C. ASSURER LA TRANSPARENCE DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES
Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc évoque le renforcement des structures administratives « directement concernées » par la mise en oeuvre de ses propositions. A ce titre, il propose d'adapter l'organisation générale du Centre national de la cinématographie (CNC). Deux objectifs lui paraissent devoir être recherchés : réformer la commission d'agrément, assurer le contrôle efficace des devis.
La participation des professionnels au choix d'attribution des aides gérées par le CNC est considérée par le rapport comme une des forces du système français, au motif qu'elle assure à ces décisions administratives une réelle légitimité et qu'elle organise la transparence de l'information entre professionnels.
Ce point méritera à l'évidence d'être discuté dans la mesure où l'on peut, au contraire, estimer qu'il y a là une source de confusion, voire de malentendu, de nature à affecter l'efficacité de l'ensemble du système d'aide.
La gestion collective et le plus souvent collégiale des aides apparaît en effet assez largement contraire à l'esprit de la loi organique précitée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances. Les notions cardinales de programme et de responsabilisation paraissent difficilement compatibles avec ce type d'organisation qui fait sans doute une trop large place à la cogestion.
1. Dégager des indicateurs d'activité de coût et de performances pour évaluer l'efficacité de l'aide de l'État
La désignation d'un responsable pour chaque enveloppe de crédits s'accompagne de la mise au point d'indicateurs de performances objectifs. Nul doute que dans le domaine du cinéma, la mesure des performances n'est pas chose facile.
a) La problématique de la loi organique du 1er août 2001
On peut rappeler que la loi organique du 1 er août 2001 a introduit la notion de « programme », enveloppe fongible des crédits destinée selon l'article 7 de ladite loi « à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère ». A ces programmes, qui sont regroupés en missions et qui se décomposent en actions, sont associés des objectifs et des indicateurs.
En fait, cette nouvelle architecture prolonge celle des agrégats budgétaires 28 ( * ) tels qu'ils ont été mis en place à partir du projet de loi de finances pour 2000 sous l'impulsion de la direction du budget.
De fait, on trouve déjà au sein de l' agrégat 12 « développement culturel et spectacles » une rubrique « cinéma et audiovisuel » qui décrit les objectifs et les moyens du centre national de la cinématographie.
Les missions principales du CNC sont décrites comme étant :
- la réglementation de la production cinématographique et audiovisuelle et le soutien à l'économie du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia ;
- la promotion du cinéma et de l'audiovisuel, leur diffusion auprès de tous les publics ainsi que la protection et la diffusion du patrimoine cinématographique.
Il est probable que l'architecture des agrégats servira de base à l'établissement de ce qui devrait constituer le programme cinéma et audiovisuel.
Une série de questions vont certainement donner lieu à débat et notamment les relations entre cinéma et audiovisuel. Bien que l'agrégat 12 associe cinéma et audiovisuel, il s'agit des actions menées par le Centre national de la cinématographie à l'exclusion de celles gérées par la direction du développement des médias.
Même s'il s'agit de deux domaines distincts, vos deux rapporteurs ont tendance à penser qu'il existe suffisamment de passerelles, notamment sur le plan culturel, en matière de protection du patrimoine, mais aussi économique avec l'adossement du secteur du cinéma sur celui de la télévision pour que la question puisse être posée.
Actuellement, les objectifs et les indicateurs dont sont assortis les agrégats, sont présentés ex ante dans les bleus budgétaires et ex post dans les compte-rendus budgétaires. Avec la loi organique précitée, chaque programme donnera lieu ex ante à la définition de « projet annuel de performance », tandis que le projet de loi de règlement comportera des « rapports annuels de performance ».
Pour faire simple, on peut dire que le programme qui sera l'unité de base budgétaire, correspondra à un acteur identifié dont les performances seront appréciées par rapport à une batterie d'indicateurs de résultats d'où l'importance de la définition des indicateurs dont la mise au point doit mobiliser dès maintenant les capacités d'analyse des administrations.
La démarche est complexe. L'expérience acquise par les pays anglo-saxons montre qu'il faut aller au-delà des indicateurs d'impact (souvent de nature politique et parfois peu maîtrisables compte tenu des influences extérieures) pour déboucher sur des indicateurs opérationnels de nature à permettre le pilotage des services. La direction du budget distingue, à côté des indicateurs de contexte destinés à prendre en compte les influences extérieures, les indicateurs de moyens qui retracent le volume du coût des moyens utilisés et les indicateurs d'activité des services ainsi que les indicateurs de performance ou de résultat.
