C. LE PAKISTAN, SUR LE CHEMIN D'UN RETOUR À LA DÉMOCRATIE ?

Durant la présence de la délégation de la Commission au Pakistan, le principal sujet de préoccupation de politique intérieure était l'organisation des élections générales d'octobre 2002. Les différents partis s'y préparent, tout en maintenant leur scepticisme sur leur bon déroulement et même sur leur tenue effective.

Ce calendrier de retour à la démocratie s'explique par la décision de la Cour suprême pakistanaise, en 1999, de valider le coup d'Etat militaire conduit par le général Pervez Musharraf, tout en exigeant la tenue d'élections libres dans une délai de trois ans c'est-à-dire au plus tard en octobre 2002. Cette échéance a reçu le soutien des pays occidentaux. Mais le retour à la démocratie ne va pas sans poser de difficultés dans un pays sans tradition solide en la matière.

1. Une fragile tradition démocratique

Le Pakistan a connu, depuis sa création, une alternance de périodes de gouvernement civil et de gouvernement militaire. Les civils ont exercé le pouvoir dans un cadre démocratique de 1947 à 1958, de 1971 à 1977 puis de 1988 à 1999. Pourtant, durant ces trois périodes d'une dizaine d'années, la démocratie n'est pas parvenue à s'imposer. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette situation.

Tout d'abord, le Pakistan est un Etat qui n'avait pas d'existence propre avant 1947, pas d'identité nationale, très hétérogène et en outre partagé entre ses parties occidentale et orientale. De surcroît, en 1947, la Ligue musulmane, le parti d'Ali Jinnah, à l'origine de la création de l'Etat, disposait de très peu d'ancrages locaux au Pakistan même et n'avait pas acquis une réelle tradition démocratique sous la direction sans partage de son animateur. Enfin, les circonstances internes, la disparition d'Ali Jinnah puis celle de son successeur Liaquat Ali Khan, leur pratique personnelle du pouvoir et les circonstances internationales de la guerre froide vont ouvrir la voie du pouvoir aux militaires avec le soutien des Etats-Unis.

De 1971 à 1977, l'exercice des responsabilités par Z.A. Bhutto ne permettra pas non plus d'imposer la démocratie. Cette période est marquée par la partition dramatique du Pakistan, l'indépendance du Bengladesh et la très violente répression au Balouchistan. Par ailleurs, entre 1976 et 1978, la politique sociale progressiste, l'instrumentalisation de la religion et le programme nucléaire conduisent à la rupture avec ses appuis occidentaux, le Canada, les Etats-Unis et la France et favorisent le coup d'Etat militaire.

Enfin, de 1988 à 1999, la reprise du pouvoir par les civils à la faveur de la mort accidentelle du général Zia Ul Aq au pouvoir depuis 1977, ne permet pas de retrouver une stabilité politique. Les deux grands partis du Pakistan, le Parti du Peuple Pakistanais (PPP) de Benazir Bhutto et la Ligue Musulmane de Nawaz Sharif, alternent au pouvoir à la tête de coalitions instables, sans pouvoir mener les réformes attendues par la population. A l'instabilité gouvernementale s'ajoutent les scandales successifs de corruption qui contraignent Benazir Bhutto à l'exil, l'exercice personnel et autoritaire du pouvoir par Nawaz Sharif et enfin la déstabilisation du pays par les conflits menés à ses frontières en Afghanistan et au Cachemire. Dans ce pays déstabilisé, l'armée est progressivement apparue comme la seule institution capable de redresser le pays.

Prenant le pouvoir le 12 octobre 1999, le général Pervez Musharraf a suspendu toutes les assemblées locales et nationales et a installé un gouvernement de techniciens. Il a poursuivi avec sérieux ses objectifs : amélioration de la gestion du pays, ce qui a largement favorisé l'accélération de l'appui financier accordé au Pakistan par les pays occidentaux après le 11 septembre, réduction de la corruption en engageant des poursuites judiciaires et enfin organisation d'élections locales.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page