E. L'ESPAGNE : DE NOMBREUSES COOPÉRATIONS

1. Un partenaire incontournable

L'Espagne est l'un des États les plus engagés dans les coopérations européennes de défense. Dans un discours au Parlement européen en janvier 2019, le premier ministre espagnol Pedro Sanchez a appelé à la création d' « une véritable armée européenne », affirmant que « l'Union doit montrer qu'elle est une puissance douce par choix, et non par faiblesse ». Toutefois, la Stratégie nationale de sécurité de 2017 affirme que l'Alliance transatlantique demeure le « fondement de la défense collective européenne ».

De fait, l'Espagne est parmi les premiers États contributeurs en effectifs aux missions et opérations de la politique de sécurité et de défense commune. Elle assure en particulier le commandement de l'opération maritime EUNAVFOR Atalanta depuis le 29 mars 2019 dont elle accueille le quartier général sur la base navale de Rota (Andalousie). Quatre navires espagnols ont participé à cette opération en 2018. Par ailleurs, c'est un général espagnol qui a commandé la mission militaire de formation EUTM Mali en 2018, dans laquelle 1007 soldats espagnols ont été engagés au total en 2018.

L'Espagne soutient les projets de renforcement de la PSDC, notamment la mise en place du Fonds européen de défense ainsi que d'une capacité permanente de planification et de conduite opérationnelle. Elle a enfin été l'un des membres fondateurs de l'Initiative européenne d'intervention , lancée par la France en 2018.

2. Un partenaire tourné vers le Sud

L'Espagne identifie parmi les principales menaces pour son territoire la proximité d'États faillis ou instables où opèrent des groupes armés criminels ou terroristes, ainsi que les déstabilisations engendrées par les flux migratoires illégaux. Elle se positionne en faveur de la prise en compte des défis et menaces pesant sur le flanc Sud de l'Europe par l'OTAN et par l'UE.

L'Espagne porte un intérêt particulier au continuum Méditerranée - Afrique du Nord - Sahel :

- en Méditerranée, la marine espagnole participe activement à l'opération Sea Guardian (401 soldats au total en 2018) et soutient fermement le maintien de l'opération EUNAVFOR Med Sophia à laquelle elle l'est l'un des principaux contributeurs ;

- en Afrique du Nord et au Sahel :

* outre son engagement opérationnel au sein d'EUTM Mali, l'Espagne apporte un soutien logistique, notamment de transport aérien, aux opérations de l'ONU, de l'UE et françaises (Barkhane) depuis ses bases au Gabon et au Sénégal ;

* la marine espagnole collabore étroitement avec les États riverains, ainsi qu'avec l'opération française Corymbe, dans le Golfe de Guinée ;

* dans le cadre d'accords bilatéraux, les forces armées espagnoles opèrent des activités de formation et d'assistance au Cap Vert, au Sénégal, en Mauritanie et depuis 2017, en Tunisie ;

* enfin, l'Espagne participe aux opérations de lutte anti-terroriste en Afghanistan et en Irak aux côtés de l'OTAN.

L'Espagne est par ailleurs engagée dans un bataillon de la présence avancée de l'OTAN en Lettonie ainsi que dans la défense aérienne et anti missile de l'Alliance, en Lituanie, Turquie et Méditerranée. Elle participe enfin aux missions de l'ONU au Liban (FINUL) et en Colombie. En moyenne, 2500 soldats espagnols ont été déployés simultanément en dehors du territoire national en 2018, pour un coût d'1,1 milliard d'euros.

L'Espagne dispose cependant d'un budget militaire limité , estimé à 11,5 milliards d'euros en 2019 soit 0,92% du PIB, dont la remontée a été paralysée par la crise économique de 2008. Le gouvernement a annoncé en janvier 2018 sa volonté de renforcer son effort de défense et de renouveler les équipements et les systèmes d'armes devenus obsolètes. L'effort budgétaire devrait atteindre 1,53% du PIB en 2035. Parmi les chantiers prioritaires, la construction des nouvelles frégates F-110, la mise en service des sous-marins S-80 et l'anticipation du renouvellement des avions de combat.

3. Des coopérations franco-espagnoles

La France reconnait l'Espagne comme un partenaire très proche en matière de défense. Le Conseil franco-espagnol de défense et de sécurité (CFEDS) a été créé en 2006 et se matérialise par différents accords relatifs à la coopération en matière de défense et depuis 2013 par une feuille de route rappelant en particulier l'ambition d'un rapprochement des capacités opérationnelles dans les zones d'intérêt commun (Sahel, Méditerranée, Golfe de Guinée, cf supra) et d'une défense européenne forte. En 2017, les deux gouvernements ont répété leur attachement au renforcement de la PSDC.

L'Espagne et la France mènent par ailleurs des projets capacitaires structurants en commun, notamment le drone européen MALE et la modernisation des hélicoptères d'attaque Tigre. Madrid a décidé en 2018 de l'acquisition de 23 hélicoptères NH90, programme mené au travers d'une coopération entre quatre États européens (France, Italie, Allemagne, Pays-Bas).

En mars 2019, l'Espagne a rejoint le projet franco-allemand de Système de Combat Aérien Futur (SCAF) , dont l'objet est de remplacer les flottes actuelles d'avions de combat à l'horizon 2035. Il pourrait s'agir d'un débouché naturel pour le renouvellement des avions de combat espagnols, notamment les EAV-8B Harrier II. Néanmoins, face à ses contraintes opérationnelles, le gouvernement espagnol n'a pas encore écarté un recours aux F-35 américains.

L'Espagne est un partenaire politique, opérationnel et industriel majeur pour la France, sur lequel nous devons nous appuyer pour faire avancer la défense européenne.