Rapport n° 428 (2020-2021) de MM. Pierre OUZOULIAS , sénateur et Pierre HENRIET, député, fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, déposé le 4 mars 2021

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N° 3944

N° 428

ASSEMBLÉE NATIONALE

SÉNAT

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

SESSION ORDINAIRE 2020 - 2021

Enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale

Enregistré à la présidence du Sénat

le 4 mars 2021

le 4 mars 2021

RAPPORT

au nom de

L'OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

sur

Promouvoir et protéger une culture partagée de l'intégrité scientifique

PAR

M. Pierre HENRIET, député, et
M. Pierre OUZOULIAS, sénateur

Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale

par M. Cédric VILLANI,

Président de l'Office

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Gérard LONGUET

Premier vice-président de l'Office

Composition de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques
et technologiques

Président

M. Cédric VILLANI, député

Premier vice-président

M. Gérard LONGUET, sénateur

Vice-présidents

M. Didier BAICHÈRE, député

Mme Sonia de LA PRÔVOTÉ, sénatrice

M. Jean-Luc FUGIT, député

Mme Angèle PRÉVILLE, sénatrice

M. Patrick HETZEL, député

Mme Catherine PROCACCIA, sénatrice

DÉPUTÉS

SÉNATEURS

M. Julien AUBERT

M. Philippe BOLO

Mme Émilie CARIOU

M. Jean-François ELIAOU

Mme Valéria FAURE-MUNTIAN

M. Claude de GANAY

M. Thomas GASSILLOUD

Mme Anne GENETET

M. Pierre HENRIET

M. Antoine HERTH

M. Jean-Paul LECOQ

M. Gérard LESEUL

M. Loïc PRUD'HOMME

Mme Huguette TIEGNA

Mme Laure DARCOS

Mme Annie DELMONT-KOROPOULIS

M. André GUIOL

M. Ludovic HAYE

M. Olivier HENNO

Mme Annick JACQUEMET

M. Bernard JOMIER

Mme Florence LASSARADE

M. Ronan Le GLEUT

M. Pierre MÉDEVIELLE

Mme Michelle MEUNIER

M. Pierre OUZOULIAS

M. Stéphane PIEDNOIR

M. Bruno SIDO

SOMMAIRE

___

Pages

SYNTHÈSE 9

SAISINE 13

INTRODUCTION 15

PREMIÈRE PARTIE : L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE EN FRANCE, UNE AUTORÉGULATION EXERCÉE PAR LES ACTEURS DE LA RECHERCHE 23

I. LES SOURCES ENCADRANT LES PRINCIPES DE L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE 23

1. La coopération européenne en faveur de l'intégrité scientifique 24

a. La « Charte européenne du chercheur. Code de conduite pour le recrutement des chercheurs » (C&C) (Commission européenne, 2005) 24

b. Le « Code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche » ou « European Code of Conduct for Research Integrity » (European Science Foundation & All European Academies, 2011 et révision en 2017) 25

c. Le « Guide ENRIO. Recommandations pour l'investigation des méconduites en recherche », ou « ENRIO Handbook : Recommandations for the Investigations of Research Misconduct » (ENRIO, 2019) 26

d. La Déclaration de Bonn, « The Freedom of Scientific Research » (2020) 27

2. L'appréhension internationale sous l'égide des pays membres de l'OCDE 28

a. Frédéric Sgard & Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l'élaboration de politiques cohérentes » (Forum mondial de la science de l'OCDE, 2007) 28

b. La Déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche ou « Singapore Statement on Research Integrity » (septembre 2010) 29

c. Le Manifeste de Hong Kong, ou « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers: Fostering Research Integrity » (septembre 2017) 30

3. La construction d'un corpus national 31

a. Le rapport de Jean-Pierre Alix, « Renforcer l'intégrité de la recherche en France. Propositions de prévention et de traitement de la fraude scientifique » (septembre 2010) 31

b. La « Charte nationale de déontologie des métiers de la recherche » (janvier 2015) 32

c. Le rapport de Pierre Corvol, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte d'intégrité scientifique » (juin 2016) 33

d. La circulaire du 15 mars 2017 du secrétaire d'État Thierry Mandon, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche (mars 2017) 38

e. Le « Vade-mecum intégrité scientifique » (Groupe de travail Corvol, mars 2017) 38

f. Le guide « Pratiquer une recherche intègre et responsable » (Comité d'éthique du CNRS - COMETS, mars 2017) 39

g. Le « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'IS » (ResInt, 2018) 39

h. La « Charte de déontologie et d'intégrité scientifique de l'Agence nationale de la recherche » (ANR, 2018) 40

II. LES ACTEURS DE L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE 42

1. Des acteurs institutionnels au rôle limité 42

a. L'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) et le Conseil français de l'Intégrité scientifique (CoFIS) 43

b. Le référent intégrité scientifique, représentant de l'intégrité scientifique 48

2. Les réseaux informels des acteurs institutionnels 54

a. La conférence des signataires de la charte de déontologie des métiers de la recherche 54

3. Les acteurs non institutionnels de la régulation de la science 55

a. Le ResInt, réseau de mutualisation des référents intégrité scientifique 56

b. PubPeer, journal club et plateforme de signalements 56

c. Retraction Watch, base de données de rétractation d'articles 59

DEUXIÈME PARTIE : APPRÉHENDER LES MÉCONDUITES SCIENTIFIQUES 63

I. UNE NOMENCLATURE INTERNATIONALE ET COMMUNE DES MÉCONDUITES 63

1. Classement par domaines 63

a. Les Fraudes scientifiques génériques ou « FFP » : fabrication, falsification, plagiat 64

b. Les pratiques douteuses de recherche sur les données 66

c. Les pratiques de recherche inappropriées 66

d. Les pratiques douteuses liées aux publications 66

e. Les conflits d'intérêts 68

f. Autres pratiques douteuses de recherche 69

2. L'importance du critère d'intentionnalité 69

3. Classement par niveaux de gravité 72

II. TRAITER LES CAS DE MÉCONDUITE SCIENTIFIQUE 74

1. Réception et recevabilité du signalement 76

2. Recevabilité du signalement : instruction ou rejet 77

3. L'instruction à proprement parler 77

4. La constitution d'une commission ou d'un comité d'instruction 79

5. Décision du dirigeant et droit du travail 80

6. La faculté de recours ouverte au chercheur incriminé 82

7. La possibilité d'une réhabilitation du chercheur 84

TROISIÈME PARTIE : DÉVELOPPER UNE “CULTURE PARTAGÉE DE L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE” 89

I. FORMER À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE : UN EFFORT TRANSGÉNÉRATIONNEL 89

1. Former les doctorants 90

2. Former les chercheurs et les encadrants 93

3. Le conseil préventif 94

4. Développer la recherche autour de l'intégrité scientifique 94

II. DÉVELOPPER ET SOUTENIR UN ENVIRONNEMENT DE RECHERCHE FAVORABLE À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE 97

QUATRIÈME PARTIE : LES AVANCÉES OBTENUES EN MATIÈRE D'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE DANS LA LPR 111

I. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE PROGRAMMATION DE LA RECHERCHE RELATIVES À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE ET LEURS IMPLICATIONS. 112

II. VERS UN ORGANE INDÉPENDANT DÉDIÉ À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE 115

RECOMMANDATIONS 117

EXAMEN DU RAPPORT PAR L'OFFICE 119

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LES RAPPORTEURS 135

RÉFÉRENCES PRINCIPALES 139

SYNTHÈSE

Le sujet de l'intégrité scientifique a connu un regain d'intérêt en France avec la publication en 2016 d'un rapport remarqué sur la question par le P r Pierre Corvol, à la demande du secrétaire d'État chargé de la Recherche et de l'Enseignement supérieur, Thierry Mandon. Ce rapport, qui faisait suite à un travail de terrain mené par des acteurs historiques depuis la fin des années 1990, a donné lieu à la création de l'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) , d'une part, promoteur et animateur de l'intégrité scientifique en France, et des référents intégrité scientifique (RIS) , d'autre part, garants au sein des établissements et institutions d'enseignement et de recherche, de la diffusion et de la protection de l'intégrité scientifique qui fonde la confiance dans l'État, le monde de la recherche et la société.

En 2019, dans un contexte d'affaires de « méconduites scientifiques » particulièrement médiatisées, la Commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat a saisi l'OPECST afin d'« éclaire[r] la représentation nationale sur les choix de politique publique à opérer en ce domaine afin de permettre à la France d'assurer pour sa recherche et ses chercheurs un haut niveau d'exigence en matière d'intégrité scientifique. ». La saisine faisait valoir que les méconduites scientifiques portent atteinte au monde de la recherche dans son ensemble et que la réponse à ces comportements n'est pas adéquate car ils sont trop souvent traités en interne, sur la base de méthodes, sanctions et critères de transparence non uniformes.

Les rapporteurs ont fait le choix de ne pas se limiter à épingler les mauvaises pratiques, qui ne sont qu'une illustration a contrario et réductrice de l'intégrité scientifique, alors même que l'immense majorité des chercheurs français est vertueuse. Pour répondre à cette confusion et participer à une caractérisation positive de l'intégrité scientifique, la mission des rapporteurs s'est fixée deux objectifs : la valorisation d'une culture partagée de l'intégrité scientifique et la mise en évidence du problème systémique, inhérent au monde de la recherche, qui tend à favoriser les méconduites scientifiques . Les critères d'évaluation de la recherche, la course à la publication scientifique ou encore la pression à la production de résultats positifs sont autant de facteurs qui sont susceptibles de provoquer certains comportements peu intègres.

La mission propose aussi d'actionner des leviers opérants, permettant de rénover les critères d'évaluation et de créer un environnement de recherche favorable à l'intégrité scientifique.

Fort de ce constat, le rapport se déploie en quatre parties.

La première partie, L'intégrité scientifique en France, une autorégulation exercée par les acteurs de la recherche , vise à présenter les différentes sources qui ont permis la construction et le développement de la notion d'intégrité scientifique. Elles émanent des acteurs du monde la recherche, et résultent de travaux de réflexion et de concertation effectués au niveau national, mais également européen, ou international. L'analyse de ce corpus permet de mettre en évidence certains concepts cardinaux comme ceux de « fiabilité », « respect », « honnêteté », « responsabilité » (inscrits dans le code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche). La première partie a également pour objet d'identifier les acteurs institutionnels et non institutionnels, ces derniers tenant une place de choix dans la définition et la promotion de l'intégrité scientifique.

La deuxième partie, Appréhender les méconduites scientifiques , permet d'identifier une typologie des méconduites observées et leur traitement. Les auditions ont en effet révélé que les critères retenus actuellement étaient opérants, que la procédure d'instruction des méconduites était déjà solide et en voie constante d'amélioration . La généralisation d'une judiciarisation des affaires de méconduite n'apparaît pas souhaitable pour la majorité des acteurs. Néanmoins, un travail d'uniformisation est souhaitable. Il convient également de garantir le respect du contradictoire lors de l'instruction d'une affaire de méconduite. Dans cette perspective, la question de l'assistance, voire la possibilité de représentation du chercheur mis en cause se pose. Il apparaît également nécessaire de questionner la pertinence d'une forme de recours face aux sanctions prononcées par les instances disciplinaires et d'envisager la réhabilitation du chercheur sanctionné.

La troisième partie, Développer une « culture de l'intégrité scientifique » fait état des nombreuses initiatives locales et nationales, qui assurent une diffusion toujours plus large et transgénérationnelle des principes de l'intégrité scientifique. Pour autant, la mission souligne que le déploiement de cette culture commune ne peut fleurir sans le développement d'un environnement de recherche qui lui est favorable. Ceci demandera aux opérateurs de recherche et à leur tutelle une réforme ambitieuse et courageuse de certains modes de fonctionnement délétères , reconnus pour être la cause principale des manquements scientifiques.

Les rapporteurs formulent une série de dix recommandations qui viennent à la fois fortifier les préconisations énoncées dans les différents guides européens et à proposer des mesures qui traduisent la volonté d'être précurseur en matière d'intégrité scientifique . Les actions proposées auront pour effet de participer au rétablissement de la confiance à l'égard du monde scientifique et de renforcer la légitimité de la recherche française sur la scène internationale.

Ces recommandations touchent à la fois à la définition de l'intégrité scientifique (1) ; au renforcement des acteurs institutionnels et non institutionnels (3, 5) ; à une meilleure articulation entre le Hcéres, le CoFIS et l'OFIS (2, 4, 9) ; à la consolidation de certains aspects de l'instruction des méconduites scientifiques (6) ; à l'extension de la formation en intégrité scientifique (7) ; à l'éclosion d'une culture commune et positive de l'intégrité scientifique au travers de la science ouverte et d'une réforme nécessaire de l'évaluation de la recherche, afin de lever l'imprécation de la course à la publication (8 et 10).

Si certaines de ces recommandations portent sur des améliorations locales ou nationales spécifiques, comme l'indépendance de l'OFIS, le statut du référent intégrité scientifique ou la nécessaire extension de la formation à l'intégrité scientifique au-delà du cercle des doctorants, les rapporteurs insistent sur deux points fondamentaux. D'abord, rappeler que l'autorégulation, au travers des nombreux groupes de travail, guides et chartes, a permis de développer en quelques années un cadre efficace et reconnu pour garantir l'intégrité scientifique . C'est pourquoi, si l'archivage des données récoltées par le référent intégrité scientifique ou la réhabilitation du chercheur soupçonné à tort peuvent encore se voir apporter des améliorations notables, les recommandations ne doivent pas se substituer à la réflexion active, menée sur le terrain par les groupes de travail du CoFIS, par le ResInt ou par certaines universités-fleurons et aux pistes explorées par l'épistémologie. En second lieu, le rapport insiste sur la nécessité de décentrer le regard, de ne plus voir les chercheurs comme les seuls maillons faillibles, pour jauger tous les acteurs de la recherche, en particulier les opérateurs, financeurs, éditeurs et évaluateurs, et au premier plan leur tutelle, le MESRI, afin de les enjoindre à construire, tous ensemble, un environnement propice au renforcement de l'intégrité scientifique . Un tel environnement nécessite une remise en question du système actuel d'évaluation du monde de la recherche , autant qu'une consolidation de la politique de science ouverte , amorcée depuis 2018, dans le cadre du Plan national pour la science ouverte.

Ainsi, l'un des principes qui préside à la pratique de l'intégrité scientifique en France est celui de la mutualisation . Le corpus de « droit mou » qui encadre l'intégrité scientifique en France et en Europe suit ce modèle vertueux du partage des bonnes pratiques , afin d'alimenter une réflexion commune sur ce qui fonctionne, non pas en théorie, mais concrètement, sur le terrain. Forts de ce principe, les rapporteurs ont souhaité à la fois entendre les témoignages des acteurs de l'intégrité scientifique, qui participent à la diffusion d'une culture commune de l'intégrité scientifique, et s'approprier les rapports, guides, et codes nationaux comme internationaux, qui encadrent partiellement l'intégrité scientifique à la française. Les auditions ont permis de faire émerger un besoin et une attente de la part des acteurs de la recherche, demandeurs d'une inscription dans la loi de certains principes d'intégrité scientifique . Les rapporteurs sont parvenus à faire intégrer dans la loi de programmation de la recherche pour les années 2021-2030 (LPR) certaines dispositions importantes qui procèdent directement de leur travail d'enquête et d'auditions. Elles figurent dans la quatrième et dernière partie du rapport, Les avancées obtenues en matière d'intégrité scientifique dans la LPR :

- La définition de l'intégrité scientifique inscrite à l'article L. 211-2 du code de la recherche précise que cette valeur permet de garantir le caractère honnête et scientifiquement rigoureux de l'activité de recherche, et qu'elle consolide le lien de confiance entre la recherche publique et la société (art. 16 de la LPR).

- La promotion, la mutualisation et la prise en compte de l'intégrité scientifique a été réaffirmée dans le cadre des évaluations réalisées par le Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (art. 16 de la LPR).

- La prestation d'un serment d'intégrité scientifique par le nouveau chercheur à l'issue de sa soutenance de thèse (art. 18 de la LPR), a été instaurée, afin de garantir une adhésion forte à cette valeur tout au long de sa carrière.

- La déclaration de conflits d'intérêts , préalable à la réalisation d'une expertise auprès des pouvoirs publics et du Parlement (art. 23 de la LPR), a été étendue, afin de garantir un haut niveau d'exigence et de transparence, dans le cadre élargi des missions des chercheurs.

Les rapporteurs formulent enfin un point de vigilance important sur le rôle et la place de l'OFIS dans l'environnement de l'intégrité scientifique . Leur travail a en effet permis de faire état, à la fois d'un questionnement touchant à l'indépendance de l'OFIS au sein du Hcéres, et aussi de difficultés opérationnelles dans sa relation avec son Conseil scientifique, le CoFIS.

SAISINE

Figure 1 . Saisine émanant de la Commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat.

INTRODUCTION

L'intégrité scientifique -- aussi nommée par l'un de ses plus éminents défenseurs le P r Pierre Corvol, « démarche responsable de recherche 1 ( * ) » ou « conduite honnête, rigoureuse, déontologique de la recherche 2 ( * ) » -- désigne « l'ensemble des règles et valeurs qui doivent régir l'activité de recherche pour en garantir le caractère honnête et scientifiquement rigoureux 3 ( * ) ». Elle permet d'« optimiser la recherche dans son fonctionnement 4 ( * ) », en formulant les « droits et les devoirs 5 ( * ) » du chercheur, les bonnes pratiques et conduites, tant en matière de méthodologie des données et des résultats, que de propriété intellectuelle ou de conduite avec les pairs. Elle prescrit, encadre et garantit une manière éthique de faire de la recherche afin d'assurer la fiabilité, la transparence et la « reproductibilité 6 ( * ) » des travaux de recherche. Elle instaure de ce fait un contrat de « confiance » entre la science, les chercheurs et les citoyens, un terme clef pour le P r Pierre Corvol 7 ( * ) .

L'éthique, l'intégrité et la déontologie sont, selon l'actuel président de l'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) Olivier Le Gall, les « trois piliers d'une science responsable 8 ( * ) », trois pieds d'un même trépied qui sont chacun nécessaires pour donner une assise stable à la science. L'éthique de la recherche désigne les « grandes questions que posent les progrès de la science et leurs répercussions sociétales ». Elle a une dimension culturelle et est régulièrement discutée, par exemple, au sein de comités d'éthique, à mesure qu'évoluent les sciences et les techniques. L'intégrité scientifique, elle, désigne les « règles qui gouvernent la pratique de la recherche ». Elle aspire à avoir une dimension universelle puisqu'elle s'impose à tous les chercheurs comme un code professionnel de droit souple, un ensemble de bonnes pratiques qui doivent être partagées, communiquées et protégées par les pairs. La déontologie des fonctionnaires, enfin, encadre le « contrôle des liens d'intérêts et cumuls d'activité des fonctionnaires ». L'intégrité scientifique est une valeur fondamentale de la recherche, au même titre que l'éthique ou la déontologie . Il n'est pas rare de voir ces trois expressions confondues, bien qu'elles désignent, comme le souligne le P r Pierre Corvol, des choses différentes. Selon lui, « Autant les questions d'éthique font débat, autant l'intégrité scientifique ne se discute pas. Elle se respecte, c'est un code de conduite professionnelle qui ne doit pas être enfreint 9 ( * ) . », elle fait partie intégrante des attendus de la recherche scientifique.

Récemment, plusieurs cas de « méconduite scientifique » ou de « manquement à l'intégrité scientifique » ont agité de grandes institutions françaises, tels le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ou le Centre national de la recherche scientifique (CNRS). La presse grand public s'est largement faite chambre d'écho 10 ( * ) de ces divers dysfonctionnements : certains chercheurs ont été soupçonnés d'avoir fabriqué ou falsifié des données dans leurs travaux de recherche (« embellissement » d'images, omission ou fabrication de certains résultats) ; d'autres ont été suspectés de plagiat au sein même de leur thèse de doctorat ou dans diverses publications ; plusieurs se sont vus reprocher d'intimider ou de harceler collègues ou doctorants. Souvent, les journalistes se sont heurtés au manque d'information et de transparence qui entourait ces différentes affaires et se sont donc efforcés de disséquer les travaux soupçonnés de méconduite, révélant ainsi que la notion d'intégrité scientifique est à « géométrie variable 11 ( * ) », selon les institutions ou les comités chargés de statuer.

L'intégrité scientifique constitue le socle de confiance que les scientifiques se doivent de constituer au sein de leur communauté, avec les institutions et avec les citoyens. Les manquements en la matière ont plusieurs conséquences dommageables, parmi lesquelles : l'affaiblissement de la confiance du public dans la science et ses chercheurs, l'atteinte à la réputation des organismes et des structures où officient les chercheurs, le gaspillage des fonds -- privés ou publics -- qui sont alloués aux recherches, la création possible d'un risque (sanitaire, environnemental, technique), ou encore l'effritement de la recherche en tant que pratique cumulative et collective, ainsi qu'une perte de temps considérable pour les chercheurs qui se basent sur des résultats fallacieux ou trompeurs.

Plusieurs causes possibles ont été données aux méconduites lors du Forum Mondial de la Science de l'OCDE 12 ( * ) (2007). Ces facteurs, sans prétention à l'exhaustivité, sont de deux ordres : ceux « liés au chercheur et à sa carrière » et ceux « liés à l'évolution de la science et de la recherche » .

Les premières causes, centrées sur le chercheur et sa carrière , concernent la pression à la publication, résumée par l'expression publish or perish , « publier ou périr ». Pour rester visible et attractif, un chercheur se voit forcé de publier beaucoup, et des résultats positifs plutôt que négatifs. L'adage dénonce ainsi la pression qui est exercée sur les chercheurs afin qu'ils publient rapidement, et en quantité, leurs résultats positifs dans des revues scientifiques et comment, à ce titre, tout un pan de leur production (relecture des articles, valorisation de la recherche auprès d'un public profane, prépublications, enseignement) est laissé de côté au moment de l'évaluation de leurs travaux. Le scientifique et spécialiste de l'intégrité scientifique Daniel Fanelli 13 ( * ) a pu souligner dans l'une de ses études datée de 2010 que les chercheurs publiaient davantage de résultats positifs que négatifs, sous la pression du système académique, tandis que des chercheurs néerlandais ont constaté en 2019 14 ( * ) , dans une étude de grande ampleur, que toutes les disciplines et tous les chercheurs sondés étaient touchés par cette contrainte systémique. Des nuances ont pu être apportées par d'autres études, comme celle d'Hendrik P. van Dalen et Kène Henkens 15 ( * ) en 2012, sur la manière dont la pression affecte certains pays plus que d'autres, mais tous s'accordent sur son aspect délétère. Cette « course à la publication » favorise autant les mauvaises habitudes de recherche que les fraudes : découpage d'un article en une multitude d'articles ( salami slicing ) afin d'augmenter le taux de publications, recours au plagiat parce que le chercheur ne dispose pas du temps nécessaire pour laisser mûrir son idée, ou encore embellissement ou sélection des résultats ( cherry picking ) afin que l'article ne contienne que les données allant dans le sens de l'hypothèse de départ.

L'article d'Ernest Hugh O'Boyle, Jr., George Christopher Banks et Erik Gonzalez-Mulé 16 ( * ) , publié en 2014, a cherché à expliquer comment un chercheur honnête peut progressivement glisser vers une conduite contraire aux principes de l'intégrité scientifique, tout en ayant l'impression qu'il est dans la norme et les comportements vertueux. C'est ce qu'ils ont appelé « l'effet chrysalide ». Le spécialiste de l'intégrité scientifique Hervé Maisonneuve 17 ( * ) explique, en s'appuyant sur cette étude, qu'un chercheur honnête, confronté à des difficultés pour publier, s'aperçoit que des collègues contournent ces difficultés, car ils savent embellir des résultats. Il ressent alors des émotions négatives, est anxieux et « s'aperçoit que des comportements légèrement hors des bonnes pratiques peuvent faciliter sa carrière, sa recherche de ressources. Il constate aussi que ces pratiques questionnables, pas très graves, sont acceptées par la communauté scientifique qui ferme les yeux . ».

Une autre expression 18 ( * ) est utilisée pour expliquer que des chercheurs contreviennent aux valeurs de l'intégrité scientifique. Fund or famish , « financement ou famine », dénonce l'importance de publier des résultats en soutien à une demande de fonds, pour obtenir de la notoriété ou un avancement. Aussi, l'incitation à la « labellisation », qui invite le chercheur à mettre en avant des idées séduisantes ou porteuses, à s'inscrire dans un axe prédéfini au détriment parfois de sa curiosité, a été donnée comme explication possible aux méconduites scientifiques.

En ce qui concerne les facteurs liés à l'évolution de la science et de la recherche , l'une des explications avancées vise la non-maîtrise des logiciels ou des instruments par les chercheurs.

Pour autant, comme le rappelle systématiquement le P r Pierre Corvol, la majeure partie des chercheurs exerçant en France est vertueuse . En 2009, le chercheur Daniel Fanelli a regardé de près des sondages qui avaient été effectués autour de l'intégrité scientifique et rapporte les chiffres suivants : 1,97 %, soit environ 140 000 chercheurs à l'échelle mondiale, admettent sur le mode déclaratif avoir un jour falsifié, fabriqué ou modifié des données 19 ( * ) , et 33,7 %, soit plus de 2 millions de chercheurs, disent s'être déjà adonnés à ce qu'on appelle des « pratiques questionnables de recherche », c'est-à-dire des manquements moins graves, qui relèvent plutôt de mauvaises habitudes de recherche. Les chiffres sont très probablement sous-estimés car, si seulement plus de 30 % des chercheurs admettent avoir déjà commis des pratiques questionnables de recherche sur le mode déclaratif, les chercheurs qui doivent s'exprimer sur les comportements de leurs collègues rapportent que pas moins de 14,12 % d'entre eux ont été témoins de fraudes scientifiques chez leurs collèges, et 72 % d'entre eux ont déjà été témoins de « pratiques questionnables de recherche » !

La crise sanitaire a permis de rappeler l'importance fondamentale que revêt la valeur de l'intégrité scientifique par temps de défiance scientifique et de montée de la pensée conspirationniste 20 ( * ) . En effet, un certain nombre d'observateurs 21 ( * ) ont alerté, alors que se sont côtoyés remèdes miracles, culte de la personnalité scientifique et désinformation 22 ( * ) , sur la question de la crédibilité et de la fiabilité des résultats, opposant le temps du fait politique à celui du fait scientifique 23 ( * ) .

On constate cependant une large insuffisance, voire une quasi-absence de données françaises chiffrées sur les manquements à l'intégrité scientifique, sur l'offre de formation à l'échelle nationale ou sur les suites données aux rapports d'instruction reçus par les organes dirigeants des institutions actives en matière de recherche. Rien ne prouve, d'ailleurs, que les méconduites soient plus nombreuses aujourd'hui qu'il y a vingt ans ; en revanche, elles sont maintenant mieux détectées (vigilance accrue des acteurs de la recherche, logiciels adéquats, développement d'une culture commune de l'intégrité scientifique, etc.). Si des acteurs historiques comme l'INSERM ont créé dès la fin des années 1990, des dispositifs variés pour garantir l'intégrité scientifique, l'intérêt de la France pour ce sujet est assez tardif en comparaison d'autres pays comme les États-Unis ou le Danemark.

UN SUJET D'INTÉRÊT POUR L'OPECST ET LA REPRÉSENTATION NATIONALE

L'intérêt affiché de l'OPECST pour l'intégrité scientifique remonte à 2014 et s'est particulièrement manifesté sous la présidence du sénateur Bruno Sido. Remarquant qu'elle « s'inscrit dans les préoccupations de l'Office parlementaire depuis sa création, notamment dans l'idée de contribuer à l'établissement de relations de confiance et à leur renforcement entre la communauté scientifique et la société civile », il avait sollicité son Conseil scientifique autour de cette question.

Cet intérêt ne s'est pas démenti les années suivantes. L'OPECST a d'abord auditionné le P r Pierre Corvol en novembre 2016 au sujet de son rapport publié avec Rémi Gicquel, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte nationale d'intégrité scientifique 24 ( * ) ». À cette occasion, le Pr Corvol est revenu sur l'historique de l'intégrité scientifique, sur la mise en place de la « charte nationale de déontologie des métiers de la recherche » en 2015, et sur la feuille de route présentée dans le rapport qu'il a remis au secrétaire d'État concerné en 2016. En 2018, l'Office a reçu M. Olivier Le Gall, chercheur en virologie végétale et actuel (premier) président de l'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) et M. Michel Cosnard, alors président du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres) 25 ( * ) , afin qu'ils présentent tous deux le fonctionnement de l'OFIS, constitué en tant que service du Hcéres. L'OPECST s'était déjà associé aux questions d'intégrité scientifique dès 2017 puisque Cédric Villani, l'ancien sénateur Claude Huriet et Jean-Yves Le Déaut, alors président de l'OPECST, ont pris part au colloque de Nancy, L'intégrité scientifique en action 26 ( * ) .

Entre 2015 et 2018, plusieurs parlementaires, dont certains membres de l'OPECST, ont par ailleurs interrogé le gouvernement sur le sujet de l'intégrité scientifique 27 ( * ) (quelle mise en oeuvre par le gouvernement ? raisons de la hausse des méconduites scientifiques ? avis sur les possibles dysfonctionnements au sein des comités chargés d'instruire les manquements ? quels moyens pour endiguer la fausse science ?). Il ressort des réponses apportées par le gouvernement que ce dernier ne portait pas à cette époque un projet global autour de l'intégrité scientifique.

Les médias nationaux se sont également saisis de la question en menant des enquêtes spécifiques (conflits d'intérêts au sein des commissions chargées de statuer sur une méconduite, importance grandissante de la fausse science, etc.) ou en laissant la parole à des collectifs de scientifiques 28 ( * ) . Ils ont ainsi contribué à sensibiliser encore davantage les parlementaires sur cette question. Le traitement par les médias des informations et des controverses scientifiques relatives à la pandémie a suscité de nombreux débats, notamment au sein de l'OPECST.

On voit ainsi que l e sujet de l'intégrité scientifique a pris de l'ampleur ces dernières années et a attiré l'attention de la représentation nationale . D'une part, à la faveur d'affaires médiatiques 29 ( * ) : le biologiste végétal Olivier Voinnet 30 ( * ) , soupçonné d'avoir manipulé des images de gels d'électrophorèse dans certains de ses articles ; Catherine Jessus 31 ( * ) , directrice de l'Institut des sciences biologiques, soupçonnée d'avoir manipulé des images dans plusieurs de ses articles ; Anne Peyroche 32 ( * ) , présidente par intérim du CNRS, soupçonnée de fraudes (manipulations d'images) ; l'avocat Arash Derambarsh 33 ( * ) , soupçonné d'avoir effectué plus de 92 % de plagiat dans sa thèse de doctorat 34 ( * ) . D'autre part, grâce à des rapports publiés sur le sujet par Jean-Pierre Alix (2010) ou par Pierre Corvol (2016). Face à l'identification récente de sujets touchant à l'intégrité scientifique (viralité des fausses informations ; « infodémie 35 ( * ) » ; rétractation d'articles scientifiques 36 ( * ) ; recours massif aux serveurs de prépublication ; place donnée aux conseils scientifiques dans la prise de décision politique), il apparaît aujourd'hui opportun de se pencher sur les moyens de porter haut les valeurs de l'intégrité scientifique en France .

Par lettre du 20 février 2019 , la sénatrice Catherine Morin-Desailly, consciente des « enjeux juridiques mais aussi sociétaux de ce sujet » a saisi l'OPECST au nom de la Commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat afin d'« éclaire[r] la représentation nationale sur les choix de politique publique à opérer en ce domaine afin de permettre à la France d'assurer pour sa recherche et ses chercheurs un haut niveau d'exigence en matière d'intégrité scientifique. ». L'OPECST a choisi de désigner comme rapporteurs deux de ses membres, particulièrement familiers du monde de la recherche 37 ( * ) : le sénateur Pierre Ouzoulias, archéologue de formation et chercheur au CNRS, ainsi que le député Pierre Henriet, doctorant en épistémologie et histoire des sciences et techniques.

Dans l'optique de saisir autant que possible les attentes de la société, de la représentation nationale et de l'ensemble des chercheurs, la mission a entendu plus de vingt acteurs qui participent, pour une majeure partie depuis de longues années, à la promotion, à la diffusion et à la consolidation de l'intégrité scientifique en France. Le présent rapport a pour objet de comprendre les mécanismes et les raisons systémiques à l'origine des méconduites scientifiques : évaluation de la recherche ; processus de recrutement des chercheurs ; biais portés par le financement de la recherche sur projet ; course à la publication scientifique ; mauvaises pratiques de mentorat ; pression à la production de résultats positifs ; propriété, conservation et diffusion des données et des résultats de la recherche, etc. À ce titre, il permet d'éclairer la représentation nationale sur les « choix de politique publique à opérer en ce domaine » .

L'intégrité scientifique est une notion à la fois récente et en construction, qui évolue avec le monde de la recherche. La mission a donc souhaité proposer un état des lieux de l'intégrité scientifique en France : il s'agit de présenter l'actualité de cette question, les échos qu'elle a connus au sein du Parlement et la façon dont elle est revenue sur le devant de la scène il y a quelques années, à la faveur du rapport du P r Pierre Corvol autant que d'affaires ayant eu un certain écho médiatique.

La première partie du rapport vise à mettre en évidence le principe d'autorégulation qui régit actuellement l'intégrité scientifique en France . Elle est en effet encadrée par des chartes et des codes de conduites, qui font intervenir une multiplicité d'acteurs, certains institutionnels, d'autres associatifs ou informels.

La deuxième partie présente les moyens actuels permettant d'appréhender, de prévenir et de traiter les méconduites scientifiques et s'interroge sur les limites de certains dispositifs et les moyens de raffermir ces outils et procédures.

La troisième partie émet des propositions visant à développer une culture de l'intégrité scientifique et un environnement de recherche propice à une recherche vertueuse.

Enfin, la quatrième partie revient sur les avancées récentes apportées dans la loi de programmation de la recherche 2021-2030 (LPR) en matière d'intégrité scientifique .

PREMIÈRE PARTIE : L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE EN FRANCE, UNE AUTORÉGULATION EXERCÉE PAR LES ACTEURS
DE LA RECHERCHE

L'intégrité scientifique, en France comme dans de nombreux pays, se caractérise d'abord par le principe d'autorégulation exercée par ceux qui pratiquent la recherche. Au moment de la saisine de l'OPECST, la notion d'intégrité scientifique n'était pas définie par le code de la recherche. Cette notion figurait cependant dans de nombreux codes, chartes, guides et déclarations, pour beaucoup européens (dès 2005), pour certains internationaux (dès 2007) et pour d'autres français (dès 2015), développés et adoptés par les acteurs de la recherche. C'est sur la base de ces textes-clefs que les institutions de recherche ont mis en place des systèmes de promotion et de protection de l'intégrité ( I ). En 2017, la circulaire n° 2017-040 du secrétaire d'État chargé de la Recherche et de l'Enseignement supérieur Thierry Mandon a porté création de l'Office français de l'Intégrité scientifique (OFIS) et du référent intégrité scientifique (RIS) ( II ). Promoteur, voire protecteur, observateur et animateur de l'intégrité scientifique en France, ce dernier est accompagné dans ses missions par d'autres acteurs, informels ou associatifs, qui mettent en avant le principe de la mutualisation pour mieux diffuser un environnement favorable à l'intégrité scientifique.

I. LES SOURCES ENCADRANT LES PRINCIPES DE L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE

L'intégrité scientifique en France ne faisait l'objet d'aucune définition législative jusqu'à l'adoption récente de la loi de programmation pour la recherche. Seule l'éthique générale des sciences de la vie et de la santé était mentionnée dans le code de la recherche, lequel renvoyait au code de la santé publique.

L'histoire française de l'intégrité scientifique a la particularité de s'écrire en regard de codes et de textes de références étrangers (« charte européenne du chercheur » ; « déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche » ; « code de conduite européen pour l'intégrité en recherche ») dans lesquels notre pays a puisé pour mettre au point, non pas un cadre normatif, mais un code de bonne conduite (« charte nationale de déontologie des métiers de la recherche », « vade-mecum sur l'intégrité scientifique »).

Les sources relatives à l'intégrité scientifique procèdent de la coopération européenne qui a très tôt appréhendé ce sujet (1) , mais aussi de questionnements internationaux (2) . Ces travaux ont favorisé la construction d'un corpus français de l'intégrité scientifique (3) .

1. La coopération européenne en faveur de l'intégrité scientifique

a. La « Charte européenne du chercheur. Code de conduite pour le recrutement des chercheurs » (C&C) (Commission européenne, 2005)

La « Charte européenne du chercheur 38 ( * ) » de la Commission européenne, régulièrement citée par les différentes chartes d'intégrité des organismes de recherche comme un texte de référence , présente des principes généraux qui spécifient les rôles, les responsabilités et les prérogatives des chercheurs et des employeurs et bailleurs de fonds des chercheurs. Elle stipule entre autres choses que les chercheurs ont une responsabilité professionnelle qui les enjoint à éviter le plagiat .

« Ils évitent [les chercheurs] tout type de plagiat et respectent le principe de la propriété intellectuelle et de la propriété conjointe des données en cas de recherche effectuée en collaboration avec un ou plusieurs directeurs de thèse/stage et/ou d'autres chercheurs. La nécessité de valider les observations nouvelles en montrant que les expériences sont reproductibles ne devrait pas être interprétée comme du plagiat, à condition que les données à confirmer soient explicitement citées. »

Elle est accompagnée d'un « code de conduite pour le recrutement des chercheurs » , destiné à rendre plus transparent et équitable le processus de recrutement, lequel énonce notamment que la qualité d'un chercheur ne doit pas se mesurer au nombre des publications (quantitatif), mais que ces indicateurs bibliométriques doivent être pondérés au sein d'un éventail de critères plus larges (gestion et valorisation de la recherche, vulgarisation scientifique, etc.).

« Cela signifie que le mérite devrait être jugé tant sur le plan qualitatif que sur le plan quantitatif, en mettant l'accent sur les résultats remarquables obtenus dans un parcours professionnel diversifié et pas uniquement sur le nombre de publications. En conséquence, l'importance des indicateurs bibliométriques devrait être correctement pondérée au sein d'un éventail plus large de critères d'évaluation, tels que l'enseignement, la supervision, le travail d'équipe, le transfert de connaissances, la gestion de la recherche, l'innovation et les activités de sensibilisation du public . »

Depuis 2005, 1247 entités 39 ( * ) (universités, organismes de recherche et agences de financement) de 35 pays, en Europe et au-delà, ont soutenu la Charte et le Code (C&C). 102 ont ainsi obtenu le label « HR excellence in Research 40 ( * ) », dispositif issu de la « Stratégie européenne de ressources humaines pour les chercheurs » (HRS4R) qui reconnaît la démarche et les mesures prises pour mettre en oeuvre les 40 principes énoncés dans le C&C, dans quatre domaines différents : aspects éthiques et professionnels, recrutement, conditions de travail et sécurité sociale, formation 41 ( * ) . La signature du C&C figure à l'article 32 de la « Convention de subvention » des actions Horizon2020. Bien que l'article ne fasse pas partie des critères d'évaluation pour obtenir un financement, l'établissement subventionné peut subir des pénalités financières, notamment une réduction de sa subvention européenne, si un audit de l'Office européen de lutte antifraude (OLAF) révèle que l'établissement en question n'a pas mis en oeuvre un plan d'action pour être en conformité avec le C&C.

b. Le « Code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche » ou « European Code of Conduct for Research Integrity » (European Science Foundation & All European Academies, 2011 et révision en 2017)

Le « code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche 42 ( * ) » édité conjointement par l' European Science Foundation et par l' All European Academies 43 ( * ) , est un code évolutif publié en 2011, révisé tous les trois à cinq ans (revu en 2017 et traduit en français en 2018). Il est cité comme texte-référence dans le programme Horizon2020. Il énonce des principes cardinaux en matière de recherche : « fiabilité », « respect », « honnêteté », « responsabilité », lesquels sont régulièrement rappelés par les opérateurs de recherche quand ils présentent le sujet de l'intégrité scientifique. Ce code est divisé en deux parties, l'une touchant aux bonnes pratiques en matière d'intégrité scientifique, l'autre se rapportant au traitement des manquements. La première partie énonce la bonne conduite à tenir dans différents contextes de recherche (environnement de recherche ; formation, encadrement et mentorat ; procédures de recherche ; garanties ; gestion et pratiques des données ; travail collaboratif ; publication et diffusion ; examen, évaluation et contrôle rédactionnel). La seconde partie propose une typologie ramassée faisant état des différentes fraudes et pratiques questionnables de recherche (appelées ici « pratiques inacceptables »). Le code ne présente pas de procédure détaillée en matière d'instruction des manquements, mais énonce quelques grands principes, qui doivent orienter leur prise en compte par les institutions concernées (par exemple, la protection du lanceur d'alerte ou encore la nécessité de prendre des mesures proportionnées si la fraude est avérée). Il souligne tout particulièrement la nécessité de prévenir lesdits manquements, notamment en mettant en place un environnement de recherche propice aux bonnes pratiques énoncées dans la première partie :

« Dans leurs formes les plus graves, les pratiques inacceptables sont passibles de sanctions mais, au minimum, tout doit être mis en oeuvre afin de les prévenir, de les décourager et de les freiner grâce à la formation, la supervision et le mentorat, ainsi qu'à la mise en place d'un environnement de recherche positif et favorable. »

Sont tout particulièrement mis en évidence dans ce code européen la nécessité de développer une « culture de l'intégrité en recherche » ; la nécessité de disposer de procédures et de prononcé des sanctions transparentes et claires ; le besoin de proposer des formations dans le domaine de l'éthique et de l'intégrité scientifique tout au long du parcours professionnel, et non pas seulement au moment du doctorat ; la quête d'une science reproductible et vérifiable ; un traitement et une conservation appropriée des donnés et résultats de la recherche, selon le principe FAIR 44 ( * ) ; la mise à disposition dans les meilleurs délais des travaux de recherche de manière transparente et ouverte ; l'intérêt de la publication de résultats négatifs de recherche.

c. Le « Guide ENRIO. Recommandations pour l'investigation des méconduites en recherche », ou « ENRIO Handbook : Recommandations for the Investigations of Research Misconduct » (ENRIO, 2019)

L' European Network of Research Integrity Offices (ENRIO), fort de 31 membres issus de 23 pays européens, a produit en 2019 « Le guide ENRIO. Recommandations pour l'investigation des méconduites en recherche 45 ( * ) ». Le modèle de l'autorégulation est dominant et préconisé par le guide , qui propose un regard panoramique sur les déclinaisons de l'intégrité scientifique en Europe. Il formule 14 recommandations visant à instruire les manquements à l'intégrité scientifique qui viennent compléter le « code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche ». Parmi celles-ci, on retient notamment le fait que chaque pays est invité à se doter d'une charte nationale, régulièrement révisée ; à définir les méconduites à une échelle nationale ou locale dans un code de bonne conduite ou dans la législation en prenant en compte le critère d'intentionnalité ; à décrire des méthodes d'enquête claires et le degré d'habilitation des structures impliquées dans des codes, chartes et autres écrits.

L'ENRIO préconise plutôt des comités locaux et permanents , aux motifs de leur connaissance et de leur expérience, avec la possibilité de leur associer des spécialistes du champ. Ces structures sont surtout utiles pour traiter les conflits d'intérêts, assurer une égalité de traitement à l'échelle nationale et peuvent surtout développer des bases de données. Les rôles et nominations de ces structures doivent être clairement signifiés. Certaines n'ont pas qu'un rôle d'enquête et peuvent aussi promouvoir l'intégrité scientifique. Plusieurs recommandations concernent la constitution de ces comités : être vigilant au sujet des conflits d'intérêts, choisir des personnes compétentes et reconnues, et prendre soin d'intégrer des membres extra-institutionnel, afin d'éviter tous biais dans le rapport.

L'ENRIO énonce plusieurs principes visant à l'intégrité de la procédure d'instruction des méconduites et reprend en majeure partie le guide de l'OCDE « Investigating Research Misconduct Allegations in International Collaborative Research Projects 46 ( * ) » (2009) : investigations précises, transparentes, exhaustives et rapides ; respect des droits de la personne soupçonnée (présomption d'innocence, enregistrement des témoignages, droit au recours) ; confidentialité (protection des lanceurs d'alerte) ; proposition de mesures adaptées pour réhabiliter ou sanctionner, les types de sanctions devant être clairement définies dans un code ; communication adaptée de la structure impliquée sur l'enquête et la décision prise. L'ENRIO insiste également sur l'utilité de bien encadrer le dépôt d'une accusation de méconduite (mise en place de personnels ressources dédiés, formulaires spécifiques). L'ENRIO propose enfin de rendre publics et diffuser les rapports annuels nationaux des enquêtes de méconduites, car ils servent aussi de base de données pour les autres pays.

d. La Déclaration de Bonn, « The Freedom of Scientific Research » (2020)

Enfin, la déclaration de Bonn sur la liberté de la recherche scientifique 47 ( * ) revient sur l'importance d'une recherche libre et intègre afin de permettre le progrès de la science et de la société. Elle souligne le rôle de premier plan donné aux gouvernements, qui se doivent de protéger les libertés académiques ainsi que la fonction d'autorégulation des organismes de recherche en matière d'intégrité scientifique, dans le but de préserver le lien de confiance entre science et société. Cette déclaration établit ainsi un lien très clair entre libertés académiques et intégrité scientifique :

« La science a une responsabilité vis-à-vis de la société ; elle se doit de communiquer des résultats de recherche clairs, transparents et compréhensibles, ainsi que d'expliquer la différence entre des opinions non-scientifiques et des résultats scientifiques vérifiables. [...] La confiance dans la science est la clé d'une société intégrative, ouverte et démocratique.

Nous (ministres de la recherche européens) reconnaissons que l'exercice de la liberté scientifique doit s'opérer dans le cadre du système d'autorégulation responsable existant dans le monde académique et les organismes de recherche. Nous encourageons et soutenons les standards les plus élevés de bonnes pratiques scientifiques, lignes de conduite et structures de conseil pour préserver l'intégrité scientifique et les cadres éthiques de recherche. Cela inclut les procédures fondées sur la transparence, l'équité et l'excellence permettant l'évaluation des carrières des chercheurs et l'allocation de fonds compétitifs. Cela induit la création de systèmes incitatifs et gratifiants afin de promouvoir l'indépendance, l'intégrité et la transparence de la recherche, ainsi que de développer des guides et des soutiens pour le développement de la carrière des chercheurs 48 ( * ) . ».