Ce bref rappel témoigne de la complexité conceptuelle et de la difficulté que l'on va rencontrer non seulement pour dégager des indicateurs objectifs et fiables des performances de l'administration mais aussi pour savoir à quel niveau, efficacité socio-économique, qualité du service ou efficacité de la gestion, l'on se situe.
b) L'urgence d'une réflexion sur les indicateurs
Il n'est pas question ici d'amorcer une réflexion qui ne peut résulter que d'un travail collectif associant, d'une part, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et les services techniques concernés et, d'autre part, la profession.
Tout au plus, peut on suggérer que l'observatoire de la production cinématographique 29 ( * ) , dont le rapport Leclerc propose la constitution, ou son équivalent quel qu'en soit le nom, ait pour tâche d'élaborer des références incontestables pour l'appréciation des résultats de l'intervention de l'État. Sur le plan administratif, il restera à veiller à ne pas empiler les instances dès lors qu'il existe depuis 1996 une autre instance du même type destinée à suivre l'évolution de la fréquentation cinématographique, avec « l'observatoire de la diffusion ».
Jusqu'à présent, les lois de finances étaient principalement axées sur la discussion des moyens ; avec la loi organique précitée, les débats se focaliseront sur des objectifs à atteindre et des résultats obtenus. En matière de cinéma, la méthode est certainement plus facile à énoncer qu'à mettre en oeuvre.
D'abord, il faudra éviter de faire référence à des indicateurs ayant un caractère incantatoire ou au contraire calqués sur les moyens mis en oeuvre sans que l'on se pose la question de l'importance des résultats obtenus.
Deux orientations méthodologiques paraissent cependant incontestables :
- d'une part, il convient de s'assurer que le souci de la diffusion du contrôle de gestion et de la comptabilité analytique est bien pris en compte. Sans se faire de ce type d'outil un objectif absolu, il faut insister sur l'apport qu'il constitue du point de vue de l'appréciation des résultats de l'action administrative ;
- d'autre part, ainsi qu'on l'a déjà mentionné, on aura du mal à éviter de s'attaquer à la délicate question de la mesure de la qualité , si ce n'est de la production elle-même, du moins des résultats obtenus. Tel est le sens à donner à l'idée avancée ci-dessus par vos rapporteurs de la création d'une instance chargée de déterminer des indices de la qualité de la production cinématographique.
En tout état de cause, la réflexion sur la nouvelle architecture budgétaire qu'il faut entreprendre sans tarder, doit déboucher sur la définition d'un contrat d'objectifs et de moyens, passé entre l'État et le Centre national de la cinématographie. Un tel cadre, à défaut d'être un outil parfaitement opérationnel, a essentiellement le mérite de servir de relais entre le niveau global retracé dans le « bleu » budgétaire et le niveau microéconomique.
2. Clarifier les responsabilités entre tutelle et gestionnaires des aides, entre État et professionnels
Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc se félicite, comme on l'a vu, de la participation des professionnels du secteur à la gestion des aides publiques à la filière cinématographique.
a) Le partage des compétences entre Budget et compte spécial du Trésor
La répartition des dépenses exécutées par le CNC entre les crédits issus du compte d'affectation spéciale et ceux du budget général venant du ministère de la culture a fait l'objet depuis quelques années d'un effort de rationalisation par rapport aux sources de financement.
La logique de cette répartition est d'abord juridique :
- relèvent du compte d'affectation spéciale, les dépenses qui sont prévues dans la loi de finances et les décrets fixant son objet et ses modalités d'attribution. On doit rappeler que la loi organique précitée précise et restreint les possibilités de dépenses qui doivent avoir un rapport avec la source des recettes des comptes d'affectation spéciale ;
- relèvent des crédits du ministère de la culture, les dépenses financées sur le budget général par le ministère de la culture dont l'exécution lui est confiée par l'État. Dans la mesure où ces dépenses entrent dans la mission du CNC et celle du ministère de la culture, les possibilités sont donc plus générales que pour le compte.
De cette logique juridico-budgétaire, découle la répartition des compétences entre les deux masses budgétaires.
