3. En cas d'échec, se doter d'un solide mécanisme contre les « paradis du carbone »
Toutefois, l'Europe ne devrait pas s'interdire de recourir à un mécanisme d'inclusion carbone. En effet, dans un premier temps, la crédibilité d'une telle perspective peut constituer un atout dans les négociations internationales sur le climat.
Et, surtout, l'Europe devrait mettre en place un tel mécanisme si des pays se soustrayaient à des obligations de réductions d'émissions, voire optaient pour une stratégie de développement en tant que « paradis du carbone ». L'allocation de quotas gratuits aux secteurs menacés pourrait, en effet, ne pas suffire. Il resterait alors à définir les modalités d'un mécanisme d'inclusion carbone.
a) La solution « simple » de la soumission des importateurs au marché de quotas européen
L'inclusion des importateurs dans le marché de quotas européen apparaît comme la solution la plus « simple » .
En premier lieu, les secteurs sous quotas sont, par définition, les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre et donc les plus exposés à la « concurrence carbone » internationale.
Ensuite, ces secteurs sont soumis à une législation européenne uniforme et à des mécanismes de quotas cohérents en Europe.
Enfin, la question du « tarif de la taxe » se règle aisément puisqu'il ne s'agit que de vendre des quotas au prix du marché, dans les mêmes conditions que les industriels européens. Il n'y aurait donc pas de discrimination.
Il semble, dès lors, possible de procéder à une telle inclusion, à condition de régler deux questions :
- la détermination de la quantité de carbone des produits importés. Comme indiqué ci-dessus, la présomption selon laquelle ces produits ont été fabriqués selon « la meilleure technologie disponible » (c'est-à-dire, en fait, la plus courante) semble être la voie la plus solide au regard de la jurisprudence de l'OMC ;
- la prise en compte, d'une part, des contraintes existantes dans les pays tiers et, d'autre part, des éventuelles mesures d'allégement de la contrainte (en particulier, l'attribution de quotas gratuits) existant en Europe .
Cette inclusion nécessiterait donc vraisemblablement une solide étude sectorielle préalable, ce dont le projet de loi américain prend acte en donnant deux ans à l'administrateur de l'EPA pour mettre en place sa réglementation une fois que le Président des Etats-Unis en aura approuvé le principe.
b) La solution plus complexe d'une taxe aux frontières
Une taxe (ou un ajustement fiscal) aux frontières de l'Europe serait probablement plus complexe à mettre en place.
S'agissant des secteurs sous quotas, la question de la différence entre le tarif de la taxe et le prix du marché du carbone ne manquerait pas de se poser et, comme indiqué précédemment, le rapport conjoint PNUE-OMC doute même de la pertinence d'une taxe corrélée au prix des quotas constaté sur les marchés.
S'agissant des secteurs hors quotas (par définition moins exposés à un éventuel « dumping du carbone »), un tel ajustement ne pourrait être envisagé que si l'ensemble des pays de l'Union européenne disposait, pour un secteur donné, d'une taxe de ce type .
Dans ces conditions, une taxe aux frontières de l'Europe pourrait être mise en place :
- en se fondant sur la présomption de la meilleure technologie disponible , comme dans le cas de l'inclusion dans le marché de quotas ;
- en prenant comme référence le tarif le moins élevé pratiqué au sein de l'Union européenne .