2. L'appréhension internationale sous l'égide des pays membres de l'OCDE

a. Frédéric Sgard & Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l'élaboration de politiques cohérentes » (Forum mondial de la science de l'OCDE, 2007)

L'article de Frédéric Sgard et de Stefan Michalowski 49 ( * ) , issu des travaux du Forum Mondial de la Science de l'OCDE (Tokyo, 2007), constitue un document de cadrage essentiel pour la mise en place d'un dispositif visant la prévention et le traitement des méconduites scientifiques . Il présente tout d'abord une typologie des méconduites, reprise dans de nombreux codes et guides par la suite, tout en soulignant que la réalisation d'une grille liant une méconduite à la sanction appropriée est un exercice complexe. Il donne des instructions détaillées pour l'instruction d'une méconduite scientifique, plutôt réservées aux cas de fraudes manifestes. Il pose également la question de l'harmonisation des pratiques, sur le plan national et international (car la science s'effectue de plus en plus à cette échelle) :

« Autant que possible, un système uniforme devrait être adopté à l'échelle du pays. La question d'une harmonisation internationale des définitions, standards et procédures mérite plus d'attention, étant donné le nombre croissant de collaborations internationales dans la recherche et la mobilité accrue des chercheurs. Tout système doit être (et être perçu comme) scrupuleusement juste. Une bonne manière d'aider à cela est de s'assurer qu'il existe une distribution des responsabilités lors des différentes phases du processus (enquête initiale, investigation, jugement, appel) au sein des composantes du système. [...]

Même si un système local est adopté, une certaine structure de contrôle nationale/gouvernementale peut être envisagée. Au minimum, son rôle peut être de proposer un endroit de consultation, d'évaluation, d'appel, de résolution de conflits inter-organisationnels, d'interface avec les autorités d'autres pays, voire de prendre en charge les investigations si l'institution hôte est trop petite ou incapable de les mener de façon satisfaisante. De plus, cette structure peut jouer un rôle important dans la prévention de la fraude scientifique, en mettant par exemple en place des standards pour l'éducation et la formation des étudiants et personnels.

Dans la mesure du possible, doivent être établis des standards de performance et des évaluations périodiques, de même qu'un mécanisme permettant d'ajuster le système si nécessaire. »

La rédaction du document, en partie sous la forme d'interrogations pour chaque étape, allant de la réponse à l'allégation, à l'enquête (notamment, « Existe-t-il quelqu'un à consulter lorsqu'il n'existe qu'un soupçon, sans certitudes ou preuves absolues ? » ; « Comment le système gère-t-il de fausses ou malicieuses accusations ? » ; « Quelles sont les limites du pouvoir des enquêteurs ? » ; « L'accusé peut-il avoir une assistance, un avocat ? »), fait de cette reddition du rapport du Forum Mondial de la Science un document de cadrage essentiel pour la mise en place d'un dispositif visant la prévention, le traitement des méconduites scientifiques et la promotion de l'intégrité scientifique .

b. La Déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche ou « Singapore Statement on Research Integrity » (septembre 2010)

La « Déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche 50 ( * ) » , réalisée dans le cadre de la deuxième World Conference on Research Integrity qui s'est tenue à Singapour en juillet 2010, constitue un acte fondateur ayant servi de base d'écriture à un certain nombre de chartes d'intégrité scientifique d'institutions . Elle énonce quatre principes prévalant à une recherche intègre :

« Honnêteté dans tous les aspects de la recherche ;

Conduite responsable de la recherche ;

Courtoisie et loyauté dans les relations de travail ;

Bonne gestion de la recherche pour le compte d'un tiers. »

Son préambule, tout particulièrement, a fait date :

« La valeur et les bénéfices de la recherche pour la société sont totalement dépendants de l'intégrité en recherche. Quelle que soit la manière dont la recherche est menée et organisée selon les disciplines et les pays, il existe des principes communs et des obligations professionnelles similaires qui constituent le fondement de l'intégrité en recherche où qu'elle soit menée. »

Elle énonce quatorze responsabilités qui incombent au chercheur, tant en matière de relation avec ses pairs, en termes de données et résultats de la recherche, de publications ou encore de conformité aux valeurs de l'intégrité scientifique. Toutes ces recommandations visent à favoriser le caractère honnête et scientifiquement rigoureux des recherches, en insistant sur la communication et la reproductibilité de ces dernières. La déclaration de Singapour insiste sur le droit à la paternité des recherches et sur l'importance d'une évaluation impartiale des chercheurs. La transparence, tant en matière de conflits d'intérêts que de communication des soupçons de méconduite, est évoquée. Notons que la déclaration s'achève par deux recommandations liées, d'une part, à l'environnement de recherche qui doit favoriser l'intégrité et, d'autre part, à la conduite de la politique de la recherche qui invite les chercheurs et les établissements supports « à mesurer les risques et bénéfices de leurs travaux 51 ( * ) . ». Cette dernière recommandation relève davantage de l'éthique de la recherche.

c. Le Manifeste de Hong Kong, ou « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers: Fostering Research Integrity » (septembre 2017)

Le Manifeste de Hong Kong, ou « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers : Fostering Research Integrity 52 ( * ) » , publié en septembre 2017, a été élaboré dans le cadre de la 6 e conférence mondiale sur l'intégrité scientifique. Il propose de prendre en compte l'intégrité scientifique dans l'évaluation des chercheurs . « Selon le système traditionnel qui incite à publier par risque de périr, les chercheurs sont évalués en fonction du nombre de publications, du nombre de citations de leurs publications par d'autres chercheurs et du montant octroyé en subventions », explique M. David Moher, scientifique principal et expert en publications scientifiques à l'Hôpital d'Ottawa et professeur agrégé à l'Université d'Ottawa. « Bien qu'ils soient faciles à mesurer, ces critères ne donnent pas un portrait complet de la rigueur du travail du chercheur ou de ses contributions à la recherche et à la société 53 ( * ) . ».

Il est nécessaire de noter que le Manifeste de Hong Kong ne vise pas la disparition des outils métriques, mais revendique un élargissement des critères d'évaluation, lesquels intègreraient notamment un indicateur mesurant l'investissement en tant que reviewer, referee ou encore l'intégrité du chercheur . Ce manifeste reprend la philosophie de la déclaration de Singapour concernant la reproductibilité des recherches, le caractère scientifiquement rigoureux de la méthode employée, l'évaluation par les pairs. Néanmoins, cet écrit se distingue tout particulièrement car il valorise la science ouverte de façon explicite (« valoriser les pratiques de la science ouverte (recherche ouverte) - dont l'ouverture des méthodes, des matériaux et des données 54 ( * ) ») et il soutient une évaluation de l'éthique des chercheurs qui sont invités à développer des nouvelles pratiques de recherche plus intègres 55 ( * ) .

3. La construction d'un corpus national

Les différentes sources étrangères s'articulent avec la construction française de la réflexion relative à l'intégrité scientifique.

a. Le rapport de Jean-Pierre Alix, « Renforcer l'intégrité de la recherche en France. Propositions de prévention et de traitement de la fraude scientifique » (septembre 2010)

Le rapport de Jean-Pierre Alix, « Renforcer l'intégrité de la recherche en France. Propositions de prévention et de traitement de la fraude scientifique 56 ( * ) » , est resté relativement confidentiel, puisque l'administration n'a pas souhaité lui donner de mise en oeuvre, selon David Larousserie. Il se concentre sur les organismes de recherche et non les universités, et formule huit recommandations afin d'améliorer la situation française en matière d'intégrité scientifique. Sa proposition majeure est la création d'une charte nationale énonçant les principes à respecter . La plupart des recommandations émises dans le rapport sont maintenant en place ou en voie d'amélioration :

1) éditer un guide des bonnes pratiques en matière d'intégrité scientifique ;

2) adopter une charte nationale, comme « socle national », mais pouvant être déclinée localement ;

3) développer la prévention et l'éducation afin de mettre en place une « culture de l'intégrité », notamment par la constitution d'une base de données de cas ;

4) mettre en place des procédures de traitement des cas ;

5) être mobilisé contre le plagiat ;

6) définir la responsabilité des éditeurs ;

7) créer une instance nationale chargée de la question de l'intégrité scientifique ;

8) mettre toutes ces mesures en oeuvre en l'espace d'un an.

b. La « Charte nationale de déontologie des métiers de la recherche » (janvier 2015)

La « charte nationale de déontologie des métiers de la recherche 57 ( * ) » , aussi appelée « charte française de déontologie des métiers de la recherche », est un texte de référence pour l'intégrité scientifique en France. Elle se recommande de la « charte européenne du chercheur » (2005), de la « déclaration de Singapour » (2010), du document « Fostering Science Integrity » (2010) édité par l' European Science Foundation 58 ( * ) qui vise à faire un état des lieux des systèmes européens, et de la première version du « Code de conduite européen 59 ( * ) » (2011), rédigé par l' European Science Foundation et l' All European Academies. Signée le 29 janvier 2015, avec pour 8 signataires fondateurs l'INRIA, l'INRA, l'IRD, la CPU, l'INSERM, le CNRS, le CIRAD, l'Institut Curie (60 signataires en novembre 2020 60 ( * ) ), la charte doit rester évolutive , avec un examen annuel par une conférence des signataires. La charte doit être mise en oeuvre par les signataires, mais aussi déclinée par eux en fonction des disciplines et des corps de métiers. Elle a été mise au point par des acteurs historiques de l'intégrité scientifique : Michelle Hadchouel, François Rougeon, Pierre-Henri Duée et Michèle Leduc 61 ( * ) . Leur texte de présentation, soumis lors des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche 62 ( * ) (2012), souligne la nécessité de disposer d'une charte qui encadre de manière non normative l'intégrité scientifique en France :

« Les institutions françaises pourraient ainsi adapter le modèle des Pays Bas qui disposent d'un texte de portée nationale lequel, sans avoir force de loi, s'applique à l'ensemble des disciplines scientifiques. La mise en oeuvre des procédures de traitement des manquements à l'intégrité scientifique serait laissée à l'initiative de chaque organisme, une instance consultative au niveau national pouvant être saisie permettant ainsi de faire appel des décisions ce qui est conforme au droit français. ».

La proposition est retenue dans le rapport de Jean-Yves Le Déaut, alors député et premier vice-président l'OPECST, « Refonder l'université. Dynamiser la recherche. Mieux coopérer pour réussir 63 ( * ) » (2013) : « Faire adhérer universités ou écoles à une charte d'expertise et de déontologie d'inspiration commune ».

La charte de 2015 énonce les principales valeurs qui conditionnent une recherche intègre et vise à « expliciter les critères d'une démarche scientifique rigoureuse et intègre ». Elle insiste notamment sur : le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ; la fiabilité du travail de recherche (méthode utilisée, conservation des données, vérification des résultats, reproductibilité possible, référencements et sources) ; la communication (référence et attribution juste des auteurs, neutralité liée au travail au sein d'une institution) ; la responsabilité dans le travail collectif (devoir de signalement des cas de FFP, instaurer une relation de respect dans le travail) ; l'impartialité et l'indépendance dans l'évaluation et dans l'expertise (notamment en matière de conflits d'intérêts) ; les travaux collaboratifs et cumul d'activités ; la formation.

Il est prévu qu'une conférence des signataires, par analogie avec la CPU, réunisse les signataires de la charte, afin de stimuler la réflexion sur l'intégrité scientifique. Cependant, la circulaire Mandon ayant autorisé les PDG et chefs d'établissements à être représentés par leurs référents intégrité scientifique, ce sont ces derniers qui s'y rendent, en grande majorité.

Les institutions, organismes de recherche et établissements d'enseignement supérieur, peuvent décliner la charte nationale au sein même de leurs établissements. C'est par exemple le cas de l'université de Bordeaux, qui a instauré sa charte dès 2012, révisée en 2017 64 ( * ) . Cette dernière est consultable par tout le personnel et décrit toutes les procédures relatives à l'intégrité scientifique. Elle s'inspire des travaux du Forum mondial de la science en 2007, mais aussi de plusieurs chartes canadiennes, comme celle de l'université de Laval 65 ( * ) . Elle s'est également inspirée de l'ouvrage On being a scientist 66 ( * ) , édité par l'Académie des sciences des États-Unis.

c. Le rapport de Pierre Corvol, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte d'intégrité scientifique » (juin 2016)

Le rapport de Pierre Corvol « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte d'intégrité scientifique 67 ( * ) » , publié en juin 2016, a été commandé par le secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, Thierry Mandon. Il vise en réalité à faire un bilan plus étendu que ne le suppose son intitulé, celui « des actions mises en oeuvre à l'étranger et en France afin de dégager des recommandations opérationnelles concernant l'organisation de l'activité de recherche, de faciliter la mise en oeuvre des bonnes pratiques d'intégrité scientifique 68 ( * ) . ».

Pour ce faire, le rapport se base sur une enquête adressée à 72 institutions, universités, organismes de recherche, grands établissements (27 répondants). Il propose notamment la création de l'OFIS. Ce rapport revêt une importance fondamentale ( 6 mois de travail 69 ( * ) , 62 pages, 16 recommandations , un groupe de travail très familier du sujet 70 ( * ) ) et a été remarqué lors de sa remise au secrétaire d'État. Il a servi, en grande partie, de feuille de route pour l'OFIS, avant que des objectifs ne soient énoncés par le Conseil français de l'intégrité scientifique (CoFIS).

Sont notamment mis en avant les points suivants : l'exemplarité scientifique (le chercheur travaille au sein d'une communauté) ; la mise à disposition publique des données comme véritable objet scientifique (données partagées) ; l'action à mener quand une fraude est repérée (les procédures sont rares et les affaires souvent étouffées) ; la mise en place de formations et de moyens ; la promotion interne de l'intégrité scientifique au sein des institutions, notamment par la mise en place de référents intégrité scientifique.

Les Recommandations du rapport Corvol et leur mise en oeuvre

#1 Établir une nomenclature nationale des inconduites permettant un recensement dans les établissements des cas de manquements à l'intégrité scientifique sur la base d'une typologie commune et univoque.

? Une nomenclature nationale des méconduites scientifiques a été établie. Il n'existe pas, en revanche, de tableau d'équivalence associant une sanction appropriée à chaque type de manquement. Le recensement des cas est normalement effectué par le référent intégrité scientifique auprès du chef d'établissement, sous la forme d'un bilan annuel ou plus régulier, mais celui-ci ne donne pas lieu à des chiffres officiels, et les institutions ne communiquent pas sur ces chiffres.

#2 Mettre à disposition des organismes et des universités des ressources nationales en matière d'intégrité scientifique.

? Le site de l'OFIS a mis en ligne les références majeures en matière d'intégrité scientifique : https://www.hceres.fr/fr/documentation-integrite-scientifique
Il est encore en construction. Il est cependant de plus en plus simple de trouver des ressources accessibles et didactiques sur l'intégrité scientifique, notamment parce que les ressources utilisées pour les formations (MOOC, PPT, supports de formation) sont souvent mises en ligne.

#3 S'appuyer sur l'arrêté du 23 novembre 1988 modifié sur l'HDR pour sensibiliser les institutions et surtout leurs jurys à la vérification de la connaissance du cadre et des pratiques d'intégrité par le postulant à l'HDR.

? La formation à l'intégrité scientifique est obligatoire pour les doctorants, mais certaines institutions ont déjà fait le choix d'en faire bénéficier un public plus large (HDR, encadrants, post-doctorants, etc.)

#4 Introduire explicitement au niveau de l'article 3 alinéa 3 du projet de réforme de l'arrêté des études doctorales “l'acquisition d'une culture scientifique élargie incluant une initiation à l'éthique de la recherche et à l'intégrité scientifique ».

? Reste à faire : la notion de « culture scientifique » n'est pas explicitement citée.

#5 Ajouter au niveau de l'article 3 alinéa 3 du projet de réforme de l'arrêté des études doctorales : “l'École doctorale devra veiller à ce que chaque étudiant ait reçu une sensibilisation à l'éthique et à l'intégrité scientifique”.

? Fait, le mot « formation » a d'ailleurs explicitement remplacé celui de « sensibilisation ».

#6 Inciter à des formations participatives et essentiellement “bottom up”. Permettre à de jeunes docteurs formés à l'intégrité scientifique dans leur école doctorale de contribuer à la formation des générations suivantes.

? La mutualisation est de plus en plus mise en avant au sein des formations (étude de cas, saynètes, ambassadeurs qui diffusent le savoir acquis en formation, etc.).

#7 Mettre en place un site ou un espace numérique national, “labellisé”, où les outils de formation pourraient être en accès libre pour les encadrants et les étudiants. Favoriser une mutualisation et une harmonisation des outils de formation (enseignement à distance, guides, banques de cas, etc.).

? La page web de l'OFIS dédiée aux formations existantes constitue une première avancée en ce sens https://www.hceres.fr/fr/annuaire-des-formations-doctorales-lintegrite-scientifique . Cette mise à disposition des ressources relève plutôt de l'initiative des structures, surtout pour les MOOC. Certains MOOC, comme celui de Bordeaux, sont des références pour les autres institutions.

#8 Établir pour chaque établissement la liste des personnes ressources intégrité scientifique (nom et coordonnées), s'assurer de la mise en place d'une formation sur l'éthique et l'intégrité scientifique dans les établissements.

? La plupart des institutions de recherche indiquent sur leur site web le contact du référent intégrité scientifique ainsi que des documents de cadrage.

#9 Demander que l'ANR, à l'instar des agences européennes de recherche, conditionne le financement de projets de recherche à une politique d'éthique et d'intégrité scientifique de l'institution bénéficiaire.

? Les évaluateurs et les bénéficiaires des aides de l'ANR s'engagent à respecter les principes de la charte de déontologie et d'intégrité scientifique de l'ANR, mise à jour en 2019.

#10 Inciter les établissements à faire en sorte que l'éthique et l'intégrité scientifique soient identifiées dans la Charte des thèses. Demander que le Hcéres examine spécifiquement leur modalité de mise en oeuvre : Inciter le Hcéres à évaluer la politique d'intégrité scientifique 1/ des Collèges doctoraux, 2/ des COMUE et des établissements associés ou fusionnés.

? Les chartes des thèses étant spécifiques à chaque établissement, le critère d'intégrité scientifique n'y figure pas systématiquement, mais une étude quantitative reste à faire sur le sujet.

Les évaluations réalisées par le Hcéres ne méconnaissent pas l'intégrité scientifique, néanmoins elles devraient maintenant mesurer les efforts réalisés par les institutions pour la respecter et la promouvoir.

#11 Élaborer et mettre à disposition un vade-mecum juridique national retraçant précisément les typologies de sanctions en cas de manquement à l'intégrité scientifique, leurs modalités de traitement administratif et juridique, les textes et la jurisprudence applicables en la matière.

? Ce travail a été lancé par l'OFIS et le COFIS, sous la forme d'une base de données, non encore constituée. Il est important qu'il puisse aboutir rapidement.

#12 Favoriser la promotion et la mise en place d'une recherche sur les moyens de formation à l'intégrité et leurs effets, sur les questions épistémologiques d'éthique, d'intégrité et de responsabilité scientifique ainsi que leurs conséquences sociétales.

? Les recherches sur l'intégrité scientifique ont pris de l'ampleur ces dernières années, notamment par la mise en place de colloques ou de revues spécialisées ( Poléthis à l'université de Paris-Saclay, par exemple). La cartographie des formations et une analyse plus qualitative est actuellement en cours au niveau de l'OFIS.

#13 Mieux impliquer les Académies en matière d'intégrité dans les sciences et faire la promotion de leurs travaux en la matière.

? Les Académies sont libres de leurs activités, néanmoins il serait utile qu'elles puissent mettre à contribution les compétences de leurs membres et leurs réseaux internationaux pour participer à la veille et à la réflexion générale en matière d'intégrité scientifique.

#14 Élaborer et diffuser un texte de référence national structurant permettant entre autres de renforcer l'intégrité scientifique dans les établissements

? La circulaire ministérielle n° 2017-040 produite par Thierry Mandon a répondu à cette demande. Cette reconnaissance institutionnelle de l'intégrité scientifique a été suivie par l'élaboration de chartes et de guides.

#15 Mettre en place un espace d'information national sur la question spécifique de l'intégrité scientifique sous forme d'un encart spécifique sur le site institutionnel recherche.gouv.fr, recensant et mettant à disposition de tous les publics l'ensemble des ressources documentaires et initiatives ministérielles sur ce sujet.

? C'est plutôt le site de l'OFIS qui remplit ce rôle.

#16 Créer un bureau, une cellule, un office, l'OFIS (Office français d'intégrité scientifique), structure transversale, indépendante gérant les questions d'intégrité scientifique (expertise, observatoire, lien institutionnel...).

? Cette préconisation a été suivie par la création de l'OFIS en mars 2007. Département du Hcéres, son indépendance institutionnelle est donc relative. Il est indispensable de lui assurer une totale maîtrise de ses travaux et recommandations.

Après la remise du rapport, le secrétaire d'État a accueilli le groupe de travail le 14 décembre 2016, afin de préparer la mise en oeuvre de certaines recommandations qu'il contenait, notamment : créer un Office français de l'intégrité scientifique (OFIS), intégré au Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres) ; publier une circulaire demandant que tous les établissements appliquent les recommandations établies par le rapport, et respectent la charte de déontologie des métiers de la recherche ; mettre en place par l'ANR un dispositif permettant de s'assurer du respect de la charte auprès des établissements recevant des financements de sa part ; organiser une conférence au début de l'année 2017 (la future conférence des signataires, réunissant l'OFIS, tous les établissements signataires et le groupe de travail de Pierre Corvol).

d. La circulaire du 15 mars 2017 du secrétaire d'État Thierry Mandon, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche (mars 2017)

La circulaire n° 2017-040 du 15 mars 2017 du secrétaire d'État Thierry Mandon, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche 71 ( * ) fait suite au « rapport Corvol », et au constat que la France manque d'organes assurant la mise en place de mesures et de mécanismes appropriés en matière d'intégrité scientifique. À cet égard, elle dénonce un retard en matière de « mesures et de mécanismes appropriés pour traiter l'intégrité scientifique et son contrôle ». Pour y répondre, la circulaire appelle à mettre en oeuvre différentes dispositions, parmi lesquelles :

-- Veiller à l'adoption et à l'application des principes de la charte de déontologie des métiers de la recherche ;

-- Faire désigner par le responsable exécutif des opérateurs de recherche d'un responsable à l'intégrité scientifique (RIS) ;

-- Mettre en place des procédures transparentes pour la saisine, l'instruction du dossier par le RIS ;

-- Énoncer le rôle futur que l'ANR doit jouer dans la vérification de l'adhésion des établissements financés avec les préconisations d'intégrité scientifique : « C'est ainsi, qu'à terme, l'Agence nationale de la recherche (ANR) conditionnera le financement de projets de recherche à la déclaration de la mise en place effective d'une politique d'éthique et d'intégrité scientifique de l'institution bénéficiaire. »

-- Créer l'OFIS au sein du Hcéres , en plus de renforcer l'évaluation des critères d'intégrité scientifique : « Situé au sein d'une autorité administrative indépendante, l'OFIS sera en mesure d'assurer un rôle d'observatoire et de référence pour toutes les questions relatives à l'intégrité scientifique, hors questions disciplinaires et pénales relatives au traitement des manquements à l'intégrité scientifique. Elle aura également vocation à accompagner l'engagement des opérateurs de recherche sur les questions d'intégrité scientifique réunis au sein d'une Conférence des signataires. Elle interagira aussi avec le réseau des référents dédiés des différents opérateurs de la recherche. »

e. Le « Vade-mecum intégrité scientifique » (Groupe de travail Corvol, mars 2017)

Le « vade-mecum intégrité scientifique 72 ( * ) », publié en mars 2017 et issu des travaux d'un groupe de travail parmi lesquelles figurent certaines personnes auditionnées dans le cadre de ce rapport, se présente comme un complément à la lettre circulaire ministérielle . Il est néanmoins moins souvent cité que le « rapport Corvol », alors même qu'il aspire à en être la déclinaison opérationnelle. Il propose une série de recommandations, propres à conforter l'intégrité scientifique. Il présente 1) les missions du référent intégrité scientifique (promotion, définition de la politique d'intégrité scientifique et traitement des manquements), différentes de celles d'un comité d'éthique ; 2) une typologie indicative des manquements à l'intégrité ; 3) la procédure de traitement des allégations de manquements (allégation non anonyme, contradictoire dans l'instruction) ; 4) le rôle et les missions de l'OFIS (expertise, observatoire, lien institutionnel) ; 5) le rôle joué par l'ANR en matière d'intégrité scientifique (s'assurer de la prise en compte de l'intégrité scientifique par les porteurs de projets) ; 6) le rôle joué par le Hcéres (prendre en compte l'intégrité scientifique dans l'évaluation des établissements et des organismes de recherche).

f. Le guide « Pratiquer une recherche intègre et responsable » (Comité d'éthique du CNRS - COMETS, mars 2017)

Le guide « Pratiquer une recherche intègre et responsable 73 ( * ) » , rédigé par Lucienne Letellier, membre du comité d'éthique du CNRS (COMETS), a été inspiré par les avancées permises par la déclaration de Singapour en 2010. Ce guide, régulièrement actualisé et remis aux entrants au CNRS, met particulièrement l'accent sur la question de la science ouverte . Le COMETS, créé en 1994, est une instance de réflexion chargée des questions d'éthique et d'intégrité capable de s'autosaisir, qui se compose de douze personnes, issues de champs disciplinaires variés. Il est directement rattaché à la présidence du CNRS et lui transmet des avis. Parmi les quarante avis publiés, on citera notamment, en plus du guide « Pratiquer une recherche intègre et responsable », des avis portant sur la science ouverte 74 ( * ) , les questions d'évaluation et d'expertise ou encore les publications sur les réseaux sociaux et les liens et conflits d'intérêts 75 ( * ) . Le COMETS a également récemment noté qu'en matière d'évaluation du chercheur, les missions supplémentaires ( peer review , vulgarisation et valorisation de la recherche, etc.), sont trop peu prises en compte et que la bibliométrie est encore l'outil privilégié.

g. Le « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'IS » (ResInt, 2018)

Le « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'IS 76 ( * ) », publié en 2018 par le réseau national des référents à l'intégrité scientifique (ResInt), répond à un manque soulevé dans le rapport Corvol, lequel faisait état de « procédures encore partielles, voire parfois inexistantes, en matière de saisine et d'instruction-enquête 77 ( * ) . ». Ce guide vise à exposer sous la forme de recommandations les principes à suivre pour l'ensemble de la procédure (déroulement, suites, archivage). Il est conforme au guide européen, qui est lui-même en cohérence avec les textes internationaux de référence. Il doit servir de guide pour aider au respect de l'intégrité scientifique dans chaque structure, mais le référent intégrité scientifique pourra l'adapter en fonction du corps de métier ou du champ d'expertise (certains l'adoptent directement).

Ce guide a été complété en 2019 par une autre publication du ResInt : « Repères pour une mise en oeuvre de la procédure de recueil et de traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique, en conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) 78 ( * ) ». Ce document s'adresse aux référents intégrité scientifique, dans le but de les aider à être en conformité avec la RGPD 79 ( * ) .

h. La « Charte de déontologie et d'intégrité scientifique de l'Agence nationale de la recherche » (ANR, 2018)

L'Agence nationale de la recherche (ANR) s'est également dotée d'une « Charte de déontologie et d'intégrité scientifique 80 ( * ) » en 2009, qu'elle a révisée en 2018 pour y intégrer également les principes et règles en matière d'intégrité scientifique. L'ANR est aussi signataire depuis mai 2018 de la « charte nationale de déontologie des métiers de la recherche » et s'est dotée d'une « Politique en matière d'éthique et d'intégrité scientifique 81 ( * ) » en 2014, basée sur les principales déclarations internationales (déclaration de Singapour, code de conduite européen, principes du Global Research Council 82 ( * ) ). Ce dernier texte confère à la fois aux financeurs et aux bénéficiaires de financements la responsabilité de vérifier la conformité des projets aux principes de l'intégrité et de l'éthique.

« Les financeurs de la recherche et les établissements et structures de recherche publics et privés, dans le domaine de leur responsabilité, doivent s'assurer que l'environnement de recherche qu'ils soutiennent et les exigences qu'ils ont face au rendement ou à la performance des chercheurs contribuent à encourager des façons de faire favorables à l'éthique et pour l'intégrité en recherche. » [...]« L'ANR engage les établissements à se doter d'une capacité de réflexion éthique, et si ce n'est déjà fait, de politiques de prévention et de traitement des manquements à l'intégrité. »

La « Charte de déontologie et d'intégrité scientifique de l'ANR » énonce les principes, les règles d'action et de comportement que doivent adopter l'ANR, ses collaborateurs, ses administrateurs, déposants, partenaires et bénéficiaires. Sont mis en exergue les cas de fraude falsification, plagiat (dits « FFP ») et de conflits d'intérêts, l'importance de rapporter les cas de manquements à l'intégrité, mais aussi de former les différents participants à la question.

L'association de l'ANR à la politique d'intégrité scientifique avait été mise en avant par le rapport Corvol (« Proposition n° 9 : Demander que l'ANR, à l'instar des agences européennes de recherche, conditionne le financement de projets de recherche à une politique d'éthique et d'intégrité scientifique de l'institution bénéficiaire. ») et rappelée par le vade-mecum qui a suivi (« Les porteurs de projet en principal (principal investigateur-PI) devront indiquer qu'ils ont pris connaissance des règles éthiques et d'intégrité scientifique qu'implique leur projet de recherche. Ils devront déclarer avoir pris connaissance de la charte nationale de déontologie des métiers de la recherche, qu'ils en partagent les valeurs et les principes sous-jacents. »). À ce titre, l'ANR demande à ceux dont elle finance les projets de s'engager à respecter à la fois les principes de la charte nationale de déontologie des métiers de la recherche, et la charte de déontologie et d'intégrité scientifique propre à l'agence de financement. Suspension ou recouvrement des dotations décidées ou versées sont prévus en cas de non-respect de l'intégrité scientifique, comme le fait déjà l'European Research Council (ERC), mais la situation ne s'est pas encore produite.

L'ANR dispense également des formations à l'ensemble du personnel, ainsi qu'aux présidents-référents des comités d'évaluation, lors desquelles l'accent est mis sur ces engagements. Elle a nommé une référente intégrité scientifique en 2018 et traite les allégations de manquement à l'intégrité dans le cadre des projets soutenus.

Nous l'avons vu, la France dispose déjà, avec des codes, des chartes -- nationales ou européennes -- et même des guides encadrant les collaborations internationales, d'un arsenal généreux en matière d'intégrité, qui définit explicitement la typologie des manquements et les nombreuses actions à mener en faveur de l'intégrité. L'ensemble de ces textes permet de dégager des points saillants, pour certains mis en évidence dès les années 2005 : principes cardinaux de fiabilité, d'honnêteté, de respect et de la responsabilité (« Code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche », « Déclaration de Singapour ») ; transparence, clarté et harmonisation de la procédure d'instruction dans le cadre d'une allégation (« Déclaration de Singapour » et principes issus du Forum mondial de la science de l'OCDE, « Guide ENRIO ») ; développement d'un environnement propice à l'intégrité scientifique (« Déclaration de Singapour », « Code de conduite européen pour l'intégrité de la recherche ») ; usage raisonné des indices bibliométriques (« Code de conduite pour le recrutement des chercheurs », « Principes de Hong Kong »).

Les rapporteurs estiment qu'il existe aujourd'hui un corpus complet et solide de documents par lesquels la communauté internationale des chercheurs et leurs institutions ont défini l'intégrité scientifique et les moyens de la conforter et de la préserver. Ils constatent néanmoins que leur respect par l'ensemble des chercheurs ne peut plus reposer uniquement sur les pratiques conventionnelles de gestion de la science par ses acteurs. Dans sa majorité, la communauté scientifique française demande à la représentation nationale de l'aider à faire progresser l'intégrité scientifique en lui donnant une reconnaissance législative et en modifiant le code de la recherche pour que les chercheurs et leurs institutions de rattachement la considèrent comme constitutive de leurs droits et devoirs.

Recommandation n° 1 : Introduire, par la loi, dans le code de la recherche une définition de l'intégrité scientifique et proposer des règles générales pour engager les institutions et les chercheurs à la respecter. Cet objectif a été en grande partie atteint par la loi de programmation de la recherche.

II. LES ACTEURS DE L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE

L'intégrité scientifique est l'affaire de tous : chercheurs et auteurs ; revues, comités de rédaction, reviewers ; universités et institutions ; financeurs de la recherche ; politique ; citoyens avertis et journalistes ; bibliothèques 83 ( * ) ; sociétés savantes. On peut distinguer, en tant que régulateurs et promoteurs de l'intégrité scientifique, d'une part des acteurs institutionnels, mis en place depuis quelques années à la suite notamment du rapport de Pierre Corvol ( 1 ) et, d'autre part, les acteurs associatifs ou informels, qui ont le rôle de vigie ou d'agrégateurs ( 2 ).

1. Des acteurs institutionnels au rôle limité

Certains établissements se sont très tôt saisis de la question de l'intégrité scientifique, en créant des comités d'éthique et d'intégrité scientifique ou des réseaux et délégations chargés de ces questions. L'INSERM a été pionnier en matière d'intégrité scientifique , dès 1999, avec la création d'une « délégation à l'intégrité scientifique » (DIS), créée après une affaire médiatique de fraude scientifique autour du « gène de l'obésité », mais aussi après un débat remarqué autour de la « mémoire de l'eau 84 ( * ) ». L'institut Pasteur, aussi, en 2002, a mis en place un « comité de veille déontologique et conciliation » (CVDC). Le dernier terme visait à mettre en évidence que ce sont souvent des conflits qui sont à l'origine des méconduites scientifiques.

Alors que persiste une interrogation autour du traitement des inconduites (local ou national, administratif ou pénal, encadré par un texte local, national voire international), la députée Anne Genetet, membre de l'OPECST, tout comme Ghislaine Filliatreau, déléguée à l'intégrité scientifique au sein de l'INSERM, relèvent une analogie possible avec la lutte antidopage , dont les facteurs majeurs de triche sont autant la compétition des sportifs que la médiatisation : « On pourrait dresser une analogie avec la lutte antidopage, dont chaque fédération sportive est chargée pour ses ressortissants, mais sous le contrôle d'une agence publique indépendante 85 ( * ) . ». C'est d'ailleurs la même métaphore que file le sénateur Claude Huriet, parlant d'un triathlon avec trois épreuves : « course à l'innovation, course au financement, course à la publication 86 ( * ) . ».

a. L'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) et le Conseil français de l'Intégrité scientifique (CoFIS)

L'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) , a été créé le 20 mars 2017 à la suite des recommandations du rapport Corvol. Ce rapport préconisait de créer une structure indépendante, mais celle-ci a finalement été placée sous l'égide du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres). L'OFIS dispose donc de moyens matériels alloués par le Hcéres pour son fonctionnement. Il se compose actuellement d'une équipe de quatre personnes : une directrice par intérim (depuis septembre 2020), une chargée de projet et un scientifique, issu des sciences de la vie, et un conseiller scientifique.

L'OFIS dispose de plusieurs compétences et attributions : il est à la fois un observatoire, un animateur et une référence en matière d'intégrité scientifique . En tant qu' observatoire , il vérifie l'application de la « charte nationale de déontologie des métiers de la recherche » et encourage l'élargissement des signataires (8 en 2015, 36 fin 2018, 50 fin 2019, 60 au moment de la publication de ce rapport). Il recense aussi les pratiques en vue de leur harmonisation et procède à une veille générale sur les sujets relatifs à l'intégrité scientifique. Il aspire, dans le temps, à pouvoir aussi constituer une base de données, destinée à recenser les cas et leur instruction dans les différentes institutions françaises. En tant que pôle de réflexion , il participe à définir une politique nationale de l'intégrité scientifique, et il émet des avis et des recommandations. En tant qu' animateur , il valorise la recherche autour de l'intégrité scientifique, participe au réseau des référents intégrité scientifique (ResInt) et prend part à de nombreux colloques.

L'OFIS recommande des « bonnes pratiques », édicte des recommandations, mais n'aspire pas à être une structure de sanction ou d'instruction (« l'intégrité ne se réduit pas à une absence de manquement 87 ( * ) »). En effet, en cas de manquement, ce n'est pas l'OFIS qui est saisi, mais, localement, le référent intégrité de l'établissement, dont c'est la responsabilité. Quand l'OFIS est sollicité sur un dossier personnel, il aiguille vers le RIS de l'organisme ou de l'établissement auquel est rattaché le chercheur mis en cause. L'OFIS est susceptible d'appeler l'attention du référent intégrité scientifique , comme le rappelle M me Nelly Dupin, présidente par intérim du Hcéres 88 ( * ) , quand celui-ci ne regarde pas suffisamment une affaire. David Larousserie est attaché à ce rôle « d'accélérateur 89 ( * ) ». Il faut, selon lui, qu'en plus de la mission de diffusion des connaissances autour de l'intégrité scientifique, l'OFIS puisse à la fois être un levier quand des affaires s'enlisent, et qu'il puisse aussi travailler à l'inventaire des différentes affaires et de leur publicité.

En 2017, l'OFIS a été doté d'un conseil d'orientation scientifique, le CoFIS. Son rôle est « d'orienter et superviser les travaux de l'OFIS ». Il se compose de douze membres, soucieux de l'intégrité scientifique, de l'organisation du système d'enseignement supérieur et de recherche français et de nouvelles formes de recherche en science ouverte (la majorité sont des chercheurs titulaires ou émérites). Son rôle est de travailler à la collecte des données et, à l'aide de groupes de travail, de donner des orientations pour l'OFIS, son « bras opérationnel 90 ( * ) ». On notera toutefois ci-après que le COFIS semble aller au-delà de la simple orientation et supervision du travail de l'OFIS en prenant directement en charge une partie du travail opérationnel. Fin 2018, le CoFIS a ainsi publié une feuille de route 2020 de l'intégrité scientifique 91 ( * ) , qu'il se propose de mettre lui-même en oeuvre par le biais de groupes de travail dont les participants sont pour la plupart désignés en son sein 92 ( * ) . Il semble donc que le CoFIS se soit donné à la fois un rôle de conseil scientifique de l'OFIS et d'organe de définition et de mises en oeuvre de sa stratégie. Cette pluralité de missions impose à ses membres une grande capacité de mobilisation qui n'est pas toujours compatible avec leurs disponibilités professionnelles. Afin de mieux articuler le travail de ces deux entités, il serait judicieux de réévaluer le rôle et les missions de chacune et de clarifier leurs relations institutionnelles et opérationnelles.

Recommandation n° 2 : Réévaluer les conditions d'exercice des missions de l'OFIS et du CoFIS, ainsi que leurs rôles institutionnels.

Figure 2. Feuille de route 2020 de l'intégrité scientifique produite par le CoFIS.

Dans le cadre de cette feuille de route, basée en grande partie sur les recommandations contenues dans le rapport Corvol, le CoFIS affiche comme première priorité d'harmoniser les procédures existantes. Le ResInt a produit en 2018 le « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique », diffusé par l'OFIS, sur lequel les référents se basent largement pour décliner leur propre procédure d'instruction d'une méconduite scientifique. L'OFIS a aussi publié en juin 2019 un « vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique, à l'usage des chefs d'établissements 93 ( * ) ». Ce document s'accompagne d'une liste de contrôle, permettant aux chefs d'établissement de s'assurer de la solidité des éléments issus de l'investigation qui seront amenés à fonder leurs décisions.

Un autre axe de cette feuille de route concernait les mutualisations d'expérience. S'il existe une nomenclature nationale des méconduites (FFP et pratiques questionnables de recherche) qui fait consensus 94 ( * ) , la réalisation d'une base de données des méconduites et de leurs suites s'avère plus problématique. Cette dernière nécessiterait en effet d'obtenir un rapport annuel de la part des référents intégrité scientifique , qui n'ont pas nécessairement systématisé ce processus dans leurs établissements. Plusieurs difficultés se posent : le format que pourrait prendre ce bilan rédigé par le référent, ainsi que les modalités de la publicité à donner aux rapports, même anonymisés. À ce stade des réflexions, le modèle retenu est celui d'une base de données fermée, réservée aux seuls référents et chefs d'établissements 95 ( * ) . Contrairement à un modèle type RetractionWatch , les dossiers ne seraient pas classés selon les méconduites alléguées, mais chaque cas serait soigneusement rapporté, de manière anonymisée, en intégrant par exemple la nature du signalement, le déroulement de la procédure et les suites données : « Le but n'est pas de quantifier les méconduites (ce serait illusoire car nécessairement très partiel) mais de qualifier les cas : mutualiser les retours d'expérience pour progresser mutuellement 96 ( * ) . »

L'OFIS contribue par ailleurs à diffuser une culture positive de l'intégrité scientifique en partageant un certain nombre de documents sur son espace web sur le site du Hcéres, en proposant de mettre en avant des institutions exemplaires et des initiatives inspirantes 97 ( * ) et la réalisation d'une section « FAQ » qui permettrait de répondre aux questions les plus courantes des chercheurs en matière d'intégrité scientifique.

L'OFIS est actif à l'échelle européenne et internationale. Il participe à ENRIO, prend part à plusieurs autres projets européens, comme le Mutual Learning Experience (MLE) on Research Integrity 98 ( * ) , dans le cadre d'Horizon 2020.

Un autre axe de la feuille de route concerne la formation à l'intégrité scientifique. L'OFIS et le CoFIS ont ainsi constitué un annuaire des formations doctorales à l'intégrité scientifique, mis en ligne en décembre 2020 99 ( * ) . Cet annuaire, qui recense une dizaine de formations en France majoritairement sous forme de MOOC 100 ( * ) , n'est pas exhaustif et à vocation à être complété au fil de l'eau. L'OFIS a par ailleurs co-organisé le premier atelier des RIS consacré à la dimension juridique de leurs missions. Il intervient très régulièrement lors des formations des doctorants, de séminaires, de journées d'études ou de congrès nationaux comme internationaux sur la question de l'intégrité scientifique. Une mission pour évaluer l'impact du dispositif de formation à l'intégrité scientifique est par ailleurs en cours.

Pour ce qui est de la promotion des valeurs de l'intégrité scientifique , l'OFIS participe régulièrement à des événements dédiés à l'intégrité scientifique assurés dans les sites universitaires ou auprès d'autres acteurs de la recherche et de l'enseignement supérieur. Il a aussi organisé au printemps 2019 le 4 e colloque national de l'intégrité scientifique 101 ( * ) . Il agit aussi via son site web. Un groupe de travail « bibliographie » vise à enrichir cette part de sa mission.

L'OFIS est également engagé en faveur de la promotion d'un environnement propice à une science intègre . Dans ce domaine, l'action de l'OFIS passe notamment par l'encouragement des différents acteurs du monde de la recherche à signer la « charte nationale de déontologie des métiers de la recherche ». L'OFIS a aussi retenu ce thème pour la 3 e conférence des signataires de cette charte, qui s'est tenue en février 2021. Enfin, l'OFIS s'est doté d'un groupe de travail réfléchissant spécifiquement à cet enjeu et examine notamment les critères d'évaluation du Hcéres dans cette optique. Un vade-mecum à l'usage des comités d'expertise du Hcéres est en préparation 102 ( * ) .

Concernant l'intégration des enjeux de la science ouverte , l'OFIS a co-organisé son premier colloque national sur le sujet en avril 2019 avec le Comité national pour la science ouverte (CoSO) et la Conférence des présidents d'université (CPU) 103 ( * ) . Sur la base des conclusions de ce colloque, l'OFIS finalise une note prospective sur les enjeux d'intégrité scientifique dans l'ouverture des données, protocoles et publications de recherche. L'OFIS participe par ailleurs à un consortium européen dédié à l'exploration de la perspective « éthique et intégrité » d'une science ouverte responsable 104 ( * ) .

La réunion du CoFIS de juin 2020 a permis de faire le point sur les travaux en cours. Ainsi, le groupe « séminaire RIS (référents intégrité scientifique) », qui témoigne selon Nelly Dupin 105 ( * ) de « partenariats fructueux » avec le ResInt, est chargé de préparer la prochaine rencontre des RIS, laquelle portera sur le thème des « enjeux de la médiation », la première ayant porté sur les aspects juridiques de la mission du référent. Le groupe de travail « formation » qui a produit un annuaire des formations doctorales sur l'intégrité scientifique, souhaite réaliser un état des lieux qualitatif et quantitatif de l'offre de formation. Le groupe « base de données et retour d'expérience » s'est donné pour but de construire une base de données interne qui recense les différents cas de méconduites et leurs traitements au sein des établissements. Elle servira de « clef partagée de lecture pour les référents 106 ( * ) ». Le groupe « colloque IS et communication/média » a la charge de préparer le colloque annuel de l'intégrité scientifique. Enfin, le groupe « IS et évaluation » réfléchit au thème-pivot de l'évaluation de la recherche et du chercheur, laquelle est une cause avérée des méconduites scientifiques. Il a pour objectif de rédiger un guide des manières d'évaluer après DORA, intitulé « Intégrité scientifique (IS) : guide pour l'adoption de bonnes pratiques concernant l'environnement de la recherche » (destiné aux directeurs d'unité de recherche, des établissements, des départements d'évaluation du Hcéres).

Ce dernier groupe de travail n'est pas sans interroger la question de l'indépendance de l'OFIS , soulevée dès la première réunion du CoFIS : « L'OFIS est créé sous forme d'un département du Hcéres : cela facilitera son quotidien et l'articulation avec l'évaluation-conseil, mais il conviendra de veiller à l'indépendance de la programmation de son action 107 ( * ) . ». Il s'agit d'un point qui sera abordé plus en détail en quatrième partie.

b. Le référent intégrité scientifique, représentant de l'intégrité scientifique

Les référents intégrité scientifique (RIS) tirent leur origine d'une suggestion importante du rapport du P r Pierre Corvol. Leurs missions ont été définies par la « circulaire Mandon 108 ( * ) » en mars 2017 : « Le garant de l'intégrité scientifique est le responsable exécutif de l'opérateur de recherche [...] Pour l'assister dans cette tâche et le représenter au niveau national au sein d'un réseau des signataires de la Charte, il désignera un référent à l'intégrité scientifique. Il lui adressera une lettre qui précisera ses missions et son rattachement. Le référent devra notamment être clairement distingué de la direction scientifique de l'opérateur. » Néanmoins, il faut souligner que s'il est fortement recommandé aux établissements de recherche de se doter d'un RIS, cela n'est, pour l'heure, pas obligatoire. Les RIS étaient au nombre de 134 en octobre 2020 109 ( * ) (ils étaient 83 fin 2018, 115 fin 2019). Ils sont nommés par le responsable de l'établissement pour une durée déterminée, lequel effectue son choix au regard des compétences de cette personne. Le référent intégrité scientifique est ainsi le plus souvent un chercheur ayant de l'expérience, idéalement émérite , afin d'être le plus indépendant possible. Le « rapport Corvol » appelait à ce que le RIS ne soit pas impliqué dans des processus d'évaluation, mais plusieurs RIS sont vraisemblablement vice-présidents Recherche et donc en position de décision. Quelques référents ont été choisis parmi les personnels ayant cessé leurs activités professionnelles. La majorité d'entre eux 110 ( * ) sont toutefois pleinement associés à la gestion de leur établissement ce qui peut être à l'origine de conflits d'intérêts.

