Rapport d'information n° 405 (2017-2018) de M. Olivier CADIC , fait au nom de la Délégation aux entreprises, déposé le 5 avril 2018

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N° 405

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 avril 2018

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux entreprises (1) relatif à l' accompagnement du cycle de vie des entreprises ,

Par M. Olivier CADIC,

Sénateur

(1) Cette délégation est composée de : Mme Élisabeth Lamure, présidente ; MM. Gilbert Bouchet, Olivier Cadic, Emmanuel Capus, Fabien Gay, Xavier Iacovelli, Joël Labbé, Mmes Patricia Morhet-Richaud, Nelly Tocqueville, MM. Michel Vaspart, Richard Yung, vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Catherine Fournier, Pascale Gruny, M. Jackie Pierre, secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Guillaume Arnell, Mmes Martine Berthet, Annick Billon, M. Martial Bourquin, Mme Agnès Canayer, M. Michel Canevet, Mmes Anne Chain-Larché, Laurence Cohen, M. René Danesi, Mme Jacky Deromedi, M. Jérôme Durain, Mme Dominique Estrosi Sassone, MM. Michel Forissier, Jean-Marc Gabouty, Éric Jeansannetas, Antoine Karam, Guy-Dominique Kennel, Daniel Laurent, Jacques Le Nay, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Sébastien Meurant, Claude Nougein, Philippe Paul, Rachid Temal, Jean-Louis Tourenne, Mme Sabine Van Heghe.

SYNTHÈSE

I - LIBERER LA CREATION D'ENTREPRISE

591 000 entreprises ont été créées en 2017, soit deux fois plus qu'il y a dix ans.

Pourtant le rapport Doing Business de 2018, qui évalue la facilité à faire des affaires, fait reculer la France de deux places en un an, au 31 ème rang sur 190. Paris n'occupe que la 11 ème place des villes les plus dynamiques du monde pour les start up que notre écosystème peut produire mais qui peuvent être rapidement revendues à l'étranger.

Jamais le dynamisme entrepreneurial n'a été aussi fort, surtout chez les jeunes et 40 % des créateurs d'entreprise sont des créatrices. Or, des intentions aux actes, des freins demeurent, à commencer par la complexité administrative , comme le constatait dès 2008 le rapport Attali.

Créer son entreprise est un parcours du combattant qui commence dès lors que l'on souhaite se renseigner, et plus encore dans le choix du statut juridique de l'entreprise pour lequel Infogreffe recense 87 catégories différentes de sociétés . La différence entre une entreprise individuelle, qui est un statut, et la micro-entreprise, qui est un régime fiscal et social n'est pas évidente. Surtout que, depuis la création de ce dernier régime en 2009, les contraintes administratives se sont alourdies, comme l'obligation de posséder un logiciel de facturation. La proposition du rapport Grandguillaume de 2013 de simplification du statut juridique de l'entreprise, reprise par le Conseil de simplification pour les entreprises en 2014, n'a jamais été mise en oeuvre. Mieux, le rapprochement des régimes micro-social et micro-fiscal a été repoussé à 2020 et le doublement des seuils d'imposition risque de se révéler une mauvaise affaire pour les micro-entrepreneurs, les seuils de TVA n'ayant pas changé.

Si les Centres de formalités des entreprises se présentent comme un « guichet unique », ce qu'ils ne sont pas (il y en a 7 !), Infogreffe est l'interface la plus accessible et la plus rapide. Une fois l'entreprise créée, la publication effectuée par les annonces légales et le « Kbis » obtenu, l'entreprise doit enregistrer les « bénéficiaires effectifs », se voit attribuer un numéro SIREN, un SIRET par établissement, un code APE, lequel peut lui rendre applicable la convention collective de branche. Elle peut également faire protéger sa marque par l'INPI.

Dans leurs relations avec l'administration fiscale , les PME peuvent bénéficier de l'assistance d'un centre de gestion agréée, onéreuse, peu efficiente globalement comme l'a constaté la Cour des comptes en 2014. Les déclarations sociales, particulièrement complexes, font l'objet d'une « simplification » applicable aux entreprises depuis 2016. Son application aux personnes publiques a été repoussée en 2022, exemple caractérisé où l'État s'exonère des exigences qu'il impose aux entreprises privées .

Trois exemples de complexité du régime social de l'entreprise peuvent être mis en lumière : la généralisation des complémentaires santé, des exonérations et allègements de charges sociales, l'assujettissement des dividendes et stock-options à cotisations sociales.

Il conviendrait de regrouper les différents statuts de l'entreprise en deux grandes catégories, l'entreprise individuelle et la société anonyme (outre le régime des sociétés cotées), ce qui suppose une « remise à plat » d'ampleur.

Pour simplifier, il importe de créer un portail unique regroupant l'ensemble des sites publics fournissant de l'information sur la création d'entreprise, de faire d'Infogreffe un guichet unique des formalités de création des entreprises , d'étendre l'obligation d'immatriculation au RCS aux associations ayant une activité économique et employant plus de 10 salariés, de créer un identifiant unique afin d'éviter les démarches successives d'inscription auprès de différents « guichets » de l'administration. Toutes les déclarations relatives à la vie de l'entreprise seraient regroupées dans une déclaration annuelle . L'objectif de dématérialisation totale, déjà avancé en 2011, devrait conduire à mettre un terme à l'obligation de publication papier des annonces légales, ce qui représenterait pour les entreprises une économie de 250 millions d'euros par an.

La micro-entreprise, écosystème fragile, ne nécessite cependant pas de créer un statut du travailleur indépendant mais davantage de sécuriser les entreprises dans leurs relations avec ces entrepreneurs individuels en limitant les possibilités de leur requalification en salariés .

En revanche, il paraît utile de développer l'accompagnement de la création d'entreprise qui permet d'améliorer la réussite et la pérennité des jeunes entreprises, en le considérant comme du mécénat d'entreprise.

Pour alléger les charges pesant sur les PME, il faudrait aligner les seuils de certification des comptes par des commissaires aux comptes sur les normes européennes, revenant ainsi sur une surtransposition, tout en maintenant le rôle des centres de gestion agréés qui concourent à la lutte contre la fraude fiscale et jouent un rôle utile de pré-contrôle fiscal, voire d'alerte des difficultés de l'entreprise.

II - SOUTENIR LA CROISSANCE DE L'ENTREPRISE

Entre 2009 et 2016, le nombre des micro-entreprises a été multiplié par trois, mais sur le million déclaré, seules 2/3 (670 000) sont économiquement actives. Leur pérennité est faible, contribuant à une perception négative de l'aventure entrepreneuriale. Les TPE sont essentiellement tournées vers le marché local : elles représentent 19 % des emplois mais seulement 13 % du chiffre d'affaires total des entreprises et 3 % des exportations. La France compte deux fois moins de PME que l'Allemagne et manque singulièrement de « gazelles », entreprises en croissance rapide.

La France ne manque pas d'épargne . Mais elle est mal orientée et les épargnants délaissent les actions. Le nombre d'entreprises cotées a été divisé par deux en 8 ans, et le nombre de PME cotées a baissé de 10 %. Les ménages privilégient l'assurance-vie et l'investissement locatif. Le fonds pour l'innovation de rupture, alimenté par les privatisations, suffira-t-il à assurer le financement des entreprises ? Quoi qu'en dise le Gouvernement, qui ne souhaite pas créer de nouvelle niche fiscale, il manque un instrument dédié à cet objectif notamment pour créer un outil adapté au capital-risque afin de permettre le décollage des PME.

La France ne manque pas d'investissement, mais celui-ci est mal orienté et trop concentré , étant plus faible dans les ETI et plus encore dans les PME. La France manque d'investisseurs de long terme et la French Tech n'est pas à l'abri d'un retournement brutal de conjoncture. Il faut donc mener une bataille culturelle pour faire revenir l'épargne des ménages vers les actions , une bataille de simplification pour dissuader les entreprises de quitter les marchés sur-réglementés pour aller vers le private equity non régulé. D'autant que la France ignore les fonds de pensions, sauf pour les fonctionnaires, alors que ce financement est nécessaire pour compléter la retraite par répartition.

Pour renforcer l'investissement dans les entreprises, il faut doubler le mécanisme de l'IR-PME par analogie avec le dispositif britannique de l'Enterprise Investment Scheme , lequel vient d'être porté de 1 à 2 millions de livres sterling.

Le crédit bancaire envers les entreprises et singulièrement les TPE-PME reste frileux. Malgré un code de bonnes pratiques, une amélioration de la lisibilité des tarifs de financement, un engagement actif de la Médiation du crédit, une forte auto-censure de demande de crédit freine le développement des entreprises. L'intervention de Bpifrance n'est pas décisive sauf dans le segment des entreprises innovantes où elle comble la défaillance de l'investissement privé. Cette surexposition de la banque publique risque à terme de fausser l'allocation des ressources.

La France est bien placée dans la Fintech et la blockchain , qui devraient permettre une meilleure appréhension du risque financier à même de sécuriser les épargnants et diminuer les coûts de transaction des marchés, « ubérisation » du financement de l'économie dont les PME pourraient bénéficier. Il sera cependant nécessaire d' aider les TPE et les PME à s'approprier les nouveaux usages numériques et à intégrer ces technologies afin d'améliorer leur compétitivité.

La France manque en revanche d'ETI, lesquelles prennent une part essentielle à l'économie nationale comme l'avait relevé le rapport Retailleau de 2010, et qui sont les champions français sur les marchés mondiaux. Le marché du capital-investissement leur est particulièrement adapté. Toutefois, et alors même que les pouvoirs publics conviennent de la faiblesse des ETI françaises par rapport à leurs concurrents européens, ils leur imposent un empilement de mesures administratives, sans articulation, qui soumettent les ETI, à partir d'un certain seuil, aux mêmes obligations que les sociétés cotées et qui entravent leur transmission.

Au choc de simplification annoncé et tenté en 2012-2014 avec des résultats mitigés, a succédé en 2016-2017 un choc de complexité pour les ETI, résultant soit de la transposition de directives européennes, soit de lois qui ont accru les obligations d'information que cette catégorie d'entreprise doit recenser et rendre publiques : publication d'informations extra-financières (RSE), loi Sapin 2 etc... L'alourdissement de cette information est devenu indigeste pour l'actionnaire, l'investisseur et le public. L'ordonnance du 17 juillet 2017 a allégé certaines contraintes, notamment en mettant fin opportunément à la surtransposition de la directive comptable.

De nombreux dispositifs publics d'aide aux entreprises ont été développés, mais le logiciel permettant de se repérer dans les 1 654 aides publiques ne doit pas dispenser d'une rationalisation réclamée par la Cour des comptes en 2007, le rapport Guillaume de 2011 ou encore le rapport Queyranne de 2013 qui recensait 365 aides d'État représentant chacune moins de 5 millions d'euros. Ce foisonnement d'aides contraste avec un faible accès des PME, notamment innovantes, à la commande publique , déjà soulignée par le rapport Bourquin d'octobre 2015, qu'il conviendrait de faciliter en priorité. Il faut par ailleurs sécuriser les entreprises innovantes, susceptibles de se voir opérer un redressement fiscal en cas de recours au crédit d'impôt recherche et au crédit d'impôt en faveur de l'innovation .

Pour aider à la croissance des entreprises, il convient de réduire la complexité du droit de l'entreprise . La prise de conscience date de 2008 au niveau européen et la création de la Délégation sénatoriale aux entreprises en 2014 à l'initiative du Président Larcher en est le reflet. L'accumulation des formalités exigées a rendu le droit des sociétés formel. Les entreprises françaises doivent produire chaque année 10,7 millions de pièces justificatives demandées par l'administration, à l'occasion de 4,1 millions de démarches . Cette complexité administrative coûte chaque année 60 milliards d'euros à l'économie française. L'OCDE estime que 15 milliards pourraient être dégagés par une réduction de cette complexité. La loi pour un État au service d'une société de confiance est cependant un rendez-vous manqué . Le texte est davantage une incitation pour l'administration à s'adapter, dans le temps long (17 expérimentations et 12 habilitations à légiférer par ordonnance), qu'un allégement immédiat du fardeau administratif de nos entreprises pour conduire la bataille économique. Il vaudrait mieux mener rapidement à terme la simplification pragmatique du code de commerce initiée par le Sénat depuis août 2014 et discutée en séance publique le 8 mars dernier, élément contribuant à l'action que mène le Sénat en faveur de la simplification pour les entreprises.

L'entreprise n'a jamais été définie en droit . Créer un code des entreprises permettrait de rassembler les dispositions éparses qui traitent des entreprises, quelle que soit leur forme juridique. À cette occasion, une remise à plat serait effectuée, à l'instar de ce qui a été fait en Allemagne en 2009. De même, comme l'a proposé le Sénat le 24 octobre 2017 dans la proposition de loi d'orientation et de programmation pour le redressement de la justice, conviendrait-il de créer un tribunal des affaires économiques pour unifier le contentieux du droit des entreprises en difficultés.

Contrairement aux normes obligatoires, la normalisation volontaire favorise le développement de l'entreprise. L es entreprises qui s'investissent dans l'élaboration de normes volontaires et les appliquent ont connu un surcroît de croissance annuelle de leur chiffre d'affaires de 20 % et autant pour l'exportation. Les entreprises allemandes l'ont bien compris et sont les plus engagées dans le monde dans le processus de normalisation de l'ISO.

Il faut donc encourager les entreprises françaises à s'engager dans le processus de normalisation, leur permettant de co-créer des normes qui améliorent leur performances et leur permettent de bénéficier d'avantages comparatifs par rapport à leurs concurrents.

L'entreprise est également collectrice d'impôts.

À compter du 1 er janvier 2019, les entreprises seront même désormais des tiers collecteurs de l'impôt à la source , ce qui aura un coût élevé de gestion pour elles.

Les entreprises étaient redevables de 233 prélèvements en 2016, collectant 773 milliards de recettes fiscales pour l'État , mais huit concentraient 85 % des recettes et 96 autres n'en représentaient que 0,3 %. Outre les quatre taux de TVA, la collecte de ces taxes par les entreprises est source de complexité pour les entreprises. L'administration fiscale fait en outre subir aux entreprises un « yalta administratif » entre la DGFiP et la DGDD, alors que plusieurs déclarations pourraient être réunies au sein d'un même document avec un même interlocuteur. Les contrôles fiscaux aléatoires sur les entreprises devront être remplacés à terme par un ciblage utilisant les outils de la Fintech , permettant à des algorithmes de procéder à une analyse des bilans des entreprises afin de détecter d'éventuelles fraudes. Mieux ciblé, le contrôle fiscal sera ainsi mieux accepté. Le temps ainsi gagné pourra être consacré par l'administration fiscale à des fonctions de conseil aux entreprises.

De même, les déclarations sociales pourraient être simplifiées ; l'assujettissement aux cotisations sociales des dividendes et stock-options, singularité de la France en Europe, pourrait être supprimé . Enfin, la simplification, pour l'entreprise, du bulletin de paie reste à entreprendre. Pourquoi ne pas créer un organisme interface entre les salariés et les organismes sociaux, afin de créer un taux de cotisation sociale unique pour les salariés et les entreprises en fonction du salaire distribué à charge pour cet organisme de répartir les cotisations sociales entre tous les organismes sociaux ?

La France est un pays de seuils . Elle compte 2,4 fois plus d'entreprises de 49 que de 51 salariés et 1,8 fois plus d'entreprises de 48 et 49 salariés qu'en Allemagne. Le gel des seuils, préconisé par le Sénat depuis la discussion de la loi Macron en 2015, devrait être une étape vers leur alignement sur un nouveau seuil unique de 250 salariés.

Pour orienter l'épargne des ménages vers les entreprises, le rapport recommande d'assouplir au préalable les contraintes de la directive Solvabilité II et de renforcer l'éducation financière .

Outre la réforme de l'eurocroissance et le développement de nouveaux contrats en euros bonifiés, il faut encourager la portabilité et la transférabilité totales des produits d'assurance-vie au cours de la vie professionnelle et faire de l'épargne retraite un instrument d'attractivité de la France pour tous les entrepreneurs européens, en garantissant sa portabilité européenne, favorisant ainsi la mobilité internationale des salariés. Cela permettrait à la nouvelle génération d'entrepreneurs, notamment de start upers de se lancer dans une aventure entrepreneuriale à l'échelle européenne en étant garantis d'une épargne-retraite constituée indépendamment de leur lieux d'activité successifs, laquelle concourrait au financement de l'économie, en renforçant l'investissement en fonds propres.

Pour le financement des PME par les marchés, le préalable est d'assouplir la directive Prospectus , mais également d'endiguer la sur-règlementation du droit souple de la part des autorités de régulation (on dénombre un stock de 790 recommandations pour l'Autorité des marchés financiers) ou d'expérimenter des circuits courts de financement.

Dans la bataille de l'exportation, les PME françaises exportatrices (de 125 000 à 360 000) considèrent que le soutien public à l'export est peu efficace. Le plan d'action annoncé le 23 février 2018 ne semble pas à la hauteur du déficit de 63 milliards de notre balance commerciale.

Pour permettre aux entreprises exportatrices de se battre à armes égales à l'international avec leurs concurrents internationaux et rapatrier en France la marge bénéficiaire réalisée actuellement à l'étranger par des entreprises françaises, il faut moduler le taux de l'IS en fonction de la part des exportations dans le chiffre d'affaires de l'entreprise, l'avantage fiscal étant plafonné à 200 000 euros (règle de minimis ).

III - TRANSMETTRE, REBONDIR OU DISPARAITRE,

LA FIN DE VIE DES ENTREPRISES

Avec 55 000 défaillances d'entreprises par an, un nombre en diminution, la France se situe dans la moyenne européenne pour la durée de ses procédures (composées à 70  % de liquidation judiciaire, 27 % de règlement judiciaire et 2 % de sauvegarde). L'activité économique préservée par ces procédures varie entre 3 et 5 milliards.

Depuis quelques années, le regard sur l'échec change . Alors qu'aux États-Unis, un échec entrepreneurial est une expérience , c'est en France toujours une défaillance de l'entrepreneur. Cependant, les notions de rebond et de seconde chance progressent, notamment avec la suppression en 2013 d'une mesure pénalisante et stigmatisante des entrepreneurs passés par une liquidation judiciaire, et grâce aux associations d'aide au rebond. Cependant, l'extension de l'assurance-chômage des entrepreneurs, promise lors de la campagne présidentielle, et susceptible de dédramatiser l'échec, se réduit pour l'instant aux seuls travailleurs indépendants ayant connu une liquidation judiciaire.

Le droit français des entreprises en difficulté met l'accent sur la prévention. Il est particulièrement complexe , que ce soit pour ses procédures préventives ou pour ses procédures judiciaires. Depuis une quinzaine d'années, le législateur a créé de nouvelles procédures, sans cesse plus ciblées, pour s'adapter à toutes les situations en créant un continuum rendant parfois difficile l'appréciation de l'adéquation de la procédure applicable à la situation économique de l'entreprise, notamment pour les PME.

Le Président de la République ayant, en septembre 2017, ouvert une perspective d'unification du droit franco-allemand de la faillite, le rapport s'attache à une comparaison avec le droit allemand .

Deux divergences (soulignées par des études d'Oseo en 2008 et de la COFACE en 2012) essentielles dominent :

1/ alors que le droit français a développé une grande variété de procédures amiables (mandat ad hoc , conciliation) ou judiciaires (redressement judiciaire, liquidation judiciaire, liquidation judiciaire simplifiée, sauvegarde, sauvegarde financière accélérée), le droit allemand se fonde sur une seule procédure ;

2/ alors que le droit français offre une protection faible aux créanciers par rapport aux autres parties, notamment les actionnaires, le droit allemand se situe dans une position intermédiaire en termes de protection des créanciers. En France, le débiteur a le monopole de la présentation du plan de sauvegarde et les créanciers sont seulement invités à formuler un avis, non liant, sur ce plan. En Allemagne, un juge dirige la procédure collective mais doit obtenir l'accord des créanciers pour toute restructuration du passif.

Cette convergence franco-allemande d'un droit de la faillite supposerait de combiner les droits les plus performants :

- le droit français pour le traitement précoce des difficultés des entreprises, qui est un modèle en Europe, a fait ses preuves lors de la crise financière de 2008 et repose sur la procédure de conciliation, confidentielle, dont le taux de réussite avoisine les 70 % ;

- le droit allemand pour la liquidation, qui est beaucoup plus favorable aux créanciers, lesquels sont regroupés en classes et qui permet de passer outre la résistance des actionnaires par un cross-class cram-down inspiré du Chapter 11 américain.

Le droit européen étant en cours d'harmonisation, pour mettre l'accent sur la rapidité des procédures afin de faciliter le rebond, la future transposition du la directive, qui sera adoptée sur le fondement de la proposition du 22 novembre 2016, devra opérer la première étape de ce rapprochement franco-allemand du droit de la faillite.

Pour anticiper les défaillances d'entreprise, il convient de poursuivre les efforts en matière de délais de paiement, source chronique de menace sur la pérennité des entreprises (32 % des PME subissent des retards de paiement, pour un coût de 635 milliards d'euros). L'État, qui a amélioré ses propres délais de paiement, pratique la remise de prix pour les « bons élèves » et le « name and shame » pour les mauvais élèves. Il pourrait être utile de différencier les délais de paiement en fonction de la taille des entreprises afin de prendre en considération leur plus fort impact sur les PME.

Lorsqu'une entreprise rencontre des difficultés et se met en défaut à l'égard de ses obligations fiscales ou sociales, les pénalités et intérêts de retard ont tendance à aggraver la situation. En lieu et place de pénalités linéaires, leur progressivité permettrait un redressement plus rapide de la situation des entreprises confrontées à des difficultés temporaires.

Pour la transmission des entreprises , il est préconisé une exonération totale de droits de succession en contrepartie d'un allongement des délais de détention des parts de l'entreprise, lesquels seraient au total portés à huit ans. Pour faciliter les fusions-acquisitions et la croissance de certaines entreprises, il préconise de créer un abattement fiscal sur les plus-values de cession sur la cession des fonds de commerce réalisées au cours d'une vie professionnelle et pas seulement à l'occasion d'un départ à la retraite .

Il est également envisagé par ailleurs de supprimer les stigmatisations des entrepreneurs ayant connu l'échec (suppression des cotations 050 et 040 de la Banque de France) pour faciliter leur rebond.

Enfin, pour fermer rapidement une entreprise , perspective non aboutie malgré une habilitation législative de 2014, il conviendrait de s'inspirer de la procédure de turbo-dissolution aux Pays-Bas pour permettre un rebond rapide de l'entrepreneur.

Ces orientations, présentées lors de la 3 ème journée des entreprises au Sénat, jeudi 29 mars 2018 ont été adoptées par la Délégation aux entreprises du Sénat le jeudi 5 avril 2018.

LISTE DES PRINCIPALES PROPOSITIONS

38 PROPOSITIONS POUR UNE FRANCE LIBRE D'ENTREPRENDRE

I - Libérer la création d'entreprise

§ Une simplification radicale des statuts de l'entreprise :

Infogreffe recense actuellement 87 catégories différentes. Il est proposé d'articuler le droit de l'entreprise autour de deux statuts , celui de l'entreprise individuelle et celui de la société (les sociétés cotées gardant leur statut actuel) et une large marge de manoeuvre serait laissée pour l'organisation interne de chaque catégorie d'entreprise (proposition n° 1).

§ Une simplification de la création de l'entreprise :

Pour se renseigner, un portail unique regrouperait l'ensemble des sites publics fournissant de l'information sur la création d'entreprise (proposition n° 2) ;

Pour effectuer les formalités de création :

- Infogreffe devrait devenir le guichet unique des démarches de création d'entreprise (proposition n° 3) ;

- toutes les informations relatives à la vie de l'entreprise seraient regroupées dans une déclaration annuelle (proposition n° 4) ayant un coût forfaitaire qui couvrira celui des déclarations complémentaires nécessaires à la vie de l'entreprise pour toute modification significative ;

- le rôle de l'Agence France Entreprise serait recentré sur l'information concourant à la création d'entreprise (proposition n° 5) ;

- chaque entreprise aurait un identifiant unique (proposition n° 6) ;

- la dématérialisation des démarches de publicité légale serait totale, mettant un terme à l'obligation de publication des annonces légales sur des supports papier (proposition n° 7).

Pour sécuriser les relations professionnelles entre les entreprises et les entrepreneurs individuels, l'accès à l'action en requalification de l'entrepreneur individuel en salarié sera limité (proposition n° 9).

Pour améliorer la pérennité d'une création d'entreprise , l'accompagnement de la création d'entreprise (proposition n° 10) et l'aide au rebond de l'entrepreneur (proposition n° 10bis) seront éligibles au mécénat d'entreprise.

II - Soutenir la croissance de l'entreprise

§ Une simplification d'ampleur du droit de l'entreprise :

Avec la création d'un code des entreprises rassemblant les dispositions du code civil, du code de commerce, du code des sociétés, du code monétaire et financier, relatives aux entreprises (proposition n° 12) ;

Avec, dans l'intervalle, la simplification du Code de commerce initiée par la proposition de loi de simplification, de clarification et d'actualisation du code de commerce adoptée par le Sénat le 8 mars 2018 (proposition n° 11) ;

Avec la création d'un tribunal des affaires économiques unifiant la compétence pour traiter des mesures et procédures relatives aux difficultés des entreprises, quelle que soit la forme juridique du débiteur (proposition n° 13) ;

Avec l'encouragement des entreprises à participer à la normalisation , volontaire et co-construite, qui confère à celles qui y souscrivent un avantage comparatif, notamment à l'exportation (proposition n° 14) ;

Avec le gel pendant 5 ans du seuil de 50 salariés dans la perspective de son alignement sur le seuil européen de 250 salariés (à créer) et de l'alignement des seuils de 11 et 20 salariés sur le seuil européen de 50 salariés (proposition n° 20).

§ Une simplification des formalités qui pénalisent les entreprises :

- Créer un organisme interface entre les salariés et les organismes sociaux, afin de créer un taux de cotisation sociale unique pour les salariés et les entreprises en fonction du salaire distribué et afin de collecter les cotisations sociales pour tous les organismes sociaux (proposition n° 8) ;

- regrouper les déclarations de TVA, DEB et DES au sein d'un même document et d'un même site (proposition n°15) ;

- intégrer la DAS 2 dans la déclaration sociale nominative (proposition n° 17) ;

- supprimer l'assujettissement des dividendes et stock-options à cotisations sociales (proposition n° 18) ;

- aligner la France sur les seuils européens en matière de certification des comptes des PME (proposition n° 19).

Les contrôles fiscaux aléatoires sur les entreprises devront être remplacés à terme par un ciblage utilisant les outils de la Fintech (proposition n° 16), permettant à des algorithmes de procéder à une analyse des bilans des entreprises afin de détecter d'éventuelles fraudes. Mieux ciblé, le contrôle fiscal sera ainsi mieux accepté. Le temps ainsi gagné pourra être consacré par l'administration fiscale à des fonctions de conseil aux entreprises.

§ Une meilleure efficacité de l'aide publique aux entreprises :

- en rationnalisant les 1654 aides publiques existantes , en supprimant les micro-aides publiques et en confortant les aides à l'innovation (proposition n° 21) ;

- en facilitant l'accès des PME à la commande publique (proposition n° 22) ;

- en sécurisant les entreprises innovantes qui utilisent le crédit d'impôt recherche ou le crédit d'impôt en faveur de l'innovation (proposition n° 23) ;

- en remplaçant toutes les aides à l'exportation par une modulation du taux de l'IS en fonction de la part des exportations dans le chiffre d'affaires de l'entreprise, l'avantage fiscal étant plafonné à 200 000 euros (règle de minimis ) (proposition n° 28).

§ Une amélioration du financement des entreprises et notamment des PME :

- en doublant le mécanisme de l'IR-PME par analogie avec le dispositif britannique de l'Enterprise Investment Scheme , lequel vient d'être porté de 1 à 2 millions de livres sterling (proposition n° 25) ;

- en desserrant les contraintes de la directive Solvabilité II pour favoriser l'investissement de long terme (proposition n° 26). Ce dossier doit être porté au plus haut niveau de l'État et faire l'objet d'une position commune franco-allemande ;

- en favorisant la mobilité internationale des salariés , en garantissant la portabilité européenne d'un nouveau produit d'épargne-retraite, qui renforcera le financement des entreprises (proposition n° 27) ;

- en dotant la France d'une stratégie publique et d'un plan d'action destinés à mettre la Fintech au service du financement des PME (proposition n° 24).

III - Transmettre, rebondir ou disparaître,

la fin du cycle de vie de l'entreprise

§ Une simplification fiscale radicale pour la transmission des entreprises :

Aller au-delà des aménagements du pacte Dutreil en exonérant à 100 % la transmission des entreprises des droits de mutation à titre gratuit en contrepartie d'un allongement à huit ans de la durée d'engagement de détention des parts de l'entreprise (proposition n° 38).

Pour faciliter les fusions-acquisitions, il faut créer un abattement fiscal sur les plus-values de cession sur la cession des fonds de commerce réalisées au cours d'une vie professionnelle et pas seulement à l'occasion d'un départ à la retraite (proposition n° 36).

§ Une meilleure efficacité pour fermer rapidement une entreprise « saine » :

Créer une procédure de turbo-dissolution à la française permettant un rebond rapide de l'entrepreneur (proposition n° 38).

§ Une simplification du droit des entreprises en difficulté :

- profiter de la transposition de la future directive relative aux cadres de restructuration préventifs, à la seconde chance et aux mesures à prendre pour augmenter l'efficience des procédures de restructuration, d'insolvabilité et d'apurement, issue de la proposition du 22 novembre 2016, pour réaliser une simplification du droit des entreprises en difficulté et opérer un premier rapprochement franco-allemand du droit des entreprises en difficulté (proposition n° 30) ;

- pour rapprocher le droit français et le droit allemand de la faillite, créer très rapidement un groupe de travail commun, souple, entre les directions juridiques des deux ministères de la Justice, qui pourrait s'appuyer sur les cercles de réflexion existants, tels l'association Henri Capitant (proposition n° 29).

§ Une meilleure efficacité de la politique en matière de réduction des délais de paiement :

- créer un mécanisme de subrogation des créances publiques (proposition n° 31) ;

- rendre automatique le paiement des intérêts moratoires et de l'indemnité forfaitaire de 40 euros en cas de retard de paiement d'une personne publique (proposition n° 32) ;

- pour le secteur privé, moduler les pénalités des retards de paiement en fonction de la taille de l'entreprise les subissant, afin de favoriser les PME et en fonction du retard du paiement (proposition n° 33).

§ Une aide au rebond de l'entreprise en difficulté :

- moduler dans le temps les pénalités et majorations de retard (les rendre progressives en lieu et place de pénalités et majorations linéaires) (proposition n° 34) ;

- supprimer les mentions de l'échec (cotations 050 et 060) pour faciliter le rebond de l'entrepreneur (proposition n° 37).

AVANT-PROPOS

Madame, Monsieur,

La Délégation sénatoriale aux entreprises poursuit, avec ce rapport, sa mission de recenser les obstacles au développement des entreprises et de proposer des mesures visant à favoriser l'esprit d'entreprise et à simplifier les normes applicables à l'activité économique, en vue d'encourager la croissance et l'emploi dans les territoires.

Depuis qu'elle a confié, le 6 novembre 2017, à votre rapporteur un rapport sur le cycle de vie de l'entreprise, afin de préparer l'examen du projet de loi PACTE (plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises), plus de 60 personnes ont été entendues en cinq mois et des dizaines de contributions ont été reçues. Ce rapport s'appuie sur ces auditions pour présenter l'analyse de la Délégation aux entreprises sur les attentes des entreprises de taille petite et moyenne, celles qui font vivre les territoires.

Lorsqu'il lance la consultation sur le PACTE, le 15 janvier 2018, le ministre de l'Économie indique que : « La France ne manque pas de talents et de créateurs d'entreprises. Mais beaucoup de ces entreprises restent trop petites. Nous manquons de grosses PME et d'ETI, les entreprises de taille intermédiaire ». Il reprend le même constat, dressé dix ans auparavant dans le rapport de la commission pour la libération de la croissance, remis le 23 janvier 2008 au Président de la République de l'époque, M. Nicolas Sarkozy, selon lequel « notre économie a deux faiblesses majeures unanimement reconnues : une compétitivité déclinante et l'insuffisance de son réseau de moyennes entreprises ».

En dix ans, nos PME n'ont pas grandi, pas davantage que le nombre de nos ETI.

90 % des start-up ne passent pas le cap des cinq ans. Quand elles réussissent, le rachat par des fonds étrangers est fréquent.

Pourtant, la société française change peu à peu son regard sur la mondialisation et sur l'entreprise. De 2013 à 2017, la perception de la mondialisation comme opportunité pour la France a progressé de 13 points pour devenir légèrement majoritaire (de 39 % à 52 %) 1 ( * ) . L'entrepreneuriat suscite un réel engouement et plus de 60 000 visiteurs, la plupart jeunes, se sont rendus au 25 ème salon des entrepreneurs les 7-8 février 2018. En 2017, 591 000 entreprises ont été créées, deux fois plus qu'il y a 10 ans. Un jeune de moins de 25 ans sur deux veut créer son entreprise.

L'enthousiasme est là mais les obstacles demeurent trop nombreux : trop de contraintes administratives, pas assez de financement, des grandes entreprises indifférentes ou au contraire prédatrices des start-up.

Pour affronter la compétition mondiale, il faut donner aux entreprises françaises les mêmes armes que celles de leurs concurrents directs : ni plus, mais ni moins non plus.

Trois orientations majeures ont guidé ce rapport :

- faire simple ;

- faire efficace ;

- faire économique.

Le monde n'attend pas les réformes de la France. Le discours public est plus favorable à l'entreprise, les intentions vont dans le bon sens, mais les actes sont décevants :

- la réforme fiscale n'épuise pas la mise en place d'un environnement favorable à l'orientation de l'épargne des ménages vers les entreprises. Le Gouvernement érige en principe intangible une stabilité fiscale qui peut l'empêcher de proposer un instrument adapté pour réorienter une petite fraction de l'assurance-vie vers des placements de long terme à même de renforcer les fonds propres des PME ;

- l'État veut se mettre au service d'une société de confiance, mais timidement, en multipliant les expérimentations qui repoussent d'autant une adaptation attendue de l'administration à un monde où les paradigmes se modifient de manière accélérée ;

- le Gouvernement affiche sa « priorité » pour changer l'environnement législatif des entreprises mais le calendrier du projet de loi PACTE ne prévoit au mieux une lecture avant l'été au Parlement.

Ce rapport veut accompagner la préparation du débat parlementaire sur ce projet de loi (qui devait être présenté au conseil des ministres du 2 mai 2018 mais serait décalé à juillet 2018), dans lequel le Sénat entend jouer pleinement son rôle.

Comme l'a indiqué M. Gérard Larcher, Président du Sénat, dans son intervention à l'occasion de la troisième Journée des entreprises au Sénat, le 29 mars 2018, votre assemblée souhaite éviter une nouvelle fois un recours excessif aux ordonnances.

Ce recours, comme l'a fait remarquer le président du Sénat, traduirait « de la part du Gouvernement, une conception paradoxale de la prise de décision publique. Après avoir vanté un mode de conception participatif et avoir mis en place un « Bercylab », serait donc venu le temps de l'absence de débat de fond au Parlement ».

Tout comme les 7 778 participants à la consultation gouvernementale qui ont déposé 12 819 contributions et émis 63 683 votes pendant trois semaines, les 348 sénateurs sont également prêts à apporter leur contribution pour « rédiger une loi ambitieuse, efficace et concrète, qui doit donner aux entreprises le cadre et les leviers pour innover, se transformer, croître et créer des emplois », pour reprendre l'invitation gouvernementale à participer à l'élaboration du projet de loi.

Pour sa part, votre rapporteur a concentré ses investigations sur les trois temps clés du cycle de vie de l'entreprise :

- la création, qui met à l'épreuve la résilience de l'entrepreneur face à la complexité de notre système administratif, social et fiscal laquelle nourrit un « écosystème de la complexité » auquel les entreprises sont très dépendantes ;

- la croissance, et les difficultés de l'entrepreneur pour trouver des fonds propres à même de financer son développement , avec le risque de découragement ;

- le rebond, avec la nécessité de permettre à l'entrepreneur de fermer une entreprise aussi simplement et rapidement que possible , dès lors qu'elle est saine mais qu'il estime que son business model n'a pas d'avenir, et la perspective d'une évolution du droit français des entreprises en difficultés qui pratique aujourd'hui l'acharnement thérapeutique.

Il y a urgence car l'économie 4.0, quatrième révolution industrielle est en marche. D'une ampleur comparable à l'introduction de la machine à vapeur, de l'électricité ou de l'électronique, elle s'installe partout. Alors même que le rapport Lemoine 2 ( * ) sur la transformation numérique de l'économie posait dès novembre 2014 un diagnostic juste sur les enjeux de cette révolution, nos entreprises et singulièrement nos PME sont en retard. Ce sera l'objet d'un prochain rapport que la Délégation aux entreprises a confié à ma collègue, Mme Pascale Gruny.

POUR UNE FRANCE LIBRE D'ENTREPRENDRE

I. LIBERER LA CRÉATION D'ENTREPRISE

A. LA CREATION D'ENTREPRISE : UN SAUT D'OBSTACLES

1. La France, une « start up Nation » plutôt « start » que « up »
a) Des créations d'entreprises au plus haut niveau

En 2017, d'après l'INSEE 3 ( * ) , 591 000 entreprises ont été créées , 37 000 de plus qu'en 2016, dans l'ensemble des secteurs marchands non agricoles, soit un doublement en dix ans, puisque 285 000 entreprises avaient été créées en 2006.

Le nombre de créations d'entreprises augmente de 7 % par rapport à 2016, ce qui représente la plus forte hausse depuis sept ans. Déjà, en 2016, la hausse de 10 % des créations de sociétés (188 800 inscriptions en 2016 contre 172 000 en 2015) avait été la plus importante hausse depuis 2009, année d'instauration du régime de l'autoentrepreneur.

En 2017, le nombre de créations d'entreprises classiques atteint 349 000, soit le plus haut niveau depuis que l'Insee mesure et publie les créations d'entreprises (1987). Il dépasse notamment son niveau de 2008, pour la première fois depuis la mise en place du régime du micro-entrepreneur en 2009.

Cette hausse est notamment due au redressement du nombre des immatriculations du régime du micro-entrepreneur qui augmentent de 9 % en 2017, soit 19 000 immatriculations supplémentaires, après une légère baisse en 2016 (- 0,3 %) et un fort recul en 2015 (- 21 %) pour atteindre 242 000.

Par ailleurs, le nombre de créations d'entreprises individuelles classiques s'accroît de 6 % (152 000 en 2017 contre 142 000 en 2016) et celui de sociétés de 5 % (198 000 contre 189 000).

Pour 2017 4 ( * ) , en données brutes, le nombre cumulé d'entreprises créées a poursuivi son accélération au dernier trimestre (+ 6,7 % en décembre après + 6,1 % en novembre et + 5,2 % en octobre). Tous les types de créations sont en hausse : micro-entrepreneurs (+ 8,5 %), créations d'entreprises individuelles classiques (+ 6,5 %) et sociétés (+ 4,8 %).

Deux créations d'entreprises sur cinq sont désormais des demandes d'immatriculations de micro-entrepreneurs : 40,9 % en décembre 2017.

La contribution des TPE-PME à ce dynamisme entrepreneurial est essentielle.

Sur le champ des entreprises, hors activités agricoles, financières et d'assurance, en 2014 5 ( * ) , les 4 millions de TPE-PME représentent 99,9 % des entreprises, 48,5 % de l'emploi salarié (en équivalent temps plein), 43,4 % de la valeur ajoutée, 31,9 % de l'investissement corporel hors apport et 15,4 % du chiffre d'affaires à l'exportation.

Si les PME emploient globalement environ la moitié des salariés, il existe de profondes disparités selon les secteurs d'activité : ainsi, elles emploient le quart des salariés du secteur transport et entreposage, le tiers dans les secteurs de l'information et communication ainsi que dans l'industrie manufacturière ; à l'opposé, elles emploient 69 % des salariés de la construction, 72 % de l'hébergement et restauration et 69 % des activités spécialisées, scientifiques et techniques.

En termes de valeur ajoutée, le poids des PME varie du simple au triple entre les transports et entreposage (22 %) et l'industrie manufacturière (25 %) d'une part, la construction d'autre part (65 %). Les PME comptent pour un peu moins du tiers (31 %) du chiffre d'affaires à l'exportation dans le commerce et réparation d'automobile et de motocycle, mais seulement pour 9 % dans le secteur manufacturier.

Les PME comptent pour 39 % de l'investissement dans les activités immobilières, 60 % dans la construction, contre le cinquième dans l'industrie manufacturière (21 %) et 12 % dans les transports et l'entreposage.

Le dynamisme entrepreneurial de l'économie numérique est donc bien présent. Profite-t-il à l'économie française ? Rien n'est moins sûr. Certains fonds français ne peuvent suivre les tours de table en raison de la valorisation proposée par des groupes ou fonds étrangers. Le montant moyen des rachats des start-up témoigne de la faible prise de risque des grandes entreprises françaises 6 ( * ) .

Si, comme l'estime à juste titre M. Mounir Mahjoubi, Secrétaire d'État chargé du Numérique, « la question de l'écosystème des start-up français n'est plus son éclosion, mais son envol » 7 ( * ) , il n'en demeure pas moins que l'écosystème français des start up peut produire de belles PME mais qu'elles peuvent aussi être destinées à être revendues à l'étranger.

b) Un rang médiocre en Europe pour la facilité à créer une entreprise

Chaque année, le rapport Doing Business de la Banque Mondiale évalue la « facilité à faire des affaires » dans 190 pays, en mesurant la réglementation qui s'applique aux petites et moyennes entreprises tout au long de leur cycle de vie 8 ( * ) . Ce rapport n'a pas vocation à refléter l'attractivité d'un pays ni le dynamisme de sa croissance mais « a simplement pour objet de donner une idée des meilleures pratiques et pousse ainsi les pays à se réformer » selon Business France 9 ( * ) .

L'édition 2017 classe la France au 29 ème rang, d'une manière globale, et au 27 ème pour la création d'entreprise, soulignant que le délai nécessaire pour démarrer une activité y a été raccourci de 4 à 3,5 jours. En revanche, la France présente des faiblesses dans le paiement des impôts (63 ème ), l'accès au crédit (82 ème ) et le transfert de propriété 10 ( * ) (100 ème ). Le rapport déplore notamment le poids des procédures fiscales pour les PME et le niveau du taux d'imposition global.

Dans l'édition 2018, la France recule de deux places, au 31 ème rang 11 ( * ) , derrière le Royaume-Uni (7 ème ), l'Allemagne (20 ème ), l'Espagne (28 ème ) ou le Portugal (29 ème ). Elle reste 27 ème pour la création d'entreprise. Elle améliore sa position pour le paiement des impôts grâce à la baisse de 1,8 points du taux global d'imposition des entreprises et la baisse de 3,6 points du taux des cotisations sociales opéré en 2016-2017. Elle recule de huit places pour l'accès au crédit (90 ème ) et reste stable pour le transfert de propriété (100 ème ). La France est cependant prise en exemple comme modèle de mise en oeuvre de ses réformes pour l'amélioration du règlement de l'insolvabilité.

La montée en puissance des start-up participe aussi du dynamisme entrepreneurial même si elles ne résument pas, loin de là, l'ensemble des entreprises.

Ainsi, Paris n'occupait en 2017 que la 11 ème place des écosystèmes de start-up les plus dynamiques du monde derrière Londres (3 ème ), Tel-Aviv (6 ème ), Berlin (7 ème ), ou Seattle (10 ème ) 12 ( * ) et la France n'est, en 2018, que 18 ème sur 38 pays considérés comme « terre d'innovation » 13 ( * ) .

Si les 10 000 business angels français ont investi 42 millions d'euros en 2015, leurs 20 000 homologues britanniques se sont engagés à hauteur de 300 millions. Ils sont 265 000 aux États-Unis pour 20 milliards d'investissements.

La France rattrape cependant son retard à grand pas dans la nouvelle économie numérique, les business angels délaissant quelque peu « l'ancienne économie ».

En 2017, la French Tech a enregistré plus de 700 investissements pour un montant total des levées de fonds de 3,5 milliards d'euros, soit une hausse de 40 % par rapport à l'an passé 14 ( * ) (2,1 milliards d'euros levés sur 508 opérations en 2016), essentiellement dans le secteur internet (62 % des opérations au premier trimestre 2017 et 68 % au second). Elle se rapproche du Royaume-Uni, leader européen en nombre de levées de fonds (511 opérations) et en montants investis (3,6 milliards d'euros).

La « French Tech », du « colbertisme high tech » 15 ( * )

Après le « mouvement des pigeons » 16 ( * ) en 2013, l'État créée l'initiative French Tech, mission rattachée à l'Agence du numérique du ministère de l'Économie et des Finances, instance de dialogue entre la puissance publique et les entreprises françaises de croissance innovantes. La French Tech se constitue à partir des start-up, ne demande aucune aide publique mais la création d'un environnement favorable au développement de cet « écosystème ».

La French Tech créé 22 « Métropoles French Tech », 13 « hubs French Tech » à l'international, obtient des « French Tech Visa » 17 ( * ) , un « French Tech Ticket » 18 ( * ) , un « Pass French Tech » 19 ( * ) , une « French Tech Central », maison des services publics dédiée aux start-up, un « fonds French Tech Accélération 20 ( * ) » et tente de promouvoir la « French Tech Diversité » 21 ( * ) ...

En trois ans (2012-2015), le nombre de start-up croît de 30 %, le salon Viva Technology attire en 2017 5 000 start-up (dont 53 % étrangères) et 50 000 visiteurs. L'École 42 22 ( * ) (2013), la Station F à Paris, « plus grand incubateur de start-up au monde », sont créés .

À l'Eureka Park du Consumer Electronic Show de Las Vegas de janvier 2018, 274 start-up françaises sont présentes (contre 38 en 2014) pour 280 américaines.

Ce succès permet d'imposer dans le débat public la French Tech comme « nom générique de l'écosystème entrepreneurial français » même si on ne recense que trois « licornes » 23 ( * ) françaises sur 227 mondiales.

Toutefois, ces dispositifs publics peuvent être perçus « comme des palliatifs à l'incapacité de l'administration française à se transformer pour répondre aux réalités des entrepreneurs et des acteurs innovants ». En outre, « animer l'écosystème des entrepreneurs n'est pas le rôle de l'État », avec le risque, en cas de faillite de réussites nationales, « d'un retour vers des politiques plus traditionnelles de soutien à l'innovation » par des aides publiques.

En Grande-Bretagne, le National Endowment for Science, Technology and the Arts , créé en 1997, a été reconstitué en 2012 sous forme de « charities », statut qui peut être rapproché du statut juridique français de « fondation ». Une dotation issue des loteries nationales britanniques lui a été transférée. La dotation initiale, non consomptible d'année en année, de 260 millions de livres sterling, permet à NESTA de financer une partie de ses activités sur la base des intérêts perçus. Aujourd'hui, NESTA est mondialement reconnu et peut compter sur 33,4 millions de livres sterling de budget pour l'année 2016-2017.

Certains évoquent en France la même évolution, soit en proposant -comme France Digitale 24 ( * ) - sa privatisation, soit en faisant de la French Tech une fondation reconnue d'utilité publique, comme le propose Terra nova. Le Gouvernement a cependant opposé une fin de non-recevoir le 29 mars dernier à ces propositions 25 ( * ) .

D'après : « Quel avenir pour la French Tech ? »,

Mathis Cohen et Thibaud Frossard, Terra nova, 16 mars 2018.

c) De l'intention à la création, l'obstacle de la complexité administrative et financière
(1) Une forte dynamique entrepreneuriale

Le dynamisme entrepreneurial , a été mesuré pour la première fois en 2016 par l'Agence France entrepreneur qui s'est inspirée d'une démarche initiée en 2009 au Québec 26 ( * ) , en agrègeant le nombre de personnes qui ont l'intention de créer une entreprise et qui sont engagés dans une démarche de création, le nombre d'entrepreneurs en activité ou en retraite. La part de Français concernés s'élève à 32 % en 2016 . Autrement dit, 15 millions de Français sont dans une dynamique entrepreneuriale .

Sur les 68 % de Français qui ne sont pas dans cette dynamique, seuls 31 % n'y ont jamais songé et 37 % y ont déjà pensé mais ont été retenus par des freins tels les investissements financiers trop importants (28 %), le risque d'échec trop élevé (28 %), la préférence pour la sécurité d'un emploi salarié (25 %) et les démarches administratives jugées trop complexes (23 %).

La dimension générationnelle est très forte . 36 % des jeunes de moins de 30 ans sont dans cette dynamique entrepreneuriale. Le nombre de créations d'entreprises par les jeunes de moins de 30 ans a plus que triplé entre 2006 et 2015, passant de 43 000 à 131 000, alors qu'il a doublé pour l'ensemble de la population. Cette hausse est notamment portée par les jeunes diplômés : la part de créateurs diplômés de 2 ème ou 3 ème cycle est passée de 27 % à 31 % de 2010 à 2014. Depuis trois ans, l'âge moyen des créateurs d'entreprise diminue d'une année et s'établit en 2017 à 36 ans et 51 % des micro-entrepreneurs ont moins de 30 ans.

Si 29 % des créateurs d'entreprises étaient des femmes en 1987, et 33 % en 2000, elles sont désormais 40 % en 2017.

La création d'entreprise reste une démarche empreinte de prudence, en France : en 2014, 74 % des entreprises nouvellement créées n'emploient aucun salarié au démarrage, tandis que seules 7 % ont 3 salariés ou plus. Cette situation est une spécificité française : les entreprises françaises ont moins de salariés au démarrage qu'en Allemagne et au Royaume-Uni.

(2) Des freins à la création d'entreprise

En effet, des intentions aux actes, des freins demeurent. Comme le reconnaît la Direction générale des entreprises du Ministère de l'Économie et des finances 27 ( * ) , « l'activité entrepreneuriale reste inférieure à l'intention entrepreneuriale, alors qu'elles sont d'un niveau équivalent en Allemagne, au Royaume-Uni ou aux États-Unis. Cela peut tenir à ce que les intentions affichées sont nettement plus nombreuses en France, et le chiffre global de ceux qui deviennent entrepreneurs en France est déjà élevé ; et pour ceux qui ne passent pas à l'acte, à d'autres opportunités ou au sentiment que l'entrepreneuriat ne s'adresse pas à tout le monde, ou à la perception des risques, dont la complexité administrative et financière ».

Chez les créateurs d'entreprises, les freins sont d'abord les « procédures administratives à effectuer pour pouvoir se lancer » . Ils arrivent en deuxième position (40 %) derrière le « manque de moyens financiers » (44 %) 28 ( * ) , et 67 % des Français estiment que le climat est encore défavorable pour entreprendre en France. Ils sont 26 % à n'être `pas du tout informés' et 46 % à être `plutôt pas informés' des démarches administratives et fiscales pour monter un projet de création d'entreprise, seuls 21 % étant `plutôt bien informés' et 5 % `très bien informés'.

Cette complexité de la démarche entrepreneuriale, dans sa dimension normative, boulet au pied dans la course de la compétition mondiale , a été largement évoquée dans un précédent rapport de la Délégation aux entreprises du Sénat 29 ( * ) de la présidente de la Délégation, Mme Élisabeth Lamure et de votre rapporteur.

Simplifier est une oeuvre de longue haleine.

« Le développement des PME, aujourd'hui entravé par de nombreux obstacles, est crucial pour la croissance (...) La création d'entreprise reste longue et complexe ». Ce constat de 2008 est hélas toujours d'actualité. Il a été dressé dans le rapport « 300 décisions pour changer la France » de M. Jacques Attali, dont le rapporteur était M. Emmanuel Macron, alors inspecteur des Finances.

2. Un dynamisme entrepreneurial confronté à la complexité dès la création de l'entreprise
a) Le dédale de la recherche d'information sur l'entreprise

Le créateur d'une entreprise est en effet d'emblée confronté à une complexité administrative et juridique pour la création de son entreprise.

La première étape, se renseigner , est un premier parcours du combattant. Sur internet, le futur entrepreneur a le choix entre des sites publics et des sites privés.

Le site guichet-entreprises.fr est conçu et développé par le service à compétence nationale « Guichet Entreprises », créé par l'arrêté du 22 avril 2015, placé sous l'autorité de la direction générale des entreprises au sein du ministère de l'Économie et des Finances .

Ce site Internet constitue le guichet unique électronique en application des directives européennes 2006/123/CE et 2005/36/CE 30 ( * ) .

Il réalise en ligne les formalités administratives liées à la vie d'une entreprise. Tout entrepreneur peut accomplir à distance les formalités et procédures nécessaires à la création, aux modifications de la situation et à la cessation d'activité d'une entreprise. Pour la création d'entreprise, le site enregistre les formalités de création et les transmet au centre de formalités des entreprises (CFE) concerné de l'un des six réseaux professionnels 31 ( * ) .

Il offre une information complète sur les formalités, procédures et exigences relatives à la vie d'une entreprise ou à l'exercice d'une activité réglementée par le biais des fiches « activités règlementées ».

En parcourant le site guichet-entreprise.fr , la présentation des critères de choix entre les différents statuts se conclut par ces conseils :

« Prenez en considération ces différents critères, en évitant de faire reposer votre choix sur un seul d'entre eux.

« Prenez le temps de lire attentivement les différents statuts juridiques (service-public.fr) en lien avec une association seule ou avec des partenaires, les besoins de financement dont vous pourrez avoir besoin ou encore si vous souhaitez séparer votre patrimoine personnel de celui de votre entreprise.

« Comparez les différentes structures susceptibles de s'appliquer à votre projet expliquées dans un tableau clair et synthétique du ministère de l'économie et des finances.

« Utilisez également l'outil de l'AFE : Aide au choix du statut

« Et... faites le bon choix ! »

Sur ce site, un tableau synthétique fournit au futur créateur d'entreprise un premier panorama de cette complexité :

Entreprise individuelle (EI)

Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL)

Société à responsabilité limitée (SARL)

Société anonyme (SA)

Société par actions simplifiée (SAS)

Société en nom collectif (SNC)

Associé(s)

L'entrepreneur individuel

Une personne physique ou morale

2 à 100 personnes physiques ou morales

Au minimum 2 personnes physiques ou morales (ou 7 pour les sociétés cotées en bourse)

Au minimum une personne physique ou morale

Au minimum 2 personnes physiques ou morales

Dirigeant(s)

L'entrepreneur individuel

Un ou plusieurs gérants (personnes physiques)

Un ou plusieurs gérants (personnes physiques)

Un conseil d'administration de 3 à 18 membres, avec un président désigné parmi eux

Un président (personne physique ou morale), obligation d'un représentant légal

Un ou plusieurs gérants (personnes physiques ou morales)

Capital social

Néant

Libre

Libre

Au minimum 37 000 euros

Libre

Libre

Régime social du ou des dirigeant(s)

Travailleur non-salarié

Travailleur non-salarié (associé unique) ou assimilé-salarié (plusieurs associés)

Travailleur non-salarié (gérant majoritaire), assimilé-salarié (gérant égalitaire ou minoritaire)

Assimilé-salarié (président du conseil d'administration)

Assimilé-salarié (président)

Travailleur non-salarié

Imposition des bénéfices

IRPP (possibilité d'impôt sur les sociétés sous conditions en entreprise individuelle à responsabilité limitée)

IRPP (personne physique - possibilité d'impôt sur les sociétés), impôt sur les sociétés (personne morale)

IS dans la plupart des cas

IS dans la plupart des cas

IS dans la plupart des cas

IRPP (part des bénéfices des associés), option de l'impôt sur les sociétés  possible pour la société

Source : Guichets-entreprises.fr

Un deuxième site , celui du ministère de l'Économie, comprend une rubrique « entreprise », laquelle comporte des informations présentées chronologiquement sur les thèmes suivants :

• Créer son entreprise

• Gérer son entreprise

• Se développer

• Céder ou reprendre une entreprise

• Aides, crédits d'impôt et financement

• Difficultés

• Marchés publics

Cependant, pour la création d'entreprise, il ne renvoie à aucun autre site opérationnel et n'a pas de lien avec le site précédent.

L'entrepreneur pourra également consulter un troisième site internet public, conçu par l'Agence France Entrepreneur , dont la création a été annoncée sous la forme d'une « agence nationale pour le développement économique sur les territoires », et lancée opérationnellement sous cette dénomination le 13 avril 2016.

L'AFE reprend en réalité le rôle de l'Agence pour la Création d'Entreprise , association de loi 1901, créée en 1996 à l'initiative des pouvoirs publics. Elle intervient dans le processus d'aide à la création, à la transmission et au développement des entreprises. Ce simple changement de nom aurait entraîné une baisse de fréquentation du site.

Présentation de l'Agence France Entrepreneur (AFE)

L'agence a pour membres fondateurs, l'État, la Caisse des Dépôts (CDC), l'Association des Régions de France (ARF), le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables (CSOEC), CCI France et l'Assemblée permanente des Chambres des métiers et de l'artisanat (APCMA).

Elle a pour objet de renforcer et mieux coordonner l'action nationale et locale en faveur de l'entrepreneuriat, prioritairement en faveur des territoires fragiles, notamment des quartiers prioritaires de la politique de la ville, des zones de revitalisation rurale,  des outre-mer et des zones d'aides à finalité régionale, au service de trois priorités :

- favoriser les créations et les reprises d'entreprises plus pérennes et créatrices d'emploi ;

- aider au développement des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME) qui créent de l'emploi ;

- innover pour créer un cadre plus favorable à l'initiative économique.

L'Agence France Entrepreneur, en lien avec ses membres fondateurs et leur réseau, et l'ensemble des acteurs de l'écosystème entrepreneurial publics et privés, a pour missions :

de déployer une stratégie nationale de soutien à l'entrepreneuriat afin de favoriser la création d'activités et d'emplois sur tous les territoires, en particulier pour les territoires fragiles. Dans le cadre de cette stratégie, l' Agence France Entrepreneur coordonne la mise en oeuvre de l'action publique au niveau national, en animant les travaux permettant de coordonner une programmation des financements nationaux de soutien aux réseaux d'appui à la création et reprise d'entreprises, et en réalisant la programmation des crédits d'intervention qui lui sont alloués. Elle renforce l'articulation des actions nationales et territoriales. Elle veille pour cela au renforcement et à l'adaptation de l'offre de service en faveur des territoires fragiles.

de promouvoir l'entrepreneuriat et l'esprit d'entreprendre, en particulier dans les territoires fragiles, en partenariat avec les acteurs de l'écosystème entrepreneurial.

d'informer et d'orienter les entrepreneurs et les porteurs d'un projet entrepreneurial. L'AFE constitue l'acteur de référence en matière d'information sur la création, la reprise et le développement des entreprises en France. Elle propose, à l'aide d'outils numériques innovants, un accès simple et personnalisé à l'information et à l'offre d'accompagnement disponible sur les territoires. Elle offre, au travers notamment de son site internet, un espace collaboratif et d'échanges pour les entrepreneurs et les acteurs de l'entrepreneuriat dans les territoires.

d'innover et d'accompagner l'émergence d'un cadre plus favorable à l'initiative économique notamment au profit des territoires fragiles. Elle détecte les initiatives et les pratiques innovantes dans les territoires, et assure leur promotion et leur diffusion, dès lors que les évaluations sont concluantes. Elle favorise le développement des projets innovants et leur passage à une échelle plus large. Elle assure une veille sur les bonnes pratiques mises en oeuvre à l'étranger.

de mesurer et d'évaluer l'action publique de soutien à l'entrepreneuriat et de développer l'expertise sur l'entrepreneuriat en intégrant notamment une dimension territoriale. L'AFE s'inscrit dans une démarche d'ouverture des données publiques (open data) afin que la contribution économique et sociale de ses travaux puisse être démultipliée par les utilisateurs.

Source : site AFE

Le site fournit des informations détaillées sur les 10 étapes de la création d'entreprise :

1 - L'idée

2 - Le projet personnel

3 - L'étude de marché

4 - Les prévisions financières

5 - Trouver des financements

6 - Les aides

7 - Choisir un statut juridique

8 - Les formalités de création

9 - Installer l'entreprise

10 - Les premiers mois d'activité

Par ailleurs, le site internet du Centre de formalités des entreprises de l'URSSAF renvoie encore au site internet de l'APCE transformée depuis 2016 en AFE. Ce site de l'URSSAF héberge pour sa part le site des auto-entrepreneurs, lautoentrepreneur.fr. Mais il renvoie également sur le site des Chambres de commerce et d'industrie consacré à ce type d'activité, (cfenet.cci.fr), lequel héberge également des pages d'information sur l'auto-entreprise.... Le ministère de l'Éducation nationale héberge également sur ses pages un site « jeunes.gouv.fr » qui renseigne également sur la création d'entreprise en renvoyant au site de l'AFE, tout comme le Centre d'Information et de Documentation Jeunesse.

D'autres sites privés proposent, moyennant finance évidemment, une aide documentaire à la création d'entreprise voire la création d'entreprise « en ligne et en 10 minutes »....

b) La perplexité devant la multiplicité des statuts juridiques de l'entreprise
(1) 87 catégories différentes d'entreprises

L'entreprise n'a pas d'existence juridique en tant que telle. Le droit français des sociétés se caractérise par un décalage entre un droit sophistiqué, qui se concentre sur le « véhicule juridique qu'est la société et sur les intérêts et droits de l'actionnaire » 32 ( * ) et la réalité économique qu'est l'entreprise. Toute réforme juridique qui vise l'entreprise doit passer par une réforme de la société commerciale qui en est le principal vecteur.

Celui qui souhaite créer une entreprise doit non seulement mener à bien un projet, assurer sa viabilité, trouver un modèle économique, des financements, mais également choisir le statut juridique le plus adapté. Or, en la matière, il se trouve confronté à une kyrielle d'acronymes qui recouvrent autant de statuts différents.

Que l'activité soit commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, l'entrepreneur a le choix entre deux grandes formes juridiques : l'entreprise individuelle (EI) ou la société (SARL, SA, EURL...).

Les possibilités sont nombreuses mais choisir le bon statut juridique est déterminant pour le chef d'entreprise. Ce statut va déterminer la capacité de financement de l'entreprise, la répartition du pouvoir et la responsabilité des dirigeants, bref, son développement.

Les entrepreneurs individuels disposent aujourd'hui de multiples possibilités pour choisir le statut juridique de leur activité.

On distingue deux formes d'entreprise individuelle : le statut de l'entrepreneur individuel (EI) et le statut de l'entrepreneur individuel à responsabilité limité (EIRL). Les entrepreneurs peuvent également choisir une forme de société, même s'ils n'ont pas d'associé : l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limité (EURL).

Ils peuvent également créer une société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) et, pour les professions libérales, une société d'exercice libéral (SEL). Le statut de société, qui devait à l'origine concerner au moins deux associés (principe d' affectio societatis ), peut en effet maintenant correspondre à une activité avec un seul associé.

Le recensement exhaustif par Infogreffe comptabilise même 87 catégories différentes de sociétés 33 ( * ) , sans même évoquer les associations qui ont un rôle économique et dont certaines sont parfois de quasi-entreprises.

Il n'est donc pas simple de s'y retrouver .

Ainsi, le futur chef d'entreprise qui voudrait chercher des indications sur l'EURL dans le code de commerce pourrait gaspiller un temps inutile puisque, selon le témoignage de l'un d'entre eux, « dans le code de commerce, il n'y a aucune indication sur l'EURL puisque c'est une SARL à associé unique ». Nombreuses pourtant sont les pages d'information publique qui comparent les statuts respectifs de l'EIRL et de l'EURL sans le préciser...

Quels sont les effets du choix d'un statut juridique ?

La première conséquence de ce choix concerne les responsabilités juridique et financière. L'EURL et la SASU sont des formes de sociétés, pour lesquelles il existe une personnalité morale, distincte de l'entrepreneur lui-même. En tant que personne morale, la société peut avoir à assumer une responsabilité civile et pénale distincte de celle du dirigeant personne physique. Aussi les patrimoines financiers sont-ils distincts, tandis que, dans le cas d'une entreprise individuelle, on constate une « confusion des patrimoines ». Il n'existe pas de séparation entre le patrimoine personnel de l'entrepreneur et son patrimoine professionnel, sauf depuis 2010 avec l'EIRL.

Mais il n'est pas toujours aisé pour le créateur d'entreprise de s'y retrouver et de faire la part entre l'entreprise individuelle, qui est un statut , une forme juridique d'entreprise, et la micro-entreprise, qui est un régime fiscal et social.

Si, en théorie, la forme d'imposition devrait suffire à guider le petit entrepreneur, force est de constater que « le plus grand désordre règne dans le régime fiscal et social de ces petites entreprises individuelles. Le législateur n'a eu de cesse de brouiller les frontières , opacifiant toujours davantage la lisibilité du système » 34 ( * ) .

Ainsi, la summa divisio entre l'imposition à l'IS pour les formes en société et celle à l'IR pour l'activité sous forme d'entreprise individuelle, n'est guère pertinente. En effet, « ce schéma n'a plus guère de sens aujourd'hui : la SASU est soumise à l'IS mais elle peut opter pour l'IR sous certaines conditions et pour une durée limitée ; l'EURL est normalement soumise à l'IR sauf dans certains cas ou si elle opte pour l'IS. Il en résulte une très grande confusion dans l'esprit des petits entrepreneurs, ce qui constitue naturellement un frein à la création de leur petite entreprise individuelle ».

De même, le dispositif de prélèvements fiscaux et sociaux se caractérise par une grande complexité et une réelle disparité, à revenus équivalents.

Enfin, les frontières entre micro-entreprise et entreprise individuelle sont poreuses : il faut respecter les plafonds du régime micro-fiscal ou micro-social sous peine de reverser dans le droit commun.

Pour bénéficier de ce régime, les seuils de chiffre d'affaires à ne pas dépasser (doublés en 2017) sont définis pour une année complète. Si l'entreprise démarre son activité en milieu d'année, le chiffre d'affaires à ne pas dépasser doit être recalculé au prorata temporis du temps d'existence de l'activité.

Les micro-entrepreneurs qui dépassent ces seuils de chiffre d'affaires peuvent bénéficier d'une tolérance de deux ans. Lorsque ce délai de tolérance est dépassé, la sortie du régime fiscal de la micro-entreprise et la bascule dans le régime de droit commun de l'entreprise individuelle sont automatiques, à partir du 1 er jour du mois de dépassement de ces seuils. Les revenus sont alors imposés au régime réel et l'entreprise est soumise à la TVA.

(2) Une tendance à complexifier le régime de la micro-entreprise

Facile d'accès et gratuit à sa création en 2009, le régime de la micro-entreprise s'est malheureusement complexifié au fil des années.

Trois exemples ont ainsi été donnés dans la presse économique :

Des complexités croissantes pour les micro-entrepreneurs

Des formalités administratives alourdies . Désormais, les micro-entrepreneurs artisans et commerçants doivent s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés (RCS) ou au répertoire des métiers (RM) et fournir un ensemble de documents (formulaire P0, attestation sur l'honneur d'information du conjoint, etc.). Si le dossier est incomplet, les chambres de commerce facturent souvent des frais de conseil en sus. Les micro-entrepreneurs artisans ont en outre l'obligation de suivre un stage préalable à l'installation (SPI) d'une durée de 30 heures et dont le coût reste à analyser puisque désormais d'autres opérateurs que les chambres de métiers peuvent le dispenser (sont exemptés de ce stage les créateurs qui ont bénéficié d'un accompagnement à la création d'entreprise ou ceux qui ont suivi une formation à la gestion).  Non seulement le stage est payant mais les chambres de métiers qui dispensent ces stages sont submergées et ont du mal à faire face. Il faut donc être patient, et accepter de prendre du retard dans le lancement de l'activité.

Compte tenu de l'impossibilité matérielle constatée dans certaines chambres de métiers et de l'artisanat d'organiser la première partie du stage en amont de l'immatriculation, eu égard au nombre de personnes désormais soumises à cette obligation de stage préalable à l'installation (160 000 stages dont 100 000 micro-entrepreneurs), l'article 125 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique prévoit que le stage doit être effectué dans les trente jours de la demande, mais qu'en tout état de cause, si ce délai n'est pas respecté, le futur artisan ne peut se voir opposer le défaut de stage pour obtenir son immatriculation.

L'obligation de posséder un logiciel de facturation sécurisé et certifié.

Depuis la loi de finances pour 2016, les micro-entrepreneurs n'échappent plus à la règle. Un micro-entrepreneur est concerné s'il enregistre lui-même les règlements de ces clients dans un logiciel de comptabilité ou de gestion. Il ne sera plus possible d'établir un livre de recettes au format papier. Depuis le 1 er janvier 2018, les micro-entrepreneurs doivent donc s'équiper ou mettre à jour leur logiciel existant. Leur nouvel équipement devra satisfaire aux conditions d'inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d'archivage des données. Une attestation de mise à jour ou un certificat d'achat seront délivrés par les éditeurs de logiciel. En cas de

contrôle, et d'absence de mise en conformité, une amende de 7 500 euros est prévue par l'administration. Plusieurs logiciels en conformité avec la loi sont disponibles sur le marché. La prise en main d'un nouveau logiciel demandera du temps, qui sera pris sur le développement de l'entreprise.

Même en cas d'absence de chiffres d'affaires, le micro-entrepreneur doit faire une déclaration, sous peine de se voir infliger une pénalité .

S'il n'encaisse pas de chiffre d'affaires, il peut bénéficier du régime de micro-entrepreneur pendant une période de 12 mois civils (choix de déclaration mensuelle) ou de 4 trimestres civils consécutifs (en cas de déclaration trimestrielle). Passé cette période, le micro-entrepreneur sera radié automatiquement du régime. La déclaration demeure une obligation même sans chiffre d'affaires. Le micro-entrepreneur doit remplir une déclaration mensuelle ou trimestrielle en indiquant "néant" dans la case chiffre d'affaires. En cas d'absence persistante et répétée de déclarations de chiffre d'affaires - même nul - des cotisations supplémentaires et des majorations devront être acquittées. Elles sont calculées de façon forfaitaire, sur la base du chiffre d'affaires maximum réalisable sous le régime micro-entrepreneur ramené au trimestre ou au mois 35 ( * ) .

Source : Articles de Valérie Froger, site Lentreprise/Lexpress.

(3) Une simplification souhaitée et toujours en attente

La volonté de réduire le nombre de statuts pour les entreprises individuelles voire de créer un statut juridique unique a été exprimée en 2013-2014 mais elle n'a jamais été réalisée.

(a) Une volonté de simplification exprimée depuis 2014

Une préconisation de simplification a été présentée lors du `premier train' de mesures de simplification pour les entreprises en 2014. Elle est malheureusement restée à quai.

La 8 ème proposition du conseil pour la simplification pour les entreprises du 14 avril 2014 était en effet de réduire le nombre de statuts pour les entreprises individuelles car « les démarches pour créer une entreprise sont compliquées par l'existence de nombreux statuts différents, aux implications multiples (juridiques, fiscales...). En particulier, un micro-entrepreneur doit choisir entre plus de 5 statuts différents . Dans le prolongement du rapport Grandguillaume, un groupe de travail devra rendre ses conclusions d'ici l'été 2014, pour réduire dès 2015 le nombre de statuts et ne retenir que ceux qui correspondent aux besoins réels des entreprises individuelles ».

Le rapport du député M. Laurent Grandguillaume de décembre 2013, commandé par le Premier ministre de l'époque, M. Jean-Marc Ayrault, avait un titre évocateur : Entreprises et entrepreneurs individuels, passer du parcours du combattant au parcours de croissance .

Ce rapport constatait d'emblée une complexité certaine créée par cette profusion de statuts juridiques : « le choix de statut a un impact non seulement sur l'objet juridique, mais également sur les charges fiscales et sociales auxquelles l'activité est soumise. Choisir son statut, c'est a priori choisir sa forme d'imposition : l'impôt sur les sociétés (IS) pour les formes en société, et l'impôt sur le revenu (IR) pour l'activité sous forme d'entreprise individuelle. Cependant, des évolutions multiples au fil du temps ont mis à bas ce bel agencement : la SASU est soumise à l'IS, mais elle peut opter pour l'IR sous certaines conditions et pour une durée limitée. De même, l'EURL, qui est une société, est normalement soumise à l'IR, sauf dans certains cas ou si elle opte pour l'IS. A contrario , l'EIRL, qui n'est pas une société, peut opter pour l'IS. Il en résulte une grande confusion dans l'esprit des personnes non expertes, ce qui constitue un frein à la création d'entreprise ».

Il préconisait donc la création d'un statut juridique unique pour les personnes n'ayant pas d'associé, celui d'Entreprise individuelle (EI), dotée de la personnalité morale.

L'entreprise individuelle unique envisagée par le rapport Grandguillaume (2014)

Cette entreprise individuelle aurait disposé de son propre patrimoine, distinct de celui de l'entrepreneur. L'intégralité du code du commerce lui aurait été applicable, hormis pour les dispositions non pertinentes, notamment du fait de l'absence d'associés. Les obligations administratives auraient été simplifiées au maximum, en les adaptant aux risques liés aux différents volumes d'activité. Un registre d'information légale « allégé » lui aurait été applicable. Si la personnalité morale de l'Entreprise individuelle serait pour ces entrepreneurs constituée juridiquement dès le démarrage de l'activité, le patrimoine de cette dernière serait nul par défaut, et il n'y aurait pas d'obligation de tenue d'une comptabilité détaillée ni d'un compte bancaire spécifique. L'entrepreneur pourrait affecter à tout moment, s'il le souhaite, un bien de son patrimoine personnel à son patrimoine professionnel, précisant ainsi progressivement les contours de cette entité morale qui lui est rattachée. Tant que le patrimoine affecté est nul, l'entrepreneur, personne physique, est complètement solidaire de l'entreprise, personne morale, notamment en cas d'engagement de la responsabilité civile, hormis sur l'habitation principale (le rapport proposant l'insaisissabilité par défaut de l'habitation principale). L'ensemble des recettes de l'entreprise serait fiscalement et juridiquement appréhendé par l'entrepreneur et soumis à l'impôt sur les revenus, l'entreprise étant fiscalement transparente. Elle aurait eu le choix entre deux régimes fiscaux et sociaux, un régime réel et un régime simplifié, forfaitaire.

À la recherche d'une réelle simplification juridique, le rapport préconisait en conséquence de faire disparaître toutes les autres formes juridiques de sociétés unipersonnelles mais, prudemment, « dans la mesure du possible et sous réserve que les contraintes administratives induites ne soient pas disproportionnées avec la réalité des entreprises individuelles ».

Cependant, devant l'obstacle, la loi Pinel recula . En effet, elle se contenta d'apporter des aménagements ponctuels au statut de l'EIRL sans repenser de manière approfondie et cohérente l'entreprise à patrimoine affectée née de la loi du 15 juin 2010, ni procéder à une simplification de l'ensemble des statuts.

Ainsi, l'article 32 de la loi n° 2014-626 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises du 18 juin 2014 36 ( * ) , issu d'un amendement parlementaire adopté à l'Assemblée nationale, se contente-t-il de renvoyer à un comité de préfiguration et un rapport au Parlement dont on attend en 2018 que le premier soit créé et que le second soit rédigé. Les conclusions de ce travail devaient être rendues dans le délai de six mois à compter de la promulgation de la loi. Elles auraient eu ensuite vocation à être reprises dans le cadre d'un futur projet de loi.

Pour votre commission des Affaires économiques 37 ( * ), il s'agissait bien de « simplifier en vue de parvenir à un statut juridique unique » et de fondre les statuts de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL) et de l'entreprise individuelle (EI).

Un groupe de travail a bien été créé au ministère de la Justice. Mais il a rapidement cessé de fonctionner.

(b) Redéfinir l'objet de l'entreprise n'est pas une priorité

Dans ce contexte de résistance de notre système juridique à simplifier, redéfinir l'objet de l'entreprise n'est pas une priorité car les modifications proposées risquent de rendre encore plus difficile la recherche d'une vision claire de la notion juridique d'entreprise.

Partant du constat que le profit n'est pas une fin en soi, postulat d'ailleurs discutable, le rapport de Nicole Notat et Jean-Dominique Senard 38 ( * ) propose l'introduction à l'article 1833 du code civil d'un alinéa « officialisant la prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux » et à l'article 1835 d'un autre afin de pouvoir faire figurer dans les statuts d'une société sa « raison d'être ».

Votre Délégation considère que ces deux propositions ouvrent un débat téléologique sur la notion d'entreprise, superflu, et constate que, si la première était mise en oeuvre, elle ferait, comme l'indique le rapport, de la responsabilité sociale et environnementale (RSE) un levier de modifications profondes de la gouvernance de l'entreprise.

Une autre des propositions du rapport, créer une nouvelle catégorie « d'entreprise à mission », risque par ailleurs de complexifier un paysage juridique déjà bien morcelé qu'il s'agit au contraire de rationnaliser.

Dans un communiqué du 12 décembre 2017, le MEDEF a ainsi considéré que ces propositions reviendraient « à toucher l'ensemble des entreprises françaises sans en avoir réellement mesuré les conséquences » et pourraient « créer de l'incertitude de manière durable » et a proposé en revanche d'avancer autour de trois pistes concrètes :

1. envisager la définition d'une nouvelle catégorie d'entreprise, sur le modèle de ce qui existe aux États-Unis, appelée « entreprise de mission », qui pourrait être adoptée de manière volontaire ;

2. faire évoluer le Code Afep-Medef pour mieux intégrer les parties prenantes et les enjeux climatiques et environnementaux ;

3. travailler sur des initiatives permettant de déployer les démarches de RSE dans les PME et TPE de manière simple et incitative.

Dans un communiqué du 12 mars 2018, le MEDEF « regrette ce choix contraignant [de modification du code civil] qui s'applique indifféremment à toutes les entreprises, y compris aux PME » et estime « qu'introduire une notion nouvelle comme celle de « raison d'être », dans le Code de Commerce, va nécessiter plusieurs années avant que sa portée puisse être appréhendée complètement ».

Votre Délégation considère qu'il y a d'autres priorités pour aider de manière pragmatique les entreprises à se créer et se développer.

(4) La fusion du micro-social et du micro-fiscal

À défaut d'une unification des statuts juridiques, un rapprochement fiscal et social partiel, préconisé par le rapport précité de 2014, a été tenté. Cependant, les hésitations gouvernementales de l'époque ont brouillé la volonté initiale de simplification.

Les travailleurs indépendants relevant du régime micro-fiscal relèvent du régime social de droit commun mais ils peuvent, sur simple demande, opter pour le régime micro-social.

La loi Pinel du 14 juin 2014 a aligné les deux régimes en prévoyant que les entrepreneurs relevant du régime micro-social relèvent automatiquement du régime micro-fiscal.

L'article 12 du projet de loi visait à faire rentrer les micro-entrepreneurs 39 ( * ) dans le régime social de droit commun applicable aux travailleurs indépendants soit à partir du moment où les montants des chiffres d'affaires sont dépassés, soit à partir du moment où le montant annuel du chiffre d'affaires des micro-entrepreneurs dépasse pendant deux années consécutives un seuil fixé par décret 40 ( * ) .

Ce statut devait s'appliquer également à toutes les micro-entreprises jusqu'ici soumises, sauf option contraire, au régime de droit commun, au 1er janvier 2016. Un décret était attendu, qui allait, par l'adoption obligatoire par les micro-entrepreneurs du régime micro-social, consacrer la fusion de la micro-entreprise et de l'auto-entrepreneur, cette dernière appellation devant par ailleurs disparaître.

Revenant déjà partiellement sur la fusion, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu que cette automaticité s'effectue « sauf demande contraire » des intéressés, laissant ouverte la possibilité d'une option mais dans l'autre sens, du régime micro-social vers le droit commun de la cotisation minimale.

Puis, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a finalement instauré une transition plus douce. Son article 14 41 ( * ) a en effet reporté à 2020 l'obligation pour les micro-entreprises, initialement prévue au 1 er janvier 2016, de basculer dans le régime micro-social.

Les micro-entrepreneurs souhaitant rester encore dans le droit commun devront en faire la demande au service des impôts aux entreprises (SIE).

La commission des Affaires sociales du Sénat avait critiqué ces hésitations quant à la conduite à tenir à l'égard de l'articulation entre le régime micro-fiscal et le régime micro-social.

Le Gouvernement a donc demandé à l'automne 2015, 16 mois après l'adoption de la loi Pinel et quelques mois avant l'échéance annoncée pour le basculement, un délai supplémentaire de quatre ans pour basculer automatiquement 160 000 personnes relevant du régime micro-fiscal dans le régime micro-social , sachant que ce régime ne leur est pas forcément plus favorable et, qu'en tout état de cause, la possibilité leur est ouverte de revenir au droit commun.

Le Sénat avait donc préféré s'en tenir à la règle actuelle : le paiement de cotisations minimales, plus protecteur en termes de droits, assortie de la possibilité, sur simple demande, de passer au régime micro-social.

Avant même son entrée en vigueur, le régime « micro » unifié a donc dû être modifié deux fois.

Par ailleurs, le doublement des seuils d'imposition, opéré dans la dernière loi de finances, traduisant un engagement de la campagne présidentielle et une annonce présidentielle du 5 septembre 2017 dans le cadre du programme en faveur des travailleurs indépendants, a été accueilli favorablement dans un premier temps, mais suscite désormais certaines interrogations et réserves.

L'augmentation des seuils d'imposition est-elle une « bonne affaire »

pour les micro-entreprises ?

L'article 22 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a porté les seuils de chiffre d'affaires ouvrant droit au régime de la micro-entreprise, pour son volet micro-fiscal comme pour son volet micro-social à :

- 170 000 euros au lieu de 82 800 euros pour les activités de ventes ;

-  70 000 euros au lieu de 33 800 euros pour les prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement.

Toutefois, les limites de la franchise en base de TVA (les mêmes seuils) n'ont pas été modifiées, le coût d'un relèvement de la franchise ayant pu être estimé à 1 milliard d'euros contre 21 millions pour la mesure adoptée, laquelle ne concernera qu'une minorité des 670 000 micro-entreprises actives, estimée à 5 % par la commission des Finances du Sénat, le Gouvernement estimant pour sa part que seules... 5 896 entreprises seraient potentiellement gagnantes. Cette réforme a donc été qualifiée « d'anecdotique » sur le plan de l'efficacité économique par la commission des Finances.

Celle-ci a par ailleurs relevé que la décorrélation et le régime fiscal et le maintien de la franchise en base de TVA introduisait un nouvel élément de complexité au sein du régime de la micro-entreprise, dont l'objectif est précisément la simplicité : à la place des quatre seuils distincts existant actuellement (BIC/BNC et seuils « hauts »/seuils « bas »), il y aurait donc... six seuils distincts, puisque le mécanisme de lissage actuel pour la franchise de TVA est maintenu. La mesure adoptée va donc aboutir à la création d'un statut « intermédiaire », celui des entreprises bénéficiant du régime micro-fiscal et micro-social, mais collectant et payant la TVA dans les conditions de droit commun.

Par ailleurs, après que la Fédération des autoentrepreneurs a dénoncé une réforme incohérente, puisqu'elle ne s'accompagne pas d'une hausse parallèle du plafond de franchise en base de TVA, l'Institut de la protection sociale (IPS) 42 ( * ) , a considéré que la mesure, favorable aux entrepreneurs de prime abord, ne l'était pas en réalité 43 ( * ) . En effet, de nombreux micro-entrepreneurs raisonnent en termes de simplicité comptable, rarement en termes de coût. « Combien de chauffeurs Uber sont 'auto-entrepreneurs' alors qu'avec leur véhicule, leur assurance, ils auraient tant intérêt à se mettre au réel pour déduire leur charges », selon un témoignage 44 ( * ) .

Ainsi, pour un chiffre d'affaires de 30 000 euros :

- un coiffeur à domicile paiera 6 900 euros de cotisations sociales en tant que micro-entrepreneur, contre 5 649 euros au réel, soit un différentiel de 1 255 euros ;

- un vendeur de vêtements sur internet règlera 3 960 euros par an, contre 2 215 euros s'il était au réel, soit 1 745 euros de plus par an ;

- un micro-entrepreneur maçon acquittera 6 900 euros par an, contre 4 144 euros au réel, soit 2 756 euros de cotisations en sus.

La situation est encore plus défavorable pour les micro-entrepreneurs lorsque les chiffres d'affaires sont encore plus élevés.

Le grand gagnant de la réforme est l'État, qui devrait encaisser davantage de cotisations sociales. Par ailleurs, le coût de la protection sociale des micro-entrepreneurs devrait s'alourdir, pouvant conduire davantage de micro-entrepreneurs à renoncer à une couverture sociale complémentaire.

Source : IPS

c) Le découragement face à la complexité administrative

Une fois que l'entrepreneur a pris connaissance de la documentation administrative, choisi le statut juridique de son activité économique, il doit ensuite trouver le bon Centre de formalités des entreprises, publier les annonces légales requises, obtenir le Kbis, déclarer les bénéficiaires effectifs, obtenir un code SIREN et enregistrer aux impôts les premiers actes de son entreprise, sans oublier, ce qui est souvent le cas, le dépôt de sa marque à l'INPI.

(1) Les Centres de formalités des entreprises : un faux « guichet unique »

Les Centres de formalités des entreprises (CFE) sont les interlocuteurs de premier niveau des entreprises et sont chargés d'être l'interface entre elles et les administrations.

Le CFE est chargé à la fois d'informer sur la réglementation relative à la création d'activité et d'assurer la centralisation, le contrôle formel et la transmission des demandes d'autorisations pour les activités réglementées, nécessitant une démarche particulière.

Les CFE évitent ainsi aux entreprises la multiplication des démarches auprès des différents organismes où elles doivent être déclarées (INSEE, Registre des métiers, URSSAF, RSI, services fiscaux, Greffe du Tribunal de Commerce, etc...).

On présente à tort les CFE comme un guichet unique . En effet, le créateur d'entreprise est immédiatement renvoyé soit vers le site Guichet-entreprises.fr, soit vers un « CFE particulier en fonction de la nature de son activité ».

Ainsi, les CFE n'ont traité que 54 975 dossiers de création sur les 554 000 entreprises créées en 2017, soit un dixième du volume.

C'est auprès du CFE dont il dépend que le porteur de projet doit d'abord s'adresser pour déposer sa déclaration d'activité 45 ( * ) :

- La déclaration d'existence P0 : pour les personnes physiques (exploitants individuels, artisans, commerçants indépendants, professionnels libéraux, artistes..) ;

- La déclaration d'existence M0 : pour les sociétés.

Les sept centres de formalités des entreprises « guichets uniques »

Activité professionnelle

CFE

Entreprise commerciale (sauf en cas d'inscription obligatoire au répertoire des métiers)

Chambre de commerce et d'industrie (CCI)

Entreprise artisanale ou entreprise commerciale qui doit s'inscrire au répertoire des métiers

Chambre des métiers et de l'artisanat (CMA)

Entreprise de transport de marchandises par voie d'eau ou société coopérative de transport fluvial

Chambre de la batellerie artisanale

Société civile ou non commerciale (société d'exercice libéral...)

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Agent commercial

Groupement d'intérêt économique (GIE) ou groupement européen d'intérêt économique (GEIE)

Greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance statuant commercialement

Profession libérale

Entreprise employant du personnel mais non immatriculée (administration, collectivité locale, syndicat, comité d'entreprise)

Artiste auteur, qui exerce à titre indépendant une activité de création d'oeuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, photographiques, graphiques et plastiques

Taxi-locataire, considéré comme assimilé salarié

Vendeur à domicile, exerçant son activité de manière indépendante, inscrit au RCS ou au registre spécial des agents commerciaux

Urssaf ou caisse générale de Sécurité sociale

Entreprise ou entrepreneur individuel exerçant à titre principal une activité agricole

Chambre d'agriculture

Entreprise ou organisme ne relevant pas d'un autre CFE et n'ayant pas d'obligations autres que statistiques et fiscales

Centre des impôts

Source : Service-public.fr

La déclaration fournit tous les renseignements sur l'activité envisagée et doit être déposée durant les 15 premiers jours d'activité. Elle indique le régime d'imposition auquel le créateur d'entreprise souhaite être soumis.

Le CFE reste ensuite l'interlocuteur privilégié du chef d'entreprise pour toutes les autres formalités liées à la vie de l'entreprise : modification, ouverture d'un établissement supplémentaire, transfert de siège social, cessation d'activité ...

(2) Infogreffe : un service d'état civil pour déclarer la naissance de l'entreprise

Le registre du commerce et des sociétés (RCS) est tenu par le greffier de chaque tribunal de commerce, sous la surveillance du président dudit tribunal ou d'un juge commis à cet effet. Il implique un contrôle général de légalité, auquel s'associe un contrôle de police économique. Ce contrôle est effectué dans un délai d'un jour franc , afin de préserver la rapidité de création de l'entreprise.

L'immatriculation au répertoire des métiers est obligatoire pour les personnes indépendantes, physiques ou morales, n'employant pas plus de 10 salariés et exerçant une activité artisanale de production, de transformation ou de prestation de services.

La distinction n'est parfois pas évidente. « Un coiffeur est en principe un artisan lorsqu'il se borne à coiffer mais devient un commerçant s'il vend un shampoing et même si son activité principale est artisanale, certains ont une double immatriculation » a ainsi témoigné un chef d'entreprise.

(a) Le « graal » du « Kbis »

L'extrait Kbis, acte authentique faisant foi des informations portées par la société au RCS, représente la véritable « carte d'identité » à jour d'une entreprise .

Ce document, qui peut être défini comme l'état civil à jour des entreprises immatriculées au RCS, regroupe l'ensemble des renseignements que l'entreprise doit déclarer, et fait état, le cas échéant, des mentions portées par le greffier 46 ( * ) du Tribunal de commerce chargé de la tenue de ce registre. La vocation fondamentale du RCS étant de porter à la connaissance du public les informations qui y figurent, toute personne a la faculté de demander et d'obtenir l'extrait Kbis d'une entreprise auprès du greffe concerné .

L'extrait Kbis atteste de l'existence juridique de l'entreprise et donne une information vérifiée qui fait foi . Il s'agit du seul document officiel prouvant l'identité et l'adresse de la personne (physique ou morale) immatriculée, son activité, ses organes de direction, administration, gestion ou contrôle, ainsi que l'existence ou non d'une procédure collective engagée à son encontre.

Dans la plupart des cas, pour être opposable, l'extrait Kbis demandé doit dater de moins de 3 mois .

Il est délivré par les greffes dont les factures ne comportent généralement qu'une faible partie d'émoluments. Ainsi, pour une modification de personne morale dont la facture totale s'élève à 200,14 euros TTC, les émoluments du greffier sont de 65,00 euros.

En effet, en plus des émoluments, le tarif facturé aux entreprises comprend :

- la taxe de parution au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC) ;

- la taxe de dépôt à l'Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) ;

- la TVA ;

- les frais postaux réels (sauf s'il existe un forfait postal ou si un autre mode de transmission est prévu).

Quelques exemples de la tarification (en euros) relative au RCS

FORMALITE

TTC

BODACC

TVA

INPI

Émoluments du greffe

Dépôts des comptes

45,63

25

2,53

5,45

11,74

Modification personne physique

95,95

45

7,51

5,90

37,54

Modification personne morale

195,38

116

11,26

11,80

56,32

Immatriculation ACHAT FONDS PP

129,41

70

8,92

5,90

44,59

Immatriculation ACHAT FONDS PM

227,81

143

12,20

11,60

61,01

Source : Conseil national des Greffiers des Tribunaux de commerce

Outre cette formalité, l'entreprise doit également effectuer une publicité dans un journal d'annonces légales (100 euros environs).

(b) Infogreffe, un interlocuteur de référence pour les entreprises

Grâce à son maillage territorial, les 134 greffes des Tribunaux de commerce, sont considérés par les entreprises comme l'interface la plus accessible et la plus rapide , étant largement dématérialisée, Infogreffe compte au total 5,5 millions d'assujettis .

Depuis 2004, les greffiers des tribunaux de commerce se sont engagés dans la dématérialisation de l'intégralité des formalités en créant un système d'échange et de suivi (SES) communiquant avec l'ensemble des centres de formalités des entreprises, les services des impôts et ceux de l'INSEE.

La dématérialisation des formalités a progressé de 100 % en 2017 avec 380 000 actes, à comparer aux 54 975 dossiers transmis en 2017 via guichet-entreprises.fr. Excepté les cessions de parts, l'ensemble des actes concernant la vie de l'entreprise est désormais dématérialisable. Les greffes des tribunaux de commerce échangent avec l'ensemble des CFE (chambre de commerce et d'industrie, chambre des métiers et de l'artisanat, chambre d`agriculture, URSSAF) les données et informations prévues par les textes lors des évenements de création, modification et cessation des entreprises.

Depuis 2007 il est possible de procéder en ligne à l'immatriculation, la modification ou la radiation de son entreprise et de déposer les comptes annuels en 30 minutes.

Depuis le 2 août 2017, il est également possible d'effectuer par voie électronique la déclaration relative aux bénéficiaires effectifs.

Les greffiers ont également la faculté de diffuser par voie électronique les inscriptions et actes issus des registres qu'ils tiennent.

Le RCS est donc intégralement conforme à la première directive européenne du 9 mars 1968 remplacée par la Directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 qui a imposé aux États membres, à compter du 1 er janvier 2007, que les registres des sociétés soient tenus par voie électronique et que les copies ou extraits puissent être délivrés par voie électronique.

Les grands remettants, c'est-à-dire les grands comptes des cabinets de formalités qui travaillent avec les cabinets d'avocats ou d'experts comptables assistant les entreprises dans leurs démarches administratives, travaillent avec Infogreffe. Ce service est même internalisé dans certaines banques qui ont des contrats de licence pour utiliser ce web-service.

Par ailleurs, et depuis la fermeture du site Euridile en 2009, l'INPI ne gère plus la base de données et la diffusion électronique des données du registre national du commerce et des sociétés, rendant fictives les missions qui lui ont été confiées par l'article 411-1 du code de la propriété intellectuelle.

Lorsque les greffes n'assurent pas cette prestation, comme auprès des tribunaux mixtes de commerce (TMC) outre-mer, il a été indiqué à votre rapporteur un délai de plusieurs mois pour enregistrer un simple changement d'adresse d'une entreprise. Il serait plus efficace de nommer des greffiers de tribunal de commerce pour assurer le greffe des TMC.

(c) Un « registre bis » : le bénéficiaire effectif

L'article 139 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, a prévu une nouvelle obligation à la charge des sociétés, laquelle conduit à créer un « registre bis ».

Toutes les sociétés françaises, immatriculées au registre du commerce et des sociétés, antérieurement au 1 er août 2017, doivent 47 ( * ) , avant le 1 er avril 2018, déclarer au greffe ses bénéficiaires effectifs, au moyen d'une déclaration, qui est déposée en annexe au registre du commerce et des sociétés. Pour celles immatriculées depuis le 1 er août 2017, le document doit parvenir au greffe, au moment de l'immatriculation ou au plus tard, 15 jours après.

Le « bénéficiaire effectif » est défini comme la ou les personnes physiques qui possèdent ou contrôlent, directement ou indirectement, une entité juridique, support d'activités économiques ou financières.

Toute société est tenue d'identifier ses bénéficiaires effectifs, lesquels sont des personnes physiques qui :

- soit détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société déclarante ;

- soit exercent, par d'autres moyens, un pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d'administration ou de direction ou sur l'assemblée générale des associés ou actionnaires de la société déclarante.

Uniquement à défaut d'identification selon les deux critères précédents, le ou les représentants légaux de la société déclarante sont les bénéficiaires effectifs.

En d'autres termes, pour chaque société, les bénéficiaires effectifs sont ainsi déterminés selon deux approches :

- une approche mathématique, en analysant les détentions directes ou indirectes. Au-delà d'un seuil (plus de 25 %), soit en capital, soit en droits de vote, la personne physique est bénéficiaire effectif ;

- une approche juridique qui permet d'identifier le bénéficiaire effectif au travers d'une analyse des actes juridiques : pacte d'actionnaires ou d'associés, convention d'indivision, montage juridique permettant d'exercer un contrôle....

Si ces deux approches ne donnent aucun résultat, alors le bénéficiaire effectif est le ou les représentants légaux de la société déclarante. À noter que si le représentant légal est une personne morale, le bénéficiaire effectif est le ou les personnes physiques qui représentent légalement cette personne morale.

Le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce a élaboré des modèles de déclaration appelés « document d'identification relatif au bénéficiaire effectif » et propose 15 schémas pour identifier le bénéficiaire effectif, lesquels ne reprennent pas « tous les cas de figure applicables, mais seulement les principaux ou des situations originales ».

Le fait de ne pas déclarer les bénéficiaires effectifs au registre du commerce et des sociétés, ou d'y reporter des informations fausses, incomplètes ou erronées, volontairement ou non, peut être sanctionné pénalement par une peine de six mois d'emprisonnement et une amende de 7 500 euros.

Le coût de cette nouvelle formalité est de 24,80 à 54,42 euros pour chaque société, auxquels s'ajoutent les frais demandés par les conseils, entre 100 et 200 euros . Elle renchérit le coût du recours aux sociétés non cotées en bourse. En effet, pour toute modification de contrôle, de siège social, de forme juridique et de dénomination sociale, voire dans certains cas de dirigeants, il conviendra de procéder à une déclaration dont le coût sera aussi important que celui du dépôt des comptes. Aucune estimation macroéconomique du coût de cette nouvelle formalité pour les entreprises n'est disponible.

Le coût est toutefois élevé alors que, lorsque le dispositif a été soumis au Sénat, il était évoqué des « formalités réduites au minimum, quelques cases à cocher ou champs supplémentaires à remplir dans un formulaire existant » 48 ( * ) . D'autant que la commission des Finances du Sénat a considéré à juste titre ce nouveau registre d'une utilité assez limitée , le dispositif reste déclaratif et l'identification du bénéficiaire effectif demeure une obligation de moyen et non de résultat ; en outre, le registre vise « tout simplement les sociétés déjà immatriculées au RCS dont on devine qu'elles ne sont pas le véhicule privilégié par les personnes souhaitant échapper à l'impôt », ce registre ayant été créé pour remédier aux lacunes du registre public des trusts ...

De surcroît, les informations ainsi communiquées au greffe peuvent éventuellement être transmises à des tiers et notamment « toute personne justifiant d'un intérêt légitime », sous le contrôle du juge cependant, ce qui ne manque pas d'inquiéter les entreprises.

(3) La publication de l'annonce légale, acte de naissance de l'entreprise

Cette obligation de publication est une formalité substantielle pour le démarrage de l'entreprise.

(a) Une double publication d'annonce légale

Il est obligatoire de faire publier un avis dans un journal d'annonces légales dans le cadre de certaines démarches administratives pour les professionnels et les entreprises : création d'entreprise, modification des statuts d'une société, changement de gérance, dissolution, transfert de siège social, appel à candidature pour un marché public, liquidation, etc.

La publication doit être effectuée dans un journal d'annonces légales habilité dans le département où est situé le siège social de l'entreprise. Le choix du journal appartient aux parties. Cependant, toutes les annonces judiciaires relatives à une même affaire doivent être insérées dans le même journal.

Les entreprises commerciales doivent publier les annonces concernant les actes enregistrés au RCS (ventes et cessions, immatriculations et créations d'établissement, modifications et radiations de personnes physiques ou morales inscrites au RCS, procédures collectives, avis de dépôt des comptes des sociétés) soit au BODACC , soit dans un journal d'annonces légales .

Cependant, dans les deux cas, ce sont les greffes des tribunaux de commerce qui assurent également la responsabilité de l'enregistrement, de la saisie de l'intégralité des informations obligatoires nécessaires à la publication des insertions au BODACC et de leur transmission à la Direction de l'Information Légale et Administrative .

On peut donc s'interroger sur le contenu effectif de la prestation du BODACC qui est facturée aux entreprises, lesquelles ont le sentiment justifié de devoir payer deux fois pour la même obligation d'information.

(b) Une publication « papier » qui persiste

Chaque année, les journaux doivent être habilités, par arrêté préfectoral (ou du représentant de l'État), à publier des annonces judiciaires et légales dans chaque département.

La loi du 4 janvier 1955 qui définit les journaux susceptibles de recevoir ces annonces légales est particulièrement souple 49 ( * ) .

L'ensemble des annonces publiées dans les journaux habilités à recevoir des annonces légales relatives aux sociétés et fonds de commerce, est consultable dans une base de données numérique centrale : le « portail de la publicité légale des entreprises » (PPLE) . Ce dernier donne gratuitement accès à l'ensemble des informations légales sur les sociétés, les entreprises commerciales et les fonds de commerce diffusées par les sites :

- actulegales.fr qui référencie l'ensemble des annonces publiées dans les journaux d'annonces légales habilités en France,

- Infogreffe.fr qui centralise l'ensemble des documents déposés au registre du commerce et des sociétés (RCS), auprès du greffe du tribunal de commerce,

- bodacc.fr qui assure la publicité des actes enregistrés au RCS et publiés au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc) depuis 2008.

La recherche peut s'effectuer sur la dénomination, le nom commercial, l'adresse, le numéro Siren/Siret de l'entreprise ou le code APE (activité principale de l'entreprise).

Les annonces publiées par les journaux habilités doivent être transmises dès leur publication au PPLE, dans une version identique à celle qui a été publiée, pour être mises en ligne dans les 7 jours maximum.

Chaque annonce mise en ligne comprend l'intégralité des mentions figurant dans l'annonce publiée dans le journal habilité, ainsi que le nom de ce journal et la date de publication dans ce journal.

Toute personne qui a besoin d'une copie d'une annonce dans son format imprimé doit en faire la demande directement auprès de l'éditeur du journal d'annonces légales, aux frais du demandeur.

Le site du BODACC précise que les journaux d'annonces légales ont la priorité chronologique sur le BODACC pour ce qui est de la publication d'une annonce commerciale.

Le BODACC

Le Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) est édité par la Direction de l'information légale et administrative dans le cadre de sa mission de service public de la transparence économique et financière 50 ( * ) . Le BODACC assure la publicité des actes enregistrés au registre du commerce et des sociétés (RCS) tels que les ventes et cessions, les immatriculations, les créations d'établissements, les cessions relatives aux EIRL, les procédures collectives, les modifications, les radiations, les annonces de dépôt des comptes des sociétés. Il publie également certaines annonces civiles.

Le montant des rémunérations dues en contrepartie des prestations fournies par la Direction de l'information légale et administrative pour l'insertion d'annonces légales, éditeur du BODACC, pour l'année 2018 est fixé par l' arrêté du 9 novembre 2017 .

À noter que, dans un souci de simplification, les micro-entreprises peuvent choisir depuis le 16 octobre 2014 de ne pas rendre publics 51 ( * ) les comptes annuels qu'elles déposent en annexe au registre du commerce et des sociétés (RCS). La « loi Macron » du 6 août 2015 a étendu cette option de confidentialité des comptes aux petites entreprises ainsi qu'aux micro-entreprises établies sous forme de société coopérative agricole ou d'union de sociétés coopératives agricoles. Depuis le 7 août 2016, les petites entreprises peuvent choisir de ne pas rendre public leur compte de résultat relatif à tout exercice clos à compter du 31 décembre 2015. Cette confidentialité ne porte cependant que sur le compte de résultat, le bilan reste public. Cette option de confidentialité concerne entre la moitié et le tiers des
comptes publiés, lesquels varient du simple au triple selon les mois : selon les derniers chiffres publiés sur le site du BODACC, 114 088 comptes ont été publiés en août 2015 et 19 851 non publiés tandis qu'en mai 2016, 45 384 comptes étaient publiés et 28 291 ne l'étaient pas.

Source : site du BODACC

(c) Une formalité substantielle.

Le non-respect des formalités de publicité peut entraîner la nullité des actes, considérés alors comme illicites.

Lors de la publication, le journal fournit au déclarant une attestation de parution ou la copie du journal, qui est nécessaire pour prouver la parution et pour d'autres démarches ultérieures (notamment pour une demande de modification au RCS).

Si le coût tarifaire est modeste, cette démarche reste relativement contraignante et onéreuse pour les PME et surtout les TPE.

(4) L'entrepreneur et l'INSEE

Lors de son immatriculation ou de sa déclaration d'activité auprès d'un centre de formalités des entreprises (CFE), toute entreprise ou entrepreneur individuel se voit attribuer un numéro composé de neuf chiffres qui permet d'identifier chaque entreprise.

Dès que l'immatriculation est effective, l'INSEE envoie un certificat d'inscription au répertoire Sirene, mentionnant :

- le numéro Siren , qui identifie l'entreprise ;

- le numéro Siret (composé de 14 chiffres), qui identifie chaque établissement de la même entreprise ;

- et le code APE , qui identifie la branche d'activité de l'entreprise ou du travailleur indépendant.

(a) Le code SIREN

Créé par le décret du 14 mars 1973, repris par les articles R. 123-220 à R. 123-234 du code de commerce, le Répertoire National d'identification des entreprises et des établissements concerne les unités implantées sur le territoire national.

Le processus est le suivant :

La gestion de ce répertoire est confiée à l'INSEE. Elle est effectuée à travers le système SIRENE (Système Informatique pour le Répertoire des Entreprises et des Établissements), d'où le nom courant de SIRENE pour désigner le répertoire.

Le répertoire SIRENE de l'INSEE

En plus de la mission de gestion du répertoire, l'INSEE assure deux autres missions dans le cadre de SIRENE :

Une mission de coordination et d'information inter administratives.

L'INSEE procède à l'immatriculation et l'identification des entreprises et de leurs établissements, qui sont utilisés et reconnus par tous.

Elle attribue un numéro unique d'identification, le numéro SIREN aux personnes morales et aux entrepreneurs individuels et le numéro SIRET à chacun de leurs établissements. L'usage généralisé de ce numéro unique place le répertoire SIRENE au coeur du dispositif d'information sur les entreprises.

Elle informe en permanence les associés et partenaires de SIRENE auxquels sont communiqués les mouvements enregistrés dans le répertoire (créations, modifications, cessations).

Une mission statistique

Le répertoire SIRENE est en France un fichier de référence servant de base pour toutes les investigations statistiques sur les entreprises, enquêtes ou exploitations de sources administratives.

Le répertoire enregistre l'état civil de toutes les entreprises et leurs établissements, quelle que soit leur forme juridique et quel que soit leur secteur d'activité. Les organismes publics ou privés et les entreprises étrangères qui ont une représentation ou une activité en France y sont également répertoriés.

Le répertoire SIRENE rassemble des informations économiques et juridiques sur plus de 7,5 millions d'établissements et 6,5 millions d'entreprises appartenant à tous les secteurs d'activité.

L'unité SIRET de type établissement correspond soit à une implantation géographique distincte où s'exerce une activité, soit à une implantation géographique pour laquelle il existe un budget annexe. Ceci signifie que, contrairement au secteur privé, à une même adresse il peut exister plusieurs numéros SIRET pour un même numéro SIREN.

Le numéro d'immatriculation attribué aux organismes est significatif, il commence toujours par 1 ou 2. Les deux premiers caractères sont fonction de la catégorie juridique, les deux suivants sont le numéro de département d'implantation du siège pour les organismes à compétence territoriale.

Source : site INSEE

(b) Le code APE (ou NAF)

Dans le cadre de sa mission de gestion du répertoire SIRENE, l'INSEE attribue pour l'entreprise et pour chacun des établissements de l'entreprise, un code dit Activité Principale Exercée (APE) à partir de la nomenclature d'activités française (NAF) définie par le décret n° 2007-1888 du 26 décembre 2007.

Ce code est attribué à des fins statistiques et ne peut constituer qu'un élément d'appréciation d'une réglementation ou d'un contrat 52 ( * ) . C'est, en particulier, l'activité réelle de l'entreprise qui détermine la convention collective qui s'y applique. Toutefois, il suffit qu'une convention collective fasse référence à un code NAF (ou APE) et qu'une entreprise soit rattachée à ce même code NAF pour que la convention collective lui soit applicable.

Le site de l'INSEE explique ainsi sur son site que l'attribution de code peut bien créer des obligations pour les unités concernées :

Comment retrouver un code APE ?

