II. CARACTÉRISÉES PAR DE PROFONDES INÉGALITÉS DE REVENUS, LES SOCIÉTÉS ULTRAMARINES DOIVENT FAIRE FACE À DES MUTATIONS DÉMOGRAPHIQUES PARTICULIÈREMENT ALARMANTES AU REGARD DE LEURS DIFFICULTÉS ÉCONOMIQUES

Les écarts de niveau de vie observés entre les outre-mer et l'hexagone s'expliquent pour l'essentiel par les particularités démographiques et économiques des sociétés ultramarines.

Celles-ci demeurent très dépendantes de la sphère publique tandis que les suppléments de rémunérations servis aux fonctionnaires et à un certain nombre d'agents de la sphère publique et para-publique tendent à accentuer les inégalités.

Elles sont par ailleurs marquées par la permanence d'un niveau de chômage important, qui pourrait renforcer les difficultés de financement de la protection sociale dans les outre-mer où les populations connaissent un vieillissement démographique particulièrement rapide.

A. DE FORTES INÉGALITÉS ENTRETENUES PAR LES COMPLÉMENTS DE RÉMUNÉRATION DANS LA FONCTION PUBLIQUE

1. Des inégalités de revenus beaucoup plus marquées que dans l'hexagone et une plus grande prévalence des situations de pauvreté
a) De profondes disparités de revenus

L'ensemble des outre-mer se caractérise par des inégalités de revenus nettement plus marquées que dans l'hexagone.

De façon générale, les ménages domiens appartenant aux 20 % les plus riches disposent en effet d'un revenu plancher par unité de consommation 3,2 fois supérieur au revenu plafond des ménages appartenant aux 20 % les plus modestes, tandis que dans l'hexagone ce rapport s'élève à 2,2 37 ( * ) .

L'INSEE signale un accroissement des inégalités entre 2001 et 2006 dans des proportions plus importantes que dans l'hexagone, alors que ces inégalités avaient eu tendance à se résorber au cours de la période précédente allant de 1995 à 2001.

La Réunion serait, selon une récente étude Compas 38 ( * ) , le département français le plus exposé aux inégalités de revenus. L'indice de Gini 39 ( * ) y atteint 0,53, soit un niveau plus élevé que celui de Paris, qui constitue le département le plus inégalitaire de l'hexagone. Le DOM affichait par ailleurs un rapport inter-décile 40 ( * ) de 5 en 2013 contre 5,4 en 2008 et 4,4 en 2000, alors que ce rapport est de 3,6 dans l'hexagone en 2010 41 ( * ) . En 2008, les 20 % les plus pauvres se partageaient 7 % du total des revenus disponibles tandis que les 20 % les plus aisées en captaient près de 47 %.

La Guyane se situe à l'autre extrémité de l'échelle des inégalités parmi les DOM. Le rapport inter-décile s'y élevait en effet à 10,7 en 2008 .

S'agissant de Mayotte , le rapport inter-décile a été ramené de 12,6 en 1995 à 9,7 en 2005 42 ( * ) . Les disparités de revenus se sont donc atténuées en l'espace de dix ans mais elles demeurent très élevées. Les revenus des personnes les plus riches y sont encore près de dix fois supérieurs à ceux des plus pauvres. L'écart est trois fois plus important que dans l'hexagone et près de deux fois plus qu'à La Réunion . Ainsi, en 2005, 40 % du total des revenus mahorais par unité de consommation étaient perçus par environ 11,5 % des personnes les plus aisées. Dans le même temps, la moitié la plus pauvre de la population se partageait un peu plus de 17 % du total des revenus distribués.

Le tableau suivant récapitule, pour l'hexagone et pour chacun des DOM, les revenus médians et les rapports inter-déciles pour l'année 2006.

Comparaison des revenus médians et des rapports inter-déciles
entre les DOM et l'hexagone en 2006

Revenu médian en euros

Rapport inter-décile D9/D1

Hexagone

15 372

3,6

La Réunion

9 445

5,4

Moyenne DOM (sans Mayotte)

9 552

6,3

Guadeloupe

9 208

6,7

Martinique

10 130

7,2

Guyane

9 219

10,7

Mayotte (2005)

2 417

9,7

Source : DGOM à partir de l'enquête INSEE « BdF », 2006

Les COM n'échappent pas, loin s'en faut, à cette situation d'exacerbation des inégalités de revenus par rapport à l'hexagone.

En 2008, selon l'ISEE, la moitié des ménages calédoniens les plus fortunés se partageait 79 % des ressources, contre 69 % dans l'hexagone . Les 20 % des ménages détenant les plus hauts revenus captaient près de 47 % du total des revenus et percevaient 7 833 € par mois en moyenne, soit 40 % de plus que les 20 % des ménages hexagonaux affichant les plus hauts revenus. En Nouvelle-Calédonie en 2008, les plus riches ont eu un niveau de vie 7,9 fois supérieur à celui des plus modestes alors que ce rapport inter-décile s'établit à 3,6 pour l'hexagone.

Le niveau atteint par le coefficient de Gini rapproche davantage la Nouvelle-Calédonie des pays en développement que des pays développés. Il indique en outre un creusement des inégalités au cours des deux dernières décennies . En légère augmentation de 0,41 à 0,42 entre 1991 et 2008, cet indice stagne aujourd'hui à un niveau analogue à celui de pays comme le Burundi ou la Thaïlande. Par comparaison, sa valeur est d'environ 0,33 en France comme en Belgique.

Les inégalités observées en Nouvelle-Calédonie sont comparables à celles qui existent en Polynésie française, bien que celle-ci affiche un PIB inférieur au PIB calédonien. Le cinquième des ménages polynésiens les plus aisés capte en effet près de la moitié (47 %) du revenu total des ménages tandis que le cinquième le plus pauvre en perçoit à peine 6 % .

Comparaison des inégalités de revenus des collectivités du Pacifique
avec le niveau national, l'Australie et la Nouvelle-Zélande (en 2008)

Indice de Gini

Rapport inter-déciles (D9/D1)

France

0,32

3,4

Australie

0,35

4,5

Nouvelle-Zélande

0,36

4,2

Polynésie française

0,4

6,1

Nouvelle-Calédonie

0,42

7,9

Wallis-et-Futuna

0,5

nd

Source : réponses de la DGOM au questionnaire de vos rapporteurs

b) Une grande prévalence des situations de pauvreté, reflétée dans la structure de consommation des ménages

La plus grande dispersion des niveaux de vie outre-mer a pour conséquence mécanique des taux de pauvreté plus élevés 43 ( * ) .

En prenant pour référence les seuils de pauvreté régionaux spécifiques à chaque collectivité ultramarine, les taux de pauvreté s'étageaient de 17 % de la population néo-calédonienne à plus de 26,5 % de la population guyanaise contre 13,2 % de la population hexagonale en 2006.

Entre 2001 et 2006, parallèlement au creusement des inégalités, la proportion de ménages pauvres a augmenté de 4 points aux Antilles, de 3 points à La Réunion et de 1,5 point en Guyane, contre 1,2 point dans l'hexagone. Il semble cependant que la tendance se soit inversée entre 2007 et 2010 à La Réunion où le niveau de vie médian s'est accru de 11 % en euros constants (contre + 2,7 % pour l'hexagone) et où le taux de pauvreté est passé de 46,5 % à 42 %. Il est à craindre que la tendance se soit à nouveau retournée à compter de 2011 sous l'effet de la crise et d'une forte augmentation du chômage.

À Mayotte, selon les résultats de l'enquête « BdF », un cinquième de la population vivait en 2005 sous le seuil de pauvreté monétaire mahorais , fixé à 50 % de la valeur médiane (soit 1 209 € annuels).

Les écarts sont encore plus prononcés avec l'hexagone lorsque l'appréciation se fonde sur le seuil de pauvreté national, ce qui reflète l'ampleur des écarts de niveau de vie : 38 % des ménages martiniquais disposaient d'un revenu inférieur à 60 % du revenu médian national en 2006. Cette proportion atteignait 46 % en Guadeloupe, 49 % à La Réunion et 50 % en Guyane la même année .

En 2005, plus de 90 % de la population mahoraise disposait d'un revenu inférieur au seuil de pauvreté national fixé à 50 % du revenu médian, soit 7 884 € annuels.

