéralisme économique
.
Jusqu'au début des années 1980
, l'économie
néo-zélandaise se caractérisait en effet par son
caractère peu ouvert sur l'extérieur et par un haut degré
d'interventionnisme économique. L'entrée de la Grande-Bretagne
dans la Communauté européenne et l'abandon simultané du
système de la "préférence impériale", le haut
niveau du système de protection sociale néo-zélandais et
les deux chocs pétroliers avaient souligné
l'inadaptation des
structures économiques néo-zélandaises
à la
compétition économique internationale. Cette politique
interventionniste s'était traduite, en raison d'une productivité
des facteurs très insuffisante, par des performances économiques
modestes, le revenu par habitant ne progressant que de 1,4 % par an entre 1950
et 1985 -contre 2,9 % pour l'ensemble des pays de l'OCDE.
C'est dans ce contexte que la victoire travailliste aux élections s'est
paradoxalement traduite, à partir de 1984, par une modification
complète de la politique économique néo-zélandaise
au profit d'une
approche résolument libérale
: les
principaux secteurs de l'économie -à commencer par
l'
agriculture
- ont été libéralisés, les
protections commerciales réduites, le secteur public diminué et
son efficacité améliorée. L'économie nationale a
cependant mis un certain temps à tirer les dividendes des
réformes. La progression du PIB est restée inférieure
à la moyenne de l'OCDE dans les années 1985-1990, tandis que le
chômage progressait et que l'inflation s'accélérait.
Le retour au pouvoir du parti national -dirigé par M. Bolger- fin 1990
s'est cependant traduit par une relance du processus de
déréglementation.
La nouvelle majorité a
modifié radicalement la législation du travail- mettant notamment
fin à la pratique du syndicat obligatoire -ce qui aboutit, malgré
le coût social d'une telle politique, à une forte augmentation de
la productivité du travail et à une reprise de la croissance en
1991, en dépit d'un environnement international défavorable, puis
à une diminution du taux de chômage qui avait atteint 11,5 % en
1991.
La Nouvelle-Zélande est ainsi devenue aujourd'hui le pays où les
subventions agricoles
sont
les plus faibles
. Rares sont les
secteurs qui n'ont pas été touchés par le mouvement de
libéralisation. Les principales
privatisations
ont
été effectuées entre 1987 et 1992 et il ne subsiste plus
aujourd'hui qu'une quinzaine d'entreprises publiques. L'
administration
a
de son côté vigoureusement
réduit ses effectifs
. La
vague des grandes réformes de structures est donc aujourd'hui
achevée.
L'économie néo-zélandaise repose encore largement sur
l'
exploitation de ses ressources naturelles
. Le pays reste d'abord
producteur et transformateur de produits de base ; en dépit de
l'évolution de l'agriculture néo-zélandaise -notamment la
diminution de l'importance relative de l'élevage ovin-, l'agriculture
reste très importante pour l'économie nationale. Cette
prépondérance se retrouve dans les exportations de la
Nouvelle-Zélande dont la viande, les produits laitiers, le poisson, la
laine et les fruits et légumes représentent la moitié.
L'économie néo-zélandaise demeure ainsi
particulièrement sensible à tout choc extérieur -compte
tenu de sa dépendance par rapport à ses
exportations
agricoles
. Elle dépend aussi de sa
capacité à
attirer des capitaux étrangers
, nécessaires à son
développement.
b) Une économie ouverte, fortement liée à la région Asie-Pacifique
Après cette thérapie libérale de choc,
l'économie néo-zélandaise constitue sans doute aujourd'hui
l'un des marchés les plus ouverts, les plus transparents et les plus
déréglementés du monde.
Bien que la taille modeste et l'éloignement géographique de ce
marché puissent représenter un handicap, la
Nouvelle-Zélande s'efforce de surmonter ces inconvénients en
s'intégrant pleinement à l'économie internationale.
La Nouvelle-Zélande est d'abord
étroitement liée
à l'Australie
, en particulier par l'
accord C.E.R.
("closer
economic relations agreement") qui prévoit entre les deux pays, qui
représentent un marché de plus de 20 millions de personnes,
la liberté de circulation des biens, des capitaux et des services.
Mais la Nouvelle-Zélande est aussi de plus en plus
fortement
intégrée dans la région Asie-Pacifique.
40 % des
exportations néo-zélandaises sont ainsi destinées aux
marchés asiatiques et la Nouvelle-Zélande enregistre un important
excédent commercial avec le Japon. Ces relations commerciales trouvent
en outre leur prolongement à travers des relations humaines et
culturelles et l'on relève ainsi que nombre de dirigeants asiatiques ont
été formés en Nouvelle-Zélande et que
l'enseignement du japonais se développe dans les écoles
néo-zélandaises.
La Nouvelle-Zélande, qui peut faire valoir des coûts de production
très compétitifs, cherche ainsi à accueillir des
investissements étrangers en mettant en valeur sa situation
privilégiée pour opérer, au-delà de la
Nouvelle-Zélande, dans l'ensemble de la région Asie-Pacifique.
2. Les fruits de la réforme : une économie dynamique
a) Des indicateurs économiques très satisfaisants
La Nouvelle-Zélande a ainsi obtenu au cours des
dernières années, et singulièrement depuis 1993,
d'excellents résultats économiques
: croissance
très significative, baisse du chômage, amélioration de la
profitabilité des entreprises et redressement des finances publiques.
- L'économie néo-zélandaise connaît sa
cinquième année consécutive de
croissance
, qui
s'est élevée à
4 % en moyenne depuis 1993
. En 1996,
un léger recul de la croissance a toutefois été
enregistré (2,6 % en rythme annuel en juin 1996) conformément au
scénario de l'"atterrissage en douceur" après l'envolée
des années précédentes. Les causes principales en ont
été un
ralentissement
de la demande intérieure et
une politique monétaire restrictive. Mais les dernières
prévisions et les mesures fiscales décidées par le
gouvernement en 1996 laissent envisager une reprise de la croissance pour
1997-1998, confirmant ainsi les tendances positives enregistrées au
cours des dernières années.
- Le taux de
chômage
, qui avait atteint un maximum de 11,5 % en
1991, a été depuis fortement réduit et se maintient
aujourd'hui
aux alentours de 6 %
, ce qui constitue sans doute un seuil
en-dessous duquel il est difficile de descendre et représente d'ores et
déjà l'un des taux les plus faibles parmi tous les pays de
l'OCDE. Ce résultat est d'autant plus remarquable que la
population
active
totale s'est
accrue
dans le même temps -de 1991
à 1996- de 234 000 personnes, soit une augmentation de plus de 16
%. Cette tendance se poursuit (+ 3,9 % l'an dernier) et devrait se confirmer,
quoiqu'à un rythme plus ralenti, dans les prochaines années.
-
L'inflation
a été, de son côté, jusqu'ici
maîtrisée. L'"inflation sous-jacente", calculée par la
Banque centrale néo-zélandaise en excluant l'incidence de
l'évolution des taux d'intérêt sur le service de la dette
et celle de la fiscalité, est demeurée sous la
barre des 2
%
- fixée par le gouvernement -pendant la plus grande partie de la
période 1991-1996. Cet objectif a été
légèrement dépassé
en 1995 et 1996 sous
l'effet de pressions inflationnistes qui ont conduit au maintien de taux
d'intérêt élevés et à l'appréciation
du dollar néo-zélandais. La fixation à 3 % par le nouveau
gouvernement du plafond d'inflation sous-jacente devrait permettre de respecter
l'objectif fixé en 1997.
-
Les finances publiques
néo-zélandaises ont
été parallèlement rétablies et ont affiché
des
excédents budgétaires
au cours des trois derniers
exercices (avec notamment 3,4 milliards de dollars néo-zélandais
d'excédent en 1995-1996). L'accroissement des recettes fiscales et la
rigueur de la politique budgétaire doivent permettre de
pérenniser cette situation favorable dans les années à
venir.
Ces excédents n'ont cependant permis de résoudre que de
manière très partielle
le problème de la dette
néo-zélandaise.
L'endettement extérieur
du pays
reste élevé
et s'élevait à 74,7 milliards de
dollars néo-zélandais au 30 juin 1996 (soit une hausse de 7,6 %
en un an). Si
la dette publique a été fortement
réduite
(de 52 % du PIB en 1991-1992 à 33,4 % en 1995-1996),
la difficulté pour le secteur privé à financer localement
les importants investissements entraînés par l'expansion explique
cette détérioration.
Le nouveau gouvernement a affiché sa volonté de réduire
encore l'endettement public à moins de 30 % du PIB et de maintenir des
excédents budgétaires en dépit de l'accroissement
prévu des dépenses sociales.
- Enfin, la
balance commerciale
de la Nouvelle-Zélande s'est
détériorée et est devenue
déficitaire
depuis
la mi-1995. La responsabilité en incombe à la fois au niveau
élevé du dollar néo-zélandais et à
l'expansion économique qui génère un courant accru
d'importations, ainsi que l'illustre le tableau ci-dessous :
Statistiques annuelles du comerce extérieur
Année |
Exportations
|
Importations
|
Balance commerciale (FOB/CIF) |
1990 |
15049 |
15688 |
-639 |
1991 |
15892 |
15490 |
+402 |
1992 |
17510 |
15185 |
+2325 |
1993 |
18899 |
17260 |
+1639 |
1994 |
19867 |
18329 |
+1538 |
1995 |
20842 |
21151 |
-309 |
1996 |
20868 |
21350 |
-482 |
Cette détérioration de la balance commerciale entraîne également un creusement du déficit de la balance des paiements courants qui a dépassé 4 % du PIB en 1996 et pourrait, selon les prévisions, atteindre 5 % en 1997-1999, ce déficit étant imputable au secteur privé (rapatriement des profits réalisés par les sociétés étrangères en Nouvelle-Zélande).
b) Une réforme économique exemplaire dont les grandes lignes doivent être maintenues par la nouvelle coalition
Le processus de réformes
conduit depuis 1984 en
Nouvelle-Zélande a
ainsi
radicalement transformé le
paysage économique national
. Si l'ère des grandes
réformes est aujourd'hui terminée, le caractère
exceptionnel et
la cohérence de ce mouvement global
de
libéralisation et de déréglementation méritent
d'être soulignés. Ainsi, à titre d'exemples :
- 40 % des revenus des
agriculteurs
néo-zélandais
provenait en 1984 de subventions gouvernementales ; un an plus tard, la
quasi-totalité de ces subventions avaient disparu avec les
difficultés qui en résultèrent ; mais, dix ans
après, l'agriculture néo-zélandaise se porte bien et est
devenue beaucoup plus saine ;
- la Nouvelle-Zélande est aussi le premier pays à avoir
totalement aligné son
administration et
sa
comptabilité
publique
sur celle du secteur privé : les administrations y agissent
désormais comme des sociétés de services, les responsables
administratifs ont des contrats de cinq ans au maximum mais disposent d'une
très grande autorité dans la gestion, et le système
comptable a été, de ce fait, poussant la logique jusqu'à
son terme, totalement aligné sur les normes privées.
L'expérience néo-zélandaise est ainsi à bien des
égards exemplaire et mérite, selon votre
délégation, d'être mieux connue et analysée
même si la taille modeste et les spécificités de
l'économie néo-zélandaise en limitent naturellement le
caractère transposable sous d'autres latitudes. Ce processus de
réformes a d'ores et déjà suscité
beaucoup
d'intérêt au niveau international
où son
efficacité
pour
permettre à la Nouvelle-Zélande de
relever les défis de la mondialisation
a été
largement reconnue. Pendant quatre années consécutives, jusqu'en
1995, la Nouvelle-Zélande a ainsi été classée au
premier rang des pays de l'OCDE dans le "World competitiveness
report" pour ce
qui est de l'action des pouvoirs publics et de la compétitivité
à long terme.
L'exemplarité de la réforme néo-zélandaise
dépendra aussi de sa poursuite et de la
pérennité des
résultats
enregistrés au cours des dernières
années. A cet égard, l'accord de gouvernement conclu en
décembre 1996 entre le parti national et "New Zealand First" maintient
les grands axes de la politique économique néo-zélandaise
tout en prévoyant des infléchissements révélateurs :
- le "Reserve bank act" demeure mais le taux d'inflation sous-jacente
toléré est, on l'a déjà signalé,
porté à 3 %,
- l'"employment contract act", qui a considérablement affaibli les
syndicats et rétabli les négociations directes entre employeur et
employé, doit être amendé.
La Nouvelle-Zélande, enfin, n'est pas à l'abri d'un choc
extérieur dans la mesure où elle est fortement dépendante
de ses exportations de denrées agricoles et de sa capacité
à attirer les capitaux étrangers. Cependant, l'importance
croissante de son commerce avec les pays asiatiques, la sous-exploitation de
ses ressources naturelles et la compétitivité de son secteur
productif devraient lui permettre de faire fructifier les résultats de
la réforme, politiquement très courageuse, conduite à
partir de 1984.
*
* *
III. DES POLITIQUES EXTÉRIEURES AUX AMBITIONS ESSENTIELLEMENT RÉGIONALES
A. LES ORIENTATIONS DIPLOMATIQUES ET DE SÉCURITÉ DE L'AUSTRALIE
1. Les grands axes de la politique étrangère de Canberra
Si l'Australie a connu des alternances de périodes
particulièrement dynamiques et d'autres moins ambitieuses sur la
scène internationale -en fonction principalement de la
personnalité de ses dirigeants successifs-, plusieurs facteurs
limitent
traditionnellement
la marge de manoeuvre de la diplomatie
australienne
: l'isolement géographique du pays, la faiblesse de sa
population et de son marché intérieur, et son potentiel
industriel limité soulignent l'
enjeu essentiel de la
sécurité de ses voies de communication
pour une Australie
excentrée, exportatrice de produits primaires. Ces handicaps ont
incité l'Australie à se placer successivement sous la
tutelle
d'une grande puissance anglo-saxonne, d'abord la
Grande-Bretagne
puis, après la seconde guerre mondiale, les
Etats-Unis
.
Malgré ces limites, l'Australie a affirmé son
statut
international
par sa capacité d'initiatives. Ainsi, dans la
région Asie-Pacifique
, elle a fondé le PECC en 1980 et
pris l'initiative de la création de l'APEC dont elle a accueilli la
première réunion en 1989. On sait aussi, sur le plan
multilatéral, l'importance de son engagement en matière de
désarmement
.
La diplomatie australienne affirme son insertion en Asie et son appartenance au
Pacifique sud. Mais, en se voulant un allié sans faille des
États-Unis et en se prévalant de ses liens historiques avec
l'Europe, l'Australie cherche à valoriser son
rôle de
"charnière" entre l'Asie et l'Occident
. C'est dans cet esprit que
l'Australie souhaite en particulier attirer les investisseurs européens
en mettant en valeur les relations commerciales privilégiées
qu'elle entretient avec les pays asiatiques.
a) L'insertion de l'Australie en Asie
La principale évolution de la politique
extérieure australienne depuis 1972 (gouvernement travailliste
dirigé par Gough Whitlam) a été sa
politique de
rapprochement avec le continent asiatique
, parallèlement au
relâchement de ses liens historiques avec la Grande-Bretagne et, plus
généralement, le monde anglo-saxon.
Ce
tournant politique,
confirmé par les gouvernements australiens
successifs, a revêtu une
dimension économique
forte.
L'Extrême-Orient et l'Asie du sud-est représentent ainsi
désormais
60 % des exportations australiennes
et rassemblent six
des dix principaux partenaires commerciaux du pays.
Cette politique d'insertion en Asie a également eu une
dimension
humaine
importante : une politique migratoire libérale,
essentiellement favorable à de nouveaux arrivants asiatiques, un
tourisme important venu d'Asie (300 000 touristes indonésiens en 1995),
et la formation de nombreux étudiants asiatiques (56 000 en 1996) en
sont quelques-unes des manifestations les plus importantes.