« Vous tenez une supérette, pour connaître le code APE dont dépend votre supérette, voici le chemin à suivre pour retrouver son code APE :

Section :  G Commerce ; réparation d'automobiles et de motocycles

Division : 47 Commerce de détail, à l'exception des automobiles et des motocycles

Groupe : 47.1 Commerce de détail en magasin non spécialisé

Classe : 47.11 Commerce de détail en magasin non spécialisé à prédominance alimentaire

Sous classe : 47.11C Supérettes

Le code APE de votre supérette est 4711C. Si la convention collective mentionne ce code, alors elle vous concerne ».

Source : site INSEE

L'APE est déterminé séparément pour l'entreprise dans son ensemble (fonction de la ventilation des activités de l'entreprise) et pour chacun des établissements. Si une entreprise exerce plusieurs activités, ce qui rend difficile de déterminer son activité principale, c'est la ventilation du chiffre d'affaires ou des effectifs selon les branches qui est utilisée comme critère.

Ce code est constitué de quatre chiffres et une lettre d'après la nomenclature actuellement en vigueur.

Pour déterminer ce code, l'INSEE utilise la nomenclature d'activité française (NAF). Cette recherche peut s'effectuer par des niveaux appelés « listes » de plus en plus détaillés.

Depuis sa création en 1993, la NAF a fait l'objet de deux révisions , la dernière version étant en vigueur depuis le 1 er janvier 2008.

Grâce aux éléments d'information ainsi recueillis, et à tous ceux exploités par ailleurs par l'INSEE dans le champ économique, une base de données, Odil 53 ( * ) , permet d'aider à la création d'entreprise en portant un diagnostic territorial.

La NAF a une structure arborescente à 5 niveaux emboîtés :

Niveau 1 : 21 sections , communes à la NAF, à la NACE (nomenclature européenne) et à la CITI (nomenclature internationale).

Niveau 2 : 88 divisions , communes à la NAF, à la NACE et à la CITI.

Niveau 3 : 272 groupes communs à la NAF et à la NACE.

Niveau 4 : 615 classes , communes à la NAF et à la NACE (niveau le plus détaillé de la NACE).

Niveau 5 : 732 sous-classes françaises.

Source : INSEE

(5) L'entrepreneur et l'INPI

L'INPI est un interlocuteur à double titre pour l'entreprise :

- pour l'accès à ses informations économiques et financières qui transite désormais par l'INPI,

- pour la protection de la marque.

(a) L'accès aux informations économiques et financières de l'entreprise

Lorsqu'il dépose ses documents au greffe du Tribunal de Commerce, l'entrepreneur les dépose également à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), établissement public placé sous la tutelle du ministère de l'Économie et des Finances.

En application de l'article L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle 54 ( * ) , l'INPI a notamment pour mission d'assurer la diffusion et la mise à la disposition gratuite du public, à des fins de réutilisation, des informations techniques, commerciales et financières qui sont contenues dans le registre national du commerce et des sociétés et dans les instruments centralisés de publicité légale.

Dans ce cadre, l'INPI rediffuse des informations 55 ( * ) saisies à partir des comptes annuels déposés, depuis le 1 er janvier 2017, auprès des greffes des tribunaux de commerce, des tribunaux d'instance des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, et des tribunaux mixtes de commerce des départements et régions d'outre-mer, puis transmis à l'INPI dans le cadre de ses missions. Ce sont les greffes qui réalisent et structurent ces informations pour le compte de l'INPI. La mission qui lui a été confiée par l'article 411-1 du code de la propriété intellectuelle apparaît donc bien formelle. C'est ce qui avait conduit les rapporteurs du Sénat du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques 56 ( * ) , à s'interroger « sur l'utilité véritable du maintien de l'attribution à l'INPI de la mission de centralisation matérielle du RNCS, à l'heure du numérique, alors que les données des RCS sont aujourd'hui numérisées et sécurisées par les greffiers eux-mêmes, qui en assurent une diffusion dont l'efficacité et la fiabilité ne sont pas contestées ».

(b) La protection de la propriété industrielle

Héritier des lois du 7 janvier 1791 et 25 mai 1791 qui ont créé la législation sur la propriété intellectuelle, l'INPI a pour missions :

- de recevoir les dépôts et délivrer les titres de propriété industrielle : brevets , marques , dessins et modèles ;

- de participer à l'élaboration du droit de la propriété industrielle ;

- de mettre à la disposition du public toute information nécessaire pour la protection des titres de propriété industrielle ;

- de former et sensibiliser tous les acteurs économiques aux questions de la propriété industrielle.

Depuis le 16 octobre 2017, les dépôts de marque se font exclusivement par voie électronique.

Cette démarche est indispensable pour mener à bien un projet entrepreneurial. En effet, la marque est un signe distinctif qui permet au consommateur de distinguer le produit ou service d'une entreprise, de ceux proposés par les entreprises concurrentes. La marque peut être matérialisée par un nom propre, un mot, une expression ou un symbole visuel.

Pour un entrepreneur, il est primordial de protéger sa marque 57 ( * ) car c'est cette procédure qui lui donnera des droits exclusifs d'utilisation de la marque. Une fois la marque enregistrée, il est le seul à pouvoir l'utiliser en toute légalité. Il sera alors interdit à tous tiers de l'utiliser sans le consentement de son propriétaire.

L'enregistrement d'une marque auprès de l'INPI en cinq étapes

1 - La recherche d'antériorité

Cette étape permet de savoir si la marque que vous voulez déposer n'existe pas déjà. Il existe une fonction de recherche de base qui est gratuite et un système de recherches approfondies (payant si vous le faites faire ou gratuit si vous le faites vous-même). La recherche approfondie permet de s'assurer qu'il n'existe aucune antériorité notamment dans les noms de domaines.

Une marque se dépose en fonction de classes qui correspondent à un secteur d'activité. Plus l'on choisit de classes pour déposer sa marque, plus le coût est élevé. Il faut donc faire le compromis entre une bonne protection et l'optimisation du coût de dépôt.

Quelques exemples de classes :

Services de restauration (alimentation) ; hébergement temporaire

Télécommunications

Vêtements, chaussures, chapellerie

Instruments de musique

2 - La demande d'enregistrement

La demande d'enregistrement doit être effectuée à l'INPI. Le centre principal est à Paris mais il existe également des implantations régionales. Il est également possible d'envoyer le dossier de dépôt de la marque par courrier.

Le coût de dépôt d'une marque est de 225 euros jusqu'à 3 classes (200 euros si la demande est réalisée sur Internet) et de 40 euros par classe de produits ou de services supplémentaires.

3 - La publicité de la demande

La publication au Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle se déroule 6 semaines après le dépôt de la demande. Le BOPI rassemble l'ensemble des demandes de brevets, marques, dessins et modèles déposés par les entreprises auprès de l'INPI.

4 - L'opposition à l'enregistrement

Il est possible pour les détenteurs de droits de propriété industrielle antérieurs de pouvoir former une opposition au dépôt (dans un délai légal de deux mois suivant la publication). Si l`opposition aboutit, la demande d'enregistrement est rejetée, dans le cas contraire, elle est validée.

5 - La délivrance du certificat d'enregistrement de la marque

Une fois la marque enregistrée, il y a une nouvelle publication dans le BOPI qui officialise le dépôt de marque. La durée de dépôt est alors de 10 ans,  pouvant être renouvelée par tranche de 10 ans indéfiniment.

Source : site INPI

(6) L'entrepreneur et l'administration fiscale

Le rapport de la Cour des comptes sur la collecte des prélèvements par les entreprises de juillet 2016 a dénombré 233 prélèvements dont les entreprises sont redevables en tant que contribuables ou collecteurs de premier niveau , qui ont procuré 772,8 milliards d'euros de recettes en 2014 , soit 36,1 % du PIB . En leur sein, huit prélèvements 58 ( * ) et ceux qui s'y apparentent concentrent 85,6 % des recettes. À l'inverse, les 96 prélèvements au rendement inférieur à 100 millions d'euros n'en apportent que 0,3 % (pour un total cumulé de 2,5 milliards).

Sept types d'assiettes concentrent une part prépondérante des recettes liées aux prélèvements versés par les entreprises : les revenus liés à l'activité professionnelle, les ventes, les bénéfices, les revenus du patrimoine financier 59 ( * ) , la valeur ajoutée, un montant représentatif d'un prix de location, un montant représentatif du prix d'un actif lors d'un transfert de propriété. Par ailleurs, de nombreux prélèvements sectoriels sont assis sur des assiettes correspondant à des données physiques : des quantités, des surfaces, des distances, des poids 60 ( * ) , des nombres à l'unité.

Il en résulte, pour les entreprises, de nombreux rendez-vous fiscaux et sociaux chaque mois...

Les échéances calendaires fiscales sont particulièrement denses en France comme en témoignent les extraits du calendrier fiscal du ministère des Finances pour les seuls mois d'avril et mai 2018 joints en annexe.

(a) Un interlocuteur : le service des impôts des entreprises

Le Service des Impôts des Entreprises adresse à chaque créateur d'entreprise une lettre d'accueil et un formulaire de renseignements lui indiquant son régime d'imposition et l'ensemble des obligations fiscales lui incombant suite à la création de son activité professionnelle.

Le Service des impôts des entreprises dispose d'un pôle enregistrement compétent pour enregistrer certains actes notariés ou établis sous seing privé, c'est-à-dire certains contrats signés en présence d'un notaire ou rédigés par l'entreprise, sans l'intervention d'un officier public. L'enregistrement au Service des Impôts des Entreprises (SIE) est une formalité fiscale donnant une reconnaissance légale à l'acte établi.

Sont obligatoirement enregistrés auprès du SIE :

- les actes sous seing privé qui constatent la prorogation, la transformation ou la dissolution d'une société ;

- les actes sous seing privé constatant l'augmentation, l'amortissement ou la réduction du capital des sociétés, les cessions de parts sociales ou cessions de fonds de commerce ;

- les statuts constitutifs de sociétés rédigés par un notaire et comportant des apports d'immeubles, de parts sociales ou d'actions ou de fonds de commerce .

Certains actes établis sous seing privé (comme la reconnaissance d'une dette ou un prêt) peuvent être également enregistrés de manière facultative.

En revanche, depuis le 1 er juillet 2015, l'obligation d'enregistrement des actes constatant la formation d'une société (statuts) a été supprimée.

Ces formalités donnent lieu en règle générale à un droit d'enregistrement qui est calculé et acquitté lors du dépôt des actes.

Le Service des Impôts des Entreprises est l'interlocuteur unique concernant toutes les démarches fiscales des PME, quelle que soit leur activité (professions libérales, artisans, commerçants et agriculteurs) et quel que soit leur statut juridique (entreprise individuelle ou société). Les missions principales du Service des Impôts des Entreprises concernent les déclarations et paiements des impôts, de la TVA, la taxe sur les salaires, la cotisation foncière des entreprises etc... Chaque Hôtel des impôts dispose de son Service des Impôts des Entreprises dans le souci d'offrir un meilleur service aux PME, notamment pour simplifier les démarches administratives, fiscales et de prises de renseignements.

Le SIE s'adresse plus exactement aux entreprises de moins de 5 000 salariés ou qui réalisent un chiffre d'affaires inférieur à 1,5 milliard d'euros et un total de bilan inférieur à 2 milliards d'euros. À défaut, les entreprises doivent se tourner vers la Direction des Grandes Entreprises (DGE).

(b) Le centre de gestion agréé : un aidant contesté mais nécessaire

Toute entreprise industrielle, commerciale, artisanale et agricole relevant de l'impôt sur le revenu (IR) ou de l'impôt sur les sociétés (IS), quel que soit son régime d'imposition (micro-entreprise, régime simplifié d'imposition ou régime du réel normal), peut adhérer à un centre de gestion agréé (CGA) .

Toutefois, seules les entreprises relevant de l'IR et soumises à un régime réel d'imposition peuvent bénéficier des avantages fiscaux :

• Le revenu imposable de l'entreprise adhérente à un CGA n'est pas majoré de 25 % pour le calcul de l'impôt, depuis la loi de finances pour 2006. Sinon, il est majoré de 25 % avant d'être soumis au nouveau barème progressif par tranches.

• Une réduction d'impôt pour frais d'adhésion et de comptabilité : cette réduction est égale au montant des dépenses engagées pour la tenue de la comptabilité et l'adhésion au CGA dans la limite des 2/3 des dépenses et plafonnée à 915 euros par an.

• La déduction intégrale du salaire versé au conjoint 61 ( * ) . Pour les non-adhérents, la réduction est plafonnée à 17 500 euros par an.

• Une « amnistie fiscale : dans les trois mois de votre adhésion à un CGA, vous ne subissez pas de majoration fiscale si vous faites connaître spontanément les insuffisances, inexactitudes ou omissions éventuelles dans votre déclaration fiscale professionnelle » selon le site de la fédération des CGA.

L'adhésion peut avoir lieu à n'importe quel moment. Néanmoins, pour bénéficier des avantages fiscaux dès la première année, cette adhésion doit intervenir dans les cinq mois de l'ouverture de l'exercice comptable de l'entreprise. Selon la fédération des centres de gestion agréés, 300 000 TPE auraient recours à 100 centres.

Le rôle du centre de gestion agréé est d'assister et de surveiller la gestion de l'entreprise adhérente. Il a ainsi pour mission de lui fournir tous services en matière de gestion notamment dans les domaines de l'assistance technique et de la formation. Il doit également fournir une analyse des informations économiques, comptables et financières en matière de prévention des difficultés économiques et financières de l'adhérent. La nature des prestations offertes aux adhérents varie en fonction de leur régime d'imposition.

Créés par la loi d'orientation du commerce et de l' artisanat du 27 décembre 1973, dite « Loi Royer », et par la loi de finances du 24 décembre 1974, leur objectif initial était de permettre une meilleure connaissance des revenus des entrepreneurs individuels et de pacifier les relations entre l'administration fiscale et les chefs d'entreprise tout en limitant fortement la fraude fiscale avec des procédures simplifiées, pour un coût raisonnable pour l'entrepreneur.

La majoration de 25 % du résultat imposable à l'impôt sur le revenu des exploitants relevant d'un régime réel d'imposition qui n'ont pas adhéré à un organisme de gestion agréé et, a contrario , l'absence de dispositif similaire pour les sociétés à l'IS conduit à s'interroger sur le champ des entreprises concernées par cette majoration.

L'efficience globale du dispositif a été évaluée par la Cour des comptes dans un rapport de juillet 2014 62 ( * ) . Il était considéré peu efficient, trop fortement dépendant des experts-comptables (malgré une obligation légale de séparation en 2004), et d'un coût élevé : 243 millions d'euros au total, soit près de 564 000 euros par organisme agréé. Cinq recommandations ont été formulées :

1. rendre facultatives les missions annexes des organismes agréés et des professionnels de l'expertise comptable délivrant le visa fiscal 63 ( * ) (dossier d'analyse économique et financière, formation) ;

2. rendre obligatoire, pour les professionnels de l'expertise comptable pouvant accorder le visa fiscal, la transmission d'un compte rendu de mission ainsi qu'un contrôle direct par la direction générale des Finances publiques (DGFiP), dans les mêmes conditions que pour les organismes agréés ;

3. introduire dans les statuts des organismes agréés une durée minimale d'adhésion de trois ans et une proportion maximum de clients d'un même professionnel de l'expertise comptable ou d'un même organisme parmi les adhérents d'un organisme agréé ;

4. publier et rendre aisément accessible sur impots.gouv.fr la liste nationale des organismes agréés et le montant de leur cotisation et veiller, à l'occasion des audits, à éviter l'accumulation de réserves de trésorerie injustifiées ;

5. instaurer un suivi systématique des recommandations formulées dans les audits de qualité, à la fois au niveau local et au niveau central.

Les centres de gestion agréés concourent à la lutte contre la fraude fiscale , suivant ce raisonnement simple de la Cour des comptes : « on ne peut exclure que la part des entreprises qui, sur une durée de cinq ans, n'adhèrent toujours pas à un organisme agréé alors même qu'elles pourraient bénéficier de la non majoration de leurs revenus de 25 % corresponde à des contribuables considérant que le gain obtenu de la sous-estimation de leurs revenus déclarés est supérieur à celui lié à la non majoration de 25 % de leurs revenus dont ils bénéficieraient en adhérant à un organisme agréé ».

Ils exercent un pré-contrôle fiscal utile dans un contexte de complexité croissante pour un coût modique par entreprise : le coût moyen annuel est de 200 euros HT, qui peut s'accompagner pour les plus petits contribuables 64 ( * ) d'une réduction d'impôt pouvant aller jusqu'à 915 euros par an, pour financer une partie des frais de tenue de comptabilité, soit un coût net annuel moyen de 65 euros , qui sécurise les adhérents comme l'administration fiscale.

Au total, seuls 9 % des contribuables (environ 155 000 en 2016) acquittent la majoration de 25 %. L'analyse laisse apparaître une forte disparité professionnelle (3,4 % chez les agriculteurs, 6,1 % chez les professions libérales et 18 % chez les commerçants et artisans). Ils ne représentent cependant que 3,8 % des revenus déclarés.

Les centres de gestion apportent enfin aux entreprises des informations fiscales et des analyses sectorielles, avec 17 ratios, qui permettent d'adresser des signaux d'alerte contribuant à prévenir les difficultés de l'entreprise.

Ce rôle utile des centres de gestion agréé devrait donc être maintenu.

(c) L'entreprise, collectrice de TVA

Aux échéances calendaires de TVA s'ajoute l'existence de 4 régimes, dont l'assujettissement est soit de plein droit, soit optionnel :

- la franchise en base,

- le régime réel simplifié,

- le régime réel normal,

- le régime du mini réel.

Si les entreprises sont soumises de plein droit à l'un ou l'autre de ces régimes, selon leur régime d'imposition des bénéfices et le chiffre d'affaires qu'elles réalisent, elles peuvent, dans certains cas, opter pour un régime différent et même dissocier leur régime de TVA de leur régime d'imposition (le régime du mini-réel de TVA). Les modalités de déclaration et de paiement de la TVA diffèrent selon le régime. De plus, dans la limite de certains plafonds de chiffre d'affaires, le passage d'un régime de TVA à l'autre n'intervient pas au même moment.

Par ailleurs, et dans certains cas, il est possible de changer le régime de TVA auquel l'entreprise est soumise de plein droit, en formulant une option auprès du Service des Impôts des Entreprises (SIE) :

- les entreprises qui évoluent en franchise en base de TVA peuvent opter pour le régime réel simplifié ou réel normal de TVA quel que soit le montant de leur chiffre d'affaires ;

- les entreprises qui évoluent au régime réel simplifié de TVA peuvent opter pour le régime du réel normal de TVA.

Le choix des options, la bonne ou la mauvaise appréhension des seuils d'exonération de TVA, la date d'exigibilité fiscale -qui ne correspond pas nécessairement à la date de la transaction ou de réalisation du service-, constituent des obstacles particulièrement difficiles à franchir pour les entreprises, en particulier les PME, qui peuvent être désarçonnées par tant de complexité. D'autant que le choix d'un régime en apparence plus contraignant est paradoxalement susceptible de procurer aux entreprises plusieurs avantages importants 65 ( * ) .

Pour les PME ou les TPE, il serait nécessaire de basculer vers un régime de déclaration trimestrielle simplifiée.

Il existe de surcroît des « taxes spéciales sur le chiffre d'affaires », dites aussi « taxes assimilées à la TVA », versées concomitamment à cette dernière.

La Cour des comptes a dénombré 40 taxes distinctes au total en 2015. En 2014, 2,6 milliards d'euros y ont été déclarés (dont un milliard au titre de la seule taxe sur les risques financiers systémiques à la charge des établissements financiers).

Comme l'a constaté la juridiction financière, leur collecte est une source de complexité particulière pour l'entreprise : « L'annexe à la déclaration de la TVA juxtapose plus qu'elle ne mutualise ces taxes entre elles et avec la TVA : les entreprises doivent calculer les taxes dont elles sont redevables en fonction d'assiettes généralement sans rapport avec celle de la TVA ; seuls sont communs l'identification du redevable, l'échéance et le règlement. En outre, elle apparaît davantage comme un simple support au versement de taxes qui s'ajoutent à la TVA que comme une déclaration. En effet, leurs redevables doivent déclarer uniquement un montant net à payer, sans avoir à faire état des bases de calcul détaillées, contrairement à la TVA. Ils sont par ailleurs peu aidés à se conformer à leurs obligations : rares sont les taxes pour lesquelles ils disposent d'une notice permettant le calcul, au-delà des indications de la doctrine fiscale formalisée dans le cadre du Bofip, qui n'ont d'ailleurs pas un caractère systématique. C'est d'ailleurs souvent l'intégration de la taxe à l'annexe de la déclaration de la TVA qui a conduit à mettre fin au formulaire ad hoc qui guidait le redevable dans le calcul de la taxe ». Au total, le regroupement de taxes diverses à l'annexe à la déclaration de la TVA n'a pas d'effet simplificateur pour les entreprises qui en sont redevables.

Attribuer cette fonction de collecte aux entreprises a « pour finalité principale d'alléger les tâches et les coûts de gestion de l'administration fiscale au titre de prélèvements comportant généralement un enjeu limité en termes de recettes, en permettant de dématérialiser leur déclaration et leur paiement sans devoir mettre en place des téléprocédures spécifiques. Il n'y parvient que très partiellement : la plupart des impôts professionnels collectés par la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et par la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) donnent lieu à des déclarations spécifiques ».

L'administration externalise donc la collecte de ces taxes et sanctionnera même une défaillance potentielle de l'entreprise-collectrice de taxes lors d'une éventuelle action de contrôle.

L'administration fait même peser sur l'entreprise les conséquences de ses choix internes.

« La collecte de la TVA a fait l'objet d'un partage d'attributions entre les administrations fiscale et douanière à la création du marché unique européen : la DGFiP collecte la TVA pour les transactions opérées sur le territoire national, pour les acquisitions intra-communautaires de biens et de services et pour les importations de marchandises en provenance de pays tiers dédouanées dans un autre pays de l'Union européenne ; la TVA sur les marchandises en provenance de pays tiers importées dans un port ou un aéroport français est collectée par la DGDDI 66 ( * ) lors de l'admission de la marchandise sur le territoire » a rappelé la Cour des comptes dans son rapport précité de 2016.

Les entreprises supportent aujourd'hui les conséquences de ce « yalta » entre administrations fiscales pour la collecte de la TVA intracommunautaire.

En effet, outre les déclarations de TVA, les entreprises françaises fournissant des services à des sociétés établies dans d'autre États membres de la Communauté européenne, doivent établir, depuis le 1 er janvier 2010, une « déclaration européenne de services » (DES) qui récapitule les opérations réalisées. Cette déclaration doit être transmise à l'administration des douanes afin de permettre le contrôle de la taxation à la TVA des prestations de services intracommunautaires. Les prestations à déclarer sont celles qui donnent lieu à autoliquidation 67 ( * ) de la TVA par le preneur identifié dans l'autre État membre, en application de l'article 196 de la directive 2006/112/CE. Cette déclaration est en principe dématérialisée 68 ( * ) . Les assujettis doivent obligatoirement établir et transmettre leur déclaration en utilisant la téléprocédure DES du portail Pro.douane .

Les entreprises doivent également transmettre mensuellement à la douane une déclaration d'échanges de biens (DEB) reprenant l'ensemble de leurs échanges intracommunautaires de marchandises. Les informations à renseigner sont en nombre limité et la charge déclarative modulée en fonction du niveau de l'activité de la société.

Les formalités liées à la DEB et destinées à la DGDDI s'ajoutent aux obligations en matière de TVA à l'égard de la DGFiP (déclaration sur le chiffre d'affaires, paiement de la taxe, notamment).

La DEB est obligatoire si l'entreprise a réalisé au cours de l'année civile précédente des introductions 69 ( * ) d'un montant supérieur ou égal à 460 000 euros, une DEB étant exigible dès le premier mois de l'année civile en cours. Elle est exigible si ce seuil est franchi en cours d'année, et dès le mois de franchissement.

À l'expédition 70 ( * ) , la déclaration au titre de la première livraison intracommunautaire réalisée est obligatoire quel que soit son montant, dès le premier euro.

L'entreprise qui a une activité économique au sein de l'Union européenne doit donc effectuer trois déclarations (TVA, DEB et DES) sur deux sites internet, l'un relevant des impôts, l'autre de la douane. Leur regroupement au sein d'une même déclaration et d'un même site simplifierait la vie des entreprises (proposition n° 15). L'administration fiscale est en capacité de le faire puisqu'elle regroupe dans l'annexe à la déclaration de la TVA un nombre croissant d'impôts auto-liquidés par les entreprises.

(d) L'entreprise, collectrice de l'impôt sur le revenu avec le prélèvement à la source

À compter du 1 er janvier 2019, les entreprises seront désormais des tiers collecteurs de l'impôt à la source.

Comme l'attestait déjà le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires en 2012, le prélèvement à la source (PAS) « génère une charge de gestion nouvelle pour les tiers payeurs à qui est confié le précompte de l'impôt ». Ce coût élevé de gestion pour les entreprises a été souligné par votre commission des finances 71 ( * ) et votre Délégation aux entreprises avait demandé au cabinet Taj d'estimer l'impact, pour les entreprises, de ce changement profond de système fiscal 72 ( * ) .

L'étude évalue 73 ( * ) la charge administrative supplémentaire à environ 1,2 milliard d'euros la première année, et un coût récurrent de l'ordre de 100 millions d'euros : « en amortissant l'investissement initial sur 10 ans, on aboutit donc à un coût annuel de l'ordre de 220 millions d'euros soit environ 0,3 % de l'impôt sur le revenu collecté ».

Environ 75 % du coût total de la mesure sera porté par les TPE (moins de 10 employés), par l'effet de multiplication d'un coût fixe faible par un très grand nombre d'entreprises.

Environ 50 % du coût de la mesure correspond à des revenus supplémentaires pour des prestataires de services spécialisés (experts comptables, éditeurs de logiciel) et 50 % à un accroissement des coûts salariaux des entreprises.

Au vu de l'expérience menée aux États-Unis en 1992, l'étude pointe un risque d'impact négatif de la mesure sur la consommation des ménages et d'un accroissement de la tension sur les salaires dans les secteurs où l'offre de travail est la plus réduite par rapport à la demande.

La mesure prévoyant la possibilité pour les TPE de ne reverser au Trésor l'impôt collecté que tous les trois mois ne procure qu'un gain financier de cette mesure évalué à environ 12 euros en moyenne par entreprise, soit 20 millions d'euros au total et l'étude conclut que « le prélèvement à la source de l'impôt n'est donc pas de nature à apporter une solution au problème récurrent de financement de l'exploitation des petites entreprises en France ».

Enfin, l'étude relève un risque de détérioration des relations sociales en raison de l'immixtion des entreprises dans la vie privée des salariés, via la détention d'éléments relatifs à leur situation patrimoniale et personnelle.

Le Gouvernement a présenté son propre chiffrage 74 ( * ) , « compris entre 310 et 420 millions d'euros (plus de 70 % de cette charge étant liée à la valorisation monétaire du temps de travail interne aux entreprises) » et considère que « cette charge devrait être réduite par la mobilisation forte des pouvoirs publics (dispositif d'assistance aux collecteurs dans le déploiement, plan de communication auprès des contribuables...) », étant précisé que le coût de la réforme pour l'État est évalué à 140 millions d'euros.

Ce chiffrage manifestement optimiste notamment pour les TPE, sous-évaluant le coût facturé par les prestataires extérieurs pour calculer le salaire net des salariés ou minorant la quantité de rescrits qui seront déposés par les TPE.

Ce sujet a été abordé par votre Délégation lors de sa réunion du 14 décembre 2017 75 ( * ) et sa présidente, Mme Élisabeth Lamure, a résumé ainsi cette divergence d'appréciation : « le Gouvernement est résolument optimiste et prévoit une mise en oeuvre sans heurts », estimant même que, pour les 87 % des PME externalisant leur paie, les experts-comptables absorberaient le coût du PAS sans le refacturer à leurs clients, « quand la Délégation anticipe un scénario où le PAS va susciter des questions, à la fois chez les salariés et chez les entreprises collectrices ».

Compte-tenu l'émotion suscitée, principalement parmi les PME, par le dispositif de sanctions pénales, qui pouvaient s'élever jusqu'à un an de prison et 15 000 euros d'amende, le ministre de l'Action et des Comptes publics, M. Gérald Darmanin, a annoncé, le 27 avril, sa décision de supprimer les sanctions qui étaient prévues contre les employeurs qui commettraient des erreurs dans la collecte de l'impôt de leurs salariés.

La complexité de ce dispositif et son coût de gestion pour les employeurs demeurent cependant des sujets de préoccupation pour les entreprises.

(7) L'entrepreneur et l'administration sociale
(a) Le bulletin de salaire clarifié pour les salariés mais pas simplifié pour les entreprises

Depuis le 1 er janvier 2017 pour les entreprises de plus de 300 salariés et le 1 er janvier 2018 pour toutes les entreprises, tous les employeurs doivent mettre en place un nouveau modèle de bulletin de paie.

Cette « simplification » résulte d'une initiative du précédent Président de la République, pour : « le rendre compréhensible à chaque salarié et faciliter la vie de l'entreprise, notamment en matière de gestion de la paie », la version actuelle du bulletin de paie présentant « trop de lacunes : accumulation de mentions et d'intitulés ni clairs, ni harmonisés, informations trop nombreuses, incompréhension du calcul du montant dû au salarié et payé par l'employeur... ».

Dans cet objectif, M. Jean-Christophe Scriberras 76 ( * ) était missionné pour remettre un rapport, ce qu'il fit le 27 juillet 2015 77 ( * ) , lequel confirmait ce que votre Délégation aux entreprises relevait à l'issue de sa mission en Grande-Bretagne afin de comparer les environnements britannique et français du point de vue des entreprises 78 ( * ) .

Dans ce rapport, il était enfin admis que « le bulletin de paie français bat des records de complexité », rendant les entreprises trop dépendantes des éditeurs de logiciels (environ 80 éditeurs en France) et des experts-comptables.

Les entreprises se sont ainsi attachées à ce que « tous les éléments de paie figurent sur le bulletin, afin que chaque destinataire puisse y retrouver les données qui l'intéresse, l'agrégation des informations au fil du temps se faisant sans ordonnancement. Le bulletin de paie est exhaustif ce qui permet de garantir la sécurité des données et leur complétude. Les entreprises ont ainsi privilégié l'exactitude de la somme à verser au salarié et la régularité de la date de versement, en abandonnant complètement l'enjeu de la lisibilité du document pour le salarié ».

Nombre de lignes du bulletin de paie par pays

Pays

Nombre de lignes

France

40

Belgique

16

Allemagne

15

Espagne

15

Grande-Bretagne

16

États-Unis

14

Japon

12

Chine

11

Source : Solvay

L'objectif de simplification du bulletin s'est en définitive traduit par une obligation pour les entreprises d'adopter une présentation particulière du bulletin de paie dont le modèle a été défini par le décret n° 2016-190 du 25 février 2016 et l'arrêté du 25 février 2016.

Cette clarification a elle-même engendré des coûts, comme l'avertissait dès octobre 2015 79 ( * ) l'ordre des experts comptables : « la mise en oeuvre des nouvelles maquettes va générer des coûts liés : à la mise à jour du logiciel par les SSII ; à l'accompagnement des chefs d'entreprise et des salariés, pour leur expliquer les nouvelles maquettes ; aux explications qu'il faudra donner dès qu'il y aura une modification sur le bulletin de paie... Et la dématérialisation du bulletin de paie ne compensera pas ces coûts, car, dans les TPE et PME, le bulletin de paie est remis en mains propres ».

Pour l'ordre des experts-comptables 80 ( * ) , « les nouveaux modèles de bulletin de paie constituent une clarification , car ils simplifient la lecture du bulletin de paie par le salarié, mais il ne s'agit pas de simplification . En effet, la réforme a été faite à droit constant, sans unifier les assiettes de cotisations, et sans suppression de cotisations. Et, en cas de contrôle, compte tenu du fait que certaines cotisations ne sont pas détaillées, l'employeur devra produire un état détaillé des rubriques ».

Ainsi, les entreprises doivent-elles en définitive établir deux bulletins de paie : l'un adressé au salarié, l'autre disponible si ce dernier demande des précisions ou des réclamations ou si l'administration procède à des contrôles .

Des interrogations demeurent comme l'illustrent ces questions d'un éditeur :

Les incertitudes de la construction du nouveau bulletin de paie

Depuis la publication du décret et de l'arrêté en 2016, nous sommes en attente de précisions de l'administration ou du législateur sur de nombreux points restant flous sur la présentation simplifiée du bulletin. Certaines informations ont été communiquées par la direction de la Sécurité sociale (...)

L'autre nouveauté majeure correspond à la suppression possible de la mention des taux patronaux des cotisations. Il appartient aux entreprises de choisir entre conserver la mention de ces taux ou de ne plus les faire apparaître. Les taux salariaux doivent eux toujours être visibles dans le bulletin.

La cotisation due au titre du financement du régime d'allocations familiales doit apparaître dans la rubrique « Famille-Sécurité sociale ». Lorsqu'un salarié doit se voir appliquer le taux réduit pour cette cotisation, c'est bien le montant dû au titre du taux réduit qui doit figurer dans cette rubrique « Famille-Sécurité sociale ». La rubrique « Allègement de cotisation » n'est pas impactée par l'application du taux réduit. Il convient toutefois pour l'employeur de ne pas oublier d'intégrer la différence entre la cotisation qui aurait dû être acquittée en cas de taux plein et la cotisation réellement versée dans la case obligatoire devant apparaître dans le bas du bulletin appelée aussi « Allègement de cotisations ».

Si regrouper certaines cotisations relevant du même bloc possédant une assiette identique sur une même ligne en additionnant les différents taux semble possible et même impose dans certains cas, la question demeure de la possibilité de regrouper sur une même ligne du bulletin des cotisations relevant du même bloc mais possédant des assiettes différentes. Ce regroupement est impossible si ces cotisations comprennent des parts salariales. Mais quid en cas de cotisations uniquement patronales ?

La question se pose en particulier dans le bloc « Autres contributions » dues par l'employeur pour le forfait social. Compte tenu des assiettes particulières propres au forfait social, peut-on faire apparaître une seule ligne mentionnant uniquement le montant dû au titre des différents forfaits sociaux ? Peut-on venir additionner ce montant avec les autres cotisations du bloc « Autres contributions » dues par l'employeur pour ne présenter ce bloc que sur une seule ligne avec un montant unique, sans distinguer ni préciser les différentes cotisations intégrées ?

À la lecture des textes et des positions communiquées par l'Administration, il semble nécessaire de ne pas regrouper les cotisations hors cas où cela est expressément demandé. (...) Cette interprétation repose en particulier sur les éléments donnés au titre de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA) pour laquelle on exige une présentation sur une ligne dédiée au sein du bloc « Autres contributions » dues par l'employeur. Mais elle reste à confirmer par une prochaine intervention du législateur ou de l'Administration.

À côté du bloc « Autres contributions » dues par l'employeur qui pose problème, le bloc « Cotisations statutaires ou prévues par la convention collective » fait aussi l'objet de nombreuses interrogations. Doit-on agréger sur une seule ligne toutes les cotisations prévues par la branche ou, au contraire, venir les faire apparaître chacune dans une ligne propre dans ce bloc ? Pas de réponse claire à ce jour. La seule précision donnée sur ce bloc est la possibilité donnée aux entreprises de venir en modifier le titre. Par exemple, si une seule cotisation est concernée, il est possible de mentionner directement le nom de cette cotisation en remplacement du titre officiel du bloc.

Source : Éditions Tissot, 19 décembre 2017

Par ailleurs, le rapport Scriberras préconisait de faire du bulletin de paie électronique (dématérialisé) le droit commun, le bulletin papier devenant optionnel, seulement 15 % des entreprises françaises étant engagées, en 2015, dans une démarche de dématérialisation des bulletins de paie contre 95 % en Allemagne. Cette diffusion représenterait un coût moyen de 50 centimes par fiche de salaire dématérialisée, soit 30 % en moyenne de moins qu'un bulletin de paie papier.

L'employeur doit assurer une accessibilité du bulletin de paie dématérialisé à ses salariés, via un coffre-fort numérique, pour une durée minimale de 50 ans ou jusqu'à ce que ces derniers aient atteint l'âge de 75 ans , qu'ils aient quitté l'entreprise avec deux jours ou 20 ans d'ancienneté 81 ( * ) . Évidemment incapables d'assumer seules ces contraintes, les entreprises se tournent vers des prestataires privés. D'autres start-up se présentent sur le marché. Toutefois, nul ne peut garantir la pérennité du prestataire de stockage à une telle échéance.

Cette évolution, sans doute plus importante que la clarification du bulletin de paie, suppose en effet que les 17 millions de salariés qui le reçoivent chaque mois adoptent à terme un disque dur ou un coffre-fort virtuel , et sachent intégrer les anciens bulletins de paie dans un outil numérique ou gérer une solution mixte, en abandonnant le classique archivage non-numérique.

(b) Un effort de simplification : la déclaration sociale unique

Les obligations déclaratives sociales sont particulièrement complexes pour l'entreprise.

L'employeur est tenu d'établir au plus tard le 31 janvier de chaque année une déclaration annuelle de données sociales (DADS), qui récapitule les effectifs employés et les rémunérations brutes versées aux salariés, sur lesquelles sont calculées les cotisations sociales, ainsi que les droits des salariés (retraite, assurance maladie, etc.).

La DADS est progressivement remplacée par la DSN (Déclaration Sociale Nominative) qui a simplifié les obligations sociales des employeurs .

Ce fichier mensuel, produit à partir de la paie, communique à l'ACOSS (la caisse nationale du réseau des URSSAF) les informations nécessaires à la gestion de la protection sociale des salariés aux organismes et administrations concernées permettant de remplacer l'ensemble des déclarations périodiques ou événementielles et diverses formalités administratives adressées jusqu'à aujourd'hui par les employeurs à une diversité d'acteurs (CPAM, URSSAF, AGIRC ARRCO, Organismes complémentaires, Pôle emploi, Centre des impôts, Caisses régimes spéciaux, etc.). La DSN repose sur la transmission unique, mensuelle et dématérialisée des données issues de la paie et sur des signalements d'événements.

Disponible sur net-entreprises.fr , la DSN est obligatoire depuis juillet 2017 pour tous les employeurs du régime général.

Elle remplace progressivement de nombreuses procédures :

• L'attestation employeur destinée à Pôle emploi ;

• La DMMO 82 ( * ) /l'EMMO 83 ( * ) ;

• La radiation des contrats complémentaires ;

• La DUCS 84 ( * ) de l'URSSAF ;

• Le relevé mensuel de mission (Intérim) ;

• Les autres DUCS (retraite complémentaire, prévoyance...) et les bordereaux de cotisation des mutuelles et sociétés d'assurance ;

• Les déclarations de cotisations MSA (BVM, DTS) ;

• La DADSU 85 ( * ) ;

• En cours (2017-2018) : le recouvrement des régimes spéciaux ou particuliers 86 ( * ) ;

• À compter de janvier 2019, le prélèvement à la source.

La DADS comportait environ 800 rubriques déclaratives distinctes, la DSN en comprend toujours 400, pour un objectif plus ambitieux de 200, qui n'a pas été atteint.

Ainsi, la DSN reste complexe, sans même évoquer les phases transitoires. Dans un rapport de juillet 2016 87 ( * ) , la Cour des comptes propose donc de poursuivre les efforts de simplification pointant par exemple « sept notions différentes de dates au titre du chômage ».

Ainsi, en raison notamment « de l'incidence du retard pris par la définition complète des spécifications informatiques de la phase 2 (déclarations URSSAF) sur les délais de réalisation des éditeurs de logiciels, mais aussi de l'impréparation de la plupart des entreprises et des tiers déclarants (experts-comptables) à l'échéance du 1 er janvier 2016, la généralisation de la DSN a été repoussée au 1 er juillet 2017 ».

Indice de cette complexité, le seul « Guide ACOSS comment déclarer et régulariser les cotisations URSSAF en DSN » comporte 77 pages d'explications.

Ce processus de « simplification » est d'une telle ampleur que le Gouvernement a demandé 88 ( * ) un délai de grâce pour l'entrée en vigueur de la DSN applicable aux employeurs publics . Alors que pour les entreprises privées, la DSN est désormais obligatoire pour tous les employeurs du régime général, elle sera applicable au 1 er janvier 2022 aux personnes publiques (administrations, collectivités publiques, entreprises publiques).

Il s'agit d'un exemple caractéristique où « l'État s'exonère des exigences qu'il impose aux entreprises privées », comme l'ont fait remarquer nos collègues rapporteurs de la commission spéciale du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance 89 ( * ) .

(c) Des exemples de complexité

Comme le constatait un rapport de deux députés en avril 2015 90 ( * ) , « la complexité et l'instabilité de la norme [sociale], quand elle n'est pas rétroactive, peuvent conduire les cotisants, notamment les plus petites entreprises, à commettre des erreurs d'appréciation et d'interprétation pouvant leur être hautement préjudiciables ».

Le rapport soulignait que ce sont les PME-TPE qui supportent 34 % des restitutions par les URSSAF contre 5 % de restitution pour les grandes entreprises.

Il plaidait pour assouplir le formalisme en cas de contrôle de l'URSSAF et pour un « droit à l'erreur » commise de bonne foi par le cotisant sur des dispositifs et des montants précis, au seul cas où la faute ne s'apparenterait pas à une prise de risque assumée.

Malgré ces préconisations, des difficultés demeurent, comme en témoignent trois exemples portés à la connaissance de votre rapporteur au cours de ses auditions :

(i) La généralisation des complémentaires santé

Depuis le 1 er janvier 2016, toutes les entreprises du secteur privé doivent accorder à l'ensemble de leurs salariés une couverture complémentaire santé, collective et obligatoire.

Afin d'ouvrir droit aux exemptions d'assiette, ce régime impose le respect de strictes exigences. Le défaut d'information d'un seul salarié peut conduire au redressement de toutes les contributions patronales versées pour l'ensemble des salariés les trois dernières années, auxquelles est ajoutée l'année du contrôle.

Lorsque l'entreprise s'appuie sur un accord de branche, elle doit adresser à chaque salarié un contrat d'assurance et une notice d'utilisation.

Lorsque l'entreprise veut améliorer la couverture sociale de ses salariés, elle devra mettre en place, pour chaque garantie (risques lourds de prévoyance, frais de santé et retraite supplémentaire), les documents suivants :

- un contrat d'assurance,

- une décision unilatérale,

- une notice d'information,

- plusieurs accusés de réception,

- des bulletins d'adhésion et d'affiliation.

Au total plusieurs dizaines de pages doivent être adaptées pour chaque entreprise à chaque salarié selon les options de couverture sociale qu'il aura choisies.

Si un seul document manque lors d'un contrôle URSSAF, un redressement pourra être opéré .

Comme le constate avec regret l'Institut de la Protection sociale : « l'entreprise vertueuse sera la plus pénalisée car en cas de redressement, l'employeur qui décide de financer à 50 % la protection sociale de ses salariés paiera moins cher que celui qui décide de la financer à 100 %.... Tout simplement parce que la base du redressement est le financement patronal ! Finalement, la situation est absurde car les entreprises les plus sociales avec leurs salariés sont les plus pénalisées par le poids des procédures à respecter ».

Une bonne intention peut donc se traduire par une surcharge de complexité.

(ii) Les exonérations et allègements de cotisations sociales

La complexité du calcul des réductions de cotisations sociales relative aux allègements dits « Fillon » fait peser de lourdes incertitudes juridiques sur les entreprises, notamment pour les plus petites. Le calcul est d'autant plus difficile que ses modalités évoluent pour ainsi dire chaque année depuis leur mise en place en 2003.

Les réductions Fillon représentent la première source de redressement parmi ces dispositifs.

(iii) L'assujettissement des dividendes et stock-options à cotisations sociales

S'agissant des dividendes , la fraction des revenus distribués qui excède 10 % du capital social d'une société d'exercice libérale (SEL) doit être réintégrée dans l'assiette des cotisations sociales sur les revenus d'activité depuis le 1 er janvier 2009.

Il s'agissait alors de mettre fin à une forme d'optimisation consistant, pour le travailleur indépendant, à se verser une faible rémunération d'activité soumise à cotisations sociales et à se rémunérer sous forme de dividendes soumis au seul prélèvement social sur les revenus du capital, en augmentant ainsi son revenu net disponible à court terme au détriment de ses droits sociaux futurs, en particulier de ses droits à retraite.

Ce dispositif a été ensuite étendu aux EIRL en 2011, puis à tous les dirigeants de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés et relevant du statut social des non-salariés en 2013.

Il a failli l'être aux dirigeants des autres sociétés (SAS, SA) dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 91 ( * ) mais face à l'opposition conjuguée du Sénat - notamment à l'initiative de votre rapporteur- et de la CPME, le Gouvernement de l'époque y a renoncé. Il aurait commis un lourd contresens . Comme l'avait souligné votre commission des Affaires sociales, « l'incertitude sur les résultats de leur entreprise conduit les entrepreneurs à privilégier le versement de dividendes à une rémunération, sans qu'il s'agisse de pratiques d'évitement des cotisations sociales » .

Là où l'administration sociale voit un mécanisme de quasi-fraude, révélant ainsi une méconnaissance des conditions de rémunération des entrepreneurs, une distorsion entre le régime fiscal et le régime social est apparue, doublée d'une iniquité.

En effet, le dividende :

- demeure un revenu du capital tant du point de vue social (étant de ce fait exonéré de cotisations sociales) que fiscal s'il est inférieur à 10 % du capital social majoré des primes d'émission et du montant moyen des sommes laissées en compte courant ;

- devient en revanche au plan social un revenu d'activité professionnelle tout en restant au plan fiscal un revenu du capital s'il est supérieur à 10 % du capital social majoré des primes d'émission et du montant moyen des sommes laissées en compte courant.

Cette législation a sans doute contribué au mouvement de transformation de SARL en SAS , les dirigeants contrôlant majoritairement une SA ou une SAS relevant du régime général de la Sécurité Sociale (assimilé salarié) et échappant ainsi au dispositif de taxation des dividendes.

La part des SAS est désormais majoritaire (60 %, après 56 % en 2016, 48 % en 2015 et 39 % en 2014) par rapport aux SARL dans les créations d'entreprise en 2017. Encore majoritaires en 2014 (57 %), ces dernières ne représentent plus que 36 % des sociétés créées en 2017, après 40 % en 2016 et 48 % en 2015.

Au sein de cette catégorie juridique, la hausse concerne surtout les SAS à associé unique ou unipersonnelles (37% des sociétés créées en 2017, et seulement 15 % en 2013). Elles atteignent ainsi leur plus haut niveau depuis dix ans (72 500 créations en 2017).

Outre cette inégalité de traitement, la distinction entre les deux types de dividendes atteint un degré de complexité particulièrement raffiné dans les modalités de leur déclaration.

Le dividende inférieur à 10 % du capital social et primes d'émission et montant moyen des sommes laissées en compte courant est renseigné sur la déclaration 2777 D, afin de payer les prélèvements sociaux au taux de 15,5 % (s'agissant de revenus du capital). Doit également être acquitté l'acompte de 21 % au titre de l'impôt sur le revenu (montant imputable sur l'impôt in fine dû, à moins de préférer s'acquitter du prélèvement forfaitaire unique entré en vigueur le 1 er janvier 2018). Il faut ensuite remplir l'IFU (déclaration  2561) afin que les bénéficiaires puissent reporter dans leurs déclarations de revenus les sommes perçues. Au plan social aucune déclaration n'est nécessaire.

Car, si le même dividende dépasse 10 % du capital social et primes d'émission et montant moyen des sommes laissées en compte courant, il faut dissocier le régime déclaratif fiscal et le déclaratif social.

Au plan fiscal, la totalité du dividende est soumis au même régime fiscal au niveau de l'impôt sur le revenu (revenus de capitaux mobiliers) mais les prélèvements sociaux sont différenciés : le dividende supérieur à 10 % du capital social est considéré au plan social comme un revenu d'activité et soumis aux charges sociales et aux prélèvements sociaux au taux de 8 %, montant qui devrait être déclaré non sur le formulaire 2777 D mais sur la déclaration sociale des indépendants DSI souscrite auprès du RSI.

Comme le reconnaît avec euphémisme l'Institut de la protection sociale : « le mécanisme n'est pas simple ».

Il génère « des risques potentiels d'erreurs et surtout des temps administratifs liés au calcul des assiettes et au remplissage des formulaires concernés (2777 D, IFU avec de nouvelles zones à renseigner, DSI) ».

La rupture d'égalité est double :

- d'une part, un revenu du capital (dividende) peut être qualifié de revenu d'activité au plan social et assujetti de ce fait aux cotisations sociales tout en restant un revenu du capital au plan fiscal et taxé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

- d'autre part, si les dividendes perçus par les dirigeants de TPE-PME, contrepartie des risques qu'ils courent et de leur investissement, sont soumis à cotisations sociales, cela aboutit à un taux de prélèvement supérieur à celui appliqué aux épargnants ayant investi en actions cotées.

Ce dispositif quasi-kafkaïen « conduit à opérer des simulations perpétuelles d'optimisation de la répartition rémunération/dividendes, qui font certes le bonheur des conseils, mais qui sont d'une valeur ajoutée inexistante en termes de création de richesse » selon le think tank.

S'agissant des stock-options 92 ( * ) , elles subissent deux contributions spécifiques :

- une contribution patronale au moment de l'attribution de l'action, recouvrée par l`'' Urssaf , au taux de 30 % pour les options consenties depuis le 11 juillet 2012, dont la base est calculée au choix de l'employeur 93 ( * ) :

• soit sur la juste valeur des options telle qu'estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales,

• soit sur 25 % de la valeur des actions à la date de décision d'attribution.

- une contribution salariale , à la charge des bénéficiaires, au moment de la cession de l'action, perçue par les Impôts, assise sur la différence entre la valeur réelle des actions au jour de la levée des options et leur prix d'imposition ou de souscription. Le bénéficiaire est imposé au titre de l'année de cessions de ces actions.

• Si les actions ont été attribuées avant le 28 septembre 2012 et à la condition d'avoir respecté le délai d'indisponibilité de 4 ans depuis la date d'attribution de ces actions, ce gain sera imposé aux taux forfaitaires :

- de 30 % pour la fraction du gain inférieure à 152 500 euros ;

- et 41 % pour la fraction supérieure.

Si ce délai n'est pas respecté, la plus-value d'acquisition sera imposée comme un salaire (avec possibilité d'opter pour le quotient). Par ailleurs, si un délai de conservation supplémentaire de deux ans (appelé délai de portage soit un délai total de six ans à compter de la date d'attribution) a été respecté, les taux d'imposition forfaitaires seront portés respectivement à 18 % (fraction inférieure à 152 500 euros) et 30 % (fraction supérieure).

• Si les actions ont été attribuées depuis le 28 septembre 2012, le gain de levée d'option sera taxé au barème progressif de l'impôt sur le revenu dans la catégorie traitement et salaires. Ce régime n'est pas modifié par le Prélèvement forfaitaire unique (PFU) mis en place par l'article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

En plus, le gain de levée d'options sera soumis aux prélèvements sociaux aux taux de :

- 17,2 % pour les options attribuées avant le 28 septembre 2012 ;

- 9,7 % sur les revenus d'activité (9,2 % de CSG et 0,5 % de CRDS) pour les options attribuées depuis le 28 septembre 2012.

• Les gains de levée d'options attribuées depuis le 16 octobre 2007 sont également soumis à la contribution salariale de 10 %.

À l'origine, les stock-options étaient conçues comme un mécanisme destiné aux jeunes entreprises innovantes permettant d'attirer des jeunes talents lorsque l'entreprise ne s'est pas encore développée, en les intéressant aux résultats futurs de l'entreprise. Elles étaient conçues comme un instrument de motivation au motif que cette forme de rémunération, liée au cours de bourse, incite les entreprises à une gestion qui génère le maximum de création de valeur, à savoir de bons résultats.

En France, les stock-options suscitent régulièrement la polémique.

Ce mécanisme a notamment été critiqué car il inciterait à la présentation trompeuse des résultats (pour faire monter le cours du titre) ; il se focaliserait sur le court terme et n'inciterait pas particulièrement à la performance ; il serait source de profit facile, sans risque, et moralement condamnable au profit des seuls dirigeants...

Le renforcement des conditions d'exercice, l'influence de la loi Sarbanes-Oxley 94 ( * ) , dont l'application extraterritoriale a modifié sensiblement les plans de stock-options en Europe, et l'alourdissement de la fiscalité en France ont rendu moins attractif ce véhicule de rémunération.

Les attributions d'actions gratuites sont désormais privilégiées , bien qu'elles aient perdu l'avantage lié au niveau plus faible de la contribution patronale, depuis le quasi-alignement de leur fiscalité sur celle des stock-options (20 % depuis le 1 er janvier 2018, après plusieurs allers-retours caractérisant une forte instabilité fiscale 95 ( * ) ) : au moins, elles n'obligent pas le collaborateur à mobiliser de l'argent pour les acquérir.

Les PME sont exonérées de la contribution patronale à la condition qu'elles n'aient pas procédé à distribution de dividendes depuis leur création et dans la limite, pour chaque salarié, du montant annuel du plafond de la Sécurité sociale, soit 39 732 euros pour 2018.

Il n'en demeure pas moins que la fiscalité des stock-options pénalise fortement les entrepreneurs. Perdant leur caractère attractif, elles ne sont plus utilisées par les entreprises innovantes pour attirer des talents.

B. LEVER LES FREINS A LA CREATION D'ENTREPRISE

1. Simplifier les démarches administratives lors de la création de l'entreprise
a) Objectif n° 1 : simplifier le statut de l'entreprise

Il faut retrouver les principes de simplicité qui ont présidé à la création du statut « d'auto-entrepreneur » en 2008, tout en les adaptant aux attentes contemporaines.

Comme l'écrivait avec talent le rapport Bredin de février 1984 : « c'est le petit entrepreneur, celui qui ne veut ou ne peut avoir recours au mécanisme de la société, qui prend les plus grands risques dans l'entreprise. L'entrepreneur le plus vulnérable est celui qui est le plus maltraité par le droit , abandonné aux périls d'une responsabilité indéfinie » , la loi devant au contraire limiter le risque « non seulement pour réparer des injustices de statut économique et social mais aussi pour encourager l'esprit d'initiative, la création des entreprises, leur développement, leur transmission, aujourd'hui entravés par un système de droit qui sanctionne impitoyablement le risque pris ».

Le statut de micro-entrepreneur, qui a permis de doubler en dix ans le nombre d'entreprises créées en France (même si, comme on l'a vu, toutes ne sont pas économiquement actives) reposait sur trois principes :

1/ une facilité de création par la dématérialisation totale,

2/ l'auto-liquidation des charges fiscales et sociales, chaque trimestre,

3/ l'absence de paiement de ces charges si un chiffre d'affaires n'est pas réalisé. Auparavant, le paiement prévisionnel des charges sociales ou fiscales constituait un obstacle létal à la création d'entreprise.

Le succès de cette formule, fortement utilisée par les jeunes diplômés comme par les personnes non diplômées, repose sur le pari de la simplification du contenant pour privilégier le contenu. Les contenants se sont cependant multipliés alors que la simplicité de création est une forte demande des créateurs d'entreprise.

Par ailleurs, les attentes des Français ont changé. La nouvelle génération d'entrepreneurs attend des garanties. Réciproquement, la constitution de ces garanties peut faire émerger une nouvelle génération d'entrepreneurs.

Selon un sondage réalisé par l'Union des auto-entrepreneurs à l'occasion du 25 ème salon des entrepreneurs de février 2018 96 ( * ) , la quête d'autonomie arrive en tête des motivations de ceux qui veulent créer une entreprise (46 %) devant la quête de sens (38 %) ou l'intérêt financier (38 %), le goût du challenge n'étant cité que par 23 %. La population féminine désireuse de créer une entreprise fait désormais jeu égal avec la population masculine.

En 2018, 84 % des 13 millions de Français qui veulent créer une entreprise souhaitent accéder aux mêmes droits que les salariés (en matière d'assurance-maladie ou d'accidents du travail) ou à la mise en place d'une assurance-chômage en cas de perte d'activité. Cela explique la demande de portabilité des droits sociaux et donc d'accès au compte personnel d'activité. Ce régime de protection sociale de l'entrepreneur individuel rendrait superflue la requalification jurisprudentielle en CDI du micro-entrepreneur puisque les droits sociaux seraient assurés.

Autrement dit, pour faire émerger une seconde vague d'entrepreneurs, après celle de 2008, il conviendrait de structurer la création d'entreprise autour de seulement deux statuts :

- celui de l'entreprise individuelle dans laquelle le créateur conserverait les droits sociaux des salariés, une fiscalité personnelle et non sociétale, une responsabilité aménagée avec le patrimoine d'affectation, qui remplacerait l'EIRL et l'EURL,

- celui de la société anonyme, simplifiée , qui remplacerait la SASU et la SARL et permettrait par l'appel public à l'épargne, à l'entreprise de grandir.

Cette simplification ne concernerait naturellement pas les sociétés cotées.

Au demeurant, le passage de l'EIRL vers la société unipersonnelle a été simplifié par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 qui l'assouplit en :

- supprimant les mentions obligatoires à faire figurer sous peine de nullité dans l'acte d'apport lorsque le fonds de commerce est apporté à une EURL ou une SASU ;

- supprimant, dans la même hypothèse, la publication dans un journal d'annonces légales et le BODACC 97 ( * ) ;

- dispensant de l'évaluation des apports en nature spécifique aux sociétés unipersonnelles lorsque l'associé unique, personne physique, apporte un élément qui figurait au dernier exercice de l'activité professionnelle qu'il exerçait en nom propre (y compris sous forme d'EIRL) avant la constitution de la société.

La SASU pourrait être la forme juridique à privilégier dans cette recomposition d'ensemble, car elle constitue la forme juridique la plus adaptée aux filiales à 100 %. Elle est plus avantageuse que l'EURL en raison de la liberté statutaire qu'elle offre et parce qu'en qualité de société par capitaux, elle facilite l'évolution de la société et sa croissance. Elle est par ailleurs compatible avec la société européenne unipersonnelle de l'article L. 229-6 du Code de commerce. D'autres, comme M. Alain Griset, président de l'Union des entreprises de proximité, préconisent « une unification de ces statuts dans l'EIRL comme statut juridique de référence de toutes les entreprises individuelles, qui permet une séparation réelle entre les biens personnels et professionnels », comme il l'a indiqué lors de la troisième Journée des entreprises du Sénat, le 29 mars 2018.

Pour votre Délégation, l'essentiel est de parvenir à l'objectif de simplification des régimes juridiques de l'entreprise, qui doit conduire à promouvoir seulement deux statuts (proposition n° 1), à l'instar du système britannique, quitte à laisser, à l'intérieur des deux catégories d'entreprise, une grande souplesse d'organisation interne.

Les deux grandes catégories d'entreprises britanniques

La première est le Sole trader (Self-employed), qui est la forme d'entreprises la plus commune puisqu'elle représente 62 % des entreprises britanniques en 2016.

Elle implique peu de frais et la tenue des registres et des comptes est simple. Cependant, le gérant est personnellement responsable des dettes de l'entreprise, ce qui peut en faire une option à risque pour les entreprises qui ont besoin de beaucoup d'investissements.

Ses caractéristiques sont les suivantes :

Création : être enregistré en tant que Self-employment auprès de HM Revenue & Customs (HMRC, organisme collecteur de taxes) ;

Gestion et mobilisation des capitaux : toutes les décisions de gestion sont prises par la personne privée. Les fonds de l'entreprise proviennent de ses biens propres et/ou de prêts auprès des banques.

Documents et comptes : une déclaration annuelle à HMRC ; une comptabilité faisant apparaître les revenues d'entreprise et dépenses.

Impôts et assurance : en tant que travailleur indépendant le Sole trader voit ses profits imposés comme un revenu. Il doit payer à taux fixe la classe 2 des cotisations d'assurance nationale (NIC) et de la classe 4 sur les profits.

Responsabilité : le Sole trader est personnellement responsable de toutes les dettes de l'entreprise.

L'autre statut est la Limited company .

La private limited company ou société privée à responsabilité limitée est une forme sociale très populaire au Royaume-Uni qui en compte plus d'1,1 million. Elle prévoit une limitation de l'exposition aux dettes de l'entreprise. Cela signifie que le risque personnel des membres est limité à leurs investissements dans l'entreprise et aux garanties éventuellement données dans le but d'obtenir un financement. Ce type de société nécessite que soient tenus à jours certains documents, une comptabilité ainsi que le dépôt de comptes annuels.

Création : une Limited company doit être enregistrée au registre des sociétés ( Companies House ). Elle doit avoir au moins un administrateur.

Gestion et capitaux : un directeur ou un conseil d'administration prend les décisions. Le financement provient des actionnaires, des emprunts et de bénéfices non distribués.

Documents et comptes : les comptes sont déposés auprès du Registre des sociétés et une déclaration « navette » annuelle (formulaire 363s) est envoyée avant la date anniversaire de création de la société chaque année.

Les directeurs et le secrétaire ( Company secretary , s'il existe) sont responsables de la notification au registre des sociétés des changements dans la structure et la gestion de l'entreprise.

Bénéfices : les bénéfices sont souvent distribués aux actionnaires sous forme de dividendes.

Impôts et assurances : l'entreprise paie l'IS et doit faire une déclaration annuelle à HMRC. Les chefs d'entreprise sont des employés de l'entreprise et doivent payer la cotisation nationale d'assurance classe 1 ainsi que l'impôt sur le revenu sur leur salaire.

Responsabilité : les actionnaires ne sont pas personnellement responsables des dettes de la société, mais il peut être demandé aux directeurs de garantir les prêts de l'entreprise.

Quelles sont les différences entre les deux statuts ?

Les sociétés limitées payent moins d'impôts que les « self-employed ». L'IS s'élève à 19 % pour l'année 2018 (objectif de 17 % en 2020). Les directeurs et actionnaires de société limitées peuvent choisir de se payer un petit salaire avec un complément en dividendes, les dividendes n'étant pas soumis à la National Insurance Contribution (cotisation à la sécurité sociale) ;

La limited est une entité distincte de la personne physique et assure la séparation des biens (responsabilité limitée). Elle permet le dépôt du nom de la société qui s'en trouve protégée.

Les coûts liés à la société limitée sont supérieurs à ceux du « sole trader ». Cependant, il suffit de 15 livres pour créer sa société limitée . La majorité des coûts tient aux rapports annuels et formalités administratives souvent confiés à un expert-comptable. Ces formalités peuvent cependant être réalisées en ligne.

Source : https://www.gov.uk/set-up-sole-trader

b) Objectif n° 2 : un portail unique

Trop d'information peut tuer l'information.

Le dédale actuel des sites publics d'information sur la création d'entreprise peut dérouter . L'accès à l'information doit être simple car le créateur d'entreprise doit consacrer l'essentiel de son énergie de départ à d'autres objectifs que la recherche de l'information sur la création d'entreprise, notamment sa forme juridique.

S'agissant des sites internet publics, le Gouvernement a pris conscience de ce handicap puisque la consultation publique du PACTE ouverte le 15 janvier 2018 évoque « une continuité du parcours entre le site de l'Agence France Entrepreneur et le Guichet-entreprises » ainsi que « leur rationalisation ».

Auparavant, lors de la présentation de 22 nouvelles mesures de simplification pour les entreprises le 23 mars 2017, avait été annoncée une nouvelle charte graphique commune des différents sites publics 98 ( * ) afin de mieux identifier les sites officiels d'information sur le développement économique.

Il faut une ambition plus forte et la création d'un portail unique regroupant l'ensemble des sites publics fournissant de l'information sur la création d'entreprise (proposition n° 2).

c) Objectif n° 3 : un guichet unique
(1) Conforter l'efficacité d'Infogreffe

La 10 ème proposition du Conseil de simplification du 14 avril 2014 : « Créer son entreprise avec un seul document en un seul lieu », promettait à toutes les entreprises le dépôt dématérialisé d'un seul exemplaire des statuts auprès d'un seul organisme au moment de la création. Cela reste un objectif et la formule « avec un seul guichet, une seule démarche, créer son entreprise n'aura jamais été aussi simple » demeure un voeu pieu.

Ainsi, en janvier 2018, la consultation publique organisée dans le cadre de la préparation de la loi PACTE proposait « d'évaluer la possibilité d'une fusion des registres et répertoires d'entreprises existants (registre du commerce et des sociétés, répertoire des métiers, SIRENE, etc.) qui comprennent les informations relatives à la création, l'identification et la vie des entreprises. La fragmentation des acteurs existants pose un problème de lisibilité pour les entreprises et un risque de cumul d'inscription à des registres différents, avec des paiements multiples associés ».

Quatre ans plus tard, la situation n'a guère avancé.

Le Centre de formalités des entreprises ne doit plus être un guichet fantôme qui renvoie le créateur d'entreprises vers sept autres interlocuteurs (Chambres de commerce et d'industrie, Chambre des métiers et de l'artisanat, Chambre de la batellerie artisanale , Greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance statuant commercialement , Service des Impôts aux entreprises en métropole ou dans les DOM, Chambre d'agriculture , Urssaf ou caisse générale de Sécurité sociale ).

De surcroît, les délais annoncés de traitement de dossier par ces CFE « dans un délai général estimé à une dizaine de jours ouvrés » soit deux semaines, sont manifestement trop longs par rapport au temps de l'économie actuelle.

Un registre unique devrait accueillir tous les agents économiques.

Infogreffe devrait devenir le guichet unique des formalités de création des entreprises (proposition n° 3)

Une première étape consisterait à effectuer la fusion des registres existants, qu'ils soient tenus par les greffes des tribunaux de commerce (registre du commerce et des sociétés, registre des bénéficiaires effectifs, registre spécial des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée, registre spécial des agents commerciaux) ou par d'autres entités (répertoire des métiers, registre des actifs agricoles).

Une seconde étape, visant à couvrir l'intégralité de la sphère économique, résiderait dans l'adjonction d'autres agents économiques non assujettis à ce jour. Les professionnels libéraux et les associations qui exercent une activité économique comparable à celle des sociétés devraient à terme faire partie du registre unique.

Les associations peuvent être aussi des entreprises

Le secteur associatif représente un pan significatif de l'économie française. Les ressources courantes de ce secteur s'élevaient en 2016 à 109 milliards d'euros, soit 4 % environ du PIB . On estime par ailleurs à 1,3 million le nombre d'associations actives sur le territoire, animées par 13 millions de bénévoles.

Le monde associatif représente également près d'un salarié privé sur dix (soit plus que le secteur de la construction ou celui des transports), puisque l'on comptait, toujours en 2016, 170 000 associations employeuses pour 1,85 million de salariés et une masse salariale de 39 milliards d'euros 99 ( * ) . Des associations interviennent dans des secteurs d'activité concurrentiels et un grand nombre d'entre elles sont assujetties à l'impôt sur les sociétés.

Pourtant, le secteur associatif échappe largement aux mesures mises en oeuvre depuis plusieurs années visant à mieux connaître les flux financiers et à favoriser la transparence. Dans la plupart des États-membres de l'Union Européenne, il existe un registre des personnes morales qui regroupe non seulement les sociétés commerciales et les sociétés civiles mais également les associations.

En France, seules deux catégories d'associations sont aujourd'hui répertoriées dans le registre du commerce et des sociétés : les associations qui émettent des obligations (art. L. 231-10 du code monétaire et financier) et les associations qui procèdent à des opérations de change manuel (art. L. 524-3 du code monétaire et financier).

Bien qu'il soit admis que les associations assujetties à la TVA ou qui emploient plus de dix salariés ont un réel impact économique, elles ne sont inscrites dans aucun registre de publicité légale.

Cette situation est de nature à créer une iniquité de traitement, voire une concurrence déloyale entre les acteurs économiques, notamment entre les PME et les associations.

L'absence de cadre juridique est préjudiciable à l'ensemble des acteurs économiques, et en premier lieu à ces associations qui souffrent d'un déficit de confiance auprès de leurs partenaires potentiels (absence d'informations relatives à leur situation juridique, impossibilité de vérifier leur solidité financière, absence de contrôle quant à la capacité des dirigeants...).

Elle n'est pas non plus sans conséquence en termes de lutte contre la fraude, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (opacité quant à l'origine et à l'usage des fonds, aux activités de l'association...).

Source : Chambre nationale des greffes des tribunaux de commerce

Les interlocuteurs professionnels, tels les CCI, garderaient leur rôle de conseil pour la création d'entreprise .

Lors du débat, en 2015, sur le projet de loi sur la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, le Sénat avait adopté plusieurs amendements 100 ( * ) confortant le rôle d'Infogreffe et plus particulièrement :

- visant à confier au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce la mission de diffuser gratuitement les données du RCS en vue de leur réutilisation, cette mission étant distincte de celle de communication sur demande de l'information légale sur les entreprises, comme de celle d'archivage au titre du RNCS ;

- visant à retirer à l'INPI sa mission résiduelle de centralisation et de diffusion des données du RNCS, qui ne consiste en pratique qu'à archiver des documents, sous forme papier et numérique, et à en délivrer des copies, extraits et certificats sous forme papier, par courrier, cette mission étant « déjà exercée en pratique et de façon satisfaisante par le GIE Infogreffe sous une forme électronique ».

Ces amendements n'avaient pas été retenus. Pourtant, il est temps de mettre le droit en accord avec les faits et de confier au Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, à ses frais et sous sa responsabilité, dans un souci de rationalisation administrative et d'économie pour la sphère publique comme pour les entreprises, la mission de centraliser le registre du commerce et des sociétés et de diffuser gratuitement, en « open data », les données qui en sont issues en vue de leur réutilisation, tout en protégeant dans ce cadre les données personnelles relatives aux dirigeants d'entreprises.

À noter que l'article 60 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a confié à l'INPI la mission d'assurer la diffusion gratuite des données retraitées informatiquement contenues dans le RCS à des fins de réutilisation, notamment par les entreprises spécialisées dans la valorisation d'informations économiques.

Ceci permettrait de décharger l'INPI d'une mission accessoire qu'il n'exerce plus, en fait, depuis 2009, pour se centrer sur ses missions essentielles de protection des droits de propriété industrielle et de valorisation de l'innovation.

(2) Alléger en contrepartie la périodicité et les coûts pour les entreprises

En contrepartie, et pour alléger les obligations des entreprises, ainsi que les coûts, toutes les déclarations relatives à la vie de l'entreprise seraient regroupées dans une déclaration annuelle (proposition n° 4) alimentant le RCS ou le RM, pour un coût forfaitaire annuel qui couvrira celui des déclarations complémentaires nécessaires à la vie de l'entreprise pour toute modification significative.

Cette préoccupation a par ailleurs conduit la Chancellerie et les représentants des greffiers des tribunaux de commerce à convenir d'une baisse du tarif applicable à certaines formalités relatives à l'information légale sur les entreprises. Le décret n° 2014-506 du 19 mai 2014 a ainsi procédé à la réduction de moitié des frais d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés (depuis le 1 er juillet 2014) et prévoit la suppression du surcoût du K bis numérique (depuis le 1 er janvier 2015). Cette même année a été consacré le principe de la gratuité des formalités pour les micro-entrepreneurs.

Cet effort de baisse des coûts pour les entreprises doit se poursuivre.

(3) Recentrer le rôle de l'Agence France Entrepreneur sur l'information

On peut enfin s'interroger sur l'implication de l'Agence France Entrepreneur (AFE) pour favoriser la création d'entreprises, alors que la loi NOTRe a renforcé la compétence économique des régions en 2015 101 ( * ) .

Son rôle de financeur de projets, avec une enveloppe modeste de 20 millions d'euros, apparaît en contradiction avec sa mission d'aide à la création qui s'adresse à toutes les entreprises ou de coordination des fonds publics qui interviennent directement dans la création d'entreprise avec une expertise et des moyens financiers et humains dont l'AFE ne dispose pas.

L'État doit en tirer les conséquences et recentrer le rôle de l'AFE sur l'information à la création d'entreprise (proposition n° 5).

d) Objectif n° 4 : un identifiant unique pour chaque entreprise

Le programme « Dites-le-nous une fois », lancé en 2013, devait contribuer à la réduction de la charge administrative en allégeant la redondance des informations demandées aux entreprises.

En effet, selon le portail de la modernisation de l'action publique, « pour plus de 3 entreprises sur 4, le traitement de la redondance doit être la priorité numéro un de l'administration. L'enjeu est en effet énorme sur le plan économique : on estime de 3 à 5 % du PIB, le coût total de la charge administrative pesant sur les entreprises .  'Dites-le-nous une fois ` a ainsi vocation à supprimer toute forme de redondance à terme afin de ne plus solliciter inutilement les entreprises ».

Les administrations devaient « se mettre en ordre de marche pour permettre aux entreprises d'ici 3 ans de ne plus avoir à fournir qu'une seule fois leurs données d'identité, sociales et comptables ainsi que toute pièce justificative déjà fournie par ailleurs :

- le numéro SIRET sera la seule donnée d'identité à fournir par les entreprises pour toutes les démarches administratives ;

- les entreprises ne transmettront qu'une seule fois leur chiffre d'affaires, leur effectif, et l'ensemble de leurs données fiscales et sociales ;

- les entreprises n'auront plus à fournir d'attestation fiscale ou sociale, de justificatif d'identité, ni aucune autre pièce produite par l'administration ».

Les démarches concernant l'accès aux marchés publics et aux aides publiques ont certes été simplifiées. Pour les premiers, une entreprise peut désormais répondre à un marché public en fournissant uniquement son seul numéro SIRET 102 ( * ) . Pour les secondes, l'expérimentation lancée en juillet 2014, d'« aide publique simplifiée » (APS) conduit à ce que, pour solliciter une aide publique, l'entreprise n'ait plus à fournir que son seul numéro SIRET 103 ( * ) .

La suppression de la redondance de la fourniture à l'administration des informations d'identité, sociales et comptables des entreprises n'est qu'un aspect, parcellaire, de la nécessaire simplification de ce parcours.

Car la situation n'a pas fondamentalement changé depuis cet ambitieux projet de simplification de 2013.

Comme en témoigne un chef d'entreprise lors de la consultation publique sur le PACTE : « Lors de son immatriculation ou de sa déclaration d'activité auprès d'un centre de formalités des entreprises (CFE), toute entreprise ou entrepreneur individuel se voit attribuer plusieurs identifications, sous la forme de numéros : INSEE, SIREN, SIRET, RCS, RM, TVA intracommunautaire, URSSAF, APE, NAF... Il résulte donc de cette multitude d'identifiants des difficultés de gestion et un sentiment de désordre administratif qui n'est pas acceptable ».

Une vraie simplification serait de donner à chaque entreprise un identifiant unique (proposition n° 6).

e) Objectif n° 5 : dématérialiser à 100 %

La première proposition du PACTE soumis à la consultation à compter du 15 janvier 2018 propose de « rendre 100 % des démarches administratives pour la création accessibles en ligne en 30 minutes, pour un coût limité : cela pourrait être fait notamment en (i) proposant un service en ligne unique et performant, (ii) modernisant le dispositif des centres de formalités des entreprises (CFE), (iii) instaurant la gratuité des prestations d'assistance aux formalités ».

Toutefois, la restitution des travaux conduits par les parlementaires et chefs d'entreprise du 21 décembre 2017 était plus ambitieuse puisqu'il était proposé, pour simplifier les démarches de publicité légale pour les entreprises, de « mettre un terme à l'obligation de publication des annonces légales dans des journaux ».

Une précédente tentative s'est soldée par un échec. Pourtant, cet objectif de dématérialisation totale représenterait pour les entreprises une économie potentielle de 250 millions d'euros par an .

(1) La tentative de dématérialisation de 2011.

L'article 78 de la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives, du député Jean-Louis Warsmann, du 28 juillet 2011, visait à « faciliter la consultation des annonces relatives à la vie des sociétés et des fonds de commerce en prévoyant leur dématérialisation et leur mise en ligne systématique, par les journaux d'annonces légales, sur une plateforme numérique prévue à cet effet ».

Cette simplification était la traduction d'une directive n° 2008/0084, du 18 avril 2008, du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 68/151/CEE du Conseil et la directive 89/666/CEE du Conseil en ce qui concerne les obligations de publication et de traduction de certaines formes de société.

Elle faisait partie d'un ensemble de directives dans le but de réduire les charges administratives pesant sur les sociétés de 25 % d'ici 2012 et de renforcer ainsi leur compétitivité.

La Commission européenne notait que, selon ses estimations, à l'échelle de l'Union européenne « la publication dans les bulletins nationaux entraîne chaque année un coût minimal total d'environ 410 millions d'euros pour la publication des comptes annuels et d'environ 200 millions d'euros pour la publication des modifications dans les registres ». À ces coûts, il faut ajouter les coûts internes des sociétés pour préparer la publication des informations et, dans certains États membres comme la France, les coûts de publication supplémentaire dans la presse . Une comparaison des différents systèmes utilisés dans les États membres a amené la Commission européenne à considérer qu'il n'était pas nécessaire d'imposer des coûts supplémentaires aux entreprises pour atteindre l'objectif de publicité des informations relatives à ces dernières . Des pays comme la Finlande et le Danemark parviennent à remplir cet objectif sans imposer à leurs entreprises des coûts supplémentaires, liés notamment à des publications dans la presse. La Commission européenne a donc recommandé aux États membres de veiller à ce que la publication des informations relatives aux entreprises n'entraîne aucun supplément de frais pour ces dernières.

La Commission proposait que la publicité de ces actes soit assurée par la publication au moyen d'une plateforme électronique centrale sur laquelle les informations faisant l'objet d'une publicité pourraient être consultées par ordre chronologique. En d'autres termes, la Commission européenne, suivie en cela par une majorité des États membres, souhaitait que la publication obligatoire des annonces judiciaires et légales fût dématérialisée, afin de réduire les charges administratives et financières qui en résultaient pour les entreprises.

Or, il apparut rapidement qu'une partie de la presse, notamment quotidienne et régionale, tirait une partie de ses ressources de la publication sous format papier des annonces judiciaires et légales relatives aux sociétés et fonds de commerce. Cette formalité représentait 250 millions d'euros chaque année 104 ( * ) pour les 600 titres habilités à recevoir les annonces judiciaires et légales. Cette ressource étant considérée comme vitale notamment pour la presse spécialisée, régionale ou locale et particulièrement la presse agricole en milieu rural 106 ( * ) , le Parlement européen modifia la directive pour permettre de financer les publications effectuées par d'autres moyens que la plateforme électronique centrale, parmi lesquels la publication assurée par le biais des journaux d'annonces judiciaires et légales.

Pour le rapporteur de l'Assemblée nationale 107 ( * ) , « la mise en ligne systématique des informations relatives à la vie des sociétés et des fonds de commerce en général et des annonces judiciaires et légales en particulier, contribuera à faciliter leur consultation sans représenter de coût supplémentaire pour les auteurs de l'annonce, puisque l'obligation d'insertion desdites informations dans la plateforme électronique pèsera sur les journaux habilités à recevoir des annonces légales ».

C'est ainsi que, conformément à l'article 101 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives et depuis le 1 er janvier 2013, l'édition des annonces relatives aux sociétés et fonds de commerce, publiée dans les journaux habilités à recevoir des annonces légales est complétée, et non pas remplacée, par une insertion dans une unique base de données numérique . C'est le décret n° 2012-1547 du 28 décembre 2012 relatif à l'insertion des annonces légales portant sur les sociétés et fonds de commerce dans une base de données numérique centrale qui a créé le dispositif actuel.

L'article 102 de ladite loi a par ailleurs simplifié le régime des annonces judiciaires et légales en homogénéisant notamment les tarifs fixés jusque-là au niveau départemental 108 ( * ) par leur « renationalisation », la grille tarifaire devenant désormais une compétence ministérielle. Depuis 2015, il ne reste plus que huit niveaux de prix, là où en 2012, il existait 39 tarifs différents.

(2) Dématérialiser en supprimant la rente des annonces judiciaires et légales

La plateforme Actulegales.fr , créée par l'Association de la Presse pour la Transparence Economique (APTE) 109 ( * ) , compte désormais plus de 4 millions d'annonces légales 110 ( * ) .

Pour la presse régionale, « cette complémentarité indispensable entre le print et le web permet un maillage très fin du territoire qui ne peut être égalé par le web seul (zones blanches...). L'approche forfaitaire permettant d'accéder à la fois à une diffusion papier et à une diffusion web serait un gage complémentaire de simplification du formalisme de ces publications ». Ainsi, « modifier cet équilibre, qui ne génère aucun surcoût pour les entreprises, ne ferait que réduire cette visibilité et cette transparence, sans bénéfice supplémentaire ».

Toutefois, comme en témoigne un chef d'entreprise dans la consultation de la loi PACTE : « pour modifier l'objet social ou tout autre ajustement du Kbis, comptez 200 euros pour la publication de l'annonce et 200 euros au Greffe. La publication fait doubler le coût de la formalité. Cela pénalise les jeunes entreprises qui ont souvent besoin d'adapter leurs statuts et leur Kbis et dont les finances sont comptées ».

Ce marché réglementé est dénoncé par le Syndicat de la presse indépendante d'information en ligne 111 ( * ) qui souligne que « sur les 1,1 million d'annonces légales publiées en 2016 dans environ 700 titres en France, 40 % d'entre elles ont ainsi été publiées dans ces journaux ultra-spécialisés dans les annonces judiciaires, qui ne vivent que grâce à cette rente en s'appuyant sur un système verrouillé dans toute sa chaîne de valeur ».

Ce marché captif des annonces légales rend la presse locale qui en bénéficie extrêmement dépendante du système. Les données restent fermées, non accessibles via une API, en contradiction avec les principes de l'OpenData.

Ce doublon pourrait donc être remplacé par l'obligation de publier les annonces sur une plate-forme publique, gérée par l'État, moyennant une taxe directement versée à l'État, moins importante qu'actuellement de manière à diminuer le coût pour les entreprises, avec un fléchage pour soutenir le pluralisme de la presse, notamment spécialisée et en région.

Sans méconnaître les difficultés de la presse, notamment spécialisée, il n'en reste pas moins qu'on ne peut que regretter que cette tentative de dématérialisation complète de cette publicité administrative n'ait pas abouti, d'autant que l'information sur les entreprises s'effectue aujourd'hui de plus en plus via les réseaux numériques.

Votre délégation propose donc une dématérialisation totale des formalités de la création d'entreprise qui mettrait un terme à l'obligation de publication des annonces légales dans les journaux (proposition n° 7), ce qui pourrait représenter, pour les entreprises, une économie de 250 millions d'euros par an.

f) Objectif n° 6 : simplifier vraiment le bulletin de salaire

Comme l'indique l'intitulé du rapport Scriberras finalement retenu, la « simplification » opérée du bulletin de salaire est davantage une clarification relative : « sa clarification est faite. Une autre réforme reste à faire, autrement plus ambitieuse : celle de la simplification des règles de paie », indique son auteur 112 ( * ) .

Une véritable simplification semble impossible à droit constant car elle supposerait de :

- diminuer le nombre de textes législatifs et réglementaires ;

- simplifier les textes de référence et au premier chef le Code du travail ;

- unifier les assiettes de cotisations (certaines sont plafonnées, d'autres déplafonnées...) ;

- diminuer le nombre de conventions collectives.

De surcroît, avec le prélèvement à la source, les entreprises seront de plus en plus sollicitées par leurs collaborateurs sur les taux de prélèvement, les évolutions de salaires. Le bulletin de paie devrait prochainement s'enrichir de quelques lignes supplémentaires pour préciser le taux de prélèvement et le montant net avant et après impôt notamment.

Votre rapporteur propose de créer un organisme interface entre les salariés et les organismes sociaux afin de créer un taux de cotisation sociale unique pour les salariés et les entreprises, en fonction du salaire distribué et qui assurerait la collecte des cotisations sociales pour tous les organismes sociaux avant leur rétrocession (proposition n° 8).

g) Objectif n° 7 : sécuriser les relations entre entreprises et travailleurs indépendants
(1) Le dynamisme du microentrepreunariat

La hausse spectaculaire des créations d'entreprise à partir de 2009 s'explique essentiellement par le statut de « l'autoentreprise » , rebaptisée micro-entreprise depuis le 1 er janvier 2016, statut créé par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 113 ( * ) .

Il s'agissait à l'époque de favoriser l'exercice d'une activité indépendante pouvant s'inscrire dans un cadre cumulatif ou alternatif avec un autre emploi. Ensuite, l'objectif a été l'insertion des publics fragiles, jeunes et demandeurs d'emploi principalement. En 2010, 30 % des micro-entrepreneurs étaient demandeurs d'emploi, 11 % sans activité professionnelle et 6 % avaient un statut salarié privé précaire.

Plus de 30 % des nouveaux micro-entrepreneurs en 2015 ont entre 20 et 29 ans, et 60 % ont un âge compris entre 20 et 39 ans. Les micro-entrepreneurs sont essentiellement des salariés du privé (38 %). 46 % des demandeurs d'emploi choisissent le statut de micro-entrepreneur pour créer leur entreprise, contre 16 % pour les entreprises individuelles ou sociétés unipersonnelles relevant de régimes sociaux et fiscaux de droit commun.

Les seules micro-entreprises comptent pour 19 % de l'emploi salarié total, avec un poids prépondérant dans la construction et l'hébergement restauration.

La micro-entreprise est toutefois un écosystème fragile.

La micro-entreprise reste un complément de revenus . En 2015, plus d'un micro-entrepreneur sur 3, enregistré en 2010 et survivant en 2015, ne consacre que 35 heures par mois à son activité de micro-entrepreneurs. Seuls 38 % des micro-entrepreneurs consacrent plus de 70 heures par mois à leur activité.

Peu de micro-entreprises se transforment en sociétés . En 2015, seules 2 % des micro-entreprises créées en 2010 et survivant en 2015 sont transformées en EI ou en société.

Par ailleurs, la question du dépassement des seuils, qui ont été doublés dans la loi de finances pour 2018, engendre une complexité difficilement compréhensible pour le micro-entrepreneur car elle répond à des conditions d'application dans le temps distinctes :

- le micro-entrepreneur bénéficie du régime micro-social simplifié jusqu'au 31 décembre de l'année de dépassement ;

- l'option pour le prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu cesse rétroactivement au 1 er janvier de l'année de dépassement, les versements déjà effectués étant déduits l'année suivante lors du paiement de l'impôt sur le revenu ;

- enfin, la TVA doit être facturée aux clients à compter du 1 er jour du mois de dépassement de ces seuils.

On est loin de la simplicité.

(2) Micro-entrepreneur ou salarié dépendant ?

Le micro-entrepreneuriat est une démarche polymorphe qui associe :

- le micro-entrepreneuriat conçu comme un sas vers la création d'une entreprise classique ;

- les demandeurs d'emploi et travailleurs précaires qui créent leur entreprise afin de créer leur propre emploi ;

- ceux qui souhaitent acquérir un complément de revenu ;

- ceux qui s'orientent vers le micro-entrepreneuriat comme forme pérenne de travail indépendant.

Le rapport du Conseil économique, social et environnemental du 27 novembre 2017 consacré aux nouvelles formes de travail indépendant indique que les deux-tiers des micro-entrepreneurs dépourvus de diplôme qualifiant le sont au titre d'une activité principale, tandis que pour la moitié des micro-entrepreneurs diplômés du supérieur, il s'agit d'un revenu d'appoint.

L a micro-entreprise permet la création de son propre emploi, et contribue ainsi à la baisse du chômage. Mais il créé également une dynamique entrepreneuriale biaisée.

Les micro-entreprises sont les entreprises les plus fragiles de notre économie en raison de la faiblesse des investissements de départ et l'absence de capital de type fonds de commerce. En 2014, 50 % des micro-entrepreneurs n'avaient investi aucun fonds dans leur projet.

La pérennité des micro-entreprises est donc faible. Seulement 38 % de celles qui ont démarré en 2010 étaient encore en activité cinq ans plus tard contre 50 % des entreprises classiques dans la même situation.

Par ailleurs, un travailleur indépendant isolé sur une activité de services de proximité créera évidemment moins d'emploi à terme qu'une start-up innovante. Selon la DGE, « Si juridiquement, rien n'interdit à une micro-entreprise d'employer un salarié, le régime spécifique n'est économiquement pas du tout adapté aux employeurs en raison notamment de la non-déductibilité des charges . La part importante des micro-entreprises parmi les créations d'entreprises (51 %) contribue à la faiblesse de la part des entreprises employeuses au moment de leur création (seulement 5 % en 2013). Cependant, même hors micro-entreprises, 90 % des entreprises créées n'emploient aucun salarié et la micro-entreprise ne fait donc que contribuer à un phénomène plus large et antérieur à la création de ce régime spécifique. L'impact en termes d'emploi des micro-entreprises créées est donc probablement moindre que celui des autres nouvelles entreprises créées ».

La micro-entreprise repose sur une ambiguïté de départ , parfaitement analysée par nos collègues sénateurs M. Philippe Kaltenbach et Mme Muguette Dini , dans leur rapport d'évaluation 114 ( * ) de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie et relatives à la création du statut de micro-entrepreneur :

« La raison de cette méprise sur la nature juridique du régime de le micro-entrepreneur, qui n'est donc pas un statut spécifique, provient du rattachement du régime dérogatoire de paiement des cotisations sociales à celui du régime micro-fiscal créé pour le travailleur indépendant. En quelque sorte, le micro-entrepreneur est un travailleur indépendant qui répond à une série de conditions particulières. Sur le plan strictement juridique, ni au regard du droit de la sécurité sociale ni au regard du droit des sociétés, ce régime ne crée un statut qui serait distinct de celui des travailleurs indépendants. Il ne constitue qu'un mode particulier de calcul et de paiement des impositions sur le revenu et des contributions sociales, en étant adossé à des formalités simplifiées de déclaration de l'activité ».

Cette frontière entre salariat et entrepreneuriat est poreuse et la micro-entreprise est dans une `zone grise' qui peut être juridiquement dangereuse pour le micro-entrepreneur comme pour une entreprise avec laquelle il a noué des relations économiques ou commerciales.

La requalification judiciaire des travailleurs indépendants en salariés constitue en effet une menace latente sur les relations entre les entreprises et les entrepreneurs individuels.

Selon l'article L 8221-6-1 du Code du travail, « est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d'ordre ». Après quelques allers-retours 115 ( * ) , la loi instaure en outre une présomption simple de non-salariat au bénéfice des personnes physiques immatriculées ou inscrites aux différents registres des indépendants 116 ( * ) .

Mais le même article, dans sa deuxième partie, explique que l'existence d'un contrat de travail peut être établie dès lors qu'un « lien de subordination juridique permanente » peut être établi entre ces personnes et un donneur d'ordre. La présomption de non-salariat, simple et non irréfragable, peut ainsi être remise en cause. C'est à celui qui demande la requalification de la relation de travail en relation salariale d'apporter la preuve de ce lien de subordination juridique. En pratique, le demandeur est le plus souvent l'URSSAF.

Les juridictions, notamment la Cour de Cassation, rappellent régulièrement la frontière entre micro-entrepreneuriat et salariat déguisé et n'hésitent pas à sanctionner les employeurs indélicats.

Selon une jurisprudence abondante et constante, la Cour de cassation a établi que « l'existence du contrat de travail ne dépend ni de la volonté des parties, ni de la qualification donnée à la prestation effectuée (salaires, honoraires, indemnités...) mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur ». (Cassation sociale 19 décembre 2000, n° 98-45.572 ; 6 mai 2015, n° 13-27535 et 15 décembre 2015, n° 14-85638). Les ' conditions de travail peuvent requalifier une relation contractuelle et transformer une relation d'indépendance en relation de subordination, par exemple lorsque les personnes sous statut de micro-entrepreneur doivent respecter des horaires et un planning précis, utiliser les outils et respecter les procédures de l'entreprise, être intégrées à une équipe salariée, etc.

Un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de Cassation, du 14 février 2006 n° 05-82.287 précise que : « l'existence d'un contrat de travail était établie dès lors que les artisans concernés, fussent-ils immatriculés au répertoire des métiers, fournissaient des prestations les mettant en état de subordination juridique par rapport au maître de l'ouvrage durant tout le temps d'exécution de leur tâche, même en l'absence d'un lien contractuel permanent ».

Le manque d'autonomie a été considéré comme flagrant et l'autorité exercée par l'entreprise considérée comme relevant d'un contrat de travail. Indépendant sur le papier, le micro-entrepreneur était de fait intégré à l'entreprise pour laquelle il intervenait, comme l'aurait été un salarié.

En cas de contrôle, l'inspection du travail ou les services de l'URSAFF vérifieront attentivement plusieurs critères : si le micro-entrepreneur a un seul ou plusieurs clients, s'il est un ancien salarié du donneur d'ordre (et si sa rémunération est identique à celle qu'il touchait comme salarié), si l'activité du micro-entrepreneur est organisée au quotidien par l'entreprise, si le micro-entrepreneur peut prendre des initiatives ou non, s'il utilise son propre matériel ou celui de l'entreprise, si les horaires et le lieu de travail sont imposés par l'employeur, si des comptes rendus réguliers sont exigés... C'est donc bien le lien de subordination qui distingue le salarié du travailleur indépendant.

En cas de requalification du statut de micro-entrepreneur en salarié et si les juges estiment que l'entreprise a cherché volontairement à échapper à ses obligations d'employeur, une fraude constitutive du délit de travail dissimulé (article L. 8221-5 du code du travail) peut être constatée.

L'employeur risque alors une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans ainsi que 45 000 euros d'amende. Ces sanctions peuvent être doublées en cas de récidive. Par ailleurs, l'employeur devra le paiement des salaires et des cotisations sociales sur la base d'un poste équivalent dans l'entreprise. Cette régularisation est rétroactive et débute dès le premier jour de la relation de travail. Le micro-entrepreneur peut également solliciter le versement d'indemnités.

Le micro-entrepreneur peut, pour sa part, devoir rembourser les éventuelles prestations sociales ou allocations chômage qu'il aurait touchées durant cette période 117 ( * ) .

La loi devrait sécuriser les entreprises dans leurs relations avec des entrepreneurs individuels , sans méconnaître les abus toujours possibles de certains donneurs d'ordre, en limitant les cas de contestation de la présomption légale de l'entrepreneur indépendant. Lorsque les URSSAF ont perçu les cotisations dues sur l'activité déclarée d'indépendant, elles ne devraient pas pouvoir intenter une action en requalification de la présomption de non-salariat. L'intérêt à agir n'est pas établi.

La loi 118 ( * ) devrait limiter les demandeurs de l'action de requalification à la direction du Travail et aux entrepreneurs indépendants eux-mêmes (proposition n°9). Une telle mesure diminuerait fortement l'incertitude juridique qui pèse sur les relations professionnelles entre travailleurs indépendants et donneurs d'ordre.

(3) Un droit économique propre au microentrepreunariat ?

Nouvelle forme d'activité économique à mi-chemin entre le salariat et l'entrepreneuriat, le micro-entrepreneuriat a eu du mal à s'installer dans notre paysage juridique, en étant soupçonné de faciliter la fraude à la TVA et la substitution à certains emplois salariés, et accusé de concurrence déloyale dans l'artisanat.

La question de l'adéquation du cadre juridique aux nouvelles formes d'organisation du travail est donc clairement posée.

Comme l'analyse le Conseil d'orientation pour l'emploi dans un rapport de 2014 consacré à L'évolution des formes d'emploi : « la distinction entre l'emploi salarié et les situations hors contrat de travail a été préservée en droit, elle s'avère de plus en plus difficile à cerner sur le marché du travail, compte tenu du foisonnement des nouveaux modes d'organisation du travail ».

Certains ont donc proposé la création d'un statut nouveau, plus adapté.

Il s'agirait de construire un droit de l'activité professionnelle , composé d'un socle de droits fondamentaux applicables à tous les travailleurs quelle que soit la forme juridique de l'exercice de leur activité professionnelle. Pour le Conseil d'orientation pour l'emploi : « A l'opposition considérée comme rigide entre travail salarié et travail indépendant, ces auteurs proposent de substituer un continuum d'activités auquel le législateur attribuerait une série de garanties modulaires et variables à partir d'un minimum commun, ces garanties étant destinées à être progressivement renforcées ».

La création d'une catégorie intermédiaire entre travail salarié et travail indépendant constitue une autre voie. Selon les promoteurs de cette thèse, ce droit de l'activité professionnelle pourrait être complété par un droit du travail indépendant économiquement dépendant.

Ce statut intermédiaire « s'appliquerait aux situations dans lesquelles le travailleur n'exploite pas une entreprise, n'est pas subordonné, mais indépendant dans l'organisation de son activité dont il assume l'essentiel des risques, tout en étant soumis à une autorité ou à une contrainte économique. En d'autres termes, cette situation se définirait au moyen de deux critères : le premier concerne la situation du travailleur, qui ne doit pas être placé dans un état de subordination juridique, et le second est constitué par son état de dépendance économique ».

Auteur d'un rapport en 2008 sur le travailleur économique dépendant 119 ( * ) , M. Paul-Henri Antonmattei avait ainsi proposé les critères suivants :

- exécuter une activité professionnelle pour son propre compte et sans lien de subordination juridique ;

- exercer seul son activité ;

- percevoir au moins 50 % de ses revenus d'un seul donneur d'ordres dans le cadre d'une relation contractuelle d'une durée minimum de deux mois ;

- avoir une activité productive ou commerciale dépendante du donneur d'ordres.

Toutefois les expériences étrangères montrent que « la création d'un nouveau statut juridique n'entraine pas forcément les effets escomptés et elles soulignent la difficulté de traiter la problématique de la protection des travailleurs indépendants économiquement dépendants, la création d'un statut juridique ne faisant pas disparaître de fait les frottements et stratégies de contournement » selon le Conseil d'orientation pour l'emploi. Au contraire, un statut spécifique , lorsqu'il a été créé, a conduit à une précarisation de certaines franges du salariat .

Un statut propre contribuerait immanquablement à complexifier le paysage juridique qu'il s'agit au contraire de simplifier et de rendre plus lisible pour les créateurs d'entreprises qui ne sont pas toujours des juristes expérimentés.

Le Conseil économique, social et environnemental estime, dans son avis consacré aux nouvelles formes du travail indépendant, que : « la création d'un troisième statut contribuerait non seulement à multiplier des situations économiques et juridiques, mais aussi à créer de nouvelles frontières avec les « pôles » du salariat et de l'indépendance, voire à accroître des contentieux ».

En outre, une nouvelle modification législative paraît inopportune et une stabilité paraît nécessaire, comme le relevait le rapport du Conseil d'orientation pour l'emploi d'avril 2014: « Bien que récent, le régime du micro-entrepreneur a été modifié à de nombreuses reprises depuis sa création : il a connu onze modifications législatives en quatre ans », de 2009 à 2013.

2. Encourager l'accompagnement des entreprises
a) Un projet d'entreprise accompagné réussit mieux

Plus tôt une jeune entreprise est accompagnée, plus forte est son taux de réussite et plus longue est son espérance de vie.

Si 50 % des entreprises françaises disparaissent avant d'atteindre leur 6 ème année d'existence, ce taux tombe à 34 % lorsqu'elles sont accompagnées.

Pour aider à la création d'entreprise, se sont développés des prestataires de services soit publics, soit privés. Les initiatives d'accompagnement des chefs d'entreprise se sont multipliées.

Les DIRECCTE (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) aident les entrepreneurs à trouver les bons interlocuteurs pour des conseils en ressources humaines de premier niveau ou bien des conseils personnalisés.

La Caisse des Dépôts a créé la marque « La Fabrique à Entreprendre » dans le but d'accompagner la création, la reprise et la transmission d'entreprises.

Le réseau des Chambres de commerce et d'industrie a mis en ligne un site intitulé les-aides.fr , répertoriant les aides existantes par secteur d'activité, par profil et par catégorie d'aide et fournit une expertise grâce à son réseau de 163 points d'accueil CCI-Entreprises.

Bpifrance offre un accompagnement à la création pour les TPE (22 dispositifs) ou PME (26 dispositifs).

Pôle Emploi propose des ateliers sur la création d'entreprise (Activ-Crea) et héberge des « entrepreneurs à l'essai » qui ont la possibilité de tester leur projet en toute sécurité grâce à un hébergement juridique (les « couveuses d'entreprise » 120 ( * ) ) . « L 'Emploi Store » est un portail qui regroupe les services digitaux de Pôle Emploi et ceux de ses partenaires, acteurs publics et privés du secteur de l'emploi et de la formation. Cet outil dispose d'un espace dédié à la création d'entreprise. De même, l'APEC a lancé, pour les demandeurs d'emploi cadres ayant un projet de création d'entreprise, deux services : « J'y pense » et « Je me lance » .

Ces initiatives publiques sont complétées par un riche réseau associatif d'accompagnement à la création d'entreprise :

- les 550 Boutiques de Gestion (BGE) , réseau fondé en 1980 qui compte désormais 950 salariés. En 2017, sur 80 000 demandes d'information, 55 000 se sont traduites par un accompagnement et 18 000 par une création effective d'entreprise ;

- les retraités peuvent mettre leur expérience au service des jeunes créateurs d'entreprise, au sein de l'Entente des Générations pour l'Emploi et l'Entreprise, des réseaux de cadres retraités, comme Egee , Pivod , Ecti , Ressac Volontaria t, OTECI ou encore AGIRabcd ;

- les jeunes dirigeants peuvent faire partager leur expérience ( Centre des Jeunes Dirigeants ) ;

- Initiative France, créé en 1985, est le 1 er réseau associatif de financement des créateurs et des repreneurs d'entreprise avec 222 plateformes locales, 16 700 entreprises et 44 155 emplois créés ou maintenus en 2016. Elle peut accorder des prêts d'honneur sans intérêts et sans garanties qui facilitent ensuite la bancarisation d'un projet ;

- le Réseau Entreprendre , fondé en 1986 et reconnu d'utilité publique, est un groupe de 14 000 « dirigeants d'entreprise qui aide de nouveaux chefs d'entreprise avec des méthodes d'entreprise ». Il accompagne 1 000 entrepreneurs par an qui donnent naissance à 800 PME dont 87 % sont toujours en activité après trois ans d'existence. Les prêts d'honneur 121 ( * ) accordés par le réseau peuvent avoir un effet de levier bancaire considérable auprès des banques et agissent comme un label qui encourage les prêts bancaires ;

- pionnier de la finance solidaire , France Active accompagne et finance les entreprises de l'économie sociale et solidaire depuis près de 30 ans et a mobilisé 270 millions d'euros au service de 7 400 entreprises en 2016.

Les organisations patronales (MEDEF, CPME, U2P) comme les organisations professionnelles (experts-comptables 122 ( * ) , avocats) apportent également leur appui.

De nombreux prestataires privés proposent enfin, moyennant rémunération, d'aider le porteur d'un projet à créer son entreprise.

b) Objectif n° 8 : considérer l'accompagnement comme du mécénat d'entreprise

Malgré cette utilité avérée, seules 12 % des créations d'entreprises sont accompagnées en France.

Toutes les politiques publiques encourageant la croissance, comme par exemple les conventions de revitalisation des territoires, et tous les dispositifs publics d'aide à la création d'entreprise devraient intégrer un volet d'accompagnement entrepreneurial, car un euro accompagné est souvent un euro sécurisé.

L'accompagnement constitue du mécénat de compétences. À ce titre, il devrait être éligible au dispositif du mécénat d'entreprise (proposition n° 10) créé par la loi n° 2003-709 du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations et bénéficier de l'agrément fiscal ouvrant droit à une réduction de 60 % des montants versés dans le cadre de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés 123 ( * ) .

II. SOUTENIR LA CROISSANCE DE L'ENTREPRISE

A. UNE CROISSANCE DIFFICILE DU TISSU ENTREPRENEURIAL FRANÇAIS

Selon le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008, l'entreprise est la plus petite combinaison d'unités légales constituant une unité organisationnelle de production de biens et de services et jouissant d'une certaine autonomie de décision.

Quatre catégories d'entreprises y sont définies :

- les petites et moyennes entreprises (PME) sont celles qui, d'une part, emploient moins de 250 personnes, d'autre part, ont un chiffre d'affaires annuel n'excédant pas 50 millions d'euros ou un total de bilan n'excédant pas 43 millions d'euros ;

- parmi elles, les micro-entreprises emploient moins de 10 personnes et ont un chiffre d'affaires annuel ou un total de bilan n'excédant pas deux millions d'euros ;

- les entreprises de taille intermédiaire (ETI) sont des entreprises qui n'appartiennent pas à la catégorie des PME et qui, d'une part, emploient moins de 5 000 personnes, d'autre part, ont un chiffre d'affaires annuel n'excédant pas 1 500 millions d'euros ou un total de bilan n'excédant pas 2 000 millions d'euros ;

- les grandes entreprises sont des entreprises non classées dans les catégories précédentes.

1. La forte mortalité des petites entreprises124 ( * )

On distingue -difficilement- les TPE des micro-entreprises :

Les micro-entreprises sont des unités légales de moins de dix personnes n'appartenant pas à un groupe et ayant un chiffre d'affaires ou un total de bilan n'excédant pas deux millions d'euros. L'INSEE en dénombrait 878 100 en 2012 et l'ACOSS 125 ( * ) , 1 072 000 fin 2016.

Les très petites entreprises (TPE) sont les micro-entreprises qui ne relèvent ni du statut de micro-entrepreneur, ni du régime fiscal de la micro-entreprise. Elles étaient plus de deux millions en 2012 selon l'INSEE.

Nombre d'unités légales par catégorie en 2012

Catégorie d'entreprise

Nombre d'unités légales

Très petites entreprises

2 148 900

Micro-entrepreneurs et micro-entreprises au sens fiscal

878 100

Unités légales de 0 à 9 salariés avec chiffre d'affaires et bilan supérieurs à 2 millions d'euros

3 300

Unités légales de 0 à 9 salariés appartenant à un groupe*

85 300

(*) Sauf s'il s'agit d'un groupe de type micro-entreprise au sens de la LME

Champ : France, secteurs principalement marchands hors agriculture et services financiers. TPE au sens de la LME, hors micro-entrepreneurs

et micro-entreprises au sens fiscal.

Source : Insee, Ésane 2012, Fare 2012.

a) Le tissu fragile des micro-entreprises

Créé par la loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, en vigueur depuis le 1 er janvier 2009, ce régime a eu pour objet essentiel une simplification de l'accès à la création d'entreprise, grâce à des formalités allégées et un mode simplifié de calcul et de paiement des cotisations sociales et d'impôt sur le revenu.

La micro-entreprise est ainsi :

- franchisée de TVA (son prix de vente ne tient pas compte de la TVA) ;

- soumise à un taux de cotisations sociales avantageux correspondant au régime microsocial, de 13,1 % pour la vente de marchandises et de 22,7 % pour les prestations de services ;

- soumise à un abattement forfaitaire pour le calcul du résultat de l'entreprise ;

- exonérée de charges sociales en cas d'absence d'activités.

En huit ans, de 2009 à 2016, le nombre de micro-entrepreneurs soumis à ce régime a triplé et s'établit à 1 072 000 126 ( * ) , en hausse de 7 % par rapport à l'année précédente.

Cette hausse constitue la première accélération depuis la création du dispositif, le rythme de progression ayant tendance à diminuer depuis 2009 (+ 7,5 % fin 2014, + 3,3 % fin 2015). Ce dynamisme résulte du rebond des immatriculations (+ 8,2 % fin 2016, après - 7,4 % en 2015) et de la baisse des radiations (- 4,9 %, après + 4,4 %).

Sur ce million, 670 000 micro-entrepreneurs déclarent un chiffre d'affaires positif au quatrième trimestre 2016, soit 62,5 % des inscrits. La progression reste forte (+ 6,1%) bien que plus faible que celle observée un an plus tôt (+ 7,8 %).

75 % des micro-entrepreneurs ont un revenu d'activité inférieur à 8 000 euros par an, alors que moins de 25 % des indépendants classiques sont dans ce cas. Il progresse toutefois sensiblement puisqu'il avait été estimé à une moyenne annuelle de 4 300 euros en 2009 et de 5 430 euros en 2011.

Quelques secteurs sont particulièrement dynamiques en nombre de micro-entreprises économiquement actives. C'est notamment le cas des transports, de la santé, des activités immobilières, du nettoyage et de l'hébergement-restauration.