La pauvreté est également plus fréquente dans les collectivités du Pacifique. Selon l'enquête sur les conditions de vie en Polynésie française, près de 20 % des ménages polynésiens , soit 27,6 % de la population, disposaient d'un revenu inférieur au seuil de pauvreté régional (4 896 € par an) en 2009. La situation s'est dégradée puisque l'enquête sur les budgets de famille de 2000-2001 fixait cette proportion à 18 % des ménages polynésiens.

De même, en Nouvelle-Calédonie , 21 % des ménages se situaient sous le seuil de pauvreté relative, entendu comme la moitié du revenu médian. Ce taux est trois fois supérieur à celui de l'hexagone et deux fois plus élevé que la moyenne de l'OCDE .

Taux de pauvreté dans l'hexagone et les outre-mer en 2006

En fonction du seuil de pauvreté régional

En fonction du seuil de pauvreté national

Hexagone

13,2 %

13,2 %

Nouvelle-Calédonie*

17,0 %

nd

La Réunion

17,0 %

49 %

Guadeloupe

17,8 %

46 %

Polynésie française (2009)

19,7 %

nd

Martinique

19,8 %

38 %

Guyane

26,5 %

50 %

Mayotte (2005) *

27,6 %

92 %

Wallis-et-Futuna

nd

nd

Saint-Pierre-et-Miquelon

nd

nd

Sources : INSEE, ISEE, ISPF, AFD

*Le seuil de pauvreté est défini comme 60 % du revenu médian, sauf à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie où il correspond à 50 % du revenu médian de référence.

NB : en 2006, le seuil de pauvreté s'élevait à 10 560 € annuels dans l'hexagone. Les seuils de pauvreté régionaux s'établissaient à 7 394 € à la Martinique, 6 806 € en Guadeloupe, 5 952 € en Guyane et 5 676 € à La Réunion.

Cette prévalence des situations de pauvreté outre-mer se reflète dans la structure moyenne de consommation des ménages ultramarins, qui se caractérise par l'importance des dépenses contraintes.

Les enquêtes « BdF » renseignent sur le poids des grands postes de consommation dans le budget des ménages. Si l'alimentation, le logement et les transports constituent de façon générale les trois premiers postes de dépenses, leur place respective varie selon le niveau de vie. Le poids des dépenses consacrées à l'alimentation a tendance à diminuer à mesure que le niveau de vie s'élève.

S'agissant tout d'abord du logement , ce poste représente une proportion de dépenses des ménages se situant sous le seuil de pauvreté allant de 19,4 % en Guadeloupe à 25,8 % à La Réunion, pour 27,5 % dans l'hexagone. Cette moindre proportion dans les budgets ultramarins les plus modestes s'explique notamment par des conditions d'habitat beaucoup plus frustes. En revanche, pour les ménages se situant au-dessus du seuil de pauvreté, la part des dépenses consacrées au logement est quasiment identique à celle des ménages hexagonaux sauf pour la Guyane où cette part est supérieure à celle de l'hexagone.

Part des dépenses de logement et des dépenses afférentes en 2006
(y compris eau, électricité et combustibles dans le budget des ménages)

(En %)

Ménages sous le seuil
de pauvreté

Ménages au-dessus
du seuil de pauvreté

Hexagone

27,5

15

La Réunion

25,8

15

Guadeloupe

19,4

14,3

Martinique

19,7

14,8

Guyane

21,4

18,5

Mayotte (2005)

5

nd

Source : INSEE, enquête « BdF », 2006 (enquête BdF 2005 pour Mayotte)

Compte tenu de la densité élevée de population et de la forte pression foncière qui caractérisent généralement les outre-mer, le poids de cette catégorie de dépenses contraintes a un impact significatif sur le niveau de vie des ultramarins.

À La Réunion en particulier, l'accession à la propriété apparaît de plus en plus difficile. Selon l'Observatoire des transactions immobilières et foncières, le prix des terrains a triplé entre 2000 et 2008 tandis que celui des maisons a doublé. Avec un prix intermédiaire dans l'ancien avoisinant 207 000 €, le coût de l'achat d'une maison y est supérieur de 10 000 € à la moyenne nationale (hors Île-de-France et Corse).

Les produits alimentaires absorbent une plus grande part du budget des ménages ultramarins que de celui des ménages hexagonaux, en particulier lorsque les ménages se situent en-deçà du seuil de pauvreté.

En 2006, l'alimentation représentait en effet 16,4 % des dépenses des ménages les plus modestes dans l'hexagone contre plus d'un cinquième à La Réunion et en Guadeloupe . À Mayotte, la part des dépenses consacrées aux produits alimentaires a baissé de dix points entre 1995 et 2005 mais demeure toujours largement supérieure à la part qui y est consacrée par les ménages hexagonaux. En 2005, ces dépenses représentaient 39,4 % du budget des ménages situés sous le seuil de pauvreté local.

Part des produits alimentaires dans le budget des ménages (2006)

(En %)

Ménages sous le seuil
de pauvreté

Ménages au-dessus
du seuil de pauvreté

Hexagone

16,4

15,3

La Réunion

20,1

17,1

Guadeloupe

21,6

16,8

Martinique

19,1

16,1

Guyane

16,9

14,7

Mayotte

39,4

nd

Source : INSEE, enquête «BdF », 2006

Les ménages des collectivités ultramarines du Pacifique consacrent une part généralement encore plus importante de leur budget à l'alimentation que les ménages domiens.

En Polynésie française 44 ( * ) , les dépenses d'alimentation représentent en moyenne 25 % de l'ensemble de leurs dépenses . À l'inverse, les dépenses allouées aux loisirs et à la culture correspondent à moins de 5 % du budget des ménages polynésiens contre 10 % pour les ménages hexagonaux.

En Nouvelle Calédonie 45 ( * ) , l'alimentation représente 18 % de la consommation des ménages, soit une proportion légèrement supérieure à celle de l'hexagone, de La Réunion et des Antilles mais plus faible qu'en Guyane ou en Polynésie française.

Enfin, selon l'enquête « BdF » réalisée à Wallis-et-Futuna , en 2005, l'alimentation représentait 21,2 % du budget des ménages wallisiens et futuniens.

Compte tenu de la cherté des produits alimentaires dans les outre-mer, le poids des dépenses qui leur sont consacrées constitue un facteur essentiel du moindre niveau de vie des populations ultramarines.

En Nouvelle-Calédonie, l'alimentation et le logement expliquent à eux seuls la moitié du différentiel des prix avec l'hexagone. En outre, la part des revenus des foyers calédoniens les plus modestes (premier décile) consacrés à l'alimentation est près du double de celle qu'y consacrent les foyers les plus aisés (dernier décile) 46 ( * ) .

Il convient de noter l'existence de pratiques d'autoconsommation particulièrement développées dans les outre-mer. À Wallis-et-Futuna, selon les informations transmises à vos rapporteurs par la DGOM, 80 % des ménages pratiquent l'autoconsommation, quel que soit le niveau de revenu mensuel moyen . Ainsi, en 2005, près des deux tiers de la consommation alimentaire des ménages ne s'étaient pas traduits en dépenses. L'autoconsommation était valorisée à plus de 19 millions d'euros, soit 26 % de la dépense totale.

De même, dans les Îles Loyauté et la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, une très grande partie des produits alimentaires provient de l'autoconsommation, si bien que la consommation non monétaire pèse pour environ 50 % dans l'alimentaire. Ces pratiques ne sont pas sans incidence sur les disparités de niveau de vie. Dans les îles Loyauté, l'apport de ressources non monétaires fait diminuer le rapport inter-décile de 13,2 à 9,3 tandis qu'il est ramené de 12,5 à 7 en province Nord.

L'autoconsommation représentait également un complément de revenus très significatif pour les ménages mahorais aux revenus les plus faibles . Selon les estimations réalisées pour l'année 2005, elle correspondait à environ 25 % de revenus supplémentaires.

c) Le poids des transferts sociaux dans la structure des revenus

La composition des ressources des ménages ultramarins diffère assez sensiblement de celle des ménages hexagonaux.