Enfin, sur le
plan militaire
, Canberra s'est efforcé de
favoriser, face à la puissance chinoise,
une organisation de
sécurité en Asie
visant à la fois à mettre en
lumière la communauté d'intérêts entre pays de la
zone, à ancrer la puissance américaine dans la région et
à favoriser un dialogue avec Pékin -malgré certaines
manifestations chinoises d'agressivité territoriale. Dans ce cadre, le
renforcement de la
coopération militaire avec les pays de l'ASEAN
s'est traduit récemment par un traité de sécurité
entre l'Australie et l'Indonésie (18 décembre 1995) et la
revitalisation des relations militaires avec Singapour et la Malaisie.
L'Australie est enfin un fournisseur d'armes non négligeable, notamment
dans le domaine maritime, dans la région (Indonésie, Malaisie...).
Cette politique de rapprochement avec l'Asie et l'ambition australienne de
jouer un rôle de "passerelle" entre l'Occident et l'Asie n'en
rencontre
pas moins
de sérieuses limites
:
- sur le plan international, la position de l'Australie suscite des
réticences chez certains de ses partenaires asiatiques
: ainsi la
Malaisie s'est-elle opposée à la participation de l'Australie au
premier sommet Europe-Asie de Bangkok en 1996 et a élaboré un
projet concurrent de l'APEC, excluant Canberra ;
- la démarche australienne, ainsi parfois considérée comme
le représentant de l'Occident dans la région, se heurte d'autre
part aux tensions récurrentes qui opposent l'Australie à certains
de ses voisins dans le domaine des
droits de l'homme
(Timor, Birmanie),
malgré la prudence de la diplomatie australienne, et qui
témoignent des différences culturelles et politiques entre
l'île-continent et ses voisins ;
- enfin, sur le plan intérieur, le rapprochement avec l'Asie,
imposé à une partie de l'opinion australienne toujours
réticente, cultive un certain
malaise identitaire
de l'Australie.
Il faut toutefois relever que
le nouveau gouvernement australien
n'a pas
suscité d'évolution marquée et encore moins un renoncement
à la politique de rapprochement avec les pays asiatiques. Malgré
de nombreuses difficultés -liées notamment aux restrictions
apportées à la politique migratoire, à la suppression de
subventions aux exportations et aux thèses xénophobes du
sénateur Pauline Hanson-, la coalition libérale-nationale s'est
efforcée de maintenir une relation confiante avec l'ensemble des pays
asiatiques et d'obtenir leur accord pour la participation de l'Australie au
second sommet Europe-Asie prévu à Londres en 1998.
L'Australie attache enfin une extrême importance à
l'APEC,
même s'il est douteux que ce forum débouche rapidement sur une
zone de libre-échange régionale et, encore moins, sur
l'émergence d'un système de sécurité qui en serait
issu.
b) Les autres lignes directrices de la diplomatie australienne
Pour le reste, les autres lignes directrices de la diplomatie australienne sont orientées autour de quatre idées principales.
(1) L'Australie demeure d'abord naturellement une nation du Pacifique sud, même si cette région ne constitue plus pour elle une priorité
C'est naturellement
avec la Nouvelle-Zélande
que
les relations sont les plus importantes. La poursuite de l'intégration
des deux économies dans le cadre de l'accord C.E.R. de 1983,
l'identité des points de vue australien et néo-zélandais
sur de nombreux sujets (essais nucléaires, Pacifique sud, relations avec
la Couronne britannique...) et la parenté politique des gouvernements
australien et néo-zélandais permettent d'ailleurs d'envisager un
renforcement supplémentaire des relations transtasmanes, même si,
pour Canberra, les relations avec les Etats-Unis priment sur celles avec
Wellington, dont les initiatives antinucléaires ont été
à l'origine d'une détérioration des relations
américano-néo-zélandaises.
Pour le reste, l'Australie assume ses responsabilités dans la
région du Pacifique sud
dont elle est le premier partenaire
commercial et le premier bailleur de fonds (428 millions de dollars
australiens). L'essentiel de cette aide (325 millions) est toutefois
destinée à la
Papouasie-Nouvelle-Guinée
, son
ancienne colonie, à laquelle l'Australie apporte une assistance
administrative et militaire et une coopération dont le cadre est
fixé par un traité pour le développement de 1989. La
coopération australienne s'inscrit en outre désormais dans un
contexte de rigueur budgétaire
qui conduit Canberra à
privilégier de nouvelles priorités en imposant à ses
partenaires des efforts conformes aux exigences des institutions de
Bretton-Woods et en substituant autant que possible l'aide projet à
l'assistance budgétaire.
Le nouveau gouvernement australien témoigne de la même
fidélité -et des mêmes difficultés- à
l'égard des pays insulaires du Pacifique sud. Il est à relever
que M. Downer, ministre des affaires étrangères, s'est, à
l'occasion d'une tournée dans la région, rendu en décembre
dernier en
Nouvelle-Calédonie
et que Canberra continue de
soutenir la
Commission du Pacifique sud
(dont le
sécrétariat général est assuré par un
Australien).
(2) Une alliance privilégiée avec les Etats-Unis
L'alliance entre Canberra et Washington manifeste
l'attachement de l'Australie au "leadership" américain
sur le
plan stratégique. Cette alliance, ancienne, s'est
développée depuis 1951 dans le cadre de
l'ANZUS
(entre
l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis) et a même
été, d'une certaine façon, renforcée par la
défection de la Nouvelle-Zélande en 1985 à la suite de son
désaccord sur le nucléaire avec les Etats-Unis. C'est ainsi que
l'Australie a, encore récemment, prouvé sa fidélité
à la mouvance occidentale lors de la guerre du Golfe. Dans le même
esprit, et pour souligner son attachement au rôle de l'ONU, Canberra a
dépêché en 1993 un détachement significatif (900
hommes) en Somalie.
La diplomatie australienne, à la recherche de l'affirmation d'une
politique étrangère plus autonome, avait cependant paru prendre
quelques distances, au cours des dernières années, à
l'égard de Washington. Mais le retour au pouvoir en 1996 d'un
gouvernement libéral-national -s'ajoutant aux limites de la politique
d'insertion en Asie- a conduit Canberra à tenter de retrouver son statut
d'
allié privilégié des Etats-Unis dans la
région
.
Cette orientation s'est traduite par un renforcement de la coopération
militaire bilatérale -notamment dans le domaine essentiel du
renseignement-, par d'importants exercices conjoints, par une
déclaration commune sur la sécurité et, enfin, par la
visite en Australie -symboliquement forte- du Président Clinton en
novembre 1996, aussitôt après sa réélection.
(3) Des relations avec l'Europe qui doivent être renforcées
Vis-à-vis de l'Europe, la diplomatie australienne
demeure empreinte d'une certaine distance, à laquelle il est de
l'intérêt commun de remédier par un dialogue plus constant
et approfondi.
En dépit d'une détente apparente du climat avec l'Union
européenne -manifestée notamment par la visite en Australie de
Sir Brittan, vice-président de la Commission européenne, en juin
1996-, Canberra, leader du "groupe de Cairns", demeure très
critique
à l'égard de la politique agricole commune
qu'elle accuse
d'autant plus d'être un obstacle à une nouvelle
libéralisation commerciale qu'elle doit subir les effets des mesures
commerciales protectionnistes américaines. Par ailleurs, les
négociations d'un accord-cadre avec l'Union européenne
se
sont heurtées fin 1996 au refus par l'Australie d'une clause sur les
droits de l'homme -que l'Union inclut désormais dans tous les accords de
ce type avec des pays tiers. Enfin, l'Australie, souhaitant affirmer son
rapprochement avec l'Asie, demeure réticente vis-à-vis des
initiatives européennes sur le continent asiatique
.
Il reste que le nouveau gouvernement australien affiche sa volonté d'une
relance des liens avec les pays européens
et son refus de
"choisir entre son histoire et la géographie". Cette relance s'est
manifestée dans les
relations interétatiques
bilatérales
et, singulièrement, dans les relations
franco-australiennes.
(4) Le rôle de l'Australie dans les enceintes multilatérales
Dernier axe traditionnellement privilégié de la
politique étrangère australienne, la
diplomatie
multilatérale
revêt une importance particulière pour
Canberra.
L'Australie a marqué de longue date son attachement aux systèmes
de sécurité collective. Elle a participé activement
à la réflexion sur la réforme des Nations-Unies. Elle a
joué un rôle important dans les domaines de l'environnement
(traité sur l'Antarctique). Elle a surtout été
particulièrement active, depuis des années, dans le domaine du
désarmement
(participation remarquée à
l'élaboration de la convention sur les armes chimiques) et surtout du
désarmement
nucléaire
: traité de non
prolifération et traité d'interdiction complète des essais
(que Canberra a présenté avec succès aux Nations unies le
10 septembre dernier).
La diplomatie australienne a toutefois été affectée, fin
1996, par l'échec de sa candidature à un poste de membre non
permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, au profit de
ses concurrents suédois et portugais. Ce revers -sans doute imputable
à la faiblesse de l'implantation diplomatique australienne sur plusieurs
continents et à sa reconnaissance de l'annexion indonésienne de
Timor- pourrait conduire le nouveau gouvernement australien, moins entreprenant
sur la scène internationale que son prédécesseur, à
plus de prudence dans l'expression de ses ambitions internationales et à
donner la
préférence aux relations bilatérales
par
rapport aux considérations multilatérales.
L'Australie s'attache cependant actuellement à l'
élaboration
d'un "livre blanc"
sur les priorités stratégiques de Canberra
pour les dix à quinze années à venir qui permettra de
préciser les orientations à moyen et à long termes de la
politique extérieure australienne.
2. La politique de la défense australienne
a) Les grandes orientations stratégiques
Alliée traditionnelle de la Grande-Bretagne et des
Etats-Unis -aux côtés desquels elle s'est successivement
engagée dans les deux conflits mondiaux, en Corée et au Vietnam-,
l'Australie s'est efforcée au cours des dernières
décennies de protéger de façon plus autonome un territoire
vulnérable.
Si l'Australie n'est pas confrontée à des menaces
immédiates, la
principale vulnérabilité
de
l'île-continent réside en effet dans la facilité avec
laquelle
ses lignes de communications maritimes
pourraient être
coupées. L'Australie, qui dépend de ces lignes de communication
pour ses exportations -qui financent ses importations de produits finis-, ne
peut en assurer seule la protection, en raison de l'insuffisance de sa
capacité de projection aéronavale. Or ces lignes de
communications pourraient être théoriquement menacées : par
la Chine -dont l'Australie craint l'expansion militaire et l'acquisition d'une
capacité aéronavale-, par l'Indonésie, par l'Inde voire
par la Thaïlande.
Dans ce contexte, la stratégie de défense australienne repose sur
trois orientations principales
:
- d'abord
des relations de sécurité étroites avec les
Etats-Unis ;
l'importance de cette alliance stratégique,
déjà ancienne, a été réaffirmée en
juillet 1996 par une déclaration commune intitulée
"Australie-Etats-Unis : un partenariat stratégique pour le XXIe
siècle" qui souligne une nouvelle fois le caractère
privilégié de la relation de sécurité entre les
deux pays et prévoit des mesures concrètes de
renforcement de
cette relation
- comportant notamment un accroissement des effectifs
américains ;
- deuxième orientation majeure :
la nécessité d'un
engagement régional
; l'Australie est déjà liée
à la Malaisie, à Singapour, au Royaume-Uni et à la
Nouvelle-Zélande par le "
pacte de défense des cinq
nations
" depuis 1971 ; les forces aériennes et navales
australiennes, malaisiennes et singapouriennes participent
régulièrement à des exercices communs ; l'Australie s'est
en outre récemment rapprochée de
l'Indonésie
avec
laquelle elle a conclu, face aux menaces liées à un
éventuel expansionnisme chinois, un traité de
sécurité ; enfin -on l'a dit- l'Australie poursuit ses efforts en
matière de sécurité collective dans le cadre de l'ASEAN,
voire de l'APEC ;
- l'Australie poursuit enfin
la recherche d'une certaine autonomie de
décision et d'une indépendance de moyens suffisante
;
Canberra privilégie à cet égard le
renseignement
et
l'acquisition de moyens de reconnaissance stratégique et
d'évaluation de la menace dans le cadre d'une
stratégie de
défense en profondeur
: les moyens de surveillance de l'espace
aéromaritime du nord doivent assurer la protection des lignes de
communication australiennes.
b) Les nouvelles orientations de la politique de défense australienne
Dans ce cadre général, le nouveau ministre
australien de la défense, M. Mc Lachlan, a défini en octobre 1996
de nouvelles orientations pour la politique de défense australienne.
Tout en réaffirmant l'alliance avec les Etats-Unis comme une option
stratégique majeure, ces orientations visent à forger
progressivement
une armée plus mobile
disposant de
capacités de combat renforcées
et capable de
se
projeter sur des théâtres extérieurs
.
La réforme proposée -dont le coût est estimé
à 380 millions de dollars australiens de 1996 à 1999- vise
notamment à renforcer les unités combattantes de l'armée
australienne, à accroître le rôle des réservistes,
à créer des forces indépendantes capables de se projeter
sur tout le territoire australien ou à l'extérieur, et à
acquérir des équipements nouveaux permettant d'améliorer
la mobilité et la puissance de feu de l'armée.
La persistance de la crise de Bougainville depuis plusieurs années, la
demande d'assistance technique et militaire du gouvernement vanuatan en
novembre dernier, comme la participation à des opérations
multinationales (guerre du Golfe et
Restore Hope
) ont en effet mis en
évidence la nécessité, pour l'Australie, de pouvoir
projeter des forces au-delà de ses approches immédiates. Les
forces armées doivent ainsi être en mesure d'assumer les
obligations prises à l'égard des alliés, tant en
matière de coopération militaire (accords de défense ou
formation du personnel) que de participation, sous l'égide de l'ONU, aux
missions humanitaires et de maintien de la paix.
c) Des moyens militaires en cours de modernisation malgré un budget limité
Les forces armées australiennes éprouvent
cependant des difficultés à conduire à leur terme la
totalité des programmes d'équipement engagés tout en
maintenant un niveau d'activité suffisant.
Le budget de la
défense
australien a été en effet en baisse constante
au cours des dernières années et ne représente plus que
moins de 2 % du PIB national
(environ 10 milliards de dollars
australiens). En très légère augmentation pour l'exercice
1996-1997, il devrait cependant, selon les orientations gouvernementales,
progresser et être dispensé des contraintes imposées aux
autres ministères en vue de la réduction du déficit public.
En l'état,
les effectifs
des forces armées australiennes
s'élèvent aujourd'hui à
57 000 hommes
(61 000 en
1990), bien équipés avec des matériels sophistiqués
-même si elles souffrent d'une grande dépendance à
l'égard des moyens stratégiques américains et de
capacités d'entraînement insuffisantes :
-
l'armée de terre
, constituée de 24 000 hommes (et d'une
réserve de 21 000 hommes), a été la principale
victime des budgets des dernières années et ne dispose que de
matériels anciens (une centaine de chars Léopard notamment) ou
souffrant de problèmes de maintenance ; elle devrait cependant
bénéficier d'un rôle et de moyens accrus dans le cadre des
réformes annoncées pour accroître le nombre et
l'efficacité des unités de combat ;
-
la marine
australienne a pour sa part un rôle majeur pour
défendre les approches du pays et lui fournir les moyens de ne pas
s'isoler sur la scène internationale ; disposant de près de 14
000 hommes, elle est de taille moyenne mais est moderne et bien
équipée ; si sa capacité de transport et de projection
aéronavale est limitée, elle fait actuellement l'objet d'une
politique de modernisation ambitieuse : ainsi, ses sous-marins devraient
être tous remplacés d'ici 2005 par la construction de six
unités de type "Collins" ; ses frégates et sa flotte de
patrouille maritime doivent être également
renouvelées ;
- enfin,
l'armée de l'air
(19 000 hommes) est
équipée de moyens satisfaisants, quoique parfois anciens : 30
avions de reconnaissance F111, 50 chasseurs F18 récents, une vingtaine
d'avions de transport C130, et une vingtaine d'avions de patrouille maritime
(en cours de renouvellement), pour un parc aérien total de 270 appareils.
Il faut enfin souligner que l'Australie a développé, depuis une
dizaine d'années,
des capacités de production d'armement
non négligeables, notamment dans le domaine naval, en fabriquant sur son
territoire des équipements qu'elle achète aux pays occidentaux.
