CONCLUSION
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente du groupe d'études sur les médias et les nouvelles technologies
Je vous remercie de ces échanges complets et des pistes évoquées qui vont nourrir la réflexion de l'ensemble des sénateurs membres du groupe d'études sur les médias et les nouvelles technologies, rattaché à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Nous avons toujours besoin de nous nourrir régulièrement des réflexions de ceux qui font l'audiovisuel et la création en France.
Nous pouvons peut-être retenir quelques idées des échanges que nous avons eus et, en tout cas, faire un certain nombre de constats :
- la révolution numérique dont nous ne savons pas où elle va s'arrêter - une innovation en chassant pratiquement tous les jours une autre - nous contraint à beaucoup d'adaptabilité et de réactivité. Son caractère est complexe. Vous l'avez tous souligné, vous avez employé à plusieurs reprises le mot « complexe ». C'est un facteur à prendre en compte. Nous constatons que les acteurs français ont été pionniers dans cette révolution avec la télévision de rattrapage dès 2007-2008. Cela veut dire que nous avons des capacités d'adaptation et d'inventivité sur ces questions ;
- j'ai retenu que les usages et la multiplication des supports ne se concurrencent pas mais, au contraire, se complètent et vous avez d'ailleurs développé des stratégies pour répondre à la demande de l'ensemble des téléspectateurs. On voit d'ailleurs que ces nouveaux supports offrent de nouvelles possibilités, favorisent de nouveaux comportements et permettent de nouveaux usages ;
- vous avez également tous souligné l'individualisation des comportements à cet égard. Nous notons aussi que l'offre française, qu'elle soit gratuite ou payante, linéarisée ou à la demande, est abondante et de grande qualité ;
- vous avez aussi souligné le problème du piratage très évolutif et très complexe.
Je note également qu'il y aura plusieurs défis pour l'avenir :
- comment peut-on préserver notre modèle de production qui demande des investissements importants avec l'arrivée d'acteurs à bas coût et surtout d'acteurs extra-européens qui ne s'acquittent pas des mêmes obligations que les acteurs français et européens et introduisent une concurrence déloyale ?
- la plupart de ces acteurs ont créé des services d'intermédiation quasi obligatoires et incontournables qui bouleversent complètement la chaîne de valeur et ces acteurs vont préempter la valeur ajoutée de ces nouveaux usages et de ces nouveaux services sans pour autant contribuer à l'effort de diversité culturelle. En conséquence, comment préserver la diversité culturelle ?
- comment relever le challenge technologique des logiciels de recommandation de programmes qui remettent aussi en question la notion d'éditeur ?
- comment assurer l'équité des règles de compétitivité et lutter contre les nouvelles formes de piratage ?
- enfin, comment assurer la pérennité des nouveaux modèles économiques qui ont émergé, encore une fois sous la pression d'acteurs extra-européens, dans le contexte d'une migration de la publicité sur d'autres supports et d'une publicité qui peut être évitée ?
Je retiens aussi un point qui n'a pas été développé : le fait qu'aujourd'hui, les données personnelles, le nouveau carburant de l'économie numérique en général, permet d'aller chercher de nouveaux clients, ou spectateurs, ou utilisateurs. C'est une question qui mérite d'être soulignée dans le monde très concurrentiel de l'hyper choix dans lequel nous vivons. Nous savons bien que cette question ne pourra être résolue qu'au niveau européen avec notamment l'adoption de dispositions législatives communes.
Enfin, la question de la régulation de l'Internet par le CSA reste quelque chose qui paraît assez utopique et d'une extrême complexité même si c'est une vraie question qui est posée.
N'hésitez pas à revenir vers nous s'il y a des points qui n'ont pas pu être évoqués lors de cette séance, transmettez-nous vos remarques complémentaires qui nous seront extrêmement utiles. Tout ceci a été enregistré et va faire l'objet d'une relecture attentive par notre groupe et par notre commission.