Rapport d'information n° 682 (2017-2018) de Mmes Élisabeth LAMURE , Martine BERTHET , M. Éric JEANSANNETAS , Mmes Anne-Catherine LOISIER et Nelly TOCQUEVILLE , fait au nom de la Délégation aux entreprises, déposé le 19 juillet 2018

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N° 682

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2018

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux entreprises (1) relatif aux rencontres entre la délégation aux entreprises et les entrepreneurs , intervenues au cours de l' année parlementaire 2017 - 2018 ,

Par Mmes Élisabeth LAMURE, Martine BERTHET, M. Éric JEANSANNETAS, Mmes Anne-Catherine LOISIER et Nelly TOCQUEVILLE,

Sénateurs

(1) Cette délégation est composée de : Mme Élisabeth Lamure, présidente ; MM. Gilbert Bouchet, Olivier Cadic, Emmanuel Capus, Fabien Gay, Xavier Iacovelli, Joël Labbé, Mmes Patricia Morhet-Richaud, Nelly Tocqueville, MM. Michel Vaspart, Richard Yung, vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Catherine Fournier, Pascale Gruny, M. Jackie Pierre, secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Guillaume Arnell, Mmes Martine Berthet, Annick Billon, M. Martial Bourquin, Mme Agnès Canayer, M. Michel Canevet, Mmes Anne Chain-Larché, Laurence Cohen, M. René Danesi, Mme Jacky Deromedi, M. Jérôme Durain, Mme Dominique Estrosi Sassone, MM. Michel Forissier, Jean-Marc Gabouty, Éric Jeansannetas, Antoine Karam, Guy-Dominique Kennel, Daniel Laurent, Jacques Le Nay, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Sébastien Meurant, Claude Nougein, Philippe Paul, Rachid Temal, Jean-Louis Tourenne, Mme Sabine Van Heghe.

AVANT-PROPOS

Madame, Monsieur,

Après trois ans d'existence, la délégation sénatoriale aux entreprises a connu son premier renouvellement en octobre 2017, en conséquence du renouvellement du Sénat intervenu à l'issue des élections sénatoriales du 24 septembre 2017. Elle m'a fait l'honneur de me renouveler sa confiance, validant ainsi l'approche pragmatique qui est la marque de fabrique de notre action depuis décembre 2014 : aller au contact direct des entreprises, là où elles sont, pour porter leur voix au Sénat et prendre des initiatives, au service de l'emploi dans les territoires.

C'est pourquoi la délégation a poursuivi ses déplacements de terrain durant l'année parlementaire 2017-2018. Elle s'est rendue dans quatre départements : la Côte-d'Or en décembre 2017, la Savoie en février 2018, la Creuse en mai 2018 et la Seine-Maritime en juin 2018.

De ces rencontres, la délégation est revenue enrichie, à la fois confortée dans ses premières orientations de travail, mobilisée sur de nouvelles problématiques et attentive à la nécessité de valoriser les clés du succès des entreprises qu'elle a pu découvrir.

Plusieurs pistes de travail déjà creusées par la délégation ont trouvé en effet leur confirmation dans ses nouveaux déplacements au fil de cette dernière session parlementaire . D'abord, la mission première de la délégation, « simplifier les normes applicables à l'activité économique » 1 ( * ) , demeure impérative : l'instabilité et la lourdeur normatives restent déplorées par l'ensemble des entreprises. De nouveau, il a été dénoncé le fait que cette situation touche toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, et donc qu'elle pèse proportionnellement plus lourd sur les plus petites d'entre elles, qui n'ont pas les moyens d'assurer une veille législative et d'intégrer les changements permanents. À cet égard, plusieurs ont souligné le rôle déterminant des chambres de commerce et d'industrie, en appui aux PME. La délégation a également découvert qu'une pression administrative accrue pouvait s'exercer dans les départements où l'activité économique est la moins dense : ainsi, dans la Creuse, il est apparu que les contrôles exercés par l'administration fiscale sur les entreprises reviennent à une fréquence plus élevée, en raison d'une population d'entreprises plus réduite dans ce département. Cette année, les entreprises des quatre départements visités ont manifesté une inquiétude renforcée en raison de l'alourdissement de leur fardeau administratif lié aux récentes évolutions : mise en place du bulletin de salaire simplifié, qui est destiné à être plus lisible pour le salarié mais qui complique le travail de l'employeur, tenu d'établir ce bulletin simplifié mais aussi et toujours la version détaillée de toutes ses lignes lesquelles n'ont connu en réalité aucune simplification ; modalités retenues pour la mise en oeuvre du prélèvement de l'impôt à la source qui feront, dès le 1 er janvier prochain, reposer la collecte de l'impôt sur le revenu des salariés sur les entreprises ; entrée en vigueur, au 25 mai 2018, du règlement général de la protection des données qui emporte de nouvelles obligations pour les entreprises envers les données personnelles de leurs clients. Tout ceci doit encourager la délégation à poursuivre son action en faveur de la simplification normative pour les entreprises 2 ( * ) .

Corollaire de cette problématique, la surtransposition des normes européennes en droit français est encore apparue comme un frein à la compétitivité des entreprises nationales : le préjudice économique subi en raison des valeurs limites d'exposition professionnelle au chrome hexavalent et aux poussières de bois, particulièrement exigeantes en France, de la règlementation nationale en matière de déclaration de bénéficiaires effectifs, et du niveau national du plafond d'exposition aux composants organiques volatils ont été dénoncés par les entreprises, respectivement en Côte-d'Or, Savoie et Seine-Maritime. La délégation a justement entrepris de recenser les cas de surtransposition et de faire observer leur impact sur la compétitivité dans un récent rapport 3 ( * ) , établi en commun avec la commission des affaires européennes du Sénat.

Les difficultés de la transmission d'entreprise , qui ont donné lieu à l'adoption, par la délégation, d'un rapport d'information 4 ( * ) suivi du dépôt d'une proposition de loi 5 ( * ) , ont à nouveau été exprimées lors des déplacements de l'année, particulièrement en Savoie et en Seine-Maritime. L'attention de la délégation a notamment été attirée sur deux situations particulièrement délicates en cette matière : celle des stations de ski, où le prix très élevé de l'immobilier implique une fiscalisation très lourde au moment de la transmission, ce qui complique particulièrement la transmission des hôtels ; et celle de la presse indépendante, dont la survie est menacée par les clauses de cession applicables dans le secteur du journalisme (le repreneur se trouvant ponctionné par les nombreux mois de salaires auxquels peut prétendre un journaliste en cas de cession du journal qui l'emploie).

La nécessité de développer la formation en alternance, et particulièrement l'apprentissage , sujet sur lequel la délégation a entrepris de travailler quasiment dès sa création jusqu'au dépôt d'une proposition de loi 6 ( * ) , a encore été démontrée par les derniers déplacements de la délégation. Les difficultés de recrutement sont particulièrement aigües dans un département comme la Creuse qui souffre d'un défaut d'attractivité : Pôle emploi lui-même en est victime sur ce territoire. Mais les entreprises s'en plaignent aussi dans des départements comme la Seine-Maritime, la Savoie ou la Côte-d'Or. Dans ces départements, ce sont surtout les entreprises dont l'activité requiert une maîtrise technique particulière qui en pâtissent : la chaudronnerie en Seine-Maritime, la mécanique (par exemple au service de la réparation d'hélicoptères chez SAF) ou la métallurgie (comme en a témoigné Ugitech) en Savoie ou autour de de la Metal'Valley à Montbard en Côte-d'Or... Mais les déplacements de cette année parlementaire ont offert à la délégation l'occasion de connaître plusieurs actions remarquables entreprises localement pour remédier à la situation : ainsi, en Savoie, le projet de double diplôme licence/CAP mené par l'Université Savoie/Mont-Blanc contribue au rapprochement souhaitable entre le monde de l'éducation et celui de l'entreprise ; à Montbard, la délégation a observé une synergie remarquable autour du lycée professionnel, pour le plus grand bénéfice réciproque des entreprises et des jeunes. Ce succès repose sur un maillage du bassin d'emplois au plus près des besoins des entreprises pour mieux y répondre, sur un décloisonnement entre CAP, lycée professionnel et GRETA, et sur la mobilisation de tous les acteurs concernés (Éducation nationale, entreprises, mission locale, bailleurs sociaux pour le logement, élus locaux...). Au-delà de la pénurie de compétences imputable aux modalités de formation et à la place de l'alternance, les entreprises dénoncent aussi d'autres obstacles à l'adéquation entre l'offre et la demande d'emplois, aux niveaux local comme national : le manque de savoir-être des candidats à l'emploi, le niveau de l'allocation-chômage qui n'incite pas à la reprise d'emploi... Autant de sujets dont l'examen actuel du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel donne au Parlement l'occasion de débattre.

Si les déplacements qu'elle a effectués cette année ont confirmé la délégation dans les pistes de travail qu'elle a déjà retenues, ils lui ont aussi permis d'identifier des points de blocage pour la croissance des entreprises, points qui méritent une attention accrue.

Le premier concerne le financement des PME : d'une part, leur trésorerie semble à nouveau souffrir des délais de paiement, après les avancées qu'avait permises en ce domaine la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008. En Savoie, en Seine-Maritime comme en Creuse, plusieurs entreprises ont dénoncé l'allongement de ces délais de paiement et jugé que la législation était trop favorable au mauvais payeur. Les acheteurs publics sont trop souvent désignés comme fautifs, certaines collectivités territoriales payant à 18 mois selon les témoignages d'entreprises savoyardes. D'autre part, s'agissant du financement de la croissance de l'entreprise, les banques, auxquelles il est déjà reproché de réserver les jours de valeur à l'encaissement des crédits et de ne pas en appliquer au décaissement des débits, sont accusées d'être excessivement frileuses dans l'octroi de crédits aux entreprises. En outre, l'investissement direct dans les PME se trouve fragilisé depuis la suppression de l'ISF et, par-là, du dispositif ISF-PME : l'association des business angels de la Savoie, représentée à la table ronde des entrepreneurs rencontrés à Chambéry par la délégation, a fait valoir que cet investissement, en plus d'être risqué, est peu liquide, ce qui justifie qu'il bénéficie d'un dispositif spécifique de soutien. Le simple aménagement du dispositif IR-PME adopté en loi de finances pour 2018 n'y suffit pas et ce sujet important doit rester un point de vigilance pour la délégation aux entreprises.

Un deuxième défi stratégique mérite l'attention de la délégation : l'aménagement du territoire, élément clé pour le développement des entreprises . Le déplacement en Creuse, sans même tenir compte des complications spécifiques rencontrées le jour où il a eu lieu en raison du mouvement de grève nationale à la SCNF, a donné concrètement à la délégation l'opportunité de voir combien la qualité des réseaux, en matière de routes, de rail comme de très haut débit, conditionne le potentiel de croissance des entreprises. Le manque d'infrastructures et l'éloignement entraînent des surcoûts pour les entreprises creusoises, qui peinent à contracter avec des agences d'entretien, de maintenance ou de surveillance. La médiocre qualité de la desserte ferroviaire de la Seine-Maritime constitue également un handicap majeur pour les entreprises de ce département. A contrario , le pôle métallurgique qui s'est cristallisé à Montbard en Côte-d'Or, ville qui bénéficie d'une gare TGV alors qu'elle compte 5 300 habitants, et le foisonnement d'entreprises au technopole de Savoie Technolac, opportunément situé au carrefour de grands axes routiers, illustrent l'importance de ces infrastructures pour le développement économique. Le désenclavement physique et numérique des zones rurales reste un objectif essentiel. Certes, le représentant du préfet en charge du projet pilote de revitalisation du bassin d'emplois de la Creuse, mis en place après la fermeture de GM&S, a indiqué à la délégation que, selon lui, une gare TGV, une autoroute ou même un grand projet ne résoudrait pas tout et qu'il travaillait à accompagner une dynamique qui vienne du territoire, en favorisant l'éclosion de multiples petits projets. La délégation ne doit toutefois pas perdre de vue l'enjeu que représentent, pour les entreprises, les aménagements qui structurent les territoires.

Un troisième sujet de préoccupation pourrait également mobiliser utilement la délégation : les entraves réglementaires qui freinent la transformation économique liée à la transition énergétique . Plusieurs entreprises en ont fait état : en Savoie particulièrement, deux d'entre elles ont témoigné de freins réglementaires au développement de leur activité qui contribue pourtant à une optimisation des ressources énergétiques.

L'une, Gaseo, produit de l'énergie propre -biométhane, électricité-, à partir de biogaz venant soit de méthaniers agricoles, soit de stations d'épuration, soit de centres d'enfouissement de déchets. À chaque type de biogaz correspond un tarif de rachat de l'électricité, fixé par arrêté ministériel et actualisé régulièrement. Gaseo déplore que seul le tarif de rachat du biogaz issu de déchets d'enfouissement n'ait pas été renouvelé au motif que, selon la réglementation européenne, l'électricité produite à partir d'un biogaz (fatal) issu de déchets ne serait pas verte, alors même que le biométhane produit à partir de ce biogaz est considéré comme vert. Cette difficulté réglementaire a stoppé brutalement un pan essentiel de l'activité de Gaseo qui y avait investi près de 7 millions d'euros. De surcroît, chaque biogaz ne pouvant, pour des raisons de qualité, être transformé en biométhane, le biogaz non transformé est envoyé en torchère, ce qui génère une augmentation massive de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour les collectivités et pour les contribuables, la loi obligeant à valoriser le biogaz sous peine de pénalité de TGAP.