Elle s'efforce également de pénétrer
les marchés
asiatiques de l'armement
, à la fois pour consolider son industrie
nationale et pour rendre plus dépendants et plus stables les pays du
sud-est asiatique.
B. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE DÉFENSE DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE
1. Les grandes orientations de la diplomatie néo-zélandaise
Confrontée, comme l'Australie -et avec des moyens
beaucoup plus faibles-, à la nécessité de
garantir la
sûreté de ses voies de communications
, la
Nouvelle-Zélande, que tout rattachait traditionnellement à la
Grande-Bretagne, a vu progressivement la
tutelle britannique
s'éloigner et se distendre. Tentée dans les années 1970
par un nouvel
amarrage aux Etats-Unis
, Wellington n'a pu mener à
bien ce rapprochement en raison principalement de l'activisme
antinucléaire néo-zélandais, notamment l'adoption en 1984
d'une législation interdisant l'accès des ports
néo-zélandais aux bâtiments à propulsion ou armement
nucléaires entraînant la mise en sommeil de l'alliance militaire
avec les Etats-Unis (dans le cadre de l'ANZUS).
La Nouvelle-Zélande a ainsi été conduite à mettre
en oeuvre, au cours de la dernière période,
une diplomatie
plus indépendante
, recentrée sur son environnement
régional asiatique et océanien.
a) Une politique étrangère recentrée sur son environnement régional
(1) L'intensification des liens avec les partenaires asiatiques
Elle constitue ainsi aujourd'hui l'axe majeur de la politique
étrangère néo-zélandaise, à la fois pour des
raisons commerciales
(40 % des échanges
néo-zélandais sont réalisés avec l'Asie orientale)
et des
motifs de sécurité
(pacte de défense des
cinq nations, forum de sécurité de l'ASEAN...).
Cette politique volontariste s'inscrit dans une
tendance à long
terme
de recentrage régional des intérêts
néo-zélandais : en 1960, l'Europe recevait 50 % des exportations
néo-zélandaises et l'Asie moins de 15 % : les chiffres sont
aujourd'hui inférieurs à 17 % pour l'Europe et supérieurs
à 35 % pour l'Asie.
Les
relations politiques
de Wellington avec ses voisins asiatiques
se
développent
également ainsi que l'ont illustré
récemment les voyages du Premier ministre néo-zélandais
(notamment à Tokyo et à Séoul) et les nombreuses visites
en Nouvelle-Zélande de dirigeants asiatiques (notamment malaisiens,
singapouriens et philippins).
Il convient néanmoins de mesurer
les limites et les handicaps de ce
rapprochement
avec l'Asie qui paraît indispensable aux dirigeants
néo-zélandais mais est souvent mal compris par une opinion qui
est à la fois fascinée et inquiétée par un
continent asiatique difficile à appréhender pour une population
d'origine européenne, très sensible notamment aux atteintes aux
droits de l'homme. Il en résulte certaines contradictions apparentes
entre une certaine revendication néo-zélandaise d'appartenance au
continent asiatique et son souhait de réduire l'immigration en
provenance d'Asie. Enfin, cette politique volontariste n'aboutit pas toujours
aux résultats escomptés, ainsi que le soulignent le rythme
insuffisant de la libéralisation des échanges au sein de l'APEC,
les limites du rapprochement avec l'ASEAN, ou la mise à l'écart
de Wellington du dialogue Europe-Asie.
(2) Le recentrage de la diplomatie néo-zélandaise sur son environnement océanien
Le recentrage de la diplomatie néo-zélandaise
sur son environnement océanien a deux destinations principales : le
Pacifique insulaire et l'Australie.
- S'agissant des
Etats insulaires du Pacifique sud
, la diplomatie
néo-zélandaise cherche à
préserver un
équilibre intra-régional
et, le cas échéant,
à neutraliser des partenaires difficiles, comme les îles Fidji et
le Samoa occidental. Elle s'appuie sur une
aide au développement
limitée (0,25 % du PIB) mais efficace. La Nouvelle-Zélande
se pose en avocat des micro-Etats de la région et son action, du fait
notamment de son identité maorie, est souvent mieux perçue dans
le Pacifique insulaire que celle de l'Australie.
Les
relations avec les Iles Cook
méritent une mention
particulière même si elles ont traversé récemment
une phase de tensions, liée à l'effort drastique de redressement
des finances publiques qui a été imposé aux Iles Cook et
aux agissements de sociétés néo-zélandaises dans ce
paradis fiscal.
Il faut enfin souligner, parmi les inflexions -modestes- qui semblent devoir
être données par le nouveau gouvernement à la diplomatie de
Wellington, la
priorité
qui doit être attribuée
au Pacifique insulaire dans l'aide au développement
néo-zélandaise, M. Winston Peters -leader de "New Zealand First"
étant particulièrement soucieux de limiter l'émigration
vers la Nouvelle-Zélande.
-
Les relations bilatérales avec l'Australie
s'inscrivent
naturellement dans un contexte très différent et revêtent
une importance essentielle pour les intérêts
néo-zélandais. Elles se sont intensifiées
parallèlement à l'approfondissement de
l'accord C.E.R.
("closer economic relations") qui a bénéficié
récemment de l'harmonisation des normes phytosanitaires et de
l'entrée en vigueur, en novembre 1996, du marché aérien
transtasman, initialement refusée par Canberra.
La relation bilatérale bénéficie d'autre part aujourd'hui
de
l'alternance politique
intervenue en 1996 à Canberra :
l'identité des orientations politiques des deux gouvernements et la
meilleure compatibilité des personnalités des nouveaux Premiers
ministres ont favorisé un réchauffement des liens
australo-néo-zélandais.
Il reste que
la perception néo-zélandaise de "l'île de
l'Ouest"
reste fondamentalement celle d'un partenaire incontournable et
d'un rival inévitable qui n'a pas toujours les égards attendus
par son "petit" voisin. De plus, pour Canberra, le renforcement de
l'alliance
australo-américaine prime toujours sur l'approfondissement des liens
avec Wellington -même si des projets d'unités militaires communes
ont été récemment évoqués.
b) Des liens distendus avec les Etats-Unis et l'Europe
(1) Les relations entre Wellington et Washington
Les relations entre Wellington et Washington continuent en
revanche à pâtir du
contentieux nucléaire
bilatéral
, déjà ancien, malgré les
efforts
néo-zélandais
pour favoriser un substantiel
réchauffement des liens bilatéraux : soutien apporté
aux positions américaines au sein de l'APEC ou de l'OMC, contribution
à des opérations de maintien de la paix des Nations unies...
Pour Washington, toutefois, la législation antinucléaire
néo-zélandaise -qui fait l'objet d'un réel accord aussi
bien dans la classe politique que dans l'opinion nationale-, fait obstacle
à une véritable normalisation. Dès lors, malgré la
reprise d'un dialogue politique de haut niveau (rencontre Bolger-Clinton en
mars 1995), les efforts de Wellington n'ont guère été
payés de retour. Cela est d'autant plus préoccupant pour la
Nouvelle-Zélande que le rapprochement militaire
américano-australien souligne encore
l'isolement
néo-zélandais
. C'est ainsi que le Président Clinton a
évité toute escale en Nouvelle-Zélande, en novembre
dernier, à l'occasion de sa visite en Australie.
(2) Les relations entre la Nouvelle-Zélande et l'Europe
Les relations entre la Nouvelle-Zélande et l'Europe
témoignent pour leur part globalement d'une certaine désaffection
sans doute explicable mais à laquelle il est, aux yeux de votre
délégation, important de remédier.
Certes, sur le plan commercial, le déclin des échanges avec
l'Union européenne est avant tout la conséquence, quasi
mécanique, de l'
entrée de la Grande-Bretagne
dans la
Communauté et de la part de plus en plus restreinte qu'occupent les
produits agricoles
dans le commerce international.
Mais les Néo-Zélandais ont tendance à imputer
fondamentalement cette évolution à la
politique agricole
commune
considérée comme un contre-modèle
protectionniste, particulièrement négatif dans un pays qui a
démantelé la quasi-totalité de ses subventions agricoles
et dont le commerce extérieur dépend principalement de ses
exportations agricoles.
Néanmoins, l'année passée a été
marquée, du côté néo-zélandais, par
une
volonté de relance des relations et des contacts avec les pays
européens
. Le ministre des Affaires étrangères a
effectué une tournée dans six pays de l'Union européenne
et développé fréquemment ce thème. Des
consultations réunissent chaque année les dirigeants
néo-zélandais et la présidence de l'Union
européenne. En retour, le nombre croissant des visites
ministérielles et des missions commerciales venant de pays
européens a manifesté la réceptivité
européenne à ces ouvertures. Il est naturellement souhaitable que
la France prenne toute sa place dans ce processus et en favorise le
développement.
c) Une réelle présence internationale, fondée sur l'activisme antinucléaire
Pour le reste, la visibilité de l'action de la
Nouvelle-Zélande sur la scène internationale est encore
liée à son
opposition sans concession et systématique
au nucléaire
.
Car, si la Nouvelle-Zélande a fait un passage remarqué au
Conseil de sécurité
des Nations unies -comme membre non
permanent, en 1993-1994- et a activement participé à des
opérations de maintien de la paix
(notamment en Bosnie), un
certain isolationnisme de l'opinion publique a conduit le gouvernement à
assumer avec plus de
réticences
ses responsabilités
internationales.
En revanche,
l'activisme antinucléaire
de Wellington n'a pas
faibli. Non sans bénéfices d'ailleurs, que ce soit
sur le plan
intérieur
-où l'opinion reste très sensible au
discours contre le nucléaire- ou
sur la scène
internationale
où la Nouvelle-Zélande a été
admise à la conférence du désarmement de Genève et
a pu faire entendre sa voix dans de nombreuses instances multilatérales,
depuis l'ONU jusqu'au Forum du Pacifique sud en passant par la Cour
internationale de justice et le sommet du Commonwealth.
Le Premier ministre néo-zélandais, M. Bolger, a ainsi
réaffirmé, au cours de l'année 1996, durant la campagne
électorale, une
politique antinucléaire très ferme et
intégrale
. Considérant que les puissances nucléaires
se sont fixé comme objectif, dans le TNP (traité de non
prolifération nucléaire), un désarmement nucléaire
général, il ne voit ainsi dans le CTBT (traité
d'interdiction générale des essais) qu'une première
étape devant déboucher ensuite sur la déclaration
d'illégalité de l'arme nucléaire, sur l'interdiction de
production d'uranium et de plutonium à des fins militaires, sur de
nouvelles réductions des arsenaux nucléaires et, finalement, sur
un désarmement nucléaire général.
Plus récemment, M. Bolger a proposé, dans un premier temps,
l'instauration d'une
zone exempte d'armes nucléaires dans l'ensemble
de l'hémisphère sud
dont le projet a été
adopté fin 1996 par les Nations unies. Si ce projet ne vise en
réalité qu'à unifier les traités de
dénucléarisation régionaux existants (Amérique
latine, Pacifique sud, Asie du sud-est et Afrique) et n'apporte rien de
nouveau, il souligne la volonté de la Nouvelle-Zélande de
continuer à conforter son image de "champion" de
l'anti-nucléaire, jugée valorisante sur la scène
internationale.
2. La politique de défense néo-zélandaise
a) Une politique de défense à caractère régional souffrant d'un certain isolement stratégique
Dépourvue de toute menace militaire directe, la
Nouvelle-Zélande s'est accordée sur une politique de
défense, à caractère principalement régional,
axée sur des relations étroites avec l'Australie et les pays
insulaires du Pacifique sud.
Ce souci se heurte toutefois à
un certain isolement
stratégique néo-zélandais
depuis le contentieux
nucléaire avec les Etats-Unis. La
crise entre Wellington et
Washington
-qui dure depuis qu'en 1984 le gouvernement travailliste de M.
David Lange s'est opposé aux escales de bâtiments
nucléaires en Nouvelle-Zélande- a en effet conduit les Etats-Unis
à suspendre les dispositions de l'ANZUS en ce qui concerne la
Nouvelle-Zélande et à réorganiser, sur une base
exclusivement bilatérale, la coopération militaire avec
l'Australie.
La
législation néo-zélandaise
interdisant les
escales de navires à propulsion nucléaire ou porteur d'armes
nucléaires a ainsi entraîné une
rupture
durable
des relations militaires avec les Etats-Unis
, malgré la
publication fin 1992 du "rapport Somers" concluant à l'innocuité
totale des escales de bâtiments de propulsion nucléaire. Elle n'a
pas été davantage remise en cause malgré la victoire aux
élections du parti national -traditionnellement favorable au
rétablissement de relations de coopération militaire avec les
Etats-Unis- qui s'est maintenu au pouvoir en 1996.
Dans le même temps, la Nouvelle-Zélande a vu un certain
affaiblissement de ses relations militaires avec l'Australie
. Or la
fiabilité de la défense néo-zélandaise est
fortement dépendante des liens avec l'Australie (en raison,
précisément, de la perte de la protection américaine qui
était assurée dans le cadre de l'ANZUS). La
Nouvelle-Zélande apparaît ainsi d'une certaine manière
prisonnière de sa propre législation antinucléaire qui l'a
exclue de l'ANZUS et conduit logiquement l'Australie à
privilégier son alliance avec les Etats-Unis.
Néanmoins, les armées australiennes et
néo-zélandaises poursuivent des échanges fréquents
et de nombreux exercices communs. Mais Wellington souhaiterait un
approfondissement de ces relations de défense bilatérales alors
que Canberra s'inquiète de la faiblesse de l'effort militaire
néo-zélandais et notamment de
l'avenir du programme ANZAC
(qui porte sur la construction en coopération de 10 frégates, 8
pour l'Australie et 2 pour la Nouvelle-Zélande).
De même, la Nouvelle-Zélande souhaite la création de forces
armées communes avec l'Australie, que Canberra juge
prématurée et n'admet que comme un objectif à long terme.
b) Des moyens militaires modestes
Les forces armées néo-zélandaises ne
disposent que de moyens très limités, situation aggravée
par
un budget de la défense faible
(1,1 % du PIB
néo-zélandais).
Depuis une dizaine d'années, en effet, les réductions de
crédits imposées à la défense
néo-zélandaise ont réduit le pouvoir d'achat de son budget
de plus d'un tiers. Ces réductions expliquent le débat sur
l'opportunité du
programme de frégates ANZAC
dont le
coût s'élève à 1,25 milliards de dollars
néo-zélandais pour deux bâtiments qui devraient être
livrés en 1997 et 1998. Ces contractions budgétaires se sont
aussi traduites par une forte diminution des dépenses de fonctionnement.
Les armées néo-zélandaises ont ainsi vu leurs
effectifs
réduits d'environ 20 % depuis 1990 pour compter aujourd'hui
moins
de 10 000 hommes
:
- les
forces terrestres
ne regroupent que 4 480 hommes et disposent
de matériels limités (26 chars), souvent vétustes ;
- les
forces aériennes
comptent 3 300 hommes mais ne peuvent
mettre en oeuvre qu'un peu plus de 30 avions de combat et 18
hélicoptères, même si elles disposent de
6 appareils de
patrouille maritime
bien adaptés aux missions qu'elles ont à
accomplir dans le Pacifique sud ;
- enfin,
la marine
néo-zélandaise (2 070 hommes) ne
peut compter que sur une vingtaine de bâtiments (dont 3 frégates
anciennes et 4 patrouilleurs) qui ne permettent pas une politique de
présence très significative.
Les réductions successives du budget de la défense depuis une
dizaine d'années, s'ajoutant aux conséquences
-stratégiques et opérationnelles- de la rupture militaire avec
les Etats-Unis, constituent ainsi
un problème délicat pour le
gouvernement néo-zélandais
alors que l'absence de menace
extérieure directe rend difficile l'accroissement de l'effort de
défense qui serait nécessaire pour relever le potentiel humain et
technique des forces armées.