Si la part des revenus d'activité est proche, 62,4 % dans les DOM contre 60,5 % dans l'hexagone en 2006, en revanche, la part des ressources issues de pensions de retraite demeure inférieure dans les outre-mer (14,6 % dans les DOM contre 24,4 % dans l'hexagone en 2006). Cette proportion est particulièrement faible à La Réunion et surtout en Guyane où la population est plus jeune, mais s'approche de celle de l'hexagone en Guadeloupe (16,3 %) et surtout en Martinique (20,2 %). Cependant, le niveau inférieur de la part des retraites dans les revenus d'activité s'explique aussi par la proportion importante de « petites retraites » : cela se vérifie en particulier aux Antilles où, selon des données émanant de la Direction générale des impôts, plus de la moitié des retraités vivaient en 2010 avec moins de 639,94 € par mois, soit une somme inférieure au taux de pauvreté (803 € par mois pour une personne seule au niveau national en 2010, correspondant à 50 % du revenu médian). Cette situation était encore plus critique pour la Martinique où cette même année 53 % des retraités vivaient avec un revenu mensuel de 551,75 €. Ce phénomène s'explique notamment par le fait que l'application de la législation sur les retraites n'est parvenue que tardivement à son régime de croisière dans les DOM, à partir des années 1960, et que nombre de retraités ont des difficultés à reconstituer des carrières complètes.

Quant à la part des prestations sociales, elle apparaît nettement plus élevée outre-mer et laisse entrevoir une très grande dépendance à l'égard des minima sociaux .

Ainsi que l'indique le tableau ci-après, en 2006, les prestations sociales (allocations familiales, indemnités chômage, aides au logement, minima sociaux) représentaient en moyenne 20,8 % des ressources des ménages domiens contre 10,4 % des ressources des ménages hexagonaux , soit un rapport du simple au double. Leur proportion est particulièrement élevée à La Réunion (25,7 %) et s'établit à 20,6 % en Guyane, 17,6 % en Guadeloupe et plus de 15 % en Martinique.

Décomposition des ressources des ménages en 2006

(En %)

Revenus d'activité

Retraites, pensions

Allocations familiales et autres revenus

Minima sociaux

Indemnités chômage

Aides au logement

Revenus du patrimoine

Île-de-France

65,2

21,8

4,0

0,6

2,7

0,8

4,9

Hexagone hors IDF

59,1

25,2

5,8

1,1

2,7

1,4

4,8

Hexagone

60,5

24,4

5,4

1,0

2,7

1,3

4,8

DOM

62,4

14,6

8,1

6,4

3,7

2,6

2,1

Guyane

70,5

6,5

9,6

5,0

3,0

3,0

2,5

Guadeloupe

64,6

16,3

7,2

4,5

3,9

2,0

1,3

Martinique

62,1

20,2

6,1

4,4

2,5

2,1

2,6

La Réunion

60,2

11,9

9,4

8,8

4,4

3,1

2,2

Source : INSEE, enquête « BdF » (2006)

À Mayotte, selon l'enquête « BdF » (2005), la part des revenus provenant des prestations sociales atteignait 31 % chez les individus les plus pauvres. A contrario , les revenus d'activité représentaient 52 % de leurs ressources totales.

Parmi les différentes prestations sociales, ce sont surtout les minima sociaux et les allocations familiales dont la part est supérieure outre-mer. En 2006, les minima sociaux représentaient en moyenne 6,4 % des ressources des ménages dans les DOM contre 1,0 % dans l'hexagone . Ils constituent près de 9 % des ressources des ménages à La Réunion et environ 4,5 % des ressources des ménages antillais. À La Réunion, on compte quelque 157 000 allocataires de minima sociaux en 2012, soit 20 000 de plus qu'en 2007. Si l'on inclut conjoints et ayants droit, ces minima font vivre le tiers de la population réunionnaise.

Le poids des prestations sociales est particulièrement élevé dans les ressources des ménages modestes. Mais au cours des deux dernières décennies, qu'ils appartiennent au premier quintile ou au cinquième quintile de niveau de vie, la quasi-totalité des ménages domiens a vu la part relative de ces transferts croître dans ses ressources, quel que soit le département concerné.

Évolution de la part des prestations sociales dans le 1 er et le 5 e quintiles
de niveau de vie dans les DOM (sauf Mayotte) entre 1995 et 2006

(En %)

1 er quintile

5 e quintile

1995

2001

2006

1995

2001

2006

Guadeloupe

42,1

44,3

51,1

5,1

14,7

13,4

Martinique

35,8

43,7

54,1

2,1

12,5

16,5

Guyane

nd

nd

58,6

nd

nd

7,3

La Réunion

54,7

53,1

63,2

3,3

14,9

15,3

Source : réponses des directions régionales de l'INSEE
au questionnaire de vos rapporteurs (enquête BdF par sondage)

À cet égard, il convient de garder à l'esprit l'alignement progressif, depuis les années 1990, de la législation sociale applicable aux DOM sur celle de l'hexagone. Après l'alignement des salaires minimum achevé en janvier 1996, celui du revenu minimum d'insertion (devenu le RSA) a été réalisé en janvier 2002.

Aujourd'hui, d'après les indications transmises à vos rapporteurs par la DGOM, en incluant les conjoints et enfants à charge, une personne sur trois est couverte par les minima sociaux dans les DOM contre moins d'une sur dix dans l'hexagone.

L'importance des minima sociaux outre-mer

Le revenu de solidarité active (RSA)

Visant à compléter les ressources d'un foyer pour les porter à un niveau de revenu garanti, le RSA s'est substitué, depuis son entrée en vigueur dans l'hexagone le 1 er juin 2009, au revenu minimum d'insertion (RMI) et à l'allocation parent isolé (API).

Il a été introduit le 1 er janvier 2011 dans les départements et les collectivités d'outre-mer, à l'exception de la Polynésie française, de la Nouvelle-Calédonie et de Wallis-et-Futuna 47 ( * ) . Son extension à Mayotte a été réalisée à compter du 1 er janvier 2012 selon des modalités spécifiques et avec des montants représentant 25 % de ceux en vigueur dans les autres collectivités. Il doit être progressivement revalorisé pour atteindre 50 % du montant national en 2017.

Selon la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), à la fin de l'année 2012, le RSA était versé à près de 2,18 millions d'allocataires, dont 212 000 résidaient dans les DOM .

Près de 10 % des foyers touchant le RSA sont implantés outre-mer alors que la population ultramarine représente moins de 3 % de la population française totale.

On compte environ 490 000 personnes (bénéficiaires et ayants droit) couvertes par le RSA dans les territoires ultramarins.

Au 31 décembre 2012 selon l'INSEE, la part de la population totale couverte par le RSA atteignait ainsi 23,5 % dans les DOM (de 20,4 % en Martinique et 23,8 % en Guadeloupe à 24,4 % en Guyane et 29,5 % à La Réunion) contre 6,6 % dans l'hexagone . Au 30 juin 2012, la composante « socle seul » (destinée aux personnes ne bénéficiant d'aucun revenu professionnel) était perçue par 82,4 % des foyers bénéficiaires contre 64,5 % dans l'hexagone. Les femmes seules avec enfant représentent la catégorie la plus importante de bénéficiaires.

En 2011, le montant total de RSA versé au titre du régime général s'est élevé à près de 9,2 milliards d'euros, dont près d'un milliard d'euros dans les DOM (CNAF).

L'allocation de solidarité aux personnes âgées (minimum vieillesse)

Le minimum vieillesse regroupe un ensemble d'allocations qui permettent aux personnes âgées de soixante-cinq ans au moins (soixante ans en cas d'inaptitude au travail ou d'invalidité) et disposant de faibles revenus d'atteindre un seuil minimal de ressources.

Dans les outre-mer, le nombre de bénéficiaires du minimum vieillesse est très supérieur à la moyenne hexagonale. En 2012, la part des allocataires parmi les personnes âgées d'au moins soixante ans y atteignait 24 %, soit environ 70 000 personnes, alors que sur l'ensemble du territoire hexagonal, cette part s'élevait à 3,3 % selon la DREES 48 ( * ) .

En 2009, la part des bénéficiaires du minimum vieillesse dans la population des soixante-cinq ans et plus s'élevait à 19 % en Guyane, 28 % en Martinique, 30 % en Guadeloupe et 44 % à La Réunion 49 ( * ) . Et encore ces taux ne couvrent-ils pas l'ensemble de la population éligible : il semble en effet qu'une partie des bénéficiaires potentiels préfère renoncer à cette allocation pour éviter de mettre leurs héritiers dans l'embarras à leur décès avec l'activation de la clause de récupération des montants versés sur le patrimoine transmis.