L'autre, Energy Pool, a développé des logiciels qui optimisent la consommation électrique grâce à une gestion intelligente de l'énergie. Pour parer à une pénurie d'électricité, les clients industriels électro-intensifs, ayant contracté sur le long terme avec Energy pool pour stabiliser leur approvisionnement électrique à des prix intéressants, sont invités à réduire leur consommation, selon une procédure dite d'« effacement », ce qui évite de devoir accroître la production électrique dans ces circonstances : ceci permet d'importantes économies financières et limite les émissions de CO2, puisque les centrales thermiques fortement polluantes servent traditionnellement de variable d'ajustement. Or ce ne sont que 100 heures par an, en hiver, durant lesquelles l'électricité fait défaut en France pour satisfaire la consommation : une meilleure gestion du réseau d'électricité permettrait de mieux rentabiliser ses capacités et d'abaisser ainsi le coût de l'électricité, au bénéfice de la compétitivité de nos entreprises. Mais la multiplicité des acteurs publics en charge de ce secteur empêche une véritable refonte du système électrique en ce sens. En Côte-d'Or et en Seine-Maritime, c'est le défaut de soutien public au recyclage du bois qui a été souvent regretté, alors même que la filière bois offre un potentiel important de projets d'économie circulaire comme celui que la délégation a pu découvrir dans le Morvan, à La Roche-en-Brenil. Les Allemands sont à cet égard beaucoup plus en avance et développent une industrie et une chimie autour du bois, lesquelles peinent à émerger en France alors même que notre pays dispose de ressources exceptionnelles en bois d'essences variées.

Les déplacements effectués cette année par la délégation ont aussi été l'occasion pour elle de visiter de très belles entreprises et ainsi d'identifier les facteurs de leur succès , qu'il convient de valoriser autant que possible.

Le premier atout sur lequel repose le succès de plusieurs des entreprises visitées est assurément l'adéquation entre la matière première de l'entreprise et son territoire. Ainsi, les entreprises de la filière bois rencontrées en Côte-d'Or développent une industrie autour de la ressource en bois abondante du Morvan, soutenues par l'engagement des élus locaux et la réalisation d'un pôle d'excellence rurale, quand d'autres territoires pourvus également en bois, comme le Limousin, ne semblent pas assez miser sur cette ressource locale: ainsi, notre collègue de la délégation élu de la Haute-Vienne a observé que l'industrie du bois de seconde transformation faisait défaut en France et que le bois exporté depuis le Limousin y revenait sous forme de cuisines sur-mesure. Dans la Creuse également, la croissance de Microplan s'est d'abord adossée sur l'abondance de roches granitiques à proximité : son activité, d'abord consacrée à la fabrication de pavés de rue, a évolué vers la métrologie, la science de la mesure, grâce à la fabrication de blocs de granits de grandes dimensions parfaitement plans, pour les appareils de mesure ou de production de très haute précision. Cette montée en puissance, à partir d'une ressource locale, permet aujourd'hui à Microplan de compter parmi ses clients des grands noms comme Nikon, Apple, EADS ou Safran et de grands centres de recherche comme le CERN ou le CEA de Saclay. C'est également en prenant appui sur la spécialisation de la Seine-Maritime dans la culture du lin -on y trouve le tiers des 60 000 hectares de lin cultivés dans l'hexagone- qu'Eco-Technilin s'est développée pour devenir l'un des principaux acteurs européens de la fabrication de produits non tissés à base de fibres naturelles (essentiellement à destination du secteur automobile). De même, le succès mondial rencontré par POMA, leader du transport par câble, s'est construit au pied des Alpes, les stations de la Tarentaise servant de territoire d'expérimentation et de vitrine à son savoir-faire. L'ancrage territorial de ces entreprises apparaît donc comme un élément décisif de leur succès.

La délégation a aussi pu constater que les entreprises florissantes sont le plus souvent celles qui exportent le plus : plusieurs des entreprises qu'elle a visitées font plus de la moitié de leur chiffre d'affaires à l'export: 60 % pour Microplan, 70 % pour Eco-Technilin, 75 % pour POMA, 90 % pour AMN voire plus encore pour Valinox nucléaire, leader mondial de tubes critiques pour les générateurs de vapeur des centrales nucléaires. Pour rester concurrentielles, elles ont besoin de disposer d'armes égales et réclament une plus grande souplesse dans le recours aux heures supplémentaires ou au travail dominical -particulièrement chez POMA-. Plusieurs ont aussi passé le cap de l'internationalisation : AMN a développé depuis vingt ans une filiale commerciale au Texas et Eco-Technilin a investi dans une usine en Pologne. Le cas de Nutriset, visitée en Seine-Maritime, est particulier. La société exporte 100 % de sa production, puisque celle-ci est dédiée à la prévention et au traitement de la malnutrition dans les pays en développement, mais elle crée aussi des emplois dans les pays où ses produits sont utilisés : un réseau de fabricants locaux de ces produits s'est ainsi constitué dans une dizaine de pays, surtout en Afrique. Cette valorisation des filières agricoles locales a déjà permis la création de 600 emplois directs et encore plus d'emplois indirects. Le rayonnement de ces entreprises sur les marchés extérieurs est à la fois la résultante et le socle de leur succès national. C'est précisément sur ce sujet que la chambre de commerce et d'industrie de Savoie a tenu à attirer l'attention de la délégation lors de la table ronde qui s'est tenue à Chambéry : constatant que seules 100 000 entreprises sur les 4 millions que compte notre pays exportent, son président a estimé que ces piètres performances de nos entreprises à l'export tenaient largement au poids administratif qui pèse sur elles et que cette situation requérait un accompagnement de la part des grands groupes et une diplomatie économique plus active.

Enfin, le point commun que la délégation relève comme décisif dans le succès des entreprises qu'elle a pu rencontrer cette année est assurément leur investissement dans l'innovation et la qualité : par exemple, le dirigeant de Nutriset a indiqué que le coeur de l'entreprise était la recherche, avant la production. Nutriset a effectivement déposé plus de 50 brevets et noué plus de 60 partenariats de recherche dans le monde. L'entreprise AMN, en Seine-Maritime également, est même née d'une innovation qui a permis d'associer des matériaux tels que l'inox et le carbure de tungstène pour développer des outils haut de gamme de découpe du plastique en granulés. La capacité d'innovation d'Eco-Technilin est également au coeur de sa croissance : l'entreprise a mis au point un filtre en lin capable de retenir les métaux lourds dans l'eau sur les chantiers de bâtiment ou de génie civil. En Côte-d'Or, l'entreprise allemande JRS se distingue par une croissance annuelle de 20 %, qui se nourrit de ses recherches sur les fonctions liées aux fibres de bois, réalisées dans ses 7 centres de R&D à travers le monde. À une autre échelle, Valinox, en Côte-d'Or, obéit également à cette exigence de se maintenir à la pointe, dans ses processus de fabrication pour garantir le meilleur niveau de sûreté des réacteurs nucléaires, au meilleur coût. Microplan, en Creuse, innove également en continu et travaille aujourd'hui sur la céramique, matériau deux fois plus stable que l'acier et cinq fois plus rigide que le granit. Dans le même département, Atulam et TIGR ont également connu leur essor grâce à des innovations: la réalisation, avec des outils industriels, de fenêtres sur mesure déjà enduites d'une peinture de haute qualité pour l'une, la diversification vers de nouveaux types de chaudières (mixtes gaz/solaires, thermiques au biogaz ou aux granulés de bois) pour l'autre, en réponse aux évolutions du marché vers de nouvelles énergies. Enfin, la Savoie en a également apporté l'illustration : l'activité de pointe développée par Energy Pool et les nombreuses innovations autour du numérique et de l'impression 3D présentées par les startups en incubation ou en accélération à Savoie Technolac sont autant de confirmations du rôle primordial de l'innovation dans le succès des entreprises.

Les rencontres effectuées cette année aux quatre coins de la France par la délégation renouvelée ont donc été éminemment fructueuses, lui permettant de confirmer le bien-fondé de ses pistes de travail, de lui en ouvrir d'autres et de la mobiliser pour encourager les clés identifiées du succès. Autant d'éléments précieux pour la délégation lorsqu'elle se penchera sur le projet de loi portant plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) qui devrait être soumis en octobre à l'examen du Sénat.

Élisabeth LAMURE,

Présidente de la Délégation aux entreprises

COMPTES RENDUS DES DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS PAR LA DÉLÉGATION AUX ENTREPRISES

A. COMPTE RENDU DE LA RÉUNION DU 18 JANVIER 2018, SUITE AU DÉPLACEMENT EN CÔTE-D'OR LE 15 DÉCEMBRE 2017

Mme Anne-Catherine Loisier . -Mes chers collègues, je suis très heureuse que la délégation aux entreprises ait accepté mon invitation à venir en Côte-d'Or pour découvrir, au-delà de ses vignes et de sa gastronomie, son tissu industriel très présent et la variété de ses entreprises. Je remercie particulièrement la présidente et tous mes collègues qui étaient présents : Michel Canevet, Dominique Estrosi-Sassone, Sébastien Meurant et Patricia Morhet-Richaud.

Notre journée était organisée autour de trois temps principaux : un premier consacré à Valinox Nucléaire, une filiale de Vallourec ; le deuxième aux entreprises du bassin de Montbard dans le cadre du lycée professionnel ; et puis un troisième qui n'apparaît pas dans le reportage mais qui est important et mérite d'être davantage connu et qui est celui de la filière bois, la Côte-d'Or étant le quatrième département boisé de France et abritent une filière bois -à la fois résineux et feuillus- très importante.

Tout d'abord quelques mots sur le groupe Vallourec, producteur de tubes pour le secteur de l'énergie et de l'industrie, qui emploie 19 000 collaborateurs, dont presque la moitié en Europe et un tiers en Amérique du Sud. Son chiffre d'affaires est de 3 milliards d'euros, il se fait essentiellement à l'étranger : 35 % en Amérique, 30 % en Asie, 20 % en Europe et 15 % en Afrique. Le groupe a traversé une passe difficile que l'on peut comprendre mais il est aujourd'hui en train de se redresser. Il compte 50 sites de production dans plus de 20 pays. À Montbard, nous avons rencontré le directeur du site et le président de Valinox. Depuis 40 ans, cette entreprise fabrique des tubes en alliage de nickel, sans soudure, qui participent au fonctionnement de la moitié des centrales nucléaires aujourd'hui en fonctionnement. Valinox est d'ailleurs membre du pôle de compétitivité Nuclear Valley. Ses produits sont dits « critiques » car ils sont à l'interface entre le circuit primaire et le circuit secondaire des générateurs de vapeur. Valinox est un leader mondial, dans cette industrie de pointe où ses concurrents sont essentiellement finlandais, japonais et chinois. L'outil industriel que nous avons pu découvrir permet l'extrusion à chaud de l'acier, puis le laminage à froid des tubes, à plusieurs reprises. Les installations sont assez impressionnantes : elles couvrent une surface de 13 000 m2 car les tubes sont de très grandes dimensions. Ils sont ensuite cintrés et contrôlés à chaque étape, la précision et la délicatesse du processus allant jusqu'à équiper les ouvriers de gants blancs. Valinox, comme l'ensemble de la filière nucléaire française, doit relever le défi de la concurrence mondiale en réduisant les coûts tout en garantissant le meilleur niveau de sûreté. Le président Stéphane Jeanneteau, qui nous a accueillis, a insisté sur le contexte dans lequel évolue aujourd'hui Valinox, et la nécessité de rester compétitif pour garder un certain volume de production. Il a profité de notre présence pour rappeler aux pouvoirs publics la forte concurrence à laquelle est soumise l'entreprise et la nécessaire « protection » de certains marchés, afin que l'industrie française puisse préserver son savoir-faire.

L'usine que nous avons visitée a commencé à produire en 2011, après avoir nécessité 80 millions d'euros d'investissement ; elle emploie aujourd'hui 250 personnes. L'année 2018, compte tenu du contexte du nucléaire, s'annonce difficile pour cette entreprise, néanmoins les perspectives sont bonnes, notamment grâce au projet Hinckley point d'EDF et à la poursuite du revamping du parc français. Il y a aussi quelques perspectives de débouchés canadiens et peut-être même indiens. Aujourd'hui, Vanilox cherche bien évidemment à se diversifier, notamment dans l'énergie renouvelable, à travers les centrales nucléaires à concentration solaire.

L'usine s'est installée à Montbard, ville d'origine médiévale qui compte 5 500 habitants et bénéficie d'une desserte par le TGV ce qui est précieux et irrigue le territoire. Il faut dire que la zone industrielle est particulièrement importante à Montbard, compte tenu notamment de cet arrêt TGV qui permet à la ville de se situer à moins d'une heure de Paris. Ce territoire est héritier d'une longue tradition de métallurgie ouvrière : elle regroupe neuf entreprises métallurgiques dont Valinox au sein d'une association appelée Metal'Valley.

L'objectif à Montbard est ainsi de faire correspondre les besoins en recrutement de ces entreprises et la formation des demandeurs d'emploi dans le cadre d'initiatives qui ont été déployées autour du lycée professionnel. Nous y avons été très bien accueillis par un proviseur très impliqué dans ses fonctions et vraiment à l'écoute à la fois des jeunes et des entreprises. Il cherche à recréer un lien de confiance entre les jeunes et l'école, et à donner aux jeunes les clés pour être employables dans un monde professionnel où ils seront appelés à changer de métier et à évoluer. Il a mis en place un maillage territorial au plus près des entreprises avec lesquelles il a des rapports réguliers et il a notamment mis en place deux pôles de formations qui sont assez singuliers : en maroquinerie et en maintenance industrielle. Nous avons visité ces ateliers avec des jeunes particulièrement épanouis et qui avaient l'air vraiment heureux dans leur formation.

En maroquinerie, le lycée propose un CAP -en deux ans pour les apprentis, et en un an pour les adultes- ainsi qu'une seconde professionnelle. Les trois branches débouchent sur des classes de 1 ère et de Terminale Pro en Métiers du cuir.