Les rôles et les fonctions transversales des RIS sont définis dans le vade-mecum du groupe de travail Corvol 111 ( * ) , publié dès mars 2017 :

-- « vigilance » : veiller à ce que l'intégrité scientifique ait une place centrale dans l'établissement par la promotion active de ses valeurs, et que les codes de bonne conduite et diverses chartes soient appliqués et connus de tous ; promouvoir l'intégrité scientifique et ses bonnes pratiques ;

-- « prévention et traitement des manquements » : recueillir les allégations et décider de la poursuite de son instruction, y compris sous la forme d'une médiation ;

-- « reddition de compte » : constituer le rapport d'enquête qui doit permettre au chef d'établissement de prendre sa décision ; rendre compte de son activité de manière annuelle.

Lors de son audition, le journaliste du Monde David Larousserie a insisté sur la « méconnaissance » de tous, chercheurs comme société, de l'ampleur du phénomène des méconduites scientifiques . S'il n'est pas possible de disposer d'un véritable état des lieux des signalements faits aux référents intégrité scientifique, tant en termes de nature que de quantité, les référents intégrité scientifique entendus par les rapporteurs ont brossé une peinture partielle des méconduites scientifiques et de leur prise en compte par les organismes de recherche. Il faut d'abord noter que tous les référents intégrité scientifique rencontrés ont témoigné du fait que leur nomination avait exhumé un certain nombre d'affaires, même anciennes. Le RIS sert, vraisemblablement, de nouvelle voie de recours 112 ( * ) .

Pour sa part, Ghislaine Filliatreau, RIS à l'INSERM, a évalué le nombre de dossiers ouverts à 150 depuis 2010 113 ( * ) , avec peu de falsifications, le reste relevant davantage de la « zone grise ». Elle reçoit en moyenne 4 à 5 prises de contact par semaine, des personnels qui lui écrivent majoritairement pour prendre conseil, par exemple sur un conflit de signatures. Les signalements ou allégations sont quant à eux assez rares et concernent plutôt la falsification de données. La précédente déléguée à l'intégrité scientifique, Michelle Hadchouel (2008-2016), rapporte pour sa part que « [...] presque deux tiers de [s]on activité sont consacrés à des conflits d'auteurs et notamment à des jeunes qui ont passé deux ans en laboratoire en post-doc par exemple, et qui voient le papier être publié sans que leur nom apparaisse. [...] Et puis on trouve quelques allégations de fraude ou d'embellissement de figures avec quelques fois une frontière très floue entre l'embellissement de figures et la fraude 114 ( * ) . ».

Jean-Pierre Savineau 115 ( * ) , RIS à l'université de Bordeaux, a reçu pour sa part depuis 2017, huit signalements de potentiels manquements à l'intégrité scientifique, touchant à la biologie (falsification de données avec un cas de copier-coller de résultats, qui a donné lieu à une correction de l'article en ligne), aux sciences humaines (allégation de plagiat, inter-établissement, formulée avant le recrutement d'un chercheur préempté et qui a donné lieu à deux rapports distincts et au non-recrutement de la personne), à l'économie (allégation de plagiat envers un doctorant qui aurait copié les travaux d'un chercheur de Bordeaux, dont l'instruction est encore en cours car aucun accord n'a été possible entre les deux établissements) et à la santé (affaire de plagiat et de blocage de données suite à des mutations de chercheurs, qui est finalement portée devant les présidents).

Du côté du CNRS, Rémy Mosseri a effectué un bilan des deux premières années de son activité en tant que RIS 116 ( * ) . Il explique avoir reçu à ce jour quelque 90 signalements et avoir formalisé 54 saisines après analyse des cas (voir figure 3). « Il s'agit assez souvent de querelles liées à des collaborations qui se sont mal terminées et pour lesquelles il subsiste des doutes sur la paternité des idées, la bonne manière d'interpréter des résultats ou les autorisations de publication ». Selon ses observations, les saisines concernant le cas de chercheurs en biologie sont les plus nombreuses en proportion de la part de cette discipline au CNRS. Celles en sciences humaines et sociales 117 ( * ) sont également en nombre important, en particulier pour des signalements de plagiat.

Enfin, pour sa part, Laurence Guyard 118 ( * ) , RIS à l'ANR depuis 2018, indique n'avoir eu à instruire que 2 cas depuis sa prise de fonctions. Il s'agit d'affaires assez anciennes qui n'avaient pas connu de suite et l'arrivée du nouvel acteur, le référent intégrité scientifique de l'ANR, a conduit à exhumer ces allégations.

Figure 3. Saisines CNRS relatives à l'intégrité scientifique.

<0B8FD779-522C-4C93-98AA-EFDBB6A443A2>"> Les méthodes et les conséquences de ce que fait le référent intégrité scientifique sont insuffisamment définies selon Ghislaine Filliatreau 119 ( * ) , qui a fait partie du groupe de travail Corvol ainsi que de l'équipe chargée de proposer le guide du ResInt « [p]our le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique ». En effet, elle a insisté, lors de son audition, sur le caractère systémique, structurel, du problème de l'intégrité scientifique alors que la mise en instruction peut avoir des répercussions sur un grand nombre de personnes, avec des effets qu'on ne maîtrise pas toujours. Elle préconise que soient davantage explicités les droits et devoirs du RIS . Est-il là pour protéger la science, pour contrôler que les articles signalés soient bien corrigés et que les personnes soupçonnées répondent aux accusations ? Comment s'accorde-t-il avec les Ressources humaines, puisque selon Ghislaine Filliatreau, quand un chercheur « dérape », il n'est pas rare que cela traduise aussi de mauvaises relations avec les collègues ? La juriste Frédérique Claudot 120 ( * ) , déontologue de Santé Publique France, s'est interrogée sur un devoir de dénonciation du RIS. L'article 40 du code de procédure pénale dit que tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'informer sans délai le procureur de la République ; les RIS doivent-ils, alors, saisir le procureur ? Toutes ces questions, complexes, et qui engagent la responsabilité du RIS, ne sont pas encore tranchées.

Le ResInt, tout comme Michèle Leduc, ont fait valoir le problème de la protection du RIS, qui peut être exposé à des menaces et poursuites lors d'affaires « houleuses » . L'association Éthique et Intégrité a quant à elle témoigné lors de son audition 121 ( * ) vouloir proposer un fichier des RIS , qui évalue leur travail (temps de réponse, respect de la procédure, etc.) à l'aide des retours des « victimes » qui ont fait appel à l'association. Certains RIS, estiment les représentantes de l'association, n'ont pas accès ou ne consultent pas les dossiers instruits ou en cours d'instruction par le précédent référent et personne ne s'assure que la continuité est respectée. Ce dispositif pourrait-il permettre d'encadrer davantage le statut de RIS, ou au contraire connaître des dérives semblables aux sites permettant de noter les professeurs de lycées 122 ( * ) en nourrissant un climat de suspicion envers la personne responsable de l'intégrité scientifique ?

On note par ailleurs des obstacles à même de limiter l'efficacité du travail des RIS. En premier lieu, il n'existe pas de formation dédiée aux RIS en France. La question se pose, d'ailleurs, de savoir quelle serait la solution la mieux adaptée en la matière. Ainsi, Frédérique Claudot, est favorable tant aux formations des RIS qu'à la mise en place de certifications. D'autres, comme le P r Pierre Corvol, s'inquiètent de certifications opportunistes qui fleurissent ces dernières années afin d'offrir, contre paiement, une formation aux RIS : une « économie de l'intégrité scientifique 123 ( * ) ». Lors de leur audition, Michelle Bergadaà et Pierre-Jean Benghozi, membres de l'Institut de recherche sur la fraude et le plagiat académique (IRAFPA) 124 ( * ) , qui proposent au sein de leur structure des formations payantes 125 ( * ) , ont rapporté que quelques référents français ont suivi leurs formations 126 ( * ) .

Hervé Maisonneuve 127 ( * ) , médecin devenu après son audition référent intégrité scientifique à la faculté de médecine université de Paris, souligne par ailleurs que les RIS n'ont pas de vrai jour dédié à leur mission intégrité scientifique , tout comme ils n'ont pas toujours les moyens matériels de s'acquitter de leur fonction (rédaction des enquêtes dans leurs ordinateurs personnels).

Enfin, selon la « circulaire Mandon », c'est au chef d'établissement de désigner un RIS et de lui remettre une lettre de mission. Cependant, il a été constaté lors des auditions que certains établissements n'ont pas de RIS , et que, lorsqu'il a été désigné, son rôle, son statut et ses missions ne sont pas toujours clairement définis . Sa désignation n'est pas systématiquement accompagnée d'une lettre de mission 128 ( * ) , a fait remarquer Pierre Mutzenhardt 129 ( * ) , président de la commission « Recherche et innovation » de la CPU. Cela pose problème, comme ont pu le souligner à plusieurs reprises les référents pendant leurs auditions, car leurs interlocuteurs ont souvent du mal à déterminer leur rôle exact. Le RIS n'est ni arbitre, ni avocat. L'ancien sénateur Claude Huriet aime à les appeler plutôt des « détecteurs 130 ( * ) ».

Faut-il, alors, inscrire dans la loi l'obligation de désigner un RIS par établissement et définir ses missions et son statut , comme c'est actuellement le cas pour les référents-déontologues ou les médiateurs ? Michelle Hadchouel est d'autant plus favorable à la mise en place d'un statut pour les référents à l'intégrité scientifique que dans d'autres pays, comme les pays anglo-saxons, leurs homologues ont la possibilité de sécuriser les données de la recherche, alors qu'un RIS français ne peut absolument pas saisir du matériel informatique, puisqu'il ne dispose pas d'un pouvoir d'enquête. Pierre Corvol, aussi, souligne cet enjeu : « Il est nécessaire de donner un statut aux référents scientifiques qui sont en première ligne dans le traitement des méconduites scientifiques. On est encore loin du compte 131 ( * ) . ».

Recommandation n° 3 : Encourager la nomination de RIS dans l'ensemble des établissements de recherche ; préciser leur statut et les conditions d'exercice de leurs missions ; formaliser le suivi de leur action, par exemple par la remise de bilans annuels ou pluriannuels de leur activité.

Il faut noter les efforts réalisés par certains établissements de recherche, notamment les plus importants en taille, pour structurer davantage le travail autour de l'intégrité scientifique. C'est notamment le cas au CNRS ou à l'Inrae. Au CNRS, le RIS Rémy Mosseri anime une mission intégrité scientifique (MIS). Celle-ci se compose de six chargés de mission (scientifiques couvrant différents champs de recherche et travaillant à temps partiel pour la mission) et d'une responsable administrative. La MIS peut également travailler en lien avec le référent déontologue sur des questions de formation et de sensibilisation du personnel, ainsi qu'avec la médiatrice du CNRS pour déceler des cas de méconduites scientifiques et conduire des « médiations scientifiques ».

À l'Inrae, c'est une délégation à la déontologie, l'intégrité et l'éthique qui a récemment été mise en place 132 ( * ) : « Elle comprend deux référents à l'intégrité scientifique, une référente déontologue et une référente à l'éthique des projets de recherche, dont l'activité est coordonnée par une déléguée qui remplit un rôle de “chef d'orchestre” : veille d'ensemble sur les évolutions réglementaires, institutionnelles et sociétales des sujets, appui à la direction générale et coordination des acteurs internes. Nous avons aussi constitué un comité de déontologie et d'intégrité scientifique, composé de 8 agents Inrae aux compétences et parcours divers, dont le rôle est de conduire une réflexion de fond et de proposer des actions qui favorisent la diffusion de ces valeurs au sein de l'institution ». Selon le PDG d'Inrae, Philippe Mauguin, l'intégrité scientifique, la déontologie et l'éthique « sont autant de valeurs qui doivent être très fortes pour la recherche. L'intégrité scientifique en est un point cardinal, avec en particulier la nécessité d'avoir des données garanties. La déontologie, liée à la notion d'intérêt général du service de la fonction publique, conditionne l'indépendance de la recherche. L'éthique, enfin, renvoie à la question de savoir pourquoi on fait de la recherche et comment celle-ci tient compte de l'intérêt général. Ce sont trois notions différentes, mais qui ont une vraie congruence ».

2. Les réseaux informels des acteurs institutionnels

a. La conférence des signataires de la charte de déontologie des métiers de la recherche

La conférence des signataires de la charte de déontologie des métiers de la recherche est une proposition de Pierre Corvol instituée par la circulaire n° 2017-040 de Thierry Mandon : « [Elle] réunira les responsables exécutifs des opérateurs ayant adopté les principes de la Charte de déontologie des métiers de la recherche ou les référents qu'ils auront désignés. Elle aura vocation à proposer des évolutions de la politique ministérielle en matière d'intégrité scientifique et d'en assurer la promotion ». L'intérêt majeur de cette conférence est donc que ses membres disposent d'un pouvoir décisionnaire pour leurs établissements et peuvent directement prendre un certain nombre d'engagements .

La circulaire précise aussi les missions de cette conférence, qui a pour objectifs, en lien avec l'OFIS et en s'appuyant sur les référents intégrité scientifique :

« -- de faire évoluer la Charte et ses différentes déclinaisons opérationnelles,

-- d'établir et de maintenir à jour la liste des référents et autres personnes ressources au sein des établissements,

-- d'inciter à l'inscription de l'intégrité scientifique dans la charte des thèses,

-- d'inciter à la formation interne à ces questions au sein des opérateurs de la recherche,

-- de promouvoir l'élaboration d'outils et de sites numériques dédiés, propres à chacun des établissements ou partagés entre eux,

-- d'établir un recensement de ces formations et de ces outils . ».

Il est prévu que cette conférence se réunisse au moins une fois par an. Les deux premières réunions, en 2017 et 2018, ont permis d'inscrire dans les faits les dispositions de la circulaire Mandon dont la création de l'OFIS, ainsi que la feuille de route 2020 de l'intégrité scientifique. La dernière réunion s'est tenue le 4 février 2021 (elle a été reportée à plusieurs reprises en raison des grèves et de la pandémie de la Covid 19), avec pour thématique « Promouvoir un environnement propice à une science intègre ».

Une difficulté que rencontre la conférence des signataires est qu'elle réunit un ensemble d'entités de recherche très diverses dans leurs natures, leurs structures et leurs missions. Il lui est également difficile de parvenir à mobiliser au même moment les chefs d'établissements de recherche ou leurs représentants désignés. Les modalités de fonctionnement de cette instance se prêtent bien à un travail de réflexion, mais ne permettent pas un travail opérationnel, qui doit être notamment porté par l'OFIS et les référents intégrité scientifique. Il faut donc veiller à la bonne articulation entre les réflexions portées lors de cette conférence et les travaux menés par l'OFIS, le CoFIS et le ResInt.

Recommandation n° 4 : Veiller à la bonne articulation des travaux et réflexions menés dans le cadre de l'OFIS, du CoFIS, du ResInt et de la conférence des signataires.

3. Les acteurs non institutionnels de la régulation de la science

La mutualisation est au coeur de l'intégrité scientifique et de ses bonnes pratiques. Elle prend d'abord la forme d'un espace d'échange, de concertation et de partage entre les référents intégrité scientifique, appelé ResInt. Certains acteurs remplissent le rôle de « vigies », c'est-à-dire qu'ils sont en position surplombante sur la production scientifique et sont à l'affût des irrégularités, des méconduites, qu'ils portent ensuite à la connaissance du monde scientifique, sur deux plateformes dématérialisées. La première, PubPeer , est un journal club qui permet le commentaire des articles scientifiques et a été le lieu du signalement de possibles cas de falsification, de fabrication et autres fraudes. La seconde, RetractionWatch , se présente comme une base de données recensant tous les articles rétractés de la littérature scientifique.

a. Le ResInt, réseau de mutualisation des référents intégrité scientifique

Les référents intégrité scientifique bénéficient d'un espace de mutualisation essentiel au partage des connaissances et à l'enrichissement de leurs pratiques : le ResInt, réseau des référents intégrité scientifique. Sans statut juridique ni financement propre, ce réseau témoigne de la vitalité et du caractère incontournable qu'ont les acteurs non institutionnels dans le champ de l'intégrité scientifique, notamment dans la définition des formes prises par l'autorégulation française. Le ResInt, « tient une place très importante », en tant que « lieu d'échange d'expériences entre les différents référents » selon le référent intégrité scientifique Jean-Pierre Savineau.

Cet espace informel est animé dans l'esprit d'ENRIO à ses débuts par Michelle Hadchouel, ancienne déléguée à l'intégrité scientifique de l'INSERM entre 2008 et 2016, ayant participé au rapport Alix ainsi qu'au rapport Corvol, membre du CoFIS et d'ENRIO, co-rédactrice de l'« European code of conduct for Research integrity », et de la « charte nationale de déontologie des métiers de la recherche », ainsi que par l'archéologue Michel Pernot. Au sein de ce réseau, une quarantaine de référents, parfois plus, se réunissent plusieurs fois par an et mettent en commun leurs expériences. Il a mis en place plusieurs groupe de travail, dont le « groupe procédure », qui a réalisé le guide des référents intégrité scientifique en novembre 2018. Le réseau n'a cependant pas vocation à former les RIS et, à ce titre, n'aspire pas à être rattaché à l'OFIS. Le ResInt, en l'état, rappelle certaines initiatives étrangères comme le « RIO Bootcamp » de l'Office of Research Integrity (ORI) américain, lequel aborde des thèmes centraux comme l'entretien avec les lanceurs d'alerte et les personnes soupçonnées de méconduite, le traitement et la conservation des données, l'analyse des données ou encore le renforcement de la politique d'intégrité scientifique au sein de l'établissement.

b. PubPeer, journal club et plateforme de signalements

En 2014, Paul S. Brookes 133 ( * ) a cherché à vérifier si la discussion publique d'un article scientifique sur internet, de manière anonyme ou non, qui connaît des problèmes en matière de données permet bien qu'il soit corrigé, voire rétracté, et qu'ainsi la littérature scientifique soit améliorée. Son étude, portant sur 497 articles, a permis de montrer que les productions discutées publiquement avaient 6,5 fois plus de chance d'être rétractées et 7,7 fois d'être corrigées , par rapport à celles qui comportaient des données douteuses, mais étaient traités en interne : « On peut donc conclure que les discussions en ligne améliorent les niveaux de mesures correctives dans la littérature scientifique. Néanmoins, des discussions anecdotiques révèlent une marge d'amélioration substantielle dans le traitement de ces questions 134 ( * ) . ».

PubPeer , est un journal club fondé en 2012 par le neuroscientifique Brandon Stell, rejoint par un autre neuroscientifique, Boris Barbour, tous deux chercheurs au CNRS. La plateforme est destinée au « partage direct de discussions scientifiques en court-circuitant au besoin les différents acteurs qui peuvent avoir des conflits d'intérêts, empêchant l'autocorrection de la science (auteurs, journaux, institutions) 135 ( * ) . ». PubPeer est devenu, en quelques années, un site important, sinon essentiel, dans l'identification des méconduites scientifiques. Dans cet espace virtuel, chacun est libre, sous couvert d'anonymat, de signaler un article dont il souhaite discuter . Depuis quelques années, la plateforme a été prise d'assaut par des signalements d'articles frauduleux, dans lesquels des veilleurs identifient principalement des cas de fraude, d'embellissement ou de falsification d'images.

La place de PubPeer a été interrogée à de nombreuses reprises pendant les auditions. Entre « mission de service public » et « plateforme de délation », les avis sont parfois tranchés sur la question. Antoine Petit, actuel PDG du CNRS, y est par exemple hostile : « Je suis pour ma part très choqué du principe de dénonciation anonyme qui permet à n'importe qui de porter un doute sur les travaux de n'importe qui 136 ( * ) » . Selon la déléguée à l'intégrité scientifique Ghislaine Filliatreau, la plateforme fait partie d'un « processus par lequel la communauté scientifique est en train de définir ses normes ». Alors que la plateforme est caricaturée comme étant une place publique sur laquelle vilipender les articles de rivaux, Boris Barbour et Brandon Stell insistent plutôt sur son rôle de « Tripadvisor pour la recherche, mais en mieux », un « accélérateur du progrès scientifique » puisque tous les avis donnés sont vérifiables (une accusation n'est pas lancée au hasard et doit être fondée) et la personne incriminée a toujours un droit de réponse . De plus, l'anonymat garanti aux commentaires est une protection : quelqu'un qui ne serait pas anonyme et signalerait un cas de plagiat de son papier pourrait être menacé par la suite.

PubPeer est devenu, avec le temps, un acteur incontournable de la régulation de l'intégrité scientifique , autant par sa fonction d'alerte que de médiation. En novembre 2019, PubPeer comptait environ 70 000 commentaires , pour environ 25 000 articles commentés (3 commentaires par article en moyenne), dont 4 % émanant des auteurs eux-mêmes. Ces articles sont publiés dans 3 600 journaux. En 2019, on compte environ 1 200 commentaires par mois en moyenne, dont 20 % qui ne sont pas publiés après modération (insultes, commentaires inutiles, diffamation).

Le trafic du site n'est pas majoritairement français, puisque la France ne représente que 5 % du flux. 40 % vient des États-Unis, 14 % de la Chine et 8 % du Royaume-Uni. Plusieurs grandes institutions françaises sont abonnées à son service Dashboard (lequel couvre environ 40 % du budget de PubPeer ) qui permet de recevoir une alerte quand un chercheur voit l'un de ses articles signalés. Les référents intégrité scientifique conseillent vivement aux personnes signalées sur le site de répondre avec des preuves.

Ghislaine Filliatreau, déléguée à l'INSERM, a évoqué 137 ( * ) lors de son audition un climat « éruptif », un « contexte de tsunami » puisqu'elle est passée, en 2016, de « 1 PubPeer par semaine et 3 signalements par mois » à « 30 à 50 signalements par jour ». Elle a cependant relativisé ces chiffres quelques mois après avoir été entendue, comme le montre le tableau ci-dessous.

Septembre 2019

72 notifications

Octobre 2019

186 notifications

Novembre 2019

328 notifications

Décembre 2019

140 notifications

Janvier 2020

Entre 28 et 34 notifications

Septembre-octobre 2020

Entre 30 et 50 par mois

Nombre de notifications PubPeer visant des personnes rattachées à l'INSERM au moment des faits allégués

Elle explique cette multiplication à la fois par une libération de la parole et par les conséquences d'un changement structurel dans la manière de faire de la recherche, depuis près de 10 ans (compétition ouverte).

À ce titre, PubPeer est-il complémentaire des référents intégrité scientifique, puisqu'il est utilisé par les organismes de recherche ? Ghislaine Filliatreau souligne que PubPeer est une bonne vigie pour les personnes qui doivent répondre de leurs actes.

Pour certains acteurs de l'intégrité scientifique, il pourrait être souhaitable que PubPeer soit institutionnalisé , afin que cette plateforme perdure. Plus généralement, PubPeer pose aussi la question de pouvoir amender, améliorer continuellement les articles de recherche , que cela se fasse sous la forme de discussions entre chercheurs sur des plateformes d'échange, ou sous la forme d'un article ouvert , dont il serait possible de modifier continuellement le contenu, tout en laissant les modifications apportées visibles pour le lecteur. Claude Kirchner, directeur de recherche émérite à l'INRIA, propose même qu'un article ne puisse plus être rétracté, mais seulement amendé et corrigé sur la durée par son auteur puisque selon lui : « Un document scientifique contenant des fraudes avérées peut aussi contenir des parties originales et scientifiquement intéressantes [...] Ces règles de déontologie peuvent encourager le ou les auteur(s) d'une fraude à publier une version révisée, expurgée des parties incriminées 138 ( * ) . ». Dans le cas d'une falsification ou d'une fabrication de données, cas les plus courants de fraude, n'est-ce pas le risque que ces données soient encore prises au sérieux par la communauté des chercheurs et que la condamnation de ces manquements ne soit plus prise aux sérieux ?

PubPeer , plus largement, témoigne de l'importance des veilleurs et des bénévoles de l'intégrité scientifique qui apparaissent comme partie intégrante d'un système de vérification permettant de corriger les écarts .

c. Retraction Watch, base de données de rétractation d'articles

En janvier 2020, la lauréate du prix Nobel de Chimie en 2018, Frances Arnold, a rétracté une publication qu'elle avait co-signé en 2019, parue dans la revue Science . Elle a expliqué sur les réseaux sociaux qu'elle était occupée au moment de la publication de ce travail et que, de fait, elle n'avait pas mené correctement ses recherches ou plutôt, pas correctement contrôlé le travail de son équipe. Son geste a été salué par la communauté scientifique et médiatique (« Malheureusement, il n'y a pas de prix Nobel pour de bonnes excuses - mais les mots du D r Frances Arnold devraient servir d'exemple pour nous tous 139 ( * ) . »). Le processus de « rétractation » désigne le fait de retirer de la littérature scientifique un article, toujours disponible en ligne cependant, et accompagné d'une notice de rétractation . Le site américain Retraction Watch , créé en 2010 par deux journalistes scientifiques (Adam Marcus et Ivan Oransky) ambitionne de rassembler les références des articles rétractés. Leur plateforme recense les retraits de publications (environ 1 500 par an 140 ( * ) , un nombre en augmentation 141 ( * ) ; la base compte plus de 24 000 rétractations en octobre 2020 142 ( * ) ). Les meilleurs journaux à comités de lecture, comme Nature ou Science , sont eux aussi concernés par la question. Chaque année, le site fait une liste des dix cas les plus marquants. Les motifs de rétractation sont visibles : duplication d'image, absence de consentement du patient, erreur dans l'analyse, plagiat, hoax , manipulation d'image, etc.

Une petite minorité de contributeurs est responsable de la majorité des rétractations : « Sur les quelque 30 000 auteurs présents dans la base de données de Retraction Watch [...] plus de 25 % d'entre elles [les rétractations] sont le fait de 500 auteurs responsables chacun de plus de cinq rétractations 143 ( * ) . ». Un article publié en 2011 par R. Grant Steen 144 ( * ) s'est penché sur les raisons qui avaient fait retirer de la littérature scientifique 788 articles . Dans 69 % des cas, il s'agissait d'erreurs, contre 25 % de fraudes, tandis que 5,8 % ont été rétractés sans que la cause ne soit connue . Un autre article de Jeffrey Brainard 145 ( * ) , en 2018, estime que la majorité des rétractations sont liées à des cas de fraudes scientifiques (FFP : fraude, falsification, plagiat) ou à de faux relecteurs. Un article plus récent, en 2019, estime que ce sont les cas de fraude qui prédominent, avec 65,3 % 146 ( * ) . Le spécialiste de l'intégrité scientifique Hervé Maisonneuve explique cette inadéquation dans les chiffres et les motifs de rétractations par plusieurs facteurs : « Les publications sur les rétractations sont nombreuses et pas très homogènes. Cela vient des échantillons, des années de publications des notices de rétractation, et SURTOUT de la manière de définir et classer les notices de rétractations. Ces analyses sont complexes [...] 147 ( * ) . ».

Quand l'article est demandé à être retiré de la littérature scientifique, le processus peut prendre beaucoup de temps, voire ne pas aboutir . Le site Retraction Watch estimait en 2017 148 ( * ) qu'une rétractation peut mettre quelques mois à plusieurs années, la médiatisation de la fraude pouvant jouer sur la rapidité de réaction de la revue. Mais si l'article est retiré, il n'est pour autant pas effacé ou éliminé des bases de données en ligne : il est encore accessible, mais l'éditeur prend soin de signaler par des moyens divers qu'il a été rétracté.

Pour autant, un article frauduleux est encore cité par les pairs , même après sa rétractation, comme l'a montré Kalevi M. Korpela dans une étude de 2010 149 ( * ) , et aucune mention n'est faite de la rétractation 150 ( * ) . À cet égard, Nature en appelle avec humour à exorciser la littérature scientifique de ses « zombies 151 ( * ) ». Certains plugins cherchent, en ce sens, à améliorer l'expérience de navigation des chercheurs lorsqu'ils consultent ces articles sur Google Scholar, ResearchGate ou Sci-Hub, sans se douter qu'ils ont depuis été rétractés. PubPeer a, pour sa part, développé un plugin navigateur 152 ( * ) et un autre compatible avec la bibliothèque d'articles Zotero , lequel permet d'avoir une alerte s'il existe un commentaire visant cet article sur sa plateforme. Retraction Watch , de son côté, s'est associé à Zotero afin d'ajouter un message d'alerte signalant la rétractation et son motif, lorsqu'un utilisateur enregistre un article dans la base.

Recommandation n° 5 : Reconnaître l'intérêt des actions menées par les acteurs, promoteurs et garants de l'intégrité scientifique et soutenir leurs actions dans le respect de leur indépendance.

Le ResInt, PubPeer et Retraction Watch sont, chacun à leur manière, des vigies pour l'intégrité scientifique, basées sur la mutualisation, le partage des savoirs et des bonnes pratiques . Ils participent, de ce fait, à la diffusion d'une culture positive de l'intégrité scientifique non pas centrée sur les sanctions ou la délation, mais sur les enseignements à tirer de chaque cas . Le premier, le ResInt, permet aux RIS de disposer d'un espace où mettre en commun leurs expériences de terrain et construire ensemble un encadrement de l'intégrité scientifique , en réfléchissant aux moyens divers qui s'offrent à eux. Limiter le RIS à son rôle d'instruction est en effet une erreur : le RIS ne fait pas qu'instruire des cas de méconduites, il participe activement à la diffusion des valeurs de l'intégrité scientifique, plutôt que de simplement « punir » les méconduites. De même, le second acteur, PubPeer , n'est pas, comme parfois caricaturé par ses détracteurs une « plateforme de délation ». Le site aspire à nettoyer la science en repérant les fraudes ou les erreurs, lesquelles peuvent éventuellement aboutir à une correction ou une rétractation . Journal club à sa création, destiné à discuter des articles, il s'est en partie transformé, malgré lui, en plateforme d'alertes en répondant à un besoin systémique du monde de la recherche : pointer du doigt les écarts à l'intégrité, à la vérité scientifique. De même, le troisième acteur, Retraction Watch , ne limite pas son rôle à la constitution d'une base de données épinglant les articles rétractés et leurs motifs. Cet apparent tableau de chasse a un rôle pratique, comme en témoigne le plugin : permettre aux autres chercheurs de s'informer des études frauduleuses et ainsi, de ne pas perdre de temps à se baser sur des travaux fallacieux . Retraction Watch endosse aussi un rôle militant : son blog regorge d'articles aidant à penser des moyens de lever la pression qui pèse sur les chercheurs, afin de limiter la course à la publication et, parmi ses effets délétères, la hausse des fraudes scientifiques.

Ainsi, le principe d'autorégulation qui régit l'intégrité scientifique en France ( Partie I ) ne signifie pas pour autant que la promotion, l'encadrement et la protection de l'intégrité scientifique ne reposent pas sur un certain nombre de textes. Prenant la forme de codes, de chartes, de guides et de déclarations, ces textes présentent des principes fondateurs en matière d'environnement favorable à la recherche et de culture partagée de l'intégrité scientifique. Plus encore, ils se recommandent les uns des autres et forment ainsi une chaîne historique cumulative, visant à valoriser toujours davantage les bonnes pratiques et à proposer des moyens transparents, souples et cohérents de traitements des allégations .

De même, si l'instruction des méconduites n'est pas encadrée par la loi , différents textes approchent, d'une part, la définition des manquements et, d'autre part, la procédure d'instruction, aidant ainsi les RIS à accomplir une part importante de leur mission ( Partie II ).

DEUXIÈME PARTIE : APPRÉHENDER LES MÉCONDUITES SCIENTIFIQUES

Ainsi, les acteurs institutionnels (OFIS, RIS) et informels ( PubPeer , Retraction Watch , ResInt) misent sur la mutualisation pour faire évoluer les choses : que cela passe par l'étude de cas, une base de données des rétractations ou un moyen de signaler des articles soupçonnés d'être frauduleux ou contenant des erreurs, ces processus de régulation se sont spontanément constitués au sein du monde de la recherche afin de pallier des dysfonctionnements systémiques et accompagner une transformation nécessaire , visant à résorber et à corriger les méconduites.

I. UNE NOMENCLATURE INTERNATIONALE ET COMMUNE DES MÉCONDUITES

La nomenclature des méconduites est sensiblement harmonisée 153 ( * ) au niveau international et en France entre les différentes disciplines . Il existe toutefois différentes classifications des manquements à l'intégrité scientifique, prenant appui sur des critères distincts. Certaines classifications s'opèrent en fonction du type de méconduite (concernant la méthodologie, la donnée, le résultat, l'auteur) ; d'autres s'appuient sur le degré de gravité du manquement ; d'autres encore se fondent sur le critère de l'intentionnalité. Il existe également des manquements entrant dans une « zone grise », c'est-à-dire les mauvaises habitudes de recherche, qui ne sont pas des fautes, mais plutôt de mauvais comportements de chercheur ou négligences, qu'il faudrait éliminer des usages ( salami-slicing ou saucissonnage des travaux en plusieurs articles afin d'en publier un plus grand nombre alors qu'un article aurait suffi ; embellissement d'une image, pour la rendre plus agréable à l'oeil ou plus conforme à l'hypothèse formulée, etc.).

1. Classement par domaines

Bien qu'il soit parfois répété qu'il n'existe pas de typologie des manquements scientifiques qui fasse consensus, les institutions se réfèrent le plus souvent au document produit par Frédéric Sgard et Stefan Michalowski 154 ( * ) , rapporteurs lors du Forum mondial de la science de l'OCDE (Tokyo, 22-23 février 2007), lequel propose une liste non exhaustive de manquements à l'intégrité scientifique (fig. 4) 155 ( * ) . Il utilise pour sa part un classement par domaines (publication, donnée, conduite personnelle, financement, etc.).

Les « domaines » des manquements à l'intégrité scientifique

Figure 4. Tableau tiré de Frédéric Sgard et Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l'élaboration de politiques cohérentes », Sciences , n° 3, 2007, p. 21.

C'est sur ce document que se fonde le « Vade-mecum intégrité scientifique » produit par un groupe de travail piloté par Pierre Corvol, qui décline 6 catégories de manquements à l'intégrité scientifique 156 ( * ) .

a. Les Fraudes scientifiques génériques ou « FFP » : fabrication, falsification, plagiat

Ces fautes graves ou fraudes 157 ( * ) sont assorties d'une intentionnalité de tromper. Elles sont dénommées « FFP », c'est-à-dire « fabrication », « falsification » et « plagiat », par l'Office of Science and Technology Policy (ORI) en 2000 158 ( * ) : « L'inconduite en matière de recherche est définie comme la fabrication, la falsification ou le plagiat lors de la proposition, de l'exécution ou de l'examen de recherches, ou dans la communication des résultats de recherche. ».

La fabrication désigne, dans le « rapport Alix », la « composition de données, leur enregistrement et leur présentation » et, comme son nom l'indique, consiste en la création de toutes pièces de données ou de résultats qui n'ont en vérité pas été mesurés ou observés. Il peut par exemple s'agir de mettre en scène de fausses données statistiques, qui n'ont jamais été collectées, ou de manipuler des images 159 ( * ) .

La falsification se rapporte à la « manipulation de procédures de recherche, transformation ou omission de données ». Elle peut consister, par exemple, à laisser de côté un résultat qui n'irait pas dans le sens de l'article ou au fait de transformer un résultat, afin qu'il aille dans le sens recherché.

Le plagiat est une notion extra-juridique, différente de la contrefaçon, qui désigne l'« appropriation des données d'autrui, de résultats de recherche ou de mots sans leur octroyer le crédit approprié ». Présent principalement au sein des sciences humaines et sociales, il ne se limite pas au plus connu, le plagiat de texte. Il peut aller du simple oubli d'attribution (« plagiat d'idées », c'est-à-dire ne pas créditer correctement une idée, une source ou une notion, qui ont été développées ou mises en évidence par un autre chercheur), à la réécriture (retravailler les écrits d'un autre pour que l'on ne puisse pas déceler l'écrit-source), ou au vol (copier-coller les écrits d'un autre, sans le créditer et sans intégrer de signes typographiques indiquant qu'il s'agit d'une citation). Alexandre Serres 160 ( * ) , référent intégrité scientifique à l'université de Rennes, trouve plusieurs formes au plagiat. Il distingue le plagiat comme « négligence informationnelle », qui est plutôt le fait des étudiants, de la « fraude scientifique », volontaire cette fois. Les causes de l'apparition du premier peuvent être d'ordres méthodologique (plagier par méconnaissance de la méthodologie de la citation), technique (usage répandu du copier-coller), socio-cognitif (l'abondance d'information et la facilité d'accès à l'information sur internet, couplées avec une crise de l'attention font oublier de référencer correctement). Pour lutter contre ce phénomène, il s'agit de renforcer la formation, la sensibilisation, la pédagogie, les réponses disciplinaires ou techniques . Quand le plagiat est intentionnel, il ne relève pas d'une erreur d'honnêteté (oubli de créditer, méconnaissance des usages), mais d'une volonté délibérée de tromper, en achetant par exemple des devoirs clefs en main, sur des plateformes comme Oboulo ou Étudier .

L'autoplagiat , (chercheur recopiant à l'identique ou presque des passages de ses propres articles de recherche) est rarement considéré comme un cas de FFP. Cela relève davantage d'une mauvaise pratique, proche de celle du « saucissonnage ». Certains commentateurs soulignent pourtant la gravité que peut parfois recouvrir l'autoplagiat, à l'image de Yannick Lung 161 ( * ) , créateur du MOOC intégrité scientifique de Bordeaux : « [...] Cela conduit à un gaspillage de ressources au niveau collectif car on envoie à plusieurs revues le même article, même s'il y a quelques modifications, on va mobiliser des référés, donc on gaspille des ressources, pour publier des résultats déjà publiés. De ce point de vue c'est assimilé à une fraude qui fait l'objet d'une procédure de rétractation des publications scientifiques. Dans le secteur biomédical, il y a eu plus de rétractations pour raisons d'autoplagiat que pour du plagiat lui-même. ».

La juriste et membre du CoFIS Frédérique Claudot 162 ( * ) , tout comme Hervé Maisonneuve, sont favorables à l'inscription dans la loi des « FFP ».

b. Les pratiques douteuses de recherche sur les données

Se trouvent dans cette catégorie toutes les pratiques qui, bien que ne relevant pas de la fraude, relèvent de mauvaises pratiques de recherche : embellissement de données, segmentation de publications ( salami slicing ou saucissonnage ), ainsi que les mauvaises pratiques liées aux données (utilisation sélective, rétention ou non conservation de données).

c. Les pratiques de recherche inappropriées

Plus souvent évoquées dans le cadre de l'éthique, cette catégorie désigne la violation des protocoles liés à l'expérimentation chez l'homme, sur les animaux ou sur l'environnement.

d. Les pratiques douteuses liées aux publications

Le journaliste scientifique Sylvestre Huet, lors d'une émission de la Méthode scientifique consacrée à la rétractation d'articles 163 ( * ) , a rappelé que l'inflation des publications, favorisée par le système d'évaluation de la recherche par le chiffre et par la bibliométrie, est un « pousse-au crime total ». L'hyperproductivité de certains chercheurs, figure au rang des pratiques douteuses. Elle suppose parfois un article réalisé à la hâte ou sans contrôle sérieux par celui qui appose son nom sur la publication. En 2018, Nature révélait ainsi que plus de 9 000 auteurs publient un article tous les cinq jours 164 ( * ) et propose, non sans humour, de « rationner » les chercheurs en publications 165 ( * ) ! Plus récemment, le P r Didier Raoult affirmait devant la commission d'enquête du Sénat avoir signé 3 500 publications 166 ( * ) . En septembre 2020, une tribune publiée dans Libération 167 ( * ) visait, sans le nommer, le P r Raoult, rappelant qu'il est « anormal que des directeurs d'équipes de recherche cosignent des publications dont le nombre rend impossible le fait qu'ils y aient réellement participé. ». Hervé Maisonneuve 168 ( * ) utilise cet exemple pour rappeler les critères cumulatifs qui président normalement à l'attribution de la qualité d'auteur, selon l'ICMJE 169 ( * ) (International Commitee of Medical Journal Editors) : la « contribution substantielle à la conception ou aux méthodes de la recherche », la « rédaction préliminaire de l'article ou sa révision critique », « l'approbation finale de la version à publier » et « l'engagement à assumer l'imputabilité pour tous les aspects de la recherche ».

Ces mauvaises pratiques liées aux publications concernent de nombreuses autres mauvaises habitudes comme celle de reprendre une citation d'un article sans vérifier la source (erreur possible dans le référencement ou dans la citation elle-même), ou indiquer un article en bibliographie sans l'avoir lu dans son entièreté .

Elles incluent aussi des conflits d'auteur : positionnement d'un nom qui a peu ou pas travaillé sur le projet, omission d'un auteur, etc. On parle notamment de gift (cadeau) guest (invité) ou ghost (fantôme) authors afin de désigner des noms qui ont été ajoutés aux articles par complaisance, par obligation ou par rétribution : par exemple, un directeur de laboratoire qui n'a pas participé aux travaux, mais demande à ce que son nom figure dans la liste. Une étude très complète de 2017, d'Eric A. Fong et d'Allen W. Wilhite 170 ( * ) , portant sur plus de 12 000 chercheurs, de plusieurs champs disciplinaires, révèle que 35,5 % des répondants ont déjà ajouté un auteur de complaisance à l'un de leurs articles (car il était le chef du laboratoire, pour 28,4 % ; parce que cette personne peut avoir une influence significative sur la carrière du chercheur pour 21,4 % ; parce que c'est un mentor pour 13,2 %).

L'ordre des auteurs aussi pose problème . Si certaines disciplines n'ont qu'un ou deux auteurs par article, ou que d'autres préconisent le classement alphabétique, dans la plupart des disciplines scientifiques, « le premier (ou les deux premiers à égalité), voire le dernier par séniorité sont les positions les plus importantes. Certains considèrent que les deux derniers auteurs sont également importants. Mais parfois, c'est par ordre décroissant d'engagement dans le travail, le dernier ayant le moins collaboré 171 ( * ) . ». Afin de dénoncer l'opacité de l'ordre des auteurs , qui favorise parfois un auteur ayant peu, voire pas, participé à l'article, mais placé en premier auteur parce qu'il est à la tête du laboratoire, certaines unités ont parfois mis en premier auteur... un animal domestique.

Les citations coercitives 172 ( * ) , aussi, désignent le fait que le relecteur d'un article demande à ce que le rédacteur cite les travaux d'autres chercheurs dans son travail ou une revue en particulier, ou même que le chercheur se sente forcé de citer un article qui n'apporte rien de substantiel à l'article, parce qu'il sait que la présence de ce nom apportera une meilleure réception du sien. Sophie Kennel et Elsa Poupardin 173 ( * ) , qui ont réalisé une étude en 2018 auprès de 339 chercheurs pour montrer comment la notion d'intégrité scientifique se manifeste lors de l'élaboration d'une bibliographie d'article, soulignent la difficulté ressentie par certains « de trouver un équilibre entre référence et révérence ». Bien que les chercheurs soient le plus souvent sensibles aux questionnements éthiques comme la question de la signature de complaisance, ils se plient, anticipent le plus souvent les attentes du comité de relecture, ce qui participe, selon les auteures, à un processus de « re-normalisation ».

Afin de lutter contre les mauvaises pratiques liées aux publications, certaines institutions ont produit des guides à destination de leur public, comme l'INSERM en 2018 174 ( * ) , qui rappelle que « 40 % des dossiers individuels traités au cours des dix dernières années par la délégation à l'intégrité scientifique (DIS) étaient liés à des conflits concernant la liste des auteurs. ».

e. Les conflits d'intérêts

Cette catégorie comporte l'absence de déclaration de liens ou de conflits d'intérêts. Le cas des conflits d'intérêts (non-signalement de liens conflictuels ou privilégiés lors d'une expertise, d'un jury ou d'une promotion) est considéré, selon les uns et les autres, comme relevant de l'intégrité scientifique ou de la déontologie. L'université de Bordeaux, par exemple, a établi une typologie présentant des cas de conflit d'intérêts dans sa « charte déontologique en matière d'activité de recherche et de valorisation 175 ( * ) ».

f. Autres pratiques douteuses de recherche

Cette catégorie fourre-tout concerne aussi bien l'utilisation abusive de fonds de recherche que le mauvais encadrement d'une équipe de recherche ou d'étudiants.

Les auditions ont à ce titre permis de souligner comment l'expression « intégrité scientifique », qui n'est d'ailleurs pas internationale puisqu'on parle autant d'« intégrité de la recherche », que de « conduite responsable de recherche », s'enrichit sur le terrain, au contact des affaires les plus récentes et de l'évolution de la recherche. Preuve que les méconduites scientifiques se diversifient et évoluent avec le temps, la microbiologiste Elisabeth Bik 176 ( * ) a révélé au mois de février 2020 l'existence de « fermes à articles 177 ( * ) » chinoises, ou américaines comme YMGrad 178 ( * ) , qui produisent à la chaîne de faux articles scientifiques , afin que leurs acheteurs obtiennent un diplôme ou une promotion, comptabilisant plus de 400 articles, publiés pour certains dans de grandes revues scientifiques.

Autre exemple, certaines personnes auditionnées, à l'image de l'Agence nationale de la recherche (ANR) inscrite dans le projet GenderSmart, de l'association Éthique et Intégrité, ou de Michèle Leduc, ont souligné une intégration de plus en plus forte de la question du genre ou du harcèlement sexuel à celle de l'intégrité scientifique : « Et ces leviers, relatifs à l'intégrité scientifique, sont l'open science - DORA - [le protocole de] Nagoya, et également la prise en compte de la dimension sexe et/ou genre, dans les projets de recherche quel que soit le domaine [...] Ne pas prendre en compte cette dimension [du genre] peut introduire un biais dans le savoir et c'est là où on n'est plus dans une recherche intègre 179 ( * ) . ».