Le rôle important des minima sociaux dans l'atténuation des situations de pauvreté outre-mer a été mis en évidence par l'INSEE pour La Réunion 50 ( * ) . Avant redistribution (versement des prestations sociales et paiement des impôts directs), 10 % de la population réunionnaise ne déclarait disposer d'aucune ressource financière pour vivre ; après redistribution, cette même population disposait d'un revenu inférieur à 390 € par mois.

Les ménages des collectivités du Pacifique bénéficient également de revenus de transfert, qui ne sont cependant pas les mêmes, les collectivités détenant une compétence propre en matière fiscale et sociale. Cette situation rend difficiles les comparaisons avec le reste de la France. En 2008, selon l'ISEE, les revenus sociaux représentaient 59 % des ressources monétaires mensuelles moyennes par unité de consommation des ménages calédoniens .

S'agissant de la Polynésie française , la DGOM indique que le niveau élevé des inégalités de revenus s'y explique en large partie par la faiblesse des mécanismes de compensation monétaire ou redistributifs à travers les prestations et la fiscalité directe sur les revenus. Selon l'étude de l'AFD de novembre 2010 intitulée « Les approches de la pauvreté en Polynésie française : résultats et apports de l'enquête sur les conditions de vie en 2009 », les allocations monétaires publiques et les aides sociales comptent pour moins de 10 % des revenus des 10 % des ménages les plus pauvres, contre 35 % de leurs revenus dans l'hexagone.

2. Un secteur privé à la remorque d'un secteur public prédominant
a) Une structure de l'emploi caractérisée par le faible nombre de cadres assorti de fortes disparités salariales et l'importance du secteur tertiaire non marchand
(1) Un secteur privé caractérisé par une faible proportion de cadres et de réels écarts salariaux par rapport à l'hexagone

En 2010, le salaire net annuel moyen dans le secteur privé des DOM (hors Mayotte) s'élevait à 22 820 € en équivalent temps plein (ETP), soit un niveau inférieur de 9 % à celui de l'hexagone 51 ( * ) .

Ce moindre niveau de salaire moyen résulte essentiellement de la structure particulière de l'emploi salarié domien, marquée par une faible proportion de cadres . Ceux-ci représentaient en effet de 8,5 % de l'emploi à La Réunion à 11,2 % de l'emploi en Guyane contre 17,2 % dans l'hexagone.

À l'inverse, les professions intermédiaires et les employés représentent une part plus importante de l'emploi salarié dans les DOM que dans l'hexagone.

Structure de l'emploi par catégories socio-professionnelles
dans les DOM en 2010 par rapport à 2006

(En %)

Cadres

Professions intermédiaires

Employés

Ouvriers

2010

2006

2010

2006

2010

2006

2010

2006

Guadeloupe

10,4

8,8

32,4

33,0

39,0

34,8

18,2

23,4

Martinique

13,0

11,6

29,1

31,4

38,0

32,3

19,9

24,8

Guyane

12,6

14,0

30,8

26,9

37,3

33,7

19,3

25,5

La Réunion

12,3

10,5

28,8

27,4

37,7

32,9

21,2

29,3

Ensemble DOM hors Mayotte

12,1

10,7

29,9

29,7

38,0

33,3

20,0

26,5

Mayotte (2007)

5,8

-

17,2

-

23,0

-

21,3

-

Hexagone

17,3

16,4

26,6

32,7

33,1

23,4

23,0

27,5

Sources : INSEE, Emploi et salaires, 2013 ; RP 2007 pour Mayotte ;
Enquête budget de famille 2006

Bien que les données 2010 et 2006 ne soient pas strictement comparables car provenant de sources différentes, certaines évolutions sont manifestes.

On constate que les effectifs ouvriers ont tendance à se contracter significativement dans les DOM, tendance semblable à celle perceptible dans l'hexagone. Au contraire, la tertiarisation des économies induit un accroissement des effectifs d'employés. Les effectifs de cadres progressent, sauf en Guyane. La proportion de cadres est également faible en Polynésie française avec 7,2 % des emplois en 2007.

Au sein d'un même segment d'activité, le niveau de salaire moyen reste cependant assez comparable. L'analyse des écarts de salaire par catégorie socioprofessionnelle montre en effet un niveau de salaire plus favorable pour les cadres dans les DOM, à l'exception de La Réunion . Il en va de même et dans une plus large mesure pour les professions intermédiaires dont le salaire moyen est supérieur dans tous les DOM à celui de l'hexagone.

Ce constat d'une situation salariale favorable aux cadres et professions intermédiaires prévalait déjà au début des années 2000. Cependant, les écarts constatés, tout en restant significatifs, ont tendance à se réduire.

Les niveaux de rémunération moyens des employés sont relativement proches. En revanche, avec un différentiel de 4,2 %, l'écart de rémunération est défavorable pour les ouvriers dans les DOM.

Deux raisons expliquent, selon l'INSEE, le niveau de rémunération plus élevé offert aux salariés les plus qualifiés dans les DOM. D'une part, face au déficit important de main-d'oeuvre qualifiée, les entreprises sont conduites à offrir des rémunérations plus attractives et à recruter sur le marché national. D'autre part, certaines conventions collectives locales fixent des majorations salariales dans les DOM par rapport au niveau hexagonal. Il en va notamment ainsi dans le secteur bancaire.

Salaires nets annuels en EQTP dans le secteur privé par CSP
dans les DOM en 2010

(En euros)

Cadres

Professions
intermédiaires

Employés

Ouvriers

Ensemble

Guadeloupe

48 180

26 420

18 670

17 960

23 080

Martinique

48 250

27 140

18 560

18 070

23 140

Guyane

49 840

29 380

18 830

18 370

24 480

La Réunion

47 200

26 770

18 100

17 970

22 150

Ensemble DOM

48 000

27 040

18 420

18 030

22 820

Hexagone

47 560

25 730

18 090

18 820

24 980

Source : INSEE, Enquête emploi 2013

Écarts salariaux par rapport à l'hexagone (en 2010)

(En %)

Cadres

Professions intermédiaires

Employés

Ouvriers

Guadeloupe

+ 1,3

+ 2,7

+ 3,2

- 4,6

Martinique

+ 1,5

+ 5,5

+ 2,6

- 4

Guyane

+ 4,8

+ 14,2

+ 4,1

- 2,4

La Réunion

- 0,7

+ 4

+ 0,1

- 4,5

Ensemble DOM

+ 0,9

+ 5,1

+ 1,8

- 4,2

Source : Calculs réalisés à partir des données INSEE figurant dans le tableau précédent

(2) Une prépondérance du secteur tertiaire non marchand

La structure de l'emploi dans les DOM est marquée par une prépondérance du secteur tertiaire non marchand 52 ( * ) , qui emploie 42,1 % des salariés contre 32 % dans l'hexagone . En Guyane, ce secteur emploie même plus d'une personne sur deux.

À l'inverse, l'industrie apparaît sous-représentée , contribuant à 7,2 % de l'emploi salarié seulement contre 13,8 % dans l'hexagone. Il convient toutefois de noter la place importante des industries extractives en Guyane.

L 'agriculture est quant à elle plus présente dans l'emploi salarié des DOM, en particulier à Mayotte.

Répartition de l'emploi salarié dans les DOM par secteur d'activité

(En %)

Guadeloupe

Martinique

Guyane

La Réunion

Mayotte

France

Agriculture, sylviculture et pêche

1,4

3,6

0,9

1,2

8,5

0,9

Industries extractives, énergie, eau, gestion des déchets et dépollution

1,7

1,9

2,7

1,5

2,2

1,5

Industrie manufacturière

5,1

5

5,2

5,7

2,6

12,1

Construction

5,6

5,3

6,8

6,8

8,0

6,1

Services marchands

43,3

43,2

33,8

44,2

38,6

47,1

Services non marchands

42,9

40,9

50,4

40,6

40,1

32,2

Source : INSEE, 2010, stat. adm., 2007 RP pour Mayotte

Source : INSEE, Emploi et salaires, 2013

En 2006, les salariés du secteur public dans les DOM représentaient 30 % de l'ensemble des actifs contre 36 % pour les salariés du secteur privé, ces proportions s'élevant respectivement pour l'hexagone à près de 24 % et 59 %.