Il a mis en place cette formation dans le cadre d'un partenariat avec l'entreprise de maroquinerie Thomas qui travaille beaucoup de produits de luxe avec des grandes marques. C'est aussi satisfaisant pour nous, parlementaires, de savoir que ces grandes marques sont bel et bien fabriquées en France. Les représentants de l'entreprise étaient présents lors de notre visite pour témoigner du bénéfice qu'ils tiraient de ce partenariat. Auparavant, cette entreprise avait des difficultés pour recruter des jeunes et avaient souvent à faire à des jeunes ayant suivi des formations autour de l'esthétique, de la coiffure, ou bien d'autres choses très éloignées de la maroquinerie. Ils devaient acquérir à la fois l'habileté manuelle et apprendre à s'adapter à l'environnement industriel de cette entreprise. Aujourd'hui, grâce au partenariat de long terme qui a été mis en place avec le lycée professionnel, cette entreprise recrute chaque année les douze apprentis issus de ce lycée. De plus, comme l'a évoqué le proviseur, les trois quarts de ces jeunes viennent de plus loin que du bassin de Montbard, ce qui illustre bien l'attractivité dont jouit cette formation.

Le lycée propose aussi des formations industrielles, qui commencent par la découverte de différents métiers : chaudronnerie, maintenance industrielle, numérique et électrotechnique, afin d'éveiller les jeunes à des filières méconnues. Une formation post-bac a été ouverte en 2013 qui offre une mention complémentaire d'agent en contrôle non destructif (MCACND) pour contrôler la qualité des tubes produits dans le bassin d'emplois. Cela répond à un besoin singulier en technologies de contrôle exprimé par les entreprises de la Metal Valley. La grande réactivité et le dialogue qu'a réussi à instaurer cet établissement avec les entreprises du bassin est donc vraiment à souligner.

Les adultes en formation continue au GRETA peuvent aussi bénéficier de l'ensemble de ces dispositifs.

C'est donc un bel exemple de synergie entre des acteurs de l'enseignement attentifs et réactifs et des entreprises qui font confiance et travaillent sur les contenus avec les enseignants. Ces enseignants sont particulièrement impliqués dans la construction d'une orientation réussie et accompagnent les jeunes dans tous leurs projets, la rédaction de leurs CV etc. La Mission locale est également associée pour être au plus près des besoins de ces jeunes : elle organise aussi en parallèle des Job dating qui mobilisent les entreprises du territoire. Les bailleurs sociaux contribuent également, en proposant des logements proches de l'entreprise pour ces jeunes qui viennent souvent d'assez loin.

Cette démarche fonctionne bien, largement soutenue par Madame le maire de Montbard et la municipalité, mais aussi par les élus locaux, et la région compétente dans ce domaine. Elle trouve également un prolongement auprès du club des entrepreneurs de l'Auxois qui a mis en place en amont une initiative à destination des plus jeunes avec sa commission école-entreprise. Ils interviennent dans les collèges pour expliquer les métiers d'une manière simple : à partir d'un stylo, ils détaillent l'ensemble des entreprises et des emplois mobilisés pour sa fabrication. Ils ont regretté la persistance de quelques entraves, certaines déjà connues de notre délégation: le manque d'attractivité et de promotion de l'apprentissage notamment au sein de la formation initiale et des collèges, qui freine le recrutement du lycée professionnel ; ensuite, les freins réglementaires. Par exemple, l'interdiction d'embauche pour les mineurs complique l'accès à l'emploi, de même que les limites imposées en matière d'horaires ou d'activités réputées dangereuses. Le lycée envisage aujourd'hui des missions industrielles à l'intérieur du lycée, sur des machines correspondant à celles utilisées en entreprise, pour permettre l'immersion des jeunes et essayer de dépasser ces problèmes de mises en situation au sein des entreprises.

Après cette découverte de l'écosystème construit autour du lycée professionnel, nous avons pu échanger avec des entreprises du bassin de Montbard et notamment le président de l'association Métal Valley. Il a insisté sur les difficultés liées à la surtransposition en matière environnementale, sanitaire ou sécuritaire. Il a donné comme exemple le plafond d'exposition au chrome 6 qui a été divisé par 50 en France depuis 3 ans et abaissé à 1 microgramme, ce qui constitue la marge d'erreur ! Cette règlementation pour laquelle son entreprise doit investir 1 million d'euros uniquement pour se mettre en conformité est sans plus-value... or le seuil est à 5 en Allemagne, Suède et Espagne. La production de tubes en acier a été divisée par 4 en dix ans en France : les entreprises savent qu'elles ont une part de responsabilité puisque c'est à elles d'investir dans l'innovation, dans l'adaptation, mais la surtransposition est malheureusement à l'origine de beaucoup de difficultés et de cessations d'activité. D'autres entreprises ont insisté sur des problématiques du même ordre, par exemple pour la filière bois, la règlementation de l'aspiration des poussières de bois en France est là encore beaucoup plus exigeante que les normes européennes. Cela induit des surcoûts de production et des surcoûts de facture énergétique.

Deuxième sujet bien connu aussi de l'ensemble des acteurs publics et qui a encore une fois émergé : la lourdeur et l'inconstance des obligations administratives. Les entreprises se sentent souvent seules et étouffées sous les règles et les contrôles qui leur sont imposés. Et elles soulignent le fait que les plus petites entreprises ont les plus grandes difficultés à réaliser ne serait-ce que la veille réglementaire, d'où l'importance de tous les partenaires intermédiaires et notamment les chambres de commerce et d'industrie qui accompagnent les chefs d'entreprises. Des entreprises du secteur de la pierre, qui est très présent aussi en Bourgogne, mais aussi de la menuiserie ont exprimé leur saturation à l'égard des tracasseries administratives. Plusieurs chefs d'entreprises ont enfin dénoncé de nombreuses difficultés dans la mise en place du prélèvement à la source. Ils estiment qu'il appartient à chacun de faire son travail : à l'État de collecter l'impôt, et aux entreprises de se concentrer sur leur production pour résister à la concurrence internationale.

D'autres sujets d'inquiétude ont été dénoncés : l'accès au très haut débit, les difficultés persistantes de recrutement malgré les efforts des établissements d'enseignement, et pour les entreprises de la Metal Valley, ce qu'elles ont appelé  le « radicalisme » en matière de transition énergétique. Dans le cadre de leur activité, pour chauffer les tubes qu'elles produisent, elles utilisent et brûlent du gaz. Elles n'ont pas de possibilité de faire autrement, même avec des énergies renouvelables, puisque l'intermittence des énergies renouvelables ne les rend pas suffisamment fiables pour assumer leurs transformations dans de bonnes conditions.

Dans un second temps, nous nous sommes rendus dans la partie la plus forestière de la Côte-d'Or, le Morvan, pour y découvrir un pôle d'excellence rurale qui a été porté par une petite communauté de communes. Il s'agit d'un éco-pôle bois. Cette petite communauté de communes a réalisé en 2008 cette zone industrielle de 35 hectares consacrée à la transformation du bois, selon un principe d'économie circulaire. On y trouve d'abord une scierie qui réalise la première transformation de résineux : s'est ensuite installée une entreprise allemande, JRS, qui réutilise les produits connexes de cette scierie pour faire des pellets et souhaite développer à moyen terme des activités ou des produits autour de la fibre de bois. La matière première très présente sur ce territoire est donc mise à profit dans l'instauration d'une plateforme industrielle avec des entreprises qui se complètent, et qui permettent son usage circulaire et optimisé.

La scierie Fruytier est la deuxième plus grosse scierie de résineux en Bourgogne : il y a une immense tension sur le résineux aujourd'hui puisque c'est essentiellement le bois utilisé dans la construction. C'est une entreprise qui a une longue histoire, qui remonte à plus de 70 ans, et qui emploie 600 salariés dans plusieurs pays, en France, en Belgique et en Allemagne. Ses sites industriels occupent des surfaces très importantes, près 150 hectares ce qui correspond à 300 terrains de football ! Ils sont installées à La Roche-en Brenil depuis cinq ans et y emploient 95 personnes. Le site comprend une unité de découpe, deux lignes de sciage automatique qui déploient des outils assez performants - notamment des canters - qui optimisent le matériau pour qu'il y ait le moins de déchets possible, avec en plus un grand séchoir puisqu'aujourd'hui les demandes portent davantage sur des produits séchés. C'est une scierie dont l'objectif d'approvisionnement est de produire 500 000 m3 par an, ce qui est très important, pour alimenter toute la filière (planches et plaquettes pour le bricolage et la construction, sciures pour le chauffage et les pellets, etc.). L'intérêt de ces démarches industrielles est l'adéquation entre le territoire et la matière première. Aujourd'hui l'enjeu pour le Morvan et cette entreprise est de développer des capacités de sciage sur des grumes plus grosses. Ne pas avoir de production de bois alignés et du même diamètre permet de répondre aux enjeux environnementaux de bonne gestion et de lutte contre les tempêtes : plus il y a de diversification dans un peuplement forestier, plus le bois va résister à la tempête. Ceci est un enjeu majeur à l'échelle de la France car nous n'avons pas beaucoup de scieries de gros bois et on sait que cette ressource va devenir stratégique.

La société Brenil Pellets est installée juste à côté de la scierie et en recycle les déchets pour fabriquer des pellets. L'entreprise JRS est leader sur le marché des pellets mais aussi de la fibre de bois pour tout ce qui est litière animale. C'est une société allemande qui développe beaucoup l'innovation et la recherche. Il s'agit d'une société familiale (Rettenmaier) qui remonte à 1878 et affiche une croissance de 20 % par an - il s'agit en effet d'un marché très porteur - et ouvre deux nouveaux sites chaque année. Elle compte sept centres de R&D et emploie 2 500 employés dans le monde. JRS identifie des fonctions qui sont liées à la fibre naturelle (absorption, abrasion, compactage, isolation). Elle développe à partir de là des produits variés (poudre de cellulose, fibres de bois, copeaux de fumage, ...), qui trouvent des applications en pharmacie, dans le secteur alimentaire, ou encore pour la filtration. La fibre de bois peut également entrer dans la fabrication du plastique, de l'amiante, des plaquettes de frein, des peintures, des litières ou dans la construction de routes... Il s'agit réellement d'une entreprise à haute valeur ajoutée qui illustre le type d'entreprises high tech qui peuvent se développer autour de la ressource en bois.

JRS a ouvert le site de l'éco-pôle en acquérant 9 hectares de terrain. Ce site, qui fait aujourd'hui vivre 43 emplois directs, mais davantage dans un avenir proche, permet à JRS de se rapprocher du client et du fournisseur : les déchets de Fruytier sont sa matière première, et la biomasse sert à chauffer l'ensemble de ses bâtiments, dont ceux de production. Il s'agit d'une démarche très écologique.

Le projet a été finalisé en juin 2013 et a mobilisé 35 millions d'euros, avec une production qui vient tout juste de démarrer. C'était donc un challenge intéressant pour la communauté de communes qui a créé cette zone d'activité en 2008. Aujourd'hui en 2018, tous les terrains sont vendus et toutes les entreprises fonctionnent, malgré la crise économique mondiale et les tensions passées par là. Cela est vraisemblablement dû au secteur où coexistent la matière première d'une part et l'écosystème de développement des entreprises d'autre part.

Merci encore à la délégation de s'être penchée un peu plus sur la Côte-d'Or dont j'avais à coeur de montrer un autre visage et les perspectives de développement industriel. Je vous remercie.

Mme Élisabeth Lamure , présidente de la Délégation aux entreprises . - Merci beaucoup d'avoir très bien organisé cette journée et de nous en avoir fait un compte-rendu très complet. Chaque fois que la délégation se déplace dans un département, nous avons toujours de belles surprises en découvrant des entreprises méconnues mais souvent de pointe. Cette fois-ci, en Côte-d'Or, nous avons vu deux facettes : l'entreprise très traditionnelle autour du bois, la scierie, qui a beaucoup évolué, et aussi Valinox qui travaille des matériaux propres à servir l'industrie nucléaire. Les deux étaient très intéressants avec la jonction au milieu de journée dans ce lycée qui nous a énormément surpris dans le bon sens du terme. Nous avons pu voir à quel point il peut y avoir une belle entente entre l'entreprise et l'école, et combien cela donne à tous d'excellents débouchés. Voilà, je vais laisser la parole à ceux qui souhaitent intervenir.

Mme Patricia Morhet-Richaud . - Merci Madame la présidente. J'ai eu beaucoup de chance de pouvoir participer à ce déplacement. Merci à notre présidente de nous avoir emmenés dans ce très beau département de la Côte-d'Or et merci à notre collègue Anne-Catherine Loisier qui nous a accueillis. Un point que je retiendrai dans cette journée est la belle synergie qui existe entre la formation du lycée professionnel Eugène Guillaume et les entreprises locales. Je trouve que c'est un bel exemple dont de nombreux territoires pourraient s'inspirer, bien que cela existe aussi ailleurs. Cela montre bien la nécessité de nos travaux en matière d'apprentissage.

M. Michel Canevet . - J'ai moi aussi été frappé par le lien extrêmement étroit entre les entreprises et le lycée professionnel de Montbard, et aussi par les différents profils des élèves au sein de l'établissement, puisqu'il y avait des adultes en formation continue, aussi bien que des lycéens et des apprentis en formation initiale. Je vais regarder si dans le département du Finistère, il y a des établissements qui ont des démarches analogues, que je trouve particulièrement positives.

Sur la question du bois, est-ce l'existence d'un pôle d'excellence rurale qui a permis d'initier un écosystème extrêmement favorable de valorisation de la ressource bois ? Par ailleurs, je voudrais savoir si l'ensemble des sous-produits et coproduits du bois sont aujourd'hui valorisés ? Ou alors est-ce que toute la filière est complète et il n'y a plus de déchets ?