*
* *
TROISIÈME PARTIE -
LES RELATIONS
BILATÉRALES :
LA FRANCE, PUISSANCE RECONNUE ET
APPRÉCIÉE
DU PACIFIQUE SUD
Malgré de sérieuses nuances et quelques
véritables différences, les
relations bilatérales
de la France avec l'Australie, d'une part, et la Nouvelle-Zélande,
d'autre part, après avoir connu les
mêmes turbulences
,
connaissent aujourd'hui la
même embellie
, que chacun estime devoir
être durable.
La mission de votre délégation -
première visite
politique française de haut niveau
dans ces deux pays depuis
l'arrêt définitif des essais nucléaires français en
janvier 1996- a permis de constater -l'accueil des autorités
australiennes et néo-zélandaises en a témoigné- que
le dossier des essais était aujourd'hui classé et qu'un nouveau
chapitre des relations bilatérales était désormais ouvert.
Les dirigeants australiens et néo-zélandais se félicitent
désormais publiquement de la présence et du rôle de la
France dans le
Pacifique sud
. La voie est aussi ouverte à un
nouveau
développement de nos échanges
économiques,
financiers et commerciaux -qui n'avaient d'ailleurs été que
marginalement affectés par la crise des essais- et à une
coopération active sur le plan culturel.
*
* *
I. LA NORMALISATION ET LE RÉCHAUFFEMENT DES RELATIONS POLITIQUES BILATÉRALES
A. LES RELATIONS POLITIQUES FRANCO-AUSTRALIENNES
1. La crise des essais nucléaires est aujourd'hui soldée
Les relations politiques franco-australiennes ont connu, au cours de la dernière décennie, des fortunes diverses qui se sont souvent traduites par des perturbations passagères, liées notamment à l'évolution de la situation en Nouvelle-Calédonie, aux critiques australiennes à l'égard de la politique agricole commune ou aux négociations entreprises dans le cadre du GATT (où l'Australie défendait les intérêts des pays du " groupe de Cairns "). Mais les essais nucléaires français dans le Pacifique sud ont, sans conteste, constitué, pendant une trentaine d'années, la principale hypothèque pesant sur les relations franco-australiennes. La crise des années 1995-1996, aujourd'hui close, fut à la fois la dernière et la plus rude.
a) Une crise profonde aux effets néanmoins limités
Les réactions hostiles et disproportionnées de
l'Australie à notre ultime série d'essais nucléaires
(annoncée en juin 1995 et terminée en janvier 1996) ont, par leur
dureté de ton sans précédent, sérieusement
affecté les relations politiques bilatérales.
L'
hostilité profonde et traditionnelle
de l'opinion
australienne
au nucléaire
s'est trouvée en effet
renforcée par la perception de la fin de la guerre froide et
exacerbée par un
contexte intérieur
préélectoral
propice aux surenchères. Les
protestations populaires, fortement relayées au plan politique et
médiatique, se sont cependant atténuées dès la fin
de l'été 1995.
Les " sanctions " australiennes ont été principalement
confinées au
domaine de la défense :
gel de la
coopération militaire bilatérale, rappel de l'attaché de
défense australien à Paris, et exclusion de la
société Dassault d'un appel d'offres pour la fourniture d'une
trentaine d'avions d'entraînement conduisant au rappel pour consultation
de notre ambassadeur à Canberra.
Sur place, les entraves posées au
fonctionnement quotidien de
l'ambassade et des consulats de France
et aux
intérêts de
nos ressortissants
(menaces de boycott, refus de décharger les
navires et avions français ...) ont été source de
frictions renouvelées.
Enfin,
au plan international,
l'Australie a mené campagne contre
nos essais dans les enceintes multilatérales (Forum du Pacifique sud,
Assemblée générale de l'ONU, Cour internationale de
justice, conférence du désarmement, Commonwealth), puis a
constitué la " commission de Canberra sur l'élimination des
armes nucléaires ".
En dépit de cet activisme politique,
la substance des relations
franco-australiennes n'a pas été profondément
affectée
par la crise des essais. Limitées au domaine de la
défense, les représailles n'ont pas été
prolongées par des mesures de rétorsions
commerciales.
Sur le plan
économique,
si les effets de la crise ont atteint
notamment nos compatriotes travaillant dans le commerce de détail ou la
restauration, ils n'ont jamais affecté les intérêts des
grandes entreprises et
les échanges bilatéraux ont
paradoxalement progressé
en 1995. Ce fait a été
particulièrement illustré par le rachat par
Axa
, au plus
fort de la crise, de 51 % de " National Mutual ", l'un
des
principaux réseaux d'assurances australiens.
On relèvera enfin que le contentieux nucléaire n'a pas
entravé la
poursuite de la coopération franco-australienne
dans le Pacifique.
Canberra n'a jamais officiellement contesté la
légitimité de notre présence dans le Pacifique sud. A
titre d'exemple, les deux pays ont cofinancé l'aéroport de Santo
au Vanuatu et Paris a soutenu en octobre 1985 l'élection de l'Australien
Robert Dun à la commission du Pacifique sud.
b) Une crise aujourd'hui définitivement close
Après s'être progressivement estompé au
fil des mois -sans doute plus par résignation que par
compréhension des objectifs de la politique française et des
garanties apportées par les conditions de réalisation de nos
tirs-, le mouvement de protestation australien s'est quasiment achevé
avec l'arrêt des essais début 1996.
Le nouveau gouvernement australien -dirigé par M. John Howard à
la tête d'une coalition libérale-nationale et constitué en
mars 1996- a alors pris l'initiative de la
normalisation des relations
franco-australiennes.
Prenant acte notamment de la signature par la France,
le 25 mars 1996, des protocoles du traité de Rarotonga (sur
l'instauration d'une zone exempte d'armes nucléaires dans le Pacifique
Sud), le nouveau gouvernement conservateur a décidé, à la
mi-mai, la levée des mesures de restriction de nos
relations
militaires
; cette normalisation s'est achevée tout récemment
par la nomination d'un nouvel attaché de défense australien
à Paris.
Dans le domaine du
désarmement,
Paris et Canberra
défendent désormais des positions proches. Ils ont oeuvré
de concert pour la signature du
CTBT (
traité d'interdiction
complète des essais), d'abord à Genève, ensuite à
New-York, tandis que l'Australie soutenait la réintégration de la
France au sein du dialogue post-
Forum du Pacifique sud
,
décidée par les pays membres le 4 septembre dernier.
Enfin, les nouveaux dirigeants australiens ont pris l'initiative de renouer le
dialogue gouvernemental
. Après la rencontre des deux ministres
des Finances à Paris, en marge de l'OCDE, dès le mois de mai
1996, les ministres australiens des Affaires étrangères -
M.
Downer
- et de la Défense -
M. Mc Lachlan
- ont
effectué des visites en France, successivement en septembre et
décembre 1996, qui ont marqué deux étapes essentielles du
réchauffement des relations bilatérales.
L'
année
1997
devait, dans ce contexte, être celle du
parachèvement du rapprochement bilatéral
. Tel a
été l'esprit de la mission de la délégation de
notre commission en Australie du 8 au 13 février. Quinze jours plus
tard, la visite d'une délégation du CNPF -conduite par MM. Jean
Gandois et Claude Bebéar- devait marquer la volonté commune de
développer les échanges économiques et commerciaux
bilatéraux. Enfin, le ministre français des Affaires
étrangères, M. Hervé de Charette, a retenu, à
l'invitation de son homologue australien le principe d'une visite -très
attendue et que notre délégation juge très souhaitable- en
Australie, visite qui devrait avoir lieu dans l'année. Ces visites
successives -auxquelles s'ajouteront d'autres contacts gouvernementaux et
parlementaires- constitueront autant de jalons sur la voie du
resserrement
naturel d'une relation bilatérale
que la crise des essais avait
perturbée sans la remettre en question.
2. Le Pacifique sud, théâtre privilégié du dialogue franco-australien
a) La France, puissance reconnue du Pacifique sud
Le séjour de votre délégation en
Australie a été à la fois l'occasion de réaffirmer
la présence de la France dans le Pacifique sud et de constater la
satisfaction de l'Australie de voir la France rester engagée dans la
région pour l'aider à partager la charge de l'aide au
développement et à la stabilité de la zone.
La France est d'abord naturellement présente dans le Pacifique par ses
trois territoires de
Nouvelle-Calédonie
, de
Wallis-et-Futuna
et de
Polynésie française
. Il est
à souligner que la Nouvelle-Calédonie a cessé
d'être, depuis les accords de Matignon, un sujet de désaccord
franco-australien. Canberra soutient le processus des accords de Matignon que
Paris compte fermement mener à son terme jusqu'au
référendum sur l'avenir du territoire prévu en 1998.
Mais la France participe aussi très activement à la
coopération et à l'aide au développement dans la
région. Sa présence a été longtemps mise en cause
par certains Etats mélanésiens -comme la
Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Vanuatu et les îles Salomon-
partisans de l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie, au moins
jusqu'aux accords de Matignon. D'autres contestations se manifestent
périodiquement : ainsi le Premier ministre des îles Cook -sir
Geoffrey Henry- a-t-il, fin 1996, souhaité l'inscription de la
Polynésie française sur la liste des territoires à
décoloniser.
Mais
l'aide française
au développement du Pacifique sud
est, au-delà de nos territoires,
très substantielle
: le
seul Vanuatu bénéficie ainsi d'une aide de 40 millions de francs
par an.
L'Australie -comme la Nouvelle-Zélande- apprécie d'autant plus
cette assistance française aux économies insulaires de la
région que la volonté française contraste avec le
désintérêt croissant des autres bailleurs de fonds
potentiels
depuis la fin de la guerre froide : la Grande-Bretagne a
quitté la Commission du Pacifique sud en 1995 et les Etats-Unis ont, de
leur côté, considérablement diminué leur aide. La
France reste ainsi la dernière grande puissance impliquée dans la
zone.
Canberra -qui, de son côté, doit faire face à des
contraintes budgétaires pour sa propre aide financière- ne
souhaite pas se retrouver seule en première ligne dans l'aide au
développement de ses voisins insulaires. Cette
concordance des
intérêts stratégiques français et australiens
rend également l'Australie consciente du caractère
stabilisateur de la présence française.
b) La coopération régionale franco-australienne
C'est ainsi que le ministre australien des Affaires
étrangères, M. Downer, a clairement souligné que la
France est bienvenue dans le Pacifique sud, où elle est un partenaire
important de l'Australie et des Etats de la région.
L'Australie dispose d'une
influence
certaine
dans la zone
. Elle a
ainsi favorisé le rétablissement de la France dans son statut de
partenaire du dialogue post-Forum du Pacifique sud dont Paris avait
été suspendu en octobre 1995. Elle a également
tenté d'influencer la position de certains pays de la région,
comme la Papouasie-Nouvelle Guinée.
La France et l'Australie ont par ailleurs déterminé
récemment en commun
cinq projets de coopération
au profit
des pays insulaires de la région.
Enfin, le rapprochement franco-australien s'est traduit fin 1996 par une
intensification des contacts avec la Nouvelle-Calédonie
(visite
d'une mission commerciale du Queensland, visite d'une délégation
du territoire conduite par le haut-commissaire en Australie, et visite de M.
Downer lui-même à Nouméa en décembre 1996).
3. La coopération militaire bilatérale
Le " Livre blanc " australien
(" strategic
review ") de 1993 a marqué la reconnaissance officielle par
l'Australie du rôle actif de la France dans le Pacifique. Il recommandait
en particulier d'élargir la coopération militaire avec la France
ainsi que les escales et visites réciproques.
Après le gel des relations militaires en 1995, la décision de
normalisation prise le 15 mai 1996 a ouvert la voie à une
reprise des
relations de défense bilatérales
-notamment le retour
à Paris d'un attaché de défense australien. Un officier
australien doit être accueilli en 1997 au collège
interarmées de défense (CID).
Il reste que cette
coopération
militaire bilatérale reste
modeste
et réduite à des échanges limités
(hors Pacifique sud).
En matière de
défense
, l'Australie accorde, on l'a
relevé, une priorité stratégique à son alliance
avec les Etats-Unis et est naturellement réticente à
l'idée que les Européens -et la France en particulier- puissent
jouer un rôle en matière de sécurité en Asie.
Dans le
domaine de l'armement,
l'industrie française n'est
guère présente en Australie. A l'exception notable de
Thomson-CSF, les industriels français n'ont pas remporté de
contrats importants dans ce pays en raison principalement de
l'étroitesse des liens entre pays anglo-saxons. Les industriels
français de l'armement n'ont guère été jusqu'ici
récompensés de leurs efforts sur le marché australien.
Les perspectives principales dans les années à venir s'inscrivent
aujourd'hui dans les domaines terrestres, navals et surtout
aéronautiques, compte tenu des programmes de modernisation rendus
nécessaires par le vieillissement des parcs de matériels
australiens. Des opportunités pourraient ainsi apparaître pour les
hélicoptères Tigre et NH 90 ou pour les missiles Mistral.
Il importe, là comme ailleurs, que le rétablissement des contacts
officiels permette de soutenir efficacement l'action de nos industriels.
B. LES RELATIONS POLITIQUES FRANCO-NÉO-ZÉLANDAISES
1. Le " coup d'envoi " de la normalisation bilatérale
Comme en Australie, mais avec un léger décalage
dans le temps pour des raisons de politique intérieure
néo-zélandaise -le nouveau gouvernement, issu des
dernières élections générales, n'a pu être
constitué qu'en décembre 1996-, l'arrêt définitif
des essais nucléaires a permis l'apurement des relations politiques
entre Paris et Wellington.
L'accueil que votre délégation puis celle du CNPF fin
février ont reçu de la part des autorités
néo-zélandaises peut ainsi être clairement
considéré comme le
" coup d'envoi " de la
normalisation des relations bilatérales
franco-néo-zélandaises
.
A plusieurs reprises, en effet,
au cours des dix dernières
années
notamment,
divers contentieux
ont troublé,
voire durablement détérioré, la relation
bilatérale, qu'il s'agisse de la situation en Nouvelle-Calédonie,
des questions agricoles et des négociations du GATT, de l'affaire du
" Rainbow Warrior " -qui a eu un impact très négatif-,
ou de la question des essais nucléaires elle-même.
a) La fin de la crise des essais
Si la
crise
des essais est ainsi terminée, elle
n'en a pas moins été
aiguë
, dans un pays
viscéralement antinucléaire. Le gouvernement dirigé par M.
Bolger a toutefois, au plus fort des tensions, tenté de
préserver les intérêts
bilatéraux
à
long terme
tout en ménageant les
susceptibilités
antinucléaires de l'opinion.
Après avoir pris des mesures de
rétorsion relativement circonscrites (gel des relations militaires et
interruption des contacts ministériels) le 17 juin 1995, Wellington a
activement participé, à l'automne suivant, à la campagne
internationale contre la France : devant la Cour internationale de justice, aux
Nations unies, au Forum du Pacifique sud et au Commonwealth.
C'est ensuite avec soulagement que Wellington a tiré les
conséquences de l'annonce par Paris de la fin des essais, de notre
signature du traité de Rarotonga, de la fermeture du Centre
d'expérimentations du Pacifique et de notre signature du CTBT. Si cette
satisfaction n'a pu s'exprimer aussi clairement et rapidement que l'on pouvait
l'espérer, c'est néanmoins dès le
27 mars 1996
-
deux jours après notre approbation des protocoles du traité
de Rarotonga- que les
sanctions
décidées en juin 1995 ont
été
levées
, avant que soit rétablie, en
juillet, l'autorisation permanente de survol et d'escale dans les mêmes
conditions qu'avant juin 1995.
