B. ...ET QUI REPOSE SUR DES MESURES D'ÉCONOMIES PEU DOCUMENTÉES
Dans la mesure où l'effort de redressement repose, à juste titre, exclusivement sur la maîtrise de la dépense, il implique la mise en oeuvre d'un programme d'économies d'une ampleur inédite.
D'ici 2022, le montant des économies nécessaires pour respecter l'objectif d'évolution de la dépense publique atteindrait ainsi 81 milliards d'euros.
Estimation du montant des économies à réaliser pour respecter l'objectif d'évolution de la dépense publique
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances du Sénat (à partir du tendanciel d'évolution de la dépense publique retenu par la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques 2017)
À cet égard, si le budget 2018 a engagé un premier effort de réorientation de la dépense publique rompant avec la logique du « rabot », en particulier dans les domaines de l'emploi et du logement, la crédibilité de la trajectoire gouvernementale reste difficile à apprécier au-delà, tant les économies demeurent peu documentées .
La mise en oeuvre d'une démarche volontariste d'identification d'économies ciblées dans le cadre du processus « Action publique 2022 » paraît louable mais les précédents échecs de la « modernisation de l'action publique » (MAP) et des « revues de dépenses » invitent à la plus grande prudence . À ce stade, la concrétisation de ce processus se limite à la première série de mesures annoncées le 1 er février 2018 lors du comité interministériel de la transformation publique, dont le potentiel d'économies n'apparaît pas évident 45 ( * ) .
Compte tenu de ces incertitudes, votre rapporteur général a évalué les conséquences d'un éventuel « dérapage » de la dépense sur la trajectoire de redressement des comptes publics , en faisant l'hypothèse d'un dépassement annuel de l'objectif d'évolution de la dépense publique du Gouvernement équivalent à celui observé en 2017, soit 0,6 point.
Sensibilité de la trajectoire budgétaire aux objectifs de maîtrise de la croissance de la dépense publique
(taux d'évolution en volume, % du PIB)
Scénario du Gouvernement |
||||||
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
|
Croissance de la dépense publique (*) |
1,5 |
0,7 |
0,4 |
0,3 |
0,3 |
0,2 |
Solde nominal |
- 2,6 |
- 2,3 |
- 2,4 |
- 0,9 |
- 0,3 |
0,3 |
Dette publique |
97,0 |
96,4 |
96,2 |
94,7 |
92,3 |
89,2 |
Scénario avec un dépassement de
l'objectif de croissance de la dépense de 0,6 point par an
|
||||||
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
|
Croissance de la dépense publique (*) |
1,5 |
1,3 |
1,0 |
0,9 |
0,9 |
0,8 |
Solde nominal |
- 2,6 |
- 2,6 |
- 3,0 |
- 1,9 |
- 1,6 |
- 1,3 |
Dette publique |
97,0 |
96,7 |
97,2 |
96,7 |
95,6 |
94,1 |
Note : (*) hors crédits d'impôts.
Source : commission des finances du Sénat
Dans ce scénario, le déficit public manquerait de dépasser le seuil de 3 % du PIB en 2019 et la dette publique resterait pratiquement stable jusqu'en 2020, avant de décroitre légèrement en fin de période.
Compte tenu de cette forte sensibilité de la trajectoire gouvernementale à l'évolution de la dépense publique, il apparaît indispensable d'adopter sans tarder une stratégie crédible de maîtrise de cette dernière. À cet égard, votre rapporteur général maintient que le Gouvernement pourra difficilement faire l'économie de réformes visant à maîtriser la masse salariale publique et les dépenses de retraite , qui représentent près de la moitié du total de la dépense publique et demeurent, jusqu'à présent, deux « angles morts » de sa politique 46 ( * ) .
* 45 Programme national de réforme 2018, p. 78.
* 46 Sur ces sujets, le lecteur est invité à se reporter aux préconisations et aux analyses produites par votre rapporteur général dans le cadre du rapport précité sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, p. 56 et s.