Les services constituent ainsi la principale source de création de richesse des économies ultramarines. Celles-ci demeurent très dépendantes des transferts publics.

À La Réunion, les services non marchands contribuent pour 36,7 % à la richesse de l'île, alors qu'ils ne représentent que 26 % du PIB hexagonal en 2009 53 ( * ) .

De même en Guadeloupe, les services administrés contribuent pour 41,4 % à la richesse de l'île, en croissance de 10 points par rapport à 1999. L'accentuation de ces écarts s'explique, selon l'IEDOM, par le rythme de croissance plus élevé des services administrés en Guadeloupe.

La Martinique apparaît également comme une économie qui repose sur le secteur public et parapublic. Les services constituent la principale source de création de richesse puisqu'ils représentent 83,7 % de la richesse produite en 2009 contre 79,2 % dans l'hexagone. Les services non marchands contribuent à 44,1 % de la richesse produite.

À Mayotte, le poids des administrations publiques représente plus de la moitié du PIB. Parallèlement à l'élévation des dépenses de personnel, la part du secteur public est en effet passée de 44 % en 2001 à 49 % en 2005 puis 51 % en 2009. Entre 2005 et 2009, les masses salariales de la collectivité départementale, de l'État et des communes ont augmenté respectivement de 29 %, 56 % et 89 %.

Le caractère attractif du secteur public dans les économies ultramarines s'explique en partie par le niveau des rémunérations servies. Pour autant, rapporté à la population de chaque territoire, le nombre de fonctionnaires n'apparaît pas sensiblement plus élevé que dans l'hexagone, et l'importance relative du secteur public résulte principalement de l'atonie de l'emploi privé.

Effectifs de la fonction publique dans les DOM

Fonction publique de l'État (agents civils)

Fonction publique territoriale

Fonction publique hospitalière

Total des trois fonctions publiques (agents civils)

Agents pour 100 habitants

DOM

67 431

68 338

25 273

161 042

8,8

Guadeloupe

15 366

15 139

6 593

37 098

9,2

Martinique

14 239

16 381

8 469

39 098

9,9

Guyane

9 186

7 546

2 528

19 260

8,6

La Réunion

28 640

29 272

7 683

65 595

8

Hexagone

1 941 930

1 737 598

1 074 800

4 754 328

7,6

Source : INSEE, 2009 SIASP

En Polynésie française en 2010, le secteur public regroupe 22 % de l'emploi salarié, avec 15 % relevant de l'administration territoriale.

b) Les suppléments de rémunérations dans la sphère publique : de quoi parle-t-on ?

S'élevant en moyenne à 31 650 €, le salaire net annuel des fonctionnaires domiens est supérieur de 18,6 % à celui des fonctionnaires hexagonaux 54 ( * ) . Ces différences ne s'expliquent pas par des différences de structure dans l'emploi. Elles tiennent essentiellement à l'existence des « sur-rémunérations » dont bénéficient les fonctionnaires en poste dans les outre-mer.

Mis en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les compléments de rémunération visaient à renforcer les effectifs de cadres ultramarins en rendant la fonction publique plus attractive sur ces territoires. Il s'agissait également de prendre en compte l'éloignement par rapport à l'hexagone et de compenser la cherté de la vie outre-mer ainsi que les risques de dévaluation, à l'époque, du franc CFA ou du franc CFP par rapport au franc métropolitain.

Aujourd'hui, ce que l'on nomme « sur-rémunérations » désigne une réalité composite : il existe en effet une superposition de plusieurs dispositifs (majorations de traitement, indemnités diverses, congés bonifiés) et une grande hétérogénéité des règles législatives et réglementaires en vigueur. Initialement cantonnées à la fonction publique d'État, elles ont été progressivement étendues aux fonctions publiques territoriale et hospitalière. Certaines communes les ont également instituées pour des agents contractuels, sous la forme notamment de primes de vie chère. Des mécanismes de sur-rémunérations ont également infiltré le secteur parapublic.

(1) La fonction publique d'État, civile et militaire
(a) Les majorations de traitement

Dans l'ensemble des collectivités ultramarines, les fonctionnaires de l'État bénéficient d'une rémunération majorée par l'application d'un coefficient multiplicateur. Le taux de ce coefficient varie en fonction de la collectivité d'affectation.

Dans les DOM , la majoration applicable aux salaires des fonctionnaires civils se compose de plusieurs strates , dont deux sont communes aux départements français d'Amérique et à La Réunion :

- d'une part, une majoration de 25 % du traitement brut instituée en 1950 55 ( * ) ;

- d'autre part, un « complément temporaire » à la majoration de traitement créé au taux de 5 % en 1953 56 ( * ) et porté quatre ans plus tard à 10 % à La Réunion 57 ( * ) et à 15 % aux Antilles et en Guyane 58 ( * ) .

Dans les départements français d'Amérique , la majoration de traitement n'a pas évolué depuis cette date ; elle est ainsi fixée à 40 % .

À La Réunion , il est en outre appliqué au traitement majoré un coefficient de 1,138 (soit + 13,8 %).

Introduit en 1948, ce dernier dispositif visait, d'un point de vue historique, à tenir compte de la disparité entre le « franc des colonies française d'Afrique » (CFA) et le franc métropolitain. Même si son niveau a baissé au cours du temps, il a survécu à l'introduction du franc métropolitain en 1975 mais ne concerne plus aujourd'hui que La Réunion 59 ( * ) . Appliqué au traitement net majoré, il porte la majoration de traitement à La Réunion à 53 % au total.

Le personnel militaire affecté dans les DOM bénéficie, quant à lui, d'une majoration de solde qui correspond à 25 % de la solde de base brute mensuelle 60 ( * ) . À la Réunion, il voit en outre sa solde de base nette mensuelle indexée de 13,8 % 61 ( * ) .

Dans les COM , le traitement indiciaire, augmenté de l'indemnité de résidence et du supplément familial applicable à Paris, est également affecté d'un coefficient de majoration. La loi du 30 juin 1950 fixant les conditions d'attribution des soldes et indemnités des fonctionnaires civils et militaires relevant du ministère de la France d'outre-mer 62 ( * ) prévoit en effet pour les personnels civils « un complément spécial proportionnel à la solde et fixé à un taux uniforme pour chaque territoire ou groupe de territoires et chaque catégorie de cadres ». Dans le Pacifique, cette majoration de traitement visait initialement aussi à compenser le risque de dévaluation de la monnaie locale par rapport à la monnaie métropolitaine (« franc des colonies françaises du Pacifique » ou « changes franc Pacifique » introduit en 1945).

Sur ce fondement, un décret du 5 mai 1951 63 ( * ) institue un « complément spécial » pour les fonctionnaires civils, calculé en francs métropolitains et versé en monnaie locale. Il prévoit une majoration de 25 % en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, 30 % à Saint-Pierre-et-Miquelon et 40 % à Wallis-et-Futuna.

Le décret du 23 juillet 1967 relatif au régime de rémunération des magistrats et des fonctionnaires de l'État en service dans les territoires d'outre-mer 64 ( * ) modifie le dispositif antérieur en prévoyant que la rémunération nette des magistrats et fonctionnaires est multipliée par un coefficient de majoration propre à chaque territoire .

L'arrêté du 28 juillet 1967 fixait ces taux à 1,92 pour la Nouvelle-Calédonie, 2,13 pour la Polynésie et 2,05 pour Wallis-et-Futuna . Des arrêtés interministériels ont par la suite majoré ces taux : pour la Polynésie française (de 1,84 pour les Îles-du-Vent et les Îles-sous-le-Vent à 2,08 pour les Marquises, les Australes et les Tuamotu-Gambier) et la Nouvelle-Calédonie (de 1,73 à 1,94 selon les circonscriptions administratives).

À Saint-Pierre-et-Miquelon , un décret de 1978 65 ( * ) prévoit à la fois une majoration de traitement équivalente à celle des Antilles (soit 40 % sur le traitement brut ) et, pour remplacer l'index de correction des territoires d'outre-mer, une indemnité spéciale compensatrice sur le traitement indiciaire net, fixée alors à 56 % . Ce taux a été réduit à chaque augmentation générale des rémunérations de la fonction publique jusqu'en avril 1982. Depuis cette date, il s'élève à 30,67 %, ce qui porte la majoration totale à 75 %.

