CONCLUSION GÉNÉRALE
Depuis les années 1990, force est de constater que l'État a abandonné toute ambition en matière d'aménagement du territoire. Jadis, acteur clé de l'organisation du territoire, son rôle est désormais limité au mieux à celui de facilitateur quand il n`est pas totalement désengagé. Le rôle dévolu au CGET (ex- DATAR), autrefois bras armé de l'État pour l'aménagement du territoire, en est l'illustration la plus flagrante. Ce dernier ne constitue plus qu'une structure vidée de sa substance, de ses moyens d'actions et de toute ambition même.
Le groupe de travail a pu constater à travers les auditions, les contributions d'élus et la consultation publique en ligne une demande forte d'aménagement du territoire.
Cette attente se comprend quand on observe les disparités territoriales en termes d'emploi, de services à la population, de couverture numérique ou encore d'accès aux soins. Ce constat est indissociable de l'échec des politiques mises en oeuvre ces dernières années et de l'absence de vision des gouvernements successifs en la matière. La mise en oeuvre de politiques sectorielles et de dispositifs épars sans cohérence globale s'est substituée à toute ambition d'aménagement du territoire. La créativité sémantique de ces dernières années - que ce soit le concept d' « égalité des territoires » ou le changement récurrent de noms du CGET - cache mal l'absence de doctrine et de vision stratégique de l'État.
Cette démission des pouvoirs publics est d'autant plus regrettable que les transformations profondes touchant l'aménagement du territoire appellent plus que jamais à une action renouvelée et forte des pouvoirs publics. Les dynamiques de mondialisation économique, et de métropolisation qui l'accompagne, de décentralisation, de construction européenne ou encore de développement durable sont autant de défis qui ont éprouvé notre modèle.
La conséquence de la « passivité » de l'État est un accroissement sans précédent des inégalités entre les territoires et le sentiment pour une partie de la population d'être « oubliée de la République». La disparition des services publics et des installations de proximité ou encore les difficultés grandissantes d'accès aux soins, aux facilités de transport ou au monde numérique exacerbent le sentiment d'injustice et de déclassement. Les résultats obtenus par le Front National lors du dernier scrutin présidentiel en attestent malheureusement.
Face à ce constat, la seule issue est une nouvelle politique d'aménagement du territoire forte et volontariste impliquant des évolutions institutionnelles et l'ensemble des parties prenantes (élus, administrations locales et centrales, acteurs privés, etc.).
Cette nouvelle politique d'aménagement du territoire plus que jamais nécessaire doit s'appuyer sur le binôme Région-EPCI qui a désormais un rôle majeur à jouer. Pour autant celui-ci n'exempte pas, bien au contraire, l'Etat d'être à nouveau un acteur de premier rang. Il doit être stratège, régulateur et en dernier ressort aménageur.
Les politiques actuelles, caractérisées par un enchevêtrement de zonages illisible et contre-productif, sont vouées à l'échec. La contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales apparaît comme le moyen de pilotage le plus adapté pour assurer une cohérence au niveau national.
Cette nouvelle ambition doit afficher des objectifs clairs concentrés sur des politiques identifiées. Deux grandes priorités pour lesquelles la demande est forte se dégagent : l'accessibilité numérique et la lutte contre les déserts médicaux. L'état des infrastructures de transport devient alarmant et nécessite une mobilisation des pouvoirs publics. Le maintien de services publics de proximité est impératif et appelle des solutions innovantes. Les conséquences d'une telle ambition doivent être tirées par l'État en apportant aux opérateurs de ces programmes (agence, collectivités, etc.) un financement à la hauteur des enjeux.
A défaut d'un État qui prendrait à bras-le-corps l'aménagement du territoire, la situation économique et sociale du pays ne pourrait que s'aggraver. Le sentiment d'abandon déjà largement ressenti par les populations « oubliées » ne ferait que s'accroître avec à la clef des conséquences politiques graves. Le Président de la République récemment élu a créé un ministère de la Cohésion des territoires. Derrière ce nouveau changement de terminologie, il faut espérer une réelle volonté d'agir en faveur des territoires. C'est le souhait du groupe de travail qui invite le nouveau gouvernement à mettre en oeuvre ses propositions.