2. L'importance du critère d'intentionnalité

Si la nomenclature précédente ne figure pas dans un texte de loi français et que son application et son interprétation diffèrent suivant les institutions, elle permet de mettre en évidence l'importance du critère d'intentionnalité pour caractériser le manquement à l'intégrité scientifique, comme l'ont rappelé les représentants de l'OFIS lors de leur audition. Ainsi, il convient de différencier l' erreur (un manquement involontaire), de la fraude (un manquement intentionnel, dans l'espoir d'en tirer un éventuel bénéfice), de la faute (un manquement conscient). Comme le souligne Martine Bungener, économiste et sociologue qui a été la première déléguée intégrité scientifique de l'INSERM (1999-2008), « N'oublions pas qu'il peut y avoir des erreurs, que l'on a le droit de se tromper, mais pas de falsifier des données ou des résultats 180 ( * ) . ».

D'autres expressions se réfèrent au critère d'intentionnalité. Il existe des « comportements délinquants », qualifiés de « pratiques questionnables de recherche » (PQR) ou de « pratiques de recherche critiquables » (PRC) : conflit d'intérêts, rétention ou « embellissements » de données (nettoyer les données ou une image, pour que le résultat recherché soit davantage mis en valeur), récupération d'une idée, non citation des travaux qui contredisent les recherches, obstacle à un article concurrent, citation de travaux contestables... Cette « zone grise » inclut par ailleurs de toute une série de négligences ou de mauvaises habitudes, telles que des méthodes ou protocoles inappropriés, la non-conservation des données de base, la mauvaise maintenance des outils, la sélection des données, le « saucissonnage » d'articles ( duplicate publication , salami slicing ). On estime que tous les chercheurs se sont retrouvés à un moment ou à un autre au sein de cette nébuleuse. On trouve parmi elles, ce qui relève des pratiques douteuses de recherches sur les données , à savoir par exemple l'auto-plagiat (reprendre plus ou moins à l'identique ses propres travaux dans un nouvel article), qui est critiqué parce qu'il ferait perdre du temps aux revues. Entrent aussi dans cette « zone grise » les publications concernées par le refus ou l'omission d'un auteur ou encore le placement abusif d'un autre qui, bien que n'ayant pas participé à l'article, réclame de figurer dans la liste des auteurs, ou demande instamment à figurer dans l'appareil scientifique de l'article.

Toshio Kuroki, professeur émérite et auteur de l'ouvrage Accountability in Research a proposé en 2018 une nouvelle classification 181 ( * ) . Elle permet d'enrichir une réflexion proposée dans le rapport Corvol : la méconduite scientifique contrevient-elle à la connaissance scientifique dans son ensemble, au monde de la recherche, au citoyen, aux institutions, au potentiel patient ? La typologie de Kuroki met en évidence le fait que la « fabrication » et la « falsification » trahissent la vérité, tandis que le « plagiat » contrevient à la confiance de la communauté scientifique . Il propose donc de séparer la catégorie FFP pour produire un classement, moins linéaire, qui rend possible, selon lui, des analyses plus précises et prendrait mieux en compte les « pratiques questionnables de recherche », pas assez étudiées ou sanctionnées. Cette nouvelle classification se compose de trois catégories : 1) la « trahison de la vérité » (fabrication et falsification) ; 2) la « trahison de la confiance » (plagiat, non reproductibilité, mauvaises pratiques de recherche qui recouvrent autant les conflits d'auteurs, la sélection des données, etc.) ; 3) un « risque pour la sécurité » (une méconduite qui conduit à un risque sanitaire, social, technique).

Figure 5. Tableau tiré d'Alexandre Serres, « Stage de l'URFIST de Rennes. Introduction à l'intégrité scientifique », Brest, 17 mai 2019, en ligne , p. 36-37.

Le tableau précédent (fig. 5), connu des experts de l'intégrité scientifique, utilise le critère d'intentionnalité comme séparation entre la « fraude », les « pratiques contestables de recherche » et la « méconnaissance » pour approcher des méconduites touchant aux données de la recherche ainsi qu'aux publications, il module aussi à l'aide du critère de gravité. Le tableau inclut dans les méconduites liées aux publications le phénomène peu connu des citations d'articles erronées , pourtant bien documenté, selon qu'il relève du fait de citer extensivement et de seconde main un extrait, mal recopié ou référencé par le premier article, ou qu'il s'agisse de citer en bibliographie un article hors sujet, peu pertinent, du fait que le rédacteur a inclus cette référence, alternativement pour plaire au comité ou pour étoffer sa bibliographie, sans parfois même lire l'article en question ou en interprétant mal son contenu 182 ( * ) .

3. Classement par niveaux de gravité

Un dernier classement s'est développé, à la faveur du « rapport Bach » : celui d'un classement par niveau de gravité, sans que ne soit attachée une sanction particulière. La commission Bach, formée pour émettre un avis sur les articles incriminés d'Anne Peyroche, a mis au point une typologie se basant sur des niveaux de gravité , auxquels est attaché chaque fois un manquement particulier (fig. 6) 183 ( * ) :

Figure 6. Comité d'experts en charge de l'Affaire Peyroche, « Rapport final sur cinq articles publiés par Mme Anne Peyroche », 22 janvier 2020, p. 2

Il n'a pas été possible, dans le cadre de ces auditions, de savoir si cette nomenclature était répandue ou en usage au sein des référents intégrité scientifique. Seul Rémy Mosseri, référent intégrité scientifique du CNRS, a rapporté l'avoir utilisée pour un cas particulier. Lors de son audition, Ghislaine Filliatreau a souligné que cette échelle n'intègre pas le critère d'intentionnalité, alors même que l'erreur peut être à l'origine d'une de ces méconduites.

Déterminer la gravité d'une méconduite s'avère un exercice difficile. Un article de 2016 184 ( * ) , retraçant une étude menée auprès de 1 353 membres du public des conférences consacrées à l'intégrité scientifique, révèle que les méconduites considérées comme étant les plus graves ne sont pas forcément celles attendues . L'étude demandait aux répondants de qualifier, à l'aide d'un système de points, 60 méconduites, en regard des critères de fréquence, prévention possible, impact sur la vérité, impact sur la confiance entre les scientifiques. Les résultats de l'enquête donnent à réfléchir : l'utilisation sélective des citations, les défauts dans le mentorat, l'absence de publication d'article négatif, demander ou réclamer une citation, les citations sélectives pour faire plaisir aux auteurs ou aux maisons d'édition, sont vus comme les problèmes majeurs, tandis que les fabrication et falsification ont un impact élevé sur la vérité, mais minimal, car cas isolés.

Ainsi, si la réalisation d'un tableau d'équivalence, associant à chaque méconduite une sanction mesurée s'avère peu approprié à la diversité des disciplines ou à la prise en compte du critère d'intentionnalité (fraude, faute ou erreur ?) comme le montre l'échelle de gravité développée par le « rapport Bach », deux nomenclatures semblent se dégager. L'une repose sur la typologie reprise de celle proposée en 1992 par l'Académie des sciences américaine par le Forum Mondial de la science en 2007 , et rappelée dans le « Vade mecum de l'intégrité scientifique », et considère d'une part les FFP et d'autre part les pratiques questionnables de recherche, classées par domaines ; l'autre, mise en avant par Toshio Kuroki, cherche à savoir qui a été lésé dans l'affaire : un patient, la société, le citoyen, un autre chercheur, la science ou la notion même de vérité ?

Enfin, les auditions témoignent de la difficulté à réaliser un tableau d'équivalence méconduite/sanction. Il semble que tous les acteurs de l'intégrité scientifique ne soient pas demandeurs d'une telle typologie, en partie parce que les nomenclatures précitées sont à ce stade suffisantes et sont rendues opérationnelles, à la fois par les échanges au sein du groupe ResInt et par la future base de cas pratiques et de rapports anonymisés que l'OFIS souhaite mettre à leur disposition.

II. TRAITER LES CAS DE MÉCONDUITE SCIENTIFIQUE

La procédure d'instruction des manquements à l'intégrité scientifique a fait l'objet de deux guides édités par le ResInt 185 ( * ) . Le premier a permis d' expliciter toutes les étapes attendues et éventuelles à la réception d'une allégation , le second s'est concentré sur la mise en conformité de cette instruction avec les principes du RGPD . Le premier guide, détaillé, vise à satisfaire les exigences qui sont formulées dans plusieurs textes internationaux auquel adhère le ResInt : présomption d'innocence, droit au contradictoire, constitution des éléments de preuve, etc.

L'OFIS a lui aussi édité, par la suite, un guide destiné plus particulièrement aux chefs d'établissements 186 ( * ) , dont la checklist annexe a reçu quelques critiques relatives à sa mise en oeuvre concrète. Il a également démarré un projet pour constituer une base de données commune à tous les RIS qui permettrait de construire une culture partagée de l'intégrité scientifique, d'harmoniser les réponses apportées aux différentes allégations, mais aussi d'identifier les environnements qui favorisent l'apparition de ces manquements. En ce sens, l'instruction d'un manquement n'est pas une procédure isolée, mais doit s'accompagner d'une analyse systémique de l'environnement du chercheur, de l'institution et du monde de la recherche, afin de prévenir de tels manquements à l'avenir.

Olivier Le Gall insiste tout particulièrement sur l'importance de définir positivement l'intégrité scientifique, de promouvoir les pratiques vertueuses, plutôt que de concentrer toute l'attention sur la sanction des manquements , tout comme « l'essentiel des attendus du dispositif français pour l'intégrité scientifique n'est pas punitif mais préventif : il s'agit surtout de partager des valeurs communes 187 ( * ) . » C'est aussi l'opinion d'un éditorial de Nature , en 2019 : « L'intégrité scientifique comprend de telles enquêtes [l'investigation des méconduites scientifiques], mais c'est bien plus. Il s'agit de créer des systèmes qui améliorent la qualité, la pertinence et la fiabilité de toutes les recherches 188 ( * ) . » .

Comme dans de nombreux autres pays, il n'existe pas en France de procédure d'instruction réglementaire des manquements à l'intégrité scientifique. Les sphères scientifiques et judiciaires sont restées séparées. Les textes de référence 189 ( * ) soulignent en effet que l'intégrité scientifique est une coresponsabilité entre les individus et leurs opérateurs de recherche (universités, écoles, organismes), un principe rappelé dans la récente déclaration du conseil des ministres européen, la déclaration de Bonn « The Freedom of Scientific Research 190 ( * ) » : « Les rôles et les responsabilités des organismes de recherche [...] nous comprenons que l'exercice de la liberté scientifique est nécessairement lié à un système professionnel d'autorégulation responsable de la part des institutions académiques et de recherche. Nous encourageons et soutenons des normes élevées de bonnes pratiques scientifiques, des lignes directrices et des structures consultatives pour la sauvegarde de l'intégrité, une recherche responsable et des limites éthiques, y compris des procédures transparentes, équitables et basées sur l'excellence pour l'avancement universitaire et l'attribution compétitive des financements. ».

Le ResInt, comme dit précédemment, a produit un document-cadre, le « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique 191 ( * ) » , destiné à aider et encadrer l'action des RIS tout au long de l'instruction de l'affaire ; il peut être complété par le « vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique, à l'usage des chefs d'établissements 192 ( * ) » , produit par le CoFIS en juin 2019. La présentation ci-après détaille le déroulement de la procédure, telle que décrite dans le guide du ResInt, tout en la complétant de précisions recueillies pendant les auditions.

1. Réception et recevabilité du signalement

Lorsqu'un soupçon de méconduite scientifique est soulevé, plusieurs moyens d'alerte s'offrent aux personnes désireuses de voir l'affaire instruite 193 ( * ) . Les auditions ont dégagé trois types d'allégations et d'interlocuteurs différents, qui peuvent servir d'intermédiaires entre la personne porteuse du soupçon et le RIS. Dans la majeure partie des cas, les personnes désireuses de porter une allégation s'adressent au référent intégrité scientifique de l'établissement auquel le personnel est rattaché, afin que ce garant de l'intégrité ouvre un dossier et instruise le manquement. C'est sur cette voie d'action que se concentre le guide de procédure édité par le ResInt.

D'autres personnes (leur nombre, inconnu, est vraisemblablement faible) font appel à des associations, comme l'IRAFPA ou Éthique et Intégrité 194 ( * ) , en particulier dans le cas de plagiats, et leur demandent de contacter le RIS, si elles s'estiment lésées, injustement attaquées ou pas reconnues.

Enfin, certaines personnes 195 ( * ) préférent poster une alerte sur PubPeer , en accompagnant leurs allégations d'éléments factuels comme des captures d'illustrations d'articles, pouvant viser la non-reproductibilité de la recherche, des soupçons de fabrication, de falsification ou d'embellissement de données ou d'images, ou encore des cas de plagiat. À cet égard, les signalements postés sur PubPeer visent principalement les fraudes. La plupart des RIS ne souhaitent pas recevoir d'allégations anonymes via PubPeer . Cependant, Michelle Hadchouel, lorsqu'elle était déléguée de l'INSERM, s'est autosaisie de tels cas puisqu'il n'est pas souhaitable, selon elle, d'ignorer ces signalements qui peuvent porter atteinte à la réputation de l'institution. D'ailleurs, plusieurs organismes sont inscrits au Dashboard et font donc une veille sur les méconduites signalées sur la plateforme.

La procédure de réception d'un signalement, qui fait l'objet d'une des trois démarches que la personne ayant connaissance d'une méconduite peut choisir d'adopter est, dès ces premières étapes, précisément décrite par le guide. Dans un premier temps, le RIS reçoit un signalement visant un personnel employé par l'institution ou au sein d'un laboratoire affilié au moment des faits, et ce, par plusieurs canaux possibles (mail, courrier, appel téléphonique) . Ce signalement doit être daté et signé. Les signalements anonymes ne sont pas admis.

2. Recevabilité du signalement : instruction ou rejet

Après avoir reçu le signalement, le RIS juge des suites à donner en s'assurant notamment de sa recevabilité et en regardant s'il relève bien d'un cas de manquement à l'intégrité scientifique. Dans le cas contraire, le RIS redirige son interlocuteur vers le référent déontologue, le service des ressources humaines, le médiateur ou un autre professionnel. Il peut aussi répondre à son interlocuteur que la question soulevée n'est pas une méconduite scientifique 196 ( * ) .

Dans le cas où le signalement est recevable, le RIS en informe systématiquement la personne mise en cause, pour obtenir des premiers éléments de réponse, sauf dans le cas où cette prise de contact pourrait signifier la destruction ou la disparition d'éléments de preuve, comme un cahier de laboratoire 197 ( * ) .

3. L'instruction à proprement parler

Si le RIS estime que le signalement de méconduite est recevable et qu'il doit être instruit par ses soins, il élabore un « pré-rapport d'enquête », dans lequel il doit recueillir des éléments objectifs de preuve. Le RIS reste cependant limité dans ses moyens d'action. Il ne peut pas séquestrer des données, mais peut exiger de voir le cahier de laboratoire qui appartient à l'institution. Son instruction s'apparente à une enquête administrative pré-disciplinaire 198 ( * ) . Du fait, notamment, que certains RIS sont des chercheurs en poste et n'ont pas systématiquement de jour dédié à leur mission, le temps de collecte de tous ces éléments et celui nécessité par les auditions, parfois nombreuses, qu'il doit mener, peut être particulièrement long, allant de quelques semaines à un an, voire plus.

L'instruction de l'affaire peut aussi considérablement se compliquer du fait de la mobilité des chercheurs qui dépendent parfois de plusieurs établissements, relevant aussi de plusieurs tutelles, de droit privé et de droit public. Dans ce cas de figure, les référents intégrité scientifique entrent tous en contact et un seul référent est désigné « coordinateur » (généralement celui de l'institution qui emploie la personne mise en cause), sans pour autant qu'il ait d'autorité sur les autres ou pilote seul l'instruction. Le rapport peut être commun, mais aussi séparé en cas de désaccord entre les RIS 199 ( * ) . Plusieurs des personnes auditionnées ont d'ailleurs témoigné de la difficulté à instruire en commun une allégation si l'un des organismes souhaite de son côté ralentir ou minimiser l'affaire.

À cet égard, le cas des manquements dans un cadre international, éminemment délicat, n'est pas facile à aborder malgré l'édition de plusieurs guides. Deux textes-clefs encadrent le problème des méconduites à l'international , survenues dans le cadre d'un projet collaboratif : le « Montreal Statement on Research Integrity in Cross-Boundery Research Collaboration 200 ( * ) » (2013) et le guide pratique « Investigating Research Misconduct Allegations in International Collaborative Research Projects 201 ( * ) » (2009). Ce dernier conseille notamment d' inclure un texte standard dans tous les projets internationaux collaboratifs , par lequel les collaborateurs déclarent travailler dans le respect du présent guide et des différentes chartes locale/nationale ou lois des pays concernés. Il n'a pas été permis de vérifier pendant les auditions l'application de cette préconisation.

Le pré-rapport peut donner lieu à trois cas de figure différents :

-- Le RIS peut juger opportun, à l'issue du pré-rapport d'instruction et en particulier dans le cadre d'affaires de conflit de signatures, de « propriété de terrain 202 ( * ) » ou de différends au sein d'un laboratoire de recherche, de procéder à une « conciliation », « médiation » entre les parties qui permet de désamorcer le conflit et de traiter en interne, efficacement, le problème . Il peut aussi choisir de se renseigner auprès du directeur du laboratoire ou de l'institut où travaille la personne incriminée, car le signalement peut être la manifestation d'un « conflit historique », selon les mots de Rémy Mosseri, soit la manifestation d'une tension qui existe depuis longtemps déjà. Ghislaine Filliatreau rapporte que beaucoup de litiges portent « sur le partage de matériels, l'interprétation des données, l'application des règles de signatures dans les articles à soumettre 203 ( * ) . ». Le succès des médiations semble cependant variable. Lors des auditions, il a été rapporté que certains RIS sont parfois enlisés dans ces démarches, alors même que les parties ne veulent clairement pas transiger et cela retarde grandement la résolution des affaires en cours.

-- Le RIS peut remettre son pré-rapport au chef d'établissement, qui passe directement à la phase de décision. Le PDG peut cependant estimer le pré-rapport du RIS insuffisant et lui demander de le compléter. Il peut aussi souhaiter, même si le RIS ne l'a pas conseillé, que soit constitué un comité.

-- Le RIS peut estimer que, au regard de la gravité des faits avancés ou de la difficulté à les circonscrire et à les analyser, il est utile de constituer une commission d'instruction.

4. La constitution d'une commission ou d'un comité d'instruction

Dans certains cas, il est décidé de constituer un comité ad hoc chargé d'épauler le RIS dans l'instruction de l'affaire, voire de s'en saisir 204 ( * ) .

La constitution de ce comité peut s'avérer délicate : ce dernier doit se composer de spécialistes du champ de recherche visé par l'enquête, tout en n'étant pas en conflits d'intérêts avec la personne incriminée 205 ( * ) . Dans les faits, si le chef d'établissement décide des suites à donner au pré-rapport du RIS, il doit également donner des suites au rapport du comité.

La publicité donnée à ces rapports est extrêmement variable d'un établissement à l'autre , alors même que le journaliste David Larousserie 206 ( * ) a souligné que pour les chercheurs, comme pour les citoyens, la connaissance des affaires, et plus largement des rapports attenants, est très importante, car « l'un des défauts du système actuel est de laisser dans l'ignorance des faits le grand public, mais même des chercheurs proches de l'affaire. ». Si le pré-rapport du RIS n'est, a priori, pas communiqué sur le site internet des institutions et est destiné exclusivement au chef d'établissement, le rapport de la commission d'instruction est parfois publié , afin de témoigner de la parfaite transparence mise en oeuvre dans l'étude de l'allégation.

5. Décision du dirigeant et droit du travail

C'est au dirigeant du centre de recherche ou au président de l'université qu'appartient le choix de la sanction 207 ( * ) . Il doit respecter les procédures disciplinaires de l'institution et ensuite décider, in fine , après avoir reçu les propositions des instances. Il n'appartient pas au RIS de suggérer des sanctions, mais seulement de qualifier, de renseigner les faits.

L'OFIS, conscient des difficultés que pouvaient rencontrer les chefs d'établissement au moment de statuer sur la ou les sanctions applicables à un manquement avéré à l'intégrité scientifique a réalisé en 2019 une « liste de contrôle pour l'investigation des signalements de méconduite scientifique » , censée les aider à vérifier que toutes les étapes d'une instruction, de la réception d'un signalement à la publicité du rapport, ont bien été respectées, « pour lui permettre de s'assurer de la solidité des éléments issus de l'investigation, qui seront amenés à fonder ses décisions ». Ces 55 questions à choix multiples (« oui », « partiellement », « non », « à éclaircir ») suivent le déroulement de la procédure du guide ResInt, depuis le référent (« une description claire des grandes lignes d'une procédure est-elle accessible via la communication institutionnelle ? »), à la réception du signalement (« l'auteur du signalement a-t-il reçu une réponse institutionnelle accusant réception et l'informant de ses droits ? »), à la recevabilité (« les autres établissements concernés, s'il y en a, ont-ils été informés et associés à la procédure ? »), à l'enquête (« le comité et/ou les experts ont-ils fait leur possible pour obtenir l'accès à tous les éléments permettant de conclure ? »), au rapport final (« le rapport final décrit-il clairement la substance du signalement ? », aux suites données (« les éléments factuels, les résultats de l'enquête, le pré-rapport et le rapport final ont-ils été correctement archivés ? »).

Michelle Hadchouel a cependant exprimé ses craintes sur cette grille qui est à l'origine une grille d'auto-validation , dérivée d'un article de C.K. Gunsalus 208 ( * ) et d'un guide de l'Association for Promotion of Research Integrity (APRIN) 209 ( * ) , lesquels ont déjà été critiqués car ils débutaient leur énumération à l'instruction du dossier alors qu'au préalable, une conciliation ou la non-recevabilité de la plainte sont aussi des issues possibles. Se pose aussi la question de savoir qui va remplir cette grille. Le référent ou le chef d'établissement ? Quelle différence s'il coche « partiellement » ou « non » ou « à éclaircir » ? Frédérique Claudot 210 ( * ) , a de même souligné que cette publication faisait « double emploi » avec le guide travaillé par le ResInt et qu'elle contient des éléments discutables, qui peuvent porter atteinte aux droits de la personne, parce que ce vade-mecum a été rédigé en réaction à des affaires médiatisées. La checklist , cependant, permet d'insister sur certains aspects essentiels, déjà énoncés dans le code européen ainsi que dans le guide du ResInt, notamment la présomption d'innocence et le droit au contradictoire (question 21), la conservation du rapport après clôture de l'enquête (question 45), la réhabilitation du chercheur incriminé à tort (question 55), mais il manque dans ce questionnaire une interrogation autour de la réintégration du chercheur ayant fauté.

Les sanctions applicables sont d'ordres divers : judiciaires, dans de rares cas ; académiques (retrait de diplômes ou rétractation d'articles) ; disciplinaires (retenue sur salaire, blâme, mise à pied) ; financières (suspension ou restitution financière, en particulier dans le cadre de l'ANR) ; scientifiques (correction ou rétractation d'articles, mesures correctives sous la forme d'un accompagnement du chercheur sous la forme d'un mentorat, d'une formation, voire d'une mobilité). Il n'existe, ce jour, aucun dénombrement du nombre d'instructions, de leur durée, de leurs arguments, ou encore des éventuelles sanctions prises . L'OFIS a indiqué vouloir rassembler ces éléments.

Marc Léger, ancien référent intégrité scientifique au CEA, a consacré une communication 211 ( * ) à l'intégrité scientifique et au droit du travail dans laquelle il rappelle à la fois que « La procédure d'instruction d'un signalement de manquement, menée sous sa responsabilité par le référent à l'intégrité scientifique, est uniquement destinée à établir l'existence ou non du manquement au regard du référentiel rendu ainsi applicable. C'est ensuite au responsable de l'opérateur de recherche, en tant qu'employeur, de donner ou non une qualification fautive au manquement. Cette qualification peut conduire le responsable à prononcer une sanction disciplinaire au sens du droit du travail, indépendamment des mesures correctives préconisées par le référent et limitées au domaine de l'intégrité scientifique, qui peuvent s'ajouter à la mesure disciplinaire. Il en résulte un certain nombre de conséquences, qui marquent ».

Lors des auditions, certains RIS ont fait valoir, en l'absence de statut défini pour cette fonction, la possibilité que le responsable d'établissement puisse mettre fin aux fonctions d'un RIS en cas de désaccord ou, plus simplement qu'il refuse de donner suite au pré-rapport du RIS. Ghislaine Filliatreau 212 ( * ) a présenté différents garde-fous qui préviennent de telles situations, certains existant déjà, d'autres pouvant être développés : 1) le comité d'experts est nommé, avec une lettre de mission, et il est donc difficile de ne pas prendre en compte son avis ; 2) la plupart des instructions, puisque les chercheurs ont plusieurs tutelles, mobilisent plus d'un référent ; 3) l'analyse du rapport du référent pourrait faire place à une certaine collégialité, dispositif très courant à l'étranger : plusieurs hauts responsables de l'institution reçoivent le rapport en même temps que le président et statuent ; 4) il pourrait être préconisé de demander un complément d'instruction ou une contre-instruction, plutôt que de simplement décider de ne pas prendre en compte le rapport.

6. La faculté de recours ouverte au chercheur incriminé

Nombre d'auditions ont insisté sur les difficultés auxquelles se heurtent les personnes soupçonnées de méconduite, puisque la procédure d'instruction n'est pas encadrée et que les RIS suivent un guide détaillé, mais ne sont pas toujours familiers avec le domaine du droit (présomption d'innocence, droits de la défense, principe du contradictoire, valeur de la preuve, droit de garder le silence, etc. 213 ( * ) ). Cette affirmation conviendrait d'être explorée dans le détail, sur des cas concrets. L'association Éthique et Intégrité, dont l'une des fondatrices est avocate, a ainsi expliqué, sans donner une appréciation quantitative, que certains RIS refusent catégoriquement la présence des syndicats lors des auditions et qu'ils ne répondent pas aux courriers d'avocats, quand la personne soupçonnée décide d'en prendre un pour se défendre. Le RIS ne fait là que respecter les règles de son institution. C'est en effet à la direction des affaires juridiques (DAJ) de prendre en charge de tels courriers.

Figure 7. Logigramme du traitement des signalements, tiré du « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique », novembre 2018, en ligne

Michelle Hadchouel, qui a participé à la rédaction du guide du ResInt (fig. 7), a tenu à rappeler 214 ( * ) qu'à l'issue de la remise du rapport par le référent intégrité scientifique, plusieurs suites sont possibles : 1) le chef d'établissement choisit de ne pas donner suite au dossier d'instruction, qui doit avoir explicité la méconduite dont a été soupçonné le chercheur en premier lieu ; 2) le chef d'établissement juge recevables les conclusions de l'instruction et décide de saisir la commission disciplinaire, qui va instruire à nouveau. Ainsi, dire qu'il « n'existe pas de structure d'appel » est trompeur puisque le référent ne décide de rien du point de vue disciplinaire. Il n'existe actuellement pas de moyen de demander que soit faite une contre-instruction au rapport d'instruction du référent intégrité scientifique 215 ( * ) , mais pour autant, la personne soupçonnée est présentée devant la structure disciplinaire appropriée après remise du rapport d'instruction et si le chef d'établissement le juge nécessaire , laquelle structure disciplinaire peut instruire pour son propre compte. Il s'agit du conseil de discipline, dans le cadre de l'université (appel possible devant le Cnéser) ; des prud'hommes dans le cas d'un établissement public industriel et commercial (EPIC) comme le CEA (appel possible devant la cour d'appel) ; de la commission administrative paritaire dans le cadre d'un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) comme le CNRS (appel possible devant le tribunal administratif).

7. La possibilité d'une réhabilitation du chercheur

Si l'INSERM a développé des processus de réhabilitation au travers du mentorat, tel que la mise en place d'un référent pour cette personne et l'examen des articles avant soumission à un comité de lecture, tous les établissements ne sont pas armés pour réintégrer les chercheurs ayant commis un ou des manquements et certains tardent à entamer une réflexion sur le sujet. La réhabilitation du chercheur incriminé à tort n'est, elle-aussi, pas encore aboutie et passe principalement par une lettre de réhabilitation, adressée par le chef d'établissement .

La publicité donnée à la conclusion du rapport appartient entièrement à celui-ci 216 ( * ) .

La procédure d'instruction des manquements à l'intégrité scientifique semble donc satisfaisante en France. Toutefois, il existe un paradoxe mis en évidence par la spécialiste de l'intégrité scientifique C. K. Gunsalus 217 ( * ) : bien que la plupart des pays européens se soient dotés d'une politique et d'un encadrement de l'intégrité scientifique, il manque encore une collecte de données à ce sujet, qui permettrait d'apprécier la récurrence et la nature des fautes, ainsi que l'efficacité des réponses institutionnelles apportées. Pour elle, il est urgent de rendre publique la prise en charge de l'intégrité (y compris des affaires) au sein des organismes. Cela passe tant par la publication des rapports , que par la constitution d'une base de données des cas .

Plusieurs personnes auditionnées ont souligné leur besoin de disposer d'une base de données, qui permette de créer une forme de « jurisprudence » grâce à la mutualisation des affaires . Alors qu'aucune échelle de sanctions n'a été définie, cette base de données, déjà mise en place au niveau international par ENRIO sous la forme de la collecte des rapports diffusés par ses membres, serait un outil de choix. L'un des freins importants à la constitution d'une telle base de données repose sur les modalités d'accès aux rapports d'instruction et aux informations qui y sont consignées. Leur publicité est aléatoire et certains centres de recherche ne souhaitent pas diffuser ces documents. L' anonymat et la divulgation de données sensibles comme de la composition des jurys posent problème. Faut-il un code de bonne conduite sur ces éléments ?

L'association Éthique et Intégrité a témoigné lors de son audition 218 ( * ) , vouloir mettre en place une base RIFCOP ( Research Integrity and Fraud Cases Online Platform ) qui aura plusieurs volets (rétractation, fraude, méconduite, rapports d'investigation internationaux afin que les RIS s'en inspirent, annuaire des experts de l'intégrité scientifique, guides et textes de loi, épistémologie, statistiques sur les fraudes et les manquements, une rubrique de post publication peer review ). Est-ce à une association de s'en charger, qui disposera, en l'état, d'informations moins complètes que celles progressivement agrégées par l'OFIS ?

Il n'est pas systématique que le RIS fasse un bilan annuel, quantitatif et qualitatif, destiné au chef d'établissement , bien que la mention d'un tel rapport confidentiel, recommandée par le « vade-mecum intégrité scientifique » (2017) figure régulièrement sur des sites institutionnels, comme l'université Rennes 1 ou celui du CNRS. S'il n'a pas été possible d'apprécier l'application d'une telle mesure à l'échelle de la France, les auditions ont permis de mettre en évidence sa plasticité. Par exemple, dans le texte régissant le « fonctionnement de la délégation à l'intégrité scientifique » de l'INSERM, il est écrit qu'un rapport d'activité annuel est émis par la délégation et disponible pour le public. Ghislaine Filliatreau a dit ne pas réaliser ce bilan annuel, mais tenir mensuellement au courant la direction de ses travaux, ce qui assure une prise de connaissance plus proche du terrain.

Lors des auditions, l'un des groupes de travail du CoFIS travaillait à la réalisation d'une typologie des manquements et plus spécifiquement, au-delà du descriptif, à obtenir plus de détails pour en tirer une politique qualité, afin de contribuer à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques et organisations dans le domaine de la recherche scientifique . Pour cela, le groupe se base à la fois sur le modèle de l'aéronautique et sur le modèle des « évènements indésirables associés aux soins » (EIAS 219 ( * ) ). Cette proposition est proche de celle d'Ulrich Dinargl, Ingo Przesdzing, Claude Kurreck et Sebastian Major 220 ( * ) , qui proposent de prendre modèle sur les critical incident reporting (rapports sur les incidents graves).

Recommandation n° 6 : Normaliser davantage les règles d'instruction des méconduites scientifiques ; assurer que les règles du débat contradictoire soient respectées lors des procédures d'instruction ; encourager les interactions transversales entre RIS et services juridiques des établissements ; inciter à une prise de décision finale collégiale et ne reposant pas exclusivement sur le chef d'établissement ; finaliser la base de données des cas d'instruction de méconduites afin de disposer d'un référentiel.

Il a été donné, préalablement, d'apprécier la multiplicité, la cohérence et la cohésion des textes nationaux, européens et internationaux encadrant les principes de l'intégrité scientifique et l'usage qui en est fait par les acteurs de l'intégrité scientifique en France. Il a aussi été possible de mettre en évidence la structuration de l'édifice de l'intégrité scientifique, reposant sur l'autorégulation au travers du RIS et de vigies comme PubPeer , Retraction Watch , lesquels sont portés par un désir de mutualisation, exemplifié par les actions menées par le ResInt. Recourir à l'autorégulation ne veut pour autant pas dire manquer de cadre. L'analyse précédente a souligné l'existence de plusieurs guides explicitant la procédure à suivre en cas de réception d'une allégation, cette procédure visant à assurer tant la protection du lanceur d'alerte que celle de la personne soupçonnée, qui a droit à la présomption d'innocence. Si certaines questions ont pu être légitimement soulevées, au sujet de la publicité à donner aux rapports des RIS, à l'utilité que pourrait avoir la mise à disposition d'une base de données de cas anonymisés ou l'importance de consolider les processus de réhabilitation et de réintégration du chercheur, les auditions menées dans le cadre de ce rapport portent à croire à la solidité du cadre établi pour l'intégrité scientifique en France . Les acteurs non institutionnels n'ont pas attendu la représentation nationale pour se doter de mécanismes d'investigation, de contrôle et de promotion de l'intégrité scientifique, et ils valorisent depuis presque deux décennies la mutualisation des expériences, le partage d'une culture commune de l'intégrité, autant que la nécessaire remise en question de certains usages du monde de la recherche. À ce titre, les rapporteurs souhaitent attirer l'attention sur la nécessité de prendre de la hauteur, en décentrant le regard, trop fixé sur les méconduites scientifiques, pour interroger plus largement l'environnement de recherche au sein duquel les méconduites ont lieu ( Partie III ).

TROISIÈME PARTIE : DÉVELOPPER UNE “CULTURE PARTAGÉE DE L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE”

Un article 221 ( * ) publié en 2016 par les membres du projet européen PRINTEGER 222 ( * ) a souligné qu'il existe deux discours ou regards sur l'intégrité scientifique, l'un mettant l'accent sur les méconduites, l'autre sur la construction d'une culture positive. À ce titre, l'OFIS a signifié lors de son audition l'importance de développer une « culture commune de l'intégrité de la méthode scientifique », selon l'expression d'Oliver Le Gall 223 ( * ) , plutôt que de faire de l'intégrité scientifique une notion négative, qui se définirait uniquement en creux par les méconduites qu'elle sanctionne. Cette « culture de l'intégrité scientifique », expression revenue à plusieurs reprises lors des auditions, valorise les principes contenus dans le « code de conduite européen du chercheur », à savoir la fiabilité, le respect, l'honnêteté, la responsabilité.

Le développement d'une culture partagée de l'intégrité scientifique passe par plusieurs véhicules. La formation à l'intégrité scientifique d'abord, dont plusieurs institutions soulignent la nécessité qu'elle soit dispensée tout au long du parcours de recherche, y compris aux encadrants et pas cantonnée aux jeunes chercheurs ( I ). La recherche épistémologique , qui étudie de manière plus étroite les rapports entre déontologie, éthique et intégrité, a également toute son importance.

La construction d'un environnement de recherche favorable est par ailleurs nécessaire pour donner corps à la culture partagée de l'intégrité scientifique ( II ). Pour cela, il est utile de se pencher sur les pratiques actuelles notamment en matière d'évaluation de la recherche et d'identifier les ressorts qui incitent à certaines pratiques néfastes : course à la publication, évaluation des chercheurs laissant trop de place aux indicateurs bibliométriques, ratio trop important de tâches administratives dévolues aux chercheurs...

I. FORMER À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE : UN EFFORT TRANSGÉNÉRATIONNEL

Plusieurs institutions et organismes ont mis en place des dispositifs incitatifs, qui touchent à la promotion et à la protection des valeurs de l'intégrité scientifique. C'est tout d'abord par la formation des futurs et jeunes chercheurs que se diffusent les valeurs de l'intégrité scientifique. Ces formations sont parfois étendues, de manière informelle pour le moment, aux personnels encadrants . Cette approche positive de l'intégrité scientifique, qui valorise des ambassadeurs plutôt que des punisseurs , passe aussi par le conseil préventif , qui permet de donner au référent scientifique un rôle déterminant, car il ne serait plus circonscrit à l'instruction des manquements. Enfin, il est utile de promouvoir la recherche épistémologique sur l'intégrité scientifique, afin de maintenir un degré de connaissance pointu dans ce domaine.

1. Former les doctorants

Actuellement, l'obligation de formation à l'intégrité scientifique ne concerne que les doctorants. Cette obligation résulte de l' arrêté du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat 224 ( * ) , qui dispose dans son article 3 que : « Les écoles doctorales [...] 3° veillent à ce que chaque doctorant reçoive une formation à l'éthique de la recherche et à l'intégrité scientifique . ».

Il n'existe pas de cartographie précise de l'offre de formation à l'intégrité scientifique en France 225 ( * ) . Néanmoins, l'annuaire récemment mis en ligne par l'OFIS 226 ( * ) sur une dizaine de formations et de ressources en ligne mises en place en France ainsi que l'étude 227 ( * ) menée en 2018 par Meriem Koual « Formation à l'éthique et à l'intégrité scientifique au sein des écoles doctorales françaises » permettent de constater que ces formations se présentent sous des jours extrêmement variés. Ainsi, sur 153 écoles doctorales ayant répondu à son enquête 228 ( * ) , Meriem Koual montre que 93 % proposent une formation à l'intégrité scientifique dans le cadre du doctorat, 75 % rendent cette formation obligatoire, mais elle fait rarement l'objet d'un examen de validation. Ces formations se font à 37 % sous la forme de cours en présentiel, 35 % sous la forme de conférences ou séminaires, 23 % sous la forme de cours en ligne. Le volume horaire est relativement faible : moins de 2 heures pour 13 %, entre 2 et 10 heures dans 62 % des cas, entre 10 et 20 heures dans 21 % des cas, plus de 20 heures dans 4 % des cas.

Ces formations prennent différents formats : cours magistraux, MOOC, serious game 229 ( * ) , kits numériques . L'université Paris-Sud-Paris-Saclay 230 ( * ) , au sein de son « réseau formation à l'éthique de la recherche et à l'intégrité scientifique » a entamé une réflexion de fond sur le sujet de la formation, comme le rapporte Emmanuel Hirsch 231 ( * ) , président du POLETHIS de Paris-Saclay : « Notre priorité est donc de ne pas proclamer à distance du réel quelque code de bonne conduite dont on sait l'inconsistance, mais de créer les conditions d'appropriation d'une culture à la fois personnelle et collective de l'intégrité comprise comme une manière d'être digne de la mission qui nous est confiée 232 ( * ) . ». Elle propose un format non plus basé sur le virtuel, mais principalement sur la présence et la mobilisation forte des élèves. Le premier volet de la formation se dispense sous la forme d'un cours magistral , « Introduction à l'éthique de la recherche et à l'intégrité scientifique », et vise à donner les fondamentaux méthodologiques aux étudiants. Le second volet, en groupe restreint, mais pluridisciplinaire le plus souvent, consiste à fournir aux apprenants une « éthique de terrain 233 ( * ) ». Il se compose d'une présentation théorique, mais surtout de cas pratiques étudiés sous la forme d'ateliers 234 ( * ) et d'un moment d'échange où les étudiants, sous couvert d'anonymat, peuvent formuler les questions liées à l'intégrité scientifique qui surviennent dans le cadre de leur thèse. Un questionnaire 235 ( * ) auquel ont répondu 1 628 doctorants, produit par l'université Paris-Saclay après 3 jours de formation 236 ( * ) dispensés en mai-juin 2018, a permis de rassembler des éléments sur l'efficience de ces formations, et de préciser les éléments fondamentaux qui permettent à une telle formation d'être utile. Le rapport met notamment en évidence le fait de présenter plutôt cette formation en début de doctorat et de l'adapter aux disciplines spécifiques (possibilité d'essaimer sous la forme de formations de proximité), ainsi que l'importance de l'échange avec les étudiants.

À l'Université de Bordeaux 237 ( * ) ou de Lyon 238 ( * ) , c'est le format du Massive Open Online Course ( MOOC) qui a été retenu, c'est-à-dire un cours proposé sur internet, dispensé sur quelques semaines et qui utilise généralement du contenu interactif (forum, travaux collaboratifs, quizz) ou des éléments animés (présentations, captations, jeux Flash ). Il repose le plus souvent sur une pédagogie active (fondée sur l'idée que l'apprentissage passe par l'expérience) et horizontale (les apprenants se corrigent entre eux, au lieu d'être seulement corrigés par la figure professorale). Le MOOC s'inscrit pleinement à ce titre dans une stratégie de la « graine dormante » : familiariser le plus tôt possible les apprenants avec le phénomène, avant qu'un problème se présente, et miser sur une appropriation collective et mutuelle des valeurs de l'intégrité scientifique. Le MOOC de Bordeaux, élaboré par Antoine de Daruvar et par Yannick Lung, se présente sous la forme de vidéos donnant la parole à de grands acteurs de l'intégrité scientifique en France et propose notamment un jeu à choix multiples, inspiré du Dilemma Game Scientific Integrity de l'université de Rotterdam. Les participants peuvent discuter de leurs prises de position sur un forum et mettre en commun leur interprétation de l'intégrité scientifique.

Dans le cadre du projet « Bibliothèques et médiation numérique au service de la réussite étudiante », l'université de Bordeaux, l'université de Bordeaux Montaigne, l'université de Pau et des Pays et de l'Adour, l'université de La Rochelle, Bordeaux sciences agro, Sciences Po Bordeaux et l'INP Bordeaux, ont développé le « jeu sérieux 239 ( * ) » Subpoena 240 ( * ) , lauréat du Prix spécial du jury PEPS (passion enseignement et pédagogie dans le supérieur). Il explore la question du plagiat à partir d'un fait réel : la démission du président hongrois en 2012, après avoir été accusé d'avoir plagié les travaux d'un autre chercheur dans sa thèse de doctorat. Subpoena amène le joueur à se familiariser avec la recherche documentaire, le référencement bibliographique, ou encore la détection du plagiat : « Subpoena permet donc de prendre conscience que la frontière entre inspiration et plagiat est infime... Sous couvert de divertissement ce jeu est un outil pour apprendre à utiliser correctement les sources et citations dans ses travaux de rédaction, pour ne plus commettre de plagiat involontaire 241 ( * ) » .

L'INSERM a, de son côté, mis en place le « kit intégrité scientifique », composé de quatre documents utiles pour les laboratoires, qui définissent des processus qualité comme celui du cahier de laboratoire ou la notion de mentorat, afin d'empêcher les dérapages, voire les traiter en interne et surtout savoir quoi faire quand ils surviennent.

Les auditions, et certaines initiatives locales, ont permis de mettre en évidence la nécessité que ces formations soient étendues à un public plus large. Il a notamment été souligné que cette culture de l'intégrité scientifique s'apprend le plus tôt possible , dès le primaire. Cette réflexion est partagée par Priya Satalkar et David Shaw dans un article récent de BMC Medical Ethics 242 ( * ) . Selon eux, l'éducation reçue dans la jeunesse et les traits de la personnalité ont une influence plus déterminante que les formations reçues en intégrité scientifique, dans la bonne conduite de la recherche. Les enjeux de l'intégrité scientifique devraient donc s'apprendre dès l'entrée à l'école.

2. Former les chercheurs et les encadrants

Plusieurs personnes auditionnées ont témoigné de la nécessité d'homogénéiser les pratiques , puisque, trop souvent, les jeunes doctorants formés à l'intégrité scientifique seront confrontés à des cultures différentes selon leur laboratoire de rattachement. Une étude de 2019 243 ( * ) , portant sur la perception différente des chercheurs en fonction des disciplines et du rang de carrière, a souligné combien la vision de l'intégrité scientifique diffère d'un chercheur à l'autre et nécessite à cet égard non seulement une formation, mais un apprentissage qui soit pensé spécifiquement pour ce public senior . C'est aussi l'opinion de la League of European Research Universities, qui préconise dans son rapport de janvier 2020 244 ( * ) que les institutions rendent les formations obligatoires pour les doctorants, mais qu'elles offrent aussi des formations spécifiques aux seniors .

Le référent intégrité scientifique Jean-Pierre Savineau explique que l'université de Bordeaux a fait le choix d'étendre le MOOC intégrité scientifique aux HDR, qui encadrent des doctorants, ainsi qu'aux post-doctorants, aux maîtres de conférences, etc., puisque tous peuvent faire face, à un moment de leur recherche, à un problème relevant de l'intégrité scientifique voire à un possible manquement. De même, Karine Demuth-Labouze, dans sa présentation des formations Poléthis, souligne que la formation des encadrants est fondamentale puisqu'elle « vise à soutenir l'émergence d'une confiance réciproque, prérequis à l'exercice d'une responsabilité partagée 245 ( * ) . ». Jacques Haiech, pour sa part, souligne que la formation doit se faire entre tous les membres du monde de la recherche . À cet égard, il souhaite créer une « école de l'éthique de la recherche et de l'intégrité scientifique » avec les universités de Paris-Saclay, de Bordeaux, de Paris et l'INSERM, afin de former le personnel à l'intégrité scientifique. Ghislaine Filliatreau a insisté sur l'importance d'agir sur le terrain. Ainsi, l'INSERM s'est engagé dans le projet d'accompagner des « ambassadeurs » , relais de l'intégrité scientifique au sein de chaque laboratoire. Jean-Pierre Savineau a lui aussi témoigné de son souhait de trouver des relais au sein des laboratoires de Bordeaux, afin de disposer d'un vivier de formateurs .

La nécessité de proposer des formations au-delà du seul doctorat s'impose car tous les chercheurs sont concernés par les valeurs de l'intégrité scientifique. Plusieurs initiatives commencent à se développer, mais elles doivent être généralisées afin d' atteindre une culture commune de l'intégrité scientifique .

Recommandation n° 7 : Rendre obligatoire la formation en intégrité scientifique tout au long de la carrière dans la recherche, en particulier pour les encadrants et autres personnes en position de mentorat (HDR, post-doc), comme le font déjà, de manière informelle, certains établissements.

3. Le conseil préventif

Un autre levier de formation à l'intégrité scientifique est le conseil préventif pouvant être prodigué sur demande par les référents intégrité scientifique (RIS). Ghislaine Filliatreau témoigne ainsi qu'à l'INSERM, le conseil préventif est surtout utilisé par les post-doctorants . Sans ouvrir de dossier et en respectant l'anonymat de la personne si elle le désire, elle est à même de la conseiller sur le meilleur moyen de redresser seule une situation inconfortable, touchant par exemple à un responsable de laboratoire. Elle explique que les sujets traités ainsi touchent le plus souvent à la problématique du rang de signatures dans un article.