Selon l'INSEE 127 ( * ) , sur 100 micro-entrepreneurs immatriculés au 1 er semestre 2010, 38 n'ont jamais été actifs et leur radiation a été prononcée ; 62 ont effectivement démarré une activité économique . La « mortalité » est très forte la première année. Parmi les micro-entrepreneurs immatriculés en 2010, 47 % sont encore actifs un an après leur immatriculation. La première année, le risque de cessation d'activité (y compris par absence de démarrage) est donc de 53 %. Parmi ceux ayant démarré une activité, cinq ans après, en 2015, 39 ont cessé en tant que micro-entrepreneur et 23 sont toujours actifs sous ce régime, soit une pérennité à cinq ans de 38 % pour ceux qui ont vraiment démarré une activité . Pour les entreprises classiques de la même génération, la pérennité à cinq ans est beaucoup plus élevée (60 %), y compris pour les entrepreneurs individuels (50 %).

La proportion de micro-entrepreneurs encore actifs cinq ans après dépend beaucoup du secteur d'activité. Elle est la plus élevée dans la santé humaine et l'action sociale (46 %) et dans l'enseignement (35 %). En revanche, elle est plus faible que la moyenne dans l'information-communication et le commerce (19 %).

La pérennité croît avec l'âge du micro-entrepreneur. Si l'activité est un complément, la pérennité à cinq ans est plus faible que pour une activité principale.

En moyenne, les micro-entrepreneurs immatriculés en 2010 encore actifs cinq ans après déclarent un chiffre d'affaires de 10 200 euros en 2014, inférieur de 400 euros à celui déclaré deux ans plus tôt. Pour les micro-entrepreneurs en activité principale, ce chiffre d'affaires annuel moyen est de 12 800 euros, contre 7 700 euros pour ceux en activité de complément.

b) Une fragilité qui contribue à une perception ambivalente de l'entreprise

La micro-entreprise est souvent présentée comme un outil de lutte contre le chômage et comme passerelle vers la création d'entreprise. Mais c'est aussi un « instrument qui institutionnalise la précarité » 128 ( * ) .

Ce « salariat déguisé » ou cet « entrepreneuriat par nécessité », qui brouille les frontières entre le statut salarial et le statut de travailleur indépendant, brouille également l'image de l'entreprise. D'autant qu'en France, la liberté et l'autonomie associées au travail « indépendant » et à la création d'entreprise, sont survalorisées.

La récurrence de l'échec de la micro-entreprise contribue donc sans doute au fossé qui existe dans notre pays entre le désir d'entreprendre, la réalité de l'entrepreneuriat et la pérennité des entreprises créées.

c) Les TPE sont essentiellement tournées vers le marché intérieur

Les TPE représentent 71 % des micro-entreprises au sens de la LME, quasiment 100 % de leurs salariés, 97 % de leur chiffre d'affaires et 96 % de leur valeur ajoutée.

Les TPE emploient 2,3 millions de salariés en équivalent temps plein (ETP), soit 19 % des effectifs de l'économie nationale, réalisent 477 milliards d'euros de chiffre d'affaires (13 %) et 168 milliards d'euros de valeur ajoutée (17 %). Par leur valeur ajoutée, elles contribuent pour 9 % au produit intérieur brut national.

En 2012, 55 % des TPE n'ont pas de salarié et 18 % n'en emploient qu'un. Parmi les 1,2 million de TPE non employeuses, une sur deux réalise moins de 41 400 euros de chiffre d'affaires et une sur quatre, moins de 17 400 euros.

Les TPE représentent moins de 3 % des exports du champ principalement marchand non agricole et non financier. Leur poids dans l'investissement est modeste 129 ( * ) (17 %).

La majorité des TPE (54 %) a le statut de société à responsabilité limitée. Cette catégorie juridique est d'autant plus fréquente que l'unité légale est grande : 42 % des unités non employeuses, 74 % des unités employant trois à neuf salariés. Un quart des TPE a un statut d'artisan ou de commerçant, 6 % un statut de profession libérale et 5 % un statut d'autre personne physique. Ces deux derniers statuts sont utilisés pour l'essentiel par des structures sans salarié.

De manière générale, les TPE sont tournées vers l'économie locale. Elles oeuvrent notamment dans le commerce (22 % des TPE), les services aux entreprises (20 %) et la construction (17 %).

2. Des PME trop faibles
a) Des PME deux fois moins nombreuses qu'en Allemagne

D'après les données EUROSTAT de 2016 130 ( * ) , la pérennité à un an des entreprises créées en 2009 était en France dans la moyenne européenne (81 % en France, 80 % dans l'Union européennes), légèrement supérieure à l'Allemagne (78 %) mais dix points derrière la Grande-Bretagne (91 %). Avec 49 %, elle demeure, à un horizon de cinq ans, supérieure à celle de l'Allemagne (46 %), de la Grande-Bretagne (47 %) et de la moyenne européenne (44 %).

La création d'emplois à trois à cinq ans s'améliore. cinq ans après sa création, une entreprise sur deux emploie au moins un salarié. Elles sont 20 % à employer plus de trois salariés cinq ans après leur création, en hausse significative par rapport aux entreprises créées en 2002, qui ne sont que 8 % à employer trois salariés et plus cinq ans après leur création.

Le principal handicap de la France n'est donc pas le nombre mais bien la taille de ses entreprises et leur croissance .

N otre pays manque de « gazelles », entreprises à croissance rapide 131 ( * ) .

En France, les créations d'entreprises, certes nombreuses, sont en moyenne trop petites et/ou à plus faible potentiel de croissance.

Comme l'a relevé le Conseil d'orientation pour l'emploi, « la France et l'Allemagne comptent autant de créations d'entreprises unipersonnelles, mais l'Allemagne crée plus d'entreprises de deux à quatre salariés , et l'écart s'accroit encore pour les entreprises plus grosses. En nombre d'emplois, il y a un rapport de deux à trois entre les deux pays. Ces écarts traduisent le fait qu'en France, il y a une difficulté à faire grossir les entreprises ». Cette comparaison qui joue en notre défaveur révèle une certaine efficacité des dispositifs de soutien à la création d'entreprises mais un déficit de soutien pour leur croissance.

Entreprises créées avec au moins un salarié en 2008

1

2-4

5-9

10+

Total

France

Allemagne

France

Allemagne

France

Allemagne

France

Allemagne

France

Allemagne

Firmes créées

23 125

25 903

10 800

28 444

4 029

8 444

3 271

6 253

41 225

69 044

Salariés créés

23 125

25 903

28 200

72 844

26 661

53 408

36 962

151 395

114 948

303 550

Source : INSEE (France) et Destatis (Allemagne)

En 2014, si la France comptait 50 % d'entreprises employant de un à neuf salariés de plus que l'Allemagne (2 991 860 contre 2 074 830) , elle en comptait trois fois moins au-delà de dix salariés comme l'illustre ce tableau :

Source : « L'entrepreneuriat, faits et chiffres », DGE, novembre 2017

b) Des PME trop petites

Notre pays est bien confronté à un manque constant d'entreprises de tailles intermédiaires (ETI) et de grosses PME, dynamiques et en fortes croissance.

Sur 3,82 millions d'entreprises, 287 grandes entreprises (GE) emploient 3,9 millions de salariés en équivalent temps plein (ETP), soit 29 % du total. À l'opposé 3,67 millions d'entreprises, soit 96 %, sont des microentreprises ; elles emploient 2,4 millions de salariés en ETP (18 % du total). Entre ces extrêmes, près de 5 800 entreprises de taille intermédiaire (ETI) et 140 000 PME non microentreprises emploient respectivement 25 % et 28 % des salariés (ETP).

Fin 2017, le nombre d'entreprises françaises a été réduit de 13 % (2,35 millions en 2015), si l'on exclut le 1,1 million de micro-entrepreneurs, dont le chiffre d'affaires global ne dépasse pas 1,1 % du chiffre d'affaires des entreprises de moins de 10 salariés, par rapport au record de 2008 (2,7 millions) lequel a été provoqué en grande partie par la création du statut de micro-entrepreneur.

En 2015, en France, les entreprises du secteur marchand 132 ( * ) ont employé 12,6 millions de salariés en équivalent temps plein (ETP), soit 254 300 de plus qu'en 2009. Entre 2009 et 2015, le solde d'emplois salariés est positif pour les unités légales de moins de 10 salariés (+ 121 300 ETP), pour les unités de 10 à 249 salariés (+ 103 200) et celles de 250 à 4 999 salariés (+ 89 600). Il est négatif pour les unités de 5 000 salariés ou plus (- 59 800).

Comparé aux autres pays d'Europe, les entreprises françaises à forte croissance 133 ( * ) sont peu nombreuses.

Selon une étude de la Commission européenne d'avril 2018, on comptait, en 2016, 180 000 entreprises de cette catégorie contre 158 000 en 2015 (+ 13 %) et 144 000 en 2014 (+ 7 %), et employaient environ 15 millions de personnes dans l'Union européenne.

Si l'essor des entreprises françaises à forte croissance est indéniable, leur poids dans l'économie tend à relativiser ces bonnes performances économiques. En effet, les entreprises à forte croissance ne représentaient que 8,5% des entreprises du secteur marchand en France (pour une moyenne européenne de 9,9 %), soit la 19 ème place sur 24 économies étudiées en 2015, ce qui est un classement stable depuis 2014.

En valeur absolue de ces entreprises à forte croissance, la France, bien qu'occupant la 4 ème place avec 17 000 entreprises, comme l'Espagne, reste encore loin de l'Allemagne (37 662 entreprises) et de la Grande-Bretagne (26 000) mais devance l'Italie (15 000) .

c) Des PME insuffisamment financées
(1) Une épargne des ménages mal orientée

La France ne souffre pas d'un manque d'épargne . Le patrimoine des ménages 134 ( * ) représente au total 10 221 milliards d'euros 135 ( * ) investis à 60 % dans l'immobilier : les Français aiment la pierre. Le reste est investi dans des placements peu risqués voire sans risque. Notre pays a un rapport compliqué à son histoire financière, fait de faillites retentissantes ruinant les épargnants.

L'épargne des ménages 136 ( * ) a atteint en septembre 2017 4 924 milliards d'euros, soit plus de deux fois le PIB annuel. Notre taux d'épargne, 14 %, est le plus élevé d'Europe.

La France souffre en revanche d'un problème d'orientation, ou d'allocation, de l'épargne .

Les épargnants ont délaissé les actions au profit de placements financiers majoritairement sans risques :

- le taux de détention directe d'actions a été divisé par deux en huit ans . Il représentait 6,2 % en mars 2016 contre 13,8 % en 2008. Quand un ménage américain investit 57 % de son épargne financière en actions, un ménage français place 69 % de son épargne en produit de taux ou en placements garantis ;

- en termes de supports de l'épargne 137 ( * ) , l'assurance-vie atteint 31 % du total de l'épargne des ménages, soit plus de 1 920 milliards à fin septembre 2017 , et l'investissement locatif est le second poste avec 22 %. Les dépôts réglementés 138 ( * ) reçoivent 20 %, avec 700 milliards, les dépôts non réglementés, 14 %, et les fonds 139 ( * ) environ 10 % ;

Pourtant, sur le long terme (40 ans), le rendement cumulé des actions a été plus de trois fois celui du livret A et s'est situé au-dessus des rendements obligataires.

Cette orientation croissante vers l'assurance-vie et l'épargne réglementée est peu favorable à l'investissement de long terme. Sa réorientation vers le financement des entreprises pourrait se faire « naturellement » grâce aux mutations des attentes des épargnants liés à leur retraite : « davantage attachés à la protection du capital qu'à la liquidité, car ils sont de plus en plus orientés vers le long terme du fait notamment de la nécessité de préparer leur retraite. Il est donc bienvenu que les professionnels commencent à imaginer aujourd'hui une assurance-vie de long terme, moins liquide, mais assortie d'une forme de protection du capital, et significativement investie en actions » selon une intervention récente du Gouverneur de la Banque de France 140 ( * ) .

Il est plus probable cependant qu'elle doive être accompagnée.

En effet, la bataille de l'innovation , « clé de notre compétition et de notre avenir » selon le ministre de l'Économie et des Finances dans un discours du 15 janvier 2018, nécessite une réorientation de l'épargne vers le long terme, mais aussi vers le risque et l'innovation.

Ce besoin est crucial. Or, en 2013, seules 26 % des TPE/PME françaises ont sorti un nouveau produit ou service durant les 12 derniers mois contre 30 % pour le Royaume-Uni et 32 % pour la Suède.

Le financement de cette bataille de l'innovation ne pourra se faire exclusivement par les produits du fonds pour l'innovation de rupture 141 ( * ) annoncé à cette occasion. Cette bataille repose sur les PME et ETI qui détiennent la clé de la croissance de long terme, à la condition que les PME puissent grandir. Elles ne pourront le faire que si l'épargne est investie en fonds propres.

• L'objectif du Gouvernement, explicité au Grand rendez-vous de l'investissement productif , organisé le 22 janvier 2018 à l'Assemblée nationale, est de « doubler sur le quinquennat l'investissement de l'épargne des Français dans les fonds propres des PME. Il représente aujourd'hui environ 5 milliards d'euros par an, en additionnant ISF-PME, levées de fonds des banques et des conseillers en gestion de patrimoine, et PEA-PME », afin que cet effort passe à 10 milliards d'euros par an d'ici 2022 142 ( * ) . Cette réallocation de l'épargne semble à notre portée puisque seul 1 % de l'épargne gérée par les investisseurs institutionnels français est investi dans les PME, contre 3 % pour les assureurs européens et 6 % pour les caisses de retraites américaines.

• Il manque toutefois un support adapté à cette réallocation de l'épargne vers l'investissement productif de long terme . La stratégie du Gouvernement est de faire appel au civisme des banques, de leur « passer le relais » 143 ( * ) , une fois supprimé l'ISF et mise en place la flat tax, dans un contexte de stabilité du système fiscal pour garantir le maximum de prévisibilité, selon le Premier ministre qui s'est exprimé à cette occasion. Or, la synthèse des 120 contributions reçues des intermédiaires financiers pour la préparation de cette manifestation comme l'interpellation dans la presse, la veille 144 ( * ) , par les acteurs du financement des PME (Association française des investisseurs pour la croissance, France Digitale, Business angels), ont souligné qu'il manquait un outil adapté au capital-risque en France.

Si l'on veut que les PME grossissent, il faut s'en donner les moyens. Le Gouvernement et sa majorité comptent sur la bonne volonté des acteurs du financement. Votre rapporteur est convaincu qu'il manque un instrument adapté.

(2) Des PME sous-financées

D'après une étude de novembre 2016 portant sur des données de 2013 145 ( * ) , les PME ne représentent que 4 % des actifs finaux composant l'épargne , soit un montant de 177 milliards sur un montant total d'épargne de 4 200 milliards. Au sein de ces 4 %, l'effort provient principalement des fonds comme les FCPI et les banques disposent de 67 milliards d'encours de crédits aux PME.

Pour ce qui est de la dette (crédits et obligations), l'étude souligne que les grandes entreprises captent la majorité du financement par la dette (68 %), les PME n'en recueillant que 27 %. En effet « le portefeuille des ménages est majoritairement composé d'obligations qui ne financent pas les petites structures. En l'occurrence, les PME se financent majoritairement par le crédit et en reçoivent deux fois plus que les grandes entreprises » : 106 milliards contre 40 milliards pour les grandes entreprises et les ETI.

Alors que la majorité du financement des grandes entreprises se fait par l'émission d'obligations, les PME se financent majoritairement à travers le crédit pour des durées supérieures à 5 ans.

(3) Un financement par la bourse trop étroit
(a) Euronext, un système multilatéral de négociation

Les systèmes multilatéraux de négociation (SMN) 146 ( * ) sont des plates-formes électroniques de courtage organisant la confrontation entre acheteurs et vendeurs de titres financiers. Ils sont gérés par un prestataire de services d'investissement agréé ou par une entreprise de marché (comme Euronext).

Il ne s'agit pas à proprement parler d'une place boursière mais davantage d'une société privée destinée à promouvoir les marchés financiers auprès des PME.

Euronext gère cinq Marchés réglementés en Europe : en France (« Euronext Paris »), aux Pays-Bas (« Euronext Amsterdam »), au Portugal (« Euronext Lisbonne »), en Belgique (« Euronext Bruxelles ») et au Royaume-Uni (« Euronext London »).

Pour plus de clarté, les marchés réglementés européens sont segmentés par niveaux de capitalisation boursière :

Compartiment A

Sociétés dont la capitalisation est  supérieure à 1 milliard d'euros

Compartiment B

Sociétés valorisées entre 150 millions d'euros et 1 milliard d'euros

Compartiment C

Sociétés dont la capitalisation est  inférieure à 150 millions d'euros

Principes de fonctionnement du système multilatéral de négociation

Le gestionnaire du système multilatéral de négociation doit établir des règles transparentes et non discrétionnaires, garantissant un processus de négociation équitable et ordonné et fixant des critères objectifs pour une exécution efficace des ordres (article L. 424-2 du code monétaire et financier).

Les règles du système fixent des critères transparents concernant l'admission des instruments financiers aux négociations. Contrairement aux marchés réglementés, un titre financier peut être admis aux négociations sans requérir l'accord de l'émetteur. Dans un tel cas, celui-ci n'est soumis à aucune obligation d'information financière à l'égard de la personne qui gère le système.

Seuls Alternext, NYSE BondMatch et Galaxy (qui permettent la négociation d'obligations) ont le statut de système multilatéral de négociation organisé (SMNO).

La personne qui gère un système multilatéral de négociation publie les prix à l'achat et à la vente ainsi que le nombre de titres financiers correspondant pour les actions admises aux négociations sur un marché réglementé. Il s'agit de la transparence pré-négociation. Elle publie également le prix, le volume et l'heure des transactions exécutées sur des actions admises aux négociations sur un marché réglementé. C'est la transparence post-négociation.

Le gestionnaire du système multilatéral de négociation doit contrôler que ses membres respectent les règles et surveiller le bon déroulement des transactions effectuées sur son système. Il informe l'AMF des manquements à ses règles et de toute condition de négociation de nature à perturber le bon ordre du marché ou, pour les actions admises aux négociations d'un marché réglementé, tout comportement potentiellement générateur d'un abus de marché. Le gestionnaire du système multilatéral de négociation organisé assure la même surveillance pour l'ensemble des titres admis à ses négociations.

Source : AMF

Euronext gère trois segments de marchés :

Euronext Growth (ex Alternext depuis le 19 juin 2017) , présent à Bruxelles, Lisbonne et Paris, qui offre un accès simplifié au marché, avec des contraintes limitées et avec moins d'obligations permanentes que sur le marché réglementé d'Euronext. Dédié principalement aux entreprises de petite et moyenne capitalisation, aux ETI et aux scale-ups 147 ( * ) , ce marché est ouvert aux professionnels comme aux investisseurs non professionnels. Ce marché est contrôlé mais n'est pas réglementé au sens des directives de l'Union Européenne. Cependant, les directives d'abus du marché s'appliquent, ainsi que la directive « prospectus » de l'Union européenne dans le cadre d'une offre publique. Les entreprises souhaitant être cotées sur Euronext Growth doivent sélectionner un listing sponsor 148 ( * ) accrédité qui les aidera pendant la procédure d'admission et les guidera tout au long de leur vie en tant que société cotée sur Euronext Growth. Une fois cotée en bourse, le listing sponsor est responsable de conseiller et d'aider la société dans ses interactions avec le marché, notamment par le biais d'organisation de réunions investisseurs. Le listing sponsor peut être un prestataire de services d'investissement (PSI), un cabinet d'audit ou un spécialiste des finances d'entreprise et doit être accrédité par Euronext.

Euronext Access est un accès facilité aux marchés de capitaux via une procédure de cotation simplifiée . Ce marché est particulièrement adapté aux PME-ETI qui souhaitent renforcer leur visibilité et leur notoriété grâce au statut de société cotée. La cotation sur ce marché peut être un premier pas vers un marché plus mature par la suite.

Les entreprises candidates à l'admission à la cotation sur Euronext Access doivent nommer un listing sponsor dûment accrédité qui les assistera lors de la procédure d'admission. Ce marché est contrôlé mais n'est pas réglementé suivant les directives de l'UE. Cependant, et comme pour le précédent, les directives « abus du marché » et « prospectus » s'appliquent.

Euronext Access + ™, créé en juin 2017, est conçu pour les start-ups et les PME en forte croissance. Ce nouveau compartiment « agit comme un tremplin vers d'autres marchés plus matures d'Euronext, en les incitant à se structurer et s'acclimater à la réalité d'une vie boursière » selon Euronext. Les entreprises admises à la négociation sur Euronext Access+ reçoivent une assistance supplémentaire et leurs actions bénéficient d'une plus grande visibilité. Pour être admis sur ce marché, l'entreprise doit :

- avoir des états financiers pour au moins les deux années précédentes, ainsi que des comptes audités pour la dernière année,

- avoir un capital flottant minimum d'1 million d'euros,

- avoir un listing sponsor , pendant l'admission aux négociations et pour toute la durée de la cotation,

- s'engager à communiquer régulièrement au marché.

(b) De moins en moins de PME se financent par le marché

En 2008, le segment dédié aux PME sur le marché parisien, Alternext , (devenu Euronext Growth ) regroupait moins de 100 sociétés, contre plus de 1 600 pour son homologue londonien, l'Alternative investment market (AIM), et capitalisait alors 5 milliards d'euros contre 75 milliards pour l'AIM.

En 2016, sur 658 entreprises françaises cotées en France, 524 étaient des PME, représentant une capitalisation totale de près de 92 milliards d'euros 149 ( * ) .

Le rapport Attali de 2008 se donnait comme objectif « la cotation de 1 000 sociétés sur Alternext en 2012, avec 50 milliards d'euros de capitalisation ».

On est loin de ces ambitions puisque l'on constate un déclin continu, notamment sur Euronext, du nombre de PME cotées sur la place de Paris :

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Alternext

(Euronext Growth)

133

153

151

156

167

175

174

Euronext

441

409

393

379

361

350

350

Total

574

562

544

535

528

525

524

Source : Euronext

2017 a été une année stable avec onze sociétés ayant intégré l'indice Euronext Growth (cinq introductions en bourse avec offre au public et six transferts de marché) et douze qui en sont sorties. Cependant, les sociétés cotées sur Euronext Growth ont levé 379,2 millions d'euros (+ 15,9 %) de fonds.

Comme le souligne l'OCDE, 150 ( * ) les introductions en bourse diminuent surtout pour les PME en particulier en Europe tout comme aux États-Unis. Les contraintes réglementaires et comptables constituent des freins pour l'introduction en bourse . En outre, les entrepreneurs freinent l'arrivée d'actionnaires extérieurs : d'une part, ils manquent d'information financière (« La crainte de ne pas être capable de gérer le processus d'introduction en bourse, la peur d'être exposé à la volatilité des cours, l'aversion à communiquer des données sensibles, mais aussi la méconnaissance du processus d'entrée en bourse et des étapes ultérieures sont d'autres raisons qui expliquent la réticence des PME à rejoindre les marchés boursiers ») et d'autre part, ils refusent souvent d'abandonner la propriété ou le contrôle de leur entreprise.

Or, l'ouverture du capital a le mérite de changer la culture de la PME.

(4) Le financement croissant des PME par la private equity

Les PME recourent de plus en plus au private equity , forme privée 151 ( * ) d'investissement dans des entreprises, généralement non cotées, finançant un développement par un apport de capitaux non-publics.

Les fonds d'investissement en private equity investissent dans un portefeuille d'entreprises qu'ils accompagnent dans leur expansion et leur transformation sur une période allant généralement de cinq à sept ans. Le financement par l'apport de capitaux privés est un levier de croissance très important pour les entreprises qui cherchent à se développer, du fait d'une vision de long terme. Les fonds d'investissement en private equity n'utilisent pas de stratégies comme « l'arbitrage » ou encore la vente à court terme. Ce type de financement est dit « alternatif » parce qu'il ne recourt pas aux financements classiques que constituent l'emprunt bancaire ou les émissions obligataires.

Au-delà de l'apport en capitaux, les fonds de private equity assistent le management de l'entreprise sous contrôle sur toutes les décisions stratégiques.

Pour les PME, la branche du private equity qui accompagne leur croissance est le Capital Développement . Les PME ayant déjà atteint un certain stade de développement et cherchant à financer leur croissance sont souvent en difficulté pour trouver des financements auprès des banques. Le recours à un fonds de capital développement est une alternative pour poursuivre et accélérer leur croissance.

La private equity : développer son entreprise plutôt que communiquer ?

Un aspect essentiel des compagnies spécialisées dans le capital-investissement est qu'elles ne sont pas tenues aux mêmes règles comptables qu'une entreprise cotée. En effet, la plupart du temps, ces compagnies n'ont pas à publier de rapports de fin d'année ou ne sont pas tenues de publier des bilans financiers aussi complets qu'une organisation cotée. Et cela a des implications importantes pour leur vie quotidienne. Cela permet à ses dirigeants de se concentrer pleinement sur la stratégie et le développement de l'entreprise, plutôt que de s'abandonner à la pratique de la communication. Il est facile de voir aujourd'hui à quel point les dirigeants d'une société cotées peuvent être accaparés à la fois par les médias, les marchés financiers et les régulateurs, qui exigent d'eux des explications précises sur leurs résultats publiés, sur les attentes de résultats, sur les dividendes ou les stratégies. Plus l'entreprise est loin des marchés boursiers, plus sa gestion quotidienne se rapproche de son activité fondamentale. Le conseil d'administration décide plus sereinement, et est jugé plus pour ses actions que pour sa capacité à rassurer les marchés ou à communiquer.

Source : Finance de marché

Ce mode de financement se développe fortement en France : 2 000 entreprises y ont eu recours en 2017, contre 1 600 en moyenne les années précédentes.

Le private equity français a levé plus de 80 milliards d'euros en dix ans et plus de 15 milliards en 2017. « Notre dynamique devrait nous conduire à dépasser les 20 milliards d'ici à 2020 et ainsi devancer le capital-risque britannique » selon M. Olivier Millet 152 ( * ) , président de France Invest 153 ( * ) .

Mais ce segment ne représente que 0,8 % du portefeuille des investisseurs institutionnels, contre 2,5 % dans le reste de l'Europe et 8 % pour les fonds de pensions américains.

Pour les PME, qui considèrent que « la bourse n'est pas faite pour eux », ce mode de financement respecte leurs valeurs patrimoniales et familiales.

Source de financement des PME, le private equity est aussi un « cheval de Troie » pour notre économie. Ce secteur est financé à plus de 40 % par de l'épargne internationale.

Il est donc attractif, sans doute trop, car il met les PME françaises à la merci d'investisseurs internationaux, comme l'illustre cet exemple emblématique :

Nao, le petit robot français devenu japonais

Lors de la présentation le 12 septembre 2013 à l'Elysée des « 34 plans de bataille » pour doper l'industrie, la société française Aldebaran Robotics, qui compte alors 310 salariés, présente au Président de la République, M. François Hollande, et au ministre du Redressement productif, M. Arnaud Montebourg, un petit robot humanoïde baptisé Nao qui mesure 58 cm, pèse 4,8 kg et possède déjà un compte Twitter, @NaoRobot. Il fera ensuite des apparitions à la télévision au côté de Thierry Ardisson pour « Salut les terriens ! » et sera invité au Grand Journal de Canal+.

Lorsque Nao revient le 6 juillet 2017 à l'Elysée, dans le cadre de la concertation autour du quatrième plan autisme, organisée par le nouveau Président de la République, M. Emmanuel Macron, le petit robot est devenu japonais.

Entretemps, au cours d'une levée de fonds de 50 millions d'euros, le petit androïde a séduit le milliardaire japonais Masayoshi Son, le PDG du groupe SoftBank, qui investit environ 100 millions de dollars pour s'emparer de 73 % des parts d'Aldebaran. La société lyonnaise qui construit Nao a été fondée en 2005 par Bruno Maisonnier, une figure de la robotique française. Ce dernier quitte l'entreprise le 25 février 2015, détenue désormais à 95 % par Softbank, les 5 % restants étant répartis entre les salariés.

Trois modèles de robots ont été développés par Aldebaran. Le premier, Nao, est un bijou technologique, sans utilité pratique. Le grand public préfère le robot aspirateur, qui a déjà séduit des millions de consommateurs. Pepper, le deuxième robot, est une commande de l'actionnaire, une sorte de Nao simplifié. La station debout sur deux jambes est abandonnée au profit d'un déplacement sur roulettes, moins esthétique mais plus simple. Commercialisé depuis le début de l'année, il est destiné aux grandes entreprises, qui s'en servent pour accueillir les clients dans leurs boutiques. Enfin, Romeo, le troisième robot, est un projet développé en grande partie par la recherche publique française et européenne. Il est destiné à venir en aide aux personnes âgées ou dépendantes. Les Japonais souhaitent le commercialiser aussi vite que possible.

Le business model de ces robots est en réalité fondé sur un modèle économique à la Apple qui rémunère davantage les applications et les contenus que sur les ventes d'appareils. Softbank vend Pepper avec un abonnement qui permet d'avoir accès à une sorte de mini-iTunes robotique. « Mais pour passer de l'invention bricolée dans un garage au statut de plus grosse capitalisation boursière mondiale, il faut créer un vaste écosystème. Tout seul dans son village gaulois, Aldebaran n'avait aucune chance d'y parvenir. Avec SoftBank, il peut réussir. Tant pis pour le Made in France ».

Challenges, 6 avril 2015.

3. Les ETI : un atout décisif dans la mondialisation
a) Les ETI, un atout décisif
(1) Le « coeur » de l'économie française

Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) constituent une catégorie d'entreprises intermédiaire entre les PME et les grandes entreprises.

Sont considérées comme ETI, les entreprises comprenant entre 250 et 4 999 salariés, réalisant entre de 50 millions et 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires et plus de 43 millions et 2 milliards d'euros de total de bilan.

Ce sont en réalité, et pour moitié, de « grosses PME » : 50 % des ETI ont moins de 500 salariés.

Au regard de nos voisins, la France compte moins d'ETI : 5 300 contre 8 000 en Italie ou en Espagne, 10 500 en Grande-Bretagne et 12 500 en Allemagne.

Ces 5 300 entreprises représentent 0,2 % du total des entreprises françaises mais contribuent à une part essentielle de l'économie nationale : 23 % de l'emploi salarié (3,3 millions), 27 % du chiffre d'affaires, 34 % des exportations, 39 % du PIB. Les ETI sont surreprésentées dans l'industrie (33 % sont présentes dans ce secteur contre 10 % en moyenne pour l'ensemble des entreprises). Elles sont des acteurs de la mondialisation : 73,5 % d'entre elles sont présentes à l'international (contre 11,7 % des PME), essentiellement en Europe, et 200 sont des champions mondiaux sur leur marché ; 75 % sont des entreprises familiales ou patrimoniales ; 64 % ont un capital détenu majoritairement par des personnes physiques ; seules 212 sont cotées en France ; 21 ans sont nécessaires en moyenne pour qu'une PME devienne une ETI.

Il s'agit de la catégorie d'entreprises qui créent le plus d'emplois : 156 000 des 187 200 emplois nets créés dans le secteur marchand en 2016 l'ont été par des ETI.

Pour l'INSEE, les ETI représentent les deux tiers du coeur de l'économie française 154 ( * ) . Car, comme le constatait dès février 2010 le rapport Retailleau sur les ETI 155 ( * ) , cette catégorie performante qui génère le tiers de l'export français incarne « un capitalisme vertueux, dont les principales caractéristiques sont une vision de long terme plutôt qu'un abandon aux intérêts court-termistes, une préférence pour l'investissement plutôt que pour le dividende, des relations sociales apaisées et une culture d'entreprise forte ; enfin, elles sont capables d'articuler harmonieusement le local et le global grâce à un fort enracinement dans les territoires, et une capacité de projection sur les marchés internationaux. Elles combinent donc taille critique nécessaire au développement, notamment pour l'exportation et l'innovation, stabilité temporelle et échelle humaine ».

(2) Gazelles, girafes, licornes et titans

On peut associer aux ETI, les PME de croissance, les « gazelles » et les « girafes ».

Les PME de croissance sont des jeunes entreprises en croissance rapide dont les caractéristiques sont, selon le ministère des Petites et Moyennes entreprises, de compter entre 20 et 250 salariés, dont les dépenses de personnel ont crû d'au moins 15 % par exercice sur deux exercices consécutifs, qui répondent aux critères de la PME et sont assujetties à l'IS.

Selon la définition de l'OCDE et d'Eurostat, les « gazelles » sont des entreprises de moins de 5 ans d'âge (à la fin de la période de croissance) qui ont connu une croissance moyenne annuelle supérieure à 20 % pendant une période de trois ans consécutifs, soit 72 % sur trois ans, et sur au moins l'un des trois indicateurs suivants : les effectifs, la valeur ajoutée ou l'EBITDA (le résultat d'exploitation avant intérêts, impôts et amortissement).

Les entreprises qui croissent au même rythme mais sont âgées de plus de cinq ans sont appelées « girafes ».

Si l'intensité de la croissance les rassemble, « gazelles » et « girafes » se distinguent en ce qui concerne les modalités de leur croissance : « Alors que celle des gazelles se fait tout autant sur une croissance des effectifs que de l'EBITDA, les girafes, quant à elles, privilégient plutôt une croissance en EBITDA : plus de la moitié d'entre elles ne sont d'ailleurs en forte croissance que sur cet indicateur. Le plus souvent, le critère est exclusif et la croissance s'opère soit via l'EBITDA, soit via les effectifs, rarement conjointement. En 2013, les gazelles comme les girafes sont moins de 5 % à croître à la fois en effectif et en EBITDA. En d'autres termes, si la richesse produite n'est pas suffisante pour entretenir à la fois la croissance en effectifs et en actifs, alors un arbitrage se fait entre stratégie de taille et stratégie de valorisation » 156 ( * ) .

Les gazelles se différencient des autres PME par une productivité salariale et une rentabilité économique et financière plus élevées. Elles sont également moins endettées, avec un financement davantage axé sur l'augmentation des capitaux propres que sur l'endettement financier 157 ( * ) .

La part des gazelles au sein des PME décroît. Elle était de 21 % en 2010, de 23 % en 2007 et de 13,5 % en 2013.

Enfin, une gazelle qui réussit se transforme en licorne , dès lors que sa capitalisation boursière est supérieure à 1 milliard de dollars.

En 2017, l'Europe compte 57 licornes, dont 3 françaises et 9 nouvelles par rapport à 2016, mais 41% des licornes dans le monde sont américaines, et 37 % chinoises 158 ( * ) . Le Royaume-Uni compte 22 licornes, suivi par la Suède (7) et l'Allemagne (7). La France reste à 3 (Blablacar, Criteo et Vente-privée ; OVH n'est pas comptée car née avant 2000). Contrairement aux économies britanniques et allemandes, la France n'a engendré aucune nouvelle licorne en 2017. Néanmoins, malgré cette accélération notable, l'Europe reste à la traîne. En effet, l'an dernier, 30 nouvelles licornes ont vu le jour en Asie, et 37 aux États-Unis mais seulement 9 en Europe.

Au-delà, et très loin du monde des PME-ETI, une licorne qui réussit se transforme en titan lorsqu'elle est valorisée à plus de 50 milliards de dollars. Comme, parmi ces 57 licornes européennes, seules trois dépassent les 10 milliards de dollars de valorisation, les entreprises européennes sont donc encore loin de pouvoir créer leur premier « titan ».

b) L'absence de stratégie publique en faveur des ETI

Si la France a su créer les conditions d'un écosystème dense qui accompagne les débuts du cycle de vie des entreprises, elle a encore beaucoup à faire pour encourager les PME à devenir des ETI et pour que ces dernières deviennent de grandes entreprises.

La France manque de réussites entrepreneuriales récentes : sur les 100 premières entreprises françaises, une seule avait moins de 30 ans (Free) en 2014. Sur les 100 premières européennes, elles étaient 9. Sur les 100 premières américaines, elles étaient 63.

(1) Faire grandir les ETI

Selon une étude de 2015 de l'Observatoire du financement des entreprises 159 ( * ) , les ETI n'éprouvent pas de difficultés à se financer. Elles recourent en particulier au financement en dette sous forme de placements privés. Pourtant, les investisseurs sont trop peu orientés vers les ETI de croissance, et l'écosystème boursier n'aide pas, faute d'investisseurs suffisants sur ce segment. La France a mal su jusqu'ici faire éclore des ETI « small & mid caps » 160 ( * ) capables, en restant françaises, d'intégrer le CAC 40 et de devenir des leaders mondiaux.

Récemment, Xavier Niel rappelait qu'il n'existe aucune société du CAC 40 plus jeune que Sanofi (1973) et affirmait, à juste titre : « On a besoin de créer le CAC 40 du prochain siècle ».

Or, les acheteurs naturels d'actions des ETI, les fonds « small & mid cap » sont peu présents sur les capitalisations boursières inférieures à un milliard d'euros. Chez certains gérants d'actifs, la frontière « mid cap » avoisine désormais les six milliards d'euros !

Il peut en résulter une faiblesse du cours de Bourse qui peut couper les sociétés de l'accès aux fonds propres dont leur essor, voire survie, dépend. À défaut, les ETI se financeront à l'étranger.

Le système de financement en dette sous forme de placements privés (apportés principalement par des assurances et des mutuelles), apparu en France en 2012, se présente comme un mode de financement particulièrement adapté aux entreprises en croissance. En effet, l'Euro PP (placement privé obligataire à l'échelle européenne) constitue une source de financement additionnelle moyen ou long terme pour les entreprises, à partir de montants relativement faibles, même si elles ne sont pas cotées. Le remboursement est le plus souvent in fine (remboursement en totalité à la date d'échéance) et sans prise de garantie, ce qui libère de la liquidité pour l'entreprise. En outre, ce nouveau mode de financement répond aux souhaits des ETI de diversifier leurs sources de financement et de limiter leur dépendance au seul secteur bancaire.

Par ailleurs, souvent trop petites pour être cotées en bourse, les PME-ETI en croissance ont pour autant besoin de renforcements réguliers de leurs fonds propres , et le marché du capital-investissement 161 ( * ) leur est particulièrement adapté.

Ce marché s'est développé en France, particulièrement depuis le début des années 2000, pour devenir le deuxième marché européen derrière le Royaume-Uni.

En revanche, le nombre de fonds de capital-innovation, ou de capital-risque 162 ( * ) , de taille significative est insuffisant et les entreprises sont encore dépendantes du soutien public, notamment de Bpifrance et « ce manque de capital-innovation ne permet pas aux petites entreprises d'investir de façon significative pour se développer, ce qui peut expliquer en partie le faible nombre d'ETI en France par rapport aux pays voisins », selon le constat dressé en janvier 2018 par l'Institut Montaigne 163 ( * ) .

(2) Développer une politique publique en faveur des ETI

Comme l'avait relevé en 2010 notre collègue M. Bruno Retailleau, les ETI cumulent les obstacles généraux du modèle français et des handicaps particuliers : « elles bénéficient moins des guichets publics que les PME et les grandes entreprises alors qu'elles supportent une charge fiscale et sociale plus lourde ». Alors que dans la décision publique, les PME pèsent par leur nombre et les grandes entreprises par leur poids et leur relation de proximité avec l'administration, « les grandes entreprises veillent à ne pas laisser prospérer des entreprises suffisamment fortes pour leur faire concurrence. Ainsi, le processus d'absorption par des groupes est intense. Les institutions financières sont concentrées en nombre et à Paris, tandis que les ETI sont principalement provinciales ».

Par ailleurs, toute politique publique en faveur des ETI doit éviter, d'une part, de transposer simplement aux ETI des mesures d'aide aux PME, « qui se serait heurtée au plafond bruxellois des 250 salariés, sans être appropriée du reste aux réels besoins des ETI », et d'autre part, d'instaurer un traitement spécifique aux ETI, « générateur de nouveaux seuils et donc de ruptures dans le processus de croissance que nous cherchons, au contraire, à fluidifier ».

c) L'alourdissement significatif des contraintes pesant sur les ETI
(1) Un choc de complexité

Alors même que les pouvoirs publics conviennent de la faiblesse des ETI françaises par rapport à leurs concurrentes européennes, ils leur imposent un empilement de mesures administratives obligatoires nouvelles, sans articulation, qui les soumettent, à partir d'un certain seuil, aux mêmes obligations que les sociétés cotées.

Au choc de simplification annoncé et tenté en 2012-2014 avec des résultats mitigés, a succédé en 2016-2017 un choc de complexité pour les ETI, résultant soit de la transposition de directives européennes soit de lois qui ont accru leurs obligations d'information.

Pour les ETI, deux nouveaux seuils ont été créés, entraînant de nouvelles obligations :

le seuil des 300 salariés impose depuis l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales :

- une commission spécifique traitant des questions d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail 164 ( * ) ;

- un conseil  d'entreprise , par accord collectif majoritaire, ou, pour les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, par accord de branche étendu, qui exerce alors les missions du Conseil social et économique et a, en sus, les pouvoirs de la négociation collective 165 ( * ) ;

le seuil des 500 salariés impose la publication d'informations extra-financières (anciennement Reporting social et environnemental, RSE ), depuis le 1 er août 2017, en application de l'ordonnance n°2017-1180 du 19 juillet 2017 transposant la directive n°2014/95/UE du Parlement et du Conseil du 22 octobre 2014. Parmi ces informations, doivent figurer désormais celles « relatives aux conséquences sur le changement climatique de l'activité de la société et de l'usage des biens et services qu'elle produit, à ses engagements sociétaux en faveur du développement durable, de l'économie circulaire et de la lutte contre le gaspillage alimentaire, aux accords collectifs conclus dans l'entreprise et à leurs impacts sur la performance économique de l'entreprise ainsi que sur les conditions de travail des salariés et aux actions visant à lutter contre les discriminations et promouvoir les diversités » 165 ( * ) .

Cette publication devra être réalisée par les sociétés cotées de plus de 500 salariés dont le bilan dépasse 20 millions d'euros ou le chiffre d'affaires 40 millions d'euros. Les PME cotées ne sont plus concernées. Elle devra aussi être réalisée par les sociétés non cotées de plus de 500 salariés avec un total de bilan ou de chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d'euros, qui devaient déjà réaliser un rapport RSE. Sont désormais concernés les établissements de crédits, les sociétés de financement, les entreprises d'investissement, les entreprises d'assurance et de réassurance et les sociétés d'assurance mutuelle. Les mêmes critères et seuils leur sont appliqués.

Suite au rapport conjoint IGF-IGAS/CGEDD de mai 2016 166 ( * ) , l'application du principe de « matérialité » laisse certes une marge d'appréciation à l'entreprise sur la pertinence des informations à fournir au regard des risques suscités par son activité .

Le décret n°2017-1265 du 9 août 2017 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2017-1180 du 19 juillet 2017 relative à la publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises précise les modalités de présentation de ces informations qui restent vérifiées par un organisme tiers indépendant (OTI). Le régime de vérification concerne désormais les seules sociétés de plus de 500 salariés et dépassant plus de 100 millions d'euros de total de bilan ou de chiffre d'affaires, alors que le régime actuellement en vigueur vise toutes les sociétés tenues de produire un rapport RSE. La déclaration de performance extra-financière devra désormais être publiée sur le site internet des sociétés visées et maintenue en ligne pendant une durée de cinq ans.

Cette information a bien évidemment un coût pour les entreprises , estimé dans le rapport précité, de « quelques milliers d'euros pour une petite société ayant peu de sites, n'opérant qu'en France et soumise à la seule obligation d'attestation de présence, à plusieurs millions d'euros pour une grande société cotée , multi-sites, multinationale et faisant vérifier les informations qu'elle publie ».

Le seuil des 500 salariés est également celui de l'application des dispositions de la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.

Son article 17, paragraphe II, oblige, depuis le 1 er juin 2017, tout dirigeant 167 ( * ) d'entreprise 168 ( * ) (président, directeur général ou gérant) de plus de 500 salariés et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 100 millions d'euros à prendre les huit mesures suivantes, applicables à sa société  mais également à ses filiales :

1° Un code de conduite définissant et illustrant les différents types de comportements à proscrire comme étant susceptibles de caractériser des faits de corruption ou de trafic d'influence. Ce code de conduite est intégré au règlement intérieur de l'entreprise et fait l'objet, à ce titre, de la procédure de consultation des représentants du personnel prévue à l'article L. 1321-4 du code du travail ;

2° Un dispositif d'alerte interne destiné à permettre le recueil des signalements émanant d'employés et relatifs à l'existence de conduites ou de situations contraires au code de conduite de la société ;

3° Une cartographie des risques prenant la forme d'une documentation régulièrement actualisée et destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques d'exposition de la société à des sollicitations externes aux fins de corruption, en fonction notamment des secteurs d'activités et des zones géographiques dans lesquels la société exerce son activité ;

4° Des procédures d'évaluation de la situation des clients, fournisseurs de premier rang et intermédiaires au regard de la cartographie des risques ;

5° Des procédures de contrôles comptables, internes ou externes, destinées à s'assurer que les livres, registres et comptes ne sont pas utilisés pour masquer des faits de corruption ou de trafic d'influence. Ces contrôles peuvent être réalisés soit par les services de contrôle comptable et financier propres à la société, soit en ayant recours à un auditeur externe à l'occasion de l'accomplissement des audits de certification de comptes prévus à l'article L. 823-9 du code de commerce ;

6° Un dispositif de formation destiné aux cadres et aux personnels les plus exposés aux risques de corruption et de trafic d'influence ;

7° Un régime disciplinaire permettant de sanctionner les salariés de la société en cas de violation du code de conduite de la société ;

8° Un dispositif de contrôle et d'évaluation interne des mesures mises en oeuvre.

Ce programme doit être validé par les représentants du personnel, l'inspection du travail et la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) en cas de traitement automatisé des données.

Afin d'aider les entreprises à répondre aux nouvelles exigences de ce seul article 17, Transparency International France , a publié un « Guide pratique pour la mise en oeuvre des mesures anticorruption imposées aux entreprises par la loi », de 48 pages, et le MEDEF, un « guide pratique - les mesures anticorruption de la loi Sapin II » de 121 pages.

Par ailleurs, la loi transforme le Service central de prévention de la corruption en Agence française anticorruption (AFA). Elle pourra inspecter les entreprises et, le cas échéant, mettre en oeuvre les procédures d'avertissement et les sanctions prévues par la loi. Celles-ci pourront aller jusqu'à un million d'euros pour les entreprises concernées et 200 000 euros pour les dirigeants, sur qui la loi fait peser la responsabilité du respect des nouvelles obligations 169 ( * ) .

Un premier recensement 170 ( * ) des obligations de l'ensemble de ce dispositif que les entreprises doivent appliquer, conduit à comptabiliser 92 tâches à accomplir, 290 questions de l'AFA auxquelles il faut que les ETI se préparent, 209 documents à établir par chaque ETI, pour un coût minimal de 400 000 euros par an et par ETI.

Le chiffrage du coût cumulé de ces deux nouvelles obligations, pour les quelque 1 600 ETI concernées, reste à effectuer.

(2) L'obligation d'information, une charge pour les ETI
(a) L'information sur l'entreprise

Pour l'Association nationale des sociétés par actions 171 ( * ) , la croissance des obligations d'information, imposées ou décidées de manière volontaire par les entreprises cotées, concerne de plus en plus d'entreprises non cotées :

Bien au-delà de l'information financière, sont désormais visés les modalités de gouvernance des sociétés, la composition des conseils, les rémunérations des dirigeants et des salariés sous toutes leurs formes (stock-options, actions de performance, retraites, etc.), la responsabilité sociale et environnementale, le contrôle interne et la gestion des risques, etc. Tous domaines dans lesquels les grands groupes cotés, bien avant l'intervention du législateur, ont pris des initiatives volontaires adaptées à leur situation et aux attentes des investisseurs.

Loin de concerner seulement les sociétés cotées, les nouvelles dispositions visent de plus en plus souvent les sociétés non cotées, dès lors qu'elles dépassent une certaine taille, mesurée à l'aune de critères variés et trop souvent différents selon le sujet: effectifs salariés de la société ou du groupe, en France ou dans le monde entier, bilan, chiffre d'affaires...

Cette transparence se présente comme dirigée vers les actionnaires, mais elle est inspirée non seulement par le souci d'informer ceux-ci, mais aussi, voire surtout, dans certains cas, le public en général. Ces obligations fréquemment modifiées ont ainsi conduit à un alourdissement considérable de l'information imposée aux émetteurs, devenue indigeste pour les actionnaires, les investisseurs et le public, au point que l'on peut se demander si l'excès d'information financière et extra-financière ne nuit pas à cette information... et si les actionnaires et le marché ne sont pas perdus dans la masse d'informations, parfois redondantes et d'intérêt très inégal, qui doivent désormais être fournies à intervalles réguliers.

Source : Modernisation et simplification du droit des sociétés, AFEP/ANSA/MEDEF

Une étude 172 ( * ) de l'Institut Messine 173 ( * ) , publiée avant ce choc de complexité, sur l'information financière des sociétés cotées, constatait ainsi que les documents de référence 174 ( * ) des sociétés françaises atteignaient en moyenne plus de 300 pages pour l'exercice 2013 soit plus du double du volume moyen des rapports annuels publiés par les sociétés britanniques .

Comme en a témoigné un chef d'entreprise au forum « Entreprise en action(s) » organisé le 28 mars 2018 au ministère de l'Économie et des finances : « mon entreprise , [une ETI], doit fournir 450 pages de documents de référence contre 150 pages il y a 15 ans ».

L'AMF a pris conscience de la nécessité de réduire la volumétrie des documents de référence pour les PME en publiant en décembre 2014 un « Guide d'élaboration des documents de référence adapté aux valeurs moyennes », initiative qui répond à la demande de pause règlementaire et au besoin de simplification exprimés par les acteurs du marché coté des PME et ETI.

Répondant à cette attente, l'ordonnance du 12 juillet 2017 va dans le bon sens.

Cette ordonnance 175 ( * ) permet de simplifier, clarifier et moderniser les obligations d'information prévues par le code de commerce à la charge des sociétés commerciales d'une part, et d'adapter le contenu du rapport de gestion aux petites entreprises, d'autre part.

La première partie de l'ordonnance remplace le rapport du président par un rapport thématique sur le gouvernement d'entreprise, pouvant également prendre la forme d'une section distincte du rapport de gestion dans les sociétés à conseil d'administration. Ce rapport sur le gouvernement d'entreprise contiendra notamment les dispositions relatives à la composition et l'organisation des travaux du conseil, à la rémunération des dirigeants et à l'application des codes de gouvernement d'entreprise. Le rapport de gestion sera quant à lui exclusivement consacré aux questions relatives à la marche des affaires, aux risques et à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises.

L'ordonnance permet également de moderniser le contenu des rapports en supprimant la surtransposition de la directive comptable (2013/34/UE) concernant les informations relatives aux procédures de contrôle interne et de gestion des risques et en proposant une rédaction plus systématique et plus lisible.

Elle allège le contenu du rapport de gestion des petites entreprises en le concentrant sur les éléments d'informations pertinents. Les petites entreprises 176 ( * ) seront exemptées de l'obligation de mentionner des indicateurs clés de performance de nature non financière ayant trait à l'activité de la société, des informations portant sur l'utilisation des instruments financiers, la gestion des risques financiers, la politique de couverture et l'exposition aux risques de prix, de crédit, de liquidité et de trésorerie, des informations relatives aux activités de recherche et développement, ainsi que la liste des succursales existantes.

(b) La protection des données personnelles par l'entreprise

Le règlement général sur la protection des données (RGPD), adopté par le Parlement européen et le Conseil le 27 avril 2016, entrera en vigueur dans toute l'Union européenne le 25 mai 2018, date intangible fixé par le règlement. Son intégration en droit interne, par le Parlement, est en cours par le projet de loi de protection des données personnelles. Afin de mieux accompagner les petites structures, comme les TPE-PME, dans la mise en oeuvre de leurs nouvelles obligations, le Sénat avait prévu d'encourager la diffusion d'informations et l'édiction de normes de droit souple par la CNIL adaptées à leurs besoins et moyens mais l'échec de la commission mixte paritaire n'a pas permis de retenir ces dispositions favorables aux entreprises.

Le RGPD a comme contrepartie à la fin de la plupart des formalités préalables obligatoires auprès des autorités nationales, le renforcement de la responsabilité des opérateurs et de leurs sous-traitants. Ils ont l'obligation de mettre en place des mesures de protection des données appropriées (en fonction du risque pour la vie privée des personnes) et d'être en mesure de démontrer à tout moment leur conformité au règlement ; ils doivent privilégier des techniques respectueuses de la protection des données personnelles dès l'élaboration du produit ou du service (« privacy by design »), et réduire l'usage des données au strict nécessaire en fonction de la finalité du traitement (« privacy by default »).

Dans ses observations sur le projet de loi relatif à la protection des données personnelles, la commission des affaires européennes du Sénat 177 ( * ) a estimé que : « Aucune de ces dispositions n'apparaît de nature à nuire aux droits des personnes, à entraver la circulation des données personnelles au sein du marché intérieur, dans les limites fixées par le RGPDP et la directive, ni à alourdir la compétitivité des entreprises françaises ».

En effet, les PME employant moins de 250 salariés sont dispensées de la tenue d'un registre des données qu'elles traitent dès lors que le traitement de données à caractère personnel constitue pour elles une activité auxiliaire . En outre, de manière générale, les entreprises n'ont pas l'obligation de procéder à la désignation d'un délégué à la protection des données lorsqu'elles n'effectuent pas de traitements à grande échelle ou de données sensibles . Elles n'ont pas non plus l'obligation d'effectuer une analyse d'impact pour les traitements qui ne sont pas susceptibles d'engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes physiques .

Pour mieux répondre aux fortes inquiétudes exprimées par les entreprises, dont très peu seront prêtes pour appliquer le RGPD dès le 25 mai 2018, la commission des lois du Sénat s'est attachée à réduire l'aléa financier pesant sur ces dernières, en supprimant la faculté pour la CNIL de leur imposer des amendes et astreintes administratives, en reportant de deux ans l'entrée en vigueur de l'action de groupe en réparation et en encourageant la diffusion d'informations et l'édiction de normes de droit souple par la CNIL adaptées aux besoins et aux moyens des TPE-PME.

Par ailleurs le régulateur fera preuve de « pragmatisme et de bienveillance pour les principes nouveaux du règlement, comme le droit à la portabilité ou l'obligation de mettre en place un registre, car il faut laisser aux entreprises le temps de se les approprier. Le but d'un régulateur n'est pas d'afficher un tableau de chasse de sanctions. Dans un premier temps, nous privilégierons l'accompagnement et l'explication » a indiqué Mme Isabelle Falque-Pierrotin, présidente de la Commission nationale de l'informatique et des libertés 178 ( * ) .

Selon elle, pour les entreprises, le RGPD peut avoir un effet de rattrapage : la problématique de la gestion des données, autrefois cantonnée dans les directions juridiques, remonte au comité exécutif. Cette nouvelle contrainte peut apporter un bénéfice opérationnel et le respect de la vie privée des clients et collaborateurs être même un facteur de différenciation concurrentielle .

Il n'en demeure pas moins que l'inquiétude des entreprises confrontées au RGPD est forte 179 ( * ) , principalement compte tenu de la lourdeur des sanctions encourues en cas de violation lesquels peuvent atteindre 4 % du chiffre d'affaires mondial. La présidente de la CNIL admet que « les PME sont plus démunies face à la complexité du texte » alors que les PME sont les principales victimes des cyberattaques : 77 % d'entre elles ciblent cette catégorie. La CNIL leur propose un tutoriel pour les aider à réaliser une étude d'impact et a élaboré un kit pratique réalisé en partenariat avec Bpifrance.

Cette inquiétude est d'autant plus forte que se profile un nouveau projet de règlement « e-Privacy » 180 ( * ) qui suscite de fortes inquiétudes chez les acteurs européens du numérique dont France Digitale 181 ( * ) .

Les entreprises sont inégalement préparées à la mise en oeuvre du RGPD. On distingue « les entreprises « fourmis », les bons élèves qui sont prêts ou presque. Elle comprend surtout des grands groupes, PME ou start-ups dans des secteurs très régulés comme la banque et l'assurance, qui se sont préparés dès 2016-2017. Parmi les retardataires se trouvent ce qu'il appelle les « cigales », une catégorie comprenant notamment des sociétés industrielles, des entreprises dans le "B to B", des PME étrangères exerçant en Europe qui se sentent à tort éloignées du sujet et se réveillent au dernier moment. Enfin, il y a les « caméléons », c'est-à-dire des entreprises qui sont familières avec leurs obligations RGPD, mais traînent volontairement les pieds. Réticentes à engager les coûts nécessaires à la mise en conformité, elles préfèrent attendre de voir dans quel sens tourne le vent et comptent sur une certaine tolérance des régulateurs, débordés » 182 ( * ) .

RGPD : les TPE-PME ont-elles les moyens pour se mettre en conformité ?

Demander à un dirigeant de TPE ou même à une PME de 30 salariés de nommer un Data Protection Officer (délégué à la protection des données) revient à tenter de vendre un jet privé à celui qui a les moyens de s'offrir un vélo. Le premier souci du dirigeant de TPE-PME, c'est le temps et si 27 % des entreprises déclarent "ne pas être certaines" de savoir où sont stockées toutes leurs données, on estime qu'elles devraient recevoir chaque mois 89 demandes liées au RGPD et rechercher dans 23 bases de données. À raison de cinq minutes par base de données, le temps dédié à la seule recherche de données dépasserait 172 heures par mois ! (Source étude Senzing).

Qu'il s'agisse d'une entreprise en ligne, d'un commerçant physique ou d'une société artisanale, il est possible de se mettre à jour sans douleur en suivant quelques bonnes pratiques édictées par la CNIL.

Pour commencer, l'entreprise doit évaluer l'usage qu'elle fait de la donnée en interne. Quelles données personnelles sont collectées auprès de clients, de prospects ? Dans quel but ? Combien de temps sont-elles conservées ? Quels sont les risques (pertes, fuites, etc.) ? Comment lutter contre ces risques ? De même sur le volet RH, les entreprises doivent recenser l'ensemble des traitements de données personnelles, la catégorie concernée, la finalité de leur traitement, la durée de conservation... Et au-delà, s'assurer que les acteurs qui traitent ces données respectent les nouvelles obligations légales à travers des procédures écrites claires et précises ! Rappelons au passage qu'en cas de faute, le RGPD pénalise l'ensemble des acteurs de la chaîne.

Enfin, il faut que l'entreprise obtienne le consentement des clients ou prospects avant de collecter et de traiter leurs données personnelles et mettre à jour la politique de confidentialité et être particulièrement vigilants sur l'utilisation de certaines techniques en interne comme l'achat de base de données douteuses ou le scraping (collecte automatisée de données sur la toile sans accord du propriétaire). In fine, il convient de mettre en place une charte de bonnes pratiques qui permettra de montrer sa bonne foi en cas de contrôle...

Si le chemin peut sembler simple, pour une PME qui ne dispose pas des ressources stratégiques ou opérationnelles pour le mener concrètement, il s'apparente à un chemin de croix...

Source : Les Échos, 28 mars 2018

Ainsi, M. Raphaël Gorgé témoignait-il lors du forum « entreprises en action(s) » organisé le 28 mars 2018 au ministère de l'Économie et des Finances : « mon entreprise 183 ( * ) a les mêmes contraintes que Facebook ; pourtant, je ne vends rien au grand public ».

Cette simplification liée à la disparition de formalités administratives développe paradoxalement un « business de la peur » et de la conformité, une « jungle d'experts plus ou moins autoproclamés ». La présidente de la CNIL reconnaît que « certains pratiquent un grossier marketing de la peur en accentuant les difficultés du RGPD pour vendre des prestations parfois inutiles à un prix exorbitant ».

RGPD : un exemple paradoxal du marché de la peur

de la complexité administrative

[La mise en conformité RGPD] ouvre un énorme marché , qui se chiffre en milliards d'euros à l'échelle européenne . Tout un écosystème d'acteurs - avocats, cabinets de conseil, start-ups, spécialistes historiques de la gestion des données personnelles... - se met à proposer des audits, accompagnements à la conformité, solutions logicielles et diverses prestations jusqu'à la formation des Data Protection Officers (DPO).

Personne ne sait aujourd'hui chiffrer le coût moyen de la mise en conformité d'une entreprise en fonction de sa taille et de sa maturité vis-à-vis de la gestion des données. Pour une PME/ETI, les factures s'élèvent le plus souvent entre 50 000 et 150 000 euros. Même pour une start-up ou une petite PME, il est difficile de s'en sortir pour moins de 20 000 euros, ne serait-ce que parce que l'évaluation des risques peut être longue et est souvent payée en temps-homme.

Dans ce chaos généralisé, les entreprises sont aussi confrontées à de nombreuses arnaques : des experts qui n'en sont pas vraiment ou qui gonflent volontairement la facture en exagérant le chantier à mener.

Au-delà du coût de la mise en conformité, le RGPD engendre des coûts de long terme, qui varient selon la stratégie de l'entreprise. Si le DPO - le chef d'orchestre de la gouvernance des données au quotidien, obligatoire dès que la société se situe dans le business des data - est embauché en interne, c'est plus cher que s'il est externalisé ou mutualisé avec d'autres entreprises de la même branche professionnelle. Les grands groupes et les grosses PME choisissent souvent de créer un poste en interne... à condition de dénicher la perle rare.

Source : « Protection des données : le chaotique business de la conformité RGPD ».

La Tribune.fr, 24 mars 2018

La CNIL souhaite donc transformer ses labels en certifications, en s'appuyant sur des organismes privés.

B. LEVER LES FREINS ADMINISTRATIFS À LA CROISSANCE DES ENTREPRISES

1. La simplification du droit européen
a) Un droit illisible pour les PME

En 2008, la Commission européenne s'est mobilisée pour éviter que les 23 millions de PME européennes aient à satisfaire aux mêmes exigences que les 41 000 grandes entreprises.

Ainsi, le règlement du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement contenait 521 articles, 136 considérants, 4 annexes, le tout sur 337 pages du Journal officiel de l'Union européenne. Il était complété par une directive, publiée le même jour, 2013/36/UE, concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, qui nécessitait la lecture de 99 pages du Journal officiel de l'Union européenne.

Or, « p ar son diktat, le droit européen impose désormais une césure de plus en plus nette entre un droit des petites (voire très petites) entreprises et un droit des sociétés cotées, qui s'ajoute à nos classifications traditionnelles, sans compter la multiplicité des régimes sociaux et fiscaux qui créent une complexité dont il serait grand temps de se préoccuper ». 184 ( * )

b) Un « SOS complexité » lancé par la Commission européenne

Pour réagir à une telle complexité, fut adopté le 25 juin 2008 un plan d'action, dénommé « Loi 185 ( * ) sur les petites entreprises pour l'Europe » comportant des mesures d'assouplissement en faveur des PME sur plusieurs points 186 ( * ) .

Dans cet objectif, la France avait transmis à la Commission européenne deux mémorandums, le 25 janvier 2008 puis le 13 mai 2008, dont les points clefs concernaient :

- l'accès aux marchés publics pour les PME, ainsi qu'au financement ;

- une réflexion sur la définition des PME ;

- les simplifications des réglementations et la réduction des charges administratives ;

- l'adoption de mesures permettant aux PME de mieux profiter du marché intérieur (statut de la société privée européenne, brevet communautaire et système juridictionnel des brevets, base commune d'imposition pour l'impôt sur les sociétés) ;

- la formation tout au long de la vie et de la mobilité professionnelle, notamment des apprentis (renforcement des programmes Erasmus et Leonardo) ;

- les marchés publics : centralisation au niveau européen des publications des appels d'offres inférieurs aux seuils d'application des directives de 2004, diverses mesures de simplifications par le biais notamment de l'utilisation des communications électroniques ;

- l'accompagnement des PME à l'étranger.

Par ailleurs, deux consultations publiques furent lancées, l'une sur le plan d'action « Entrepreneuriat 2020 », visant l'ensemble des entreprises, l'autre portant sur la question suivante : « Quels sont les dix actes législatifs les plus contraignants pour les PME ? ».

Dans le rapport intitulé « Alléger les charges imposées aux PME par la réglementation - Adapter la réglementation de l'UE aux besoins des micro-entreprises », la Commission annonçait la création d'un site internet afin d'établir les dix principaux actes législatifs de l'Union européenne susceptibles de créer une charge excessive pour les PME et les micro-entreprises. À la suite de ces consultations, un plan d'action intitulé « Entrepreneuriat 2020, Raviver l'esprit d'entreprise en Europe » fut publié en janvier 2012.

La question de la simplification du droit européen est désormais inscrite de façon permanente dans les agendas législatifs, européen et nationaux .

Ainsi, un rapport récent de l'Assemblée nationale sur la surtransposition des directives européennes dans le droit français 187 ( * ) souligne qu'elle produit des écarts réglementaires avec les autres États membres, lesquels aboutissent, dans de très nombreux secteurs soumis « à une concurrence européenne, à une perte de compétitivité pour les entreprises françaises, tenues de respecter des normes plus coûteuses que leurs concurrents ». L'administration ne s'est pas dotée de moyens efficaces pour les évaluer et en limiter les effets. Ainsi, des outils innovants comme les « tests PME », créés en 2012 afin de pouvoir consulter directement un échantillon de petites entreprises et d'évaluer les conséquences d'un projet de réglementation, par l'intermédiaire des DIRECCTE 188 ( * ) , n'ont pas été utilisés puisque seulement quatre tests ont été conduits depuis la création du dispositif.

Se saisissant à son tour de cette complexité, votre Délégation aux entreprises a pris l'initiative de consulter directement les entreprises, un questionnaire sur les « surtranspositions » du droit européen qui leur portent préjudice. Les résultats de cette consultation ont fait l'objet d'une communication commune devant la Délégation et la commission des affaires européennes du Sénat le 8 mars 2018 189 ( * ) .

2. La simplification du droit français de l'entreprise

« Des dizaines de milliers d'entrepreneurs recourent à la constitution d'une société de façade et pratiquent donc une fraude à la loi généralisée. La pratique du droit des sociétés ressemble à un théâtre d'ombres : sociétés sans associés, associés sans apport, administrateurs de paille, assemblées et conseils tenus sur le papier, sièges sociaux de la taille d'une boite à lettre ».

Ce constat n'est pas récent. Il a été tenu par le professeur Sayag au colloque des 10-11 février 1983 sur l'entreprise unipersonnelle, ce dernier citant un rapport d'un groupe d'étude interministériel de février 1978, présidé par M. Champaud, et dénonçant un « droit nourri d'hypocrisie et de fictions ».

Il ne se limite pas à constater les techniques utilisées avant la création de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée de la loi de 1985 pour limiter, par le recours à la société fictive, la responsabilité encourue par l'entrepreneur unipersonnel.

C'est, selon les chefs d'entreprise auditionnés par votre rapporteur, une pratique encore répandue à toutes les étapes de la vie de l'entreprise.

L'accumulation des formalités exigées a rendu le droit des sociétés formel.

Pourtant, on disait que « les affaires du commerce sont très peu susceptibles de formalités. Ce sont des actions de chaque jour, que d'autres de même nature doivent suivre chaque jour. Il faut donc qu'elles puissent être décidées chaque jour » (Montesquieu, De l'esprit des lois , 1748, Livre vingtième, Chapitre XVIII).

Aujourd'hui, la situation a radicalement changé et les entreprises sont chaque jour confrontées à la complexité administrative et normative.

Ainsi, et selon l'étude d'impact du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, les entreprises françaises doivent produire chaque année 10,7 millions de pièces justificatives demandées par l'administration, à l'occasion de 4,1 millions de démarches .

Les entreprises françaises souffrent de ces charges administratives, fiscales et sociales particulièrement lourdes, qui nuisent à leur compétitivité, ce qui contribue à maintenir le chômage à un niveau très élevé.

a) Objectif n° 9 : simplifier le droit des entreprises
(1) Alléger les formalités

Le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, actuellement en cours de discussion devant le Parlement, contient trois catégories de mesures qui vont dans le bon sens.

Au préalable, il convient de souligner que le projet de loi comporte en annexe une « Stratégie nationale d'orientation de l'action publique », dont l'approbation est demandée au Parlement par l'article 1 er , qui comporte plusieurs orientations générales allant dans le sens des préconisations de la Délégation aux entreprises du Sénat.

Cet article s'apparente à une loi de programmation 190 ( * ) . Il définit des objectifs pour l'action publique à horizon 2022, laquelle peut comporter des dispositions non normatives, telles qu'objectifs, orientation ou prévisions. L'État s'assigne de tels objectifs, qu'il s'agisse d'objectifs proprement dits ou de la définition des moyens nécessaire à leur poursuite. Ces objectifs peuvent envisager l'intervention future du législateur, du pouvoir réglementaire ou encore la simple mise en oeuvre d'une action publique.

Ainsi, l'étude d'impact présente ce texte comme la traduction d'une nouvelle culture des relations entre les administrés et les administrations fondée sur deux axes : « le développement d'une administration de conseil et de service (relation de confiance) et la recherche d'une action publique modernisée, simplifiée et plus efficace ».

On relève également dans l'exposé des motifs du projet de loi une nouvelle orientation de la politique publique davantage consciente des charges entraînées par la complexité administrative. Ainsi, pour l'article 12, est-il indiqué que « traduction d'une politique publique, les règles peuvent aussi être une contrainte pour la compétitivité des entreprises et source de complexité et d'insécurité juridique lorsqu'elles s'empilent ». Pour l'article 15, l'exposé des motifs reconnaît que « La multiplicité des acteurs au sein des services publics est, en effet, source de complexité, de perte de temps pour l'usager et d'inefficacité pour l'administration. Elle nuit à la construction du lien de confiance ». Pour l'article 16, le Gouvernement convient que : « Les contrôles des administrations peuvent peser lourdement sur les entreprises et mobiliser leurs ressources internes au détriment de leur force productive. Ceci est particulièrement vrai pour les PME ». Ces éléments dénotent une prise de conscience de la part de l'État d'une situation préjudiciable au développement économique que votre Délégation dénonce depuis sa création.

De même, l'étude d'impact reconnaît sans restriction le coût économique de la complexité administrative : « selon l'OCDE, la complexité administrative coûte chaque année 60 milliards d'euros à l'économie française » et estime possible une économie annuelle de 15 milliards d'euros qui pourrait être injectée dans l'économie au bénéfice des entreprises.

Elle se réfère également à la Commission européenne, laquelle a identifié « l'échange d'informations entre administrations dans le cadre du service public comme un axe prioritaire de simplification au service de la compétitivité de l'Union européenne. La Commission indique que cette politique d'échanges permettrait l'allègement de 25 % de la charge administrative » 191 ( * ) .

Les trois mesures favorables aux entreprises que ce texte comporte sont :

1/ le droit à l'erreur et le droit au contrôle, accompagnés d'une modulation des éventuelles pénalités en cas de bonne foi. Toutefois, les chefs d'entreprise entendus par votre rapporteur ont fait état de leur crainte de sanctions plus sévères de la part de l'administration à la deuxième erreur de bonne foi commise après l'usage de ce premier « droit à l'erreur ». Il faudra donc un profond et durable changement de culture de l'administration ;

2/ la limitation, toutefois à titre expérimental et avec de nombreuses exceptions 192 ( * ) , de la durée des contrôles administratifs à six mois sur une période de trois ans dans les PME et, sur proposition du Sénat, à trois mois dans les TPE, afin de diminuer la mobilisation des chefs d'entreprise, dont le temps consacré au contrôle distrait du temps de la gestion directe de son entreprise ;

3/ la suppression du rapport de gestion 193 ( * ) pour toutes les TPE 194 ( * ) , comme le prévoit la directive Comptable 2013/34/UE, exemption que la France n'avait pas pleinement utilisée.

Toutefois, ce projet de loi est davantage une incitation pour l'administration à s'adapter, dans le temps long (rebaptisé d'ailleurs « projet de loi renforçant l'efficacité de l'administration pour une relation de confiance avec le public », il prévoit 17 expérimentations et 12 habilitations à légiférer par ordonnance), qu'une préparation, dans l'immédiat, de nos entreprises à conduire la bataille économique avec un fardeau administratif allégé.

(2) Actualiser le Code de commerce

Suite à l'examen, par la commission des lois du Sénat, le 4 décembre 2013, du rapport sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, devenu la loi du 2 janvier 2014 après un vote conforme de l'Assemblée nationale en deuxième lecture, le rapporteur, notre collègue M. Thani Mohamed Soilihi, avait annoncé « un travail complémentaire, susceptible de donner lieu à l'élaboration d'une proposition de loi spécifique destinée à simplifier et clarifier certaines dispositions du code de commerce ».

Une proposition de loi de simplification, de clarification et d'actualisation du code de commerce était déposée le 4 août 2014, examinée et adoptée par la commission des lois le 1 er juin 2016.

Cet exercice contribue à simplifier la vie des entreprises et singulièrement des PME puisque la proposition de loi entend « supprimer des obligations obsolètes ou n'atteignant pas leur objectif, alléger des contraintes inutilement lourdes, complexes ou disproportionnées, corriger des erreurs ou des incohérences résultant de la sédimentation de textes successifs, clarifier des dispositions ambiguës posant des difficultés d'interprétation, harmoniser des rédactions disparates, renforcer la sécurité juridique, rendre plus efficaces certains mécanismes conformément à leur finalité, faciliter l'accomplissement de certaines procédures ou formalités, parfois en les dématérialisant, éviter les dispositifs trop rigides ou excessifs au profit de la liberté des parties, fluidifier les relations économiques et la vie des affaires sans remettre en cause la protection des divers intérêts en présence », par 50 dispositions 195 ( * ) qu'elle propose d'adopter.

Le Sénat a adopté cette proposition de loi en séance publique le jeudi 8 mars 2018, complétée par :

- la ratification de quatre ordonnances 196 ( * ) qui simplifient le droit des entreprises ;

- la dématérialisation des assemblées générales d'actionnaires dans les seules sociétés anonymes non cotées, en supprimant le droit d'opposition des actionnaires représentant au moins 5 % du capital ;

- la simplification des règles de rachat par une société non cotée de ses propres actions, en ménageant plus de souplesse grâce notamment à la suppression du rapport supplémentaire d'un expert indépendant, qui est apparu redondant ;

- des améliorations au régime des actions de préférence 197 ( * ) , pour rendre celles-ci plus attractives.

À cette occasion, le Gouvernement a estimé qu'il fallait « répondre » aux entrepreneurs « quand ils disent que certains obstacles juridiques sont incompréhensibles et les empêchent de développer leur activité dans de bonnes conditions ».

Pour votre Délégation, il est indispensable de mener à bien la simplification du Code de commerce initiée par la proposition de loi de simplification, de clarification et d'actualisation du code de commerce déposée le 4 août 2014 (proposition n° 11).

Plus généralement, le droit économique, que ce soit le droit des sociétés ou le droit du commerce, sans même évoquer le droit social ou fiscal, n'est pas adapté à la réalité du monde des PME et des TPE. En réalité, « le droit économique est écrit par Bercy pour des grandes entreprises, lesquelles disposent des ressources juridiques pour en appréhender toutes les subtilités » selon un entrepreneur entendu par votre rapporteur.

La norme est écrite pour des grandes entreprises et le cas échéant ensuite allégée et simplifiée pour être rendu applicable aux PME-TPE.

C'est ce paradigme qu'il faudrait inverser. Un droit économique simple, commun à toutes les entreprises, devrait pouvoir être appliqué à toute entreprise et se complexifier en fonction de la taille de l'entreprise .

b) Objectif n° 10 : créer un code des entreprises

La simplification et une modernisation du droit français des sociétés est un objectif ancien. En 2003, l'AFEP, l'ANSA 198 ( * ) et le MEDEF avaient présenté un projet commun de refonte du titre deuxième du Code de commerce sur les sociétés commerciales, qui faisait lui-même suite à un rapport du CNPF de juillet 1996 Pour une réforme en profondeur du droit des sociétés , qui intégrait également des propositions de l'AFEP et de l'ANSA.

L'entreprise n'est pas un objet de droit, au contraire de la société dont traite le code civil. Comme le résument des professeurs de l'école des Mines : « l'entreprise n'a jamais été définie en droit . Le droit l'encadre, certes, par diverses branches. Le droit social, le droit commercial, le droit de la propriété intellectuelle, le droit fiscal portent évidemment sur l'entreprise. Mais l'entreprise elle-même est restée un impensé juridique » 199 ( * ) .

Lors de la publication du nouveau code de commerce par l'ordonnance du 18 septembre 2000, qui n'a au demeurant jamais été ratifiée par le Parlement, un code des sociétés avait été évoqué mais seul un code monétaire et financier a été édicté par l'ordonnance du 14 décembre 2000. Ce dernier rejoint le droit des sociétés en ce qu'il comprend la majeure partie des textes relatifs au droit boursier. L'un et l'autre codes remplissent alternativement les rôles de "code pilote" et de "code suiveur".

Il a été choisi de codifier une partie seulement du droit des sociétés commerciales dans le code de commerce. Il n'existe donc pas à proprement parler de "Code des sociétés" puisque différents textes, qui traitent de sociétés particulières, restent en vigueur ou figurent dans un autre code (c'est le cas des sociétés civiles, régies par le code civil). Ainsi, le droit commun des sociétés est encore énoncé par le code civil.

Un code des entreprises permettrait de réunir, de manière cohérente, lisible et accessible , les dispositions qui traitent de la vie des entreprises, qu'elles aient ou non la forme de société.

Cet exercice permettrait une remise à plat du droit de l'économie dans l'objectif de l'adapter à la réalité de l'entreprise contemporaine : « s'il a offert aux opérateurs économiques une réforme globale du droit des procédures collectives (2005) et du droit des sûretés (2006), et qu'il s'emploiera bientôt peut-être à une refonte du droit des obligations, le législateur n'a pas pris la peine de repenser globalement notre droit des sociétés qui aurait pourtant bien besoin d'être remis à plat » estime une juriste avertie 200 ( * ) .

Cet exercice, d'une ampleur que votre rapporteur ne mésestime pas, donnerait l'occasion d'une réécriture de la norme applicable aux entreprises « en insérant des définitions, en créant des subdivisions logiques, en adoptant les bons intitulés, en supprimant les répétitions, les contradictions, les renvois inutiles ou au contraire, en introduisant les renvois indispensables. On pourrait, notamment, regrouper les dispositions communes à toutes les sociétés, qu'elles soient civiles ou commerciales, procéder à une distinction plus nette entre les sociétés cotées et celles qui ne le sont pas, opérer une répartition entre les dispositions ayant trait à l'organisation structurelle et celles relatives au financement, réaliser des rassemblements: par exemple, les dispositions relatives aux groupes de sociétés ; celles ayant trait aux dispositions communes applicables aux sociétés de l'économie solidaire (ce qui permettrait, enfin, de disposer d'un droit commun en la matière) » 201 ( * ) .

C'est une réforme globale et pas seulement une codification qu'il conviendrait de mener car « la matière sociétaire est trop présente dans le quotidien des acteurs de la vie des affaires pour n'être appréhendée que comme un magma de règles à revisiter au gré des revendications ponctuelles des uns ou des autres. Elle gagnerait à être repensée en profondeur et à devenir, enfin, un véritable chantier de simplification ».

Cette opération pourrait également servir de support à une refonte des termes du droit des sociétés dont certaines remontent à l'activité économique du XIXème siècle et sont obsolètes.

On trouve ainsi encore dans notre code de commerce des « entreprises de manufactures » ou des « établissements de vente à l'encan » 202 ( * ) , ou des expressions comme « nolisement » 203 ( * ) , synonyme d'affrètement, ou vente de comestibles « à cri public », qui sont manifestement obsolètes 204 ( * ) .

Nos voisins n'hésitent pas à procéder à une simplification radicale afin de rendre le droit plus compréhensible pour les praticiens. En Allemagne, 950 termes et concepts juridiques obsolètes, tant du point de vue du fond que de la forme, ont été éliminés lors de l'adoption d'une grande loi de simplification en 2009 205 ( * ) .

Cette lisibilité du droit est un enjeu encore plus crucial pour les PME, lesquelles ne disposent pas de services juridiques, contrairement aux grandes entreprises, et éprouvent en conséquence de réelles difficultés d'accès à la norme de droit.

Pourrait ainsi être créé un code des entreprises rassemblant les dispositions du code civil, du code de commerce, du code des sociétés, du code monétaire et financier relatives aux entreprises (proposition n° 12).

L'objectif de cette profonde réforme serait de marquer plus nettement la distinction entre sociétés cotées et non cotées, afin d'éviter que ces dernières ne se voient imposer, par contagion, des exigences qui ne sont justifiées que pour les premières par la protection accrue due à leurs actionnaires en raison de l'ouverture de leur capital à tous les investisseurs et de reconnaître aux sociétés non cotées une plus grande liberté statutaire dans leur direction, leur administration et la prise des décisions collectives.

Cette démarche ne serait pas exclusive de celle consistant à alléger les normes qui pèsent sur les entreprises les moins armées pour en appréhender toutes les dimensions : les PME.

Certains ont proposé qu'un critère de dimension (la prise en compte du chiffre d'affaires ou le nombre de salariés) soit introduit, aboutissant in fine à distinguer un droit des sociétés par actions cotées, un droit des grandes sociétés par action non cotées et un droit des autres sociétés par action.

Cependant, l'introduction de ces seuils, variables selon les textes ou la matière, aurait pour conséquence de rendre finalement le droit des sociétés encore plus complexe.

A tout le moins est-il nécessaire d'élaborer un statut simplifié pour les sociétés unipersonnelles comme pour les micro-entrepreneurs, ainsi qu'il a été déjà indiqué.

c) Objectif n° 11 : créer un tribunal de l'entreprise

Aujourd'hui, les entreprises relèvent de deux juridictions différentes en fonction de leur statut et de leur secteur d'activité :

- le tribunal de commerce est compétent pour les personnes ayant le statut de commerçant et les sociétés commerciales ainsi que pour les artisans 206 ( * ) ;

- le tribunal de grande instance demeure aujourd'hui compétent pour les exploitants agricoles et les professionnels libéraux, à moins qu'ils aient opté pour un statut de société commerciale, ainsi que pour les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique.

Votre rapporteur souscrit à la proposition d'extension de la compétence du tribunal de commerce à l'ensemble des entreprises , formulée dans le rapport d'information 207 ( * ) de notre collègue président de la commission des Lois du Sénat, M. Philippe Bas, en avril 2017.

Au-delà de l'incohérence dans la répartition des compétences, justement soulignée, les magistrats judiciaires ne sont pas les mieux armés pour appréhender les contraintes des entreprises. Les 3 200 juges consulaires des 134 tribunaux de commerce, bénévoles et élus, ont, pour leur part, tous pratiqué l'entreprise.

Le Sénat a donc proposé de renommer les tribunaux de commerce, « tribunaux des affaires économiques » .

Le 24 octobre 2017, le Sénat a adopté la proposition de loi d'orientation et de programmation pour le redressement de la justice qui donne compétence au seul tribunal des affaires économiques pour les mesures et procédures relatives aux difficultés des entreprises, déterminées par le livre VI du code de commerce, quelle que soit la forme juridique du débiteur , y compris toutes les associations. Le texte précise par ailleurs que, lorsqu'un litige sur un bail commercial concerne le débiteur dans une procédure collective, le tribunal saisi de la procédure collective est appelé à trancher le litige, en lieu et place du tribunal de grande instance. Les rapporteurs de la commission des Lois n'ont pas souhaité, à ce stade, aller jusqu'à transférer le contentieux des baux commerciaux au tribunal de commerce, « cette question méritant à leurs yeux une réflexion approfondie ». Cela impliquerait en effet de « rapatrier » les procédures préventives actuellement pratiquées par les Tribunaux de commerce vers cette nouvelle juridiction.

La Conférence générale des juges consulaires de France accompagne cette réforme, qu'elle a soutenue lors de son dernier congrès des 9 et 10 novembre 2017. Toutefois, la restitution des Chantiers de la justice du 15 janvier 2018 au ministère de la Justice n'aborde pas ce sujet.

Votre Délégation soutient cette démarche et propose de donner compétence au seul tribunal des affaires économiques pour traiter des mesures et procédures relatives aux difficultés des entreprises, déterminées par le livre VI du code de commerce, quelle que soit la forme juridique du débiteur (proposition n° 13).

d) Objectif n° 12 : encourager la normalisation volontaire

Processus volontaire qui la distingue des normes obligatoires, la normalisation est un processus gagnant pour les entreprises.

La normalisation joue un rôle essentiel dans la sécurisation du client d'une entreprise. Elle atteste que le bien acheté ou le service fourni ont fait l'objet de contrôles, et qu'ils sont conformes aux normes de qualité imposées. Cette certification est également un avantage pour l'entreprise, tant vis-à-vis de ses clients que de la concurrence, notamment dans le cas des appels d'offres. Ce processus évalue toutes les fonctions de l'entreprise qui interviennent dans la production du produit ou du service, en fonction d'un référentiel très strict. Le label ainsi obtenu est revu régulièrement, obligeant l'entreprise à garder une même qualité vis-à-vis de ses clients.

L'Association française de normalisation (AFNOR) est l'organisation française qui représente la France auprès de l' Organisation internationale de normalisation (ISO), qui regroupe 170 pays, et du Comité européen de normalisation (CEN).

L'AFNOR a été créée en 1926 ; elle est placée sous la tutelle du ministère chargé de l'Industrie. Elle compte environ 3 500 entreprises adhérentes et a produit 33 000 normes dont 1 % ont été rendues obligatoires. Le grand public connaît l'AFNOR car elle édite la collection des normes NF .

Pour l'entreprise, ces normes internationales volontaires (Iso 9001 pour le management de la qualité, Iso 14001 pour le management de l'environnement, Iso 45001 pour la santé et sécurité au travail) doivent la rendre plus durable, contribuer à sécuriser les conditions de travail des salariés, ou avoir des process plus rigoureux.

Quelques normes concernant l'entreprise

AC X50-184 (mars 2004) : « prise en compte des compétences dans le management de l'entreprise », qui cible les PME

NF X50-770 (octobre 2003) : « accompagnement à la création ou à la reprise d'entreprise - Activités des pépinières d'entreprises - Description des services fournis par la pépinière d'entreprises », qui définit l'activité des pépinières d'entreprises (porteur de projet pouvant entrer dans une pépinière d'entreprises, porteur de projet ayant signé un contrat avec une pépinière d'entreprises, créateur d'entreprise sous contrat avec une pépinière d'entreprises, entreprise sortie d'une pépinière d'entreprises).

XP CEN/TS 16555-1 (août 2014) « Management de l'innovation - Partie 1 : système de management de l'innovation » qui fournit des lignes directrices pour la mise en place et le maintien d'un système de management de l'innovation.

NF ISO 31000 (2010) qui fournit des principes et des lignes directrices du management des risques ainsi que les processus de mise en oeuvre au niveau stratégique et opérationnel. Elle ne vise pas à promouvoir l'uniformisation du management du risque au sein des organismes, mais plutôt à harmoniser la myriade d'approches, de standards et de méthodologies existantes en matière de management des risques.

NF EN 12973 (juin 2000) : qui définit le management par la valeur.

ISO 37001 (2016) qui définit des exigences et fournit des préconisations pour l'établissement, la mise en oeuvre, la tenue à jour, la revue et l'amélioration d'un système de management anti-corruption . Le système peut être autonome ou intégré à un système de management global

ISO/IEC 27001 (2013) qui expose les exigences relatives aux systèmes de management de la sécurité des informations (SMSI), est la norme la plus célèbre de cette famille.

Lorsqu'une entreprise atteint ces objectifs, elle peut demander un certificat, à l'issue d'une expertise indépendante, qui étudie les forces et faiblesses de l'entreprise et lui donne des conseils pour atteindre les exigences de la norme. 1,5 million de certificats ont été délivrés dans le monde, en 2015, en hausse de 3 %.

70 % des entreprises certifiées par l'AFNOR sont des PME. Le taux d'échec est d'environ 5 %, car les entrepreneurs qui s'engagent volontairement dans le processus de certification sont motivés.

Ces normes permettent aux entreprises d'être plus efficaces, de mobiliser leurs salariés, de rendre les contrats plus robustes, de mieux maîtriser des risques tels que la casse de matériel, d'éviter aux salariés de faire des burn-out...

Pour les sous-traitants, certaines certifications sont nécessaires pour obtenir des contrats auprès de grandes entreprises.

L'Iso estimait, en 2014, que les entreprises avaient comptabilisé, grâce aux normes, des répercussions positives représentant de 0,15 % à 5 % de leur chiffre d'affaires annuel .

Participer à l'élaboration des normes permet aux entreprises de ne plus subir la norme mais de la co-construire, ce qui leur donne un coup d'avance sur les partenaires et les concurrents . Ce n'est donc pas un hasard si les entreprises allemandes sont particulièrement investies dans le champ de la normalisation.

Selon une étude du BIPE 208 ( * ) , les entreprises qui s'investissent dans l'élaboration de normes volontaires et les appliquent ont connu un surcroît de croissance annuelle de leur chiffre d'affaires de 20 % (une croissance annuelle de 4 % contre 3,3 % pour l'ensemble des entreprises) car « la normalisation ouvre des marchés » et de 19 % pour l'exportation (un taux d'exportation de 18,2 % contre 15,3 % pour l'ensemble des entreprises), car « la norme est un passeport pour mieux vendre hors des frontières ».

Il faut donc encourager les entreprise françaises à s'engager dans le processus de normalisation leur permettant de co-créer des normes qui améliorent leur performances et leur procurent des avantages comparatifs par rapport à leurs concurrents (proposition n° 14).

e) Objectif n° 13 : simplifier les obligations déclaratives fiscales

Il faut mieux cibler et motiver le contrôle fiscal des entreprises.

Alors que le conseil des ministres du 28 mars 2018 vient d'adopter un nouveau projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale, qui est présenté comme le complément du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, en cours d'examen par le Parlement, votre rapporteur prend acte de la volonté du Gouvernement de « cibler et renforcer les sanctions à l'encontre des fraudeurs qui contreviennent délibérément aux principes fondamentaux d'égalité devant les charges publiques et de consentement à l'impôt ».

Cependant, et sous réserve d'une instruction complémentaire, il s'attachera à veiller à ce que les principes de la société de confiance et que la logique d'accompagnement et de conseil priment.

La Grande-Bretagne a considérablement réduit les effectifs de son administration fiscale, qui est aujourd'hui deux fois moins nombreuse qu'en France. Selon l'IFRAP 209 ( * ) en effet : « l'arbitrage fiscal pragmatique du Royaume-Uni consiste donc à déplacer le coût budgétaire de la fraude en cherchant non seulement à être compétitif sur le plan fiscal, dans un pays qui, rappelons-le, ne connaît pas encore l'abus de droit au sens français du terme (il n'y a pas en effet de General Anti-Avoidance Rule ), tout en poursuivant l'évasion fiscale et la fraude par un renforcement des moyens de recoupement et d'information ( mass Data et Data-mining ), ce qui lui permet du même coup de poursuivre réductions d'effectifs et coupes budgétaires ».

Les contrôles fiscaux aléatoires sur les entreprises devront être remplacés à terme par un ciblage utilisant les outils de la Fintech (proposition n° 16) , permettant à des algorithmes de procéder à une analyse des bilans des entreprises afin de détecter d'éventuelles fraudes. Mieux ciblé, le contrôle fiscal sera ainsi mieux accepté. Le temps ainsi gagné pourra être consacré par l'administration fiscale à des fonctions de conseil aux entreprises.

f) Objectif n° 14 : simplifier les obligations déclaratives sociales
(1) Une déclaration « unique » qui ne l'est pas

La mise en place de la déclaration sociale nominative (DSN) a été engagée avec l'entrée en vigueur de la loi du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives. Son déploiement est progressif depuis 2013.

Pour permettre son application progressive à l'ensemble des employeurs, la DSN a été mise en place en trois phases 210 ( * ) et son périmètre déclaratif s'est élargi progressivement, en incluant de nouvelles déclarations et de nouvelles entreprises cibles :

Projet majeur de simplification des déclarations à la charge des entreprises, elle vise à regrouper la plupart des déclarations sociales, à en rationaliser la production en la faisant procéder directement de la paie sur laquelle ont été précomptés les prélèvements sociaux et à réduire le nombre d'informations distinctes demandées dans ce cadre.

La DSN emporte toutefois des « effets de bord » indésirables.

La simplification est relative : « par rapport aux déclarations antérieures, la déclaration sociale nominative (DSN) intègre dans une seule et même déclaration un nombre accru de déclarations et de prélèvements » 211 ( * ) .

Mais elle s'accompagne de la disparition des allègements d'obligations déclaratives dont bénéficiaient une partie des employeurs de salariés en fonction de leur effectif ou de l'organisme de collecte, comme l'a relevé la Cour des comptes : « aujourd'hui, seuls 6 % environ des employeurs de moins de dix salariés déclarent et versent aux URSSAF et aux groupements de protection sociale selon une périodicité mensuelle. Avec la DSN, ils devront déclarer tous les mois comme les autres employeurs. Néanmoins, afin de ne pas pénaliser leur trésorerie, ils pourront opter pour le maintien d'un versement trimestriel ».

Ces nouvelles obligations vont obliger les entreprises à s'équiper ou à moderniser leurs logiciels de paie, à restructurer parallèlement leur processus de gestion de la paie et à recourir plus systématiquement à un expert-comptable, l'externalisation des déclarations fiscales et sociales décroissant avec la taille de l'entreprise. Autrement dit, la simplification à moyen terme s'accompagne à court terme d'une externalisation, indispensable pour que les PME s'approprient les allégements d'obligations déclaratives dont elles sont bénéficiaires, mais coûteuse.

Transmettre une DSN implique en effet pour l'entreprise de disposer d'un logiciel de paie en capacité de « traduire » les données figurant dans les bulletins de paie des salariés en données DSN. L'éditeur doit donc respecter le format, les contrôles et les critères qualité de la norme NEODES 212 ( * ) , qui supporte la DSN. Pour les TPE qui ne disposent pas d'un logiciel de paie, le Titre emploi service entreprise (TESE) réservé aux entreprises de moins de 20 salariés, peut être utilisé. Les fédérations professionnelles de certains métiers offrent à cette catégorie d'entreprises des produits accessibles pour 5 à 10 euros par mois et par salarié.

La DSN est en règle générale renseignée par un expert-comptable . Or, comme le remarque la Cour des comptes, « elle nécessite un important effort d'appropriation de la part des employeurs de salariés et des experts-comptables, en matière de formation et de logiciels de paie notamment ». Pour les TPE, le recours au TESE constitue une alternative, mais elle reste mal connue.

Cette déclaration devrait permettre dans un proche avenir l'extension de son périmètre à d'autres déclarations sociales collectives concernant les prélèvements sociaux comme :

- la déclaration annuelle obligatoire d'emploi des travailleurs handicapés,

- la déclaration d'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale pour les embauches dans les zones de revitalisation urbaine ou rurale,

- la déclaration de chômage partiel,

- les déclarations concourant à des enquêtes de l'Insee (activité et conditions d'emploi de la main d'oeuvre -CEMO - et coût de la main d'oeuvre et structure des salaires - ECMOS).

Par ailleurs, il serait logique que la taxe sur les salaires 213 ( * ) à laquelle sont assujetties les entreprises exonérées de la TVA pour tout ou partie de leurs activités soit incluse dans la DSN, car, comme l'indique la Cour des comptes dans son rapport de 2016 : « le maintien de deux supports déclaratifs 214 ( * ) , l'un fiscal et annuel à des fins de gestion courante de l'impôt, l'autre social et mensuel à des fins de contrôle de ce dernier, alourdira les obligations déclaratives des entreprises et des autres redevables de la taxe sur les salaires et appelle un réexamen ».

Dans cette perspective, la DSN pourrait accueillir la DAS 2.

La DAS 2 est une déclaration obligatoire à transmettre aux services fiscaux par tout professionnel (personne physique ou société) versant des honoraires, des commissions, des remises commerciales, des droits d'auteurs ou d'inventeurs de plus de 1 200 euros à des tiers. Ce document doit être actualisé chaque année, au même titre que la DADS (Déclaration Annuelle des Données Sociales).

Les entreprises individuelles et les sociétés sont tenues d'établir une DAS 2 lorsqu'elles versent à des tiers (salarié ou non de l'entreprise) des montants supérieurs à 1 200 euros par bénéficiaire et par an.

Les éléments suivants doivent être pris en considération :

-    les commissions,

-    les honoraires,

-    les courtages,

-    les vacations,

-    les gratifications,

-    les ristournes à destination des clients,

-    les sommes versées à des organismes de formation ,

-    les avantages en nature ,

-    les sommes versées à des intermédiaires en publicité,

-    les droits d'auteur .

Les sommes peuvent être versées, par exemple, à un professionnel libéral (expert-comptable, avocat...), à un expert ou à tout autre type de prestataire. Le bénéficiaire peut être domicilié en France ou dans un autre pays.

La DAS 2 peut être remplie en ligne sur le site impôt.gouv.fr ou via un formulaire (cerfa n°12303*12).

Les entreprises ayant plus de 200 bénéficiaires par an sont tenues d'utiliser un procédé informatique, à défaut de quoi elles s'exposent à des sanctions.

Comme l'a proposé la Cour des comptes en 2016, et au titre des efforts supplémentaires de réduction du nombre d'informations demandées aux entreprises, la DAS 2 devrait être elle aussi intégrée dans la DSN afin d'alléger les charges déclaratives (proposition n° 17) .

(2) Supprimer l'assujettissement des dividendes et stock-options à cotisations sociales perçus par les dirigeants en complément d'une rémunération minimale

Le souci de combattre certains abus (dividendes utilisés comme forme de rémunération permettant d'éviter le paiement de cotisations sociales) ne doit pas aboutir à ce que soient lourdement taxés les dividendes perçus par les chefs d'entreprise s'acquittant normalement de leurs cotisations sociales.

Pour assurer un traitement équitable quel que soit le statut social du dirigeant, simplifier la gestion du dispositif et éviter les abus, l'assujettissement des dividendes et stock-options à cotisations sociales ne devrait se déclencher que si le dirigeant ne perçoit pas aussi de sa société une rémunération au moins égale au plafond annuel de la sécurité sociale (proposition n° 18).

Ainsi, ne devrait être soumise aux charges sociales que la distribution des dividendes au bénéfice d'un dirigeant, qu'il soit assimilé salarié ou indépendant, n'ayant pas déclaré (et donc cotisé) un revenu professionnel au moins égal au montant du plafond annuel de Sécurité Sociale (39 732 euros en 2018). Lorsque la rémunération est inférieure au plafond annuel de la Sécurité sociale, les dividendes perçus sont assujettis à cotisations sociales obligatoires, pour la différence comprise entre le plafond annuel de la Sécurité Sociale et le montant de la rémunération.

Cette proposition de simplification mettrait fin aux discriminations selon les catégories d'entrepreneurs, aux calculs sur la franchise de 10 %, et donnerait de la stabilisation et de la visibilité.

g) Objectif n° 15 : relever le seuil imposant la certification des comptes des PME pour l'aligner sur le niveau européen

Aujourd'hui, en France, l'obligation de nommer un commissaire aux comptes dépend de la taille de l'entreprise et de sa nature juridique.

Si les sociétés anonymes y sont contraintes dès leur constitution, les SARL le sont à partir de certains seuils : un chiffre d'affaires supérieur à 3,1 millions, un total de bilan de plus de 1,5 million et plus de 50 salariés. Pour les SAS, le seuil est de 2 millions.

Le niveau de ces seuils est expliqué par la nature du tissu économique français, essentiellement composé de petites entreprises. En Allemagne, les seuils sont supérieurs, car il y a beaucoup moins de petites entreprises.

Par ailleurs, l'audit légal ne s'arrête pas à la certification des comptes mais comprend également des missions d'intérêt général, à travers l'alerte -quand l'entreprise est en difficulté-, ou la révélation de faits délictueux au procureur.

Or, la directive européenne n°2013/34/UE du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels et consolidés 215 ( * ) impose une certification des comptes aux entreprises à partir d'un seuil beaucoup plus élevé, à 8 millions d'euros.

Il s'agit là d'un cas manifeste de surtransposition .

À la demande du ministre de l'Économie, une mission de l'Inspection générale des Finances a chiffré à 5 500 euros le coût moyen de l'audit légal, ce qui constitue une charge non négligeable pour une PME. Ce rapport a constaté que « l'effet de la certification des comptes sur la qualité de ces derniers, mesuré au moyen du taux de redressement et du taux de contrôles fiscaux effectués sans redressement est non significatif pour les petites entreprises situées au voisinage des seuils de l'audit légal » 216 ( * ) . Le taux de défaillance des petites entreprises ayant certifié leurs comptes ne diffère pas de celles dont les comptes n'ont pas été audités.

Le rapport recommande donc l'alignement de la France sur les seuils européens, ce que votre Délégation approuve (proposition n° 19), à l'issue d'une période de « lissage » de six ans, ce qui conduirait pour la profession des commissaires aux comptes à une perte de 25 % de son chiffre d'affaires global (les mandats des petites sociétés représentant 620 millions de CA sur un total de 2,5 milliards). L'obligation serait relevée mais rien n'interdira aux petites sociétés d'y recourir de manière volontaire.

Les PME y gagneraient une bouffée d'oxygène non négligeable et votre rapporteur approuve cette orientation.

h) Objectif n° 16 : geler le seuil social de 50 salariés puis le relever au niveau européen

La France est un pays de seuils.

Pour les entreprises, grandir et croître en chiffres d'affaires et/ou en effectifs conduit à se confronter à une complexité croissante : un système de dialogue social de plus en plus sophistiqué, des informations extra-financières de plus en plus diverses, des mécanismes de prévention de la corruption de plus en plus détaillés.

(1) Les seuils, un obstacle à la croissance des entreprises

La France compte aujourd'hui « 2,4 fois plus d'entreprises de 49 que de 51 salariés. Ce n'est pas un hasard. En effet, nous avons estimé que le franchissement du seuil de 50 salariés déclenche 35 obligations administratives et financières supplémentaires » 217 ( * ) .

Au fil des années, l'enrichissement du cadre législatif a fait apparaître des effets de seuil , incitant les employeurs à limiter la croissance de leur entreprise ou à contourner la réglementation, en créant par exemple des structures indépendantes, pour ne pas dépasser 1 (aujourd'hui) , 20 ou 50 salariés.

Le rapport Attali l'avait constaté dès 2008 : « le passage de 49 à 50 salariés entraîne actuellement l'application de 34 législations et réglementations supplémentaires dont le coût représente 4 % de la masse salariale ».

Ainsi, selon l'Insee, « en l'absence de discontinuités dans la législation, la probabilité qu'une entreprise de neuf salariés franchisse dans l'année le seuil de dix salariés passerait de 24,5 % à 29,4 % (+ 5 points). Pour les entreprises de 19 et 49 salariés, les probabilités de franchir les seuils de 20 et 50 salariés seraient supérieures, respectivement, de 9 et 14 points » 218 ( * ) .

Mieux, l'étude commandée en 2015 par votre Délégation sénatoriale aux entreprises à l'institut de recherche économique allemand (IFO) 219 ( * ) , a établi que ces seuils constituaient une barrière à la croissance de l'emploi : il y a 1,8 fois plus d'entreprises de 48 et 49 salariés en France qu'en Allemagne .

Ainsi que le souligne cette étude, « le passage au-dessus du seuil de 50 employés semble donc très clairement imposer des coûts additionnels aux entreprises françaises, ceci créant une distorsion de la distribution par taille des entreprises » et la probabilité de croissance de l'emploi diminue à mesure que les entreprises approchent ce niveau d'effectif.

Le tableau ci-après, tiré de l'étude précitée, est assez éloquent et fait clairement apparaître que le nombre d'entreprises chute abruptement aux seuils de 10, 20 et 50 employés :

Distribution des entreprises par le nombre total d'employés France (2013)

et Allemagne (2010)

Régulièrement dénoncée par les chefs d'entreprise et constatée, sur le terrain, par votre Délégation sénatoriale aux entreprises, l'existence de ces effets de seuil est un obstacle au développement de l'activité .

Ces seuils constituent un frein non seulement économique mais surtout psychologique au développement de l'emploi et à la reprise économique. Ils en sont venus à symboliser, aux yeux de trop nombreux chefs d'entreprise, les rigidités excessives du droit du travail et les entraves qu'il impose à l'activité.

Le paradoxe est que cette question pourtant centrale reste peu suivie par l'INSEE 220 ( * ) et il faut se référer à une étude de l'American Economic Review 221 ( * ) de 2016 pour trouver une documentation récente sur ce sujet . Cette étude constate « qu'il y a une forte chute de la distribution à partir d'une taille d'entreprise de 50 salariés » et que par ailleurs, le franchissement de celle-ci, par les pertes de recettes qu'il induit (coûts normatifs et fiscaux), « pourrait engendrer des ajustements de coûts ayant un impact non négligeable en termes de bien être total ».

(2) Le gel des seuils

Le gel des seuils a été évoqué dans le cadre de la préparation du PACTE.

Le Gouvernement propose de reprendre la même méthode que celle envisagée à plusieurs reprises depuis 2015 :

- lors de la discussion de la loi Macron 222 ( * ) , la commission spéciale du Sénat avait proposé une période de trois ans , à compter du franchissement d'un seuil, durant laquelle les entreprises en croissance seraient exonérées de l'application des obligations auxquelles le droit commun les soumet en matière de représentation et de consultation du personnel 223 ( * ) . Il s'agissait évidemment d'une période transitoire, durant laquelle les entreprises auraient évidemment été libres de mettre en place des institutions représentatives du personnel si elles le souhaitaient ;

- lors de la discussion de la loi Rebsamen 224 ( * ) , la rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat avait proposé une démarche expérimentale analogue 225 ( * ) : pendant cinq ans à compter de la promulgation du projet de loi, les entreprises franchissant les seuils de onze ou cinquante salariés dans les conditions de droit commun bénéficieraient d'un délai de trois ans pour se mettre en conformité avec l'ensemble de leurs obligations en matière de représentation du personnel. Le Gouvernement aurait été chargé de l'évaluation de cette mesure et devait remettre au Parlement, trois mois avant son expiration, un rapport sur l'opportunité de la pérenniser.

Par ailleurs, ce mécanisme du lissage de seuil a été proposé par la CCI de Paris dès 2008 226 ( * ) . Il est déjà pratiqué pour ce qui concerne la participation à la formation professionnelle continue , qui passe de 0,55 à 1 % de la masse salariale à partir de 11 salariés 227 ( * ) , ou pour le versement transport 228 ( * ) . Il est également utilisé pour la constitution du comité économique et social créé par l'ordonnance n° 2007-1386 du 22 septembre 2017. Le CES ne doit être institué que si l'entreprise compte au moins onze salariés pendant douze mois consécutifs, ce qui a pour conséquence de lisser dans le temps l'effet du franchissement de ce seuil pour les petites entreprises et de leur permettre de se concentrer sur le développement immédiat de leur activité avant d'avoir à se doter d'outils de formalisation du dialogue social interne.

La 11 ème proposition soumise à consultation publique par le ministre de l'Economie le 15 janvier 2018 s'inscrit dans cette démarche en proposant de « donner des délais aux entreprises » pour mettre en oeuvre les seuils sociaux et fiscaux en généralisant « un dispositif de gel des obligations en cas de franchissement d'un seuil d'effectif pendant trois ans » mais « hors code du travail », ce qui restreint la proposition et la vide de sa substance en excluant toutes les obligations des employeurs à l'égard de la représentation des salariés.

(3) Un gel de 5 ans et la perspective de l'alignement des seuils sur les normes européennes

La création d'une nouvelle institution représentative du personnel, en lieu et place des structures existantes, réalisée par les ordonnances du 22 septembre 2017, n'est donc qu'un premier pas qu'il convient d'amplifier.

