b) Le rôle des « territoires de projet »
Vos rapporteurs souhaitent mettre en avant le rôle essentiel joué par les « territoires de projets » portés par plusieurs communes qui s'avèrent être de puissants leviers d'action en matière de développement local.
Ils soulignent toutefois la nécessité de respecter deux conditions :
- une dimension adaptée à la conduite des projets : il s'agit de mettre en place des structures qui, sans atteindre une taille excessive susceptible de paralyser toute initiative, soient suffisamment importantes pour créer des synergies et mutualiser les moyens humains et matériels disponibles. Notons, à cet égard, qu'un rapport de la Cour des comptes de novembre 2005 110 ( * ) a stigmatisé le caractère trop exigu des périmètres de certains territoires de projet, qui ne permet pas d'apporter des réponses pertinentes aux problématiques locales, en particulier en milieu rural. L'expérience montre que le chiffre de 50.000 habitants répond bien à cette exigence de « taille critique » ;
- un projet de territoire équilibré : il s'agit de placer au coeur du projet le développement de l'ensemble des communes membres, quelle que soit leur taille. Cet objectif suppose en particulier que la commune-centre joue la carte de la répartition équitable des implantations économiques.
Parmi les territoires de projet, il faut distinguer les EPCI, les pays et les parcs naturels régionaux.
(1) La coopération intercommunale
Les EPCI à fiscalité propre recouvrent, depuis la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale :
- les c ommunautés urbaines pour les grands ensembles urbains d'au moins 500.000 habitants ;
- les communautés d'agglomération pour les territoires urbains d'au moins 50.000 habitants ;
- les communautés de communes pour les autres territoires, en particulier les territoires ruraux .
Le succès rencontré par l'intercommunalité en France apparaît au travers, d'une part, de sa large diffusion (notre pays compte plus de 2.500 EPCI à fiscalité propre regroupant 88 % des communes et 82 % de la population), d'autre part, de la forte adhésion de nos concitoyens à l'intercommunalité, comme l'illustrent les sondages régulièrement commandés par l'Assemblée des communautés de France qui révèlent que 88 % des Français pensent que l'intercommunalité permet de mieux mutualiser les investissements et 64 % qu'elle renforce la solidarité financière entre les communes.
Parmi les nombreuses actions susceptibles d'être menées dans un cadre intercommunal afin de favoriser le développement des territoires ruraux, vos rapporteurs ont souhaité mettre en valeur les regroupements pédagogiques intercommunaux et les relais services publics .
Comme il l'a été précédemment indiqué, des regroupements pédagogiques intercommunaux se sont développés depuis les années 1970 afin d'apporter une réponse aux besoins des familles qui résident dans des zones rurales, où le nombre d'élèves est trop faible pour justifier l'installation ou le maintien d'une école.
Ces regroupements, obligatoires pour les communes distantes de moins de trois km dès lors que l'une des communes compte moins de quinze élèves (article L. 212-2 du code de l'éducation), se sont fortement appuyés sur les EPCI favorisant en leur sein la concertation entre les communes, concertation dont la nécessité a été mise en avant dans le rapport d'enquête du Sénat publié en 1999 sur l'Education nationale 111 ( * ) .
Notons, sur le plan juridique, que le principe posé par la loi Gobelet du 30 octobre 1886 prévoyant qu'une école publique doit être créée dans chaque commune, à charge pour cette dernière d'en assumer la construction, l'entretien et le fonctionnement, a été atténué par la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, qui consacre la possibilité d'un transfert de cette compétence aux EPCI 112 ( * ) .
Si l'intercommunalité joue un rôle essentiel dans la réussite de ces regroupements pédagogiques, celle-ci suppose également un partenariat actif avec le département en matière de transport scolaire (article L. 213-11 du code de l'éducation).
Un autre exemple de l'action efficace de l'intercommunalité en matière de développement local est fourni par les « relais services publics » .
Ces relais ont été imaginés à la suite d'un rapport de l'inspection générale de l'administration 113 ( * ) , rendu public en février 2006, préconisant la création de 1.500 points d'accueil multiservices dans un délai de trois ans, sur le modèle de ce qui existait déjà dans certains bourgs ruraux sous des formes et des appellations très diverses : maisons de services publics, espaces régionaux emploi formation, points publics ...
Il s'agit de créer des structures légères, animées par une ou deux personnes, chargées d'accueillir le public pour lui permettre d'obtenir des informations et d'effectuer des démarches administratives relevant de plusieurs administrations ou organismes publics, principalement en matière d'emploi et de prestations sociales. Ces structures, qui peuvent accueillir également un service postal, ont ainsi vocation à jouer le rôle de « guichets uniques de proximité en milieu rural ».
La DIACT a décidé de lancer, début septembre 2006, une campagne de labellisation de ces relais, subordonnée à la signature d'une charte nationale de qualité qui garantit le niveau de prestation réalisée. Le label ouvre droit à des subventions de l'Etat, sachant que le coût annuel de fonctionnement d'un relais est estimé à 50.000 euros. 75 relais ont d'ores et déjà été labellisés.
Si les relais services publics n'ont pas de forme juridique imposée puisqu'ils peuvent être portés par une mairie, un service de l'Etat, une association..., c'est le plus souvent l'intercommunalité qui en est le maître d'oeuvre.
* 110 Ce rapport, consacré à l'évaluation de la coopération intercommunale en France, retrace l'évolution du cadre législatif de l'intercommunalité et, en raison de l'étape importante que constitue la loi du 12 juillet 1999, évalue ses conséquences pour l'Etat et la gestion publique locale. Le rapport plaide notamment pour une utilisation plus active des dispositions de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui a institué une procédure de fusion facilitant le regroupement de plusieurs EPCI.
* 111 Mieux gérer, mieux éduquer, mieux réussir, redonner sens à l'autorisation budgétaire, rapport de la commission d'enquête sur la situation et la gestion des personnels des écoles et des établissements du second degré ainsi que de ceux des services centraux et extérieurs des ministères de l'éducation nationale et de l'agriculture, pour l'enseignement agricole, publié le 28 avril 1999 et disponible sur Internet : http://www.senat.fr/rap/r98-3281/r98-3281.html .
* 112 Article 17 de la loi qui introduit un nouvel article L. 5214-16 dans le code général des collectivités territoriales.
* 113 Ce rapport faisait suite aux travaux de la conférence nationale sur les services publics ruraux et du rapport de son président Paul Durieux.