Rapport n° 557 (2012-2013) de M. Jean-Pierre SUEUR , sénateur et Mme Patricia ADAM, député, fait au nom de la délégation parlementaire au renseignement, déposé le 30 avril 2013
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N° 1012 ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 QUATORZIÈME LÉGISLATURE |
N° 557 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013 |
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale |
Enregistré à la Présidence du Sénat |
le 30 avril 2013 |
le 30 avril 2013 |
DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE AU RENSEIGNEMENT
RAPPORT
relatif à
l'
activité
de la
délégation parlementaire au
renseignement
pour l'année 2012
Par
MME Patricia ADAM, Députée
Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale par MME Patricia ADAM Présidente de la délégation. |
Déposé sur le Bureau du Sénat par M. Jean-Pierre SUEUR Premier Vice-Président de la délégation . |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
La composition de la délégation a évolué au cours de l'année 2012. À la suite des élections législatives, Madame Patricia Adam, élue de la commission de la défense, a succédé à M. Guy Teissier à la tête de la délégation, tandis que M. Philippe Nauche a succédé à M. Jean-Michel Boucheron comme membre désigné par le Président de l'Assemblée nationale. En outre, M. Michel Boutant a remplacé M. Didier Boulaud en tant que membre désigné par le Président du Sénat.
Depuis octobre 2012, la délégation était ainsi composée :
- Mme Patricia Adam, présidente,
-MM. Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Sueur et Jean-Jacques Urvoas, membres de droit,
- MM. Michel Boutant, Jean-Patrick Courtois, Jacques Myard et Philippe Nauche, membres nommés par les Présidents des deux assemblées.
- MM. Jean-Pierre Sueur et Jacques Myard étaient vice-présidents.
Au cours de l'année, la délégation s'est réunie à cinq reprises :
- le 26 janvier, pour une audition du préfet M. Ange Mancini, coordonnateur national du renseignement (CNR) et de l'ensemble des directeurs des six services (DGSE, DCRI, DNRED, DPSD, DRM, TRACFIN),
- le 4 avril pour entendre le CNR et l'ensemble des directeurs des six services sur l'affaire Merah,
- le 25 octobre pour entendre le CNR,
- le 22 novembre pour l'audition de M. Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, et de M. Patrick Calvar, directeur central du renseignement intérieur (DCRI) également au sujet l'affaire Merah,
- le 17 décembre pour celle de M. Jean-Paul Garcia, directeur national du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED).
La délégation a également échangé, le 24 mars, avec la 4 e promotion de l'académie du renseignement, le 13 septembre, avec son cycle supérieur ainsi qu'avec la 5 e promotion le 1 er octobre.
Elle a enfin effectué deux déplacements :
- le 22 mars, sur un des sites de la DGSE afin de visiter des installations techniques,
- le 17 décembre, elle s'est rendue au siège de la DGSE pour rencontrer son directeur général, M. le préfet Érard Corbin de Mangoux, les responsables des différentes directions ainsi que la cellule Sahel.
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Réunie le 28 février 2013, la délégation a adopté à l'unanimité de ses membres le présent rapport.
Les parties en blanc correspondent à des
éléments que la délégation parlementaire au
renseignement a décidé de ne pas publier en raison des
impératifs du secret de la défense nationale.
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I. L'ÉVOLUTION DE LA MENACE
La délégation a cherché à se tenir constamment informée de la situation des otages français retenus au Sahel ainsi que de celle de l'agent retenu en Somalie jusqu'à l'opération tentée pour le libérer. Face à la multiplication des prises d'otages de nos ressortissants, la délégation exprime sa préoccupation concernant la sécurité des 15 000 Français se trouvant en « zone rouge » au Sahel .
Par ailleurs, les suites de la révolution libyenne se sont notamment traduites par un accroissement des menaces dans la zone sahélienne . En premier lieu, a été constatée une prolifération des armes dans la zone. En second lieu, certains groupes terroristes ont été renforcés par cet apport d'armes ainsi que par des renforts issus en particulier de Libye. Enfin, les frontières sont encore plus poreuses que par le passé, ce qui favorise la circulation de ces groupes.