Cette amplification est souhaitée par les autorités européennes qui se sont également emparées de l'impact négatif sur l'emploi des effets de seuils, comme en témoigne la recommandation du 22 mai 2017 adressée par le Conseil européen à la France dans le cadre de son programme national de réforme :

COM(2017) 509 final du 22 mai 2017

Recommandation du Conseil

concernant le programme national de réforme de la France pour 2017 et

portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2017

Dans le cadre de son programme de simplification, la France a pris des mesures afin de réduire les lourdeurs administratives auxquelles sont confrontées les entreprises, mais un grand nombre de mesures adoptées avant 2016 n'ont pas encore été mises en oeuvre. Dans le même temps, des effets de seuil continuent de limiter le développement des entreprises , ce qui a des implications pour leurs performances économiques et de marché. Les obligations sociales et fiscales accrues qui leur incomberaient au-delà d'un certain nombre de salariés peuvent dissuader les entreprises d'atteindre une taille qui leur permettrait d'exporter et d'innover. Ces effets de seuil peuvent alors avoir un effet négatif sur la productivité, la compétitivité et l'internationalisation des entreprises.

En effet, d'après des données empiriques, les seuils de 10 et de 50 salariés sont particulièrement coûteux pour les employeurs, tandis que l'économie française se caractérise par une proportion particulièrement faible d'entreprises au-dessus de ces seuils, ce qui suggère un lien entre ces deux phénomènes.

En droit européen, la recommandation 2003/361/ CE définit les PME comme les entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros. Cette définition a été reprise par l'article 3 du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique.

Votre Délégation préconise dont de geler pendant 5 ans le seuil de 50 salariés dans la perspective de son alignement sur un seuil européen de 250 salariés, à créer, et de l'alignement des seuils de 11 et 20 salariés sur le seuil européen de 50 salariés (proposition n° 20).

C. FACILITER LE FINANCEMENT DES PME

1. Franchir la « vallée de la mort »
a) La « vallée de la mort » dans le cycle de croissance de l'entreprise

Cette expression désigne une phase critique de la croissance de l'entreprise.

Les étapes de la croissance de l'entreprise

Étape 1. Incubation . Au premier stade du développement, lorsque l'entreprise n'existe pas encore et que son modèle d'affaire n'est pas établi, le financement repose essentiellement sur le love money (FFF pour Family, Friends and Fools), les aides publiques (concours, prêts d'honneur) ou encore l'aide apportée par les incubateurs ou les accélérateurs.

Étape 2. Amorçage . Il s'agit du premier apport en capital de l'entreprise. Les fonds peuvent provenir de business angels , de la puissance publique (aides), de mécanismes d'appel à l'épargne privé de type crowdfunding ou de fonds spécialisés (fonds d'amorçage).

Étape 3. Démarrage . C'est généralement à ce stade qu'intervient le capital-risque au sens strict, essentiellement au travers de l'activité de fonds spécialisés mais également via des aides publiques ici encore.

Étape 4. Croissance. Durant la phase de croissance interviennent aussi les fonds de capital-croissance, qui permettent à l'entreprise d'étendre son volume d'activité et de s'attaquer à de nouveaux marchés.

Étape 5. Sortie. La dernière étape éventuelle est celle de la sortie : revente de l'entreprise (le plus souvent à de grandes entreprises désireuses de s'approprier les actifs, les idées et/ou les technologies développées) ou introduction en Bourse.

Source : note du CAE n° 33, juillet 2016

Malgré le renforcement de l'écosystème de financement des start-ups, la « vallée de la mort », période délicate où les jeunes pousses entre 1 et 3 ans meurent par manque d'accès au financement, n'a pas disparu en France. Le schéma de croissance de l'entreprise est le suivant :

Source : Renforcer le capital-risque français, note n° 33 CAE

Il est toujours difficile pour les entreprises, après un et trois ans, voire cinq ans, de traverser le passage délicat où elles ne dégagent toujours pas de bénéfice alors qu'elles ont besoin de cash supplémentaire pour financer leur croissance, dénicher de nouveaux marchés (notamment à l'international) et se faire connaître du public.

À leur création, les jeunes entreprises connaissent une première année florissante, épaulées par un système français solide favorisant le financement des jeunes entrepreneurs. Mais dès le début de leur deuxième année et jusqu'à leur troisième anniversaire environ, elles font face à de sérieuses carences en termes de financement disponible.

La mortalité des start-ups culmine autour du deuxième anniversaire 229 ( * ) , c'est-à-dire au moment où les entrepreneurs arrivent au bout de leurs fonds propres, alors même que la création de valeur de leur start-up est toujours faible.

Le risque de succomber dans cette vallée de la mort est d'autant plus important pour les start-ups qui évoluent dans des domaines où la phase de R&D est très longue, comme dans les biotechnologies, où qui s'adressent à un marché BtoC, où la rentabilité est difficile à atteindre.

S'il est difficile d'imputer la mortalité des start-ups uniquement à un problème de financement (au total, neuf sur dix finissent par mettre la clé sous la porte) et s'il se produit aussi un phénomène de « sélection naturelle », il manque toujours des investisseurs capables de financer des tours de table supérieurs à 20 millions d'euros , qui restent rares en France.

Mais l'intérêt croissant des fonds européens et internationaux pour la France (le nombre de levées de fonds impliquant des fonds étrangers a plus que doublé sur les cinq dernières années) et l e développement spectaculaire du « corporate venture » , c'est-à-dire le financement par les grands groupes 230 ( * ) , offre d'autres perspectives aux entrepreneurs en quête de financement.

b) La faiblesse de l'écosystème pour l'amorçage et le démarrage

L'étude du Conseil d'analyse économique consacrée au capital-risque en juillet 2016 a souligné que la France « exportait » son capital-risque : les fonds excèdent légèrement les investissements. Inversement, le manque d'attractivité pouvait se mesurer par la faiblesse des investissements provenant de l'étranger (850 millions en 2014), ne représentant que 9,4 % du montant total investi, contre 37,1 % en Allemagne.

Paris n'occupait en 2015 231 ( * ) que la 11 ème place mondiale des écosystèmes d'innovation derrières Londres (6 ème ) ou Berlin (9 ème ).

Sur les 226 licornes 232 ( * ) mondiales en 2018, seules trois sont françaises, valorisées au total à 2,7 milliards de dollars, autant qu'en Suède (mais elles sont valorisées à 11 milliards de dollars) et qu'en Allemagne (10,8 milliards de dollars), mais 6 en Suède (26 milliards) et 13 en Grande-Bretagne (25 milliards).

Certes, le capital-risque est en forte croissance. En 2015, avec 1,81 milliard d'euros, il doublait par rapport à 2014. Mais le capital-risque français réalise de plus petites opérations.

Pour le secteur des entreprises innovantes, ou start-up, une étude 233 ( * ) a dénombré 506 levées de fonds en 2017, une baisse de 10 %par rapport à 2016 (566) mais un montant global progressant légèrement de 2,5 à 2,6 milliards (2016/2017).

Plusieurs modes de financement dépendent du moment de la croissance de l'entreprise.

(1) L'incubation par les « copains, cousins et cinglés »

L'incubation est le début du développement d'une start-up et son financement se fait essentiellement à travers la love money , appelé également 3F « friends, family and fools » ou en français 3C : « copains, cousins et cinglés ».

Pour le créateur d'entreprise, la love money peut être plus facile à obtenir qu'un prêt accordé par une collectivité régionale ou par un établissement bancaire. Elle permet d'ouvrir son capital à des personnes connues avec des modalités généralement plus souples et de tester l'attractivité du projet. Elle peut amorcer d'autres types de financements (prêts bancaires classiques, crowdfunding ) grâce au gain de crédibilité qu'elle permet.

La love money présente pour ceux qui y participent deux avantages principaux : la possibilité de soutenir un proche dans la réalisation de son projet, et, sous conditions, une réduction d'impôt à hauteur d'une partie des sommes versées.

La love money est toutefois davantage indiquée pour les créations d'entreprises dont le besoin de fonds reste limité sauf à multiplier les financeurs. C'est un placement moins rentable et plus risqué pour l'épargnant, notamment en cas d'insuccès de l'entreprise, susceptible d'affecter les relations personnelles entre le créateur et l'investisseur en cas de difficultés dans l'activité financée ou dans le remboursement.

(2) L'amorçage par le crowdfunding

Le crowdfunding désigne un financement participatif. Il permet à des particuliers de participer à l'élaboration, en termes économiques et financiers, d'un projet.

Cette pratique se fait essentiellement par le biais d'internet et a connu un essor grâce aux réseaux sociaux. Ainsi, ce mode de financement s'inscrit dans un processus de désintermédiation et la contribution peut se faire par des particuliers ou des entreprises, quel que soit le domaine d'activité, sans passer par les banques.

Les différentes formes de financement participatif

Le don. C'est une forme de participation sans attente ni contrepartie, qui se fait par une personne physique ou une personne morale (association, entreprise). Le don est alors désintéressé, même s'il existe une pratique de contre-don, tout à fait symbolique.

La récompense, aussi appelée don avec contrepartie. La personne physique ou morale va ainsi participer à la hauteur de son choix, mais recevra quelque chose en retour. Cette « récompense » ou « contrepartie » est une forme de troc, qui peut se manifester matériellement (offre de cadeaux, d'objets promotionnels) ou de façon plus symbolique (en nature, en temps accordé, en publicité).

Le prêt ou crowdlending (plateformes de prêts). L'emprunteur s'adresse, par le biais d'une plateforme web, à une multitude de prêteurs qui vont participer à hauteur de leurs moyens. La somme se doit d'être remboursée dans des temps impartis, avec ou sans intérêts (selon la plateforme et les accords prédéfinis).

L'investissement en capital ou equity crowdfunding . C'est une forme de crowdfunding où les particuliers participant à l'effort collectif deviennent actionnaires du projet (souvent, il s'agit de monter une entreprise). Ces capitaux sont détenus par ces « petits actionnaires », leur donnant un droit de regard, un droit de vote mais également un droit à une partie des bénéfices futurs.

La production communautaire . C'est lorsque les investisseurs sont aussi coproducteurs. À ce titre, ils vont percevoir des royalties sur les ventes à venir (parfois, cela peut être plus symbolique et ne consister qu'en des invitations ou cadeaux promotionnels). Mais dans tous les cas, il y a contrepartie.

Le microcrédit ou microcrédit solidaire . Il est souvent utile dans le cadre de microprojets : les internautes donnent de petites sommes afin de favoriser l'essor de l'activité concernée.

Source : Crowdlending.fr, décembre 2014

En France, cette activité est soumise à la réglementation bancaire et financière par l'ordonnance n°2014-559 du 30 mai 2014 relative au financement participatif, entrée en vigueur le 1 er octobre 2014.

Les plateformes de dons sont soumises, depuis le 1 er mars 2017, à l'obligation d'être immatriculées au registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance géré par l'ORIAS 234 ( * ) en tant qu'intermédiaire en financement participatif (IFP).

Par ailleurs, la Commission européenne a présenté le 8 mars 2018 une proposition législative visant à aider les plateformes de financement participatif à se développer dans le marché unique de l'UE.

La réglementation du financement participatif

Les transactions se font, la plupart du temps, auprès d'organismes agréés, qui reçoivent des fonds sur un compte ouvert spécifiquement pour l'appel au projet, qu'un teneur de compte se charge de tenir, ce que l'on appelle des « services de paiement ». La réglementation variera ensuite en fonction de la forme de transaction concernée.

Si la plateforme fournit elle-même les services de paiement (compte dédié et teneur de compte), ou si elle délègue ce service de paiement à un prestataire tiers, elle doit être agréée auprès de l' Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution . Dans le cas où la plateforme ne serait qu'un simple lieu de mise en relation des particuliers et non un lieu d'encaissement des fonds, elle n'est pas soumise à cette législation de l'intermédiaire financier.

Si la plateforme consent des prêts rémunérés ou non mais par le biais d'une multitude de particuliers prêteurs, elle devra alors être inscrite sur les registres de l' ORIAS (Organisme pour le Registre des Intermédiaires en Assurance) . En effet, la plateforme n'aura alors pas le statut d'établissement de crédit, mais celui d'intermédiaire en financement participatif (IFP ) . La plateforme pourra alors consentir un prêt d'un montant maximum d'un million d'euros et les prêteurs pourront investir au maximum 2 000 euros par projet pour les prêts rémunérés et 5 000 euros pour les prêts sans intérêts.

Si la plateforme consent des minibons ou des obligations, elle devra obtenir le statut de Conseiller en Investissement Participatif (CIP ) auprès de  l'AMF. Elle pourra alors consentir des prêts jusqu'à 2,5 millions d'euros et les épargnants n'auront pas de limite d'investissement.

Enfin, les plateformes ont l'obligation de souscrire un contrat d'assurance de responsabilité civile professionnelle depuis le 1 er juillet 2016.

La législation sera différente selon l'activité exercée par la plateforme de financement collaboratif. Trois statuts juridiques sont possibles :

- l'agrément de prestataire de service d'investissement (PSI) sera délivré si la plateforme est à la recherche de souscripteurs pour son compte dédié aux fonds du projet. L'agrément ne pourra s'obtenir que par le biais, encore une fois, de l'ACPR après accord de l' AMF (Autorité des Marchés Financiers) .

- lorsque la plateforme fournit des conseils d'ordre financiers (CIF), des opinions, elle doit être enregistrée sur les registres de l'ORIAS. La plateforme peut également opter pour le statut CIP. Elle sera alors limitée à des opérations de 2,5 millions d'euros maximum ;

- enfin, lorsqu'elle récolte seulement des fonds auprès d'un large public, elle est soumise au formalisme de « l'offre au public » (en lien avec l'AMF). Pour éviter cela, il est possible de qualifier l'opération d'investissement de « placement privé », seulement dans le cas où moins de 150 personnes participent à cet investissement.

Source : AMF

Le financement participatif permet de financer un projet en se passant des banques et dans des délais relativement courts pour les petits projets, mais également de réaliser indirectement une étude de marché. En effet les donateurs ou prêteurs peuvent donner leur opinion sur le projet. Si la campagne de « levée de fonds » échoue, il conviendra de déterminer pourquoi et d'en tirer les leçons. Si elle réussit, les participants deviendront de véritables ambassadeurs du projet de l'entreprise.

Faire appel à une plateforme de crowdfunding a cependant un coût non négligeable : des commissions pouvant atteindre 4 à 12 % du financement obtenu sont généralement prélevées.

Deux principales différences distinguent les crowdfundeurs des business angels :

- les apports des premiers sont bien moins importants au capital des start-ups. Ils sont par conséquent bien plus nombreux à entrer au capital de l'entreprise ;

- surtout, ils investissent à travers une plateforme et ne rencontrent que rarement les entrepreneurs, à la différence des business angels dont l'accompagnement est toujours présent.

Le ministre de l'Économie et des finances a annoncé le 28 mars 2018 qu'il allait « engager une réflexion sur les possibilités de rehaussement des seuils de financement participatif autorisés par projet », à savoir leur doublement , de 2,5 millions actuellement à 5 millions. Rien ne semble devoir s'opposer à cette mesure que votre rapporteur encourage vivement de prendre.

(3) La post-création par les business angels

Les business angels sont des personnes physiques qui investissent une part de leur patrimoine personnel au capital de start-ups innovantes et qui les accompagnent sur la durée :

Ø des personnes physiques et non des fonds d'investissement . Ils investissent en tant que personnes physiques, et chaque business angels est actionnaire en son nom propre de la société investie. A l'inverse, les fonds sont des véhicules d'investissement qui regroupent tous les actionnaires au sein de l'entreprise investie ;

Ø des personnes physiques qui investissent une part de leur patrimoine personnel au capital d'entreprises : les business angels prennent une part de l'entreprise dans laquelle ils investissent. En échange d'une somme d'argent  injectée au capital, ils obtiennent des actions et détiennent ainsi une partie de l'entreprise. Ils ont vocation à détenir une part toujours minoritaire de l'entreprise afin que l'entrepreneur reste le premier décisionnaire. Ces parts leur confèrent un droit de regard sur l'activité de l'entreprise, notamment dans sa ligne stratégique. En tant qu'actionnaires, ils ont une place au Conseil d'Administration et/ou au comité stratégique ;

Ø un financement des start-ups innovantes - tous types d'innovation - non cotées en bourse et scalables 235 ( * ) . Les business angels investissent à un stade précis de la vie de l'entreprise, lors de la phase de post-création.

La levée de fonds en amorçage ou en seed 236 ( * ) est la première levée d'importance pour l'entreprise. Cette levée est parfois précédée d'autres en pré-seed qui rassemblent le capital des fondateurs, de la famille ou des amis (la « love money ») et des levées en crowdfunding .

La levée en seed intervient au moment où l'entrepreneur présente un projet économiquement viable. Elle a pour objectif de financer la validation d'un marché à plus grande échelle. Les montants levés vont de 100 000 à 1 million d'euros.

Ce moment de la naissance de l'entreprise est critique. Pour France Angels : « un financement doit être apporté pour prendre l'avantage sur ses concurrents et pour passer le cap de la « vallée de la mort », ce moment où l'entreprise a plus que jamais besoin d'argent pour financer sa croissance, mais où son business model ne lui permet pas de dégager des bénéfices. A ce stade de sa vie, la start-up a absolument besoin d'investisseurs pour survivre. Mais le business model , en raison de son caractère innovant, n'a pas encore fait ses preuves sur son marché. Les fonds d'investissements sont donc très réticents à investir dans des entreprises si jeunes, qui ont pourtant besoin de cet argent pour passer de l'état de projet à celui de PME. Les Business angels sont prêts à prendre ce risque, et cela les rend indispensables à la chaîne de financement ».

Au-delà de l'apport financier, le business angels met à disposition de l'entrepreneur ses compétences, ses contacts et son expérience. Puisqu'il est présent dans les organes de gouvernance, il est amené à entrer en contact régulièrement avec l'entrepreneur et à l'aider dans ses prises de décisions stratégiques par des conseils, des mises en relation ou autre. En aucun cas il ne s'agit pour les business angels d'interférer dans la gestion quotidienne de l'entreprise, mais plutôt d'apporter leur aide pour éviter des erreurs classiques en matière de création d'entreprise.

Ainsi, les business angels sont indispensables pour la phase d'amorçage des entreprises, en assurant la continuité entre la période d'apports de financements par l'équipe entrepreneuriale et un éventuel financement par du capital-risque.

Toutefois leur poids économique ne représentait en 2013 que 1,7 % du PIB français contre 2 % en Allemagne, 4,4 % en Grande-Bretagne et 4,6 % en Suède.

Il n'existe que 4 500 business angels en France, ayant investi 43 milliards en 2016, contre 20 000 en Grande-Bretagne, ayant investi 300 milliards, presque sept fois plus !

Non seulement les business angels sont moins nombreux en France mais ils apportent de faibles montants aux projets qu'ils soutiennent, comparativement à leurs homologues étrangers.

c) La double difficulté du chef d'entreprise

Le chef d'entreprise doit trouver comment financer son projet entrepreneurial. Il doit par ailleurs réaliser un arbitrage entre la croissance et la rentabilité de son entreprise.

(1) Une connaissance inégale des nouvelles sources de financement

Les nouvelles sources alternatives de financement (fonds de dettes, placement privé, financement participatif, prêt interentreprises...) sont maîtrisées de manière inégale par les chefs d'entreprise.

Comme l'a relevé le Médiateur du crédit dans son rapport de mars 2017 pour l'activité de l'année 2016 : « Pour que ces sources représentent effectivement une alternative, il faudra que les dirigeants s'approprient mieux leurs modalités d'utilisation et leurs possibilités de combinaison avec un socle de financement bancaire. La Médiation du crédit a un rôle à jouer dans les efforts d'information à mener au niveau des chefs d'entreprise ».

Pourtant, un chef d'entreprise innovante a témoigné avoir réalisé en 18 ans 27 levées de fonds en utilisant toutes les facultés proposées : « d'abord Pôle emploi, des fonds personnels, la love money, des business angels -soit des entrepreneurs soit des investisseurs pour optimiser l'ISF-, des FCPI 237 ( * ) , des FCPR 238 ( * ) , des FIP 239 ( * ) , du venture capital pour développer la croissance internationale de l'entreprise, le programme Ambition numérique de la BPI, le programme Large Venture de la BPI, de l'ISF-PME, du PIA 240 ( * ) , du Fonds unique interministériel 241 ( * ) des pôles de compétitivité, des fonds FEDER, des fonds européens du programme H2020 242 ( * ) , une IPO 243 ( * ) , le recours au fonds de gestion PME-PEA, de l'assurance-vie, du financement secondaire.... ». Significativement, dans ce parcours, cet entrepreneur n'a pas mentionné les banques.

(2) Le dilemme de la croissance ou de la rentabilité

La trajectoire de croissance d'une entreprise et son rythme de création d'emploi est le reflet davantage de son âge que de sa taille. Il diffère selon sa position dans le cycle de vie.

L'objectif premier d'une entreprise nouvellement créée est de survivre puis d'exister : soit par la conquête du marché (satisfaire la demande nouvellement acquise ou captée par un avantage compétitif), soit par la sécurisation de son avantage compétitif.

Les jeunes entreprises croissent plus rapidement que leurs aînées quelle que soit leur taille, et l'âge est un facteur déterminant du rythme de croissance en taille des entreprises. Toutes choses égales par ailleurs, une TPE âgée va croître moins fortement qu'une jeune TPE mais cet effet diminue à mesure que les niveaux de 10, 50 et 250 salariés sont franchis.

Pour croître en taille, il faut renoncer, au moins à court terme, à la rentabilité.

Le modèle empirique développé par l'Observatoire de la BPCE le confirme : « la croissance en effectifs impacte négativement la croissance de l'EBITDA 244 ( * ) sur le segment des TPE et des PME. Autrement dit, la croissance du chiffre d'affaires d'une entreprise sert à nourrir une trajectoire de croissance qui portera soit sur les effectifs, soit sur le capital. L'impact de l'âge dans ce choix de trajectoire est déterminant. Les jeunes entreprises choisissent de croître d'abord en effectifs, une question de survie d'abord, puis de coût. Par la suite, la croissance en effectifs laisse place à la croissance en EBITDA. En effet, une fois les entreprises plus âgées, elles sont de plus en plus nombreuses à préférer la croissance des actifs et de leur EBITDA à une croissance en effectifs. Une fois que la taille objectivée est atteinte, le rythme de croissance des emplois peut ralentir et le choix d'affectation de la valeur ajoutée se porte alors davantage vers la productivité du capital.

L'approche par le cycle de vie des entreprises fait donc apparaître deux segments de tailles sensibles pour les PME : le seuil de 50 et celui de 250 salariés. En effet, les moyennes entreprises subissent une double contrainte. Une fois le seuil de 50 salariés franchi, le rythme de création d'emplois des moyennes entreprises ralentit alors que chaque point de croissance en taille requiert un sacrifice en EBITDA tout aussi grand que pour les entreprises plus petites. Ce n'est que lorsque l'entreprise franchit le seuil des 250 salariés que la croissance en effectifs est moitié moins coûteuse en EBITDA et que ni l'âge, ni le taux de croissance passé n'influent sur le taux de croissance futur. Les PME dynamiques qui deviennent des ETI fournissent donc un effort et un coût en rentabilité plus élevé dans un premier temps que les autres ETI installées. Cet effet s'estompe heureusement avec le temps, à mesure que le taux de croissance des ETI s'émancipe de l'âge ou du taux de croissance passé ».

Lorsque le choix de la croissance est effectué au détriment de la rentabilité, l'entreprise est exposée à un triple besoin :

1/ un besoin en fonds de roulement plus élevé , financé soit par de l'autofinancement, soit par de l'endettement de court terme auquel ont davantage recours les entreprises en forte croissance ;

2/ un endettement de long terme pour financer des investissements productifs afin de gagner en compétitivité ;

3/ une croissance des fonds propres à due proportion, afin de ne pas rendre plus risquée la position d'un prêteur potentiel et de ne pas augmenter la probabilité d'un refus de crédit. Pour cette croissance, les actionnaires peuvent mettre en réserve des résultats et/ou réaliser des apports en fonds propres.

Ces entreprises en croissance ont donc des problématiques de financement propres.

Le marché du capital investissement est particulièrement adapté pour les PME-ETI en croissance qui ont besoin de renforcements réguliers de leurs fonds propres.

Elles sont très souvent trop petites pour être cotées en bourse mais peuvent notamment recourir aux aides publiques (voir 2.) et au crédit bancaire (voir 3.). Le financement des PME est également en phase de désintermédiation ou « d'ubérisation » (voir 4.), tandis que les pouvoirs publics s'interrogent sur les moyens d'orienter structurellement une partie de l'épargne des ménages vers cette catégorie d'entreprises (voir 5.), tout en essayant d'améliorer l'accès des PME au marché (voir 6.).

2. Sortir du dédale des aides publiques
a) 1654 dispositifs d'aides publiques aux entreprises : est-ce bien raisonnable ?

Le portail aides-entreprises.fr recense à ce jour 1654 dispositifs d'aide aux entreprises.

Parmi celles-ci, si l'on souhaite créer une entreprise à Paris, 108 dispositifs sont proposés.

La plus connue est l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise (Accre) qui consiste en une exonération partielle de charges sociales pendant les 12 premiers mois d'activité.

À compter du 1 er janvier 2019, tous les créateurs et repreneurs d'entreprise seront éligibles à ce dispositif sous réserve d'en respecter les conditions. La nature de l'aide restera inchangée. Cette aide prendra le nom d'exonération de début d'activité.

Comme en témoigne un jeune chef d'entreprise, « Pôle emploi est le premier financeur des start up », car une start up n'a pas besoin de beaucoup de capitaux pour démarrer.

Caractéristiques de l'ACCRE

L'aide est une exonération de charges sociales pendant un an (un dispositif spécial est prévu pendant 3 ans pour les micro-entrepreneurs ) à compter, soit de la date de l'affiliation au régime des travailleurs non-salariés, soit du début d'activité de l'entreprise, si l'assuré relève du régime des assimilés-salariés.

Pour les créations et reprises intervenant à compter du 1 er janvier 2017, l'aide est réservée aux personnes éligibles à l'exonération Accre dont les revenus d'activité sont inférieurs au plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) soit 39 732 euros en 2018.

De plus, l'exonération devient :

- totale, lorsque les revenus ou les rémunérations des bénéficiaires sont inférieurs à 3/4 du PASS (soit 29 779 euros en 2017).

- puis dégressive, lorsque les revenus sont supérieurs à 3/4 du PASS et inférieurs à 1 PASS (soit entre 29 779 euros et 39 732 euros en 2018)

- nulle, lorsque les revenus sont supérieurs à 1 PASS.

Le décret du 8 mars 2017 détermine la formule de calcul de la dégressivité.
Le montant de l'exonération est égal au : (montant total des cotisations dues pour un revenu égal au 3/4 du PASS / 0,25 PASS) × (PASS - le revenu d'activité).

Sont exonérées, dans les deux cas, quel que soit leur nouveau statut, les cotisations (patronales, et salariales pour les assimilés salariés) correspondant :

-  à l'assurance maladie, maternité, invalidité, décès,

-  aux prestations familiales,

-  à l'assurance vieillesse de base.

Restent dues les cotisations relatives à la CSG-CRDS, au risque accident du travail, à la retraite complémentaire, au FNAL, à la formation professionnelle continue et au versement transport.

L'exonération pendant un an de la cotisation d'assurance vieillesse au titre de l'Accre permet la validation de 4 trimestres maximum (selon le montant du revenu réalisé) d'assurance vieillesse de base.

En revanche, la personne ne cotisant pas pendant cette période d'exonération, les trimestres sont considérés comme non cotisés. Ceci signifie que le revenu procuré par l'activité professionnelle pendant cette année d'exonération ne sera pas pris en compte dans le revenu annuel moyen entrant dans le calcul de la pension de retraite.

Les personnes éligibles doivent créer ou reprendre une entreprise, quel que soit son secteur d'activité, sous forme d'entreprise individuelle ou de société (associations, GIE et groupements d'employeurs exclus) et en exercer effectivement le contrôle.

En cas de création ou reprise sous forme de société, la personne éligible doit exercer le contrôle effectif de l'entreprise, c'est-à-dire :

- soit détenir plus de 50 % du capital seul ou avec son conjoint, son partenaire pacsé ou son concubin, ses ascendants ou ses descendants, avec au moins 35 % à titre personnel.

- soit être dirigeant dans la société et détenir au moins 1/3 du capital seul ou avec son conjoint, son partenaire pacsé, ses ascendants ou ses descendants, avec au moins 25 % à titre personnel, sous réserve qu'un autre associé ne détienne pas directement ou indirectement plus de la moitié du capital.

Plusieurs personnes peuvent obtenir séparément l'aide pour un seul et même projet à condition :

- qu'elles détiennent collectivement plus de 50 % du capital,

- qu'un ou plusieurs d'entre eux aient la qualité de dirigeant,

- et que chaque demandeur détienne au moins 1/10ème de la fraction du capital détenue par la personne qui possède la plus forte.

Ces conditions doivent être réunies au minimum pendant 2 ans.

Source : Pôle Emploi

b) Un logiciel pour se repérer

Pour se repérer dans cette complexité et trouver l'aide publique financière adaptée à sa situation, l'entreprise peut désormais naviguer grâce à un logiciel spécifique, opérationnel depuis janvier 2017.

Dans le cadre du programme de simplification en faveur des entreprises, le Gouvernement a décidé fin 2012 la mise en place d'une base de données unique sur les aides publiques aux entreprises 245 ( * ) .

Cette base de données permet la consultation par les chefs d'entreprise et les porteurs de projet des informations sur les aides financières aux entreprises ainsi que la mise à disposition de ces informations auprès des organismes publics souhaitant les relayer auprès des entreprises. Le pilotage de ce projet a été confié à la Direction générale des entreprises.

Au terme d'une analyse de faisabilité menée en 2014, le ministère chargé de l'économie a choisi de s'appuyer sur la base de données de l'Observatoire des aides aux entreprises de l'Institut supérieur des métiers (ISM) , en raison de sa robustesse, de la qualité des mises à jour régulières, de son exhaustivité dans le champ des aides financières et de son homogénéité géographique.

Depuis le 1 er janvier 2015, la base de données de l'ISM, disponible à l'adresse www.aides-entreprises.fr, constitue la base de données de référence sur les aides financières aux entreprises, sélectionnée par l'État, le Répertoire National des Aides aux Entreprises.

Sa mise en ligne est effective depuis le 24 janvier 2017 et le lancement officiel a eu lieu au Salon des Entrepreneurs à Paris le 1 er février 2017.

Aides-entreprises.fr offre une information complète et actualisée sur plus de « 2 000 aides » (selon le site) aux entreprises, à l'échelle locale, nationale ou européenne et oriente le demandeur vers l'interlocuteur de référence sur chaque dispositif visé.

Un exemple d'aide publique : le soutien aux jeunes entreprises innovantes

Suite aux assises de l'entrepreneuriat d'avril 2013, la loi de finances pour 2014 a créé un dispositif de soutien aux petites entreprises investissant au moins 15 % de leurs charges dans la recherche et développement.

Le statut de jeune entreprise innovante (JEI) s'applique à des petites et moyennes entreprises de moins de 8 ans dont une partie des dépenses est affectée à la recherche . Il permet de bénéficier d'exonérations fiscales et sociales. L'entreprise doit, à la clôture de chaque exercice, répondre aux conditions suivantes :

- être une PME, c'est-à-dire employer moins de 250 salariés et réaliser soit un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros, soit un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros ;

- avoir moins de 8 ans d'existence ;

- être indépendante (son capital doit être détenu pour 50 % au minimum par des personnes physiques) ;

- être réellement nouvelle, c'est à dire ne pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, restructuration, extension d'activité ou reprise d'activités préexistantes ;

- réaliser des dépenses de recherche représentant au moins 15 % des charges fiscalement déductibles ;

- avoir été créé au 31 décembre 2019 dernier délai.

La jeune entreprise innovante bénéficie d'avantages fiscaux et sociaux substantiels :

- exonération totale d'impôt sur les bénéfices (impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés) pour les résultats du premier exercice ou de la première période d'imposition bénéficiaire et application d'un abattement de 50 % au titre de l'exercice ou de la période d'imposition bénéficiaire suivant ;

- exonérations pendant 7 ans de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutées des entreprises (CVAE) sur délibération des collectivités locales ;- sous certaines conditions, exonération des plus-values de cession de parts ou actions des JEI détenues par des personnes physiques ;

- exonérations sociales sur les rémunérations des personnels 246 ( * ) si 50 % de leur temps de travail est consacré au projet de recherche et développement.

L'exonération est applicable jusqu'au dernier jour de la 7 e année suivant celle de la création de l'entreprise. Elle s'applique dans la limite d'un double plafonnement :

- une rémunération mensuelle brute par personne plafonnée à 6 661,20 euros correspondant à 4,5 fois le Smic ;

- un plafond annuel de cotisations éligibles par établissement, fixé à 196 140 euros (correspondant à cinq fois le plafond annuel de la sécurité sociale).

Les entreprises qui souhaitent bénéficier des avantages attachés à la qualité de jeune entreprise innovante peuvent, à tout moment de leur existence, interroger par écrit l'administration fiscale afin de savoir si elles respectent les critères fixés pour l'application du dispositif. Cette demande doit être formulée à l'aide d'un modèle de demande d'avis et adressée en recommandé avec accusé de réception (ou par remise directe contre décharge). L'avis exprès ou tacite délivré au contribuable dans un délai de quatre mois par l'administration fiscale est opposable à l'Urssaf.

Aucune déclaration préalable auprès de l'Urssaf n'est nécessaire pour obtenir l'exonération de charges sociales. L'entreprise applique elle-même l'exonération en remplissant le bordereau récapitulatif des cotisations .

En régime permanent, le coût annuel de la mesure pour les finances publiques a été évalué à environ 200 millions d'euros pour un montant total d'investissement annuel prévisionnel de 600 millions d'euros, réparti de manière équivalente entre investissement direct et investissement intermédié.

Source : ministère de l'Économie

Cependant, d'autres sites publics fournissent toujours ce type de renseignements : le site de l'AFE, l'espace profession du site Service public, le référentiel des financements des entreprises de la Banque de France, le site les-aides.fr des CCI...

De multiples interlocuteurs publics prodiguent leur conseils pour accompagner les entreprises soit pour l'obtention d'une aide publique, soit, plus globalement, pour les développer : DIRECCTE, Bpifrance, correspondant TPE de la Banque de France dans chaque département, réseau des Chambres de commerce et d'industrie...

Dans ce même objectif, un foisonnant secteur privé de prestation de services s'est développé pour fournir, en ligne ou en direct, des conseils rémunérés pour développer une entreprise.

c) Objectif n° 17 : rationaliser les aides publiques

Depuis 10 ans, de nombreux rapports ont procédé à une évaluation des aides publiques aux entreprises.

Un audit de modernisation des aides publiques a été effectué en janvier 2007 par une triple mission de l'IGF, de l'IGAS et de l'IGA, qui a analysé l'efficacité de 65 milliards d'euros dépensés chaque année en subventions d'aide aux entreprises, représentant 4 % du PIB. Cet audit recensait plus de 6 000 dispositifs et soulignait des redondances dans les aides et les organismes, un empilement faisant naître le doute sur l'efficacité réelle de ces aides pour les entreprises et l'économie en général.

Le rapport annuel de la Cour des comptes pour 2007 analysait pour sa part les aides publiques aux PME. Dans ce rapport, la Cour des comptes estimait le montant des seules aides à la création, au développement et à la transmission des PME à environ 6 milliards d'euros répartis entre les aides fiscales et financières et les allègements de charges.

Le rapport Guillaume du comité d'évaluation des dépenses fiscales et niches sociales de 2011 , qui a procédé à l'évaluation de 339 dépenses fiscales et 46 niches sociales, dispositifs dérogatoires au droit commun des prélèvements obligatoires, concluait à l'inefficacité de 37 % des dépenses fiscales évaluées (125 dispositifs pour un total de 11,8 milliards d'euros) et de 37 % des niches sociales (17 dispositifs pour un total de 3,3 milliards d'euros).

Le rapport Queyranne de juin 2013 Pour des aides simples et efficaces au service de la compétitivité , quoique limité dans son champ d'investigation 247 ( * ) , constatait leur sédimentation, leur manque de pertinence au regard des priorités de la compétitivité (« ni les secteurs d'avenir ni ceux soumis à la concurrence internationale ne sont aidés prioritairement ») et leur manque d'efficacité, comme en témoigne cet extrait :

« La pertinence de ces mesures de faible montant peut être remise en cause de plusieurs manières : faible connaissance par les bénéficiaires potentiels, doutes sur l'effet incitatif, ciblage trop fin qui peut générer des coûts de gestion excessifs, obsolescence des objectifs ou existence justifiée par la seule satisfaction d'intérêts catégoriels. Il résulte de ces flux des cofinancements, des redondances et des incohérences, provoquées par la juxtaposition de plusieurs milliers d'aides, dans tous les secteurs, parfois avec des montants unitaires très limités et un nombre de bénéficiaires faible ».

« Plusieurs raisons militent en faveur d'une réforme du système global des aides et soutiens publics aux acteurs économiques. Le système général, pris dans sa globalité, nous apparaît inefficace et inadapté . Trop d'évaluations ont conclu à l'existence d'effets d'aubaine , au manque de ciblage et de pertinence dans de nombreux dispositifs ».

Depuis ce rapport, les interventions économiques, en direction des entreprises notamment, des collectivités locales ont été rationalisées et confiées aux régions en 2015 et la création de Bpifrance a permis de simplifier le paysage des opérateurs financiers. L'accessibilité aux aides a été améliorée, comme on l'a vu, avec la création d'un logiciel permettant une plus grande lisibilité de l'intervention publique dont les entreprises peuvent bénéficier et facilitant leur accès par le dépôt dématérialisé de demande de soutien.

Toutefois, la préconisation de réduire drastiquement le nombre d'aides publiques de faible montant (sur les 700 dispositifs d'aides de l'État, la moitié (365) ne représente qu'un montant annuel inférieur à 5 millions d'euros) n'a pas été suivie d'effet.

Le logiciel facilitant, pour l'entrepreneur, le « repérage » des aides publiques ne doit pas servir de prétexte à abandonner toute volonté de les rationaliser . Votre rapporteur est persuadé que les 1654 dispositifs ne sont pas tous efficaces et pertinents et que la priorité doit être donnée aux aides à l'innovation. Il faut réduire les micro-aides publiques, conforter les aides à l'innovation, rationaliser les aides financières existantes (proposition n° 21).

d) Objectif n° 18 : un accès privilégié des PME à la commande publique

Dix ans après le rapport Stoléru 248 ( * ) , il manque toujours un accès privilégié des PME à la commande publique. Il est paradoxal que la France multiplie les dispositifs d'aide publique, et construise un avantage compétitif avec le crédit d'impôt recherche (CIR) ; mais que la demande publique ne consomme pas les produits ou services créés grâce à ce crédit d'impôt.

Un récent rapport du Sénat 249 ( * ) a ainsi souligné que les PME ne profitent que trop peu du potentiel de la commande publique . En 2011, alors qu'elles ont représenté 35,7 % du chiffre d'affaires des entreprises françaises, elles n'ont exécuté en tant que titulaires que 25 % du montant total des 200 milliards d'euros de marchés publics. Il constatait que « les acheteurs se privent ainsi des capacités d'innovation des PME - les PME innovantes ne représentant que 0,01 % des marchés de l'État », alors même que se multiplient les dispositifs publics d'aide à l'innovation !

Le rapport ne recommandait pas un « small business act » européen et la réservation d'« une partie des commandes publiques à des PME au niveau européen » , en raison de son risque d'inconstitutionnalité 250 ( * ) , de son incompatibilité avec les règles de l'OMC 251 ( * ) et de son inefficacité. En effet, et malgré le Small Business Act de 1953, les taux d'accès respectifs des PME aux marchés publics aux États-Unis et en Europe sont assez proches, avec même un léger désavantage pour les États-Unis.

En France, une circulaire du Premier ministre du 31 juillet 2013 relative à la modernisation des achats de l'État fixe comme objectif que 2% des achats des administrations soit réalisé en 2020 auprès d'entreprises innovantes et notamment des PME de croissance innovantes , car « l'accès aux marchés publics permet aux PME de croître et de contribuer au développement économique de la France. Il est donc important que les stratégies d'achat de l'État et de ses établissements intègrent cette dimension lorsqu'il existe une offre économique pertinente, notamment par la voie de l'allotissement ».

Le décret n° 2013-623 du 16 juillet 2013 qui réforme le Service des achats de l'État (SAE) assigne à ce dernier la mission de « s'assurer que les achats de l'État sont réalisés dans des conditions favorisant le plus large accès des PME à la commande publique ».

Pourtant, comme en a témoigné un chef d'entreprise innovante entendu par votre rapporteur : « l'État a accordé à mon entreprise le label d'entreprise stratégique mais je n'ai aucune commande publique. Comme les grandes entreprises achètent au meilleur prix dans le monde et n'achètent pas français, si l'État ne passe pas des commandes, vais-je pouvoir rester longtemps une PME française ? ».

Décréter une politique générale de réservations en faveur des PME apparaîtrait cependant à contre-courant. Le rapport sénatorial voulait faciliter l'accès des PME à la commande publique par des incitations à agir , la commande publique souffrant d'un excès de règles, et proposait des solutions concrètes notamment en faveur des PME innovantes. En 2012 252 ( * ) , l'État a affiché un objectif de 2 % des achats de l'État et de ses opérateurs attribués aux PME innovantes à l'horizon 2020. Cet objectif est ambitieux puisqu'en 2014, le taux a été de 0,01 % pour l'État et de 0,57 % pour ses établissements publics.

Il faut donc sinon remplacer les aides publiques, du moins les compléter par un accès plus facile des PME à la commande publique (proposition n° 22) reprenant les propositions du rapport sénatorial.

e) Objectif n° 19: sécuriser le crédit d'impôt recherche

La dépense fiscale en faveur de la recherche et l'innovation s'est élevée à près de six milliards d'euros en 2017.

Les trois principales dépenses fiscales sont :

- le crédit d'impôt recherche (CIR), dont le coût est évalué à 5,8 milliards d'euros pour 2018 (5,5 milliards en 2017) et qui constitue, de loin, la principale dépense fiscale ;

- la taxation à taux réduit des plus-values à long terme provenant des produits de cessions et de concessions de brevets, dont le coût peut être estimé à 660 millions (300 millions en 2017) ;

- le crédit d'impôt en faveur de l'innovation (CII), institué par la loi de finances pour 2013 , dont le coût serait de 180 millions d'euros en 2018 (115 millions en 2017).

Créé par la loi de finances pour 1983, le CIR consiste, depuis le 1 er janvier 2008, en un crédit d'impôt de 30 % des dépenses de recherche et développement (R&D) jusqu'à 100 millions d'euros et 5 % au-delà . Entre 2008 et 2013, le nombre d'entreprises déclarantes a augmenté de plus de 50 % , dépassant 21 000 , pour un montant de dépenses éligibles de 20,5 milliards d'euros et un crédit d'impôt de 5,6 milliards d'euros en 2013 , contre 1,7 milliard d'euros en 2007.

Le montant du CIR a dépassé les aides directes à la R&D des entreprises depuis 2008, en se stabilisant autour de 19 % des dépenses intérieures de R&D des entreprises. Les aides directes représentent moins de 10 % de ces dépenses depuis 2009, contre 18 % en 1993. Le cumul des deux types d'aide porte le taux de financement public des dépenses de R&D des entreprises à 27 % en 2013 (soit 0,40 % du PIB).

Ce niveau de soutien public place la France en deuxième position, selon les données de l'OCDE, nettement derrière la Russie (dont le soutien public atteint 58 % de la dépense intérieure de R&D des entreprises), proche du Canada (25 %) et du Portugal (21 %), mais loin devant les États-Unis, l'Allemagne ou le Japon. En Allemagne ou au Japon en particulier, l'intensité en R&D privée est élevée du fait de la structure sectorielle de ces économies où les secteurs comme l'automobile et l'électronique représentent une forte part de la R&D privée.

Cet outil fiscal fournit donc à la France un véritable avantage comparatif dans la bataille de l'innovation qu'il convient de préserver. Cependant, son usage par les entreprises est parfois contesté par l'administration qui exerce un contrôle tatillon, y compris sur les entreprises stratégiques, comme l'illustre cet exemple, anonymisé :

Le contrôle du CIR dans l'entreprise Z

5 juin 2015 : avis de vérification de comptabilité

23 juin : premier rendez-vous avec l'administration

21 juillet : première transmission de documents (119 Mo de fichiers)

2 septembre : 2 ème rendez-vous avec l'administration

16 septembre : 2 ème transmission de documents (98,1 Mo de fichiers)

30 septembre : 3 ème rendez-vous avec l'administration

7 octobre : 4 ème rendez-vous avec l'administration

14 octobre : 5 ème rendez-vous avec l'administration et 3 ème transmission de documents (9,9 Mo de fichiers)

3 novembre : 6 ème rendez-vous avec l'administration

2 décembre : 7 ème rendez-vous avec l'administration et 4 ème transmission de documents (2,89 Mo de fichiers)

11 décembre : proposition de rectification émise par l'administration

15 décembre : remise d'un rapport d'expertise portant sur l'année 2013, proposant de rejeter l'éligibilité de l'intégralité des travaux réalisés au titre du CIR

4 janvier 2016 : l'entreprise Z adresse à l'administration un courrier de contestation

14 janvier : visioconférence entre l'entreprise et l'expert qui demande l'envoi de données complémentaires

15 février : transmission des données complémentaires à l'expert concernant le dossier A

15 mars : transmission des données complémentaires à l'expert concernant le dossier B et le dossier C

19 mai : transmission des données complémentaires à l'expert concernant la répartition du temps par salarié et par projet

24 mai : 2 ème rapport d'expertise qui valide les dépenses déclarées pour 2013 au titre du CIR et regrette que l'entreprise Z n'a « pas assez approfondi certains éléments » et que la description faite de ses travaux « n'ait pas assez mis en évidence le caractère novateur de ceux-ci »

29 juin : 2 ème proposition de rectification de l'administration

26 juillet : réponse de l'entreprise Z à l'administration et nouvelle réclamation

15 septembre : maintien de la position de l'administration qui indique les voies de recours

10 octobre : demande de recours gracieux par l'entreprise Z

10 octobre : demande de saisine du comité consultatif du CIR par l'entreprise Z

9 novembre : recours hiérarchique par l'entreprise Z

21 novembre : l'administration transmet le dossier au comité consultatif du CIR

31 janvier 2017 : 3 ème rapport d'expertise réalisée par un nouvel expert dont les conclusions sont contraires à celles du ministère de l'Education nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

28 mars : réunion du comité consultatif du CIR 253 ( * )

15 septembre : notification de l'avis du comité consultatif du CIR qui maintient la contestation de l'éligibilité au CIR de projets datant de 2012 et de 2014 pour un montant total de 550 000 euros et qui propose un nouvel examen au fond

5 février 2018 : rendez-vous avec un interlocuteur départemental du ministère qui estime que l'éligibilité au CIR d'un des projets doit être réexaminée et qui demande « de le recontacter dans un mois si l'administration ne donne pas de réponse »...

Cet outil indispensable pour les entreprises innovantes doit donc être allégé et celles qui y recourent doivent être dispensées d'une suspicion permanente de détournement d'emploi.

Plusieurs membres de la délégation aux entreprises du Sénat avaient soutenu des amendements au projet de loi de finances rectificative pour 2015, allant dans le sens d'un renforcement de l'efficacité du CIR dont le contrôle se fonde in fine sur l'appréciation d'experts, la plupart du temps universitaires, qui ne sont pas toujours en mesure d'apprécier le caractère innovant, ou de recherche, d'une dépense d'une entreprise.

L'un prévoyait que, si le contribuable dont les dépenses sont examinées le demande, ce comité entend une personnalité qualifiée désignée par le contribuable, issue du secteur privé et présentant des garanties d'indépendance, susceptible d'apporter une expertise sur la qualification des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt. Cet amendement, adopté par le Sénat, n'avait pas été retenu dans le texte final qui prévoit seulement que « l'agent du ministère chargé de la recherche et l'agent du ministère chargé de l'innovation peuvent, s'ils l'estiment utile, être assistés par toute personne susceptible d'apporter une expertise sur la qualification des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt. Cette personne ne prend pas part aux votes » 254 ( * ) .

Un autre, qui n'a malheureusement pas été retenu, prévoyait d'autoriser les agents des ministères en charge de l'industrie et de l'innovation à vérifier, au même titre que les agents du ministère de la recherche, la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt recherche ou innovation, afin de mieux prendre en compte les enjeux économiques des dépenses de recherche considérées.

À tout moment, les services fiscaux peuvent vérifier l'éligibilité d'une dépense au CIR. Cette possibilité de contrôle fiscal fait peser une épée de Damoclès sur une entreprise. Celle-ci risque, lorsqu'il s'agit d'une PME, de ne pas avoir les moyens de rembourser le crédit d'impôt. Cet aléa constitue une menace pour l'entreprise et pèse sur l'entrepreneur.

Pour sécuriser l'entreprise qui utilise le crédit d'impôt recherche et le crédit d'impôt en faveur de l'innovation, votre rapporteur avait proposé qu'ils soient transformés en allègement de charges. Cependant, comme l'examen du présent rapport en Délégation l'a révélé, cette proposition pourrait être interprétée comme une remise en cause du principe même de ces dispositifs. C'est pourquoi, d'autres systèmes de sécurisation pourraient être imaginés, comme un agrément préalable des entreprises innovantes et une présomption du caractère innovant de leurs recherches, l'essentiel demeurant la sécurisation des entreprises innovantes qui ont recours au CIR (proposition n° 23).

3. Des banques trop frileuses pour financer les PME ?
a) Le financement bancaire des entreprises

Le financement bancaire vient après le recours aux fonds propres : le crédit bancaire pour les PME/TPE pèse entre 60 % et 70 % des financements empruntés et représente presque vingt fois les autres sources de financement externe . La situation est bien sûr différente pour les ETI (autour de 40 %) et pour les grandes entreprises (10 % à 20 %).

L'encours de crédit bancaire aux PME/TPE s'élève à 385 milliards d'euros en décembre 2016 sur un total de 894 milliards d'euros selon la Banque de France. Le crédit bancaire a bénéficié à 1,1 million de PME/TPE en France, soit plus de 25 %. Ainsi, 43 % des crédits bancaires aux entreprises vont aux PME/TPE qui représentent environ 50 % des salariés.

Selon la Banque de France, et son enquête trimestrielle sur l'accès au financement bancaire, ce dernier s'améliore, sauf pour les crédits de trésorerie des TPE.

Pour le Conseil économique, social et environnemental 255 ( * ) en revanche, 30 % des dirigeants d'une TPE ayant demandé un crédit de trésorerie ne l'ont pas obtenu . Cela représente 100 000 entrepreneurs qui contribuent à la représentation duale des banques, à la fois outils du développement de l'économie et institutions financières préoccupées par leurs propres profits.

De même, pour la Banque centrale européenne, qui conduit depuis 2009 une enquête semestrielle sur l'accès au financement par les entreprises 256 ( * ) , « l'écart entre demande et offre de crédit pour les PME/TPE françaises, s'est réduit fin 2016 mais il reste défavorable et la France est, avec la Grèce, le seul pays de la zone euro où la demande de financements se trouve supérieure à l'offre ».

La demande de crédit ne prend en compte que celle exprimée par les entreprises et n'intègre donc pas en compte l'autocensure de ces dernières, qui serait significative. Elle peut provenir du chef d'entreprise qui a peur de perdre le contrôle de son entreprise ou de s'endetter, mais aussi celui qui craint de se voir opposer un refus.

Selon la Banque de France, 15 % des dirigeants de TPE ne font pas appel au crédit « par principe ». Selon une étude Sofres-KMPG pour la CPME de septembre 2016, 25 % des dirigeants de PME restreignent leurs demandes de financement en raison des difficultés d'accès au crédit, 64 % témoignent du durcissement récent de leur banque, un tiers évoque des frais élevés ou des montants accordés plus faibles que demandés ou des garanties supplémentaires demandées par la banque ou encore des réductions de crédits ou de facilités de compte courant.

Ce sentiment est corroboré par l'étude SIAGI 257 ( * ) pour les artisans, lesquels sont 43 % à évoquer des freins tels que les garanties demandées, leur inexpérience en matière de crédits, un investissement non finançable par un prêt, l'anticipation d'un refus ou la lourdeur administrative d'une demande de prêt.

Ces relations difficiles entre PME et les banques ont été prises en considération par les acteurs concernés.

(1) Un code des bonnes pratiques entre les banques et les PME

Chaque trimestre, environ 10 % des 2,7 millions de TPE font une demande de crédit de trésorerie ou d'investissement, correspondant à environ un million de dossiers déposés par an.

L'Observatoire du financement des entreprises a pointé, dans un rapport rendu en juin 2014, la nécessité d'améliorer les relations entre les banques et les TPE . Cinq mesures pragmatiques ont été formulées par l'observatoire :

1. répondre rapidement, sous 15 jours ouvrés, à toute demande de financement d'un dirigeant de TPE ;

2. expliquer le refus de crédit au dirigeant de TPE ;

3. indiquer les recours existants, notamment la Médiation du crédit aux entreprises ;

4. développer une meilleure information sur le financement de la trésorerie et du court terme ;

5. favoriser une plus grande stabilité des conseillers TPE dans leurs fonctions au sein des banques.

Les banques adhérentes de la Fédération bancaire française (FBF) se sont engagées à suivre ces recommandations dans un code des relations banques/PME du 11 mai 2006 258 ( * ) .

Un premier bilan de ce code de bonnes pratiques a été élaboré par l'Observatoire du financement des entreprises le 25 novembre 2015. Il fait état « d'améliorations significatives qu'il faut toutefois prolonger et amplifier ».

L'évaluation de la mise en oeuvre des cinq mesures prises par la FBF pour améliorer les relations banques-TPE/PME

Les banques, qui étaient en 2014 déjà pleinement conscientes de la nécessité de favoriser la stabilité de leurs chargés de clientèle TPE, ont mis en place plusieurs mesures pour accroître la durée moyenne de poste et favoriser les transitions entre chargés de clientèle. Différents indicateurs permettent de mesurer des progrès réels, et l'appropriation par les directions générales des banques de cette question semble convaincante.

Pour mieux informer les TPE sur les différentes possibilités de financement court terme (découvert, mobilisation des créances commerciales, crédits échéancés), la FBF a très rapidement rédigé, imprimé et diffusé un mini-guide à destination des chefs d'entreprise sur les « Outils et solutions des TPE pour financer leurs besoins court terme » disponible, en consultation et téléchargement gratuit sur le site pédagogique de la FBF et sur le site de nombreux réseaux bancaires, et les conseillers peuvent souvent l'imprimer à partir de leur intranet. Ces derniers en ont parfois aussi directement sous format papier à leur disposition pour les distribuer.

Les banques ont intégré à leurs lettres de dénonciation et à leurs lettres de refus de crédit la mention d'un possible recours à la Médiation du crédit aux entreprises. Cependant, l'envoi d'une lettre de refus de crédit n'est dans la plupart des réseaux bancaires qu'exceptionnel (le plus souvent à la demande du client). Or, mis à part le cas d'un réseau, les chargés de clientèle TPE-PME n'ont pas la consigne de mentionner l'existence de la Médiation du crédit lors des explications orales de refus de crédit. Pour autant, les banques se sont engagées, dans le cadre du nouvel Accord de Place, « en cas de refus ou dénonciation de financement ou de garantie, à informer l'entreprise de la possibilité de recourir au médiateur de crédit ». En pratique, les dirigeants de TPE-PME à qui un crédit est refusé ne sont donc pas, la plupart du temps, informés à ce moment-là de la possibilité de recourir à la Médiation.

Par ailleurs, si les réseaux bancaires se sont organisés pour que les dirigeants de TPE-PME à qui un crédit a été refusé puissent bénéficier d'entretiens avec un responsable de la banque, les entrepreneurs ne se trouvent en pratique que très peu informés de cette possibilité. Le recours à ce type d'entretien, que les réseaux bancaires jugent très utile si la première explication n'est pas comprise, est donc exceptionnel.

S'agissant des délais de réponse à toute demande de financement d'un client TPE-PME, si les réseaux bancaires conviennent de répondre à environ 90 % des demandes de crédit en moins de 15 jours ouvrés, 10 % des dossiers de TPE n'ont pas reçu de réponse dans ces délais et cette proportion semble plus élevée pour les PME. Les banques expliquent certains cas où le délai de réponse déroge aux 15 jours ouvrés par le caractère difficile, atypique, risqué de ces dossiers, que ce soit au regard du projet ou de l'entreprise (dossiers atypiques nécessitant souvent deux instructions, présentant souvent des montages complexes, ou nécessitant des intervenants extérieurs en garantie par exemple). A ce stade, les banques ne disposent pas du recul suffisant pour mettre en évidence une évolution de ce nombre de dossiers ne trouvant pas de réponse avant 15 jours ouvrés. Par ailleurs, le ressenti des entrepreneurs sur la durée de réponse peut être biaisé par le fait que le moment où le dossier est jugé complet par la banque n'est pas toujours signifié à l'entrepreneur. Les banques soulignent toutefois que ce point de départ peut évoluer avec l'analyse même du dossier et du projet.

En conclusion, il apparaît que l'annonce des 5 mesures par la FBF en juin 2014 a conduit à une action des banques en faveur d'une amélioration du dialogue entre les banques et les TPE et PME, ce qui était l'objectif partagé suite au rapport de l'Observatoire du financement des entreprises.

Cependant, des marges de progrès existent encore sur certains points.

Il est nécessaire que les banques poursuivent leurs efforts pour répondre à l'ensemble des demandes de crédit de TPE-PME en moins de 15 jours ouvrés. Cela devrait passer notamment par une amélioration du suivi et de l'analyse des dossiers complets qui ne reçoivent pas de réponses en 15 jours ouvrés, une accélération du traitement des dossiers les plus complexes, et une meilleure information des clients sur le caractère complet de leur dossier et sur ce délai maximal de réponse de 15 jours ouvrés.

Il serait par ailleurs souhaitable que les banques informent les entrepreneurs lors des entretiens oraux de refus de crédit, lorsqu'une incompréhension est détectée, de la possibilité de s'entretenir avec un responsable de la banque.

Il est indispensable que les banques informent systématiquement en cas de refus de crédit - par écrit ou oralement - les entrepreneurs de la possibilité de recourir à la Médiation du crédit aux entreprises afin de respecter pleinement l'article 14 de l'Accord de Place.

Enfin, il apparaît souhaitable que les efforts engagés pour une plus grande stabilité des chargés de clientèle soient poursuivis.

Par ailleurs, il est important que les différentes fédérations professionnelles et les réseaux consulaires renforcent leur communication autour de la mise en oeuvre des 5 mesures, pour que les chefs d'entreprise les connaissent et se les approprient mieux.

Source : synthèse du rapport l'Observatoire du financement des entreprises

25 novembre 2015 .

L'Observatoire du financement des entreprises a par ailleurs contribué à améliorer la lisibilité des tarifs de financement : sur la base du rapport rédigé en 2016, la FBF et l'ASF ont élaboré des préconisations professionnelles applicables à leurs adhérents.

La lisibilité des tarifs des produits de financement utilisés par les TPE

En mai 2015, le ministre des Finances et des Comptes publics et le ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique ont chargé l'Observatoire du financement des entreprises d'établir un diagnostic sur cette question.

En effet, les coûts de ces produits - découvert, facilité de caisse, crédits court terme, mobilisation de créances professionnelles (anciennement appelées cession par loi Dailly), escompte, affacturage... - peuvent être assez difficiles à appréhender. Pour un produit donné, qu'il soit un « pur » produit de financement ou assorti de services complémentaires (gestion du poste clients en affacturage, par exemple), le nombre de composantes tarifaires peut être considéré comme élevé, avec une structure tarifaire bien plus complexe qu'un simple schéma « frais de dossier/intérêts débiteurs ». Par ailleurs, l'environnement monétaire et financier actuel, caractérisé par des taux historiquement bas, tend à limiter dans le coût effectif global le poids relatif du coût du crédit (intérêts débiteurs) au profit des frais fixes et des tarifications annexes : la compréhension de l'ensemble des composantes devient d'autant plus nécessaire.

Trois axes d'analyse ont été déclinés dans le rapport :

-les terminologies utilisées par les établissements bancaires et les affactureurs pour les différentes composantes tarifaires ;

-la présentation, dite a priori , des tarifs des produits de financement aux entrepreneurs ;

-la présentation, dite a posteriori , des coûts effectifs des produits utilisés par l'entreprise au cours de l'exercice annuel écoulé.

Sous l'égide de l'Observatoire, les fédérations professionnelles de la banque et de l'affacturage ont élaboré des glossaires pédagogiques des principales composantes tarifaires des produits de financement étudiés, permettant aux entrepreneurs de pouvoir plus facilement se repérer dans l'ensemble des offres tarifaires, en leur indiquant, pour chaque famille de produit, la définition des composantes et, sommairement, le mode de calcul correspondant.

En outre plus généralement, l'Observatoire a notamment recommandé :

- que les glossaires soient largement diffusés à la fois par les établissements et les fédérations, notamment sur les sites internet, et qu'ils servent de référence pour les acteurs du marché ;

- que les banques et les affactureurs reprennent les terminologies présentées dans ces glossaires dans leurs plaquettes ou guides tarifaires ;

- que les plaquettes des banques soient complètes dans la présentation des composantes tarifaires des produits de financement court terme proposés aux TPE ;

- que soit systématiquement proposé au professionnel/dirigeant de TPE un entretien annuel pour faire le point sur ses besoins et financements court terme. Cet entretien pourrait s'appuyer sur des informations récapitulant les frais annuellement facturés à l'entrepreneur pour ses besoins de financement court terme ;

- que les établissements financiers proposent au professionnel/dirigeant de TPE un récapitulatif par produit des frais payés annuellement pour les produits de financement bancaire court terme les plus utilisés et pour l'affacturage.

À partir de ces recommandations, la FBF et l'ASF ont élaboré des préconisations professionnelles applicables à leurs adhérents.

Source : rapport de l'Observatoire du financement des entreprises (2016)

(2) Le rôle de la Médiation du crédit aux entreprises

En cas de difficulté, un dirigeant d'entreprise peut saisir la Médiation du crédit aux entreprises, créée en 2008.

Sous l'effet d'un environnement économique et financier plus favorable aux entreprises, l'activité de la Médiation du crédit a légèrement reculé en 2016.

Sur les 2 780 dossiers déposés par les entreprises (contre 2 990 en 2015), la Médiation en a accepté 1 884 (contre 2 086 en 2015) ; soit un taux d'éligibilité de 68 %, comparable à celui de 2015. Les cas d'inéligibilité correspondent pour l'essentiel à des sociétés réorientées vers les procédures judiciaires en raison de leurs difficultés financières trop avancées.

Parmi les motifs de saisine, la dénonciation des découverts bancaires reste largement prédominante. Le taux de médiations réussies, qui augmente de 2 points par rapport à 2015, s'établit à 64 %.

Dans l'ensemble, 1 048 entreprises, employant près de 12 800 personnes, ont été confortées et 183 millions d'euros d'encours de crédits ont pu être renouvelés ou débloqués. La part de TPE dans les saisines (85 %) conduit à intervenir sur des besoins de financement toujours plus réduits (175 000 euros en moyenne).

Par rapport à 2015, le profil sectoriel des entreprises qui ont recours à la Médiation est peu modifié. Les services (43 % des dossiers déposés) et le commerce (25 %) demeurent les principaux secteurs d'intervention. L'industrie (11 %) et la construction (15 %) pèsent moins mais sont toujours un peu surreprésentées par rapport à la démographie des entreprises. L'agriculture reste une branche d'activité marginale, dont le poids (6 %) se maintient.

Fonctionnement de la Médiation du crédit aux entreprises

LE TOP 5 DES MOTIFS DE SAISINE

Une dénonciation de découvert ou autre ligne de crédit

Un refus de rééchelonnement d'une dette

Un refus de crédit (trésorerie, équipement, crédit-bail...)

Un refus de caution ou de garantie

Une réduction des garanties par un assureur-crédit

LES 5 AVANTAGES DE LA MÉDIATION DU CRÉDIT

Un service gratuit et confidentiel

Un premier contact avec un médiateur du crédit dans les 48 heures suivant le dépôt d'un dossier de médiation

Un maintien de ses concours bancaires existant pendant la durée de la médiation

Une expertise sur mesure

Un traitement local de son dossier

POURQUOI ET COMMENT SAISIR LA MÉDIATION DU CRÉDIT ?

L'entreprise :

Remplit le dossier en ligne à l'aide du tutoriel

Joint ses documents comptables au format électronique

Peut se faire accompagner de son expert-comptable/tiers de confiance

Le Médiateur du crédit :

Contacte le dirigeant dans les 48 heures

Vérifie la recevabilité de la demande

Les établissements financiers :

Bénéficient d'un délai de 5 jours ouvrés pour revoir leurs positions.

Informent le médiateur de leur décision de maintenir ou non leur position.

Le Médiateur du crédit :

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Source : rapport annuel 2016 du Médiateur du crédit (mars 2017)

Depuis 2008, les TPE représentent une part croissante de l'activité de la Médiation, passant de 79 % de l'ensemble des dossiers traités en 2008-2009, à 85 % en 2016 . Cette évolution s'explique par un accès aux crédits (crédits de trésorerie et crédits d'investissement) toujours sensiblement moins facile pour les TPE que pour les PME. D'après la Banque de France 259 ( * ) , alors que 84 % des PME obtiennent totalement ou en grande partie les financements de trésorerie demandés, seulement 70 % des TPE obtiennent satisfaction.

b) Le rôle de Bpifrance : un effet dual
(1) L'intervention marginale de Bpifrance dans le segment du financement des PME/TPE

Pour le financement des PME/TPE, Bpifrance est un acteur de taille limitée avec seulement 3,6 % de l'encours total des crédits bancaires en 2015. Elle intervient en cofinancement de prêts bancaires associés.

Bpifrance ne dispose ni d'un réseau ni de ressources humaines suffisants pour jouer le rôle d'une banque de proximité pour les PME/TPE . N'étant pas dotée d'une capacité propre de sélection des dossiers, elle intervient en aval des choix des banques, à partir de dossiers sélectionnées par celles-ci.

Pour les TPE qui souhaitent un crédit de trésorerie, l'accès à Bpifrance était quasiment impossible en 2015 comme l'a montré le rapport d'évaluation par l'Assemblée nationale des premières années d'activité de Bpifrance 260 ( * ) .

Son positionnement est en revanche plus affirmé en faveur des PME innovantes.

(2) L'intervention décisive de Bpifrance dans le segment de l'innovation

La frilosité du secteur privé a conduit l'État à intervenir fortement en soutien à l'innovation, pour les raisons ainsi décrites par le Conseil d'analyse économique :

« La France manque de fonds de long terme . Pour des raisons réglementaires (ratios prudentiels), les banques et les compagnies d'assurances ne peuvent investir que des montants limités dans des projets risqués de long terme. Elles ont également des contraintes d'efficacité de gestion (temps passé/montant investi) et de ratio d'emprise sur les fonds souscrits qui leur font naturellement privilégier des fonds de grande taille. Surtout, la France ne dispose pas de fonds de pension ni d'endowments 261 ( * ) d'universités, qui dans d'autres pays travaillent dans le long terme et peuvent donc prendre des risques. Or, le capital-risque a un rendement imprévisible, historiquement faible, qui de surcroît ne se réalise pas avant 7-10 ans. La politique d'investissement de Bpifrance dans des « fonds de fonds » privés procède ainsi de la volonté de faire émerger des investisseurs de long terme référents français ».

Ainsi, sur la période 2012-2015, la part des nouveaux fonds levés par le capital-risque provenant des institutions publiques était bien plus élevée en France qu'au Royaume-Uni et dans les pays nordiques.

Le capital-risque sert à financer des entreprises généralement de très petite taille, qui se trouvent aux premiers stades de leur existence et qui présentent un fort potentiel de croissance et de développement.

Les fonds de capital-risque n'apportent pas que des capitaux mais aussi des conseils. Ils fournissent aux entreprises des compétences et des connaissances précieuses, des contacts professionnels, des conseils stratégiques.

Dans le domaine du capital-investissement et de l'innovation, Bpifrance est devenu le principal acteur français du segment du capital-risque et de l'amorçage 262 ( * ) .

Elle intervient notamment dans des PME désireuses d'ouvrir leur capital. Grâce à des tickets compris entre 250 000 euros et 13 millions d'euros, son activité sur ce segment a été en forte expansion avec 132 millions d'euros en 2015 (+ 78 % par rapport à 2012).

Sur le segment de l'innovation, les prises de participations de Bpifrance ont fortement progressé (+ 48 % entre 2013 et 2015) pour atteindre 169 millions d'euros, avec notamment le Fonds national d'amorçage, fonds de fonds qui réalise des investissements dans des fonds d'amorçage investissant eux-mêmes dans des start-up et des jeunes entreprises innovantes.

Bpifrance est très présente dans l'investissement direct dans les start-up. Elle apparaît même comme l'investisseur européen le plus actif du 1 er trimestre 2016, avec 15 opérations, devant Index Ventures (dix opérations), l'un des tout premiers fonds pan-européens. Bpifrance est également très active en investissement indirect puisqu'elle est présente, via 262 fonds partenaires en 2015, dans la moitié des acteurs français du capital-innovation.

En revanche, la participation de l'université au financement de l'innovation est faible, contrairement aux pays anglo-saxons.

L'investissement direct de l' É tat dans le capital risque est trop important . Il investit chaque année 366 millions d'euros dans le capital risque, soit 0,018 % du PIB. Cela représente 40 % du total des investissements dans le capital risque en France. De son côté, le Royaume - Uni investit en moyenne 112 millions d'euros par an dans le capital risque, soit 0,006 % de son PIB, et 18 % du total investi. L'Allemagne quant à elle investit 149 millions d'euros soit 0,005 % de son PIB, soit 20 % du total des investissements dans le capital risque. En effet l'absence de la participation de Bpifrance dissuade parfois d'autres investisseurs d'apporter leurs capitaux.

L'intervention de l'argent public dans le capital risque, si elle apparaît comme la contrepartie de la faiblesse de l'initiative privée, risque à terme de fausser l'allocation optimale des ressources , comme l'a parfaitement analysé le Conseil d'analyse économique en juillet 2016 :

§ « l'État n'a, en général, pas de compétences particulières pour détecter les secteurs et les entreprises d'avenir ; il n'a pas de faculté le prédisposant à « choisir les gagnants » mieux que le secteur privé ;

§ l'intervention publique peut évincer certains acteurs privés en concurrence de facto avec un acteur qui ne fait pas face aux mêmes objectifs de rentabilité ni de levée de capitaux auprès de tiers ;

§ les groupes de pression peuvent, par l'intermédiaire du processus politique, obtenir des choix différents de ceux que des experts indépendants opéreraient ; les personnalités politiques peuvent être tentées d'utiliser l'intervention publique à des fins électorales, soit afin de capter les votes de groupes ciblés, soit pour se positionner sur des symboles forts et porteurs auprès de l'électorat ;

§ de façon reliée, il est très difficile de mettre un terme à des initiatives publiques. Cela est vrai que le projet initial s'avère justifié ou non. Ces facteurs font que les politiques industrielles ne sont pas toujours fructueuses sur le long terme et que les institutions s'empilent les unes sur les autres au cours du temps ;

§ le poids important du secteur public peut être perçu négativement par les investisseurs étrangers qui considéreraient Bpifrance comme le « bras armé » d'un État français à réputation « protectionniste ou craindraient des quotas géographiques d'exposition française ».

Bpifrance a joué un rôle majeur pour pallier les carences du secteur privé suite à la crise de 2008 . Mais la pérennité de son intervention interroge. Elle « aura parfaitement réussi le jour où elle ne sera plus nécessaire que sur des segments bien spécifiques qui ne peuvent être financés par le seul secteur privé ». Dans cet objectif, l'écosystème doit être alimenté par de nouveaux fonds innovants, lesquels supposent que les acteurs privés puissent prendre le relais.

Or, comme le souligne le Conseil d'analyse économique, « La difficulté est que du fait même de son existence, et parce qu'elle joue un rôle clé d'instruction des dossiers et de coordination des acteurs privés, Bpifrance porte en elle le risque, par effet d'éviction, d'entraver l'émergence d'un écosystème autonome ».

L'objectif des pouvoirs publics devrait donc être l'émergence d'une industrie du capital risque autonome et non de faire de Bpifrance un substitut permanent à la faiblesse de l'investissement privé .

4. « Ubériser » le financement des PME ?
a) La Fintech va bouleverser le système bancaire.

La technologie financière , aussi dénommée « Fintech » , est une nouvelle industrie financière qui déploie la technologie numérique pour améliorer les activités financières. Il s'agit d'une nouvelle étape de la désintermédiation bancaire qui s'est faite sur les produits et concerne désormais le métier lui-même.

Les Fintech prétendent en effet remplir la même fonction qu'une banque : assurer la sécurité d'un système de paiement, prêter de l'argent à partir de dépôts d'investisseurs, mais différemment et mieux, grâce à une meilleure connaissance de leurs clients par l'utilisation du Big Data 263 ( * ) , ce qui leur permet une meilleure analyse du risque de crédits des sociétés.

La nouvelle directive européenne « DSP2 » (ou Directive sur les Services de Paiement), entrée en vigueur le 13 janvier 2018, oblige désormais les banques à partager les données de leurs clients avec les autres opérateurs. L'exploitation de ces données va donc permettre aux nouveaux entrants, que sont les Fintech, de proposer des offres similaires aux banques, mais à moindre coût. Ils pourront même élaborer de meilleures offres, plus adaptées aux besoins des clients.

Le point fort de la Fintech est précisément l' exploitation des données financières des entreprises . Les banques « classiques » restent  difficiles à concurrencer sur le coût du financement. Les Fintech font de la rapidité de leur réponse aux candidats à l'emprunt un argument commercial. Lendix promet ainsi une offre de prêt ferme en 48 heures grâce à la reconnaissance optique de caractère. Bankin' peut capter l'ensemble des données bancaires récentes des entreprises si celles-ci acceptent de partager leurs identifiants bancaires. Credit.fr , rachetée cet été par Tikehau Capital, assure analyser entre 160 et 400 paramètres sur chaque société en quête d'un financement, permettant à une équipe de trois analystes d'étudier 17 000 dossiers dans l'année, des algorithmes de scoring effectuant une partie du tri dès le départ 264 ( * ) .

La Fintech suscite un fort engouement mondial depuis 2012 : les volumes investis dans les Fintech sont passés de 2,5 milliards de dollars en 2012 à 20 milliards de dollars en 2015 , et des sociétés parfois non cotées en Bourse sont valorisées plus de un milliard de dollars. Les Fintech suscitent une véritable frénésie chez les investisseurs en capital-risque qui ont investi 16,6 milliards de dollars en 2017 dans un peu plus de 1 120 start-up de la finance. Après sa naissance en Californie, la vague atteint l'Europe : 2,7 milliards de dollars y ont été investis, soit plus du double de 2016, contre 300 millions de dollars en 2013. L'Europe a soutenu plus de Fintech que tous les pays d'Asie réunis (297 contre 290) l'an dernier, une première depuis 2014.

Au total, et selon KPMG 265 ( * ) , les fonds mondiaux investis dans les Fintechs ont progressé de 24 % en 2017 et s'élevaient à 31 milliards de dollars en 2017 contre 25 milliards en 2016. Le nombre de transactions réalisées dans ce secteur est passé de 1 076 en 2016 à 1 134 en 2017. La réalisation des 10 transactions les plus importantes a représenté 5,3 milliards de dollars en 2017. Le secteur des paiements/transactions accapare le top 10 des méga-transactions avec quatre Fintechs pour un volume de 31 %.

2017 a constitué une année record en France. Les fonds levés ont bondi de 84 % pour atteindre 318 millions d'euros via 64 transactions alors qu'en 2016, les fonds levés correspondaient à 172 millions d'euros. Cette croissance se constate aussi au niveau du ticket moyen des opérations : de trois millions d'euros en 2016, il est passé à cinq millions d'euros en 2017.

Le début de l'année 2018 témoigne de la poursuite d'une tendance dynamique du marché des levées de fonds Fintechs en France, avec déjà près de 110 millions d'euros de fonds levés à travers plus de dix opérations - soit déjà l'équivalent de toute l'année 2015.

En France, deux jours après l'entrée en vigueur de la nouvelle directive européenne sur les services de paiement ou DSP2 266 ( * ) , le 15 janvier 2018, la société française Bankin ' a été la première Fintech agréée comme établissement de paiement , ce qui lui permet d'avoir le même statut que les banques et d'assurer des services financiers sécurisés.

Pour l'instant, les Fintech restent sur des niches réservées aux clients exclus des banques ou à des besoins très spécifiques non couverts par le système bancaire. Mais la situation devrait rapidement évoluer.

La deuxième génération de technologie financière émerge et devrait concerner cette fois le système bancaire et financier dans son ensemble. Elle se fonde sur la technologie de la blockchain , dont le potentiel est comparé à celui du protocole TCP-IP qui a fondé Internet.

La blockchain souffre encore de la confusion que la presse fait à son égard. En effet, le bitcoin utilise la technologie blockchain , ce qui a conduit à l'amalgame blockchain/bitcoin . Cependant, le bitcoin est une cryptomonnaie tandis que la blockchain constitue un protocole sur lequel repose le fonctionnement de cette cryptomonnaie.

Le fonctionnement de la blockchain 267 ( * )

Ce protocole open source, qu'on pourrait traduire par « chaîne de blocs » ou, plus précisément, « enchaînement de blocs», a deux caractéristiques majeures : il est décentralisé (comme la plupart des protocoles, il vise à la communication entre machines sans utiliser de machine centrale) et cohérent. Que le système soit cohérent et décentralisé signifie qu'au lieu de devoir consolider l'information en un point qui serait l'autorité centrale, l'ensemble de l'information est disponible en chaque noeud du réseau. Il n'est plus besoin d'un « grand livre » central pour valider l'ensemble des informations. Par exemple dans le cas du bitcoin, l'ensemble des transactions sont enregistrées après avoir été confirmées en chaque noeud du réseau. Il n'est donc plus nécessaire d'avoir une autorité centrale ou un hôtel des Monnaies pour s'assurer qu'il n'y a pas eu de fraude ou double dépense (i.e. utiliser le même bitcoin pour deux transactions distinctes). Il suffit de vérifier la cohérence avec l'ensemble des transactions ou avec le noeud précédent du réseau.

Entre Internet (TCP-IP) et la blockchain existent des parallèles puisque ce sont tous les deux des protocoles permettant la création d'une infrastructure décentralisée. Néanmoins, là où Internet transfère des paquets de données d'un point A à un point B, la blockchain permet à la « confiance » de s'établir entre des parties distinctes. Dit autrement, avec la blockchain , le « tiers de confiance » devient le système lui-même.

Source : « Fintech 2020, reprendre l'initiative », CroissancePlus PME Finance, 2016

b) La France, premier pays au monde à autoriser l'usage financier de la blockchain

La France est le premier pays en Europe et au monde, avec l'État américain du Delaware, à autoriser dans sa législation l'usage financier de la blockchain .

(1) L'encadrement législatif de la blockchain

Il s'est opéré en deux temps.

L'o rdonnance n° 2016-520 du 28 avril 2016 relative aux bons de caisse a introduit dans les articles L.223-12 et 13 du code monétaire et financier la définition légale de la blockchain comme « un dispositif d'enregistrement électronique partagé [DEEP] permettant l'authentification » d'opérations grâce à la constitution d'un registre décentralisé permettant de garantir à tout instant la sécurité et la validation d'échanges de données grâce à la technologie des « DLT » ou technologies de registre distribué 268 ( * ) .

Les bons de caisse peuvent faire l'objet d'une offre par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement ou d'un conseiller en investissements participatifs au moyen d'un site internet remplissant les caractéristiques fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers. Ils prennent alors la dénomination de minibons.

Dès lors, ces titres peuvent être cédés selon des modalités adaptées : l'inscription de l'opération de cession dans le dispositif d'enregistrement partagé opère le transfert de propriété du titre.

L'ordonnance précitée prévoit que l'émission de minibons peut être inscrite dans un dispositif d'enregistrement électronique partagé, la blockchain , dans des conditions précisées par le décret n° 2016-1453 du 28 octobre 2016 relatif aux titres et aux prêts proposés dans le cadre du financement participatif.

Précédée de deux consultations publiques, l' ordonnance n° 2017-1674 du 8 décembre 2017 269 ( * ) fait de Paris la première place financière en Europe à définir un régime juridique adapté pour le transfert de propriété de titres financiers par un dispositif d'enregistrement électronique partagé.

La technologie de la chaîne de blocs s'appliquera notamment aux :

- titres de créance négociables ;

- parts ou actions d'organismes de placement collectif ;

- titres de capital émis par les sociétés par actions et les titres de créance autres que les titres de créance négociables, à condition qu'ils ne soient pas négociés sur une plate-forme de négociation, au sens du I de l'article L. 420-1 du code monétaire et financier , dans sa rédaction en vigueur à compter du 3 janvier 2018.

L'ordonnance permet de conférer à l'inscription d'une émission ou d'une cession de titres financiers dans une blockchain les mêmes effets que l'inscription en compte de titres financiers. Elle ne crée pas d'obligation nouvelle, ni n'allège les garanties existantes relatives à la représentation et à la transmission des titres concernés. Les dispositions au sein du code monétaire et financier et du code de commerce relatives aux titres financiers sont ajustées pour permettre le recours à ce dispositif.

Au plus tard au 1 er juillet 2018, un décret en Conseil d'État devra fixer les conditions applicables à l'inscription de titres financiers dans un DEEP.

(2) La régulation de la blockchain

La Banque de France a défini la blockchain comme « une technologie de stockage et de transmission d'informations. Par extension, ce mot désigne une base de données numérique décentralisée. Souvent assimilée à un registre, cette base regroupe un historique de transactions électroniques (c'est le « chain » dans blockchain).

Cette technologie permet à des personnes connectées en réseau qui ne se connaissent pas, de :

- réaliser des transactions en quasi-temps réel à partir d'une même application

- s'affranchir des intermédiaires tels que les banques, notaires, cadastres

- s'assurer de la fiabilité et de la sécurité de leurs opérations ».

La Fintech est régulée par l'Autorité des marchés financiers 270 ( * ) et par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution .

Les acteurs sont en principe les prestataires de services d'investissement (PSI) 271 ( * ) , autres que les sociétés de gestion de portefeuille. Ces entreprises d'investissement et établissements de crédit ont reçu un agrément délivré par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) après avis de l'AMF. L'exercice de chacun de ces services est soumis au respect de règles de bonne conduite et d'organisation.

L'exercice de services d'investissement requiert, sauf exemptions prévues dans le code monétaire et financier, un agrément du programme d'activité portant sur le service de conseil en investissement et/ou le service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers. Concernant les autres services d'investissement, le service de tenue de compte-conservation et l'activité de compensation d'instruments financiers, l'AMF peut émettre des observations.

Les règles prudentielles auxquelles sont soumis les PSI sont de la compétence de l'ACPR.

(3) Une prochaine régulation des Initial Coin Offerings

L'AMF a organisé une consultation publique dont elle a rendu compte le 22 février 2018 272 ( * ) sur les Initial Coin Offerings (ICO), levée de fonds en jetons virtuels.

Qu'est-ce qu'une ICO (Initial Coin Offering) ?

Une ICO ( Initial Coin Offering ) est une méthode de levée de fonds, fonctionnant via l'émission d'actifs numériques échangeables contre des cryptomonnaies durant la phase de démarrage d'un projet (définition de ICO Mentor ) .

Ces actifs numériques sont appelés tokens (jetons, en français). C'est pourquoi les ICO sont également appelées « token sales ».

Dans un premier temps, les tokens sont émis par l'organisation à l'origine de l'ICO, et peuvent être acquis par quiconque lors de l'ICO en échange de cryptomonnaie (le plus souvent, de l'ether ou du bitcoin).

Dans un second temps, ces tokens :

- sont vendables et achetables sur des plateformes d'échange, à un taux dépendant de l'offre et de la demande. Ils sont donc très liquides ;

- ont vocation à être utilisables dans le projet financé par l'ICO en question. Leur valeur est donc censée dépendre du service fourni in fine par l'entreprise à l'origine de l'ICO.

Les tokens ne représentent pas des parts de l'entreprise, à la différence d'actions . Acheter des tokens lors d'une ICO revient en fait à pré-payer le produit ou le service appelé à être développé. Pour prendre un exemple, une IPO 273 ( * ) consisterait à acheter des actions d'Air France, une ICO serait pré-acheter les Miles.

Les porteurs d'un projet d'ICO garantissent que ces tokens seront rares. Le terme Initial est donc clef : il s'agit d'acheter ces tokens au tout début du processus, lorsque leur valeur est encore relativement faible.

Cette méthode incite fortement les participants de l'ICO à être investis dans le projet : ceux-ci ont en effet intérêt à ce que celui-ci devienne par la suite un succès, afin de pouvoir à terme utiliser les tokens acquis ou bien espérer en tirer une valeur financière supérieure à leur valeur d'achat. Ces « early-adopters » sont clefs pour la réussite espérée du projet.

Les ICO sont utilisés par des créateurs d'applications blockchain ou de blockchains elles-mêmes. Le plus souvent, les ICO servent à financer le lancement d'applications décentralisées qui fonctionnent sur un protocole blockchain spécifique. Parfois cependant, les ICO visent à financer directement des protocoles blockchain .

N'importe quel investisseur disposant de cryptomonnaie peut également utiliser des ICO.

C'est pour cette raison que les ICO sont souvent appelées crowdsales : dans une logique similaire à celle du crowdfunding , n'importe quel internaute peut investir dans un projet initiant une ICO, à condition de posséder des cryptomonnaies. Pour investir, l'internaute échange le montant de cryptomonnaie qu'il souhaite contre des tokens , émis par le projet réalisant son ICO.

Les initiateurs des ICO les utilisent pour s'affranchir des contraintes des levées de fonds traditionnelles.

Les ICO permettent aux lanceurs de projets de contourner le système classique de venture capital (capital-risque) qui n'aurait souvent pas permis de financer (autant) leur projet à un stade aussi précoce de développement. Les ICO, qui se concentrent sur les phases de démarrage des projets (d'où le terme Initial ), sont en effet lancées lorsque le produit n'en est encore qu'à ses toutes premières étapes de développement (voire de prototypage). De nombreux projets ont ainsi pu lever des sommes considérables - plusieurs dizaines de millions de dollars, parfois même des centaines de millions - qu'ils n'auraient jamais pu lever avec des fonds de capital-risque traditionnels.

Les investisseurs les utilisent pour être les premiers à miser sur des projets très prometteurs.

Deux principaux objectifs expliquent les mises des internautes-investisseurs dans les ICO : un objectif spéculatif (en faisant l'hypothèse que le token prendra de la valeur), et un objectif utilitaire (volonté d'utiliser à terme le token dans le cadre du projet financé). Les deux objectifs se rejoignent plus ou moins, puisque l'idée reste fondamentalement la même : miser sur un fort développement à venir du projet, qui permettra d'accroître mécaniquement la valeur du token acheté au départ (en raison de l'offre et de la demande). Dès lors, les possesseurs des tokens pourront soit les revendre à un taux bien plus avantageux que ceux de départ, soit utiliser ces tokens dont la valeur aura grimpée.

Les ICO représentent un changement de paradigme.

Ce mécanisme bouscule les règles traditionnelles de l'économie numérique, en premier lieu l'effet de réseau, qui est au fondement du succès des plateformes comme Facebook, AirBnb, BlaBlaCar, etc. En renversant cet effet de réseau, il permettra à des services numériques d'émerger bien plus facilement.

Les ICO permettront également à des protocoles (comme le sont TCP/IP et HTTP pour Internet et le web) de se développer plus rapidement, et d'opérer un rééquilibrage radical en termes de captation de valeur. La valeur créée par les chercheurs à l'origine d'Internet et du web a été récupérée par les Google, Facebook, etc. : cette logique, ici, se renverse.

Les ICO font également tomber la barrière entre investisseurs professionnels ( business angels ou VCs) et investisseurs particuliers. Tout un chacun peut miser sur des services jugés prometteurs.

Malgré leurs atouts considérables, les ICO présentent des risques aussi bien pour les investisseurs que pour les porteurs de projets. L'incertitude réglementaire est notamment au coeur des problématiques actuelles puisqu'il existe une sorte de vide juridique entourant les ICO.

Source : Blockchain France, 22 août 2017

Pour l'AMF, un document d'information sera nécessaire pour informer les acheteurs de tokens . Il devrait comporter a minima des informations sur le projet lié à l'ICO et son évolution, les droits conférés par les tokens et le traitement comptable des fonds levés lors de l'ICO. Ce document devrait également permettre l'identification de la personne morale responsable de l'offre, leurs dirigeants fondateurs et leurs compétences. Il pourrait faire l'objet d'un visa accordé par l'AMF ou une institution ad hoc .

La régulation est un enjeu car ce mode de financement se développe très rapidement .

Dans le monde, 3,8 milliards de dollars ont été levés par plus de 211 opérations de ce type en 2017.

En France, 21 ICO ont été réalisées au 19 février 2018, pour un montant total de levées de fonds réalisées ou envisagées par les porteurs de projets d'environ 350 millions d'euros, dont environ 66 millions d'euros collectés par 5 opérations déjà terminées. La moyenne des levées de fonds atteindrait 25 millions d'euros.

Les montants levés en France sont disparates, allant de 700 000 euros pour l'ICO la plus ancienne à environ 50 millions d'euros pour des projets en cours de concrétisation. En comparaison, la plus grosse ICO réalisée à l'étranger visait une levée de fonds de 700 millions de dollars. La messagerie cryptée Telegram vient de lever 850 millions de dollars, pour un objectif initial de 600 millions, afin de financer son projet TON 274 ( * ) .

Selon le ministre de l'Economie 275 ( * ) , l' É tat anticipe cette révolution qui « pourrait bouleverser nos usages quotidiens dans les secteurs de la banque et de l'assurance, des marchés financiers, mais aussi des brevets et des actes certifiés. Elle pose la question des conséquences pour les épargnants comme pour les acteurs traditionnels comme les banques et les fonds d'investissement » et « offre des opportunités inédites à nos start-ups », en promettant de « créer un réseau de confiance sans intermédiaire, d'offrir une traçabilité accrue des transactions et, globalement, de faire gagner l'économie en efficacité ».

Un cadre législatif adapté sera proposé dans la loi PACTE, une fois les conclusions tirées d'un rapport confié à Jean-Pierre Landau sur la « construction d'un cadre juridique efficace », afin de permettre « aux entreprises initiant une ICO de démontrer leur sérieux aux investisseurs potentiels ».

Le Gouvernement propose ainsi que l'AMF donne « un visa aux entreprises émettrices de jetons respectant certains critères précis de nature à protéger les épargnants. Cette « liste blanche » constituera un repère précieux pour les investisseurs qui souhaitent financer des projets sérieux et créateurs de valeur ».

D'ores et déjà, la commission des Finances du Sénat a renforcé la protection des utilisateurs de Fintech à l'occasion de l'examen, le 14 mars dernier, du projet de loi ratifiant l'ordonnance du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite "DSP 2" 276 ( * ) .

La France « ne veut pas rater la révolution de la blockchain » car les ICO sont un moyen de créer de nouvelles sources de financement pour les entrepreneurs, d'offrir de nouvelles opportunités d'investissement pour les particuliers, et, surtout, de créer de nouveaux business models , aussi bien pour les entrepreneurs que pour les créateurs de protocoles.

Les ICO concurrencent le travail des investisseurs traditionnels, puisque n'importe quel internaute peut décider d'investir dans un projet : « les ICO feront tomber la barrière entre investisseurs professionnels et acheteurs de tokens de la même façon qu'Internet a fait tomber la barrière entre journalistes professionnels d'une part, et blogueurs et utilisateurs de Twitter d'autre part. Internet a permis à chacun de devenir journaliste amateur. Désormais, des millions de gens vont devenir investisseurs amateurs » 277 ( * ) .

Les ICO, un nouveau business model du financement des entreprises

Jusqu'alors, figurer parmi les utilisateurs pionniers d'un service numérique n'était pas récompensé ; c'était même le contraire, puisque les grands succès du numérique se sont développés avec l'effet de réseau selon lequel la valeur d'un service augmente plus que proportionnellement à chaque nouvel utilisateur. Par exemple, BlaBlaCar présentait peu de valeur à ses débuts, puisque très peu de covoiturages étaient proposés ; désormais BlaBlaCar présente un maillage territorial très fin et une quantité d'offres très importante, ce qui rend le service très attractif pour les utilisateurs.

Les ICO bousculent ce paradigme en offrant, via l'émission de tokens , des incitations fortes à rejoindre le réseau le plus tôt possible, au moment où le token lié à ce réseau présente une valeur encore relativement faible (par rapport à ce qu'il pourra valoir ensuite). Ce mécanisme de création de viralité via l'émission de tokens bénéficie donc aux early adopters et encourage (financièrement) les internautes à rejoindre tôt le service.

Les ICO permettront donc à des services numériques d'émerger bien plus facilement, là où les start-ups tentaient toutes les ruses possibles jusqu'ici pour réduire le blocage de l'effet de réseau (Facebook a commencé en aspirant la base des étudiants d'Harvard pour pouvoir présenter une base qui ne soit pas vierge ; Reddit générait son propre contenu avant que les utilisateurs postent le leur sur la plateforme ; etc.).

Les services numériques ne sont pas les seuls à pouvoir profiter des ICO. C'est aussi le cas des protocoles, sur lesquels reposent par exemple les plateformes numériques actuelles. Les protocoles clefs, en particulier celui à l'origine d'Internet (TCP/IP) et du web (HTTP), sont nés du travail de chercheurs. Or la grande majorité des chercheurs qui ont créé ces protocoles en ont tiré très peu de gains financiers directs. La captation de valeur s'est faite au profit des Google, Facebook, etc. Avec la blockchain et son système de tokens , la relation entre protocoles et applications se renverse. Les créateurs d'un protocole peuvent le monétiser directement, et en tirer d'autant plus de bénéfices que d'autres construisent des business par-dessus ce protocole.

C'est la notion de ` fat protocols' : avec l'économie des tokens , la valeur se concentre dans la couche protocolaire, et seule une partie de cette valeur est distribuée tout au long de la couche applicative. De ce fait, dans l'univers blockchain , la valeur de marché d'un protocole augmente toujours plus vite que la valeur de marché combinée des applications construites par-dessus . Le créateur originel d'un protocole obtiendra d'autant plus d'argent que le protocole est adopté par un grand nombre d'utilisateurs et qu'il a conservé pour lui certains des tokens du protocole (ce qui lui permettra de les vendre plus cher ensuite).

Avec les ICO et plus profondément les tokens , les règles traditionnelles de l'économie numérique sont renversées . Un nouveau web, que certains appellent web 3.0, fondé sur une logique de décentralisation, est en train d'émerger...

« ICO, un changement de paradigme », 22 août 2017, ICO Mentor.

(4) Vers une régulation européenne

La Commission européenne a présenté le 8 mars 2018 un projet de règlement visant à créer un passeport européen spécifique aux plates-formes de crowdfunding souhaitant lever des fonds dans l'ensemble des pays de l'Union européenne.

Cet encadrement ne portera que sur les plateformes en prêt ou titres financiers (actions ou obligations). Les modèles tels que l'investissement en start-ups ou le crowdfunding immobilier entendu comme le financement de la promotion immobilière sont également concernés par cette uniformisation. Les promoteurs font en effet partie de ces PME pour lesquelles les conditions d'accès à l'emprunt bancaire depuis 2008 (accords Bâle II) ont été durcies et qui ont besoin d'effet de levier pour se développer et accroître leur chiffre d'affaires.

La mise en place de ce nouveau régime européen pour le financement participatif prévoit :

- la création d'un agrément « European Crowdfunding Services Provider » (ECSP) que les plateformes devront demander si elles souhaitent s'étendre hors de leur marché national ;

- la désignation de l'ESMA ( European Securities and Markets Authority ) en tant que superviseur des activités des plateformes à l'échelle de l'Union européenne. Cette autorité indépendante sera également en charge de traiter les demandes d'agrément des différentes plateformes.

- le plafonnement à un million d'euros par levée sur 12 mois pour les offres individuelles de financement sur les plateformes.

Par ailleurs, la Commission présentera, dans le courant de l'année 2018, un rapport sur les problèmes et les potentialités des actifs cryptographiques et elle élaborera une stratégie globale en matière de technologie des registres distribués et de chaînes de blocs, couvrant tous les secteurs de l'économie.

c) Objectif n° 20 : mettre la Fintech au service du financement des PME
(1) Une meilleure connaissance des PME pour les épargnants

Si l es ménages ont déserté les marchés financiers, ce n'est pas en raison de leur manque de culture financière mais plutôt leur insuffisante appréhension du risque financier. Les épargnants ont subi la crise des subprimes en 2007-2008 puis la crise de la zone euro en 2012. Ils constatent des rendements faibles de l'ordre de 1,5 % pour les fonds en euros et de 0,75 % pour le livret A. Ils ont donc acquis une expérience négative des marchés financiers entre krachs et rendements décevants. Les banques ne leurs proposent guère d'innovation financière sûre et adaptée à leur besoin.

La Fintech pourrait proposer de nouvelles solutions financières plus adaptées à la demande des épargnants et plus à même de sécuriser leurs investissements .

Ces nouveaux opérateurs financiers « proposent des solutions technologiques permettant de préciser la connaissance de l'épargnant, de concevoir des solutions de placement moins formatées, plus individualisées, d'apporter des outils de maîtrise de risque adaptés aux conditions de marchés, tels qu'ils sont devenus. Les Fintechs permettent de mieux satisfaire les besoins réels de l'épargnant, de tenir compte de ses contraintes, de contribuer au maillage des compétences capable de résoudre le dilemme de l'épargnant engagé sur les marchés financiers entre temps long et temps court, de rétablir sa confiance en apportant, l'une un profilage, l'autre une allocation, une autre encore une surveillance de risque, une autre enfin la flexibilité indispensable à la gestion dès lors qu'elle vise à la performance en maîtrise de risque » 278 ( * ) .

Dans le contexte du resserrement du crédit professionnel et de la défiance structurelle des établissements bancaires classiques envers les entrepreneurs - liés principalement au risque de défaut de paiement -, la Fintech ouvre de nouvelles perspectives dans la recherche de capitaux pour financer les entreprises et l'économie : « pour les artisans, les auto-entrepreneurs et les entreprises, tout comme pour les particuliers, des opportunités peuvent apparaître notamment dans la réduction tarifaire des prestations bancaires, dans la capacité à trouver d'autres formes de financement alternatif - participatif par exemple - et aussi à entreprendre dans un nouvel univers pour les entrepreneurs les plus créatifs et audacieux » 279 ( * ) .

(2) Une réduction des coûts de transaction des marchés pour les PME

Pour les PME, dont le financement demeure encore à 90 % bancaire, ces technologies numériques ouvrent de nouvelles solutions de financements répondant de façon satisfaisante à leurs besoins : financement de l'innovation, du risque, du court-terme, sans garantie. Elles vont pouvoir à leur tour profiter de la désintermédiation financière jusque-là réservée aux grandes entreprises.

Le développement des Fintech dans le crédit aux PME pourrait aussi conduire, paradoxalement, à une hausse du coût des crédits bancaires.

Les moyens de paiement sont aujourd'hui une source de revenus abondants pour les banques françaises, qui leur permet notamment d'offrir leurs autres services, en particulier le financement de l'investissement pour les particuliers ou les PME, à bas coût. Ceci contribue à expliquer la faible désintermédiation bancaire dans le crédit aux PME en France par rapport aux États-Unis.

La situation pourrait toutefois changer avec la concurrence opérée par les Fintech sur le système bancaire traditionnel : « pour retrouver leurs marges actuelles, déjà attaquées, les banques devront trouver d'autres sources de revenus. Cette autre source de revenus ne semble pas pouvoir être le paiement des particuliers, qui est sujet à une concurrence croissante et l'objet d'une grande attention du politique et du régulateur. De même, la concurrence est forte dans le crédit aux particuliers et particulièrement néfaste pour les banques qui quand elles perdent un crédit, risquent de perdre un client. Le crédit d'investissement consenti aux PME et aux particuliers semble donc pouvoir être une source de revenus de substitution au moins partielle pour les banques françaises. Si les banques doivent renchérir leurs conditions de financement du crédit aux PME pour compenser leurs pertes de revenus, cela aura de lourdes conséquences pour l'ensemble du tissu de PME françaises. De même, une hausse des coûts de gestion de compte (aujourd'hui relativement faibles pour les particuliers) pourrait être accentuée avec le développement de nouveaux systèmes de paiement » 280 ( * ) .

Si ce scénario pessimiste se réalisait, les PME seraient pénalisées. En réalité, elles trouvent dans la Fintech davantage d'opportunités en termes de nouveaux modes de financement que d'inconvénients en termes de coût de leur financement.

Ainsi, la Fintech LiquidShare , cocréée par BNP Paribas , Société Générale , Caceis , la Caisse des Dépôts , Euroclear , S2iEM 281 ( * ) et Euronext avec le soutien de Paris Europlace , a pour finalité de sécuriser et faciliter les opérations post-marché 282 ( * ) des PME en utilisant la technologie blockchain , les coûts de transaction pour le règlement-livraison de titres de PME étant aujourd'hui trop importants : « La blockchain reposera sur un registre virtuel de données distribuées et partagées entre les parties. À terme, cette individualisation permettra de réduire les frais de transactions, car le règlement et la livraison se feront instantanément (pour l'instant, il faut attendre deux jours entre ces deux opérations), en simplifiant les différentes étapes des opérations de post-négociation et en garantissant la transparence des registres de titres. Néanmoins, la Fintech continuera à travailler avec un dépositaire central, l'intervention d'un tiers de confiance restant nécessaire » 283 ( * ) .

Un autre exemple a été donné lors de l'audition par notre commission des finances du Sénat du 7 février 2018 sur les nouveaux usages et la régulation du blockchain par le témoignage de M. Gilles Fedak, cofondateur de l'entreprise iExec Blockchain Tech , start-up fondée en octobre 2016 qui est la première plateforme décentralisée de cloud computing utilisant la technologie blockchain, qui est « une place de marché, une sorte d'Airbnb du serveur, mais sans plateforme centrale » :

Lever 11 millions d'euros en trois heures grâce à la blockchain

Nous avons ainsi proposé à une communauté de souscrire à ce jeton en échange d'une monnaie dont le cours est déjà établi -en l'occurrence, le bitcoin. La préparation a duré six mois ; puis, en avril 2017, nous avons levé, en moins de trois heures, 10 000 bitcoins, pour un montant de 11 millions d'euros, soit la cinquième levée mondiale de crypto-monnaie.

Une fois l'ICO terminée, les investisseurs ont reçu leurs jetons, échangeables sur un marché secondaire. Notre capitalisation est désormais de 100 millions de dollars et nous sommes cotés sur une dizaine de places d'échanges dont quatre majeures - aux États-Unis, en Corée du Sud, à Hong-Kong et à Londres.

(....)

Une start-up comme la nôtre fait face à trois risques. Le premier est la volatilité liée au cours du bitcoin. Sur ce plan, nous avons plutôt bénéficié de l'envolée des cours. Le deuxième est le risque comptable et fiscal : nous ne sommes pas en mesure de déterminer quel montant nous avons levé, et il y a plusieurs scénarios très différents de comptabilisation. Dans l'un d'entre eux, nous paierions davantage d'impôts que Facebook ! Nous espérons éliminer ce risque cette année (...).

D'autres entreprises ont réalisé des levées encore plus spectaculaires 284 ( * ) :

- le projet Tezos (nouvelle blockchain qui pourrait concurrencer la blockchain Ethereum) est à ce jour l'ICO ayant levé le plus d'argent : l'équivalent de 232 millions de dollars 285 ( * ) ;

- le protocole Bancor a levé l'équivalent de 153 millions en seulement trois heures ;

- En avril 2017, Cosmos (réseau visant l'interopérabilité entre les blockchains ) a levé l'équivalent de 16 millions de dollars en moins de 30 minutes ;

- Gnosis (plateforme décentralisée de marché prédictif) a levé l'équivalent de 12 millions en 12 minutes ;

- le projet Brave , créé par le fondateur de Mozilla, de Firefox et du langage Javascript, a levé en juin 2017 l'équivalent de 34 millions en moins de 30 secondes...

L'économie 4.0 est en marche et nos PME doivent s'y préparer.

La France devrait donc se doter rapidement d'une stratégie publique et d'un plan d'action destinés à mettre la Fintech au service du financement des PME (proposition n° 24).

Cette stratégie devrait approfondir le programme « Transition Numérique », lancé par le Gouvernement en 2012, pour aider les TPE et les PME à s'approprier les nouveaux usages numériques et à intégrer ces technologies afin d'améliorer leur compétitivité.

Elle pourrait également reprendre les préconisations du rapport Lemoine de novembre 2014 286 ( * ) , complété par le rapport d'information de l'Assemblée nationale de mai 2014 287 ( * ) .

5. Réorienter l'épargne des ménages vers l'entreprise
a) Le paradoxe de l'investissement en France

Selon une étude récente 288 ( * ) , la France connaît un fort taux d'investissement qui contraste avec une faible croissance de ses entreprises. Il est resté stable à un niveau élevé et n'a pas décroché malgré la crise de 2008-2009.

Ce taux a été en 2015, par rapport à la valeur ajoutée, de :

- 20,3 % en Allemagne,

- 24,3 % en Italie et en Grande-Bretagne,

- 25 % en Espagne,

- 29,3 % en France.

Les entreprises industrielles françaises ou établies en France ont donc investi 80 milliards d'euros environs répartis dans l'appareil de production (53,7 %, soit 43 milliards environ), la recherche-développement (31,9 %, soit 25,6 milliards) et la construction de bâtiments (14,4 %, soit 11,5 milliards).

L'investissement français serait en réalité plus improductif qu'insuffisant car moins bien orienté vers des activités innovantes à forts gains de productivité. La France souffrirait d'un « manque d'investissement dans l'innovation de produits et dans la modernisation des équipements de production. Le nombre relativement faible de robots utilisés dans la production manufacturière est un indicateur fréquemment mentionné comme révélateur d'un phénomène plus large » selon le rapport de M. Henrik Enderlein et de M. Jean Pisani-Ferry remis aux ministres allemand et français de l'Économie en 2014, alors MM. Sigmar Gabriel et Emmanuel Macron 289 ( * ) .

L'investissement est non seulement sous-dimensionné mais également très concentré . Selon une étude de l'INSEE de 2016 290 ( * ) , 70 % des dépenses d'investissement sont réalisées par seulement 3 000 entreprises. Parmi elles, la moitié sont des grands groupes, un tiers sont des ETI et seulement 15 % des PME. De manière plus générale, le taux d'investissement des PME reste nettement inférieur à la moyenne. Tous secteurs confondus, il s'élève à 15,2 %, alors qu'il atteint 22,5 % pour les grands groupes et 23,9 % pour les ETI.

Le soutien public à l'investissement privé ne manque cependant pas, avec les deux principaux dispositifs d'aide à l'investissement que sont le CICE, instauré en 2013, ou le Crédit impôt-recherche, créé en 1983, et considéré comme l'un des tout premiers dispositifs de soutien à la recherche et à l'innovation dans le monde.

Or, malgré ces politiques publiques, les investissements de recherche-développement des entreprises françaises n'ont progressé, entre 2008 et 2015, que de 23 % contre 28 % en Allemagne et 44 % en Grande-Bretagne.

Le développement de l'investissement dans l'innovation est donc un enjeu stratégique en France.

b) Le capital-risque, « armure » de la French Tech

Le marché du capital-investissement s'est développé en France, particulièrement depuis le début des années 2000, pour devenir le deuxième marché européen derrière le Royaume-Uni.

Environ 1 650 entreprises ont fait l'objet d'un financement par les membres de l'AFIC (Association Française des Investisseurs pour la Croissance) en 2014, ce qui place la France au deuxième rang mondial en termes de nombre d'entreprises financées (5 000 aux États-Unis, 1 300 en Allemagne, 900 en Royaume-Uni, 200 en Italie et en Espagne). Par ailleurs, le marché du capital-investissement français a vu sa taille décupler depuis le milieu des années 1990, passant de 876 millions d`euros investis en 1996 à 8,7 milliards d`euros en 2014.