Mme Anne-Catherine Loisier . - Le Morvan est le premier massif européen en douglas. Transporter du bois est compliqué et coûteux. On observait depuis plusieurs années un trafic des entreprises étrangères venant acheter du bois en France. Cela n'était pas très satisfaisant pour les habitants et les propriétaires du Morvan. Au départ, c'est le parc naturel régional du Morvan qui a mis en place une étude sur la manière dont on pourrait valoriser sur le territoire cette ressource et qui a incité les communautés de communes à s'engager dans cette démarche. Concomitamment, la communauté de communes a présenté un projet de pôle d'excellence rurale et s'en est suivie une phase de recherches. Malheureusement, aucune entreprise française n'a souhaité s'installer, alors que notre pays compte de grandes entreprises en matière de transformation du bois. Enfin, je confirme qu'il y a un recyclage total des produits du bois. Sur les lignes de sciages canter -bien que cela ne s'applique qu'aux bois moyens-, tout est informatisé, le bois est tourné dans tous les sens pour optimiser le sciage et pour qu'il y ait le moins de déchets possibles. Le peu de déchets est recyclé, soit dans la chaufferie soit pour les pellets. Il reste bien évidemment encore des choses à faire, mais davantage autour de la chimie du bois. C'est aussi pour cela que nous sommes particulièrement ravis que la société JRS se soit installée et nous aimerions qu'elle ouvre un pôle de R&D sur le site. L'intérêt de la chimie du bois est qu'elle concerne toutes les essences : on peut travailler sur les résineux, mais aussi sur d'autres essences comme le hêtre. En France nous avons des milliers d'hectares de hêtres dont on ne sait que faire. L'importance de la chimie du bois est de permettre de trouver d'autres débouchés pour les essences de bois. Donc oui, à l'heure actuelle, le recyclage est total, mais il y a un potentiel de développement très important.

M. Richard Yung . - J'ai appris que les Chinois étaient de gros acheteurs de notre bois et que les fameux trains de la route de la soie qui passent par le Kazakhstan retournent en Chine avec du bois français. Si c'est vrai, cela rejoint ce que vous indiquez : notre filière a besoin d'être musclée. Si ce sont les Allemands qui font la valorisation dans ce cas-ci, c'est un peu dommage. Nos entreprises françaises ne peuvent-elles pas investir davantage dans la recherche, dans la mise au point de nouveaux procédés, de nouvelles machines ? Il y a pourtant beaucoup d'argent disponible pour faire tout cela.

M. Martial Bourquin . - Le Québec avait la même difficulté il y quinze ou vingt ans et a pris la décision d'interdire aux grumes de quitter le Québec sans une double transformation sur place. La filière bois du Québec a pu ainsi se redresser et devenir l'une des plus compétitives du monde. C'est une décision que l'Europe devrait envisager parce que ce qui se passe dans le Morvan se passe également en Franche-Comté, chez moi. Nous avons un massif forestier énorme dans les Vosges mais nous n'avons pas les entreprises performantes pour valoriser ces ressources exceptionnelles. L'Allemagne a une filière bois qui découle de sa volonté de toujours avoir une industrie : les Allemands veulent transformer et avoir des emplois. Nos scieries sont petites comparées à celles du Canada donc, bien que certaines fassent des efforts, il faudrait les recapitaliser et les regrouper pour avoir, dans la filière bois, des entreprises au niveau, susceptibles d'investir dans la R&D.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Il faut bien distinguer le marché des feuillus et des résineux, qui sont très différents. S'agissant de la Chine, elle importe énormément de feuillus et de chênes français, notre patrimoine étant exceptionnel et reconnu en ce domaine. De nombreux pays ont déjà dilapidé le leur. Cela met une importante pression sur les scieries de feuillus, qui affirment d'ailleurs avoir des difficultés à s'approvisionner. Le Gouvernement a mis en place certaines mesures protectionnistes, notamment des agréments et labels UE pour les acheteurs de chênes français, afin que le bois subisse une première transformation en France avant d'être exporté. Ce dispositif a été instauré il y a deux ans, sous l'impulsion de l'ancien ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll, et fut très décrié par certains exportateurs qui préfèrent vendre au plus offrant. Des barrières ont aussi été mises en place pour le traitement des bois destinés à l'export. Or peu de nos ports sont équipés d'infrastructures -enceintes confinées- permettant d'effectuer ce type de traitements phytosanitaires. Ceci a d'ailleurs amené les exportateurs à faire transiter notre bois non par des ports français comme Le Havre mais par le port d'Anvers aux Pays-Bas. L'Office National des Forêts (ONF) a mis en place une formule de contractualisation afin d'approvisionner les scieries mais je constate qu'elle est peu utilisée dans le secteur des feuillus. Certains autres pays européens ont mis en place des mesures protectionnistes plus fortes encore pour protéger leurs ressources. J'avais interrogé le ministre sur l'éventualité d'instaurer de telles mesures en France mais il m'a répondu que ce n'était pas envisageable car contraire aux règles européennes. La plupart du bois qui est acheté par les Chinois nous revient sous forme de meubles d'où le déficit de notre balance commerciale de 6 milliards d'euros sur l'industrie du bois et de l'ameublement. En France, nous avons perdu beaucoup de petites entreprises de transformation. Par exemple, il n'y a plus qu'une ou deux scieries de hêtre. Il est regrettable que les investissements dans cette filière soient principalement étrangers. Bien que la France compte encore quelques grandes scieries comme celle de Monnet-Sève et Sougy, nombre d'entre elles sont en difficulté. Nos entrepreneurs de la filière bois manquent sans doute d'esprit d'innovation et attendent trop du Gouvernement, notamment en termes de régulation protectionniste. Ils sont encore trop arc-boutés sur la ressource en chêne alors qu'elle se raréfie et que la ressource en hêtre est abondante et demeure encore trop sous-valorisée. J'espère que le Programme national de la forêt et du bois 2016-2026, qui a pour priorité l'innovation et l'investissement, amènera les industriels du bois à se repositionner et à s'engager davantage dans la R&D car ils risquent de se faire doubler par les Suisses et les Allemands, beaucoup plus offensifs.

Mme Catherine Fournier . - Tout d'abord, merci beaucoup pour cette présentation. C'était très complet. Je m'excuse de n'avoir pu venir à ce déplacement en Côte d'Or, j'étais retenue à la Région. Quel discours tiennent les responsables de la filière, s'agissant d'innovation ?

Mme Anne-Catherine Loisier . - Innover implique de nouveaux métiers, de nouveaux processus de production et donc des investissements supplémentaires. Transformer du hêtre et du chêne, qui n'ont pas les mêmes caractéristiques techniques, implique la mise en place de deux processus différents. C'est l'un des enjeux du Programme national de la forêt et du bois. La France ne doit pas prendre du retard sur ces sujets par confort.

M. Jackie Pierre . - Je souhaiterais ajouter qu'il existe quand même des recherches sur les feuillus, comme en mène l'entreprise Terres de hêtre dans les Vosges. Cette entreprise a construit il y a trois ou quatre ans, en coopération avec l'École nationale du bois d'Épinal, des chalets entièrement en hêtre grâce à un traitement spécifique, alors que personne ne l'aurait cru possible il y a encore sept ou huit ans. Il y a d'importantes recherches en cours mais les entreprises n'ont pas envie de dévoiler les innovations qu'elles sont en train de développer. Aujourd'hui, on utilise aussi des grumes déchiquetées pour chauffer les collectivités. Cela n'existait pas quand j'étais bûcheron, il y a quarante ans. Sur les 35 000 habitants que compte la ville d'Épinal, plus de 20 000 se chauffent au bois déchiqueté. Ces innovations prennent du temps à être développées. Je suis optimiste sur le potentiel de développement de la filière. D'ailleurs, mon département dispose d'un parc forestier exceptionnel. Vous y êtes les bienvenus pour un déplacement futur.

M. Jean-Marc Gabouty . - Au niveau de l'industrie, il y a surtout un problème de seconde transformation. On exporte beaucoup de grumes sciées. En plus de faciliter le transport, cela permet aux producteurs de répondre à l'obligation de première transformation en France. En revanche, la deuxième transformation pose quelques difficultés sur certains bois. Pour le bois qui sert à la filière de la papeterie, on passe directement du bois débardé à la transformation donc il n'y a pas d'intermédiaire. Pour ce qui est de la filière construction, la plus importante en pourcentage en France, elle est en pleine croissance bien que cette bonne dynamique ne soit pas partagée par toutes les essences. En revanche, sur l'ameublement, c'est toute notre industrie dans ce secteur, des artisans aux grandes entreprises, qui s'est considérablement affaiblie. Je suis d'une région qui exporte des grumes vers le Portugal. Parallèlement, des petites entreprises portugaises viennent dans tout le Sud-ouest pour faire de l'aménagement de cuisine sur-mesure. Donc les grumes qui partent de la région de Limoges ou des contreforts du Massif central nous reviennent sous forme de cuisines élaborées au Portugal. C'est un défi pour d'autres secteurs industriels.

B. COMPTE RENDU DE LA RÉUNION DU 15 FÉVRIER 2018, SUITE AU DÉPLACEMENT EN SAVOIE LE 12 FÉVRIER 2018

Mme Martine Berthet . - Je suis très heureuse que la délégation aux entreprises ait accepté mon invitation à venir rencontrer les entreprises de Savoie. Je remercie particulièrement la présidente ainsi que nos collègues qui nous ont accompagnées : Guillaume Arnell, Michel Canevet, Sébastien Meurant, Patricia Morhet-Richaud et Jackie Pierre.

Le programme du déplacement a permis à la délégation de découvrir le dynamisme du département, en pointe sur l'aménagement de la montagne mais également riche en industries et pionnière en technologies innovantes : la délégation a d'abord été accueillie à Savoie Technolac, pôle d'excellence en matière d'énergies et de réseaux qui rassemble 230 entreprises et 4 000 emplois. Notre collègue Jean-Pierre Vial, qui a été le président de Savoie Technolac depuis sa création en 1987 jusqu'en 2015, y a rejoint la délégation. Ce pôle, né de la reconversion d'une ancienne base aérienne militaire, est placé au carrefour de plusieurs grands axes routiers.

Le projet de tunnel Lyon-Turin sera aussi déterminant pour son développement, la France étant le premier partenaire commercial de l'Italie. Nous avons visité l'accélérateur Le Village, situé à Savoie Technolac. Il accueille actuellement six start up . Ce chiffre devrait doubler d'ici l'an prochain. La délégation a pu y rencontrer plusieurs start up en incubation ou en accélération, dont Morphosense et Beelse.

Yannick Omnes a fondé il y a un an et demi Beelse, qui met à disposition un logiciel permettant aux entreprises de stocker l'ADN de pièces manufacturées dont elles ont besoin et de les intégrer dans leur entrepôt virtuel. Dès qu'elles ont été ainsi stockées, ces pièces peuvent être fabriquées en un seul clic grâce à un réseau d'imprimeurs 3D partout dans le monde pour être au plus près du client. Ce système permet ainsi aux entreprises de limiter considérablement leurs stocks et de réduire l'obsolescence programmée en allongeant la durée de vie des produits.

Alexandre Paléologue nous a présenté son entreprise, Morphosense, qu'il a fondée il y a un an. Neuf salariés y travaillent actuellement contre trois au départ. Morphosense développe une technologie qui met en oeuvre une surveillance à distance et en temps réel de la santé des infrastructures stratégiques comme les ponts ou les barrages, un peu partout dans le monde.

Pour ce faire, ces réseaux de capteurs enregistrent les vibrations pour fournir des données permettant de connaître l'évolution de l'état des ouvrages et donc de planifier les éventuels travaux de réparation nécessaires.

Ensuite, nous avons rejoint les locaux d'Energy Pool. Ses 100 collaborateurs ont la charge de superviser 6 GW dans 7 pays. Energy Pool optimise la consommation électrique par une gestion intelligente de l'énergie. Elle suit en temps réel la production et la consommation électriques : en cas de risque de pénurie, elle demande à ses clients industriels gros consommateurs d'électricité de réduire leur consommation (procédure dite de « l'effacement ») ou à l'inverse, en cas d'abondance, elle les encourage à consommer. Ce pilotage de la consommation repose sur une plateforme technologique qui dispose d'un logiciel d'optimisation et d'une chaîne de contrôle en France, développée par l'entreprise. Cette technique présente l'avantage d'éviter de recourir à une hausse de la production en cas de manque d'énergie, permettant ainsi d'importantes économies financières tout en limitant les émissions de CO2, la variable d'ajustement étant traditionnellement dévolue aux centrales thermiques fortement polluantes. Plusieurs industriels que nous avons rencontrés au fil de la journée nous ont indiqué combien il était important pour leur activité de stabiliser leur approvisionnement électrique par des contrats de long terme.

Ceux-ci leur garantissent des tarifs intéressants en échange d'un engagement à ralentir leur consommation au moment des heures de pointe. La France a en effet un problème structurel de gestion de son réseau de production et de consommation : le réseau est globalement en surproduction huit mois de l'année ; surtout en été, car les énergies renouvelables produisent le plus d'électricité durant cette saison alors que la consommation nationale est beaucoup plus faible. A l'inverse, en hiver, les énergies renouvelables produisent beaucoup moins, faute de vent et de soleil, alors que la consommation y est beaucoup plus élevée. Finalement, ce ne sont que 100 heures par an, en hiver, où l'électricité fait défaut pour satisfaire la consommation : la solution n'est pas d'augmenter, pour ces quelques heures, les capacités de production qui sont le plus souvent sous-utilisées -les centrales françaises étant moins rentabilisées que celles des pays voisins-. Il faut encourager une plus grande flexibilité dans la gestion de l'électricité produite. Le Président d'Energy Pool affirme que la France produit déjà une énergie relativement bon marché et qu'une baisse supplémentaire de son coût est possible, sous réserve d'une meilleure gestion du réseau, ce qui mécaniquement renforcera la compétitivité de nos entreprises. Il regrette cependant que les acteurs publics en charge de ce secteur soient trop nombreux en France, ce qui empêche une véritable refonte du système en ce sens.