Si, en période électorale, le gouvernement
néo-zélandais ne pouvait ignorer les réactions de
l'opinion et des médias- où la crise avait fait remonter à
la surface les vieux griefs du " Rainbow Warrior "-, le
changement
de ton
a toutefois été sensible dès la fin des essais
: participation d'un ministre néo-zélandais à un colloque
organisé à l'Assemblée nationale en mai 1996,
décision d'achat de missiles Mistral qui mettait un terme au gel des
relations militaires. Surtout, le Pacifique sud est demeuré perçu
par Wellington, comme par Canberra, comme un enjeu d'intérêt
commun. L'acceptation de la présence et du rôle de la France dans
le Pacifique et le soutien de la Nouvelle Zélande aux accords de
Matignon n'ont jamais été remis en cause. Cette communauté
d'intérêts français et néo-zélandais a
motivé le soutien de Wellington -comme celui de Canberra- au
rétablissement de notre statut de partenaire du dialogue post-Forum du
Pacifique sud.
b) Le contexte : une relation bilatérale complexe
Les difficultés engendrées par notre
dernière campagne d'essais nucléaires en Nouvelle-Zélande
-comme d'ailleurs en Australie- ne doivent pas conduire à
considérer que l'image de la France y est mauvaise. La
réalité est plus complexe.
Il faut d'abord prendre en considération
l'extrême
sensibilité des Néo-Zélandais à tout ce qui
concerne le nucléaire
. Ce sentiment antinucléaire, quasi
viscéral, s'exprime sur un mode émotionnel, voire passionnel,
ainsi qu'en témoignent les médias locaux. Le gouvernement
néo-zélandais ne peut pas ne pas en tenir compte et votre
délégation a pu mesurer, lors de son séjour à
Wellington, que le
souci de tourner la page
du nucléaire dans les
relations bilatérales, était plus net au niveau gouvernemental
qu'au niveau des médias, toujours prompts à s'enflammer à
nouveau sur les thèmes antinucléaires -en l'occurrence la
question du transport des déchets nucléaires recyclés.
Le gouvernement néo-zélandais s'est ainsi efforcé, durant
la période des essais, à la fois d'en tirer le
bénéfice sur le plan intérieur, mais aussi de limiter
l'ampleur de ses réactions pour
ne pas compromettre à long
terme des relations bilatérales
franco-néo-zélandaises
dont Wellington souligne les aspects positifs, notamment dans le domaine de la
coopération régionale.
Les Néo-Zélandais font par ailleurs preuve de sentiments
d'
amitié
et d'
attachement
à l'égard de la
France dont ils admirent l'histoire, la culture et la technologie. Ils
rappellent ainsi volontiers -pour l'anecdote- que si les Français
étaient arrivés trois semaines plus tôt, en 1840, à
Akaroa, l'île du sud aurait pu être française. Les
Néo-Zélandais, comme les Australiens, combattirent aussi à
nos côtés durant les deux conflits mondiaux. La culture
française y reste très appréciée, au même
titre que notre " art de vivre " chaleureusement décrit par
Katherine Mansfield. Enfin, la haute technologie française est
jugée remarquable et contribue à corriger l'image traditionnelle
de notre pays dans un sens plus moderne et plus positif.
Pour toutes ces raisons, la nouvelle page, désormais ouverte, des
relations franco-néo-zélandaises doit reposer sur une base
d'amitié et de communauté culturelle solide qui doit engager les
échanges bilatéraux sur la voie du développement et de
l'approfondissement.
2. Les relations militaires bilatérales
Les
relations militaires bilatérales
, dont le
gel avait constitué la principale mesure de rétorsion
décidée par le gouvernement néo-zélandais durant la
crise des essais, doivent désormais -l'hypothèque
nucléaire étant levée- retrouver un cours normal. La
normalisation entreprise depuis mars 1996 ouvre la voie à la reprise des
liens antérieurs à juin 1995, tels que des manoeuvres communes ou
l'échange de sections d'infanterie avec la Nouvelle-Calédonie.
La coopération militaire bilatérale, basée sur une
communauté d'intérêts dans la région, est,
quoique modeste,
favorisée par plusieurs
facteurs
:
l'attitude traditionnellement favorable de la France
à cette coopération, l'isolement stratégique de Wellington
depuis sa mise à l'écart de l'ANZUS, et la présence
militaire française dans le Pacifique.
Diverses activités ont déjà été
lancées et devraient se développer : le commandant
supérieur des forces françaises stationnées en
Nouvelle-Calédonie doit se rendre en Nouvelle-Zélande en avril
1997 ; Wellington a renouvelé l'autorisation permanente de survol et
d'escale accordée à nos aéronefs militaires ; le principe
d'une participation française à l'exercice naval
interallié " Tasmanex 98 " est acquis ; et l'échange
d'une section d'infanterie avec la Nouvelle-Calédonie, prévu en
1995, devrait pouvoir être organisé en 1997.
Par ailleurs, dans le domaine de
l'industrie de défense
, la
Nouvelle-Zélande, si elle représente un marché mineur par
sa taille, permet la conclusion de quelques ventes de matériel militaire
d'ampleur modeste. C'est ainsi qu'un contrat de
27 missiles et postes de tir
Mistral
de la société Matra, dont la conclusion avait
été différée à une date postérieure
à la fin des essais, a été signé le 23 octobre
1996. D'autres contrats avaient précédemment été
conclus par Thomson-CSF et plusieurs de ses filiales. Des perspectives
s'offrent enfin aujourd'hui, compte tenu des besoins des forces armées
néo-zélandaises, dans les domaines des systèmes de
communications tactiques et des radars.
*
* *
II. LE DÉVELOPPEMENT DES RELATIONS ÉCONOMIQUES BILATÉRALES : L'OCÉANIE, TREMPLIN VERS L'ASIE ?
A. LES RELATIONS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES FRANCO-AUSTRALIENNES
1. Des échanges commerciaux accrus et excédentaires, mais encore limités
a) Un essor incontestable qui doit être poursuivi
Les relations économiques et commerciales
franco-australiennes se présentent sous un jour
très
satisfaisant
. Si elles peuvent paraître encore modestes par rapport
aux potentialités des deux partenaires -et si elles disposent, de ce
fait,
d'une marge de progression encore importante
-, elles connaissent
un incontestable essor.
Ce développement -il faut le rappeler-
n'a pas été
affecté par la crise des essais
, sinon dans le commerce de
détail ou la restauration. Les menaces de boycott sont restées
largement théoriques. Les intérêts des grandes entreprises
françaises n'ont pas -sauf dans le domaine des transports-
été atteints et les échanges et investissements
bilatéraux ont, paradoxalement, continué à progresser. Nos
parts de marché en Australie se sont même légèrement
améliorées par rapport à celles de nos concurrents
européens.
Le
rachat par Axa
, au plus fort de la crise, de 51 % de "
National
Mutual
" a illustré ce souci réciproque de préserver
les échanges bilatéraux. De même, la Compagnie
générale des eaux s'est alors vue attribuer la gérance de
la distribution d'eau dans l'agglomération d'Adélaïde. Et
les livraisons d'uranium destiné à notre production
d'énergie civile n'ont pas été affectées.
Au total, après la très forte augmentation enregistrée en
1994 (+ 21,1 %), les échanges franco-australiens ont poursuivi leur
progression en 1995 (+ 7,1 %)
pour représenter
10,7
milliards de francs
(exportations plus importations).
Structurellement déficitaires jusqu'en 1990, les échanges
commerciaux bilatéraux se sont ensuite rééquilibrés
et font au contraire désormais apparaître, pour la
cinquième année consécutive, un large
excédent
commercial
: il s'élevait fin 1995 à 1,8 milliard de francs,
soit le 21ème excédent bilatéral de notre pays dans le
monde, et à 925 millions pour le premier semestre de 1996. Le
taux de
couverture atteint
ainsi
142 %.
L'ampleur de cet excédent
commercial est à rapprocher de l'important effort d'investissements de
nos entreprises en Australie et de la faiblesse relative des investissements
australiens en France, les entreprises australiennes investissant en Europe
ayant encore tendance à s'installer prioritairement au Royaume-Uni.
Evolution des échanges commerciaux
franco-australiens
Millions FF |
1986 |
1987 |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
Importations en provenance d'Australie |
5218 |
5699 |
6173
|
6332 |
4824
|
4618
|
5027
|
3365
|
4183
|
4429
|
Exportations
|
3712 |
3262 |
4449 |
6132 |
4733 |
5855 |
4915 |
4286 |
5758 |
6208 |
Total |
8930 |
8961 |
10622 |
12464 |
9557 |
10473 |
9942 |
7651 |
9941 |
10637 |
Solde |
1506 |
2437 |
1724 |
200 |
91 |
-1237 |
112 |
-921 |
-1575 |
-1779 |
Les
performances
économiques françaises
sur le marché australien apparaissent ainsi
satisfaisantes
.
L'effort de compétitivité fourni et une présence
commerciale accrue ont été récompensés, de
même que la tendance à la hausse et à la diversification de
nos exportations.
Il reste que, globalement, l'Australie n'est encore pour la France qu'un
partenaire commercial modeste
:
- l'Australie,
33ème client et 36ème fournisseur de la
France
, n'absorbe que 0,42 % de nos exportations et ne représente
que 0,33 % de nos approvisionnements ;
- la France, de son côté, est le
14ème fournisseur et le
19ème client
de l'île-continent ; si elle n'est pas
négligeable, loin de là, la
part de marché
française en Australie ne dépasse pas
2,5 %
et peut donc
encore fortement progresser.
Les progrès, incontestables, accomplis au cours des dernières
années doivent donc être poursuivis et approfondis. L'accent
pourrait, selon les informations recueillies par votre
délégation, être particulièrement mis sur des
secteurs où notre présence demeure insuffisante
(agro-alimentaire, automobiles, travaux publics...) et sur une présence
accrue de certaines petites et moyennes entreprises. La croissance de
l'économie australienne et la perspective des Jeux olympiques de l'an
2000 devraient être mises à profit pour
poursuivre l'essor des
échanges bilatéraux
. C'est ce que fait apparaître
l'analyse, plus détaillée, des exportations françaises en
Australie.
b) Des exportations françaises dont la diversification doit être poursuivie
Nos exportations vers l'Australie on atteint en 1995
6208
millions de francs.
Ce niveau, jamais atteint, marque une nouvelle
progression, de 8,2 %, par rapport à 1994, année où nos
exportations avaient déjà augmenté de 18,9 %. Pour
les sept premiers mois de 1996, les exportations françaises ont
conservé la même tendance (+ 0,5 %) en atteignant un montant de
3 533 millions de francs.
Ces exportations françaises proviennent de rubriques multiples, aucun
secteur n'étant massivement prédominant. Il est
intéressant de relever que les PME sont déjà à
l'origine de 42 % de nos ventes. Les principaux postes exportateurs sont les
suivants :
-
les biens d'équipement professionnel
figurent au premier rang
en représentant 43 % de nos exportations totales (2,7 milliards en 1995)
; très diversifiées, ces exportations concernent notamment des
turbines, des matériels électroniques, des matériels de
traitement de l'information, des matériels électriques de grande
puissance, des matériels de travaux publics et des machines pour
l'industrie alimentaire ;
- viennent ensuite
les produits chimiques
et divers
demi-produits
(21,7 % des exportations, 1 365 millions en 1995) et des
biens
de consommation
, tels que parfums, cosmétiques ou boissons (18 % du
total, 1 130 millions en 1995) ; certains de ces produits, comme les
produits de parfumerie, ont toutefois été les principales
victimes, en 1995, des appels au boycott lancés à l'occasion de
nos derniers essais nucléaires ;
- on notera enfin que les exportations de
métaux
et de produits
issus du travail des métaux connaissent une progression remarquable et
représentent désormais près de 8 % de nos exportations
totales.
Les exportations françaises
reflètent
ainsi globalement
les domaines d'excellence de l'industrie française
, avec un
accent particulier sur les produits d'équipement à fort contenu
technologique. Deux secteurs importants pour la France,
l'agroalimentaire et
l'industrie automobile
, sont toutefois -il faut le regretter- très
peu présents en Australie.
Il convient enfin de souligner que le redressement de nos ventes en Australie a
été concomitant à la croissance des investissements
français dans ce pays. Il y a là un exemple très positif
d'investissements porteurs d'exportations.
c) Des exportations australiennes en France concentrées sur quelques produits
Après avoir fortement progressé durant les
années 1980, les ventes australiennes en France avaient fortement
diminué en 1993 (- 32,5 %), en raison à la fois de la crise
économique en France et de la baisse des prix des matières
premières.
Elles ont repris un mouvement à la hausse en 1994 (+ 24,3 %),
confirmé en 1995 (+ 5,7 %) mais à nouveau compromis en 1996 (-
12,5 % pour les sept premiers mois) par la dépréciation des cours
mondiaux de la laine et des produits énergétiques.
Ces exportations australiennes en France, qui ont atteint
4 429
millions de francs
en 1995, restent en effet
concentrées sur
trois grands produits de base :
- la laine
en suint (1 053 millions en 1995, soit 23,8 % du total des
importations),
-
la houille
(889 millions en 1995, soit 20,3 %),
- et
le minerai de fer
(690 millions, soit 15,6 %).
Si l'on ajoute les autres matières premières minérales et
les cuirs et peaux brutes, on obtient ainsi près de 70 % des
importations françaises en provenance d'Australie. Les biens
d'équipement professionnel et les biens de consommation n'occupent en
revanche qu'une place encore réduite.
Il convient toutefois de relever
une certaine diversification
des
exportations australiennes en France, à l'image de l'évolution
générale de l'économie australienne. Ainsi, les produits
industriels élaborés sont passés en dix ans, de 1985
à 1995, de 3,4 % à 15,6 % du total des ventes australiennes.
2. Des investissements français en forte croissance depuis la fin des années 1980
a) Des implantations françaises, longtemps faibles, et désormais en augmentation rapide
Le redressement des exportations françaises en
Australie a été concomitant à l'importante montée
en puissance de nos implantations dans ce pays. Longtemps très faibles,
ces implantations ont en effet connu
une très forte augmentation
depuis les années 1980. Le nombre des filiales françaises en
Australie est en effet passé de
37 avant 1980
à
80 en
1989
et à
213
aujourd'hui.
Les années 1980 ont
ainsi marqué la volonté des sociétés
françaises de s'implanter sur le sol australien. Les années 1990
confirment et amplifient ce mouvement : 86 filiales ont ainsi été
créées en moins de six ans, entre 1990 et 1995.
Ces 213 filiales françaises
emploient près de 40 000
personnes
. Les sociétés de moins de 100 personnes y sont
prédominantes (petites sociétés de commerce, bureaux de
représentation, activités de services...) et seules 3 % d'entre
elles emploient plus de mille personnes. Mais les groupes Axa et Accor
emploient, à eux seuls, plus de 12 000 salariés.
Les entreprises françaises sont désormais
présentes
dans la plupart des secteurs
de l'économie australienne :
- dans le
secteur primaire
, on citera la laine avec Chargeurs et
Dewavrin, l'aluminium avec Péchiney et l'uranium et l'or avec Cogema ;
on peut toutefois regretter notre absence dans le domaine minier australien,
notamment le charbon, et dans la production de pétrole et de gaz ;
- dans le
secteur industriel
, GEC Alsthom, Schneider et Coflexip, sont
bien installées ; dans l'électronique Thomson, Alcatel, la Sagem.
Autre point fort, notre chimie pharmacie (Rhône-Poulenc, Servier,
Mérieux, Virbac, ELF,...). Dans le secteur agroalimentaire, prometteur
dans ce pays, il faut enfin signaler nos investissements vinicoles (Moët
et Chandon, Pernod Ricard, Rémy) ;
- dans le
secteur des services
, nous sommes bien
représentés. Cinq banques françaises opèrent en
Australie (BNP, Crédit Lyonnais, Indosuez, Paribas,
Société Générale). Dans les assurances, l'UAP et
maintenant Axa avec la reprise de National Mutual. Dans le tourisme,
créneau porteur, le groupe Accor gère plus de 45 hôtels et
emploie 4 000 personnes ; le Club Méditerranée
possède un premier club. Enfin, la privatisation des services publics a
ouvert un champ d'initiatives intéressant. La Lyonnaise des Eaux, la
Générale des Eaux, ont des filiales et ont remporté
chacune un contrat dans l'Etat de Nouvelle-Galles du Sud.
Les sociétés françaises en Australie -principalement
installées à Sydney (65 % d'entre elles) -se sont ainsi
diversifiées. D'abord concentrée sur la transformation des
matières premières (Péchiney possède à
Tomago la plus grande usine d'aluminium du monde, rassemblant 3 000
salariés), la présence française s'est étendue
à l'industrie puis aux services.
