2. L'importance de l'objet et des traces matérielles du passé

Au cours du colloque précité, Mme Marie-Hélène Joly a également souligné que « le fait qu'un objet, quel qu'il soit, ait traversé le temps pour s'exposer à nos regards permet au spectateur d'entrer en contact avec le passé sur le mode magique ». Lors de son audition par votre rapporteur, Mme Adeline Rispal, muséographe et architecte, a estimé que la galerie chronologique de la Maison de l'Histoire de France devrait nécessairement s'appuyer sur des objets, faisant ainsi référence à la puissance émotionnelle suscitée par les objets de guerre : « les visiteurs sentent en général très fortement la prégnance des objets de guerre, car ce sont des objets qui ont touché la mort. [...] On sous-estime toujours la capacité des visiteurs à ressentir les choses. La symbolique touche tout le monde, la médiation sensible est très importante (espace, lumière, etc.) ». Les objets incarnent, ainsi, un ancrage dans la réalité matérielle de l'histoire .

Dans le cadre d'une médiation culturelle de l'histoire 31 ( * ) , dès lors que les objets devront être mis en scène afin de mettre en avant leur message, il est illusoire d'aspirer à une totale neutralité dans le discours historique de la future Maison de l'Histoire de France. En effet, Mme Marie-Hélène Joly souligne qu' « il n'y a pas d'objectivité ni de neutralité dans l'acte muséographique , contrairement à ce que peuvent encore imaginer certains conservateurs ; muséographier, c'est déjà renoncer à toute neutralité , même (et surtout) si l'on est totalement inconscient de ses intentions ». Par conséquent, compte tenu de la polysémie intrinsèque des objets à valeur historique, il est nécessaire non pas de prétendre à une fausse objectivité, mais d' assumer une part de mise en scène contrebalancée par une démarche systématiquement multiperspectiviste , soulignant la pluralité des interprétations soulevées par l'étude de ces objets.

Comme le rappelle Mme Odile Coppey lors de son intervention dans le cadre du colloque précité, il existe une très grande variété de moyens et de supports susceptibles de replacer un objet à valeur historique dans un discours. Parmi ceux-ci, on peut citer : « conférence - récit ou explication -, borne interactive, animation plus ou moins spectaculaire d'un lieu par le son, la lumière ou les deux, jeu, muséographie discursive où l'objet trouve sa place dans un propos globalisant permettant l'appropriation et de l'objet du discours » 32 ( * ) . Dans la plupart des cas, elle souligne qu'il est plus aisé pour le visiteur ou le téléspectateur de « se situer par rapport à une grille de lecture que hors de tout repère ».


* 31 Selon Mme Odile Coppey, « la médiation culturelle se définit comme l'ensemble des éléments qui réduisent les écarts entre ce qui est présenté : oeuvres, objets... et les destinataires : le public ou la clientèle ou encore la population » (in COPPEY, Odile, « Pour une médiation de l'histoire » in Des musées d'histoire pour l'avenir , actes du colloque organisé à l'Historial de Péronne du 19 au 21 novembre 1996, Noêsis, Paris, 1998).

* 32 Ibidem .

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