La délégation note également que, bien qu'affaiblis par les incursions militaires du Kenya et de l'Éthiopie et par la présence de la mission de l'Union africaine en Somalie (AMISOM), les Shebab représentent toujours une menace pour les ressortissants et les intérêts français en Afrique de l'Est. Il en va de même au Nigéria avec l'organisation Boko Haram.
La délégation a été informée de la montée de la menace des groupes terroristes au Sahel tout au long de l'année 2012 , ainsi que celle du crime organisé (en particulier les trafics d'armes et de stupéfiants) souvent pratiqué par ces mêmes groupes.
Outre le Sahel et la Corne de l'Afrique, la délégation est également préoccupée par l'évolution de la situation en Syrie et ses conséquences dans la région, ainsi que par la situation en Afghanistan.
Le risque terroriste résultant pour les ressortissants et les intérêts français de ces évolutions est resté très élevé tout au long de l'année 2012 , y compris sur le territoire national. La délégation a donc tenu à s'assurer de la vigilance et de la mobilisation constantes des services.
La délégation est enfin préoccupée par la progression constante de la menace « cyber » , qui s'est plusieurs fois concrétisée en 2012 sous la forme d'attaques informatiques contre des administrations et des entreprises françaises.
Devant l'ensemble de ces menaces, la délégation estime qu'il est nécessaire de conserver une approche équilibrée en ne négligeant aucun aspect au profit d'un autre . Ainsi, les attaques contre les systèmes d'information et de communication, l'espionnage économique, la criminalité organisée, les phénomènes de radicalisation constituent d'ores-et-déjà des menaces tout aussi importantes pour la France que le terrorisme. Il est indispensable de ne pas laisser se former d'« angle mort » dans l'appréciation de ces menaces, ce qui suppose un constant réajustement des moyens humains et techniques des services.
II. LES ENSEIGNEMENTS DE L'AFFAIRE MERAH
Au cours de l'année 2012, la délégation a consacré une part importante de ses travaux aux enseignements que l'on peut tirer de l'affaire Merah pour l'organisation et le fonctionnement des services de renseignement. La délégation s'est ainsi réunie le 4 avril pour entendre le coordonnateur national du renseignement et les directeurs des six services sur ce sujet, dont M. Bernard Squarcini, alors directeur central du renseignement intérieur (DCRI). Puis, elle a auditionné le ministre de l'intérieur M. Manuel Valls et le directeur central du renseignement M. Patrick Calvar, le 22 novembre.
La délégation a constaté un sous dimensionnement des moyens humains affectés à la lutte contre le terrorisme au sein de la DCRI.
Recommandations :
La délégation recommande tout d'abord de renforcer les liaisons entre tous les échelons du renseignement intérieur. Elle a pris acte, à ce titre, des mesures annoncées par le ministre , portant notamment sur l'amélioration de la coordination des antennes régionales. La mise en place d'un service d'inspection au sein de la DCRI va également dans le bon sens.
En outre, la délégation recommande de renforcer sensiblement les moyens de lutte contre le terrorisme.
Enfin, à la lumière de l'affaire Merah, la délégation considère que la France doit se doter des moyens permettant de suivre les déplacements de personnes par voie aérienne vers des destinations sensibles , y compris lorsque les trajets comportent une ou des escales.
II. UNE RÉFORME INABOUTIE DE L'ORGANISATION DU RENSEIGNEMENT
La délégation ne préconise pas une refonte complète de l'architecture générale des services de renseignement telle qu'issue de la réforme de 2008. Elle estime toutefois que ce cadre demeure perfectible.
L'articulation entre les services départementaux d'information générale et les services de la DCRI , dont les difficultés ont été évoquées dans les rapports de la délégation de 2010 et 2011, ne semble pas encore complètement efficace. À la suite de la publication du rapport de l'inspecteur général Desprats et du contrôleur général Léonnet, le 23 octobre 2012, le ministre de l'Intérieur a annoncé que des fonctionnaires de la DCRI seront placés au sein des SDIG. Cette réforme instaurant des bureaux de liaison est effective depuis le début de l'année 2013. La délégation considère qu'elle devra faire l'objet d'un suivi attentif.
La direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP) exerce à Paris et en petite couronne deux missions relevant de la DCRI à savoir la lutte contre le terrorisme et contre les subversions violentes. Pour autant, elle ne fait pas partie de la communauté du renseignement.
