B. UNE APPRECIATION INSUFFISAMMENT NUANCEE DE L'IMPACT DE L'AGRICULTURE SUR L'ENVIRONNEMENT
Le schéma met à plusieurs reprises l'accent sur l'impact négatif que peut avoir l'agriculture sur l'environnement et les ressources naturelles.
Sans mettre en cause ce constat, qui est d'ailleurs partagé par les acteurs économiques, ainsi que par les contributions des régions sur le schéma, votre rapporteur estime que les développements qui y sont consacrés auraient gagné à être plus nuancés.
Il est par exemple regrettable que la responsabilité de la pollution des ressources en eau potable soit principalement imputée à l'agriculture.
Des sujets importants ont été passés sous silence. C'est notamment le cas de la pratique de l'épandage des boues urbaines sur les terres agricoles, service rendu par l'espace rural aux citadins, qui est au centre d'un débat entre agriculteurs et consommateurs.
Enfin, le schéma n'apporte pas, à l'intention des agriculteurs, suffisamment de principes d'action en la matière.
S'agissant, par exemple, de la maîtrise des procédés de fertilisation et d'emploi des produits phytosanitaires, le schéma devrait prévoir une meilleure information des agriculteurs. Il serait également souhaitable qu'y soit inscrit l'engagement de l'Etat à soutenir les dispositifs d'autocontrôle mis en place par la profession, tels que l'initiative «Fertimieux».
Enfin, concernant la politique de l'eau, force est de constater que le schéma ne définit aucune nouvelle stratégie en matière de reconquête de la qualité de l'eau. En outre, si l'exigence du recours à des techniques économes en eau ne peut qu'être approuvé, il conviendrait que le schéma prenne explicitement en compte la spécificité méditerranéenne dans ce dossier, les cultures (horticulture, viticulture, arboriculture...) ayant des besoins particuliers dans cette région. L'alimentation en eau de ces régions doit être sécurisée.
C. DES RÉPONSES INCOMPLÈTES AU PROBLÈME DE L'AGRICULTURE DANS LES ESPACES RURAUX MENACÉS
La déprise agricole est identifiée comme un fait préoccupant, tant dans les zones périurbaines que dans les zones marquées par l'exode rural.
1. L'espace périurbain
Le schéma met à juste titre l'accent sur la surconsommation d'espaces ruraux par l'étalement des villes. Il prend acte de l'échec des outils de planification urbaine à contrôler la périurbanisation. Chaque année, ce sont prés de 100.000 hectares qui sont soustraits à l'activité agricole, dont 65.000 par artificialisation des sols.
Cependant, le schéma ne fournit pas d'analyse sur les causes de ce phénomène, imputables notamment à un manque de rigueur dans l'application des documents d'urbanisme et d'aménagement de la génération précédente (plan d'occupation des sols, schémas directeurs, cartes des terres agricoles), et à une révision fréquente de leurs règles d'application, qui n'ont pas permis de contenir l'urbanisation.
Le schéma entend favoriser une politique foncière destinée à maîtriser la périurbanisation, en vue de lutter contre une surconsommation de l'espace qui se fait principalement au détriment de l'agriculture. C'est dans cette optique qu'il se réfère notamment à des instruments tels que les documents départementaux de la gestion de l'espace agricole et forestier, les « zones agricoles protégées » ou encore le droit de préemption des SAFER à l'égard des espaces agricoles et naturels.
Les SCOT, les ZAP et les documents
Instaurés par l'article 3 de la loi du 14 décembre 2001 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, les schémas de cohérence territoriale succèdent aux schémas directeurs. Fondés sur un diagnostic, ils sont destinés à présenter le projet d'aménagement et de développement durable retenu pour un territoire, à fixer les objectifs poursuivis en termes d'urbanisme, d'habitat, de développement économique, de loisirs, de circulation des véhicules... Prévu par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, le classement en « zone agricole protégée » vise à protéger des zones agricoles menacées de disparition en raison de fortes pressions foncières, notamment en milieu périurbain, parce qu'elles présentent un intérêt général en raison soit de la qualité de leur production, soit de leur situation géographique. Réalisé, après enquête publique, par décret, à la demande des communes ou à celle du préfet avec l'accord de celles-ci, le classement en ZAP doit être pris en compte par les autorités locales chargées d'élaborer les plans locaux d'urbanisme. Prévus par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, les documents de gestion de l'espace agricole et forestier se substituent aux « cartes des terres agricoles » prévues par la loi d'orientation agricole du 4 juillet 1980. Ils sont élaborés par le représentant de l'Etat dans le département, après avis des communes, mais également d'organismes représentatifs du secteur agricole et forestier tels que la chambre d'agriculture et le centre régional de la propriété forestière. Il doit être consulté lors de l'élaboration des documents d'urbanisme et des schémas départementaux des carrières. |
Le schéma demeure néanmoins muet sur un certain nombre de points.
Il ne précise pas la place qu'occuperont les nouvelles zones agricoles protégées ZAP dans le zonage existant. Cette lacune est d'autant plus regrettable que l'article 108 de la loi d'orientation agricole et son décret du 20 mars 2001 relatif à l'affectation de l'espace agricole et forestier n'apportent aucune précision sur l'objet et les caractéristiques de ces futures zones.
Il n'offre pas, non plus, de garanties sur les pouvoirs reconnus par la loi aux SAFER pour exercer leur droit de préemption.
En outre, la question de la prise en compte de la nécessité de préserver les espaces naturels et ruraux dans les SCOT et les contrats d'agglomération n'est pas explicitement évoquée.
Enfin, il est permis de douter du caractère opérationnel des nouveaux instruments auxquels se réfère le schéma.
S'agissant des ZAP, des interrogations se font jour sur l'efficacité de ce dispositif, dont la mise en oeuvre apparaît bien lourde. L'autorité du dispositif semble certes assurée en l'absence de document d'urbanisme, puisque tout changement d'utilisation du sol susceptible d'affecter durablement le potentiel agronomique ou économique de la ZAP ne peut être autorisé, dans le cas où la chambre d'agriculture et la commission départementale d'orientation de l'agriculture y sont défavorables, que sur décision motivée du préfet. En revanche, lorsque la ZAP est créée sur un périmètre déjà couvert par un document d'urbanisme, les projets susceptibles d'avoir des conséquences négatives sur la zone ne sont pas soumis à cette procédure renforcée, s'ils relèvent d'une autorisation au titre du code de l'urbanisme.
Quant aux documents de gestion de l'espace agricole et forestier, ils n'ont aucune valeur prescriptive, de sorte que si les communes sont formellement tenues de les consulter, elles ne sont nullement obligées d'en traduire les orientations dans leur document d'urbanisme.
Enfin, il serait souhaitable de compléter ces orientations par l'attribution d'aides financières et fiscales, seules à même de compenser le problème du prix des terres. En l'absence de telles mesures, destinées à maintenir les activités agricoles, les servitudes de protection des terres agricoles en zone urbaine sont vouées à l'échec.
Dans cette optique, il pourrait être souhaitable que les collectivités publiques soutiennent, dans ces zones, la production de biens et de services répondant plus particulièrement aux attentes des citadins. L'Assemblée permanente des chambres d'agriculture a, à cet égard, exprimé son regret que l'agriculture ne figure que rarement dans les contrats d'agglomération en préparation.