4. Développer la recherche autour de l'intégrité scientifique

Plusieurs séminaires et colloques ont été organisés sur le sujet de l'intégrité scientifique. Ce sont notamment ces initiatives qui permettent de réaliser des avancées notables dans la réflexion et soulèvent les problématiques-clés liées à l'intégrité scientifique.

Ainsi, le colloque Parlons éthique 246 ( * ) (2012) à l'Institut Curie, en présence de l'ancien sénateur Claude Huriet, de Cédric Villani et de Claudie Haigneré, une membre du conseil scientifique de l'OPECST, a permis d'impulser une réflexion étendue sur l'intégrité scientifique à l'institut Curie, qui a donné lieu à une formation sur le sujet, à destination des doctorants.

Le colloque Intégrité scientifique : parlons-en ! 247 ( * ) (2016) a soulevé les questions suivantes : comment publier de manière intègre dans des revues prestigieuses ? Comment approcher les cas de la zone grise ? Que penser de l'embellissement des données ? Comment mettre en place une charte d'intégrité scientifique au sein des établissements ?

Le séminaire Sensibilisation aux manquements à l'intégrité scientifique et à leurs conséquences 248 ( * ) (2018) a développé des thématiques telles que la publication de résultats négatifs, les conflits d'intérêts ou encore l'évaluation de la recherche.

La journée L'intégrité scientifique au prisme de l'IST 249 ( * ) s'est intéressée à la fois à la place de l'intégrité scientifique dans l'écosystème des publications scientifiques, à la problématique de l'évaluation de la recherche, ainsi qu'au rapport plus spécifique entre intégrité scientifique et information scientifique et technique.

Le colloque L'intégrité scientifique à l'aune du droit 250 ( * ) a quant à lui mis l'accent sur les prohibitions et les prescriptions qui encadrent l'intégrité scientifique (encadrement du plagiat, des données, liens avec le droit du travail ou la déontologie). Ce colloque a aussi suscité un intérêt notable pour la question de l'épistémologie de l'intégrité scientifique (concept de désexcellence).

Le colloque Intégrité scientifique et science ouverte 251 ( * ) visait à mettre en évidence les renforcements mutuels entre intégrité scientifique et science ouverte, en réunissant les acteurs majeurs des deux champs.

La 6 e conférence mondiale consacrée à l'intégrité scientifique 252 ( * ) a notamment donné lieu à un texte remarqué sur la question de la bibliométrie. Le programme s'est concentré sur les « nouveaux challenges » posés à l'intégrité scientifique, autant en termes de recherche internationale que de science ouverte, ou de crises de la réplicabilité et de la reproductibilité et plus spécifiquement autour de l'évaluation de la recherche.

Enfin, le colloque La publication scientifique à l'heure des fake news ou comment favoriser l'intégrité scientifique ? 253 ( * ) s'est concentré sur deux thématiques : l'intégrité des publications scientifiques et comment détecter et réduire la fausse science.

D'autres initiatives, telle que la publication de la revue POLETHIS 254 ( * ) qui propose des articles, des entretiens et des reportages sur l'intégrité scientifique, contribuent également à faire progresser l'analyse scientifique du concept.

La recherche épistémologique fournit également des clefs de lecture. Ainsi Léo Coutellec, enseignant-chercheur en épistémologie, a participé à définir, au sein de l'institution de Paris-Saclay, le concept d'intégrité scientifique. Il s'agit selon lui d'utiliser l'éthique de la recherche 255 ( * ) , pivot réflexif, comme un pont entre l'intégrité scientifique 256 ( * ) et la responsabilité sociale 257 ( * ) . En cela, l'analyse de Léo Coutellec 258 ( * ) s'accorde avec le coeur du rapport de la mission : s'il est possible d'expliquer la hausse visible des méconduites scientifiques ou l'augmentation des rétractations par l'impossibilité pour les comités de lecture d'effectuer un travail toujours opérant (manque d'accès aux données, manque de temps pour relire), et donc d'y remédier localement sous la forme de charte, de standard et de code, il est impossible de trouver des solutions durables sans s'interroger sur l'évaluation du chercheur qui le pousse à toujours plus produire, pour être plus attractif, plus compétitif ou encore, du côté du relecteur, sur l'aggravation des tâches secondaires confiées au chercheur, notamment administratives, qui le tiennent éloigné de sa recherche ou sur la valorisation insuffisante du travail de peer review dans un dossier de candidature.

Le développement d'une « culture partagée de l'intégrité scientifique » se présente comme l'un des moyens durables et fédérateurs de promouvoir et garantir l'intégrité scientifique . Ceci passe d'abord par la formation à destination des jeunes comme des seniors , de préférence spécialisée par champ disciplinaire et basée sur des études de cas. Cela passe aussi par le développement de l'épistémologie , soit la recherche sur la recherche, qui doit permettre de mieux comprendre l'intrication entre la société civile et la recherche, entre les droits et les devoirs du chercheur. Cette culture propice à l'intégrité scientifique, préconisée par la plupart des codes et chartes, doit s'épanouir dans un environnement de recherche favorable à la consolidation de l'intégrité scientifique.

II. DÉVELOPPER ET SOUTENIR UN ENVIRONNEMENT DE RECHERCHE FAVORABLE À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE

La « déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche » affirme que : « Les institutions doivent susciter un contexte qui encourage l'intégrité à travers la formation, l'élaboration de règles claires et de critères rationnels pour l'avancement de carrière, en promouvant un environnement de travail qui prenne en compte l'intégrité scientifique 259 ( * ) ». C'est parce que parmi les critères favorisant les méconduites ont été identifiées la pression à l'excellence et une inflation de résultats positifs dans le domaine des publications, que s'est développée une approche plus globale, qui aspire à construire un environnement de recherche qui n'incite pas aux méconduites, et à l'inverse, diffuse les valeurs de l'intégrité. Construire un tel environnement 260 ( * ) passe autant par l'élimination ou la transformation de certaines pressions qui s'exercent sur le chercheur et l'incitent à tricher ou à tromper (pression à la publication, évaluation basée sur des critères métriques, valorisation des résultats positifs uniquement, climat concurrentiel), que par les dispositifs incitatifs et la mutualisation des bonnes pratiques (formations, récompenses allouées à l'intégrité, meilleur encadrement des projets y compris collaboratifs).

Une étude britannique datée de juin 2020 261 ( * ) , commandée par l'UKRIO et menée auprès de 1 500 chercheurs, identifie cinq des principales « pressions systémiques » qui s'exercent sur les sondés. La bibliométrie ainsi que la manière dont les chercheurs sont évalués ont, selon ces derniers, un « impact très négatif » sur l'intégrité scientifique : « La nature insidieuse de la pression à la publication et l'utilisation associée de paramètres (inappropriés) imprègnent tous les niveaux du système de recherche 262 ( * ) ». Pour favoriser la culture de l'intégrité scientifique il est d'abord nécessaire de faire évoluer le rapport du monde de la recherche à la publication . Il faut également revoir les modalités d'évaluation des chercheurs afin de mieux équilibrer les différents critères pour favoriser le respect de l'intégrité scientifique dans les pratiques de recherche. Enfin, certaines mauvaises pratiques de recherche pourront être progressivement éliminées grâce aux potentialités de la science ouverte .

1. La course à la publication, une injonction nocive pour l'intégrité scientifique

Plusieurs raisons sont données à l'augmentation des cas de méconduite scientifique, la principale étant liée à l'évaluation du chercheur , laquelle repose dans de nombreuses disciplines sur des critères métriques (quantité de travaux publiés et prestige de la revue où l'article est publié). On désigne par « bibliométrie » « [...] l'ensemble des procédures qui contribuent à l'évaluation de la production scientifique d'un chercheur (ou d'un ensemble de chercheurs) à partir du nombre de ses publications, du prestige des revues dans lesquelles elles ont été faites, et des citations auxquelles elles ont donné lieu 263 ( * ) ». Mais l'Académie des sciences, qui a consacré un rapport à la question en 2011, est formelle : « Il est indispensable de rappeler qu' aucun indicateur ni aucun ensemble d'indicateurs ne peuvent résumer à eux seuls la qualité de la production scientifique d'un chercheur 264 ( * ) . ».

En effet, on constate de nombreux biais liés à l'usage de ces indicateurs bibliométriques . Par exemple, le nombre de citations élevé d'un article ne signifie pas nécessairement qu'il est de qualité (un article polémique ou pseudoscientifique peut être cité un grand nombre de fois). De même, la position de l'auteur dans la signature n'étant pas prise en compte dans le cadre d'une recherche par nombre de citations, son nom peut être cité de nombreuses fois sans que sa contribution à un article soit nécessairement significative.

Il faut d'ailleurs rappeler que l e « facteur d'impact » (FI) , calculé à partir du nombre d'articles cités dans une revue sur une période donnée, a été mis au point à l'origine en 2005 par Thomson Reuters afin d'aider les bibliothécaires à identifier les revues scientifiques à acheter, mais n'a jamais été destiné à mesure la qualité d'un chercheur ou de son travail . Aujourd'hui, il est détourné de son usage premier par les jurys de recrutement et les évaluateurs afin d'estimer la qualité du travail d'un chercheur, en prenant en compte à la fois le nombre d'articles publiés par un chercheur et le nombre de citations reçues 265 ( * ) .

Les facteurs intégrés, comme le « facteur h 266 ( * ) » ou le « facteur g 267 ( * ) », ne sont pas exempts de critique. L'inventeur du h-index lui-même, Jorge Hirsch, rappelle la dangerosité de cette métrique, notamment parce qu'elle avantage les chercheurs ayant une longue carrière 268 ( * ) : « Il faut regarder la nature du travail. Si vous prenez des décisions uniquement sur la base du h-index de quelqu'un, vous pouvez finir par embaucher la mauvaise personne ou refuser une subvention à quelqu'un qui est beaucoup plus susceptible de faire quelque chose d'important. Il doit être utilisé avec précaution. ». Ces indicateurs métriques peuvent également brider la créativité d'un chercheur , qui peut se consacrer à un sujet « porteur » ou chercher à publier dans une revue à fort impact, au détriment d'une participation à l'accroissement des connaissances.

On constate ces dernières années l'apparition de nouveaux outils bibliométriques liés à l'essor d'internet. On est en effet passé de l'adage « publish or perish » qui désigne la nécessité de publier en quantité, à « visible or vanish » pour souligner l'importance d'être visible, repartagé et discuté sur les réseaux académiques et sociaux. Ces nouveaux outils, comme Altmetric 269 ( * ) ou Our Research 270 ( * ) , sont appelés « mesures d'impact alternatives 271 ( * ) ». De nombreux éditeurs de revues scientifiques ou de bases de données bibliographiques intègrent les altmetrics dans leurs interfaces web afin de témoigner, en temps réel, de la visibilité d'un article sur internet ; c'est le cas d' Elsevier , de F1000Research ou encore de PLoS . Mais là encore, les biais sont nombreux notamment car un taux d'attention élevé sur internet n'est pas gage de qualité. Les indicateurs altmetrics ne visent donc pas à remplacer les indicateurs traditionnels tels que ceux liés à la publication (facteurs g et h) ou aux revues (facteurs d'impact), mais à les compléter puisqu'ils mesurent des critères qui échappent aux indicateurs les plus courants.

L'Académie des sciences, si elle ne rejette pas en bloc l'utilisation des critères bibliométriques, insiste sur la nécessité de les utiliser comme un « outil d'aide à la décision » ne pouvant se substituer à l'évaluation qualitative par les pairs, et met en garde contre ses dérives : « Aucun de ces indicateurs, en fait, n'est complètement satisfaisant. Il paraît indispensable dans la pratique, de ne jamais utiliser l'un d'entre eux, isolément 272 ( * ) . ».

Ces indicateurs métriques sont, à ce titre, dénoncés depuis de longues années, à la fois parce qu'ils sont trompeurs (ils reflètent le nombre de citations d'un article et pas le contenu). Boris Barbour et Brandon Stell l'ont rappelé lors de leur audition : « Toute métrique est une distraction de la science ». Dès 2013, la déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche (DORA) 273 ( * ) a mis en avant le fait que ces facteurs d'impact sont inopérants et biaisés, notamment parce que d'une revue à l'autre les distributions de citations sont asymétriques et qu'ils peuvent être aisément manipulés. Elle insiste notamment sur « la nécessité de mettre un terme à l'utilisation d'indicateurs basés sur les revues, comme les facteurs d'impact, dans le financement, les nominations et les promotions ; celle d'évaluer la recherche sur sa valeur intrinsèque plutôt qu'en fonction de la revue où elle est publiée ; et celle encore d'exploiter au mieux les possibilités offertes par la publication en ligne ».

Nous avons vu en première partie que l'utilisation des indicateurs bibliométriques est dénoncée par la déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche (DORA) 274 ( * ) et le manifeste de Leiden 275 ( * ) . Ces textes ont notamment été signés par le CNRS, l'INSERM, l'INRA, l'ANR, le Hcéres. Mais il semble que l'utilisation des indicateurs bibliométriques persiste malgré tout. Il faudrait pouvoir mener une étude systématique auprès de ces différents organismes afin de vérifier l'évolution des pratiques.

Un autre moyen de s'assurer de la mise en oeuvre effective de ces recommandations serait de les faire figurer à un niveau réglementaire ou législatif (code de la recherche, code de l'éducation) , et non pas dans une circulaire, comme l'a évoqué la juriste Frédérique Claudot 276 ( * ) lors de son audition.

Recommandation n° 8 : S'assurer que les signataires de la déclaration de San Francisco (DORA) et du manifeste de Leiden appliquent bien les principes préconisés par ces textes ; à la suite de la déclaration de Bonn, promouvoir au sein de l'Union européenne une réflexion juridique et législative afin de doter l'Union d'une réglementation en faveur de l'intégrité scientifique et des libertés académiques.

2. Adopter des critères pour l'évaluation des chercheurs et de leur recherche favorisant l'intégrité scientifique

Hervé Maisonneuve 277 ( * ) , médecin de formation et actuel référent intégrité scientifique de la faculté de médecine université de Paris, estime que l'incitation à la « conduite responsable de recherche » doit se faire en passant par une réforme ambitieuse de la recherche, qui change autant le culturel (les différences générationnelles entre les chercheurs) et la méthode (en ralentissant la recherche), que les structures. Il cite l'article de Ferric C. Fang et Arturo Casadevall 278 ( * ) , « Reforming Science: Methodological and Cultural Reforms » (2012). Leur publication insiste sur plusieurs traits significatifs (notamment, la pression au « publier ou périr » et à une forte productivité qui noie la littérature scientifique sous de trop nombreux articles, un climat concurrentiel , le nombre restreint de récompenses 279 ( * ) , les financements fléchés , la place importante des tâches administratives qui tiennent captifs les chercheurs) et propose plusieurs réformes. Sur le plan de la méthode, il propose de revoir les critères d'évaluation du chercheur, notamment en ce qui concerne l'attribution des bourses, des allocations de recherches et des promotions, laquelle devrait privilégier la sélection par les pairs et valoriser le travail de groupe. Il insiste aussi sur l'importance d'enseigner l'éthique et l'intégrité ou encore l'épistémologie et de s'assurer que le chercheur, dans le cas des sciences, soit compétent en statistiques et en probabilités. Les réformes culturelles, elles, touchent autant à la question de la parité qu'à la nécessaire montée en puissance du travail collaboratif.

Critiquer l'importance qu'ont pris les facteurs métriques dans la production des chercheurs ne veut pas pour autant dire abandonner toute métrique. La dernière conférence sur l'intégrité scientifique qui s'est tenue à Hong Kong en 2019 280 ( * ) a produit un texte « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers : Fostering Research Integrity 281 ( * ) » , formulant plusieurs recommandations visant à améliorer l'évaluation des chercheurs. Ces alternatives, plutôt que substitutions, aux critères bibliométriques sont nombreuses : évaluer les chercheurs sur les pratiques responsables de recherche ; valoriser l'exactitude et la transparence ; valoriser la science ouverte ; valoriser les projets de science participative ; valoriser la méta-recherche, la synthèse, la traduction ; valoriser d'autres contributions comme le peer review 282 ( * ) et le mentorat, valoriser les efforts du chercheur pour que sa science soit réplicable et reproductible.

Le journaliste spécialiste de l'intégrité scientifique Nicolas Chevassus-au-Louis, lors de son audition, a rappelé que les missions de la fonction publique consistent à « produire, valoriser et diffuser le savoir » . Il lui semble judicieux que le chercheur puisse demander à être évalué pour ces trois missions d'égales importances au pourcentage de son choix. En effet, les missions diverses effectuées par les chercheurs afin de diffuser le savoir (conseil scientifique, audition parlementaire, vulgarisation scientifique, relecture d'articles 283 ( * ) ) et plus encore l'administration et la gestion de la recherche sont peu, voire pas, valorisées. Pourtant, une étude publiée en 2015 284 ( * ) a estimé que le travail de peer review touchant au biomédical représentait la même année près de 63,4 millions d'heures dans le monde tandis qu'une autre étude en 2018 285 ( * ) estime que le travail de reviewers prend 65 millions d'heures par an , que 75 % des rédacteurs de revues ont du mal à trouver des relecteurs et que 42 % des chercheurs sollicités refusent l'invitation du fait de la charge de travail que cela représente. Andrew Preston et Tom Culley, fondateurs de Publons qui encourage les chercheurs à enregistrer et donc valoriser leur activité de reviewer , soulignent la nécessaire prise en compte de cette mission dans l'évaluation des chercheurs : « Pour résumer, le système récompense presque exclusivement les experts qui publient à presque n'importe quel prix. Le même système n'offre alors aucune incitation formelle aux mêmes experts sur lesquels on s'appuie pour filtrer les soumissions fausses, frauduleuses ou trompeuses par le biais d'un examen par les pairs. [...] Il n'existe pas de solution miracle pour résoudre tous les problèmes, mais il existe des mesures simples à prendre pour rétablir l'équilibre dans le système. Un point de départ évident est de reconnaître et de récompenser formellement les efforts d'évaluation par les pairs afin qu'ils aient une chance contre les récompenses disproportionnées accordées à la publication 286 ( * ) . ».

Les chercheurs semblent s'accorder sur leur volonté de voir le peer review pris en compte dans l'évaluation, plutôt que rémunérée , comme le montre notamment une étude réalisée en 2016 auprès de 3 000 chercheurs 287 ( * ) . Pour cela, différentes initiatives ont été proposées, comme celle de créer un indicateur F3-index, conçu pour évaluer la performance d'un reviewer , en étudiant le temps de correction, la longueur du rapport, ou encore l'adéquation entre les recommandations et le comité éditorial 288 ( * ) .

D'autres chercheurs demandent que l'évaluation s'effectue sur le contenu propre des articles , plutôt que d'élargir le périmètre de l'évaluation. Alan Finkel 289 ( * ) propose ainsi d'évaluer le chercheur selon la « Règle des Cinq », qui consiste à lire les cinq meilleurs articles du candidat, publiés ces cinq dernières années. À titre d'exemple, l'Agence nationale de recherche (ANR) a indiqué lors de son audition 290 ( * ) ne plus tenir compte du h-index lors de l'évaluation des projets, mais juger les cinq publications majeures relatives au projet proposé, qui prouvent la compétence du chercheur. Il ne s'agit pas d'évaluer le chercheur, mais bien son projet .

Certains soulignent aussi l'intérêt de valoriser dans l'évaluation des chercheurs la publication de résultats négatifs : « Lorsque les résultats négatifs ne sont pas publiés dans des revues à fort impact, d'autres scientifiques ne peuvent pas apprendre d'eux et finissent par répéter des expériences qui ont échoué, ce qui entraîne un gaspillage de fonds publics et un retard dans les progrès réels 291 ( * ) ». Or, Hervé Maisonneuve rappelle que les chercheurs n'envoient souvent pas les études dont les résultats sont « négatifs », en partie parce que les résultats ne sont, de ce fait, pas attractifs. Il existe néanmoins des revues spécifiquement dédiées à la publication de résultats négatifs 292 ( * ) .

Changer les modalités d'évaluation du chercheur offre aussi l' opportunité de sortir de la course à la publication et d'éradiquer un fléau qui en est né : les revues prédatrices. En effet, le chercheur en microbiologie Quentin Gaday 293 ( * ) explique que la multiplication des revues prédatrices a été rendue possible par la conjonction de plusieurs phénomènes. D'une part, elles sont un moyen utile, pour certains chercheurs hostiles au peer review, de passer le filtre en cas d'article non consensuel (climatoscepticisme, anti-vaccins, panspermie, etc.). D'autre part, les revues prédatrices tirent parti de la durée parfois trop longue de la révision d'articles par certaines revues (de 2 à 12 mois, voire plus, avec des variations selon les disciplines et le mode de publication) : l'absence de révision par les pairs leur permet de publier sous de brefs délais. Les chercheurs qui s'y résolvent peuvent ainsi rapidement ajouter un article à leur liste de publications.

La réflexion autour de l'évaluation de la recherche doit être replacée dans le mouvement plus global de la slow science (science lente) laquelle préconise entre autres de ralentir le rythme des publications, des demandes de financement et d'appels à projet pour laisser au chercheur... le temps de réfléchir . Plusieurs chercheurs ont participé à la diffusion de ce concept. C'est tout particulièrement le cas d'Olivier Gosselain, archéologue à l'Université libre de Bruxelles, au travers de sa « charte de désexcellence » qui souligne que le discours de l'excellence, prôné entre autres par les agences de financement, est néfaste, car il ne laisse pas de place aux tâtonnements, aux fausses pistes ou même à la pensée de s'épanouir : « La fraude est un produit dérivé de l'excellence 294 ( * ) ». Une étude de 2014, menée par John Ziker 295 ( * ) , a en effet mis en évidence qu' un enseignant-chercheur passe environ 30 % de son temps à accomplir des tâches qui ne sont pas directement liées à la recherche (réunions, répondre à des emails). Seuls 3 % d'une journée de la semaine de travail est consacrée à de la recherche et 2 % à la rédaction de manuscrits. Si une étude d'ampleur reste encore à mener en France, les enseignants-chercheurs verbalisent depuis plusieurs années maintenant la charge administrative toujours grandissante qui pèse sur leurs épaules.

Malgré cela, Philippe Hinsinger 296 ( * ) souligne que si une grande partie de la communauté scientifique est sensible à cette question, la recherche française s'inscrit dans un cadre international qui pousse les chercheurs à « auto-entretenir » ce système pour pouvoir rivaliser avec les instituts étrangers . Selon lui, même si l'on adoptait des mesures à l'ANR et dans les instituts et organismes de recherches, les chercheurs n'en seraient toujours pas moins en compétition avec des pays non alignés sur ces choix, comme la Chine qui incite financièrement ses chercheurs à publier. On peut opposer à cet argument l'idée que la promotion d'une recherche de qualité peut lui procurer un avantage. À l'inverse de la monnaie, la bonne science chasse la mauvaise ! Par ailleurs, les méconduites scientifiques peuvent exposer les sociétés à des risques technologiques et sanitaires importants. Les pouvoirs publics ont à ce titre un rôle essentiel de régulation.

Les auditions ont également mis en lumière l'importance de mieux mesurer les bonnes pratiques institutionnelles et individuelles préservant l'intégrité scientifique. Actuellement, l'intégrité scientifique figure dans les critères d'évaluation du Hcéres, au sein de « l'organisation et de la vie de l'unité » et se limite principalement à la lutte contre le plagiat, la bonne tenue du cahier de laboratoire et une politique claire en matière de signature d'articles 297 ( * ) . Il faudrait très probablement étoffer cette liste de critères examinés par les évaluateurs du Hcéres .

Concernant la détection de plagiat, il faut noter que les logiciels de détection ( Compilatio ) sont une « béquille, autant qu'un problème 298 ( * ) », puisqu'ils produisent autant des faux négatifs que des faux positifs. Cela a été corroboré par plusieurs des personnes auditionnées, rappelant qu'un individu souhaitant plagier connaît toutes les tricheries, comme celle d'ajouter des lettres en blanc entre les mots, pour tromper le logiciel. En ce sens, un logiciel ne peut absolument pas se substituer à une analyse humaine : « L'intégrité académique est un problème social ; la diligence raisonnable ne peut être laissée à des algorithmes inconnus. Garder la science honnête repose sur des scientifiques prêts à travailler dur pour protéger la littérature 299 ( * ) . ».

Recommandation n° 9 : Intégrer la promotion et la garantie de l'intégrité scientifique au nombre de missions de l'Hcéres.

Ainsi, la bibliométrie est fortement interrogée, que ce soit en montrant ses limites, ce qui a favorisé le développement d'outils alternatifs qui prennent en compte la visibilité sur internet, ou en rejetant en bloc une évaluation chiffrée du chercheur et de ses travaux, puisque celle-ci encourage une politique de l'excellence, propice aux manquements à l'intégrité scientifique. Un autre levier favorable à la création d'un environnement de recherche est le développement de la bibliodiversité, tourné vers un partage libre et immédiat des résultats et des données de la recherche.

3. Exploiter les potentialités de la science ouverte pour développer l'intégrité scientifique

La science ouverte peut fournir des pistes pour prévenir les écarts à l'intégrité scientifique. L'accès ouvert aux données et aux résultats de la recherche vise en effet à promouvoir une science plus transparente, vérifiable par tous et qui peut être largement discutée entre pairs.

Ainsi, développer la pratique de l' open peer review pourrait contrecarrer certaines difficultés précédemment discutées concernant l 'évaluation et la relecture par les pairs, le « peer-review » (activité chronophage non valorisée dans l'évaluation des chercheurs, subjectivité possible de relecteurs anonymes qui obligent certains auteurs à citer certaines références...) . Les revues en open peer review mettent en ligne les noms des relecteurs ou leurs commentaires et rendent donc transparent le processus de peer review . C'est le cas de certaines revues, comme F1000Research , Royal Society Open Science, Annals of Anatomy, PeerJ ou encore EMBO Press qui se sont engagées cette pratique depuis une dizaine d'années. Marin Dacos, conseiller pour la science ouverte au MESRI, souligne les vertus du processus d' open peer review 300 ( * ) , mais il invite à la prudence et à l'expérimentation pour ne pas tomber dans une forme de dictature de la transparence : que faire si l'on publie, par exemple, la lettre de rejet des articles refusés ? Si l'évaluation est publique, cela suppose aussi un droit de réponse. À ce sujet, il est intéressant de noter qu'une étude détaillée de 2016 301 ( * ) , menée auprès de 3 062 répondants dans le cadre du projet OpenAIRE2020, permet de constater que 60,2 % d'entre eux pensent que la publication du rapport améliore la qualité des relectures, tandis que 31 % sont favorables à la déclaration de l'identité des relecteurs.

Le problème de la non -reproductibilité des résultats publiés pourrait être en partie résolu grâce au développement combiné de la science ouverte et d'une culture partagée de l'intégrité scientifique . Ce phénomène est identifié depuis les années 2010 sous le terme de « crise de la reproductibilité 302 ( * ) » : les résultats d'une expérience ne peuvent être reproduits par une autre équipe de recherche alors qu'elle travaille dans les mêmes conditions que l'équipe qui a publié. Selon Nicolas Chevassus-au-Louis, seuls 25 % des travaux de recherche publiés aujourd'hui seraient reproductibles . En 2016, une enquête publiée dans Nature 303 ( * ) souligne que 70% des 1 576 chercheurs interrogés ont échoué dans leur tentative de reproduire l'expérience d'une autre équipe . Ces chiffres sont corroborés par plusieurs études, dans le domaine de la biologie 304 ( * ) ou de la psychologie 306 ( * ) par exemple. Cela pose un problème majeur car se fonder sur une hypothèse fausse peut avoir des conséquences sanitaires, sociales importantes et faire perdre du temps à la recherche, ainsi qu'aux financeurs.

Plusieurs rapports ont été publiés sur la crise de la reproductibilité et les moyens qui permettraient d'en sortir. Celui de l' Academy of Medical Sciences en 2015 308 ( * ) , centré sur le champ biomédical, a identifié plusieurs causes à la non-reproductibilité des travaux de recherche. Elles sont en partie liées à un défaut d'intégrité scientifique : « triturage de données » ( HARKking -- Hypothesizing After the Results are Known -- formulation d'une hypothèse en fonction des résultats obtenus, ou data dredging , aussi appelé p-hacking , c'est-à-dire la publication des seules données abondant dans le sens de l'hypothèse) ; non publication des résultats négatifs, jugés peu attractifs par les revues ; études réalisées à partir de données insuffisantes ; erreurs d'ordre technique ; méthode insuffisamment détaillée pour être reproductible par d'autres ; erreurs méthodologiques dans la conduite de l'étude. Ainsi, le développement d'un environnement favorable à la science et au chercheur, et une culture renforcée de l'intégrité scientifique, peuvent améliorer significativement la reproductibilité des travaux. Parmi les pistes proposées pour résoudre cette crise, les possibilités offertes par la science ouverte figurent en bonne place . En effet, en mettant les données et les résultats de la recherche en accès ouvert, les pairs peuvent vérifier plus facilement la justesse et la reproductibilité des travaux concernés. Les auteurs peuvent aussi déposer le protocole avant que ne soit réalisée l'expérience (comme sur la plateforme Open Science Framework ), afin qu'il puisse être révisé par les pairs. Il est également possible de discuter entre pairs des articles publiés sur des plateformes dédiées . Manque à cette liste une solution essentielle, mise en oeuvre par les Pays-Bas en 2016 309 ( * ) : investir massivement dans les expériences de reproduction et changer, à terme, la vision des revues prestigieuses sur cette problématique puisqu'elles rechignent actuellement à publier de tels articles.

Un autre problème auquel se trouvent confrontés nombre de chercheurs touche à la difficulté de trouver une revue qui accepte de publier leur article (certaines revues pratiquent des coûts de publication très élevés que ne peuvent payer les chercheurs) ou à des délais de publication trop importants . Une réflexion globale a été amorcée à ce sujet dans le cadre des sciences ouvertes car ces pratiques nuisent à la bonne évolution de la science. Parmi les pistes apportées par la science ouverte, la pré-publication ou preprint peut apparaître comme une solution intermédiaire : le « manuscrit auteur » est déposé sur une plateforme numérique avant évaluation et mise en forme par un comité de rédaction. Il permet à la fois de discuter de l'article en travail, de mettre à disposition de la communauté scientifique plus rapidement les résultats de la recherche sans attendre la publication dans une revue, et de revendiquer la paternité sur des résultats. Cette pratique est depuis longtemps passée dans les moeurs en mathématiques et en physique et elle commence à se développer dans d'autres disciplines telles les sciences sociales ou la biologie 310 ( * ) . En 2017, les Alliances AllEnvi et AvieSan et l'ensemble de leurs membres ont été jusqu'à déclarer le preprint « comme une forme recevable de communication scientifique [et] invitent les instances d'évaluation et de financement de la recherche à adopter une politique similaire et à reconnaître les preprints comme des contributions au progrès scientifique 311 ( * ) . » La déclaration souligne la nécessité de valoriser les preprints dans l'ensemble du système de production de connaissances : citation, évaluation, recrutement, promotion, etc.

Les preprints semblent avoir suscité un réel intérêt chez les chercheurs dans le cadre de la crise sanitaire de la Covid-19, car elle leur permet de porter rapidement à la connaissance de tous le fruit de leurs travaux. Ainsi, une étude publiée en mai 2020 montre qu'entre janvier et avril 2020, 83 % des auteurs publiant un travail relatif à la Covid-19 postaient pour la première fois sur les serveurs BioRxiv et MedRxiv 312 ( * ) .

Si les preprints sont parfois critiqués pour leur absence de peer review 313 ( * ) , certaines plateformes d'« épi-revues 314 ( * ) » comme Peer Community In proposent des alternatives vertueuses. Cette dernière permet en effet aux chercheurs de disposer de rapports sur leurs travaux et de choisir ensuite, ou non, de publier l'article ainsi commenté et relu par les pairs. Elle forme un système alternatif de recommandation d'articles scientifiques de haute qualité, déposés dans des banques d'archivage en libre accès . L'externalisation de l'avis des pairs, qui utilise ici la « voie verte 315 ( * ) » de publication, est une façon de penser d'autres manières de publier, non plus assujetties aux maisons d'édition, tout en bénéficiant de la même expertise des pairs. Un nombre croissant de sociétés savantes, revues et laboratoires estiment que cette revue par les pairs non seulement est recevable pour l'évaluation du chercheur, mais aussi témoigne de l'excellence de l'article 316 ( * ) .

Quelques précautions sont tout de même à prendre concernant les preprints , comme un avertissement clair sur les serveurs où ils sont hébergés, car ils sont susceptibles d'être consultés par le grand public ou repris par les médias, alors même qu'ils ne possèdent pas le statut d'information vérifiée ou validée.

Recommandation n° 10 : Mieux identifier les processus par lesquels les objectifs poursuivis par la politique de la science ouverte peuvent aider au respect et à la promotion de l'intégrité scientifique ; définir des normes d'archivage et de mise à disposition des données de la recherche afin de garantir le contrôle par les pairs des productions scientifiques. Les rapporteurs jugent nécessaire qu'un rapport sur la science ouverte fasse suite au présent rapport.

QUATRIÈME PARTIE : LES AVANCÉES OBTENUES EN MATIÈRE D'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE DANS LA LPR

Au cours de leur mission, les rapporteurs ont pu constater que la perception du sujet de l'intégrité scientifique évoluait rapidement . En effet, seules quatre années se sont écoulées depuis la publication de la circulaire n° 2017-040 de Thierry Mandon, mais la prise en compte de l'intégrité scientifique par les acteurs de la recherche a connu des progrès significatifs. Ainsi, la majorité des établissements est désormais dotée d'un référent intégrité scientifique, le ResInt, l'OFIS et le CoFIS ont produit une documentation substantielle et une part de plus en plus importante de la communauté scientifique est sensibilisée et se saisit du sujet en questionnant certaines de ses pratiques et en soulevant des cas potentiels de méconduites scientifiques. L'autorégulation apparaît donc comme un élément clef, ce qui est d'ailleurs bien explicité dans la déclaration de Bonn. Néanmoins, les auditions menées dans le cadre de la mission ont permis de faire émerger le fait que les acteurs de la recherche souhaitent que l'autorégulation soit accompagnée et soutenue par la législation . Cette demande a même été formulée par voie de presse dans Le Monde par 90 sociétés savantes 317 ( * ) : « Pour cela, nos sociétés savantes demandent urgemment la définition dans la loi d'un ensemble de règles - et de moyens pour les mettre en oeuvre - garantissant l'honnêteté et la rigueur scientifique du travail effectué dans les laboratoires de recherche publics et de sa diffusion ».

La pandémie de la Covid-19, en mettant la recherche scientifique au premier plan et en révélant certains cas de méconduites scientifiques, a par ailleurs accéléré chez tous (communauté scientifique, pouvoir publics, société civile) la prise de conscience des enjeux liés à l'intégrité scientifique et a montré combien il est crucial de pouvoir s'appuyer sur les résultats d'une recherche fiable.

Tout cela a convaincu les auteurs du rapport qu'il était nécessaire de renforcer l'encadrement législatif autour de l'intégrité scientifique . Heureux hasard du calendrier, le travail de la mission a coïncidé avec l'examen parlementaire du projet de loi de programmation pour la recherche (LPR). Les rapporteurs ont ainsi eu la rare opportunité de proposer immédiatement de transcrire dans la loi certaines des recommandations émanant de leurs travaux .

Cette quatrième partie présente les avancées en matière d'intégrité scientifique qui ont été intégrées dans la loi de programmation pour la recherche et les implications de ces ajouts (I). Elle revient ensuite sur certains aspects qui ont pu être discutés par le Parlement, mais qui n'ont pas abouti (II).

I. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE PROGRAMMATION DE LA RECHERCHE RELATIVES À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE ET LEURS IMPLICATIONS.

La qualité des échanges lors du débat parlementaire sur la LPR a permis une discussion nourrie autour de l'intégrité scientifique et l'inscription dans la loi de plusieurs dispositions.

Ainsi, l' article 16 concerne notamment dans un premier temps le Haut conseil d'évaluation de l'enseignement supérieur et de la recherche (Hcéres) et précise :

« Article 16

« Le code de la recherche est ainsi modifié :

« [...]

« 6° L'article L. 114-3-1 est ainsi modifié :

« [...]

« Il [le Hcéres] contribue aÌ la définition d'une politique nationale de l'intégritéì scientifique et favorise l'harmonisation et la mutualisation des pratiques des établissements d'enseignement supérieur et de recherche dans ce domaine.

« Il favorise l'usage de la langue française comme langue scientifique.

« [...]

« Pour l'exercice de ses missions, le Haut Conseil s'inspire des meilleures pratiques internationales. Il fonde son action sur les principes d'objectivitéì, de transparence, de débat contradictoire et d'égalitéì de traitement entre les structures examinées. Le choix des experts chargés des évaluations est guideì par les principes de neutralitéì, d'expertise scientifique au meilleur niveau international, d'équilibre dans la représentation des thématiques et des expertises et avis et de l'absence de conflit d'inteìre^ts. Les eìtablissements et les structures eìvalueìs sont mis en mesure de preìsenter, aÌ leur demande, des observations tout au long et aÌ l'issue de la procédure d'eìvaluation.

« [...]

« [Le Haut Conseil est chargeì :]

« [...]

« 6° De promouvoir l'inteìgriteì scientifique et de veiller aÌ sa prise en compte dans les évaluations qu'il conduit ou dont il valide les procédures ».

Ces modifications apportées au code de la recherche attribuent au Hcéres de nouvelles missions. Plusieurs concernent également l'Office pour l'intégrité scientifique (OFIS) et le Conseil scientifique de l'OFIS (CoFIS), organes qui lui sont rattachés. Il ne revient pas au législateur de préciser les modalités internes d'organisation du Hcéres qui doivent être établies au sein même de cette organisation. Toutefois, les rapporteurs rappellent ici l'importance de redéfinir les périmètres d'action de chacun de ces acteurs, objet de leurs recommandations n° 2 et 4.

Une première mission essentielle, qui semble d'ailleurs concerner au premier chef l'OFIS et le CoFIS, est de contribuer à la définition d'une politique nationale de l'intégrité scientifique . Ces deux entités disposent en effet d'une vision globale du sujet sur le plan national, elles sont en relation avec les principaux acteurs de l'intégrité scientifique en France et sont impliqués dans des instances internationales leur permettant de connaître les meilleures pratiques prévalant chez nos partenaires. Elles sont ainsi au courant des principales évolutions concernant l'intégrité scientifique et peuvent contribuer de manière efficace à la définition de la stratégie nationale dans ce domaine.

La mission consistant à favoriser l'harmonisation et la mutualisation des pratiques implique de pouvoir fédérer l'ensemble des acteurs de l'intégrité scientifique. Cela demande aussi un travail opérationnel (actualisation des guides existants, suivi de leur mise en oeuvre) qui doit pouvoir être réalisé par l'OFIS.

La mission consistant à veiller à la prise en compte de l'intégrité scientifique dans les évaluations relève davantage des attributions classiques du Hcéres. Comme cela a été évoqué dans la troisième partie, le Hcéres a déjà établi quelques critères devant faire l'objet d'une vérification par les comités d'évaluation afin de s'assurer de la production d'une recherche intègre (lutte contre le plagiat, bonne tenue des cahiers de laboratoire, politique claire en matière de signature d'articles). La disposition introduite dans la LPR invite le Hcéres à préciser et étoffer la liste des critères à examiner et à redoubler de vigilance sur ces points au moment de l'évaluation.

Enfin, la mission consistant à promouvoir l'intégrité scientifique semble du ressort de tous : OFIS, CoFIS, Hcéres. C'est en effet l'ensemble des acteurs qui doit être mobilisé à travers le développement de contenus et de formations, en expliquant les enjeux et les bonnes pratiques lors des évaluations... L'objectif est de sensibiliser l'ensemble de la communauté scientifique au sujet de l'intégrité scientifique.

L'article 16 de la LPR complète également la partie du code de la recherche consacrée à l'éthique de recherche :

« Le chapitre unique du titre I er [« L'éthique de la recherche »] du livre II [« L'exercice des activités de recherche »] est complété par un article L. 211-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 211-2.- Les travaux de recherche, notamment l'ensemble des activités de la recherche publique contribuant à ses objectifs mentionnés à l'article L. 112-1, respectent les exigences de l'intégrité scientifique visant à garantir leur caractère honnête et scientifiquement rigoureux et à consolider le lien de confiance avec la société.

« L'intégrité scientifique contribue à garantir l'impartialité des recherches et l'objectivité de leurs résultats.

« Les établissements publics contribuant au service public de la recherche et les fondations reconnues d'utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens du même article L. 112-1 offrent les conditions du respect des exigences de l'intégrité scientifique pour les activités et travaux menés en leur sein. Ils mettent en place les dispositifs nécessaires pour promouvoir les valeurs de l'intégrité scientifique et favoriser le respect de ses exigences. Sans préjudice des dispositions du code du patrimoine sur les archives publiques, ils conservent les résultats bruts des travaux scientifiques réalisés en leur sein afin de permettre leur vérification.

« Les établissements et fondations mentionnés au troisième alinéa du présent article transmettent tous les deux ans au ministre chargé de la recherche et au Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur un rapport sur les actions entreprises dans le cadre des dispositions du présent article.

« Un décret pris sur le rapport du ministre chargé de la recherche fixe les conditions d'application de ces dispositions. »

Cet article nouveau établit une définition simple de l'intégrité scientifique, qui vise à garantir le caractère honnête et scientifiquement rigoureux de l'activité de recherche, et rappelle l'importance du lien de confiance entre la recherche publique et la société.

Il induit aussi une obligation pour les établissements de recherche : celle d'offrir à leurs employés/chercheurs des conditions de travail permettant de respecter l'intégrité scientifique. Cela formalise encore davantage les dispositions de la circulaire n° 2017-040 de Thierry Mandon. Les conditions d'application de ces dispositions doivent être fixées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la recherche.

L'article 18 complète le code de l'éducation en disposant qu'« AÌ l'issue de la soutenance de la thèse, le candidat doit prêter serment en s'engageant aÌ respecter les principes et les exigences de l'intégritéì scientifique, dans des conditions fixées par arrêtéì du ministre chargeì de la recherche ».

Au moment de la reconnaissance par ses pairs de sa qualité de chercheur, cet acte à visée symbolique doit permettre de renforcer la prise de conscience du docteur de l'importance de ce sujet et de formaliser un véritable engagement. Un arrêté de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche doit à présent fixer le texte du serment de thèse ainsi que les modalités dans lesquelles il doit être prononcé.

L' article 23 de la LPR complète le code de la recherche en matière de déclaration des conflits d'intérêts des chercheurs dans le cadre de leurs activités. Il rétablit, au sein du chapitre I er « Missions et garanties fondamentales » du titre I er « Dispositions générales » du livre IV « Les personnels de la recherche », un article L. 411-5 qui prévoit que, « Sans préjudice des dispositions applicables aux agents publics, notamment celles des articles 25 bis et 25 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, toute personne qui participe directement au service public de la recherche est tenue d'établir une déclaration d'intérêts préalablement aÌ l'exercice d'une mission d'expertise aupreÌs des pouvoirs publics et du Parlement. Elle mentionne les liens d'intérêts de toute nature, directs ou par personne interposée, qu'elle a, ou qu'elle a eus pendant les cinq années précédant cette mission, avec des personnes morales de droit priveì dont les activités, les techniques et les produits entrent dans le champ de l'expertise pour laquelle elle est sollicitée ».

Cette disposition assurera que les expertises réalisées par des chercheurs seront exemptes de tout soupçon de conflit d'intérêts. C'est un décret en Conseil d'État qui fixera les conditions d'application de cet article.

II. VERS UN ORGANE INDÉPENDANT DÉDIÉ À L'INTÉGRITÉ SCIENTIFIQUE

Certains sujets n'ont pas fait l'objet d'un consensus dans le cadre de la LPR et demandent peut-être davantage de réflexion. Parmi eux, la question de l'indépendance de l'OFIS a notamment été soulevée.

Cette question a été abordée à plusieurs reprises lors des auditions. Certains acteurs pensent qu'il serait utile de donner une personnalité morale à l'OFIS , afin qu'il puisse ester en justice et servir de structure d'appel aux personnes mises en cause dans des affaires de méconduites. Dans leur tribune publiée dans Le Monde le 13 octobre 2020, les sociétés savantes insistent par ailleurs sur l'importance de « donner à l'Office français de l'intégrité scientifique, récemment créé, une réelle autonomie d'action et d'expression, ainsi que les moyens financiers et les prérogatives nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Il faut qu'il puisse instruire tout dossier relatif à l'intégrité scientifique et publier librement ses avis. Il faut enfin qu'il puisse saisir la justice et demander aux tutelles de prendre des sanctions universitaires et professionnelles en cas de méconduite ».

Le CoFIS lui-même réaborde cette question à la faveur d'un cas concret : le refus par le Hcéres de diffuser une note réalisée par le CoFIS sur l'espace web de l'OFIS sur le site du Hcéres : « La note d'expression du CoFIS a été finalisée et adoptée suite à la réunion du CoFIS de juin. La direction du Hcéres n'a toutefois pas validé sa diffusion sur le site web. Elle a été publiée par News Tank (en accès réservé), par ENRIO (en français et en anglais) puis finalement comme annexe au compte-rendu de la réunion du CoFIS de juin. Le CoFIS exprime son étonnement de la difficulté rencontrée, ainsi que le besoin d'un espace d'expression propre. Au-delà, il estime que cette difficulté questionne, une fois de plus, le statut de l'OFIS comme département du Hcéres 318 ( * ) ».

La question de l'indépendance de l'OFIS est également posée dans le rapport de l'Inspection générale de l'éducation, du sport, de la recherche (IGESR) relatif à l'intégrité scientifique 319 ( * ) . La mission de l'IGESR recense plusieurs alternatives à un rattachement de l'OFIS à l'Hcéres, mais elle ne retient finalement que deux options :

« - le rattachement de l'OFIS à l'Institut de France serait porteur d'un fort symbole puisque l'Institut de France, et les académies qu'il regroupe, ont pour mission la promotion des sciences, mais donnerait à ce dernier un rôle plus opérationnel qu'il ne l'a dans ses actions actuelles ; cette option pourrait être une alternative intéressante à investiguer plus avant ;

« - le statu quo, les critiques du rattachement de l'OFIS au HCÉRES pouvant être atténuées par une meilleure reconnaissance de la mission spécifique de l'OFIS, ce qui devrait notamment impliquer :

ï « une communication autonome (en donnant par exemple la responsabilité éditoriale au président du CoFIS), alors qu'actuellement, si l'intégrité scientifique est bien présente sur la page d'accueil du HCÉRES, toute communication de l'OFIS est associée au logo du HCÉRES et passe par les arcanes internes de sa communication (à noter cependant que l'adresse internet ofis.fr n'est actuellement pas disponible),

ï « un point sur les objectifs et moyens de l'OFIS lors de chaque réunion de dialogue de gestion entre l'administration centrale et le HCÉRES ».