Les dépenses inscrites sur le compte de soutien, à partir de taxes prélevées sur les recettes des professionnels, doivent revenir soit directement aux professionnels du secteur pour la réalisation d'oeuvres ou pour aider les entreprises à s'adapter à l'évolution du marché, soit indirectement par la promotion ou l'aide à la formation.
L'objet du compte de soutien est en quasi-totalité d'apporter une aide économique au secteur du cinéma et des programmes audiovisuels, même si la section cinéma intègre des éléments de choix culturels, essentiellement dans l'avance sur recettes.
Les aides dispensées sur les crédits du ministère de la culture relèvent :
- soit de secteurs qui n'entrent pas dans le domaine du compte de soutien tel le multimédia,
- soit correspondent à une mission de l'État comme le rayonnement international de la France, l'éducation initiale ou la préservation du patrimoine, et ne sont pas une aide directe aux professionnels, même si ceux-ci peuvent en tirer des bénéfices annexes.
- soit à une mission spécifique exécutée pour le ministère de la culture par le CNC ainsi que c'est la cas de l'opération « Images de la culture ».
Le tableau ci-dessous dresse la liste des principales interventions du CNC et la justification de leur rattachement à l'un ou l'autre des budgets:
Ventilation des crédits entre budget et compte de soutien
Crédits du compte de soutien |
|
Soutien automatique aux producteurs |
Aide à l'oeuvre versée aux producteurs, à fondement économique |
Soutien automatique aux distributeurs |
Aide à l'oeuvre versée aux distributeurs, à fondement économique |
Soutien automatique aux exploitants |
Aide à l'investissement pour les exploitants, à fondement économique |
Avance sur recettes et autres aides sélectives à l'oeuvre |
Aide à une oeuvre présentée par un réalisateur, aide aux films d'auteurs |
Aides sélectives à la rénovation de salles |
Aide aux exploitants dans des situations de concurrence difficile (salles de centre-ville face à des multiplexes, salles dans des zones peu desservies...) |
Aides sélectives à la programmation (art et essai) |
Aide aux exploitants proposant une programmation plus difficile |
Soutien automatique aux oeuvres audiovisuelles |
Aide à l'oeuvre versée aux producteurs avec obligation de contrat d'un diffuseur, à fondement économique |
Aide sélective aux oeuvres audiovisuelles |
Aide à l'oeuvre versée à un producteur qui n'a pas de compte de soutien (nouveaux entrants) - aide à visée automatique |
Aides à l'exportation |
Actions en faveur de l'exportation des films et des programmes audiovisuels français sur les marchés et foires (essentiellement pour les marchés rentables) |
Formation continue des professionnels |
Formation des professionnels en activité (scénaristes, producteurs...) |
Industries techniques |
Aides à l'investissement des industriels, définition des normes (CST) |
Promotion |
Actions de soutien au cinéma destiné aux professionnels, à visée économique (ex : Festival de Cannes, MIFA...), aides aux organismes professionnels (SRF, ARP...) |
Crédits du budget général Ministère de la culture
Multimédia (FAEM, RIAMM, DICREAM) |
Interventions dans le multimédia qui ne ressortait pas des missions du compte |
Actions internationales (Fonds Sud, aides à l'exportation, cinématographies peu diffusées) |
Actions liées au rayonnement international de la France, sans retombée économique directe (diffusion de films français sur des marchés non rentables, ou de filmographie du Sud en France...) |
Coproductions (Eurimages, franco-canadiennes, franco-allemandes) |
Actions internationales de la France tendant à soutenir au-delà de ses aides "normales" les coproductions avec certains pays proches. Ces interventions relèvent en général d'accords internationaux. |
Patrimoine (Cinémathèque française, Bibliothèque du film, 51 rue de Bercy, cinémathèques régionales...) |
La défense du patrimoine et sa mise en valeur relève des activités de l'État dans le cadre de son budget général |
Aides sélectives aux salles |
Subventions à des salles ne relevant pas du compte de soutien (DOM-TOM essentiellement) car n'acquittant pas la taxe. |
Images de la Culture |
Collecte et mise à disposition des DRAC, bibliothèques... en cassettes vidéo de documentaires sur la Culture. Mission exécutée pour le Ministère de la culture dans toutes ses directions |
Education à l'image (écoles, collèges et lycées au cinéma) et actions jeunes |
Actions d'éducation pour les jeunes en formation initiale |
Actions régionales (conventions avec les collectivités, fonds régionaux de production) |
Soutien aux activités des collectivités décentralisées et au développement régional |
Festivals et manifestations culturelles |
Activités ayant un but culturel et peu commercial : "festival des films de femmes, du film ancien, du film italien...", rétrospectives... |
Fonds de création audiovisuelle |
Aides à des actions culturelles (documentaires culturels sur le cinéma, formation d'animateurs...) |
Un été au ciné - Cinéville |
Politique de la ville |
b) Le risque d'une certaine confusion des genres
S'il y a dans cette participation des professionnels aux instances d'attribution de l'aide une source de légitimité , on peut aussi y voir un facteur de confusion des genres.