La délégation souhaite la consolidation du suivi des risques de radicalisation en milieu pénitentiaire.
Enfin, le coordonnateur national du renseignement est placé sous l'autorité du Président de la République, en application de l'article R*1122-8 du code de la défense alors que la gestion administrative et financière de la coordination relève du secrétariat général du Gouvernement. Cet article précise que le coordonnateur national transmet les instructions du Président de la République aux responsables de ces services, « qui lui communiquent les renseignements devant être portés à la connaissance du Président de la République et du Premier ministre », et lui rendent compte de leur activité.
Recommandations :
La question du positionnement de la DRPP par rapport aux autres services de renseignement doit être abordée.
La délégation est particulièrement attachée à la bonne articulation entre les services départementaux d'information générale et le renseignement intérieur.
Enfin, la délégation constate que la transformation éventuelle de la DCRI en direction générale reste posée. En tout état de cause, elle estime indispensable que la DCRI dispose d'une autonomie de gestion notamment de son personnel.
IV. UNE ÉVOLUTION DIFFÉRENCIÉE DES MOYENS HUMAINS ET UNE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES À MODERNISER
La délégation constate que si la priorité accordée à la fonction « connaissance et anticipation » par le Livre blanc de 2008 s'est traduite par une augmentation des effectifs de certains services, principalement de la DGSE, d'autres services, en particulier la DCRI, la DPSD et la DRM, ont vu leurs effectifs stagner voire diminuer, notamment en raison de la RGPP.
La délégation rappelle aussi que les effectifs et les moyens consacrés au renseignement représentent en France une part très modeste de l'ensemble des dépenses de l'État et que les efforts constatés ces dernières années constituent un rattrapage indispensable . Malgré cela, au terme de la programmation, ces moyens resteront inférieurs à ceux du Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, de l'Allemagne, alors qu'ils devraient être équivalents. En outre, malgré un effort de repyramidage des services, et comme le relèvent les responsables des différents services, le nombre de postes d'agents de catégories B et C ou de militaires du rang et de sous-officiers reste encore très élevé par rapport au nombre de postes d'agent de catégorie A ou d'officiers, notamment au sein de la DCRI, de la DRM et de la DPSD.
Enfin, les réformes mises en place en matière d'encadrement supérieur, de diversification du recrutement, de gestion des carrières, de mobilité entre les services et de formation, avec notamment la création de l'académie du renseignement, ont eu, selon la délégation, des effets positifs, mais ces réformes ne semblent pas avoir bénéficié dans les mêmes proportions à tous les services, et en particulier à la DCRI.
Recommandations :
La délégation estime souhaitable de stabiliser les effectifs de la DPSD et de la DRM à leur niveau actuel, de poursuivre le renforcement des effectifs de la DGSE, de Tracfin et de la DNRED, et de renforcer notablement les effectifs de la DCRI .
Elle considère également qu'il conviendrait de diversifier le recrutement de la DCRI en lui permettant notamment de recruter des contractuels, linguistes ou spécialistes de haut niveau, ce qui nécessite de lui accorder une véritable autonomie de gestion.
Enfin, la délégation juge nécessaire de poursuivre la modernisation de la gestion des ressources humaines, la diversification du recrutement et l'amélioration de la mobilité entre les services.
V. LES CAPACITÉS TECHNIQUES : DES LACUNES INACCEPTABLES
Si depuis 2008 la priorité accordée à la fonction « connaissance et anticipation » par le précédent Livre blanc s'est manifestée par le développement de nouvelles capacités de renseignement d'origine électromagnétique opérées par la DGSE, ce qui a permis à notre pays de combler le retard qu'il avait pris sur nos principaux partenaires, la délégation estime indispensable de poursuivre ces programmes à l'avenir, compte tenu notamment de l'augmentation considérable du nombre de données.