Lors du débat parlementaire, a été soulevée à plusieurs reprises la difficulté pour l'Hcéres d'être à la fois juge et partie en matière d'intégrité scientifique. En effet, comme cela apparaît nettement dans la troisième partie de ce rapport, les modalités d'évaluation de la recherche peuvent considérablement influer sur le comportement des chercheurs et les inciter à des conduites peu intègres. Si ce constat est partagé par plusieurs parlementaires, il n'est pas apparu de solution consensuelle au moment du débat. Une solution pourrait consister en une meilleure définition des périmètres de l'OFIS vis-à-vis du Hcéres et une renégociation des moyens humains et financiers qui lui sont accordés. Une autre, comme le suggère l'IGESR, pourrait être un rattachement à l'Institut de France. Il semble donc que les réflexions soient amenées à se poursuivre à ce sujet.

RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1 : Introduire, par la loi, dans le code de la recherche une définition de l'intégrité scientifique et proposer des règles générales pour engager les institutions et les chercheurs à la respecter. Cet objectif a été en grande partie atteint par la loi de programmation de la recherche.

Recommandation n° 2 : Réévaluer les conditions d'exercice des missions de l'OFIS et du CoFIS, ainsi que leurs rôles institutionnels.

Recommandation n° 3 : Encourager la nomination de RIS dans l'ensemble des établissements de recherche ; préciser leur statut et les conditions d'exercice de leurs missions ; formaliser le suivi de leur action, par exemple par la remise de bilans annuels ou pluriannuels de leur activité.

Recommandation n° 4 : Veiller à la bonne articulation des travaux et réflexions menés dans le cadre de l'OFIS, du CoFIS, du ResInt et de la conférence des signataires.

Recommandation n° 5 : Reconnaître l'intérêt des actions menées par les acteurs, promoteurs et garants de l'intégrité scientifique et soutenir leurs actions dans le respect de leur indépendance.

Recommandation n° 6 : Normaliser davantage les règles d'instruction des méconduites scientifiques ; assurer que les règles démocratiques du débat contradictoire soient respectées lors des procédures d'instruction ; encourager les interactions transversales entre RIS et services juridiques des établissements ; inciter à une prise de décision finale collégiale et ne reposant pas exclusivement sur celle du chef d'établissement ; finaliser la base de données des cas d'instruction de méconduites afin de disposer d'un référentiel.

Recommandation n° 7 : Rendre obligatoire la formation en intégrité scientifique tout au long de la carrière dans la recherche, en particulier pour les encadrants et autres personnes en position de mentorat (HDR, post-doc), comme le font déjà, de manière informelle, certains établissements.

Recommandation n° 8 : S'assurer que les signataires de la déclaration de San Francisco (DORA) et du manifeste de Leiden appliquent bien les principes préconisés par ces textes ; à la suite de la déclaration de Bonn, promouvoir au sein de l'Union européenne une réflexion juridique et législative afin de doter l'Union d'une réglementation en faveur de l'intégrité scientifique et des libertés académiques.

Recommandation n° 9 : Intégrer la promotion et la garantie de l'intégrité scientifique au nombre de missions de l'Hcéres.

Recommandation n° 10 : Mieux identifier les processus par lesquels les objectifs poursuivis par la politique de la science ouverte peuvent aider au respect et à la promotion de l'intégrité scientifique ; définir des normes d'archivage et de mise à disposition des données de la recherche afin de garantir le contrôle par les pairs des productions scientifiques. Les rapporteurs jugent nécessaire qu'un rapport sur la science ouverte fasse suite au présent rapport.

EXAMEN DU RAPPORT PAR L'OFFICE

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques s'est réuni le jeudi 4 mars 2021 pour examiner le rapport « Promouvoir et protéger une culture partagée de l'intégrité scientifique » présenté par M. Pierre Henriet, député, et Pierre Ouzoulias, sénateur, rapporteurs.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - Nous allons maintenant parler d'un sujet qui, sans conteste, prend de l'ampleur : celui de l'intégrité scientifique.

M. Pierre Henriet, député, rapporteur . - Ce rapport fait état de deux années de travail, au cours desquelles nous avons interrogé un grand nombre d'acteurs institutionnels. Je remercie d'ailleurs le secrétariat de l'Office et plus particulièrement Fleur Hopkins, pour son travail remarquable ; je salue également nos collaborateurs, qui se sont pleinement mobilisés.

Bien que résultant d'une saisine antérieure à la crise sanitaire, ce travail a pris une coloration toute particulière dans un contexte où la communication scientifique occupe une place croissante dans le processus de décision politique. Jamais un tel nombre de personnalités scientifiques ne se sont exprimées dans les médias ou directement auprès du grand public, par l'intermédiaire des réseaux sociaux. Dans un tel contexte, la rigueur scientifique est d'autant plus décisive, vous en conviendrez tous.

L'intégrité scientifique est un sujet qui a parfois été entouré de polémiques, et le rapport retrace les avancées qu'il y a pu y avoir dans ce domaine. C'est une spécificité de ce rapport : certaines des recommandations qui y sont formulées sont déjà intégrées dans notre législation.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - On ne peut que s'en féliciter !

M. Pierre Henriet, député, rapporteur . - C'est un travail collectif. Tout l'Office s'est mobilisé pendant l'examen du projet de loi de programmation de la recherche (LPR), et ces félicitations doivent être collectives. Je tiens à remercier le président Villani qui s'est engagé pleinement à mes côtés, lors des débats à l'Assemblée. Le rapporteur Pierre Ouzoulias vous éclairera sur les avancées obtenues dans la LPR.

L'Office avait été saisi par la Commission de la culture du Sénat en février 2019, pour éclairer la représentation nationale sur les choix à opérer dans le domaine de l'intégrité scientifique. Nous avions fait une communication à l'Office, le 9 juillet dernier, en parallèle de la présentation de la LPR en conseil des ministres.

Cette saisine procède d'un phénomène, à la fois conjoncturel et structurel, qui s'est aggravé ces derniers temps.

L'appréhension de l'intégrité scientifique varie selon les établissements et les organismes de recherche ; la culture de l'intégrité est encore peu répandue malgré le développement de la formation à destination des doctorants depuis quelque temps. L'ensemble des acteurs académiques et universitaires (HDR, post-doctorants, encadrants, etc.) n'ont pas encore dans leur cursus de formation sur la culture de l'intégrité scientifique.

Sur un plan conjoncturel, nous sommes confrontés à une multiplication des cas de méconduites, médiatisés pour certains, traités de façon hétérogène, et qui révèlent parfois des environnements de recherche peu propices aux comportements intègres ; la crise sanitaire a révélé une augmentation significative de la défiance à l'encontre de la parole scientifique.

Le rapport que nous vous présentons aujourd'hui vise à dresser un état des lieux de l'intégrité scientifique en France et à émettre des recommandations afin de renforcer celle-ci dans le monde de la recherche. Ce travail implique également d'étudier les causes susceptibles de conduire certains chercheurs à des comportements peu intègres et la façon dont les cas de méconduite sont identifiés puis instruits.

Les objectifs à terme sont les suivants : d'une part, restaurer la confiance dans la science et offrir à chaque chercheur un cadre de recherche et un parcours de publication conformes aux principes de l'intégrité scientifique et, d'autre part, permettre à la France de jouer un rôle moteur dans le développement et la généralisation de pratiques de recherche intègres et scientifiquement rigoureuses, ce qui ne manquera pas de renforcer la crédibilité et la légitimité de la recherche française sur la scène internationale.

Ce rapport s'inscrit dans un travail de fond qui méritera d'être complété, notamment par l'étude des questions relatives à la science ouverte et plus largement au parcours des publications scientifiques, sujets sur lesquels, je crois, l'Office a déjà décidé de se pencher.

Nous avons conduit de nombreuses auditions et plusieurs champs d'action se sont dessinés à l'issue de nos travaux : d'abord, le renforcement et la clarification du rôle des acteurs de l'intégrité scientifique. Au niveau des établissements et des organismes, il existe désormais des référents intégrité scientifique - qui ont été nos interlocuteurs privilégiés. Contrairement aux déontologues, ces référents ne disposent pas d'un statut officiel, alors que cela serait indispensable pour leur procurer la protection et la légitimité inhérentes à leurs fonctions, notamment en cas de conflit d'intérêts au sein d'un établissement.

Au niveau national, l'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) et le Conseil scientifique de l'intégrité scientifique (CoFIS), hébergés par le Haut Conseil de l'évaluation et de l'enseignement supérieur (Hcéres), ont pour mission de mener des réflexions sur l'intégrité scientifique, mais également de regarder les pratiques et d'animer les réseaux. Dans le cadre de nos propositions, nous estimons que les conditions d'exercice des missions de ces deux instances et leurs rôles institutionnels doivent être revus (recommandation n° 2).

Il est également souhaitable que la collaboration entre le réseau des référents intégrité scientifique (ResInt) et l'OFIS soit renforcée et que la nomination d'un référent intégrité scientifique dans les établissements scientifiques soit systématisée. Le statut des référents scientifiques doit être clarifié afin d'offrir une légitimité et un cadre serein aux personnes exerçant ces fonctions parfois difficiles. À terme, l'OFIS devra fonctionner de manière totalement indépendante, et nous avons déjà eu l'occasion d'aborder ce sujet avec le gouvernement et le Hcéres. Actuellement, l'OFIS est hébergé par le Hcéres et cette incubation est nécessaire pour renforcer cette structure à l'avenir. Nous espérons également que l'OFIS puisse devenir un interlocuteur privilégié des référents intégrité scientifique sur le terrain et les soutenir grâce à l'expertise développée au sein de chaque établissement. Cette évolution exige que l'OFIS dispose de données et d'outils pour offrir une analyse de haut niveau lorsqu'il sera saisi sur une affaire.

Ce rapport vise également à informer la représentation nationale sur de nouveaux acteurs qui ne sont pas institutionnels mais qui agissent comme des réseaux de régulation informels. On peut citer PubPeer, un site internet créé en 2012 par deux neuroscientifiques chercheurs au CNRS, qui offre une plateforme de discussion scientifique en court-circuitant au besoin les acteurs qui pourraient avoir des conflits d'intérêts, empêchant l'autocorrection de la science, que ce soit des auteurs, des journaux ou des institutions. Ce site joue désormais un rôle important dans l'identification des méconduites scientifiques. Dans cet espace virtuel, chacun peut, sous couvert d'anonymat, signaler un article dont il souhaite discuter. Depuis quelques années, la plateforme a été prise d'assaut par des signalements d'articles frauduleux, ou ayant fait l'objet d'embellissement ou de falsification d'images, ce qui n'est pas sans poser des problèmes de fond sur les rapports entre une plateforme anonymisée et les canaux institutionnels. La légitimité et la pertinence de cet outil font donc l'objet de controverses dans le monde de la recherche : il est appréhendé tantôt comme un vecteur d'autorégulation, tantôt comme un outil de délation au service des rivalités entre chercheurs ou organismes de recherche. PubPeer est néanmoins devenu un acteur incontournable de la régulation de l'intégrité scientifique, autant par sa fonction d'alerte que de médiation. En novembre 2019, le site comptait 70 000 commentaires pour 25 000 articles commentés, dont 4 % émanant des auteurs eux-mêmes. La France ne représente que 5 % du flux, mais les organismes de recherche sont à l'affût de signalements auxquels il est recommandé de répondre. Ainsi, des publications de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) auraient donné lieu à 328 notifications pour le seul mois de novembre dernier.

Notre rapport aborde également les méconduites scientifiques et la manière de les traiter. L'idée est de faire évoluer l'appréhension des méconduites. Des disparités existent entre les organismes et les établissements de recherche dans les procédures d'instruction, même si nous souhaitons saluer la qualité du « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique » élaboré par le ResInt, qui éclaire les référents intégrité scientifique sur le terrain et contribue à l'harmonisation des pratiques. Nous recommandons que les personnes mises en cause dans les procédures soient mieux protégées afin d'éviter une incidence trop grave sur la santé physique et mentale des chercheurs. La question de la réhabilitation des chercheurs mis en cause doit également être traitée.

Le troisième axe du rapport concerne l'amélioration de l'environnement de recherche. C'est un facteur déterminant pour les chercheurs. Il est urgent de réviser les modalités d'évaluation, notamment les référentiels utilisés en matière de publication, et de développer des outils plus pertinents pour apprécier la qualité du travail des chercheurs au quotidien. Dès 2013, la déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche avait mis en avant le fait que les facteurs d'impact étaient biaisés et inopérants car, d'une revue à l'autre, les distributions de citations sont asymétriques et peuvent être manipulées. La limite des indicateurs métriques est largement démontrée et elle est particulièrement défavorable aux jeunes chercheurs.

Il faut mettre fin au principe délétère du « Publier ou périr » et valoriser les pratiques de recherche rigoureuses et transparentes. La formation à l'intégrité scientifique, déjà mise en place pour les doctorants, doit être étendue aux futurs HDR (habilités à diriger des recherches) et aux personnes qui encadrent les recherches. Cette formation doit être considérée comme un parcours qui accompagne le chercheur tout au long de sa carrière et non comme une seule formation. C'est l'objet de notre septième recommandation.

Nous espérons que ces travaux provoqueront un engouement pour la recherche dédiée à l'intégrité scientifique, notamment pour améliorer l'état de nos connaissances sur ce sujet encore méconnu. Nous espérons également qu'une réflexion globale pourra être menée au niveau européen et que cette réflexion puisse aboutir à une réglementation harmonisée et applicable dans l'ensemble des États membres. Ce travail supranational implique d'analyser l'application concrète des engagements liés aux chartes et aux conventions signées par les organismes de recherche depuis plusieurs années.

La première partie du rapport détaille les sources qui constituent le corpus dédié à l'intégrité scientifique en dehors des avancées réalisées dans le cadre de la loi de programmation de la recherche (LPR). Leur multiplication témoigne de la volonté du monde de la recherche d'avancer sur ces questions partout dans le monde.

M. Pierre Ouzoulias, sénateur, rapporteur . - Je remercie l'Office et ses deux présidents pour leur confiance et pour nous avoir donné les moyens de réaliser ce rapport qui n'aurait pas pu aboutir sans l'implication des fonctionnaires de l'Office et de nos collaboratrices.

L'intégrité scientifique et l'Office entretiennent des relations anciennes puisque le président Bruno Sido avait identifié ce problème dès 2014 et avait orienté l'Office sur plusieurs réflexions sur le sujet. En 2018, l'Office avait entendu les présidents de l'OFIS et du Hcéres, MM. Olivier Le Gall et Michel Cosnard. Je rappelle également les travaux du sénateur Claude Huriet et du député Jean-Yves Le Déaut, qui avaient conduit à l'organisation d'un colloque à Nancy en 2017 intitulé « L'intégrité scientifique en action ».

Nous avons donc poursuivi une tradition ancienne avec ce rapport qui constitue une étape supplémentaire et importante. En effet, sur la base du pré-rapport validé en juillet 2020 par l'Office, les parlementaires des deux chambres, et notamment de l'Office, se sont mobilisés afin que la loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030, adoptée le 24 décembre dernier, qui ne contenait initialement aucune disposition relative à l'intégrité scientifique, dote finalement la France d'un dispositif unique au monde. À l'Assemblée nationale, ce sont Pierre Henriet et le président Cédric Villani, et au Sénat, Laure Darcos, rapporteure du texte, et tous membres de l'OPECST, qui ont travaillé en ce sens et dans la même direction. Je salue également notre collègue Sonia de La Provôté qui, en tant que représentante du Sénat au sein du Hcéres, sera la garante des nouvelles missions que confie la LPR à cet organisme.

L'article 16 de la LPR a en effet confié au Hcéres une mission forte : « la définition d'une politique nationale de l'intégrité scientifique ». La loi lui a demandé de favoriser l'harmonisation et la mutualisation des pratiques, et par ailleurs, de veiller à ce que l'intégrité scientifique soit effectivement prise en compte dans le processus d'évaluation des opérateurs, en théorie comme en pratique. Évaluation et intégrité scientifique sont intimement liées, et à défaut d'une telle prise en compte, des biais dans l'évaluation sont susceptibles de provoquer des contraintes en matière d'intégrité scientifique, voire des incitations aux méconduites.

La loi propose aussi une définition : « l'intégrité scientifique contribue à garantir l'impartialité des recherches et l'objectivité de leurs résultats ». On ne peut pas faire plus simple. Bien sûr, chaque discipline scientifique a ses propres pratiques, méthodologiques et déontologiques, et il n'appartient pas au législateur de les définir au-delà des objectifs généraux : chacun comprend bien que l'intégrité scientifique d'un mathématicien n'est pas celle d'un archéologue. Toutefois, je tiens à préciser que si les parlementaires sont intervenus dans ce débat, c'est bien à la demande des scientifiques eux-mêmes : au fil de nos auditions, tous ont fait le constat que les mécanismes d'autorégulation ne fonctionnaient plus, et en ont appelé au soutien du législateur. Il y a une véritable prise de conscience par les scientifiques de la réalité d'un phénomène qui les dépasse, et qu'ils n'arrivent plus à contrôler.

Parmi les dispositions du code de la recherche introduites par la LPR, il en est une qui nous intéresse particulièrement : l'obligation faite aux chercheurs publics de déclarer leurs potentiels conflits d'intérêts lorsqu'ils participent à une mission pour les pouvoirs publics ou le Parlement. De fait, j'ai été frappé de constater que la déontologie qui s'impose aux parlementaires, notamment en matière d'obligation de déport, est beaucoup plus sévère que celle qui s'impose aux scientifiques : à cet égard, la loi ne fait qu'appliquer aux chercheurs les règles que nous nous appliquons ici au Parlement.

Nous avons eu de nombreuses discussions sur le statut qu'il convenait de donner à l'Office français pour l'intégrité scientifique (OFIS). Nous avions pensé en faire une autorité administrative indépendante (AAI), une solution qui n'a pas pu aboutir, faute de temps et d'un arbitrage interministériel en ce sens. Il reste donc au sein du Hcéres, mais il faudra veiller, à l'avenir, à garantir son indépendance. Il est en effet essentiel que l'OFIS puisse se prononcer sur les méthodes d'évaluation du Hcéres.

Au Sénat, nous avions envisagé de confier à l'Institut de France la mission d'héberger l'OFIS dans ses locaux, ce qui aurait pu constituer une manière élégante de lui conférer une sorte d'indépendance de fait. Cette piste n'a pas abouti, même si l'Institut n'y était pas opposé. C'est une idée qu'il faut garder en tête.

Je terminerai en évoquant l'Europe, à la suite de ce qu'a dit Pierre Henriet : sur la base du travail que nous avons fait en France, nous devrions aller porter la bonne parole afin de faire de l'Europe un pôle d'excellence en matière d'intégrité scientifique et, par-là, de conforter les bonnes pratiques à l'échelle internationale et de lutter contre certaines pratiques à l'Ouest aussi bien qu'à l'Est - en Asie et plus particulièrement en Chine, pour le dire clairement. Il va falloir regarder certaines pratiques, le rôle des revues prédatrices, ou encore la capacité de certaines officines à offrir thèses et articles clé en main, avec un niveau d'excellence scientifique dépendant du montant du chèque.

J'ai d'ailleurs le plaisir de vous annoncer que la commission de la culture du Sénat va officiellement saisir l'OPECST d'une mission sur la science ouverte, un champ très large qui permettra de s'interroger sur les revues, sur les coûts de la publication scientifique, sur la place du livre et des éditeurs privés, etc. Je serai le cas échéant disponible pour continuer ce travail. Nous avions d'ailleurs commencé à aborder le sujet avec Pierre Henriet, mais cela nous menait trop loin et nous avons finalement choisi de retirer les développements en question du rapport.

Je vous remercie une fois de plus pour la confiance que vous nous avez témoignée tout au long de cette aventure de presque deux ans.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - J'adresse un très grand remerciement à nos collègues Pierre Henriet et Pierre Ouzoulias pour cet exposé remarquable et je formulerai quelques réflexions en complément.

D'abord, comme vous l'avez souligné, nous pouvons nous féliciter que l'OPECST ait pesé sur ce sujet, s'en soit saisi et que le Parlement ait joué pleinement son rôle. Aujourd'hui, nous pouvons dire que la façon dont les institutions françaises prennent en compte le sujet de l'intégrité scientifique est unique au monde, non parce qu'un jour un ministre ou un gouvernement a décidé de le régler, mais bien parce que la communauté scientifique et les institutions du Parlement s'en sont saisies. Vous avez eu raison de saluer le travail réalisé par nos collègues Bruno Sido et Claude Huriet, qui a été un acteur charismatique et extrêmement actif sur ces questions d'intégrité scientifique.

Je me souviens de l'audition d'Olivier Le Gall, président de l'OFIS dans sa première configuration, et des questions que nous nous posions déjà sur la pérennité de sa situation au sein du Hcéres, sur l'adéquation de ses moyens, sur son avenir, etc. Nous avons par la suite identifié des mésaventures et des inconvénients. Nous allons les gérer. Il est normal que les institutions mettent un peu de temps à se mettre en place. Mais on voit se dessiner un dispositif qui sera tout à fait satisfaisant, en particulier une fois résolu le problème du statut de l'OFIS. Je me suis d'ailleurs exprimé, à titre personnel, pour un OFIS indépendant, jugeant que son rattachement au Hcéres entraînait une sorte de conflit d'intérêts qui n'est pas sain dans un domaine où l'indépendance est une vertu majeure.

Je n'avais pas en tête la solution du rattachement à l'Institut de France, qui est intéressante et mérite d'être approfondie avec ce dernier. Toutes les disciplines sont, par nature, représentées, avec leurs différentes pratiques, au sein de l'Institut, qui a une tradition d'indépendance. Il faut se souvenir que l'Académie des sciences a été fondée dans les années 1660 pour permettre au pouvoir politique de disposer d'un conseil scientifique indépendant. En tout cas, sur le plan institutionnel, félicitons-nous sans ambages de ce rôle positif du Parlement et de l'OPECST. Quand l'Office parvient à prendre les sujets en amont des débats pour les travailler, il peut être vraiment efficace.

Ma deuxième remarque est qu'il s'agit ici d'un sujet grave, dont il ne faut surtout pas minimiser l'importance. Les problèmes de méconduite scientifique retardent la science. Cela remonte à loin. Les mathématiciens ont tous en tête la grande querelle sur l'accusation de plagiat entre Newton et Leibniz, au XVII e siècle, qui a abouti à une séparation entre la Grande-Bretagne et le continent, laquelle a eu des conséquences considérables sur le développement des sciences. À l'Est, on se souvient, parmi les cas de non-intégrité scientifique, du désastre Lyssenko en Russie, de la façon dont tout un domaine scientifique a été « plombé » durablement par l'interférence avec la politique. Parmi d'autres drames emblématiques, on se souvient du suicide de ce chercheur confronté à un problème d'inconduite scientifique d'un des membres de l'équipe dont il était responsable à l'Institut Riken, il y a quelques années au Japon.

Mon troisième commentaire, c'est que ce sujet est sorti de l'ombre. Il y a quarante ans paraissait La Souris truquée , premier ouvrage à briser un tabou en indiquant, de manière un peu systématique, combien dans certains laboratoires scientifiques ou chez certains chercheurs, on pouvait constater de pratiques inqualifiables. C'était le tout début. À l'époque, quand on évoquait ces sujets, il s'agissait de collections d'anecdotes, de pratiques et d'histoires recensées sans se poser de questions sur les statistiques, le système, les institutions, etc. On en était à l'enfance de l'art, si je puis dire. Je me souviens, cela vous fera certainement sourire, quand j'ai commencé ma carrière en mathématiques, avoir entendu l'histoire de ce mathématicien italien qui s'était fait une spécialité de traduire les articles de confrères étrangers, avant de les publier dans d'autres revues, à une époque où il n'y avait pas de vérification systématique. Il avait été démasqué quand l'un des experts contacté pour écrire une revue de ses articles dans les notices mathématiques avait découvert, dans l'article qu'on lui demandait de référer, son propre article traduit. Il l'avait écrit tel quel dans la notice. Alors, notre collègue italien s'était résolu à faire le tour de toutes les universités italiennes pour arracher la page correspondante dans leur catalogue.

C'était la préhistoire, maintenant nous avons des outils automatiques d'analyse des plagiats, des dénonciations incessantes, etc. et nous nous posons toutes ces questions. Mais cela va au-delà. On a compris qu'il ne suffisait pas de trouver le plagiaire, le coupable clairement identifié, mais qu'il s'agissait aussi d'un ensemble de zones grises. C'est bien dit dans le rapport : la frontière entre l'inspiration et le plagiat est parfois fine, et il existe une gamme de pratiques pour lesquelles il s'avère difficile de trancher. À travers ces pratiques grises, tout un système perd en efficacité. Le problème résulte aussi, comme on l'a vu ces dernières années, de l'augmentation phénoménale du nombre de revues, de la diversification des modèles économiques, de l'apparition de revues prédatrices, de la charge immense qui s'est mise à peser sur les experts chargés d'évaluer les articles, de communautés tellement élargies, en particulier dans les sciences de la vie, qu'il devient très difficile de garantir un regard à la fois éclairé et indépendant, de la montée en puissance de la Chine, etc. Bref, le contexte des manquements à l'intégrité scientifique a connu une systématisation qui fait que le débat est passé de l'artisanat à l'industrie.

Dans le rapport, vous citez une statistique indiquant que peut-être un tiers des scientifiques estiment avoir été témoins de pratiques douteuses, et qu'une part importante d'entre eux reconnaît avoir agi de façon un peu douteuse, parfois en tordant les cadres, parfois en embellissant une figure, considérant que ce n'est pas grave, puisque cela participe d'un système qui a perdu en intégrité, en conscience professionnelle, dans son ensemble. De tels chiffres étaient impensables voici quelques décennies. On se disait que c'était une toute petite fraction de brebis noires, tout le reste du troupeau agissant de façon intègre. Aujourd'hui, on voit que c'est beaucoup plus nuancé, et à prendre beaucoup plus au sérieux.

Il y a aussi eu des affaires célèbres, vous en citez quelques-unes, dont certaines ont éclaboussé le sommet de nos institutions scientifiques, y compris en France. Avec ce rapport, on voit bien la différence par rapport aux ouvrages mentionnés tout à l'heure. Il a pris la mesure de ce que le sujet a gagné en ampleur et en intensité. Vous analysez bien tout ce qui, de façon systémique, pousse parfois à la faute ou à enfreindre les règles, donnant lieu à toutes sortes de comportements indélicats, non seulement de la part des chercheurs mais aussi des éditeurs, de ceux qui s'occupent des revues : le « publish or perish », le « fund or famish » - si l'on ne parvient pas à décrocher un contrat, on va mourir de faim, puis disparaître. Vous relevez notamment la montée des indicateurs en sciences : combien d'articles publiés, combien de citations, dans quelle revue, etc. Il y a encore maintenant des débats sur l'extraordinaire rythme de publication de l'un des scientifiques clefs, médiatiquement parlant, de la Covid, et sur le fait qu'il a souvent publié dans des revues où lui-même était membre du comité de rédaction. Toutes ces pratiques interrogent et font partie d'un système.

Ma quatrième remarque porte sur un sujet que vous avez abordé brièvement, qui viendra nécessairement sur la table, mais qui n'est pas forcément du ressort de cette mission : celui des méconduites humaines liées au contexte scientifique. Je veux dire par là le harcèlement moral de la part d'un directeur de thèse, les brimades, voire le harcèlement sexuel. Ce sont des choses qui existent aussi. La société universitaire, dont on reconnaît le besoin d'indépendance, doit aussi se conformer à des règles qui sont celles de la vie en société. Dans certains milieux, le débat a été extrêmement poussé. Il viendra aussi de façon connexe, parce que ce n'est pas une question de pratique scientifique, mais on n'en n'est pas tellement loin.

Dernière remarque : vous êtes parfaitement dans l'air du temps, avec les préconisations de ce rapport et le contexte dans lequel il s'inscrit. Oui, le débat vers la science ouverte est un débat de notre temps. J'approuve donc votre demande de prolonger vos travaux par un rapport sur la science ouverte. Dans cette période de Covid, où le rapport entre science et société a été interrogé plus que jamais, où l'on a vu les revues les plus prestigieuses, comme Science ou Nature, faire de la mauvaise science en allant bien trop vite parce qu'elles étaient sous pression, ce débat est d'une extraordinaire actualité. Je n'ai pas vraiment de question particulière, mais vous réagirez peut-être à mes commentaires.

M. Gérard Longuet, sénateur, premier vice-président de l'Office . - Cédric Villani ayant dit l'essentiel, je voudrais insister sur la vocation de l'Office parlementaire et peut-être donner un éclairage sur des sujets plus techniques, plus précis.

Sur la vocation de l'Office, je me réjouis que nous soyons au coeur de notre métier, en associant les deux assemblées, en entretenant un contact de confiance avec les milieux scientifiques et en introduisant immédiatement dans cet excellent véhicule qu'était la LPR les dispositions qui vous apparaissaient indispensables et que nous avions évidemment partagées et soutenues. Comme j'ai un certain penchant pour la vie parlementaire et pour le rôle du Parlement dans la vie publique, vous voyez devant vous un premier vice-président absolument enchanté d'apporter la démonstration qu'il n'est pas nécessaire à tout prix de tirer au sort pour avoir de bonnes solutions. Mais ceci est un commentaire personnel, je ne demande à personne de le partager.

En revanche, deux aspects vont expliquer ma demande : le développement du numérique et l'internationalisation, les deux étant d'ailleurs liés, puisque le numérique permet une internationalisation de l'instant, tous obstacles de lieux, de distances, de langues étant ainsi abolis. L'intelligence artificielle permet quasiment d'abolir cette distance - en dépit d'une dialectique de l'offensive et de la défensive - et d'unifier le monde de la science. En contrepartie, nous devons faire preuve d'une vigilance quasi permanente sur l'intégrité scientifique, donc prévoir une sorte de rendez-vous, peut-être annuel, de suivi.

L'Office parlementaire suit assez souvent les dossiers qu'il a ouverts. Nous n'avons pas la prétention de fixer dans chaque rapport l'état de l'art pour l'éternité, mais à l'instant où nous le publions. Je pense qu'il faut considérer l'intégrité scientifique comme un secteur extrêmement évolutif, pour les raisons techniques que j'évoquais à l'instant, sans doute la dimension économique, assurément avec la pandémie mondiale la dimension humaine, enfin la sensibilité de l'opinion publique à la science.

Je crois qu'il existe une curiosité pour la science, bien involontaire, mais beaucoup plus forte qu'auparavant. Comme vient de le dire Cédric Villani, on a découvert que les scientifiques ont beaucoup de talents mais n'ont pas nécessairement toutes les qualités. On a vu de vrais scientifiques soutenir des causes absurdes. Sans entrer dans le détail et régler des comptes avec l'histoire, Georges Claude, fondateur d'Air Liquide, était également l'un des principaux soutiens de la collaboration dans notre pays. On peut se tromper politiquement tout en ayant une vraie valeur ajoutée scientifique et, inversement, on peut méconnaître une réalité scientifique parce qu'on se censure à l'endroit d'une évolution qui n'est pas à la mode ou acceptée. Je pense, en particulier, au débat sur les vaccins et la façon de combattre le virus.

Avoir un rendez-vous régulier sur le thème de l'intégrité scientifique serait donc judicieux. Conviendrait-il de choisir un jour déterminé ou de prendre un rendez-vous à l'occasion de l'examen du budget de la recherche ? Je suis convaincu qu'il faut prendre l'initiative de tenir à jour notre réflexion sur l'intégrité scientifique.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l'Office . - Ce rapport arrive à point nommé, mais comme cela a été dit, c'est une étape parce qu'on n'a pas épuisé le sujet, qui est évolutif : les frontières de l'intégrité scientifique sont mouvantes et il faudra savoir s'adapter. J'ai trois remarques.

Sur le Hcéres et ses rapports avec l'OFIS et le CoFIS, je suis complètement en phase avec ce qui a été dit. Toutefois, comme je viens juste d'intégrer le Hcéres, je vous demande de me laisser le temps de prendre la mesure des choses. La question de l'indépendance est importante et l'intégrité scientifique devra pouvoir être traitée de façon sereine, mais ferme, afin de permettre sa prise en compte effective et rigoureuse par tous les acteurs scientifiques.

Je m'interroge également sur ce qui motive le plus les chercheurs dans ces affaires-là, entre la carrière, la reconnaissance ou, plus trivialement, les aspects pécuniaires. De même, je me demande quel peut être le poids des « donneurs d'ordres » dans ces motivations, celui par exemple des instances scientifiques internationales et des laboratoires. Avec un bon diagnostic des motivations, on pourra trouver de bons remèdes.

Je voudrais, enfin, parler des relations entre les médias, les politiques publiques et la science au regard de l'intégrité scientifique. J'ai en mémoire une interprétation d'un article de la revue Journal of the American Medical Association (JAMA) sur l'efficacité des masques FFP1 et des masques FFP2 contre le virus de la grippe. L'étude, qui contenait de nombreux biais, avait montré une égalité de protection entre les deux types de masques. Sans être un grand spécialiste de la science, il était évident qu'il ne fallait pas s'appuyer sur cet article pour justifier de la pénurie de masque FFP2 pour les soignants. L'interprétation et l'usage de la publication scientifique, qui échappent aux chercheurs, font partie de l'intégrité scientifique et il serait sans doute utile de mettre en place des systèmes de réinformation de qualité. En d'autres termes, il y a l'intégrité scientifique des scientifiques, mais il y a aussi celle de ceux qui portent la parole publique et interprètent la science, voire l'utilisent comme argumentaire. Cette utilisation contribue à la défiance de la population vis-à-vis de la science.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - Derrière ce qui est évoqué ici, on voit l'importance extraordinaire de l'indépendance et du fait que, sous une pression que l'on s'impose soi-même ou qui est imposée de l'extérieur, l'intégrité scientifique peut être menacée.

M. Philippe Bolo, député . - Ce que l'on entend ce matin sur l'intégrité scientifique est très intéressant. On pourrait effectivement imaginer des procédures et des critères pour mieux contrôler les publications et sortir, comme l'a dit Pierre Henriet, du « publier ou périr ». Mais je souhaite revenir sur ces procédures et critères de l'intégrité scientifique, car il existe des différences entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée : il ne faudrait pas que les règles retenues pénalisent la recherche appliquée, qui souffre déjà alors qu'elle est en capacité de montrer que la science et la recherche sont utiles à tous. Ma question est simple : comment peut-on s'assurer que le respect de l'intégrité scientifique, qui est absolument essentiel, ne se fasse pas au détriment de certaines recherches ?

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - C'est une excellente question, à laquelle j'ajouterai celle-ci : comment faire en sorte que les mécanismes qui garantissent l'intégrité scientifique n'aboutissent pas à une perte d'efficacité de la science en général ? Dans un autre domaine, on peut penser aux débats sur le rôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Un certain nombre d'entrepreneurs et de startuppers ont dénoncé à juste titre son effet sur certaines recherches. Et notre collègue député Éric Bothorel s'est exprimé sans ambiguïté sur son rôle de frein dans son rapport au Premier ministre sur la politique publique de la donnée. Il y a là un vrai débat sur lequel nous reviendrons et il faudra l'investiguer avec toute la rigueur dont sait faire preuve l'Office.

Mme Florence Lassarade, sénatrice . - Je tiens à féliciter les rapporteurs pour la qualité de leur travail, très enrichissant.

M. Pierre Henriet, député . - Je vais commencer mes réponses par l'un des sujets majeurs liés à l'intégrité scientifique mais qui en déborde le cadre strict, à savoir les questions liées au harcèlement et, plus généralement, au lien entre les responsables de recherche et les chercheurs qu'ils encadrent. C'est évidemment un sujet essentiel, déjà borné sur un plan pénal ; il est bien évoqué dans le rapport, mais il mériterait un développement entier car il dépasse l'intégrité scientifique. Il est intéressant de relever que pour le comité d'éthique du CNRS comme pour celui de l'ANR, ce sujet ne relève pas de la déontologie ou de l'éthique, mais bien de l'intégrité scientifique. Cette dernière offre donc des perspectives plus larges que les données, les méthodes et les publications scientifiques, puisqu'elle concerne aussi la construction des programmes de recherche, les liens sociaux entre les scientifiques et, enfin, les rapports hiérarchiques qui peuvent exister dans le monde de la recherche et qui s'accompagnent parfois d'abus.

Pour aborder d'autres questions posées, il y a une vraie difficulté aujourd'hui à pouvoir disposer des données nationales sur ce que sont les manquements à l'intégrité scientifique. Peu de données publiques sont en fait disponibles, elles sont surtout internationales ou américaines, et nous avons eu beaucoup de mal à avoir un spectre large de ce que pouvaient être qualitativement et quantitativement les différents manquements. C'est une vraie question, sur laquelle il faudra revenir, notamment avec le Hcéres, par exemple lors du suivi que nous devrons faire des avancées législatives obtenues en matière d'intégrité scientifique et qui devront se traduire concrètement dans l'ensemble de la communauté scientifique.

Le mauvais tutorat des directeurs est un sujet à aborder en lien avec l'extension aux HDR de la formation à l'intégrité scientifique. Je pense que c'est l'un des enjeux fondamentaux de court terme. En effet, quand on voit le bénéfice qu'elle peut apporter dans le public des doctorants, rien ne s'oppose à ce que la formation à l'intégrité scientifique soit étendue à l'ensemble des directeurs de thèse et des formateurs, de manière à ce qu'elle puisse diffuser au quotidien dans chacun des organismes de recherche.

En matière de méconduites, je précise que le manque de chiffres induit des difficultés pour traiter les cas spécifiques de manquement, parce que ces derniers sont souvent singuliers et très différents les uns des autres. Parfois les cas concernent les « sommets » de la science et peuvent poser des questions de conflits d'intérêts qui dépassent le monde scientifique lui-même. C'est pour cela qu'il est fondamental de parvenir à une harmonisation des saisines : il faut que les acteurs, en particulier les référents intégrité scientifique, puissent disposer d'une base de données et d'un code à appliquer en pratique, de sorte qu'ils puissent mener à bien leur mission le plus aisément possible - c'est une demande qu'ils nous ont faite maintes fois. Ils nous ont aussi très régulièrement indiqué qu'ils se sentent seuls face à des situations qui sont souvent disproportionnées par rapport à leur propre emploi au sein des établissements. Par exemple, quand une méconduite concerne un membre du conseil d'administration d'une université, le risque est que le référent intégrité scientifique ne bouge pas d'une oreille et il faudrait donc avoir d'autres canaux de saisine, à travers l'OFIS et plus généralement le Hcéres. Ce sont à notre sens de bons canaux pour éviter de passer à côté de certains manquements à l'intégrité scientifique.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - Une personne qui a enquêté durant un an sur les conditions de travail des jeunes chercheurs en France m'a récemment contacté. Elle évoque de graves dysfonctionnements dans certaines équipes. Je vous associerai à notre entretien qui visera précisément à cartographier certaines de ces pratiques, moins bien prises en compte institutionnellement que celles évoquées précédemment. Ce projet, intitulé Vies de thèse, dispose d'un compte Twitter.

M. Pierre Henriet, député, rapporteur . - La situation des jeunes chercheurs a été évoquée à l'occasion du débat sur la LPR, notamment lorsque la question du paiement des vacataires a été abordée. Il s'agit d'un problème d'intégrité dans le rapport d'un établissement avec ses jeunes chercheurs. Nous avons parfois eu du mal à porter ce sujet, ce qui montre que ce rapport est une première pierre. Il en restera bien d'autres à poser pour régler les différents sujets liés directement ou indirectement aux manquements à l'intégrité scientifique.

M. Pierre Ouzoulias, sénateur, rapporteur . - Quand, sur la base d'un article scientifique faisant un lien entre vaccination et autisme, on en vient à limiter la protection vaccinale, cela a pour conséquence une baisse des vaccinations, puis des morts supplémentaires de la rougeole. On n'est déjà plus dans le domaine de l'intégrité scientifique, mais dans le champ pénal. Un chercheur doit avoir conscience que certains de ses actes peuvent avoir des conséquences majeures en termes de santé publique. Dans la façon dont la population française a réagi au vaccin contre la Covid-19, on peut trouver des traces de cette méfiance. Il s'agit donc vraiment d'un sujet grave.

Le numérique et l'internationalisation ont complètement modifié les enjeux de l'intégrité scientifique. À l'époque de Pasteur, avec une recherche limitée à un laboratoire et pour référence presque exclusive la communauté nationale, l'autorégulation fonctionnait très bien. Aujourd'hui, un chercheur appartient à une communauté internationale qui, avec le numérique, lui donne le sentiment qu'il n'a plus de responsabilité envers personne.

Le numérique a aussi l'effet inverse, puisqu'il permet de détecter les fraudes beaucoup plus facilement. Dans les analyses statistiques, une discipline sort du lot : la biologie. C'est dans ce domaine que l'on recense 50 % des cas de méconduite au CNRS, les outils d'analyse permettant d'identifier très facilement les images arrangées ou fallacieuses. Cette analyse s'avère, par exemple, beaucoup plus difficile à réaliser sur les résultats d'un chantier de fouilles. Il en va de même pour les outils de détection du plagiat. À cet égard, ceux qui sont mis à la disposition des enseignants-chercheurs ne fonctionnent pas très bien. Si j'avais soumis ma thèse d'historiographie, pleine de citations, à ces outils, elle n'aurait pas été acceptée, en raison d'un taux de plagiat de l'ordre de 20 %, ces logiciels ne distinguant pas un plagiat d'une citation, faute de comprendre la signification des apostrophes. C'est un point important.

Pour répondre à Sonia de La Provôté, un terme grec explique parfaitement bien dans quelle logique se trouve le chercheur : l' hubris , sentiment d'une puissance absolue qui permet de transgresser toutes les règles. J'ai entendu la confession publique de plusieurs chercheurs dont les méconduites avaient été signalées, parfois publiquement. Ils ont dit, de façon tout à fait honnête - on sentait que cela représentait pour eux une souffrance morale - que tout était beaucoup plus facile et allait considérablement plus vite lorsqu'ils trichaient. Avec trente-cinq thésards, dont on sait qu'on ne peut pas surveiller le travail, cela permet d'avoir une puissance de frappe exceptionnelle. Un chercheur constatait qu'il progresse aujourd'hui moins vite, mais qu'en faisant de la bonne science, il s'y retrouve moralement. Cette confession était vraiment très intéressante.

Pour répondre à la question absolument essentielle de Philippe Bolo, nous avons eu ce débat au Sénat lors de l'examen de la LPR. Personnellement, j'ai insisté pour que le Hcéres prenne en compte la nécessité pour un chercheur, inclus dans une société et un territoire, de participer à l'expertise de la représentation nationale et des collectivités. Il ne doit donc pas être uniquement jugé en fonction des travaux qu'il réalise pour un système international et global. Il me semble avoir réussi à faire intégrer cette contribution dans les critères d'évaluation des chercheurs. Il reviendra à Sonia de La Provôté de veiller à ce que les chercheurs soient aussi évalués sur ce critère.

M. Pierre Henriet, député, rapporteur . - J'aurai le plaisir de travailler avec Sonia de La Provôté sur le suivi du Hcéres. Refonder l'évaluation des chercheurs est rendu difficile par l'application systématique du principe « publier ou périr » qui pousse les chercheurs à privilégier la quantité sur la qualité et la rigueur scientifique. Il existe, par ailleurs, une différence réelle dans l'évaluation des différentes disciplines, notamment entre les sciences formelles ou dures et les sciences humaines et sociales. On ne peut pas évaluer sur les mêmes critères des travaux de recherche en sciences humaines et sociales et des travaux en biologie ou en mathématiques. Cela tombe sous le sens pour la communauté scientifique. Cette question de fond sur l'évaluation devra un jour aussi être examinée, car c'est la pierre angulaire du sujet.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - Sur la question des pratiques, il suffit de voir combien les différences entre les processus d'évaluation des publications d'une discipline à l'autre peuvent être très grandes. Les mathématiques sont un cas extrême, puisqu'il s'agit de vérifier, ligne par ligne et page par page, le raisonnement et la reproductibilité. Pour certains articles, ce processus prend longtemps, entre une semaine et cinq ans, en fonction des domaines et des revues. En biologie, il s'agit de reproduire, d'avoir accès aux cahiers, aux données brutes, etc. Dans ce domaine, la pression sur le rythme de publication est habituellement beaucoup plus élevée - évidemment, au bout d'un an, la recherche a généralement perdu de sa valeur et de son intérêt. Et puis il y a la question de la reproductibilité, très difficile bien sûr en biologie ou en sciences humaines et sociales, avec des expériences et des constatations célèbres en la matière.

Quelles réflexions vous inspire la pratique des co-signatures, celle-ci variant aussi selon les domaines ? Dans certains domaines, le fait qu'un directeur de thèse publie avec son doctorant est considéré comme immoral ; dans d'autres, au contraire, c'est considéré comme une bonne pratique. Pour certains sujets, les rapports hiérarchiques représentent une rente à la publication. Récemment, un interlocuteur m'a sensibilisé au problème des cohortes : dans certains cas, les détenteurs d'une cohorte co-signent systématiquement, alors qu'ils se sont contentés de la maintenir.

M. Pierre Ouzoulias, sénateur, rapporteur . - Le conflit d'attribution scientifique des travaux est sans doute le cas le plus souvent signalé. C'est presque le plus simple à gérer en interne par les établissements. Il faut essayer de trouver des règles claires. Mais dans certaines disciplines, pour le dire avec beaucoup de diplomatie, les étudiants sont très honorés que leur directeur de thèse signe le premier. Dans d'autres, au contraire, seule compte la première signature de l'étudiant, la co-signature étant très dévalorisée. Il faudrait que chaque discipline arrive à des formes de régulation. Quand existe une pression à la publication, les conflits d'auteurs deviennent extrêmement prégnants. Aujourd'hui au CNRS, cela représenterait 30 % des cas, réglés de façon à peu près convenable en interne.

Nous nous sommes intéressés à une dernière difficulté, pour laquelle nous n'avons pas vraiment trouvé de solution : Que faire des travaux fallacieux ? Faut-il les garder ou faut-il les frapper d'une damnatio memoriae qui les supprime de la mémoire des scientifiques ?

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - Par « travaux fallacieux », entendez-vous ceux qui ont été issus de mauvaises pratiques ?

