c) La faible utilisation du facteur travail
Au-delà de ses conséquences sociales, le sous-emploi de masse que connaît la France depuis un quart de siècle constitue un formidable gâchis économique. Celui-ci ne se traduit d'ailleurs pas seulement par un taux de chômage élevé, mais aussi par un taux d'activité modeste, c'est-à-dire par une part trop faible de la population en âge de travailler constituant le facteur travail disponible pour la production nationale 245 ( * ) .
C'est là une grande différence avec certains Etats comme les Pays-Bas, cités plus haut, où la faible durée moyenne de travail hebdomadaire correspond à un recours important au travail à temps partiel dont le corollaire est un taux de chômage particulièrement bas.
Ce gâchis est d'ailleurs devenu structurel et systématique s'agissant des salariés de plus de 50 ans, largement sous-employés, que l'on a poussé vers la sortie du marché du travail sans chercher à engager des politiques actives de formation continue ou de reconversion permettant de valoriser ce capital humain.
En même temps qu'il prive le pays d'une partie de ses capacités de production, ce sous-emploi massif aggrave la faible productivité par tête de ceux qui travaillent en grevant leurs salaires des charges nécessaires au financement d'un système de redistribution bénéficiant en particulier aux personnes sans emploi.
La non-valorisation de la population active est d'autant plus regrettable qu'un des atouts concurrentiels de la France réside précisément dans le dynamisme de sa démographie .
En effet, à l'horizon 2025, le pays ne devrait avoir perdu que 3,5 % de sa population de 15-24 ans, qui représente les entrants sur le marché du travail, alors que le manque à gagner sera de 25 % pour l'Allemagne et de 38,6 % pour les dix Etats membres entrés dans l'Union en 2004 246 ( * ) .
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la forte productivité horaire des Français apparaît d'abord comme la variable d'ajustement d'un cercle vicieux caractérisé par le sous-investissement productif, le poids de la dépense et des déficits publics, ainsi que par un sous-emploi massif.
Cette situation de sous-utilisation du potentiel productif est particulièrement handicapante pour l'économie française dans la mesure où la productivité globale des facteurs de production conditionne directement la croissance et la compétitivité du pays, c'est-à-dire notre capacité à financer des politiques redistributrices.
* 245 La perte ainsi occasionnée est considérable puisque si notre pays atteignait les taux d'activité les plus élevés d'Europe (Pays-Bas pour les moins de 35 ans et Suède pour les plus de 35 ans), il récupérerait une réserve de plus de 3,7 millions de personnes à l'horizon 2025, soit une hausse de 13 % de la population active.
* 246 Source : projection de la population mondiale, ONU, 2004.