Au total, les investissements français en Australie sont de l'ordre de
16 milliards de francs
. Le chiffre d'affaires réalisé dans
ce pays est estimé à environ 28 milliards de francs (pour
40 000 salariés). 12 % des entreprises françaises
réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions
de dollars australiens (400 millions de francs français).
b) Les perspectives de la présence française : l'Australie, tête de pont vers l'Asie ?
- Malgré les progrès accomplis, la
présence française en Australie demeure néanmoins
relativement modeste et dispose encore d'une marge importante de progression
qui doit, selon votre délégation, être pleinement
exploitée.
D'importantes opérations demeurent en perspective :
- à la suite de l'échec du projet de
liaison ferroviaire
à grande vitesse
Sydney-Melbourne, la filiale locale de GEC Alsthom
s'est engagée dans la promotion d'un nouveau projet portant sur la
liaison
Sydney-Canberra
(270 km en 1 heure et 20 minutes) ; promue sur
place par l'entreprise "Speedrail", la réalisation de ce projet
demeure
toutefois incertaine. Le Premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud a
réaffirmé devant votre délégation le principe de
non-implication financière de l'Etat dans le projet. La procédure
d'appel à candidatures pour ce projet a été lancée
en décembre 1996, le cahier des charges devant être publié
très prochainement ;
- les
privatisations en Australie
(aéroports,
électricité, eau...) ouvrent également de nouvelles
potentialités aux entreprises françaises ; on rappelle ainsi,
dans le domaine de l'eau, que la CGE et la Lyonnaise des eaux assurent
déjà le traitement des eaux dans les agglomérations de
Sydney et d'Adélaïde ;
- enfin,
les Jeux olympiques de Sydney
, en l'an 2000 offrent de
nouvelles possibilités de participations aux entreprises
françaises, notamment dans les domaines de la restauration collective,
de l'environnement ou des télécommunications ; il est important
que ces opportunités disposent d'une action continue de soutien et des
efforts de promotion nécessaires.
De manière générale, le renforcement de la présence
économique française en Australie devra être soutenu par un
courant plus soutenu et plus dense de visites réciproques. A cet
égard, la visite en Australie, du 21 au 26 février dernier
-quelques semaines après la délégation sénatoriale-
de la
délégation du CNPF conduite par M. Jean Gandois
a
marqué la solidité des rapports entre les milieux d'affaires des
deux pays et la volonté commune d'aller de l'avant.
- Dans cette perspective, les autorités australiennes développent
et encouragent le thème de
l'Australie, plate-forme vers l'Asie
.
Cette conception du marché australien, tête de pont vers les
marchés asiatiques, mérite d'être précisément
analysée par les entreprises françaises concernées pour
définir leur
stratégie d'implantation dans la zone
Asie-Pacifique.
Cette volonté des autorités australiennes d'attirer dans leur
pays les sièges régionaux des entreprises
étrangères a déjà séduit un certain nombre
de sociétés françaises. Ainsi
Accor
, à
travers sa participation dans "Accor Asia Pacific", gère plus de 80
hôtels (11 500 chambres) -dont 48 en Australie- dans la zone, ce qui
en fait l'un des plus grands groupes hôteliers de la région, et a
établi son siège régional à Sydney.
Cet exemple n'est pas unique :
Thomson
-CSF a créé
récemment une société holding pour la zone Asie-Pacifique
à Canberra. La société
Coflexip
,
société spécialisée dans les tubes flexibles, a
choisi de déplacer sa direction régionale de Singapour à
Perth et d'y installer son centre de production pour l'Asie du sud-est. Dans le
même esprit, les équipes australiennes de nombreuses entreprises
françaises consacrent une partie importante de leur activité
à prospecter les marchés asiatiques.
Enfin, une société comme
Axa
, en prenant le contrôle
de "National Mutual" -groupe qui occupe également la deuxième
place en part de marché à Hong Kong et en
Nouvelle-Zélande-, a ipso facto solidement pris pied en Asie. National
Mutual, qui est notamment responsable du management des filiales assurances-vie
du groupe Axa au Japon, en Corée et Singapour, est ainsi devenu le
principal axe de développement du groupe Axa dans la zone Asie-Pacifique.
Ces exemples ne sauraient faire oublier que considérer l'Australie -ou
la Nouvelle Zélande- comme une tête de pont vers l'Asie suppose
d'abord, pour les firmes concernées, de
disposer, en Australie
même, d'un marché solide
("hinterland").
Mais, si cette condition est remplie, l'Australie -qui a lancé en 1993
un important programme pour inciter les entreprises étrangères
à y installer leur siège régional pour l'Asie-Pacifique
-ne manque pas d'
atouts
à faire valoir et à
intégrer dans les stratégies des groupes français en Asie :
- d'abord, bien sûr,
la bonne santé économique du
marché australien -
et néo-zélandais- qui a
été l'un des premiers marchés de l'OCDE à retrouver
la
croissance
, ininterrompue depuis cinq ans, avec un taux de
chômage en baisse ;
- ensuite et surtout, des
conditions d'implantation très
favorables
pour les sociétés européennes : elles
trouvent en Australie un climat et une
culture quasi-européennes
qui rendent l'expatriation plus aisée, tandis que les
coûts
d'installation
, notamment immobiliers, y sont bien inférieurs
qu'à Singapour ou Hong-Kong ; globalement, on estime que les charges
fixes d'une entreprise en Australie y sont inférieures d'environ 40 % ;
- ces implantations sont également facilitées par
un
décalage horaire très limité
(au maximum trois heures,
au lieu de dix avec l'Europe) avec les grands marchés asiatiques ; ainsi
se trouve en partie compensé l'extrême éloignement de
l'Australie, aux antipodes de l'Europe ;
- enfin, les entreprises françaises présentes en Australie
peuvent bénéficier de
l'image favorable
dont disposent
souvent les Australiens -ou les Néo-Zélandais- en Asie ; il faut
à cet égard rappeler que les deux-tiers des exportations
australiennes sont allées en 1995 vers l'Asie, soit près d'un
quart pour le seul Japon, devenu ainsi son premier partenaire commercial.
L'Australie doit
, ainsi, aux yeux de votre délégation,
sans être considérée comme un nouveau "tigre" asiatique,
prendre toute sa place
dans la stratégie d'approche des
marchés asiatiques par les entreprises françaises.
*
* *
B. LES RELATIONS ÉCONOMIQUES ET COMMERCIALES FRANCO-NÉO-ZÉLANDAISES
1. Des échanges bilatéraux en progression mais encore modestes
a) Un déficit structurel qui a cédé la place en 1995 à un excédent commercial
Les liens économiques entre la France et la Nouvelle-Zélande, encore modestes, ont été toutefois renforcés à la faveur de la forte croissance néo-zélandaise -servie, on l'a vu, par une politique économique ultra-libérale. Les échanges commerciaux bilatéraux, structurellement déficitaires , ont fait apparaître en 1995 , pour la première fois, un excédent commercial en faveur de la France, ainsi que l'illustre le tableau ci-dessous.
Evolution historique des échanges commerciaux France-Nouvelle-Zélande
Année |
Exportations françaises vers la Nouvelle-Zélande |
Exportations néo-zélandaises vers la France |
Taux de couverture % |
Solde
|
1975 |
99,0 |
395,4 |
25,0 |
-296,4 |
1976 |
95,9 |
639,0 |
15,0 |
-543,1 |
1977 |
136,1 |
604,2 |
22,5 |
-468,1 |
1978 |
158,9 |
557,3 |
28,5 |
-398,4 |
1979 |
187,5 |
700,4 |
26,8 |
-512,9 |
1980 |
163,4 |
714,8 |
22,9 |
-551,4 |
1981 |
226,3 |
801,5 |
28,2 |
-575,2 |
1982 |
363,6 |
892,5 |
40,7 |
-528,9 |
1983 |
431,5 |
1004,5 |
43,0 |
-573,0 |
1984 |
582,5 |
1306,6 |
44,6 |
-724,1 |
1985 |
634,7 |
1348,1 |
47,1 |
-713,4 |
1986 |
593,1 |
1145,6 |
51,8 |
-552,5 |
1987 |
553,0 |
1170,2 |
47,3 |
-617,2 |
1988 |
519,2 |
1167,0 |
44,5 |
-647,8 |
1989 |
663,4 |
1429,0 |
46,4 |
-765,6 |
1990 |
756,8 |
1093,8 |
69,2 |
-337,0 |
1991 |
733,0 |
1115,2 |
65,7 |
-382,2 |
1992 |
605,1 |
1041,5 |
58,1 |
-436,4 |
1993 |
623,4 |
898,4 |
69,4 |
-275,0 |
1994 |
792,5 |
1051,3 |
75,4 |
-258,8 |
1995 |
1244,9 |
1051,9 |
118,3 |
+192,9 |
1996* |
901 |
995 |
91 |
-94 |
* onze premiers mois 1996 (En millions de francs)
Ainsi, en dépit de la crise liée aux derniers essais
nucléaires français et des
boycotts sporadiques
de
certains produits français, les exportations françaises en
Nouvelle-Zélande ont atteint en 1995 un niveau record. Cette progression
exceptionnelle appelle trois observations :
- elle est partiellement imputable à la livraison, fin 1995, de 5 des
7 appareils ATR 72
commandés par la compagnie Air New Zealand ;
- mais, même si l'on met à part l'impact de ce contrat important,
les exportations françaises de 1995 marquent encore une progression de
8,6 % par rapport à celles de 1994 ;
- ce résultat très positif ne saurait toutefois conduire à
occulter
l'effet des boycotts
sur nos exportations : ainsi, nos ventes
d'automobiles, de vins et de cognac ont-elles respectivement diminué de
34 %, 34 % et 33 %.
Si l'année 1995 marque ainsi un tournant, paradoxalement positif, dans
nos relations économiques bilatérales, les
échanges
commerciaux franco-néo-zélandais demeurent
limités
,
à l'échelle en tout cas des échanges extérieurs de
la France :
- la Nouvelle-Zélande ne se situe qu'au
61e rang de nos fournisseurs
(moins de 0,1 % de nos importations totales...) et au
69e rang de nos
clients
(0,08 % de nos exportations) ;
- la France, pour sa part, est le
8ème fournisseur
et le
17ème client
de la Nouvelle-Zélande ; parmi les
fournisseurs européens de la Nouvelle-Zélande, la France ne se
situe encore qu'au quatrième rang, loin derrière le Royaume-Uni
(5,42 % de part de marché) et l'Allemagne (4,85 %) et encore
après l'Italie (2,57 %) ; notre pays détient pour sa part en
Nouvelle-Zélande une
part de marché de 2,48 %.
Ce bilan mitigé appelle toutefois deux observations
complémentaires :
- les
échanges bilatéraux
ont d'abord connu une
évolution très positive : ils ont, sur une trentaine
d'années, été
multipliés par plus de 5
; si
les importations en provenance de Nouvelle-Zélande ont été
multipliées par 3, les exportations françaises ont dans le
même temps été multipliées par 26 ;
- on relèvera par ailleurs que
les échanges entre nos
territoires du Pacifique et la Nouvelle-Zélande
s'effectuent
à sens unique : si les ventes de nos territoires sont symboliques, la
Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie sont
respectivement le 3e et le 5e client de la Nouvelle-Zélande dans le
Pacifique.
b) La progression des exportations françaises
De manière plus précise, les exportations
françaises en Nouvelle-Zélande, qui avaient déjà
fortement progressé en 1994 (+ 28,3 %), ont fait un
bond
spectaculaire (+ 56,8 %) en 1995
grâce au contrat ATR, pour
s'établir à
1 245 millions de francs
.
Traditionnellement diversifiées, ces exportations se concentrent de plus
en plus sur les
biens d'équipement professionnels
(687 millions
en 1995, soit 55,2 %), qu'il s'agisse des équipements
aéronautiques (du fait notamment du contrat ATR) mais aussi des
matériels agricoles, des machines pour l'industrie alimentaire, de
celles pour l'industrie du papier, ou des équipements électriques.
Les
produits chimiques et demi-produits
(197 millions en 1995) et les
biens de consommation courants
(178 millions) représentent, pour
leur part, respectivement 15,8 % et 14,3 % de nos exportations.
Enfin,
deux postes de moindre importance
ont été les plus
touchés en 1995 par les conséquences commerciales de la reprise
des essais : il s'agit des
produits agroalimentaires
(vins, eaux,
champagnes, Cognac...) et des
voitures automobiles
.
c) Des exportations néo-zélandaises très concentrées sur les produits agroalimentaires
Nos importations en provenance de Nouvelle-Zélande se
sont élevées en 1995 à
1 052 millions de
francs
, soit une augmentation de 3,8 % d'un an sur l'autre. Malgré
des sensibles évolutions, leur montant tourne depuis une quinzaine
d'années autour du milliard de francs (cf. tableau ci-dessus).
Ces importations restent très concentrées sur les
produits
agricoles et agroalimentaires
qui représentent, à eux seuls,
87,2 %
de l'ensemble (917 millions en 1995). Les principaux postes
d'importations sont, dans ce domaine, les viandes fraîches
(essentiellement ovines), les volailles et le gibier, et les cuirs et peaux.
Pour le reste, les autres importations néo-zélandaises portent
essentiellement sur :
- les fruits non tropicaux,
- les conserves de poisson,
- la laine en suint,
- et, pour des montants modestes, les biens de consommation et les biens
d'équipement professionnel.
2. L'accroissement des investissements français en Nouvelle-Zélande
a) Une présence économique française significative mais encore modeste
La présence économique française en
Nouvelle-Zélande est principalement constituée d'
une
cinquantaine de sociétés
implantées dans ce pays,
principalement dans la région d'Auckland.
Ces 50 sociétés emploient environ 3 700 personnes et on
estime en outre à 1 300 les emplois supplémentaires
directement liés à l'importation de produits français.
Ces données sont à rapprocher de celles de la
communauté française en Nouvelle-Zélande
qui
rassemble 1 400 immatriculés et environ 700 non
immatriculés. 45 % de ces Français sont établis à
Auckland, 18 % à Wellington et les autres répartis dans les
principales villes comme Christchurch, Dunedin ou Palmerston North.
En termes d'effectifs, les quatre
principaux investisseurs
français en Nouvelle-Zélande sont Danone, GEC Alsthom, Axa et
Alcatel.
De manière générale, les secteurs où l'implantation
française est la plus forte sont :
les produits alimentaires, les
produits chimiques, la laine, les vins, le tourisme et les parfums et
cosmétiques
. Si le secteur bancaire est
sous-représenté (seule Indosuez est présente), les
filiales des banques françaises installées en Australie sont
également actives en Nouvelle-Zélande.
Par ailleurs, l'essentiel de nos courants d'exportation est
réalisé avec des importateurs-distributeurs (plus de 700). C'est
notamment le cas dans l'automobile, la verrerie ou le machinisme agricole. Au
total,
le nombre d'entreprises françaises qui exportent en
Nouvelle-Zélande est estimé à environ 1 500.
b) La Nouvelle-Zélande, une base d'opération attractive en direction de l'Asie ?
La récente mission du patronat français en
Nouvelle-Zélande a été, une nouvelle fois, l'occasion pour
de nombreux dirigeants néo-zélandais de souligner
l'intérêt de leur pays -comme de l'Australie- comme
tremplin
vers l'Asie.
Tout ce qui a été dit ci-dessus (Cf. A, 2.) au sujet de
l'Australie reste valable, mutatis mutandis, pour la Nouvelle-Zélande.
Certes, la Nouvelle-Zélande ne constitue, à elle seule, qu'un
marché très modeste, et de surcroît encore plus
éloigné. Ce handicap, bien sûr important, est toutefois
compensé par le fait que la Nouvelle-Zélande constitue,
avec
l'Australie, un marché unique
déjà significatif. De
surcroît, les
coûts de production
en Nouvelle-Zélande
sont inférieurs, de l'ordre de 20 à 25 %, à ceux existant
en Australie. Par ailleurs, les Néo-Zélandais
bénéficient le plus souvent d'un
préjugé
favorable dans les milieux d'affaires asiatiques
dont des
sociétés françaises peuvent tirer profit pour
accéder à certains marchés d'Asie en liaison avec des
opérateurs néo-zélandais. Enfin, l'ouverture de la
Nouvelle-Zélande aux
technologies avancées
et aux produits
nouveaux en fait un marché très adapté pour tester de
nouveaux produits et de nouvelles idées.