M. Pierre Ouzoulias, sénateur, rapporteur . - Oui, il s'agit de ceux qui résultent d'une méconduite scientifique. Faut-il les effacer ? J'évoquais par exemple à l'instant un article sur une prétendue relation entre vaccination et autisme. Eh bien, il est toujours disponible, il peut toujours être cité...

M. Gérard Longuet, sénateur, vice-président de l'Office . - Comme dans les bibliothèques, il faudrait créer une sorte d'enfer des articles fallacieux. Cela nous appellerait tous à la modestie et au réalisme.

M. Cédric Villani, député, président de l'Office . - Attention, il y aura des cas difficiles à trancher ! Quelques-uns appartiennent à l'histoire. Certains considèrent, statistiques à l'appui, que les travaux de Mendel étaient trop beaux et trop nets pour être honnêtes. Sûr des résultats à obtenir, il aurait falsifié les données dans le sens voulu... La même rumeur court sur les travaux de Newton relatifs au système solaire. Les zones grises sont nombreuses.

Cela nous renvoie au sentiment de puissance qui s'empare du chercheur : convaincu d'avoir raison, il n'hésite pas, parfois, à « améliorer » les choses. Peut-être faut-il d'ailleurs y voir le contrepied du sentiment d'impuissance qui peut s'emparer de lui lorsqu'il se trouve aux prises avec des mécanismes de financement ou des procédures administratives trop complexes.

L'histoire de la souris truquée est restée célèbre. Un chercheur peignait effectivement des pois sur ses souris pour qu'elles paraissent avoir subi une mutation. Il était convaincu que la mutation recherchée existait bel et bien, même si, pour des raisons mystérieuses, ses souris ne permettaient pas de le montrer. Il est aisé de voir les puissants ressorts psychologiques à l'oeuvre : on estime que la fin justifie les moyens et qu'à travers une petite manipulation, c'est la vérité qui triomphera.

Mais la fraude scientifique prend souvent des formes beaucoup plus subtiles. Elle s'observe aussi bien au stade de l'évaluation des carrières. De manière plus banale, elle trouve en ce cas son origine dans des relations humaines marquées par des rapports de force ou par l'existence de hiérarchies au sein du domaine.

Notre débat a été riche et passionnant. Je vous propose de valider le rapport que nous ont présenté Pierre Henriet et Pierre Ouzoulias.

L'Office autorise à l'unanimité la publication du rapport sur l'intégrité scientifique.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LES RAPPORTEURS

Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

• Marin Dacos, conseiller scientifique pour la science ouverte auprès de la direction générale de la recherche et de l'innovation du MESRI, 2 septembre 2019.

• Pierre Valla, Marie-Caroline Beer et Émilie-Pauline Gallié, inspecteurs généraux de l'IGESR, 21 janvier 2020.

Universités

• Pierre Mutzenhardt, président de la commission « recherche et innovation » de la CPU, 18 septembre 2019.

Agences d'évaluation et de financement de la recherche

• Nelly Dupin, présidente par intérim du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres), juillet 2020.

• Olivier Le Gall, président, et Joëlle Alnot, directrice de l'OFIS, 2 septembre 2019.

• Laurence Guyard, responsable des relations avec les communautés scientifiques, référente genre et référente intégrité scientifique au sein de l'Agence nationale de la recherche (ANR) ; Jérôme Ferrand Ammar, chargé de mission auprès de la direction générale de l'ANR, et Martine Garnier-Rizet, responsable du département numérique et mathématiques de l'ANR, 14 octobre 2019.

Comités et conseils d'intégrité scientifique

• Frédérique Claudot, juriste, membre du CoFIS, 4 novembre 2019.

• Emmanuel Hirsch, président du Conseil pour l'éthique de la recherche et l'intégrité scientifique (POLÉTHIS) de l'université Paris-Saclay et professeur d'éthique médicale, 27 février 2020.

• Michèle Leduc, membre du CoFIS et du COMETS, 2 décembre 2019.

Référents intégrité scientifique

• Ghislaine Filliatreau, déléguée à l'intégrité scientifique de l'INSERM, 18 novembre 2019.

• Hervé Maisonneuve, médecin et référent intégrité scientifique de la faculté de médecine université de Paris, 21 octobre 2019.

• Rémy Mosseri, directeur de recherche au CNRS et référent intégrité scientifique au CNRS, 7 octobre 2019.

• Jean-Pierre Savineau, référent intégrité à l'université de Bordeaux, 16 septembre 2019.

Direction de l'information scientifique et technique et bibliothèques

• Sylvie Rousset, directrice de l'information scientifique et technique du CNRS et Laurence El Khouri, directrice adjointe à la direction de l'information scientifique et technique du CNRS, 28 octobre 2019.

• Frédéric Hélein, directeur scientifique du Réseau national des bibliothèques de mathématiques (RNBM), 16 septembre 2019.

• Philippe Hinsinger, directeur de la revue Publier la science et biogéochimiste à l'INRA, 16 septembre 2019.

Associations et fondations

• Michelle Bergadaà et Pierre-Jean Benghozi, membres de l'Institut de recherche sur la fraude et le plagiat académique (IRAFPA), 2 décembre 2019.

• Seraya Maouche et M e Katherine Loffredo-Treille, co-fondatrices de l'association Éthique et Intégrité, 18 novembre 2019.

• Brandon Stell et Boris Barbour, neuroscientifiques et dirigeants de PubPeer , 4 novembre 2019.

Réseau informel d'intégrité scientifique

• Michelle Hadchouel et Michel Pernot, co-animateurs du ResInt, 30 septembre 2019.

Auteurs de rapports sur l'intégrité scientifique

• Pierre Corvol, président de l'Académie des sciences et rédacteur d'un rapport consacré à l'intégrité scientifique en 2016, 17 septembre 2019.

Journalistes

• Nicolas Chevassus-au-Louis, docteur en biologie, historien et collaborateur à Mediapart , 7 octobre 2019.

• Sylvestre Huet, journaliste spécialiste de l'intégrité scientifique, 18 février 2019.

• David Larousserie, journaliste au Monde , spécialiste de l'intégrité scientifique, 30 septembre 2019.

RÉFÉRENCES PRINCIPALES

• Circulaires et arrêtés

- Circulaire MENESR-DGRI-SPFCO B2 n° 2017-040 du 15 mars 2017 (NOR : MENRI705751C), de M. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, Bulletin officiel de l'éducation nationale n° 12 du 23 mars 2017, en ligne .

• Codes, chartes, guides, déclarations

- APRIN, « How to Investigate Allegations of Research Misconduct: a Checklist », 2018, en ligne .

- « Charte nationale de déontologie des métiers de la recherche », en ligne (ratifiée au 13 juin 2019).

- CoFIS, « Vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique, à l'usage des chefs d'établissements », juin 2019, en ligne .

- Commission européenne, « Charte européenne du chercheur. Code de conduite pour le recrutement des chercheurs », 2005, en ligne .

- Global Research Council, « Statement of Principles on Peer/Merit Review 2018 », 2012, en ligne , révisé en 2018, en ligne .

- Groupe de travail Corvol, « Vade-mecum intégrité scientifique », mars 2017, en ligne .

- « Déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche (DORA) », 2013, en ligne .

- ENRIO, L'« ENRIO Handbook : Recommandations for the Investigations of Research Misconduct », 2019, en ligne ; traduit par l'OFIS en 2020, « Guide ENRIO. Recommandations pour l'investigation des méconduites en recherche », en ligne .

- ESF-ALLEA, « European Code of Conduct for Research Integrity » (« code européen de conduite pour l'intégrité de la recherche), 2018, en ligne .

- Eu2020, « Bonn Declaration on Freedom of Scientific Research », adoptée par les Ministres européens de la recherche, 20 octobre 2020, en ligne .

- FNRS, « Directives relatives à l'intégrité dans la recherche scientifique. Principes généraux et Procédure à suivre en cas de manquement », 2007, en ligne .

- Diana Hicks, Paul Wouters, Ludo Waltman, Sarah de Rijcke, & Ismael Rafols , « Manifeste de Leiden pour la mesure de la recherche », Nature , n° 250, p. 429-431, 2015, en ligne .

- David Moher, Lex Bouter, Sabine Kleinert, Paul Glasziou, Mai Har Sham, Virginia Barbour, Anne-Marie Coriat, Nicole Foeger, & Ulrich Dirnagl, « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers : Fostering Research Integrity », 17 septembre 2017, en ligne .

- OECD Global Science Forum, « Investigating Research Misconduct Allegations in International Collaborative Research. A Practical Guide », 2009, en ligne .

- Plan S, « Principles and Implementation », mai 2019, en ligne .

- ResInt, « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'IS », 2018, en ligne .

- ResInt, « Repères pour une mise en oeuvre de la procédure de recueil et de traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique, en conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) », 2019, en ligne .

- « Singapore Statement on Research Integrity » (déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche), 2010, en ligne .

• Avis, rapports, supports

- Académie des sciences, « Du bon usage de la bibliométrie pour l'évaluation individuelle des chercheurs », 17 janvier 2011, p. 9, en ligne .

- Jean-Pierre Alix, « Renforcer l'intégrité de la recherche en France. Propositions de prévention et de traitement de la fraude scientifique », Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, 2010, en ligne .

- COMETS, « Pratiquer une recherche intègre et responsable », mars 2017, en ligne .

- COMETS, « Des liens d'intérêts aux conflits d'intérêts dans la recherche publique », avis 2019-39, avril 2019, en ligne .

- Commission Européenne, « Mutual Learning Experience (MLE) on Research Integrity », octobre 2019, en ligne .

- Pr Pierre Corvol, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte nationale de l'intégrité scientifique », 2016, en ligne .

- European Science Foundation, « Fostering Research Integrity in Europe », 2010, en ligne .

• Articles scientifiques, thèses de doctorat

- Lex M. Bouter, Joeri Tijdink, Nils Axelsen, Brian C. Martinson & Gerben ter Riet, « Ranking Major and Minor Research Misbehaviors: Results from a Survey among Participants of four World Conferences on Research Integrity », Research Integrity and Peer Review , vol. 1, n° 17, 2016, en ligne .

- Jeffrey Brainard « Rethinking Retractions », Science , vol. 362, n° 6413, 26 octobre 2018, p. 390-393, en ligne . ??????????

- Isabel Campos-Varela & Alberto Ruano-Raviña, « Misconduct as the main cause for retraction. A descriptive study of retracted publications and their authors », Gaceta Sanitaria , vol. 33, n° 4, juillet-août 2019, p. 356-360, en ligne .

- Pierre Corvol, « Intégrité scientifique, sonnons l'alerte ! », Laennec , tome 68, n° 2, p. 24-32, en ligne .

- Léo Coutellec, « Penser l'indissociabilité de l'éthique de la recherche, de l'intégrité scientifique et de la responsabilité sociale des sciences : Clarification conceptuelle, propositions épistémologique », Revue d'anthropologie des connaissances , vol. 13, n° 2, 2019, p. 381-398, en ligne .

- Daniel Fanelli, « How Many Scientists Fabricate and Falsify Research? A Systematic Review and Meta-Analysis of Survey Data », PLoS ONE , vol. 4, n° 5, 2009, en ligne .

- Daniel Fanelli, Rodrigo Costas, & Vincent Larivière, « Misconduct Policies, Academic Culture and Career Stage, Not Gender or Pressures to Publish, Affect Scientific Integrity », PLoS ONE , vol. 10, n° 6, 2015, en ligne .

- Eric A. Fong, & Allen W. Wilhite, « Authorship and citation manipulation in academic research », PLoS ONE , vol. 12, n° 12, 2017, en ligne .

- Olivier Gosselain, « La fraude est un produit dérivé de l'excellence », POLETHIS, n° 2, novembre 2019, p. 42-44.

- C. K. Gunsalus, Adam R. Marcus, & Ivan Oransky, « Institutional Research Misconduct Reports Needs More Credibility », JAMA , vol. 319, 2018, p. 1315-1316, en ligne .

- Tamarinde L. Haven, Joeri K. Tijdink, Brian C. Martinson, & Lex M. Bouter, « Perceptions of research integrity climate differ between academic ranks and disciplinary fields: Results from a survey among academic researchers in Amsterdam », PLoS ONE , vol. 14, n° 1, 2019, en ligne .

- Tamarinde L. Haven, Lex M. Bouter, Yvo M. Smulders, & Joeri K. Tijdink, « Perceived publication pressure in Amsterdam: Survey of all disciplinary fields and academic ranks », PLoS ONE , vol. 14, n° 6, 19 juin 2019, en ligne .

- Claude Kirchner, « Intégrité et publication scientifiques. De la science ouverte à l'évolution de la déontologie », POLETHIS , n° 2, novembre 2019, p. 11-12.

- Kalevi M. Korpela, « How Long does it Take for the Scientific Literature to Purge Itself of Fraudulent Material?: the Breuning Case Revisited », Current medical research and opinion , vol. 26, n° 4, p. 843-847, en ligne .

- Toshio Kuroki, « New Classification of Research Misconduct from the Viewpoint of Truth, Trust, and Risk », Accountability in Research , vol. 25, n° 7-8, 2018, p. 404-408, en ligne .

- Serge Larivée, « Le côté sombre de la science », Revue de psychoéducation , vol. 46, n° 2, 2017, p. 421-452, en ligne .

- Hervé Maisonneuve, « Development of Research Integrity in France is on the Rise: the Introduction of Research Integrity Officers was a Progress », Research Integrity and Peer Review , vol. 4, n° 20, 2019, en ligne .

- Hervé Maisonneuve, « L'art de la citation est parfois une manipulation sournoise de la science », POLETHIS, n° 2, novembre 2019, p. 46.

- Niels Mejlgaard, Lex M. Bouter, George Gaskell, Panagiotis Kavouras, Nick Allum, Anna-Kathrine Bendtsen, Costas A. Charitidis, Nik Claesen, Kris Dierickx, Anna Domaradzka, Andrea Reyes Elizondo, Nicole Foeger, Maura Hiney, Wolfgang Kaltenbrunner, Krishma Labib, Ana Maruiæ, Mads P. Sørensen, Tine Ravn, Rea èepanoviæ, Joeri K. Tijdink, & Giuseppe A. Veltri, « Research Integrity : Nine Ways to Move from Talk to Walk », Nature , vol. 586, 15 octobre 2020, p. 358-360.

- Andrew Preston & Tom Culley, « Formal recognition for peer review will propel research forward », in BioMedCentral and Digital Science, « What might peer review look like in 2030? SpotOn Report », avril 2017, en ligne .

- Tony Ross-Hellauer, Arvid Deppe, & Birgit Schmidt, « Survey on Open Peer Review: Attitudes and Experience amongst Editors, Authors and Reviewers », PLoS ONE , vol. 12, n° 12, 2017, en ligne .

- Priya Satalkar & David Shaw, « How do Researchers Acquire and Develop Notions of Research Integrity? A Qualitative Study among Biomedical Researchers in Switzerland », BMC Medical Ethics , vol. 20, n° 72, 2019, en ligne .

- Alexandre Serres, « Plagiat académique : de la négligence informationnelle à la fraude scientifique », Barcamp « Copier-coller, créacollage numérique ou plagiat », Université de Lorraine, juillet 2018, Nancy, en ligne .

- Neal Smith, &, Aaron Cumberledge, « Quotation Errors in General Science Journals », Proceedings of the Royal Society, n° 476, n° 2242, 2020, en ligne .

- Raymond De Vries, Melissa S. Anderson, Brian C. Martinson, « Normal Misbehavior: Scientists Talks about the Ethics of Research », Journal of Empirical Research on Human Research Ethics , 2006, vol. 1, n° 1, p. 43-50, en ligne .

- Verity Warne, « Rewarding Reviewers - Sense or Sensibility? A Wiley Study Explained », Learned Publishing , vol. 29, n° 1, 2016, p. 41-50, en ligne .

• Essais

- Nicolas-Chevassus-au-Louis, Malscience. De la fraude dans les labos , Paris, Seuil, « Science ouverte », 2016.

- National Academy of Sciences, National Academy of Engineering, Institute of Medicine, & Committee on Science, Engineering, and Public Policy, On being a scientist: A Guide to Responsible Conduct in Research: Third Edition, Washington DC, The National Academies Press, 2009.

- Stuart Richie, Science Fictions , Exposing Fraud, Bias, Negligence and Hype in Science , New York, Vintage Books, Penguin Random House LLC, 2020.

• Notes scientifiques et parlementaires

• La division de la législation comparée du Sénat a réalisé une note consacrée à l'intégrité scientifique à l'étranger : Législation comparée, Direction de l'initiative parlementaire et des délégations, « Recueil des notes de synthèse », mars 2019 à juin 2019, p. 5-29, en ligne .


* (1) Rapport au Gouvernement du P r Pierre Corvol sur « La mise en oeuvre de la charte nationale d'intégrité scientifique », compte rendu du 29 novembre 2016, OPECST, en ligne .

* (2) René Frydman, « L'indispensable intégrité scientifique », en présence du P r Pierre Corvol, Matières à penser avec René Frydman, France Culture, 17 avril 2018, 44 minutes, en ligne .

* (3) Circulaire MENESR-DGRI-SPFCO B2 n° 2017-040 du 15 mars 2017 (NOR : MENRI705751C), de M. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, Bulletin officiel de l'éducation nationale n° 12 du 23 mars 2017, en ligne .

* (4) Audition de Pierre Valla, Marie-Caroline Beer et Émilie-Pauline Gallié, inspecteurs généraux à l'IGESR, 21 janvier 2020.

* (5) Université de Limoges, « Intégrité scientifique, l'université de Limoges s'engage », Unilim, sans date, en ligne .

* (6) Hervé Maisonneuve, « Comment améliorer la reproductibilité de la recherche scientifique ? », Afis, 12 février 2019, en ligne .

* (7) Pierre Corvol, « Confiance, défiance, doute et scepticisme en sciences », séminaire Sensibilisation aux manquements à l'intégrité scientifique et à leurs conséquences, Académie Internationale d'Éthique, Médecine et Politiques Publiques, 12 avril 2018, en ligne .

* (8) Audition d'Olivier Le Gall, président, et de Joëlle Alnot, directrice de l'OFIS, 2 septembre 2019.

* (9) Pierre Corvol, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte nationale de l'intégrité scientifique », 2016, p. 8, en ligne .

* (10) Par exemple, David Larousserie, « L'affaire Olivier Voinnet, une loupe posée sur l'intégrité scientifique », Le Monde, 15 janvier 2019, en ligne ; Tristan Vey, « Fraude scientifique : une guerre de rapports “anonymes” empoisonne le CNRS », Le Figaro, 29 mai 2018, en ligne ; Hervé Morin & David Larousserie, « Enquête sur l'ex-présidente du CNRS Anne Peyroche », Le Monde, 22 janvier 2018, en ligne ; Yann Bouchez & Camille Stromboni, « L'annulation d'une thèse pour plagiat déstabilise l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne », Le Monde, 28 juillet 2020, en ligne .

* (11) David Larousserie, « Intégrité scientifique à géométrie variable », Le Monde , 22 mai 2018, en ligne .

* (12) Frédéric Sgard & Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l'élaboration de politiques cohérentes », Sciences, n° 3, 2007, p. 26-27, en ligne .

* (13) Daniel Fanelli, « Do Pressures to Publish Increase Scientists' Bias? An Empirical Support from US States Data », PLoS ONE, vol. 5, n° 4,ý 2010, en ligne .

* (14) Tamarinde L. Haven, Lex M. Bouter, Yvo M. Smulders, & Joeri K. Tijdink, « Perceived Publication Pressure in Amsterdam: Survey of all Disciplinary Fields and Academic Ranks », PLoS ONE, vol. 14, n° 6, 19 juin 2019, en ligne .

* (15) Hendrik P. van Dalen & Kène Henkens, « Intended and Unintended Consequences of a Publish-or-perish Culture: A Worldwide Survey », Journal of the American Society for Information Science and Technology, 20 avril 2012, en ligne .

* (16) Ernest Hugh O'Boyle, Jr., George Christopher Banks, & Erik Gonzalez-Mulé, « The Chrysalis Effect: How Ugly Initial Results Metamorphosize Into Beautiful Articles », Journal of Management, vol. 43, n° 2, 19 mars 2014, p. 376-399, en ligne .

* (17) Échange électronique avec Hervé Maisonneuve, 9 novembre 2020.

* (18) Maryann Feldman, « The Economic Logic of U.S. Science », Science, vol. 335, n° 6073, 9 mars 2012, p. 1171, en ligne .

* (19) Daniel Fanelli, « How Many Scientists Fabricate and Falsify Research? A Systematic Review and Meta-Analysis of Survey Data », PLoS ONE, vol. 4, n° 5, 2009, en ligne , rapporté par Nicolas Chevassus-au-Louis dans Nicolas Martin, « Fraude scientifique : faut-il changer les règles ? », La Méthode scientifique, France Culture, 6 octobre 2016, 57 minutes, en ligne .

* (20) L'observatoire du conspirationnisme Conspiracy Watch propose une carte des théories du complot associées au coronavirus : virus créé en laboratoire, rôle de Bill Gates dans l'élaboration du virus, lien avec les antennes 5G, vaccins contre la covid-19 porteurs d'une puce ou dont l'élaboration serait retardée par les laboratoires pharmaceutiques, en ligne .

* (21) Sylvestre Huet, « Covid-19 et l'intégrité scientifique », blog de Sylvestre Huet, 16 avril 2020, en ligne ; Emmanuel Hirsch, « Recherche biomédicale : quels principes éthiques en temps de pandémie ? », The Conversation, 27 mars 2020, en ligne ; Comité d'éthique du CNRS et Mission à l'intégrité scientifique du CNRS, « Recherche en temps de crise sanitaire : débats éthiques et respect de l'intégrité scientifique », 7 avril 2020, en ligne ; ENRIO, « ENRIO Statement : Research Integrity even more important for research during a pandemic », sans date, en ligne : « Les chercheurs devraient communiquer leur travail sur les réseaux sociaux et auprès des médias de manière responsable, avec professionnalisme et transparence. Des interprétations subjectives ou infondées doivent être évitées et une information ne doit pas être sciemment omise. » (traduction) ; Ethiquette, « COVID-19, intégrité scientifique et éthique », Mediapart, 19 mars 2020, en ligne ; Jean-Gabriel Ganascia, « L'éthique de la recherche en situation de crise sanitaire », CNRS Le journal, 9 avril 2020, en ligne ; Tribune du Collectif de chercheurs et de professionnels médicaux, « Halte à la fraude scientifique », Libération, 2 septembre 2020, en ligne .

* (22) ONU, « Déclaration interrégionale sur l'infodémie dans le contexte du COVID-19 », 12 juin 2020, en ligne .

* (23) Michel Dubois, « Le coronavirus peut-il altérer la confiance en la science ? », Le Journal du CNRS, 1 er avril 2020, en ligne .

* (24) Pierre Corvol, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte nationale d'intégrité scientifique », 2016, en ligne .

* (25) OPECST, Présentation du fonctionnement de l'OFIS et de sa relation au Hcérès, compte rendu du 18 janvier 2018, en ligne .

* (26) Colloque L'intégrité scientifique en action, faculté de droit de Nancy, 23 février 2017, programme en ligne .

* (27) Question du sénateur Bruno Sido, n° 1218S du 30 juillet 2015 - réponse du 27 janvier 2016, en ligne ; Question de la députée Marielle de Sarnez, n° 9311 du 12 juin 2018 - réponse du 21 mai 2019, en ligne ; Question de la députée Sabine Rubin, n° 9368 du 19 juin 2018 - réponse du 21 mai 2019, en ligne ; Question de la députée Bérangère Couillard, n° 11416 du 31 juillet 2018, en attente de réponse, en ligne .

* (28) Robert Gast, « Fake science : une étiquette qui va nuire à la science », Pour la science, 31 juillet 2018, en ligne ; Collectif NoFakeScience, « La science ne saurait avoir de parti-pris ». L'appel de 250 scientifiques aux journalistes », L'Opinion, 15 juillet 2019, en ligne ; Adrien Sénécat, « Les évidences relatives de la tribune de No Fake Science sur l'information scientifique », Les Décodeurs, Le Monde, 26 juillet 2019, en ligne ; Nicolas Martin, « Sciences et médias : un dialogue de sourds », en présence d'Estelle Dumas-Mallet, Jacques Hennen et Pierre-Antoine, La Méthode scientifique, France Culture, 5 septembre 2019, 58 minutes, en ligne .

* (29) Nicolas-Chevassus-au-Louis, Malscience. De la fraude dans les labos, Paris, Seuil, « Science ouverte », 2016. Sur le même sujet, voir Stuart Richie, Science Fictions, Exposing Fraud, Bias, Negligence and Hype in Science, New York, Vintage Books, Penguin Random House LLC, 2020 ; William Broad & Nicholas Wade, La souris truquée. Enquête sur la fraude scientifique, Paris, Points, « Sciences », 1987 ; Nicolas Martin, « Fraude scientifique : biologie, le maillon faible ? », en présence de Pierre Corvol et David Larousserie, La Méthode scientifique, France Culture, 6 décembre 2018, 59 minutes, en ligne .

* (30) David Larousserie, « L'affaire Olivier Vionnet », en six épisodes, publiés entre le 15 janvier 2019 et le 22 janvier 2019, Le Monde, en ligne ; Intervention d'Olivier Voinnet, séminaire Politiques des sciences, organisée à l'EHESS, 17 janvier 2019, en ligne ; Olivier Voinnet, « Le CNRS n'est pas encore prêt pour traiter des allégations de manquements à l'intégrité scientifique », Zilsel, vol. 6, n° 2, 2019, p. 193-231, en ligne .

* (31) CNRS, « La commission d'enquête Sorbonne Université - CNRS concernant la mise en cause de publications de Catherine Jessus conclut à l'absence de méconduite scientifique », 21 février 2018, en ligne .

* (32) David Larousserie, « L'intégrité scientifique de la biologiste Anne Peyroche mise en question », Le Monde, 9 octobre 2018, en ligne ; Hervé Morin, « Deux semaines de mise à pied pour l'ex-présidente du CNRS », 13 février 2020, en ligne ; CEA, « Comité de déontologie et d'intégrité scientifique : publication du rapport final », 10 février 2010, en ligne .

* (33) Yann Bouchez & Camille Stromboni, « L'annulation d'une thèse pour plagiat déstabilise l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne », Le Monde, 28 juillet 2020, en ligne .

* (34) Avis du conseil disciplinaire, tel que rapporté par Yann Bouchez & Camille Stromboni, dans « Thèse plagiée : l'université Panthéon-Sorbonne saisit la justice », Le Monde, 3 septembre 2020, en ligne : « Depuis son introduction (...) jusqu'à sa conclusion (...) , en passant par ses notes, ses annexes, sa bibliographie, le manuscrit de thèse de M. Derambarsh est quasi intégralement composé d'un assemblage de textes, produits dans un contexte académique ou publiés par d'autres auteurs que lui-même, et recopiés selon un ou plusieurs des procédés plagiaires visant à faire accroire au lecteur que M. Derambarsh en est l'auteur . ».

* (35) L'expression est de Sylvie Briand, directrice du département pandémies et épidémies de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et désigne « la surabondance d'informations, certaines fiables et d'autres non, observée au cours d'une épidémie. ».

* (36) Cécile Thibert & Vincent Bordenave, « Comment l'épidémie de Covid-19 a révélé les failles des publications scientifiques », Le Figaro, 12 juin 2010, en ligne .

* (37) OPECST, Compte rendu n° 46, séance du 3 juin 2019, en ligne .

* (38) Commission européenne, « Charte européenne du chercheur. Code de conduite pour le recrutement des chercheurs », 2005, en ligne , p. 13 et p. 27 pour les citations.

* (39) Liste des signataires du C&C, en ligne .

* (40) Amue & CPU, « La stratégie européenne de ressources humaines pour les chercheurs (HRS4R) », mai 2016, en ligne .

* (41) Plusieurs établissements français sont demandeurs du label « HR Excellence in Research », lequel est obtenu en réalisant d'abord un autodiagnostic selon un modèle standard ; puis la publication de la stratégie RH et du plan d'action visant la conformité avec le C&C ; puis la demande du label HR. Suivront une évaluation interne 2 ans après l'obtention du label et une évaluation externe, réalisée par des experts de la Commission européenne 4 ans après. Pour voir certains plan d'action français : Institut Curie ( en ligne ) ; CNRS ( en ligne ) ; Université Jean Moulin Lyon 3 ( en ligne ).

* (42) ESF-ALLEA, « European Code of Conduct for Research Integrity » (« code européen de conduite pour l'intégrité de la recherche »), 2018, en ligne , p. 10 pour la citation.

* (43) L'All European Academies est le réseau européen des académies de sciences et d'humanités, composé de plus de 50 académies issues de 40 pays.

* (44) FAIR signifie « Facile à trouver, Accessible, Interopérable, Réutilisable ».

* (45) ENRIO, L'« ENRIO Handbook : Recommandations for the Investigations of Research Misconduct », 2019, en ligne ; traduit par l'OFIS en 2020, « Guide ENRIO. Recommandations pour l'investigation des méconduites en recherche », en ligne , p. 4 ; p. 10-11.

* (46) OECD Global Science Forum, « Investigating Research Misconduct Allegations in International Collaborative Research. A Practical Guide », 2009, en ligne .

* (47) Eu2020, Bonn declaration on freedom of scientific research, adoptée le 20 octobre 2020, lors de la conférence ministérielle de l'Espace européen de la recherche et en cours de signature par les différents ministres européens de la recherche, e n lign e.

* (48) Traduction des auteurs, la version française n'est pas encore disponible dans sa version officielle. « Science has a responsibility towards society to ensure clarity, transparency and comprehensibility when sharing and communicating research findings, and to explain the difference between non-scientific opinions and scientifically verifiable findings. (...) Trust in science is key for an integrative, open and democratic society.

We understand that the exercise of scientific freedom is necessarily linked to a professional system of responsible self-regulation of academic and research institutions. We encourage and support high standards of good scientific practice, guidelines and advisory structures for safeguarding integrity and ethical boundaries, including transparent, fair and excellence based procedures for academic advancement and the competitive allocation of funding. This includes creating incentive and reward systems that promote independance, integrity and transparency of research, as well as implementing support and guidance for the professional development of researchers ».

* (49) Frédéric Sgard & Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l'élaboration de politiques cohérentes », Sciences, n° 3, 2007, p. 20-27, en ligne (p. 22 ; p. 23-24 pour les citations).

* (50) « Singapore Statement on Research Integrity » (déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche), 2010, en ligne .

* (51) Recommandations 14 de la charte de Singapour, cf. supra.

* (52) David Moher, Lex Bouter, Sabine Kleinert, Paul Glasziou, Mai Har Sham, Virginia Barbour, Anne-Marie Coriat, Nicole Foeger, & Ulrich Dirnagl, « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers: Fostering Research Integrity », 17 septembre 2017, en ligne . La présente analyse s'appuie sur la traduction française en partie tirée du site Ouvrir la science, « Les Principes de Hong Kong : promouvoir l'intégrité de la recherche dans l'évaluation des chercheurs », en ligne .

* (53) L'Hôpital d'Ottawa, « Cinq principes pour accroitre l'intégrité de la recherche et éviter de « publier ou périr » dans le milieu universitaire », IRHO, 16 juillet 2020, en ligne .

* (54) Recommandation n° 3 du manifeste de Hong Kong cf. supra.

* (55) Recommandation n°1 du manifeste de Hong Kong cf. supra.

* (56) Jean-Pierre Alix, « Renforcer l'intégrité de la recherche en France. Propositions de prévention et de traitement de la fraude scientifique », Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, 2010, en ligne .

* (57) « Charte nationale de déontologie des métiers de la recherche », en ligne (ratifiée au 13 juin 2019).

* (58) European Science Foundation, « Fostering Research Integrity in Europe », 2010, en ligne .

* (59) ESF-ALLEA, « European Code of Conduct for Research Integrity », 2011, version 1, en ligne .

* (60) La liste à jour se trouve sur la page internet de l'OFIS. Chiffres vérifiés par Michelle Hadchouel le 20 octobre 2020.

* (61) Pierre-Henri Duée, Michelle Hadchouel, Michèle Leduc, & François Rougeon, « Pour une réflexion nationale sur l'intégrité scientifique », Assises nationales de la recherche, 2012.

* (62) Vincent Berger, « Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche », rapport au Président de la République, décembre 2012, p. 43, en ligne .

* (63) Jean-Yves Le Déaut, « Refonder l'université. Dynamiser la recherche. Mieux coopérer pour réussir », rapport au Premier Ministre, 2013, en ligne .

* (64) Université de Bordeaux, « Charte déontologique en matière d'activité de recherche et de valorisation. Responsabilités, gestion, gestion des conflits d'intérêts et traitement des allégations de manquements à l'intégrité scientifique », septembre 2017, en ligne .

* (65) Université de Laval, « Politique sur la conduite responsable en recherche, en création et en innovation à l'Université Laval », 28 mars 2018, en ligne .

* (66) National Academy of Sciences, National Academy of Engineering, Institute of Medicine, & Committee on Science, Engineering, and Public Policy, On being a scientist: A Guide to Responsible Conduct in Research: Third Edition, Washington DC, The National Academies Press, 2009.

* (67) Pierre Corvol, « Bilan et propositions de mise en oeuvre de la charte nationale de l'intégrité scientifique », 2016, en ligne .

* (68) MESRI, « Mission relative à l'intégrité scientifique confiée au professeur Pierre Corvol », communiqué, 25 janvier 2016, en ligne .

* (69) Denis Sergent, « Comment renforcer l'intégrité scientifique des chercheurs », La Croix, 11 juillet 2016, en ligne .

* (70) Pierre Corvol, Frédérique Coulée de Daruvar, Laurent Degos, Pierre-Henri Duée, Ghislaine Filliatreau, Jean-Gabriel Ganascia, Rémy Gicquel, Michelle Hadchouel, Günther Hahne, Claude Huriet, Michèle Leduc, Hervé Maisonneuve.

* (71) Circulaire MENESR-DGRI-SPFCO B2 n° 2017-040 du 15 mars 2017 (NOR : MENRI705751C), de M. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, Bulletin officiel de l'éducation nationale n° 12 du 23 mars 2017, en ligne .

* (72) Groupe de travail Corvol, « Vade-mecum intégrité scientifique » , mars 2017, en ligne .

* (73) COMETS, « Pratiquer une recherche intègre et responsable », mars 2017, en ligne .

* (74) COMETS, Les « publications à l'heure de la science ouverte », avis 2019-40, janvier 2020, en ligne .

* (75) COMETS, « Des liens d'intérêts aux conflits d'intérêts dans la recherche publique », avis 2019-39, avril 2019, en ligne .

* (76) ResInt, « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'IS », 2018, en ligne .

* (77) Ghislaine Filliatreau précise, dans un échange électronique du 25 octobre 2020, que « Du mot valise, nous (collectif) avons choisi de ne retenir dans le guide et dans tous nos textes que “instruction”. En effet, nous n'avons ni les prérogatives ni la technicité d'enquêteurs ! Nous nous efforçons d'instruire au mieux les dossiers mais, à part les cahiers de laboratoire et données primaires, nous ne manipulons que ce que les personnes veulent bien nous confier ! Si nous voulons quelques informations (même simples) nous devons trouver un motif valable pour porter plainte ; la personne qui refuse de nous répondre ne peut y être obligée, etc... bref, nous ne sommes pas des “enquêteurs”. ».

* (78) ResInt, « Repères pour une mise en oeuvre de la procédure de recueil et de traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique, en conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) », 2019, en ligne .

* (79) https://www.cnil.fr/fr/reglement-europeen-protection-donnees .

* (80) ANR, « Charte de déontologie et d'intégrité scientifique de l'Agence nationale de la recherche », 2018, en ligne .

* (81) ANR, « Politique en matière d'éthique et d'intégrité scientifique », 2014, en ligne .

* (82) Global Research Council, « Statement of Principles on Peer/Merit Review 2018 », 2012, en ligne , révisé en 2018, en ligne .

* (83) Mélissa Defond, « Bibliothèques universitaires et intégrité scientifique : quels apports, quelles limites ? », diplôme de conservateur de bibliothèque, sous la direction d'Alexandre Serres, université de Lyon, mars 2019, en ligne , à consulter à partir de la page 56.

* (84) Martine Bungener, première déléguée à l'intégrité scientifique de l'INSERM, « La naissance de l'intégrité scientifique en France : pourquoi ? comment ? », colloque L'intégrité scientifique, parlons-en !, 29 janvier 2016, 17 minutes, en ligne .

* (85) OPECST, Présentation, par la députée Anne Genetet, de l'historique et des avancées en matière d'intégrité scientifique, communication du 7 février 2019, en ligne .

* (86) Colloque L'intégrité scientifique : parlons-en !, 29 janvier 2016, Université de Bordeaux.

* (87) Olivier Le Gall, président de l'OFIS, lors de son audition par l'OPECST (18 janvier 2018).

* (88) Audition de Nelly Dupin, présidente par intérim du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres), juillet 2020.

* (89) Audition de David Larousserie, journaliste au Monde, spécialiste de l'intégrité scientifique, 30 septembre 2019.

* (90) Visioconférence avec Olivier Le Gall, président de l'OFIS, 21 octobre 2020.

* (91) Compte rendu de la réunion du CoFIS 19 octobre 2018, en ligne .

* (92) « Plusieurs Actions 2019 sont prises en charge par un à quatre membres du CoFIS chacune, soit directement soit comme référents auprès de l'équipe de l'OFIS qui elle-même fait l'interface avec d'autres acteurs dans les établissements », compte-rendu de la réunion du CoFIS, 3 décembre 2018, en ligne .

* (93) CoFIS, « Vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique, à l'usage des chefs d'établissements », juin 2019, en ligne .

* (94) Cette nomenclature peut notamment se trouver dans le « rapport Corvol », le vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique ou encore le document du Forum Mondial de la Science de l'OCDE.

* (95) Compte rendu de la réunion du CoFIS, 3 décembre 2019, en ligne .

* (96) Compte rendu de la réunion du CoFIS, 18 juin 2020, en ligne .

* (97) Compte-rendu de la réunion du CoFIS, 3 décembre 2019, en ligne .

* (98) Commission européenne, « Mutual Learning Experience (MLE) on Research Integrity », octobre 2019, en ligne .

* (99) https://www.hceres.fr/fr/annuaire-des-formations-doctorales-lintegrite-scientifique .

* (100) MOCC : « massive open online course », soit « cours en ligne ouvert et massif ».

* (101) Il était dédié à l'interface entre science ouverte et intégrité scientifique. Les vidéos et verbatims sont en ligne sur le site du Hcéres. Le 5 e colloque aurait dû se tenir au printemps 2020 sur l'interface intégrité-média, mais il a été repoussé en raison de la situation sanitaire. Le 6 e colloque devrait aborder la question de l'intégrité scientifique dans le contexte des sciences citoyennes et participatives ; une enquête est en cours pour assurer le fondement scientifique de ce futur colloque, qui porte sur un sujet encore inexploré.

* (102) Compte rendu de la réunion du CoFIS, 17 septembre 2019, en ligne .

* (103) Les interventions sont consultables sous la forme d'un compte rendu, autant que de captations vidéos.

* (104) Il s'agit du projet « Responsible Open Science : an ethics and integrity perspective” financé dans le cadre de l'appel H2020 SwafS-30-2020, compte rendu de la réunion du CoFIS, 12 octobre 2020, en ligne .

* (105) Audition de Nelly Dupin, présidente par intérim du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres), juillet 2020.

* (106) Visioconférence avec Olivier Le Gall, président de l'OFIS, 21 octobre 2020.

* (107) OFIS, « Réunion du Conseil », 15 décembre 2017, en ligne .

* (108) Circulaire MENESR-DGRI-SPFCO B2 n° 2017-040 du 15 mars 2017 (NOR : MENRI705751C), de M. Thierry Mandon, secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, Bulletin officiel de l'éducation nationale n° 12 du 23 mars 2017, en ligne .

* (109) La liste à jour des référents intégrité scientifique, accompagnée de leurs coordonnées, est disponible sur la page internet de l'OFIS. Chiffres vérifiés par Michelle Hadchouel le 20 octobre 2020 et confirmés par l'OFIS le 7 novembre 2020.

* (110) Hervé Maisonneuve, dans son article « Development of Research Integrity in France is on the Rise: the Introduction of Research Integrity Officers was a Progress » (paru dans Research Integrity and Peer Review, vol. 4, n° 20, 2019, en ligne ), a fait la moyenne d'âge des 142 référents intégrité scientifique dont il possédait les informations : la moyenne d'âge tourne autour de 61,2 ans + 9,6 ans, avec 70 % d'hommes et 30 % de femmes. Il suppose que les moins de 65 ans sont chefs de laboratoire et n'ont aucun temps dédié à l'intégrité sur leur contrat, alors que ceux au-delà de 65 ans ont le temps de faire.

* (111) Groupe de travail Corvol, « Vade-mecum intégrité scientifique », mars 2017, p. 4-5, en ligne .

* (112) À ce titre, Hervé Maisonneuve a souligné qu'il y avait du « règlement de compte sur des choses anciennes, qui ne sont pas logiques », alors mêmes que les pratiques de 2020 ne sont pas celles d'il y a quelques années.

* (113) Ghislaine Filliatreau, « Pratiques de la délégation à l'intégrité scientifique de l'INSERM », POLETHIS, n° 1, janvier 2019, p. 28-29.

* (114) Michelle Hadchouel, MOOC de l'université de Bordeaux « Intégrité scientifique dans les métiers de la recherche », volet « La zone grise », en ligne .

* (115) Audition de Jean-Pierre Savineau, référent intégrité à l'université de Bordeaux, 16 septembre 2019.

* (116) Entretien avec Rémy Mossery publié par CNRS info le 18 décembre 2020, en ligne .

* (117) Sarah Carvallo, Yves Duval, Michel Faure, & Michel Pernot, « L'intégrité scientifique dans les Sciences humaines : quelles spécificités ? », Document de synthèse du ResInt, groupe de travail 2, 19 septembre 2018.

* (118) Audition de Laurence Guyard, responsable des relations avec les communautés scientifiques, référente genre et référente intégrité scientifique au sein de l'Agence nationale de la recherche (ANR) ; de Jérôme Ferrand Ammar, chargé de mission auprès de la direction générale de l'ANR, & de Martine Garnier-Rizet, responsable du département numérique et mathématiques de l'ANR, 14 octobre 2019.

* (119) Audition de Ghislaine Filliatreau, déléguée à l'intégrité scientifique de l'INSERM, 18 novembre 2019.

* (120) Audition de Frédérique Claudot, juriste, membre du CoFIS, responsable d'un parcours éthique dans le master santé publique, 4 novembre 2019.

* (121) Audition de Seraya Maouche et de M e Katherine Loffredo-Treille, co-fondatrices de l'association Éthique et Intégrité, 18 novembre 2019.

* (122) Martine Laronche, « Note2Be : les élèves évaluent les professeurs », Le Monde, 20 février 2008, en ligne .

* (123) Audition de Pierre Corvol, président de l'Académie des sciences et rédacteur d'un rapport consacré à l'intégrité scientifique en 2016, 17 septembre 2019.

* (124) Audition de Michelle Bergadaà et Pierre-Jean Benghozi, membres de l'Institut de recherche sur la fraude et le plagiat académique (IRAFPA), 2 décembre 2019.

* (125) Elles sont estimées à 500 euros jour, plus les frais de déplacement, par Hervé Maisonneuve.

* (126) Ces certifications destinées aux universités et crées en 2016, ont notamment été dispensées en Roumanie ou au Kosovo, en partenariat avec l'UNESCO et le Conseil de l'Europe, mais aussi proposées à quelques RIS, comme ceux de Corse ou de Nantes. L'IRAFPA, mais aussi l'Embassy for Good Science, sont deux exemples de structures proposant des certifications à destination des référents ou assimilés, ainsi que des universités pour les former à l'intégrité scientifique.

* (127) Audition d'Hervé Maisonneuve, médecin et référent intégrité scientifique de la faculté de médecine université de Paris, 21 octobre 2019.

* (128) Michelle Hadchouel et Michel Pernot ont rassemblé quelques statistiques à la demande de la mission et ont obtenu 77 réponses. Sur ces 77, 44 RIS ont une lettre de mission et 33 n'en ont pas. Tous ont, a priori, un arrêté de nomination.

* (129) Audition de Pierre Mutzenhardt, président de la commission « recherche et innovation » de la CPU, 18 septembre 2019.

* (130) Claude Huriet, « Synthèse et conclusion », séminaire Sensibilisation aux manquements à l'intégrité scientifique et à leurs conséquences, Académie Internationale d'Éthique, Médecine et Politiques Publiques, 12 avril 2018, en ligne .

* (131) Pierre Corvol, « Intégrité scientifique, sonnons l'alerte ! », Laennec, tome 68, n° 2, p. 24-32, en ligne .

* (132) Dépêche AEF n°642961, en ligne .

* (133) Paul S. Brookes, « Internet Publicity of Data Problems in the Bioscience Literature Correlates with Enhanced Corrective Action », PeerJ, vol. 2, n° 313, 2014, p. 1-9, en ligne .

* (134) « It is therefore concluded that online discussion enhances levels of corrective action in the scientific literature. Nevertheless, anecdotal discussion reveals substantial room for improvement in handling of such matters.».

* (135) Audition de Brandon Stell et Boris Barbour, neuroscientifiques et dirigeants de PubPeer, 4 novembre 2019.

* (136) Nicolas Martin, « Grand entretien avec Antoine Petit », La Méthode scientifique, France Culture, 8 mars 2018, 58 minutes, en ligne .

* (137) Échange téléphonique avec Ghislaine Filliatreau, 16 octobre 2020 et audition du 18 novembre 2019.

* (138) Claude Kirchner, « Intégrité et publication scientifiques. De la science ouverte à l'évolution de la déontologie », POLETHIS, n° 2, novembre 2019, p. 12.

* (139) Poppy Noor, « Nobel Prize Winner Demonstrates the Best Way to Apologize », The Guardian, 6 janvier 2020, en ligne : « Unfortunately there aren't Nobel prizes for good apologies - but Dr Frances Arnold's words should be an example to all of us. ».

* (140) Retraction Watch, « Ten Takeaways from Ten years at Retraction Watch », RetractionWatch, 3 août 2020, en ligne .

* (141) R. Grant Steen, « Retractions in the Scientific Literature: is the Incidence of Research Fraud Increasing? », Journal of Medical Ethics, vol. 37, n° 4, 2011, p. 249-253, en ligne .

* (142) Base de données RetractionWatch, en ligne .

