II. LE DÉVELOPPEMENT DE SOURCES D'ÉNERGIES ALTERNATIVES DANS LE CADRE D'UNE POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
A. UNE INCITATION LIMITÉE À DIVERSIFIER LE MIX ÉNERGÉTIQUE
Le mix électrique québécois est donc très vert. C'est un avantage commercial significatif par rapport à son principal partenaire commercial qu'est le Nord-Est des États-Unis. Certaines entreprises américaines sont d'ailleurs intéressées par l'achat d'électricité avec des certificats d'économie verte. Le Québec profite également du pic de demande aux États-Unis durant l'été, du fait de la climatisation, pour vendre ses surplus à bon prix sur le marché spot.
Hydro-Québec a en outre une gestion très fine de ses importations d'énergie. L'entreprise importe parfois de l'électricité des Etats-Unis, quand c'est avantageux économiquement. En effet, les centrales thermiques américaines ne peuvent pas être arrêtées rapidement. En fonction de l'évolution de la demande, elles se trouvent parfois à produire de l'électricité en surplus. Hydro-Québec ferme alors ses turbines hydroélectriques - les responsables de l'entreprise, rencontrés sur place, ont expliqué à votre délégation que cette fermeture pouvait être effectuée en une minute - et achète à prix négatif de l'électricité aux Américains.
Compte tenu de ces éléments, il existe a priori peu d'intérêt, en particulier économique, à développer d'autres sources d'énergies au Québec. L'électricité est une manne abondante et bon marché.
B. L'ÉOLIEN COMME OUTIL D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
Malgré la manne hydroélectrique, et donc une incitation très limitée à varier le mix énergétique, le Québec investit pour développer des sources d'énergies alternatives.
L'éolien est une des priorités du gouvernement. Le Québec dispose en effet du deuxième plus grand gisement éolien au monde. Il faut cependant distinguer le gisement théorique du potentiel réellement exploitable techniquement, en tenant notamment compte de la capacité de raccordement au réseau principal de transport d'électricité.
Le Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec a fait réaliser deux études pour mieux caractériser le potentiel éolien de la province : le programme de mesure du potentiel éolien en 2003 dans les régions de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, du Bas-Saint-Laurent et de la Côte-Nord, et l'inventaire du potentiel éolien exploitable du Québec, en 2005, sur l'ensemble du territoire du Québec. Cette dernière étude évalue à 4 millions de mégawatts le potentiel technique exploitable total du Québec. Le potentiel total intégrable au réseau électrique, selon l'évaluation faite par Hydro-Québec TransÉnergie, correspond actuellement à 3 600 mégawatts et à 4 000 mégawatts en 2015.
CARTE DES VENTS DOMINANTS AU QUÉBEC
Source : Hydro-Québec
Le Gouvernement utilise aujourd'hui l'éolien dans une optique d'aménagement du territoire, pour développer économiquement certaines régions. Depuis quelques années, Hydro-Québec passe des appels d'offres auprès de producteurs indépendants et assure l'intégration de l'énergie produite dans son réseau.
La production éolienne a débuté en 1998 avec le projet Le Nordais en Gaspésie. En 2003, Hydro-Québec a lancé un premier appel d'offres pour l'acquisition de 1 000 mégawatts d'électricité éolienne. À l'issue du processus de sélection, huit contrats ont été signés pour une puissance totale de 990 mégawatts. Tous les projets retenus sont situés en Gaspésie, région en difficulté sur le plan économique et ayant investi dans la filière éolienne pour diversifier son activité. Les entreprises retenues y ont investi près de deux milliards de dollars et créé plus de 600 emplois au sein de nouvelles entreprises de fabrication de composants d'éoliennes.
En 2005, un second appel d'offres a été lancé par Hydro-Québec pour 2 000 mégawatts d'énergie éolienne. Quinze projets ont été retenus et sont actuellement en cours de réalisation.
En 2009, un troisième appel d'offres a été lancé pour des projets communautaires et autochtones de 25 mégawatts. Le gouvernement québécois vise, de cette manière, à maximiser les retombées économiques locales et régionales, tout en s'assurant que les développements effectués respectent l'environnement et bénéficient du soutien des communautés concernées.
Au total, fin 2013, le Québec dispose de 23 parcs éoliens en exploitation, ce qui représente, selon les données fournies par l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable (AQPER), 1 388 éoliennes, 2 398 mégawatts, 5 000 emplois et une chaîne d'approvisionnement intégrée de plus de 150 entreprises.
Les petits producteurs d'électricité, dont votre délégation a rencontré les représentants à travers l'AQPER, regrettent toutefois que les contrats ne se fassent que sur 20 ans, quand Hydro-Québec amortit ses propres investissements sur 120 ans, et qu'il n'y ait pas de visibilité suffisante sur les appels d'offres à venir.
En tout état de cause, la raison d'être de l'éolien au Québec est bien une volonté politique d'aménagement du territoire, et non la rentabilité économique des projets.