c) Assurer le succès de la réforme
Le groupe de travail ne souhaitait pas achever son « tour d'horizon » des enjeux liés à la création d'une taxe carbone sans évoquer quelques éléments de méthode qui lui semblent indispensables pour garantir le succès de la réforme. A cet égard, les deux priorités que doivent se donner les pouvoirs publics sont la construction d'un consensus le plus large possible et la garantie d'une visibilité forte pour les mesures prises en contrepartie de cette fiscalité nouvelle.
(1) Bâtir un consensus durable
Les développements qui précèdent ont montré que l'efficacité d'une taxe carbone implique notamment une montée en puissance progressive et prévisible de son tarif, afin de permettre l'ajustement des comportements. Dans cette mesure, la trajectoire retenue devra résister aux alternances politiques et, par conséquent, faire l'objet du consensus le plus large possible au moment de sa définition. A cet égard, le groupe de travail se félicite de la méthode retenue par le gouvernement, consistant à réunir une « conférence du consensus » placée sous l'autorité de l'ancien Premier ministre Michel Rocard.
Ce consensus devra également venir des futurs redevables de la contribution, sauf à favoriser l'apparition de contestations et, partant, de revendications pour l'obtention de mesures dérogatoires nuisibles à l'efficacité et à la lisibilité du prélèvement.
L'on remarque, à ce titre, que l'instauration d'une taxe carbone à l'étranger n'a pas systématiquement suscité les « levées de bouclier » accompagnant traditionnellement la création d'un nouvel impôt. En Colombie britannique, la taxe carbone semble avoir été globalement bien accueillie, tant par les organisations environnementales que par la chambre de commerce et le Business Council de la province. En Finlande, le taux de la taxe CO 2 étant initialement faible par rapport aux autres accises, celle-ci a également été acceptée sans difficulté.
Selon l'ADEME, plusieurs sondages témoignent d'une réelle prise de conscience par les ménages des conséquences de nos comportements de consommation sur le changement climatique, qui pourrait favoriser l'acceptation de la contribution climat-énergie. La connaissance des impacts du chauffage des bâtiments dans l'aggravation de l'effet de serre est ainsi passée, en France, de 39 % en 2000 à 75 % en 2008 90 ( * ) . De même, 75 % des français semblent aujourd'hui prêts à réduire l'usage de leur voiture, 84 % leur consommation de chauffage et 81 % l'usage des appareils électroménagers 91 ( * ) .
Cette prise de conscience est également le fait des entreprises . Suite au Grenelle de l'environnement, 75 % des dirigeants d'entreprise français envisagent d'engager des actions de réduction ou de maîtrise de la consommation en énergie des bâtiments , 65 % d'entre eux souhaitent prendre les mêmes mesures dans les process de production et 54 % dans les transports. Ces intentions semblent avoir résisté à la crise , puisque selon le sondage « L'environnement et la maîtrise de l'énergie dans les PME - TPE » réalisé début 2009 auprès de 1.000 chefs d'entreprises de 1 à 249 salariés, les chefs d'entreprise restent préoccupés par la protection de l'environnement (85 % des répondants) et la maîtrise de l'énergie (82 % des répondants). Ces chiffres sont stables par rapport au même sondage réalisé en 2006.
Enfin, les représentants des entreprises et des partenaires sociaux auditionnés par le groupe de travail n'ont guère manifesté d'hostilité de principe à une fiscalité du carbone, sous réserve qu'elle s'articule correctement avec le système européen d'échanges de quotas et que sa mise en oeuvre s'accompagne d'une réflexion globale sur l'architecture des prélèvements.
* 90 Selon l'enquête ISL/RCB réalisée pour l'ADEME en 2008.
* 91 Selon le sondage Terra Eco-OpinionWay, opéré sur un échantillon de 1.014 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d'âge, de catégories socioprofessionnelles, de région, de résidence et catégorie d'agglomération. Interrogation en ligne sur système Cawi (Computer Assisted Web Interview) et interviews réalisées les 11 et 12 mars 2009.