Pour toutes ces raisons, la Nouvelle-Zélande, qui
bénéficie d'une économie dynamique et libérale
-plus encore que l'Australie- doit, selon votre délégation,
malgré son éloignement et sa taille modeste, être
mieux
prise en considération dans la stratégie d'insertion des
entreprises françaises dans la zone Asie-Pacifique.
Au même
titre que l'Australie, elle peut constituer un trait d'union utile, au plan
économique, entre l'Europe et l'Asie et est accessible à
l'idée d'une telle approche de l'Asie par le biais du Pacifique.
Pour l'heure, la plupart des filiales néo-zélandaises
d'entreprises françaises ne disposent que d'une compétence
nationale et certaines sont directement liées aux filiales
australiennes. On relèvera toutefois l'exemple de la
société PEC NZ, filiale d'EMC, dont le bureau
néo-zélandais a compétence sur l'ensemble de la zone
Asie-Pacifique ; les succès qu'elle remporte méritent
d'être médités.
Une meilleure
utilisation du levier néo-zélandais -comme du
levier australien- pour renforcer notre présence en Asie
devrait,
selon votre délégation, être favorisée par trois
orientations :
- orienter les sociétés françaises
intéressées vers les entreprises néo-zélandaises
disposant déjà d'accès aux marchés asiatiques
-à l'exemple de ce qui a déjà été fait par
la société Danone ;
- favoriser en particulier les entreprises de haute technologie ainsi que
l'implantation de certaines PME/PMI françaises qui manquent souvent des
moyens financiers nécessaires ;
- enfin, naturellement, faciliter l'expatriation de Français en
Nouvelle-Zélande, encore peu nombreux.
*
* *
III. UNE COOPÉRATION CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE DE QUALITÉ MALGRÉ DES MOYENS RÉDUITS
A. DES RELATIONS CULTURELLES ET SCIENTIFIQUES FRANCO-AUSTRALIENNES QUI DOIVENT ÊTRE VALORISÉES
1. Une coopération culturelle et linguistique solidement établie
La coopération culturelle et scientifique
franco-australienne a traversé sans dommages importants la crise des
essais. Malgré les convictions anti-nucléaires de certains de nos
partenaires australiens, la France a, en la matière, continué
à bénéficier de la
solidité
et de la
fidélité de ses réseaux d'influence
, dans un pays
où elle offre un
modèle culturel apprécié
,
différent de celui d'une Angleterre -dont l'Australie s'éloigne-
et d'une Amérique décevante, mais plus proche que celui d'une
Asie voisine, mais culturellement totalement étrangère. Cette
attente australienne
à l'égard de la culture française
se traduit par des demandes australiennes, pourtant dignes
d'intérêt, qui dépassent largement des
disponibilités budgétaires malheureusement réduites :
l'enveloppe culturelle et scientifique consacrée par notre pays
à l'Australie est ainsi passée de 5,6 millions de francs en 1996
à
5 millions pour 1997.
- Notre
partenariat culturel
avec les grandes institutions culturelles
australiennes est solidement établi. Le succès rencontré
par les
grandes manifestations
(expositions Matisse en 1994,
" les
Fauves " en 1995 ou " Paris au XIXe siècle "
inaugurée par le Premier ministre australien le 29 novembre
dernier) témoigne de l'attrait qu'exerce toujours la culture
française.
Les échanges sont ainsi aussi nombreux qu'économiquement
possibles. Ils devraient de surcroît être favorisés par la
mise en place, à l'automne 1996, par l'ambassade de France d'un
comité franco-australien de mécènes.
A l'heure
où les crédits culturels ne cessent de diminuer et où la
demande de partenariat reste forte, votre délégation tient
à souligner ici l'
aspect très positif du mécénat
d'entreprise
dans le cadre d'une stratégie de conquête de
nouveaux marchés et de valorisation d'une présence culturelle
française rénovée.
- Dans
le domaine linguistique
, notre réseau devrait
également être renforcé et mobilisé. Notre
coopération linguistique se heurte au choix politique de l'Australie en
faveur des langues asiatiques.
La langue française a ainsi perdu son
rang de première langue étrangère enseignée, au
profit du japonais
, dans tous les Etats à l'exception du Victoria.
Les autres langues européennes -sauf, dans certains Etats, l'allemand et
l'italien- subissent le même sort.
Il semble toutefois que ce recul de la langue française soit, pour
l'heure, interrompu. En termes absolus,
le nombre d'élèves
apprenant le français croît à nouveau :
dans
l'enseignement secondaire depuis 1988 (160 000 élèves en
1988, 180 000 aujourd'hui), et dans l'enseignement supérieur depuis 1994
(le français étant à peu près au même niveau
que le japonais avec 4 500 étudiants).
Dans cette optique -et notamment dans la perspective des
Jeux olympiques de
Sydney
où la langue française, en tant que langue officielle,
doit occuper toute sa place-, la France développe une politique tendant
à multiplier les actions éducatives sous des formes diverses. On
relèvera en particulier :
- le projet franco-allemand de création d'un
" euro-campus " à Sydney
qui devrait réunir
à l'horizon 1999, en leur donnant une dimension européenne
bienvenue, le lycée français Condorcet et l'école
allemande Gutenberg qui doivent, l'un et l'autre, faire face à des
effectifs croissants et à des locaux insuffisants ; le lycée
Condorcet compte actuellement 265 élèves (dont 113
Français, 51 franco-australiens, 47 Australiens et 54 étrangers
tiers) ;
-
l'école franco-australienne de Canberra,
qui est reconnue
à la fois par le ministère de l'éducation nationale et par
les autorités australiennes ;
- aidé par la présence dans les différents Etats
australiens de
cinq attachés linguistiques
détachés, notre réseau linguistique s'appuie enfin sur
l'existence de
27 alliances françaises
(dont, il est vrai, 20
petites) qui rassemblent près de
5 800 élèves
et
constituent, pour la langue française, un atout spécifique.
- Dans
le domaine audiovisuel
, enfin, qui devrait, selon votre
délégation, constituer l'instrument majeur de notre action
culturelle extérieure à l'avenir, les données
géographiques et techniques font qu'il reste beaucoup à faire. On
relèvera toutefois que Radio France Internationale
(RFI)
diffuse
une heure par jour son service en français. Un accord conclu en 1994
entre la chaîne publique de télévision australienne
SBS
et Canal France International
(CFI)
permet d'autre part -ce
qui est naturellement très apprécié par la
communauté française- la diffusion quotidienne en français
du journal télévisé de France 2. Enfin, l'extension de la
couverture géographique doit permettre très prochainement aux
foyers résidant en Australie, et dotés des équipements
nécessaires, de recevoir un bouquet de programmes incluant
TV5
.
2. Une coopération scientifique recherchée
Les relations scientifiques franco-australiennes font
également l'objet d'une coopération bilatérale active,
recherchée et de haut niveau. La France y consacre près de la
moitié (46 %) de l'ensemble de ses crédits d'action culturelle,
scientifique et technique.
Il convient en particulier de souligner l'intérêt du
programme
FAIR
(" French australian industrial research program ")
destiné à favoriser la coopération entre organismes de
recherche et entreprises des deux pays. Créé par un accord
intergouvernemental quinquennal en mai 1991 et initialement orienté vers
l'industrie, ce programme a été étendu en 1993 aux
domaines agricoles et agroalimentaires ; il a été
renouvelé en août 1996 pour une nouvelle période de cinq
ans.
Cette initiative a donné des résultats remarquables dans des
domaines variés : télécommunications, espace,
agroalimentaire, biopharmacie. Un nouveau séminaire vient d'avoir lieu,
en mars 1997, en Australie sous l'égide du FAIR sur le thème des
ressources naturelles. Ces résultats sont d'autant plus
appréciables qu'ils ont été obtenus pour
une mise de
fonds très modeste
(0,6 million de francs).
Au-delà de ce programme, il faut également relever
l'intérêt scientifique de
recherches conjointes
dans les
domaines de l'environnement et des sciences marines, impliquant les plus grands
organismes de recherche français (INRA, CNRS, ORSTOM, CIRAD, IFREMER ou
BRGM).
Par ailleurs, une
coopération universitaire
active est mise en
oeuvre, à laquelle participent 36 établissements français.
On relèvera enfin que la coopération constante et fructueuse des
organismes de recherche français implantés dans le Pacifique sud
avec leurs équivalents australiens trouve sa traduction dans la
publication régulière de deux bulletins scientifiques.
B. LES RELATIONS CULTURELLES ET SCIENTIFIQUES FRANCO-NÉO-ZÉLANDAISES
1. La coopération culturelle et linguistique : une enveloppe modeste pour répondre à une incontestable attente
Au delà des retombées -relativement modestes en
ce domaine et qui relèvent désormais du passé- des
derniers essais nucléaires français, les échanges
culturels entre la France et la Nouvelle-Zélande souffrent surtout de
l'isolement et de
l'éloignement géographique
de ce pays et
de
l'enveloppe budgétaire très réduite
(2 millions
de francs) qui y est consacrée. Ils bénéficient en
revanche d'atouts non négligeables dans la mesure où ils
répondent, du côté néo-zélandais, à
une attente incontestable
et où l'intérêt de ce pays
pour la culture française est toujours aussi prononcé.
- Notre
partenariat culturel
doit, dans ce contexte, être
particulièrement créatif. Il doit aussi permettre
d'améliorer l'image de la France pour mieux la vendre. Les idées,
parfois négatives, véhiculées d'une France colonisatrice
et polluante doivent céder la place à celles d'une France
ouverte, innovatrice et compétente.
C'est, à titre d'exemple, dans cet esprit que l'événement
culturel majeur, sur le plan local, que constituera en 1998 l'ouverture du
musée de Nouvelle-Zélande pourrait donner lieu à une
exposition de tableaux français du XIXe siècle tandis que
l'éclairage extérieur du musée pourrait être
confié à un artiste français.
- Sur
le plan éducatif
, on constate, là aussi,
malgré une certaine amélioration en 1996,
une
désaffection relative à l'égard de la langue
française.
Ce phénomène a été
accentué par la forte réduction des subventions publiques aux
établissements scolaires et universitaires néo-zélandais
qui a conduit les responsables à réduire ou à
éliminer les enseignements qui n'ont qu'un moindre pouvoir d'attraction
économique. Ainsi, le nombre d'élèves et
d'étudiants néo-zélandais qui apprennent le
français est passé, en une dizaine d'années, de
35 000
en 1985
à à peine plus de
26 000 en 1995.
Ce constat peut toutefois être nuancé par le fait que le
français reste enseigné dans six des sept universités
néo-zélandaises, que 10 % des enfants néo-zélandais
apprennent le français, et que l'engouement pour la langue japonaise
semble s'être davantage réalisé au détriment de
l'allemand que du français. En revanche, un phénomène plus
récent conduit un nombre croissant d'étudiants
néo-zélandais à privilégier désormais
l'espagnol, l'Amérique latine apparaissant comme un partenaire
économique naturel.
L'action linguistique française en Nouvelle-Zélande s'appuie
d'autre part sur un
réseau de 13 alliances françaises
réparties sur l'ensemble du territoire. Trois d'entre elles ont des
activités enseignantes (Auckland, Wellington et Christchurch) et
l'Alliance scolarise chaque année environ 900 étudiants. La
fédération des alliances françaises, avec le soutien du
" Fonds d'amitié France-Nouvelle-Zélande "
(créé en 1991 à la suite du règlement de l'affaire
du Rainbow Warrior), permet de surcroît chaque année des voyages
d'étudiants très positifs entre les deux pays.
- Sur le
plan audiovisuel
enfin, il était très important
d'ouvrir la Nouvelle-Zélande aux images et informations
françaises (ni RFI, ni RFO ne parviennent en effet dans ce pays). Des
progrès sensibles sont à cet égard actuellement accomplis
: les
programmes de CFI et de TV5
sont désormais repris par
plusieurs chaînes de télévision et par certains
cablo-opérateurs. Cette présence de programmes français
dans le paysage audiovisuel néo-zélandais ouvre des perspectives
nouvelles à notre coopération culturelle.
2. Des échanges scientifiques limités mais renforcés
Pour limitée qu'elle soit, la coopération
scientifique bilatérale s'est cependant renforcée dans la
dernière période.
Désormais plus structurés, les échanges en la
matière font l'objet de projets à long terme de trois à
cinq ans et concernent
chaque année une quinzaine de chercheurs
dans des domaines aussi variés que la géologie terrestre et
marine, l'Antarctique, l'agriculture ou la forêt. Ils confirment
l'intérêt pour les Néo-Zélandais de notre recherche
et notre technologie, ainsi que des enseignements tirés par nos
scientifiques de trois siècles de présence française dans
le Pacifique.
La France s'efforce pour sa part de privilégier dans ce cadre les
séjours de jeunes chercheurs et les missions scientifiques de haut
niveau.
*
* *
LES CONCLUSIONS DE LA DÉLÉGATION
Votre délégation n'a naturellement pas
l'ambition, à l'issue d'un déplacement aussi bref aux antipodes
-et quels qu'aient pu être l'intérêt et la densité
des contacts de toute nature qu'elle a pu nouer à cette occasion-, de
tirer des conclusions définitives sur l'évolution de l'Australie
et de la Nouvelle-Zélande et sur la politique de la France dans la
région.
Elle a toutefois eu le sentiment que sa
mission
sur place a
été
particulièrement opportune
et a pleinement
atteint son objectif. L'accueil particulièrement chaleureux et la
qualité des entretiens qui lui ont été
réservés, au plus haut niveau, tant à Canberra et à
Sydney qu'à Wellington, l'ont convaincue de la volonté des
autorités australiennes et néo-zélandaises
d'
entériner la " normalisation " de leurs relations avec
Paris
. La démarche de la délégation
sénatoriale, porteuse de surcroît de messages de M. Alain
Juppé, Premier ministre, à ses deux homologues australien et
néo-zélandais, aura ainsi constitué le
premier signal
politique fort
donné, du côté français, d'une
volonté de relance,
dans l'intérêt commun,
des
relations bilatérales
entre la France et chacun des pays riverains
de la mer de Tasmanie.
C'est dans cette perspective qu'il lui paraît utile de formuler ici, en
guise de conclusion, quelques observations de nature à éclairer
le Sénat, et, à travers lui, les autorités
françaises, les opérateurs économiques et l'opinion
publique elle-même.
*
* *
1. L'attrait de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, pays " occidentaux " du Pacifique
Les deux anciennes colonies britanniques des antipodes que
constituent l'Australie et la Nouvelle-Zélande apparaissent,
de prime
abord, bien différentes,
souvent rivales, à certains
égards opposées. Situées à
1 600 kilomètres l'une de l'autre, l'Australie est, à
elle seule, un continent, le sixième pays le plus vaste du monde, tandis
que la Nouvelle-Zélande, " petite note en bas de page " de
la
carte du Pacifique, est trente fois plus petite, six fois moins peuplée
et jalouse de son identité propre, qui passe parfois par la
distanciation de l'autre.
Ainsi, sur le
plan économique,
la Nouvelle-Zélande,
devenue un véritable laboratoire du libéralisme
économique, jouit aujourd'hui, après une vague de réformes
virulentes, d'une économie assainie avec un taux de chômage
réduit à 6,5 % (deux points de moins qu'en Australie) et se pose
volontiers en modèle de gestion économique moderne.
De même, en matière diplomatique, les
relations avec les
Etats-Unis
, étroites pour l'Australie -le Président Clinton y
a effectué, en novembre dernier, sa première visite à
l'étranger après sa réélection-, restent
marquées par la politique antinucléaire de Wellington qui a rendu
caduc le traité de l'ANZUS.
Les
tensions transtasmanes
sont enfin fréquentes, y compris -bien
souvent- au plus haut niveau, et les
particularismes nationaux
sont
souvent plus clairement exposés que les similitudes.
