SYNTHÈSE DU CHAPITRE
La trajectoire de la dette publique dans le PIB, passée entre 1996 et 2000 de 57,1 à 57,3 points de PIB, a bénéficié d'un contexte macro-économique favorable, caractérisé par une croissance effective supérieure à la croissance potentielle de l'économie française et par une décrue des taux d'intérêt qui a allégé le coût de la dette publique. Une diminution de la composante structurelle des besoins de financement publics s'est, en outre, produite.
Toutefois, le bilan du redressement des comptes publics apparaît plus nuancé dès lors qu'on le compare avec les performances des partenaires européens et qu'on en analyse les ressorts.
I. Le contexte macroéconomique qui a prévalu entre 1996 et 2000 a constitué un environnement particulièrement favorable à la maîtrise du ratio dette publique/PIB. Il a atténué les exigences à satisfaire pour stabiliser ce ratio, exigences dont il a, de plus, favorisé le respect
A. L'atténuation des exigences à satisfaire pour maîtriser le ratio dette publique/PIB
1. L'accélération de la croissance a, mécaniquement, pesé sur le ratio dette publique/PIB en en augmentant le dénominateur et à un besoin de financement donné, a fait correspondre, mécaniquement aussi, une moindre variation de ce ratio.
Ainsi, le cumul des besoins de financement, observés entre 1996 et 2000, aurait engendré une augmentation sensiblement plus importante du ratio dette publique/PIB si la croissance n'avait pas excédé la croissance potentielle. Dans ce cas, ce ratio aurait progressé de 1,5 point entre 1996 et 2000, passant de 57,1 % du PIB à 58,6 %, contre une évolution limitée à + 0,2 point. Avec une croissance tendancielle, la progression du ratio dette publique/PIB aurait même atteint 2,3 points, le rapprochant du seuil de 60 % du Traité sur l'Union européenne.
2. Combinée avec l'accélération de la croissance, la décrue des taux d'intérêt a atténué l'effet « boule de neige » de la dette .
Le niveau des performances à réaliser pour atteindre un solde primaire 26 ( * ) compatible avec la maîtrise du ratio dette publique/PIB en a été diminué. Un excédent primaire de 2,1 points de PIB était requis en 1996 pour stabiliser le ratio dette/PIB, contre un excédent primaire de seulement 0,7 point de PIB en 2000.
B. Des exigences dont l'« écart de croissance » positif a favorisé le respect
1. La France a connu un « écart de croissance » positif entre 1996 et 2000.
La croissance potentielle de l'économie française est estimée à 2,5 % et la croissance tendancielle, qui est appréciée à partir des performances historiques de croissance depuis 1978, à 2,1 %.
La croissance effective a dépassé ces rythmes en s'élevant à 3,1 % au cours de la période sous revue.
2. Il en est résulté une résorption de la composante conjoncturelle du besoin de financement public.
Les méthodes de calcul des composantes conjoncturelle et structurelle des besoins de financement publics sont diverses et débouchent sur des résultats variables.
Cette variété de résultats est explicitée dans la présente étude. Mais, il semble raisonnable de s'accorder sur le constat selon lequel la réduction du besoin de financement public, qui a atteint 2,8 points de PIB entre 1996 et 2000, s'est partagée, moitié-moitié, entre une réduction de sa composante conjoncturelle (- 1,4 point de PIB) et une réduction de sa composante structurelle (- 1,4 point de PIB).
II. Une amélioration des comptes publics seulement relative
Grâce à la réduction du besoin de financement public de 2,8 points de PIB intervenue entre 1996 et 2000, et au faible montant des acquisitions nettes d'actifs financiers - voir le chapitre II de la première partie -, la tendance à l'augmentation du poids de la dette publique dans le PIB a été inversée. Mais, les performances obtenues par la France ont été sensiblement moins élevées que celles de ses partenaires européens et laissaient en 2000 une situation des comptes publics marquée par une vulnérabilité persistante.
A. La réduction du besoin de financement public a été moins forte en France qu'en Europe et l'évolution comparée de la dette publique s'en est ressentie
1. Le repli du besoin de financement public a été moins important en France que dans l'Union européenne.
Le besoin de financement public a été réduit de 5,4 points de PIB dans l'Union européenne entre 1996 et 2000 et de 4,7 points de PIB dans la zone euro. La performance française a été deux fois moins bonne que celle de la zone euro puisque le besoin de financement public n'a été réduit que de 2,8 points de PIB.
Deux observations complémentaires peuvent être mentionnées :
à supposer qu'une relation de causalité simple existe entre les « déficits publics » et le niveau des taux d'intérêt, la France a moins contribué que ses partenaires à la détente des conditions monétaires en Europe ;
le repli relativement plus élevé des besoins de financement public des partenaires de la France ne les a pas empêchés de connaître une croissance en volume identique à celle réalisée en France - avec, en outre, une croissance en valeur plus élevée. Il est, par conséquent, vraisemblable que les conditions de croissance, qui ont prévalu entre 1996 et 2000, étaient propices à un assainissement des comptes publics plus prononcé, l'expérience des voisins européens montrant que celui-ci n'a pas donné d'impulsion négative à leur activité.