Son rôle essentiel dans le financement de l'innovation a été souligné par France Stratégie en 2014 : « si le crédit bancaire est bien adapté au financement d'une économie en rattrapage ou dont la productivité repose sur des innovations incrémentales, ce n'est pas une modalité adéquate au financement d'innovations radicales qui supposent une phase plus ou moins longue d'incubation suivie, en cas de succès, d'une croissance très rapide. Pour accompagner de telles dynamiques, il faut faire plus de place à l'investissement en capital ».

Capital-investissement et cycle de vie de l'entreprise

Le capital-investissement se décompose en plusieurs types d'activité correspondant à des stades distincts de la vie de l'entreprise. Selon la terminologie de l'AFIC, on distingue :

- le capital-innovation : financement d'entreprises en création ou aux premiers stades de leur développement ;

- le capital-développement : financement d'entreprises ayant atteint leur seuil de rentabilité et dégageant des profits. Les fonds sont employés pour augmenter les capacités de production, la force de vente, développer des nouveaux produits et services, conquérir de nouveaux marchés à l'international,... ;

- le capital-transmission (ou « leverage buy-out » - LBO) : acquisition d'entreprises existantes par une équipe d'investisseurs financiers et de dirigeants venant de la société ou de l'extérieur par le moyen d'un effet de levier ;

- le capital-retournement : financement d'entreprises connaissant des difficultés.

L'activité de capital-investissement fait intervenir des souscripteurs variés au capital des entreprises non cotées :

- des investisseurs institutionnels : banques, assurances, caisses de retraite agissant via des véhicules dédiés comme les Fonds Professionnels de Capital Investissement (FPCI) ;

- des investisseurs privés regroupés dans des family offices ;

- des particuliers regroupés dans des fonds fiscaux de type FIP (fonds d'investissement de proximité) et FCPI (fonds commun de placement dans l'innovation) bénéficiant de réductions d'impôt sur le revenu ou la fortune ;

- des investisseurs dits « corporate » (grandes entreprises) : ce type d'investisseurs reste cependant minoritaire en France ;

- des entités publiques françaises et étrangères : Bpifrance, fonds souverains étrangers, etc.

Source : Rapport sur le financement des PME et ETI en croissance,

Observatoire du financement des entreprises, octobre 2015

Depuis 2000, plus de 105 milliards d`euros ont été investis dans le capital investissement de quelques 5 800 entreprises. L'encours des participations du capital-investissement dans les entreprises françaises était estimé fin 2015 autour de 60 milliards d`euros.

Le capital-investissement français présente un des taux de couverture de son marché domestique les plus importants au monde : en 2012, environ 0,9 % des entreprises françaises de plus de 10 salariés ont été financées par les acteurs du capital-investissement français. Ce ratio de couverture du marché domestique était comparativement de 0,6 % aux États-Unis, de 0,4 % au Royaume-Uni, et de 0,3 % en Allemagne.

Ces flux bénéficient à l'économie de la connaissance dans des secteurs d'avenir qui représentaient 40 % des entreprises financées en 2014 (informatique, biotechnologie, télécommunication, technologies vertes), l'industrie et la chimie concentrant à eux seuls près de 20 % du total des montants investis ces 10 dernières années.

Toutefois, le marché du capital-investissement français est un marché majoritairement composé de « tickets » 291 ( * ) de petites tailles. En 2014, 56 % des entreprises financées ont reçu moins d'1 million d'euros (52 % en moyenne sur la période 2009-2014) et 80 % moins de 3 millions d'euros. À titre de comparaison, l'investissement moyen est de l'ordre de 5,5 millions d'euros/an sur les segments risque et développement aux États-Unis.

L'émergence de fonds de taille plus importante était ainsi vivement recommandée par l'Observatoire du financement des entreprises, dans son rapport précité d'octobre 2015.

L'enjeu est donc de trouver des marges de progression pour mobiliser à plus grande échelle le capital-risque en France. En effet, si 8,2 milliards d'euros ont été investis en capital-investissement dans des entreprises françaises en 2015, contre 6,6 milliards en Allemagne, 12,3 milliards l'ont été au Royaume-Uni.

Définition du fonds d'investissement de capital-investissement

et du fonds d'investissement capital-risque

Le fonds met des investissements communs de plusieurs investisseurs dans les actions et les titres de fonds propres (comme des quasi-fonds propres) de sociétés (entités émettrices). Il s'agit généralement de sociétés privées dont les actions ne sont pas cotées en bourse. Le fonds peut prendre la forme d'une société ou d'une entité sans personnalité juridique, comme une société en commandite.

Dans sa forme, une société de capital-investissement/capital-risque peut être ou bien une entreprise ou bien une société en commandite: il est rare qu'elle soit cotée en bourse. Les sociétés de capital-risque investissent dans l'intention de participer à la croissance de la valeur pour les actionnaires, tout en réalisant une sortie profitable (à savoir la vente des actions). Cette finalité doit figurer dans les statuts.

Les sociétés de capital-risque sont considérées comme des sociétés ordinaires (par exemple dans les secteurs des produits pharmaceutiques, des transports, de l'énergie, etc.), qui choisissent comme activité accessoire d'investir des capitaux dans une autre société (généralement une jeune entreprise) tout en poursuivant leur activité principale.

Source : AMF

Par ailleurs, le développement du capital risque préserverait la French Tech d'un coup de grisou financier comme l'a analysé M. Jean-David Chamboredon, directeur du fonds ISAI et qui fut le porte-parole du mouvement des pigeons 292 ( * ) en 2012 :

Imaginons un « coup de grisou » sur les bourses mondiales

Dans les semaines qui suivront, se dérouleront trois phénomènes.

1/ Les grands « corporates » français prendront la décision au sein de leur Comex de stopper ou de limiter fortement leur activité de « corporate venture ». Ils décideront, ici de ne pas refinancer des sociétés dans lesquels ils détiennent une participation, ou là de faire défaut lors de l'appel de fonds de tel ou tel fonds de capital-risque dont ils sont souscripteurs. Ils mettront une partie de l'écosystème dans l'embarras. Ils en seront un peu gênés, mais mettront logiquement la priorité sur leur coeur de métier.

2/ Les investisseurs internationaux se replieront naturellement sur leurs marchés domestiques, assumeront a minima leurs engagements d'actionnaires vis-à-vis de leur portefeuille tricolore, mais arrêteront, au moins pour un temps, de faire des nouveaux deals. Passant d'offensifs à défensifs, ils créeront une pénurie subite de capital pour nos start-ups les plus ambitieuses.

3/ Bpifrance (et le FEI), comme c'est leur mission, essaieront autant que faire se peut de combler la nouvelle « défaillance de marché », mais leur emprise, déjà importante, se trouvera naturellement capée [ limitée ] par les ratios admissibles en termes de financements publics... De la même façon que nous avons connu un triplement sur les cinq dernières années, nous connaîtrons en tendance une division par deux ou trois des montants levés et des tours de table « externes » (avec un nouvel entrant). Ce freinage sera suivi d'une difficulté retrouvée pour les capital-risqueurs français à lever de nouveaux fonds... « Gloomy » [ sombre ] sera le bon terme pour désigner l'atmosphère au sein de notre écosystème. La raison pour laquelle ce retournement sera plus violent en France qu'ailleurs est simple à expliquer : hormis Bpifrance et les entrepreneurs, il n'y a pas d'investisseurs « longs » dans l'innovation et la technologie en France !

Quand on sait qu'il faut a minima dix ans pour construire un champion du numérique, on comprend que seuls les investisseurs ayant un horizon de ce type, peuvent soutenir une croissance pérenne et vertueuse d'un écosystème comme French Tech... Nos compétiteurs ont la chance d'avoir beaucoup plus d'investisseurs « longs » : qu'il s'agissent des university endowments 293 ( * ) (exemple, 35 milliards de dollars pour la seule Harvard) pour les Américains ou des caisses de retraite par capitalisation (que beaucoup satanisent en les désignant comme « fonds de pension spéculatifs » voulant faire oublier qu'il s'agit de simples gérants de retraites souhaitant servir un bon rendement à leurs futurs retraités) de nos amis américains, britanniques, germaniques ou nordiques, qui investissement de 5 à 10 % de leurs actifs dans le non-coté, dont un quart dans le capital-risque, (exemple, la seule caisse de retraite des fonctionnaires de Californie, nommée Calpers, détient environ 30 milliards de dollars d'actifs soit 8 % de son bilan dans le non-coté).

Par comparaison, nos quelques caisses de retraite par capitalisation sont minuscules et les gérants de la principale épargne longue des Français (assurance-vie) ont dans leur bilan environ 0,4 % de non-coté dont epsilon en capital-innovation ! Les raisons sont prudentielles (Solvabilité II, réforme européenne de l'assurance, en 2009) et culturelles (épargne à capital garanti, liquidité permanente et faible rendement)...

Source : « La French Tech a-t-elle un maillot de bain ? »

La Tribune.fr, 18 janvier 2018

c) Objectif n° 21 : mobiliser l'épargne des Français vers le financement des entreprises
(1) Moins d'actionnaires

Les Français aiment le risque en tant que créateurs d'entreprise, mais moins lorsqu'il s'agit de mobiliser, en faveur des entreprises, leur épargne, laquelle reste assise sur l'immobilier et l'assurance-vie.

La part de la richesse des ménages investie en actifs risqués est plus de trois fois moins élevée en France qu'aux États-Unis : 77 % contre 241 % du PIB respectivement.

Entre 2000 et 2014, la part du patrimoine financier des ménages placé en actions cotées a été divisée par deux, passant de 8,8 % à 4,2 %. En sept ans, la France a perdu plus de la moitié de ses actionnaires individuels (trois millions en 2016 contre 7,4 millions en 2008), même si on assiste à une progression de 22 % en 2016, avec 700 000 actionnaires de plus, soit 3,7 millions. De même, le nombre de plan d'épargne en actions (PEA) a baissé de cinq à quatre millions entre 2014 et 2017.

Mais cette frilosité est relative car les Allemands possèdent deux fois moins d'actions que les Français, notamment dans les PME. Un Allemand détient en moyenne, directement, 3 643 euros d'actions cotées et 3 659 euros d'actions non cotées, contre respectivement 3 550 euros et 12 270 euros pour un Français. Un autre indice peut être trouvé en comparant les comptes courants, qui par définition ne contribuent pas au financement des entreprises. Ainsi, si 1 400 milliards d'euros « dorment » sur les comptes des Allemands, 850 milliards sur ceux des Britanniques, on n'en recense que 450 milliards en France.

(2) Moins d'entreprises cotées

L'investissement en direction des entreprises ne doit pas être assimilé à l'« investissement en bourse ». Par ailleurs, la baisse du nombre d'entreprises cotées est une tendance lourde et mondiale.

Aux États-Unis, les sociétés cotées étaient 7 322 en 1996, mais ne sont plus que 3 671 en 2016.

En France, le nombre de PME-ETI françaises cotées à Paris est passé, entre 2007 et 2017, de 733 à 641 (sur Euronext et Euronext Growth), soit une baisse de 13 % (-90 sociétés).

En 2017, 33 entreprises ont quitté la cote, dont 23 suite à des offres de retrait et 10 suite à des faillites, pour seulement 14 introductions en Bourse (neuf sur Euronext et cinq sur Euronext Growth), contre 17 en 2016, alors que 2017 a été l'année la plus active depuis la crise financière en matière d'introduction en bourse dans le monde.

La bourse de « Paris ne fait plus partie du classement des places les plus actives : 5ème en 2016, elle est sortie du Top 12 cette année » 294 ( * ) . Si leur nombre a été limité, les introductions en bourse ont cependant été beaucoup plus grosses en 2017 qu'en 2016 (2,429 milliards d'euros levés, contre 909 millions en 2016).

Toutefois, les introductions en bourse ne sont qu'une facette des marchés de capitaux. Ainsi, 107 sociétés ont réalisé des augmentations de capital en 2017, soit deux opérations par semaine, et deux fois plus qu'en 2016. Celles-ci ont levé près de 14 milliards d'euros, contre 9,1 milliards en 2016. Cette vitalité témoigne de l'attractivité retrouvée des entreprises françaises en dépit de la faiblesse de la place financière .

L'attrition du marché boursier et le départ d'entreprises, notamment des PME, qui substituent à l'appel public à l'épargne, régulé, le financement par le private equity , non régulé, peut s'expliquer par un encadrement croissant du marché.

Ainsi, le Règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (règlement relatif aux abus de marché) peut-il conduire, au nom de la lutte contre les délits d'initiés, à imposer à toutes les entreprises des contraintes difficilement conciliables avec leur développement et leur bon fonctionnement au quotidien.

Comment en particulier apprécier la notion de « personne étroitement liée à des personnes exerçant des responsabilités dirigeantes » selon le règlement qui serait un « conjoint ou partenaire considéré comme l'équivalent du conjoint conformément au droit national » dans le champ d'investigation de la prévention des abus de marché et, en particulier, des opérations d'initiés ? Comment, concrètement, une entreprise doit-elle procéder afin de permettre l'accomplissement des pouvoirs de surveillance et d'enquête comportant « l'accès à tout document et à toute donnée, sous quelle que forme que ce soit », et permettant « d'en recevoir ou en prendre une copie » ou « de se faire remettre les enregistrements des conversations téléphoniques, des communications électroniques ou des enregistrements de données relatives au trafic détenus par des entreprises d'investissement, des établissements de crédit ou des institutions financières » ? L'appréciation par une entreprise de la portée exacte de ces dispositions est difficile.

Aucun coupable de délit boursier en France n'a jamais été condamné à une peine de prison ferme , le rapport du parquet national financier de février 2015 soulignant que « l'ensemble des peines d'emprisonnement prononcées au cours des dix dernières années a été assorti du sursis total ; la durée moyenne d'emprisonnement s'élève à 9,3 mois, la plus importante étant de 20 mois ». Or, pour tout écart individuel non sanctionné, la tendance est à édicter une régulation de plus en plus stricte que devront appliquer toutes les entreprises dont l'immense majorité est vertueuse.

(3) La création d'un support fiscal adapté et individualisé.

Ni le Gouvernement, qui promet la stabilité du système fiscal après les grandes réformes de la loi de finances pour 2018, ni la Banque de France, ne sont favorables à créer une nouvelle niche fiscale sur l'épargne , car nous aurions « abusé de cette intéressante spécificité hexagonale » selon son Gouverneur 295 ( * ) .

En revanche, la Fédération Bancaire Française propose, dans sa contribution au PACTE « la création d'un produit long d'épargne réglementé et défiscalisé », lequel « s'impose comme une nécessité ». Elle considère en effet que la fiscalisation du plan d'épargne logement (PEL) via le PFU « a pour conséquence de mettre en extinction les flux générés par ce produit ce qui conduit à la mort programmée de la seule ressource longue d'épargne réglementée des bilans bancaires et compromet la stabilité des conditions du financement long de l'économie, notamment des entreprises » 296 ( * ) .

Pour votre rapporteur, il faut, et de manière pragmatique, permettre à notre économie de lutter à armes égales .

Il conviendrait donc de booster le mécanisme de l'IR-PME en s'inspirant du dispositif britannique de l'Enterprise Investment Scheme (l'EIS) (proposition n° 25), comme l'a proposé votre Délégation aux entreprises le 23 novembre 2017 297 ( * ) dans le cadre des amendements qu'elle a initiées à la loi de finances pour 2018 298 ( * ) .

L'EIS permet à un particulier de bénéficier d'un dégrèvement fiscal de 30 % du montant investi dans une PME 299 ( * ) et d'une exemption d'impôt sur les plus-values, les pertes en capital étant par ailleurs prises en charge par le fisc à hauteur de 50 %. Au total, grâce à cette fiscalité, 61,5 % de l'investissement est protégé. Le coût fiscal est d'environ 325 millions de livres sterling. Avec cet instrument, la Grande-Bretagne attire 36 % des investissements en capital-risque en Europe. L'EIS vient d'être doublé dans le budget britannique pour 2018 et porté de un à deux millions.

Ce dispositif particulièrement encourageant explique que chaque année, près de deux milliards de livres sterling sont investis dans les jeunes entreprises britanniques quand l'ancien dispositif ISF-PME ne permettait de mobiliser que 800 millions d'euros.

Par ailleurs, le Seed Enterprise Investment Scheme (SEIS) encourage l'investissement dans les petites entreprises 300 ( * ) et a permis en 2016 d'injecter 180 millions de livres sterling dans 2 000 entreprises.

Avec le Venture Capital Trust 301 ( * ) , ce sont au total 4 milliards d'euros qui financent les entreprises non cotées britanniques par des systèmes de défiscalisation contre 1,8 milliard en France.

Avec cette politique fiscale particulièrement favorable, la Grande-Bretagne attire 36 % des investissements en capital-risque en Europe.

d) Objectif n° 22 : assouplir les contraintes de la directive Solvalibilité II

Un autre enjeu, permettant de développer l'épargne en actions, est européen.

Après la crise des subprimes de 2008, la redéfinition de la marge de solvabilité en fonction des risques de l'ensemble des acteurs financiers, a conduit à l'adoption de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice (Solvabilité II) 302 ( * ) .

Elle offre un nouveau cadre prudentiel au secteur de l'assurance selon une approche en trois « piliers », comparable à celle de Bâle II pour la banque :

- le premier porte sur les exigences quantitatives en capital (niveau minimal de fonds propres qu'une entreprise doit détenir pour offrir des produits d'assurance ; calcul des provisions techniques...) ;

- le deuxième concerne les exigences qualitatives (gestion des risques notamment) et la gouvernance des assureurs.

- le troisième porte sur les informations à fournir aux autorités de supervision et au public.

Les assureurs considèrent que les exigences posées par cette directive pénalisent l'investissement en actions des assureurs et plombent la croissance.

Les assureurs ont ainsi réduit leurs investissements en actions de trois points depuis 2009. Axa par exemple, a réduit la part de ses fonds détenus en actions de 14 % à 4 %, car les normes de Solvabilité II « fixent un horizon de gestion très court, avec des exigences en capital très lourdes qui découragent l'investissement en actions » 303 ( * ) .

En effet, les actions sont la classe d'actifs la plus « chargée en fonds propres » 304 ( * ) , avec 39 % pour les actions cotées et 49 % pour les actions non cotées, ce qui signifie que lorsqu'un assureur investit 100 en actions non cotées, il doit immobiliser dans son bilan 49.

A l'inverse, les contraintes sont moindres sur l'immobilier (25 %) et les obligations d'entreprise (7 %) et nulles pour les obligations d'État, ce qui fait dire à un assureur qu'il est « davantage pénalisé s'il investit en actions Google qu'en obligations de l'État grec »....

Afin de retrouver un flux supplémentaire d'investissements en actions estimé à 30 milliards d'euros en cinq ans , la Fédération française de l'assurance préconise donc, dans sa contribution au PACTE, les mesures suivantes :

- abaisser la charge standard en capital , qui serait appliquée aux actions investies par les assureurs dans le cadre de stratégies d'investissement à long terme (majoritairement en actions) adossées à des passifs de long terme. Cette charge en capital devrait être modulée en fonction de la duration des passifs et converger vers 22 % (contre 39 % actuellement pour les actions cotées et 49 % pour les actions et la dette non cotées) ;

- supprimer la provision pour risque d'exigibilité (PRE) 305 ( * ) , qui a pour vocation de permettre aux assureurs de faire face à leurs engagements en cas de moins-values de certains actifs. Elle ne se justifie plus dans le cadre prudentiel actuel. Cette provision ne connaît pas les mêmes modalités de lissage selon qu'il s'agit de comptabilité sociale de l'entreprise (où elle peut être lissée sur huit ans) ou du compte de participation aux bénéfices (où elle ne peut être lissée que sur trois ans) ;

- à défaut de cette suppression, aligner ses modalités de lissage au compte de participation aux bénéfices sur celles applicables à la comptabilité sociale , ce qui permettrait aux assureurs de libérer du capital qui peut être réalloué à la détention d'actifs plus dynamiques.

Le desserrement des contraintes de la directive Solvabilité II (proposition n° 26) apparaît en effet nécessaire pour votre Délégation afin de favoriser l'investissement de long terme dans les entreprises. Ce dossier doit être porté au plus haut niveau de l'État et faire l'objet d'une position commune franco-allemande, alors même que l'Allemagne a obtenu un report à 2032 de la mise en oeuvre des contraintes de la directive. L'objectif serait d'abaisser la « charge en capital » à 22-30 %pour les portefeuilles de longue durée afin de favoriser des stratégies d'investissements à long terme en actions.

e) Objectif n° 23 : favoriser l'investissement des ménages dans les entreprises

Une révolution culturelle est nécessaire à plusieurs titres pour obtenir :

- une meilleure éducation financière 306 ( * ) des Français. Suite à un rapport 307 ( * ) de février 2015, un « Comité national d'éducation financière » a été installé le 20 décembre 2016, la Banque de France étant chargée de piloter la stratégie nationale en la matière, mais celle-ci est avant tout tournée vers la prévention du surendettement ;

- une confiance à long terme dans l'entreprise, pour sortir l'économie française du capitalisme sans capital, où l'épargne nationale ne s'investit pas suffisamment dans le capital productif, les entreprises manquant chroniquement de fonds propres ;

- un second pilier de l'épargne-retraite en fonds de pension , épargne longue et stable pour renforcer le capital des entreprises ;

- une meilleure image du private equity , au sein des opérateurs financiers eux-mêmes, car il est souvent considéré comme du shadow banking , finance non régulée par opposition aux banques et aux marchés, alors que cette finance n'est pas gérée par un algorithme mais est régulée par l'AMF, avec un code de déontologie.

Par ailleurs, il faut un support adapté pour remédier à la sous-allocation structurelle en défaveur du financement de long terme en actions.

Plusieurs voies sont envisageables pour améliorer l'orientation de l'assurance-vie en direction des entreprises, sachant que 61 % des 2 433 milliards d'actifs de l'assurance-vie sont déjà placés auprès des entreprises en 2017, soit 1 473 milliards , 39 % l'étant en obligations, 18 % en actions et 4 % dans l'immobilier. Seuls 70 milliards d'actifs de l'assurance-vie sont fléchés vers les PME-ETI .

(1) Les paradoxes français des fonds de pension

Élément de l'exception française, les fonds de pension 308 ( * ) sont marginaux en France.

Dans une étude de 2016 sur les fonds de pension, l'OCDE souligne la spécificité de la France. Avec seulement 14,7 milliards de dollars (0,63 % du PIB) d'actifs, notre pays est parmi les plus mauvais élèves des pays membres, la moyenne de l'actif des fonds de pension représentant 86 % du PIB pour les pays de l'OCDE.

Avec ce taux, la France affiche les actifs des fonds de pension les plus faibles par rapport aux autres pays européens : ils représentent en Allemagne 6,76 %, au Royaume-Uni, 95,29 % et aux Pays-Bas, 180 %. La France fait même moins bien que la Grèce (0,68 %) et se situe loin derrière la plupart des pays riches membres de l'OCDE comme le Canada (85 %), les États-Unis (79,8 %), l'Australie (120 %) ou la Suisse (126 %).

Les 14,7 milliards de dollars d'actifs français investis en fonds de pension ne peuvent rivaliser face aux 1 289 milliards de dollars au Canada, les 14 877 milliards de dollars aux États-Unis, les 2 273 milliards au Royaume-Uni ou même les 224 milliards en Allemagne.

Il est également paradoxal que seuls les fonctionnaires français bénéficient d'un fonds de pension 309 ( * ) .

L'adoption d'un pilier de retraite par capitalisation est débattue en France depuis longtemps.

Ainsi, en novembre 2015, lorsqu'il était ministre de l'Économie, M. Emmanuel Macron avait affirmé que « la France aurait besoin de fonds de pension ».

Mais le mot reste tabou, contrairement à l'épargne-retraite.

(2) L'impasse d'un fléchage général de l'assurance-vie

Un fléchage général d'une part de l'assurance-vie vers l'entreprise est préconisée par le Conseil économique social et environnemental dans son rapport de mars 2017 310 ( * ) .

Une part de l'épargne dite réglementée (livrets A, livrets de développement durable, livrets d'épargne populaire) contribue au financement bancaire des PME. C'est la partie « non centralisée », c'est-à-dire conservée par les banques et non reversée à la Caisse des Dépôts. S'agissant de cette partie « non centralisée », la loi fixe une obligation d'un pourcentage d'utilisation 311 ( * ) en faveur des PME/TPE.

La partie « non centralisée » serait de 150 milliards d'euros en 2015, selon l'Observatoire de l'épargne réglementé. L'obligation de financement des PME pour au moins 80 % des ressources non centralisées a été respectée en 2015.

Pour mobiliser les 1 600 milliards d'épargne des ménages investie par ailleurs en assurance-vie, le CESE estime « utile qu'un dispositif, analogue à celui existant pour l'épargne réglementée collectée par les banques, puisse assurer qu'une partie des fonds et réserves de l'assurance-vie soit fléchée vers le financement des PME/TPE, y compris les associations employeuses. Ces dispositions devraient prendre en compte les impératifs réglementaires mais aussi de sécurité et de rendement s'imposant aux compagnies et sociétés d'assurance ».

Un tel fléchage serait cependant contraire au droit européen 312 ( * ) et serait assimilé à une aide d'État, interdite en application du principe de non-discrimination.

(3) Les propositions pour réorienter l'assurance-vie

Pour tenir compte de ces contraintes et résoudre cette équation (créer de nouvelles incitations à la détention de long terme en assurance vie sans niche fiscale), la Fédération française de l'assurance (FFA) a proposé le 22 janvier 2018 « d'introduire la faculté optionnelle d'une modulation des garanties des fonds euros incitative à l'allongement de la détention, de desserrer les contraintes réglementaires qui entravent le développement de l'eurocroissance et d'élargir l'accès à l'investissement non coté à travers les unités de compte ».

Ces objectifs avaient déjà été annoncés dans un rapport Dynamiser l'épargne financière des ménages pour financer l'investissement et la compétitivité, d'avril 2013 313 ( * ) , qui se proposait déjà de « réorienter l'épargne financière des ménages au bénéfice des PME-ETI à hauteur de 15 à 25 milliards par an », en réaménageant, sans la bouleverser, la fiscalité spécifique de l'assurance-vie « pour renforcer la nature de long terme de ce support d'épargne, redonner aux assureurs des marges de manoeuvre dans l'allocation d'actifs en faveur de l'économie productive et inciter les épargnants les plus à même de le faire vers le financement des entreprises ».

À cet effet, le rapport proposait :

- de mettre en place un nouveau contrat «Euro-Croissance» sur le principe des contrats « euro diversifiés » existants et reposant sur une allocation d'actifs combinant mieux au profit de l'économie le risque et la sécurité ;

- de dynamiser leur montée en charge en assurant le maintien de l'antériorité fiscale pour la transformation des contrats existants ;

- de créer au sein de ces contrats des compartiments obligatoires en direction des PME.

(a) Moduler la garantie des contrats d'assurance-vie pour encourager leur détention à long terme

Pour les assureurs, ce nouveau cadre incitatif et de fidélisation ( Fonds « euro bonifié » ) serait fondé sur la possibilité, pour l'assureur, de moduler la garantie en capital offerte et, en contrepartie, la participation aux bénéfices versée aux assurés pour les inciter à une détention longue. Son fonctionnement pourrait, à titre d'exemple, être le suivant :

- avant un horizon de placement défini (huit ans ou plus), un « partage de sort » serait mis en place entre l'assureur et l'assuré, dans la limite d'une garantie minimale du capital (par exemple 80 %ou 90 %) ;

- après cet horizon, 100 % du capital serait garanti au client, augmenté chaque année de la participation aux bénéfices acquise et bonifiée, afin d'inciter à allonger la détention.

Ce mécanisme ne repose pas sur la reconstitution de nouvelles incitations fiscales et permettrait , dans un horizon de cinq ans, d'investir 10 milliards d'euros en actions.

Dans le prononcé de son discours le 28 mars 2018 lors du forum « Entreprises en action(s) », le ministre de l'Économie et des finances a cependant écarté cette piste « ni souhaitable ni responsable » afin de ne « faire prendre aucun risque aux épargnants ».

(b) Desserrer les contraintes du support « eurocroissance »

Le support « eurocroissance » comporte une garantie en capital, totale ou partielle, au terme d'une durée de détention contractuelle d'au moins huit ans. Ce fonds en euros diversifié doit permettre aux assureurs d'obtenir de meilleures rémunérations que les classiques fonds en euros. C'est un support adapté, du fait de sa garantie à terme, à une détention longue (notamment en vue de la retraite). Il représente des encours encore faibles (2,1 milliards d'euros) mais une composante actions plus élevée (24 %).

Des freins, et notamment l'opposition de la direction du Trésor à ce nouvel instrument, imaginé en 2013, ont entravé son développement jusqu'en 2016. Ce n'est que depuis mai 2017 que ce support se développe, le Président de la République y étant favorable lorsqu'il était secrétaire général adjoint de l'Élysée au moment de la création de ce support.

Le ministre de l'Économie, M. Bruno Le Maire, a annoncé 314 ( * ) vouloir accélérer son développement par une simplification « drastique » pour offrir « plus de lisibilité sur la performance et le rendement du produit, année après année. Ce rendement sera unifié pour tous les épargnants. Il pourra être bonifié lors d'engagements d'investissement plus longs, en particulier dans les PME. Le nouvel Eurocroissance, qui a été conçu en lien étroit avec les assureurs, pourra devenir ainsi un support de référence, fournissant un équilibre entre rendement et prise de risque ». Le Gouvernement attend que les sommes investies atteignent 20 milliards d'euros sous deux ans .

Dans cette perspective, la FFA propose :

- d'assurer une équité à l'entrée entre les clients sur fonds euros et fonds eurocroissance en permettant le transfert de plus-values latentes des fonds euro vers l'eurocroissance, en prorogeant le mécanisme au-delà du 31 décembre 2018 et en rendant éligibles les primes souscrites en 2015 ;

- de favoriser le développement de l'eurocroissance au sein des plans d'épargne retraite populaire (PERP), en supprimant l'obligation de créer un fonds eurocroissance spécifique au sein de ces plans ;

- de simplifier et rendre plus pertinente la communication financière aux assurés, en définissant les engagements vis-à-vis d'eux sur la base d'une valeur contractuelle globale « au lieu et place des deux composantes actuelles (provision mathématique et provision technique de diversification), difficilement compréhensibles » ;

- de renforcer la mutualisation entre assurés en étendant le rôle de la provision collective de diversification différée (PCDD).

Les flux supplémentaires d'investissements en actions qui peuvent être attendus atteignent, selon la FFA, environ 13 milliards d'euros à l'issue de cinq années, soit une prévision plus modeste que celle du Gouvernement.

Il faut toutefois noter que la garantie en capital peut être totale ou seulement partielle et ne s'applique qu'au terme d'une durée de détention (d'au moins huit ans) contractuelle.

(c) Améliorer l'accessibilité de l'investissement non coté

L'assurance-vie étant essentiellement investie en fonds euro, lesquels ont un rendement faible (environ 1,5 %), l'attractivité du marché non coté est un atout. Toutefois, selon France Invest : « les contraintes réglementaires des assureurs les empêchent d'aller vers le non coté. Il faut que les unités de compte d'assurance-vie puissent investir plus de 10 % dans le non coté ».

La FFA propose ainsi de desserrer les contraintes règlementaires pour faciliter la commercialisation du capital risque à travers l'assurance, la loi pour la croissance d'août 2015 ayant permis d'investir dans des unités de compte 315 ( * ) dédiées au financement d'entreprises non cotées , en private equity.

Pour cela, il conviendrait :

- d'augmenter le plafond d'investissement sur ces supports à 30 % de l'encours du contrat (contre 10 % aujourd'hui), levant ainsi le principal frein commercial à ces dispositifs ;

- de modifier les conditions, pour la remise en titres, de détention dans le cercle familial notamment en les alignant sur le PEA, également pour élargir la clientèle ;

- d'élargir le dispositif en créant un nouveau type d'unités de compte à deux « poches » (une liquide, pour faire bénéficier les assurés du rachat à tout moment, une investie principalement dans des entreprises non cotées et des infrastructures), permettant ainsi d'élargir considérablement la clientèle potentielle.

Cependant, le Gouverneur de la Banque de France, s'il note le dynamisme de la collecte des unités de compte (+ 27 % en 2016 et un doublement pour les dix premiers mois de 2017) avertit que ce produit 316 ( * ) « n'offre pas de protection en capital » et préconise plutôt d'encourager les fonds « eurocroissance  qui doivent être rénovés et amplifiés ». Il estime, de manière constante, que les épargnants français préfèrent la protection du capital à la liquidité du produit financier.

L'évolution récente du comportement d'épargne des ménages indique toutefois qu'ils sont de en plus en plus prêts à un prendre un risque plus élevé en contrepartie d'une plus forte rémunération puisque le montant de la collecte de l'assurance-vie en unités de compte est passé de 12 % en 2012 à 30 % en 2017 (elle était encore de 17 % seulement en 2016). La collecte nette en unités de compte a été de 20 milliards en 2017 contre une décollecte nette en euros de 13 milliards.

Ainsi, les assureurs proposent-ils un nouveau produit, l'euro bonifié , qui aurait une plus forte exposition en actions (24 %) et une garantie du capital au terme du contrat, entre huit et dix ans. Ce produit constituerait un 3 ème pilier de la gamme de l'assurance-vie, entre les fonds euro et les unités de compte.

f) Objectif n°24 : créer un fonds de mobilité internationale permettant une portabilité de l'assurance-vie

Les taux de remplacement diminuant, il est indispensable de développer un outil d'assurance retraite volontaire. Les dispositifs actuels sont très variables et leurs règles sont différentes, ce qui les rend difficilement compréhensibles : certains sont des contrats individuels, d'autres sont réservés aux travailleurs indépendants, d'autres encore dépendent des entreprises.

Alors que le Haut-commissaire à la réforme des retraites, M. Jean-Paul Delevoye, travaille à une réforme systémique des régimes de retraite, pour améliorer leur lisibilité et leur universalité, les assureurs proposent un produit universel d'assurance retraite, le « revavie », qui entend simplifier radicalement le fonctionnement actuel des produits de retraite, fournira un complément de revenus garanti à vie et inclura une option pour le risque dépendance. Ce produit serait favorable à l'investissement en fonds propres des entreprises , avec un investissement plus long -mais avec une phase d'accumulation estimée à 30 ans- et un volume d'actifs plus important. Les assureurs estiment que l'encours des produits retraite serait porté à 270 milliards en 2022, soit une hausse de 20 milliards, apportant cinq milliards par an d'investissements supplémentaires en actions .

Il correspond aux attentes du Gouvernement qui souhaite « une portabilité et une transférabilité totales des produits [d'assurance-vie] au cours de la vie professionnelle » 317 ( * ) . Ce produit étant portable , en cas de changement de statut de son titulaire, et concurrentiel , permettant le transfert du contrat d'un assureur à l'autre , votre rapporteur propose de saisir cette occasion pour en faire un instrument d'attractivité de la France pour tous les entrepreneurs européens.

Ce nouveau produit d'épargne retraite devrait favoriser la mobilité internationale des salariés , en garantissant sa portabilité européenne (proposition n° 27). Cela permettrait à la nouvelle génération d'entrepreneurs, notamment de start-uppers de se lancer dans une aventure entrepreneuriale à l'échelle européenne en étant garantis d'une épargne-retraite constituée indépendamment de leurs lieux d'activité successifs, laquelle concourrait au financement de l'économie, en renforçant l'investissement en fonds propres des entreprises.

Cette proposition trouve un écho dans les préoccupations exprimées par les chercheurs français expatriés et recensées dans le récent rapport de M. Cédric Villani sur l'intelligence artificielle 318 ( * ) , lequel cherche à « augmenter l'attractivité de la France pour les talents expatriés ou étrangers », indiquant que, « pour un chercheur senior, rentrer dans le système français représente une marche très haute financièrement parlant (rachat des cotisations sur une longue période) qui pourrait être en partie franchie avec une aide ad hoc , ce qui semble quasiment impossible aujourd'hui », révélant une convergence inattendue entre jeunes chercheurs et jeunes entrepreneurs.

6. Faciliter l'accès des PME au financement par le marché

Symétriquement à une orientation de l'épargne vers l'investissement productif, il conviendrait de faciliter l'accès des PME au financement des marchés.

a) Objectif n° 25 : adapter aux PME la règlementation du financement du marché en révisant la directive Prospectus

Suite à la crise des subprimes de 2007-2008, l'Union européenne a encadré de façon stricte les marché financiers afin d'accroître la stabilité financière dans l'ensemble, de garantir que les mêmes règles techniques de base y soient appliquées, de déceler le plus tôt possible les risques qui menacent le système et de permettre une action collective beaucoup plus efficace dans les situations d'urgence pour le règlement de différends entre autorités de surveillance nationales.

La contrepartie de ce que certains ont qualifié de « tsunami » réglementaire a été précisément de rendre plus complexe pour les PME l'accès au financement par le marché, ce que souligna dès 2010 le rapport Demarigny 319 ( * ) .

La prise de conscience de ces difficultés a entraîné une adaptation de cet encadrement, sans pour autant nuire à la sécurité des investisseurs.

Dans le cadre de l'Union des marchés de capitaux de l'Union européenne, la modification de la directive Prospectus en 2012 visait à élargir à la fois l'accès des PME aux marchés financiers et la base d'investisseurs en Europe.

Le règlement (UE) n° 2017/1129 du 14 juin 2017 entend pour sa part faciliter l'accès des entreprises aux marchés de capitaux sans compromettre l'information pertinente des investisseurs.

Pour l'Autorité des marchés financiers, ce règlement comporte de nombreuses avancées :

- un relèvement des seuils de déclenchement de l'obligation d'établir un prospectus d'offre au public (à partir d'un million d'euros), les États membres pouvant toutefois prévoir (dès le 21 juillet 2018) une exemption jusqu'à huit millions d'euros. De même, le seuil d'exemption de prospectus d'admission en cas d'émission dilutive est relevé de 10 % à 20 % ;

- la mise en place d'un « document d'enregistrement universel » ( universal registration document - URD), très inspiré du document de référence français, qui permet au marché de disposer d'une information annuelle complète et aux entreprises de bénéficier d'une procédure accélérée d'approbation (cinq jours) lorsqu'elles intègrent ce document dans un prospectus ;

- la rationalisation du résumé, qui ne devra pas dépasser sept pages compréhensibles (et jusqu'à 10 pages dans certaines circonstances) ni comporter plus de 15 facteurs de risque, et pourra incorporer - pour les produits qui y sont soumis - le document d'informations clés du règlement « PRIIPs » 320 ( * ) , afin de faciliter la comparaison des instruments financiers émis sur le marché européen ;

- un nouveau schéma sensiblement allégé pour les émissions secondaires, qui représentent la majorité des prospectus, afin de mieux tenir compte de l'information périodique et permanente déjà disponible ;

- un prospectus simplifié, appelé « prospectus de croissance de l'Union », dédié aux PME cotées sur les marchés non réglementés (dont les nouveaux « marchés de croissance des PME ») et aux petites offres de sociétés non cotées ;

- une meilleure sélectivité et présentation des facteurs de risque, qui devront faire l'objet d'une catégorisation, les facteurs les plus importants étant présentés en premier ;

- la reconnaissance du pouvoir de contrôle de la documentation commerciale par l'autorité de l'État membre d'accueil, lorsque les titres sont distribués sur plusieurs territoires en application de la procédure de passeport ;

- un élargissement de l'incorporation par référence et une amélioration du fonctionnement du prospectus de base obligataire.

Compte-tenu de la complexité de la mise en oeuvre de ces préconisations, la date « d'effectivité » du règlement devrait être repoussée en juillet 2019.

En simplifiant les prospectus, la Commission entend encourager les valeurs moyennes à émettre de la dette et des fonds propres.

L'Autorité des marchés financiers (AMF) a lancé une consultation du 24 janvier au 21 février 2018 afin de définir ce nouveau seuil d'exemption pour les offres au public 321 ( * ) et propose :

- une exemption de prospectus d'offre au public jusqu'au seuil maximum permis par le règlement Prospectus, soit huit millions d'euros sur douze mois, accompagnée d'une suppression du critère actuel de 50 % du capital offert au public ;

- un régime allégé d'information pour les offres inférieures à ce seuil, selon des modalités déjà existantes (offres de financement participatif) ou nouvelles, s'agissant des offres non intermédiées de titres non cotés.

Pour certains, le nouveau règlement Prospectus est toutefois loin de satisfaire à l'objectif de simplification, notamment pour les PME.

Ainsi, le prospectus devra présenter les « facteurs de risques ». Les émetteurs devront les lister selon trois principes : identifier les facteurs de risques propres à l'entreprise et aux titres financiers, évaluer leur importance selon leur probabilité d'occurrence et l'ampleur estimée de leur impact, et les présenter par nature dans un nombre limité de catégories en les hiérarchisant.

Pour les émissions dont le montant nominal par titre est inférieur à 100 000 euros, les entreprises devront rédiger un « résumé » du prospectus limité à sept pages et mentionnant les quinze facteurs de risques les plus importants, confrontant les émetteurs à des choix complexes. Faute d'une maîtrise suffisante de l'information, les PME risquent de renseigner un maximum de ces facteurs dans la catégorie « hauts risques », ce qui pourra se retourner contre elles en détournant les investisseurs.

Au-dessus d'un montant unitaire de 100 000 euros, les émetteurs de dette structurée devront appliquer le règlement « PRIIPs », lequel prévoit de rédiger un document d'information clé de trois pages en cas de placement auprès de particuliers, ce qui est probablement encore plus difficile à rédiger que le résumé du règlement Prospectus.

b) Encadrer les débordements du droit souple

Les agences qui régulent les marchés financiers, AMF ou APCR, et désormais l'Agence française anticorruption, produisent des normes de droit souple, en théorie facultatives mais en réalité, appliquées par les entreprises .

Face à l'importance croissante de la régulation par de tels instruments de droit souple, le Conseil d'État a pris en compte les conséquences que ces actes étaient susceptibles d'avoir, dans les faits, sur la situation des acteurs concernés : il a jugé recevable le recours pour excès de pouvoir contre les actes des autorités de régulation qui sont de nature à produire des effets notables, ou qui ont pour objet d'influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles il s'adresse 322 ( * ) . Mais la Haute juridiction administrative ne freine pas avec vigueur ces débordements puisqu'elle a validé 323 ( * ) la compétence de l'AMF pour publier sur son site internet des communiqués de « mise en garde » des épargnants, publications qui n'étaient pas explicitement mentionnées par le code monétaire et financier, ni par le règlement général de l'Autorité 324 ( * ) .

Plus généralement, l'explosion de la réglementation sur les marchés boursiers depuis une dizaine d'années ainsi que l'attrition accélérée de la cotation démontrent bien que le système n'est plus adapté.

Non seulement le droit « dur » est trop complexe mais les débordements du droit « souple » ont dégradé la situation.

Ainsi la doctrine de l'Autorité des Marchés Financiers est-elle éparpillée dans 80 documents. On recense au total 790 éléments de cette doctrine, soit « une tous les trois jours » comme l'a indiqué Mme Caroline Weber, de Middlenext 325 ( * ) , lors de la 3 ème journée des entreprises du Sénat organisée le 29 mars 2018.

Définition et portée de la doctrine de l'AMF

La doctrine de l'AMF permet aux acteurs de marché, en complément de la lecture de la jurisprudence de la Commission des sanctions et de la motivation de certaines décisions individuelles, de connaître la façon dont le régulateur applique, sous le contrôle des tribunaux, les dispositions législatives et réglementaires concernant les sujets relevant de sa compétence.

Elle comprend les instructions, les positions, les recommandations, les pratiques de marché admises ainsi que les rescrits :

- l 'instruction constitue l'interprétation des dispositions du règlement général de l'AMF en indiquant leurs modalités d'application ainsi que leurs conditions de mise en oeuvre. Elle informe les acteurs de marché des procédures à suivre et des règles à appliquer ;

- la position constitue une interprétation des dispositions législatives et réglementaires entrant dans le champ de compétence de l'AMF. Elle indique la manière dont l'AMF les applique à des cas individuels et est extériorisée dans un souci de transparence et de prévisibilité ;

- la recommandation est une invitation à adopter un comportement ou à se conformer à une disposition, comportement ou disposition que l'AMF considère comme susceptibles de faciliter la réalisation des objectifs des normes ou principes généraux relevant de son champ de compétence. Néanmoins, la recommandation n'exclut pas que d'autres comportements ou dispositions soient également compatibles avec ces normes ou ces principes généraux. Elle ne revêt donc pas de caractère impératif. Toutefois, le fait de se conformer à une recommandation contribue généralement à nourrir une présomption de conformité à la

règlementation. Dans certains cas, les dispositions d'une recommandation peuvent, compte tenu des circonstances de l'espèce, constituer l'un des éléments d'appréciation pris en compte dans le traitement d'un cas individuel, par exemple une demande de visa ou d'agrément. Mais d'une manière générale, le non-respect d'une recommandation ne peut, en lui-même, caractériser une violation de la réglementation ;

- la pratique de marché admise par l'AMF dont le champ ne concerne que les manipulations de marché, permet d'instaurer une présomption de légitimité à l'égard des acteurs de marché qui s'y conforment.

- le rescrit offre enfin la possibilité pour une personne partie à une opération de solliciter un avis sur la conformité de celle-ci aux dispositions du règlement général de l'AMF. Si le rescrit ne vaut que pour le demandeur, sa publication anonymisée permet à l'AMF de faire connaître la façon dont les dispositions de son règlement général s'appliqueraient à une opération particulière.

Source : AMF

Par exemple, « l'avis relatif aux recommandations de l'Agence française anticorruption destinées à aider les personnes morales de droit public et de droit privé à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d'influence, de concussion, de prise illégale d'intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme » est en quelque sorte le commentaire officiel de la loi du 9 décembre 2016 (dite loi Sapin 2). Publié au Journal officiel du 27 décembre 2017, ce document comporte 36 pages.

Prenant conscience de l'illisibilité de ce droit souple, l'AMF a clarifié le champ et la portée de celui-ci, structuré son processus d'élaboration et déterminé un format de publication adapté. L'AMF a décidé de systématiser et de mieux organiser la publication de sa doctrine « qui jusqu'alors faisait l'objet d'une diffusion sur des supports variés - à savoir, des guides, des listes de questions-réponses, des positions, des lignes directrices, des communiqués de presse, des rapports annuels...-, dont la portée n'était pas toujours explicite et dont l'accès n'était pas toujours aisé ». La doctrine de l'AMF « regroupe désormais, par thématique, des instructions, positions, recommandations, pratiques de marché admises et rescrits. La doctrine permet aux professionnels de connaitre la façon dont l'AMF applique les lois et règlements concernant les sujets de sa compétence ».

Toutefois, l'AMF continuera à « publier des documents de doctrine mixtes, contenant à la fois des positions et des recommandations », chacune d'entre elles devant être « clairement identifiée au sein du document afin d'éviter toute ambiguïté » et sa doctrine pourra toujours être présentée au travers « de différents supports tels que des listes de questions-réponses, guides ou rapports » tout en s'efforçant néanmoins « d'éviter une trop grande profusion de supports, susceptible de nuire à la lisibilité de la doctrine ».

On constate ainsi une sur-régulation qui frappe les entreprises cotées -et par effet de ruissellement de plus en plus les entreprises non cotées d'une certaine taille, comparée à la sous-régulation de la private equity . Ce sont pourtant deux systèmes de financement d'entreprises qui sont légitimes et nécessaires. Cela revient à priver, de fait, les entreprises de capacités de financement adapté.

c) Favoriser les circuits courts de financement

Une autre piste pour faciliter le financement des PME serait de traiter leurs besoins au niveau régional. Votre rapporteur ne la juge cependant pas convaincante.

En application de l'article 172 de la loi n° 2015-990 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, un rapport portant sur « la création de plateformes de cotation régionales ou de bourses régionales dans chaque métropole régionale, en hexagone et dans les outre-mer, afin de fournir un outil de circuits courts de financement régional » a été rédigé.

Ces bourses régionales devraient tout d'abord respecter les obligations européennes :

• le prospectus s'imposerait au marché primaire, comme pour toute offre au public de titres financiers, sauf réservée à un nombre limité d'investisseurs ou à des investisseurs qualifiés, ou d'un montant limité (inférieur à 1 million d'euros pour le financement participatif, 5 millions d'euros pour les autres formats d'offre) ;

• le marché secondaire devrait prendre la forme d'un marché réglementé 326 ( * ) , comportant un système multilatéral de négociation 327 ( * ) et éventuellement un internalisateur systématique 328 ( * ) ;

• pour dénouer l'opération et assurer le transfert effectif de la propriété des titres, il faudrait une inscription en compte chez un dépositaire central de titres ;

• l'entreprise cotée aura des obligations d'information financières très lourdes 329 ( * ) et devra se soumettre aux règles de prévention et de répression des abus de marché, imposant une organisation rigoureuse des informations au sein de l'entreprise.

L'ampleur de ces contraintes se traduit pour les PME par des coûts élevés d'accès et de maintien sur le marché , car ils sont indépendants de la taille de l'entreprise. Une multiplication de plate-formes régionales en concurrence sur le même segment de marché pourrait aboutir à renchérir le coût de la cotation.

Outre le recours croissant au private equity , le concept du Carnet d'annonces , développé par CiiB 330 ( * ) , vise à préparer les TPE, PME et ETI à une cotation sur Euronext Access ou Euronext Growth. Il consiste à mettre à la disposition d'une PME-PMI non cotée une « mini-bourse digitale » permettant l'échange de gré à gré d'actions entre acheteurs et vendeurs. En cas d'appel public à l'épargne, CiiB, agréé Listing Sponsor 331 ( * ) , accompagne la société dans la rédaction d'un prospectus conforme aux exigences de l'AMF.

Ce Carnet d'annonces est un moyen d'acclimatation à la bourse pour les petites PME.

D. SOUTENIR LES PME DANS LA BATAILLE DE L'EXPORTATION

L'activité internationale des entreprises françaises qui contribue à leur développement, est concentrée et s'inscrit dans un contexte de concurrence accrue.

1. Une rude bataille : un déficit commercial persistant et inquiétant

La part de marché des exportations françaises a diminué de deux points entre 2000 et 2014, notamment du fait de la montée en puissance de pays émergents, tels que la Chine et l'Inde, mais aussi en raison d'une moindre compétitivité-prix.

Si les parts se sont stabilisées depuis 2013, le rapport économique, social et financier pour 2018 constate un fort ralentissement des exportations (+ 1,8 % après + 4,3 %) plus important que pour les importations (+ 4,2 % après + 5,7 %) et une perspective inquiétante de dégradation du déficit commercial qui atteignait déjà -48 milliards d'euros en 2016, et s'est creusé à - 62,3 milliards d'euros en 2017 (65,6 milliards d'euros après corrections et ajustements de la Banque de France) et sans doute autant en 2018, « à la condition d'un gel du prix du pétrole ».

La balance courante continuerait également de se dégrader en 2017 (à - 29 milliards d'euros après - 19 milliards d'euros) pour quasiment se stabiliser en 2018, autour de - 1,3 point de PIB (- 30 milliards d'euros).

L'exportation assure un emploi à près de six millions de personnes, et chaque milliard d'euros d'exportation engrangé par notre économie crée 10 000 emplois supplémentaires.

2. Les PME, un rôle modeste

D'après l'INSEE, 9 % des entreprises françaises (hors secteurs financier et agricole et hors micro-entreprises) ont réalisé en 2015 un chiffre d'affaires à l'export, pour un montant total de 593 milliards d'euros.

La répartition de ce chiffre d'affaires est très inégale puisque 97 % de ce montant est réalisé par les 24 000 entreprises qui ont réalisé un chiffre d'affaires d'au moins un million d'euros à l'export. Les 1 000 entreprises les plus grosses à l'export réalisent 70 % de l'export français ; 10 000 entreprises concentrent 95 % du commerce extérieur.

En 2014, le poids des grandes entreprises dans les exportations est de 52 %, les entreprises de taille intermédiaire ETI 33 %, les PME/PMI 16 %.

3. L'évaluation du soutien public aux exportations

Dans une évaluation réalisée par le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale en 2013 332 ( * ) , il était indiqué que seulement 10 % des entreprises qui exportent utilisent des dispositifs de soutien pilotés par l'État (ce ratio n'intègre pas les dispositifs régionaux), pour l'essentiel les accompagnements Ubifrance et l'assurance prospection.

Lorsqu'on interroge les chefs d'entreprise qui exportent sur les raisons de ce faible intérêt, la réponse est qu'ils jugent le système français de soutien à l'export peu ou pas efficace (61 %), peu ou pas compréhensible (66 %) et peu ou pas adapté au contexte économique actuel (67 %) selon une enquête réalisée en février 2013 333 ( * ) . En conséquence, 78 % d'entre eux se chargent eux-mêmes de la commercialisation de leurs produits à l'exportation.

De même, les chefs d'entreprise estiment inefficace à 58 % le soutien à l'exportation dans une enquête d'Ernst Young de février 2013 consacrée aux aides publiques aux entreprises.

Face à ce désaveu, le rapport proposait non pas de « faire du chiffre en recherchant absolument à intégrer davantage de TPE ou PME, qui n'en ont pas les moyens, dans une démarche d'exportation » mais de « se focaliser sur l'identification des entreprises à fort potentiel afin de les aider à mettre en place ou consolider une stratégie de moyen terme à l'exportation ». La marge de progrès sur ce segment est importante car la moitié des ETI françaises ne sont pas exportatrices et, parmi les ETI exportatrices, 40 % réalisent moins de 10 % de leur chiffre d'affaires à l'export.

a) La suppression du crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale des PME

Prévu à l'article 244 quater H du CGI, le crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale (CIDPC) correspondait à 50 % de certaines dépenses engagées par les PME au titre d'activités de prospection commerciale dans les quatre mois qui suivent le recrutement d'une personne affectée au développement des exportations ou le recours à un volontaire international en entreprise affecté à la même mission.

Ce crédit d'impôt, qui ne pouvait être obtenu qu'une fois par chaque entreprise, était plafonné à 40 000 euros. D'un coût de 22 millions d'euros par an, il avait bénéficié à moins de 1 700 entreprises en 2016.

En 2011, le Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales jugeait cette mesure comme n'étant pas « de nature à produire les effets escomptés ; elle est redondante avec d'autres dispositifs. La dépense fiscale ne paraît ni efficiente ni pertinente » 334 ( * ) .

Malgré l'opposition du Sénat, inquiet du « mauvais signal adressé aux PME », l'Assemblée nationale a voté sa suppression à compter du 1 er janvier 2018 335 ( * ) .

En effet, la plupart des exportations sont réalisées par des firmes multinationales, sous contrôle français ou étranger. Les entreprises indépendantes ou appartenant à un groupe intégralement français ont réalisé un chiffre d'affaires cumulé de 55 milliards d'euros à l'export, soit moins de 10 % du total réalisé en 2013. Or, ce sont ces entreprises qui avaient principalement besoin de soutien pour effectuer des démarches de prospection commerciale, a fortiori pour les engager.

Par ailleurs, l'exonération d'impôt sur le revenu des suppléments de rétrocession d'honoraires, prévue à l'article 93-0 A du CGI et concernant les cabinets d'avocats français au titre des dépenses engagées dans un cadre de prospection commerciale, d'un coût inférieur à 500 000 euros et n'ayant bénéficié qu'à 177 redevables en 2016, a été également supprimée.

b) Les annonces du Gouvernement du 23 février 2018

La nouvelle stratégie de l'accompagnement public à l'exportation des entreprises vise à simplifier nos outils et à « muscler » les dispositifs d'aide existants.

(1) La simplification du dispositif de soutien public aux exportations

Tous les acteurs de l'export -- agences régionales de développement, sociétés d'accompagnement et de commerce international, mais aussi acteurs du financement export, autour de Bpifrance et des opérateurs privés -- seront regroupés autour des opérateurs publics, CCI et Business France « dans une logique de mobilisation coordonnée en fonction des besoins des entreprises ».

Les régions sont appelées à jouer un rôle central . Elles assureront le co-pilotage de la réforme aux côtés de l'État et pourront s'appuyer sur l'opérateur Business France et les CCI pour proposer une expertise et des ressources aux entreprises. Chaque région pourra bâtir le dispositif qu'elle juge le plus pertinent sur son territoire, en liaison avec Business France qui assurera la cohérence du dispositif d'un bout à l'autre de la chaîne de l'export.

Le guichet sera unique mais ne sera pas géré de manière identique.

Une « plateforme numérique de solutions » regroupera, au niveau national, l'ensemble des offres d'accompagnement à l'export et de financement export. Cette plateforme sera prolongée par un outil de CRM 336 ( * ) permettant d'assurer de manière mutualisée le suivi des entreprises qui s'appuieront sur la Team France Export 337 ( * ) . Tous les acteurs privés et publics concernés auront vocation à être hébergés, s'ils le souhaitent, sur ce portail qui organisera le « parcours de l'export » préparant l'entreprise à son internationalisation, en dématérialisant les procédures. La phase de repérage des entreprises et de diagnostic de leur potentiel exportateur sera dévolue aux CCI, avec l'appui de l'opérateur public Business France et en lien avec les agences régionales de développement. Le portail constituera un levier d'activation pour les mécanismes de financement existant.

Le service public de l'export prendra la forme d'un correspondant unique par pays . Celui-ci pourra être Business France ou tout autre opérateur privé sélectionné dans le respect des règles de concurrence à l'issue d'une procédure ouverte et transparente. Cependant, il ne s'agirait que d'une expérimentation conduite dans huit pays.

Pour votre rapporteur, c'est un exemple positif de rationalisation.

(2) Le renforcement des mécanismes d'aide à l'exportation

Le fonctionnement de l'assurance prospection 338 ( * ) sera simplifié avec la réduction du nombre de documents et d'informations nécessaires. L'aide sera plus prévisible pour les entreprises qui auront une visibilité sur la totalité du montant de dépenses de prospection garanti. Les entreprises pourront bénéficier d'une avance de trésorerie immédiate à hauteur de 50 % du budget prévisionnel garanti pour les deux à trois années à venir. Les entreprises bénéficiaires devront rembourser a minima 30 % du montant perçu.

Ce dispositif a bénéficié jusqu'à présent à 12 000 PME et ETI.

Dans une logique de « partenariat de confiance sur-mesure négocié entre l'État et un exportateur pour une durée de trois à cinq ans » , des exportateurs pourront désormais bénéficier d'un PassExport leur permettant d'obtenir une couverture en garanties publiques au maximum permis par nos engagements multilatéraux. En contrepartie, l'entreprise s'engage à « respecter un niveau minimum de part française en moyenne sur l'ensemble des contrats soutenus financièrement par l'État pendant la durée du passeport ».

Certains projets stratégiques à l'international seront couverts par une garantie publique, y compris en l'absence de contrat export alors que jusqu'à présent, l'assurance-crédit publique, délivrée par Bpifrance Assurance Export au nom de l'État était traditionnellement conditionnée à l'existence d'une opération d'export sous-jacente.

La garantie publique pourra être apportée aux filiales étrangères d'entreprises françaises pour soutenir les exportateurs français y compris lorsqu'une implantation locale est rendue obligatoire par la législation du pays importateur afin de pouvoir remporter un contrat.

D'autres mesures ponctuelles ont été annoncées comme un dispositif particulier de soutien aux sous-traitants d'entreprises exportatrices pour les prémunir des risques associés à l'exportation, l'extension de la garantie de change à onze nouvelles devises, le doublement de l'enveloppe des prêts du Trésor en trois ans , d'environ 300 à 600 millions d'euros par an et la création de financements exports court termes (inférieurs à 24 mois).

Cependant, cette nouvelle stratégie ne répond pas aux défauts structurels de notre économie en raison du mauvais positionnement de gamme de nos produits -y compris sur le marché domestique-, du recul de la production manufacturière, et de la dégradation inquiétante du solde positif de la balance commerciale des services, divisé par quatre en cinq ans, passé de 25 milliards en 2012 à 5,4 milliards en 2017 (et même 0 en 2016).

c) Objectif n° 26 : moduler l'IS en fonction de l'export

Notre commerce extérieur reste trop dépendant d'un petit nombre de secteurs à forte valeur ajoutée où nous sommes bien positionnés et d'entreprises. En France, 5 % des entreprises réalisent 90 % des exportations, en Allemagne 5 % des entreprises en réalisent 80 %.

Seules 125 000 entreprises sont exportatrices 339 ( * ) sans que ce nombre n'ait évolué depuis dix ans quand l'Italie en dénombre 250 000 et l'Allemagne 400 000.

Ce chiffre est toutefois controversé 340 ( * ) et l'INSEE comptabilise environ 360 000 entreprises réalisant un chiffre d'affaires à l'exportation, en intégrant les services 341 ( * ) , soit un chiffre comparable à celui issu des données analogues en Allemagne (360 000 en 2012, selon l' Institut für Mittelstandsforschung de Bonn).

En 2017, 28 203 nouvelles entreprises françaises se sont engagées à l'international, après 28 915 en 2016). Les deux-tiers sont des primo-exportateurs (entreprises n'ayant pas exporté les cinq années précédentes). Le nombre d'exportateurs « sortants » (ayant exporté en 2016 et n'exportant plus en 2017) diminue fortement (28 218 après 29 920 en 2016).

Sur l'année 2017, les grandes entreprises exportatrices ne représentent 0,4 % du nombre d'exportateurs de biens mais réalisent plus de la moitié du montant des exportations (51,8 %). Le montant de leurs exportations augmente de 4 % en valeur sur l'année.

Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) exportatrices progressent en nombre de 0,7 %. Elles représentent 4 % du nombre total d'exportateurs mais le tiers des exportations. Leurs exportations augmentent de 6 % en 2017.

Les exportations des PME progressent encore en 2017 (+ 3,7 %) même si le nombre de PME exportatrices diminue très légèrement (- 0,2 %). Les PME représentent plus de 95 % du nombre d'entreprises mais elles n'exportent que 13 % des montants.

Le redressement de notre commerce extérieur sera de longue haleine et cette perspective est désormais obérée par le risque d'une guerre commerciale , suite aux récentes annonces protectionnistes du Président des États-Unis.

Pour permettre aux entreprises exportatrices de se battre à armes égales à l'international avec leurs concurrents internationaux, votre rapporteur propose tout simplement de moduler le taux de l'IS en fonction de la part des exportations dans le chiffre d'affaires de l'entreprise, l'avantage fiscal étant plafonné à 200 000 euros (pour respecter la règle de minimis de l'Union européenne 342 ( * ) , qui prévoit qu'une même entreprise ne peut recevoir que 200 000 euros d'aides sur une période de trois exercices fiscaux) ( proposition n° 28 ).

III. TRANSMETTRE, REBONDIR OU DISPARAITRE, LA FIN DE VIE DES ENTREPRISES

« L'impulsion fondamentale qui met et maintient en mouvement la machine capitaliste est imprimée par les nouveaux objets de consommation, les nouvelles méthodes de production et de transport, les nouveaux marchés, les nouveaux types d'organisation industrielle - tous éléments créés par l'initiative capitaliste. [...] L'histoire de l'équipement productif d'énergie, depuis la roue hydraulique jusqu'à la turbine moderne, ou l'histoire des transports, depuis la diligence jusqu'à l'avion. L'ouverture de nouveaux marchés nationaux ou extérieurs et le développement des organisations productives, depuis l'atelier artisanal et la manufacture jusqu'aux entreprises amalgamées telles que l'U.S. Steel, constituent d'autres exemples du même processus de mutation industrielle - si l'on me passe cette expression biologique - qui révolutionne incessamment de l'intérieur la structure économique, en détruisant continuellement ses éléments vieillis et en créant continuellement des éléments neufs. Ce processus de Destruction Créatrice constitue la donnée fondamentale du capitalisme : c'est en elle que consiste, en dernière analyse, le capitalisme et toute entreprise capitaliste doit, bon gré mal gré, s'y adapter . »

Joseph Schumpeter , Capitalisme, socialisme et démocratie ,

1943 (Traduction française 1951).

A. UN DROIT DES FAILLITES QUI NE FACILITE PAS LE REBOND

1. Les défaillances d'entreprise en nette baisse
a) Moins de défaillances d'entreprises

Les défaillances d'entreprises diminuent sensiblement depuis 2016 alors que les créations d'entreprises restent dynamiques et continuent de croître depuis 2000 (avec une hausse en 2016 de 5 % par rapport à 2015) avec 554 000 entreprises créées (dont 188 800 sous formes sociétaires, 142 400 entreprises individuelles et 222 800 micro-entrepreneurs).

Pour une entreprise défaillante, dix entreprises sont créées en 2016, alors qu'en 2000, le rapport était de un à cinq et en 2015 de un à huit , signe de la vitalité économique française.

En 2016, et pour la première fois depuis 2008 , la France a compté moins de 60 000 défaillances d'entreprises.

2017 a consolidé ce reflux de la sinistralité avec 55 175 défaillances d'entreprises , revenant au niveau de novembre 2008 (55 569). À fin février 2018, selon des données encore provisoires, le cumul des défaillances diminuerait de 6,4 % À fin janvier 2018, le cumul sur 12 mois du nombre de défaillances s'élève à 54 028, soit une baisse de 6,5 % par rapport à Janvier 2017.

Bien qu'en légère progression sur le segment des petites entreprises (+ 0,6 %), les défaillances reculent pour l'ensemble des PME (- 6,6 %). Elles sont, en revanche, en augmentation pour les ETI et les Grandes Entreprises (+ 15 défaillances sur un an, passant de 30 à 45).

En 2017, l'entreprise défaillante demeure essentiellement une microentreprise, catégorie qui représente près de 95 % de l'ensemble 343 ( * ) . Celles-ci représentent 72 % du tissu économique français mais concentrent 95 % des défaillances enregistrées. Le segment est le seul connaissant une augmentation des défaillances avec une accentuation de son exposition. Il représentait 35 % en 2014, 41 % en 2015 et 47 % des procédures en 2016.

A l'inverse, les PME, ETI et Grandes Entreprises ont mieux résisté.

Les TPE/PME qui représentent 27 % des entreprises n'ont représenté que 5,22 % des défaillances. À partir de trois salariés, on constate une baisse de l'exposition au risque avec une diminution des défaillances de l'ordre de 15 %, toutes tranches d'effectif confondues.

Pour les ETI et les grandes entreprises, les défaillances se comptent en quelques dizaines.

Les sociétés commerciales constituent encore l'essentiel des défaillances avec 77,3 %, suivies des entreprises individuelles, avec 18 %.

Source : Banque de France

Mesuré par l'OCDE, le taux de disparition des entreprises comportant des salariés, comparé au nombre d'entreprises en activité, était en 2015 de 5,3 en France contre 7,7 en Allemagne mais 11 en Grande-Bretagne, 8,9 en Italie ou 8,2 en Espagne.

En 2017, l'ensemble des entreprises défaillantes représentent un chiffre d'affaires global de 16,7 milliards d'euros contre 17,9 milliards un an plus tôt, soit un recul de 7,2%.

Les défaillances ont menacé près de 152 400 postes salariés en 2017 (contre 193 649 emplois menacés en 2016 et 234 453 en 2015), soit un recul de 7 %. Le passage sous la barre symbolique des 200 000 emplois menacés en 2016 confirme une tendance baissière structurelle depuis 2013 et un seuil atteint le plus bas, inférieur à celui de 2008 (230 500 emplois menacés).

Les entreprises touchées sont souvent des créations récentes, 42,5 % étant âgées de moins de cinq ans, et pour un quart d'entre elles entre cinq et dix ans.

En 2017, les trois principaux secteurs concernés sont demeurés inchangés par rapport à l'année précédente : le BTP cumule près de 28 % des défaillances, suivi des services aux particuliers (18 %) et des services aux entreprises (9 %). Ces trois secteurs représentent ainsi 55 % des ouvertures de jugements enregistrées en 2017 contre 57 % en 2016.

b) La France se situe dans la moyenne européenne pour la durée des procédures de liquidation judiciaire

On prétend qu'il faut sept à neuf ans pour se relever d'un échec entrepreneurial en France, contre un à deux ans dans d'autres pays européens. Ce chiffre se fondait sur une estimation de la Commission Européenne de 2011 sur des données de 2004. Il représentait, à l'époque, le temps moyen qu'il fallait pour qu'une procédure de liquidation soit complètement achevée.

En réalité, le temps moyen pour pouvoir rebondir est désormais de 15 mois en France. Dans la moitié des États membres, la procédure d'insolvabilité aboutit en 2 à 4 ans.

Selon le ministère de la Justice 344 ( * ) :

- S'agissant des procédures de conciliation, pour sept décisions sur dix, un mandataire a été désigné 12 jours en moyenne après la saisine du tribunal et les décisions concernant les conciliations sont prononcées en moyenne 2 mois et 28 jours après l'ouverture. Qu'il y ait un accord ou non, la durée des conciliations, après avoir baissé sensiblement entre 2012 et 2014, augmente très légèrement depuis.

- S'agissant des procédures collectives, il s'écoule en général le même nombre de mois entre le jugement d'ouverture et le jugement arrêtant un plan de redressement ou arrêtant un plan de sauvegarde (14 mois). La conversion d'une autre procédure (redressement judiciaire ou sauvegarde) en procédure de liquidation judiciaire sur conversion intervient, en moyenne, cinq mois et huit jours après l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire et près de huit mois après l'ouverture d'une procédure de sauvegarde. Les liquidations judiciaires interviennent dans un délai de cinq mois et 27 jours.

La France se situe aujourd'hui dans la moyenne européenne .

c) Les défaillances d'entreprise par type de procédure

La baisse du nombre d'entreprises défaillantes depuis 2013 a concerné les trois principales procédures judiciaires :

Sauvegarde

Redressement judiciaire

Liquidation judiciaire

2013

1633

18 465

43 003

2014

1620

18 092

42 874

2015

1569

18 191

43 254

2016

1242

15 989

41 548

Source : Observatoire économique CNAJMJ - décembre 2017

La liquidation judiciaire concerne 70,7 % des procédures, le règlement judiciaire 27,2 % et la sauvegarde seulement 2,1 %.

Selon l'étude annuelle Altarès-Deloitte pour l'année 2016, les procédures à l'amiable progressent et les procédures judiciaires diminuent.

- Avec 2 467 procédures amiables , la hausse de 3 % par rapport à 2015, dont 65 % de mandats ad hoc , concernant 612 001 emplois traduit une anticipation accrue du traitement des difficultés par les chefs d'entreprises, ce qui doit être considéré comme un progrès en matière de lutte contre la défaillance des entreprises.

Les procédures amiables représentent 4 % de l'ensemble des procédures en 2016 concernent 76 % des emplois menacés par l'ensemble des procédures.

En 2016, pour 3,2 emplois concernés par une procédure amiable, un emploi est menacé par une procédure judiciaire. Ce rapport s'est creusé, le ratio était de 2,5 pour 1, en 2015.

Toujours en 2016, chaque procédure amiable concerne en moyenne 345 ( * ) 312 salariés contre seulement quatre salariés pour les procédures collectives, soit au total, respectivement, 585 000 contre 200 000 salariés.

Une procédure amiable sur deux réussit, soit un taux très proche de celui des sauvegardes, qui reste deux fois supérieur à celui des redressements judiciaires, permettant de préserver les emplois dans les meilleures conditions.

- Les procédures judiciaires ont concerné 57 844 entreprises en 2016 .

Les procédures de sauvegarde représentent la plus forte baisse (16 %) et 2 % de l'ensemble des procédures.

Le taux de poursuite d'activité augmente avec la taille de l'entreprise. Si 30 % des entreprises bénéficient d`un plan de redressement ou d'une cession à un nouvel actionnaire qui en poursuit l'activité, ce taux passe à 49 % pour les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à cinq millions.

Plus d'une entreprise sur deux (54 %) concernée par un plan de redressement est encore en activité cinq ans 346 ( * ) ou neuf ans 347 ( * ) après.

L'activité préservée par les procédures de sauvegarde et de redressement varie de trois à cinq milliards entre 2012 et 2016.

Les liquidations judiciaires ont réparti, en 2016, six milliards entre les créanciers et ont conduit à licencier 217 440 salariés 348 ( * ) .

2. De la faillite à la seconde chance, pour une révolution culturelle du rebond
a) Une révolution culturelle : de la faillite au rebond

« L'échec et la réussite sont les deux faces d'une même pièce, celle d'entreprendre (...) Anticiper, c'est aussi expliquer aux créateurs d'entreprises que la faillite est une option, que l'on doit s'y préparer (...) Aux États-Unis, vous êtes un entrepreneur respectable et crédible si vous avez échoué deux ou trois fois avant de réussir. En France, on n'a pas le droit à une deuxième chance » témoignait en mars 2017 un chef d'entreprise à un colloque universitaire sur la petite entreprise 349 ( * ) .

Lors des Assises de l'entrepreneuriat en 2013, les pouvoirs publics ont appelé à reconsidérer l'échec entrepreneurial. Les témoignages d'entrepreneurs se sont multipliés dans la presse. Les associations d'entraide ont été créées afin de faciliter le rebond en dispensant leurs conseils.

(1) L'apparition de la notion de « seconde chance »

En décembre 2012, une communication de la Commission européenne annonçant la révision du règlement de l'UE sur l'insolvabilité de 2000 affichait l'ambition de donner « « une seconde chance aux entreprises honnêtes et aux personnes qu'elles emploient », les études montrant que : « les entreprises créées après une première faillite réussissent mieux et ont une durée de vie plus longue que la moyenne des jeunes pousses. L'échec que connaît un entrepreneur ne devrait donc pas se solder par une «condamnation à perpétuité» lui interdisant toute nouvelle activité entrepreneuriale mais plutôt être envisagé comme une occasion d'apprendre et de s'améliorer ». Pour la première fois était explicitement considéré que les faillites font partie intégrante d'une économie dynamique et moderne.

Il était par ailleurs jugé comme primordial de disposer d'une législation moderne et de procédures efficaces, « pour aider les entreprises ayant une consistance économique suffisante à surmonter des difficultés financières et, d'autre part, pour leur accorder une seconde chance ».

Quelque mois plus tard, le Gouvernement français annonçait lors des Assises de l'entrepreneuriat d'avril 2013 la suppression symbolique d'une mesure pénalisante.

(2) La suppression de la cote 040 de la Banque de France

La Banque de France délivre des indicateurs et cotations aux banques et établissements financiers, en fonction d'informations collectées par diverses sources, pour éclairer leurs prises de décision (octroi de crédit fondé sur une cotation conforme à des standards indépendants et objectifs...), permettre de sélectionner les créances qu'ils pourront apporter en garantie des refinancements qu'elles sollicitent de leurs partenaires, établir le besoin en fonds propres de la banque en fonction des règles de solvabilité qui s'imposent à elle, apprécier la teneur de son portefeuille de créance et ses risques.

Les entreprises et les dirigeants d'entreprises et entrepreneurs individuels sont évalués, dans un fichier  FIBEN (Fichier Bancaire des Entreprises) destiné au renseignement des banques, alimenté par des informations juridiques et économiques (activité, capital), comptables (chiffre d'affaires, endettement), bancaires (crédits, incidents de paiement) et judiciaires (procédures collectives).

Créée en 1982 pour la mise en oeuvre de la politique monétaire, la banque de données FIBEN est également utilisée pour l'analyse des risques de crédit. Elle permet notamment d'apprécier la qualité d'un portefeuille de crédits et de détecter les financements les plus risqués.

Les cotations de l'entreprise

La cotation d'activité

Cette cotation est notée de A à X qui correspond au chiffre d'affaires (A supérieur ou égal à 750 millions d'euros, M inférieur à 0.1 Million d'euros, N non significatif c'est à dire pas d'activité économique directe - par exemple Holding-, X inconnu)

La cotation de crédit de l'entreprise

Cette cotation correspond à la capacité de l'entreprise à respecter ses engagements à court terme (trois ans) notée de 3++ (très favorable) à 9 (compromise), et avec en outre une côte P (procédure collective) et 0 (pas d'information et absence d'indice défavorable)

La cotation de l'entreprise

Ces deux premières cotations se réunissent pour former la cotation de l'entreprise, qui sera par exemple cotée A3+ ou H9

Source : Banque de France

Outre la cotation de l'entreprise, le FIBEN assure également une « notation » du chef d'entreprise ou de l'entrepreneur individuel .

Cet indicateur est attribué à toute personne physique qui a exercé ou exerce une fonction de dirigeant ou d'entrepreneur individuel.

La cotation 040 était attribuée à un dirigeant qui exerçait une fonction de représentant légal dans une société en liquidation judiciaire datant de moins de trois ans. Longtemps réclamée par les acteurs de l'entreprise, sa suppression a été réalisée par le décret n° 2013-799 du 2 septembre 2013, modifiant l'article D. 144-12 du code monétaire et financier, qui supprime le fichage des dirigeants d'entreprise ayant connu une seule liquidation judiciaire depuis trois ans.

Cet indicateur était critiqué dans la mesure où la Banque de France ne recensait que les incidents de paiement alors que la plupart des autres pays de l'Union européenne utilisent des fichiers positifs recensant l'historique du comportement positif et négatif des personnes physiques concernées.

Le FIBEN comporte actuellement trois cotes :

- 000 est neutre,

- 050 en raison de deux liquidations judiciaires en cinq ans ou un redressement judiciaire suivi d'un plan depuis moins de cinq ans ou une sauvegarde suivie d'un plan depuis moins de trois ans

- 060 en raison de trois liquidations judiciaires en cinq ans, ou un jugement de faillite personnelle, ou interdiction de gérer, ou un redressement judiciaire de moins de deux ans non résolu par un plan, ou d'une liquidation judiciaire de moins de cinq ans.

Les cotes 050 et 060 ne sont plus communicables au-delà d'un certain délai fixé par l'article D.144-12 du Code monétaire et financier :

- les informations relatives au prononcé d'une liquidation judiciaire peuvent être communiquées à des tiers pendant une durée maximale de quatre ans ;

- les informations relatives à l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire peuvent être communiquées à des tiers pendant une durée maximale de deux ans. En cas d'adoption d'un plan de sauvegarde ou de redressement, elles peuvent être communiquées pendant la durée de ce plan. Il en va de même des informations relatives à l'adoption du plan ;

- les informations relatives à la faillite personnelle ou à l'interdiction de gérer d'un dirigeant d'entreprise ou d'un entrepreneur individuel peuvent être communiquées à des tiers pendant la durée de la mesure correspondante ;

- lorsque la fonction de dirigeant d'entreprise ou l'exercice de l'activité d'entrepreneur cesse, la durée maximale de diffusion des informations détenues sur lesdites fonctions ou sur l'exercice de l'activité est de trois ans à compter de la date de cessation des fonctions ou de l'arrêt de l'activité d'entrepreneur. Dans les autres cas, ces informations ne peuvent être communiquées à des tiers plus de quatre ans après l'intervention de l'événement auquel elles se rapportent.

Depuis 2013, les dirigeants ayant connu une liquidation judiciaire voient leur notation ramenée à 000 après un délai de trois ans 350 ( * ) , ce qui leur permet de retrouver un accès normal au crédit bancaire. Malgré une première faillite, ces entrepreneurs ne seront plus fichés à la Banque de France et n'auront donc plus en théorie de difficultés à obtenir de crédits ou concours bancaires. N'étant plus marqués au fer rouge dès le premier incident de faillite, ils devraient bénéficier d'une seconde chance .

Cette réforme a concerné 140 000 personnes en 2013 .

Il existait une asymétrie de l'information dans la mesure où, si les créations d'entreprises sont recensées dans un fichier national, le fichier d'interdiction de gérer une entreprise est décentralisé et réparti entre les 134 greffes des tribunaux de commerce . Il pouvait donc arriver qu'en changeant de domicile et de département, une personne interdite de gérer arrive néanmoins à recréer une entreprise.

Depuis février 2017 cependant, le fichier national des interdits de gérer, interconnecté, géré également par Infogreffe, contribue à mettre fin à cette pratique. Les associations ayant une activité économique ne sont toutefois pas concernées.

Le fichier national automatisé des interdits de gérer (FNIG)

Afin de lutter contre les fraudes, de prévenir la commission des infractions prévues aux articles 434-40-1 du code pénal et L. 654-15 du code de commerce et de favoriser l'exécution des mesures d'interdiction de gérer prononcées par les juridictions judiciaires, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce est autorisé à mettre en oeuvre un fichier national automatisé des interdits de gérer.

La tenue de ce fichier est une mission de service public assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce à ses frais et sous sa responsabilité.

Le Conseil national bénéficie du soutien financier de la Caisse des dépôts et Consignations dans la mise en oeuvre de ce fichier.

Ce fichier est régi par les articles L. 128-1 à L. 128-5 du code de commerce et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Le fichier recense les interdictions prononcées par les juridictions commerciales, civiles et pénales et non susceptibles de recours suspensif d'exécution.

Sont inscrites dans ce fichier les faillites personnelles et les autres mesures d'interdiction de diriger, de gérer, d'administrer ou de contrôler, directement ou indirectement, une entreprise commerciale, industrielle ou artisanale, une exploitation agricole, une entreprise ayant toute autre activité indépendante ou une personne morale, prononcées à titre de sanction civile ou commerciale ou à titre de peine et résultant des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée. Ne sont pas inscrites les sanctions disciplinaires.

Le fichier mentionne le jugement ou l'arrêt ayant prononcé la mesure.

Ce fichier n'est pas accessible au public mais réservé aux greffiers des tribunaux de commerce et des tribunaux civils statuant en matière commerciale ainsi qu'aux magistrats judiciaires ou représentants de l'administration et d'organismes définis par décret en Conseil d'État, dans le cadre de leur mission de lutte contre les fraudes.

Le secrétaire général du comité interministériel de restructuration industrielle peut demander au ministère de la Justice si une personne pressentie pour exercer des fonctions de direction, gestion, administration ou contrôle dans un dossier dont ce comité a été saisi est inscrite dans ce fichier.

Les mesures sont conservées dans le fichier pendant la durée de leur validité. Elles sont radiées à leur terme ou suite à une mesure de relèvement ou d'amnistie. À l'issue de leur radiation, elles ne peuvent plus être communiquées aux destinataires.

L'inscription à ce fichier est obligatoire, l'exercice du droit d'opposition n'est pas possible.

Source : CNTCG

(3) Les associations d'aide au rebond

Le premier Centre d'Information et de Prévention des difficultés des entreprises a été créé à Paris en 1999. Une association nationale a ensuite été créée en 2007 à la suite du développement de plateformes locales d'accueil et d'assistance aux chefs d'entreprise en difficulté.

L'association est présente dans 67 villes. Chaque délégation locale est constituée de bénévoles parmi lesquels, au minimum, un juge consulaire à la retraite, un avocat et un expert-comptable. Très souvent s'y trouvent aussi des représentants des chambres d'industrie et des métiers, des organisations patronales artisanales, des greffiers, des centres de gestion agréées, des administrateurs et mandataires judiciaires, des représentants de la compagnie des conseils et experts financiers (CCEF) et des associations (ECTI, EGEE) qui regroupent des seniors bénévoles capables d'apporter des solutions et du conseil aux entreprises en difficulté.

Le CIP a signé une convention de partenariat avec APESA (Aide Psychologique pour les Entrepreneurs en Souffrance Psychologique Aiguë) qui soutient également les dirigeants d'entreprise connaissant des difficultés d'ordre moral comme la dépression, le burn-out ou la souffrance psychologique aiguë pouvant déclencher une crise suicidaire.

En 2014, quatre associations ( SOS Entrepreneur, Re-créer, 60 000 rebonds, Second Souffle) , et l'observatoire Amarok 351 ( * ) , dont l'objectif commun est d'aider les entrepreneurs à rebondir pendant ou après avoir connu des difficultés, ont décidé d'unir leurs efforts dans le respect de leurs originalités, en créant un Groupement d'Intérêt Associatif dénommé « le portail du rebond des entrepreneurs » afin d'offrir un accès internet commun accessible à tout entrepreneur en difficultés.

Pour ces associations, « en France, l'échec d'un entrepreneur est souvent marqué comme une infamie, la conséquence de fautes ou d'erreurs ; par suite, même s'il n'a rien à se reprocher (pas de fautes de gestion, de fraudes), il rencontre les plus grandes difficultés quand il cherche à rebondir ; notamment il ne trouve pas de financements bancaires lorsqu'il veut recréer une entreprise. Une telle situation n'existe pas dans d'autres pays. La perception de l'échec n'est pas la même, par exemple pour les sportifs, chacun est conscient qu'ils puisent leur force dans l'expérience qu'ils retirent de leurs échecs. Elle devrait être la même pour les entrepreneurs ».

Ainsi par exemple, les membres de 60 000 rebonds animent des conférences (« échec, tremplin et rebond ») dans les grandes écoles (Essec, Centrale, HEC) auprès d'élèves futurs entrepreneurs ainsi que d'anciens élèves devenus entrepreneurs, et auprès de dirigeants de start-up dans le cadre d'incubateurs ou de tribunes libres.

L'association Second Souffle se donne pour sa part comme objectif de « démarginaliser l'échec entrepreneurial et réhabiliter l'entrepreneur qui a échoué auprès des recruteurs et des organismes financiers » ou de « valoriser l'expérience entrepreneuriale comme un potentiel de compétences à explorer » car « seul peut échouer celui qui a osé » et car « l'échec peut être une étape de la réussite ».

Tout comme l'accompagnement de la création des entreprises, l'aide au rebond des entrepreneurs repose sur le bénévolat. Aux yeux de votre rapporteur, il faudrait cependant, comme pour l'accompagnement, le considérer comme du mécénat de compétences. À ce titre, l'aide au rebond devrait être éligible au dispositif du mécénat d'entreprise (proposition n°10bis) créé par la loi n° 2003-709 du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations et bénéficier de l'agrément fiscal ouvrant droit à une réduction de 60 % des montants versés dans le cadre de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

(4) Les témoignages d'entrepreneurs sur leurs échecs

Dans la presse économique, le regard sur la faillite a commencé à changer.

Ainsi, Atlantico a publié, pendant l'été 2015, une série de quinze portraits de chefs d'entreprises connaissant une success story (Viadeo, Sarenza, VivaStreet, KissKissBankBank, Blablacar ou Meetic pour ne citer que les plus connus), qui apportaient un témoignage de leurs échecs et donnaient les clés qui ont « leur ont permis de rebondir pour construire le succès commercial ».

Ces témoignages sont utiles pour que le regard de la société change.

Après tout, la faillite de Balzac en 1828, qui écrivit sur les défaillances d'entrepreneurs à au moins trois reprises, influa sans doute -suite à la parution en 1837 de l' Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau - la réforme du code de commerce de 1838 sur les entreprises en difficulté...

b) L'espoir de l'assurance-chômage des entrepreneurs

En France, la couverture du risque de perte involontaire d'emploi pour les travailleurs indépendants n'est effectuée que par le recours à des assurances privées contre la perte d'emploi.

(1) Une assurance-chômage confidentielle

L'assurance-chômage des entrepreneurs existe depuis 1979 à l'initiative du MEDEF, de la CPME et de l'U2P.

Elle reste cependant confidentielle avec moins de 15 000 souscripteurs actuellement sur 2,2 millions, les micro-entrepreneurs ne pouvant y souscrire.

Elle est une assurance volontaire 352 ( * ) qui indemnise les dirigeants non salariés à hauteur de 55 % ou 70 % de leur revenu fiscal net antérieur, sur 12, 18 ou 24 mois. Les créateurs d'entreprise bénéficient d'une garantie forfaitaire de 5 712 euros versé en une fois pour une cotisation annuelle de 408 euros.

La « GSC », assurance chômage des entrepreneurs

Le chef d'entreprise, quel que soit son statut : artisan, commerçant, entrepreneur individuel ou dirigeant mandataire social assimilé salarié, peut souscrire cette assurance dont le revenu n'est pas soumis aux cotisations de Pôle emploi, s'il remplit les conditions suivantes :

- être inscrit au Registre du Commerce et des Sociétés - RCS - ou au Répertoire des Métiers pour les artisans ;

- ne pas pouvoir prétendre avant au moins cinq ans, à la date de l'affiliation, à la liquidation de la retraite de base de sécurité sociale à taux plein ;

- ne pas être titulaire d'une pension d'invalidité de 2 ème ou 3 ème catégorie au titre d'un régime obligatoire de base de la Sécurité sociale

- percevoir un revenu professionnel hors dividendes (sauf pour la formule créateur / repreneur d'entreprise)

- ne pas être en situation de difficulté économique et financière au moment de l'affiliation, c'est-à-dire ne pas faire l'objet d'une procédure de sauvegarde, d'un redressement judiciaire ou d'un plan de continuation, ou ne pas connaitre l'une des situations suivantes : report à nouveau débiteur ou dernier résultat d'exercice déficitaire et/ou perte d'exploitation supérieure à 50 % du capital social ou situation nette comptable négative ; ne pas être en état de cessation de paiement ;

- adhérer à une organisation patronale professionnelle ou territoriale elle-même adhérente à l'Association GSC. Les créateurs et repreneurs d'entreprise peuvent toutefois être admis au bénéfice de la GSC sans être adhérent d'une organisation patronale. Cette condition devra être remplie dès lors que ces derniers changeront de formule.

Les créateurs et repreneurs d'entreprise peuvent s'assurer moyennant une cotisation forfaitaire limitée, même s'ils ne perçoivent pas ou peu de revenu.

La GSC couvre le dirigeant d'entreprise dans tous les cas de perte involontaire d'emploi à la suite d'événements concernant le dirigeant mandataire social comme la révocation (même lorsque le mandataire social détient plus de 10 % du capital social), le non-renouvellement du mandat prononcé à son encontre ou touchant l'entreprise sur décision judiciaire (redressement judiciaire, liquidation judiciaire, jugement arrêtant un plan de cession) ou sur décision amiable sous contrainte économique (dissolution anticipée, cession, fusion absorption, restructuration profonde).

L'état de chômage est reconnu en cas de perte juridique du mandat social ou du statut de chef d'entreprise et la GSC permet également de pallier l'absence de cotisation retraite pendant la période sans emploi.

L'entreprise peut demander son affiliation dès sa création, sans attendre la clôture d'un premier exercice comptable. Le dirigeant peut être affilié dès sa nomination et pourra donc être couvert pour la révocation notamment, dès le 1er anniversaire de son affiliation.

L'adhésion à la GSC permet par ailleurs d'appartenir à un réseau de chefs et dirigeants d'entreprise qui peut aider à rebâtir un projet professionnel pour rebondir.

Source : GSC

Cette formule, quoique confidentielle, répond à la demande exprimée par les entrepreneurs de sécurisation de leur parcours . Entre 2005 et 2013, la crainte de la perte d'emploi a doublé dans cette catégorie, passant de 16 % à 30 %, tandis qu'elle restait stable (24 %) chez les salariés.

L'extension de cette assurance volontaire à tous les entrepreneurs pose toutefois la question de sa viabilité économique , puisque pour assurer la même indemnisation à l'entrepreneur qu'à un salarié couvert par l'Unedic à niveau de revenu équivalent, la cotisation GSC serait de 3,4 %, contre 6,45 % à l'Unedic si l'entrepreneur pouvait y être assuré.

D'autres assurances privées, telles celle proposée par l'Association pour la protection des patrons indépendants ou celle du groupe APRIL, proposent une couverture semblable.

(2) Une extension limitée aux cas de liquidation judiciaire

Lors de la campagne présidentielle avait été annoncé que « les entrepreneurs auraient droit à l'assurance-chômage ».

L'application de cette promesse est en réalité bien plus restrictive.

En effet, réagissant à l'accord national interprofessionnel sur l'assurance-chômage, le Gouvernement a indiqué, le 5 mars 2018, que les travailleurs indépendants (agriculteurs, artisans, micro-entrepreneurs, commerçants indépendants ) qui actuellement ne bénéficient pas d'une couverture chômage, auraient désormais droit, en cas de liquidation judiciaire , à une allocation de 800 euros par mois durant 6 mois , un montant forfaitaire et perçu sous réserve que leur activité ait généré un montant significatif durant deux ans. Pour rappel, 50 000 à 60 000 défaillances d'entreprises se produisent chaque année. Aucune cotisation supplémentaire ne sera prélevée pour financer ce nouveau droit.

Ces mesures devraient bénéficier à environ 30.000 bénéficiaires par an pour un coût de 140 millions. L'allocation sera financée grâce à la hausse de 1,7 % de la CSG et versée par Pôle emploi.

Si l'assurance-chômage était étendue à 300 000 travailleurs indépendants, son coût serait porté à 3,2 milliards d'euros 353 ( * ) , selon une estimation de France Stratégie en mai 2017 354 ( * ) .

En conséquence, le Conseil économique, social et environnemental préconise, dans son étude consacrée aux nouvelles formes du travail indépendant, de circonscrire une éventuelle future négociation d'une couverture chômage aux seuls travailleurs indépendants qui recourent, pour l'exercice de leur activité professionnelle, aux plateformes de mise en relation par voie électronique. Le groupe des employeurs s'est toutefois opposé à cette préconisation en faveur du recours à une assurance privée volontaire.

Pourtant, et comme le plaide M. François Hurel, président de l'Union des Auto-Entrepreneurs 355 ( * ) , renoncer à l'assurance-chômage des indépendants serait perdre de vue l'un des objectifs du gouvernement : « garantir à tous les actifs une équité dans la sécurisation de leur parcours professionnel, et, via un transfert du financement des cotisations sociales vers la CSG, en assurer une forme d'universalité ». Ce serait également « passer à côté d'une demande de plus en plus affirmée chez la majorité de ces nouveaux "micro-entreprenants" qui souhaitent créer leur activité, tester un projet, de façon souple et sécurisée ».

Réserver cette indemnisation aux seuls cas de liquidation judiciaire, serait enfermer l'entrepreneuriat dans l'échec, au lieu d'encourager la prise de risque et de donner le droit à une capacité de rebond . Cette extension est aujourd'hui nécessaire à la promotion de l'entrepreneuriat dans notre pays.

A l'occasion de l'examen de la réforme de l'assurance-chômage 356 ( * ) au Parlement, ce sujet ne manquera pas d'être débattu.

3. Un droit des entreprises en difficulté complexe qui privilégie le maintien de l'emploi
a) Un droit qui met l'accent sur la prévention

Jusqu'à l'adoption du code de commerce en 1807, le droit de la « faillite » avait surtout pour vocation de punir le débiteur défaillant . Cette vision pénale de la faillite s'est atténuée au XIXe siècle avec la suppression de la contrainte par corps le 22 juillet 1867, la création en 1889, à côté de la procédure de faillite, de la liquidation judiciaire pour les débiteurs de bonne foi et, en 1955, la mise en place du règlement judiciaire afin de permettre au débiteur d'obtenir un accord, autrefois appelé concordat. Ces deux procédures furent conservées par la loi du 13 juillet 1967.

Le droit de la défaillance des entreprises était à l'origine réservé aux seuls commerçants (d'où sa place dans le Code de commerce de 1807).

Il a été étendu aux personnes morales de droit privé même non commerçantes (1967), aux artisans (1985), aux agriculteurs (1988), puis enfin à tous les professionnels indépendants y compris les professions libérales (2005), qui représentent 25 % des entreprises françaises.

Ce droit doit, d'une part, tenir compte des droits prioritaires des créanciers titulaires de sûretés par rapport aux autres créanciers et actionnaires, et ce, afin de garantir l'efficacité des sûretés et garantir l'accès au crédit privé des entreprises et, d'autre part, donner à l'entreprise viable une véritable chance de rebond , ce qui suppose que les actifs permettant la poursuite de son activité ne soient pas saisis par les créanciers titulaires de sûretés.

La France est le seul pays de l'OCDE autorisant le juge à pouvoir faire approuver un plan de continuation de l'entreprise , affectant les droits des créanciers titulaires de sûreté, sans que le consentement d'une partie au moins des créanciers ne soit nécessaire 357 ( * ) et sans que les créanciers titulaires de sûretés ne puissent être moins bien traités que dans un scénario liquidatif.

Les principaux éléments de ce droit, d'une complexité rare, peuvent être résumés ainsi :

Mandat ad hoc

Conciliation

Sauvegarde

Redressement judiciaire

Situation de l'entreprise

Difficultés avérées ou

prévisibles sans cessation

des paiements

Difficultés avérées ou

prévisibles. Cessation

des paiements possible

(si < 45 jours)

Difficultés avérées ou

prévisibles (sans cessation

des paiements)

Cessation des paiements

(< 45 jours)

Finalité du dispositif

Résolution des difficultés/

Accord amiable

avec les principaux

créanciers

Résolution des difficultés/

Accord amiable

avec les principaux

créanciers - possibilité

d'homologation

Privilège

de new money

Moratoire dans le cadre

d'un plan de sauvegarde

Moratoire dans

le cadre d'un plan

de continuation ou

de cession des activités

de l'entreprise

Ouverture du dispositif

À l'initiative du dirigeant

À l'initiative du dirigeant

À l'initiative du dirigeant

Initiative du dirigeant,

assignation d'un créancier

ou saisine du tribunal

par le parquet

Impact sur les dettes

Négociation amiable

Négociation amiable

Gel du passif pendant la

procédure

Gel du passif pendant la

procédure

Publicité

Confidentiel

Confidentiel

Non confidentiel

Non confidentiel

Autonomie de gestion du dirigeant

Liberté de gestion

Liberté de gestion

Gestion surveillée ou

assistée par l'administrateur

judiciaire

Gestion assistée ou

assurée totalement par

l'administrateur

Sort des cautions et garanties consenties

À négocier

Cautions (et assimilées)

personnes physiques

et morales peuvent se

prévaloir de l'accord

constaté ou homologué

Cautions (et assimilées)

personnes physiques

peuvent se prévaloir des

délais du plan

Cautions personnes

physiques protégées

uniquement pendant

la période d'observation

Honoraires

Imputation des coûts

éventuels de restructuration

à l'entreprise

Rémunération fixée par

le juge sur proposition

des parties

Imputation des coûts

éventuels de restructuration

à l'entreprise

Rémunération fixée par

le juge sur proposition

des parties

Barème légal, honoraires

arrêtés par le président

de la cour d'appel

au-delà du seuil

Barème légal, honoraires

arrêtés par le président

de la cour d'appel

au-delà du seuil

Durée

Prorogeable sans limite

5 mois maximum

18 mois maximum

18 mois maximum

JUDICIAIRE Source : Le guide de l'entrepreneur éclairé , FHB Editions

(1) La difficulté d'anticiper et d'appréhender la cessation de paiement

La plupart du temps, l'entrepreneur attend de rencontrer des difficultés de trésorerie pour s'inquiéter de la santé de son entreprise. Ces tensions ne sont pas des signaux d'alerte car il est parfois déjà trop tard.

L'anticipation doit permettre de traiter au mieux ces difficultés.

(a) Un référentiel d'anticipation

Plusieurs éléments peuvent permettre à l'entrepreneur d'agir au plus tôt :

• Carence ou insuffisance d'accompagnement comptable

• Arbitrages dans les paiements courants : témoins d'un mode de financement inadapté du BFR ou d'une rentabilité insuffisante, ils sont toujours graves !

• Menaces de résiliation d'un contrat pour impayé, d'assignation en paiement d'un fournisseur, de mise en demeure visant la clause résolutoire du bail commercial : ces difficultés en engendreront de nouvelles ! Il faut agir immédiatement.

• Menaces de dénonciation de concours bancaires ou de refus de financement : la confiance des banques est un indicateur à prendre en compte.

• Engagements disproportionnés par rapport à la rentabilité de l'entreprise : renégociez !

• Sous-rentabilité (au regard des engagements financiers) ou déficit structurel (charges d'exploitation non couvertes par les marges) : identifiez les foyers de perte, repensez la stratégie.

• Pertes exceptionnelles à financer : estimez les conséquences sur votre trésorerie, envisagez des moratoires auprès des créanciers les moins critiques voire institutionnels (saisine CCSF).

• Blocage dans la gérance, litige ou mésentente entre associés : courez vers un médiateur !

• Dépendance économique : le piège se refermera ! Diversifiez-vous.

• Sureffectif structurel : l'entrepreneur éclairé sait ajuster ses charges à son activité pour préserver le maximum d'emplois sur la durée.

• Débauchage de personnel clé : protégez-vous au moyen, par exemple, de clauses de non-concurrence et, si elles ne suffisent pas, analysez les conséquences sur l'activité.

• Difficultés de recouvrement du poste clients : c'est comme le lait sur le feu ! Leurs décalages sont vos décalages, restez vigilant !

• Difficultés d'un client important : gare à l'effet domino !

• Réorientation stratégique nécessitant de nouveaux financements : redoublez d'attention et d'échanges pour accompagner cette phase de développement.

Source : Le guide de l'entrepreneur éclairé , FHB Editions

(b) Des lanceurs d'alerte

Quatre catégories de lanceurs d'alerte internes ou externes de l'entreprise peuvent intervenir dès lors qu'ils relèvent dans ses comptes ou son environnement des éléments laissant présager l'existence de difficultés qui peuvent compromettre sa pérennité et dont la direction ne prendrait pas la juste mesure :

1. le commissaire aux comptes , obligatoire ou facultatif, en fonction de la structure juridique et du chiffre d'affaires de l'entreprise), qui doit alerter le dirigeant dès qu'il relève des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation - et en informer le tribunal de commerce, s'il constate que les décisions prises sont insuffisantes ;

2. les associés (pour une SARL) ou les actionnaires représentant au moins 5 % (pour une société par actions), qui peuvent interpeller deux fois par an le dirigeant par écrit sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation ;

3. le comité d'entreprise (ou, à défaut, les représentants du personnel), qui peut alerter la direction, avec l'aide d'un expert, sur des faits de nature à affecter de manière préoccupante l'entreprise ; faute de réaction suffisante du dirigeant, les représentants du personnel pourront saisir l'organe collégial de direction ou d'administration et, à défaut, les associés ;

4. le président du tribunal de commerce ou de grande instance, qui peut convoquer le dirigeant à un entretien pour l'inciter à réagir et envisager avec lui comment redresser la barre - et, si nécessaire, obtenir de tiers 358 ( * ) des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation de l'entreprise : si les difficultés avérées sont considérables, il pourra préconiser une conciliation ou sensibiliser le procureur, qui pourra alors saisir le tribunal pour l'ouverture d'une procédure collective, dans le souci de préserver au mieux les partenaires de l'entreprise.

Ces différentes procédures d'alerte, qui comportent plusieurs phases et dépendent de la structure juridique de chaque entreprise, sont peu coercitives : « elles obligent le dirigeant à ouvrir les yeux, sinon à réagir concrètement face à la menace » 359 ( * ) .

L'entrepreneur a tout à gagner de s'entourer de conseils. Les centres d'information sur la prévention des difficultés des entreprises, les observatoires judiciaires ainsi que les cellules de prévention des tribunaux de commerce, s'ils n'ont pas un devoir d'alerte, jouent un rôle crucial en informant bénévolement les chefs d'entreprise en difficulté sur les outils offerts par la loi pour les aider à traverser ces difficultés. Les experts-comptables pourraient également jouer ce rôle de lanceurs d'alerte.

Les groupements de prévention agréés 360 ( * ) (pour un commerçant ou un artisan, une EIRL et toute personne morale de droit privé) fournissent à leurs adhérents, de façon confidentielle, une analyse comptable et financière des informations transmises sur leur entreprise et peuvent proposer, en cas de détection d'indices de difficultés, l'intervention d'un expert ou d'un médiateur.

(2) Des procédures qui peuvent s'enchaîner

Ces différentes procédures peuvent se succéder : mandat ad hoc , puis conciliation, puis procédures judiciaires hybrides (sauvegarde accélérée, sauvegarde financière accélérée) ou procédure judiciaire classique (sauvegarde, redressement judiciaire).

(a) Les procédures préventives

Amiables (non obligatoires) et confidentielles (afin d'éviter le « suraccident » d'une perte de confiance dans l'entreprise et/ou son dirigeant), les procédures préventives permettent, dans 70 % des cas, de résoudre des difficultés (recul du chiffre d'affaires et de la rentabilité rendant trop élevées les charges d'emprunts ; dénonciation de concours bancaires ; litige entre associés risquant d'entraîner la paralysie de l'entreprise ; assignation d'un fournisseur ; sous-capitalisation de l'entreprise ; accompagnement de la cession d'une entreprise en difficulté ; recherche de financements en vue de soutenir une réorientation stratégique ; LBO 361 ( * ) supposant une restructuration de la dette ; bris de ratios financiers...). Elles prennent deux formes :

- le mandat ad hoc , formule très souple et peu encadrée légalement ;

- la conciliation , plus encadrée, qui permet l'homologation judiciaire d'un accord.

Un mandat est donné par le président du tribunal de commerce à un professionnel, souvent un administrateur judiciaire, qui est choisi par l'entreprise en difficulté.

Ces deux procédures sont souples, rapides (la conciliation est limitée à 5 mois), et préservent la marge de manoeuvre de l'entrepreneur qui demeure libre de la gestion de l'entreprise et des orientations de la négociation (il peut à tout moment y mettre un terme ou récuser le médiateur).

La procédure de conciliation offre des leviers de négociation plus forts :

- elle est compatible avec l'état de cessation des paiements de l'entreprise ;

- elle permet l'octroi de délais de grâce pendant la procédure, tant à l'égard des créanciers attraits que des créanciers non attraits 362 ( * ) ou en cours d'exécution de l'accord ; ces délais sont possibles pour les créanciers signataires, peu importe que ce soit dans le champ de l'accord ou non ; enfin, il n'y a pas d'anatocisme 363 ( * ) pour les créances de l'accord ou les créances attraites à la procédure et échues à l'ouverture ;

- elle constitue l'étape préalable à des outils plus coercitifs (constitution des comités de créanciers 364 ( * ) votant à la majorité des 2/3), qui peuvent servir en cas (de risque) d'échec d'accords unanimes amiables (sauvegarde accélérée, sauvegarde financière accélérée, prepack cession , etc.) ;

Le prepack cession

Directement inspiré du droit américain de la faillite, le prepack cession a été introduit dans le Code de commerce par l'Ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, entrée en vigueur le 1 er juillet 2014 ( article L. 611-7 du Code de commerce ).

Il consiste en la préparation, dans le cadre d'une procédure amiable, de la cession de tout ou partie des actifs du débiteur . Cette cession sera ensuite arrêtée et mise en oeuvre dans le cadre d'une procédure collective par un plan de cession. Le Tribunal va pouvoir ainsi arrêter un plan de cession déjà pré-négocié dans le cadre de procédures préventives, ce qui permet un gain de temps considérable. En effet, la recherche de candidats repreneurs aura d'ores et déjà été effectuée pendant la phase amiable.

Cette procédure met en place un processus rapide permettant de diminuer au maximum le temps de mise en oeuvre du plan de cession qui aura été préparé préalablement en phase amiable alors que traditionnellement, il est préparé dans le cadre du lancement d'un appel d'offres pendant la procédure collective. La cession étant envisagée dans le cadre d'une procédure amiable, elle bénéficie de la sécurité, de la souplesse, et surtout de la confidentialité de la conciliation et du mandat ad hoc .

Le prepack cession présente aussi les avantages suivants : en termes de coûts, il permet notamment de réduire les frais relatifs à la période d'observation ; il permet d'obtenir un prix de cession plus intéressant en évitant la dévalorisation des actifs ; le préjudice à l'image et au crédit du débiteur sera amoindri préservant ainsi sa valeur économique.

La conciliation sécurise les accords face aux risques liés aux périodes suspectes (bien que purement techniques en raison des définitions de la cessation des paiements) et face aux cas de responsabilités. Elle permet aux parties de solliciter que le conciliateur se voie confier une mission spécifique de mandataire à l'exécution de l'accord pour sécuriser les engagements pris.

L'homologation judiciaire de l'accord, qui protège les apporteurs de new money 365 ( * ) , n'est possible que si des prévisions réalistes démontrent la pérennité de l'entreprise (incluant le financement de ses activités) tout en mettant fin à l'état de cessation des paiements, alignant les intérêts des parties à la négociation.