La délégation a ensuite pu visiter à Gilly-sur-Isère la nouvelle usine du groupe POMA, leader mondial du transport par câble, qui produit des pièces permettant le transport de personnes en montagne comme en ville. Elle compte aujourd'hui près de 900 collaborateurs, dont les deux tiers employés en France. Le groupe a réalisé à ce jour plus de 8 000 installations qui représentent une capacité de transport de 6,5 millions de personnes par heure grâce à un savoir-faire reconnu lui permettant de s'affirmer sur le marché mondial. Elle est détenue depuis le 31 mai 2000 par l'industriel italien Michael Seeber, par le biais de HTI BV1, réunissant Poma avec le groupe Leitner, et forme un des deux leaders mondiaux du transport par câble avec l'Autrichien Doppelmayr. Plus des trois quarts de leur production sont exportés, notamment en Amérique latine (Colombie) ou encore en Chine. L'agglomération d'Albertville a accueilli ce site de Poma au pied des Alpes, qui utilise les stations de la Tarentaise comme vitrine de son savoir-faire. Le groupe se diversifie et produit aussi des têtes d'éoliennes. Son dirigeant nous a indiqué que, pour être concurrentiel, son groupe avait besoin, d'une part, d'une augmentation du plafond d'heures supplémentaires et, d'autre part, de plus de souplesse concernant le travail du dimanche.

La délégation a également été reçue à Albertville par le groupe SAF (Secours Aérien Français), leader européen des services héliportés.

Née à l'origine pour porter secours en montagne et rapatrier les blessés vers les hôpitaux de la région, l'entreprise a ensuite développé son activité vers la livraison de matériaux lourds dans des endroits d'accès difficile. Elle s'est également étendue vers d'autres régions : le Maroc et l'île de La Réunion notamment. L'entreprise a 52 hélicoptères dont un tiers en pleine propriété. Les pièces proviennent à 90 % de fournisseurs français. Nous avons visité le site où elle assure les réparations d'hélicoptères civils et militaires, qu'elle rénove en les désossant entièrement pour le prix modeste de 300 000 euros (750 000 pour le PUMA qui vaut 15 millions d'euros). Sur un autre site voisin, le SAF accueille des pilotes pour des formations et des remises à niveau. Des armées de différents pays y ont recours car les simulateurs de vols utilisés par le SAF sont uniques en Europe, l'un d'entre eux n'ayant qu'un homologue aux États-Unis. Le responsable de l'entreprise nous a fait part de difficultés à trouver du personnel formé. Il affirme ainsi avoir par exemple recruté et formé un électricien en bâtiment qui n'avait jamais travaillé dans l'aéronautique. Il déplore le fait que les jeunes qui sortent des écoles aient plus travaillé la théorie que la pratique, manquant ainsi d'expérience, et réfléchit sérieusement à développer une formation en interne pour former ses futures recrues.

En complément de ces visites, une table ronde avec une quinzaine d'entrepreneurs a été organisée au Conseil départemental.

Elle nous a permis de prendre le pouls des entreprises locales, mais elle leur a aussi donné l'occasion de mieux se connaître entre elles. Se sentant suspectes dès qu'elles réussissent et exposées à un risque pénal croissant, ces entreprises souffrent des mêmes maux que celles que nous avons pu rencontrer dans d'autres départements : tout d'abord, le poids de la complexité administrative et de l'instabilité législative, bien sûr. Ainsi, en matière d'apprentissage, après l'encouragement par des subventions est venu le temps des pénalités, et maintenant les deux s'appliquent aux entreprises ! Quant au crédit d'impôt recherche, dont les PME ont redit avoir besoin, il a encore été dénoncé pour la lourdeur du dossier à constituer pour le solliciter, au regard de son montant attendu, et pour les craintes de contrôle fiscal qu'il est supposé déclencher. Autre complexité : les aménageurs de la montagne doivent, pour construire une offre de ski, respecter les procédures associées aux délégations de services publics : ainsi, ils doivent faire valider les tarifs des forfaits par les communes ! Et évidemment, le prélèvement à la source a été critiqué : voici encore une complexité infligée aux entreprises, alors que le Trésor public dispose, grâce à la généralisation de la Déclaration sociale nominative (DSN), de tous les outils nécessaires pour prélever lui-même l'impôt à la source. Quant au bulletin de salaire simplifié, qui est entré en vigueur le 1 er janvier 2018, s'il masque un peu la complexité aux yeux du salarié, il semble en créer une nouvelle pour les entreprises...

Pour le président de la CCI, c'est ce poids administratif qui explique les piètres performances de nos entreprises à l'export : malgré les nombreux efforts consentis par les uns et les autres, le nombre d'entreprises qui exportent plafonne à 100 000 (quand notre pays en compte près de 4 millions)... Ceux qui ont passé le cap considèrent que le territoire local est un territoire d'expérimentation avant de se lancer dans l'export. Mais les autres, notamment le Cluster Montagne, réclament un accompagnement de la part des grands groupes et une diplomatie économique plus active ; la plupart jugent aussi que les interventions de Business France, souvent payantes, sont mal adaptées aux primo-exportateurs et TPE-PME.

Plusieurs ont à nouveau dénoncé la surtransposition de directives européennes. Le cas de la directive sur les bénéficiaires effectifs a été évoqué : cette directive, destinée à lutter contre le blanchiment, impose aux entreprises de déclarer leurs bénéficiaires effectifs. Mais la France l'a transposée sans fixer de seuil permettant d'exonérer les petites entreprises de cette obligation : de ce fait, même une PME qui n'a aucun flux financier s'y trouve soumise alors qu'elle ne présente aucun risque de blanchiment... Autre exemple, la directive sur le chrome 6 a été transposée de manière plus stricte en France qu'ailleurs, ce qui nuit à l'activité d'Ugitech, plus gros employeur de Savoie avec 1 200 salariés, qui fabrique de l'acier inoxydable à Ugine.

Beaucoup, à commencer justement par Ugitech, se plaignent aussi de difficultés de recrutement. Faire venir des talents est difficile dans ce territoire étiqueté comme touristique, et les métropoles jouent le rôle d'aspirateur. Certaines compétences manquent, par exemple les opérateurs de maintenance, ce qui a pu conduire l'entreprise Trimet, spécialisée en métallurgie, à fonder sa propre école de formation. Mais c'est aussi le simple savoir-être qui fait parfois défaut : ponctualité, régularité au travail... Certains accusent le niveau trop élevé des indemnités de chômage qui rend le travail moins attractif. À la difficulté du recrutement, s'ajoute aussi le défi de la fidélisation des personnes recrutées, en raison du coût élevé de la vie en Savoie. Tous plaident pour promouvoir l'alternance, seule piste efficace pour résorber la pénurie de compétences. Certains préconisent de délocaliser les structures d'apprentissage, afin de les rapprocher des entreprises car la question de la mobilité et de l'hébergement des apprentis, qui sont souvent très jeunes, est délicate. L'université Savoie-Mont Blanc, pour sa part, se rapproche des entreprises pour coconstruire des filières de formation ; elle travaille même sur un projet de double diplôme licence + CAP afin de faciliter la reprise d'entreprises artisanales.

C'est un sujet important car les entraves à la transmission d'entreprises ont à nouveau été déplorées.

Le président de la chambre des métiers a souligné que la moyenne d'âge des chefs entreprise du département était élevée et que les difficultés de la transmission exposaient à une importante perte de savoir-faire. Une spécificité des stations de ski tient au prix très élevé de l'immobilier qui implique une fiscalisation très lourde au moment de la transmission, ce qui complique encore la transmission des hôtels. Certains ont donc proposé que le montant des travaux de rénovation pour remettre aux normes les locaux d'hôtellerie puisse être retiré du montant transmis.

Si ces sujets nous sont déjà familiers, nous avons été étonnés d'entendre plusieurs entreprises dénoncer des délais de paiement excessifs de la part des acheteurs publics : certaines collectivités territoriales paient ainsi à 18 mois, quand d'autres lancent des appels d'offre sans en avoir les budgets. Une entreprise qui fabrique des dameuses a entendu la commune qui avait acheté la machine la prier de s'asseoir sur la facture... C'est une situation inédite, du moins en métropole. Elle laisse entendre que le sujet des délais de paiement n'est pas résolu, malgré la loi de modernisation de l'économie de 2008. Il arrive également que les petites entreprises subissent la rigidité des règles des marchés publics et qu'ainsi, un terrassier intervenu dans un chantier de BTP ne puisse pas être payé avant la réception complète de l'ensemble du chantier, de longs mois après.

Par ailleurs, un sujet a été mis sur la table avec une acuité nouvelle : la question du financement des PME depuis la fin de l'ISF. Le président de l'association des business angels de la Savoie a fait part de sa grande inquiétude suite à la suppression de l'ISF dans la dernière loi de finances, qui a entraîné la fin du dispositif ISF-PME, lequel drainait 500 millions d'euros par an. Notre délégation s'en était préoccupée au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2018 et plusieurs d'entre nous avions défendu des amendements pour éviter cela. Finalement, c'est un simple aménagement du dispositif IR-PME, dit Madelin, qui a été voté ; son taux a été porté de 18 à 25 % mais le plafond de cette niche fiscale a été maintenu à 10 000 euros, et, dans ce plafond, le financement des PME est en concurrence avec la réduction d'impôt pour emplois domestiques, alors qu'au Royaume-Uni, le plafond est de 1 million de livres... Il a été rappelé que le taux de mortalité des start up est de 40 % : l'investissement dans les PME est effectivement risqué et, en plus, peu liquide. Cet investissement a donc besoin d'un dispositif spécifique de soutien, comme l'ISF PME qui permettait le partage du risque entre l'État et les particuliers. Jamais l'assurance vie et les banques ne pourront remplacer les business angels : elles n'ont pas de temps à accorder à ces petits dossiers de financement qui ne présentent pas les mêmes garanties de liquidité et de reporting que celles exigées par leurs clients. Il s'agit de sujets importants sur lesquels nous devrons revenir prochainement pour garantir le financement des PME.

Enfin, un sujet spécifique a été soulevé par l'entreprise Gaseo qui produit de l'énergie propre -biométhane, électricité-, à partir de biogaz venant soit de méthaniers agricoles, soit de stations d'épuration, soit de centres d'enfouissement de déchets. Son dirigeant, qui préside aussi le cluster Biogaz vallée, déplore qu'il n'existe plus de tarif de rachat pour l'électricité provenant du biogaz issu des déchets d'enfouissement, qui n'est pas considérée comme verte, alors même qu'il en existe un pour le biométhane issu des déchets, lequel est donc considéré comme vert. En effet, chaque type de biogaz possède un tarif de rachat de l'électricité fixé par arrêté ministériel. Ainsi, les biogaz produits à partir de stations d'épuration ou à partir de méthaniseurs agricoles ont un tarif de rachat dédié. Chacun de ces tarifs a été renouvelé depuis environ deux ans avec une actualisation du mécanisme tarifaire. Étonnamment, seul le tarif de rachat du biogaz issu de déchets d'enfouissement n'a pas obtenu de renouvellement, si bien que désormais il n'est plus possible de produire d'électricité à partir de ce biogaz, alors qu'il est un produit fatal inévitable généré par les déchets. Le motif invoqué est que Bruxelles considèrerait que l'électricité produite à partir d'un biogaz (fatal) issu de déchets ne serait pas verte. Donc en résumé, le biométhane produit à partir de biogaz de déchets serait vert, mais l'électricité produite à partir de ce même biogaz ne serait pas verte !

Cette difficulté réglementaire a stoppé brutalement un pan essentiel de l'activité de GASEO qui y avait investi près de 7 millions d'euros. Or, sur le terrain, chaque biogaz ne peut, pour des raisons de qualité, être transformé en biométhane, ce qui signifie que le biogaz non transformé est envoyé.... en torchère. Avec comme conséquence supplémentaire, une augmentation massive de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour les collectivités et pour les contribuables, car la loi oblige à valoriser le biogaz sous peine de pénalité de TGAP ! Je pense que nous devrions saisir de ce sujet le groupe d'études Energie qui vient de redémarrer ses travaux.

J'espère que ce compte-rendu vous a permis d'entrevoir la diversité des entreprises savoyardes et la richesse de l'activité économique de mon département. Nous revenons avec des pistes de travail qui, je l'espère, mobiliseront notre délégation.

Mme Élisabeth Lamure , présidente de la Délégation aux entreprises . - Je remercie notre collègue Martine Berthet d'avoir organisé ce déplacement, ainsi que notre collègue Jean-Pierre Vial qui nous a rejoints lors de notre visite à Savoie Technolac, à la création duquel il a participé comme maire du Bourget. La Savoie est souvent considérée sous l'angle touristique, nous y avons découvert un vrai dynamisme avec de belles entreprises industrielles, un taux de chômage inférieur à 5 %, une main d'oeuvre qualifiée et des difficultés de recrutement.

Mme Patricia Morhet-Richaud . - Merci à notre collègue Martine Berthet pour son accueil. Nous avons encore pu constater que la France regorge de talents et que les entreprises de Savoie y rencontrent les mêmes difficultés qu'ailleurs : des formations inadaptées aux métiers locaux, des complexités administratives et des difficultés spécifiques à nos départements de montagne qui peinent notamment à attirer des talents.

Mme Pascale Gruny . - Je confirme que le bulletin de salaire n'est simplifié que pour le salarié, dont on peut se demander d'ailleurs s'il regarde les cotisations... En revanche, il est certain que la situation est devenue plus compliquée pour les entreprises, qui doit établir deux bulletins : l'ancien et le simplifié, sans compter les coûts infligés par les éditeurs de logiciels. La retenue de l'impôt à la source va soulever les mêmes difficultés, alors que la déclaration sociale nominative (DSN) aurait permis de prélever l'impôt. L'enjeu que représente l'apprentissage en réponse aux besoins de main d'oeuvre formée est particulièrement important dans un département comme le mien, qui connaît un fort taux d'illétrisme et n'a ni mer ni montagne pour attirer la main d'oeuvre.