Jusqu'en 2013, Mayotte était la seule collectivité ultramarine dans laquelle il n'existait pas encore de dispositif de majoration de traitement pour les fonctionnaires civils de l'État. La fonction publique militaire y bénéficiait toutefois d'un index de correction de 1,9. De plus, le régime de l'indemnité d'éloignement est plus favorable à Mayotte que dans les autres collectivités bénéficiaires. Les majorations de traitement ont cependant été étendues à cette collectivité par décret 66 ( * ) avec effet rétroactif au 1 er janvier 2013 et montée en charge progressive jusqu'au 1 er janvier 2017 .

Les majorations de traitement sont applicables à l'ensemble du secteur public, tous les fonctionnaires de l'État y étant éligibles, qu'ils soient résidents ou en séjour administratif de durée limitée dans la collectivité.

Le tableau ci-dessous récapitule les différents coefficients applicables selon la collectivité d'affectation.

Coefficients de majoration applicables aux traitements
des fonctionnaires en activité dans les départements
et les collectivités d'outre-mer

Antilles, Guyane, Saint-Barthélemy et Saint-Martin

1,4

La Réunion

1,53

Mayotte

entrée en vigueur échelonnée ; 1,4 à compter du 1 er janvier 2017

Polynésie française

de 1,84 à 2,08

Nouvelle-Calédonie

de 1,73 à 1,94

Wallis-et-Futuna

2,05

Saint-Pierre-et-Miquelon

1,75

Terres australes et antarctiques françaises (TAAF)

de 1,53 à 1,73

Source : DPT Outre-mer (PLF 2013)

NB : Les coefficients s'appliquent sur le traitement brut dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon et sur le traitement net en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

(b) Les indemnités spécifiques d'éloignement, de sujétion et d'installation

Aux majorations de traitement s'ajoutent un certain nombre d'indemnités dont l'objet et le montant varient en fonction de la collectivité concernée.

Supprimée dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon en 2001 67 ( * ) , l'indemnité d'éloignement continue d'être versée aux fonctionnaires civils effectuant des séjours de durée limitée dans les collectivités du Pacifique et à Mayotte 68 ( * ) .

Payable en deux fractions égales au départ et au retour, elle se compose forfaitairement du traitement indiciaire de base versé sur un certain nombre de mois, variable en fonction de la collectivité concernée. Elle est versée sur la base d'un séjour de deux ans, renouvelable une fois consécutivement . Elle ne peut être affectée du coefficient de majoration. Pour un séjour de deux ans, chaque fraction de l'indemnité d'éloignement correspond à 5 mois de traitement indiciaire net en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, 9 mois de traitement indiciaire net à Wallis-et-Futuna et 11 mois et 15 jours de traitement indiciaire net à Mayotte.

En Guyane, à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon, une indemnité particulière de sujétion et d'installation (IPSI) a été créée en 2001 pour une durée de cinq ans au bénéfice des magistrats et des fonctionnaires de l'État dont la précédente résidence était située en dehors de ces zones géographiques 69 ( * ) . Le montant de l'indemnité représentait 16 mois de traitement indiciaire brut de l'agent . Le versement s'effectuait au taux plein sur la base d'une durée de services de quatre ans et en trois fractions.

Le dispositif de l'IPSI a été reconduit à cinq reprises et a fait l'objet d'une dernière prorogation jusqu'au 1 er avril 2013 70 ( * ) . Il a été remplacé, par décret du 15 avril 2013 71 ( * ) , par une indemnité de sujétion géographique visant à « tenir compte des spécificités intraterritoriales et de la difficulté des postes à pourvoir » pour les fonctionnaires de l'Etat et magistrats affectés en Guyane, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon ou à Saint-Barthélemy. Le montant de ce nouveau régime indemnitaire, entré en vigueur au 1 er octobre 2013, est variable selon les collectivités concernées.

Le tableau ci-dessous récapitule les indemnités versées aux fonctionnaires civils de l'État en fonction de leur collectivité d'affectation.

Indemnités spécifiques d'éloignement, d'installation et de séjour versées aux fonctionnaires d'État en activité dans les DOM et les COM

Indemnité d'éloignement

Indemnité de sujétion géographique

Guyane, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon

néant

entre 6 et 20 mois du traitement indiciaire de base de l'agent pour 4 ans de service

Mayotte

23 mois de traitement indiciaire net pour 2 ans de service

néant

Nouvelle-Calédonie

10 mois de traitement indiciaire brut pour 2 ans de service

néant

Polynésie française

néant

Wallis-et-Futuna

18 mois de traitement indiciaire brut pour 2 ans de service

néant

Le personnel militaire affecté dans un DOM (hors Mayotte) bénéficie quant à lui d'une indemnité d'installation qui correspond, pour un séjour réglementaire de deux ans, à 9 mois de la solde de base brute mensuelle pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion et à 12 mois pour la Guyane 72 ( * ) . À La Réunion, le montant de l'indemnité d'installation est indexé. Il bénéficie en outre d'une indemnité de départ outre-mer (DEPOM) qui comprend un élément principal forfaitaire (variable selon le grade) et une majoration familiale 73 ( * ) .

Dans les COM et à Mayotte, les militaires perçoivent une indemnité résidentielle de cherté de vie (IRCV) fondée sur des taux variables affectés à une solde de base maintenue au taux atteint au 1 er avril 1956. Les taux s'étagent de 10 % dans les collectivités du Pacifique et à Mayotte à 18 % à Saint-Pierre-et-Miquelon 74 ( * ) . Ils bénéficient en outre d'une indemnité d'éloignement payable en deux fractions et constituée d'un nombre forfaitaire de jours de solde de base variable en fonction de la collectivité (75 jours pour la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, 83 jours pour Mayotte) 75 ( * ) . Ils se voient enfin attribuer un complément spécial de solde (COSP) calculé, à l'instar de l'IRCV, à partir de taux variables affectés à une solde de base cristallisée sur des indices applicables au 1 er avril 1956 76 ( * ) .

(c) Les fonctions publiques territoriale et hospitalière

La définition des régimes indemnitaires des fonctionnaires territoriaux relève, en application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, de l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale ou du conseil d'administration d'un établissement public local. Les indemnités doivent être fixées dans la limite de celles dont bénéficient les différents services de l'État 77 ( * ) .

Quant aux fonctionnaires hospitaliers ayant reçu une affectation dans un département d'outre-mer, ils bénéficient, en application de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière 78 ( * ) , des majorations de traitement résultant pour les fonctionnaires de l'État de la loi du 3 avril 1950.

Les fonctionnaires hospitaliers bénéficient également des indemnités d'éloignement et de l'ISPI applicables aux fonctionnaires de l'État en séjour administratif de durée limitée dans la collectivité 79 ( * ) .

Vos rapporteurs ont demandé à la représentation de l'État dans chaque département et collectivité d'outre-mer de bien vouloir préciser à la délégation sénatoriale à l'outre-mer les dispositifs de sur-rémunérations en vigueur dans leur territoire respectif, le nombre d'effectifs concernés ainsi que le coût résultant de l'application de ces compléments.

Malheureusement, les réponses adressées à vos rapporteurs sont souvent restées trop incomplètes pour permettre une appréciation d'ensemble pertinente. Aucune réponse n'est parvenue à vos rapporteurs de la Guyane et de la Nouvelle-Calédonie.

Les éléments de réponse obtenus confirment néanmoins l'application, dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière, de coefficients de majoration généralement identiques à ceux de la fonction publique d'État.