2. L'évolution comparée de la dette publique a enregistré l'impact de ses performances inégales.
Le poids de la dette publique (au sens du Traité sur l'Union européenne) dans le PIB s'est replié de 7,7 points dans l'Union européenne entre 1996 et 2000 et de 5,1 points dans la zone euro. La France a connu une augmentation de 0,2 point de PIB de ce ratio.
Au regard de la situation de sa dette publique, la France était classée en troisième position en Europe après le Luxembourg et le Royaume-Uni en 1996. En 2000, elle avait rétrogradé à la 9 ème place.
B. La réduction du besoin de financement public a été moins solide en France que dans le reste de l'Europe
Les facteurs d'évolution du solde public sont les recettes et les dépenses et une même variation du solde public peut s'accompagner de combinaisons très différentes des unes et des autres. La théorie et la pratique des finances publiques montrent qu'une réduction du déficit public davantage assise sur la maîtrise des dépenses que l'accroissement des prélèvements obligatoires offre des garanties de pérennité supérieures. Sous cet angle, la France a réalisé des performances moins bonnes que ses partenaires européens.
Mais, avant de le montrer, il faut aussi tenir compte du caractère plus ou moins délibéré de l'assainissement des finances publiques qu'on décèle usuellement à travers l'analyse des composantes conjoncturelle ou structurelle des soldes publics. Sous cet angle aussi, la performance réalisée entre 1996 et 2000 paraît mois bonne qu'en Europe en moyenne.
1. Les partenaires européens ont, mieux que la France, amélioré la composante structurelle de leurs comptes publics.
La composante structurelle du besoin de financement public a été améliorée de 4,7 points de PIB dans l'Union européenne entre 1996 et 2000 et de 3,9 points de PIB dans la zone euro, selon les estimations de la Commission européenne. Selon ces mêmes estimations, la France n'a amélioré son solde structurel que de 2 points de PIB.
Des estimations fondées sur un traitement différent des dépenses d'intérêt donnent des écarts un peu moins nets mais significatifs avec des améliorations respectives de 3,7, 2,3 et 1,4 points de PIB.
En conséquence de ces évolutions, la France connaissait en 2000 un déficit entièrement attribuable à la situation structurelle de ses comptes publics dont l'effet sur le besoin de financement total était légèrement atténué par un excédent conjoncturel. Que celui-ci, comme il est toujours envisageable dans une période de croissance supérieure au potentiel, vienne à se retourner en un déficit conjoncturel et la situation des comptes publics devait déboucher, toutes choses égales par ailleurs, sur un nouveau creusement du financement public. C'est ce retournement qui s'est produit en 2001 pour s'accentuer en 2002, les composantes structurelle (sous l'effet des baisses de prélèvements obligatoires) et conjoncturelle (sous l'effet d'un ralentissement de l'activité en dessous du potentiel de croissance) se dégradant.
2. Une réduction du besoin de financement public en France moins assise qu'en Europe sur la maîtrise des dépenses publiques.
Le poids des dépenses publiques a rétrogradé de 5,3 points de PIB dans l'Union européenne entre 1996 et 2000 et de 3,6 points de PIB dans la zone euro. En France, il a été réduit de 2,3 points de PIB.
Une partie de ces écarts résulte d'une baisse plus accentuée en Europe des dépenses d'intérêts : 1,7 point de PIB pour l'Union européenne ; 1,6 point pour la zone euro et 0,6 point pour la France.
Mais, les dépenses primaires (dépenses publiques - dépenses d'intérêt) ont rétrogradé beaucoup plus en Europe : 3,6 points de PIB pour l'Union européenne ; 2,9 points pour la zone euro et 1,6 point pour la France.
La France a donc beaucoup plus compté sur les recettes publiques pour réduire son besoin de financement puisque, malgré une moindre amélioration de celui-ci, le poids des recettes publiques dans le PIB s'est accru plus nettement en France (0,5 point de PIB) qu'en Europe en moyenne (0,1 point de PIB).
PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE DE
L'AJUSTEMENT
(en points de PIB) |
|||
France |
Zone euro (12) |
Union européenne |
|
Variation du besoin de financement |
- 2,8 |
- 4,7 |
- 5,4 |
Variation de la composante conjoncturelle du besoin de financement |
|
|
|
Variation de la composante structurelle du besoin de financement |
|
|
|
Variation des recettes publiques |
+ 0,5 |
+ 0,1 |
+ 0,1 |
Variation des dépenses publiques |
- 2,3 |
- 4,5 |
- 5,3 |
Variation des dépenses d'intérêt |
- 0,6 |
- 1,6 |
- 1,7 |
Variation des dépenses primaires 2) |
- 1,7 |
- 2,9 |
- 3,6 |
1 Aux arrondis près 2 Dépenses publiques - dépenses d'intérêt. Source : Calcul du Service des Etudes à partir de données de la Commission européenne |
* 26 Recettes publiques - dépenses publiques hors dépenses d'intérêts.