EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 12 juillet 2011, sous la présidence de M. Jacques Legendre, président, la commission examine le rapport d'information de MM. Pierre Bordier et Yves Dauge sur l'archéologie préventive.

Un débat s'engage après l'exposé des deux rapporteurs.

M. Jacques Legendre, président . - Un point de méthode : avez-vous prévu une fiche synthétique reprenant vos recommandations dans le rapport ?

MM. Pierre Bordier et Yves Dauge , rapporteurs . - Bien sûr !

M. Jean-François Humbert . - L'exposé était intéressant et complet. Qu'advient-il des découvertes ?

Mme Maryvonne Blondin . - Les objets trouvés dans les foyers datant de l'âge de bronze découverts lors des fouilles réalisées à l'occasion du contournement nord-ouest de la ville de Quimper ont été exposés dans des préfabriqués avant d'être reversés au centre archéologique départemental.

Je continue de m'interroger sur le financement : de nombreuses collectivités à hésitent à se lancer dans des fouilles préventives en raison de leur coût. L'Inrap est désormais capable de cibler les endroits susceptibles de contenir des trésors archéologiques grâce à des photos aériennes. Pourriez-vous préciser ?

M. Yves Dauge, rapporteur . - L'information préalable dans les documents d'urbanisme guide les aménageurs. Plus elle sera complète, plus l'on réduira les fouilles. Contrairement à ce que l'on affirme souvent, les archéologues préfèrent ne pas lancer des fouilles. La prévention et le dialogue permettent de les éviter ou, tout du moins, de circonscrire leur ampleur et, donc, de minimiser leur coût.

M. Pierre Bordier, rapporteur . - Dans les zones dotées d'une carte de la recherche archéologique, tout le monde sait où se trouve le principal des sites enfouis. Résultat, les aménageurs peuvent déplacer leur projet pour éviter des recherches. Parfois, 100 mètres changent la donne !

M. Jack Ralite . - Je me souviens de la grande bataille de 2001 autour de l'archéologie préventive. Pourquoi une grande administration comme l'Inrap ne serait-elle pas capable de gérer ces fonds ? Pourquoi les regrouper au sein de la Caisse des dépôts, une grosse machine finalement vulnérable aux décisions de l'État ? L'exemple de France domaine montre que cette solution n'est pas toujours heureuse...

Permettez-moi un autre questionnement : les personnes du privé sont parfois très compétentes, mais faut-il que la bonification du public passe par le privé ? Le bilan que tire le Journal des arts sur les musées apporte un éclairage intéressant à cet égared. Quant à l'exclusion des groupes du BTP, cela reste à vérifier : de nombreux bistrots parisiens appartiennent désormais à des grandes chaînes, bien qu'ils aient conservé leur nom. Tout est affaire de vigilance, comme on dit aujourd'hui.

M. Pierre Bordier, rapporteur . - L'archéologie préventive ne se limite plus à l'Inrap. Compte tenu de la multiplicité des acteurs, mieux vaut confier les fonds à un organisme extérieur d'autant que l'élargissement de l'assiette de la redevance d'archéologie préventive pèsera sur tous.

M. Jean-Pierre Plancade . - Bien sûr, le dialogue est absolument nécessaire. Des difficultés surviennent néanmoins lorsqu'une fouille apparaît nécessaire sur un chantier déjà engagé. Dans ce cas, les collectivités territoriales doivent payer aux entrepreneurs des indemnités de retard alors que l'État, seul, décide la poursuite des recherches. Une journée sur le chantier du métro à Toulouse vaut la prunelle des yeux ! Alors, trois fois trente jours... Après négociation, nous avons finalement trouvé un accord pour réduire les frais : préserver certaines zones pour les générations futures.

M. Alain Dufaut . - Impossible de creuser un parking, qu'il soit public ou privé, à Avignon sans faire des découvertes donnant lieu à des fouilles avec différentes strates... Effectivement, les indemnités de retard sont telles que les opérateurs ne veulent pas entendre parler de fouilles. Parfois, les entreprises, engagées ailleurs, ne peuvent pas reprendre les travaux. Ce problème n'est pas simple, mais il faudrait trouver une solution.

Mme Françoise Cartron . - Dans notre région, la DRAC pousse les collectivités à prendre la compétence d'archéologie préventive. Combien de collectivités ont fait ce choix ? Est-ce effectivement une solution plus souple, plus efficace ?

M. Yves Dauge, rapporteur . - D'après nos données, une cinquantaine. Le service de Chartres, qui compte une centaine de personnes est très impressionnant ; il est...

M. Pierre Bordier, rapporteur . - ... un véritable atout de développement !

M. Yves Dauge, rapporteur . - Etant entendu que cet opérateur public travaille sous le contrôle du SRA. Des villes comme Avignon ou Arles auraient tout intérêt à créer des services pour mieux maîtriser ces situations ou à utiliser la possibilité de conventionnement avec l'Inrap ou les opérateurs privés. Les responsables de l'Inrap, eux-mêmes, ne contestent pas la fin du monopole : reste à passer de la confrontation au dialogue. Bref, nous appelons de nos voeux un changement radical des comportements.

M. Pierre Bordier, rapporteur . - Monsieur Dufaut, seulement 2 % des projets aboutissent à des fouilles. Pour autant, celles-ci sont très concentrées dans certaines zones. Tout dépend également des strates archéologiques : le gallo-romain intéresse peu...

Madame Cartron, la création de services d'archéologie dans les collectivités va dans le sens d'une simplification de la procédure. Le domaine reste largement dominé par le public : 64 services dans les collectivités pour 20 opérateurs privés. Chartres a un service extraordinaire, très réactif, très prospectif. Il compte même embaucher 30 à 50 personnes, un nombre sans commune mesure avec que nous imaginions au début de nos travaux !

M. Yves Dauge, rapporteur . - J'ajoute que la redevance couvrait à peine les frais engagés par les collectivités pour le diagnostic. Sa réforme permettra de le faire et de financer, en partie, ces services.

M. Jean-Pierre Plancade . - Une remarque à notre collègue Ralite : quand les opérateurs privés demandent, avec raison, de participer à des grands travaux publics, c'est le public qui apporte un bonus au privé, et non le contraire !

M. Jacques Legendre, président . - Nous voulions nous assurer que le gros effort consenti pour les fouilles archéologiques se traduisait bien par une meilleure connaissance de la mémoire du sol. Des rigidités, le manque de coordination, avez-vous montré, diminuent la portée de l'investissement national en faveur de l'archéologie préventive. Vous avez évoqué un désengagement du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche : déjà, le texte était porté par la Culture. La Recherche ne doit pas rester aux abonnés absents. Il faut également mieux associer les universités.

Pour finir, il faudra s'assurer que la carte de l'archéologie préventive soit renseignée à mesure des découvertes, et prévoir des dépôts de fouilles sur tout le territoire. Actuellement, certaines découvertes partent dans la nature, ce qui est une perte pour la recherche.

* *

*

La commission adopte à l'unanimité les conclusions de son rapporteur et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page