Majorations de traitement applicables dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière et coût des compléments de rémunération
dans les outre-mer en 2012

Majorations de traitement

Coût annuel des compléments de rémunération

FPT

FPH

FPT

FPH

Guadeloupe

1,4

1,4

16,051 M€

1,67 M€

Martinique

1,4

non renseigné

17,7 M€ pour le conseil général et 9,1 M€ pour le conseil régional

non renseigné

La Réunion

1,53

1,4 pour les personnels médicaux des établissements de santé et 1,53 pour les personnels non médicaux titulaires et contractuels

non renseigné

non renseigné

Mayotte

1,4

1,4

non renseigné

12,7 M€ (y compris frais de changement de résidence)

Saint-Barthélemy

1,4

1,4

2,160 M€

4,3M€

Saint-Martin

1,4

1,4

3,96 M€

Saint-Pierre-et-Miquelon

1,75

1,4 pour les personnels médicaux et 1,75 pour les personnels non médicaux

1,95 M€ pour la commune de Saint-Pierre

3,75 M€

La fonction publique de la Polynésie française est indépendante des trois fonctions publiques hexagonales. La collectivité peut toutefois accueillir en détachement des fonctionnaires de ces trois fonctions publiques. Actuellement, quelques agents seulement sont en fonction au sein de l'administration de la Polynésie française et de ses établissements publics. À ce titre, ils bénéficient de la majoration de traitement applicable aux fonctionnaires de l'État selon la subdivision administrative d'affectation (de 1,84 à 2,08) et de l'indemnité d'éloignement (10 mois pour un séjour de deux ans).

À Wallis-et-Futuna, il n'existe pas de fonction publique territoriale au sens de la loi du 26 janvier 1984. Les agents permanents affectés au service du territoire ne se voient pas appliquer le coefficient de majoration de 2,05 applicable aux fonctionnaires de l'État. Dans la fonction publique hospitalière, la situation des agents affectés à l'Agence de santé est généralement régie par une convention prévoyant l'application d'un indice de correction de 1,45. Les fonctionnaires exerçant leur activité en détachement à l'Agence de santé bénéficient d'une majoration de 2,05 pour un coût de 485 000 €.

(2) Des dépenses importantes, qui entretiennent le phénomène de « vie chère »

En 2011, l'ensemble des sur-rémunérations versées aux fonctionnaires civils et militaires de l'État en activité dans les outre-mer représentait une dépense de 1,261 milliard d'euros .

Au nombre de 91 212, les fonctionnaires civils se sont vu verser au total 1,033 milliard d'euros au titre des majorations et indexations, 159 millions d'euros au titre de l'indemnité d'éloignement et 26,6  millions d'euros au titre de l'IPSI.

Quant aux militaires , dont le nombre était légèrement inférieur à 9 000 personnes au 31 décembre 2011, le montant de leurs compléments de rémunération s'est élevé à 167,129 millions d'euros en 2011.

Compléments de rémunération des fonctionnaires civils de l'État
dans les DOM et les COM en 2012

(En euros)

Majoration de traitement

Indexation de traitement

PSI + IE + ISPI

Total

DOM

745 588 038

65 511 380

223 632 272

1 034 731 689

COM

248 890 619

33 512 744

38 413 932

320 817 296

Total Outre-mer

994 478 657

99 024 124

262 046 203

1 355 548 985

Source : DPT Outre-mer, PLF 2014

NB : L'indexation de traitement correspond au versement de majorations de traitement pour des agents non titulaires et ouvriers d'État.

Les sur-rémunérations font périodiquement l'objet de fortes critiques.

Tandis que certaines des justifications des sur-rémunérations sont historiquement datées, l'adéquation de ce système aux réalités de la vie outre-mer est en effet sujette à caution. Le niveau des sur-rémunérations n'apparaît plus nécessairement proportionné aux conditions de vie dans les outre-mer . Les progrès des moyens de communication et l'amélioration des conditions de vie localement ont considérablement réduit les difficultés rencontrées par les fonctionnaires affectés outre-mer, à l'exception de quelques postes qui demeurent particulièrement exposés. Les primes devraient être recalibrées pour s'attacher désormais essentiellement à compenser le différentiel de coût de la vie. Il faut cependant prendre garde à conserver une attractivité suffisante pour les affectations outre-mer.

En outre, la contribution des sur-rémunérations à l'accentuation des inégalités outre-mer ne fait plus guère de doute. En tenant compte de la structure de l'emploi par catégorie socioprofessionnelle, « le salaire net moyen dans la fonction publique est supérieur de près de 40 % à celui du secteur concurrentiel , alors qu'ils sont proches en métropole ». 80 ( * )

Salaires nets annuels moyens en ETP dans les DOM en 2010

(En euros)

Secteur concurrentiel

Fonction publique

Guadeloupe

23 080

32 610

Guyane

24 480

31 840

Martinique

23 140

31 700

La Réunion

22 150

31 080

France

24 980

25 750

hors internes, externes et résidents de la fonction publique hospitalière

Source : INSEE, Emploi et salaires, 2013

En Nouvelle-Calédonie, l'écart entre les salaires du secteur public et ceux du secteur privé, tous emplois confondus, est de 57 %, ce qui s'explique à la fois par les sur-rémunérations et la proportion importante de cadres dans la fonction publique, l'essentiel des ouvriers et des employés étant en poste dans le secteur privé.

Enfin, ainsi que l'a indiqué la DGOM en réponse au questionnaire de vos rapporteurs, les mécanismes de sur-rémunérations « sont souvent dénoncés comme une cause de la cherté de la vie, ayant en outre une incidence à la hausse sur les salaires du privé , alimentant l'inflation et les hausses de coûts de production dans le secteur privé et pesant sur la compétitivité des productions locales (tourisme par exemple) ».

Les sur-rémunérations conduisent en effet à surévaluer artificiellement les économies ultramarines . Dans ce contexte, on peut s'interroger sur la pertinence de la décision d'introduire progressivement à Mayotte une majoration qui atteindrait en l'espace de cinq ans celle des Antilles . L'accès de Mayotte au statut de DOM aurait au contraire pu être l'occasion de réaménager globalement le dispositif.

La DGOM indique que « ces différents avantages ne correspondent plus aujourd'hui à la compensation financière des affectations outre-mer. L'évolution se caractérise par une grande hétérogénéité des régimes applicables selon les collectivités et l'émergence de nouveaux bénéficiaires ».

Une reconsidération des compléments de rémunération apparaît ainsi nécessaire. Des évolutions ont déjà été engagées en ce sens avec la réforme très progressive, par la loi de finances rectificative pour 2008, des indemnités temporaires de retraite (ITR) servies aux anciens fonctionnaires domiciliés outre-mer 81 ( * ) .

Le rapport publié en 2009 au nom de la mission commune d'information sur la situation des DOM avait en outre formulé plusieurs propositions précises en matière de sur-rémunérations, qui n'ont pas pour le moment été suivies d'effet.

Propositions formulées en 2009 par la mission commune d'information
du Sénat sur la situation des DOM

Proposition n° 12 : Ajuster les majorations de traitement des fonctionnaires de l'État dans les DOM au différentiel réel du coût de la vie.

Proposition n° 18 : Rendre des marges de manoeuvre aux collectivités territoriales en ajustant les majorations de traitement des fonctionnaires territoriaux au différentiel réel du coût de la vie.

Proposition n° 19 : Une fois les majorations de traitement réajustées au différentiel réel du coût de la vie, compensation par l'État des charges supplémentaires qui en résultent pour les collectivités territoriales, grâce aux économies réalisées par cette réforme pour les fonctionnaires de l'État.

En parfait accord avec ces conclusions, vos rapporteurs rappellent qu'il est nécessaire de ramener le montant des sur-rémunérations au véritable différentiel de coût de la vie entre les outre-mer et l'hexagone, sans exclure la possibilité d'une modulation prenant en compte les spécificités géographiques de certains territoires. Les marges de manoeuvre financières ainsi dégagées doivent revenir à l'économie et aux infrastructures des départements et collectivités d'outre-mer . À ce titre, le débat doit aujourd'hui prendre en compte une dimension plus opérationnelle afin de définir précisément les mesures à mettre en oeuvre dans cette perspective, sur la base d'un cahier des charges comportant une triple exigence : une entrée en vigueur progressive pour éviter toute déstabilisation des économies ultramarines, seuls les nouveaux entrants dans la fonction publique devant être concernés ; la définition d'un référentiel stable et régulièrement publié mesurant pour chaque territoire le différentiel de coût de la vie afin d'y adosser le niveau des compléments de rémunération ; la mise au point d'un dispositif permettant de réinjection dans les économies ultramarines les économies réalisées.