Mme Élisabeth Lamure . - En effet. Un des entrepreneurs que nous avons rencontré en Savoie nous a dit : « La simplification, je n'y crois plus ! ».

M. Philippe Adnot . - J'ai bien noté la problématique évoquée à propos du biogaz. J'ai justement monté un cluster avec 80 entreprises de ce secteur et vous ferai passer une petite note d'information à ce sujet.

Mme Élisabeth Lamure . - Merci. Un point nous a particulièrement frappés lors de nos échanges avec les entrepreneurs : les délais de paiement, surtout imputables à des collectivités territoriales, qui excipent par exemple de deux mauvaises saisons successives pour ne pas payer les entreprises.

Mme Martine Berthet . - En effet. J'ai aussi relevé l'initiative intéressante de l'Université Savoie Mont Blanc de lancer un double diplôme associant une licence à un CAP.

M. Michel Forissier . - L'importance des écoles d'entreprises va croissant : il convient de les favoriser et de le financer. Il semble que le gouvernement n'a pas encore rendu des arbitrages à ce sujet.

C. COMPTE RENDU DE LA RÉUNION DU 14 JUIN 2018, SUITE AU DÉPLACEMENT DANS LA CREUSE LE 25 MAI 2018

M. Éric Jeansannetas . - Je remercie la délégation aux entreprises d'être venue en Creuse découvrir la variété des entreprises de ce département. Je remercie particulièrement la présidente ainsi que nos collègues qui nous ont accompagnés : Guillaume Arnell, Michel Canevet, Sébastien Meurant, et Nelly Tocqueville, ainsi que Jean-Marc Gabouty et Claude Nougein, qui nous ont rejoints en voisins.

Nous avions un programme ambitieux pour cette journée : trois visites d'entreprises - Microplan, Atulam et TIGR - et une table ronde à Guéret. Nous avons suivi ce programme au pas de course, les grèves de train ayant sensiblement retardé notre arrivée sur place. Nous avons d'abord été accueillis chez Microplan France à La Forêt-du-Temple qui compte 150 habitants. Profitant d'une mine en granit située sur la ligne de chemin de fer Guéret-La Châtre, la société, qui s'appelait alors Ateliers Maître, est créée en 1924 pour fabriquer des pavés de rue. Elle évolue pour se spécialiser dès les années 1970 dans la métrologie, c'est-à-dire la science de la mesure. Depuis plus de 40 ans, cette entreprise fabrique des supports en granits de grandes dimensions parfaitement plans, pour les appareils de mesure ou de production de très grande précision. Elle a été rachetée en 1991 par le groupe italien Microplan, société spécialisée dans les réalisations en granit de grandes dimensions, avec un savoir-faire technologique élevé, ce qui a permis à l'entreprise de monter en puissance dans son secteur, tout en diversifiant ses activités : éléments métrologiques en granit mais aussi usinage de matériaux, structures en granit reconstitué, systèmes de micro-positionnement, éléments métrologiques en céramique... À la pointe de l'innovation, Microplan France travaille en effet aujourd'hui à la céramique, matériau deux fois plus stable que l'acier et cinq fois plus rigide que le granit.

L'outil industriel que nous avons pu découvrir permet le sciage au fil diamanté des blocs de granit brut, leur débitage, fraisage, rectification, polissage, perçage et enfin rodage et polissage à la main. Les installations sont impressionnantes (l'usine occupe une surface de 8 000 m²) : les blocs de granit ainsi travaillés ont des dimensions supérieures à 4m x 2m.

Les produits de Microplan France sont critiques car indispensables pour le contrôle des instruments de mesure de haute précision, essentiels dans la recherche et les industries de haute technologie. L'entreprise compte ainsi parmi ses clients des grands noms comme Nikon, Apple, EADS ou Safran et des grands centres de recherche comme le CERN ou le CEA de Saclay. Microplan France est donc l'un des leaders mondiaux dans cette industrie de pointe, en particulier pour la fabrication de pièces de grandes dimensions, et la seule entreprise en France sur ce secteur. Elle emploie 46 personnes pour un chiffre d'affaires de 5,4 millions d'euros, dont 60 % réalisé à l'export.

Dépassant les difficultés liées aux réseaux routiers et de communications dans cette zone très rurale, Microplan France doit donc sa réussite à sa capacité d'innovation, mais également à son positionnement de niche, une caractéristique partagée avec la deuxième entreprise que nous avons visité, la société Atulam, située à Jarnages.

Atulam est une entreprise spécialisée dans la fabrication de menuiseries en bois sur mesure et la restauration de portes et fenêtres en bois. Cette entreprise, qui a plus de 50 ans, emploie 130 salariés pour un chiffre d'affaires de 16 millions d'euros en 2017.

L'entreprise s'est positionnée dans les années 2000 sur la fenêtre bois haut de gamme. Elle a innové en proposant des fenêtres déjà peintes : la peinture du bois qu'elle applique, et qu'elle achète à un fournisseur allemand, est garantie 12 ans, et serait capable de durer 25 ans selon le directeur, mettant à mal les idées reçues sur le défaut de durabilité ou la lourdeur d'entretien du bois. L'immense atelier de 10 000 m² que nous avons visité permet la création de fenêtres en bois sur mesure, depuis la conception et la réalisation jusqu'à l'application de divers traitements et protections, puis de peinture au robot, avant séchage final.

Ce savoir-faire unique, qui allie la qualité d'un travail artisanal à la puissance d'un outil industriel, a permis à Atulam de se démarquer sur le marché de la rénovation haut de gamme : Atulam a ainsi réalisé des chantiers de prestige comme l'École des Ponts-et-Chaussées ou le siège du groupe Dassault. L'entreprise affichait en 2015 une croissance d'activité de l'ordre de + 8 % et a réalisé 5 millions d'euros d'investissement dans son outil industriel entre 2014 et 2016.

Après ces belles découvertes, nous avons pu échanger avec des entreprises du bassin Creusois lors d'une table ronde à Guéret. Les entrepreneurs ont déploré leurs difficultés de recrutement dans un territoire qui souffre d'un défaut d'attractivité. La carence de main d'oeuvre est particulièrement sensible sur des postes techniques, attestant de manquements significatifs dans la formation professionnelle et l'apprentissage, sujets familiers de la Délégation, mais aussi sur des postes d'encadrement (RH, achats...). Les prestataires commerciaux font aussi défaut : trop peu d'agences d'entretien, de maintenance ou de vidéo surveillance en Creuse. Ces difficultés freinent la montée en puissance des entreprises.

Les entrepreneurs ont aussi déploré le manque d'infrastructures en Creuse (routes, réseaux de téléphonie mobile et internet) et l'éloignement, à l'origine des surcoûts, alors que les taxes dont ils s'acquittent sont identiques voire supérieures à celles des zones d'activités urbaines ultra-connectées. Certains transporteurs refusent de se rendre dans le sud de la Creuse car la faible densité d'entreprises dans cette zone en rend la desserte non rentable pour eux.

La question des délais de paiement a encore une fois été évoquée, les entreprises ayant trop souvent le sentiment de jouer le rôle de banquier. La paperasserie administrative a de nouveau été déplorée, les mêmes contraintes s'imposant à toutes les entreprises sans égard à leur taille, et plusieurs ont souligné la complexité des procédures, notamment en matière de TVA différenciée selon les produits ; les nouvelles contraintes ont été dénoncées, notamment celles qu'imposent la protection des données et, bientôt, le prélèvement à la source. Nouveauté : nous avons entendu un des entrepreneurs évoquer la question de l'objet social de l'entreprise avec anxiété. Le projet de loi PACTE devrait nous conduire à revenir sur cette question.

Une particularité creusoise a été soulignée : la fréquence des contrôles que les entreprises subissent de la part de l'administration. La population d'entreprises étant réduite dans mon département, l'administration a en effet le loisir de les contrôler très régulièrement... En tout cas, nous avons pu entendre que la Creuse se distinguait par l'existence d'un guichet unique pour les entreprises : la maison de l'économie et de la formation, qui semble fonctionner de manière satisfaisante depuis sa création il y a trois ans, et qui regroupe acteurs publics et privés (Pôle Emploi, Mission locale, chambres consulaires, banques...).

La question de l'attractivité était bien entendu au coeur des débats. Certains entrepreneurs ont appelé au lancement d'un grand projet avec le soutien de l'État, comme le Laser mégajoule récemment installé près de Bordeaux. Le représentant du préfet, en charge du projet pilote de revitalisation du bassin d'emplois de la Creuse, mis en place après la fermeture de GM&S, a estimé pour sa part qu'un grand projet ne résoudrait pas tout, ni même une gare TGV ou une autoroute : il travaille à accompagner une dynamique qui vienne du territoire, en favorisant l'éclosion de plein de petits projets. Mais il se confronte également aux difficultés de recrutement, même pour Pôle Emploi, et c'est un comble ! Il a observé que l'inadéquation entre offre et demande d'emplois est une problématique locale mais aussi nationale, qui doit conduire à mieux impliquer les branches professionnelles dans la formation. Surtout, il explique qu'attirer des emplois en Creuse demande aussi de répondre à la demande d'emploi des conjoints, à la nécessité d'un accès Internet, aux besoins en éducation, santé, loisirs...

Après ces riches échanges, nous sommes partis vers La Souterraine pour découvrir l'entreprise TIGR, spécialisée dans la fourniture de solutions de chauffage, de réfrigération ou de climatisation industriels. Cette entreprise compte 45 salariés sur ses deux sites, dont 35 sur le site de Saint-Maurice que nous avons visité.

Si l'entreprise conçoit et fabrique des chaufferies préfabriquées depuis 1999, c'est son rachat par deux salariés en 2009 qui marque la montée en puissance de la société, dont les installations sont passées de 2000 à plus de 3000m² en six ans et dont le chiffre d'affaires atteint presque 8 millions d'euros. Cette évolution correspond à celle du marché de l'énergie qui pousse l'entreprise à diversifier ses compétences. Ainsi, aux chaufferies au gaz et au fioul des origines, s'ajoutent aujourd'hui des chaudières mixtes gaz/solaires, des chaudières thermiques au biogaz ou aux granulés de bois. L'entreprise s'est par ailleurs spécialisée dans les réseaux de chauffage urbains sur lesquels elle est leader, comme dans les chantiers sur mesure de haute précision : elle a ainsi fourni la solution de climatisation de la chapelle Sixtine ou des usines Rolex. TIGR s'engage en outre dans une démarche de haute qualité environnementale dans le suivi et la réparation des modules préfabriqués qu'elle loue et vend.

J'ai été très heureux de présenter ces belles réussites à mes collègues. J'espère qu'ils auront apprécié la journée et découvert avec plaisir tout le potentiel de mon département, dont les entrepreneurs volontaires et soudés sont très attachés à leur territoire et se battent malgré les difficultés.

Mme Élisabeth Lamure . - Effectivement, nous avons pu ressentir l'affirmation d'une forte identité. Ils se battent autant pour leur lieu de vie que pour leur entreprise.

M. Michel Canevet . - Merci beaucoup pour la qualité de l'accueil qui nous a été réservé. Nous avons vu de belles entreprises, positionnées sur des niches, très exportatrices, avec un niveau d'automatisation élevé qui m'a surpris, je le reconnais. Le très haut débit et le désenclavement sont effectivement vitaux : l'aménagement du territoire se fait à ce prix.

Mme Martine Berthet . - À l'écoute du compte-rendu, je regrette d'autant plus de ne pas avoir eu la possibilité de me joindre à ce déplacement. J'entends que la Creuse souffre de difficultés de recrutement, mais quel est son taux de chômage ?

M. Éric Jeansannetas . - Le taux de chômage y est du niveau national. Le salariat s'y distingue par sa loyauté et sa fidélité si bien que les effectifs sont souvent stables. Mais la Creuse exporte aussi ses talents !

D. COMPTE-RENDU DE LA RÉUNION DU 28 JUIN 2018, SUITE AU DÉPLACEMENT EN SEINE-MARITIME LE 11 JUIN 2018

Mme Nelly Tocqueville . - Je suis très heureuse que la délégation aux entreprises ait accepté mon invitation à venir découvrir le dynamisme et la capacité d'innovation des entreprises de la Seine-Maritime. Je remercie particulièrement la présidente ainsi que nos collègues qui nous ont accompagnés : Jackie Deromedi, Michel Canevet, Jackie Pierre, ainsi qu'Agnès Canayer et Sébastien Meurant qui nous ont rejoints sur place. Céline Brulin, qui est sénatrice du département depuis le 1 er juin dernier en remplacement de Thierry Foucaud, s'est également jointe à nous au cours de la journée.

Malgré un léger retard de train, nous avons pu accomplir tout le programme prévu pour cette journée, soit la visite de trois entreprises - Nutriset, AMN et EcoTechnilin - ainsi que la participation à une table ronde pour échanger avec des entrepreneurs du département.

Nous avons tout d'abord été accueillis chez Nutriset, dans la commune de Malaunay (6 000 habitants). Lors de sa fondation en 1986, cette entreprise s'est fixé un objectif unique : nourrir les populations vulnérables dans les pays du Sud. Elle a commencé en produisant des laits thérapeutiques mais s'est trouvée confrontée à la mauvaise qualité de l'eau sur le terrain et aux difficultés de réfrigération. Depuis 1996, l'entreprise développe une pâte d'arachide, Plumpy'Nut, qui permet de lutter contre la malnutrition sévère des enfants. Ce produit fait l'objet d'un approvisionnement massif par l'UNICEF, le Programme Alimentaire Mondial et de nombreuses ONG. 100 % de la production de Nutriset (60 000 tonnes par an) est exportée. L'entreprise élargit aussi sa gamme de produits, pour couvrir par exemple les besoins des femmes enceintes. En 2016, Nutriset a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 100 millions d'euros et comptait plus de 200 collaborateurs. En 2017, ce sont plus de 10 millions de bénéficiaires qui ont été pris en charge par les produits fabriqués par Nutriset.