La délégation constate également qu' une partie des programmes d'investissements majeurs du renseignement prévus par le précédent Livre blanc de 2008 et la loi de programmation militaire ont connu des retards ou reports significatifs . Ainsi, le programme de renseignement électromagnétique satellitaire CERES a été retardé de quatre ans (CERES devrait être lancé en 2020, soit un « trou capacitaire » de trois ou quatre ans) et la modernisation de la flotte de drones MALE n'a pas été réalisée. Le programme de satellite d'alerte avancée a été reporté. Comme elle l'avait souligné dans ses précédents rapports, la délégation regrette en particulier nos faiblesses persistantes en matière de drones MALE, dont les interventions en Libye et au Mali ont démontré le rôle majeur dans le recueil du renseignement. De même, la possession d'une capacité spatiale pérenne en matière d'écoute électromagnétique apparaît comme un instrument indispensable pour la connaissance et la surveillance des théâtres d'opérations ou zones d'intérêts importants pour notre sécurité, tels que le Sahel. Par ailleurs, le coût global du satellite CERES ne paraît pas très élevé au regard d'autres programmes militaires et permettrait à la France d'accéder à une capacité de souveraineté unique en Europe.
La délégation rappelle aussi que la mutualisation des capacités techniques des services de renseignement répond à la fois aux nécessités d'optimisation de la ressource budgétaire et à des besoins opérationnels. Depuis 2008, des progrès ont été réalisés en matière de mutualisation des capacités, notamment en ce qui concerne le renseignement d'origine électromagnétique, opéré par la DGSE au profit de l'ensemble de la communauté du renseignement. D'une manière plus générale, les membres de la délégation considèrent que la mutualisation des capacités devrait être fortement accentuée .
Recommandations :
La délégation estime qu'il conviendrait, dans l'optique du nouveau Livre blanc et de la future Loi de programmation militaire, de confirmer et d'amplifier les capacités de renseignement mises en oeuvre par les armées , en particulier concernant le lancement du programme de satellite d'écoute électromagnétique CERES, de la composante optique du système de satellite d'observation spatiale MUSIS, de l'acquisition de drones MALE équipés de capacités optiques et électromagnétiques et de l'amplification des programmes de renseignement électromagnétique lancés depuis 2008.
La délégation estime également nécessaire d'accentuer la mutualisation des capacités, en renforçant notamment le rôle du coordonnateur national du renseignement, en renforçant les capacités exploitées par la DGSE au profit de la communauté du renseignement et en consolidant l'accès des autres services aux capacités mutualisées de la DGSE .
D'une manière plus générale, la délégation estime que les investissements nécessaires au renforcement des capacités techniques des services de renseignement devraient faire l'objet d'une priorité et d'un suivi effectif et régulier, sous le contrôle du Premier ministre, lors du vote du budget et de son exécution, ainsi que d'une information de la délégation parlementaire au renseignement.
VI. LE CYBERESPACE, NOUVEAU CHAMP D'ACTION POUR LES SERVICES
La menace représentée par les attaques contre les systèmes d'information s'est concrétisée et amplifiée ces dernières années, qu'il s'agisse de la cybercriminalité, d'attaques informatiques à des fins d'espionnage, de tentatives de déstabilisation ou encore d'attaques à des fins de sabotage (STUXNET, attaque informatique contre Saudi Aramco). La délégation rappelle également que la France n'est pas épargnée par ce phénomène .
depuis le Livre blanc de 2008, notre pays a renforcé son dispositif en matière de protection et de défense des systèmes d'information
Recommandations :
La délégation estime que la protection et la défense des systèmes d'information, en particulier de l'État, des entreprises publiques ou privées de secteurs stratégiques et des infrastructures d'importance vitale (énergie, transport, santé, etc.) devrait être une priorité de notre politique de défense et de sécurité nationale.
Il apparaît ainsi indispensable pour la délégation de poursuivre le renforcement des moyens et des effectifs de l'ANSSI dans les prochaines années, en se fixant un objectif minimal de 500 agents à l'horizon 2015 , de même que ceux affectés à cette tâche au sein des services de renseignement, .
La délégation considère qu'un important effort reste à accomplir en matière de sensibilisation des administrations, des entreprises et des infrastructures d'importance vitale, et plus largement des utilisateurs du cyberespace. Il semblerait notamment utile d'introduire une obligation de déclaration en cas d'incident ou d'attaque informatique significative qui s'appliquerait aux entreprises et aux opérateurs d'importance vitale , afin que l'État puisse être réellement informé de ces attaques.
Enfin, la délégation rappelle, que le précédent Livre blanc de 2008 avait indiqué que notre pays devait être doté de capacités offensives, tant dans les services spécialisés que dans les armées. Il paraît difficile, en effet, de concevoir une politique défensive sans connaître les méthodes et les moyens d'attaque. .