L'objectif des procédures amiables est, à l'issue d'une négociation transparente et impartiale avec l'ensemble des parties, de restaurer durablement la situation de l'entreprise en :

- négociant des moratoires avec les créanciers afin d'obtenir des délais de paiement auprès des fournisseurs et des banques critiques (« amend & extend agreement »), en étalant de façon équilibrée ou en restructurant les dettes financières (réaménagement des crédits, garanties, ratios bancaires ou deleverage 366 ( * ) ) ; en négociant avec les administrations fiscales et sociales pour l'obtention de remises et de délais, ainsi que de financement de créances fiscales (CIR, CICE, carry-back 367 ( * ) ...) ;

- identifiant de nouvelles sources de financement sur la base des propositions chiffrées de restructuration établies avec l'entreprise et ses conseils, et partagées entre tous. La nouvelle stratégie de l'entreprise et les besoins y afférents pourront ainsi être présentés aux parties, pour reconstituer les capitaux propres provenant des actionnaires ou de nouveaux investisseurs et financer les besoins de trésorerie . Grâce au privilège dit de « l'argent frais » ou « new money », les apporteurs de fonds nouveaux ou de prestations nouvelles sont protégés. En cas d'échec et d'ouverture ultérieure d'une procédure collective, les titulaires de ce privilège ne pourront pas se voir imposer des délais dans le plan final et seront remboursés de ces apports à l'arrêté du plan ;

- négociant le passif institutionnel avec le Comité interministériel de restructuration industrielle 368 ( * ) ou avec les Comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises 369 ( * ) qui pourront faciliter l'obtention de délais et de remises de dettes publiques auprès du Comité consultatif du secteur financier 370 ( * ) ;

- restructurant l'entreprise ou en engageant sa cession, ce qui peut impliquer une cession d'actifs ou de filiales et, le cas échéant, des négociations pour autoriser l'entreprise à disposer de ses biens qui peuvent avoir été donnés en garantie.

Les limites de ces procédures préventives sont les suivantes :

- les créanciers ne peuvent être forcés ni à participer ni à signer, alors que l'unanimité des parties est requise pour la signature de l'accord final et que les droits des créanciers non attraits ne sont pas affectés : il faudra user de procédures hybrides (procédure amiable qui se finit en procédure judiciaire, telles la sauvegarde accélérée ou la sauvegarde financière accélérée) pour y procéder ;

- ces procédures ne gèlent automatiquement ni les dettes ni les actions initiées par les créanciers ; seuls des délais de grâce de maximum 24 mois peuvent être obtenus en conciliation. De ce fait et de façon générale, les procédures amiables sont plus utiles pour résoudre des difficultés de structure de bilan , et les procédures judiciaires plus efficaces pour résoudre des difficultés liées aux comptes de résultat ;

- le délai de cinq mois pour la conciliation peut s'avérer trop court ;

- aucun aménagement du droit du travail n'est possible.

(b) Les procédures collectives (ou judiciaires)

À la différence des procédures préventives, ces procédures collectives sont publiques, plus longues (18 mois maximum) et conduites dans un cadre judiciaire.

Le contrôle du tribunal se matérialise par le fait qu'il devient l'ultime décisionnaire du sort de la procédure et donc de l'entreprise : il renouvelle ou met fin aux procédures, adopte ou non les plans proposés...

En outre, les pouvoirs de gestion de l'entreprise sont répartis entre le dirigeant et l'administrateur judiciaire, qui est désigné 371 ( * ) , outre un mandataire judiciaire chargé de représenter les intérêts des créanciers.

Dans cet environnement, l'administrateur judiciaire a pour mission d'aider au sauvetage de l'entreprise et d'assister la gestion de celle-ci. Ses pouvoirs sont graduels en fonction de l'étendue des difficultés :

- en sauvegarde, où l'entreprise n'est pas défaillante, il aura en général une simple mission de surveillance ;

- en redressement judiciaire, où l'entreprise est défaillante et la confiance est à recréer avec l'environnement, l'administrateur judiciaire aura au minimum une mission d'assistance , au maximum une mission de représentation totale .

En contrepartie de ce dessaisissement partiel de la direction , les procédures judiciaires offrent un environnement propice au sauvetage de l'entreprise, grâce à des leviers uniques, dont les principaux sont :

- le gel des dettes antérieures à la procédure en vue de leur étalement sans intérêts dans le cadre d'un plan de dix ans maximum, qui pourra, dans les entreprises les plus significatives, être arrêté par la majorité des deux tiers des créanciers réunis par catégories (financiers ou fournisseurs),

- la suspension des poursuites judiciaires,

- la suspension du cours des intérêts pour les dettes à moins d'un an,

- l'intervention de l'AGS 372 ( * ) pour l'avance des indemnités de licenciement voire des arriérés de salaires (en redressement judiciaire),

- la rationalisation des contrats conclus par l'entreprise (résiliation sans préavis et indemnités au passif),

- la reconstitution du patrimoine de l'entreprise ou de ses capitaux propres, avec, si besoin, une refonte forcée de son actionnariat dans les cas les plus graves.

Le droit offre actuellement à l'entreprise en difficulté quatre procédures différentes :

Sauvegarde

Sauvegarde accélérée

Sauvegarde financière accélérée

Redressement judiciaire

Conditions d'ouverture

Toute entreprise justifiant de difficultés qu'elle n'est pas en mesure de surmonter mais n'étant pas en cessation de paiement. Elle ne peut être ouverte qu'à l'initiative de l'entreprise, qui peut proposer l'intervention

de l'administrateur judiciaire de son choix, sous réserve de la décision finale du tribunal après

avis du parquet.

Elle est obligatoirement

précédée d'une procédure de conciliation,

qui aura permis l'émergence d'un plan à soumettre aux comités de créanciers à la règle de la majorité des deux tiers. Ses délais sont par

ailleurs abrégés (1 à 3 mois).

Réservée aux entreprises les plus importantes 373 ( * ) engagées

dans une procédure de conciliation et qui

ne sont pas en cessation des paiements depuis

plus de 45 jours

Toute entreprise

dans l'impossibilité de régler ses dettes avec son actif disponible (en cessation de paiement), mais dont la situation permet

encore un redressement.

Ouverte :

à la demande du chef d'entreprise (au plus tard dans les 45 jours suivant la cessation des

paiements) ;

sur assignation d'un créancier (sauf si une procédure

de conciliation est en cours) ;

à la demande du procureur de la République

(sauf si une conciliation est en cours).

Avantages

Permet à l'entreprise de geler ses dettes, de se prémunir

des poursuites de ses créanciers ou de faire intervenir

l'AGS pour le financement des coûts d'éventuels licenciements (en période d'observation ou en exécution du plan de sauvegarde uniquement).

Conçue pour faciliter le dénouement heureux d'une

conciliation qui a échoué en raison de l'opposition

d'une minorité de créanciers, elle est réservée aux

entreprises importantes 374 ( * ) qui peuvent être en cessation

des paiements, à condition que cette situation

ne date pas de plus de 45 jours, et qui justifient

d'un projet de plan visant à assurer leur pérennité,

susceptible de recueillir un soutien suffisamment

large de la part des créanciers, réunis en comités par

dérogation

aux seuils de droit commun.

Son objectif est d'imposer rapidement à certains

créanciers minoritaires récalcitrants, et en présence de

créanciers non identifiés (titres de dette négociables

sur les marchés financiers), une restructuration financière

pré-négociée et ayant recueilli un large soutien

des créanciers concernés, afin de préserver l'activité

opérationnelle de l'entreprise en difficulté.

Elle permet de geler

les poursuites des créanciers ainsi que les dettes de l'entreprise, sous le contrôle de l'administrateur

judiciaire, le temps de mener sa restructuration et de démontrer la faisabilité d'une continuation de

l'activité ainsi que du remboursement des dettes.

Modalités

Le tribunal désigne un administrateur judiciaire,

ainsi qu'un mandataire judiciaire (qui dresse l'état

du passif).

Les salariés sont représentés dans la

procédure.

Des créanciers (jusqu'à 5) peuvent être désignés en tant que contrôleurs.

Le jugement du tribunal ouvre une période dite

« d'observation » de 6 mois, renouvelable une fois (sauf prorogation exceptionnelle de 6 mois complémentaires

maximum, sur demande du ministère

public). Durant cette période, le dirigeant

continue à assurer seul la gestion de l'entreprise. Il

peut être assisté par l'administrateur judiciaire sur

certains aspects, dont la gestion de la trésorerie.

Ouverte à la demande du dirigeant, cette procédure

permet de bénéficier d'un gel de dettes pendant

au maximum 3 mois. À défaut de plan dans ce délai, le tribunal met fin à la procédure.

Elle donne lieu à un plan de sauvegarde arrêté

par jugement dans un délai maximum de 2 mois.

Le tribunal désigne un juge-commissaire, un

administrateur judiciaire ainsi qu'un mandataire

judiciaire.

Les salariés sont représentés dans la

procédure et des créanciers (jusqu'à 5) peuvent

être désignés contrôleurs. L'entreprise ne peut

plus bénéficier des procédures préventives.

Le redressement judiciaire prévoit une période d'observation

de 12 mois maximum (sauf prorogation

exceptionnelle jusqu'à 6 mois complémentaires, sur demande du ministère public).

Effets

La procédure, non confidentielle, peut aboutir à

un plan de sauvegarde, arrêté par jugement du

tribunal de commerce et opposable à tous les

créanciers de l'entreprise. Seule une cession partielle

de l'entreprise est possible : en sauvegarde, le dirigeant reste et restera maître à bord.

Elle affecte l'ensemble

des créanciers, excepté les salariés et les créanciers

alimentaires.

Cette procédure est semi-collective

puisqu'elle n'a d'effet que sur les créanciers financiers.

Sur décision du tribunal, la procédure débouche soit sur un plan de continuation, soit sur un plan de cession, soit sur la liquidation judiciaire de l'entreprise, lorsque le redressement est manifestement impossible.

Source : Le guide de l'entrepreneur éclairé , FHB Editions

(c) Le redressement a pour objectif la recréation de valeur

La procédure collective est souvent perçue par le chef d'entreprise comme une sanction alors qu'elle fait naître une chance de perdurer. En redressement judiciaire, tout est mis en oeuvre pour sauver l'activité, prioritairement avec la même équipe dirigeante, la cession étant subsidiaire (si aucun plan de redressement sérieux n'est présenté). Mise à l'abri des poursuites de ses créanciers, l'entreprise peut se concentrer sur les moyens de se restructurer rapidement.

Outre ce gel des poursuites, l'entreprise bénéficie du gel du passif 375 ( * ), lequel sera étalé dans le cadre du plan de continuation , qui lui permet de reconstituer sa trésorerie ou de financer sa restructuration. L'administrateur judiciaire, spécialiste de la gestion des biens d'autrui, doit réaliser un bilan diagnostic de l'entreprise qui va déterminer la faisabilité d'une continuation d'activité.

À l'issue de la procédure d'observation qui doit permettre à l'entreprise en difficulté de faire la preuve de la possibilité d'une continuation de l'activité et du remboursement de ses dettes, l'étalement de ces dettes sans intérêts sur au plus 10 années est une voie privilégiée du plan de redressement 376 ( * ) .

Pour veiller à sa mise en oeuvre et procéder au règlement des créanciers de ces dispositions, un commissaire à l'exécution du plan est nommé. Dès sa mise en oeuvre, la société redevient « in bonis » 377 ( * ) et le dirigeant retrouve seul sa signature, mais le Kbis mentionnera le plan de continuation jusqu'à l'apurement total du passif, avec possibilité de solliciter la suppression de ces mentions plus rapidement auprès du greffe.

À défaut, « si le ou les plans proposés apparaissent manifestement insusceptibles de permettre le redressement de l'entreprise ou en l'absence de tels plans » 378 ( * ) , le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise. Cela intervient lorsqu'un plan de continuation est exclu, c'est-à-dire en cas d'impossibilité de payer le passif du fait d'une rentabilité insuffisante, d'un échec de négociation ou de l'absence de moyens pour réduire le passif, ou encore d'impasse de trésorerie à bref délai. Lorsque des offres de reprises sont présentées, le choix du tribunal doit être guidé par l'objectif de la sauvegarde la plus pérenne possible de l'emploi.

(d) La liquidation judiciaire n'est pas une sanction

Le tribunal a la faculté de prononcer la liquidation judiciaire à tout moment dès l'ouverture de la procédure collective si l'entreprise n'est pas viable et son redressement manifestement impossible - souvent parce que la procédure a été ouverte trop tardivement : à l'issue de la période d'observation, à défaut de plan de redressement ; à tout moment de la phase d'observation ou en cas d'inexécution du plan ; en cas de résolution d'un plan de sauvegarde ou de continuation.

La procédure de liquidation judiciaire a pour but de régler les dettes de l'entreprise en procédant à la vente de ses biens. Elle entraîne la dissolution de la société. Pour le cabinet spécialisé FHB : « Il ne s'agit pas en soi d'une sanction, mais d'une mesure dictée par le souci de l'intérêt collectif : par effet domino, une entreprise qui crée de nouvelles dettes affecte négativement son environnement économique ».

Dès l'ouverture de la procédure, le tribunal désigne un liquidateur. Dans la plupart des cas, il a été le représentant des créanciers désigné pendant la procédure de redressement judiciaire. Il est chargé de vendre les actifs de l'entreprise par des enchères publiques ou de gré à gré, puis de répartir le produit des ventes entre les créanciers, sous le contrôle d'un juge-commissaire.

Durant cette période, l'entrepreneur est dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, mais peut procéder aux licenciements économiques nécessaires.

La procédure est close lorsqu'il n'existe plus de passif exigible, que le liquidateur dispose des sommes suffisantes pour rembourser les créanciers ou que l'insuffisance de l'actif rend impossible la poursuite de l'opération : on procède alors à la clôture pour insuffisance d'actif . C'est ainsi une procédure qui aboutit à l'effacement des dettes et permet le rebond de l'entrepreneur personne physique.

Exceptionnellement, elle peut être assortie d'une période de poursuite d'activité pour les besoins de la liquidation ou pour organiser une cession d'activité ou d'actifs.

b) Un droit du redressement d'entreprise qui pratique « l'acharnement thérapeutique »

Il résulte de ce rapide panorama et comme l'a relevé la commission des Lois du Sénat dans son rapport précité lors de la ratification des ordonnances de 2014, que « ces réformes successives cherchent à concilier approche juridique et approche économique, au risque parfois, selon votre rapporteur, de présenter des risques de contradiction . La logique toujours croissante de `boîte à outils' du livre VI du code de commerce n'est pas toujours compatible avec l'exigence de lisibilité du droit pour les chefs d'entreprise et la cohérence procédurale d'ensemble » 379 ( * ) .

Les auditions réalisées à l'époque ont relevé la complexité croissante du droit des entreprises en difficulté, qui semble parfois évoluer davantage en fonction des grandes entreprises que de la situation générale des entreprises.

Cette complexité du droit des procédures collectives résulte aussi de la création de nouvelles procédures, sans cesse plus ciblées, pour s'adapter à toutes situations en créant un continuum rendant parfois difficile l'appréciation de l'adéquation de la procédure applicable à la situation économique de l'entreprise.

A l'occasion de la troisième Journée des entreprises du Sénat, le 29 mars 2018, Mme Sophie Vermeille, présidente de Droit et croissance a ainsi souligné que : « depuis dix ans, le droit des faillites a été réformé à cinq reprises avec, chaque fois, des résultats mitigés. Le législateur a pris conscience du risque qu'il y avait à trop asphyxier les créanciers, mais n'a agi qu'en apposant des rustines pour corriger les effets pervers de dispositifs imparfaits. À sa décharge toutefois, il est malaisé de légiférer de manière simple et efficace en la matière. Il serait souhaitable que les pouvoirs publics adoptent une approche plus globale de ces questions, que la Commission européenne encourage » avec sa proposition de directive du 22 novembre 2016.

Cette situation soulève le problème de l'accessibilité de ce droit en particulier pour les PME, problème qui ne se pose pas pour les grandes entreprises, lesquelles peuvent se faire assister de conseils adéquats. En outre, même si toutes les dispositions du livre VI du code de commerce n'ont pas vocation à être appliquées aux petites entreprises, elles accentuent néanmoins l'image de complexité de ce droit, au rebours de la nécessité d'inciter les entreprises à anticiper les difficultés et à s'adresser au tribunal le plus tôt possible.

L'autre caractéristique de ce droit est que beaucoup trop d'entreprises non viables sont artificiellement maintenues en vie , ce qui conduit à appauvrir le gage des créanciers. Plus le temps passe, plus la valeur des actifs de l'entreprise diminue. Lorsque la liquidation est prononcée, l'existence de trop nombreux privilèges primant les droits des créanciers titulaires de sûretés, et la lenteur des procédures, rendent illusoire, à certaines exceptions près, le recouvrement d'au moins une partie de leurs créances, par les créanciers titulaires de sûretés.

À cet égard, compte tenu de ce degré de complexité, de nombreuses personnes entendues en audition par la commission des Lois en 2015 avaient jugé nécessaire « de faire désormais une pause » dans les réformes du livre VI du code de commerce.

Cette pause se trouve remise en question par les nouvelles perspectives ouvertes par le Président de la République.

c) Vers un droit franco-allemand de la faillite en 2024 ?

Le Président de la République a annoncé dans son discours à la Sorbonne du 27 septembre 2017 sur « l'Initiative pour une Europe souveraine, unie, démocratique » qu'il souhaitait proposer « en premier lieu à l'Allemagne un partenariat nouveau » et notamment pour « se donner d'ici à 2024 l'objectif d'intégrer totalement nos marchés en appliquant les mêmes règles à nos entreprises, du droit des affaires au droit des faillites ».

L'accord de coalition CDU-CSU-SPD 380 ( * ) présenté le 12 mars 2018, reprend cette proposition et évoque « la réalisation d'un espace économique franco-allemand doté de règles uniformes, notamment en matière de droit des sociétés et de faillite, et de rapprochement de l'assiette de l'impôt sur les sociétés » 381 ( * ) .

Le nouveau Traité de l'Elysée qui doit être conclu en 2018 reprendrait également cette perspective d'unification franco-allemande du droit de l'entreprise, du droit des faillites et de la fiscalité.

Cette convergence du droit des faillites requiert au préalable une évaluation des deux systèmes afin d'apprécier le plus performant.

La réponse est sans appel. Selon le classement 2017 de Doing Business en effet, la France occupe la 28 ème position et l'Allemagne la 4 ème pour ce qui est de l'efficacité des procédures d'insolvabilité.

En 2016, on a recensé 21 518 faillites d'entreprises allemandes contre 58 057 d'entreprises françaises 382 ( * ) , soit 2,7 fois plus que notre principal partenaire économique.

Ce nombre, figuré dans l'histogramme ci-dessous, est tombé en Allemagne à 15 169 pour les neuf premiers mois de 2017, en baisse de 8 % par rapport à la même période en 2016.

Le différentiel s'accroît puisque il s'élevait à 40 % en 2011, avec 30 099 défaillances d'entreprises en Allemagne contre 50 485 pour la France.

Depuis le début des années 1990, l'Allemagne affiche un nombre annuel de défaillances plus faible que la France. Si les chiffres ont convergé au début des années 2000 (à la baisse pour la France et à la hausse pour l'Allemagne), ils suivent depuis 2005 une trajectoire diamétralement opposée. En Allemagne, les défaillances sont inférieures à leur niveau d'avant l'éclatement de la bulle internet, qui était d'environ 30 000 ouvertures annuelles de procédures judiciaires, tandis qu'elles ont fortement augmenté en France avec la crise de 2008-2009 pour se stabiliser depuis 2010 au-dessus de 50 000 ouvertures.

Deux divergences essentielles dominent entre les droits français et allemand :

1/ alors que le droit français a développé une grande variété de procédures amiables (mandat ad hoc , conciliation) ou judiciaires (redressement judiciaire, liquidation judiciaire, liquidation judiciaire simplifiée, sauvegarde, sauvegarde financière accélérée), le droit allemand se fonde sur une seule procédure ;

2/ alors que le droit français offre une protection faible aux créanciers par rapport aux autres parties, notamment les actionnaires, le droit allemand se situe dans une position intermédiaire en termes de protection des créanciers. En France, le débiteur a le monopole de la présentation du plan de sauvegarde et les créanciers sont seulement invités à formuler un avis, non liant, sur ce plan. En Allemagne, un juge dirige la procédure collective mais doit obtenir l'accord des créanciers pour toute restructuration du passif.

(1) La loi allemande de l'insolvabilité de 1999383 ( * )

La loi InsO 384 ( * ) organise la fusion des différentes procédures collectives pendant la phase préliminaire, au cours de laquelle un administrateur est généralement désigné pour gérer le patrimoine du débiteur. Quelques semaines après l'ouverture de la procédure d'insolvabilité, l'administrateur présente aux créanciers un rapport exposant la situation économique de l'entreprise et analysant les perspectives de redressement. L'assemblée des créanciers prend alors la décision d'arrêter ou de poursuivre l'activité de l'entreprise. Dans le second cas, il existe deux possibilités : le redressement par cession ou le redressement par le débiteur dans le cadre d'un plan de résorption de l'insolvabilité, procédure inspirée du chapitre 11 américain.

L'article premier de la loi précise toutefois que la procédure pour insolvabilité vise à « satisfaire collectivement les créanciers d'un débiteur, en réalisant les actifs de ce dernier et en en partageant le produit, ou en adoptant une solution dérogatoire dans le cadre d'un plan de résorption de l'insolvabilité visant notamment la sauvegarde de l'entreprise ». La sauvegarde de l'entreprise apparaît donc comme un objectif second par rapport à la satisfaction des créanciers, à rebours du droit français.

(2) La réforme de 2005

En Allemagne, la procédure du « plan d'insolvabilité » qui permet, par dérogation à la rigidité du droit commun, d'organiser un redressement en préservant la personne morale, n'a pas rencontré le succès escompté. Oseo n'avait recensé, dans son étude de 2008, que 168 plans d'insolvabilité en 2004.

Les critiques portées contre les insuffisances du cadre juridique en vigueur depuis 1999 ont conduit le législateur allemand à insuffler un nouvel élan au droit allemand de l'insolvabilité avec la loi dite « amendement ESUG » 385 ( * ) , en vigueur depuis 2012.

En définitive, la réforme ESUG a souhaité rendre plus attractives les restructurations en Allemagne dans un contexte de « tourisme de l'insolvabilité » qui profitait au Royaume-Uni, et que les directives européennes ont entendu combattre, et favoriser l'ouverture des procédures plus en amont des difficultés. Le pari est donc de favoriser les chances de parvenir à un redressement, et de développer les restructurations négociées, dans l'intérêt de chacune des parties.

d) Un long chemin pour une convergence franco-allemande
(1) L'analyse comparée d'Oseo de 2008 a montré deux systèmes très divergents386 ( * )

La législation allemande étend l'initiative du déclenchement d'une procédure de liquidation aux créanciers dès lors que ceux-ci sont en mesure de faire valoir un motif sérieux et légitime. Toutefois, il ressort que cette possibilité n'est exercée que de manière marginale. En effet, les déclenchements à l'initiative du débiteur représentent 91,8 % des dossiers étudiés.

Un des objectifs de la réforme de 1999 était d'atteindre un taux d'ouverture des dossiers plus élevé dans l'idée de faire bénéficier un plus grand nombre de créanciers des gains potentiels de la coordination du recouvrement ainsi que d'accroître les chances de continuation des entreprises défaillantes. Oseo a calculé que si la proportion de dossiers ouverts avait fortement progressé sur la période 1998-2002, la proportion se serait stabilisée autour de 50 % pour les années postérieures à 2002. De ce point de vue, la réforme a atteint partiellement son objectif. Cependant, un accroissement du nombre de dossiers ouverts n'implique pas une amélioration des taux de récupération des créanciers, augmentation qui permettrait d'affirmer que les entreprises entrent dans la procédure dans une situation moins mauvaise.

L'étude conduite par Oseo a montré que, parmi les trois critères juridiques d'ouverture des procédures collectives, le critère de la cessation de paiements imminente apparaît comme très largement marginal (2,4 % des cas recensés). L'ambition de la législation de 1999 d'anticiper le déclenchement de la procédure apparaît inefficace. De la même manière, le critère de surendettement n'est que rarement invoqué (1,44 % des cas étudiés). C'est le critère de cessation des paiements associé au surendettement qui est le critère principal présidant au déclenchement d'une procédure (73 % des cas).

Le poids moyen (moyenne de ratios) des coûts de faillite 387 ( * ) représente 40,1 % des montants recouvrés. Ce chiffre, élevé, rend également compte de la petite taille des entreprises considérées. En effet, la rémunération de l'administrateur est fixée sur la base des montants recouvrés et selon un barème dégressif.

La durée moyenne de la procédure pour l'Allemagne s'élève à 39 mois et 10 % des procédures durent plus de 64 mois. Toutefois, ces durées ne peuvent être comparées directement à la durée des procédures françaises 388 ( * ) .

Les issues de la procédure de faillite en Allemagne permettent une répartition finale des créances dans 67 % des cas et la part des dossiers clos pour absence ou insuffisance de masse représente, respectivement, 11 % et 12 % des cas.

En comparant les procédures, la note établit que :

- la France se distingue par une part plus importante de redressements, continuation et cession (5 %) car la survie de l'entreprise est prioritairement recherchée, tandis qu'en Allemagne, la liquidation apparaît comme une issue naturelle de la procédure pour les PME ;

- le coût des faillites est très élevé en Allemagne (47 000 euros en moyenne) par rapport à la France (5 000 euros), laquelle compte cependant de nombreux dossiers impécunieux dont les coûts sont supportés par les administrateurs et mandataires ;

- les entreprises défaillantes présentent des structures de passif (évaluées sur la base des trois groupes de créanciers retenus par l'étude) très différentes qui traduisent des conceptions diamétralement opposées du traitement des difficultés financières des entreprises.

La législation allemande se caractérise par une mutualisation très large des pertes . En particulier, les organismes sociaux, l'équivalent de l'ANPE et le fisc sont chirographaires dans la procédure. Ainsi, l'« ANPE » allemande, qui se substitue dans une large mesure aux salariés, absorbe une partie conséquente des pertes induites par la défaillance. Cela constitue un mécanisme de socialisation des pertes sur recouvrement : le système accordant peu de privilèges, c'est la collectivité qui supporte ces pertes à travers ces organismes auxquels la loi n'accorde qu'un statut de chirographaires.

En France se dessine le mécanisme inverse : la loi accorde des privilèges aux parties « hors contrats financiers », à savoir l'État et les salariés , qui, dès lors qu'une procédure est ouverte, captent l'essentiel du passif privilégié . Les sécurités s'en trouvent naturellement amoindries, à la fois en part des passifs et en taux de récupération. La procédure collective apporte alors des distorsions aux relations contractuelles initiales.

En conclusion de l'étude, Oseo rappelle que « la France considère la faillite comme un outil de politique économique destiné à sauvegarder les entreprises . Il faut donc offrir aux partenaires impliqués une procédure attractive et plutôt bon marché. À l'opposé, en Allemagne, où les relations banques-entreprises sont plus étroites, on peut s'attendre à ce que les efforts de résolution privée des difficultés soient plus développés. Dans cette logique, le déclenchement d'une procédure collective peut s'interpréter comme l'échec de la voie privée. Il en découle que le coût des procédures collectives n'est pas appréhendé comme un facteur essentiel de leur attractivité ».

(2) L'étude de la COFACE de 2012 a montré que l'Allemagne privilégiait les créanciers sur le maintien de l'emploi

Cette étude, qui intègre dans son périmètre la réforme de 2012 de l'amendement ESUG, confirme la précédente sur le coût des défaillances d'entreprises qui atteint en 2011, 20 milliards en Allemagne contre 14,3 en France (moyenne de 700 000 euros contre 200 000). Elle représente toutefois une différence moins marquée en part de PIB (0,8 % pour la France et 1,1 % pour l'Allemagne) en raison de la taille plus faible des entreprises françaises (94 % d'entreprises de moins de 10 salariés en France) par rapport à leurs homologues allemandes (81 %). Cette différence de coût s'explique par ailleurs parce que « en moyenne plus grosses que leurs homologues françaises, les entreprises allemandes sont moins exposées au risque de défaut, mais lorsque celui-ci se matérialise, son coût en est d'autant plus élevé ».

La COFACE note surtout que les entreprises allemandes sont financièrement plus solides que les entreprises françaises.

Une divergence croissante entre l'Allemagne et le reste de l'Europe est apparue quant aux buts poursuivis par le droit encadrant les procédures collectives. La conjugaison d'une croissance ralentie et d'un chômage élevé a en effet incité la plupart des législateurs européens, dont la France, à privilégier la survie de l'entreprise à l'intérêt de ses créanciers, essentiellement dans un objectif de défense de l'emploi. En Allemagne, à l'inverse, le régime juridique des défaillances est demeuré très favorable aux créanciers.

Alors qu'en France, le juge est en mesure de contrôler la procédure et reste maître de la décision finale quant à l'avenir du débiteur, il se contente en Allemagne d'arbitrer la procédure, à l'issue de laquelle c'est le comité des créanciers - et non le juge - qui décide du redressement ou de la liquidation de l'entreprise débitrice. En outre, avant l'amendement ESUG à la loi sur l'insolvabilité allemande, l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité entraînait, le plus souvent, le dessaisissement du chef d'entreprise au profit de l'administrateur de l'insolvabilité nommé par le tribunal (le juge se méfiant de la bonne foi et de la capacité du débiteur à rétablir son crédit). En France, au contraire, le chef d'entreprise demeure en charge de ses affaires, assisté d'un administrateur judiciaire, le temps de la procédure (de sauvegarde ou de redressement judiciaire).

Jusqu'en mars 2012, le droit des faillites allemand, bien plus défavorable à l'entreprise défaillante que son homologue français, a donc pu inciter à une gestion plus prudente de l'entreprise. Le tournant majeur dans le droit des faillites allemand de 2012 incite l'entrepreneur à agir plus en amont 389 ( * ) .

Les mesures contenues dans l'amendement ESUG doivent encourager le débiteur défaillant à intervenir plus en amont auprès du tribunal pour initier la procédure d'insolvabilité, de façon à accroître ses chances de redressement face aux créanciers. À terme, l'amendement ESUG pourrait donc sensiblement faire augmenter le nombre de défaillances en Allemagne.

Au final cependant, estime la COFACE, « l'incitation créée par la fermeté du droit des faillites allemand à l'égard de l'entreprise défaillante constitue probablement un facteur pouvant expliquer le nombre plus faible des défaillances en Allemagne ».

(3) Mixer le droit préventif français et la simplicité et la rapidité du droit allemand de la liquidation

Une convergence franco-allemande du droit de la faillite supposerait de combiner les droits les plus performants :

- le droit français pour le traitement précoce des difficultés des entreprises , qui est un modèle en Europe, a fait ses preuves lors de la crise financière de 2008 et repose sur la conciliation, confidentielle, dont le taux de réussite avoisine les 70 % ;

- le droit allemand pour la liquidation, qui est beaucoup plus favorable aux créanciers , lesquels sont regroupés en classes et qui permet de passer outre la résistance des actionnaires par un cross-class cram-down 390 ( * ) inspiré du Chapter 11 américain.

Compte-tenu de la complexité de ce rapprochement, votre Délégation préconise de créer très rapidement un groupe de travail commun, souple, entre les directions juridiques des deux ministères de la Justice, qui pourrait s'appuyer sur les cercles de réflexion existants, tels l'association Henri Capitant (proposition n° 29).

4. L'évolution du droit européen

Les exigences du bon fonctionnement du marché intérieur ont conduit à envisager la convergence du droit des procédures collectives. Il a fallu cependant attendre 2000 pour qu'un premier règlement soit adopté.

Chaque année, au sein de l'Union européenne , 200 000 entreprises font l'objet d'une procédure d'insolvabilité, soit 600 par jour, générant près d'1,7 million d'emplois perdus. Un quart de ces procédures, soit 50 000, correspondent à des procédures transfrontalières, impliquant créanciers et débiteurs dans plus d'un État membre de l'Union européenne.

a) Une harmonisation du droit européen en deux étapes

Le droit européen n'est applicable que si la procédure a des effets transfrontaliers .

En droit français, l'insolvabilité caractérise la situation d'une personne physique ou d'une entreprise dans l'incapacité de rembourser ses créanciers. En droit européen, l'insolvabilité désigne également la situation d'un débiteur en probabilité d'insolvabilité.

(a) Le règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité

Ce règlement ne concernait que des questions de compétence judiciaire, de reconnaissance et d'exécution, de législation applicable et de coopération dans les procédures d'insolvabilité transfrontières.

En présence d'une procédure d'insolvabilité ouverte à l'égard d'un débiteur ayant des activités, des actifs ou des créanciers situés dans plusieurs États membres, il permettait de répondre aux questions suivantes :

- Quel est le tribunal compétent pour ouvrir la procédure d'insolvabilité ?

- Quel est le droit national applicable à cette procédure ?

- Quelle sera la reconnaissance de cette procédure dans les autres États membres concernés ?

Il s'agissait de la première tentative de coordination entre les différents droits nationaux des États membres (le Danemark n'était pas concerné), pour faciliter les procédures d'insolvabilité transnationales.

Ce règlement reposait sur la localisation du centre des intérêts principaux du débiteur, le COMI 391 ( * ) . L'État membre sur le sol duquel est établi le débiteur est compétent pour ouvrir la procédure d'insolvabilité dite principale. Le tribunal compétent (lieu du COMI) devait appliquer son droit national et les effets de la procédure étaient automatiquement reconnus dans tous les autres États membres (sans formalité).

Un créancier situé dans un autre État membre où est localisé un établissement du débiteur (et non une filiale) pouvait demander au tribunal local l'ouverture d'une procédure dite secondaire dont les effets étaient limités aux seuls actifs situés dans cet autre État membre, avec une seule issue possible, la liquidation.

Curieusement, ce premier droit européen des procédures collectives n'a pas fait l'objet de transposition législative et n'a eu droit, pour son application par les juridictions françaises, qu'à deux modestes circulaires du ministère de la Justice.

(b) Le règlement (CE) n° 2015/848 du 20 mai 2015 relatif aux procédures d'insolvabilités transnationales

Il remplace et abroge le règlement (CE) n° 1346/2000.

Le règlement de 2015 met l'accent sur la résolution de conflits de juridiction et de lois dans les procédures d'insolvabilité transfrontières et garantit la reconnaissance des décisions judiciaires d'insolvabilité dans toute l'Union européenne. Toutefois, il n'harmonise pas le droit matériel de l'insolvabilité des États membres.

Afin de s'adapter au contexte de développement des activités transfrontalières des entreprises, le règlement poursuit les objectifs suivants : améliorer le fonctionnement du droit européen des procédures collectives, remédier à ses insuffisances, rattraper le décalage avec la nouvelle réalité économique, tenir compte de l'évolution des pratiques et des lois (nouveaux outils de prévention et de redressement), prendre en compte l'élargissement de l'Union européenne et lutter contre le « forum shopping » qui consiste pour un débiteur à demander l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité dans l'État membre qui servira au mieux ses intérêts, au détriment des créanciers.

Le nouveau règlement de 2015 élargit son champ d'application pour couvrir les procédures hybrides et de prévention des difficultés, mais reste limité aux procédures publiques, les procédures confidentielles restant exclues.

Il prévoit que, pour lutter contre le forum shopping , la présomption de la localisation du COMI du débiteur personne morale au lieu de son siège statutaire, nécessite que ce siège n'ait pas été transféré dans un autre État membre moins de trois mois avant la demande d'ouverture de la procédure. Le COMI doit être vérifiable par les créanciers qui disposent d'un droit de contestation. Autre nouveauté, le COMI des personnes physiques est désormais défini.

Le règlement considère que les procédures secondaires ne sont plus uniquement liquidatives : le redressement des établissements rentables devient une option. Il est désormais possible de suspendre leur ouverture pour faciliter un plan de restructuration. Ces procédures sont désormais facultatives : le tribunal peut écarter leur ouverture à condition d'avoir obtenu un engagement unilatéral du praticien nommé dans la procédure principale, garantissant aux créanciers locaux les mêmes droits dans la répartition des fonds que les droits qu'ils auraient eus en cas d'ouverture d'une procédure secondaire. Le droit applicable restera le droit local et cet engagement devra être approuvé à la majorité des créanciers locaux qui disposent d'un droit de recours contre le projet de répartition. Cette disposition, qui pourrait être de nature à favoriser la compétition entre les praticiens de l'insolvabilité, marque cependant pour nombre d'entre eux les prémices d'une harmonisation opérationnelle des pratiques.

Le règlement intègre les groupes de sociétés en difficulté, qui étaient ignorés par le précédent règlement de 2000, afin de permettre la restructuration d'un groupe dans sa globalité 392 ( * ) .

Il prévoit que, au plus tard le 26 juin 2018, les États membres devront tenir un ou plusieurs registres nationaux d'insolvabilité, accessibles au public et devant contenir un certain nombre d'informations. Au niveau de l'UE et au plus tard le 26 juin 2019, la Commission devra mettre en place un système décentralisé permettant l'interconnexion de ces registres d'insolvabilité nationaux via le portail e-justice.

Enfin, le règlement améliore les droits des créanciers étrangers, lesquels disposeront d'un délai minimum de 30 jours pour déclarer leurs créances.

Pour Hélène Bourbouloux, fondatrice et associée gérante du cabinet d'administrateurs judiciaires FHB, ce règlement apparaît majeur car « il s'agit d'un début de reconnaissance du traitement de l'insolvabilité d'un groupe de sociétés sur le fond et pas seulement sur la forme. Les propositions de sauvetage du règlement se font au niveau du groupe. C'est fondamental, car cela change la grille de lecture. Si l'échelon de sauvetage est au niveau de la personne morale dans nos législations nationales, celui retenu par le règlement se positionne au niveau du groupe. C'est perçu ainsi par les lenders 393 ( * ) ».

Plus de quatre mois après l'entrée en application du règlement (UE) n° 2015/848 du 20 mai 2015 relatif aux procédures d'insolvabilité -ce texte étant applicable aux procédures ouvertes depuis le 26 juin 2017-, a été publiée l'ordonnance n° 2017-1519 du 2 novembre 2017 portant adaptation du droit français au règlement précité 394 ( * ) . Les dispositions de nature réglementaire auxquelles renvoient plusieurs nouveaux articles restent à venir.

L'ordonnance crée un nouveau titre IX du livre VI du Code de commerce ainsi intitulé : « Dispositions particulières aux procédures d'insolvabilité relevant du règlement (UE) n° 2015/848 du 20 mai 2015 relatif aux procédures d'insolvabilité ». C'est donc la première fois que le Code de commerce comporte un titre relatif aux procédures d'insolvabilité .

L'interconnexion des registres d'insolvabilité, soit la possibilité pour tout citoyen européen de consulter gratuitement sur le site de la Commission européenne des informations relatives à la procédure d'insolvabilité d'un débiteur, est prévue pour courant 2019.

b) La mise en place d'un droit matériel harmonisé des procédures d'insolvabilité
(1) Une nouvelle stratégie de l'Union européenne : faciliter le rebond par la rapidité

La Commission européenne a pris conscience de la nécessité de la rapidité du traitement des procédures de défaillance des entreprises pour offrir une seconde chance et faciliter le rebond du chef d'entreprise.

Dans une recommandation du 12 mars 2014 « relative à une nouvelle approche en matière de défaillances et d'insolvabilité des entreprises », la Commission européenne souhaitait « assurer aux entreprises viables en difficulté financière, où qu'elles se trouvent dans l'Union, un accès aux cadres nationaux en matière d'insolvabilité leur permettant de se restructurer à un stade précoce afin de prévenir leur insolvabilité et d'optimiser ainsi leur valeur totale pour les créanciers, les travailleurs, les propriétaires et l'économie dans son ensemble ». La recommandation entendait également « offrir une seconde chance, dans l'ensemble de l'Union, aux entrepreneurs honnêtes ayant connu la faillite ».

Dès une « communication pour un Acte unique II » du 3 octobre 2012, la Commission considérait que la modernisation des règles en matière d'insolvabilité était « une mesure clé ».

Dans son Plan d'action Entrepreneuriat 2020 , du 9 janvier 2013, la Commission invitait les États membres à « limiter, si possible, à trois ans tout au plus d'ici à 2013, la durée des procédures de réhabilitation et de concordat pour les faillis honnêtes, et à fournir aux entreprises des services de soutien à la restructuration précoce ainsi que des conseils pour éviter la faillite, et aider les PME à se restructurer et à redémarrer ».

La recommandation de 2014 constate que l'harmonisation des cadres nationaux d'insolvabilité serait bénéfique à plusieurs titres :

- pour l'économie , car elle « permettraient d'optimiser les rendements des différents créanciers et investisseurs et encourageraient les investissements transfrontières. Cette cohérence accrue faciliterait également la restructuration des groupes de sociétés, quel que soit le lieu de l'Union où sont établis les membres du groupe » ;

- pour l'emploi , « la création d'activités non salariées dans les États membres serait stimulée par un meilleur accès des entrepreneurs à cette seconde chance. Par ailleurs, des cadres d'insolvabilité plus efficaces amélioreraient l'évaluation des risques liés aux décisions de prêt et d'emprunt et faciliteraient, en minimisant les coûts économiques et sociaux inhérents aux procédures de désendettement, l'ajustement des entreprises surendettées » ;

- pour les PME « qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour assumer les coûts élevés d'une restructuration et profiter des procédures de restructuration plus efficaces de certains États membres ».

Les éléments principaux de la recommandation de 2014

Un cadre de restructuration devrait permettre aux débiteurs de prendre en charge leurs difficultés financières à un stade précoce, lorsque leur insolvabilité peut encore être évitée et la poursuite de leur activité assurée. Toutefois, pour éviter tout risque potentiel d'abus de la procédure, les difficultés financières du débiteur doivent être de nature à entraîner son insolvabilité et le plan de restructuration doit être capable de prévenir l'insolvabilité du débiteur et d'assurer la viabilité de l'entreprise.

Pour permettre un gain d'efficacité et minimiser les délais et les coûts, les cadres de restructuration préventifs devraient comporter des procédures souples limitant les formalités judiciaires aux situations dans lesquelles elles sont nécessaires et proportionnées afin de préserver les intérêts des créanciers et des autres parties intéressées susceptibles d'être affectées.

Á titre d'exemple, afin d'éviter des coûts inutiles et de refléter le caractère précoce de la procédure, il conviendrait en principe de laisser aux débiteurs le contrôle de leurs actifs et de ne pas rendre obligatoire la nomination d'un médiateur ou d'un superviseur, mais de la prévoir au cas par cas.

Un débiteur devrait être en mesure de saisir une juridiction en vue d'obtenir un moratoire sur les procédures individuelles d'exécution et la suspension des procédures d'insolvabilité à son encontre demandées par les créanciers, lorsque ces actions peuvent affecter de manière négative les négociations et compromettre les possibilités de restructuration de l'entreprise du débiteur. Toutefois, afin d'assurer un juste équilibre entre les droits du débiteur et ceux des créanciers et compte tenu de l'expérience des réformes récentes dans les États membres, le moratoire devrait être initialement accordé pour une période n'excédant pas quatre mois.

Le plan de restructuration doit être validé par une juridiction compétente, afin d'assurer la mise en balance de la diminution des droits des créanciers et des avantages de la restructuration et de garantir l'accès des créanciers à un recours effectif, dans le plein respect de la liberté d'entreprise et du droit à la propriété qui sont consacrés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. La juridiction saisie doit dès lors rejeter tout plan qui serait susceptible d'entraîner une diminution des droits des créanciers dissidents en-deçà du niveau qu'ils auraient pu raisonnablement escompter si l'entreprise du débiteur n'était pas restructurée.

Alors qu'il semble être démontré que les entrepreneurs faillis ont plus de chance de réussir la seconde fois, les effets de la faillite et plus particulièrement la stigmatisation sociale, les conséquences juridiques et la persistance du défaut de paiement, sont autant de facteurs dissuasifs pour ceux qui souhaitent créer une entreprise ou bénéficier d'une seconde chance. D'où la nécessité de prendre des mesures propres à réduire les effets négatifs des faillites sur les entrepreneurs, en prévoyant des dispositions pour un apurement complet des dettes à l'expiration d'un délai déterminé.

Source : Recommandation 2014/135/UE de la Commission du 12 mars 2014 relative à une nouvelle approche en matière de défaillances et d'insolvabilité des entreprises

Dans ce contexte, le « plan d'action pour la mise en place d'une union des marchés des capitaux » 395 ( * ) de 2015 a annoncé une initiative législative dans le domaine de l'insolvabilité des entreprises, couvrant la restructuration précoce et la seconde chance. Cette initiative vise à supprimer les principaux obstacles à la libre circulation des capitaux et s'inspire des régimes nationaux qui fonctionnent bien.

Dans le même sens, la « stratégie pour le marché unique » 396 ( * ) du 28 octobre 2015 a annoncé le soutien aux entrepreneurs par une législation mettant en place un environnement réglementaire permettant de gérer l'échec sans décourager les entrepreneurs de se relancer dans des projets innovants.

Le rapport des cinq présidents de juin 2015 Compléter l'Union économique et monétaire européenne mentionne le domaine du droit des faillites parmi les principaux goulets d'étranglement qui empêchent l'intégration des marchés de capitaux dans la zone euro et au-delà :

« Une véritable Union des marchés des capitaux nécessite également d'autres améliorations, dont certaines ne peuvent être obtenues que par le biais de la législation, telles que : une simplification des exigences en matière de prospectus; une revitalisation du marché européen des titrisations de grande qualité; une plus grande harmonisation des pratiques comptables et d'audit ; et la suppression des principaux goulets d'étranglement qui empêchent l'intégration des marchés de capitaux, dans des domaines tels que le droit des faillites, le droit des entreprises, les droits de propriété et le caractère exécutoire des créances transfrontières ».

La Commission européenne estime, dans sa communication du 22 novembre 2016 annonçant cette nouvelle approche en matière d'insolvabilité, consistant à promouvoir la restructuration précoce pour soutenir la croissance et protéger les emplois, que « des systèmes d'insolvabilité et de restructuration qui fonctionnent sont essentiels pour soutenir la croissance économique et la création d'emplois. Cette initiative renforcera les possibilités, pour les entreprises en proie à des difficultés financières, de se restructurer sans attendre, afin d'éviter la faillite et le licenciement de leurs employés. Elle garantira que les entrepreneurs auront une seconde chance après une faillite. Elle conduira également à des procédures d'insolvabilité plus efficaces et plus efficientes dans toute l'UE ».

M. Franz Timmermans, premier vice-président de la Commission européenne a indiqué que celle-ci voulait : «aider les entreprises à se restructurer à temps, de façon à sauver des emplois et à préserver leur valeur. Nous voulons aussi soutenir les entrepreneurs qui ont échoué, pour qu'ils se relèvent plus rapidement, repartent de l'avant et se remettent en selle, plus avisés ».

Allant dans le même sens, la commissaire chargée de la justice, des consommateurs et de l'égalité des genres, Mme Vera Jourová, a souligné que « bien souvent, la faillite pourrait être évitée si nous disposions de procédures d'insolvabilité et de restructuration plus efficientes. Il est grand temps de donner aux entrepreneurs une seconde chance de démarrer une activité, par l'apurement complet de leurs dettes dans un délai maximal de trois ans ».

En effet, actuellement, la moitié des Européens déclarent qu'ils ne sont pas prêts à créer une entreprise par crainte de la faillite.

(2) La proposition de directive du 22 novembre 2016

La Commission européenne a publié, le 22 novembre 2016, une proposition de directive sur les procédures préventives de restructuration, la seconde chance et les mesures accroissant l'efficacité des procédures de restructuration, d'insolvabilité et de décharge de dettes. Elle entend promouvoir un système de procédures plus « efficientes ». Cette proposition modifie une directive CE 2012/30 relative au droit des sociétés. Elle s'inscrit dans le prolongement de la Recommandation de la Commission européenne du 12 mars 2014 relative à une nouvelle approche en matière de défaillances et d'insolvabilité des entreprises en prescrivant aux États membres de modifier leur loi sur l'insolvabilité. Il s'agit de dépasser le règlement européen du 20 mai 2015 portant sur les procédures d'insolvabilité.

Par cette démarche, l'Union européenne entend soutenir la croissance et protéger les emplois en développant une «culture commune de sauvetage ».

La Commission européenne propose ainsi, pour la première fois, une série de règles de fond concernant le droit de l'insolvabilité des entreprises.

En effet, comme on l'a vu, le droit européen harmonisait les procédures mais non le droit matériel de l'insolvabilité des entreprises au sein de l'Union européenne. Cette volonté d'harmoniser partait du constat simple de l'existence de disparités entre divers États membres.

Ainsi, les taux de recouvrement des créances, étroitement corrélés aux possibilités de restructuration, varient de 30 à 90 % (78 % en France, au-dessus de la moyenne européenne).

L'impact macro-économique d'une réforme de l'insolvabilité a été chiffré entre 0,3 et 0,55 % du PIB européen , représentant entre 41 et 78 milliards d'euros 397 ( * ) . Par ailleurs, elle permettrait la libéralisation d'une partie du capital mobilisé par les prêts improductifs (NPL) 398 ( * ) dont le montant a été estimé en 2014 par la BCE à 879 milliards d'euros, à hauteur de 167 à 522 milliards, ce qui entraînerait de nouvelles activités de prêt 399 ( * ) . Or, ce sont les PME qui détiennent la plus forte part (18,5 % en juin 2015) de ces NPL.

La proposition de directive du 22 novembre 2016 vise l'harmonisation des droits nationaux des 28 États membres en matière d'insolvabilité à partir du constat d'imprévisibilité et d'inefficacité des procédures collectives et de l'effet dévastateur des procédures sur les entreprises et l'emploi.

La directive proposée 400 ( * ) est axée sur trois éléments principaux :

a) des principes communs pour l'utilisation de cadres de restructuration précoce, qui aideront les entreprises à poursuivre leur activité et à préserver les emplois;

b) des règles autorisant les entrepreneurs à bénéficier d'une seconde chance, puisqu'ils seront entièrement libérés de leurs dettes à l'expiration d'un délai maximal de trois ans ;

c) des mesures ciblées pour que les États membres améliorent l'efficience des procédures d'insolvabilité, de restructuration et de réhabilitation. Cela réduira la longueur excessive et le coût des procédures dans de nombreux États membres, qui génèrent une insécurité juridique pour les créanciers et les investisseurs et aboutissent à de faibles taux de recouvrement des créances impayées.

Une harmonisation améliorerait la prévisibilité que recherchent les investisseurs et encouragerait le sauvetage précoce des entreprises viables et donc l'emploi. La Commission européenne évoque une nouvelle approche en matière d'insolvabilité et une culture du sauvetage mais n'a pas pour ambition d'harmoniser les aspects fondamentaux de l'insolvabilité : ce projet serait trop complexe, compte tenu des divergences nationales importantes et des interconnexions avec les autres branches du droit.

Ce manque d'ambition a été critiqué dans l'avis sur cette proposition de directive de la Banque centrale européenne (BCE) du 7 juin 2017 401 ( * ) . La BCE regrette, notamment, que la directive proposée renforce la fragmentation actuelle concernant la définition des procédures applicables et ne soit pas utilisée comme un moyen d'harmonisation de la définition de ces procédures.

La proposition de directive : « ne suit pas une approche globale visant à harmoniser les législations en matière d'insolvabilité dans l'ensemble de l'Union, à la fois pour la restructuration et la liquidation, et elle ne cherche pas non plus à harmoniser les aspects essentiels du droit de l'insolvabilité, tels que : a) les critères d'ouverture de la procédure d'insolvabilité ; b) une définition commune de l'insolvabilité ; c) le classement des créances en cas d'insolvabilité ; et d) les actions révocatoires. Bien que la BCE reconnaisse pleinement les difficultés considérables, sur les plans juridique et pratique, qu'entraînerait l'élaboration d'une approche globale, en raison des changements profonds du droit commercial, du droit civil et du droit des sociétés qu'un tel effort nécessiterait, des mesures plus ambitieuses doivent être prises pour déterminer des points communs en vue de l'harmonisation, sur le fond, des législations des États membres en matière d'insolvabilité; ceci garantirait une harmonisation plus globale à long terme et contribuerait au bon fonctionnement de l'union des marchés des capitaux ».

La BCE réclame aussi une hiérarchisation claire entre la proposition de directive et d'autres actes juridiques ayant une incidence sur la stabilité des marchés comme les directives n° 98/26/CE et 2002/47/CE ou le règlement (UE) n° 648/2012.

Enfin, elle appelle à une définition plus précise de la « probabilité d'insolvabilité » : « en raison de son importance cruciale pour le cadre de restructuration, elle ne devrait pas être laissée à l'entière appréciation des États membres ».

La proposition de directive définit des principes et une série de mesures ciblées et réalistes autour de trois thèmes.

Le premier thème est la promotion des outils de restructuration précoce des entreprises viables pour les aider à poursuivre leur activité et à préserver l'emploi, via des outils d'alerte précoce de détection des difficultés et des procédures de prévention permettant la restructuration et évitant l'insolvabilité, articulées autour de principes simples parfois inspirés du Chapter 11 américain parmi lesquels :

- le maintien du débiteur aux commandes de son entreprise,

- la limitation à quatre mois, renouvelables deux fois, de la suspension des poursuites,

- l'encadrement du plan de restructuration,

- le regroupement des créanciers en différentes classes,

- la possibilité d'imposer ce plan à une ou plusieurs classes de créanciers dissidents ainsi qu'aux actionnaires réfractaires ( cross class cram-down ),

- l'évaluation systématique de la valeur de l'entreprise,

- la protection absolue du new money et des transactions prévues au plan,

- et enfin, les contraintes fortes sur le dirigeant pour qu'il prenne les mesures qui s'imposent en cas de probabilité d'insolvabilité, de façon à protéger l'entreprise et son environnement.

Le deuxième thème porte sur la seconde chance des entrepreneurs « honnêtes » en vue d'un rebond, articulée autour de la libération totale du poids de la dette, la limitation des mesures d'interdiction de gérer dans un délai maximum de trois ans et le traitement coordonné des dettes professionnelles et personnelles.

Le troisième thème vise l'efficacité des procédures collectives par la formation et la spécialisation des juges . Pour les praticiens de l'insolvabilité, la Commission insiste sur leur formation, un code de conduite, des contrôles, un processus de désignation prévisible avec consultation du débiteur et des créanciers, un régime de sanctions approprié et un système de rémunération au mérite. En cas de procédure transfrontalière, leur désignation devra dépendre (i) de leur capacité à communiquer et à coopérer avec leurs collègues étrangers et (ii) de la taille de leurs équipes. D'autres mesures sont préconisées comme l'optimisation des moyens de communication électroniques et la mise en place d'un outil national de statistiques avec un rapport annuel à la Commission.

Les États membres auraient deux ans pour appliquer cette directive qui prévoit un premier contrôle de la Commission au bout de cinq ans, puis d'autres tous les sept ans.

La proposition de directive a fait l'objet d'une première lecture par le Conseil européen. La deuxième lecture s'est déroulée à l'automne 2017 sous présidence estonienne et la nouvelle lecture est programmée sous la présidence bulgare en 2018.

(3) L'impact de la proposition de directive sur le droit français du redressement d'entreprise
(a) Une proposition de directive compatible avec le droit français de la procédure de conciliation

Comme on l'a vu, la France est classée 14 ème sur 28 en Europe pour l'efficacité de ses procédures collectives en raison notamment de sa préférence pour la voie judiciaire et du nombre de procédures se soldant par une liquidation judiciaire, et ce malgré le succès de ses procédures préventives.

Elle bénéficie en effet d'un avantage par rapport à ses concurrents européens dans la prévention et la seconde chance grâce à la sauvegarde, avec la possibilité d'imposer aux créanciers d'un comité une solution de restructuration avec deux tiers des voix alors que cette majorité est portée aux trois quarts avec les procédures britanniques.

Pour le Président de l'Association pour le Retournement des entreprises 402 ( * ) , Me Jean-Dominique Daudier de Cassini, « le projet de directive s'inspire du droit français de l'entreprise en difficulté, en reconnaissant l'intérêt des outils amiables de prévention, sans toutefois les reproduire à l'identique. C'est l'idée d'anticipation qui est reprise ».

Pour ce faire, la Commission propose, comme on l'a vu, des procédures de détection précoces des difficultés et d'autre part, des procédures de restructuration préventive des dettes, avec la possibilité pour le débiteur pendant la période de renégociation, de bénéficier d'une suspension des poursuites individuelles. Le but est de faciliter l'adoption d'un plan de restructuration par une autorité judiciaire ou administrative, après accord de la majorité des créanciers, au détriment des créanciers minoritaires qui se trouvent alors écrasés. C'est précisément le schéma proposé par le droit français avec la procédure de sauvegarde et sa variante financière.

La Commission européenne cherche en outre à favoriser le rebond des chefs d'entreprises en leur permettant de ne pas supporter indéfiniment les conséquences d'un échec économique.

Le volet « seconde chance des entrepreneurs » est axé sur l'objectif de décharger les débiteurs du paiement de leur passif non apuré dans un délai qui ne saurait être supérieur à trois ans après la fin du plan d'apurement ou la clôture de la procédure collective, malgré l'absence de règlement du passif. C'est donc encore une règle inspirée de la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif existant en droit français.

Ainsi, « le droit français ayant constitué le modèle de cette proposition, si la directive était adoptée en l'état, sa transposition en France ne provoquerait pas de révolution du droit des entreprises en difficulté » selon Michel Menjucq, Professeur à l'École de droit de la Sorbonne.

Pour le Haut comité juridique de la place financière de Paris , dans son avis rendu le 7 juillet 2017, le projet de directive ne remet pas en cause les procédures préventives du droit français.

Il serait en revanche opposé à une transposition ayant pour effet d'imposer « une suspension générale ou partielle des poursuites individuelles dès l'ouverture de la procédure de conciliation, remettant ainsi en cause le principe de confidentialité indispensable pour une mise en oeuvre harmonieuse d'une procédure préventive et garant de la préservation de la valeur de l'entreprise ».

Cette directive nécessiterait des ajustements du droit français comme :

- la suppression de l'implication systématique des tribunaux ou des mandataires de justice,

- la limitation de la suspension des poursuites à une durée de quatre mois prorogeable à 12 mois (contre 6 à 18 mois actuellement),

- la séparation des créanciers privilégiés et chirographaires en 2 classes distinctes, l'intégration du cross-class cram-down (suppression de l'accord unanime de tous les comités de créanciers)

- la systématisation d'une évaluation de l'entreprise best interests test 403 ( * ) .

Le classement des créanciers introduirait une rupture majeure dans le droit français lui permettant de se rapprocher du droit américain ou allemand de la faillite.

(b) Une proposition de directive qui permettrait d'aller plus loin en introduisant des classes de créanciers
(i) Le classement des créanciers, une notion qui fait son chemin

Ce classement a été préconisé, sur le plan théorique, par une note du Conseil d'analyse économique du 7 juin 2013 , « Les enjeux économiques du droit de la faillite ».

Une meilleure protection des créanciers apparaît en effet nécessaire pour améliorer leur taux de recouvrement, faciliter l'accès au crédit des entreprises, augmenter in fine la probabilité de poursuite de l'activité des entreprises défaillantes.

Le Conseil d'analyse économique a donc préconisé d'inverser le paradigme du droit français des procédures collectives qui favorise la poursuite de l'activité de l'entreprise au profit de la réalisation rapide de la valeur de liquidation de l'entreprise « lorsque cela est optimal ». À cet effet, il propose de classer les créanciers en fonction de leur rang et de mettre la décision finale « entre les mains de la classe pivot ».

Proposition du Conseil d'analyse économique du 7 juin 2013

Afin de clarifier le processus de décision lors des procédures collectives et d'éviter les conflits d'intérêts délétères entre investisseurs, nous proposons une évolution du redressement judiciaire (et de la procédure de sauvegarde) qui s'articule autour des trois étapes suivantes :

une classification des créanciers en fonction de leur rang, en prenant en compte toutes les sûretés ;

la proposition, d'abord par le débiteur puis éventuellement par les créanciers, d'un plan de réorganisation qui comporte une projection de l'activité et une identification des classes pivots - celles dont les créances sont partiellement modifiées, sans être totalement annulées par le plan de réorganisation ;

un vote sur le plan de réorganisation au sein de ces classes pivots seulement, assorti de la possibilité pour le juge d'imposer le plan si seules certaines classes l'approuvent.

Cette approche a deux avantages principaux. D'une part, le processus est clair et sa mise en oeuvre plus rapide, ce qui permet à l'entreprise de retrouver plus vite un bilan assaini et limite le stigmate et la désorganisation liés aux restructurations de dette. D'autre part, les classes pivots n'ont a priori ni le biais en faveur de la continuation et de la prise de risque de celles qui perdent vraisemblablement tout en cas de cessation d'activité (par exemple, les actionnaires), ni le conservatisme des classes de créanciers les mieux protégés. Leurs incitations sont donc mieux alignées avec l'objectif de maximisation de la valeur totale.

Cette proposition introduit trois ruptures majeures avec les procédures sous leur forme actuelle :

les rangs des créanciers et leurs sûretés sont respectés tout au long de la procédure. Dans la législation actuelle, au contraire, les créanciers sont regroupés en classes qui ne reflètent pas nécessairement le rang de leurs créances (fournisseurs, banques, créanciers obligataires) ;

l'actionnaire devient un acteur marginal, ce qui reflète l'idée selon laquelle la valeur de ses droits résiduels sur les actifs est a priori très faible à ce stade. Dans les procédures actuellement en place, les actionnaires ne sont en général pas obligés par le juge d'absorber les pertes et de perdre leurs droits, sauf dans l'hypothèse d'une liquidation judiciaire ;

le nouveau rôle du juge consulaire est de s'assurer que les créanciers implémentent la procédure correctement et arrivent à une décision. Il peut éventuellement imposer un plan à tous dès lors qu'au moins une classe de créanciers pivots vote en sa faveur.

Le Haut comité juridique de la place financière de Paris, dans son avis précité, s'est rallié à cette proposition et préconise également « d'établir des seuils clairs à partir desquels la constitution de classes de créanciers serait obligatoire. Ils pourraient être ceux existants en droit français pour la consultation en comités de créanciers ».

(ii) La différenciation des créanciers

En France, la loi de sauvegarde des entreprises n° 2005-845 du 26 juillet 2005 avait introduit, à titre d'expérimentation, le concept des comités de créanciers en optant pour une approche simple et efficace. La sélection entre les différentes catégories de créanciers est opérée en fonction de la qualité du créancier et non pas de celle de leurs créances. C'est ainsi que le code de commerce distingue trois catégories de créanciers : les créanciers financiers, les fournisseurs et les obligataires.

La pertinence de ce classement est aujourd'hui remise en cause et « ne correspond plus aux meilleurs standards internationaux dans un monde de financement des entreprises de plus en plus sophistiqué - notamment en matière de leverage buy out (LBO) », selon des avocats spécialistes du sujet 404 ( * ) . .

L'ordonnance du 12 mars 2014 a tenté d'y remédier en introduisant la possibilité pour l'administrateur judiciaire de moduler les droits de vote en prenant en considération l'existence de garanties et d'accords de subordination. Pour les praticiens précités, « cette solution - unique en Europe - n'est guère convaincante. L'absence de critères objectifs est, en effet, de nature à créer une insécurité juridique ».

Le projet de directive prévoit de créer des classes de créanciers , distinguant entre créanciers garantis et non garantis, et traitant les salariés dans une classe distincte, seuls ceux affectés par le plan participant au vote. Des sous-classes de créanciers ayant des droits similaires et une communauté d'intérêts pourraient être créées.

La grande nouveauté proposée par le projet de directive serait l'introduction d'un mécanisme pour vaincre l'opposition des créanciers minoritaires.

(iii) L'introduction d'un mécanisme d'application forcée interclasse

En droit français, le rapport de force favorise débiteurs et actionnaires.

Les actionnaires ont la faculté de bloquer une restructuration reposant sur une conversion des créances en capital et entraînant leur dilution, même s'ils n'ont plus aucun espoir de gain. Si les créanciers, qui ne peuvent imposer leur solution, rejettent le projet du débiteur, les tribunaux peuvent les contraindre à rééchelonner sur dix ans leurs créances, retardant l'adoption d'une solution pérenne.

Les créanciers ont le même poids lorsqu'ils votent sur le projet de restructuration, quel que soit leur rang de remboursement, et qu'ils bénéficient ou non de sûretés, créant conflits d'intérêts et solutions de compromis, parfois non viables.

Dans le projet de directive, un plan de restructuration qui n'est pas approuvé par toutes les classes concernées peut néanmoins être validé par une autorité judiciaire ou administrative et être imposé à la demande du débiteur (ou d'un créancier avec l'accord du débiteur) à une ou plusieurs classes dissidentes. Le plan doit être approuvé par au moins une classe de créanciers qui a un intérêt financier dans le plan de restructuration 405 ( * ) . Les États membres devront prendre les dispositions nécessaires pour éviter que des actionnaires puissent empêcher l'adoption ou la mise en oeuvre d'un plan de restructuration viable 406 ( * ) .

Afin de ne pas constituer une disposition « repoussoir » qui empêcherait des PME de solliciter l'ouverture d'une procédure de restructuration préventive, les détenteurs de capital n'étant pas de simples investisseurs mais également les propriétaires de leur entreprise (parfois familiale), le projet de directive prévoit que le mécanisme de cross-class cram down reste facultatif pour le débiteur, auteur du plan.

Se pose néanmoins la question de savoir si un debt equity swap 407 ( * ) peut être imposé aux actionnaires d'une société dans le cadre d'une procédure de restructuration préventive sous l'angle du droit constitutionnel des États membres.

En France, le Conseil constitutionnel a validé , dans sa décision du 5 août 2015, la disposition de la loi dite « Macron » n° 2015-990 du 6 août 2015 qui avait introduit un dispositif de dilution et de cession forcée des actionnaires 408 ( * ) .

Le projet de directive instaure par ailleurs deux garde-fous :

1/ La restructuration doit être plus favorable qu'une liquidation ( best interests of creditors ). Seront comparés les montants que recevraient les créanciers dans deux scenarii : liquidation ou poursuite de l'activité. Si le montant reçu dans le premier est supérieur, la restructuration ne pourra être imposée.

2/ La restructuration ne peut déroger à l'ordre des remboursements ( absolute priority ). Aucun créancier ne peut recouvrer même partiellement sa créance si les créanciers bénéficiant d'un rang meilleur n'ont pas recouvré l'intégralité de leur dû.

(iv) Créer une seconde chance et faciliter le rebond de l'entrepreneur

La proposition de directive prévoit enfin l'apurement des dettes du débiteur, entrepreneur individuel, au-delà d'un délai maximum de trois ans 409 ( * ) . Il est actuellement de sept ans en Autriche et cinq ans en Allemagne. C'est un signal fort de soutien aux créateurs d'entreprise. En effet, la stigmatisation sociale et les suites juridiques d'un défaut de paiement sont trop souvent dissuasives pour ceux qui souhaiteraient bénéficier d'une seconde chance.

Le droit français ne fixe pas à l'heure actuelle de délai impératif, deux procédures permettant, dans des cas particuliers, d'aller vite :

- la procédure de liquidation simplifiée, introduite par la loi du 26 juillet 2005, qui a pour objet de permettre une réalisation rapide des opérations de liquidation qui doivent être terminées au plus tard un an après l'ouverture de la procédure, qu'elle soit obligatoire ou facultative. Elle implique toutefois l'absence de biens immobiliers et le respect de seuils relatifs au chiffre d'affaires et au nombre de salariés ;

- la procédure de rétablissement personnel introduite dans notre droit par l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 dont le but est de parvenir à l'effacement des dettes du débiteur, personne physique, qui n'a que très peu d'actifs, afin de lui permettre de se réinstaller.

À noter que la proposition de directive semble affirmer que, si le débiteur refuse tout plan, aucune réhabilitation ne sera possible. Une modification du droit français sera donc nécessaire sur ce point.

c) Objectif n° 27 : amorcer le rapprochement franco-allemand à l'occasion de la transposition de la directive du 22 novembre 2016

Votre Délégation préconise de profiter de la future transposition de cette directive , relative aux cadres de restructuration préventifs, à la seconde chance et aux mesures à prendre pour augmenter l'efficience des procédures de restructuration, d'insolvabilité et d'apurement et modifiant la directive 2012/30/UE, pour opérer un premier rapprochement franco-allemand (proposition n° 30).

(1) Rééquilibrer le droit des entreprises en difficulté

La proposition de directive ne va pas assez loin en conservant les procédures collectives nationales de pré-insolvabilité tout en introduisant des dispositions relatives à l'éviction des actionnaires et des créanciers, lesquelles ne peuvent être envisageables qu'à la condition que l'entreprise soit insolvable et qu'elle soit réalisée dans le cadre d'un forum transparent et sous le contrôle du juge.

Pour le laboratoire de recherche Droit et croissance , il faudrait revoir complètement le modèle français du droit de la faillite.

À cet effet, il faudrait « modifier la procédure de sauvegarde afin d'assurer le respect de l'ordre d'absorption des pertes et faciliter les plans de cession d'entreprises en faveur du meilleur offrant, le tout dans un cadre totalement transparent, condition indispensable au respect des droits des investisseurs susceptibles de se retrouver évincés », voire « supprimer la procédure de redressement judiciaire ainsi que les procédures de sauvegarde annexes (sauvegarde financière accélérée, sauvegarde accélérée) pour améliorer la lisibilité du droit français du point de vue des investisseurs et éviter que la direction de la société débitrice procède à des arbitrages entre telle ou telle procédure, conduisant à une modification des droits des investisseurs de manière totalement imprévisible » et « abroger la règle de la confidentialité absolue en procédure de conciliation (pour laisser les parties imposer une confidentialité relative) afin d'améliorer la liquidité du marché secondaire et permettre aux établissements bancaires de pouvoir plus rapidement financer de nouveaux projets ».

Le changement de paradigme de la procédure collective serait complet si, pour améliorer l'efficacité, le droit français réduisait le privilège accordé aux salariés, en reconnaissant que la protection des salariés passe davantage par un système de protection sociale amélioré : « le droit des faillites doit être cantonné à son seul rôle : la coordination des créanciers afin de préserver la valeur d'entreprise dans un objectif d'apurement du passif et, par voie de conséquence, de préservation des activités viables ».

Le droit des entreprises en difficulté est en effet devenu « un droit de la crise du travail et non un instrument qui permet d'améliorer le recouvrement des créanciers tout en préservant la valeur des entreprises défaillantes » 410 ( * ) .

Ce rapprochement franco-allemand harmoniserait, selon Maître Reinhard Dammann 411 ( * ) , les procédures préventives :

- en retenant le droit français de la restructuration de la dette en deux temps : (i) la phase de conciliation, dont le taux de réussite avoisine les 70 % car elle est confidentielle, (ii) la phase de sauvegarde, abrégée et simplifiée, pour imposer un plan de sauvegarde à la majorité des deux tiers des créanciers ;

- en retenant le droit allemand pour la technique de regroupement des créanciers en classes homogènes et la possibilité d'opérer un cram-down des actionnaires récalcitrants.

L'objectif étant de fluidifier le marché de la dette secondaire pour stabiliser le secteur bancaire et améliorer le recouvrement des créances financières en facilitant la cession des portefeuilles de non performing loans 412 ( * ) à des fonds d'investissement.

En effet, en décembre 2016, ce type de créances totalisait 1 092 milliards d'euros en Europe 413 ( * ) . Or, si l'Italie vient devant la France avec 276 milliards d'euros de ces prêts dans les bilans de ses banques, la France vient en deuxième position avec 148 milliards d'euros devant l'Espagne (141 milliards d'euros), la Grèce (115 milliards d'euros), l'Allemagne (68), les Pays-Bas (45), le Portugal (41).

Cette fragilité de notre système bancaire n'est pas inquiétante lorsque l'on ramène ces prêts à la taille du bilan des seules grandes banques françaises qui équivaut à trois 3 fois le PIB national. Toutefois, lorsque ces 148 milliards d'euros de prêts défaillants sont ramenés aux fonds propres réels des banques ( 259,7 milliards d'euros fin 2016 ) mobilisables en cas de crise, on obtient un ratio de 57 % : plus de la moitié des fonds propres des banques françaises sont donc menacés par ces prêts défaillants .

(2) Procéder à une réforme du droit des sûretés

Le droit des sûretés fixe les conditions dans lesquelles une entreprise offre en garantie ses actifs à ses créanciers et les conditions dans lesquels ces derniers peuvent exercer leurs droits sur ces actifs.

Une première réforme issue du rapport de la commission Grimaldi de 2005 414 ( * ) a été réalisée par l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés.

Sur la demande du ministère de la justice, l'Association Henri Capitant a constitué une commission en vue d'élaborer un avant-projet de nouvelle réforme du droit des sûretés présentée comme « urgente » pour répondre à l'attractivité du droit français car :

- la réforme de 2006 a exclu de son périmètre le cautionnement et les privilèges qui, de ce fait, demeurent sous l'empire de textes remontant pour la plupart à 1804. Or « il est indispensable, dans l'intérêt des acteurs économiques (créanciers et cautions), de clarifier le droit du cautionnement, très fragilisé par l'intarissable contentieux que suscitent notamment le formalisme qui l'encadre et l'exigence de proportionnalité » 415 ( * ) ;

- certaines difficultés d'interprétation de la réforme doivent être clarifiées 416 ( * ) ;

- il convient de mettre en cohérence la réforme de 2006 et les réformes ultérieures 417 ( * ) .

Un avant-projet a été rendu public le 14 septembre 2017 418 ( * ) . Il propose la modification de 216 articles du code civil et contribue à augmenter le niveau de complexité du droit alors même que la France connaît déjà une complexité excessive du droit des sûretés comparable à celle du droit des procédures collectives. Il ne prend pas non plus en considération la réforme à venir de la réglementation communautaire du droit des faillites.

Celle-ci devrait 419 ( * ) garantir aux créanciers titulaires de sûretés que leurs droits réels survivront à la procédure collective en leur conférant un véritable droit de priorité sur les actifs et se traduire de la manière suivante :

- les créanciers titulaires de sûretés ne seront plus logés au sein des comités de créanciers pour l'approbation du plan ;

- le vote des créanciers chirographaires à un plan n'aura pas d'effet sur les droits des créanciers titulaires de sûretés ;

- les créanciers titulaires de sûretés seront prioritaires par rapport aux créanciers chirographaires et aux actionnaires pour un montant égal à la valeur de marché des actifs remis en garantie

- les créanciers titulaires de sûretés seront alors les seuls à conserver des droits sur l'entreprise et les actionnaires et chirographaires pourront être évincés ;

- le droit pour les créanciers à ne pas être moins bien traités que dans un scénario liquidatif devra être instauré.

Les sept pistes d'une réforme ambitieuse du droit des sûretés

créer un registre de publicité des sûretés uniques pour l'ensemble des sûretés afin de faciliter l'information des créanciers et donc la constitution des sûretés ;

établir un régime général de droits et obligations des créanciers titulaires de sûretés uniques pour l'ensemble des sûretés, quelle que soit la nature des actifs sous-jacents, afin de simplifier le droit ; toute exception au régime général (par exemple en cas de nantissement de compte-courant afin d'assurer le bon fonctionnement du système bancaire) doit être explicitement justifiée dans la loi ;

supprimer le plus possible les exceptions à la règle de l'arrêt des poursuites au bénéfice de tel ou tel intérêt catégoriel ; par exemple, le privilège des salariés doit être revu à l'aune de la réforme du droit du travail ;

traiter de manière uniforme les gages avec dépossession du débiteur, comme les gages sans dépossession en cas d'ouverture de procédures collectives ; il convient de ne pas encourager les nantissements qui entraînent inutilement une immobilisation des actifs ;

réduire, sur le modèle de droits étrangers, l'usage d'instruments conférant fictivement les transferts de propriété en garantie : les ventes avec transferts de propriété différés doivent être analysées comme des simples prêts ;

de manière générale un principe de « substance over the form 420 ( * ) » doit prévaloir, afin d'éviter le plus possible aux techniques financières d'échapper aux règles de la procédure collectives ;

encourager d'autres formes de nantissements que ceux sur des sommes d'argent : les sûretés sur des sommes d'argent conduisent souvent à bloquer des sommes d'argent appartenant au débiteur sur un compte nanti, au moment où le débiteur en a le plus besoin, c'est à dire en cas d'ouverture d'une procédure collective. Il est préférable de privilégier la constitution de nantissements produisant des effets sur l'ensemble des actifs du débiteur (et pas seulement sur le fonds de commerce), sur le modèle de la floating charge 421 ( * ) de droit anglais, sans dépossession pour le débiteur.

Source : Droit et croissance.

Cette orientation serait de nature à renforcer considérablement l'attractivité des sûretés traditionnelles. La réforme du droit des sûretés devrait en tout état de cause s'opérer en étant accompagnée d'une approche économique et pas seulement juridique de ses objectifs .

Dans cet objectif, la commission « droit des sûretés » de Paris Europlace 422 ( * ) , présidée par M. Etienne Gentil, regroupant des praticiens, des universitaires et des représentants des établissements de crédit et du monde de l'entreprise, et aux réunions de laquelle participent en observateurs des représentants des ministères des finances et de la justice, avait publié un rapport le 1 er septembre 2015 comprenant de nombreuses propositions détaillées et explicitées sur le sujet. Elle a repris ses travaux dans l'optique de renouveler ses propositions ou d'en formuler de nouvelles, tenant notamment compte de l'avant-projet de réforme publié par l'association Henri Capitant en 2017.

Ses propositions, qui enrichiraient la réforme des sûretés d'une approche économique, sont attendues au plus tôt en juin 2018.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demanderait à être habilité, dans la loi PACTE, à procéder à une réforme du droit des sûretés par voie d'ordonnance afin d'intégrer, d'une part, cette approche économique et d'autre part, une dimension européenne, avec la transposition de la future directive proposée le 22 novembre 2016.

B. DEVELOPPER UN ENVIRONNEMENT FAVORABLE AU REBOND DE L'ENTREPRENEUR

1. Anticiper et prévenir les défaillances
a) La permanence de la question des délais de paiement
(1) Des sanctions alourdies pour des retards chroniques

En 2008, un rapport au Président de la République proposait de fixer le délai légal de paiement à trente jours :

[Proposition de] DÉCISION 38 - Imposer (par la loi et si nécessaire par ordonnance) le paiement aux PME à moins de 30 jours à compter de la date de livraison. Une telle décision (qui ne peut être prise que par la loi ou l'ordonnance) peut sembler remettre en cause la liberté du commerce, mais elle ne fait qu'en préciser les conditions d'exercice. Elle permettra aux PME de recouvrer 8 milliards d'euros de trésorerie pour toutes les livraisons aux grandes entreprises, et 1 milliard d'euros de trésorerie pour tous les marchés passés avec les collectivités publiques. Il faudra également imposer la publication des délais de paiement des groupes cotés.

Dix ans après ce rapport Attali, la question des délais de paiement se pose toujours. C'est un coût avéré pour l'entreprise et une fragilité permanente pour les PME.

(a) Les délais de paiement à respecter

La loi n'impose pas aux parties de convenir d'un délai de paiement. Le délai prévu à l'article L. 441-6, alinéa 8, du Code de commerce est supplétif 423 ( * ) .

En cas d'accord entre les parties, les délais de paiement pour régler les sommes dues ne peuvent dépasser 60 jours à compter de la date d'émission de la facture. Par dérogation, un délai maximal de 45 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture peut être convenu sous certaines conditions. D'autres dérogations, essentiellement sectorielles, à ces délais de principe existent.

Pour remédier aux retards de paiement qui restent trop nombreux, des évolutions législatives sont venues renforcer les pouvoirs de sanctions et de contrôle de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de de la répression des fraudes :

- la loi relative à la consommation n° 2014-344 du 17 mars 2014 a modifié le régime de sanction pour garantir un meilleur respect des règles définies par le Code de commerce. Les sanctions civiles et pénales, précédemment en vigueur, ont été remplacées par des sanctions administratives ;

- la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques n° 2015-990 du 6 août 2015 a étendu le champ de contrôle aux entreprises publiques ;

- la loi pour la transparence et la modernisation de la vie économique n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 a renforcé le cadre législatif de lutte contre les retards de paiement interentreprises en :

§ relevant le plafond maximal de l'amende de 375 000 euros à deux millions d'euros pour les personnes morales (le plafond de 75 000 euros pour les personnes physiques n'étant pas modifié) ;

§ instaurant la publicité systématique des décisions d'amendes administratives sur le site de la DGCCRF ;

§ supprimant le plafond de sanctions financières administratives applicables à un même auteur d'infractions.

Les rapports de gestion, dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes, doivent mentionner des informations sur les délais de paiement de leurs fournisseurs et de leurs clients.

(b) Des délais de paiement en baisse

Le délai moyen de règlement fournisseur était de 71 jours en 1994, 66 jours en 2001 et de 51 jours en 2016 : 20 jours ont été gagnés en 20 ans .

Le délai moyen de règlement client a suivi la même orientation, passant de 53 jours en 2001 à 44 jours en 2016. Toutefois, ce chiffre est stable depuis 2011. De même, le solde commercial 424 ( * ) , qui mesure l'intensité de cette contrainte sur les entreprises, s'établit au même niveau ( 11 jours de chiffres d'affaires ) en 2016 qu'avant l'application de la loi de modernisation de l'économie de 2008. En d'autres termes les entreprises font une avance aux autres acteurs économiques : ménages, administrations publiques, secteur financier, reste du monde.

La situation est très hétérogène selon la taille de l'entreprise et son appartenance sectorielle. Les PME bénéficient des délais clients plus courts (44 jours) que les grandes entreprises (47 jours) et les ETI (53 jours) 425 ( * ) . Mais les grandes entreprises et les ETI ont davantage gagné en solde commercial (respectivement -six et sept jours) tandis que les PME ont gagné de deux jours.

(c) Des retards de paiement ramenés en dessous des 11 jours

Les retards de paiement (mesurés comme des délais clients et fournisseurs supérieurs à 60 jours) affectent la rentabilité et la compétitivité des entreprises.

Ces retards ont culminé en 2015 à 13,6 jours pour diminuer depuis à 11,3 jours en 2016 et à moins de 11 jours (10,9) en 2017.

Selon la Banque de France, « la LME a été efficace puisqu'entre 2007 et 2009 la proportion de factures clients payées à moins de 60 jours a augmenté de cinq points (60 % en 2007, contre 65 % en 2009). Cette progression est encore plus significative du côté fournisseurs, en augmentation de neuf points (55 % en 2007, contre 64 % en 2009). On constate qu'en début de période, les entreprises étaient en moyenne plus souvent responsables de retards de paiements fournisseurs qu'elles n'étaient confrontées à des paiements tardifs de leurs clients. Cette proportion s'est équilibrée depuis 2009. On remarque depuis cette date une relative stabilité des comportements, un plafond de verre difficile à franchir semble s'être installé » 426 ( * ) .

La France connaît un taux élevé de petits retards de règlement : plus de quatre entreprises sur dix acquittent leurs factures dans les délais mais 33,6 % décalent les paiements de un à quinze jours. Ce taux est supérieur de sept points à la moyenne européenne (26,5 %).

Seulement une grande entreprise sur deux règle ses fournisseurs à moins de 60 jours, alors que deux tiers d'entre elles reçoivent le règlement de leurs clients dans le délai imparti par la loi. Une petite majorité d'ETI (54 %) paient leurs fournisseurs dans les délais réglementaires. Les entreprises appartenant à ces deux catégories sont plus nombreuses à générer des retards qu'à en subir. Les PME sont la catégorie d'entreprises qui subissent et qui causent le moins de retards (respectivement 32 % et 30 %).

Les personnes publiques ont fait des efforts.

La loi du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière a ainsi entendu lutter contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique en imposant le versement d'intérêts moratoires pour sanctionner les retards, lesquels sont de 13 jours dans l'administration de l'État et dans les départements, mais 19 jours dans les régions.

Dans cet objectif, l'État a revu l'organisation de ses services et mis en place en 2011 un nouveau progiciel de gestion comptable et de production des comptes, Chorus , pour simplifier les processus de référencement et de règlement des factures. La généralisation de la facture électronique depuis le 1 er janvier 2017 devrait améliorer les délais de paiement.

Le délai global de paiement moyen de l'État est passé de 36 jours en 2011, date de la mise en service de cet outil informatique, à 18,6 jours en 2016, sachant que le plafond des délais de paiement est fixé à 30 jours. Plus de 75 % des demandes de paiement sont réglées dans un délai inférieur à 20 jours.

Pourtant, les PME ne perçoivent pas ces efforts et 53 % d'entre elles refusent de répondre aux appels d'offres émis par le secteur public par crainte de ne pas être payées ou de subir des délais de paiement trop longs.

(d) Un coût économique notamment pour les PME

32 % des entreprises subissent des retards de paiement. Le montant du crédit interentreprises (crédit que se font les entreprises entre elles sous la forme de délais de paiement) se monte en France à 635 milliards d'euros. Par ailleurs, les retards de paiement sont à l'origine d'une défaillance d'entreprise sur trois.

Ces éléments soulignent la persistance d'un coût économique élevé des retards de paiement.

Selon la Présidente de l'Observatoire des délais de paiement, Mme Jeanne-Marie Prost : « Si les délais clients et fournisseurs respectaient la LME, la trésorerie nette libérée serait de 11 milliards d'euros. Le transfert s'effectuerait vers les PME à hauteur de 16 milliards d'euros et les ETI à hauteur de 6 milliards d'euros, tandis que les grandes entreprises apporteraient 11 milliards et les autres acteurs 11 milliards ».

Pour la Banque de France, en 2016, l'ensemble des sociétés non financières totalise 397 milliards de dettes fournisseurs . Or 41 % de ces dettes sont portées par les entreprises subissant des retards de paiement, qui représentent 32 % du nombre total d'entreprises. Ces difficultés ont un impact sur les établissements de crédit : plus du tiers du total de la dette bancaire des sociétés non financières (37 %) provient des entreprises subissant des retards de paiement.

Conscients de ces enjeux, les pouvoirs publics ont développé une politique active de contrôle, de sanctions et d'encouragements.

(2) La politique publique : des prix pour récompenser, du « name and shame » pour punir
(a) Le prix des délais de paiement pour les bons élèves

En 2010, la Charte des relations inter-entreprises (devenue depuis la Charte Relations Fournisseurs Responsables ) 427 ( * ) a été créée dans le but de sensibiliser les acteurs économiques aux enjeux inhérents aux achats responsables et à la qualité des relations clients-fournisseurs. Parmi les critères évalués, figure le respect des délais de paiement. Les entreprises s'engagent à payer dans les délais légaux. Le volume d'achats des 1 900 entreprises signataires de la charte est de près de 600 milliards d'euros.

Un label a été créé. Au 31 janvier 2018, 31 entreprises ont obtenu ce label, représentant un volume d'achats annuels de 100 milliards d'euros. En 2018, ce label s'est ouvert également aux PME, après une expérimentation avec trois d'entre elles.

La Médiation des entreprises a proposé « 30 bonnes pratiques » pour améliorer la situation.

En parallèle, l'État met en valeur les bons payeurs . Six d'entre eux ont reçu, le 13 novembre 2017, un prix « pour leurs pratiques exemplaires en matière de délais de paiement ».

(b) Le « name and shame » pour les mauvais élèves

À l'inverse, les mauvais payeurs sont à présent montrés du doigt et mis à l'amende.

La DGCCRF a effectué plus de 2 500 contrôles en 2016, a constaté 17 % d'anomalies et a pris des sanctions dans 274 cas.

Au total, l'État a infligé des amendes pour près de 11 millions d'euros en un an.

Alors que les amendes étaient jusqu'alors plafonnées à 375 000 euros, la loi Sapin a, comme on l'a vu, porté les amendes à 2 millions d'euros.

En outre, les noms des entreprises responsables de retards de paiement sont désormais systématiquement rendus publics dès qu'il s'agit d'une grande entreprise ou que l'amende dépasse 75 000 euros. Au coût financier s'ajoute la réprobation morale, le « name and shame ».

C'est ainsi que les noms de 29 entreprises ont été rendues publiques en 2016, et 18 autres au premier semestre 2017. Parmi elles, des entreprises peu suspectes de rencontrer des difficultés de trésorerie pour payer leurs fournisseurs, comme le leader mondial de la pharmacie Pfizer, l'assureur Axa, Alstom et les hôtels Accor, qui ont chacun dû acquitter 375 000 euros.

Onze sociétés se sont ajoutées depuis le début de l'année 2018 : Canal+ International, Sephora et Technip, mais aussi la société de messagerie DHL, filiale de Deutsche Post, pour un montant de 375 000 euros chacune, les branches françaises de Walt Disney et de Coty, avec, respectivement, des amendes de 200 000 euros et 180 000 euros.

Aucune entreprise ne s'est vu infliger le montant maximal de l'amende, et aucune n'a dépassé pour le moment l'ancien plafond de 375 000 euros.

b) Objectif n° 28 : différencier les délais de paiement selon la taille de l'entreprise

Les entreprises de 250 salariés ou plus demeurent plus nombreuses que les PME à payer leurs factures en retard. Or, nombre de petites entreprises acceptent un dépassement des délais , par crainte de ne pas être retenues dans les contrats à venir, publics ou privés.

Ainsi, les délais de paiement réels diffèrent parfois sensiblement des délais de paiement officiels en raison de l'existence de délais cachés , définis comme le nombre de jours écoulés entre la date à laquelle l'entreprise, ayant effectué ses travaux, est légitime à présenter une situation et la date à laquelle elle est autorisée à présenter sa facture. Cette situation se présente chroniquement entre une grande entreprise et ses sous-traitants, souvent des PME. Ainsi, dans le secteur des travaux publics, l'« effet ciseau » dû au délai clients à 91 jours de chiffre d'affaires et à des règlements fournisseurs à 79 jours d'achats génère un besoin de trésorerie estimé à 21 jours de production.

L'amélioration des délais de paiement des personnes publiques , pourrait conduire à créer un mécanisme de subrogation de créances publiques (proposition n° 31), permettant à une TPE-PME qui subirait le retard de paiement d'une collectivité, d'un établissement public de santé ou d'un ministère, par exemple, de pouvoir remettre sa créance à une institution financière contre paiement, charge à cette institution financière de se faire payer cette dette en se rémunérant grâce aux intérêts moratoires.

Pour la commande publique, la part des PME requérant le paiement des amendes, comme cela est prévu dans les textes 428 ( * ) , est anecdotique, les PME craignant de ne pas être retenues dans les contrats à venir : votre rapporteur propose en conséquence de rendre automatique le paiement des intérêts moratoires et de l'indemnité forfaitaire de 40 euros en cas de retard (proposition n° 32).

Pour le secteur privé, il faudrait moduler les pénalités des retards de paiement en fonction de la taille de l'entreprise les subissant, afin de favoriser les PME et en fonction de l'ampleur du retard du paiement (proposition n° 33).

c) Objectif n° 29 : moduler dans le temps les pénalités et majorations de retard des cotisations fiscales et des impôts

Lorsqu'une entreprise éprouve des difficultés, il peut lui arriver de ne pas acquitter ses obligations fiscales et sociales. Si les mécanismes de report, d'aménagement ou de conciliation ne fonctionnent pas, l'entreprise peut rapidement sombrer en cumulant les pénalités de retard fiscales et majorations pour retard de paiement des cotisations sociales , exigibles dès le premier jour de retard.

Ainsi, au lieu de temporiser ou de chercher une issue, ces mécanismes amplifient les difficultés de l'entreprise au lieu de les aider à les surmonter.

(1) Les pénalités de retard en matière fiscale
(a) Les intérêts de retard.

Aux termes du I de l'article 1727 du code général des impôts (CGI), toute créance de nature fiscale dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal, donne lieu au versement d'un intérêt de retard.

À cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au CGI (articles 1728 et suivants).

L'intérêt de retard « compense le préjudice financier subi par le Trésor du fait d'un retard ou d'une insuffisance dans le paiement de l'impôt ».

Depuis le 1 er janvier 2018, le taux des intérêts de retard a été divisé par deux (0,2 % par mois soit 2,4 % par an), afin de mieux les mettre en adéquation avec les taux d'intérêt du marché.

(b) Un dispositif exclu du droit à l'erreur

Le droit à l'erreur, tel que le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance en cours d'examen au Parlement le reconnaît, ne traite pas des sanctions en cas de retards de déclaration ou de paiement en raison des difficultés de l'entreprise.

Ce droit a une portée supplétive. Or, la direction générale des finances publiques présume d'ores et déjà la bonne foi du contribuable - dans le cas contraire, la charge de la preuve incombe à l'administration - et plusieurs dispositifs du code général des impôts et du livre des procédures fiscales permettent de régulariser des erreurs commises de bonne foi, sans qu'il soit fait application des sanctions.

Comme pour le droit à l'erreur général, en matière fiscale, seules les erreurs susceptibles d'être régularisées sont concernées. Les retards ou omissions de déclaration dans les délais prescrits n'entrent pas dans son champ d'application .

Aussi, les majorations prévues en cas de défaut ou retard de déclaration (majoration de 10 % en cas de retard ou de défaut de déclaration 429 ( * ) ), ou défaut ou retard de paiement (majorations de 10 % ou 5 % selon les impôts en cas de défaut ou de retard de paiement 430 ( * ) ), continuent d'être appliquées quel que soit le comportement du contribuable.

(c) La prise en considération des difficultés de l'entreprise
(i) Le recours gracieux et la transaction

L'article L. 247 du livre des procédures fiscales prévoit que l'administration peut accorder, sur la demande du contribuable : des remises d'impôts en cas de gêne ou d'indigence du contribuable, des remises totales ou partielles d'amendes fiscales ou de majorations d'impôts lorsque les impositions auxquelles elles s'ajoutent sont définitives. Par voie de transaction, le contribuable peut également obtenir une atténuation d'amendes fiscales ou de majorations d'impôts lorsque les impositions auxquelles elles s'ajoutent ne sont pas définitives.

(ii) L'aménagement en fonction de la situation du contribuable

Des dispositions spécifiques permettent également à l'administration de prendre en considération la situation du contribuable.

Pour les créances autres que l'IR, en cas de difficulté ponctuelle et à la demande expresse du débiteur, lorsque celui-ci se trouve dans l'incapacité de s'acquitter en une fois de la totalité de sa dette, le comptable public peut accorder des délais de paiement.

L'octroi de délais supplémentaires relève du pouvoir discrétionnaire du comptable chargé du recouvrement de l'impôt, qui engage alors sa responsabilité personnelle et pécuniaire . Il peut renoncer temporairement au recouvrement forcé des créances, ou accepter d'en suspendre momentanément les effets, en contrepartie de l'engagement du reliquataire de se libérer de sa dette moyennant un plan de règlement échelonné.

Ce plan de règlement peut aussi bien bénéficier à un particulier qu'à une entreprise, qui rencontre des difficultés passagères exceptionnelles et imprévisibles. Il suspend les poursuites.

(2) Les majorations de retard en matière sociale
(a) Les majorations de retard initiales

Dans une situation de retard classique, les majorations de retard initiales représentent une sanction financière . Elles sont décomptées dès le lendemain de la date d'exigibilité des cotisations. Le cachet de la poste figurant sur l'enveloppe contenant le versement et/ou le bordereau peut donc être déterminant quant au calcul des majorations de retard. Ce point de départ des majorations est invariable, et celles-ci courent sans qu'aucune formalité ou mise en demeure soit nécessaire. Les majorations doivent être versées dans le mois de leur notification par mise en demeure.

L' Urssaf a assoupli le dispositif des majorations en baissant les taux et en distinguant la sanction, du loyer de l'argent . Le taux des majorations de retard initiales est de 5 % des cotisations et contributions dues à l'Urssaf. Ce taux est également applicable en cas de contrôle.

Les majorations de retard initiales de 5 % peuvent faire l'objet d'une remise.

Si le retard n'est pas régularisé dans les délais indiqués, il est alors appliqué des « majorations de retard complémentaires ».

(b) Des majorations de retard complémentaires

Le taux des majorations de retard complémentaires est fixé à 0,2 % par mois de retard, qui correspond au loyer de l'argent, et sont appliquées dès l'exigibilité.

Les majorations de retard complémentaires peuvent faire l'objet de remise lorsque les cotisations ont été acquittées dans le délai de trente jours qui suit la date limite d'exigibilité ou à titre exceptionnel, en cas d'événements présentant un caractère « irrésistible et extérieur » 431 ( * ) .

En cas de régularisation suite à contrôle, le décompte de la majoration complémentaire est différent. Il intervient à partir du 1 er février de l'année qui suit celle au titre de laquelle les régularisations sont effectuées.

(3) Les mécanismes de conciliation et d'arbitrage
(a) La commission des chefs de services financiers (CCSF)

La commission des chefs de services financiers ( CCSF ) réunit les représentants des créanciers publics. Elle peut accorder à une entreprise 432 ( * ) des délais de paiement pour ses dettes fiscales et sociales (part patronale) en toute confidentialité, à la condition :

- que l'entreprise rencontre des difficultés financières ;

- sans pour autant être en cessation de paiement 433 ( * ) ;

- tout en étant, en principe, à jour de ses obligations déclaratives et de paiement de la part salariale des cotisations sociales.

La commission peut accorder :

- un échéancier de paiement concernant des dettes sociales (cotisations patronales Urssaf ), fiscales professionnelles (contribution économique territoriale, TVA , impôt sur les sociétés), et d'assurance chômage ;

- voire des remises partielles de dettes dans le cadre d'une procédure collective ;

- à titre dérogatoire, des remises partielles ou intégrales des majorations de retard et des pénalités si l'entreprise fait l'objet d'une reprise ou d'une restructuration financière.

Aucune publication n'est effectuée auprès du greffe du tribunal de commerce, ce qui peut l'empêcher d'exercer sa mission de détection-prévention.

(b) Le comité départemental d'examen des problèmes de financement des entreprises (Codefi)

Déclinaison du comité interministériel de restructuration industrielle ( Ciri ) au niveau départemental, le CODEFI est l'interlocuteur privilégié des PME 434 ( * ) rencontrant des difficultés économiques. Il a vocation à accueillir et à orienter les entreprises de moins de 400 salariés, tous secteurs confondus, qui rencontrent des problèmes de financement, à élaborer et mettre en oeuvre des solutions permettant d'assurer leur pérennité et leur développement.

Cette instance permet aux organismes de protection sociale collecteurs de cotisations et contributions sociales de coordonner leurs actions grâce à une demande unique de l'entreprise, à l'un de ces organismes de protection sociale, et une réponse conjointe à partir de critères communs d'analyse.

Avec l'accord du chef d'entreprise, le préfet, président du comité, a le pouvoir de décider la réalisation d'audits afin de valider certains éléments de la situation de l'entreprise in bonis (situation financière et commerciale, savoir-faire industriel, capacité à dégager des marges, pertinence de l'outil industriel...), les hypothèses de redressement économique et financier, ou établir une situation de trésorerie et un prévisionnel.

Le CODEFI joue un rôle de facilitateur 435 ( * ) afin d'obtenir le redressement de l'entreprise.

À cette fin, le comité peut aussi octroyer, par délégation du fonds de développement économique et social (FDES), des prêts destinés à financer l'entreprise dans le cadre d'un plan de restructuration d'une entreprise in bonis , ou d'un plan de reprise par voie de cession après dépôt de bilan. À titre subsidiaire, des prêts ordinaires peuvent également être octroyés dans la limite d'un montant unitaire de 800 000 euros.

Les conditions et le montant de ces prêts, devant rester accessoires et complémentaires à un plan de restructuration, sont strictement réglementés. Seules les entreprises commerciales en situation régulière par rapport à leurs obligations fiscales et sociales sont éligibles à ces prêts.

(4) Moduler dans le temps les pénalités et majorations de retard

Pour la Cour de cassation, ne constitue pas un événement exceptionnel de nature à justifier la remise des majorations complémentaires de 0,2 %, les « difficultés économiques » invoquées par l'employeur ( Cass. civ., 2 e ch., 10 mars 2016, n° 15-13713 B), quand bien même il s'agit un motif de saisine de la CCSF.

Ce mécanisme n'aide en rien l'entreprise. Bien au contraire, il accroît ses difficultés.

En lieu et place de pénalités et majorations linéaires, votre rapporteur propose leur progressivité (proposition n° 34) afin d'aider l'entreprise à surmonter ses difficultés.

2. Lever les freins au rebond
a) Objectif n° 30 : transmettre facilement
(1) La proposition de la Délégation aux entreprises dans son rapport du 23 février 2017

Eu égard à l'importance du sujet (60 000 transmissions par an et 750 000 emplois concernés dans les années à venir), la problématique de la transmission des entreprises a fait l'objet de l'un des premiers rapports 436 ( * ) de votre Délégation aux entreprises.

Parmi les nombreuses propositions du rapport figurait le relèvement du taux d'exonération de droits de mutation de 75 % actuellement à hauteur de 90 % de la valeur de l'entreprise, sous condition d'un engagement global de conservation des titres pendant 8 ans, tout en conservant le taux de 75 % en cas d'engagement sur 6 ans (Proposition n° 13).

Cette proposition est reprise à l'article 8 de la proposition de loi n° 343 (2017-2018) de MM. Claude Nougein et Michel Vaspart , déposée au Sénat le 7 mars 2018, visant à moderniser la transmission d'entreprise.

(2) Aller plus loin et supprimer les droits de succession pour les chefs d'entreprises non cotées

Depuis sa création en 2003, le pacte Dutreil 437 ( * ) est passé d'un outil moderne et simple à un dispositif rigide et complexe , plusieurs fois modifié. Certains, telle l'association CroissancePlus 438 ( * ) , proposent de raffiner le système en remédiant à ses défauts.

Votre rapporteur considère qu'il convient d'aller beaucoup plus loin .

Si l'on veut muscler notre appareil productif et favoriser la transmission des entreprises familiales, il est nécessaire d'édicter une mesure forte : l'exonération totale, telle qu'elle se pratique en Suède, en Suisse, en Russie, au Portugal, au Royaume-Uni pour les donations (mais non pour les successions). En effet, si l'on compare la France à ses pays limitrophes, le coût de transmission d'une entreprise reste, malgré le dispositif Dutreil, l'un des plus élevés :

Droits de mutation à titre gratuit

Taux marginal sans faveur

Taux marginal avec faveur 439 ( * )

Espagne

34 %

5,7 %

France

45 %

5,63 %

Italie

4 %

0 %

Belgique

30 %

3 %

Allemagne

30 %

4,5 %

Votre rapporteur rejoint donc la proposition de création d'un « pacte Dutreil renforcé » , faite par plusieurs sénateurs 440 ( * ) , qui serait caractérisé, d'une part, par une exonération complète de la transmission de l'entreprise des droits de mutation à titre gratuit et d'autre part, en contrepartie, par un allongement des délais d'engagement de détention des parts de l'entreprise, lesquels seraient au total portés à huit ans (proposition n° 35).

Dans le raisonnement qui a conduit, en 2013, le Conseil constitutionnel à valider l'extension de l'exonération partielle des droits de mutation en matière de succession aux transmissions gratuites d'entreprises entre vifs, un « intérêt national » avait été invoqué dans un commentaire autorisé 441 ( * ) :

« Le législateur a voulu éviter que les conditions concrètes dans lesquelles se transmettent les entreprises ne les exposent (elles et leurs salariés) aux risques de moindre autofinancement, de délocalisation, de démembrement ou même de prédation.

« Dans les dix années à venir, quelque 500 000 entreprises vont en effet changer de dirigeants pour des raisons démographiques. Dans une telle perspective, veiller à ce que les transmissions d'entreprises se passent dans des conditions permettant de garantir la pérennité de l'appareil productif et la sauvegarde de l'emploi relève de l'intérêt national .

« Ce motif d'intérêt général justifie l'octroi d'un avantage fiscal déjà admis pour le décès du dirigeant et calculé de la même façon et sous les mêmes réserves » .

Ce motif d'intérêt général devrait pouvoir justifier une exonération fiscale exceptionnelle : comme l'a fait remarquer CroissancePlus, faire grandir nos entreprises doit s'effectuer en facilitant notamment les transmissions d'entreprises. Les entreprises allemandes ont le temps de grandir précisément grâce à une transmission facilitée par un dispositif fiscal adapté.

(3) Faciliter les cessions de PME

Afin de faciliter la transmission des petites et moyennes entreprises (PME), plusieurs dispositifs fondés sur l'exonération de taxation des bénéfices des plus-values professionnelles ont été mis en place :

- l'article 151 septies du code général des impôts (CGI) permet d'exonérer totalement ou partiellement l'ensemble des plus-values réalisées, en cours ou en fin d'exploitation, par les petites entreprises dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole lorsque les recettes n'excèdent pas certains seuils et sous réserve que l'activité ait été exercée à titre professionnel pendant au moins cinq ans. Ce régime, qui n'est pas propre aux transmissions d'entreprises, vise toutes les cessions, à l'exception des cessions portant sur des terrains à bâtir. Peuvent donc bénéficier de l'exonération les plus-values, réalisées en cours d'activité et celles portant sur d'autres actifs que le fonds commercial ;

- l'article 238 quindecies du CGI prévoit un régime d'exonération spécifique aux plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'une activité commerciale, artisanale, libérale ou agricole . L'exonération s'applique aux transmissions d'entreprises individuelles, de branches complètes d'activité et de parts ou titres détenus au sein d'une société de personnes relevant de l'impôt sur le revenu, à la double condition que l'associé cède l'intégralité de ses parts et qu'il exerce au sein de cette société son activité professionnelle. À la différence du dispositif précédant, fondé sur le montant des recettes de l'exploitation, ce régime est soumis à une condition portant sur le montant du prix de cession (exonération totale lorsque la valeur des éléments cédés est inférieure à 300 000 euros et partielle lorsque la valeur est comprise entre 300 000 euros et 500 000 euros), à l'exercice de l'activité pendant au moins cinq ans par le cédant et à l'absence de lien entre le cédant et le cessionnaire ;

- l'article 151 septies A du CGI prévoit l'exonération totale des plus-values professionnelles réalisées à l'occasion de la cession de son activité dans le cadre du départ à la retraite de l'exploitant individuel ou de l'associé d'une société de personnes relevant de l'impôt sur le revenu. Comme les dispositifs précédents, il est ouvert à l'ensemble des activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales et agricoles. Il concerne tant les exploitants individuels que les associés des sociétés relevant de l'impôt sur le revenu qui exercent au sein de cette structure leur activité professionnelle. L'exonération est accordée lorsque l'entreprise dont l'activité ou les parts sont cédées est une PME au sens du droit communautaire et à condition que le cédant ait exercé son activité pendant au moins cinq ans, que la cession soit réalisée dans le cadre du départ à la retraite du cédant et qu'il n'y ait pas de lien entre le cédant et le cessionnaire. Dans ce régime, il n'est pas prévu de mécanisme d'exonération partielle ou progressive. Soit le professionnel répond à l'ensemble des conditions posées et la plus-value est intégralement exonérée quel que soit son montant, soit il ne répond pas aux conditions et la plus-value est alors taxée dans les conditions de droit commun.

Comme l'a indiqué au cours de la 3 ème journée des entreprises du Sénat Mme Bénédicte Caron, vice-présidente de Système U Nord-Ouest, vice-présidente de la CPME : « la vente de l'entreprise au moment du départ en retraite donne lieu à une exonération de taxation de la plus-value jusqu'à 500 000 euros. Mais il serait beaucoup plus avantageux d'en bénéficier en cours de vie professionnelle ».

Pour faciliter les fusions-acquisitions, il faut créer un abattement fiscal sur les plus-values de cession sur la cession des fonds de commerce réalisées au cours d'une vie professionnelle sans la réserver seulement au départ à la retraite (proposition n° 36). Ces droits pèsent en principe sur le vendeur mais dans la pratique, l'acquéreur les acquitte.

b) Objectif n° 31 : supprimer les stigmatisations des entrepreneurs ayant connu l'échec
(1) Supprimer les cotations 050 et 060

Ces notations ne se veulent pas être une sanction sur les capacités de gestionnaire du dirigeant d'entreprise mais a pour seul objectif d'appeler l'attention des établissements de crédits.

Elle est cependant en réalité une sanction sans appel : en pratique, l'établissement de crédit écartera purement et simplement toute analyse du dossier et se retranchera derrière cette cotation négative pour refuser toute forme de financement.

La cotation 050 est par ailleurs contestable dans son raisonnement.