Afin de fabriquer et de diffuser localement les produits dans les pays affectés par la malnutrition, Nutriset a créé en 2005 le réseau PlumpyField, permettant de répondre plus vite aux situations de crises humanitaires. Présent dans une dizaine de pays, notamment en Guinée, en Haïti, au Burkina Faso, ou au Soudan, PlumpyField est aussi un vecteur de la valorisation des filières agricoles et donc du développement de ces pays. Ce réseau a permis de créer plus de 600 emplois directs, et encore plus d'emplois indirects.

Mais Nutriset, c'est d'abord de la recherche avant d'être de la production : l'entreprise a noué 60 partenariats de recherche dans le monde. Aujourd'hui, Nutriset est le leader mondial en matière de recherche pour prévenir la malnutrition et a déposé plus de 50 brevets.

Dans le cadre de la visite de l'usine de Nutriset, nous avons découvert la chaîne de production et de conditionnement des différents produits, ainsi que l'engagement qualité porté par l'entreprise. Nutriset innove également en matière de gouvernance : elle est devenue la première entreprise française à s'être dotée d'un Objet social étendu, dont l'objectif est « d'apporter des propositions efficaces aux problématiques de malnutrition ». Cet objectif est décliné en neuf engagements : par exemple, mener des activités de recherche et de développement. Ces engagements résument les valeurs qu'entendent porter les actionnaires, et font l'objet d'une évaluation annuelle par une commission.

Nous avons ensuite pu échanger avec des entrepreneurs du département lors d'une table ronde à Yvetot (commune de 12 000 habitants), qui a réuni une trentaine de chefs d'entreprises, de secteurs d'activité aussi divers que le prêt-à-porter, l'expertise de cavités souterraines, les maisons d'hôtes ou encore la vente de produits monastiques.

Les entrepreneurs ont fait part des principaux écueils qui freinent la croissance de leur activité. Nombre d'entre eux sont régulièrement mentionnés, comme encore lors de notre dernier déplacement en Creuse. En effet, les seuils, les surtranspositions (en matière d'exposition aux composés organiques volatils), les rigidités du droit du travail (notamment l'ouverture le dimanche), le poids et la complexité des normes - qui entravent plus particulièrement les petites entreprises ont encore été dénoncés. Les entrepreneurs ont exprimé des craintes renforcées en raison des nouvelles règlementations qui risquent d'accroître leur charge de travail, avec la mise en place du prélèvement de l'impôt à la source, ou de la règlementation sur la protection des données. Une entreprise d'abattage de volailles s'est ainsi demandé pourquoi elle devait garder 5 ans des papiers relatifs à un poulet qui doit être mangé dans les 9 jours.

Même si c'est moins prégnant que ce que nous avons pu constater dans la Creuse, les difficultés de recrutement sont apparues fortes, dans les métiers de bouche, la chaudronnerie aussi bien que le transport. Plusieurs entrepreneurs ont fait observer que la formation dans l'entreprise prenait un temps considérable aux salariés formateurs et que ce temps, qui ne rapporte rien directement à l'entreprise, devrait être valorisé, par exemple par un crédit d'impôt formation, sur le modèle du Crédit Impôt recherche (CIR).

La question des délais de paiement, de même que la difficulté pour accéder à un crédit bancaire, sont apparus encore comme des sujets de préoccupations qui ont été plusieurs fois signalés. La législation apparaît favorable au mauvais payeur, et les pratiques bancaires sont jugées défavorables aux entreprises puisqu'elles réservent les jours de valeur à l'encaissement des crédits et n'en appliquent jamais au décaissement des débits.

D'autres difficultés plus sectorielles rencontrées par différents chefs d'entreprise nous ont été signalées : d'abord, le manque de soutien à la filière bois et au recyclage du bois selon une logique d'économie circulaire. Ensuite, une entreprise spécialisée dans les marnières nous a sensibilisés au frein que représente pour elle l'application de taux différenciés de TVA entre les travaux de fondation qui bénéficient d'une TVA réduite et ceux de comblement. Enfin, un journal local nous a indiqué la nécessité de revoir les clauses de cession dans le secteur du journalisme : en effet, un journaliste peut partir avec 30 mois de salaire en cas de cession, ce qui constitue une ponction lourde pour le repreneur et menace la survie de la presse indépendante.

Après ces échanges constructifs, nous avons fait la visite d'une deuxième entreprise, AMN (ou Application Mécanique Normande), dans la commune de Port-Jérôme-Sur-Seine (10 000 habitants). AMN est l'un des principaux acteurs sur le marché français de l'outillage de granulation, étape décisive du processus de transformation des matières plastiques. Au cours de ce processus, le pétrole est craqué dans les raffineries, comprimé sous forme de gaz, ces gaz étant ensuite portés à l'état de pâte plastique. Cette matière est hachée en granulés à l'aide de trois outils : la filière, c'est-à-dire une plaque ronde par laquelle passe la matière plastique, les couteaux et enfin les porte-couteaux rotatifs. La société AMN se positionne sur deux marchés : celui des filières et celui des couteaux.

Créée en 1979, l'entreprise familiale a très vite été approchée par des sociétés de pétrochimie du bassin industriel local qui rencontraient des problèmes de granulation des matières plastiques. Grâce à un savoir-faire et une capacité d'innovation uniques, en associant des matériaux tels que l'inox et le carbure de tungstène, AMN a pu développer des outils haut de gamme qui augmentent la productivité et la qualité de la coupe de plastique. Forte du succès et de la technicité de ses produits, AMN s'internationalise à partir des années 1990 et développe une filiale commerciale au Texas. Quelques années plus tard, AMN est récompensée par le Premier ministre pour sa participation au rayonnement de la France sur les marchés extérieurs. Aujourd'hui, l'entreprise fournit les plus grandes sociétés pétrolières mondiales.

Durant la visite de l'usine AMN, nous avons découvert un impressionnant outil industriel, ainsi que la plus grande filière construite à ce jour dans le monde. Positionnée sur un marché de niche, AMN emploie aujourd'hui 37 collaborateurs et a réalisé en 2016 un chiffre d'affaires de plus de 5 millions d'euros, dont 90 % à l'export, dans 43 pays. Annuellement, l'entreprise produit entre 40 000 et 50 000 couteaux ainsi qu'une soixantaine de filières dont le prix peut dépasser les 150 000 euros.

La dernière usine que nous avons visitée, à la demande de la présidente, ce dont je la remercie, est EcoTechnilin, dans la commune de Valliquerville (1 400 habitants). EcoTechnilin est le leader français pour la fourniture de produits non tissés à base de fibres naturelles. Les principales fibres utilisées par EcoTechnilin sont végétales - telles que le lin, le jute ou le chanvre - mais elle emploie aussi des fibres de verre. La quasi-totalité des produits est destinée au secteur automobile (pour réaliser par exemple des tablettes arrière, des panneaux de portes, ou des fonds de coffre), et l'entreprise réalise 70 % de son activité à l'export. EcoTechnilin cherche de plus à se diversifier vers des produits haut de gamme.

Créée en 1995 par des coopératives agricoles, l'entreprise a connu des débuts mouvementés, et a déposé le bilan en 2008 avant d'être reprise par le négociant en céréales britannique Driftwell. EcoTechnilin s'est ensuite redressée pour devenir l'un des principaux acteurs européens de son secteur. L'année dernière, l'entreprise a rejoint le groupe Cap Seine, renouant avec ses origines coopératives et un ancrage territorial, au coeur de la première région productrice de lin d'Europe. La Seine-Maritime cultive à elle seule 19 000 hectares de lin sur les 60 000 que compte l'Hexagone. EcoTechnilin vient en outre d'investir 7 millions d'euros dans la construction d'une usine en Pologne pour desservir l'Europe de l'Est. C'est un secteur promis à un bel avenir : selon un rapport de l'Union Européenne, les biocomposites devraient représenter 30 % du marché européen des composites à l'horizon 2020, contre 15 % en 2010. EcoTechnilin est également une entreprise très innovante, qui a mis au point un filtre en lin capable de retenir les métaux lourds dans l'eau sur les chantiers de bâtiments ou de génie civil.

Nous avons fait la visite de l'outil industriel d'EcoTechnilin qui réalise le cardage, le nappage et l'aiguilletage des fibres. L'entreprise emploie aujourd'hui près de 50 salariés pour un chiffre d'affaires avoisinant les 15 millions d'euros. Entre 2016 et 2017, le total du bilan a augmenté d'environ 60 %.

C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai présenté à mes collègues ces trois entreprises, qui sont toutes de véritables réussites industrielles, ultra innovantes et particulièrement tournées vers l'export. Elles témoignent du dynamisme et de l'ambition du département, que nous devons soutenir pour créer un véritable tissu de PME. J'espère que mes collègues auront comme moi apprécié les échanges avec nos différents interlocuteurs, qui se sont illustrés tant par la qualité de leur accueil que par leur capacité à nous faire partager leur savoir-faire. Sachez que le succès de cette journée, qui a donné lieu à de bonnes reprises dans la presse locale, me vaut d'être déjà sollicitée pour l'organisation d'une nouvelle visite sénatoriale !

Mme Élisabeth Lamure . - Merci encore. Les trois entreprises que nous avons visitées étaient de beaux exemples de réussite, chacune atypique : Nutriset, au service de la malnutrition, AMN sur un créneau méconnu mais essentiel, celui des couteaux pour plastique, et Ecotechnilin qui exporte des productions à base de lin depuis la région française spécialisée dans cette culture.

Mme Nelly Tocqueville . - On trouve dans les territoires des niches et des entreprises qu'on ne soupçonnerait pas, avec des capacités d'innovation extraordinaires. C'est l'un des intérêts majeurs de ces déplacements.

Mme Élisabeth Lamure . - En effet. Le seul bémol, ce sont les transports !

M. Éric Jeansannetas . - La Creuse mène le même combat !

Mme Élisabeth Lamure . - En tout cas, nous avons pu échanger de manière nourrie avec les entreprises réunies à Yvetot autour d'une table ronde particulièrement garnie. J'ai aussi relevé les questions spécifiques que les marnières soulèvent pour les entreprises locales.

Mme Nelly Tocqueville . - Effectivement, c'est un problème local mais qui couvre un grand territoire, celui du pays de Caux, où il y a eu de multiples extractions dans les sous-sols créant de nombreuses galeries. Notre collègue Charles Revet pourrait en témoigner pour en avoir été victime à titre privé. Or il est difficile d'obtenir la reconnaissance du phénomène de catastrophe naturelle. Je suis également préoccupée par les questions de transmission d'entreprise dans ce pays : AMN est particulièrement soucieuse de cette perspective et a déjà été approchée par des grands groupes. Cette entreprise souhaite aussi pouvoir s'étendre, ce qui n'est pas toujours simple ; Ecotechnilin a la même ambition mais, du fait de son statut de coopérative, rencontre moins de difficultés, la commune mettant à sa disposition un terrain à Port-Jérôme. Je vous remercie encore pour votre attention.

Lors de sa réunion du 19 juillet 2018, la Délégation aux entreprises
a autorisé la publication du présent rapport.

ANNEXES

1. Programme des déplacements
a) Programme du déplacement effectué en Côte-d'Or le 15 décembre 2017, à l'initiative de Mme Anne-Catherine LOISIER, sénatrice (Union Centriste) de la Côte d'Or

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION

- Mme Élisabeth LAMURE, sénateur (Les Républicains) du Rhône, Présidente de la Délégation aux entreprises,

- Mme Anne-Catherine LOISIER, sénatrice (UC-R) de la Côte d'Or, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Michel CANEVET, sénateur (UC) du Finistère, membre de la Délégation aux entreprises,

- Mme Dominique ESTROSI-SASSONE, sénateur (Les Républicains) des Alpes-Maritimes, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Sébastien MEURANT, sénateur (Les Républicains) du Val d'Oise, membre de la Délégation aux entreprises,

- Mme Patricia MORHET-RICHAUD, sénatrice (Les Républicains) des Hautes-Alpes, Vice-présidente de la Délégation aux entreprises.

PROGRAMME

07h56

08h15

10h45

11h30

12h30

13h30

14h15

15h30

Arrivée gare de Montbard. Accueil par M. Joël BOURGEOT, sous-préfet de Montbard

VALINOX NUCLEAIRE (filiale du Groupe Vallourec et membre du Pôle de Compétitivité Nuclear Valley) : accueil-café par M. Jackie COUDERC, Directeur du site, et présentation en salle de l'entreprise et de l'association Métal'Valley. Visite du site.

(Montbard)

Accueil et présentation par M. Rémy HEYTE, proviseur, du lycée professionnel Eugène Guillaume, suivis d'une visite du pôle de formation industrie

(Montbard)

Table ronde réunissant des chefs d'entreprises locaux et des acteurs de la formation, en présence de Mme Laurence PORTE, Maire de Montbard et conseillère départementale.