Recommandation n° 3 - Rénover le dispositif des compléments de rémunération pour en faire un outil vertueux au service des économies ultramarines :

Redéfinir le régime des sur-rémunérations sur la base incontournable des trois exigences suivantes :

ï une entrée en vigueur progressive pour éviter toute déstabilisation des économies ultramarines, seuls les nouveaux entrants dans la fonction publique devant être concernés ;

ï la définition d'un référentiel stable et régulièrement publié mesurant pour chaque territoire le différentiel de coût de la vie afin d'y adosser le niveau des compléments de rémunération ;

ï la mise au point d'un dispositif permettant de réinjecter dans les économies ultramarines les sommes dégagées .

Demander au Gouvernement la réalisation d'une étude opérationnelle de mise en oeuvre du nouveau dispositif , identifiant précisément le mécanisme garantissant la réinjection dans les économies ultramarines des montants économisés.


* 37 Réponses de la DGOM au questionnaire de vos rapporteurs à partir de l'enquête « BdF » (2006) de l'INSEE.

* 38 Compas études, « Des départements d'outre-mer marqués par les difficultés sociales et les inégalités », n° 9, octobre 2013 ; étude réalisée à partir des données sur les revenus fiscaux 2011 de l'INSEE. Il est à noter que cette étude se fonde sur les revenus d'activité et ne prend pas en compte les transferts sociaux, ce qui explique la discordance avec les résultats présentés dans le tableau qui suit. Ce décalage met en évidence l'importance des prestations sociales dans les ressources des ménages ultramarins.

* 39 Plus l'indicateur de Gini se rapproche de zéro, moins les inégalités sont grandes. Plus il se rapproche de un, plus elles sont élevées.

* 40 L'écart inter-décile mesure l'écart entre le premier et le dernier décile des revenus. Il s'agit du rapport entre le niveau de vie plancher des 10 % les personnes les plus aisées et le niveau de vie plafond des 10 % les plus modestes.

* 41 Voir le rapport annuel IEDOM 2013.

* 42 INSEE, enquête «BdF », 2005.

* 43 Un individu est considéré comme pauvre lorsqu'il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. Selon l'approche en termes relatifs utilisée en Europe, le seuil de pauvreté est défini par rapport à la distribution des niveaux de vie de l'ensemble de la population. Ce seuil est en règle générale, fixé à 60 % de la médiane des niveaux de vie.

* 44 CEROM, mars 2010.

* 45 CEROM, octobre 2012.

* 46 ISEE, Enquête BCM 2008.

* 47 Ordonnance n° 2010-686 du 24 juin 2010 portant extension et adaptation dans les départements d'outre-mer, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

* 48 DREES, Enquêtes sur les allocations du minimum vieillesse au 31 décembre 2012.

* 49 Réponses des directions régionales de l'INSEE au questionnaire de vos rapporteurs.

* 50 INSEE Réunion, Économie de La Réunion, n° 134, avril 2009.

* 51 INSEE, Emploi et salaires, 2013.

* 52 Les services non marchands recouvrent les administrations publiques ainsi que les activités éducatives, sanitaires et sociales.

* 53 IEDOM, Rapport annuel, 2013.

* 54 INSEE, Emploi et salaires, 2013.

* 55 Article 3 de la loi n° 50-407 du 3 avril 1950 concernant les conditions de rémunération et les avantages divers accordés aux fonctionnaires en service dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de La Réunion.

* 56 Article 10 du décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'État en service dans les départements d'outre-mer.

* 57 Décret n° 57-333 du 15 mars 1957 portant majoration du complément temporaire alloué aux fonctionnaires de l'État en service dans le département de La Réunion. Il est prévu que le complément soit payé « à sa contre-valeur en monnaie locale d'après la parité en vigueur pendant la période sur laquelle porte la liquidation ».

* 58 Décret n° 57-87 du 28 janvier 1957 portant majoration du complément temporaire alloué aux fonctionnaires de l'État en service dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane française.

* 59 L'article 3 du décret n° 49-55 du 11 janvier 1949 avait fixé l'index de correction prévu en cas de disparité entre le franc et la monnaie ayant cours dans les départements d'outre-mer pour La Réunion à 1,65 à partir du 17 octobre 1948. L'index de correction fixé pour La Réunion en application du décret n° 71-485 du 22 juin 1971 modifiant le décret du 11 janvier 1949 précité est de 1,63 à compter du 1 er juin 1971. L'arrêté du 28 août 1979 a fixé cet index de correction à 1,150 à compter du 1 er septembre 1979 et à 1,138 à compter du 1 er novembre 1979.

* 60 Décret n° 50-1258 du 6 octobre 1950 fixant, à compter du 1er janvier 1950, le régime de solde et d'indemnités des militaires entretenus au compte du budget de la France d'outre-mer dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane française, de la Martinique et de la Réunion.

* 61 Décret n° 49-55 du 11 janvier 1949 précité.

* 62 Loi n° 50-772 du 30 juin 1950 fixant les conditions d'attribution des soldes et indemnités des fonctionnaires civils et militaires relevant du ministère de la France d'outre-mer, les conditions de recrutement, de mise en congé ou à la retraite de ces mêmes fonctionnaires.

* 63 Décret n° 51-511 du 5 mai 1951 fixant, en application de la loi n° 50-772 du 30 juin 1950, les régimes de rémunération, des prestations familiales, des congés administratifs de certains cadres de fonctionnaires civils relevant du ministère de la France d'outre-mer.

* 64 Décret n° 67-600 du 23 juillet 1967 relatif au régime de rémunération des magistrats et des fonctionnaires de l'État en service dans les territoires d'Outre-mer.

* 65 Décret 78-293 du 10 mars 1978 fixant le régime de rémunération et les avantages accessoires des magistrats et des fonctionnaires de l'État en service dans la collectivité territoriale de Saint Pierre et Miquelon.

* 66 Décret n° 2013-964 du 28 octobre 2013 portant création d'une majoration du traitement allouée aux fonctionnaires de l'État et de la fonction publique hospitalière et aux magistrats en service dans le Département de Mayotte.

* 67 Article 26 de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer.

* 68 L'indemnité d'éloignement a été instituée par l'article 2 de la loi n° 50-772 du 30 juin 1950 fixant les conditions d'attribution des soldes et indemnités des fonctionnaires civils et militaires relevant du ministère de la France d'outre-mer. Ses conditions d'attribution sont fixées par le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996.

* 69 Décret n° 2001-1226 du 20 décembre 2001 portant création d'une indemnité particulière de sujétion et d'installation et décret n° 2001-1224 du 20 décembre 2001.

* 70 Le dispositif a d'abord été prorogé pour une durée de deux ans par le décret n° 2006-1664 du 21 décembre 2006 pour une durée de deux ans et dernièrement par le décret n° 2012-1134 du 8 octobre 2012.

* 71 Décret n° 2013-314 du 15 avril 2013 portant création d'une indemnité de sujétion géographique.

* 72 Décrets n° 50-343 du 18 mars 1950 et n° 50-1258 du 6 octobre 1950.

* 73 Décret n° 49-90 du 20 janvier 1949.

* 74 Décret du 10 novembre 1952.

* 75 Décrets n° 51-1185 du 11 octobre 1951, n° 52-1122 du 6 octobre 1952, n° 69-148 du 5 février 1969.

* 76 Décrets n° 51-1185 du 11 octobre 1951 et n° 52-1122 du 6 octobre 1952.

* 77 Article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

* 78 L'article 77 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière prévoit que « sont applicables de plein droit aux fonctionnaires régis par le présent titre les dispositions législatives et réglementaires prises pour les fonctionnaires de l'État relatives à la valeur du traitement correspondant à l'indice de base, à l'indemnité de résidence, au supplément familial de traitement ainsi qu'à toutes autres indemnités ayant le caractère de complément de traitement ».

* 79 Circulaire de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation de soins DHOS/P 1 n° 2003-368 du 24 juillet 2003 relative à l'application du décret n° 53-1296 du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'État en service dans les départements d'outre-mer.

* 80 INSEE, Emploi et salaires, édition 2013.

* 81 Très critiqué au regard des enjeux budgétaires et d'équité, ce dispositif, instauré par le décret du 10 septembre 1952, majorait de 75 % les pensions servies aux fonctionnaires civils et militaires retraités de l'État et résidant effectivement en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna. Cette disposition est également applicable dans le département de La Réunion et à Mayotte au taux réduit de 35 % ainsi qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon (40 %).

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