On peut en effet se demander si l'État n'abdique pas une partie de ses responsabilités d'acteur de plein exercice pour se contenter de celles de régulateur du système, voire de simple spectateur engagé.
Le rapport Leclerc a bien vu la difficulté. Il s'est toutefois contenté d'estimer que la participation de professionnels doit avoir pour contrepartie l'ouverture de la composition des commissions professionnelles à des personnalités extérieures ainsi qu'une rotation rapide des membres desdites commissions.
Il y a là, selon vos deux rapporteurs, un remède qui n'est pas sans effets négatifs dans la mesure où il interdit de donner un contenu opérationnel aux idées de responsabilité et de responsabilisation qui sous-tendent la loi organique précitée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.
Le cas de la commission de l'agrément est significatif de l'ambiguïté d'un système, dans la mesure où ses membres, au nombre de 25 environ, demeurent exclusivement nommés par les représentants des organisations professionnelles et siègent dans cette instance depuis plusieurs années.
La méthode actuelle de cogestion, comme l'absence de direction du cinéma dont le rôle est en fait assumé par le CNC, paraissent peu conformes à l'évolution récente qui , dans de nombreux secteurs, au sein même du ministère de la culture, a conduit à séparer les pouvoirs de tutelle, qui sont l'apanage de l'administration centrale, des responsabilités opérationnelles , de plus en plus souvent confiées, soit à des établissements publics soit à des organes déconcentrés de l'État. On peut citer des évolutions de ce type aussi bien à la direction du patrimoine et à la direction des musées de France qu'à la délégation aux arts plastiques.
La réforme en cours des structures de la cinémathèque française est d'ailleurs un autre exemple de cette évolution vers une clarification des rapports entre l'État et les acteurs de la filière cinématographique.
Suivant les recommandations du rapport Toubiana et les observations du rapport d'audit de KPMG de la fin octobre 2002, M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, a décidé de demander à la cinémathèque de réformer les statuts. En effet, alors qu'il est le principal financeur de la cinémathèque française, l'État ne dispose au sein de ce conseil d'administration que de trois membres de droit sur vingt-quatre administrateurs. La solution retenue consiste dans la désignation d'un commissaire du gouvernement qui aurait voie consultative, sauf en ce qui concerne certaines décisions financières pour lesquelles il aurait un droit de suspension des délibérations jusqu'à ce que l'autorité de tutelle ait tranché. A ce droit de veto, s'ajouterait la désignation d'un comité financier chargé du pilotage budgétaire de l'institution. Enfin, la cinémathèque française serait invitée à s'engager vis-à-vis de l'État dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens.
Vos rapporteurs se proposent de poursuivre cette démarche en demandant au ministère de la culture et de la communication d'explorer de nouveaux modes de gestion séparant plus clairement les responsabilités de l'État et celles des acteurs de la filière.
La nouvelle articulation des aides envisagées, à titre exploratoire, par vos rapporteurs paraît de nature à faciliter cet effort de clarification.
La distinction entre l'aide automatique de base accordée sur des critères des marchés aux films agréés et les aides sélectives, au sens nouveau plus large qui lui est donné dans l'optique des rapporteurs, qu'elle soit fondée sur des critères objectifs ou sur une appréciation qualitative discrétionnaire, permet de faire la part des responsabilités des uns et des autres.
Dès lors que l'octroi de l'agrément n'est plus l'amorce d'un examen de la structure des devis débouchant sur une modulation de l'aide par suite de la délivrance d'un certain nombre de points donnant droit à des aides bonifiées mais un simple système d'admission au sein du club des films participants, il peut tout à fait relever du cadre professionnel. L'agrément dans cette perspective ne constitue qu'un système de reconnaissance mutuelle , on n'ose pas dire de cooptation, que la profession est tout à fait habilitée à gérer.
