b) La réforme du financement des exonérations de cotisations sociales, un enjeu pour la clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale
(1) Une débudgétisation permettant le respect de la norme de stabilité des dépenses de l'Etat en volume
Afin d'assurer le financement des allègements généraux de cotisations sociales, l'article 41 du projet de loi de finances pour 2006, tel que déposé par le gouvernement, prévoit de remplacer la dotation budgétaire actuelle inscrite sur le budget du travail par l'affectation à la sécurité sociale d'un panier de recettes.
« L'inventaire à la Prévert » des 9 taxes et impôts visés par l'article 41 du projet de loi de finances pour 2006 : a) une fraction égale à 95 % de la taxe sur les salaires ; b) le droit sur les bières et les boissons non alcoolisées ; c) le droit de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels ; d) le droit de consommation sur les produits intermédiaires ; e) les droits de consommation sur les alcools ; f) la taxe sur les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire ; g) la taxe sur les primes d'assurance automobile ; h) la taxe sur la valeur ajoutée brute collectée par les commerçants de gros en produits pharmaceutiques ; i) la taxe sur la valeur ajoutée brute collectée par les fournisseurs de tabacs. |
Ce panier de taxes a été fixé de telle sorte que leur produit « corresponde » au montant estimé des allègements de charges en 2006, soit 18,9 milliards d'euros.
Votre rapporteur général tient à souligner que, avant de répondre à une logique de clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, la mesure prévue par l'article 41 du projet de loi de finances est une commodité permettant le respect de la norme de stabilité des dépenses de l'Etat en volume, puisqu'elle permet d'exclure une dépense très dynamique, qui doit évoluer spontanément de 17,1 milliards d'euros en 2005 à 18,9 milliards d'euros en 2006.
Ceci posé, la solution retenue ne constitue pas un simple retour à la situation antérieure à 2004, puisque ces taxes seraient directement affectées à la sécurité sociale et non à un « fonds de nulle part » comme c'était le cas avec le FOREC.
Si la solution retenue dans le cadre de l'article 41 retient ainsi une option claire, il convient de s'assurer qu'elle contribue pleinement à la clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
En outre, elle ne règle en rien la question centrale de la maîtrise des dépenses sociales.
(2) Un nécessaire effort de lisibilité
Votre rapporteur général relève que la kyrielle de taxes proposées par l'article 41 du projet de loi de finances pour 2006 ne contribue pas à la lisibilité ni à la simplicité.
La mesure proposée par l'article précité conduit également au partage de la taxe sur les salaires 19 ( * ) , 95 % du produit de celle-ci allant à la sécurité sociale tandis que les 5 % restants reviendraient à l'Etat.
Deux raisons justifient ce partage de la taxe sur les salaires :
- d'une part, la volonté d'attribuer des recettes correspondant exactement au montant anticipé des allègements de charge ;
- d'autre part, le souhait de conserver une marge de manoeuvre pour l'avenir, compte tenu des « clauses de revoyure » prévues par cet article 20 ( * ) .
Si votre rapporteur général comprend ces contraintes, il estime nécessaire d' explorer d'autres solutions plus lisibles que cet « inventaire à la Prévert », comme l'affectation d'une quote-part de TVA. D'après les informations recueillies auprès du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, un point de TVA à taux normal représente, en 2005, environ 5,7 milliards d'euros 21 ( * ) , ce qui signifie que le transfert à la sécurité sociale représenterait environ 3,3 points de TVA .
Ce financement des régimes de sécurité sociale par la TVA ne constituerait pas une nouveauté, puisque le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) a bénéficié, jusqu'en 2003, d'une part du produit de la TVA 22 ( * ) .
L'orientation vers une intégration des allègements de charges dans le barème de la sécurité sociale doit également faire l'objet d'une étude approfondie. Votre rapporteur général relève que cette solution conduit à substituer au débat sur les allègements de charges, dont il est dommage que le Parlement soit dessaisi compte tenu des doutes concernant leur efficacité économique, un débat sur la progressivité des charges.
* 19 Sur ce point, se reporter au rapport d'information n° 8 (2001-2002) de notre collègue Alain Lambert sur la taxe sur les salaires.
* 20 Trois mécanismes sont en effet prévus : une régularisation en 2007 pour tenir compte du montant effectif des exonérations de cotisations sociales en 2006 ; une modification de la liste des impôts et taxes affectés dans le cas où les allégements de charges seraient eux-mêmes modifiés ; des rendez-vous en 2008 et 2009, le gouvernement devant remettre un rapport analysant les écarts éventuels entre les recettes des impôts et taxes affectés et la perte de recettes résultant des allégements de charges l'année précédente. En cas d'écart supérieur à 2 %, une commission indépendante serait alors chargée de rendre un avis sur d'éventuelles mesures d'ajustement.
* 21 On estime en effet qu'un point de taux super-réduit « rapporte » 449 millions d'euros, un point de taux réduit 2,287 milliards d'euros et un point de taux normal 5,729 milliards d'euros.
* 22 L'article 1609 septdecies du code général des impôts prévoyait l'institution, au profit du BAPSA, d'une cotisation de 0,70 % incluse dans les taux de la taxe sur la valeur ajoutée.