En effet, elle vise à la fois le dirigeant d'une entreprise en liquidation judiciaire, et l'entrepreneur individuel ayant obtenu un plan de redressement judiciaire ou un plan de sauvegarde. Or, près de 90 % des plans de redressement obtenus ne franchissent pas le cap des trois ans de viduité, alors que la cotation demeure à 050 pour les deux catégories.

En outre, un entrepreneur individuel ayant fait l'objet d'un simple jugement d'ouverture de redressement judiciaire peut se retrouver à une cotation à 060, alors même qu'un dirigeant ayant commis deux liquidations judiciaires, bénéficiera quant à lui d'un indicateur inférieur, à savoir 050.

On cite aussi le fait que trois liquidations seraient « équivalentes » à une faillite personnelle ou un redressement judiciaire (indicateur 060).

Enfin, l'indicateur 060 semble toujours pouvoir s'appliquer en cas de liquidation judiciaire « à titre personnel » de moins de cinq ans, alors que l'indicateur 040 (une liquidation de moins de trois ans) a été supprimé.

C'est le principe même de la cotation qui est critiquable .

En effet, comment un entrepreneur en situation de redressement judiciaire, qui a donc besoin d'un nouveau concours bancaire pour obtenir un plan de redressement et faire face à ses obligations financières tout en conservant l'emploi et l'actif de son entreprise, peut-il « s'en sortir » s'il est en outre stigmatisé par une cotation dont l'effet répulsif sur l'établissement bancaire est avéré ?

Certes, l'entrepreneur peut toujours solliciter un entretien avec la Banque de France pour tenter d'obtenir une modification de sa cotation.

Dans les faits cependant, cette cotation oblige parfois les dirigeants à utiliser un prête-nom, un gérant ou un président « de paille » pour créer une nouvelle société.

Compte-tenu de ces inconvénients, la suppression des cotations 050 et 060 (proposition n° 37), notation personnelle handicapante et stigmatisante, faciliterait le rebond de l'entrepreneur de bonne foi.

(2) Limiter les mentions de l'échec

Pour faciliter le rebond des chefs d'entreprise ayant obtenu du tribunal un plan de sauvegarde ou de redressement, un décret du 7 décembre 2011 a prévu une radiation d'office des inscriptions si, au bout de trois ans pour les plans de sauvegarde et de cinq ans pour les plans de redressement, les modalités des plans étaient respectées. Toutefois, un plan de sauvegarde peut durer jusqu'à dix ans.

La mesure précédente devrait donc être complétée par trois modifications :

- harmoniser à deux ans la radiation d'office des inscriptions des plans de redressement et de sauvegarde . En effet, si une entreprise passe les deux premières années de son plan, elle a une très forte probabilité de pouvoir honorer toutes les échéances suivantes. Il n'est donc pas justifié de prévoir un délai plus long pour les plans de redressement et pénaliser pendant cinq années les entreprises qui ont pu poursuivre leur activité, maintenir des emplois et honorer les nouvelles échéances de leurs dettes ;

- rendre publique la radiation d'office , car, si les greffes des tribunaux appliquent bien systématiquement cette mesure, ils ne sont pas tenus d'informer le BODACC de cette radiation importante, qui n'est donc pas connue des tiers ;

- harmoniser et réduire le délai de l'article R.626-20 du code de commerce . Selon cet article, un chef d'entreprise dont le plan se déroule normalement durant deux années, peut faire une requête auprès du président du tribunal pour obtenir la radiation des inscriptions au RCS de la mention d'une procédure judiciaire . Cependant, l'article R.631-35 interdit spécifiquement l'application des dispositions de l'article R.626-20 aux entreprises qui ont obtenu un plan de continuation à la suite d'une procédure de redressement judiciaire. La modification de l'article R. 631-35 est donc indispensable pour permettre une radiation plus rapide des inscriptions après un examen par le tribunal du déroulement du plan.

c) Objectif n° 32 : créer une « turbo-dissolution » à la française

Lorsqu'un entrepreneur s'aperçoit que son « business model » ne prend pas, qu'il n'existe aucune perspective de développement de son entreprise, voire qu'un échec semble inéluctable, il peut être conduit à vouloir « fermer » sa société.

Or, en l'état actuel, il est plus simple de laisser mourir une société, et de la conduire à la faillite, que d'engager une procédure visant à sa fermeture.

(1) Le rendez-vous manqué de l'habilitation de 2014

La création d'une procédure de liquidation simplifiée a été l'une (la 44 ème ) des 50 "premières propositions" du Conseil de la simplification pour les entreprises, du 14 avril 2014.

Dès le 25 juin 2014, un projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises reprenait cette proposition, pour habiliter, dans son article 12, le Gouvernement à simplifier par ordonnance le régime de la liquidation dite amiable, intervenant en dehors de toute procédure collective. Le Sénat avait, suivant sa commission des Lois, limité cette habilitation aux seules sociétés qui « présentent un montant faible d'actifs et de dettes et n'emploient aucun salarié ».

Le 2° du I de l'article 23 (article 12 du projet de loi) de la l oi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives habilite donc le Gouvernement à prendre une ordonnance afin « d'instituer une procédure simplifiée de liquidation des sociétés commerciales qui présentent un montant faible d'actifs et de dettes et n'emploient aucun salarié, dans le respect des droits des créanciers, pour les cas ne relevant pas de la liquidation judiciaire prévue au livre VI du code de commerce » .

Un groupe de travail devait réunir les administrations concernées mais aussi des parties prenantes et des universitaires pour préparer cette réforme. Selon le rapport de l'Assemblée nationale lors de la loi d'habilitation, « les travaux de ce groupe porteront plus particulièrement sur la liquidation statutaire, mais il ne s'interdira pas d'évoquer le champ de la liquidation sur décision judiciaire, si des évolutions dans ce domaine apparaissaient possibles ».

D'après l'étude d'impact, l'ordonnance devait être publiée dans les neuf mois de la publication de la loi afin de procéder aux consultations nécessaires. La loi relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives ayant été promulguée le 20 décembre 2014, l'ordonnance aurait dû être prise fin septembre 2015, mais elle ne l'a pas été.

En revanche, une procédure de rétablissement professionnel avait été créée un peu auparavant.

(2) Le rétablissement professionnel

Issue de l'ordonnance du 12 mars 2014, cette procédure est réservée aux personnes physiques de bonne foi, n'employant aucun salarié depuis six mois, dont l'actif n'excède pas 5 000 euros et n'ayant pas fait l'objet d'une procédure collective au cours des cinq années précédentes.

La procédure de rétablissement professionnel

Prévue aux articles L. 645-1 à 645-12 du Code de commerce, elle est destinée aux entrepreneurs individuels, personnes physiques, qui n'ont pas de salarié et dont l'actif est inférieur à un certain seuil. Inspirée du rétablissement personnel des procédures de surendettement des particuliers, elle offre au débiteur une possibilité de rebondir rapidement en le faisant bénéficier d'un effacement des dettes, sans recourir à une liquidation judiciaire.

Le rétablissement professionnel est applicable à toute personne physique exerçant une activité commerciale, artisanale, agricole, ou une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale. Les entrepreneurs individuels à responsabilité limitée (EIRL), les sociétés et les personnes morales, ne peuvent pas en bénéficier.

Pour demander l'ouverture de cette procédure, le débiteur doit :

- être en état de cessation de paiements et son redressement manifestement impossible,

- ne pas faire l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ou d'un procès prud'homal en cours,

- ne pas avoir fait l'objet d'une liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif, dans les cinq ans précédant la demande,

- n'avoir employé aucun salarié au cours des six derniers mois,

- détenir un actif dont la valeur est inférieure à 5 000 euros;

- ne pas avoir cessé son activité depuis plus d'un an.

Seul le débiteur peut demander à bénéficier du rétablissement professionnel.

Ce dernier doit solliciter l'ouverture de la procédure de rétablissement professionnel auprès du tribunal de commerce (pour un commerçant ou artisan), ou du tribunal de grande instance (dans les autres cas) du lieu du siège de l'entreprise.

Si le tribunal accède à sa demande, un juge commis et un mandataire judiciaire (ou un huissier de justice ou un commissaire-priseur judiciaire à partir de 2017) sont désignés pour effectuer une enquête sur la situation patrimoniale du débiteur, notamment sur le montant de son passif et la valeur de ses actifs.

Le mandataire judiciaire doit informer les créanciers connus de l'ouverture de la procédure et les inviter à lui communiquer, dans un délai de deux mois suivant cet avis, le montant de leur créance ainsi que toute autre information utile.

La procédure est ouverte pendant une période de quatre mois.

Si les conditions sont remplies, le tribunal prononce la clôture du rétablissement professionnel. Elle entraîne l'effacement de toutes les dettes (sauf en matière de pensions alimentaires et les dettes salariales) à l'égard des créanciers, qu'elles soient professionnelles ou personnelles, dans la limite de celles qui ont été portées à la connaissance du juge, et à condition qu'elles soient antérieures au jugement d'ouverture. Le président du tribunal peut décider que le Trésor public fasse l'avance des droits, taxes, ou émoluments perçus par les greffes des juridictions ainsi que des frais de notification et de publicité.

Contrairement à une liquidation judiciaire, le débiteur n'est pas dessaisi et conserve le pouvoir de gérer et disposer de ses biens.

La procédure de rétablissement personnel n'entraîne pas l'arrêt des poursuites, mais le juge peut ordonner la suspension des procédures d'exécution (saisies) engagées par les créanciers. Il peut également accorder des délais de paiement pour une durée de quatre mois au maximum.

S'il est établi que le débiteur qui a demandé l'ouverture d'un rétablissement professionnel n'est pas de bonne foi, le tribunal peut prononcer la liquidation judiciaire.

Source : Service-Public-Pro

Cette procédure reste toutefois confidentielle puisque depuis 2014 seuls 344 jugements de clôture ont été prononcés en France.

Serait en cause le mécanisme d'effacement des dettes qui devrait pouvoir être amélioré : « en pratique, il peut arriver que le débiteur ne porte pas les bonnes créances à la connaissance du juge commis ou qu'il le fasse de manière incomplète. Par ailleurs, le mandataire judiciaire informe les créanciers connus par lettre simple. Il peut donc arriver que le créancier ne soit pas informé en amont de l'effacement des dettes » 442 ( * ) .

(3) Pouvoir fermer rapidement une entreprise
(a) Fermer une micro-entreprise

Les formalités de radiation de cette catégorie sont les mêmes que pour clôturer une entreprise individuelle, avec quelques aménagements propres à ce régime.

La déclaration de cessation d'activité est faite auprès du Centre de Formalité des Entreprises (CFE) de l'organisme consulaire dont le micro-entrepreneur relève.  La formalité peut être effectuée par courrier :

- via le formulaire de radiation d'une personne physique P4 CMB si l'activité relève de la Chambre de Commerce et d'Industrie ou de la Chambre des Métiers et de l'Artisanat (industriels, commerciaux, artisans et prestataires de services) ;

- via le formulaire de modification ou de cessation d'activité P2-P4 micro-entrepreneur pour les professions libérales ;

- directement en ligne via le site officiel du micro-entrepreneur : Urssaf/autoentrepreneur.fr , à condition de disposer d'un certificat de signature électronique.

La formalité de clôture est entièrement gratuite.

L'étape suivante est la dernière déclaration de chiffre d'affaires dans les conditions habituelles (déclaration en ligne sur le compte net-entreprises ou en version papier auprès de l'organisme collecteur). Elle permet l'apurement du paiement des cotisations sociales 443 ( * ) .

Pour les micro-entrepreneurs qui relèvent du régime fiscal micro, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas opté pour le prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu, une déclaration de revenus n° 2042 et une déclaration complémentaire n° 2042-C-PRO, indiquant le montant du chiffre d'affaires taxable en microBIC ou le montant des recettes taxables en microBNC, y compris celui correspondant à des factures non recouvrées (la vente d'éléments d'actifs et du stock est également taxable), doivent être déposées auprès du service des impôts des entreprises dans les 60 jours à compter de la fermeture. Elles mentionnent le montant du chiffre d'affaires entre le 1 er janvier de l'année de radiation et la date de fermeture définitive, y compris le chiffre d'affaires qui n'a pas encore été encaissé. Ce chiffre d'affaires sera réintégré à l'assiette de l'impôt sur le revenu du foyer fiscal, dans les conditions habituelles (Bénéfices Industriels et Commerciaux ou Bénéfices Non Commerciaux et abattement forfaitaire).

La fermeture de la micro-entreprise créée un délai de carence et interdit de recréer une micro-entreprise pour la même activité pendant un délai de deux années civiles 444 ( * ) , comprenant l'année de cessation de l'activité. Ce délai s'applique uniquement pour la même activité (code APE identique).

Afin de conserver le statut de micro-entrepreneur, en mettant en sommeil l'activité, il est possible de déclarer un chiffre d'affaires égal à zéro pendant les 24 mois. Cependant, passé ce délai sans chiffre d'affaires positif, le régime de la micro-entreprise s'arrête.

(b) Fermer une entreprise

Une société, un entrepreneur individuel ou un travailleur indépendant qui cesse son activité doit effectuer des démarches de radiation afin que sa cessation d'activité soit effective.

Quelle que soit l'activité, la cessation doit être déclarée dans les 30 jours suivant sa fin auprès du CFE dont dépend l'entreprise et auprès duquel le début d'activité avait été déclaré.

Cette déclaration entraîne la radiation de l'entreprise des registres et fichiers légaux 445 ( * ) .

La cessation d'activité entraîne l'imposition immédiate :

- des bénéfices ou des recettes réalisés depuis le dernier exercice clos (ou depuis le 1er janvier pour les exercices clos au 31 décembre),

- des bénéfices en sursis d'imposition (provisions constituées avant la cessation, plus-values dont l'imposition avait été différée),

- des plus-values réalisées sur la vente des immobilisations.

La déclaration de résultats, imposés d'après le régime du bénéfice réel normal ou simplifié, doit être télétransmise dans les 60 jours suivant la cessation.

Le délai débute à partir de :

- la publication de la cession du fonds de commerce dans un journal d'annonces légales ,

- la fermeture définitive de l'établissement où l'activité était exercée,

- la cessation effective d'une activité libérale ou indépendante (artiste auteur par exemple),

- s'il s'agit d'une profession réglementée, la publication au Journal officiel de la nomination du nouveau titulaire de la charge ou de l'office,

- ou la prise effective de la direction de l'exploitation par l'acquéreur de l'entreprise.

Le formulaire de télédéclaration de résultats dépend du statut juridique de l'entreprise ou du travailleur indépendant 446 ( * ) .

Les éventuelles plus-values, réalisées lors de la cession du fonds de commerce par exemple, peuvent être exonérées d'imposition sous certaines conditions.

L'employeur est tenu d'acquitter différentes taxes et impôts dans les 60 jours :

- la TVA pour les redevables qui y sont assujettis pour le régime d'imposition réel simplifié 447 ( * ) , dans un délai de 30 jours pour le régime d'imposition au réel normal 448 ( * ) ;

- avec souscription de la déclaration annuelle de liquidation et de régularisation ( taxe sur les salaires ) et au plus tard le 15 janvier de l'année suivante ;

- la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) 449 ( * ) .

Pour la cotisation foncière des entreprises , la date de cessation détermine les modalités d'imposition. Si la cessation de l'activité intervient en cours d'année, il est possible de demander au SIE une réduction de la cotisation au prorata du temps d'activité.

En effectuant une démarche de radiation auprès du CFE, les organismes sociaux sont informés et l'assuré reçoit dans les 30 jours une notification de radiation lui indiquant la situation de son compte (débiteur ou créditeur). La procédure de radiation s'engage automatiquement à la date de la cessation d'activité. Le cotisant dispose de 90 jours suivant la date d'effet de la radiation, pour déclarer ses revenus pour l'année de cessation et l'année précédente au moyen de la déclaration sociale des indépendants (DSI).

Les cotisations d'assurance maladie-maternité, d'allocations familiales et retraite de base font l'objet d'une régularisation, avec avis de paiement 450 ( * ) . Pour acquitter le paiement des cotisations et contributions, le cotisant dispose d'un délai de 30 jours suivant la date d'envoi de l'avis d'appel établi sur la base de la DSI déclarée après la radiation.

Parallèlement, l'assuré doit procéder à sa radiation au régime d'assurance vieillesse dont il dépend.

(4) Fermer une entreprise en 48 heures

Les délais qui ont été présentés, de 60 à 90 jours hormis le cas de la micro-entreprise, semblent assurément trop longs et inadaptés à la vitesse actuelle des cycles économiques .

Certains entrepreneurs mettent ainsi en sommeil artificiellement une entreprise compte-tenu de la complexité actuelle des conditions posées pour sa disparition. Il faut pouvoir fermer plus vite pour recréer, ailleurs et rapidement, autre chose .

Dès lors que la situation de l'entreprise est saine, qu'elle n'est pas en situation de cessation de paiement et qu'une trésorerie suffisante existe pour désintéresser les créanciers et les salariés, il conviendrait de s'inspirer de la procédure néerlandaise de « turbo dissolution » (proposition n° 38) .

En 1994, a été insérée dans le code civil des Pays-Bas une nouvelle disposition codifiant la pratique et la jurisprudence établie qui dispose :

« Dès lors que la personne morale au moment de sa dissolution n'a plus de revenus, elle cesse d'exister. Dans ce cas, la direction ou, par application de l'article 19a, la Chambre de commerce, en fait déclaration/mention sur les registres où la personne morale est inscrite » (article 2:19 §4 BW - Code civil néerlandais).

La turbo liquidation aux Pays-Bas

L'entreprise cesse d'exister quand l'assemblée générale des actionnaires décide de sa dissolution, si elle n'a plus d'actifs ou de passifs au moment de la liquidation. Dans un tel cas, il n'y aura pas de procédure de liquidation et aucun liquidateur ne sera désigné. Cette situation est habituellement qualifiée de "turbo liquidation". Le conseil d'administration doit inscrire la liquidation de l'entreprise au registre du commerce de la chambre de commerce.  Les registres et livres comptables de la société seront placés auprès du dépositaire pendant 7 ans.

Source : Liquidation of a Dutch BV - Tax Consultants International

Les éléments essentiels de cette « fermeture expresse » de l'entreprise seraient les suivants :

- Les conditions d'accès seraient réservées aux personnes morales qui ne sont pas en cessation de paiement et disposent des fonds suffisants pour désintéresser les créanciers et indemniser les salariés ;

- L'entreprise cesserait d'exister 48 heures après l'engagement de la procédure, sur requête du chef d'entreprise, et, après accord des actionnaires, le Président du Tribunal de commerce homologuerait un plan de cessation d'activité de l'entreprise conventionnel, mentionnant l'accord des créanciers. Ce plan serait opposable aux co-contractants pour mettre en extinction tous les contrats de l'entreprise ;

- Une présomption irréfragable de licenciement économique serait créée, dès lors qu'il est avéré que le développement économique de l'entreprise est impossible ; les délais de consultation des institutions représentatives du personnel seraient réduits à un mois ; le plan social serait simplifié, chaque salarié se voyant offrir, par l'entreprise, une indemnité de licenciement.

EXAMEN EN DELEGATION, JEUDI 5 AVRIL 2018

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Notre ordre du jour appelle la présentation des travaux et propositions de notre collègue Olivier Cadic sur le cycle de vie des entreprises.

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Vous m'avez confié un rapport sur le cycle de vie des entreprises - création, développement, disparition - et l'élaboration de propositions pour dynamiser notre économie. Après une soixantaine d'auditions et la prise en compte des nombreuses contributions écrites que j'ai reçues, je vous propose de créer une « France libre d'entreprendre », un univers idéal pour les créateurs, les innovateurs et les entrepreneurs.

Qu'est, pour l'entrepreneur que je suis, un univers idéal ? J'ai créé ma société à vingt ans, puis l'ai déplacée au Royaume-Uni en 1996 à la suite de l'instauration de la libre circulation des personnes dans l'Union européenne. Je dirige désormais, avec un simple portable, une société no paper, no people , sans aucun salarié, qui regroupe des travailleurs en free-lance aux quatre coins du monde. C'est simple, efficace et économique.

Comment créer une France libre d'entreprendre ? Par quelle priorité convient-il de commencer ? Le système administratif français est d'une telle complexité que les entreprises ont développé une forme de résilience. Pour beaucoup - les auditions nous l'ont confirmé -, la simplification consiste à s'adapter à la complexité. Les entreprises françaises doivent produire chaque année 10,7 millions de pièces justificatives demandées par l'administration, dans le cadre de 4,1 millions de démarches. Cette complexité administrative coûte chaque année 60 milliards d'euros à l'économie française. L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime que 15 milliards d'euros pourraient être économisés en la réduisant. Pour y parvenir, il faut faire simple, efficace et économique.

Sénateur des Français établis hors de France, ma circonscription est le monde. Et je puis vous dire qu'il n'attend pas les réformes de la France ! Certes, le discours public est désormais plus favorable à l'entreprise : le dynamisme entrepreneurial est présent, on entend même créer une start-up nation . Les intentions sont louables, mais les actes décevants : notre nation est plus start que up !

Nous avons besoin d'une réforme fiscale d'envergure, qui oriente l'épargne des ménages vers les petites et moyennes entreprises (PME). Il faut nous montrer pragmatique. La Grande-Bretagne vient de doubler l' Enterprise Investment Scheme pour renforcer encore le capital-risque. Alors que l'on compte à Londres deux fois plus de business angels , il ne faut pas s'étonner que l' Alternative Investment Market , pour les 950 PME cotées, pèse 105 milliards de livres, contre 180 PME cotées à Paris pour 10 milliards d'euros, soit cinq fois plus de PME cotées pour dix fois plus de capitaux. Tel est le constat que nous avions mis en évidence en 2015 avec Élisabeth Lamure dans notre rapport d'information intitulé Pourquoi le Royaume-Uni séduit les entrepreneurs français .

L'État veut se mettre au service d'une société de confiance. Dans cet esprit, lors de l'examen du projet de loi éponyme, je n'ai proposé qu'un seul amendement. Il prévoyait que le montage fiscal présenté par l'entrepreneur serait considéré approuvé si l'administration ne répondait pas à l'issue d'un délai de six mois, comme la loi l'y oblige. Mais le Gouvernement l'a déclaré irrecevable au prétexte que l'embauche d'un grand nombre de fonctionnaires pour répondre dans les temps serait de nature à alourdir la charge de l'État. Pourtant, nous avons suffisamment de fonctionnaires pour venir contrôler et redresser fiscalement les entreprises auxquelles on n'a pas voulu répondre précédemment. Je vous laisser méditer sur cette société de confiance... Pour simplifier, on multiplie les expérimentations, qui repoussent d'autant une adaptation attendue de l'administration à un monde où les paradigmes économiques et financiers se modifient de manière accélérée.

Avant de présenter quelques pistes, je poserai un préalable : la réalité des entreprises en France ne se limite pas aux start-up . La French Tech est un colbertisme high tech . Envoyer autant de start-up françaises à Las Vegas en janvier dernier qu'il y avait de start-up américaines, alors qu'on ne compte que deux ou trois licornes françaises, c'est survendre un écosystème, qui a des fragilités et ne reflète pas la réalité de l'économie française.

Il faut faire simple, efficace et économique. Pour la création d'entreprise, je propose deux catégories d'entreprises, et non pas quatre-vingt-sept, comme le recense Infogreffe, avec les entreprises individuelles à responsabilité limitée (EIRL), les entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL), les sociétés à responsabilité limitée (SARL), les sociétés par actions simplifiées (SAS), les sociétés par actions simplifiées unipersonnelles (SASU), les sociétés anonymes (SA), les sociétés en nom collectif (SNC), etc. Simple. Reprenons le modèle britannique de la division sole trader/limited compagny , en laissant le plus de souplesse possible à l'entreprise pour lui permettre une auto-organisation. Un seul modèle d'entreprise ! Efficace.

Je propose un coût unique, par exemple 30 euros, pour le paiement de l'ensemble des formalités liées à la création d'une société - économique -, un portail unique regroupant les sites publics fournissant de l'information sur la création d'entreprise - simple -, un guichet unique pour les créations d'entreprise - simple - : Infogreffe - efficace. Je propose, en outre, une dématérialisation totale des démarches de publicité légale et la suppression de la publication des annonces légales dans des journaux permettant de faire économiser aux entreprises 250 millions d'euros - économique -, une déclaration annuelle de toutes les informations devant être portées à la connaissance du registre du commerce et des sociétés (RCS) - simple - et un registre et un identifiant uniques pour les entreprises. Imagine-t-on un casier judiciaire ou un registre des permis de conduire par département ? Efficace. Il convient également de rendre l'accompagnement à la création d'entreprises et au rebond de l'entrepreneur éligibles au mécénat d'entreprise : un coup de pouce fiscal utile, simple, efficace et économique pour améliorer les chances de survie d'une jeune pousse. Je pense ici au « Réseau Entreprendre » ou à l'association « 60 000 rebonds ».

Après la création, il faut grandir. Nos PME ont beaucoup de mérite de réussir à se développer en dépit de notre système administratif, fiscal et social. Quand l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) requalifie une relation contractuelle avec un travailleur indépendant de relation salariale, toute 1'entreprise individuelle en est ébranlée. Il faut supprimer cette possibilité. Efficace. Quand l'URSSAF ou le fisc applique des pénalités pour non-respect d'une date de paiement, cela constitue une punition contre-productive pour les entreprises. Nos voisins britanniques ne comptent que des intérêts de retard : faisons de même. Économique.

Il faut créer un code des entreprises rassemblant tous les textes les concernant, éparpillés dans plusieurs codes. Simple.

Rationalisons aussi les 1 654 dispositifs d'aide publique qui existent en ne conservant que les plus performants. Efficace. Pour croître, il faut, en outre, supprimer les obstacles, comme les seuils de 20 ou 50 salariés. Le Gouvernement voudrait les geler pendant trois ans ; certains demandaient cinq ans. Cela revient à reporter le problème. Il faut rehausser les seuils, en les faisant passer à 50 et 250, les seuils européens. Simple.

La France manque d'entreprises de taille intermédiaire (ETI), dit-on. Alors même que les pouvoirs publics conviennent de la faiblesse des ETI françaises par rapport à leurs concurrents européens, ils leur imposent un empilement de mesures administratives, sans articulation, qui les soumettent à partir d'un certain seuil aux mêmes obligations que les sociétés cotées.

Supprimons les sur-transpositions de directives européennes dans le droit français. Efficace. À cet égard, je remercie le président Larcher d'avoir fait état, lors de la troisième journée des entreprises le 29 mars dernier, du travail du Sénat en la matière.

La France est un marché trop étroit pour permettre un développement pérenne des entreprises. Pour renforcer l'export, je propose de remplacer toutes les aides par un taux d'impôt différencié. Par exemple, si vous exportez 25 % de votre chiffre d'affaires, un quart de vos bénéfices est imposé à un taux réduit, quand les 75 % restant sont imposés au taux normal. Simple.

Pour se développer, les entreprises ont besoin non pas d'aides, mais de commandes. Combien d'administrations et de grandes entreprises écartent nos PME de leurs marchés, car elles n'ont pas la taille critique ? Dans le secteur de la cyber-sécurité par exemple, on se tourne vers des entreprises américaines ou israéliennes. Il faut réserver une part des commandes aux PME pour faciliter leur développement et préserver notre écosystème. Je sais les blocages qui existent en la matière. En 1996, quand on parlait du Small Business Act , le délégué général pour l'armement nous avait annoncé que nous avancerions aussi vite que le permettrait la viscosité du système. Voyez où nous en sommes toujours ! Ce serait efficace.

Des progrès doivent par ailleurs être réalisés concernant les contrôles fiscaux. Un entrepreneur auditionné nous a livré la liste de toutes les pièces qu'il a dû fournir depuis juin 2015 pour justifier un crédit d'impôt recherche (CIR) ; certaines remontent à 2011 et le dossier n'est toujours pas clos en mars 2018. Un contrôle fiscal doit servir à vérifier des incohérences ou des dysfonctionnements. Avec les technologies de ciblage des bilans d'entreprise, l'administration doit savoir où chercher. Ce serait économique. Pour éviter les effets pervers induits par la multiplication des contrôles, pourquoi ne pas envisager de transformer le CIR en un allègement de charges ?

Des mesures sont également nécessaires s'agissant des feuilles de paie. Sur celles que je produis en Grande-Bretagne figurent deux chiffres : le numéro de sécurité sociale de la personne et le code pour l'impôt à la source. En tant qu'entrepreneur, je ne fais qu'un seul paiement. Il ne faut pas seulement clarifier le bulletin de paie pour le salarié mais le simplifier vraiment pour l'entreprise, en créant un organisme interface entre les salariés et les organismes sociaux, afin de créer un taux de cotisation sociale unique pour les salariés et les entreprises en fonction du salaire distribué et qui assurerait la collecte des cotisations sociales pour tous les organismes sociaux. Cela a été tenté et réfléchi. Cessons d'exporter la complexité de notre système sur les entreprises et laissons Bercy s'en démêler !

Nous voulons favoriser le développement des entreprises. Mais si l'on compte uniquement sur la croissance organique, les résultats ne seront pas rapidement au rendez-vous. Il faut faciliter les fusions-acquisitions et créer un abattement fiscal sur les plus-values de cession lors de la cession des fonds de commerce réalisée au cours d'une vie professionnelle et pas seulement à l'occasion d'un départ à la retraite.

La vie de l'entreprise est un cycle : la croissance, mais aussi la disparition. Le principe de l'erreur est que l'on ignore que c'en est une au moment où on la commet. Il nous arrive aussi d'avoir de fausses bonnes idées. Aux États-Unis, un échec entrepreneurial est une expérience ; en France, c'est toujours une faillite. À cet égard, je salue les associations d'aide au rebond : elles contribuent à faire évoluer les mentalités. Nous avons un droit des entreprises en difficulté particulièrement complexe : il privilégie le maintien de l'emploi - souvent de façon illusoire - au détriment des créanciers et met l'accent sur la prévention. L'opportunité de le simplifier a été donnée par le Président de la République, en annonçant une unification du droit franco-allemand pour ce qui concerne la faillite, mais encore faut-il rapidement se mettre au travail avec les Allemands... À l'occasion de la transposition du projet de directive du 22 novembre 2016, il faudra rendre notre droit plus favorable aux créanciers, les regrouper en classes, permettre de passer outre la résistance des actionnaires : s'inspirer, en somme, du Chapter 11 de la loi sur la faillite des États-Unis. Efficace.

Si ma société était installée en France et que je décédais subitement, ma compagne se trouverait dans l'incapacité de payer les droits de succession et l'entreprise devrait être vendue. Aussi, je propose d'abroger les droits de succession des entreprises non cotées, comme cela se pratique chez nos voisins européens, pour permettre à celles-ci de rester dans le giron familial et participer ainsi à l'écosystème des territoires, comme nous l'observons en Allemagne. Ce serait simple et répondrait à l'attente des nombreux sénateurs qui comptent des ETI sur leurs territoires. Quand une ETI disparaît, vous le savez, c'est tout l'écosystème qui s'effondre avec elle.

Enfin, pour fermer rapidement une entreprise, je propose de nous inspirer de la procédure de « turbodissolution » en vigueur aux Pays-Bas, en créant une procédure de liquidation simplifiée, qui permettrait un rebond rapide de l'entrepreneur. On peut créer une entreprise en vingt-quatre heures, on devrait aussi pouvoir la fermer dans le même délai. Simple, efficace et économique

Le Gouvernement affiche sa priorité pour changer l'environnement législatif des entreprises, mais le calendrier du projet de loi pour un plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), qui devrait être présenté le 2 mai prochain au conseil des ministres, ne prévoit qu'une lecture avant l'été au Parlement. Le Sénat ne devrait l'examiner qu'en septembre. Pour autant, et comme l'a indiqué le Président du Sénat dans son intervention à l'occasion de la troisième journée des entreprises, il faut éviter une nouvelle fois un recours excessif aux ordonnances. Il serait en effet paradoxal que le Gouvernement, après avoir vanté un mode de conception participatif et avoir mis en place un « Bercylab », prive à nouveau le Parlement d'un débat de fond. Les 348 sénateurs sont prêts à contribuer à la loi PACTE, tout autant que les 7 778 participants qui ont déposé 12 819 contributions et émis 63 683 votes pendant trois semaines.

Les entrepreneurs n'en peuvent plus d'un environnement où leurs entreprises ne peuvent travailler, se développer en toute sérénité et se battre à armes égales avec la concurrence. Pour eux et pour les salariés qui cherchent à s'épanouir dans leur entreprise, je vous présente ce rapport sur le cycle de vie des entreprises intitulé Pour une France libre d'entreprendre et sa trentaine de propositions. Je les ai testées lors de la journée des entreprises et elles y ont reçu un accueil très favorable. L'expertise et l'analyse du Sénat sont très attendues.

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Nous vous remercions pour la présentation de votre rapport, qui mérite le qualificatif de « décapant ». Je vous propose de prendre connaissance avec attention des propositions sur lesquelles il nous revient de nous prononcer. Certaines, particulièrement audacieuses, n'ont pas été intégrées au rapport.

M. Olivier Cadic , rapporteur . - J'ai effectivement renoncé à certaines préconisations, notamment la liberté, pour une entreprise, d'adhérer ou non à une chambre de commerce et d'industrie ou à une convention collective.

M. Daniel Laurent . - Il faut parfois savoir demander plus pour obtenir quelque chose !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Mon objectif, au travers de ces propositions, est d'offrir aux entreprises françaises des avancées significatives. Je vous l'indiquais dans ma présentation : l'essentiel des mesures proposées est déjà à la disposition des sociétés installées en Grande-Bretagne. Je souhaite ardemment que les entreprises françaises puissent profiter de mesures comparables, afin qu'elles puissent aborder la concurrence à armes égales.

Je comprends très sincèrement les réticences qui pourraient se manifester à l'égard de certaines propositions, mais ayez conscience que notre pays appartient à l'Union européenne où des règles plus favorables s'appliquent bien souvent. Mes propositions n'abordent toutefois pas le droit du travail. Une mesure particulièrement novatrice concerne les aides à l'exportation, que je vous propose de remplacer par une modulation du taux de l'impôt sur les sociétés en fonction de la part des exportations dans le chiffre d'affaires de l'entreprise. Les entreprises françaises installent des filiales à l'étranger pour y fiscaliser leurs plus-values et, ainsi, assurer leur compétitivité : il est temps de rapatrier en France cette valeur ajoutée. Mieux vaut en effet, pour l'État, récupérer 15 % d'impôt sur les sociétés plutôt que rien. Tel fut le choix des Pays-Bas. La Bulgarie a, pour sa part, établi son taux d'impôt sur les sociétés à 10 % et la Hongrie à 9 %.

Dans leur rapport d'information intitulé Moderniser la transmission d'entreprise en France : une urgence pour l'emploi dans nos territoires , ainsi que dans leur proposition de loi visant à moderniser la transmission d'entreprise, nos collègues Michel Vaspart et Claude Nougein n'ont pas souhaité proposer une exonération totale des droits de succession sur les entreprises non cotées. Pourtant, il n'est guère de mystère : si les ETI sont si dynamiques en Allemagne, cela tient à la facilité avec laquelle elles peuvent se transmettre au sein d'une famille. Souvenez-vous, lorsque le président-directeur général de la Biscuiterie Saint-Michel est brutalement décédé dans un accident de voiture en 1994, la société, compte tenu du montant astronomique des frais de succession, est entrée dans le giron de l'allemand Bahlsen. Avec une telle réglementation, nous pénalisons nos entreprises !

M. Michel Vaspart . - L'exonération intégrale est, à notre connaissance, inconstitutionnelle, raison pour laquelle nous ne l'avons pas proposée.

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Si nos propositions sont utiles à la France, alors modifions la Constitution, c'est l'actualité !

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Vos propositions sont pragmatiques. Si toutes ne pourront s'appliquer dans l'immédiat, elles portent une vision pour l'avenir : nous devons fluidifier notre économie pour limiter les installations d'entreprises françaises à l'étranger et la perte de valeur qui en résulte.

M. Martial Bourquin . - Certaines propositions apparaissent éminemment logiques : instaurer un guichet unique, diriger l'épargne vers les PME... Je m'étonne cependant que le rapport n'aborde nullement l'actionnariat salarié. Dans le cadre des travaux de la mission commune d'information sur Alstom, nous nous sommes rendus en Allemagne, où il fonctionne particulièrement bien. Les salariés ne sont pas les ennemis de l'entreprise ; direction et salariés doivent s'unir pour en assurer le succès ! Vous n'évoquez pas non plus la nécessaire facilitation de l'ouverture du capital des PME, très insuffisante en France. Les ETI y sont trop peu nombreuses car les PME familiales craignent, en ouvrant leur capital pour se développer, de perdre leur majorité. Louis Schweitzer faisait d'ailleurs récemment état de cette difficulté devant la mission commune d'information précitée. Que proposez-vous enfin s'agissant des impôts de production, mal français s'il en est ? Ils gênent la compétitivité de nos entreprises et pourraient utilement être remplacés par une fiscalité plus ambitieuse sur le carbone.

M. Sébastien Meurant . - A quels impôts faites-vous allusion ?

M. Martial Bourquin . - Je pense, par exemple, à la cotisation foncière des entreprises (CFE). En Allemagne, par exemple, la taxe professionnelle n'a jamais porté que sur les bénéfices. Le cercle de l'industrie réclame ardemment une telle réforme.

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Prenons garde à ses conséquences sur les finances des collectivités territoriales !

M. Martial Bourquin . - La France a, je vous le rappelle, le taux de taxe carbone le moins élevé d'Europe... Par ailleurs, il me semble que la commande publique, grâce à des appels d'offres simplifiés, devrait profiter plus avant aux PME. La règlementation française fixe un seuil de mise en concurrence à 25 000 euros depuis octobre 2015. Dans le rapport d'information que j'avais présenté en 2015 avec Philippe Bonnecarrère pour la mission commune d'information sur la commande publique, nous proposions de le relever à 40 000 euros. Il pourrait également être envisagé de prendre en considération l'empreinte carbone dans les critères de sélection des offres. Cette disposition est prévue par la législation européenne ; transposons-la !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Ma proposition n° 18 vise, pour favoriser l'actionnariat salarié, à supprimer l'assujettissement des dividendes à cotisations sociales. Elle traite également des stock-options . Lorsque Google ou Samsung s'installent en France, ils attirent les meilleurs ingénieurs, alors qu'une PME ne peut offrir que l'attractivité de son projet et des stock-options pour leur faire concurrence. J'aurais effectivement pu, monsieur Bourquin, mentionner les impôts de production, mais il m'a semblé que cette problématique s'éloignait quelque peu du sujet de mon rapport, qui ne traite pas de la compétitivité mais du cycle de vie des entreprises. Dans ce cadre, nous pourrions également réfléchir à faire évoluer les formes d'imposition, par exemple en taxant l'espace qu'occupe une entreprise sur un territoire.

M. Martial Bourquin . - Il n'empêche que la question de la taxe carbone doit être posée rapidement.

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Certes, mais elle n'en demeure pas moins éloignée du thème de mon rapport d'information. J'ai, en outre, évoqué dans ma présentation les enjeux liés à la commande publique lorsque j'ai cité les propos que m'avait tenus, en 1996, le délégué général pour l'armement. Depuis, hélas, nous n'avons guère progressé...

M. Michel Vaspart . - Dans notre rapport d'information et dans notre proposition de loi portant sur la transmission des entreprises, nous n'avons pas non plus abordé, avec Claude Nougein, le dépôt de bilan, qui ressort, en France d'un système pervers défavorable à la reprise d'entreprise. Ce sujet demanderait un travail approfondi qu'il conviendrait de mener, notamment, avec la commission des lois. Nous nous sommes, en revanche, penchés sur la transmission d'entreprise, de la TPE à l'ETI. Dans ce cadre, nous n'avons effectivement pas proposé d'exonérer intégralement, comme cela existe en Allemagne et en Grande-Bretagne, certaines transmissions de droits de succession. Nous sommes restés dans la philosophie du pacte dit Dutreil en limitant cette exonération à 90 % dès lors que les parts de l'entreprise sont conservées pendant huit ans, disposition par ailleurs constitutionnellement acceptable. Nous pourrions certes, comme le propose Olivier Cadic, modifier la Constitution, mais cette solution ne m'apparaît pas des plus aisées... Sur le principe néanmoins, je soutiens sa proposition d'une exonération totale.

Dans nos échanges relatifs à la compétitivité des entreprises comme dans le projet de loi dit PACTE, il n'est jamais fait mention de l'état d'esprit des entrepreneurs français. Je vous livre à ce propos une anecdote : lorsque je dirigeais une entreprise de prêt-à-porter féminin haut-de-gamme, nous nous sommes intéressés au marché américain. Avec d'autres entrepreneurs, je suis rentré enthousiaste d'un voyage de prospection aux États-Unis. Mais il est rapidement apparu que nos entreprises étaient individuellement trop limitées dans leur capacité de production pour assurer seules des commandes d'envergure. Hélas, nous avons échoué à nous unir et les Italiens ont remporté le marché... Je connais, par ailleurs, une entreprise de mon département qui exporte beaucoup en Chine. Figurez-vous que son patron n'a jamais pensé à faire profiter les entrepreneurs de sa région de son réseau sur place...

Le CIR représente un outil particulièrement utile. La commission d'enquête sur la réalité du détournement du CIR de son objet et de ses incidences sur la situation de l'emploi et de la recherche dans notre pays, présidée par Francis Delattre et dont la rapporteure était Brigitte Gonthier-Maurin, n'a, en 2015, pas adopté de rapport car il n'était pas question, pour la majorité sénatoriale, de remettre en cause ce dispositif. Il peut certes exister des abus, mais la mesure n'en demeure pas moins essentielle à la compétitivité des entreprises. Il conviendrait, en revanche, de retravailler certains aspects, notamment s'agissant de son contrôle.

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Ma proposition n° 23 prévoit d'organiser la transformation du CIR et du crédit d'impôt en faveur de l'innovation en allégements de charges, sur le modèle du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), mais l'objectif essentiel est de sécuriser les entreprises innovantes. Sortons de situations ubuesques, telle que celle que je décrivais dans ma présentation. Vous trouverez d'ailleurs, en annexe de mon rapport, la liste interminable des pièces demandées à une entreprise pourtant considérée comme « stratégique » dans le domaine de la cyberdéfense lors de son contrôle fiscal.

Le projet de loi PACTE traitera des sujets relatifs à l'export, mais je m'inquiète de n'observer aucune corrélation entre les mesures proposées et la balance commerciale... Pour ce qui me concerne, je propose un taux d'impôt différencié sur les sociétés en fonction de la part des exportations dans le chiffre d'affaires, afin d'inciter les entreprises à rester ou à revenir en France. Mais il est vrai que les freins à l'export tiennent aussi à l'état d'esprit de nos entreprises.

Quant à la question de l'exonération de droits de succession, je citerais le commentaire publié aux Nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel sur sa décision du 31 juillet 2003 relative à la loi sur l'initiative économique : « dans les dix années à venir, quelque 500 000 entreprises vont en effet changer de dirigeants pour des raisons démographiques. Dans une telle perspective, veiller à ce que les transmissions d'entreprises se passent dans des conditions permettant de garantir la pérennité de l'appareil productif et la sauvegarde de l'emploi relève de l'intérêt national. Ce motif d'intérêt général justifie l'octroi d'un avantage fiscal déjà admis pour le décès du dirigeant et calculé de la même façon et sous les mêmes réserves ». Usons de cet argument pour obtenir l'exonération intégrale que nous appelons de nos voeux et portons-la à l'occasion de l'examen du projet de loi PACTE !

M. Michel Vaspart . - Il faudrait présenter un amendement à cet effet.

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Mon rapport d'information constitue justement une boîte à outils dans la perspective, notamment, de l'examen de ce projet de loi.

M. Martial Bourquin . - Certaines propositions que vous formulez sont effectivement intéressantes ; d'autres méritent d'être plus finement expertisées. Prenons garde notamment à ne pas toucher au CIR !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Je ne propose nullement la suppression du CIR ; je prône sa transformation, afin de sécuriser les entreprises.

M. Michel Canevet . - Quant au lien entre les impôts de production et le résultat de l'entreprise, prenons garde à ses conséquences sur les finances locales. Les entreprises ne doivent pas être tentées d'échapper à l'impôt par une optimisation fiscale.

M. Michel Vaspart . - Dans le cadre de la commission d'enquête précitée sur le CIR, qui avait mené de très nombreuses auditions, nous nous étions attachés à conserver le dispositif et à en préserver les fondements. Nous souhaitions, en revanche, une simplification des contrôles, qui relèvent à la fois du ministère de la recherche et de celui des finances.

M. Martial Bourquin . - Ce double contrôle est inacceptable !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Les entreprises ne sont pas sereines de ce fait, c'est pourquoi je propose de les sécuriser en transformant le dispositif en allègements de charges.

M. Martial Bourquin . - Si, initialement, le critère d'innovation applicable au CIR était relativement fermé, il a depuis été élargi, permettant à de nombreuses entreprises de bénéficier du dispositif. Il représente un atout majeur pour leur compétitivité. Ne laissons donc pas croire, par un message inapproprié, que nous prônons sa suppression !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - Le système actuel favorise par trop les très grandes entreprises, y compris les Google, Amazon, Facebook et Apple (GAFA), alors qu'il était conçu pour encourager les PME innovantes. Peut-être devrait-on imaginer un dispositif différencié selon la taille de l'entreprise, qui serait simplifié pour les plus petites ? Certaines renoncent à son bénéficie par crainte des contrôles...

M. Martial Bourquin . - Ces contrôles sont toutefois moins systématiques qu'autrefois.

Mme Catherine Fournier . - Vous évoquez la nécessité de sécuriser les entreprises et de faire évoluer la mentalité des entrepreneurs : il faut, à cet effet, leur redonner confiance en garantissant la pérennité des mesures établies en leur faveur.

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Les entreprises sont effectivement désireuses d'une plus grande stabilité de la réglementation. Soutenez-vous, mes chers collègues, les propositions présentées par Olivier Cadic ?

M. Martial Bourquin . - Le rapport de notre collègue est particulièrement intéressant, notamment s'agissant des mesures proposées en matière de simplification. Sur les autres sujets, ma position sera celle d'une abstention positive... Je conclurais en appelant de mes voeux une harmonisation des taux de l'impôt sur les sociétés en Europe. Certains pays poursuivent une politique du moins disant fiscal - je pense notamment à l'Irlande - et mettent ainsi notre industrie en danger !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - L'Irlande exigera alors de la France la suppression du CIR...

M. Martial Bourquin . - Le CIR, dont le coût s'établit à 5,7 milliards d'euros, ne peut être comparé au paradis fiscal, évalué à 17 milliards d'euros, que constitue l'Irlande pour Google !

M. Olivier Cadic , rapporteur . - L'Irlande est un petit pays excentré qui se bat avec les arguments dont il dispose... L'Estonie, pour sa part, a fixé, sous certaines conditions, un impôt sur les sociétés nul. Une harmonisation fiscale européenne ne me paraît pas très réaliste.

M. Joël Labbé . - Je m'abstiens également sur les propositions de M. Cadic.

Mme Élisabeth Lamure , présidente . - Nous vous remercions, cher collègue, pour la qualité de votre travail et le dynamisme de votre présentation.

À l'issue du débat, la délégation adopte le rapport.

ANNEXES

Annexe I - Les 87 catégories d'entreprises recensées par Infogreffe

1

Société de caution mutuelle

2

Société coopérative agricole

3

Société coopérative d'intérêt collectif à responsabilité limitée

4

Société coopérative maritime

5

Société coopérative et participative à responsabilité limitée

6

Société coopérative de travailleurs à forme anonyme

7

Société civile de placement immobilier

8

Coopérative d'utilisation de matériel agricole

9

Exploitation agricole à responsabilité limitée

10

Groupement foncier agricole

11

Société civile

12

Société d'investissement à capital fixe

13

Société de participations financières de professions libérales à forme de S.A.S.

14

Société de placement à prépondérance immobilière à capital variable

15

Union de coopératives agricoles

16

Agence commerciale d'une collectivité étrangère

17

Association émettant des obligations

18

Société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée

19

Société coopérative et participative par actions simplifiée

20

Société coopérative de production à forme anonyme

21

Représentation commerciale d'une collectivité étrangère

22

Société anonyme de presse

23

Société civile de construction vente

24

Société civile d'exploitation agricole

25

Société de droit étranger

26

Société d'économie mixte

27

Société d'intérêt collectif agricole par actions simplifiée

28

Société interprofessionnelle de soins ambulatoires

29

Société de participations financières de professions libérales à responsabilité limitée

30

Société de participations financières de professions libérales à forme anonyme

31

Union de sociétés coopératives à responsabilité limitée

32

Union d'économie sociale - Société coopérative par actions simplifiée

33

Agence commerciale d'un Etat étranger

34

Société coopérative de crédit

35

Société coopérative d'intérêt collectif à forme anonyme

36

Société coopérative ouvrière de production à responsabilité limitée

37

Société coopérative et participative à forme anonyme

38

Société coopérative de travailleurs à responsabilité limitée

39

Société anonyme coopérative d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété

40

Société anonyme à objet sportif

41

Société par actions simplifiée

42

Société anonyme sportive professionnelle

43

Société en commandite par actions

44

Société civile professionnelle

45

Société en commandite simple

46

Société d'exercice libéral en commandite par actions

47

Société publique locale d'aménagement

48

Société coopérative à responsabilité limitée

49

Société coopérative artisanale

50

Société coopérative de banque populaire

51

Groupement agricole d'exploitation en commun

52

Groupement européen d'intérêt économique

53

Groupement forestier

54

Représentation commerciale d'un établissement public étranger

55

Société civile de moyens

56

Société européenne

57

Société d'exercice libéral à responsabilité limitée

58

Société d'exercice libéral par actions simplifiée

59

Société d'économie mixte à opération unique

60

Société d'intérêt collectif agricole à responsabilité limitée

61

Société en nom collectif

62

Union de sociétés coopératives à forme anonyme

63

Agence commerciale d'un établissement public étranger

64

Société coopérative par actions simplifiée

65

Société civile coopérative

66

Société coopérative de commerçants détaillants à forme anonyme

67

Société coopérative européenne

68

Société coopérative à forme anonyme

69

Société coopérative ouvrière de production à forme anonyme

70

Société coopérative de production à responsabilité limitée

71

Société coopérative de production par actions simplifiée

72

Etablissement public à caractère industriel et commercial

73

Groupement foncier rural

74

Groupement d'intérêt économique

75

Représentation commerciale d'un Etat étranger

76

Société anonyme

77

Société anonyme à participation ouvrière

78

Société à responsabilité limitée

79

Société civile agricole

80

Société civile immobilière

81

Société d'exercice libéral à forme anonyme

82

Société d'intérêt collectif agricole à forme anonyme

83

Société d'investissement à capital variable

84

Société de libre partenariat

85

Société de participations financières de professions libérales en commandite par actions

86

Union d'économie sociale - Société coopérative à responsabilité limitée

87

Union d'économie sociale - Société coopérative à forme anonyme

Annexe II - Les 50 mesures de simplification du code de commerce proposées par la commission des Lois du Sénat (juin 2016) dans son Rapport n° 657 (2015-2016) fait par M. André Reichardt , au nom de la commission des lois, du 1er juin 2016

1. Suppression des mentions légales obligatoires devant être portées sur l'acte de cession d'un fonds de commerce

2. Suppression de l'obligation de viser, le jour de la vente d'un fonds de commerce, les livres de comptabilité du vendeur des trois exercices précédents et d'en dresser un inventaire

3. Suppression de la condition d'exploitation préalable de deux ans du fonds de commerce avant sa mise en location-gérance

4. Suppression de la solidarité fiscale entre le loueur et le locataire d'un fonds de commerce donné en location-gérance pour les dettes fiscales contractées au-delà des six premiers mois du contrat de location-gérance

5. Clarification des droits respectifs du nu-propriétaire et de l'usufruitier en cas de démembrement de part sociale

6. Création d'un régime simplifié de fusion applicable à toutes les sociétés non commerciales

7. Clarification du point de départ du délai d'opposition d'un créancier à la dissolution d'une société dont toutes les parts sont réunies en une seule main

8. Création d'une procédure de régularisation de la prorogation d'une société en cas d'omission des formalités de prorogation par les associés

9. Simplification des conditions de remplacement du gérant d'une société civile en cas de vacance pour quelque cause que ce soit

10. Dématérialisation des formalités de publicité de la cession de parts de société civile auprès du registre du commerce et des sociétés

11. Facilitation du remplacement d'un gérant de société à responsabilité limitée placé en tutelle ou curatelle

12. Instauration d'une nullité relative des décisions prises irrégulièrement par l'assemblée des associés d'une société à responsabilité limitée

13. Clarification des conditions de désignation du commissaire à la transformation en cas de transformation d'une société quelconque en société par actions

14. Démission d'office des mandataires sociaux de société anonyme placés en tutelle ou curatelle

15. Assouplissement des conditions d'octroi, par le conseil d'administration ou par le directeur général d'une société anonyme, de garanties par une société mère à ses filiales contrôlées

16. Création d'une procédure écrite de consultation au sein du conseil d'administration ou de surveillance d'une société anonyme, pour les décisions courantes

17. Limitation des obligations de publication d'informations par les sociétés cotées aux seules sociétés dont les actions sont cotées

18. Limitation aux seules conventions réglementées effectivement conclues de l'approbation par l'assemblée générale des actionnaires

19. Exclusion des abstentions, actuellement comptabilisées comme des votes contre, du nombre des voix exprimées dans les assemblées générales d'actionnaires

20. Possibilité pour les sociétés cotées de remplir leurs obligations de publication d'informations dans un document unique, pouvant être déposé au registre du commerce et des sociétés

21. Dématérialisation de la tenue des assemblées générales d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées

22. Simplification des modalités de réponse aux questions écrites des actionnaires dans les assemblées générales

23. Allègement de la sanction prévue en cas de manquement aux obligations concernant le procès-verbal des assemblées générales d'actionnaires

24. Transformation en nullité relative de la nullité impérative de la délibération adoptée sans avoir été inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée générale

25. Rétablissement de la nullité de l'assemblée générale en cas d'absence de présentation du rapport des commissaires aux comptes

26. Suppression de l'obligation triennale de soumettre à l'assemblée générale des actionnaires une augmentation de capital réservée aux salariés

27. Simplification des modalités de mise à jour des clauses statutaires relatives au capital par les mandataires sociaux en cas d'augmentation de capital résultant de l'exercice de droits attachés à des valeurs mobilières donnant accès au capital

28. Allègement de la sanction prévue en cas d'omission de la présentation à l'assemblée générale des actionnaires d'une augmentation de capital réservée aux salariés simultanément à toute augmentation de capital

29. Suppression de la suspension des droits de vote attachés à des actions émises en violation des règles applicables en matière d'augmentation de capital

30. Assouplissement des périodes d'interdiction d'attribution aux salariés d'options donnant droit à la souscription d'actions (stock-options)

31. Assouplissement des périodes d'interdiction de cession des actions gratuites attribuées aux salariés et clarification du périmètre des salariés concernés

32. Assouplissement des modalités de calcul du plafond de 10 % du capital fixé pour le nombre des actions pouvant être gratuitement attribuées par une société à ses salariés

33. Clarification des règles applicables respectivement aux sociétés cotées et non cotées pour le rachat de leurs propres actions

34. Clarification des modalités comptables de rachat par une société de ses propres actions

35. Suppression de l'obligation de désigner un commissaire aux apports en cas d'avantages particuliers ou d'apport en industrie dans une société par actions simplifiée

36. Suppression de la formalité de dépôt au registre du commerce et des sociétés d'une déclaration de conformité en cas de fusion ou de scission de sociétés par actions simplifiées

37. Possibilité dans les petites sociétés par actions simplifiées de désigner un commissaire aux comptes pour permettre la libération d'actions par compensation avec des créances en cas d'augmentation de capital

38. Possibilité d'adopter ou de modifier des clauses statutaires d'agrément d'un nouvel associé ou de retrait d'un associé à la majorité plutôt qu'à l'unanimité des associés dans les sociétés par actions simplifiées

39. Clarification des règles applicables aux actions de préférence

40. Simplification des modalités de mise à jour des clauses statutaires relatives au capital par les mandataires sociaux en cas d'augmentation de capital résultant du paiement du dividende en actions

41. Extension du régime simplifié de la fusion de sociétés aux fusions entre sociétés soeurs, détenues par une même société mère

42. Clarification des modalités d'application à l'apport partiel d'actif du régime simplifié de la fusion de sociétés

43. Clarification de la liste des fonctions devant être exercées par des commissaires aux comptes personnes physiques au sein des sociétés de commissariat aux comptes

44. Possibilité pour un même commissaire aux comptes d'accomplir plusieurs missions légales ponctuelles distinctes de celle de contrôle légal des comptes

45. Assouplissement du secret professionnel entre les commissaires aux comptes exerçant différentes missions légales auprès d'une société

46. Suppression de l'obligation de désigner un commissaire aux comptes suppléant

47. Clarification de l'obligation de désigner des commissaires aux comptes pour les entités tenues d'établir des comptes combinés

48. Extension de la norme professionnelle simplifiée de contrôle légal des comptes aux associations et autres entités non marchandes

49. Possibilité de désigner un tiers subsidiaire dans les conventions renvoyant, sous peine de nullité de la vente, à un tiers la détermination du prix de vente

50. Simplification des formalités auprès de l'administration fiscale pour bénéficier de l'exonération « Dutreil » de droits de succession sur la transmission de parts de société


Annexe III - Les principales étapes de la construction du droit des entreprises en difficulté
(1) Les réformes de 1967

La loi du 13 juillet 1967 pose la distinction entre l'homme et l'entreprise.

Sont susceptibles de bénéficier du redressement judiciaire les entreprises aptes à se redresser. Sont vouées à la liquidation des biens, les entreprises incapables de se redresser, cette procédure entraînant la cessation d'activité. L'appréciation est portée davantage sur les perspectives économiques de l'entreprise que sur la moralité du débiteur ou le dirigeant de la personne morale : si ce dernier est malhonnête, il peut être sanctionné par la faillite personnelle, laquelle est dénuée de toute portée patrimoniale, parallèlement à la procédure collective. Mais cette sanction ne pourra pas retentir sur le sort de l'entreprise débitrice, laquelle pourra se redresser au moyen d'un concordat.

La loi supprime la faillite afin de promouvoir une vision plus économique de la législation et limite au vote du concordat l'intervention des créanciers chirographaires 451 ( * ) : ils ne participent plus, par des assemblées, à tous les stades de la procédure, mais sont cantonnés au vote du concordat. Par ce vote, ils décident in fine si l'entreprise peut ou non se redresser ou si elle doit être placée par conversion en liquidation de bien. Il s'agit donc encore d'une procédure collective de paiement.

Elle créée par ailleurs une association pour la gestion du régime d'assurance des créances salariales (AGS) qui permet de faire les avances salariales lorsqu'un chef d'entreprise est défaillant.

L'ordonnance du 23 septembre 1967 institue la procédure de suspension provisoire des poursuites, applicable aux entreprises dont la situation financière difficile n'est pas irrémédiablement compromise.

Elle permet un traitement judiciaire en amont de la cessation de paiement. Toutefois, seules les entreprises dont la disparition est susceptible de causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale sont concernées. La première phase est un moratoire (suspension des poursuites individuelles) qui permet au débiteur, assisté d'un curateur, de présenter un plan de redressement au tribunal. Ce dernier peut subordonner l'adoptiondu plan au remplacement d'un ou plusieurs dirigeants. Pendant cette phase, les créanciers perdent la possibilité de décider du sort de l'entreprise. Le jugement arrête un plan (limité à trois ans) qui s'impose à tous les créanciers antérieurs, chirographaires ou privilégiés. Son exécution est confiée au commissaire à l'exécution du plan.

Ce texte soumet les créanciers privilégiés à la procédure collective de paiement et ne leur laisse plus le soin de décider si l'entreprise peut ou non se redresser. Cette procédure préventive connaît toutefois une application limitée.

La loi du 15 octobre 1981 accentue la notion de protection de l'intérêt général dans les procédures de redressement des entreprises en accroissant le rôle du ministère public, qui devient un organe de la procédure.

Elle reprend la disposition de la loi de 1967 qui permet au tribunal de subordonner l'homologation du concordat à l'éviction des dirigeants de la personne morale débitrice.

Toutefois, alors que la législation évolue vers la prédominance de l'entreprise sur le sort des créanciers, on autorise certains d'entre eux à sortir de la procédure par des techniques jouant sur l'actif du débiteur, soit en empêchant l'entrée de biens dans son patrimoine (clause de réserve propriété, loi du 12 mai 1980 ), soit en faisant sortir les biens du patrimoine du débiteur ( loi du 2 janvier 1981 dite loi Dailly).

(2) La loi du 25 janvier 1985 arbitre en faveur de l'entreprise et de sa sauvegarde.

La survie de l'entreprise devient la priorité 452 ( * ) .

En contrepartie, l'apurement du passif devient second : si l'activité de l'entreprise est poursuivie, c'est d'abord dans l'intérêt de celle-ci et de ses salariés et non de celui des créanciers. C'est pourquoi la « masse » des créanciers disparaît pour ne laisser subsister qu'un groupement de créanciers, dépourvu de la personnalité morale, avec à sa tête un représentant.

Le législateur a distingué deux situations :

1/ le débiteur peut, d'une part, avoir recours à la prévention, la confidentialité et un formalisme allégé en optant pour le mandat ad hoc (afin d'assister les dirigeants sociaux pour trouver des solutions permettant d'assurer la survie de l'entreprise, ce qui peut donner lieu à un accord négocié sous l'égide du mandataire ad hoc ) ou le règlement amiable sous l'égide du tribunal qui désigne un conciliateur, généralement un administrateur judiciaire, s'il lui apparaît que les propositions du débiteur sont de nature à favoriser le redressement de l'entreprise. La mission du conciliateur est de favoriser le fonctionnement de l'entreprise et de rechercher la conclusion d'un accord avec les créanciers.

Il peut aussi choisir ou se voir imposer un traitement « judiciaire » s'il est en état de cessation des paiements avec le déclenchement d'une procédure collective qui peut conduire, à l'issue d'une période d'observation, au redressement judiciaire (plan de continuation ou plan de cession) ou à la liquidation .

La loi de 1985 fut plutôt « défavorable » aux créanciers puisque, selon les estimations, seules 60 % des créances privilégiées et 5 % des créances chirographaires environ ont été payées depuis l'entrée en vigueur de cette réforme.

Les établissements de crédit ont perdu des sommes importantes en raison, d'une part, de la priorité donnée aux « créanciers de l'article 40 » 453 ( * ) sur les créanciers titulaires de sûretés spéciales et, d'autre part, de l'interprétation jurisprudentielle de l'article 115 de la loi de 1985 qui imposait aux bailleurs financiers de revendiquer, dans un délai de trois mois, les biens donnés en location .

Par ailleurs, elle ne permettait pas de « redressement » puisque 90% des entreprises étaient liquidées : le sacrifice des créanciers était donc largement inutile.

Enfin, lorsque l'emploi était privilégié par l'adoption d'un plan de continuation de l'entreprise, on constatait son échec dans les deux à trois ans dans près de 50% des cas.

Ces considérations ont conduit à un infléchissement assez net des financements octroyés aux PME faisant l'objet d'un redressement judiciaire, alors que le crédit est le moteur de l'économie.

(3) La loi du 10 juin 1994

Elle a tenté un rééquilibrage entre les créanciers privilégiés et les créanciers du « redressement de l'entreprise », notamment en rétablissant la priorité de certaines sûretés spéciales par rapport aux créances de l'article 40 et en supprimant l'obligation du crédit bailleur de revendiquer des biens dans le délai de l'article 115.

Elle améliore la protection des créanciers contre la fraude des débiteurs qui n'hésitaient pas à continuer l'activité cédée en créant de nouvelles structures sans payer le passif. En permettant le prononcé immédiat de la liquidation judiciaire, elle évite la création d'un important passif de l'article 40 absorbant tout l'actif du débiteur.

(4) La loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises

Elle constitue une évolution du droit français en direction du droit américain du « chapitre 11 » en consacrant la possibilité pour l'entreprise de se placer sous la sauvegarde de la justice sans être en état de cessation de paiement.

La loi associe plus étroitement les créanciers publics, fiscaux et sociaux, au traitement des entreprises en difficulté et aux efforts consentis pour tenter de sauver l'entreprise.

Elle accentue l'information du ministère public, qui se voit doté de nouvelles prérogatives pour intervenir. Parallèlement, le rôle du tribunal recule.

Afin de trouver la réponse la plus adaptée à la situation du débiteur, la loi de 2005 multiplie les procédures, la cessation de paiement cessant d'être un critère de distinction entre traitement amiable et traitement judiciaire.

La loi introduit une procédure entièrement nouvelle, qui a pour objectif de permettre le sauvetage de l'entreprise et des emplois dès les premières difficultés sérieuses, la procédure de sauvegarde .

Cette procédure peut en effet être ouverte à l'initiative du chef d'entreprise, avant la cessation de paiements. Celui-ci doit justifier de difficultés qu'il n'est pas en mesure de surmonter. L'un des intérêts de cette nouvelle procédure est de permettre au dirigeant de conserver la gestion de son entreprise. La loi prévoit en effet la nomination d'un administrateur judiciaire seulement pour une mission d'assistance et de surveillance.

L'ouverture de la procédure de sauvegarde permet la suspension des poursuites des créanciers et le gel du passif antérieur du débiteur afin de permettre la réorganisation et, le cas échéant, l'organisation d'une négociation entre l'entreprise et ses créanciers dans le cadre de deux comités : le comité des établissements de crédits et le comité des principaux fournisseurs. Le débiteur fait des propositions afin de construire un programme de remboursement. Ces propositions doivent être adoptées par chaque comité à la majorité de ses membres, représentant au moins les deux tiers du montant des créances de l'ensemble des membres du comité. En cas de refus, la décision reviendra au tribunal, qui veillera à ce que l'intérêt de tous les créanciers soit préservé.

À l'issue d'une période d'observation de six mois renouvelable une fois, et s'il existe une chance sérieuse pour l'entreprise d'être sauvegardée, le tribunal arrête un plan de sauvegarde, qui définit les modalités de poursuite de l'activité. La cession d'une ou de plusieurs activités de l'entreprise pourra être envisagée.

La loi instaure par ailleurs une procédure de conciliation qui remplace l'ancien règlement amiable. Cette nouvelle procédure, ouverte aux entreprises qui éprouvent des difficultés économiques, financières ou juridiques avérées ou prévisibles et qui ne sont pas en état de cessation de paiement depuis plus de 45 jours, présente une dimension contractuelle accentuée et conserve son caractère confidentiel.

En cas d'accord, et après homologation par le tribunal, un privilège de new money est accordé aux créanciers qui consentent, dans le cadre de l'accord homologué, à un apport de capitaux nouveaux : en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, ceux-ci seront payés par privilège avant toutes les créances nées antérieurement à l'ouverture de la conciliation.

La loi instaure enfin une nouvelle procédure de liquidation judiciaire simplifiée qui permet de clore le processus en moins d'un an. Cette procédure s'applique aux entreprises de 5 salariés au plus, qui n'ont pas d'actif immobilier et dont le chiffre d'affaire est inférieur à 750 000 euros.

La loi supprime toute possibilité de prononcer une procédure collective à titre de sanction. Le redressement judiciaire en tant que sanction est donc remplacé par une "obligation aux dettes sociales", limitée aux procédures de liquidation judiciaire. Si le dirigeant de l'entreprise commet certaines fautes graves énumérées par la loi, il devra assumer une partie ou la totalité des dettes de la personne morale.

La durée de la faillite personnelle et de l'interdiction de gérer est désormais limitée. En effet, le tribunal ne peut arrêter une mesure d'une durée supérieure à 15 ans. Par ailleurs, l'omission de déclarer la cessation de paiement ne constitue plus un cas de faillite personnelle mais donne désormais lieu à une simple interdiction de gérer.

Enfin, la loi a également introduit un nouveau cas de relèvement lorsque le débiteur fait l'objet d'une interdiction de gérer. Ce dernier, s'il en fait la demande au tribunal, peut être réhabilité « s'il présente toutes les garanties démontrant sa capacité à diriger ou contrôler » une entreprise.

(5) L'ordonnance du 18 décembre 2008

Elle entend remédier à certaines imperfections rapidement constatées de la loi de 2005. En effet, la procédure de sauvegarde n'a concerné que moins de 2000 entreprises : 509 en 2006, 513 en 2007, 694 en 2008.

L'ordonnance rend plus attractive la procédure de sauvegarde

Elle assouplit les conditions d'ouverture. Elle peut dorénavant être ouverte sur demande d'un chef d'entreprise qui, sans être en cessation des paiements, justifie de difficultés qu'il n'est pas en mesure de surmonter. En revanche, il n'a désormais plus à démontrer que ses difficultés sont de nature à le conduire à la cessation des paiements.

Elle renforce les prérogatives du chef d'entreprise au moment de l'ouverture et pendant la procédure de sauvegarde. Il a désormais la possibilité de proposer au tribunal la désignation de l'administrateur judiciaire de son choix. Il peut également procéder lui-même à l'inventaire de son patrimoine, sous réserve que celui-ci soit validé par un commissaire aux comptes ou un expert-comptable.

Le rôle du chef d'entreprise a également été conforté dans l'élaboration du projet de réorganisation de l'entreprise. Il lui revient, avec le concours de l'administrateur judiciaire, de préparer le projet de plan de sauvegarde et de le proposer aux créanciers.

Enfin, l'ordonnance a abrogé la faculté pour le tribunal de subordonner l'adoption d'un plan de sauvegarde à l'éviction des dirigeants. Le chef d'entreprise est donc assuré de rester à la tête de son entreprise si un plan de sauvegarde est arrêté à l'issue de la période d'observation.

L'ordonnance entend faciliter la poursuite de l'activité de l'entreprise au cours de la période d'observation et la préparation du plan de sauvegarde.

Elle aménage notamment les effets de certaines sûretés et favorise une réorganisation pérenne de l'entreprise après l'arrêté du plan de sauvegarde.

Elle introduit une innovation importante en permettant au tribunal, à la seule initiative du chef d'entreprise, de convertir la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire si l'adoption d'un plan de sauvegarde est manifestement impossible et si la clôture de la procédure devait conduire de manière certaine à la cessation des paiements.

Elle aménage également les conséquences des incidents survenus pendant l'exécution du plan de sauvegarde. En cas de cessation des paiements, le tribunal n'est plus dans l'obligation de prononcer la liquidation judiciaire. Si le redressement de l'entreprise est possible malgré la cessation des paiements, un redressement judiciaire pourra désormais être ouvert.

L'ordonnance incite le chef d'entreprise à recourir davantage à la conciliation, qui est une procédure essentiellement amiable.

Pour ce faire, elle étend la protection des garants des engagements de l'entreprise, qui sont souvent le chef d'entreprise ou ses proches, en cas de succès de la conciliation.

Elle élargit par ailleurs la possibilité de demander des délais ou un report de paiement au juge saisi de la procédure. Cette demande peut désormais être présentée non seulement en cas de poursuite exercée par un créancier pendant la conciliation, mais aussi dans l'hypothèse d'une simple mise en demeure de payer.

Enfin, l'ordonnance exclut le délai nécessaire au tribunal pour statuer sur l'homologation de l'accord de conciliation, dont la durée n'est pas prévisible, du temps imparti pour mener à bien les négociations. En revanche, afin d'éviter l'enlisement de la situation de l'entreprise, elle empêche les procédures de conciliation successives en instituant un délai de carence de trois mois entre deux procédures.

L'ordonnance réforme également les règles de constitution et de fonctionnement des comités de créanciers, ainsi que celles de l'assemblée des obligataires qui, dans certaines procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire, sont appelés à se prononcer sur le projet de plan.

La composition des comités de créanciers est élargie. Dans le comité des établissements de crédits sont intégrés les établissements assimilés, dont la liste sera fixée par décret en Conseil d'État et les titulaires d'une créance transférée par un créancier d'origine. Par ailleurs, le seuil de participation obligatoire des fournisseurs de biens et de services au comité des principaux fournisseurs est revu à la baisse, passant de 5% à 3% du total des créances des fournisseurs.

Le projet de plan soumis aux comités de créanciers pourra prévoir des délais de paiement, des remises et, innovation importante de l'ordonnance, des conversions de créances en titres donnant ou pouvant donner accès au capital. Cette dernière possibilité est toutefois réservée aux sociétés par actions dont tous les actionnaires ne supportent les pertes qu'à concurrence de leurs apports.

Les conditions d'adoption du projet de plan par les comités de créanciers sont assouplies : l'exigence d'une double majorité disparaît au profit d'une simple majorité des deux tiers des créances calculée à partir des votes exprimés.

L'ordonnance a par ailleurs supprimé le calendrier fixé pour conduire les opérations. Elle prévoit désormais que les comités de créanciers doivent adopter le projet de plan dans les six mois qui suivent l'ouverture de la procédure.

Enfin, si la liquidation judiciaire simplifiée est toujours réservée aux petites entreprises ne possédant aucun bien immobilier, alors qu'elle était jusque-là toujours facultative, elle devient désormais obligatoire dans certains cas.

(6) La procédure de sauvegarde financière accélérée

Issue d'une initiative sénatoriale 454 ( * ) insérée dans la loi du 22 octobre 2010 de régulation financière et bancaire, la procédure est limitée au cercle des « créanciers financiers » des entreprises, c'est-à-dire aux établissements de crédit. Elle permet de dépasser l'opposition des créanciers minoritaires lorsque moins d'un tiers d'entre eux ont fait échouer la conciliation préalable.

La sauvegarde est dite « accélérée », car le délai est fixé à un mois à compter du jugement d'ouverture et n'est prorogeable qu'une fois. Le régime de la déclaration de créance est précisé. La majorité des deux tiers s'apprécie conformément à la procédure de sauvegarde de droit commun, c'est-à-dire en fonction du montant des créances.

Variante d'une procédure de sauvegarde, elle consiste à pré-négocier un plan de restructuration des dettes avec les principaux créanciers puis à obtenir le plus rapidement possible l'adoption de ce plan dans le cadre d'une procédure de sauvegarde.

(7) L'adaptation du droit des entreprises en difficulté à l'entrepreneur individuel.

La loi du 15 juin 2010 créée le statut d'entrepreneur à responsabilité limité (« EIRL »), permettant d'isoler dans un patrimoine affecté une masse de biens et de droits obligatoirement composée de ceux nécessaires à l'activité. Cette masse de biens répond seule des dettes générées par l'exploitation de l'entreprise, sans création d'une nouvelle personne juridique. L'EIRL, tout comme une personne physique, peut donc être à la tête d'au moins deux patrimoines.

L'ordonnance du 9 décembre 2010 (non encore ratifiée) a adapté le droit des entreprises en difficulté à l'EIRL, qui repose sur le principe d'étanchéité des patrimoines.

Le patrimoine de l'EIRL est traité comme une entreprise séparée. Le législateur renonce ainsi au caractère personnel de la procédure collective ; l'entreprise n'a plus ici la personne comme sujet mais un patrimoine pour objet. La situation économique du débiteur sera donc appréciée patrimoine par patrimoine. Plusieurs procédures collectives sont donc possibles pour un même patrimoine.

(8) Les ordonnances de 2014

Deux ordonnances de 2014, la première comportant 117 articles et la seconde, 14, modifient, une nouvelle fois et profondément, le droit des entreprises en difficulté. Elles ont été rapportées par la commission des lois du Sénat le 21 octobre 2015 455 ( * ) mais n'ont toujours pas été délibérées en séance.

L'ordonnance du 12 mars 2014 tend à augmenter l'attractivité des procédures de prévention en renforçant la sécurité de la conciliation.

Les rédacteurs du texte ont souhaité rendre plus attractifs les mécanismes existants notamment en matière de prévention, en favorisant en amont l'apport de crédit aux entreprises en apportant de l'anticipation, de la rapidité, et de la simplicité.

L'anticipation des difficultés est au coeur des réformes intervenues depuis 2005 et elle apparaît, à nouveau, comme l'une des préoccupations majeures. C'est pourquoi les mesures de prévention ont été rénovées afin d'inciter les chefs d'entreprise à y recourir, ce qui se révèle au travers de différents mécanismes : extension du pouvoir d'alerte, amélioration de l'octroi des délais de grâce et de paiement, incitation du débiteur à recourir aux procédures de prévention, incitation des créanciers à consentir des apports en trésorerie, biens ou services.

Les rédacteurs du texte ont souhaité accélérer les procédures et lever certains points de blocage pour faciliter la clôture des procédures. Pour répondre à l'objectif de célérité, l'ordonnance prévoit la création d'une nouvelle procédure de sauvegarde dite « accélérée », la réduction des délais de liquidation grâce à l'allégement des opérations de réalisation d'actifs ou, encore, la mise en place de diverses mesures tendant à éviter la paralysie de la procédure par les associés.

La liquidation judiciaire ne pourra plus être ouverte d'office et la dissolution de la société n'est plus la conséquence de la liquidation judiciaire mais seulement de sa clôture pour insuffisance d'actif. La liquidation judiciaire simplifiée l'est encore davantage. Il est désormais possible de ne plus ouvrir les procédures impécunieuses sur le constat que, s'il n'y a rien à répartir, il n'y a rien à liquider. Cette procédure ultra-rapide et simplifiée de rétablissement professionnel permet au débiteur de rebondir rapidement après effacement de ses dettes.

L'ordonnance du 26 septembre 2014 vise à corriger quelques imperfections de la précédente notamment pour tenir compte de la teneur d'une question prioritaire de constitutionalité 456 ( * ) .

Elle vient notamment préciser que les seuils d'éligibilité 457 ( * ) à la nouvelle procédure de sauvegarde accélérée, fixés par décret, sont alternatifs, ce qui élargit le nombre de sociétés susceptibles de bénéficier de cette procédure.

(9) La loi du 6 août 2015

La « loi Macron » retouche le droit des entreprises en difficulté sur des points précis 458 ( * ) .

Pour l'EIRL, elle crée l'insaisissabilité légale de la résidence principale du débiteur.

Elle consacre la cession forcée des parts ou actions détenues par les associés ou actionnaires majoritaires dans l'hypothèse d'un plan de redressement et lorsqu'il y a nécessité d'augmenter le capital social.

En cas de refus par les assemblées compétentes de voter la modification du capital prévue par le projet de plan de redressement, le tribunal a la possibilité :

- de désigner un mandataire chargé de voter l'augmentation de capital en lieu et place des actionnaires ayant refusé la modification du capital ;

- d'ordonner la cession forcée de la participation des actionnaires majoritaires ayant refusé la modification du capital.

Cette possibilité offerte au tribunal est enserrée dans des conditions strictes. Elle n'a vocation à être mise en place que dans les entreprises comprenant au moins 150 salariés. En outre, la cessation d'activité doit être « de nature à causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale et au bassin d'emploi » et la modification du capital doit apparaître « comme la seule solution sérieuse permettant d'éviter ce trouble et de poursuivre l'activité ».

D'après Droit et pratique des procédures collectives , Pierre-Michel Le Corre,

Dalloz, 9 ème édition 2017/2018.

Annexe IV - Le « chapitre 11 » du titre 11 du United States Code

Aux États-Unis, la procédure du « Chapter 11 » a été réformée en faveur des créanciers en 2005. La procédure offerte présente des avantages par rapport à celle qui existe en France car (i) les créanciers peuvent limiter la durée de la procédure, (ii) ils ont la faculté de faire une contre-offre s'ils estiment celle du débiteur contraire à leurs intérêts (iii) le pouvoir de négociation de chaque classe de créanciers dépend directement de leur rang dans le passif de l'entreprise.

Le titre 11 du Code fédéral américain définit les règles applicables à la faillite. Son chapitre 11 prévoit une procédure de réorganisation ( reorganization ) au profit du débiteur en difficulté.

L'objet de ce dispositif est de permettre à une entreprise -personne physique ou morale- ayant contracté des dettes auprès de ses créanciers d'entreprendre des actions de restructuration selon un plan défini en accord avec ceux-ci et validé par un tribunal . Le droit américain ne définit cependant aucun critère précis quant à l'importance des dettes contractées pour pouvoir ouvrir cette procédure, le juge exerçant parfois, en pratique, un contrôle de la légitimité de la demande.

La seule demande d'ouverture de la procédure, présentée par le débiteur ou l'un de ses créanciers, entraîne la suspension automatique des actions des créanciers . L'activité de l'entreprise est poursuivie, le débiteur restant aux commandes ( debtor in possession ). Par exception, le tribunal peut cependant désigner un administrateur ( trustee ) chargé de gérer les biens de l'entreprise, s'il s'avère qu'il en va de l'intérêt des créanciers ou que le débiteur ou ses dirigeants sont coupables de fraude ou de mauvaise gestion. Il peut également nommer un contrôleur ( examiner ), lorsque le montant des dettes du débiteur est élevé (supérieur à 5.000.000 dollars).

La procédure fait intervenir des comités de créanciers ( creditors' and equity security holders' committees ), institués dans chaque affaire par un représentant du ministère de la Justice ( US trustee ) et chargés de convenir avec le débiteur d'un plan de réorganisation permettant à terme le règlement de ses dettes . La constitution d'au moins un comité, rassemblant les créanciers titulaires des sept créances les plus importantes, est obligatoire. La création d'autres comités est laissée à l'appréciation du juge dans chaque cas d'espèce.

Pendant un délai de 120 jours, qui peut cependant être prorogé plusieurs fois et sans limitation de durée par le tribunal, seul le débiteur est compétent pour établir un projet de plan. Ce délai est cependant ramené à 100 jours pour les entreprises dont les dettes sont inférieures à 2 000 000 dollars. À l'issue d'un délai de 180 jours, les créanciers, les actionnaires ou l'administrateur se voient reconnaître la possibilité de présenter leur propre projet.

Le code fédéral américain détermine précisément le contenu du plan de réorganisation. Ce dernier doit être accompagné d'un document d'information présentant les conditions de gestion de l'entreprise lors de l'ouverture de la procédure, la valeur des actifs du débiteur, les mesures prises par le débiteur lors de l'ouverture, ainsi qu'un bilan prévisionnel de l'activité de l'entreprise.

Ce plan doit, en principe, être approuvé par les comités, statuant à une condition de double majorité (vote de la moitié des créanciers représentant les deux tiers des créances de chaque groupe) pour être, par la suite, arrêté par le tribunal ( US bankruptcy court ). Toutefois, les dispositions du chapitre 11 offrent au tribunal la possibilité d'arrêter ce plan lorsque l'un des comités au moins a accepté le plan, et s'il lui apparaît que les droits des créanciers sont suffisamment préservés par le plan et que ce dernier permet le redressement de l'entreprise. Lorsque le plan est arrêté par le tribunal, son exécution s'impose au débiteur.

La procédure du chapitre 11 peut être convertie, à tout moment, en une procédure de liquidation chapter 7 ») dont l'objectif est d'organiser la cessation d'activité de l'entreprise et le désintéressement de ses créanciers. Cette conversion intervient en particulier s'il s'avère que le redressement de l'entreprise n'est pas raisonnablement possible ou si le débiteur n'est pas en mesure de présenter un plan de redressement susceptible d'être approuvé par ses créanciers et par le tribunal. Elle peut également sanctionner l'inexécution par le débiteur des termes du plan de réorganisation.

Annexe V - Les principaux éléments de « l'amendement ESUG » en droit allemand

1/ Le comité provisoire des créanciers

La nouvelle loi implique davantage les créanciers tout au long de la procédure. Cela commence donc par la toute première phase, en réalité antérieure à la véritable ouverture de la procédure. Durant cette période, longue en règle générale d'environ trois mois, située entre le dépôt de la demande d'ouverture et l'ouverture elle-même, un administrateur provisoire est habituellement nommé. Il examine notamment la situation au regard de l'opportunité ou non d'ouvrir une procédure au vu de la situation financière de l'entreprise. Le tribunal tranche d'après son rapport.

En pratique, cet administrateur provisoire sera généralement désigné comme administrateur judiciaire dans le jugement d'ouverture. Les créanciers pourront désormais influencer fortement la désignation de cet administrateur. La loi crée en effet une nouvelle institution, le comité provisoire des créanciers, dont la mise en place sera facultative dans la majorité des procédures, mais obligatoire dans les plus importantes économiquement. Ce comité pourra ainsi jouer un rôle clé dans la désignation de l'administrateur provisoire, et même, en cas d'unanimité, imposer son nom au tribunal.

2/ Le droit des dirigeants à rester en place

Si l'on se place à présent du côté des dirigeants en place, il faut souligner la grande méfiance dont font preuve tant le tribunal que les créanciers à l'égard du fait que les personnes, considérées comme responsables des difficultés économiques, demeurent à la tête de l'entreprise. Il n'est pas étonnant, dès lors, que le principe fut consacré du transfert des pouvoirs au profit de l'administrateur. Désormais, la loi inverse le principe. Tandis que jusqu'à présent, le doute jouait en défaveur des dirigeants, le tribunal devra désormais faire droit à la demande de ceux-ci de rester en place, sauf à ce qu'il soit démontré que cette demande est manifestement préjudiciable aux créanciers.

3/ La procédure du « bouclier de protection »

En outre, à défaut d'avoir franchi le pas consistant à introduire des procédures amiables préventives comme celles connues en France, le législateur allemand a innové en créant une procédure dite du « bouclier de protection ». Grâce à ce mécanisme, les dirigeants pourront désormais demander au tribunal l'ouverture d'une procédure au cours de laquelle ils restent aux commandes de l'entreprise, tout en préparant un plan en accord avec les créanciers. Principale condition : cette demande spécifique devra être formulée avant que ne survienne l'état de cessation de paiement. Et grande nouveauté : le débiteur pourra choisir l'administrateur provisoire chargé de sa surveillance pendant la gestion directe.

4/ Les outils de conversion des créances en capital

Dans la procédure de droit commun, les chances de recouvrement de leurs créances pour les créanciers sont en règle générale bien maigres. La procédure du plan d'insolvabilité vise précisément à améliorer ces perspectives. Pourtant, ce mécanisme n'a été jusqu'à présent que très peu utilisé. L'un des objectifs poursuivis par le législateur est de favoriser le recours aux restructurations négociées, et de convaincre les créanciers de s'impliquer dans la procédure collective, car ils peuvent y trouver un intérêt.

La solution qui permet aux créanciers de prendre part au sort économique de l'entreprise est de procéder à une conversion de leurs créances en parts ou actions de la société. Le législateur allemand n'est pas allé jusqu'à mettre en place un mécanisme de conversion forcée contre la volonté des créanciers eux-mêmes, mais renforce les possibilités d'utilisation ce mécanisme de conversion.

Aussi, la réforme remanie le mécanisme du debt equity swap , la conversion de créances en capitaux, qui était déjà envisagé par les anciens textes. Dorénavant, cette transformation peut s'opérer sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'accord des associés évincés. Cet obstacle étant levé, la voie est ouverte à un développement de cet outil de restructuration.

Concrètement, dans le cadre d'un debt equity swap , les créanciers apportent leurs créances sous forme d'apports en nature et reçoivent en échange des parts ou actions nouvelles. Ils peuvent aussi acquérir directement des parts d'associés évincés. Le prix payé pour l'acquisition de ces titres est alors une remise de dettes.

Ces créanciers devenus associés sont donc impliqués dans le destin de l'entreprise et peuvent bénéficier des bons résultats économiques futurs de celle-ci ainsi que de l'augmentation de valeur des titres reçus. En pratique, les créanciers qui ne souhaitent pas s'engager autant dans l'avenir de l'entreprise débitrice ont la possibilité de revendre au préalable leurs créances à des investisseurs.

5/ Les avantages offerts aux repreneurs d'entreprises en difficulté

Par ses innovations, la réforme encourage ainsi les alternatives à la liquidation, qui reste la voie la plus empruntée. À l'avenir, l'on pourrait donc observer une augmentation du nombre d'entreprises en redressement à la recherche de nouveaux investisseurs ou de repreneurs.

Ce sont donc autant d'opportunités nouvelles qui pourraient se présenter aux investisseurs. S'il faut reconnaître le risque supplémentaire inhérent à une telle opération, il faut également mettre en évidence les avantages spécifiques offerts à celui qui investit dans une entreprise en crise.

D'abord, le prix réduit constitue bien entendu un facteur d'attractivité incontestable. Aussi, il n'y a pas de besoin de cash dans la mesure où la créance est convertie. Ensuite, le droit allemand prévoit que le repreneur d'une société défaillante n'engage pas sa responsabilité à l'égard des dettes antérieures de la société. Ensuite, le droit fiscal écarte lui aussi la responsabilité du repreneur pour dettes fiscales de la société redressée. Enfin, il existe des mécanismes pour négocier une séparation de certains salariés.

Source : « La réforme du code allemand de l'insolvabilité et ses opportunités »,

Patrick Ehret et RonanDugué, www.lemoci.com , 29 mars 2012

Annexe VI - Le Code des relations banques TPE/PME (11 mai 2006)

ARTICLE 1er

Périmètre et objectifs

PÉRIMÈTRE

Par TPE/PME il faut entendre les entreprises personnes morales et les entrepreneurs individuels (personnes physiques ou personnes morales), exerçant une activité industrielle, agricole ou commerciale qui emploient moins de 250 salariés, et dont le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions d'euros ou le total du bilan inférieur à 43 millions d'euros. Ce code s'applique également aux TPE/PME et aux entreprises en création établies en France en relation avec des banques opérant en France. Par souci de simplification, ces diverses entités sont appelées TPE/PME dans le présent document. En revanche, le présent code ne s'applique pas aux professionnels libéraux membres d'un ordre professionnel ainsi qu'aux associations et sociétés immobilières ou patrimoniales. Par banque, il faut entendre une entreprise agréée par les autorités françaises et exerçant ses activités sur le territoire français, dont la tâche consiste à recevoir des fonds du public, à octroyer des crédits, et à gérer des moyens de paiement.

OBJECTIFS

Le présent code a pour objectif de favoriser l'esprit d'entreprise et de contribuer à la promotion de bonnes relations entre les banques et les TPE/PME, en renforçant la compréhension réciproque des rôles et responsabilités de chacun et en contribuant à la promotion des meilleures pratiques. Le respect par les banques et les TPE/PME des engagements qui y sont inclus assurera la qualité des relations futures entre les deux parties. Les TPE/PME apportent une contribution majeure à la croissance économique et au développement de l'emploi ; l'accès à des financements et à des services bancaires adaptés conditionne la réussite de leurs projets et leur pérennité. Dans ce contexte, les banques françaises entendent, seules ou avec le concours d'institutions spécialisées, apporter des services et/ou financements aux TPE/PME qui permettent notamment de soutenir la création et le développement des entreprises, l'emploi et le financement de l'innovation.

ARTICLE 2

Soutenir l'esprit d'entreprise en favorisant la création ou la reprise d'entreprises

La profession bancaire s'engage à faciliter la bancarisation et à améliorer l'accès des créateurs et repreneurs d'entreprises aux services bancaires et/ou financements nécessaires à leur installation et à leur développement. Dans ce cadre, la banque s'engage à :

Nommer un responsable création-reprise d'entreprise dans chaque région ou chaque caisse régionale.

Fournir à chacun de ces responsables création-reprise un dossier décrivant les principaux dispositifs publics de soutien à la création-reprise ainsi que la localisation et l'activité des points d'accueil des réseaux à la création d'entreprise de sa circonscription. Cependant, la banque demeure libre de travailler avec les réseaux d'accompagnement de son choix.

Engager des actions de formation en direction des chargés de clientèle professionnelle afin de les sensibiliser à l'accueil des porteurs de projet. Plus précisément, la banque veillera notamment à :

- s'assurer que les porteurs de projet ont eu connaissance des réseaux d'accompagnement, et les orienter, le cas échéant, vers les réseaux présents sur le plan local ;

- accueillir tous les porteurs de projet présentés par les réseaux d'accompagnement avec lesquels la banque a noué des relations de partenariat ;

- identifier un chargé de clientèle professionnel pour chaque porteur de projet ;

- définir un délai de réponse en accord avec le créateur-repreneur tenant compte de l'état d'avancement de son projet ;

- préserver la confidentialité des projets ;

- s'assurer que les réseaux d'accompagnement préalablement sollicités par le porteur de projet sont informés du suivi des dossiers et de l'évolution de l'activité ;

assurer une veille permanente quant à la qualité du service rendu et diffuser les meilleures pratiques au sein du réseau.

ARTICLE 3

Droit au compte

L'ouverture d'un compte est le point de départ de la relation entre la banque et son client. Elle résulte d'une volonté partagée de collaboration dans la durée. La banque peut être amenée à ne pas donner suite à une demande. Si tel est le cas, la banque s'engage à formaliser le refus d'ouverture par une lettre gratuite expliquant la démarche à suivre par la TPE/PME pour bénéficier du «droit au compte» défini à l'article L 312-1 du Code monétaire et financier.

ARTICLE 4

Fonctionnement du compte : rôle du chargé de clientèle

Un chargé de clientèle est désigné par la banque pour remplir le rôle de premier interlocuteur dans la relation de la TPE/PME avec la banque et plus généralement expliquer le fonctionnement de la banque. En fonction de l'organisation interne de chaque banque, et des cibles de clientèle qu'elle privilégie, le chargé de clientièle est situé dans l'agence ou le centre d'affaires qui réalise les opérations courantes faites par la TPE/PME. Il peut être étranger au processus hiérarchique de décision en matière d'octroi de crédit, fréquemment confiée à un comité de crédit. En revanche, c'est à lui que la TPE/PME s'adresse pour le suivi au quotidien du fonctionnement du compte. Dans ce cadre, il fournit à son client toutes explications utiles sur les délais de remises ou encaissements en fonction des conditions applicables au compte ou les produits simples de placements de trésorerie etc.

ARTICLE 5

Transparence, dialogue et règles de déontologie

Un dialogue ouvert est essentiel au développement d'une relation solide, durable et équilibrée. La banque informe clairement la TPE/PME des conditions qui régissent leurs relations. Parallèlement, la TPE/PME communique régulièrement à la banque les informations nécessaires au suivi de la vie de l'entreprise. La TPE/PME, doit ainsi donner des éléments d'appréciation significatifs de sa situation au moins une fois par an (documents comptables, perspectives d'activités etc.). A cet égard la banque, doit préciser les informations dont elle a besoin. Elle doit également être à l'écoute des préoccupations de la TPE/PME et lui donner les principaux prix des services adéquats figurant dans les plaquettes tarifaires, de manière à ce que la TPE/PME puisse choisir ce qui correspond le mieux à ses besoins.

CONFIDENTIALITÉ

Sauf dans les cas prévus dans la loi, la banque est tenue au secret professionnel dans le traitement des informations relatives au client.

LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT, LE TERRORISME ET LES ACTIVITÉS CRIMINELLES

La banque participe à la lutte contre le blanchiment, le financement du terrorisme, les activités criminelles et les infractions aux intérêts économiques du pays y compris la fraude fiscale. En application de la réglementation en vigueur, elle est tenue d'exercer une vigilance constante sur les opérations que réalisent les clients pour tenter de détecter les opérations suspectes. Elle peut être amenée, en conséquence, à leur demander des explications sur une opération dont elle ne perçoit pas clairement la finalité, et à procéder, en cas de soupçon, à une déclaration à TRACFIN (Organisme de Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins dépendant du Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie).

ABSENCE DE DISCRIMINATION

La banque respecte la législation applicable, les règles internes de conformité et l'éthique professionnelle, notamment en ce qui concerne l'absence de discrimination selon l'origine ethnique, le sexe, la religion ou la nationalité.

ARTICLE 6

L'octroi de crédit

La banque demeure libre, en fonction de sa politique commerciale et de sa politique de risques, d'accepter ou de refuser toute demande de crédit qui lui serait faite.

TRANSPARENCE DU PROCESSUS

Pour permettre à la banque de procéder à l'étude d'une demande de crédit, la TPE/PME lui fournit toutes les informations pertinentes dans le cadre du dossier de crédit (éléments prévisionnels tant économiques que financiers, comptes annuels, situation financière actuelle, engagements éventuels vis-à-vis d'autres banques ou de tiers, garanties qu'elle peut proposer...). La banque vérifie, préalablement à la procédure d'examen du dossier de crédit, de quel type de données et/ou d'informations elle a besoin et informe la TPE/PME des éléments susceptibles d'influer sur sa décision. La banque lui fait alors part de ses premières remarques sur sa demande. La possibilité est donnée à la TPE/PME de fournir des informations et explications complémentaires. Le futur ratio de solvabilité bancaire et les nouvelles normes comptables ne seront pas sans conséquences sur l'accès au crédit de la TPE/PME et ses conditions tarifaires. La banque va en effet devoir mettre en place de nouveaux outils de gestion du risque. Le dialogue entre le chef d'entreprise et son chargé de clientèle devra être renforcé. La TPE/PME devra également être encore plus attentive aux indicateurs susceptibles d'influencer sa notation et sa cotation par la Banque de France. Les établissements de crédit doivent, sur requête du client, expliquer leurs décisions en matière de notation aux petites et moyennes entreprises et autres sociétés qui ont sollicité un crédit. Cette explication doit être fournie par écrit si la société le demande expressément. La facturation de cette prestation doit être proportionnée au montant du prêt sollicité.

DÉLAI DE RÉPONSE

La banque évite tout retard dans la communication d'une décision de crédit à la TPE/PME. Le délai d'instruction dépend de la complexité de la demande de crédit et du type d'organisation des instances de délibération et de décision propres à chaque établissement bancaire. Parallèlement, le délai de réponse sera d'autant plus court que la TPE/PME aura remis en temps utile un dossier complet.

TRANSPARENCE DES CONDITIONS

Préalablement à la conclusion d'une convention de crédit, la banque communique de façon claire à la TPE/PME toutes les informations disponibles et détaillées sur l'ensemble des conditions relatives au crédit demandé. La TPE/PME est informée de toute modification importante susceptible d'y être apportée avant la signature, compte tenu des évolutions économiques, financières et réglementaires. La TPE/PME informe la banque de toute évolution importante touchant sa situation et susceptible d'avoir un impact sur leur relation. Le dialogue entre la banque et la TPE/PME est d'autant plus indispensable en cas de dégradation de la situation de cette dernière. Dans ce cas la TPE/PME s'engage à en informer la banque sans délai. La banque en discute ouvertement avec la TPE/PME afin d'examiner les différentes options possibles. La banque conserve cependant la possibilité de recourir aux différentes mesures protectrices de ses droits.

ARTICLE 7

Evaluation du code au sein de la FBF

Une instance professionnelle recueille au sein de la Fédération Bancaire Française les difficultés d'application et d'interprétation des engagements de procédure figurant dans le code banque TPE/PME étant entendu qu'en aucune manière cette instance n'a pour but de constituer une structure d'appel statuant au fond. Cette instance professionnelle s'assure de la qualité du dialogue qui s'est instauré entre les banques et les TPE/PME, de la mise en oeuvre effective du présent code et du respect des pratiques qui y sont décrites. A cet effet, elle recueille de la part des TPE/PME les observations sur les difficultés rencontrées dans l'application du code qui n'ont pas pu trouver de solutions internes à l'établissement.

ARTICLE 8

Processus de révision

L'instance professionnelle prévue à l'article 7 est également chargée de recevoir les informations relatives au perfectionnement du code. A cet effet, elle recueille les observations des TPE/PME et des banques sur ses dysfonctionnements ou imperfections et propose des améliorations. Chaque année, les commissions ou comités concernés de la FBF débattent de l'application effective du code par tous les réseaux, de son évaluation, et se concertent en vue des améliorations éventuelles à y introduire.

ARTICLE 9

Entrée en vigueur et diffusion du code

Le présent code de conduite est transmis par la FBF aux organisations professionnelles représentant les TPE/PME, aux réseaux d'accompagnements et diffusé par les banques auprès des clients concernés au travers de leurs agences ou centres d'affaires spécialisés.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

4 décembre 2017 :

MEDEF

M. Thibault LAXANDE, Vice-président Entrepreneuriat et Croissance

M. François GONORD, Rapporteur de la Commission Croissance des TPE et PME

M. Jules GUILLAUD, Chargé de mission à la Direction des affaires publiques

7 décembre 2017 :

Thevenot et Perdereau Cabinet judiciaire

M. Christophe THEVENOT, Administrateur judiciaire

M. Christophe BASSE, Mandataire judiciaire

Droit et Croissance

Mme Sophie VERMEILLE, Fondatrice et présidente de Droit et Croissance, avocate en corporate et restructuring à la Cour à Paris, spécialisée en économie de la défaillance

11 décembre 2017 :

METI (Mouvement des entreprises de taille intermédiaire)

M. Alexandre MONTAY, Délégué général

M. Guillaume LIDON, Responsable des relations institutionnelles

12 décembre 2017 :

Conseil national des barreaux

Mme Leila HAMZAOUI, Présidente de la commission Droit et entreprise

M. Massimo BUCALOSSI, Vice-Président de la commission Nouvelles Technologies

Mme Valentine COUDERT, Vice-présidente de la Commission Prospective

M. Philippe ROCHMANN, Expert de la commission Droit et entreprise

CPME (Confédération des PME)

Mme Bénédicte CARON, Vice-présidente en charge des Affaires économiques

M. Lionel VIGNAUD, Directeur des Affaires économiques

15 décembre 2017 :

AFIC (Association Française des Investisseurs pour la Croissance)

M. Olivier MILLET, Patron de l'AFIC et patron du Fonds de capital investissement Eurazeo PME

19 décembre 2017 :

Cabinet Ferré

M. Pascal FERRÉ, Expertise comptable, audit légal et conseil PME TPE

20 décembre 2017 :

U2P (Union des entreprises de proximité)

M. Alain GRISET, Président

M. Pierre BURBAN, Secrétaire général

15 janvier 2018 :

Ministère de l'Économie et des Finances

Mme Magali VALENTE, Conseillère parlementaire et fiscalité au Cabinet du Ministre de l'Économie et des Finances

M. Fabrice PESIN, Médiateur national du crédit

16 janvier 2018 :

Euronext

M. Eric FOREST, PDG Euronext France

M. Anthony ATTIA, PDG Euronext Paris

17 janvier 2018 :

Clifford Chance

Maître Reinhard DAMMANN, Avocat, droit de l'insolvabilité

Association 60 000 Rebonds

M. Guillaume MULLIEZ, Président

24 janvier 2018 :

Union des autoentrepreneurs

M. François HUREL, Fondateur et président

30 janvier 2018 :

Institut de recherche juridique de la Sorbonne

M. Michel MENJUCQ, Co-directeur du département Sorbonne-affaires, droit des entreprises en difficulté, co-directeur de la Revue des procédures collectives

31 janvier 2018 :

Ministre de l'Économie et des Finances

M. Bertrand WALCKENAER, Directeur du Cabinet de Benjamin GRIVEAUX, Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Économie et des Finances

M. Bertrand DUMONT, Directeur-adjoint du cabinet de Bruno Lemaire

M. Malo CARTON, Conseiller PME / artisanat / commerce au cabinet de Benjamin GRIVEAUX

6 février 2018 :

FORMALEX/MEDIALEX

M. Geoffroy COURME, Gérant

14 février 2018 :

Conférence Générale des Juges Consulaires de France

M. Georges RICHELME, président de la Conférence

M. Xavier AUBRY, Président du Tribunal de commerce de Versailles

M. Eric FEDLMANN, Président du Tribunal de commerce de Lille métropole

Réseau Entreprendre

M. Gérard LESEUR, Président

Mme Caroline SANTANER, Directrice des relations Extérieures

Croissance Plus

M. Jean-Baptiste DANET, Président

M. Jérémie JEAUSSERAND, Membre du comité directeur

Mme Julie TOROSSIAN, Directrice des affaires publiques

20 février 2018 :

Institut de la Protection Sociale (IPS)

M. Bruno CHRETIEN, Président

M. Guy BONNET, Expert épargne salariale

M. Serge ANOUCHIAN, Président de My Fides , Ingénierie patrimoniale du chef d'entreprise

21 février 2018 :

Cercle d'Outre-Manche

M. Philippe CHALON, Secrétaire général

American Chamber of Commerce

M. Jérémie GALLON, Managing Director

Mme Mathilde CLAUSER, Director of Public Affairs and Government Relations

6 mars 2018 :

Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce

Maître Sophie JONVAL, Présidente

M. Jean-Marc BAHANS, Vice-Président

M. Serge SUPERCHI, Trésorier

Mme Karla AMAN, Chargée de Mission

MiddleNext

Mme Caroline WEBER, Directrice générale

8 mars 2018 :

Association Nationale des Sociétés par Actions (ANSA)

Mme Muriel de SZILBEREKY, Présidente

Mme Isabelle TREMEAU, Secrétaire générale

Cabinet FHB

Maître Hélène BOURBOULOUX, Administratrice judiciaire

14 mars 2018 :

Union nationale des associations agréées

M. Béchir CHEBBAH, Président

22 mars 2018 :

Association française de normalisation (AFNOR)

M. Olivier PEYRAT, Président

27 mars 2018 :

Centre d'Information sur la Prévention des difficultés des entreprises

M. William NAHUM, Président

IF Research Wallix

M. Jean-Noël de GALZAIN, Fondateur et CEO

28 mars 2018 :

Fédération française de l'Assurance (FFA)

M. Bernard SPITZ, Président

Mme Arielle TEXIER, Affaires publiques et Communication

5 avril 2018 :

Ministère de la Justice

Mme Pauline COMPAGNIE, Sous-directrice du droit économique

M. Julien ROSIER, chargé de mission

Mme Stéphanie ROBIN-RACHEL, chef de bureau du droit commercial général

M. Antoine CHABERT, chef du bureau du droit des sociétés


* 1 5 ème vague du sondage IPSOS « fractures françaises », décembre 2017.

* 2 « La nouvelle grammaire du succès. La transformation numérique de l'économie française », Philippe Lemoine, Rapport au gouvernement du 7 novembre 2014.

* 3 « Les créations d'entreprise en 2017 », INSEE Première, n° 1685, janvier 2018.

* 4 INSEE, informations rapides, n° 9, 16 janvier 2018.

* 5 Annexe au projet de loi de finances pour 2018 : effort financier de l'État en faveur des PME.

* 6 « La French Tech à l'heure de ses premiers craquements » Guillaume Bregeras , Les Échos, 07 mars 2018.

* 7 Les Échos, 5 mars 2018.

* 8 Le Doing Business examine le cadre réglementaire de 190 économies à travers les différentes étapes de la vie des petites et moyennes entreprises implantées dans les plus grandes villes de leurs pays respectifs à travers 11 domaines regroupant 36 indicateurs. La démarche consiste à analyser les cadres réglementaires et à interroger des experts praticiens (juristes, notaires, experts conseils, comptables, avocats, etc.) en s'appuyant sur des scénarios types assortis d'hypothèses spécifiques. Les quatre sources d'information principales sont les cadres législatifs et réglementaires nationaux, les correspondants Doing Business, les administrations publiques et le personnel de la Banque mondiale.

* 9 Synthèse du 25 octobre 2016.

* 10 Sur ce sujet voir Moderniser la transmission d'entreprise en France : une urgence pour l'emploi dans nos territoires , Rapport d'information de MM. Claude Nougein et Michel Vaspart, fait au nom de la Délégation aux entreprises n° 440 (2016-2017) - 23 février 2017.

* 11 Synthèse Business France du 2 novembre 2017.

* 12 « Global Start-up Ecosystem Report 2017 », Start-up Genome.

* 13 Classement de la Consumer Technology Association.

* 14 « Tech funding trends in France. A comprehensive, data-driven look at emerging trends, investments, and active investors in France » Q2 2017 Trends, CB Insights.

* 15 L'expression de « colbertisme high-tech » a été créée par l'économiste Élie Cohen , qui en a fait le titre, en 1992 d'un de ses ouvrages, pour désigner l'association de l'État et des industriels dans de "grands projets" technologiques qui parfois se finissent en désastres économiques. À l'ère du numérique, ce colbertisme "high tech" ressuscite une grande tradition d'intervention industrielle au service de la grandeur de la France.