* (143) Hervé Morin pour La Méthode scientifique, d'après l'article de Jeffrey Brainard « Rethinking Retractions », Science, vol. 362, n° 6413, 26 octobre 2018, p. 390-393, en ligne .

* (144) R. Grant Steen, « Retractions in the Scientific Literature: Do Authors Deliberately Commit Fraud? », Journal of Medical Ethics, vol. 37, n° 4, 2011, p. 113-117, en ligne .

* (145) Jeffrey Brainard « Rethinking Retractions », Science, vol. 362, n° 6413, 26 octobre 2018, p. 390-393, en ligne .

* (146) Isabel Campos-Varela & Alberto Ruano-Raviña, « Misconduct as the Main Cause for Retraction. A Descriptive Study of Retracted Publications and their Authors », Gaceta Sanitaria, vol. 33, n° 4, juillet-août 2019, p. 356-360, en ligne .

* (147) Échange électronique avec Hervé Maisonneuve, 24 octobre 2020.

* (148) RetractionWatch, « The Retraction Countdown: How Quickly do Journals Pull Papers? », RetractionWatch, 7 juillet 2017, en ligne .

* (149) Kalevi M. Korpela, « How Long does it Take for the Scientific Literature to Purge Itself of Fraudulent Material?: the Breuning Case Revisited », Current medical research and opinion, vol. 26, n° 4, p. 843-847, en ligne .

* (150) Jerome Samson, « Retracting Bad Science Doesn't Make it Disappear », Wired, 10 octobre 2017, en ligne .

* (151) Sandra A. Binning, Fredrik Jutfelt, & Josefin Sundin, « Exorcise citations to the `living dead' from the literature », Nature, 13 juin 2018, en ligne .

* (152) https://pubpeer.com/static/extensions .

* (153) Toshio Kuroki, « Is it Time for a New Classification for Scientific Misconduct », Retraction Watch , 17 décembre 2018, en ligne .

* (154) Frédéric Sgard et Stefan Michalowski, « Intégrité scientifique : vers l'élaboration de politiques cohérentes », Sciences, n° 3, 2007, p. 20-27, en ligne .

* (155) Le Fonds de la recherche scientifique de Belgique (FNRS) a produit un document semblable en 2007, un peu plus étoffé, mais moins connu du monde de l'intégrité scientifique : « Directives relatives à l'intégrité dans la recherche scientifique. Principes généraux et Procédure à suivre en cas de manquement », en ligne .

* (156) « Vade-mecum intégrité scientifique », mars 2017, en ligne .

* (157) Lucienne Letellier, chargée de mission au sein de la Mission à l'intégrité scientifique (MIS) du CNRS, définit ainsi la fraude : « [...] une violation sérieuse et intentionnelle dans la conduite d'une recherche et dans la diffusion de résultats, excluant par là-même les erreurs de bonne foi ou les différences honnêtes d'opinion. » (« Sur l'intégrité de la recherche : quelques considérations éthiques sur l'organisation et les pratiques de recherche », Revue Prétentaine, n° 27-28, 2011, rapporté par Alexandre Serres, « Stage de l'URFIST de Rennes. Introduction à l'intégrité scientifique », Brest, 17 mai 2019, en ligne .

* (158) Office of Science and Technology Policy, « Federal Research Misconduct Policy », vol. 65, n° 235, décembre 2000, p. 76260-76264, en ligne : « Research misconduct is defined as fabrication, falsification, or plagiarism in proposing, performing, or reviewing research, or in reporting research results. ».

* (159) En 2016, la microbiologiste Elisabeth Bik, spécialiste de l'intégrité scientifique, a annoncé que près de 4 % des 20 621 articles du domaine bio-médical qu'elle avait étudié à la loupe contenaient des duplications d'images. Voir Monya Baker, « Problematic images found in 4 % of biomedical papers », Nature, 25 avril 2016, en ligne . En 2018, Enrico Bucci, directeur de Resis, une entreprise spécialisée dans la relecture d'articles scientifiques, a estimé que 6 % des 1364 articles étudiés contenaient au moins une manipulation d'image. Voir Alison Abbott, « The Science Institutions Hiring Integrity Inspectors to Vet their Papers », Nature, vol. 575, 26 novembre 2019, p. 430-433, en ligne .

* (160) Alexandre Serres, « Plagiat académique : de la négligence informationnelle à la fraude scientifique », Barcamp « Copier-coller, créacollage numérique ou plagiat », Université de Lorraine, juillet 2018, Nancy, en ligne .

* (161) Yannick Lung, MOOC de l'université de Bordeaux « Intégrité scientifique dans les métiers de la recherche », volet « Le plagiat », en ligne .

* (162) Audition de Frédérique Claudot, avocate et membre du COFIS, 4 novembre 2019.

* (163) Nicolas Martin, « Revues scientifiques : la crise de confiance », La Méthode scientifique, France Culture, en présence de Pierre Corvol, Sylvestre Huet, Hervé Maisonneuve, 18 juin 2020, 59 minutes, en ligne .

* (164) John P. A. Ioannidis, Richard Klavans, & Kevin W. Boyack, « Thousands of Scientists Publish a Paper Every Five Days », Nature, 12 septembre 2018, en ligne .

* (165) Brian C. Martinson, « Give researchers a lifetime word limit », Nature News, 17 octobre 2017, en ligne .

* (166) Audition de Didier Raoult, Commission d'enquête du Sénat, 15 septembre 2020, en ligne .

* (167) Tribune du Collectif de chercheurs et de professionnels médicaux, « Halte à la fraude scientifique », Libération, 2 septembre 2020, en ligne .

* (168) Mathilde Roche, « Didier Raoult a-t-il vraiment signé “3 500 publications internationales” dans sa carrière ? », Checknews, 22 septembre 2020, en ligne .

* (169) International Commitee of Medical Journal Editors, « Defining the Role of Authors and Contributors », en ligne .

* (170) Eric A. Fong, & Allen W. Wilhite, « Authorship and citation manipulation in academic research », PLoS ONE, vol. 12, n° 12, 2017, en ligne .

* (171) Hervé Maisonneuve, « L'ordre des auteurs d'un article : pas de règles... mais source de conflits ! », Rédaction médicale et scientifique, 24 septembre 2018, en ligne .

* (172) Pour un panorama global des manquements relatifs aux citations et des pratiques vertueuses à adopter : Hervé Maisonneuve, « L'art de la citation est parfois une manipulation sournoise de la science », POLETHIS, n° 2, novembre 2019, p. 46.

* (173) Sur le sujet : Sophie Kennel & Elsa Poupardin, « La tension entre la pratique de recherche et l'intégrité scientifique : l'exemple de l'activité bibliographique », Les Enjeux de l'information et de la communication, vol. 19, n° 1, 2018, p. 51-61, en ligne .

* (174) INSERM, « Signature des publications scientifiques. Les bonnes pratiques », 2018, en ligne .

* (175) Université de Bordeaux, « Charte déontologique en matière d'activité de recherche et de valorisation. Responsabilités, gestion, gestion des conflits d'intérêts et traitement des allégations de manquements à l'intégrité scientifique », septembre 2017, en ligne .

* (176) Elisabeth Bik, « The Tadpole Papier Mill », Science Integrity Digest, 21 février 2020, en ligne .

* (177) Victor Garcia, « Le business juteux des “fermes à articles”, qui produisent de fausses études scientifiques », L'Express, 2 octobre 2020, en ligne .

* (178) Elisabeth Bik, « Helping Students get into top Universities by Writing their Papers, Essays and Recommandations », Science Integrity Digest, 23 juillet 2020, en ligne .

* (179) Audition de Laurence Guyard, responsable des relations avec les communautés scientifiques, référente genre et référente intégrité scientifique au sein de l'Agence nationale de la recherche (ANR) ; de Jérôme Ferrand Ammar, chargé de mission auprès de la direction générale de l'ANR, & de Martine Garnier-Rizet, responsable du département numérique et mathématiques de l'ANR, 14 octobre 2019.

* (180) Martine Bungener, MOOC de l'université de Bordeaux « Intégrité scientifique dans les métiers de la recherche », volet « L'enjeu de l'intégrité scientifique pour les institutions de recherche », en ligne .

* (181) Retraction Watch, « Is it Time for a New Classification System for Scientific Misconduct ? », interview de Toshio Kuroki par RetractionWatch, 17 décembre 2018, en ligne ; Toshio Kuroki, « New Classification of Research Misconduct from the Viewpoint of Truth, Trust, and Risk », Accountability in Research, vol. 25, n° 7-8, 2018, p. 404-408, en ligne .

* (182) L'étude allemande de Hannah Jergas, & Christopher Baethge, 2015, « Quotation Accuracy in Medical Journal Articles - a Systematic Review and Meta-analysis », PeerJ, vol. 3, en ligne , portant sur 559 articles issus du domaine médical relève ainsi des « erreurs majeures » dans 11,9 % des citations (l'article mobilisé dans la citation contredit, ne corrobore pas, ou n'a pas de lien avec l'assertion présentée dans l'article, et des « erreurs mineures » dans 11,5 % des cas (des erreurs factuelles ou incohérences qui n'altèrent pas fondamentalement la signification de la source), soit un total de 25,4 % de références erronées . Un second article, de Neal Smith, &, Aaron Cumberledge, « Quotation Errors in General Science Journals », Proceedings of the Royal Society, n° 476, n° 2242, 2020, en ligne , se penche sur 250 références sélectionnées à partir d'articles de revues prestigieuses, telles que Science et Nature et tombe une fois encore sur 25 % de citations erronées .

* (183) Comité d'experts en charge de l'Affaire Peyroche, « Rapport final sur cinq articles publiés par Mme Anne Peyroche », 22 janvier 2020, p. 2, en ligne .

* (184) Lex M. Bouter, Joeri Tijdink, Nils Axelsen, Brian C. Martinson & Gerben ter Riet, « Ranking Major and Minor Research Misbehaviors: Results from a Survey among Participants of four World Conferences on Research Integrity », Research Integrity and Peer Review, vol. 1, n° 17, 2016, en ligne .

* (185) ResInt, « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique », novembre 2018, en ligne ; ResInt, « Repères pour une mise en oeuvre de la procédure de recueil et de traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique, en conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) », 2019, en ligne .

* (186) CoFIS, « Vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique, à l'usage des chefs d'établissements », juin 2019, en ligne .

* (187) Cité par Olivier Le Gall, « L'intégrité scientifique au service d'une Science responsable », colloque interdisciplinaire L'intégrité scientifique à l'aune du droit, 12-13 mars 2019, université Paris II Panthéon-Assas.

* (188) Editorial, « Research Integrity is much more than Misconduct », Nature, 3 juin 2019, en ligne : « Research integrity includes such investigations, but it is much more. It is about creating systems that boost the quality, relevance and reliability of all research [...] And research integrity is not a virtue that is either present or absent: it is a capacity that can be enhanced.

* (189) NAS US, « Responsible Science : Ensuring the Integrity of the Research Process », (I : 1992 ; II : 1993) ; NAS US, « Fostering Integrity in Research », 2017 ; ESF-ALLEA, « European Code of Conduct for Research Integrity » (« code européen de conduite pour l'intégrité de la recherche), 2018, en ligne .

* (190) Eu2020, « Bonn Declaration on Freedom of Scientific Research », adoptée par les Ministres européens de la recherche, 20 octobre 2020, en ligne .

* (191) Texte encadré : ResInt, « Guide pour le recueil et le traitement des signalements relatifs à l'intégrité scientifique », novembre 2018, en ligne , citations p. 5 et suivantes.

* (192) CoFIS, « Vade-mecum pour le traitement des manquements à l'intégrité scientifique, à l'usage des chefs d'établissements », juin 2019, en ligne .

* (193) « Toute personne agissant de bonne foi, qui a connaissance d'un manquement possible à l'intégrité scientifique, peut adresser un signalement au RIS de l'un des opérateurs concernés. Le signalement doit être fait par écrit, par courrier papier ou électronique. Il doit concerner des faits sérieux et documentés. Les signalements anonymes ne sont pas admis. »

* (194) Les auditions ont permis de rencontrer plusieurs acteurs associatifs. Parmi elles, la responsable de l'association Éthique et Intégrité rapporte être contactée lorsqu'aucune solution satisfaisante n'a été trouvée avec le RIS. Au sein des personnes aidées se trouvent des individus ayant subi un lynchage médiatique, d'autres qui ont été spoliés (plagiat), des personnes qui contactent à la place de la victime. L'association s'efforce d'abord de redéfinir le manquement (la question se pose de la place donnée au contradictoire puisqu'elle n'a que son « plaignant » à dispositon), et s'assure que la victime n'a pas réellement commis de fraude. Elle aide alors à rédiger la saisine adressée au RIS. L'avocate bénévole de l'association écrit, dans ce cas, au titre de l'association.

* (195) Il n'existe, à notre connaissance, pas de travaux ayant porté sur les différents profils de chercheurs qui postent sur la plateforme PubPeer, mais une telle enquête qualitative et quantitative serait éclairante : statut de la personne et rapport hiérarchique à l'auteur de l'article visé ; conception de l'intégrité scientifique ; familiarité avec ces valeurs et principes ; but recherché par la mise en ligne du signalement ; quel suivi de l'affaire par cette personne par la suite, etc. ?

* (196) « Le RIS accuse rapidement réception du signalement auprès de la personne qui l'a émis, l'assure de la confidentialité et lui rappelle son devoir de discrétion. Il vérifie que le signalement porte bien sur un possible manquement à l'intégrité scientifique. Dans le cas contraire, il oriente la personne vers les interlocuteurs compétents éventuels (médiateur, référent déontologue, référent pour les lanceurs d'alerte, service des ressources humaines ou des affaires juridiques, délégué à la protection des données, collège de déontologie...). »

* (197) « Si le signalement est recevable, le RIS en informe rapidement la ou les personnes mises en cause. Par exception, lorsque des mesures conservatoires sont nécessaires pour prévenir la destruction de preuves relatives au manquement, l'information de cette ou ces personnes n'intervient qu'après la mise en oeuvre de ces mesures. »

* (198) « Tout au long de la procédure, les meilleurs efforts seront déployés pour réaliser avec diligence une instruction approfondie et documentée. Cela comprend la collecte de toutes les informations pertinentes, l'examen de tous les éléments de preuve, l'audition des personnes mises en cause, éventuellement de la personne à l'origine du signalement et de toute autre personne raisonnablement identifiée comme ayant des informations à fournir. »

* (199) « Si le signalement concerne plusieurs opérateurs de recherche, le RIS qui a reçu le signalement initial met en oeuvre tous les moyens pour ouvrir une co-instruction. L'ensemble des RIS impliqués désignent un RIS coordinateur qui aura la responsabilité de mener la procédure avec diligence. »

* (200) « Montreal Statement on Research Integrity in Cross-Boundary Research Collaborations », élaboré pendant la troisième World Conference on Research Integrity de Montréal, 5-8 mai 2013, en ligne (traduction française de l'encadré, tiré de la page p. 8). Il met l'accent sur quatre attendus en matière de collaboration : 1) les « responsabilités collaborative générales » (intégrité collective ; confiance entre les collaborateurs ; but posé de progrès de la connaissance ; avoir un objectif commun et clair de recherche) ; 2) les « responsabilités dans la gestion de la collaboration » (communication entre les membres ; accords communs ; conformité en matière de lois, règlements et politiques ; juste répartition des coûts et récompenses ; transparence dans les financements et résultats de la recherche ; utilisation responsable des ressources ; suivi du projet par tous) ; 3) « Responsabilités dans une relation de collaboration » (les rôles et responsabilités doivent être clairement établis ; les collaborateurs doivent être conscients des différences coutumières qui peuvent affecter leur interprétation respective de l'intégrité. scientifique ; les collaborateurs doivent trouver des solutions rapides aux désaccords ; doit être identifié celui qui a l'autorité de la représentation) ; 4) « Responsabilités des résultats de la recherche » (les collaborateurs doivent s'accorder sur l'utilisation et la gestion des données, de la propriété intellectuelle et des expériences de la recherche ainsi que sur la publication des travaux de recherche ; le travail collaboratif doit reconnaître la part de travail de chacun ; le groupe doit avoir réfléchi aux manières de traiter les manquements au sein de la collaboration ; les collaborateurs sont responsables vis-à-vis des partenaires, des bailleurs et des autres parties prenantes à la recherche).

* (201) OECD Global Science Forum, « Investigating Research Misconduct Allegations in International Collaborative Research. A Practical Guide », 2009, en ligne .

* (202) La propriété de terrain désigne le fait qu'un chercheur ayant travaillé sur un sujet le premier estime être prioritaire, voire propriétaire de la thématique et de ses objets.

* (203) Ghislaine Filliatreau, « Pratiques de la délégation à l'intégrité scientifique de l'INSERM », POLETHIS, n° 1, janvier 2019, p. 28-29.

* (204) « La composition de ce comité, qui pourra éventuellement être rendue publique à la fin de l'instruction avec l'accord de ses membres, doit garantir l'indépendance et la qualité de l'analyse qui lui est confiée. Notamment, les membres de ce comité ne seront nommés qu'après une analyse soigneuse de liens d'intérêt potentiels vis-à-vis du dossier et sous réserve qu'ils aient signé un engagement de confidentialité. La mise en place de ce comité sera accompagnée d'une lettre de mission qui précisera notamment l'objet et l'organisation de ses travaux. Pour assurer la conformité de la procédure aux meilleures pratiques professionnelles, le secrétariat exécutif de ce comité sera assuré par les RIS des établissements concernés travaillant de façon coordonnée. »

* (205) « L'instruction doit établir : Le recensement complet des faits signalés ; une description soigneuse des faits établis ; les arguments fournis par chacune des personnes mises en cause et les vérifications qui ont pu en être faites ; une analyse strictement fondée sur les éléments établis. Si des hypothèses sont émises, elles sont présentées comme telles, et leurs limites sont rappelées. Une fois l'instruction considérée comme complète, un pré-rapport est établi, dont une copie peut être communiquée de façon confidentielle et - sous réserve que cela soit rendu possible par les règles applicables -, à la ou aux personnes mises en cause afin qu'elles apportent leurs commentaires dans un délai donné. Au terme de ce délai, le RIS ou le comité établit son rapport définitif qui prend en compte ces commentaires ou, dans le cas contraire, les joint en annexe. »

* (206) Audition de David Larousserie, journaliste au Monde, spécialiste de l'intégrité scientifique, 30 septembre 2019.

* (207) « La décision quant aux suites à donner au rapport d'instruction appartient aux responsables des opérateurs concernés :

- en cas d'absence de manquement à l'intégrité scientifique, ces suites concernent notamment les actions éventuelles nécessaires pour réhabiliter les personnes mises en cause à tort (publicisation des conclusions de l'instruction, attestation de l'établissement ou de l'organisme...). En parallèle, les conditions du signalement seront explorées afin de détecter et de faire sanctionner tout signalement abusif, de mauvaise foi ou avec une intention de nuire ;

- en cas de manquement avéré, les actions à mener peuvent comprendre des mesures d'accompagnement des personnes (formation, tutorat, mobilité...), des mesures scientifiques (demande de correction ou de rétractation d'articles, arrêt ou modification de programme de recherche...), voire des mesures disciplinaires (à mettre en place par chaque opérateur selon les dispositions qui le régissent). »

* (208) C. K. Gunsalus, Adam R. Marcus, & Ivan Oransky, « Institutional Research Misconduct Reports Needs More Credibility », JAMA, vol. 319, 2018, p. 1315-1316, en ligne .

* (209) APRIN, « How to Investigate Allegations of Research Misconduct: a Checklist », 2018, en ligne . La checklist se compose de 32 questions (allégation, équité et compétence du comité, protection des droits de la personne soupçonnée, processus d'enquête, rapport d'enquête, actions, conformité aux règles).

* (210) Audition de Frédérique Claudot, juriste, membre du CoFIS, responsable d'un parcours éthique dans le master santé publique, 4 novembre 2019.

* (211) Colloque L'intégrité scientifique à l'aune du droit13 mars 2019, université Paris II Panthéon-Assas, texte de l'intervention.

* (212) Échange électronique avec Ghislaine Filliatreau, 9 novembre 2020.

* (213) Ghislaine Filliatreau, dans un échange électronique du 27 octobre 2020, rappelle que ces droits sont explicités dans la loi pour ce qui concerne par exemple une enquête judiciaire alors que le référent intégrité réalise une instruction. C'est précisément pour cela que ces éléments sont rappelés dans le guide de procédure dont se sont dotés les référents.

* (214) Visioconférence avec Michelle Hadchouel, 20 octobre 2020.

* (215) Si une telle structure d'appel du pré-rapport du référent devait voir le jour, le sénateur Claude Huriet souhaiterait que l'OFIS soit l'instance de recours, mais Michèle Leduc et Michelle Hadchouel ont toutes les deux fait remarquer que cela demanderait de reconfigurer le CoFIS et ses membres puisqu'ils sont, pour le moment, nommés, et non élus, intuitu personæ.

* (216) L'université Rennes 2, par exemple, signale sur sa page consacrée à l'intégrité scientifique « [...] la diffusion publique de certains documents reste l'exception et elle est décidée par la Présidence de l'université Rennes 2 » ( en ligne ).

* (217) C. K. Gunsalus, « Make Reports of Research Misconduct Public », Nature, 3 juin 2019, en ligne .

* (218) Audition de Seraya Maouche et M e Katherine Loffredo-Treille, co-fondatrices de l'association Éthique et Intégrité, 18 novembre 2019.

* (219) Haute Autorité de Santé, « Comprendre pour agir sur les événements indésirables associés aux soins (EIAS), 12 février 2015, en ligne : « Un événement indésirable associé aux soins (EIAS) est un évènement inattendu qui perturbe ou retarde le processus de soin, ou impacte directement le patient dans sa santé. Cet évènement est consécutif aux actes de prévention, de diagnostic ou de traitement. Il s'écarte des résultats escomptés ou des attentes du soin et n'est pas lié à l'évolution naturelle de la maladie. ».

* (220) Ulrich Dinargl, Ingo Przesdzing, Claude Kurreck, & Sebastian Major, « A Laboratory Critical Incident and Error Reporting System for Experimental Biomedicine », PLOS BIOLOGY, vol. 14, n° 12, décembre 2016, en ligne .

* (221) Serge Horbach & Willem Halffman, « Promoting Virtue or Punishing Fraud: Mapping Contrasting Discourses on `Scientific Integrity' », 2016, en ligne .

* (222) Le projet européen PRINTEGER, financé par Horizon2020 et fort de 8 partenaires issus de 7 pays, a pour mission « de consolider l'intégrité scientifique en faisant la promotion d'une culture scientifique dans laquelle l'intégrité fait partie intégrante de ce que signifie faire de la recherche excellente, et pas seulement un système de contrôle restrictif et externalisé ».

* (223) Audition d'Olivier Le Gall, président, et de Joëlle Alnot, directrice de l'OFIS, 2 septembre 2019.

* (224) Arrêté du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat, en ligne .

* (225) À ce titre, l'OFIS a fait part de son projet de cartographier l'offre de formation à l'échelle française (format, durée, contenu, interactivité, examen), grâce à un groupe de travail lancé fin 2018, formé du ResInt, du réseau national des collèges doctoraux (RNCD) et de l'OFIS, lesquels ont envoyé un questionnaire aux différentes institutions.

* (226) https://www.hceres.fr/fr/annuaire-des-formations-doctorales-lintegrite-scientifique .

* (227) Meriem Koual, « Formation à l'éthique et à l'intégrité scientifique au sein des écoles doctorales françaises. Un premier état des lieux en 2018 », Médecine/Sciences, vol. 35, n° 6-7, juin-juillet 2019, p. 558-561.

* (228) On compte au total 269 écoles doctorales en France.

* (229) L'université d'Aix Marseille recense un certain nombre de ces jeux : https://bu.univ-amu.libguides.com/c.php?g=511751&p=3501754 .

* (230) Collège doctoral de l'Université Paris-Saclay, & le Département de recherche en éthique Université Paris-Sud, « Éthique de la recherche et Intégrité scientifique. Pour une démarche responsable à l'Université Paris-Saclay », atelier de réflexion, 16 janvier 2017.

* (231) Audition d'Emmanuel Hirsch, président du Conseil pour l'éthique de la recherche et l'intégrité scientifique (POLÉTHIS) de l'université Paris-Saclay et professeur d'éthique médicale, 27 février 2020.

* (232) Collège doctoral de l'Université Paris-Saclay, & le Département de recherche en éthique Université Paris-Sud, « Éthique de la recherche et Intégrité scientifique. Pour une démarche responsable à l'Université Paris-Saclay », atelier de réflexion, 16 janvier 2017, p. 62.

* (233) Karine Demuth-Labouze, « La démarche formations Poléthis 2018-2019 », POLETHIS, n° 1, janvier 2019, p. 35.

* (234) Delphine Berdah, Hélène Courvoisier, Karine Demuth-Labouze, & Annick Jacq, « Formation à l'éthique de la recherche. L'approche en atelier d'étude de cas », POLETHIS, n° 1, janvier 2019, p. 32-33.

* (235) POLETHIS, « Introduction à l'éthique de la recherche et à l'intégrité scientifique. Présentation des données tirées du questionnaire renseigné par les étudiants à la suite des formations », Bilan formations doctorants, mai-juin 2018.

* (236) Centrale-Supélec, Faculté Jean Monnet pour 2 formations : Ces 3 formations se font en présentiel et auraient dû être sanctionnées par un questionnaire en ligne.

* (237) Université de Bordeaux, MOOC « Intégrité scientifique dans les métiers de la recherche », première session 2018/2019, en ligne .

* (238) Université de Lyon, MOOC « Éthique de la recherche », en ligne . Il est utilisé par plusieurs établissements maintenant, du fait de sa qualité et sa pédagogie

* (239) L'expression désigne un jeu abordant un enjeu sérieux (éducation, information, communication, entraînement, enseignement, etc.) dans un univers informatique et interactif ludique. Voir Shen Cuihua, Wang Hua, & Ritterfeld Ute, « Serious Games and Seriously Fun Games: Can they be One and the Same ? », dans Ritterfeld Ute, Cody Michael &Vorderer Peter (dir.), Serious games : mechanisms and effects, New York, Routledge, 2009, p. 48-62 ; Damien Djaouti, Alvarez, Jean-Pierre Jessel, & Olivier Rampnoux, « Origins of Serious Games », dans Minhua Ma, Andreas Oikonomou, Lakhmi C. Jain. (dir.), Serious Games and Edutainment Applications, Springer, Londres, 2011, en ligne .

* (240) Katie Brzustowski-Vaïsse, Raphaël Marczak, & Hélène Marie-Montagnac, « De Subpoena à CIEL : étude de l'acquisition de compétences informationnelles à travers une approche vidéoludique pluridisciplinaire », Communication & Organisation, vol. 54, n° 2, 2018, p. 229-240, en ligne .??????????

* (241) Université de Bordeaux, « Un “serious game” pour sensibiliser les étudiants au plagiat », sans date, en ligne .

* (242) Priya Satalkar & David Shaw, « How do Researchers Acquire and Develop Notions of Research Integrity? A Qualitative Study among Biomedical Researchers in Switzerland », BMC Medical Ethics, vol. 20, n° 72, 2019, en ligne .

* (243) Tamarinde L. Haven, Joeri K. Tijdink, Brian C. Martinson, & Lex M. Bouter, « Perceptions of research integrity climate differ between academic ranks and disciplinary fields: Results from a survey among academic researchers in Amsterdam », PLoS ONE, vol. 14, n° 1, 2019, en ligne .

* (244) League of European Research Universities, « Towards a Research Integrity Culture at Universities: From Recommendations to Implementation », n° 26, janvier 2020, en ligne .

* (245) Karine Demuth-Labouze, « La démarche formations Poléthis 2018-2019 », POLETHIS, n° 1, janvier 2019, p. 35.

* (246) Programme du colloque Parlons éthique, Institut Curie, 10 avril 2012, en ligne .

* (247) Programme du colloque Intégrité scientifique : parlons-en !, 29 janvier 2016, université de Bordeaux, en ligne . Ce programme a bénéficié d'une captation vidéo, disponible sur Canal U : en ligne .

* (248) Programme du séminaire Sensibilisation aux manquements à l'intégrité scientifique et à leurs conséquences, Académie Internationale d'Éthique, Médecine et Politiques Publiques, 11 au 12 avril 2018. Les vidéos sont consultables en ligne .

* (249) Programme de la journée d'étude L'intégrité scientifique au prisme de l'IST, 7e journée nationale d'étude du Réseau des URFIST, université Paris-Nanterre, 7 décembre 2018, en ligne .

* (250) Programme du colloque L'intégrité scientifique à l'aune du droit 12 et 13 mars 2019, université Paris II Panthéon-Assas, en ligne .

* (251) Programme du colloque Intégrité scientifique et science ouverte, 4 avril 2019, en ligne . Les captations sont aussi en ligne à la même adresse.

* (252) Programme de la World Conference on Research Integrity, Hong Kong, Chine, 2-5 juin 2019, en ligne. Les archives sont consultables en ligne : session plénière ; autres sessions .

* (253) Programme du colloque La publication scientifique à l'heure des fake news ou comment favoriser l'intégrité scientifique ?, organisé par le Syndicat de la presse culturelle et scientifique, 4 octobre 2019, en ligne .

* (254) Revue éditée par le conseil pour l'éthique de la recherche et l'intégrité scientifique de l'université Paris-Saclay, mis en place en 2017.

* (255) Il définit l'éthique de la recherche comme « démarche réflexive sur le contexte, les valeurs, les conséquences et les finalités de la recherche scientifique (dimension socio-épistémologique) » dans « Éviter le piège de la normalisation, renforcer les réflexions socio-épistémologiques », Revue française d'éthique appliquée, vol. 5, n° 1, 2018, p. 13-15, en ligne .

* (256) Il définit l'intégrité scientifique comme « démarche qui vise à encadrer d'un point de vue déontologique les « bonnes pratiques » d'une communauté (dimension normative) » dans « Éviter le piège de la normalisation, renforcer les réflexions socio-épistémologiques », Revue française d'éthique appliquée, vol. 5, n° 1, 2018, p. 13-15, en ligne .

* (257) Il définit la responsabilité sociale de la science comme « démarche politique qui vise à caractériser les missions et la vision de la science et de ses acteurs dans une prise de conscience du caractère impliqué de celle-ci (dimension politique) » dans « Éviter le piège de la normalisation, renforcer les réflexions socio-épistémologiques », Revue française d'éthique appliquée, vol. 5, n° 1, 2018, p. 13-15, en ligne .

* (258) Léo Coutellec, « L'éthique de la recherche comme démarche réflexive », POLETHIS, n° 1, janvier 2019, p. 12-13 ; Voir aussi, « Penser l'indissociabilité de l'éthique de la recherche, de l'intégrité scientifique et de la responsabilité sociale des sciences : Clarification conceptuelle, propositions épistémologique », Revue d'anthropologie des connaissances, vol. 13, n° 2, 2019, p. 381-398, en ligne ; « Éviter le piège de la normalisation, renforcer les réflexions socio-épistémologiques », Revue française d'éthique appliquée, vol. 5, n° 1, 2018, p. 13-15, en ligne .

* (259) « Déclaration de Singapour sur l'intégrité en recherche », 2010, en ligne .

* (260) Daniel Fanelli, Rodrigo Costas, & Vincent Larivière, « Misconduct Policies, Academic Culture and Career Stage, Not Gender or Pressures to Publish, Affect Scientific Integrity », PLoS ONE, vol. 10, n° 6, 2015, en ligne .

* (261) Vitae, « Research integrity: a landscape study », juin 2020, en ligne .

* (262) Vitae, « Research integrity: a landscape study », juin 2020, p. 9, en ligne : « The insidious nature of the `pressure to publish' and the associated use of (inappropriate) metrics permeates all levels of the research system ».

* (263) Académie des sciences, « Du bon usage de la bibliométrie pour l'évaluation individuelle des chercheurs », 17 janvier 2011, p. 9, en ligne .

* (264) Académie des sciences, idem., p. 2, en ligne .

* (265) Une enquête de l'INSERM, fin 2018, a révélé que les deux critères présidant parmi les sondés au choix de la revue de publication était basés sur la bibliométrie : à 93 % l'argument du facteur d'impact ; à 96 % la renommée que détient la revue dans le champ disciplinaire . Nathalie Duchange, Aïda Karniguian, & Michel Pohl, « Résultats de l'enquête sur l'accès aux revues scientifiques et l'Open Access », INSERM, novembre 2018, en ligne .

* (266) Le facteur h ou h-index est calculé en classant les publications par ordre décroissant en fonction du nombre de citations auxquelles elles ont donné lieu. Le rang de la publication pour lequel le nombre de citations est égal à ce rang est le facteur h. Ainsi un chercheur ayant un facteur h de 10 a publié 10 articles ayant chacun été cités au moins 10 fois.

* (267) Le facteur g a été introduit par L. Egghe pour raffiner l'indicateur h. Un chercheur aura par exemple un facteur g de 45 si ses 45 articles les plus cités totalisent au moins 2025 citations, c'est à dire g (45) au carré.

* (268) Gemma Conroy, « What's Wrong with the h-index, According to its Inventor », Nature index, 24 mars 2020, en ligne .

* (269) Altmetric est une société de science des données lancée en 2011 qui repère où la recherche publiée est mentionnée en ligne et fournit des outils et des services aux institutions, éditeurs, chercheurs, bailleurs de fonds et autres organisations pour surveiller cette activité, communément appelée « altmetrics ».

* (270) Impacstory, devenu Our Research est un outil en ligne gratuit qui permet de créer un profil de chercheur où et déposer tous types de documents auxquels sont attribués des « altmetrics ».

* (271) Les « mesures d'impact alternatives » ont été développés afin de compléter les indicateurs traditionnels en prenant en compte la visibilité sur internet au travers des réseaux sociaux (notamment partages Twitter et Facebook, référencement sur des blogs, etc.), de la presse ( New York Times , Le Monde , etc.), du nombre de marque-pages sur la base Mendeley , ou encore du nombre de téléchargements sur les plateformes en accès ouvert comme ArXiv ou GitHub . Sébastien Dupré, Marie-Claude Deboin, Cécile Fovet-Rabot, « Se familiariser avec les altmetrics, mesures alternatives d'impact d'une publication, en 6 points », Montpellier, CIRAD, 2016, en ligne .

* (272) Académie des sciences, op. cit., en ligne , p. 22.

* (273) « Déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche (DORA) », 2013, en ligne .

* (274) « Déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche (DORA) », 2013, en ligne .

* (275) Diana Hicks, Paul Wouters, Ludo Waltman, Sarah de Rijcke, & Ismael Rafols, « Manifeste de Leiden pour la mesure de la recherche », Nature, n° 250, p. 429-431, 2015, en ligne . Le manifeste pose 10 principes : 1) La description quantitative doit servir d'appui à une évaluation qualitative par des experts. 2) Mesurer la performance au regard des missions de recherche de l'institution, du groupe ou du chercheur. 3) Protéger l'excellence dans les domaines de recherche importants à l'échelle locale. 4) Maintenir une collecte de données et des processus d'analyse ouverts, transparents et simples. 5) Permettre aux chercheurs évalués de vérifier les données et analyses. 6) Tenir compte des différences entre disciplines en matière de publication et de citation. 7) Baser les évaluations des chercheurs sur un jugement qualitatif de leurs travaux. 8) Éviter les simplifications abusives et les fausses précisions. 9) Reconnaître les impacts systémiques des évaluations et des indicateurs. 10) Réévaluer régulièrement et faire évoluer les indicateurs.

* (276) Audition de Frédérique Claudot, juriste, membre du CoFIS, responsable d'un parcours éthique dans le master santé publique, 4 novembre 2019.

* (277) Audition d'Hervé Maisonneuve, médecin et référent intégrité scientifique de la faculté de Médecine de Paris, 21 octobre 2019.

* (278) Ferric C. Fang & Arturo Casadevall, « Reforming Science: Methodological and Cultural Reforms », Infection and Immunity, février 2012, en ligne .

* (279) Nicolas Chevassus-au-Louis, a rappelé lors de son audition qu'il était essentiel que les autres acteurs, qui ont pris part à la solidité du savoir, soient gratifiés et récompensés, dans le cadre des médailles CNRS ou de l'Académie des sciences.

* (280) Programme de la World Conference on Research Integrity, Hong Kong, Chine, 2-5 juin 2019, en ligne. Les archives sont consultables en ligne : session plénière ; autres sessions .

* (281) David Moher, Lex Bouter, Sabine Kleinert, Paul Glasziou, Mai Har Sham, Virginia Barbour, Anne-Marie Coriat, Nicole Foeger, & Ulrich Dirnagl, « The Hong Kong Principles for Assessing Researchers : Fostering Research Integrity », 17 septembre 2017, en ligne .

* (282) Shane Gero et Maurício Cantor ont ainsi proposé de créer un « R index », qui permette d'attribuer une métrique au peer review : « Review : how the R-index Aims to Improve the Peer-review System by Quantifying Reviewer Contributions », Impact of Social Sciences Blog, 20 mai 2015, en ligne .

* (283) L'étude d'Elsevier & Sense, « Quality, Trust & Peer Review : Researchers' Perspectives 10 years on », (septembre 2019, en ligne , p. 22) montre que 45 % des chercheurs sondés demandent à ce que l'employeur reconnaisse le temps passé à faire du peer review, un chiffre qui s'élève à 58 % dans le cas français.

* (284) Michail Kovanis, Raphaël Porcher, Philippe Ravaud, & Ludovic Trinquart, « The Global Burden of Journal Peer Review in the Biomedical Literature: Strong Imbalance in the Collective Enterprise », PLoS ONE, vol. 11, n° 11, en ligne .

* (285) Publons, « Global State of Peer Review », 2018, en ligne .

* (286) Andrew Preston & Tom Culley, « Formal recognition for peer review will propel research forward », in BioMedCentral and Digital Science, « What might peer review look like in 2030 ? SpotOn Report », avril 2017, en ligne : « To summarize, the system almost exclusively rewards experts for publishing at nearly any cost. The same system then offers no formal incentives to the same experts relied upon to filter out the false, fraudulent or misleading submissions through peer review. [...] There is no silver bullet that will resolve all the issues, but there are simple steps that can be taken to bring balance back to the system. An obvious starting point is to formally recognize and reward peer review efforts so it stands a chance against the disproportionate rewards for publishing. »

* (287) Verity Warne, « Rewarding Reviewers - Sense or Sensibility? A Wiley Study Explained », Learned Publishing, vol. 29, n° 1, 2016, p. 41-50, en ligne .

* (288) Federico Bianchia, Francisco Grimaldob, & Flaminio Squazzoni, « The F3-index. Valuing reviewers for scholarly journals », Journal of Informetrics, vol. 13, n° 1, février 2019, p. 78-86, en ligne .

* (289 ) Alan Finkel, « To Move Research from Quantity to Quality, go Beyond Good Intentions », Nature, n° 566, 19 février 2019, p. 297, en ligne .

* (290) Audition de Laurence Guyard, responsable des relations avec les communautés scientifiques, référente genre et référente intégrité scientifique au sein de l'Agence nationale de la recherche (ANR) ; de Jérôme Ferrand Ammar, chargé de mission auprès de la direction générale de l'ANR, & de Martine Garnier-Rizet, responsable du département numérique et mathématiques de l'ANR, 14 octobre 2019.

* (291) Devang Mehta, « Highlight Negative Results to Improve Science », Nature, 4 octobre 2019, en ligne : « When negative results aren't published in high-impact journals, other scientists can't learn from them and end up repeating failed experiments, leading to a waste of public funds and a delay in genuine progress. ».

* (292) Serge Larivée, « Le côté sombre de la science », Revue de psychoéducation, vol. 46, n° 2, 2017, p. 421-452, en ligne .

* (293) Quentin Gaday, « Face aux “revues prédatrices”, comment cesser d'être des lapins ? », Médecine/Sciences, vol. 35, n° 6-7, juin-juillet 2019, p. 562-563.

* (294) Olivier Gosselain, « La fraude est un produit dérivé de l'excellence », POLETHIS, n° 2, novembre 2019, p. 42-44.

* (295) John Ziker, Kathryn Demps, David Nolin & Matt Genuchi, « Time Allocation Workload Knowledge Study (TAWKS) », octobre 2013, rapport dans John Ziker, « The Long, Lonely Job of Homo Academicus », 31 mars 2014, en ligne . Voir l'article pour la répartition entière de la journée d'un chercheur.

* (296) Audition de Philippe Hinsinger, directeur de la revue Publier la science et biogéochimiste à l'INRA, 16 septembre 2019.

* (297) Hcéres, « Référentiel d'évaluation des unités de recherche. Campagne d'évaluation 2020-2021. Vague B », novembre 2019, en ligne .

* (298) Debora Weber-Wulff, « Plagiarism detectors are a crutch, and a problem », Nature, 27 mars 2019, en ligne : « Academic integrity is a social problem; due diligence cannot be left to unknown algorithms. Keeping science honest depends on scientists willing to work hard to protect the literature. »

* (299) Ibid.

* (300) Parmi les autres bienfaits avancés : améliore la qualité du peer review puisqu'il sera public ; participe à une compréhension toujours plus grande du champ disciplinaire ; consolide la confiance dans la science ; rend plus transparent le fonctionnement des maisons d'édition ; permet, possiblement, aux reviewers de faire valoir cette activité ; donne un exemple vertueux aux autres reviewers ; permet de mieux comprendre comment améliorer un article.

* (301) Tony Ross-Hellauer, Arvid Deppe, & Birgit Schmidt, « Survey on Open Peer Review: Attitudes and Experience amongst Editors, Authors and Reviewers », PLoS ONE, vol. 12, n° 12, 2017, en ligne .

* (302) Le rapport des Académies américaines, publié en 2019, distingue les termes de « reproductibilité » (reproductibility), de celui de « réplicabilité » (replicability). Le premier désigne le fait d'obtenir des résultats persistants quand sont utilisés les mêmes données, étapes de calcul, méthodes, codes et conditions d'analyse (cette définition est synonyme de « reproductibilité informatique »). Le second consiste à obtenir les mêmes résultats dans plusieurs études destinées à répondre à la même interrogation scientifique, chacune utilisant des données différentes, mais parvenant au même résultat. National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine, « Reproducibility and Replicability in Science », Washington DC, The National Academies Press, 2019, en ligne .

* (303) Monya Baker, « 1,500 Scientists Lift the Lid on Reproducibility », Nature, 25 mai 2016, en ligne .

* (304) En 2011, des chercheurs de la firme pharmaceutique Bayer ont tenté de reproduire 67 projets de recherche interne dans le champ de la biologie fondamentale 305 (cancérologie, santé de la femme et cardiovasculaire), dans le but d'identifier des cibles thérapeutiques, avant d'engager des essais chez l'homme. Les 2/3 des résultats des études étaient impossibles à reproduire . Florian Prinz, Thomas Schlange, & Khusru Asadullah, « Believe it or not: how much can we Rely on Published Data on Potential Drug Targets ? », Nature Reviews Drug Discovery, vol. 10, n° 712, 2011, en ligne .

* (306) En 2011, le projet Open Science Collaboration 307 , a cherché à reproduire 100 études en psychologie sociale et cognitive, toutes publiées dans de prestigieux journaux de référence dans le courant de l'année 2008. Seuls 36 % des études reproduites ont données des résultats probants (p < 0,05) . Open Science Collaboration, « Estimating the Reproducibility of Psychological Science », Science, vol. 349, n° 6251, 28 août 2015, en ligne .

* (308) Academy of Medical Sciences, Biotechnology and Biological Sciences Research Council, Medical Research Council, & Wellcome Trust, « Reproducibility and Reliability of Biomedical Research: Improving Research Practice », octobre 2018, en ligne .

* (309) Sven, « Dutch research funder grants 3 million Euros for replication studies », EDaWaX, 2 août 2016, en ligne .

* (310) L'histoire du preprint débute en 1991 lorsque des physiciens mettent en place la platerforme Arxiv afin de communiquer entre eux plus efficacement les résultats de leurs recherches. En 2004, les sciences sociales ont créé une plateforme dédiée, du nom de Social Science Research Network. En 2013, les biologistes ont mis au point leur archive ouverte, Biorxiv, lesquels ont été rejoints par la communauté médicale en 2019, avec Medrxiv. En France, c'est la plateforme HAL (Hyper articles en ligne) qui héberge des articles et des prépublications.

* (311) AllEnvi & AvieSan, « Preprints : une forme recevable de communication scientifique », 2017, en ligne .

* (312) Nicholas Fraser, Liam Brierley, Gautam Dey, Jessica K Polka, Máté Pálfy, Jonathon Alexis Coates, « Preprinting a Pandemic: The Role of Preprints in the COVID-19 Pandemic », preprint, BioRxiv, 23 mai 2020, en ligne . Le nombre de preprint postés sur MedRxiv et BioRxiv a d'ailleurs sensiblement augmenté depuis l'apparition de la Covid-19, atteignant respectivement 9 000 et plus de 2000 preprint sur le sujet en novembre 2020.

* (313) Clarissa F. D. Carneiro, Victor G. S. Queiroz, Thiago C. Moulin, Carlos A. M. Carvalho, Clarissa B. Haas, Danielle Rayêe, David E. Henshall, Evandro A. De-Souza, Felippe E. Amorim, Flávia Z. Boos, Gerson D. Guercio, Igor R. Costa, Karina L. Hajdu, Lieve van Egmond, Martin Modrák, Pedro B. Tan, Richard J. Abdill, Steven J. Burgess, Sylvia F. S. Guerra, Vanessa T. Bortoluzzi, Olavo B. Amaral, « Comparing quality of reporting between preprints and peer-reviewed articles in the biomedical literature », preprint, BioRxiv, 19 mars 2020, en ligne .

* (314) Les « épi-revues » désignent des revues en accès libre, formées à partir d'articles preprints déposés sur des archives ouvertes, lesquels sont évalués et sélectionnés par un comité éditorial.

* (315) La diffusion en Open Access peut se faire selon deux voies : la voie verte ou la voie dorée. La première désigne la diffusion d'un article sur une plateforme d'archives ouvertes, en accès libre et gratuit.

* (316) Ainsi la section 52 du CNRS estime « les articles recommandés par PCI Evol Biol, PCI Ecology et PCI Paleo au même titre qu'un article publié dans une revue scientifique indexée » in CNRS, CID 52, « Motion initiative `Peer Community in' », 2 juillet 2018, en ligne .

* (317) Collectif, « Nous demandons la définition dans la loi de règles garantissant l'honnêteté et la rigueur scientifique », Le Monde, 13 octobre 2020, en ligne .

* (318) Compte rendu de la réunion du CoFIS, 12 octobre 2020, en ligne .

* (319) Les dispositifs de prévention en faveur de l'intégrité scientifique dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, rapport à Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation n° 2020-084.

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