L'analyse à laquelle votre délégation s'est livrée
la conduit toutefois à souligner qu'au-delà de ces réelles
différences,
les points communs l'emportent
sur les
rivalités, les similitudes sont plus profondes que les oppositions et
les divergences entre ces deux partenaires incontournables s'apparentent
davantage à des querelles de famille.
- L'Australie et la Nouvelle-Zélande relèvent d'abord, l'une et
l'autre, d'
une
culture européenne commune
qui les
réunit, tout en les rendant particulièrement proches de nous. Si
l'ancien Premier ministre australien M. Paul Keating souhaitait insérer
pleinement l'Australie en Asie, le chef du gouvernement malaisien rappelait
aussitôt que l'Australie est culturellement européenne et M. John
Howard est aujourd'hui plus prudent en estimant que son pays
" n'a
pas
à choisir entre son histoire et sa géographie ".
L'Australie et la Nouvelle-Zélande, pays occidentaux du Pacifique, sont
ainsi appelées à être le " trait d'union "
naturel entre l'Europe et la région Asie-Pacifique. Cette vocation n'est
pas toujours facile à assumer. C'est néanmoins un atout majeur
pour ces deux joyaux du Pacifique qui préservent jalousement leur
culture et leur mode de vie et s'adonnent à des passions communes.
- Les deux pays sont de surcroît confrontés à des
problèmes largement identiques et à des
défis
politiques communs
. Les exemples abondent. La
question de l'avenir de la
monarchie
et de l'avènement de la République est ainsi
posée des deux côtés de la mer de Tasmanie : si le Premier
ministre australien est connu pour ses convictions monarchistes, il a
lui-même annoncé la convocation pour la fin de l'année
d'une convention constitutionnelle ; le processus est lancé et l'opinion
est majoritairement favorable à la République ; chacun admet que,
tôt ou tard, le pays deviendra une République. Et, si l'Australie
saute le pas, il est très probable que la Nouvelle-Zélande suivra.
De même, si la question aborigène -en Australie- et le
problème maori -en Nouvelle-Zélande- se posent aujourd'hui en
termes différents, la
situation des communautés
indigènes
constitue dans les deux pays un problème important
et
l'interrogation sur l'identité nationale
n'est pas sans
similitudes. Elle se trouve aussi liée, dans ces deux pays faiblement
peuplés, à la
politique d'immigration,
notamment d'origine
asiatique, avec toutes les conséquences qui en résultent et les
réactions qu'elle suscite, notamment en Australie.
- Enfin, sur
le plan économique,
les deux pays ont connu,
à des degrés et des rythmes il est vrai différents, une
évolution comparable. Traditionnellement très
réglementés, ils se sont lancés, l'un et l'autre, à
l'initiative -dans les deux cas- de gouvernements travaillistes, dans une
politique active de libéralisation,
de privatisations et de
déréglementation.
De surcroît, sur le plan bilatéral, l'Australie et la
Nouvelle-Zélande sont liées, depuis 1983, par un
accord
économique et commercial, dénommé
CER
(" closer economic relations "), qui abolit l'essentiel
des
barrières douanières entre les deux pays. Les deux pays ont ainsi
fortement développé leurs échanges commerciaux et sont
engagés sur la voie d'une
intégration plus profonde de leurs
économies.
L'Australie et la Nouvelle-Zélande peuvent donc, à bien des
égards, être considérées comme un
marché
unique
substantiel, ouvert et solvable, par les opérateurs
économiques étrangers, et notamment français. Se trouve
ainsi justifiée
une approche
, non pas identique, mais
simultanée et
globale
de la part des partenaires européens
de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande.
Une telle démarche devrait être d'autant plus justifiée
dans les années à venir que les
relations entre Canberra et
Wellington
sont aujourd'hui entrées
dans une phase
particulièrement positive
. Ainsi que l'a illustré la
récente visite de M. John Howard en Nouvelle-Zélande, il existe
aujourd'hui -ce qui ne fut pas toujours le cas, loin s'en faut, dans le
passé- un climat de confiance mutuelle entre les deux Premiers
ministres. Le principe de sommets annuels bilatéraux a été
retenu et il faut en attendre, alors que les coalitions au pouvoir dans les
deux pays sont à nouveau de même sensibilité politique, une
intensification des relations transtasmanes.
*
* *
2. Des relations franco-australiennes et franco-néo-zélandaises, politiquement assainies, qui doivent être prolongées par une présence économique française accrue
C'est dans ce contexte qu'
une page nouvelle
des
relations franco-australiennes et franco-néo-zélandaises s'ouvre
aujourd'hui.
- Le
climat politique
bilatéral est aujourd'hui redevenu
très favorable.
La crise, réelle, liée aux derniers
essais nucléaires
français, est bel et bien terminée.
Le dossier est
aujourd'hui classé, la page tournée.
Il est
révélateur de constater qu'aucun des interlocuteurs
gouvernementaux de votre délégation, qu'ils soient australiens ou
néo-zélandais, n'y a fait directement référence.
Cela ne signifie pas que cet épisode -qui a soumis nos compatriotes sur
place et, singulièrement, nos représentations diplomatiques
à rude épreuve- soit oublié. Au demeurant, la
sensibilité antinucléaire reste dans ces pays extrêmement
vive, particulièrement en Nouvelle-Zélande. Mais les questions
nucléaires ne font plus obstacle à la qualité et à
l'intensité des relations bilatérales avec la France. La
normalisation
de nos rapports avec Canberra et Wellington est
aujourd'hui complète. Une phase nouvelle est ouverte.
Elle devait d'abord se traduire par
une reprise des visites et rencontres
bilatérales.
La mission sénatoriale en a donné le
signal. Elle a été rapidement suivie par celle d'une importante
délégation de chefs d'entreprises français conduite par
MM. Jean Gandois et Claude Bébéar, ainsi que par une
délégation du groupe d'amitié France-Australie de
l'Assemblée nationale. Le dialogue politique bilatéral est ainsi
renoué. Il doit être maintenu et prolongé. C'est dans cet
esprit que le principe d'une visite en Australie et en Nouvelle-Zélande
du ministre français des Affaires étrangères est d'ores et
déjà retenu, et vivement souhaité tant à Canberra
qu'à Wellington. Il paraît à votre délégation
particulièrement souhaitable que la date de cette visite soit
prochainement arrêtée et que ce déplacement du chef de la
diplomatie française puisse se concrétiser rapidement.
Ce nouveau chapitre des relations bilatérales sera l'occasion de
réaffirmer
la place spécifique de la France dans le Pacifique
sud
et de développer à cet égard notre dialogue
politique avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Nos partenaires y
sont tout à fait disposés et les interlocuteurs australiens et
néo-zélandais de votre délégation se sont, à
plusieurs reprises, félicités du rôle de la France dans la
région. Si cette position n'est pas toujours dénuée
d'ambiguïtés, il faut se réjouir de la
convergence de
vues entre la France, l'Australie et la Nouvelle-Zélande sur la
stabilité du Pacifique sud
et du soutien de Canberra et de
Wellington au processus des accords de Matignon dans la perspective du
référendum qui doit se dérouler, en 1998, en
Nouvelle-Calédonie. L'aide française aux pays de la région
est d'autant plus appréciée que les Etats-Unis y sont moins
présents et que l'aide financière assumée par Canberra et
Wellington pèse lourdement sur leurs budgets nationaux respectifs.
Cette phase nouvelle des relations franco-australiennes sera enfin d'autant
plus importante qu'elle se développera à l'approche des
Jeux
olympiques de l'an 2000
qui placeront Sydney au centre de
l'actualité mondiale. Il sera, à cette occasion, important de
veiller au maintien du rôle -officiel- de la langue française et
d'apporter un soutien continu aux entreprises françaises candidates
à participer à la préparation des Jeux olympiques.
Il faut enfin relever -le ministre australien des Affaires
étrangères y a particulièrement insisté devant la
délégation sénatoriale- l'importance que les
autorités australiennes attachent à la suppression de
l'obligation des visas.
Le dossier est complexe et s'inscrit
naturellement dans le cadre d'une politique d'ensemble de la France en la
matière. Mais la lourdeur du système actuel, son
intérêt limité (au moins pour les visas de court
séjour), ses retombées politiques, économiques et
touristiques conduisent votre délégation à demander au
gouvernement
d'examiner la possibilité d'assouplir la
réglementation actuelle
. Il s'agirait d'un geste politique fort qui
serait particulièrement apprécié par nos partenaires.
- Cette nouvelle donne politique doit enfin permettre de donner
un
élan supplémentaire aux relations économiques
bilatérales.
Celles-ci, il faut le relever et s'en féliciter, n'ont été
que marginalement affectées par la crise des essais nucléaires.
Les échanges commerciaux et la présence économique
française sur place ont continué à se développer
durant cette période, tant en Australie qu'en Nouvelle-Zélande,
ainsi que l'a illustré, au plus fort de la crise, le rachat par Axa de
51 % du capital de National Mutual, le second assureur australien. De
même, la dernière visite du président du CNPF a
souligné symboliquement la solidité des rapports entre les
milieux d'affaires des trois pays.
Mais il va de soi que
le mouvement
en cours
doit être
poursuivi, amplifié et soutenu
, conformément à
l'esprit du discours prononcé l'an dernier par le Président de la
République à Singapour. Beaucoup reste à faire à
l'heure où la présence française dans la région
Asie-Pacifique constitue une priorité tant pour notre diplomatie que
pour notre politique économique et où nos
parts de
marché
dans ces pays restent
anormalement faibles
.
Il convient, à cet égard, selon votre délégation,
d'examiner, au cas par cas, de manière approfondie, la
possibilité pour l'Australie et, dans une moindre mesure, pour la
Nouvelle-Zélande de constituer des
têtes de pont de la
présence économique française dans la région
Asie-Pacifique.
Nos partenaires australiens et néo-zélandais y sont prêts
et l'appellent même de leurs voeux. Quelques grandes entreprises
françaises -notamment Accor et Axa- ont déjà adopté
cette stratégie avec succès. D'autres ont obtenu des contrats
importants en Asie à partir de leurs implantations australiennes.
Il est naturellement nécessaire, pour qu'une telle démarche soit
couronnée de succès, de disposer d'abord, en Australie et en
Nouvelle-Zélande même, d'un marché solide. Mais, dès
lors que cette condition est remplie -et le dynamisme des économies
locales offre à cet égard de réelles opportunités-,
de nombreux arguments favorables
méritent d'être pris en
considération : des conditions d'implantation très avantageuses,
des coûts d'installation très inférieurs à Hong-Kong
ou Singapour, une communauté culturelle qui favorise l'expatriation, un
décalage horaire très limité avec les grands
marchés asiatiques, une image souvent favorable des Australiens et des
Néo-Zélandais en Asie ...
Pour toutes ces raisons, l'Australie et la Nouvelle-Zélande,
malgré leur éloignement, peuvent constituer des
tremplins
utiles
pour renforcer notre présence en Asie et méritent
d'être, en tout cas, davantage prises en considération dans la
stratégie d'insertion des entreprises françaises dans la zone
Asie-Pacifique.
*
* *
EXAMEN EN COMMISSION
Le présent rapport a été examiné
par la commission des Affaires étrangères, de la défense
et des forces armées au cours de sa réunion du 26 mars 1997.
A l'issue de l'exposé de M. Xavier de Villepin, président, M.
André Rouvière, après avoir estimé que la mission
sénatoriale avait pleinement atteint ses objectifs, s'est
inquiété des retombées sociales de la politique
économique ultra-libérale conduite notamment en
Nouvelle-Zélande. Il a estimé que la précarisation d'une
partie de la population devait conduire à nuancer les jugements positifs
portés sur les résultats de la politique suivie, notamment du
point de vue du chômage. S'agissant des réactions
antinucléaires, il a indiqué qu'elles lui étaient apparues
plus vives, et de nature plus passionnelle, en Nouvelle-Zélande qu'en
Australie. Sur le plan international, il a souligné que l'Australie et
la Nouvelle-Zélande avaient, malgré des moyens modestes,
notamment sur le plan militaire, l'ambition de jouer un rôle sur la
scène internationale et estimé que les Européens devaient
développer leurs relations avec ces pays.
M. Jean-Luc Bécart a, à son tour, souligné que les
résultats obtenus par l'Australie et par la Nouvelle-Zélande sur
le plan macroéconomique ne devaient pas faire oublier les
réalités économiques et sociales pour les couches les plus
défavorisées de la population.
M. André Boyer, après avoir rappelé le sauvetage
spectaculaire de concurrents français du " Vendée
Globe " par la Marine australienne, s'est félicité du
complet rétablissement des relations militaires franco-australiennes.
S'agissant de l'organisation des Jeux olympiques de Sydney, il a
souligné que de nombreux spectateurs pourraient être
intéressés, à cette occasion, par des circuits
touristiques dans le Pacifique Sud et estimé que des dispositions
devraient être prises pour permettre aux territoires français de
la région, en premier lieu la Nouvelle-Calédonie, de
bénéficier de ces retombées touristiques potentielles. En
ce qui concerne le processus des accords de Matignon, il a enfin marqué
l'approbation de ce processus par l'Australie et la Nouvelle-Zélande et
souligné en conséquence l'intérêt de poursuivre un
dialogue approfondi avec ces deux pays dans la perspective notamment du
référendum en Nouvelle-Calédonie.
M. Maurice Lombard a alors relevé que l'Australie et la
Nouvelle-Zélande paraissaient ressentir un certain isolement par rapport
au monde européen et occidental dont ils partageaiernt la culture. Ce
sentiment contribuait à expliquer leur appréciation favorable de
la présence française dans le Pacifique Sud alors que leurs
relations avec la Grande-Bretagne et, dans une moindre mesure, avec les
Etats-Unis, s'étaient distendues. Il a ensuite évoqué les
politiques d'immigration australienne et néo-zélandaise et
notamment les questions posées par l'augmentation des immigrés
d'origine asiatique. S'agissant des populations indigènes, M. Maurice
Lombard a souligné l'importance de la question des droits historiques
des Aborigènes en Australie, tandis que le problème des Maoris se
posait en termes différents en Nouvelle-Zélande, notamment en
raison de l'influence du parti " New Zealand First ", en
partie
maori, qui était désormais associé aux
responsabilités gouvernementales. Evoquant enfin la révolution
économique libérale néo-zélandaise, M. Maurice
Lombard en a souligné le caractère systématique, notamment
dans le domaine agricole et dans le secteur administratif lui-même. Il a
à cet égard estimé préoccupantes les
conséquences de cette politique ultra-libérale sur l'enseignement
secondaire et sur les risques de diminution de la qualité de
l'enseignement qui en résultaient.
MM. Maurice Lombard et Xavier de Villepin, président, ont alors
constaté, pour le regretter, que le français était en
perte de vitesse dans la région. M. Xavier de Villepin,
président, tout en rappelant le rôle joué par de nombreuses
Alliances françaises, a estimé nécessaire de mettre
désormais l'accent sur les moyens les plus modernes de notre action
culturelle extérieure, notamment sur le plan audiovisuel.
En réponse à M. Michel Caldaguès qui s'interrogeait sur la
possibilité de renforcer l'influence européenne dans la
région par des relations plus denses avec l'Australie et la
Nouvelle-Zélande, M. Xavier de Villepin, président, a
souligné que les interlocuteurs de la délégation avaient
manifesté un très vif intérêt pour
l'évolution de la construction européenne -notamment la monnaie
unique- et marqué leur approbation de la présence
française dans le Pacifique Sud. Il a regretté les
difficultés survenues, à propos d'une clause sur les droits de
l'homme, dans les négociations d'un accord-cadre entre l'Union
européenne et l'Australie.
MM. Marcel Debarge, Maurice Lombard et Xavier de Villepin, président,
ont enfin évoqué les relations sino-australiennes pour souligner
à la fois la volonté de l'Australie de développer ses
relations avec la Chine et son inquiétude, non avouée, devant une
éventuelle expansion militaire chinoise favorisée par des
capacités aéronavales accrues.
La commission a alors autorisé la publication du présent rapport
d'information.