* 16 Le projet de loi de finances de 2013 proposait une augmentation du taux de la taxe sur les plus-values de cession de parts d'entreprise jusqu'au taux marginal de 60,5 %. Dans une tribune retentissante, Jean-David Chamboredon se fait la voix de l'écosystème et dénonce un projet qui tient du « dogme anticapitaliste », du « brisage de rêve », de la « démotivation quasi sadique ». En quelques jours, la démarche est suivie par des milliers de membres de l'écosystème français mais aussi d'entrepreneurs internationaux. Lors des premières assises de l'entrepreneuriat, fin 2013, le Président de la République François Hollande annonce un allégement de la pression fiscale sur les plus-values de cession.

* 17 Qui facilite l'obtention et les délais de délivrance d'un titre de séjour pour certaines populations tels les fondateurs étrangers de start-up, des investisseurs en capital-risque ou des talents étrangers recrutés par une entreprise labellisée.

* 18 Qui vise à attirer des talents étrangers, sous forme d'un concours, et ouvre droit pour les sélectionnés à des financements, des places en incubateur, une assistance à l'installation ou encore des aides pour les procédures administratives de titres de séjour, d'assurances, de sécurité sociale.

* 19 Qui permet aux entreprises labellisées de bénéficier de politiques d'accompagnement personnalisées des services de l'État.

* 20 Doté d'une capacité d'investissement en fonds propres ou quasi-fonds propres de 200 millions d'euros, pour favoriser le développement des accélérateurs de start-ups privés en France, le fonds est géré par Bpifrance, dans le cadre du Programme d'Investissements d'Avenir.

* 21 Qui vise à promouvoir l'entrepreneuriat dans les quartiers « politique de la ville », des étudiants boursiers ou bénéficiaires de minimas sociaux.

* 22 Première formation en informatique entièrement gratuite, ouverte à tous et accessible aux 18-30 ans, qui fonde sa pédagogie sur le peer-to-peer learning : un fonctionnement participatif qui permet aux étudiants de libérer toute leur créativité grâce à l'apprentissage par projets.

* 23 Start-up valorisée à plus de un milliard de dollars.

* 24 https://medium.com/france-digitale/et-si-la-frenchtech-pivotait-1eeb0e298d0a

* 25 « Mounir Mahjoubi enterre l'idée d'une French Tech indépendante », Les Echos.fr, 30 mars 2018.

* 26 Enquête réalisée par TMO pour l'Agence France Entrepreneur avec la Fondation d'entreprise MMA des Entrepreneurs du futur et Pôle emploi.

* 27 « L'entrepreneuriat, faits et chiffres », novembre 2017.

* 28 « Les Français et l'entreprenariat » enquête Opinion Way d'avril 2017 réalisée pour le compte de BNP Paribas.

* 29 Simplifier efficacement pour libérer les entreprises , Rapport d'information de Mme Élisabeth Lamure et M. Olivier Cadic, fait au nom de la Délégation aux entreprises n° 433 (2016-2017) - 20 février 2017.

* 30 Des guichets de ce type existent dans toute l'Europe et sont fédérés au sein du projet « Eugo » de la Commission européenne.

* 31 Les Chambres de commerce et d'industrie (CCI) - www.cci.fr

les Chambres d'agriculture - www.chambres-agriculture.fr

les Chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) - www.artisanat.fr

les Urssaf - www.Urssaf.fr

les Greffiers des tribunaux de commerce - www.cngtc.fr

la Chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) - www.cnba-transportfluvial.fr

* 32 L'entreprise, objet d'intérêt collectif, rapport de Mme Nicole Notat et de M. Jean-Dominique Senard, 9 mars 2018.

* 33 Voir annexes.

* 34 « Réflexions autour du concept de petite entreprise », Arnaud Lecourt, in « La petite entreprise », actes du colloque du 10 mars 2017, Université de Pau et des Pays de l'Adour.

* 35 Soit pour une déclaration trimestrielle : le quart (1/4) du plafond de CA autorisé en micro entreprise , seuils de tolérance compris* (soit le quart de 90 300 euros HT pour un activité de vente, ou le quart de 34 900 euros HT pour des prestations de service). Pour une déclaration mensuelle : le douzième de ces montants (1/12).

Une majoration sera en plus appliquée par déclaration manquante :

- 5 % de majoration sur les cotisations à payer si vous avez opté pour une déclaration mensuelle des recettes,

- 15 % de majoration pour une déclaration trimestrielle des recettes (fréquence par défaut).

Exemple. Pour un commerçant auto-entrepreneur n'ayant pas effectué deux déclarations mensuelles au cours de l'année précédente, la base de calcul des cotisations dues pour ces 2 mois correspond à :

(2 x 7 525 euros) + [(2 x 7 525 euros) x (2 x 5 %)] = 15 050 € + 1 505 euros = 16 555 euros.

* 36 Ainsi rédigé : « L'établissement d'un statut unique de l'entreprise individuelle fait l'objet d'un rapport remis au Gouvernement et au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, élaboré par un comité chargé de préfigurer cette création et dont la composition est fixée par décret. Ce rapport précise les conditions dans lesquelles les statuts juridiques actuels, notamment de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée et de l'entreprise individuelle, peuvent être simplifiés en vue de parvenir à un statut juridique unique ».

* 37 Rapport n° 440 (2013-2014) de M. Yannick Vaugrenard , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 9 avril 2014.

* 38 L'entreprise, objet de l'intérêt collectif , 9 mars 2018.

* 39 Payer ses cotisations sociales en fonction de son chiffre d'affaires, chaque mois ou chaque trimestre selon le principe du régime micro-social , est l'une des caractéristiques du statut de micro-entrepreneur .

* 40 L'étude d'impact indiquait que les seuils visés étaient respectivement de 47 500 euros pour les professions du commerce et 19 000 euros pour les professions de services.

* 41 Article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale.

* 42 Think tank regroupant des experts financiers, juridiques et fiscaux.

* 43 À partir de données de statistiques de la Fédération nationale des centres de gestion agréés.

* 44 Cité dans « Micro-entreprise : plafonds doublés... et cotisations sociales record ! », Marianne Rey , publié le 12/12/2017 Lexpress/lentreprise.

* 45 Lors du dépôt de la déclaration d'existence, le CFE délivre au porteur de projet immédiatement et gratuitement un récépissé de dépôt de création d'entreprise (RDDCE), dès lors que le dossier d'immatriculation est complet. Le RDDCE reste valable jusqu'à la notification de l'immatriculation par le greffe, au plus tard jusqu'à un mois. Le CFE transmet ensuite la déclaration d'existence à tous les organismes destinataires : service des impôts des entreprises, Urssaf, régime social des indépendants (RSI), greffe du tribunal de commerce, Insee, Caisse régionale d'assurance maladie notamment.

* 46 Officier public et ministériel, le greffier assure - comme les greffiers des autres juridictions - les services administratifs du Tribunal, notamment l'accueil au sein de la juridiction, la tenue des registres, les mises à jour des dossiers et la conservation des minutes et archives. Toutefois, le greffe du Tribunal de commerce assume en outre la charge de la tenue du Registre du Commerce et des Sociétés, de la gestion des procédures collectives (faillites) et de la tenue du fichier des sûretés (nantissements et privilèges). Son rôle est, notamment, d'en assurer la publicité auprès de toute personne, sans qu'elle ait à justifier d'un intérêt particulier. Le greffier est un professionnel libéral au service de la justice commerciale et des acteurs du développement de la vie économique.

* 47 En application de la directive 2015/849/UE du Parlement et du Conseil européen du 20/05/2015 mise en oeuvre par l'article 139 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.

* 48 Avis n° 71 (2016-2017) de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 25 octobre 2016 sur le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie de la vie économique.

* 49 Le régime des annonces judiciaires et légales est fixé par la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955 dont l'article 2 prévoit que sont, de droit, inscrits sur la liste des journaux habilités à recevoir des annonces légales, tous les journaux d'information générale, judiciaire ou technique, inscrits à la commission paritaire des papiers de presse, dès lors :

- qu'ils ne consacrent pas à la publicité plus des deux tiers de leur surface ;

- qu'ils paraissent depuis plus de six mois au moins une fois par semaine ;

- qu'ils justifient d'une diffusion minimale ;

- et qu'ils sont publiés dans le département ou qu'ils comportent pour le département une édition au moins hebdomadaire.

* 50 Sur le fondement de l'article R.123-209 du code de commerce qui précise : « Il est institué un bulletin annexe au Journal officiel de la République française sous le titre de Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. Sont insérés dans ce bulletin les avis prévus par le présent code et par tous autres textes législatifs ou réglementaires ».

* 51 Le greffier informe les tiers de cette déclaration de confidentialité en complétant l'annonce publiée au BODACC comme suit « Les comptes annuels sont accompagnés d'une déclaration de confidentialité en application du premier ou deuxième alinéa de l'article L. 232-25 » du code de commerce. La consultation des comptes est alors limitée aux autorités judiciaires et administratives, ainsi qu'à la Banque de France.

* 52 Article 5, 1 er alinéa du décret n° 2007-1888 du 26 décembre 2007 portant approbation des nomenclatures d'activités et de produits françaises : « L'attribution par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), à des fins statistiques, d'un code caractérisant l'activité principale exercée (APE) en référence à la nomenclature d'activités ne saurait suffire à créer des droits ou des obligations en faveur ou à charge des unités concernées ».

* 53 Acronyme d'outil d'aide au diagnostic d'implantation locale.

* 54 Et du décret n° 2014-917 du 19 août 2014 relatif à la mise à disposition du public, pour un usage de réutilisation, d'informations publiques issues des bases de données de l'Institut national de la propriété industrielle.

* 55 Le contenu mis à disposition par l'INPI comprend les données non confidentielles des comptes annuels, incluant les informations relatives aux bilans, comptes de résultat, immobilisations, amortissements et provisions. Les données des comptes annuels et comptes de résultat assortis d'une déclaration de confidentialité ne figurent pas dans le flux des informations mises à disposition du public.

* 56 Rapport n° 370 (2014-2015) du 25 mars 2015 au nom de la commission spéciale sur le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, par Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet.

* 57 Dès le début de l'activité. En effet, si l'entrepreneur commence à se faire connaître auprès de ses clients avec une marque non protégée et que quelqu'un la dépose pendant ce temps, il sera contraint de changer de marque.

* 58 Cotisations sociales, TVA, CSG, impôt sur les sociétés, taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques -TICPE -, contribution sur la valeur ajoutée des entreprises - CVAE -, taxe sur les salaires et cotisation foncière des entreprises - CFE.

* 59 Notamment les précomptes effectués par les établissements financiers sur les revenus qu'ils versent aux ménages.

* 60 Taxe d'abattage, aujourd'hui abrogée.

* 61 Pour l'entrepreneur marié sous le régime de la communauté des biens.

* 62 « Les organismes de gestion agréés, 40 ans après ».

* 63 Le dispositif dit du « visa fiscal » dans l'article 10 de la loi de finances pour 2009 permet d'être dispensé de la majoration de 25 % non seulement en adhérant à un organisme agréé mais également en recourant aux services d'un professionnel de l'expertise comptable (experts-comptables libéraux ou associations de gestion et de comptabilité) autorisé à cette fin par l'administration fiscale et ayant signé avec elle une convention dans laquelle il s'engage à réaliser un certain nombre de vérifications, similaires à celles réalisées par les organismes agréés. Le visa fiscal ne concerne que les déclarations de résultats et non les déclarations de TVA.

* 64 Contribuables ayant moins de 70 000 euros de CA annuel.

* 65 Pour les entreprises à un régime réel plutôt qu'au régime micro où elles sont dispensées de TVA : la récupération de la TVA sur les achats pour celles qui investissent, exportent ou facturent leurs clients à un taux de TVA moins élevé que celui de leurs achats, la constatation de crédits d'impôt ou d'un déficit fiscal reportable sur les exercices futurs et, pour celles à l'impôt sur le revenu, l'imputation sur le revenu global du déficit lié à l'activité et la non-majoration de 25 % des revenus déclarés (à condition d'avoir adhéré à un organisme de gestion agréé) ; pour les entreprises au réel normal plutôt qu'au réel simplifié : une meilleure visibilité sur leur situation économique et financière (comptabilité complète, déclarations infra-annuelles de TVA) et la récupération au mois ou au trimestre des crédits de TVA (sous le régime réel simplifié, elles doivent attendre l'acompte semestriel pour les crédits engendrés par l'acquisition de biens constituant des immobilisations ou la déclaration annuelle pour les autres crédits).

* 66 Les « douanes ».

* 67 « Si la DGDDI continue à effectuer les contrôles d'assiette, la déclaration et le versement des sommes dues au titre de la TVA à l'importation sont effectués auprès de la DGFiP par les importateurs admis à exercer l'option. Afin d'en permettre le rapprochement avec celles portées sur les déclarations de TVA, la DGDDI communique à la DGFiP les informations relatives aux flux physiques que doivent continuer à lui déclarer les importateurs » rappelle la Cour des comptes.

* 68 La possibilité d'envoyer un formulaire papier cerfa n° 13694 est réservée aux bénéficiaires de la franchise en base ( article 293 B du CGI ).

* 69 Arrivées de marchandises communautaires sur le territoire national (une marchandise provenant d'un pays tiers est une importation).

* 70 Envoi de marchandises à partir de la France vers un pays de l'Union européenne (un envoi vers un pays situé hors de l'Union européenne est une exportation).

* 71 Rapport d'information n° 98 (2016-2017) du 2 novembre 2016 de M. Albéric de Montgolfier , fait au nom de la commission des finances, sur le projet d'instauration du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu.

* 72 É tude de l'impact, pour les entreprises, du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu :

http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/delegation/entreprise/Senat_-_Etude_impact_du_prelevement_a_la_source_28.06.2017.pdf .

* 73 Réaliser un chiffrage précis du coût supplémentaire de la mesure s'est révélé impossible en raison du manque de préparation des entreprises à la date de réalisation de cette étude. Les conclusions chiffrées de cette étude comportent donc une certaine marge d'erreur.

* 74 Rapport n°2017-m-046 Audit sur les conditions de mise en oeuvre du prélèvement à la source : http://www.igf.finances.gouv.fr/files/live/sites/igf/files/contributed/IGF%20internet/2.RapportsPublics/2017/2017-M-046.pdf

* 75 http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20171211/entr.html#toc3

* 76 A l'époque directeur des ressources humaines France et directeur des relations sociales du géant de la chimie Solvay, et ancien directeur général adjoint de Pôle emploi.

* 77 Pour une clarification du bulletin de paie

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/21072015_rapportclarification_bp.pdf

* 78 Rapport d'information n°534 (session 2014-2015), de M. Olivier Cadic et de Mme Élisabeth Lamure.

* 79 « Le rapport sur la simplification du bulletin de paie et les observations du Conseil supérieur » ; SIC, octobre 2015.

* 80 Note du 18 janvier 2018.

* 81 Le décret du 25 février 2016 précise que « le salarié doit être informé trois mois avant l'éventuelle fermeture d'un service en ligne, qu'il soit géré par l'employeur lui-même ou par un prestataire externe ».

* 82 La déclaration mensuelle des mouvements de main d'oeuvre (DMMO) est une formalité administrative que doivent accomplir les établissements d'au moins cinquante salariés des secteurs privé et public. Elle porte sur nombre de personnes salariées en début et fin de mois. Pour chaque mouvement d'entrée ou de sortie au cours du mois, il y est demandé des informations sur les personnes (sexe, âge, etc.), les caractéristiques professionnelles et celles liées au mouvement (nature de l'entrée, motif de sortie du salarié...). Ces déclarations permettent de suivre à un rythme mensuel, trimestriel et annuel les mouvements de main-d'oeuvre générés par les recrutements et les départs de ces établissements en France métropolitaine. En outre, des analyses annuelles spécifiques permettent de mieux appréhender ces phénomènes de mobilité de main-d'oeuvre.

* 83 Enquête trimestrielle statistique sur les mouvements de main-d'oeuvre obligatoire à laquelle est soumis un échantillon d'établissements de moins de 50 salariés du secteur concurrentiel marchand de France métropolitaine et des départements d'Outre-mer.

* 84 La déclaration unifiée de cotisations sociales permet de déclarer, sous une forme unifiée, les cotisations sociales obligatoires : URSSAF et assurance chômage, retraite complémentaire Agirc-Arrco et prévoyance, Congés Intempéries BTP, Pôle emploi services cinéma spectacle.

* 85 Si l'employeur a « transmis une DSN Phase 3 depuis janvier 2017 (ou décembre 2016 en décalage de paie) incluant les informations relatives aux organismes complémentaires et qu'il continue ces transmissions sur l'ensemble des mois de l'année 2017 (une relance de la part de l'Urssaf sera effectuée si tel n'est pas le cas), la substitution de la DADS-U en janvier 2018 par la DSN sera opérée, l'ensemble des conditions de remplacement ayant été remplies » (site www.dsn-info.fr ).

* 86 En outre, elle permettra aux entreprises, à l'issue de la phase 3 de son déploiement, de déclarer les cotisations relatives aux contrats collectifs de prévoyance et d'assurance complémentaire santé non seulement aux institutions de prévoyance, mais aussi aux mutuelles et aux sociétés d'assurance .

* 87 Rapport Simplifier la collecte des prélèvements versés par les entreprises .

* 88 Par un amendement déposé en commission à l'Assemblée nationale au projet de loi n° 424 du 27 novembre 2017 pour un État au service d'une société de confiance, devenu l'article 22bis.

* 89 Rapport n° 329 (2017-2018) du 22 février 2018 de Mme Pascale Gruny et M. Jean-Claude Luche.

* 90 Pour un nouveau mode de relations URSSAF / entreprises , MM. Bernard Gérard et Marc Goua.

* 91 Article 12 bis, résultant d'un amendement du rapporteur général de la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2015 de l'Assemblée nationale, M. Gérard Bapt.

* 92 Attributions effectuées depuis le 16 octobre 2007.

* 93 Ce choix est exercé par l'employeur pour la durée de l'exercice pour l'ensemble des options de souscription ou d'achat d'actions qu'il attribue ; il est irrévocable durant cette période.

* 94 À la suite des scandales financiers d' Enron et de Worldcom , la loi Sarbanes-Oxley de 2002 a renforcé le rôle du conseil d'administration et prévoit d'importantes sanctions pénales en cas de manquement avéré des administrateurs.

* 95 Fixé à 30 % depuis 2012, le taux de la contribution applicable aux distributions gratuites d'actions a été diminué à 20 % par la loi Macron du 6 août 2015. Puis, ce taux a été relevé à 30 % par la loi de finances pour 2017 pour les distributions gratuites d'actions décidées par l'assemblée générale extraordinaire à compter du 31 décembre 2016. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018 change de nouveau la donne. Elle abaisse à 20 % le taux de la contribution patronale due sur les actions distribuées gratuitement aux salariés en vertu d'une décision de l'assemblée générale extraordinaire prise à compter du 1 er janvier 2018.

* 96 Sondage réalisa par OpinionWay avec le soutien de la Fondation Le Roch Les Mousquetaires et la participation de Sage à l'occasion du 25 ème salon des Entrepreneurs.

* 97 Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales.

* 98 « Aujourd'hui, l'absence de charte graphique harmonisée de l'offre publique d'information économique sur les différents sites internet ne permet pas aux entreprises de mesurer la fiabilité de l'information trouvée. L'entreprise est donc exposée à des risques d'accès à des sites frauduleux ou à de l'information de mauvaise qualité dont l'origine n'est pas aisément identifiable. Demain, grâce à la mise en place d'une charte graphique harmonisée, intégrant les codes du service public, l'entreprise aura la garantie d'accéder à une information publique fiabilisée ».

* 99 Chiffres issus de l'enquête « La France associative en mouvement », 15 ème édition, septembre 2017.

* 100 Rapport n°  370 (2014-2015) du 25 mars 2015 au nom de la commission spéciale sur le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, par Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet.

* 101 Les régions sont devenues responsables sur leur territoire du développement économique. La région doit désormais coordonner l'action des collectivités territoriales et des acteurs publics à travers l'élaboration du Schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII), obligatoire et prescriptif. Par ailleurs, elle a la compétence exclusive pour définir des régimes d'aides et pour décider de l'octroi des aides aux entreprises dans la région.

* 102 Depuis juin 2014, il est ainsi désormais possible de répondre à un marché public simplifié sur l'une des huit principales places de marché existantes.

* 103 L'organisme détenteur de la subvention récupérera directement les informations sur l'entreprise auprès des administrations compétentes.

* 104105 Estimation 2011.

* 106 Les annonces légales représentent en effet 60 % du chiffre d'affaires de la presse judiciaire, 26 % de la presse agricole, 18 % de la presse hebdomadaire régionale mais moins de 1 % de la presse quotidienne régionale et nationale.

* 107 Rapport n°3787 du 5 octobre 2011.

* 108 La fixation des tarifs des lignes d'annonces par département conduisait à une grande disparité des prix à la ligne pour les annonceurs. En 2011, ces prix variaient entre 3,70 euros hors taxes et 5,34 euros hors taxes, selon les départements. Dans 90 départements, le prix à la ligne était inférieur à 4,57 euros hors taxes. Mais dans dix départements, dont Paris, le Nord et le Pas-de-Calais, le prix à la ligne était plus élevé, oscillant entre 4,98 euros hors taxes et 5,34 euros hors taxes.

* 109 Les membres fondateurs de cette association sont les organisations professionnelles représentatives des principaux journaux habilités à publier des annonces légales en France : Syndicat national de la presse judiciaire (SNPJ), Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR), Syndicat national de la presse agricole et rurale (SNPAR), Syndicat de la presse quotidienne départementale (SPQD), Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN), Syndicat de la presse hebdomadaire régionale (SPHR).

* 110 Le site est partenaire du portail pple.fr , site officiel d'accès aux publicités et aux informations légales des entreprises. Pple.fr permet d'accéder à toutes les données publiées par Actulégales, aux inscriptions et documents enregistrés et déposés au RCS disponibles sur Infogreffe.fr et à l'ensemble des annonces publiées dans les journaux d'annonces légales et consultables sur bodacc.fr .

* 111 Communiqué de presse du 21 novembre 2017.

* 112 « De la clarification avant toute chose », Les Echos Executives, 15 janvier 2018.

* 113 À partir du rapport Hurel En faveur d'une meilleure reconnaissance du travail indépendant , Rapport à M. Hervé Novelli, Secrétaire d'État chargé des Entreprises et du Commerce Extérieur, janvier 2008.

* 114 L'auto-entreprise après quatre ans d'existence : éléments d'évaluation et préconisations , Rapport d'information n° 696 (2012-2013), fait au nom de la commission pour le contrôle de l'application des lois, déposé le 27 juin 2013.

* 115 La loi du 11 février 1994 sur l'initiative et l'entreprise individuelle (dite loi Madelin) avait posé le principe d'une présomption de non-salariat. L'idée était de s'inscrire dans une logique de respect de la volonté des parties.

La loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail (dite loi Aubry II) a supprimé cette présomption de non-salariat.

La loi du 1 er août 2003 pour l'initiative économique a rétabli la présomption de non-salariat. La volonté de revenir au respect de la volonté des parties est clairement établie.

* 116 L'article L 8221-6 du Code du travail, dans son premier alinéa, énumère les personnes bénéficiant de cette présomption de non-salariat :

- Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des Urssaf ;

- Les personnes physiques inscrites au registre des entreprises de transport routier de personnes, qui exercent une activité de transport scolaire ou de transport à la demande ;

- Les dirigeants des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés.

* 117 Par ailleurs, l'employeur ou travailleur indépendant, qui ne s'est pas mis en conformité suite aux observations formulées lors d'un précédent contrôle (qu'elles aient, ou pas, donné lieu à un redressement), s'expose, lors du contrôle suivant, à l'application d'une majoration de 10 % sur le montant du redressement régularisant un nouveau manquement sur le même point.

* 118 Le II de l'article L 8221-6 du Code du travail pourrait préciser les personnes ou organismes habilités à agir pour contester la présomption de non-salariat.

* 119 Le travailleur économiquement dépendant : quelle protection ?, Rapport de Paul-Henri Antonmattei et Jean-Christophe Sciberras à M. le Ministre du Travail, novembre 2008.

* 120 L'entrepreneur accompagné (le « couvé ») prospecte, vend ses produits et facture ses prestations avec le numéro de SIRET de la couveuse, sans avoir besoin de s'immatriculer. Chaque porteur de projet dispose de son propre compte et utilise cet argent comme il le souhaite. La couveuse perçoit les règlements des prestations des entrepreneurs hébergés (elle prélève 10 % du CA). La couveuse dispose d'un contrat particulier visant à couvrir l'entrepreneur: le CAPE (Contrat d'appui au projet d'entreprise). Avec ce contrat, l'entrepreneur à l'essai conserve son statut antérieur et ses revenus sociaux pendant toute la durée de l'accompagnement.

* 121 Entre 15 000 et 50 000 euros, sans garanties, sans intérêts.

* 122 Certains d'entre eux se sont engagés dans le cadre d'une mission création d'entreprise « Business story » .

* 123 Le dispositif fiscal est le suivant :

• en faveur des entreprises (Art. 238 bis, CGI) : réduction d'impôt sur les bénéfices égale à 60 % du montant du don (en numéraire ou en nature) à un organisme ou une oeuvre d'intérêt général dans la limite de versements annuels de 0,5 % du chiffre d'affaires de l'entreprise. En cas d'excédent de versement, l'entreprise dispose de cinq exercices pour utiliser sa réduction d'impôt.

• en faveur des particuliers (Art. 200, CGI) : réduction d'impôt sur le revenu au taux de 66 % du montant du don à un organisme ou une oeuvre d'intérêt général dans la limite de 20 % du revenu imposable du donateur, avec report possible sur cinq ans en cas d'excédent de versement.

* 124 « Les très petites entreprises, deux millions d'unités très diverses » INSEE Focus no  24 ; 30/03/2015.

* 125 « Les micro-entrepreneurs », ACOSS-Stats, n° 252, juillet 2017.

* 126 Source : ACOSTAT, Conjoncture, n°252, juillet 2017. Au 1 er janvier 2016, les régimes du micro-social et du micro-fiscal ont fusionné sous la dénomination « micro-entrepreneur ». Le champ de cette publication porte ainsi sur les micro-entreprises soumises au régime micro-social sous-jacent au dispositif auto-entrepreneur institué en 2009 ; l'étude exclut les micro-entreprises payant leurs cotisations sociales selon le droit commun. Lorsqu'elles sont incluses, on dénombre 3,67 millions de micro-entreprises, soit 96 % du total des entreprises, qui emploient 2,4 millions de salariés en ETP (18 % du total).

* 127 INSEE Première : « Auto-entrepreneurs immatriculés en 2010 : cinq ans après, moins d'un quart sont encore actifs ».

* 128 Sarah Abdelnour, Anne Lambert : « « L'entreprise de soi », un nouveau mode de gestion politique des classes populaires ? Analyse croisée de l'accession à la propriété et de l'auto-emploi (1977-2012) », Genèses 2014/2 (n° 95).

* 129 En 2012, comme en 2011, plus de la moitié des TPE (55 %) n'a pas réalisé d'investissement. Sur quatre ans, de 2009 à 2012, 43 % des TPE non employeuses n'ont réalisé aucun investissement contre 12 % des employeuses. À l'opposé, 30 % des TPE employeuses ont investi les quatre années consécutives contre 9 % des non-employeuses.

* 130 Business Demography Statistics.

* 131 Terme introduit dans une interview dans Fortune, de décembre 2002, « Small Business: Slump ? What Slump ? », par David Birch, chercheur au sein de la société Cognetics (Massachussetts), pour décrire les entreprises ayant une croissance moyenne annualisée du nombre de salariés supérieure à 10 % l'an sur une période de trois ans et un effectif d'au moins 10 salariés en début de croissance.

* 132 Hors agriculture, banque et assurance dans l'étude « Une forte proportion des emplois créés entre 2009 et 2015 sont portés par les entreprises de taille intermédiaire », Hervé Bacheré, INSEE Références, édition 2017 - Dossier.

* 133 Définie comme une croissance de l'emploi de 10 % en moyenne annuelle sur trois années consécutives pour des entreprises comptant au moins 10 salariés  (« High-growth enterprises in the EU », EUROSTAT, 5 avril 2018).

* 134 Épargne + patrimoine professionnel + bien durables + immobilier. En 2015, 94 % des ménages disposent d'un patrimoine (Source : AMF).

* 135 Chiffres 2015, source : AMF.

* 136 Ensemble des placements financiers dont l'immobilier locatif ayant pour objectif principal de faire fructifier le capital initial.

* 137 Source de cette analyse : « Fiscalité de l'épargne financière et orientation des investissements », France Stratégie, ADEME, rapport rédigé par 2° Investing Initiative, novembre 2016.

* 138 PEA et livrets réglementés : livret A, livret bleu, livret de développement durable, livret jeune, livret d'épargne populaire, comptes et plans d'épargne logement.

* 139 Épargne salariale, FCPI, SICAV, FCP, FIP, SOFICA...

* 140 Intervention de François Villeroy de Galhau « Financement en fonds propres des entreprises en France et en zone euro : Quels besoins ? Quels outils ? Quel rôle pour la Banque de France », au Grand rendez-vous de l'investissement productif, 22 janvier 2018.

* 141 Ce fonds sera alimenté par le transfert de 1,6 milliard des 3 milliards d'euros issus des cessions d'actifs dans Engie et Renault pour ce fonds. Sont mis également à disposition de ce fonds 8,4 milliards d'euros de titres EDF (13,3 % du capital) et Thalès (25,76 %), qui restent propriété de l'État. « Au total, ces 10 milliards d'euros constituent la dotation initiale du fonds. À terme, la dotation du fonds reposera exclusivement sur des cessions d'actifs et sur des produits de privatisation. Les cessions d'actifs et les privatisations seront autorisées par la loi PACTE », Bruno Le Maire, 15 janvier 2018.

* 142 Intervention de la députée (LRM) Amélie de Montchalin, 22 janvier 2018.

* 143 Selon le site internet de présentation de cette manifestation : « A l'Assemblée, les députés ont fait évoluer la fiscalité de l'épargne. C'est maintenant à vous, professionnels de l'investissement, de prendre le relais. Forts de votre expérience, que proposez-vous à celles et ceux qui veulent entreprendre, grandir, exporter, en un mot contribuer à dynamiser notre économie ? ».

* 144 « La fin de l'ISF désespère le monde des start-up : la réforme de l'ISF supprime une niche fiscale de 500 millions au bénéfice des PME », Le Monde, 21-22 janvier 2018.

* 145 « Fiscalité de l'épargne financière et orientation des investissements », France Stratégie, ADEME, rapport rédigé par 2° Investing Initiative, novembre 2016, précitée.

* 146 Au sens de l'article L. 424-1 du code monétaire et financier et de l'article 524-1 du règlement général de l' Autorité des marchés financiers (AMF), parfois également rencontré sous l' acronyme anglais « MTFO », combinaison des termes « multilateral trading facility » (système multilatéral de négociation, repris dans la version française de la directive concernant les marchés d'instruments financiers ) et du terme « organisée ».

* 147 « Les «scale-up» sont des entreprises jeunes et extrêmement dynamiques qui ont su prouver la robustesse de leur business model. Elles ont déjà un chiffre d'affaires annuel supérieur à cinq millions d'euros, avec une croissance annuelle d'au moins 10 à 20 % sur les trois dernières années. Ces entreprises bénéficient d'une capacité d'innovation très forte. Une scale-up c'est une start-up qui a grandi très vite et qui a démontré son fort potentiel », François Bloch - Associé, Responsable du marché des entreprises de croissance chez KPMG, 4 janvier 2017.

* 148 Le listing sponsor est un intermédiaire financier spécialement dédié à l'accompagnement d'une entreprise avant son introduction ou dans le cadre du transfert des actions de la société du marché libre vers Euronext Growth. Le listing sponsor accompagne l'entreprise en la conseillant tout au long de sa présence sur ce marché. Il est également responsable du respect par l'entreprise de ses obligations d'information.

* 149 « Rapport annuel 2016 de l'Observatoire du financement des entreprises par le marché », octobre 2017. Le prochain rapport sur l'année 2017 paraîtra en juin 2018.

* 150 « Le financement des PME et des entrepreneurs 2018, tableau de bord de l'OCDE ».

* 151 On parle d'investissement privé car à la différence des titres boursiers disponibles sur des marchés financiers comme Euronext ou NYSE, les participations de l'industrie du Private Equity ne sont pas cotées et sont détenues par des fonds spécialisés dans ce type d'investissement.

* 152 « La France est le pays le plus capitaliste d'Europe », La Tribune, 22 janvier 2018.

* 153 Ex-Association française des investisseurs pour la croissance. L'association compte 308 membres actifs (31 décembre 2017) et regroupe l'ensemble des structures de capital-investissement installées en France pour assurer la promotion du capital-investissement, participer à son développement, garantir son exemplarité en fédérant l'ensemble de la profession.

* 154 Les entreprises constituant le « coeur de l'économie française » sont sélectionnées pour leur importance économique selon au moins l'un des trois critères suivants : valeur ajoutée, investissement et exportations. Pour chacun de ces critères, on identifie les 1 500 entreprises ayant réalisé les plus fortes valeurs en 2013. Certaines entreprises sont présentes dans les trois sélections, d'autres dans deux, et enfin d'autres dans une seule. Il y a ainsi 3 000 entreprises différentes (et non 4 500). Hervé Bacheré, division « Enquêtes thématiques et études transversales », INSEE, « 3 000 entreprises au coeur de l'économie française », mise à jour mars 2016.

* 155 Les entreprises de taille intermédiaire au coeur d'une nouvelle dynamique de croissance , rapport au Premier ministre de M. Bruno Retailleau, février 2010.

* 156 « Gazelles et girafes : quelles sont ces entreprises qui surperforment ? », BPCE, L'observatoire 2016.

* 157 Selon la note précitée de la BPCE, les gazelles en EBITDA disposent d'une capacité d'autofinancement plus grande et d'un taux de croissance des capitaux propres de plus de dix points supérieur à celui des autres PME. En revanche, une fois plus âgées, la structure financière des entreprises en croissance explosive en EBITDA redevient peu ou prou identique aux autres PME et ETI. Cet effet de rattrapage se traduit par un taux de croissance des capitaux propres inférieur aux autres entreprises. Gazelles et girafes conservent toutefois un écart significatif de rentabilité avec les autres PME et ETI, avec un léger avantage des gazelles et girafes en croissance sur l'EBITDA sur les gazelles en croissance sur les effectifs. En effet, pour atteindre plus vite une taille critique, ces dernières ont sacrifié une partie de leur rentabilité économique et financière, grevée par une charge du facteur travail plus lourde, même si elle est en partie compensée par une productivité par employé plus élevée que leurs consoeurs en croissance d'EBITDA.

* 158 « Start-ups : 57 licornes en Europe, la France reste à la traîne », Sylvain Rolland, La Tribune.fr, 10 novembre 2017.

* 159 « Rapport sur le financement des PME et ETI en croissance », octobre 2015.

* 160 Mid caps : capitalisation boursière comprise entre deux et dix milliards de dollars ; Small caps : capitalisation boursière comprise entre 300 millions et deux milliards de dollars.

* 161 L'activité de capital-investissement (ou private equity) se décompose en quatre segments, chacun correspondant à un stade de développement de l'entreprise : (1) le capital-risque, (2) le capital-développement, (3) le capital-transmission (dont le Leveraged Buy-Out), (4) le capital-retournement.

* 162 Également appelé venture capital, il correspond à l'investissement dans les entreprises en phase de création. Il se divise lui-même en deux sous-segments : le capital-amorçage et le capital-création.

* 163 « ETI : taille intermédiaire, gros potentiel », rapport de janvier 2018.

* 164 L'inspecteur du travail peut également, lorsque cette mesure se révèle nécessaire, imposer la mise en place de cette commission spécifique dans des entreprises ou établissements de moins de 300 salariés.

* 2 Il a donc le pouvoir de négocier, conclure et réviser les conventions et accords collectifs d'entreprise, à l'exception des accords collectifs soumis à des règles spécifiques de validité (tels que les accords sur le PSE, les protocoles d'accords préélectoraux, les accords modifiant le nombre et la composition des accords préélectoraux, les accords prévoyant un scrutin hors du temps de travail).

* 165 Article L225-102-1 du code de commerce.

* 166 Consultable sur :

http://www.igf.finances.gouv.fr/files/live/sites/igf/files/contributed/IGF%20internet/2.RapportsPublics/2016/2015-M-078.pdf

* 167 Indépendamment de cette responsabilité du dirigeant, la personne morale est également responsable.

* 168 La loi étend également l'obligation aux groupes de sociétés (pour l'ensemble des filiales françaises ou étrangères) dont la maison mère a son siège social en France et qui possèdent plus de 500 salariés et un chiffre d'affaires consolidé de plus de 100 millions d'euros.

* 169 Par ailleurs, une entreprise reconnue coupable de corruption risque en France une sanction pénale et une amende pouvant aller jusqu'à cinq millions d'euros. Les individus eux risquent jusqu'à 10 ans de prison et un million d'euros d'amende.

* 170 Effectué par Middlenext.

* 171 L'Association Nationale des Sociétés par Actions regroupe des sociétés par actions cotées ou non cotées et des cabinets d'avocats. Son action s'inscrit depuis sa création en 1930 dans le même champ de compétences : le droit des sociétés, le fonctionnement des marchés boursiers, le régime des valeurs mobilières et la fiscalité de l'actionnaire et de haut de bilan.

* 172 « L'excès d'information financière nuit-il à l'information financière ?», juin 2015.

* 173 Think tank créé au cours de l'année 2014 avec le soutien de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes.

* 174 Bien que le document de référence soit facultatif, il constitue une pratique courante pour les sociétés cotées sur Euronext Paris car il facilite les opérations de marché en permettant à l'émetteur, en cas de réalisation de ces dernières, de ne publier qu'une note d'opération et, le cas échéant, une actualisation du document de référence, pour la constitution du prospectus et d'obtenir ainsi un visa de l'AMF dans un délai plus rapide.

Le contenu « minimum » du document de référence est défini par la Directive européenne « Prospectus » de 2003 et par son règlement d'application de 2004, eux-mêmes précisés par le règlement général de l'AMF (art. 212-13 et 222-9) ainsi que dans la recommandation de l'European Securities and Markets Authority (ESMA) 2011/81. L'AMF a également publié une Position Recommandation (2009-16), constituée par le « Guide d'Élaboration des Documents de Référence ».

* 175 Prise en application du 1° et du 4° de l'article 136 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

* 176 Au sens de l'article L 123-16. Ces entités ne doivent pas dépasser, au titre du dernier exercice comptable clos et sur une base annuelle, deux des trois seuils suivants :
- total du bilan : 4 000 000 euros,

- montant net du chiffre d'affaires : 8 000 000 euros,

- nombre moyen de salariés employés au cours de l'exercice : 50.

Lorsqu'une entreprise dépasse ou cesse de dépasser deux de ces trois seuils, cette circonstance n'a d'incidence que si elle se produit pendant deux exercices consécutifs.

* 177 Rapport d'information n° 344 (2017-2018) de M. Simon Sutour , fait au nom de la commission des affaires européennes, du 8 mars 2018.

* 178 La Tribune.fr, 27 mars 2018.

* 179 Une simple requête « RGPD » sur les moteurs de recherche renvoie vers près de 2 millions de résultats.

* 180 http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52017PC0010&from=EN

* 181 « Ne pas manquer la révolution des données », Les Echos, 7 mars 2018.

* 182 La Tribune.fr, 24 mars 2018.

* 183 Groupe Gorgé est un groupe indépendant présent dans des industries de haute technologie. Les activités du Groupe s'inscrivent dans les secteurs de la sécurité et de la protection en environnements extrêmes ainsi que dans le secteur de l'impression 3D. Le Groupe emploie environ 1 700 personnes, est implanté dans huit pays et exporte directement environ 40 % de son activité.

* 184 « Simplifier ou compliquer ? » par Myriam Rousille, agrégée des facultés de droit - professeur à l'université du Maine - IRJS (Sorbonne Finance), Droit des sociétés n° 10, Octobre 2014.

* 185 Traduction du mot « Act » de l'équivalent du « Small Business Act ».

* 186 Le premier ayant trait au droit des sociétés puisqu'il s'agissait de proposer un statut de société privée européenne. Les autres points étaient relatifs aux aides d'État accordées aux PME, au taux de TVA et aux délais de paiement. D'autres mesures plus précises étaient prévues : accorder une « seconde chance » aux PME qui font l'objet d'une cessation de paiements ; faciliter leur accès au financement ; réduire leurs charges administratives ; faciliter leur constitution (réduction des délais pour créer une entreprise - maximum une semaine - et des délais pour obtenir des licences et des permis d'exploitation - maximum un mois ; institution d'un guichet unique). Ce texte européen sur les PME a fait l'objet d'un réexamen en 2011.

* 187 Rapport d'information n° 532 de Mme Alice Thourot et M. Jean-Luc Warsmann déposé en application de l'article 145 du règlement, par la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en conclusion des travaux d'une mission d'information sur les moyens de lutter contre la surtransposition des directives européennes dans le droit français.

* 188 Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi.

* 189 Voir http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20180305/entreprises.html .

* 190 En application de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008, il se rattache à la catégorie des lois de programmation. En application de l'article 34 de la Constitution, ces lois déterminent les objectifs de l'action de l'État.

* 191 Study on eGovernment and the Reduction of Administrative Burden , 2013.

* 192 Cette limitation ne serait en effet pas applicable :

-  s'il existe des indices précis et concordants de manquement à une obligation légale ou réglementaire ;

- en cas de contrôle réalisé à la demande de l'entreprise, en application du droit au contrôle ;

- aux contrôles destinés à s'assurer du respect du droit de l'Union européenne ;

- aux contrôles destinés à s'assurer du respect des règles préservant la santé publique, la sécurité des personnes et des biens et l'environnement ;

- aux contrôles résultant de l'exécution d'un contrat ;

- et aux contrôles effectués par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leurs contrôles.

* 193 Selon le rapport n°329 (2017-2018) du 22 février 2018 de nos collègues Mme Pascale GRUNY et M. Jean-Claude LUCHE en effet, « Si, dans les grandes entreprises, le rapport de gestion constitue un élément important de l'information des parties prenantes et notamment des actionnaires ou des investisseurs, cet exercice se révèle relativement lourd et inutile dans les petites entreprises, puisque les données pertinentes pour l'information des actionnaires et des tiers pourvoyeurs de fonds, présentes dans le rapport de gestion, se trouvent également dans les documents comptables, plus faciles d'accès que dans les sociétés de taille plus importante ».

* 194 Les petites entreprises concernées sont celles qui ne dépassent pas deux des trois seuils suivants :

- un total de bilan de 4 millions d'euros (avec possibilité pour les États membres de fixer un seuil supérieur dans la limite de 6 millions d'euros) ;

- un chiffre d'affaires hors taxes d'un total de huit millions d'euros (avec possibilité pour les États membres de fixer un seuil supérieur dans la limite de 12 millions d'euros) ;

- un nombre moyen de 50 salariés.

* 195 Voir en annexe.

* 196 L'ordonnance n° 2017-747 du 4 mai 2017 portant diverses mesures facilitant la prise de décision et la participation des actionnaires au sein des sociétés ; l'ordonnance n° 2017-1142 du 7 juillet 2017 portant simplification des obligations de dépôt des documents sociaux pour les sociétés établissant un document de référence ; l'ordonnance n° 2017-1162 du 12 juillet 2017 portant diverses mesures de simplification et de clarification des obligations d'information à la charge des sociétés ; l'ordonnance n° 2017-1180 du 19 juillet 2017 relative à la publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises.

* 197 Les actions de préférence ont été créées en 2004, puis réformées en 2008 et 2014, mais sans rencontrer le succès attendu. Elles restent peu utilisées, alors même que, en principe, elles sont très utiles, en permettant de donner des droits particuliers à un investisseur qui s'engage pour accompagner la croissance d'une entreprise, ou de moduler ses droits.

* 198 Association nationale des sociétés par action créée en 1930, qui regroupe plus de 400 adhérents, sociétés industrielles et commerciales, dont les sociétés cotées les plus importantes, mais également des sociétés non cotées, et des membres associés intéressés par ses travaux.

* 199 Refonder l'entreprise , Blanche Segrestin, Armand Hatchuel, Seuil, 2012.

* 200 « Simplifier ou compliquer ? » par Myriam ROUSSILLE agrégée des facultés de droit - professeur à l'université du Maine - IRJS (Sorbonne Finance), Droit des sociétés n° 10, Octobre 2014.

* 201 « Réflexions sur la simplification du droit des affaires », Benoit Lecourt, RTD Com. 2015 p. 1.

* 202 Article L.110-1, 5° et 6°.

* 203 Article L.110-2, 4°. Pour le Centre de ressources textuelles et lexicales du CNRS, ce terme est vieilli et régional (Méditerranée). Chateaubriand l'utilise en 1797 dans son Essai sur la Révolution : « Nous nolisâmes une petite barque pour Jersey, et l'on nous entassa dans la cale de cette barque ».

* 204 Article L320-1 : « Les ventes aux enchères publiques de meubles et d'effets mobiliers corporels sont régies par le présent titre. Les ventes de comestibles et d'objets de peu de valeur, à cri public, sont libres ».

* 205 Au printemps 2009, le gouvernement fédéral allemand a préparé une Loi de simplification abrogeant quelques 85 lois et ordonnances concernant la politique de l'environnement. Bien que cette diminution ait été partiellement compensée par l'adoption récente de nouvelles lois, le stock des lois fédérales a été ramené de 2 039 lois et 3 175 ordonnances à 1 728 lois et 2 659 ordonnances. Le nombre de réglementations distinctes en vigueur est tombé de 86 334 à 83 044. Les efforts de simplification ont aussi abouti à l'élimination de quelque 950 termes et concepts juridiques datant de l'époque de l'Allemagne impériale, ainsi que de règlements antérieurs à la Loi fondamentale qui sont obsolètes du point de vue de leur libellé ou sur le fond.

* 206 À compter du 1 er janvier 2022 et à l'initiative du Sénat dans la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXI e siècle.

* 207 Proposition n° 60 du rapport d'information n°495 du 4 avril 2017 au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale par la mission d'information sur le redressement de la justice. Elle est reprise aux articles 14 et 15 de la proposition de loi n°641 du 18 juillet 2017 d'orientation et de programmation pour le redressement de la justice.

* 208 « Étude de l'impact économique de la normalisation », janvier 2016.

* 209 «  Deux conceptions du contrôle fiscal : France et Royaume-Uni », note du 14 février 2013, Samuel-Frédéric Servière .

* 210 La phase 1 (janvier 2013), période initiale de la DSN, couvre le remplacement de la DMMO/EMMO ; les formulaires de radiation pour les institutions de prévoyance, les mutuelles et les sociétés d'assurances ; les attestations de salaire pour le versement des indemnités journalières en cas de maladie, maternité et paternité ; et enfin les attestations d'employeur destinées à Pôle Emploi. La phase 1 a pris fin le 1 er janvier 2016.

La phase 2 (mars 2015) couvre le périmètre de la phase 1 auquel s'ajoute le volet URSSAF de la DUCS et les attestations arrêt de travail AT/MP. Elle a pris fin le 1 er janvier 2017, au moment de la généralisation de la DSN phase 3 à toutes les entreprises.

La phase 3 (septembre 2016) intègre le périmètre des phases 1 et 2, les autres DUCS (Agirc/Arrco, MSA, prévoyance) et marque le début de stockage des informations de substitution de la DADS-U.

* 211 Rapport de la Cour des comptes : Simplifier la collecte des prélèvements versés par les entreprises , juillet 2016.

* 212 Norme d'échange optimisée des déclarations sociales.

* 213 Elle aurait un rendement de 13,481 milliards d'euros en 2018.

* 214 Les redevables de cette taxe la liquident dans une déclaration annuelle unique, en régularisant les versements provisionnels effectués selon une périodicité trimestrielle (si la taxe acquittée l'année précédente dépasse 4 000 euros) ou mensuelle (si elle excède 10 000 euros). En outre, ils doivent en déclarer les bases de manière nominative dans la DADS annuelle, puis dans la DSN mensuelle à compter de sa phase 3 à des fins de contrôle.

* 215 Transposée par l'ordonnance n° 2015-900 et le décret n° 2015-903 du 23 juillet 2015 relatifs aux obligations comptables des commerçants. Les nouvelles mesures relatives aux comptes annuels établis en règles françaises, pour les exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2016, ont été précisées par le règlement de l'Autorité des normes comptables (ANC) n° 2015-06 publié le 8 décembre 2015.

* 216 Cité par Les Échos, 8 mars 2018.

* 217 Jean-Eudes du Mesnil du Buisson, secrétaire général de la CPME. Audition du 6 décembre 2017 citée dans le rapport n° 194 (2017-2018) de M. Alain Milon , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 20 décembre 201, sur le projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

* 218 Insee Analyses n° 2, décembre 2011.

* 219 Ifo Center for international institutional comparisons and migration research, « Effet sur l'emploi des seuils sociaux en France et en Allemagne », 28 mai 2015. L'étude est consultable sur : https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/delegation/entreprise/Effet-emploi-seuils_sociaux_Ifo_Francais-V2.pdf

* 220 L'étude « INSEE Analyse » de décembre 2011 qui avait conclu à un effet limité des seuils sur l'emploi se fondait sur des données de 2005-2006. Cette étude a été contestée mais aucune autre n'a été depuis réalisée.

* 221 Luis Garicano, Claire Lelarge, John Van Reenen, «Firm size distorsions and Productivity distribution : Evidence from France » , American Economic Review 2016, 106(11) : 3439-3479. http://economics.mit.edu/files/12321

* 222 Loi n° 2015-990 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques du 6 août 2015.

* 223 Article 87 A (nouveau) (art. L. 2312-1 à L. 2312-5, L. 2322-2 et L. 2391-1 [nouveau] du code du travail) ; rapport n° 370 (2014-2015) de Mmes Catherine Deroche , Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet , fait au nom de la commission spéciale, déposé le 25 mars 2015 sur le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 224 Loi n° 2015-994 relative au dialogue social et à l'emploi du 17 août 2015.

* 225 Article 8 A (nouveau). Rapport n° 501 (2014-2015) de Mme Catherine Procaccia , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 10 juin 2015, sur le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi.

* 226 « Pour une politique des seuils incitant à la croissance des entreprises » ; Rapport présenté par MM. Pierre Deschamps et Éric Hayat au nom de la Commission économique, fiscale et financière, de la Commission de l'emploi et des affaires sociales, de la Commission du droit de l'entreprise et de la Commission du commerce et des échanges et adopté à l'Assemblée générale du 24 janvier 2008 : « instaurer une période transitoire de 3 ans induisant l'étalement des obligations applicables afin de limiter les effets négatifs du franchissement de seuils lors de l'embauche de salariés supplémentaires ».

* 227 Le taux correspondant à dix salariés reste applicable les deux années suivant le franchissement de seuil. Puis lissage progressif : taux à 0,70 % la 3 e année, 0,90 % la 4 e année, puis 1 % la 5 e année.

* 228 Les employeurs qui atteignent ou dépassent 11 salariés en restent dispensés pendant trois ans. Puis le montant du versement est réduit de 75 %, 50 % et 25 %, respectivement chacune des trois années suivant la dernière année de dispense.

* 229 Comme le soulignait déjà en 2015 un rapport du cabinet d'études Raise et Bain & Company .

* 230 Le « corporate venture » ou « capital investissement d'entreprise » est une forme spécifique de capital-investissement. Cette méthode de financement recouvre en pratique l'investissement d'une entreprise dans une autre, telle que la prise de participation d'une grande entreprise dans une jeune PME innovante. Le « corporate venture » se distingue du capital-investissement classique où l'investissement repose in fine sur des investisseurs individuels. Il est notamment utilisé par les grandes entreprises pour favoriser l'innovation dans leur secteur d'activité ou explorer de nouveaux marchés.

* 231 Dans le classement Compass.

* 232 Start-up valorisée à plus d'un milliard de dollars.

* 233 L'étude (janvier 2017) « In Extenso Innovation Croissance » , du groupe Deloitte, sur les 566 levées de fonds réalisées en 2016.

* 234 L'Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance ( ORIAS ) est une association loi de 1901 , sous tutelle de la direction générale du Trésor . Créée en 2007, elle a pour but d'homologuer les intermédiaires en assurance, conformément à la directive 2002/92/CE du Parlement européen . ORIAS désigne également le registre administré par l'association, répertoriant les intermédiaires en France, quels que soient leurs domaines d'action, leurs produits et leurs activités.

* 235 La « scalabilité » est la capacité d'une entreprise à adapter son business model, son schéma d'entreprise, à une forte augmentation de son volume d'activité. Concrètement, c'est sa capacité à passer de la petite start-up à la multinationale. La scalabilité permet d'absorber le choc de croissance extrême que certaines start-ups connaissent. On peut la rencontrer dans tous les secteurs d'activité.

* 236 Le seed capital , ou capital d'amorçage, représente l'ensemble des fonds de départ que des investisseurs proposent afin de payer les frais préalables à une création d'entreprise. Le seed capital va donc être utilisé pour honorer différentes dépenses, comme les études de projet et de faisabilité, les études de recherche et développement, ou encore les prestations financières, comptables et juridiques.

* 237 Créé en 1997 pour inciter les épargnants à financer les PME innovantes, le FCPI est un organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) donnant droit, sous conditions, à une réduction d'impôt sur le revenu (IR) ainsi qu'à une exonération des plus-values réalisées.

* 238 Les fonds communs de placement à risques, créés en 1980, sont investis en titres d'entreprises non cotées en bourse à hauteur de 50 % minimum.

* 239 Les fonds d'investissement de proximité sont investis dans des PME régionales à hauteur de 60 % minimum.

* 240 Doté de près de 57 milliards d'euros, le Programme d'Investissements d'Avenir (PIA), piloté par le commissariat général à l'Investissement, a été mis en place par l'État pour financer des investissements innovants et prometteurs sur le territoire, avec un principe de co-financement pour chaque projet.

* 241 Programme destiné à soutenir la recherche appliquée , pour aider au développement de nouveaux produits et services susceptibles d'être mis sur le marché à court ou moyen terme. Il permet de financer les projets de R&D dits « collaboratifs » (associant par exemple de grandes entreprises, des PME et des laboratoires) aidés par des pôles de compétitivité . Le FUI est logé au sein du fonds de compétitivité des entreprises (FCE).

* 242 Le programme-cadre de recherche Horizon 2020 (2014-2020), regroupe pour la première fois dans un seul programme, les programmes de recherche et d'innovation européens tels que le P.C.R.D.T., Euratom, actions pour l'innovation du programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité, institut européen d'innovation et de technologie.

* 243 En anglais « Initial Public Offering ».

* 244 Earnings Before Interest, Taxes, Depreciations and Amortizations : correspond à l'excédent brut d'exploitation.

* 245 Décision n° 11 du CIMAP (Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique) du 18 décembre 2012.

* 246 Ces personnels sont les ingénieurs-chercheurs, techniciens, gestionnaires de projet de recherche et de développement, juristes chargés de la protection industrielle et des accords de technologie liés au projet, personnel chargé de tests pré-concurrentiels, les mandataires sociaux, relevant du régime général de sécurité sociale, qui participent, à titre principal, au projet de recherche et de développement de l'entreprise.

* 247 Le champ global des interventions économiques de l'État et des collectivités territoriales en faveur des entreprises a pu être estimé à près de 110 milliards d'euros en 2013. Au sein de ce périmètre, la mission d'évaluation a porté sur 46,5 milliards d'euros d'interventions, après exclusion du champ d'une centaine de dispositifs de l'État. Il s'agit principalement de mesures dont la pérennité a été annoncée par le gouvernement (notamment les allègements de charges sociales sur les bas salaires, dits « Fillon » : 21 milliards d'euros; le crédit d'impôt recherche : 3,4 milliards d'euros; les interventions en faveur du handicap : 7,4 milliards d'euros, et du logement social : 4,4 milliards d'euros) ou qui font l'objet d'évaluations par ailleurs (taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée : 18 milliards d'euros ; mesures liées à la formation professionnelle : 4 milliards d'euros).

* 248 L'accès des PME aux marchés publics , rapport au Président de la République du 5 décembre 2007.

* 249 Rapport d'information n° 82 (2015-2016) de M. Martial Bourquin , fait au nom de la mission commune d'information sur la commande publique, du 14 octobre 2015.

* 250 Le Conseil constitutionnel a reconnu une valeur constitutionnelle au principe de la liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures (Décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003).

* 251 L'AMP (Accord sur les marchés publics) encadre la possibilité, pour les parties à l'accord, de réserver certains marchés publics à leurs PME et garantit le principe de non-discrimination entre les produits, les services et les fournisseurs des différentes parties. Toutefois, l'AMP permet à ses signataires de prévoir des exemptions à ces règles de non-discrimination. Aucune règle n'interdit à l'Union européenne de demander une telle exemption à l'occasion d'une renégociation de l'accord, mais elle supposerait l'accord de tous les autres signataires de l'AMP et le consensus entre États membres.

* 252 L'objectif 32 du Pacte national pour la croissance, l'économie et l'emploi, annoncé le 6 novembre 2012, est intitulé « accompagner le développement des PME de croissance innovantes en mobilisant l'achat public ». Il consiste à « mobiliser l'achat public pour accompagner le développement des PME de croissance innovantes ».

* 253 Afin d'améliorer les relations entre les contribuables et l'administration fiscale en cas de contrôle portant sur le CIR durant une procédure de contrôle, l'article 46 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, codifié à l'article 1653 F du code général des impôts (CGI), a instauré un comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche. En application de l'article L. 59 D du livre de procédures fiscales (LPF), lorsque dans le cadre d'une procédure de rectification contradictoire, un désaccord subsiste entre un contribuable et l'administration, sur des rehaussements portant sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR défini à l'article 244 quater B du CGI, le litige peut être soumis pour avis au comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche sur demande du contribuable. Ce comité est compétent pour statuer sur les litiges résultant des propositions de rectification adressées depuis le 1 er juillet 2016. Un décret  du 9 juin 2016 a précisé les modalités de fonctionnement de ce comité.

* 254 Article 46 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 insérant un article 1653 F au code général des impôts.

* 255 Les PME/TPE et le financement de leur développement pour l'emploi et l'efficacité , rapport de M. Frédéric Boccara, mars 2017.

* 256 Enquête SAFE, pour Survey on Access to Finance by Enterprises.

* 257 Société de caution mutuelle des TPE pour laquelle OpinionWay a réalisé une enquête en septembre 2016.

* 258 Voir annexe.

* 259 Pour le 4 ème trimestre 2016.

* 260 Rapport d'information n° 3097 du 30 septembre 2015 fait au nom de la mission d'information commune sur la Banque publique d'investissement.

* 261 Les fonds de dotation ou «endowment funds» sont un capital que les universités américaines et britanniques cumulent depuis des siècles. L'Université d'Harvard, la plus riche du monde, repose ainsi sur une réserve de plus de 36 milliards de dollars de dons privés, dont les intérêts alimentent 30 % de son budget opérationnel.

* 262 « Les PME/TPE et le financement de leur développement pour l'emploi et l'efficacité », Frédéric Boccara, avis de mars 2017.

* 263 Par l'exploitation du FIBEN (voir infra) désormais en open source.

* 264 Exemples cités dans Les Échos, lundi 5 mars 2018, « Prêts aux entreprises : comment les Fintech musclent leur analyse crédit ».

* 265 « The Pulse of Fintech », étude trimestrielle, 4ème trimestre 2017.

* 266 La DSP2, qui a été transposée par l'ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, instaure de nouvelles règles intéressant directement les consommateurs dont :

- l'interdiction de la surfacturation, autrement dit l'application de suppléments en cas de paiement par carte de débit ou de crédit, aussi bien dans un magasin qu'en ligne.

- le renforcement des droits de consommateurs, avec par exemple l'abaissement  de la franchise restant à la charge du client en cas de paiement frauduleux par carte avant opposition de 150 à 50 euros, des délais plus courts de remboursement et l'introduction d'un droit au remboursement inconditionnel pour les prélèvements en euros.

- l'obligation de l'authentification forte (c'est-à-dire à deux facteurs au moins entre un code ou mot de passe que l'on sait, un appareil que l'on possède, une donnée biométrique telle que l'empreinte digitale, la voix ou l'iris) pour les paiements en ligne de plus de 30 euros, afin de réduire la fraude dans l'e-commerce.

- l'ouverture du marché à de nouveaux acteurs en donnant accès aux informations sur les comptes par un canal de communication sécurisé.

* 267 Voir « Comprendre les blockchains (chaînes de blocs) », note n°4 de l'OPECST du 12 avril 2018- Rapporteurs : Mme Valéria Faure-Muntian, M. Claude de Ganay, députés, et M. Ronan Le Gleut, sénateur.

* 268 Un registre distribué (distributed ledger technology) est une base de données de transactions partagée et synchronisée sur de nombreux ordinateurs et de nombreux sites, sans contrôle centralisé. Chaque partie possède un exemplaire identique de l'enregistrement, automatiquement mis à jour dès que des ajouts sont réalisés.

* 269 Prise en application de l' article 120 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite loi Sapin II).

* 270 L'AMF définit les règles d'organisation et de bonne conduite auxquelles sont soumis les professionnels autorisés à fournir des services d'investissement (livre III de son règlement général). Ces règles complètent les dispositions déjà précisées dans le code monétaire et financier (articles L.533-1 à L.533-24).

* 271 Définis à l'article L.531-1 du code monétaire et financier.

* 272 « Synthèse des réponses à la consultation publique portant sur les Initial Coin Offerings (ICO) et point d'étape sur le programme « UNICORN ».

* 273 Introduction en bourse ; en anglais « Initial Public Offering ».

* 274 Ce projet ambitionne de créer un service de blockchain décentralisé, reposant sur un protocole plus performant et moins consommateur en énergie que ses prédécesseurs. À partir de 2019, les utilisateurs auraient ainsi accès à des fonctionnalités telles que des VPN, des applications et un service de micropaiement affranchi des taxes internationales.

* 275 « Cryptoactifs, blockchain & ICO : comment la France veut rester à la pointe », par Bruno Le Maire, 19 mars 2018, Numerama.

* 276 « La directive "DSP 2" permet notamment de prendre en compte l'apparition de nouveaux acteurs proposant aux utilisateurs d'accéder aux données de l'ensemble de leurs comptes et produits bancaires et d'initier des ordres de paiement. Le nombre d'utilisateurs de ces nouveaux services a connu une croissance rapide : quatre millions de consommateurs ont déjà eu recours à un agrégateur de comptes en France et 2,5 millions à un initiateur de paiement. Un décalage s'est ainsi créé entre le cadre juridique et les pratiques, source d'incertitudes multiples.

À cet égard, la directive "DSP2" impose aux agrégateurs de comptes et aux initiateurs de paiement d'obtenir un agrément ou de s'enregistrer auprès de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Ces derniers sont également tenus de communiquer avec le gestionnaire de compte par le biais d'un canal de communication sécurisé et standardisé. En cas de fraude, l'utilisateur peut désormais être indemnisé immédiatement par sa banque. Le prestataire tiers doit, à ce titre, souscrire une assurance afin de pouvoir rembourser la banque si sa responsabilité est engagée.

L'ordonnance, dans la mesure où elle se borne à transposer la directive, ne concerne toutefois que les comptes de paiement. Pourtant, les nouveaux acteurs reconnus par la directive permettent aujourd'hui aux utilisateurs de passer des ordres et d'agréger les données concernant l'ensemble de leurs comptes et produits d'épargne (livrets, contrats d'assurance, comptes-titres, etc.). Ainsi, 80 % des comptes agrégés par les nouveaux acteurs ne sont pas des comptes de paiement.

Pour les comptes non couverts par la directive, les dispositions contractuelles liant l'utilisateur aux établissements bancaires et aux prestataires tiers conduisent à faire porter le risque par le consommateur : en cas de fraude ou de piratage, il serait seul responsable et ne pourrait pas être remboursé.  Dans ce contexte, s'il n'apparaît pas souhaitable d'étendre les dispositions de la directive à l'ensemble des comptes et produits d'épargne - ce chantier devant être mené au niveau européen -, la question de la responsabilité en cas de fraude ne peut être laissée longtemps sans réponse.

Aussi, dans l'attente d'une solution européenne, la commission des finances du Sénat a adopté un amendement permettant de garantir la possibilité pour l'utilisateur d'obtenir un remboursement auprès du prestataire tiers en cas de fraude, via la mise en place d'une obligation d'assurance complémentaire pour les comptes non couverts par la directive » (communiqué de presse du 14 mars de la commission des Finances du Sénat).

* 277 Selon Balaji Srinivasan, associé du fonds Andreessen Horowit, cité dans « ICO, un changement de paradigme », 22 août 2017, ICO Mentor.

* 278 « Les Fintechs au rendez-vous de l'investissement productif », Patrick Herter, FintechMag.

* 279 « Définition Fintech : changements pour les entrepreneurs et consommateurs », Rachatducredit.com, Nizar Fassi , 29 juillet 2016.

* 280 Source : « Fintech 2020, reprendre l'initiative », Croissance Plus PME Finance, 2016.

* 281 Sicav de place, S2iEM (société d'investissement en infrastructures européennes de marché), imaginée et portée par l'AF2i (Association française des investisseurs institutionnels) en juin 2014, a pour objet financier unique d'investir dans les titres d'Euronext.

* 282 Les missions principales du post-marché sont d'assurer la bonne fin des opérations initiées sur les marchés financiers, de les enregistrer dans les comptes des clients, et de prendre en compte tous les événements liés au cycle de vie des instruments financiers.

* 283 Fintech Mag.

* 284 Selon Blockchain France , 22 août 2017 .

* 285 Les projets ne lèvent jamais directement des montants en dollars ou des euros, mais bien des montants en cryptomonnaies. La juste formulation pour une levée en ICO exprimée en monnaies traditionnelles est donc `la start-up a levé l'équivalent de x dollars'.

* 286 La nouvelle grammaire du succès. La transformation numérique de l'économie française , Philippe Lemoine, Rapport au gouvernement du 7 novembre 2014.

* 287 Rapport d'information n° 1936 du 14 mai 2014 par la commission des affaires économiques sur le développement de l'économie numérique française présenté par Mmes Corinne Erhel et Laure de La Raudière.

* 288 « L'énigme de l'investissement », Les synthèses de la fabrique de l'industrie [« laboratoire d'idées »], n° 13, mai 2017.

* 289 Réformes, investissement et croissance : un agenda pour la France, l'Allemagne et l'Europe , apport du 27 novembre 2014.

* 290 « 3 000 entreprises au coeur de l'économie française », H. Bacheré, Insee Focus, n° 56, mars 2016.

* 291 Taille des fonds reçus par les entreprises financées.

* 292 Le Mouvement des Pigeons est un mouvement de contestation apparu en France le 28 septembre 2012, après la publication d'une contribution de Jean-David Chamboredon , président du fonds ISAI , dénonçant l'augmentation des cotisations et des taxations sur plus-values de cession d'entreprise contenue dans le projet de loi de finances 2013, augmentant la taxation du capital-risque dans les PME de 34,5 % à plus de 60 %, et susceptible de freiner les investisseurs et le développement des start-up et PME en France. Le mouvement a fédéré en quelques jours 75 000 entrepreneurs. Le Président de la République François Hollande annonça dans le cadre des premières Assises de l'entrepreneuriat en avril 2013 des aménagements significatifs de la réforme de la taxation des plus-values de cession, allant dans le sens de ces revendications.

* 293 Fonds de dotation universitaires.

* 294 Les Échos, 9 février 2018.

* 295 Discours prononcé le 22 janvier 2018 lors du Grand rendez-vous de l'investissement productif.

* 296 « PACTE : actions et propositions de la Fédération Bancaire Française », décembre 2017.

* 297 Voir http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20171120/entr.html

* 298 Un premier amendement proposait de relever le taux du dispositif Madelin à 30 % en le plaçant sous un plafonnement global de 18 000 euros. Un deuxième amendement proposait d'unifier le plafond des versements ouvrant droit à la réduction d'impôt, sans distinguer entre versements directs et versements intermédiés. Un troisième amendement, qui a été retenu, encadre les frais d'intermédiation.

* 299 Les actifs de l'entreprise ne peuvent excéder 15 millions de livres sterling ; l'entreprise doit compter moins de 250 salariés ; l'entreprise ne doit pas être cotée ou avoir l'intention d'entrer en bourse au moment de l'investissement.

* 300 Moins de 25 salariés, des actifs n'excédant pas 200 000 livres sterling et un financement par le SEIS plafonné à 150 000 livres sterling.

* 301 Schéma d'investissement collectif sous forme de trusts cotés pour développer le financement des petites sociétés non cotées.

* 302 Elle a été transposée par l' ordonnance n° 2015-378 du 2 avril 2015 pour une mise en application au 1 er janvier 2016.

* 303 Henri de Castries, Les Échos, 30 avril 2015.

* 304 Montant de capital minimum dont l'assureur doit disposer pour couvrir des pertes potentielles extrêmes à l'horizon d'un an avec une probabilité de 99,5 %.

* 305 La provision pour risque d'exigibilité est constituée lorsque les placements non amortissables se trouvent en situation de moins-value latente nette globale. C'est une provision technique réglementée en assurances, quantifiée par les Codes en vigueur en France.

* 306 En 2012, l'OCDE a défini l'éducation financière comme une « combinaison de conscience financière, de connaissance, d'habileté, des attitudes et comportements nécessaires pour prendre les bonnes décisions financières et finalement arriver à un bien-être financier individuel et apprécié par la personne elle-même ».

* 307 «  La définition et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale en matière d'éducation financière »,

Rapport du groupe de réflexion présidé par M. Emmanuel Constans dans le cadre du Comité consultatif du secteur financier (CCSF).

* 308 Les actifs des fonds de pension sont acquis grâce aux cotisations à un plan de retraite dans le but exclusif de financer les prestations du plan de retraite. Un fonds de pension est un pool d'actifs doté d'une personnalité juridique indépendante.

* 309 Le régime de retraite additionnelle de la fonction publique est ouvert aux agents des trois fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière) et aux militaires, il s'agit d'un régime par points assis sur les primes et indemnités qui n'entrent pas dans le calcul de la pension de base. Institué par l'article 76 de la loi du 21 août 2003 portant sur la réforme des retraites, il est entré en vigueur le 1 er janvier 2005. Aujourd'hui, les fonctionnaires de la fonction publique d'État représentent 44 % du total des bénéficiaires, ceux des collectivités locales 32 % et ceux des hôpitaux 29 %.

* 310 Les PME/TPE et le financement de leur développement pour l'emploi et l'efficacité, Simon Boccara, 15 mars 2017.

* 311 Évaluée d'après les bilans consolidés des banques.

* 312 Notamment aux dispositions de la directive du 10 novembre 1992, réaffirmées dans l'article 133, 1°, de la directive Solvabilité II du 25 novembre 2009 qui prévoit au nom de la liberté d'établissement, que « les États membres n'exigent pas des entreprises d'assurance et de réassurance qu'elles investissent dans des catégories d'actifs déterminées ».

* 313 De Mme Karine Berger et M. Dominique Lefebvre, alors députés.

* 314 Discours du 28 mars 2018 lors du forum « Entreprise en action(s) ».

* 315 Les contrats en unités de compte (UC) sont des contrats d'assurance-vie au sein desquels l'épargne est investie sur des supports financiers. Ils n'offrent pas de garantie sur le capital investi sont destinés aux épargnants à la recherche d'une rentabilité plus élevée qu'avec des fonds en euros.

Ils permettent un investissement diversifié sur les marchés financiers et immobiliers.

Contrairement aux contrats d'assurance-vie en euros , surtout investis en obligations et relativement épargnés par les mouvements boursiers, ceux en UC sont essentiellement investis en actions de valeurs mobilières ou immobilières ( Sicav , actions, obligations, parts de fonds communs de placement, parts de SCI, parts de SCPI).

* 316 «L'assurance dans un monde en disruption», 9 ème conférence internationale de l'assurance, 22 octobre 2017, François Villeroy de Galhau.

* 317 Discours du ministre de l'Économie et des finances, M. Bruno Le Maire, du 28 mars 2018 lors du forum « Entreprise en action(s) ».

* 318 « France Intelligence Artificielle », 28 mars 2018.

* 319 Un « Small Business Act » du droit boursier européen - Mettre en place un environnement financier et réglementaire adapté aux petits et moyens émetteurs cotés en Europe (« SMILEs ») ; rapport établi par Fabrice Demarigny, directeur des activités marchés de capitaux du groupe Mazars, mars 2010.

* 320 Le « Packaged Retail Investment and Insurance-based Products » vise à uniformiser l'information précontractuelle des produits financiers packagés (fonds d'investissement, produits dérivés, produits d'assurance vie en mode épargne, etc.) proposés à des investisseurs non professionnels (tels que définis par la Directive MIF II).  Le Règlement requiert de l'initiateur du produit qu'il établisse un « document clé d'information » (DICI ou KID) standardisé permettant à l'investisseur de détail de disposer des informations de base pour comprendre le produit (qu'il soit financier, bancaire ou assurantiel) et de procéder à des comparaisons entre produits.

* 321 Les placements privés de titres financiers, auprès d'un groupe de moins de 150 investisseurs, ou les placements de titres auprès d'investisseurs qualifiés, ne donnent pas lieu à l'établissement d'un prospectus obligatoire, les investisseurs étant réputés faire les diligences nécessaires. De même, des obligations allégées sont prévues pour les offres au public d'un montant limité, en cohérence avec les seuils établis au niveau européen. C'est sur cette deuxième dérogation que repose le régime du financement participatif en titres financiers en France, pour lequel des offres proposées par l'intermédiaire de conseillers en investissement participatif ou d'un site internet d'un prestataire de services d'investissement sont disponibles sans établissement de prospectus à condition que le montant de l'offre soit inférieur à un million d'euros et que les titres ne soient pas admis aux négociations sur un marché règlementé ou un système multilatéral de négociation.

* 322 CE, Assemblée, 21 mars 2016, Société Fairvesta International GMBH et autres ; CE Assemblée, même jour, Société NC Numericable.

* 323 Sur le fondement de l'article L. 621-1 du code monétaire et financier qui attribue à l'Autorité des marchés financiers une « mission générale de protection de l'épargne et d'information des investisseurs ».

* 324 CE, Assemblée, 21 mars 2016, Société Fairvesta International GmbH et autres , n os 368082 et autres, Rec.)

* 325 Middlenext est l'association (loi de 1901) professionnelle française indépendante exclusivement représentative des valeurs moyennes cotées. Créée en 1987, Middlenext fédère et représente exclusivement des sociétés cotées sur Euronext et Euronext Growth, tous secteurs d'activités confondus. Middlenext co-préside le Smaller Issuers Committee d'EuropeanIssuers, première association européenne qui promeut les intérêts des sociétés cotées en Bourse. Middlenext est présidée par Guillaume Robin, dirigée par Caroline Weber et gérée par un conseil d'administration de 11 dirigeants d'entreprises cotées. L'organisation est financée et gérée par des dirigeants de Valeurs Moyennes.

* 326 Fonctionnant conformément aux articles L. 421-1 et suivants du code monétaire et financier.

* 327 Conformément aux articles L. 424-1 et suivants du même code.

* 328 Conformément aux articles L. 425-1 et suivants du même code. Un internalisateur systématique est un prestataire de service d'investissement qui interpose systématiquement son compte propre face aux ordres de ses clients. A tout ordre à l'achat ou à la vente d'un client sur un instrument financier correspond ainsi respectivement une position vendeuse ou acheteuse de l'internalisateur systématique.

* 329 En application du règlement Transparence (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil. Il a eu pour objet de renforcer la transparence des émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché financier.

* 330 Conseil en ingénierie et introduction boursière des PME-PMI.

* 331 Les Listing Sponsors jouent un rôle déterminant dans le processus d'introduction en Bourse, leur présence étant destinée à renforcer la confiance des investisseurs. Ils s'assurent que la société réunit tous les critères requis pour être cotée et qu'elle répond aux obligations d'information et de publicité financières. Les Listing Sponsors travaillent en concertation avec la société, ses conseillers juridiques et ses auditeurs.

Les principales tâches du Listing Sponsor consistent à : évaluer l'aptitude de la société à être introduite en Bourse ; participer à la rédaction du prospectus ou de la note d'information ; coordonner le processus de diligence raisonnable ; assurer la liaison avec l'Autorité de régulation et / ou l'opérateur de marché de NYSE Alternext.

* 332 Rapport n° 1225 du 4 juillet 2016 de MM. Jean-Christophe Fromantin et Patrice Prat.

* 333 Pour le compte de l'OSCI (opérateurs spécialisés du commerce international).

* 334 Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, Rapport, annexe J, fiche n° 168, dépense fiscale n° 210312.

* 335 Article 94 de la loi de finances pour 2018. Une première tentative avait eu lieu lors des débats du budget 2017. Le Gouvernement avait proposé, dans l'article 13 du projet de loi de finances pour 2017, de supprimer, en raison de son inefficience, les deux dispositifs. La rapporteure générale de la commission des finances de l'Assemblée nationale, alors Valérie Rabault, avait maintenu ce dispositif malgré l'avis défavorable du Gouvernement et la commission des Finances du Sénat en avait pris acte.

* 336 La gestion de la relation client - Customer Relationship Management en anglais (CRM).

* 337 Nom du dispositif public d'accompagnement à l'exportation.

* 338 Outil de soutien à l'export qui offre aux entreprises une assurance contre le risque d'échec de leurs actions de prospection à l'étranger, l'assurance prospection consiste à prendre en charge jusqu'à 65 % des dépenses de prospection engagées ; ces montants sont par la suite remboursés par l'entreprise si elle dégage un chiffre d'affaires suffisant sur la zone garantie ou pris en charge par l'État en cas d'échec de la prospection afin de permettre à l'entreprise de poursuivre ses efforts en dépit de ce premier échec.

* 339 Source : « Commerce extérieur de la France - Résultats 2017 », Direction générale du Trésor, 8 février 2018.

* 340 La Direction générale du Trésor estime ainsi que : « les comparaisons entre pays, notamment européens, restent par ailleurs fragiles en raison de méthodologies de décompte non entièrement harmonisées. Il existe en particulier un seuil de déclaration pour les échanges intra-européens, différent selon les États, ce qui est susceptible d'augmenter le nombre de petits opérateurs recensés dans les États ayant fixé un seuil bas (comme l'Italie, où il est à 0) ».

* 341 À partir de données de la Direction générale des finances publiques couvrant également les exportateurs de services.

* 342 Règlement (UE) n ° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides de minimis.

* 343 Pour rappel, le stock d'entreprises (Insee) en 2015 est de 4 226 400 :

72 % d'entreprises n'emploient aucun salarié,

23 % d'entreprises emploient 1 à 9 salariés,

4 % d'entreprises emploient 10 à 50 salariés,

1 % d'entreprises emploient plus de 50 salariés.

* 344 Références statistiques 2017, Ministère de la Justice.

* 345 Source : observatoire économique du Conseil national des administrateurs judiciaires - mandataires judiciaires.

* 346 Selon la COFACE pour les défaillances 2008-2016.

* 347 Selon Ellisphère.

* 348 L'Assurance de garantie des salaires a pris en charge pour 1,7 milliard de salaires.

* 349 « La petite entreprise », colloque du 10 mars 2017, Université de Pau et des Pays de l'Adour, LGDJ, 2017.

* 350 Code de commerce, art. L. 653-1 et s.

* 351 Qui entend « sensibiliser l'opinion publique à l'importance de la santé des indépendants que ces derniers soient artisans, commerçants, dirigeants de PME ou professions libérales ».

* 352 Souscrite auprès d'un pool d'assureurs dont Groupama SA est l'assureur apériteur.

* 353 Pour un taux de cotisation à 6,8 % et une allocation brute moyenne annuelle de 10 800 euros. Dans ce scénario, il existerait un déficit structurel de 400 millions d'euros.

* 354 Séminaire du 23 mai 2017 : « Comment mieux protéger les actifs du risque de perte ou d'insuffisance de revenus ? ».

* 355 Challenges.fr, 30 janvier 2018 .

* 356 Au vu notamment de l'accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à la réforme de l'assurance chômage.

* 357 La loi prévoit ainsi que le juge peut discrétionnairement rééchelonner les créances des titulaires de sûretés jusqu'à dix ans, sans contrepartie financière.

* 358 Commissaires aux comptes, représentants du personnel, administrations publiques, organismes de sécurité et de prévoyance sociales, services de centralisation des risques bancaires et des incidents de paiement, etc....

* 359 « Le guide de l'entrepreneur éclairé », FHB Editions.

* 360 Un commerçant ou artisan, ainsi qu'un EIRL, et toute personne morale de droit privé peut adhérer à un groupement de prévention agréé par arrêté du préfet de région. Ce groupement fournit à ses adhérents, de façon confidentielle, une analyse comptable et financière des informations que ceux-ci s'engagent à lui transmettre. Lorsqu'il détecte des indices de difficultés, il en informe l'adhérent et peut lui proposer l'intervention d'un expert. Les administrations prêtent leur concours aux groupements de prévention agréés. La Banque de France peut aussi être appelée à donner des avis sur la situation financière des adhérents. Les groupements de prévention agréés sont habilités à conclure des conventions au profit de leurs adhérents, notamment avec les banques et les assurances.

* 361 Le Leveraged Buy-Out (LBO), ou « rachat de l'entreprise par effet de levier », est l'acquisition du contrôle d'une société financée par endettement dont le remboursement est assuré par les revenus opérationnels de la société rachetée.

* 362 Dans le cadre d'une procédure amiable, les parties sont appelées aux discussions par le mandataire ad hoc ou le conciliateur en lien avec l'entreprise qui bénéficie de la procédure amiable. Les créanciers ne sont jamais tenus de participer aux discussions.

* 363 Mécanisme financier prévu par un contrat ou ordonné par le juge, selon lequel les intérêts échus s'ajoutent à la dette initiale pour le calcul des intérêts futurs.

* 364 Organe regroupant les créanciers antérieurs à l'ouverture de la procédure et appartenant à une même catégorie (établissements de crédit ou fournisseurs) dès lors que l'entreprise en procédure collective dépasse une certaine taille, ou sur demande de celle-ci. Les créanciers y votent leur accord sur le plan et les modalités de règlement et/ou d'abandon de leur créance à la majorité des deux tiers.

* 365 Droit de priorité de remboursement dont bénéficient les créanciers ayant consenti un nouvel apport en trésorerie dans le cadre de la conciliation ou en exécution d'un accord de conciliation à condition qu'il ait été homologué, dans l'hypothèse d'une procédure ultérieure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.

L'attractivité du privilège de new money a été renforcée par l'ordonnance du 12 mars 2014 en confirmant qu'en cas de procédure collective ultérieure, la créance ne serait pas étalée dans le cadre du plan mais payée immédiatement au moment de son arrêté ; d'autre part, la loi prévoit désormais que ce privilège bénéficie tant aux injections d'argent frais effectuées pendant la durée de la conciliation qu'en exécution de l'accord de conciliation.

* 366 Restructuration du taux d'endettement de l'entreprise.

* 367 Mécanisme fiscal de report en arrière du déficit d'une année sur les bénéfices éventuels des années précédentes, permettant à l'entreprise de bénéficier d'une créance d'impôt sur les sociétés (IS), égale à l'IS acquitté sur ces bénéfices passés.

* 368 Le Comité interministériel de restructuration industrielle est compétent pour étudier la restructuration des entreprises de plus de 400 salariés.

* 369 Les Comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises sont compétents pour les entreprises de moins de 400 salariés.

* 370 Le Comité consultatif du secteur financier a pour mission d'étudier les questions liées aux relations entre les établissements financiers (établissements de crédit, assurances et entreprises d'investissement) et leurs clientèles, et de proposer toutes mesures appropriées dans ce domaine sous forme d'avis ou de recommandations. Composé paritairement de membres représentant les établissements financiers et les consommateurs ainsi que les parlementaires, de personnalités qualifiées et de représentants des entreprises et des salariés du secteur financier, le CCSF constitue un lieu unique de dialogue.

* 371 Obligatoirement quand le chiffre d'affaires dépasse 3 millions d'euros ou quand il y a plus de 20 salariés ; en deçà, sa désignation est facultative.

* 372 L'Association pour la gestion du régime de Garantie des créances des Salariés (AGS) est un organisme patronal fondé sur la solidarité interprofessionnelle des employeurs et financé par leurs cotisations. Elle intervient en cas de redressement, de liquidation judiciaire de l'entreprise ou encore, sous certaines conditions, en procédure de sauvegarde. Elle garantit le paiement, dans les meilleurs délais, des sommes dues aux salariés (salaires, préavis, indemnités de rupture...) conformément aux conditions fixées par le code du travail.

* 373 Entreprises de plus de 150 salariés ou avec un chiffre d'affaires supérieur à 20 millions d'euros.

* 374 Entreprises réunissant l'un des trois critères suivants : plus de 20 salariés / un chiffre d'affaires de plus de 3 millions d'euros HT / un bilan supérieur à 1,5 million d'euros.

* 375 L'entreprise a l'interdiction de payer ses créances antérieures à l'ouverture de la procédure, mais doit payer les dettes nées postérieurement et qui ont contribué à l'activité après l'ouverture de la procédure. En outre, le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous les intérêts de retard et de toutes les majorations est arrêté. Seuls les intérêts des prêts de plus d'un an à l'origine continuent de courir, mais ils ne sont pas décaissés durant la période d'observation : dans le cas des emprunts bancaires, les échéances cessent alors d'être payées, en capital et intérêts.

* 376 Pour les entreprises les plus significatives (employant au moins 150 salariés ou réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 20 millions d'euros - en deçà de ces seuils, la constitution des comités est possible mais pas obligatoire), ce plan est négocié avec les créanciers réunis en comités, ce qui permet l'adoption d'un plan à la majorité des 2/3 des créanciers concernés. Cette règle de vote majoritaire permet d'aboutir à imposer des délais, des remises de dettes ou des conversions de dettes en capital aux récalcitrants. Les comités de créanciers ont dorénavant la possibilité de proposer un plan de redressement concurrent de celui présenté par l'entreprise.

* 377 Désigne une entreprise qui n'est pas en cessation des paiements. L'expression est souvent utilisée pour désigner une entreprise qui ne fait pas l'objet d'une procédure collective.

* 378 Selon l'article article L. 631-22 du code de commerce.

* 379 Le manuel de référence en la matière Droit et pratique des procédures collectives de M.  Pierre-Michel Le Corre (Dalloz, 9 ème édition 2016) compte près de 3 000 pages et le livre VI du code commerce dépasse, dans l'édition Dalloz, les 400 pages .

* 380 « Ein neuer Aufbruch für Europa ; Eine neue Dynamik für Deutschland ; Ein neuer Zusammenhalt für unser Land ».

* 381 Page 55 : « Wir werden mit Frankreich konkrete Schritte zur Verwirklichung eines deutsch-französischen Wirtschaftsraums mit einheitlichen Regelungen vor allem im Bereich des Unternehmens- und Konkursrechts und zur Angleichung der Bemessungsgrund-lage der Körperschaftsteuer vereinbaren ».

* 382 Fin décembre 2016, cumul sur 12 mois.

* 383 La loi allemande sur l'insolvabilité de 1994, entrée en vigueur le 1er janvier 1999, a fait l'objet d'une étude du service de législation comparée du Sénat (n°135) de juin 2004, à l'occasion de la présentation du projet de loi de sauvegarde des entreprises, devenu la loi du 26 juillet 2005 : http://www.senat.fr/lc/lc135/lc135.html .

* 384 Insolvenzordnung adoptée en 1994 mais entrée en vigueur le 1er janvier 1999. Elle est décrite en annexe.

* 385 Gesetz zur Erleichterung von Sanierung von Unternehmen (ESUG). Il est décrit en annexe.

* 386 Cette analyse comparative des procédures de faillite n'intègre par l'amendement ESUG entré en vigueur le 1 er mars 2012.

* 387 Correspondant à leur poids dans les montants totaux récupérés tout au long de la procédure à partir de la continuation temporaire, la cession partielle ou totale de l'entreprise et la liquidation des actifs.

* 388 Selon l'étude, on ne dispose d'aucune mesure de la durée de la liquidation dans le cas des dossiers non ouverts (même s'il ne s'agit en définitive pas de procédures collectives). En second lieu, cette durée de 39 mois correspond à la durée entre la demande d'ouverture et le jugement de clôture qui constate la fin (et valide la légalité) de la liquidation et de la répartition des montants recouvrés. Au contraire, dans le cas français, le jugement de liquidation marque la décision de liquidation et donc le début de celle-ci. Cependant, dans le cas allemand, c'est la seconde assemblée des créanciers qui prend la décision sur le sort de l'entreprise (liquidation, recherche d'un repreneur ou construction d'un plan de continuation). Elle doit en principe se réunir dans un délai de trois mois suivant le jugement d'ouverture. Dans le cas des liquidations (la quasi-totalité des cas), on peut donc considérer que la décision de liquidation est prise dans un délai de trois mois.

* 389 Sans remettre en cause le poids des créanciers dans les procédures collectives, l'amendement ESUG vise en effet à privilégier la restructuration des entreprises à leur liquidation, en facilitant le recours à l'auto-administration du débiteur (le chef d'entreprise n'est plus dessaisi d'office par le tribunal). Depuis mars 2012, les tribunaux locaux sont en effet dans l'obligation de nommer un comité de créanciers provisoire lors de la demande d'ouverture de la procédure et ce, jusqu'au lancement de celle-ci, sous certaines conditions. Le comité provisoire peut soit proposer la nomination de l'administrateur de l'insolvabilité auprès du tribunal, soit soutenir l'auto-administration de l'entreprise demandée par son dirigeant. Lorsque le débiteur sollicite l'auto-administration, validée par le rapport d'un expert et avec l'appui du comité, le tribunal ne peut s'y opposer (comme c'était le cas auparavant), car il est présumé que l'auto-administration ne crée aucun préjudice aux créanciers. Durant une période de trois mois maximum, le débiteur peut alors préparer en collaboration avec les créanciers et sous contrôle du tribunal un plan de restructuration qui sera voté, à terme, en tant que plan d'insolvabilité. Pendant cette même période, les créanciers ne peuvent engager de procédures d'exécution à l'encontre du débiteur, c'est le principe du « bouclier de protection » (Schutzschirm).

* 390 Possibilité d'imposer le plan à une classe de créanciers qui l'aurait refusé, sous réserve notamment du respect de l'absolute priority rule (désintéressement intégral des classes prioritaires avant que des classes plus juniors ne puissent recevoir une distribution).

* 391 Acronyme anglais « Centre Of Main Interests », pour « centre des intérêts principaux ».

* 392 Dans cet objectif, le règlement comprend des mesures de coopération et de communication entre les praticiens et les juridictions pour faciliter la gestion effective des procédures d'insolvabilité : échange d'informations, entraide, répartition des tâches et des pouvoirs, désignation des praticiens, tenue des audiences, homologation de protocoles, suspension de vente d'actifs, etc.   Par ailleurs, il créée une procédure spécifique et facultative, dite de coordination : les praticiens désignent à la majorité des deux tiers le tribunal le plus approprié pour ouvrir cette procédure. Ce tribunal nomme ensuite un coordinateur (tiers indépendant) qui, à son tour, émet des recommandations qui ne s'imposent pas aux praticiens. Il propose un programme de coordination collective (série de mesures pour une approche intégrée de la résolution des difficultés financières des entités du groupe) et arbitre les conflits entre praticiens. Le succès de cette procédure de coordination dépendra de la qualité des relations entre praticiens et de l'autorité du coordinateur.

* 393 En français, prêteur.

* 394 Prise sur le fondement de l'article 110 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

* 395 https://ec.europa.eu/info/business-economy-euro/growth-and-investment/capital-markets-union_en

* 396 http://ec.europa.eu/growth/single-market/strategy_fr

* 397 « Avantages économiques potentiels à tirer de la réforme du droit de l'insolvabilité en Europe », Association for Financial Markets in Europe, février 2016.

* 398 Le non performing loans (NPL) ou prêts non performants sont considérés comme tels lorsque plus de 90 jours se sont écoulés sans que l'emprunteur ait versé les tranches prévues.

* 399 Une banque détenant trop de créances douteuses ne peut accorder le crédit nécessaire aux entreprises qui souhaitent investir et créer des emplois. Lorsque cette situation concerne de nombreuses banques pour des volumes importants, l'économie est affectée globalement ainsi que ses différentes composantes. La baisse de l'investissement dans les entreprises et la diminution des créations d'emploi ralentissent la croissance.

* 400 Analysée notamment par l 'Observatoire Consulaire des Entreprises en Difficultés (OCED) de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris dans un rapport du 13 juillet 2017 : http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/rapport_adopte.pdf

* 401 Document CON/2017/22)(2017/C 236/02.

* 402 L'Association pour le Retournement des Entreprises (ARE) s'est constituée en 2002 et a pour vocation de regrouper l'ensemble des professionnels (avocats, expert-comptables, conseils, mandataires ad hoc, banquiers, fonds d'investissement, managers de crise, etc.) impliqués de façon régulière dans les opérations de retournement, de refinancement ou de restructuration.

* 403 Bankruptcy Code Section 1129(a)(7) is known as the «Best Interests of Creditors» or «Best Interests» test. 11 U.S.C. § 1129(a)(7).  It is one of thirteen requirements that a plan proponent must satisfy in order to obtain confirmation of its plan of reorganization, guaranteeing that unless it otherwise agrees, each creditor or interest holder will receive at least as much under the plan as it would in a liquidation of the debtor in a chapter 7 case. In other words, it establishes a «floor» with respect to the level of recovery to which creditors and interest holders are entitled pursuant to any confirmed plan of reorganization. The test only applies to creditors in impaired classes of creditors. The point of a Chapter 11 is that it was the tool created by Congress to allow businesses to continue operating if its creditors believed it could pay more by continuing to operate than if it was liquidated.  In other words, the company was «worth more alive than dead.

Source : Culhane Meadows, Business Reorganization and Bankruptcy,Subpractice Group.

* 404 « Transposition du projet de directive sur l'harmonisation des procédures de restructuration préventive en Europe, une chance à saisir pour la France », Reinhard Dammann, Avocat associé Clifford Chance, Chargé de cours à Sciences Po et Mylène Boché-Robinet, Avocat à la Cour, Clifford Chance ; Recueil Dalloz 2017 p. 1264.

* 405 C'est-à-dire une classe qui est « in the money » ou « where the money breaks ».

* 406 En d'autres termes, un actionnaire, qui est « out of the money » ne doit pas être en mesure d'empêcher l'adoption d'un plan de restructuration qui permet de sauver l'entreprise.

* 407 Il s'agit de transformer les dettes d'une société envers des tiers (banques, fournisseurs, et de plus en plus des investisseurs financiers) en capitaux propres . Au cours d'une telle transaction, les créanciers « renoncent » à leurs créances envers la société et, en contrepartie, reçoivent des parts sociales ou des actions de leur ancien débiteur. Les participations des anciens actionnaires se trouvent alors diluées. Cela peut prendre la forme d'un rachat de dettes (un créancier transforme sa dette en capitaux propres) ou de de participations croisées (deux sociétés s'échangent respectivement une partie de leur capital).

* 408 La décision du Conseil constitutionnel a édicté des conditions particulièrement strictes qui justifient une exclusion forcée de l'actionnaire. Mais le Conseil constitutionnel a également visé la seule véritable justification des dispositifs de dilution et de cession forcée, tirée de ce que, sans cela, le gage commun des créanciers risque d'être affecté et, partant, les créanciers ruinés par la défaillance de la société que la procédure collective n'aura pas su éviter.

* 409 La date d'ouverture de ce délai de trois ans variera selon que l'entrepreneur effectue des paiements en faveur de créanciers dans le cadre d'un plan de remboursement ou que la procédure consiste uniquement en une réalisation des actifs.

* 410 « Objet social de l'entreprise : gare aux contorsions de la règle de droit », Sophie Vermeille, Régis Bourgueil, L'Opinion, 21 janvier 2018.

* 411 « Comment améliorer le traitement des entreprises en difficulté », Les Échos, 26 juillet 2017.

* 412 Les prêts "douteux", en défaut ou presque (les Non-Performing Loans - NPL), sont considérés comme tels, selon la définition internationale, lorsque les remboursements accusent un retard d'au moins 90 jours. Autrement dit, la situation est largement désespérée, la reprise des remboursements étant peu probable.

* 413 « Non-performing loans in the Banking Union: state of play », 13 juillet 2017.

* 414 http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/054000230.pdf

* 415 « Présentation d'un avant-projet de réforme des sûretés » Michel Grimaldi, Denis Mazeaud, Philippe Dupichot, Secrétaire général de l'Association Henri Capitant, Recueil Dalloz 2017 p. 1717.

* 416 Selon l'article précité : « en affirmant le caractère exclusif du droit qui découle d'un nantissement de créance, en reconnaissant la possibilité - jusqu'alors débattue - d'établir un gage sur des meubles immobilisés par destination, ou en dotant le nantissement de monnaie scripturale du régime qui lui fait actuellement défaut. De même est-il temps de tirer les conséquences de la modernisation du droit commun du gage opérée en 2006 en supprimant des régimes spéciaux rendus inutiles (warrant hôtelier, warrant industriel, gage commercial, etc.) ».

* 417 Idem : « consécration de la fiducie par la loi n° 2007-211 du 19 février 2007 et l'ordonnance n° 2009-112 du 30 janvier 2009, réforme du gage des stocks par l'ordonnance n° 2016-56 du 29 janvier 2016, réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, sans oublier les réformes successives des procédures d'insolvabilité ».

* 418 http://henricapitant.org/storage/app/media/pdfs/travaux/avant-projet-de-reforme-du-droit-des-suretes.pdf

* 419 « Note sur l'avant-projet de loi sur la réforme du droit des sûretés », Sophie Vermeille, Benjamin Fremaux, Octobre / novembre 2017, Droit et Croissance.

* 420 Ce principe consiste à accorder plus d'importance  à la substance économique des opérations (prééminence de la réalité économique sur l'apparence) et d'en tenir compte, lors de la comptabilisation, même si la forme juridique de celles-ci donne l'impression qu'un traitement différent est nécessaire.

* 421 Sûreté mobilière qui grève l'ensemble des biens de la société qui l'a créée afin de garantir sa dette. Elle permet à l'entreprise d'utiliser les biens visés dans le cours normal de ses affaires.

* 422 Paris Europlace est l'organisation en charge de développer et promouvoir au plan international la Place financière de Paris et, d'une manière générale, l'industrie financière française dont elle fédère l'ensemble des parties prenantes : entreprises émettrices, investisseurs, intermédiaires bancaires et financiers, professions juridiques et comptables, sociétés de conseil, autorités de marchés, soit plus de 400 membres. L'association est présidée par Gérard Mestrallet, Président du conseil d`administration d'ENGIE.

* 423 « Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée ».

* 424 Solde entre les créances clients, nettes des avances et acomptes reçus, et les dettes fournisseurs, nettes des avances et acomptes versés.

* 425 « Ce phénomène peut s'expliquer par des effets de composition sectorielle, puisque 46 % des PME et 59 % des micro-entreprises font partie des secteurs de l'hébergement et restauration et du commerce, qui ont un avantage structurel en matière de délais clients, alors que seules 31 % des grandes entreprises et 35 % des ETI appartiennent à ces secteurs » in « Les délais de paiement clients ne s'améliorent plus depuis cinq ans », Bulletin de la Banque de France n° 215, janvier-février 2018.

* 426 « Les délais de paiement clients ne s'améliorent plus depuis cinq ans », Bulletin de la Banque de France n° 215, janvier-février 2018.

* 427 La nouvelle version au 1 er octobre 2017 est adossée à la norme ISO20400 : « 2017 Achats Responsables-Lignes directrices ».

* 428 Depuis le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique, une indemnité forfaitaire de 40 euros est due en cas de retard de paiement, et s'applique aux pouvoirs adjudicateurs.

* 429 Article 1728 du code général des impôts.

* 430 Articles 1730 et suivants du code général des impôts.

* 431 Depuis le décret n°2016-941 du 8 juillet 2016.

* 432 Personnes morales de droit privé, commerçants, artisans, professions libérales ou agriculteurs.

* 433 En cas de demande de remise de dettes intervenant dans le cadre d'une procédure de conciliation, de sauvegarde ou de redressement judiciaire, le débiteur, le conciliateur, l'administrateur ou le mandataire ad hoc peut également saisir la CCSF dans les 2 mois à compter de la date d'ouverture de la procédure.

* 434 Seules les entreprises, constituées sous forme de sociétés commerciales, sont éligibles à ce dispositif, sous réserve qu'elles soient en situation régulière à l'égard de leurs obligations fiscales et sociales.

* 435 Il peut en effet accélérer le règlement des créances des entreprises sur les collectivités publiques ; relever le plafond des obligations cautionnées en matière de TVA ; aider l'entreprise à mettre en place un plan de restructuration ou de refinancement ; organiser une négociation sur la base des propositions de redressement de l'entreprise ; intervenir dans le cadre des compétences propres à chacun de ses membres afin de résoudre un problème de trésorerie affectant l'entreprise. Dans ce cas, cette intervention peut aboutir à la transmission des demandes de règlement des dettes fiscales et sociales à la CCSF géographiquement compétente.

* 436 Rapport d'information n° 440 (2016-2017) du 23 février 2017, relatif aux moyens de favoriser la transmission d'entreprise au bénéfice de l'emploi dans les territoires, de MM. Claude NOUGEIN et Michel VASPART.

* 437 Instauré par l'article 43 de la loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique, le « pacte Dutreil » (article 787 B du CGI) est une mesure destinée à préserver la pérennité des entreprises au moment de leur transmission, qu'elle soit subie (décès) ou choisie (donation ) . Il a pour objectif d'éviter que les héritiers d'un chef d'entreprise ne soient obligés, lors de son décès, de vendre l'activité professionnelle pour payer les droits de succession. L'objectif affiché est donc d'assurer la pérennité du tissu économique français par l'allègement du coût fiscal de la transmission d'entreprise dans un cadre familial. Ainsi, ce dispositif permet, si certaines conditions sont réunies, de faire bénéficier la transmission d'une entreprise familiale d'une exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit (droits d'enregistrement des donations et succession) à hauteur de 75 % , permettant ainsi une taxation de la transmission limitée à 25 % de la valeur de l'entreprise.

* 438 Think tank créé en 1997, premier réseau français des entrepreneurs de croissance, se définissant comme un « réseau performant d'entrepreneurs qui a vocation à développer l'esprit d'entreprise ».

* 439 Pour la France, l'engagement Dutreil permet d'appliquer un abattement de 75 % sur la valeur des titres transmis avant de les soumettre aux droits de mutation. Le taux maximal de 45 % porte sur les 25 % restants (soit 11,25 %) mais lorsque la transmission est réalisée en pleine propriété, ils sont encore réduits de 50 % si le donateur a moins de 70 ans, soit un taux de 5,63 %.

* 440 Proposition de loi n° 539 du 6 avril 2016 de M. Claude Nougein et plusieurs de ses collègues, tendant à faciliter la transmission des entreprises familiales pour sauvegarder l'emploi local.

* 441 Commentaire de la décision n°2003-477 DC du 31 juillet 2003 sur la loi pour l'initiative économique.

* 442 Association des jeunes professionnels du restructuring, contribution à la loi PACTE, 5 février 2018.

* 443 Même si l'activité est cessée en cours d'année civile, le micro-entrepreneur n'est redevable d'aucun reliquat de charges sociales ou d'impôt sur le revenu au titre de son activité professionnelle (au-delà de son dernier chiffre d'affaires déclaré).

* 444 Par exemple, une fermeture en mars 2018 empêche de créer une nouvelle entreprise avant le 1 er janvier 2020.

* 445 RCS, répertoire des métiers et de l'artisanat, registre spécial des agents commerciaux ou registre spécial des EIRL (RSEIRL), répertoire Sirene, fichiers des affiliés professionnels des organismes sociaux, fichiers des professionnels actifs gérés par l'administration fiscale.

* 446 Pour une personne morale ou une société : imprimé n° 2065 et ses annexes ; pour une entreprise individuelle (commerçant, artisan, etc.) soumise à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC : imprimé n° 2031 et ses annexes ; pour une entreprise individuelle (profession libérale par exemple) ou une société soumise à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BNC : imprimé n° 2035 et ses annexes ; pour les bénéfices agricoles : régime agricole simplifié (imprimé n° 2139) ou régime réel normal (imprimé n° 2143) .

* 447 Modèle de déclaration CA12 .

* 448 Modèle de déclaration CA3 .

* 449 Pour les entreprises, ou personnes exerçant une activité professionnelle non salariée, qui réalisent plus de 500 000 euros de chiffre d'affaires hors taxe, quel que soit leur statut juridique, leur activité ou leur régime d'imposition. Cependant, toutes les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152 500 euros doivent effectuer la déclaration de valeur ajoutée et des effectifs salariés qui sert à en déterminer la base d'imposition, même si elles ne sont pas redevables de la CVAE.

* 450 Étant donné que les cotisations sont provisionnelles (les cotisations maladie-maternité, invalidité-décès, indemnités journalières, retraite de base et complémentaire, allocations familiales et CSG-CRDS sont calculées sur le revenu professionnel de l'année précédente N-1), si la cessation d'activité a lieu en 2018, les cotisations et contributions calculées sur les revenus de l'année 2016 ont été versées et l'entreprise est redevable des cotisations et contributions calculées sur les revenus des années 2017 et 2018, déduction faite des éventuels versements déjà effectués.

* 451 Un créancier chirographaire est un créancier simple, c'est-à-dire ne disposant d'aucune garantie particulière (privilège, nantissement, hypothèque) lui permettant d'être payé avant les autres créanciers sur le prix de vente des biens de son débiteur. Il dispose seulement, comme garantie du paiement de sa créance, de l'ensemble des biens actuels et à venir de son débiteur. Il peut toutefois être garanti sur un autre patrimoine que celui de son débiteur, par exemple par un cautionnement accordé par un tiers. S'il n'est pas payé, un créancier chirographaire peut faire vendre les biens de son débiteur pour se payer sur le prix de vente, mais il est en concurrence avec tous les autres créanciers. C'est en ce sens que l'on dit que le patrimoine du débiteur est le gage commun de ses créanciers. Toutefois, lorsque le débiteur fait l'objet d'une procédure collective, le créancier chirographaire ne peut exercer de telles poursuites individuelles pendant la durée de la procédure. Et, en cas de liquidation judiciaire, seul le liquidateur peut solliciter du juge-commissaire une décision permettant la vente des actifs de ce débiteur. Lors de la vente des biens du débiteur, le créancier chirographaire vient après les créanciers privilégiés . Ensuite la répartition du solde éventuel se fait au marc le franc , c'est-à-dire que les sommes sont réparties entre les différents créanciers chirographaires au prorata de leur créance.

* 452 Comme en témoigne son article 1 er qui énonce : « Il est institué une procédure de redressement judiciaire destinée à permettre la sauvegarde de l'entreprise, le maintien de l'activité et de l'emploi et l'apurement du passif ».

* 453 Dans la loi de 1985, l'article 40 régissait les dettes postérieures à l'ouverture de la procédure , qui, selon la loi, doivent être payées en priorité par rapport aux dettes antérieures (à quelques exceptions près). Ce passif postérieur était couramment appelé "passif de l'article 40". Cet article a été codifié au L.622-17 du code de commerce. Cependant le terme de « passif de l'article 40 » est encore souvent employé, de manière qui n'est donc plus juridiquement appropriée, mais qui est toujours comprise comme désignant le passif postérieur.

* 454 Amendement de MM. Jean-Jacques Hyest et Philippe Marini, alors, respectivement, président de la commission des Lois et Rapporteur général de la commission des Finances du Sénat. La procédure s'inspire de la technique américaine du prepack et du scheme of arrangement anglais.

* 455 R apport n° 90 (2015-2016) de M. Christophe-André Frassa.

* 456 Décision n° 2014-399 QPC du 06 juin 2014 - Société Beverage and Restauration Organisation SA.

* 457 Selon l'article D. 628-3 du code de commerce, le nombre de ses salariés doit être supérieur à 20, ou le montant du chiffre d'affaire supérieur à 3 millions d'euros ou un total de bilan supérieur à 1,5 million d'euros.

* 458 Outre des modifications sur les compétences des tribunaux de commerce et la réforme qu'elle comporte du statut des administrateurs et mandataires judiciaires.

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