Les exemples précédemment donnés à titre indicatif, donnent une idée de la façon dont le système pourrait fonctionner :
- une partie des aides sélectives au sens large serait directement articulée sur le soutien automatique engendré par les entrées-salles : on pourrait ainsi bonifier les résultats obtenus en tenant compte du plus ou moins grand nombre de salles mobilisées, étant entendu qu'il conviendrait de favoriser les films ayant obtenu de bons résultats avec une petite combinaison de salles ;
- l'autre pourrait être accordée sur des bases financières sur le fondement des dépenses effectivement constatées pour certains postes. Tout se passerait comme si certaines dépenses, et en particulier les dépenses de fabrication au sens large dites « en dessous de la ligne », pouvaient donner lieu à une aide ciblée mobilisable à l'occasion du financement du film suivant. On peut préciser à cet égard qu'un tel système aurait l'avantage de permettre d'aider, sur le modèle de ce qui se passe dans d'autres pays d'Europe, les dépenses de fabrication effectuées en France, sans que, par définition, l'on puisse paraître, du point de vue de Bruxelles, exiger un pourcentage exorbitant de « localisation » de l'aide.
Un autre avantage de cette formule serait de permettre de responsabiliser les professionnels qui pourraient être amenés à pratiquer une certaine forme d'autocontrôle.
Actuellement, la gestion du système d'aides se trouve confrontée au lancinant problème du contrôle des devis . Il s'agit, en l'état présent, d'une forme de théâtre d'ombres dans lequel l'administration est amenée à se déterminer sur la base de devis, dont tout le monde sait qu'ils ne correspondent pas à la réalité . Qu'il s'agisse de l'importance des coproductions ou de celle des apports des producteurs, il y a de multiples facteurs qui concourent à un gonflement des devis qui n'est pas sans conséquence, même s'il n'a aucune influence directe sur l'importance de l'aide.
Une solution consiste bien entendu à renforcer les moyens de contrôle du CNC , ce qui n'est guère réaliste en l'état actuel des finances publiques. Bien que bon nombre de professionnels ne croient pas possible de trouver au sein des cabinets comptables privés des contrôleurs conciliant la connaissance du secteur et l'indépendance requise, une réflexion doit être entreprise entre spécialistes pour résoudre la difficulté, ce qui passe sans doute par la mise au point d'un cadre ou de procédures comptables adaptées .
Aussi à la solution préconisée par le rapport Leclerc envisageant une collaboration d'agents du ministère des finances ou de la Cour des comptes, vos rapporteurs se demandent s'il ne faut pas pousser, dès lors que l'on dispose d'un cadre comptable de référence, vers une solution plus radicale conférant aux demandeurs le soin de faire certifier eux-mêmes les comptes qu'ils produisent à l'appui de leur demande d'aide sélective.
Une telle voie n'est envisageable que si l'on cesse de faire référence aux devis pour faire reposer l'aide ciblée uniquement sur les comptes d'exploitation de l'oeuvre de référence.
Autant il semble indispensable d'avoir recours à des experts pour apprécier la véracité des devis, autant de simples experts comptables devraient pouvoir certifier les comptes des films déjà mis en exploitation.
Ainsi, les devis ne serviraient qu'à justifier l'agrément tandis que les comptes d'exploitation serviraient de base aux calculs de l'aide par les intéressés eux-mêmes à la condition, bien sûr, qu'existerait un cadre comptable clair.
* 28 Les agrégats budgétaires tendent à rapprocher dans un cadre commun la présentation des actions et la mesure des coûts, la description des objectifs et la mesure des résultats.
* 29 Cet organisme se verrait confier les missions suivantes :
- description des structures capitalistiques des sociétés de production cinématographique ;
- suivi statistique des investissements consentis dans la production ;
- évolution des coûts de production par l'exploitation systématique des devis ;
- suivi statistique des volumes et types de films produits ;
- étude du cycle de remontée de recettes ;
- évaluation des objectifs poursuivis par les différents outils du soutien à la production : celui-ci pourrait, par exemple, être chargé d'analyser des pondérations retenues pour les différents critères permettant d'analyser un film d'initiative française ou une production indépendante.