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VII. UN CADRE JURIDIQUE PERFECTIBLE
La délégation constate que la France s'est dotée, à partir du milieu des années 1990, d'une législation permettant de lutter contre les atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, le terrorisme et la criminalité organisée. Certains aspects de cette législation concernent directement les services de renseignement, les prérogatives des agents et leurs moyens d'action. Ils visent à maintenir le difficile équilibre entre, d'une part, la préservation de l'ordre publique et la lutte contre la criminalité et le terrorisme et, d'autre part, la sauvegarde des libertés.
La délégation estime que cette législation et ses modalités d'application par la justice, les forces de l'ordre et les services de renseignement, se sont avérées globalement efficaces, en particulier en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme.
Toutefois, les auditions des services menées au cours de l'année 2012 par la délégation l'ont convaincue que le cadre juridique peut sans doute être encore amélioré. En effet, d'une part ce cadre a été construit de manière stratifiée et certaines dispositions manquent de cohérence ; d'autre part, le législateur doit nécessairement adapter la loi aux évolutions de la criminalité et du terrorisme, en particulier sur le plan technologique, afin de maintenir l'efficacité des services.
Enfin, dans un contexte de judiciarisation accrue, la délégation estime que la protection des agents des services devrait être renforcée.
Recommandations
La délégation considère qu'il serait utile d'unifier les dispositifs en matière d'interception des télécommunications prévus d'un côté par la loi du 10 juillet 1991 (article L. 244-2 de code de la sécurité intérieure), de l'autre par la loi du 23 janvier 2006 (dispositions récemment prorogées jusqu'en 2015) en répondant aux besoins des services tout en sécurisant le cadre juridique.
En matière d' accès aux fichiers administratifs , il semble nécessaire de simplifier le dispositif législatif existant en harmonisant les dispositions relatives aux prérogatives des différents services, quel que soit leur ministère de rattachement (en particulier défense et intérieur), et aux finalités qui leur permettent d'agir (terrorisme, intérêts fondamentaux de la Nation).
Les principes fixés par la jurisprudence, en particulier celle de la Cour européenne des droits de l'Homme, rendent en revanche probablement difficile d'envisager que le témoin entendu dans une affaire judiciaire puisse être le responsable d'une opération et non l'agent lui-même. Des évolutions de l'organisation pratique des auditions au tribunal sont à privilégier.
Enfin, il apparaît périlleux de remettre en cause l'équilibre actuel en matière de législation relative à la levée du secret de la défense nationale, tel qu'il résulte de la décision du Conseil constitutionnel du 10 novembre 2011 portant sur une question prioritaire de constitutionnalité.
VIII. LE NÉCESSAIRE RENFORCEMENT DU CONTRÔLE PARLEMENTAIRE
La délégation estime indispensable le renforcement de ses prérogatives afin, d'une part, d'établir un véritable contrôle parlementaire des services de renseignement et, d'autre part, dans un contexte de judiciarisation croissante, de conforter leur activité.
La loi du 2007 n'a pas prévu que l'action de la délégation parlementaire soit qualifiée de « contrôle », évoquant seulement le « suivi » de l'activité générale et des moyens des services spécialisés. Forte de son expérience, la délégation estime aujourd'hui nécessaire que son action soit qualifiée de « contrôle ». La délégation considère, à la lumière de l'affaire Merah, qu'elle devrait être en mesure de connaître les dysfonctionnements liés à des opérations achevées.
Comme elle a eu l'occasion de le faire dans son rapport pour 2011, elle rappelle son souhait de fusionner avec la commission de vérification des fonds spéciaux . En effet, cet organisme qui n'est aujourd'hui composé que de parlementaires - dès lors que la Cour des comptes n'a pas désigné de membres pour y siéger - intervient dans un domaine proche.
La liste des personnes pouvant être entendues par la délégation est assez limitée dans l'état du droit. Elle souhaite pouvoir entendre des responsables des services de renseignement autres que leur directeur.
La délégation s'est interrogée sur sa capacité de communication . En effet, en application de la loi ses travaux sont couverts par le secret de la défense nationale. La seule exception prévue est la publication d'un rapport public annuel. Afin de mieux rendre compte de son action, la délégation a décidé d'étoffer son rapport public pour 2012.