Point presse

Départ pour l'Ecopôle Bois de La Roche-en-Brenil, labellisé Pôle d'Excellence Rurale (zone industrielle d'environ 35 hectares consacrée à la transformation du bois selon un principe d'économie circulaire)

Scierie FRUYTIER BOURGOGNE : visite de cette scierie, l'une des plus grosses de la région, en présence de M. Bruno MORENO, Directeur général

(La Roche-en-Brenil)

BRENIL PELLETS : visite de cette filiale de JRS en présence de M. Sylvain GULLY, Directeur. Présentation du projet de fabrication de pellets et d'utilisation des connexes de la scierie

(La Roche-en-Brenil)

b) Programme du déplacement effectué en Savoie le 12 février 2018, à l'initiative de Mme Martine BERTHET, sénatrice (Les Républicains) de Savoie

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION

- Mme Élisabeth LAMURE, sénateur (Les Républicains) du Rhône, Présidente de la Délégation aux entreprises,

- Mme Martine BERTHET, sénatrice (Les Républicains) de Savoie, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Guillaume ARNELL, sénateur (Rassemblement Démocratique et Social européen) de Saint-Martin, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Michel CANEVET, sénateur (UC) du Finistère, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Sébastien MEURANT, sénateur (Les Républicains) du Val d'Oise, membre de la Délégation aux entreprises,

- Mme Patricia MORHET-RICHAUD, sénatrice (Les Républicains) des Hautes-Alpes, Vice-présidente de la Délégation aux entreprises.

- M. Jackie PIERRE, sénateur (Les Républicains) des Vosges, Secrétaire de la Délégation aux entreprises.

PROGRAMME

10h00

10h45

11h45

14h00

15h15

16h30

Visite de SAVOIE TECHNOLAC, technopôle référent de la filière énergies-bâtiment dédié aux réseaux et aux énergies nouvelles.

Intervention de M. Jean-Pierre VIAL, sénateur de Savoie, sur la création de Savoie Technolac puis visite de l'incubateur avec M. Hervé LAURENT, Directeur de la base d'incubation de Savoie technolac, et de quelques entreprises en incubation.

(Le Bourget-du-Lac)

Visite de l'entreprise ENERGY POOL DEVELOPPEMENT, qui offre des solutions pour optimiser la consommation électrique, avec M. Olivier BAUD, président fondateur.

Table ronde réunissant des entreprises (industrie, Cluster montagne, Savoie Technolac...), des institutionnels et des élus, au Conseil départemental

(Chambéry)

Point presse

Visite de l'entreprise POMA, spécialisée dans la fabrication de systèmes de transport par câble avec M. Philippe LAVILLE, Président de SACMI, Groupe POMA

(Gilly-sur-Isère)

Visite du groupe SAF (Secours aérien français), avec M. Christophe ROSSET, Président de SAF HELICOPTERES et Président d'HELICAP

(Aérodrome de Tournon, Albertville)

c) Programme du déplacement effectué dans la Creuse le 25 mai 2018, à l'initiative de M. Éric JEANSANNETAS, sénateur (Socialiste et Républicain) de la Creuse

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION

- Mme Élisabeth LAMURE, sénateur (Les Républicains) du Rhône, Présidente de la Délégation aux entreprises,

- M. Éric JEANSANNETAS, sénateur (Socialiste et Républicains) de la Creuse, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Guillaume ARNELL, sénateur (RDSE) de Saint Martin, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Michel CANEVET, sénateur (Union Centriste) du Finistère, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Jean-Marc GABOUTY, sénateur (RDSE) de Haute Vienne, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Sébastien MEURANT, sénateur (Les Républicains) du Val-d'Oise, membre de la Délégation aux entreprises,

-M. Claude NOUGEIN, sénateur (Les Républicains) de Corrèze, membre de la Délégation aux entreprises (l'après-midi),

- Mme Nelly TOCQUEVILLE, sénatrice (Socialiste et républicain) de Seine-Maritime, vice-présidente de la Délégation aux entreprises.

PROGRAMME

11h00

12h15

14h30

15h45

16h30

Visite de l'entreprise MICROPLAN, société spécialisée dans les bâtis en granit pour la métrologie

(La Foret du Temple)

Visite de l'entreprise ATULAM, société spécialisée dans la restauration de fenêtres en bois

(Jarnages)

Table ronde réunissant des entreprises, des institutionnels et des élus

(Guéret)

Point presse

Visite de l'entreprise TIGR, spécialisée dans la fabrication d'équipements aérauliques et frigorifiques industriels

( La Souterraine )

d) Programme du déplacement effectué en Seine-Maritime le 11 juin 2018, à l'initiative de Mme Nelly TOCQUEVILLE, sénatrice (Socialiste et Républicain) de la Seine-Maritime

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION

- Mme Élisabeth LAMURE, sénateur (Les Républicains) du Rhône, Présidente de la Délégation aux entreprises,

- Mme Nelly TOCQUEVILLE, sénatrice (Socialiste et Républicains) de Seine-Maritime, Vice-présidente de la Délégation aux entreprises,

- Mme. Agnès CANAYER, sénateur (Les Républicains) de Seine-Maritime, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Michel CANEVET, sénateur (Union Centriste) du Finistère, membre de la Délégation aux entreprises,

- Mme Jackie DEROMEDI, sénatrice (Les Républicains) des Français établis hors de France, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Sébastien MEURANT, sénateur (Les Républicains) du Val-d'Oise, membre de la Délégation aux entreprises,

- M. Jackie PIERRE, sénateur (Les Républicains) des Vosges, Secrétaire de la Délégation aux entreprises.

PROGRAMME

08h40

10h40

10h45

12h15

14h45

16h45

Accueil, par M. Thomas COUAILLET, Directeur, et visite de l'entreprise NUTRISET

(Malaunay)

Accueil en l'Hôtel de ville d'Yvetot par M. Emile CANU, Maire, et M. Gérard CHARASSIER, Président de la Communauté de Communes de la Région d'Yvetot (CCRY)

(Yvetot)

Table ronde avec une vingtaine d'entreprises en partenariat avec l'antenne locale de la CCI

Point presse

Accueil et présentation, par M. Christian PIERENS, PDG, et visite de l'entreprise APPLICATION MÉCANIQUE NORMANDE (AMN), spécialisée dans la production de pièces pour l'industrie plastique, en présence de Mme Virginie CAROLO LUTROT, maire de Notre-Dame-de-Gravenchon

(Port-Jérôme-sur-Seine)

Accueil par M. BEHLOULI, Directeur, et visite de l'entreprise ECO-TECHNILIN, leader français pour la fourniture de produits non tissés à base de fibres naturelles.

(Valliquerville)

2. Liste des entrepreneurs rencontrés dans les territoires
a) Côte-d'Or

- Jean-Christophe CHASSAIGNE, Président de METAL VALLEY,

- Jackie COUDERC, Directeur du site, VALINOX Nucleaire (filiale du Groupe Vallourec et membre du Pôle de Compétitivité Nuclear Valley),

- Fabrice DESCOMBES, Président, Ateliers Pierre de Bourgogne,

- Séverine GRESSET, Dirigeante Menuiserie Gresset à Châtillon sur Seine et VP du Club des Entreprises du Châtillonnais,

- Sylvain GULLY, Directeur de projet, scierie BRENIL PELLETS,

- Julie JACQUENET, Dirigeante de Jacquenet-Malin Entreprise,

- Jocelyne JACQUET, Présidente du Club des Entrepreneurs de l'Auxois,

- Edmond LEFEBVRE, Directeur, Sogepierre société : extraction et taille de pierre dans le Châtillonnais,

- Alain MALGRAS, Président du Club des entrepreneurs du Chatillon,

- Bruno MORENO, Directeur général, Scierie Fruytier Bourgogne,

- Aurore RICHARD, Directrice des Ressources humaines chez Thomas Maroquinerie (établissement du groupe Maroquinerie Auguste Thomas).

b) Savoie

- Jean-Michel AMARÉ, Président d'ATAWEY, solutions d'approvisionnement énergétique autonome,

- Olivier BAUD, Président Energy Pool Developpement,

- Didier BIC, Directeur de KASBOHRER, fabricant de dameuses,

- Dominique FAVARIO, Président de SAVOIE MONT BLANC ANGELS,

- Philippe GARZON, Directeur antenne Savoie de Auvergne Rhône-Alpes entreprises,

- Bruno GASTINNE, Président, Chambre de commerce et d'industrie de SAVOIE (CCI),

- Bruno HENRIET, Directeur du site d'UGITECH,

- Xavier JOLY, Président de GASEO DEVELOPPEMENT, production d'énergie à partir de biogaz,

- Hervé LAURENT, Directeur de la base d'incubation de Technolac,

- Philippe LAVILLE, Président de SACMI, Groupe POMA,

- Guy LECOMTE, Président de l'association CHOISIR SAVOIE,

- Marc LO PIZZO, Directeur de l'établissement d'Ugine de Framatome,

- Loïc MAENNER, Directeur de TRIMET, métallurgie, transformation d'aluminium, d'alliages,

- Pierre MARTOIA, Directeur de l'entreprise MARTOIA, BTP,

- André MOLLARD, Président de la Chambre des métiers de la Savoie.

- Virginie REITZER, Déléguée générale du Club des entreprises de l'université,

- Patrick RICHIERO, Directeur de l'entreprise RICHIERO SAS Electricité et Président de CPME Savoie,

- Christophe ROSSET, Président de SAF Hélicoptères,

- Nathalie SAINT-MARCEL, Représentante du CLUSTER Montagne,

- Mikael TOUSSAINT, Directeur des relations institutionnelles du groupe Montagne et Neige développement (MND).

- c) Creuse

- Gilles BEAUCHOUX, Président, Chambre de commerce et d'industrie de la Creuse (CCI), Maison de l'Économie,

- Claude BERNARD, SARL BERNARD,

- Caroline BIGOURET, PDG, FONTVIELLE,

- Jimmy BROGNARA, Directeur, entreprise TIGR (Fabrication d'équipements aérauliques et frigorifiques industriels),

- Patrice BRUNAUD, Directeur, Atelier Creusois de Chaudronnerie,

- Philippe DUGENEST, Directeur général, MICROPLAN,

- Xavier LECOMPTE, Président, ATULAM (Financière Lecompte SARL),

- Jérôme LEVASSOR, Directeur, Aquaroche,

- Jean-Marc POUZAUD, Chef d'agence, COLAS, Charentes-Limousin,

- Stéphane VAN DEN DRIESSCHE, PDG, magasin Leclerc Guéret.

- d) Seine-Maritime

- Isabelle AUTRIVE, BHN Expertise, Expert Comptable,

- Jérémy BACA, Gérant, Société TTEN, Nettoyage industriel,

- Karim BEHLOULI, Directeur général, ECO TECHNILIN, Fabrication des produits à base de fibres naturelles,

- Christophe BENARD, Atelier BENARD, Ebéniste, menuisier d'art,

- Sophie BIGOT, Gérante, ESPRIT VOYAGES, Agence de voyages,

- Michel CANU, PDG, INTERMARCHÉ, Grande distribution,

- Frédéric CHARTRON, EURL FIJA, Vente Electroménager,

- Père Abbé CHOPIN, ABBAYE St Wandrille, Vente de produits monastiques,

- Thomas COUAILLET, Directeur, Nutriset,

- Xavier DELASSUS, Dirigeant, DIMSPIA, Mécanique chaudronnerie en milieu agricole,

- Etienne DJELLOUL, Gérant, INDIGO Prêt à Porter,

- Harold DUCHESNE, Chargé d'affaires, Société DUCHESNE, Fabrication, constructeur d'escaliers,

- Frédéric DUROZEY, Meuble DUROSEY,

- Didier HIS, Président, SOCAUVOL, Abattage de volailles,

- Julien HUE, Président, Sté Huiles HAFA,

- Brigitte JOUTEL, Traiteur JOUTEL,

- Dominique LECOQ, Directeur délégué, COURRIER CAUCHOIS Presse Locale,

- Emmanuel LECOURT, Directeur commercial, Cars HANGARD, Transport touristique,

- Jeanne LOZAY, LA MAISON PLUME, Chambres d'hôtes,

- Sylvie MAZARS, DRH, Cars HANGARD, Transport touristique,

- Christian PIERENS, Président, entreprise APPLICATION MÉCANIQUE NORMANDE (AMN),

- Eric PRINS, BHN Expertise, Expert Comptable,

- Bruno RENIER, Directeur, Société BICHOT, Chauffage plomberie,

- Sylvain ROUSSEAU, Chief Financial, Société REVIMA, Entretien de matériels aéronautiques,

- Franck SAILLARD, Gérant, LS FROID, Vente et installation frigorifique,

- Laurent de SUTTER, PDG, LINEX PANNEAUX (de bois),

- Frère Benoît VACHETTE, ABBAYE St Wandrille, Vente de produits monastiques,

- Gilles WAYERE, Président, FOR&TEC, Expertise cavités souterraines.


* 1 Selon les termes de l'article II ter du chapitre XVII bis de l'Instruction générale du Bureau du Séant lequel a, par l'arrêté n°2014-280 du 12 novembre 2014, créé la délégation sénatoriale aux entreprises.

* 2 Dans le prolongement de son rapport d'information Simplifier efficacement pour libérer les entreprises de Mme Élisabeth LAMURE et M. Olivier CADIC, n° 433 (2016-2017) déposé le 20 février 2017 et suivi par le dépôt de plusieurs textes qui en déclinent juridiquement les préconisations (textes n° 721, 722, 723 et 724) le 28 septembre 2017.

* 3 La surtransposition du droit européen en droit français : un frein pour la compétitivité des entreprises , rapport d'information de M. René DANESI, fait au nom de la commission des affaires européennes et de la délégation aux entreprises, n° 614 (2017-2018), déposé le 28 juin 2018.

* 4 Moderniser la transmission d'entreprise en France : une urgence pour l'emploi dans nos territoires , rapport d'information de MM. Claude NOUGEIN et Michel VASPART, n° 440 (2016-2017, déposé le 23 février 2017.

* 5 Proposition de loi visant à moderniser la transmission d'entreprise, n° 343 de MM. Claude NOUGEIN, Michel VASPART et plusieurs de leurs collègues, déposée au Sénat le 7 mars 2018 et adoptée par le Sénat le 7 juin 2018.

* 6 Proposition de loi visant à développer l'apprentissage comme voie de réussite, n° 394 de Mme Élisabeth LAMURE, M. Michel FORISSIER et plusieurs de leurs collègues, déposée au Sénat le 10 février 2016.

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